Le Mois du patrimoine latino-américain
Troisième lecture—Ajournement du débat
7 novembre 2017
L’honorable Sénatrice Rosa Galvez :
Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui au sujet du projet de loi S-218, Loi instituant le Mois du patrimoine latino-américain.
Le mois dernier, comme l’a dit le sénateur Enverga, j’ai comparu devant le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie pour parler de ce projet de loi. Les Canadiens d’origine latino-américaine, comme moi, jouent un rôle important dans la relation du Canada avec les pays démocratiques des Amériques. Le Canada a conclu avec des pays et des groupes de pays de l’Amérique latine de nombreux accords multilatéraux politiques et économiques qui contribuent à créer des alliances politiques, économiques et commerciales. Le fait de reconnaître le patrimoine culturel que nous partageons au Canada en instituant le Mois du patrimoine latino-américain nous permettra de renforcer les relations entre le Canada et les pays d’Amérique latine tout en désignant officiellement une période pendant laquelle nous pourrons célébrer les contributions culturelles, sociales et économiques des Canadiens et résidents permanents d’origine latino-américaine.
Dans une déclaration écrite, le président du Conseil canadien pour les Amériques, M. Kenneth Frankel, a affirmé que son organisme appuyait la désignation du Mois du patrimoine latino-américain au Canada. Dans sa lettre, il décrit les avantages qui en découleraient :
Premièrement, cela enverrait aux Canadiens, y compris aux Canadiens d’origine latino-américaine, le message important que le Canada, notre pays, reconnaît les contributions clés et continues des Canadiens d’origine latino-américaine au Canada.
Deuxièmement, cela enverrait aux Canadiens, aux Latino-Américains et au reste du monde le message que le Canada accorde une grande importance à cette relation et à notre engagement commun envers des valeurs démocratiques libérales fondamentales et des objectifs sociétaux inclusifs.
Troisièmement, cela enverrait au monde entier le message que, dans une ère où les discours et les manifestations anti-immigrés foisonnent, le Canada clame haut et fort qu’il a profité et continuera grandement de profiter du multiculturalisme.
Comme je l’ai tout récemment dit dans ma déclaration au Sénat, lors de mon dernier voyage au Pérou, j’ai participé à une réunion organisée par le Président du Congrès. J’ai représenté la présidence de notre Sénat. Les présidents et les vice-présidents des Congrès de 12 pays d’Amérique latine se sont rassemblés pour condamner fermement les actes du président du Venezuela. Cette condamnation a montré que les pays d’Amérique latine peuvent faire front commun. J’ai réitéré l’engagement du Canada envers le respect des valeurs démocratiques dans les Amériques et demandé que des négociations soient tenues pour rétablir l’ordre démocratique au Venezuela en signant une déclaration qui réaffirme notre confiance à l’égard des valeurs démocratiques.
Les Amériques se partagent des plaques tectoniques, une chaîne de montagnes comme les Andes et des fleuves mystiques comme l’Amazone. Nous avons également dans notre histoire des événements communs, aussi lointains que récents, et des liens culturels et économiques unissent le Canada aux pays d’Amérique latine. Ils sont d’importants alliés pour le Canada, tant individuellement que collectivement.
Peu importe comment nous examinons ce projet de loi, que ce soit sous l’angle économique, politique ou social ou du point de vue de ceux qui sont nés au Canada ou des immigrants latino-américains au Canada, leurs enfants et leur famille, il n’y a aucune raison de ne pas l’appuyer.
J’aimerais vous donner un exemple fondé sur ma propre expérience. Comme vous le savez, je suis née à Lima, au Pérou, et j’ai grandi dans une ville typiquement latino-américaine : surpeuplée et très achalandée. Il pourrait s’agir de Santiago, de Mexico, de Bogota ou de Rio de Janeiro. Nous parlons une langue latine, nous avons la même religion et nous nous ressemblons tous.
Lorsque je travaillais à l’Université McGill, mon nom apparaissait sur le tableau dans l’entrée, et mon bureau était considéré comme le bureau d’orientation des étudiants latino-américains. Tous les Latino-Américains se sont arrêtés à mon bureau en quête de conseils. Mes compatriotes latino-canadiens aiment faire preuve de solidarité entre eux. Nous voulons nous entraider. Nous tentons de remonter le moral à nos concitoyens. Notre verre est toujours à moitié plein.
Le mode de vie latino est épicurien. Il permet de jouir du moment présent au moyen de l’amitié et du partage de la musique, de la cuisine et des expériences de vie. Combien d’amis canadiens avons-nous convaincus de découvrir les Andes, la jungle amazonienne et les sites archéologiques mayas, aztèques et incas? Combien de Canadiens ont forgé des amitiés permanentes avec des gens de pays de l’Amérique latine et d’origine latino-américaine? Des milliers.
Un mois pour célébrer le patrimoine latino-américain est une formule gagnante pour rassembler toutes les cultures.
Comme vous le savez, j’aime bien les chiffres. J’estime qu’ils illustrent très bien les faits. Une statistique peut aider à voir comment la communauté latino-américaine est perçue et s’intègre au Canada. Les Canadiens d’origine latino-américaine s’intègrent en général plutôt bien. Selon l’étude sur la diversité ethnique, 82 p. 100 des citoyens d’origine latino-américaine ont un fort sentiment d’appartenance au Canada. Comme moi, ils choisissent de rester ici. Dix-sept pour cent des adultes latino-américains au Canada détiennent un diplôme d’études universitaires, ce qui est supérieur à la moyenne de 15 p. 100; 64 p. 100 des adultes latino-américains, comparativement à 62 p. 100 de la population générale. Ces statistiques montrent que les Latino-américains ont un taux d’intégration élevé dans l’économie et la société canadiennes.
De même, une part considérable des étudiants inscrits aux programmes d’études supérieures en sciences et en génie des universités canadiennes sont latino-américains. D’ailleurs, au cours de ma carrière professionnelle en tant que professeure et ingénieure, j’ai encouragé de nombreux professeurs canadiens à enseigner dans des universités latino-américaines, et j’ai convaincu bon nombre d’étudiants de l’Amérique latine de venir étudier au Canada. Cet échange de savoir est précieux dans une société éduquée. Par ailleurs, certains des immigrants qui auraient pu choisir de retourner dans leur pays ne l’ont pas fait. Ils sont restés au Canada.
Les personnes d’origine latino-américaine qui aiment le Canada et y restent le font non seulement pour les occasions d’emploi, mais, et j’insiste sur ce point, en raison de l’ouverture, des valeurs, de la gentillesse, de la résilience et de la nature travaillante des Canadiens.
À l’instar des vagues d’immigrants venus d’Amérique centrale et d’Amérique du Sud depuis un demi-siècle, ces immigrants apportent au Canada un riche patrimoine culturel, non seulement dans les arts, l’artisanat, les textiles, la musique, l’agriculture et les produits alimentaires, mais également dans leurs perspectives et dans leurs relations avec les peuples autochtones. L’occasion de célébrer ce patrimoine culturel avec les Canadiens d’origine latino-américaine ou d’autres origines est un bienfait pour l’ensemble des Canadiens.
Honorables sénateurs, nous devons également tenir compte du fait que, au Canada, nous retrouvons la culture latine d’héritage français. Les communautés francophones du Québec, de l’Acadie, du Manitoba et de l’Ontario bénéficient des échanges, de l’esprit de solidarité et de la culture commune avec les communautés qui proviennent de l’Amérique latine.
Je salue, remercie et appuie le sénateur Enverga pour l’initiative qu’il a prise de parrainer ce projet de loi.
Le Mois du patrimoine latino-américain fournira aux Canadiens une occasion annuelle de célébrer le patrimoine et le legs culturels des Latino-Américains au Canada, de s’informer à ce sujet et de prendre part à l’œuvre perpétuelle d’édification de la nation.
Chers collègues, je vous remercie à l’avance et vous encourage à appuyer le projet de loi S-218. Merci beaucoup.