PÉRIODE DES QUESTIONS — Le cabinet du premier ministre
SNC-Lavalin
18 mars 2019
Ma question s’adresse au leader du gouvernement. Le 7 février dernier, le Globe and Mail faisait état de pressions indues sur l’ancienne procureure générale de la part de l’entourage du premier ministre Trudeau pour favoriser SNC-Lavalin dans le cadre d’une entente et d’un procès criminel. Le premier ministre a immédiatement déclaré que toutes ces informations étaient fausses. Cependant, depuis ce temps, deux ministres ont démissionné. Son meilleur ami, Gerald Butts, secrétaire principal, a démissionné, et le premier ministre nous a avoué que, finalement, tout ce qui se trouvait dans cet article du Globe and Mail était vrai. Le gouvernement ne conteste plus aucun des faits dans cette affaire. Tous les acteurs de cette histoire, même le premier ministre, ont retenu des avocats spécialistes du secteur privé en droit criminel. Aujourd’hui, nouveau coup de théâtre, c’est le greffier du Conseil privé qui démissionne.
Monsieur le leader, pouvez-vous nous confirmer que la Gendarmerie royale du Canada a commencé son enquête sur l’affaire SNC-Lavalin et que c’est à cause de cette enquête criminelle que le greffier du Conseil privé a décidé de prendre sa retraite?
Je ne peux pas confirmer une telle chose. Je peux toutefois revenir sur la raison pour laquelle le secrétaire du Cabinet a décidé de prendre sa retraite. Je souligne d’abord que M. Wernick comptait 37 ou 38 années de service public. On peut lire ce qui suit dans sa lettre :
Il est maintenant apparent qu’il m’est impossible d’avoir une relation de confiance et de respect mutuels avec les chefs de partis d’opposition. De plus, il est essentiel que durant la période électorale, le greffier soit considéré par tous les partis politiques comme étant impartial, surtout dans un contexte où de l’interférence étrangère aurait eu lieu.
C’est pourquoi je souhaite renoncer à ces responsabilités avant les élections.
C’est là un greffier hautement intègre qui a pris une décision dans l’intérêt du Canada.
Tout le monde sait qu’un bon avocat en droit criminel va conseiller à ses clients de ne pas parler. Le conseiller leur dira : « Vous avez droit au silence. » Le leader du gouvernement peut-il nous confirmer que si les acteurs qui ont été identifiés dans ce dossier, soit la douzaine de personnes du bureau du premier ministre et du cabinet du ministre des Finances, sont appelés à témoigner devant le comité de la Chambre des communes ou le Sénat, ils n’invoqueront pas leur droit au silence ou la possibilité de se faire incriminer par leur témoignage, et qu’ils donneront des versions complètes à 100 p. 100?
Tout ce que je peux confirmer, c’est ce qu’ont dit ceux qui ont comparu devant le comité de la Chambre des communes : ils ont répondu aux questions de façon honnête, directe et appropriée.
Ma question s’adresse également au leader du gouvernement. La semaine dernière, M. Drago Kos, le président du Groupe de travail de l’OCDE sur la corruption dans les transactions commerciales et internationales, a déclaré à la CBC que l’allégation de l’ancienne procureure générale concernant une ingérence politique dans la poursuite criminelle contre SNC-Lavalin « avait immédiatement déclenché tous les signaux d’alarme ». En réponse aux graves préoccupations soulevées par l’OCDE, la ministre Freeland a publié une déclaration dans laquelle elle a indiqué que le processus du Comité de la justice de la Chambre des communes était solide et indépendant. Toutefois, les députés libéraux ont mis fin aux travaux de ce comité la semaine dernière avant même que les membres n’aient pu débattre de la possibilité d’inviter Mme Wilson-Raybould à comparaître.
Monsieur le leader du gouvernement, comment le gouvernement peut-il dire à l’OCDE que le processus du comité est robuste et indépendant étant donné ce qui s’est passé au comité à peine deux jours après l’avertissement de l’OCDE?
Premièrement, ce que l’honorable sénatrice n’a pas dit, dans sa question, c’est que l’ancienne ministre a passé plus de quatre heures devant le comité, donc, contrairement à ce qu’elle laisse entendre, cette dernière a eu l’occasion de parler.
Deuxièmement, en ce qui a trait à la déclaration de la ministre des Affaires étrangères sur la primauté du droit au Canada, je conviens, à l’instar du ministre de la Justice et, je l’espère, de tous les sénateurs, que la primauté du droit au Canada repose sur des assises solides et qu’elle est respectée dans l’ensemble de notre administration.
Honorable sénateur, je sais que nous suivons tous très attentivement ce qui se déroule au Comité de la justice, et nous savons que Mme Wilson-Raybould n’a pas pu parler aussi librement que ce que vous avez laissé entendre. Je crois que de nombreux membres du comité ont convenu qu’il fallait au moins tenir un débat pour déterminer si l’ancienne procureure générale devait être convoquée de nouveau, étant donné que d’autres l’avaient été. Ainsi, je me demande si le comité a fait preuve de diligence raisonnable en permettant au débat d’avoir lieu. J’ai l’impression qu’il y a davantage de questions en raison de ce qui s’est passé. Nous avons besoin de plus renseignements.
Je le répète, le comité de l’autre endroit se réunit demain, à ma connaissance. Il s’agit d’un comité indépendant, qui prendra ses décisions à titre de comité indépendant.
Je peux seulement souligner que le décret fourni par le premier ministre permet à l’ancienne ministre d’aborder, dans son témoignage, des sujets qui seraient autrement couverts par le secret du Cabinet et qui concernent le dossier à l’étude et la période où elle était ministre et procureure générale. Il s’agit d’une façon de faire inhabituelle, mais qui a été jugée nécessaire pour que l’ancienne ministre puisse parler librement et de façon détaillée.