LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES AFFAIRES SOCIALES, DES SCIENCES ET DE LA TECHNOLOGIE
TÉMOIGNAGES
OTTAWA, le mercredi 26 novembre 2025.
Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie se réunit aujourd’hui, à 16 h 15 (HE), avec vidéoconférence, pour étudier le projet de loi S-212, Loi concernant une stratégie nationale pour les enfants et les jeunes au Canada, et, à huis clos, pour étudier un projet d’ordre du jour (travaux futurs).
La sénatrice Flordeliz (Gigi) Osler (vice-présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La vice-présidente : Bonjour. Je m’appelle Flordeliz (Gigi) Osler. Je suis sénatrice du Manitoba et vice-présidente de ce comité.
Avant de commencer, j’aimerais demander aux sénateurs de se présenter.
La sénatrice McPhedran : Sénatrice Marilou McPhedran, du Manitoba.
La sénatrice Senior : Sénatrice Paulette Senior, de l’Ontario.
La sénatrice Burey : Sharon Burey, de l’Ontario.
[Français]
Le sénateur Boudreau : Bonjour. Victor Boudreau, du Nouveau-Brunswick.
[Traduction]
La sénatrice Arnold : Dawn Arnold, également du Nouveau-Brunswick.
La sénatrice Hay : Katherine Hay, de l’Ontario.
[Français]
La sénatrice Petitclerc : Chantal Petitclerc, du Québec.
[Traduction]
La sénatrice Moodie : Rosemary Moodie, de l’Ontario.
La sénatrice Greenwood : Margo Greenwood, de la Colombie-Britannique.
La sénatrice Muggli : Tracy Muggli, du territoire visé par le Traité no 6, en Saskatchewan.
La vice-présidente : Aujourd’hui, nous poursuivons notre étude du projet de loi S-212, Loi concernant une stratégie nationale pour les enfants et les jeunes au Canada.
Dans le premier groupe de témoins, nous accueillons aujourd’hui deux représentantes du Collectif petite enfance : Mme Elise Bouchard-Bonneville, directrice; et Mme Julie Cailliau, directrice, Observatoire des tout-petits. Elles participent en personne. Nous accueillons des représentantes de Jeunesse, J’écoute : Mme Andréanne Deschamps, vice-présidente principale et cheffe des services cliniques et des opérations; et Mme Laetitia Satam, Coprésidente du Conseil national de la jeunesse. Nous recevons des représentantes du Conseil canadien des défenseurs des enfants et des jeunes : Mme Lisa Broda, présidente et défenseure des droits des enfants et des jeunes, Bureau du défenseur des enfants et des jeunes de la Saskatchewan; et Mme Marci Macomber, directrice générale, Enquêtes systémiques, Bureau du défenseur des enfants et des jeunes de la Saskatchewan. Elles participent par vidéoconférence.
Merci à toutes de votre présence aujourd’hui. Vous disposerez de cinq minutes chacune pour nous présenter votre déclaration liminaire. Nous passerons ensuite aux questions des membres du comité.
Mesdames Deschamps et Satam, vous partagerez vos cinq minutes. Nous allons commencer par Mme Deschamps, qui sera suivie de Mme Satam.
Andréanne Deschamps, vice-présidente principale et cheffe des services cliniques et des opérations, Jeunesse, J’écoute : Madame la présidente, mesdames et messieurs les membres du comité, je vous remercie de me donner l’occasion de comparaître devant vous aujourd’hui. Je m’appelle Andréanne Deschamps et je suis vice-présidente principale des services cliniques chez Jeunesse, J’écoute, le service de santé mentale en ligne du Canada destiné aux jeunes et accessible 24 heures sur 24, sept jours sur sept. Depuis plus de 36 ans, nous offrons un soutien équitable et immédiat d’un océan à l’autre. Notre service est gratuit, multilingue et confidentiel. Nous offrons de l’aide par téléphone, par message texte, par clavardage et par l’entremise de nos ressources autogérées, dont la plus grande base de données de ressources communautaires au Canada destinée aux jeunes.
Nous sommes ici pour exprimer notre soutien au projet de loi S-212, qui vise à établir une stratégie nationale pour les enfants. Bien que Jeunesse, J’écoute ne soit pas un organisme de défense juridique, notre point de vue s’appuie sur ce dont les jeunes nous font part chaque jour. Nous savons que 75 % des jeunes ont confié quelque chose à Jeunesse, J’écoute qu’ils n’ont jamais dit à personne d’autre.
En 1991, le Canada a signé la Convention relative aux droits de l’enfant des Nations unies, s’engageant à protéger tous les enfants contre la discrimination et à soutenir leurs droits à la vie, au développement et à la participation. L’article 24 de la convention affirme le droit de chaque enfant de jouir du meilleur état de santé possible, ce qui doit inclure la santé mentale.
Or, les données montrent que le Canada n’atteint pas tout à fait cet objectif. Le suicide est la deuxième cause de décès chez les jeunes âgés de 15 à 34 ans, et 22 % des interactions par message texte avec Jeunesse, J’écoute portent sur le suicide. Nous effectuons en moyenne huit appels par jour aux services d’urgence pour des jeunes exposés à des préjudices, et 9 % des utilisateurs du service ont déclaré qu’ils se seraient rendus à l’urgence s’ils n’avaient pas parlé avec un représentant de Jeunesse, J’écoute.
Les jeunes ont besoin de soutien, non seulement de la part d’organismes de services de première ligne comme Jeunesse, J’écoute, de leur famille et de leur communauté, mais aussi de tous les ordres de gouvernement.
[Français]
Jeunesse, J’écoute est un partenaire reconnu du gouvernement du Canada, non seulement pour ses services, mais aussi pour ses programmes et soutiens destinés aux jeunes Autochtones, aux jeunes Noirs et aux jeunes nouvellement arrivés au Canada. Le projet de loi S-212 propose un cadre pour renforcer la reddition de comptes, améliorer les programmes et stimuler l’action en faveur des jeunes au Canada. Jeunesse, J’écoute peut y contribuer grâce à ses données et à son expertise auprès des jeunes, tant dans les consultations que dans les rapports qui en découleront.
[Traduction]
Nous appuyons ce projet de loi et exhortons le comité à le faire avancer et à veiller à ce que la santé mentale soit au cœur de la stratégie. Je vais maintenant céder la parole à Mme Satam. Merci.
Laetitia Satam, Coprésidente, Conseil national de la jeunesse, Jeunesse, J’écoute : Je vous remercie, madame la présidente et mesdames et messieurs les membres du comité.
Je n’avais que 12 ans lorsque j’ai commencé à faire du bénévolat chez Jeunesse, J’écoute. Aujourd’hui, j’ai le privilège d’être Coprésidente du Conseil national de la jeunesse de Jeunesse, J’écoute.
Dans le cadre de cette étude du projet de loi S-212, je tiens à souligner que les jeunes doivent être vus, entendus et valorisés dans les programmes et les décisions du gouvernement qui influencent notre vie maintenant et à plus long terme. Il faut aussi que la stratégie fasse de la santé mentale des jeunes une priorité essentielle.
Le Conseil national de la jeunesse de Jeunesse, J’écoute est composé de jeunes âgés de 14 à 24 ans de partout au pays qui se passionnent pour la santé mentale et le bien-être.
Notre conseil influence la prise de décision, la stratégie et la programmation de Jeunesse, J’écoute. Je suis également membre du conseil d’administration de Jeunesse, J’écoute pour veiller à ce que les jeunes puissent se faire entendre au sein du principal organe directeur de l’organisme.
Cette présence est essentielle pour que Jeunesse, J’écoute soit au courant des besoins et des valeurs des jeunes. À titre d’exemple, le Conseil national de la jeunesse a participé à des séances de consultation relatives à l’élaboration d’un outil d’intelligence artificielle générative par Jeunesse, J’écoute. Nous avons donné notre avis sur les utilisations que nous aimerions en faire, les paramètres de sécurité et l’intention de l’outil. Nos suggestions ont alimenté la conception et l’orientation des prototypes.
La conception conjointe avec les jeunes fait en sorte que les nouveaux produits nous aideront et refléteront nos expériences vécues, en particulier celles des jeunes issus de communautés en quête d’équité.
Je vous donne cet exemple parce que le projet de loi S-212 prévoit la consultation des enfants et des jeunes. J’estime que nous ne devrions pas seulement être invités à la table des discussions; nous devrions également définir les priorités. Une stratégie nationale devrait refléter la diversité des jeunes au Canada.
Les jeunes font face aux réalités auxquelles cette stratégie vise à remédier. Lorsque la voix des jeunes n’est pas entendue, les gouvernements ne peuvent pas établir le lien avec ceux qu’ils sont censés servir.
Je vous remercie de nous donner l’occasion de témoigner devant le comité. Nous sommes disposées à répondre à vos questions.
La vice-présidente : Merci beaucoup. Madame Broda, vos cinq minutes commencent maintenant.
Lisa Broda, présidente et défenseure des droits des enfants et des jeunes, Bureau du défenseur des enfants et des jeunes de la Saskatchewan, Conseil canadien des défenseurs des enfants et des jeunes : Bonjour, madame la présidente et mesdames et messieurs les membres du comité.
Je vous remercie de me donner l’occasion aujourd’hui de parler du projet de loi S-212. Je suis accompagnée de Mme Marci Macomber. Nous sommes ravies d’être ici aujourd’hui.
Je me joins à vous depuis le territoire visé par le Traité no 6 à Saskatoon, en Saskatchewan. Notre conseil couvre tous les territoires visés par des traités et les territoires non cédés, et, dans un esprit de réconciliation, nous honorons tous les peuples des Premières Nations, les Inuits et les Métis du Canada.
Les membres de notre conseil sont des défenseurs, des représentants et des ombudsmans indépendants nommés dans les provinces et les territoires, dont le mandat prescrit par la loi est de protéger les droits des jeunes qui bénéficient de services publics.
Nous travaillons ensemble pour cerner les préoccupations communes et aborder les questions nationales qui touchent les enfants, tout en respectant les compétences des provinces et des territoires, comme le Québec, qui ne fournit pas d’observations sur ce projet de loi, comme nous l’avons indiqué dans notre mémoire.
Le Conseil estime qu’une stratégie nationale pour les enfants et les jeunes est nécessaire. Ce comité a entendu d’autres témoins qui ont beaucoup parlé de la façon dont nous continuons à manquer à nos obligations envers les enfants, malgré les nombreux programmes et plans mis en place pour répondre à leurs besoins au Canada.
Le comité connaît le classement décevant du Canada par rapport à ses pairs en matière de bien-être des enfants. Cela montre que les enfants et leurs intérêts ne sont pas pris en compte de manière systématique et efficace.
Notre conseil partage ces préoccupations importantes et constate chaque jour, sur le terrain, les répercussions de cet échec pour les enfants, et ce, dans l’ensemble des administrations.
En tant que pays industrialisé, nous devons faire plus. Il est encourageant que le projet de loi comprenne de nombreux éléments structurels considérés comme nécessaires par le Comité des droits de l’enfant des Nations unies dans son observation générale no 5 : le projet de loi doit reposer sur la Convention des Nations unies relative aux droits de l’enfant et la Déclaration sur les droits des peuples autochtones; il faut inclure la voix des enfants et des jeunes dans l’élaboration de la stratégie et au-delà; veiller à déterminer les priorités, les normes, les cibles et les principales mesures; prévoir l’utilisation d’évaluations fondées sur des données probantes et établir un plan pour atteindre les objectifs non réalisés.
Il s’agit là d’éléments essentiels qui permettront à la stratégie d’être réalisable, responsable et efficace.
Cela dit, nous estimons que plusieurs aspects du projet de loi pourraient être renforcés en tenant compte des recommandations formulées par le Comité des droits de l’enfant des Nations unies.
Vous trouverez la liste de toutes nos recommandations dans notre mémoire. Je n’en aborderai ici que quelques-unes.
Nous avons vu de nombreux exemples de situations où les gouvernements, à tous les paliers, n’ont pas respecté leurs promesses d’accorder la priorité aux jeunes. Trop nombreux sont les plans d’action et les programmes destinés aux enfants à l’échelle fédérale, provinciale et territoriale qui ont fait l’objet d’investissements, pour ensuite tomber dans l’oubli, comme le plan d’action du Canada en 2004.
Notre conseil a les mêmes préoccupations. La plupart des gouvernements provinciaux et territoriaux n’ont pris aucune mesure pour élaborer ou mettre en œuvre des stratégies coordonnées pour les enfants et les jeunes, ou, s’ils l’ont fait, celles-ci étaient dépourvues d’engagements concrets pour apporter des améliorations et ont fini par disparaître de la conscience politique.
Par conséquent, il nous faut une stratégie nationale inscrite dans la loi qui fera en sorte que les droits, les intérêts et le bien-être des jeunes demeureront au cœur des décisions prises par tous les ordres de gouvernement, indépendamment des cycles électoraux ou des changements de gouvernements.
La stratégie doit également garantir une reddition de comptes à la population, mais surtout aux enfants et aux jeunes. Le projet de loi, dans sa forme actuelle, reconnaît les avantages de la collaboration entre tous les ordres de gouvernement et exige que le Canada consulte les gouvernements provinciaux et municipaux lors de l’élaboration d’une stratégie.
Cela dit, le Conseil est d’avis que ce n’est pas suffisant. Les questions qui ont une incidence sur la vie quotidienne des jeunes relèvent en grande partie de la compétence des provinces et des territoires.
C’est pourquoi nous recommandons que le projet de loi comprenne un engagement visant non seulement à consulter les gouvernements, mais aussi à les aider à élaborer leurs propres stratégies en fonction des éléments structurels établis dans le projet de loi-cadre qui contribueraient à la réalisation des objectifs généraux de la stratégie nationale, tout en répondant aux besoins précis des enfants dans leur région.
D’après notre expérience, ce sont ces éléments qui font défaut dans les initiatives provinciales, nous empêchant ainsi de faire évoluer les droits des enfants de manière concrète, responsable et efficace.
Nous reconnaissons les défis liés aux champs de compétence qui peuvent exister à cet égard. Je dois admettre que je ne connais pas les détails de la voie constitutionnelle la plus appropriée à suivre dans ce dossier, mais j’encourage ce comité à prendre ceci en considération.
S’il y a un dossier où tous les ordres de gouvernement peuvent coopérer, c’est bien d’aller de l’avant avec ce projet de loi.
En ce qui concerne la reddition de comptes, notre conseil recommande également au comité d’envisager des modifications pour renforcer le libellé concernant la consultation continue avec les enfants et les jeunes, ainsi que la surveillance publique.
Dans sa forme actuelle, le projet de loi laisse une faille potentielle permettant de négliger la mise en œuvre de ces mesures. Notre conseil affirme qu’une consultation continue avec les enfants et des mécanismes de surveillance publique doivent être des exigences légiférées plutôt que des éléments optionnels.
Enfin, notre conseil recommande de renforcer la sensibilisation du public, plus particulièrement pour communiquer l’information à tous les ordres de gouvernement, à la population et directement aux enfants et aux jeunes.
La stratégie doit exiger un plan d’action pour veiller à ce que les jeunes soient informés de la stratégie, des répercussions qu’elle peut avoir sur leur vie et de la façon dont ils peuvent avoir voix au chapitre dans sa mise en œuvre et son évaluation.
Nous espérons que ce projet de loi sera adopté rapidement pour faire respecter les droits des enfants et des jeunes en vertu de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant, ou CNURDE. Il est essentiel de reconnaître les vulnérabilités spéciales des enfants et de traiter efficacement les questions complexes qui ont une incidence sur les jeunes dans toutes les sphères de leur vie.
Je vous remercie de votre temps et de l’occasion de faire partie de ce groupe de témoins. Nous répondrons avec plaisir aux questions du comité. Je vous remercie.
La vice-présidente : Merci, madame Broda. Madame Bouchard-Bonneville et madame Cailliau, vous allez partager vos cinq minutes.
[Français]
Elise Bouchard-Bonneville, directrice, Collectif petite enfance : Merci, madame la présidente et membres du comité, de m’accueillir comme représentante du Collectif petite enfance, qui rassemble 23 réseaux nationaux d’horizons divers, notamment des représentants des services de garde éducatifs à l’enfance, des organismes communautaires, des organisations œuvrant en périnatalité, en insécurité alimentaire, en persévérance scolaire, en milieu municipal et en littéracie, et enfin, des organismes qui représentent des réalités multiples comme celles des pères, des Premières Nations ou des personnes d’expression anglaise. Nous partageons un objectif commun : soutenir le développement global optimal de tous les tout-petits, et ce, dans une perspective d’équité.
Ainsi, nous avons analysé ce projet de loi quant à son potentiel de soutenir efficacement le développement des tout-petits. Nous soutenons donc l’élaboration d’une stratégie claire en la matière.
Une ambition partagée à l’échelle du pays peut certainement contribuer à créer des synergies entre les provinces et les territoires. Aussi, les processus d’élaboration, d’évaluation et de suivi proposés nous semblent prometteurs, puisqu’ils permettent à la société civile dans son entière diversité de s’y impliquer.
Les politiques publiques doivent refléter cette nécessité du travail intersectoriel, et cela inclut les décideurs. Le législateur gagnerait ici à rendre responsables un plus grand nombre de décideurs dans l’élaboration de la stratégie.
Cela dit, sans diminuer l’importance d’avoir de grandes ambitions nationales, il est fondamental que les décisions concernant les enfants soient prises le plus près possible d’eux et de leur famille. Il faut s’ancrer dans leur réalité spécifique.
Cela peut sembler paradoxal par rapport à l’idée de cibles pancanadiennes. Cependant, l’exercice fonctionne si, plutôt que de miser sur des cibles, on développe un large tableau d’indicateurs communs favorisant une vision partagée, mais des réponses adaptées. Autrement, puisque les organismes de plaidoyer auront un rôle à jouer dans la promotion de la stratégie et de ces résultats, il serait souhaitable que l’article 6 prévoie plutôt un partage immédiat.
Nous suggérons également que la stratégie nationale soit renouvelée tous les 10 ans, afin d’assurer un cycle continu d’apprentissage et d’amélioration.
Enfin, à l’instar de la Commission de la santé et des services sociaux des Premières Nations du Québec et du Labrador, nous souhaitons souligner l’intention et les efforts déployés dans le cadre de ce projet de loi visant à améliorer le mieux-être des enfants au Canada. Toutefois, il est essentiel que le texte soit bonifié afin de réaffirmer clairement le droit à l’autodétermination des peuples autochtones.
Je suis également accompagnée de la directrice de l’Observatoire des tout-petits, allié scientifique du Collectif petite enfance.
Julie Cailliau, directrice, Observatoire des tout-petits, Collectif petite enfance : Merci, madame la vice-présidente et mesdames et messieurs les membres du comité, de nous recevoir dans le cadre de cette consultation.
Je m’appelle Julie Cailliau et je suis directrice de l’Observatoire des tout-petits, qui est une organisation sans but lucratif ayant pour mission de communiquer l’état des connaissances afin d’éclairer la prise de décisions en matière de petite enfance au Québec, afin que chaque tout-petit ait accès aux conditions qui assurent le développement de son plein potentiel, et ce, peu importe le milieu où il naît et grandit. L’observatoire veille à la mise à jour d’un tableau de bord de plus de 160 indicateurs sur la petite enfance au Québec identifiés et reconnus par la communauté scientifique. Nous publions aussi des rapports sur divers enjeux touchant la petite enfance.
Cette période, qui s’étend de la grossesse à l’âge de 5 ans, est une période clé du développement humain. Les expériences vécues par les tout-petits peuvent laisser des traces et entraîner des problèmes plus tard dans la vie. Bien comprendre cette période permet de guider des interventions efficaces pour soutenir le développement de chaque enfant.
C’est notamment pour cette raison que l’OMS et l’OCDE recommandent d’adopter une approche globale en petite enfance. En effet, les actions les plus efficaces sont celles qui intègrent à la fois des interventions directes auprès de l’enfant et des interventions plus larges qui agissent sur tous les environnements dans lesquels grandit le tout-petit dans une vision de prévention. Agir de façon préventive signifie notamment que l’on vise à améliorer les conditions de vie des tout-petits, ce qui illustre l’importance de porter un regard vaste sur les politiques publiques. La petite enfance ne se réduit pas à l’accès aux soins de santé ou au réseau des services éducatifs à l’enfance.
Il est également important de porter un regard particulier sur les enfants qui subissent des inégalités et de tenir compte des disparités entre les communautés. Ces besoins variables d’un territoire à l’autre et d’une famille à l’autre nécessitent la collaboration entre les différents ministères, ordres de gouvernement et secteurs, en incluant les organisations communautaires et les organisations à but non lucratif. La concertation se révèle être la clé pour faire en sorte d’offrir les bons services au bon moment pour chaque tout-petit.
Merci de votre attention.
[Traduction]
La vice-présidente : Merci à tous de vos témoignages. Nous allons maintenant passer aux questions des membres du comité. Pour ce groupe de témoins, sénateurs — et je serai très stricte pour faire respecter le temps imparti —, vous disposez de quatre minutes pour poser votre question, ce qui comprend la réponse. Veuillez préciser si votre question s’adresse à un témoin particulier ou à tous les témoins.
La sénatrice Hay : Bienvenue, tout le monde. Je suis ravie de vous voir tous, ainsi que mes amis de l’organisme Jeunesse, J’écoute. Ma question s’adresse aux témoins de Jeunesse, J’écoute, mais à tous les témoins également.
Je dis souvent qu’une solution universelle ne convient pas très bien à personne, alors ma question est la suivante : pouvez-vous expliquer comment une stratégie non statique fondée sur les distinctions fonctionne pour les jeunes et la santé mentale des jeunes et pourquoi elle est non seulement importante, mais aussi déterminante pour la création conjointe, la prise de décision et l’établissement d’indicateurs de rendement clés, ou IRC?
Mme Deschamps : Je vous remercie de cette question, sénatrice. À Jeunesse, J’écoute, nous soutenons les jeunes issus de communautés en quête d’équité, y compris ceux des communautés autochtones — des Premières Nations, des Métis et des Inuits. Nous avons élaboré une approche fondée sur les distinctions, car comme vous l’avez mentionné précédemment, une approche universelle ne fonctionne pas pour tout le monde.
À Jeunesse, J’écoute, nous avons mis cela en pratique en écoutant les besoins des différentes communautés partout au Canada en nous fondant sur une approche fondée sur les distinctions. Nous écoutons les jeunes et les communautés autochtones qui font part à des organisations comme la nôtre de leurs besoins et de la meilleure façon d’y répondre dans leurs communautés. Nous ne décidons pas de ce qui est le mieux pour eux; ils guident notre stratégie et sa mise en œuvre dans les communautés de partout au Canada.
Pour mesurer le succès, il y a plusieurs éléments à examiner : que nous disent les jeunes? Le service répond-il à leurs besoins? Comment cela évolue-t-il au fil du temps? Examinons-nous qui communique avec nous et comment le service répond aux besoins de ces communautés partout au Canada? Avons-nous une représentation? Intégrons-nous cette représentation dans notre travail également? Sommes-nous représentatifs au sein de notre propre secteur, de nos propres services, afin que les jeunes puissent s’identifier aux services proposés et, par conséquent, avoir confiance dans le fait que les services auxquels ils ont recours correspondent à leurs besoins et ont été élaborés pour eux et avec eux tout au long du processus?
La sénatrice Hay : Merci. Quelqu’un d’autre souhaite faire des commentaires?
[Français]
Mme Bouchard-Bonneville : En fait, pour l’apprentissage au Québec, je crois que c’est vraiment la complémentarité des réseaux. Donc, en complément à ce que ma collègue à l’écran mentionnait, avoir une complémentarité des réseaux publics et communautaires permet d’avoir un très proche accès aux tout-petits et aux enfants. Leurs besoins vont se compléter.
Par rapport aux tout-petits, bien sûr, quand on parle du développement, on peut penser aux populations plus vulnérables, donc il faut avoir une approche d’universalisme proportionné, par exemple, qui est une approche répondant aux besoins des populations, mais mettant davantage l’accent sur des populations qui vivent ou qui cumulent des vulnérabilités.
Est-ce que tu voulais mentionner quelque chose?
Mme Cailliau : Je voulais parler des mêmes sujets que toi.
Mme Bouchard-Bonneville : Parfait.
[Traduction]
La sénatrice McPhedran : Merci à tous les témoins ici en personne ainsi qu’à ceux qui se joignent à nous en ligne.
Je veux demander à chacun de vous de réfléchir à la notion d’engagement — et, plus particulièrement, à la participation — et de nous faire part de vos réflexions à ce sujet, en vous référant au cadre proposé et en indiquant où vous pensez pouvoir apporter votre contribution. Quels sont les secteurs clés dans lesquels vos organisations pourraient participer?
[Français]
Mme Bouchard-Bonneville : J’inviterais ma collègue de l’Observatoire des tout-petits à répondre.
Mme Cailliau : Il y a un volet intéressant dans le projet qui concerne la définition des indicateurs pour déterminer où on en est collectivement sur l’état de santé, de développement et de bien-être des enfants. À l’Observatoire des tout-petits, on a collaboré avec la communauté scientifique pour identifier des indicateurs permettant de refléter les diverses facettes du développement des enfants, pour investiguer du côté des facteurs de protection de ce développement et des facteurs de risque et pour comprendre où l’on met le développement à risque. Une bonne manière de contribuer aux travaux serait d’échanger sur ce cadre de référence d’indicateurs.
[Traduction]
La sénatrice McPhedran : Mais ma question est un peu différente. Elle concerne ceci : comment voyez-vous votre place? Où voyez-vous la voie pour participer au projet de loi existant? Est-ce seulement par invitation? Estimez-vous que le cadre est suffisamment clair quant à l’importance de votre participation?
Mme Broda : Merci. Du point de vue de notre engagement, en ce qui concerne notre rôle au Conseil canadien des défenseurs des enfants et des jeunes, mais aussi dans nos champs de compétence respectifs, provinciaux et territoriaux, nous sommes légalement tenus de surveiller tous les services offerts aux enfants et aux jeunes. Nos lois sont toutes différentes d’un bout à l’autre du pays.
Bien entendu, en raison de nos mandats législatifs et de notre capacité de formuler des recommandations et d’assurer une surveillance en vertu de nos pouvoirs législatifs, notre contribution au projet de loi — en plus de nos contributions au projet de loi et au comité à ce sujet — est que nous sommes en mesure d’obliger le gouvernement à rendre des comptes. En ce qui concerne la stratégie, nous pouvons obtenir toutes les données dont il dispose, recueillir des renseignements de la part des gouvernements concernés et les tenir responsables afin de nous assurer qu’ils respectent les exigences de toute stratégie nationale.
Cela concernerait tous les éléments de la stratégie en matière de collecte et de surveillance des données. Nous pouvons également faire rapport publiquement. Notre loi prévoit que nous pouvons rendre public tout ce qui est dans l’intérêt des enfants et des jeunes. Toutes les sociétés civiles qui ont contribué à la cause des enfants et qui défendent les intérêts des enfants sont formidables. Ce qui nous différencie d’elles, c’est que nous sommes en mesure d’imposer tout cela dans nos provinces et territoires, ce qui constituera une contribution importante et essentielle à la stratégie.
La sénatrice Moodie : Merci aux témoins qui sont des nôtres aujourd’hui. Je veux demander aux représentants du Conseil canadien des défenseurs des enfants et des jeunes de m’aider à comprendre quelque chose. Vous travaillez directement avec les enfants pris en charge, les personnes vulnérables et les jeunes. D’après vous, quelles barrières systémiques pourraient être mieux gérées à l’aide d’un cadre national coordonné? Madame Broda?
Mme Broda : Merci. Dans nos provinces respectives, nous supervisons les services destinés aux enfants et aux jeunes dans tous les secteurs liés à l’enfance, mais nos lois sont toutes différentes. Pourriez-vous répéter votre question, sénatrice Moodie?
La sénatrice Moodie : En particulier pour les enfants très vulnérables, tels que les enfants racisés, comment une stratégie nationale vous aiderait-elle à travailler avec ces groupes?
L’autre aspect est le suivant : avez-vous mis en place des mécanismes pour travailler avec le gouvernement fédéral au niveau provincial, où un partenariat entourant la stratégie nationale pourrait fonctionner, en termes de coopération et de collaboration entre les différentes instances?
Mme Broda : Nous essayons d’influencer le gouvernement fédéral. Les champs de compétence s’étendent à nos provinces et territoires, mais cela ne nous empêche pas d’essayer d’influencer le gouvernement fédéral, chaque fois que nous le pouvons, auprès des ministres responsables des enfants ou chargés de tout autre portefeuille. Ce que nous pourrions faire d’utile, c’est de siéger au comité chargé de la stratégie nationale ou, si elle est adoptée, nous pourrions y participer et établir ces liens. Ce ne serait pas un lien juridique ou juridictionnel, car nos compétences se limitent aux frontières de notre province. Mais ce qui est important dans ce que vous dites, c’est que les enfants et les groupes particuliers, notamment les enfants autochtones, sont confrontés à des vulnérabilités, mais tous les enfants sont vulnérables. Nous voyons les mêmes problèmes que tout le monde, et les priorités de la stratégie seront essentielles pour traiter certains des problèmes de taille que nous observons chez les enfants, pour lesquels le Canada n’a pas rempli ses obligations.
Notre rôle est limité en ce qui concerne nos provinces et nos territoires, mais dans ma province, j’ai un vaste pouvoir pour obtenir toute sorte d’information par l’entremise de notre service d’enquête. Donc, si la stratégie se concrétisait et que nous parvenions à établir ce lien, nous pourrions transmettre ces renseignements au comité, en collaboration avec le comité ou l’entité de direction qui sera responsable d’adopter et de mettre en œuvre la stratégie.
Marci Macomber, directrice exécutive, Enquêtes systémiques, Bureau du défenseur des enfants et des jeunes de la Saskatchewan, Conseil canadien des défenseurs des enfants et des jeunes : J’ajouterais que dans nos provinces, nous avons fait de nombreuses tentatives d’apporter des changements systémiques et de faire progresser les priorités systémiques, et nous sommes efficaces à cet égard. Mais il arrive parfois que les mesures prises par le gouvernement dans ce domaine échouent ou soient mises de côté, si bien que nous cherchons une stratégie nationale — comme Mme Broda l’a dit dans sa déclaration liminaire — pour avoir des mécanismes en place pour soutenir les provinces et les territoires afin qu’ils puissent créer leurs propres stratégies qui comprennent ces éléments structurels précis, comme des cibles, des mesures clés et des mécanismes de reddition de comptes, qui doivent alors être intégrés à la stratégie nationale. Nous pensons que cela aiderait à faire avancer les choses.
La sénatrice Muggli : Ma question s’adresse à Mme Broda. Je suis ravie de vous voir, madame Broda. Ma question est similaire. Je tiens à signaler que je vous suis reconnaissante du travail difficile que vous accomplissez, que ce soit pour mener des enquêtes ou formuler des recommandations, et je reconnais que, parfois, ces recommandations semblent tomber dans l’oreille d’un sourd. Je me demande si cette stratégie, ce projet de loi, peut amplifier le travail que vous essayez de mettre de l’avant. Comment pourriez-vous l’utiliser pour amplifier le travail, et peut-il être utilisé pour renforcer les recommandations que vous formulez dans vos rapports?
Mme Broda : Merci, et ravie de vous voir également, sénatrice. Dans ma déclaration liminaire, quand j’ai dit que je ne connaissais pas exactement les dispositions constitutionnelles entre le gouvernement fédéral et les provinces et les territoires, nous savons qu’il doit y avoir une stratégie de soutien pour inciter les provinces et les territoires à adopter cette mesure. Nous l’avons vu dans le passé dans les politiques fédérales en matière de services de garde d’enfants, d’éducation préscolaire et de santé mentale, où les provinces peuvent adopter ces politiques lorsqu’il y a un budget ou un incitatif financier, ce qui est évidemment nécessaire et doit faire partie d’une stratégie en matière de ressources, ce qui aidera les provinces et les territoires à les adopter.
Comme Mme Macomber vient de le mentionner, et comme je le vis ici en Saskatchewan, nous avons une stratégie pour les enfants et les jeunes que le gouvernement a mise en place, mais ce qui fait défaut et ce que nous préconisons ces dernières années, c’est qu’il faut tous les éléments nécessaires : un point de référence, des cibles, des mesures et des résultats mesurés. Les indicateurs sont essentiels également pour évaluer notre rendement en matière de droits de l’enfant et déterminer où nous en sommes. Nous avons besoin de tous ces éléments, mais ils font malheureusement défaut ici en Saskatchewan.
Nous y travaillons fort depuis environ trois ans et demi. Pour répondre à votre question, les mesures incitatives pourraient être similaires. Je ne connais pas la voie constitutionnelle à emprunter ici, alors j’inviterais le comité à y réfléchir. Je n’ai pas la réponse, mais c’est une bonne question à poser en ce qui a trait à l’interface de la stratégie.
La portée de notre rôle se limite aux provinces et aux territoires, mais nous pouvons nous en acquitter en collaboration avec le gouvernement fédéral. J’ai participé à de nombreux événements avec le gouvernement fédéral au fil des années et j’ai exercé mon influence là où j’ai pu, en tant que présidente de notre conseil et au nom des 12 autres membres que je représente partout au pays. Nous avons ensuite ramené les acquis dans nos provinces et territoires respectifs du mieux que nous l’avons pu.
Je ne suis pas certaine d’avoir répondu à votre question, mais l’important, c’est de songer aux prochaines étapes à cet égard et de tenir compte des obstacles — faute d’un meilleur mot — afin d’appuyer le gouvernement et de ne pas se limiter à une consultation sur la stratégie. Ce sera l’essentiel.
La sénatrice Muggli : Vous insistez sur les défis que posent les questions de compétence et il faut en tenir compte. Je vous suis reconnaissante pour votre réponse. Merci.
La sénatrice Burey : Je remercie tous les témoins d’être avec nous aujourd’hui. Je tiens à saluer notre collègue, la sénatrice Hay, et les intervenants de Jeunesse, J’écoute pour l’excellent travail qu’ils ont fait pendant et après la pandémie, et qu’ils continuent de faire.
Tout le monde souhaite l’adoption de ce projet de loi. Je tiens à le préciser, mais comme d’habitude, le diable est dans les détails, et nous voulons bien faire les choses. Vous constaterez, dans le cadre de cette étude, que nous voulons nous assurer qu’en passant en revue toutes les dispositions, nous allons pouvoir changer les choses. On a évoqué la nécessité de ne prendre aucune décision sans les personnes concernées; on a fait valoir qu’une approche universelle ne convenait pas et on a souligné l’importance des consultations entre les territoires, les provinces et les dirigeants autochtones, en plus des consultations à l’échelle fédérale.
Au début de la réunion, nous nous sommes demandé — et vous avez fait de nombreuses recommandations, que je vais vous demander de nous expliquer plus en détail — si ce grand projet de loi étant trop général, parce que bon nombre d’entre vous ont fait des recommandations précises. Je sais que nous n’aurons pas suffisamment de temps pour faire un tour de table, alors j’aimerais que vous étoffiez certaines de vos recommandations pour commencer.
Nous avons entendu parler des questions de compétence. J’aimerais me concentrer sur la mobilisation des jeunes et parler de certains détails. Il ne faut pas que ce soit trop général, sinon on n’avancera pas. Qu’en pensez-vous?
Mme Satam : Je vous remercie pour votre question, sénatrice.
Je crois que le Conseil national de la jeunesse de Jeunesse, J’écoute peut servir de cadre pour ce que tente d’accomplir le projet de loi en ce qui a trait à la consultation et à la mobilisation des jeunes. Je travaille à Jeunesse, J’écoute depuis près d’une décennie et j’ai vu diverses organisations tenter de reproduire notre modèle. Ce qui est au cœur de notre organisation, c’est la voix des jeunes, qui doit être prise en compte à toutes les étapes.
Comme je l’ai dit dans mon discours préliminaire, je siège aussi au conseil d’administration de Jeunesse, J’écoute, au sein duquel je suis un membre votant, et je participe activement aux conversations. Dans le cadre de mon rôle à titre de coprésidente du Conseil national de la jeunesse, je participe régulièrement au développement des ressources, comme le nouvel outil d’intelligence artificielle générative, de même qu’aux groupes de discussion avec divers jeunes pour les entendre directement nous parler de leurs expériences. Nous compilons tous les renseignements de manière à ce que Jeunesse, J’écoute puisse répondre activement aux besoins en constante évolution des jeunes.
Je crois que la santé mentale des jeunes doit absolument être une priorité du projet de loi S-212. À l’heure actuelle, un jeune sur deux au Canada a des problèmes de santé mentale et si le projet de loi n’aborde pas directement la question, il présentera une lacune majeure, à mon avis. Je crois aussi que le Sénat mobilise les jeunes de plusieurs excellentes façons, notamment en leur offrant leurs propres conseils des jeunes. Il serait peut-être aussi utile de créer un conseil des jeunes associé à ce projet de loi en particulier afin qu’ils puissent parler directement de leurs besoins les plus pressants. On parle beaucoup de l’intelligence artificielle à l’heure actuelle, mais on ne sait pas à quoi ressemblera la situation dans cinq ans, par exemple.
Je vais céder à la parole à ma collègue, Andréanne Deschamps, qui souhaite peut-être ajouter quelque chose.
Mme Deschamps : Oui, je crois qu’il est important d’examiner les divers modèles sur le plan de la gouvernance et de la mise en œuvre, et de veiller à parler à divers intervenants, y compris les jeunes. Il y a aussi beaucoup de voix silencieuses : ces jeunes dont nous n’entendons peut-être pas parler, mais qui vivent des difficultés et qui ont besoin de notre aide et de celle du gouvernement.
Jeunesse, J’écoute dispose du plus grand ensemble de données sur la santé mentale au Canada...
La sénatrice Burey : Je crois que nous n’avons plus de temps. Merci beaucoup.
La vice-présidente : Merci beaucoup, madame Deschamps. Je suis désolée, mais la sénatrice Burey n’a plus de temps.
La sénatrice Senior : Merci, je vais peut-être continuer là où vous vous étiez arrêtées.
J’ai écouté ce qui s’est dit. Je crois qu’Elise Bouchard-Bonneville ou Julie Cailliau a parlé de complémentarité, et je voulais comprendre un peu mieux le contexte.
Je voulais aussi parler de la structure qui permettrait d’éviter que les stratégies nationales comme celle-ci ne soient pas un autre échec ou qu’elles ne permettent pas d’aborder les enjeux fondamentaux. Je crois que c’est parfois le problème, et nous vivons dans une fédération où diverses compétences se côtoient, non seulement entre les provinces et les territoires, mais aussi entre les Premières Nations, les Métis et les Inuits.
J’aimerais avoir votre opinion sur ce que devrait être cette structure pour nous assurer de ne pas rater la cible et que ce soit un outil utile, si nous faisons bien les choses avec la stratégie. À quoi devrait ressembler la structure ou l’interface pour veiller à ce que la voix des jeunes soit entendue et à ce qu’on ne se limite pas à écouter les travailleurs ou le personnel des organisations. Je suppose que c’est ce que l’on veut dire par la complémentarité.
[Français]
Mme Bouchard-Bonneville : Merci pour la question. En fait, au Québec, l’un des apprentissages que l’on fait, c’est de viser l’expertise en petite enfance. Il est essentiel de réfléchir au développement des tout-petits et au bien-être des enfants dans une perspective de transversalité : dans quel environnement ils grandissent, avec qui ils grandissent et les acteurs qui vont graviter autour de leur vie.
Quand on veut consulter des tout-petits, la particularité est sine qua non : on doit penser aux parents, qui sont les premiers acteurs vivant près d’eux, mais on doit aussi penser au développement et au bien-être des enfants dans la perspective des conditions de vie dans lesquelles ils grandissent. Si l’on veut avoir des cibles ou des indicateurs, il ne faut pas penser seulement au développement optimal et global des compétences de l’être humain, mais aussi aux conditions dans lesquelles ils grandissent.
Au Québec, l’Observatoire des tout-petits étudie de manière plus transversale comment se développent les tout-petits et les enfants. Quand on pense à ce qu’il faut capter, il ne faut pas oublier la période périnatale, soit la période où l’on développe notre famille. Tout se joue à cette période. C’est le début du développement et du bien-être de l’enfant, dès le début de la grossesse. L’un des apprentissages que nous avons faits au Québec, qui se transpose à l’échelle internationale ou dans d’autres provinces, c’est l’importance de considérer la période de la périnatalité comme étant une période clé sur laquelle la société peut agir et sur laquelle il faut miser quand il s’agit d’offrir le plein développement et les capacités.
Il existe un autre élément au Québec. Il s’agit de la politique familiale qui nous permet d’avoir trois grands piliers, dont des réseaux de services éducatifs à l’enfance et des congés parentaux pour les familles. Au Québec, on favorise les politiques qui soutiendront les capacités des familles à se développer pour offrir aux enfants le maximum de ce dont ils ont besoin. Il faut étudier les politiques sur lesquelles se base la province. Voilà les éléments que j’apporterais.
[Traduction]
La sénatrice Senior : J’aimerais aussi entendre Mme Broda, si nous en avons le temps. Nous n’avons pas le temps.
[Français]
La sénatrice Petitclerc : Merci à nos témoins d’être ici pour nous aider dans cette étude.
J’aimerais poser une question sur la petite enfance. On a parlé de cette stratégie et de la vision globale de ce que nous voulons pour nos enfants. On a entendu plusieurs témoins qui sont d’accord sur cette vision globale avec des valeurs communes, mais il faut s’attarder sur la spécificité; on en a parlé beaucoup et cela représente un défi.
Je sais que ce n’est pas nécessairement votre expertise, mais en écoutant tout le monde, j’ai pris conscience qu’il y a un groupe qui a encore plus de besoins particuliers. Je ne sais trop comment nous allons réussir, avec cette la stratégie, à faire en sorte que ces enfants soient aussi bien couverts et protégés. Il s’agit d’enfants et de tout-petits en situation de handicap. Je reconnais que ce n’est pas votre expertise.
Avant de vous entendre, je vais parler de l’expérience que j’ai vécue la semaine dernière. J’étais à la Grande Bibliothèque, et comme nous étudions actuellement ce projet de loi, j’étais aux aguets. Il y avait un atelier de cuisine pour les tout-petits; je trouvais cela fantastique dans une perspective d’inclusion, car il y avait des tout-petits de diverses origines et de langues différentes. J’ai soudain eu cette réflexion que tout le monde pouvait être là, sauf les tout-petits en situation de handicap.
Voilà ma question, qui est très large. Comment faire pour qu’une telle stratégie ne laisse pas derrière les enfants en situation de handicap?
Mme Cailliau : L’Observatoire des tout-petits a justement publié un rapport en 2023 sur les tout-petits ayant besoin de soutiens particuliers. Ce qu’on faisait ressortir dans le rapport, c’est que ces enfants subissent des inégalités d’accès aux services, quand on pense aux services de garde éducatifs, aux soins de santé et aux délais. La première étape est justement de surveiller et de faire ressortir ces enjeux, puis de pouvoir identifier des pistes d’action.
L’une des pistes d’action du rapport proposait de s’attarder non pas à des diagnostics, mais bien à des besoins et d’impliquer les parents dans cette conversation. La complémentarité est un autre élément de réponse : il faut s’assurer de regarder toutes les facettes de la situation.
Effectivement, quand on parle d’universalisme proportionné, c’est aussi aux tout-petits ayant besoin de soutien particulier que l’on pense. On doit penser à des mesures qui pourront bénéficier à tous les enfants tout en ajustant l’intensité en fonction de là où cela fera la plus grande différence.
Au Québec, on sait que l’accès aux services de garde éducatifs est largement répandu et que nous avons véritablement un super réseau. Toutefois, on sait que certains tout-petits qui en bénéficieraient particulièrement y ont moins accès proportionnellement. Cela commence donc par la surveillance, puis, une fois qu’on a identifié les endroits où agir plus intensément fera une différence, on doit diriger les interventions de ce côté.
La sénatrice Petitclerc : C’est quelque chose qui peut se faire à travers une stratégie, j’imagine, si on choisit d’y porter attention?
Mme Cailliau : Cela touche encore une fois à la complémentarité. Reconnaître une situation, c’est une première chose; ensuite, il faut assurer une concertation entre les différents intervenants, car on se rend souvent compte que c’est la clé pour arriver à répondre précisément aux besoins, et ce, de la bonne manière.
La sénatrice Petitclerc : Merci.
[Traduction]
La sénatrice Greenwood : Je remercie tous les témoins d’être avec nous. Ma question fait suite à celle de la sénatrice Petitclerc. Je vous ai beaucoup entendu parler des approches fondées sur les différences plutôt que des approches universelles, et elles sont souvent difficiles à adopter. Je pense aux enfants qui ont divers besoins et capacités et à la façon dont vous en tenez compte dans le cadre de votre travail. Je crois que vous avez commencé à tracer la voie avec vos réponses à nos questions. On parle d’une stratégie nationale. Comment pouvons-nous réunir tous les éléments qui la composent? Nous voulons ce qu’il y a de mieux pour tous les enfants. Cela va de soi. Mais la diversité est grande. Les besoins et les capacités varient. Les enfants viennent de divers milieux. Je parle beaucoup des enfants autochtones et des enfants racisés. Comment pouvons-nous veiller à ce qu’un projet de loi de cette nature tienne compte de cela et à accorder suffisamment d’attention à tous les éléments dans ces domaines? Je ne connais même pas tous les domaines; j’aimerais entendre vos conseils.
La vice-présidente : Sénatrice Greenwood, nous avons trois témoins en ligne qui ont la main levée. Voulez-vous les entendre en premier?
La sénatrice Greenwood : Oh, oui. Allez-y, madame Deschamps.
[Français]
Mme Deschamps : Merci pour votre question.
C’est un aspect important. C’est une chose à laquelle nous avons longuement réfléchi à Jeunesse, J’écoute, soit comment être inclusifs dans nos services, particulièrement parce que nous avons une portée nationale. La manière dont on le fait, c’est dans l’intention que l’on a. De quelle manière est-ce qu’on peut rejoindre le plus de jeunes possible?
Toutefois, on doit voir quelles sont les populations à plus haut niveau de risque, les plus vulnérables, et développer des stratégies, nommer ces populations et avoir des plans d’action qui sont clairs et bâtis avec ces communautés. Quand on prend en considération les besoins des jeunes qui sont les plus démunis, les plus à risque, les plus vulnérables, ou qui ont des besoins particuliers, si l’on bâtit nos stratégies et nos services en fonction de leurs besoins, on sait qu’on part d’un dénominateur commun qui pourra servir le plus de gens possible.
Voici un exemple : à Jeunesse, J’écoute, nos services sont tous en ligne. On pourrait dire que c’est plus complexe pour un jeune malentendant d’avoir accès à nos services. On a conclu des partenariats avec des centres d’expertise pour les jeunes malentendants pour développer nos services de manière à les rejoindre. C’est le moment d’unir les voix de ces populations et de développer des réseaux et des partenariats pour que les stratégies qui seront mises en place puissent rejoindre la population ciblée et avoir du succès auprès d’eux; ce sera la réunion d’expertises communes qui pourra assurer une bonne prestation de services.
[Traduction]
Mme Broda : Merci beaucoup. Oui, je suis tout à fait d’accord avec ma collègue. Du point de vue du conseil, nous avons un cadre solide et votre question est grande et importante : comment pouvons-nous tenir compte de tout? Il faut consulter les enfants et les jeunes tout au long du processus et au-delà de ce processus. Si nous respectons le préambule du projet de loi-cadre, alors il faut consulter les enfants et les jeunes sur ce qui est le plus important pour eux. On ne peut tout faire avec une stratégie; je suis d’accord avec vous. Je crois que nous pourrions nous centrer sur les cinq prochaines années et nous demander ce que nous devrions faire.
Pour notre conseil, la santé mentale est l’un des enjeux les plus importants au pays. C’est peut-être l’une des priorités, mais ce n’est pas à nous de décider. Il faut donc consulter les jeunes et créer un comité, et si nous allons de l’avant — ou lorsque nous irons de l’avant —, il faudra songer à ce que contiendra la stratégie.
À notre avis, le projet de loi-cadre contient toutes les composantes. Pour le renforcer, il faut faire participer les jeunes, comme l’énonce l’article 12 de la convention et comme c’est leur droit de le faire. Nous voudrions que ce soit ajouté. C’est l’une de nos recommandations.
La vice-présidente : Merci. Votre temps est écoulé, sénatrice. Chers collègues, cela nous amène à la fin de la première série de questions. Je sais que les sénateurs ont des questions pour la deuxième série. Avec votre permission, est-ce que je peux vous demander de lire votre question aux fins du compte rendu et d’inviter les témoins à fournir une réponse écrite au comité, si les témoins l’acceptent? Merci. Nous allons entendre trois sénatrices pour notre deuxième série de questions.
La sénatrice McPhedran : Je vais revenir à ma question précédente et vous demander de songer aux façons d’intégrer vos messages, vos données et vos renseignements au projet de loi, en fonction de son cadre. J’aimerais aussi que vous nous parliez de la responsabilité du gouvernement à l’égard du projet de loi.
La sénatrice Moodie : À votre avis, quelle est la principale lacune de l’approche actuelle du Canada à l’égard des politiques sur les enfants et les jeunes que le projet de loi S-212 permettrait d’aborder?
La sénatrice Burey : J’aimerais que toutes les témoins nous disent, aux fins du compte rendu, pourquoi il est important de désigner la santé mentale de façon précise dans le projet de loi aux fins d’une stratégie pour les enfants.
La vice-présidente : Sénateurs, nous en sommes à la fin de cette partie de la réunion. Nous remercions les témoins d’avoir été avec nous aujourd’hui.
Pour la deuxième partie de la réunion, nous allons entendre la voix des jeunes. Nous recevons la défenseure de la jeunesse pour CARE Canada, Shreya Rao, de même que la conseillère des jeunes pour Les Enfants d’abord Canada, Josephine Maharaj. Nous vous remercions toutes les deux de vous joindre à nous aujourd’hui. Vous disposerez chacune de cinq minutes pour faire une déclaration préliminaire. Suivront ensuite les questions des membres du comité. Madame Rao, vous avez la parole.
Shreya Rao, défenseure de la jeunesse, CARE Canada : Madame la présidente, honorables sénateurs, je vous remercie de nous recevoir aujourd’hui.
Je suis une jeune activiste et entrepreneure. Je suis une porte-parole de la mobilisation publique des jeunes chez CARE Canada, où je milite en faveur de l’égalité des sexes et d’autres causes qui façonnent l’avenir des jeunes de partout au pays.
L’article 12 de la Convention relative aux droits de l’enfant des Nations unies garantit que les enfants capables de discernement ont le droit d’exprimer librement leur opinion sur toute question les intéressant, et prévoit que les opinions de l’enfant doivent être dûment prises en considération eu égard à son âge et à son degré de maturité.
Je tiens à souligner que toutes les politiques qui sont créées ont une incidence sur les jeunes. Dans le cadre des questions sur la pauvreté, la santé, l’abordabilité et la durabilité, les jeunes sont encore traités comme des bénéficiaires passifs, et non comme des partenaires. Le qualificatif de l’âge et de la maturité ne tient souvent pas compte de notre expérience vécue, en raison de l’hypothèse voulant que l’âge corresponde au degré de maturité.
Le projet de loi S-212 offre un point de départ pour veiller à ce que les jeunes soient consultés dans le cadre de ces conversations. Le système actuel est brisé. Les programmes actuels du gouvernement pour mobiliser les jeunes se veulent presque uniquement une façade. Le conseil jeunesse du premier ministre existe à peine dans la pratique et les sites Web du gouvernement enfouissent l’information sous diverses couches, la rendant inaccessible pour une génération branchée sur le numérique et qui s’attend à un contenu clair et efficace. Les possibilités pour les jeunes se limitent souvent à ceux qui entretiennent de bons liens ou qui ont une éducation universitaire, tandis que ceux qui sont les plus touchés par l’injustice sont systématiquement exclus. Les jeunes provenant des communautés marginalisées, rurales ou autochtones se voient rarement représentés dans les discussions stratégiques et lorsqu’ils sont inclus, c’est souvent de façon symbolique seulement. La consultation ne représente qu’une première étape. Pour qu’il y ait une mobilisation significative, il faut que les politiques qui sont mises en œuvre au Canada soient créées de façon collaborative. Il faut adopter des mesures radicales en matière d’accessibilité, d’inclusion et de partage des pouvoirs.
En premier lieu, les programmes doivent viser activement les jeunes de tous les milieux et éliminer les obstacles qui les gardent à l’écart comme le fossé numérique, les enjeux en matière de transport, le travail non rémunéré et la bureaucratie. Non seulement faut-il inviter les jeunes à la table, mais il faut aussi les habiliter à façonner les programmes par l’entremise d’un pouvoir décisionnaire clair.
En deuxième lieu, les politiques de mobilisation des jeunes doivent être associées à des objectifs quantifiables, des échéances et des rapports publics afin que la participation donne lieu à de réels changements, et non à des promesses vides.
D’après mon expérience de consultation avec les jeunes, j’ai constaté ce qui pouvait fonctionner lorsqu’ils étaient traités en tant qu’égaux. Les jeunes proposent des solutions audacieuses parce qu’ils ne sont pas coincés dans les anciennes façons de faire les choses. Nous exigeons une responsabilisation et nous nous attendons à un suivi. La participation significative renforce le leadership; elle outille les jeunes de la confiance, des connaissances et des responsabilités dont ils ont besoin pour continuer à servir leurs communautés une fois que la période de consultation est terminée.
Si le Canada met en œuvre ces stratégies, nous pourrons créer des politiques qui reflètent les réalités des personnes les plus touchées, cultiver la prochaine génération de leaders et faire du Canada un exemple mondial en matière de mobilisation authentique des jeunes et d’innovation démocratique. Pour mobiliser les jeunes, il faut faire plus qu’en inviter quelques-uns à s’exprimer devant une tribune comme celle-ci.
On ne peut pas rédiger des politiques pour les jeunes alors qu’ils sont tenus à l’écart des processus décisionnels. Pour qu’il y ait une réelle mobilisation, il faut aller à la rencontre des jeunes, dans leurs communautés, leurs écoles, leurs milieux de travail et aussi en ligne, où ils vivent et interagissent. Pour ce faire, il faut créer des occasions pour que les jeunes participent à votre travail, leur demander activement d’exprimer leurs opinions et leurs valeurs et concevoir les politiques en collaboration avec eux.
La mobilisation des jeunes n’est pas une case à cocher; c’est un effort délibéré et continu en vue de bâtir des relations, d’écouter attentivement et de veiller à ce que les voix qui façonnent les décisions reflètent les réalités des personnes les plus touchées.
Le projet de loi exige une stratégie qui comprend des indicateurs mesurables et la production de rapports réguliers à l’intention du Parlement. Cela signifie que les jeunes — une fois qu’ils auront été consultés — verront leurs rétroactions se transformer en des cibles concrètes et des mesures du progrès, associées à une responsabilité publique.
En préparant ma présentation d’aujourd’hui, je n’ai pas trouvé d’informations claires sur les mesures concrètes prises pour faire participer les jeunes à la politique nationale. Après des heures de recherche, les réponses restaient vagues ou éparses. Si même quelqu’un comme moi, qui se consacre à la mobilisation des jeunes, a du mal à trouver ces informations, imaginez à quel point ce doit être difficile pour la plupart des jeunes Canadiens. Ce manque d’accessibilité exclut les jeunes avant même qu’ils aient la possibilité de participer. Pour remédier au problème, nous avons besoin de stratégies et de programmes qui rendent la participation simple, inclusive et réalisable, afin que chaque jeune puisse avoir véritablement son mot à dire dans l’élaboration des politiques qui les concernent.
Le projet de loi réitère l’engagement du Canada envers les droits des enfants, la réconciliation et une stratégie à long terme pour le bien-être des jeunes. Les jeunes, dont la contribution était purement symbolique, joueront désormais un rôle fondamental dans l’élaboration des politiques.
Lorsque vous évaluerez ce projet de loi, je vous demande de réfléchir à une chose : que ferez-vous, à titre personnel et collectif, afin de créer des débouchés pour les jeunes dans les salles où se prennent les décisions?
Veillons à ce que la voix des jeunes soit entendue, et qu’elle devienne le fondement sur lequel nous construisons nos politiques et façonnons le Canada dont nous hériterons. Merci.
La vice-présidente : Madame Maharaj, vous disposez de cinq minutes.
Josephine Maharaj, conseillère des jeunes, Les Enfants d’abord Canada : Merci, honorables sénateurs. C’est un privilège pour moi de me joindre à vous virtuellement en tant que témoin pour la séance d’aujourd’hui.
J’ai 17 ans et je suis membre du Conseil consultatif des jeunes à Enfants d’abord Canada. Enfants d’abord Canada est un organisme de bienfaisance national qui vise à faire du Canada le meilleur endroit au monde pour grandir. Grâce à la recherche, à la publication de rapports et à la sensibilisation aux questions qui touchent les enfants aujourd’hui, ainsi qu’à la formation de jeunes leaders et d’acteurs du changement, Enfants d’abord Canada a donné à de nombreux jeunes comme moi les moyens de défendre nos droits.
Cependant, malgré ces progrès, je m’en voudrais de passer sous silence le fait que de nombreux jeunes et enfants passent entre les mailles du filet. Actuellement, le Canada se classe 67e sur les 194 pays du « KidsRights Index ». Que ce soit en raison de la crise de santé mentale, du manque d’accès aux soins de santé, de la discrimination ou de la pauvreté croissante, les enfants de partout souffrent, car les solutions ne sont pas exhaustives et ne tiennent pas compte des subtilités de chaque problème.
Ces enjeux sont exacerbés par le fait que nous ne sommes pas consultés et que nous ne disposons pas d’une plateforme pour partager nos expériences de manière productive. Sans une stratégie intentionnelle fondée sur une collaboration respectueuse entre les jeunes et les décideurs politiques, les enfants et les jeunes du Canada continueront à subir le poids de ces obstacles, car les mesures visant à atténuer les préjudices sont au mieux correctives plutôt que préventives.
Le projet de loi S-212 jettera les bases nécessaires à l’élaboration de stratégies intentionnelles et à l’instauration d’un dialogue respectueux. Une stratégie nationale pour les jeunes garantirait que des objectifs mesurables en matière de bien-être des enfants et des jeunes seraient fixés et mis en œuvre en temps opportun. Comme mentionné précédemment, les programmes et les solutions axés sur le bien-être des jeunes sont souvent insuffisants et ne tiennent pas compte des obstacles particuliers auxquels les jeunes peuvent être confrontés en fonction de leur milieu. Une partie du problème réside dans le fait que pour trouver des solutions adéquates, il faut que les jeunes de tous horizons partagent leurs points de vue divers afin de créer une réponse qui tient compte de tous les aspects. Le projet de loi S-212 permettra d’amorcer un dialogue pour que ces points de vue soient partagés, plutôt que de compter sur une poignée de jeunes pour parler des expériences des huit millions d’enfants du Canada. Le projet de loi S-212 renforcera les efforts actuels déployés par des organisations telles que Enfants d’abord Canada et les jeunes militants pour promouvoir les droits et la voix des enfants et des jeunes en fournissant le cadre approprié pour le faire, tout en s’attaquant aux inégalités et aux obstacles qui subsistent.
Une stratégie nationale pour les enfants et les jeunes au Canada n’est pas seulement une bonne politique; c’est une stratégie qui incarne les valeurs intrinsèques de notre société, où chacun, indépendamment de sa race, de son genre, de ses croyances et, dans ce cas, de son âge, a une place à la table.
Les enfants représentent un quart de la population canadienne et 100 % de l’avenir de notre pays. Nous sommes les leaders d’aujourd’hui et de demain. Que le projet de loi S-212 soit le rameau d’olivier que les décideurs politiques tendent aux jeunes. Au nom d’Enfants d’abord Canada, et en tant qu’une des huit millions d’enfants au Canada, j’exhorte sincèrement et du fond du cœur le comité à adopter le projet de loi S-212.
Merci beaucoup, et j’attends vos questions avec impatience.
La vice-présidente : Je vous remercie toutes les deux pour ces remarques liminaires. Nous allons maintenant passer aux questions des membres du comité. Pour ce groupe-ci, les sénateurs disposeront de quatre minutes afin de poser leurs questions, y compris les réponses. Veuillez indiquer si votre question s’adresse à un témoin en particulier ou à tous les témoins.
La sénatrice Hay : Je vous remercie d’être ici et de faire ce travail, de prendre la parole et non seulement de participer, mais aussi d’insister pour être présentes à la table et être des décideuses, ce qui est essentiel.
J’aimerais avoir votre avis ou vos réflexions sur une chose. Si nous voulons vraiment mobiliser les jeunes, cela doit se faire d’un océan à l’autre, ce qui inclut les Premières Nations, les Métis, les Inuits, les Noirs, les Africains, les Antillais, les nouveaux arrivants, les réfugiés ainsi que les populations urbaines, rurales et éloignées. Il s’agit d’une vaste population à mobiliser. Souvent, les appels lancés à des conseils comme ceux auxquels vous siégez, notamment Jeunesse, J’écoute, ne sont pas nécessairement représentatifs, même si les intentions sont bonnes. Vous pouvez avoir la réponse de ceux qui lèvent souvent la main — ils savent comment le faire et sont à l’aise —, mais il y a tout un groupe de jeunes qui peuvent être vulnérables ou intimidés. Ils peuvent avoir des préjugés inconscients lorsqu’ils s’adressent à un conseil. Je suis d’accord avec ce que vous avez dit. Il faut aller à la rencontre des jeunes là où ils se trouvent. Ma question, ou plutôt le conseil que j’aimerais que vous nous donniez, est le suivant : comment atteindre ces jeunes d’un océan à l’autre qui pourraient nous éclairer sur ce que nous devons faire maintenant et à l’avenir, mais qui ne sont peut-être pas ceux qui lèvent la main dans la communauté? Je commencerai par celle qui prendra la parole en premier.
La vice-présidente : Madame Rao, souhaitez-vous commencer?
Mme Rao : Oui. Je vous remercie pour votre question, sénatrice.
Je voudrais revenir à la réponse que j’ai donnée : parfois, lorsqu’on veut mobiliser les jeunes, il est important d’aller à leur rencontre là où ils sont. Je trouve que les jeunes sont tellement déconnectés de la politique canadienne qu’ils ne savent pas vraiment par où commencer. Il se passe beaucoup de choses dans les lieux où les décisions sont prises, et même moi, je me demande comment je peux m’impliquer. Je recommanderais d’aller à la rencontre des jeunes là où ils se trouvent, dans leurs écoles et leurs communautés, et de leur demander directement : « Comment puis-je mieux vous faire participer? » et « Comment pouvons-nous créer des politiques qui vous représentent? »
Nous pouvons vous aider à mobiliser les jeunes et à leur poser des questions. Nous pouvons diffuser votre message et faire connaître à nos communautés, entre autres, le travail que vous accomplissez et la manière de s’impliquer.
Une chose qui fait défaut est le sentiment d’agir collectivement. Je ne veux pas vous laisser tout le travail, en tant que sénateurs, et je veux pouvoir vous aider en plus de vous consulter. C’est ainsi qu’on crée conjointement. Si vous venez me dire qu’une chose vous pose problème, je peux vous donner mon avis, puis l’adresser à ma communauté et continuer à transmettre ces commentaires aux jeunes.
C’est ainsi que j’envisage la co-création de solutions et le rassemblement de personnes issues de milieux sous-représentés. J’espère que cela répond à votre question.
Mme Maharaj : Je suis tout à fait d’accord avec ce qu’a dit Mme Rao. J’ajouterais simplement qu’il faut persévérer. Ne vous découragez pas si vous n’obtenez pas de réponse ou de commentaires les premières fois. Comme Mme Rao l’a mentionné, les jeunes sont très déconnectés et désabusés par la politique, surtout de nos jours. Il faut donc être déterminé. Persévérez jusqu’à ce que vous obteniez des réponses, car les jeunes, une fois que vous prenez le temps de leur parler, sont plus que désireux de participer.
La sénatrice Hay : Je terminerai en disant que si nous suivons tous les jeunes, nous saurons exactement où nous devons aller. Merci pour vos commentaires.
La sénatrice Moodie : Merci aux jeunes qui se sont jointes à nous aujourd’hui. Vos opinions ont toujours été précieuses à mes yeux, et je suis très heureuse de vous avoir ici aujourd’hui pour nous aider à orienter nos délibérations.
J’aimerais vous poser la question suivante : quelles leçons tirées des stratégies nationales pour les jeunes d’autres pays pourraient aider le Canada à concevoir un cadre efficace et fondé sur les droits?
Je sais que CARE Canada travaille avec des jeunes du monde entier, alors peut-être pourriez-vous commencer, madame Rao, puis nous céderons la parole à l’autre témoin.
Mme Rao : Merci beaucoup, sénatrice Moodie. À CARE Canada, nous travaillons avec des jeunes du Kenya, de l’Ouganda et de la Zambie, nous et collaborons avec eux afin d’apporter ce contexte mondial dont vous parlez.
J’ai appris que nous ne sommes pas les seuls, en tant que nation, à avoir du mal à accroître l’engagement des jeunes et à leur offrir des occasions. Or, la première étape importante consiste à équilibrer les chances. Lorsque nous pensons aux jeunes qui sont en difficulté ou qui se trouvent dans un système défavorisé, tout le monde n’est pas encore traité sur un pied d’égalité. Avant de penser à construire un avenir meilleur, par exemple, nous devons d’abord nous attarder aux personnes que nous avons déjà laissées pour compte, puis continuer à élaborer des solutions.
Lorsque nous pensons à d’autres pays et à leurs progrès entourant la participation des jeunes et d’autres objectifs que vise le projet de loi, nous devons également songer à impliquer les jeunes à l’échelle mondiale et présenter des stratégies concrètes du Canada qui pourraient ensuite être reproduites à l’étranger. Nous pourrions servir d’exemple à cet égard. J’espère que cela répond à votre question.
La sénatrice Moodie : L’autre sujet que j’aimerais aborder est le suivant : vos deux organisations travaillent sur les menaces grandissantes qui pèsent sur le bien-être des enfants. La santé mentale en est une, le harcèlement et l’insécurité alimentaire en sont d’autres. Comment une stratégie nationale pourrait-elle accélérer la coordination des actions entre les différents secteurs pour contrer ces risques?
Mme Rao : Une stratégie nationale commence par encadrer le débat et identifier l’ensemble des problèmes qui existent aujourd’hui, puis contribue à soutenir toute autre politique mise en œuvre ultérieurement pour cibler des indicateurs précis dans ce domaine. Ce projet de loi est extrêmement utile, car il nomme les différentes difficultés auxquelles sont confrontés les jeunes. Espérons que cette reconnaissance nous permettra de trouver des solutions plus efficaces par la suite.
Mme Maharaj : Comme je l’ai mentionné dans mon introduction, une stratégie nationale concrétiserait l’intention des processus. À l’heure actuelle, il est très difficile d’unir nos voix, que ce soit les organisations de jeunes ou les jeunes militants, car nos efforts sont très fragmentés. Une stratégie permettrait de combler toutes les lacunes existantes tout en surmontant les obstacles, afin que nous puissions combiner nos efforts de manière plus efficace. Je vous remercie.
La sénatrice Moodie : Je vous remercie toutes les deux.
La sénatrice Senior : Je voudrais revenir sur la question de l’intention que vous avez mentionnée, madame Maharaj, car j’aimerais vous interroger un peu plus à ce sujet. Pourriez-vous nous expliquer à quoi pourrait ressembler ce genre d’intention en ce qui a trait aux voix? J’ai entendu des jeunes parler des « vraies voix ». Comment atteindre les vraies voix, c’est-à-dire celles qui ne sont pas les plus brillantes, mais qui sont ignorées et marginalisées? Comment l’intention permettrait-elle d’atteindre ces personnes?
Mme Maharaj : Tout d’abord, il faut développer des programmes et réfléchir aux groupes qui sont déjà défavorisés. Par exemple, quel est l’effet de la pauvreté sur les communautés autochtones? Quel est son effet sur les communautés racisées? Quel est son effet sur les jeunes nouveaux arrivants? La première partie de ce travail consiste pour les organisations elles-mêmes à se poser les questions auxquelles elles doivent répondre pour susciter l’engagement des jeunes. Encore une fois, il s’agit d’être persévérant. Vous n’obtiendrez peut-être pas immédiatement les « vraies voix » que vous souhaitez toucher dans vos efforts pour mobiliser les jeunes, et ce n’est pas grave. L’important, c’est de ne pas se décourager et, comme l’a dit Mme Rao, d’aller à la rencontre des jeunes là où ils se trouvent et de leur poser des questions précises sur leurs expériences, plutôt que les questions plus générales qui ont tendance à être posées pour mobiliser les jeunes.
La sénatrice Senior : Je vous remercie.
La sénatrice Burey : Mesdemoiselles, merci beaucoup. Je suis remplie d’espoir. Vous allez y arriver. Nous devons simplement vous donner l’espace nécessaire pour le faire. Je pense que c’est ce que vous nous avez dit. Je me sens vraiment optimiste. J’ai toujours eu confiance en la jeunesse. Continuez sur cette voie, je ne saurais trop insister là-dessus. C’est en vous impliquant que nous trouverons les solutions.
De votre point de militantes, quelles sont les lacunes systémiques les plus urgentes à combler dans cette stratégie nationale? Selon vous, quelles sont les plus importantes?
Mme Rao : Je pense que l’accès aux débouchés et aux possibilités réelles de s’impliquer est actuellement un des principaux problèmes. Nous avons tous dit et répété la même chose, à savoir que les jeunes ont la motivation, la détermination et les solutions, mais qu’il leur manque simplement une plateforme. Il faut inviter les jeunes dans ces espaces et leur donner cette occasion.
Aussi, on m’a offert cette occasion en raison de mon travail auprès d’une autre organisation. J’aimerais mettre au défi tous les sénateurs devant moi aujourd’hui de trouver des jeunes qui ne font pas encore partie d’organisations établies et de les inviter à participer à cette conversation, afin de leur donner la parole. J’ai le privilège de m’exprimer ici aujourd’hui, et j’en suis très reconnaissante, mais j’aimerais que vous parliez avec des personnes de divers horizons qui auraient tout à gagner de s’exprimer sur un projet de loi comme celui-ci.
Mme Maharaj : La sénatrice pourrait-elle répéter sa question? Le son s’est coupé pendant qu’elle parlait.
La sénatrice Burey : Certainement, avec plaisir. De votre point de militantes, quelles sont les lacunes systémiques les plus urgentes à combler dans cette stratégie nationale? Quelles sont les plus importantes?
Mme Maharaj : Je pense qu’il faudrait s’attarder davantage aux répercussions de l’IA générative et à la dépendance croissante des jeunes à Internet au quotidien. Internet fait désormais partie de notre vie. Ce n’est plus un simple lieu. C’est un sujet qui doit être abordé. Comment fonctionne l’IA générative lorsqu’elle produit quelque chose? On sait qu’elle n’a aucun sens critique et qu’elle peut être utilisée comme un outil de haine. Quel est son impact sur les jeunes qui méritent un traitement équitable? Comment l’IA générative affecte-t-elle les élèves dans les salles de classe? Comment peut-elle aider les élèves? À quoi sert-elle? Je pense que cette question est urgente, car l’IA générative évolue en ce moment même. C’est un sujet qui doit être abordé dans ce projet de loi. Je vous remercie.
La sénatrice Moodie : Merci beaucoup.
La sénatrice Petitclerc : Je vous remercie toutes les deux d’être ici aujourd’hui pour nous aider. C’est formidable de vous écouter. Voici une partie de ma question. Vous connaissez ce projet de loi et vous en avez parlé. Il dit qu’une consultation est nécessaire. C’est clair, nous devons consulter les jeunes.
Je voudrais insister un peu plus sur ce point. Il y a la consultation, et il y a l’idée de création conjointe. Où pensez-vous que les jeunes devraient se situer? Devraient-ils être consultés au début, après quoi tout le monde fait le travail? Sinon, croyez-vous que les jeunes devraient jouer un rôle du début à la fin du processus?
Mme Rao : Merci beaucoup pour cette question. Je suis convaincue que les jeunes devraient être inclus à toutes les étapes de l’élaboration des politiques, parce qu’ils ont toujours une perspective unique et différente. Je pense parler au nom de tous les jeunes quand je dis que nous ne comprenons pas les systèmes bureaucratiques dans lesquels vous évoluez tous; c’est pourquoi j’ai le sentiment que nous pouvons exprimer très librement nos opinions et vous donner une rétroaction authentique, ce qui peut être très utile dans ce genre de situation.
De plus, je doute qu’un seul d’entre vous, lorsqu’il était plus jeune, rêvait de faire un jour partie du Sénat. Pour aider les jeunes à s’orienter et à choisir leur carrière, en particulier dans le domaine politique, il faut leur ouvrir la voie et leur offrir du mentorat. C’est une autre forme d’engagement. Je sais que beaucoup de sénateurs ont des conseils jeunesse, et c’est formidable. Mais je pense que de créer des ponts et de cocréer avec eux donnerait aux jeunes l’occasion de rêver et de s’imaginer qu’ils pourraient un jour siéger au Sénat ou travailler en politique et continuer à exercer une influence par la cocréation avec d’autres jeunes.
J’espère donc que nous pourrons tous travailler ensemble de manière collaborative du début à la fin.
La sénatrice Petitclerc : Merci.
Mme Maharaj : Je suis tout à fait d’accord avec Mme Rao. Les enfants et les jeunes devraient être consultés à chaque étape, car comme tout le monde dans cette salle le sait, les projets de loi ou tout type de rapport façonnent la rédaction des lois. Il est donc très important de faire participer les jeunes à chaque étape du processus d’élaboration afin que leur voix ne soit pas déformée ni étouffée.
La sénatrice Petitclerc : Merci.
La sénatrice Muggli : Merci. Je suis moi aussi pleine d’espoir, et j’apprécie beaucoup l’énergie et l’enthousiasme que vous apportez à la conversation d’aujourd’hui.
Ma question porte sur les classements. Je sais, madame Maharaj, que vous avez mentionné que nous étions à la 67e place. Je n’ai pas bien compris de quel classement vous parliez, mais ce n’est pas très bon. Je regardais justement la page de l’UNICEF, à l’instant, et le Canada y figure au 19e rang sur 36 parmi les pays les plus riches au monde, mais aussi au 33e rang sur 36 pour le suicide chez les adolescents. Ce ne sont clairement pas de bons classements.
Je me demande si vous voudriez nous parler un peu de ce que vous considérez comme la priorité absolue pour cette stratégie. Quelle serait la première chose que vous espéreriez voir se concrétiser grâce à cette stratégie? Je vais commencer par vous, madame Maharaj.
Mme Maharaj : Malheureusement, il est très difficile de répondre à cette question, car les enfants et les jeunes sont en situation de crise sur tellement de plans : la pauvreté, la santé mentale, l’intelligence artificielle générative, la discrimination, etc. Je pense qu’il serait injuste de donner la priorité à un problème plutôt qu’à un autre, parce qu’ils méritent tous d’être traités en priorité. Nous sommes en situation de crise dans de nombreux domaines.
La sénatrice Muggli : Oui, tout à fait. Qu’en pensez-vous, madame Rao?
Mme Rao : Merci. Si je peux me permettre, j’aimerais voir la création d’un bureau de la jeunesse ou la mise en place de mesures visant à renforcer la mobilisation et l’élaboration de politiques pour aider à résoudre tous ces différents problèmes auxquels les jeunes sont confrontés. Ce pourrait être un programme plus formel ou structuré auquel nous pourrions participer afin de mettre en lumière les différents problèmes auxquels nous sommes confrontés, puis de trouver des solutions qui déboucheraient sur des politiques tangibles, parce que je comprends que ce projet de loi ne peut pas tout couvrir et qu’il ne peut pas tout reconnaître, donc je crois qu’il faudrait créer d’autres occasions formelles comme celle-ci. Ce serait formidable.
La sénatrice Muggli : Je comprends, parce qu’il faudrait un énoncé général qui couvre tout le monde dans ce projet de loi. C’est là tout le défi. Lorsque cela devient une stratégie réalisable, on peut commencer à s’attaquer aux problèmes réels. Merci beaucoup pour vos observations. Je vous en suis reconnaissante.
La vice-présidente : Merci à nos deux témoins. Sénateurs, cela vient clore la réunion d’aujourd’hui. Je tiens à remercier tous les témoins de leurs témoignages.
(La séance se poursuit à huis clos.)