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Projet de loi sur la stratégie nationale pour la prévention de la violence conjugale

Troisième lecture--Débat

26 novembre 2024


L’honorable Fabian Manning [ + ]

Propose que le projet de loi S-249, Loi concernant une action nationale pour la prévention de la violence entre partenaires intimes, tel que modifié, soit lu pour la troisième fois.

 — Honorables sénateurs, ce jour a mis longtemps à arriver, mais je suis extrêmement heureux que nous soyons enfin réunis pour discuter et débattre de mon projet de loi d’intérêt public, le projet de loi S-249, à l’étape de la troisième lecture.

Hier soir, en quittant mon bureau de l’édifice de l’Est, j’ai été ravi de voir la tour de la Paix illuminée en violet. En effet, la campagne des 16 jours d’activisme contre la violence fondée sur le sexe a débuté hier. Le 25 novembre est la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes. La campagne s’achèvera le 10 décembre, qui est la Journée internationale des droits de l’homme. La campagne des 16 jours d’activisme appelle à l’action contre l’une des atteintes aux droits de la personne les plus persistantes dans le monde : la violence à l’égard des femmes.

Le thème de la campagne de 2024 est « S’unir pour agir ». Les 16 jours d’activisme soulignent à quel point il est crucial de mobiliser tout le monde au Canada, en particulier les hommes et les garçons, pour faire évoluer les normes sociales, les attitudes et les comportements qui contribuent à la violence fondée sur le sexe. Il s’agit également d’un appel à l’action, exhortant chacun d’entre nous à reconnaître les signes de la violence fondée sur le sexe et à tendre la main pour obtenir un soutien pour nous-mêmes et pour nos proches.

Pendant les 15 prochains jours, la tour de la Paix sera illuminée en violet. Je vous suggère de prendre une photo et de la publier sur les médias sociaux pour rappeler aux gens l’épidémie à laquelle notre pays est confronté aujourd’hui.

Avant de poursuivre avec mes observations sur le projet de loi, j’aimerais profiter de l’occasion pour remercier plusieurs personnes et groupes qui ont joué un rôle majeur pour nous amener à cette étape du processus visant à faire du projet de loi S-249 une loi canadienne.

Le philosophe chinois Lao Tseu a dit : « Un voyage de mille lieues commence toujours par un premier pas. »

Je crois qu’il ne fait aucun doute que nous avons dû parcourir beaucoup de chemin pour amener le projet de loi S-249 à cette étape, mais le premier pas si crucial a été fait en janvier 2017, lorsque j’ai reçu un appel de Georgina McGrath, une résidante de la pittoresque municipalité de Branch, située dans la baie St. Mary’s, à Terre-Neuve-et-Labrador.

Mme McGrath voulait me rencontrer pour discuter de ce qu’on appelait alors la violence familiale. Peu de temps après, je lui ai rendu visite chez elle, et elle m’a raconté en détail son vécu par rapport à ce que nous appelons maintenant la violence entre partenaires intimes.

À partir de ce jour, je me suis engagé auprès de Mme McGrath à travailler avec elle et avec d’autres pour voir ce que nous pouvions faire collectivement pour nous attaquer à ce problème bien réel et très important.

Les mots me manquent pour décrire à quel point je suis heureux qu’elle ait pu se joindre à nous aujourd’hui au Sénat du Canada, en compagnie de son mari Karen, de sa sœur Kim et de sa nièce Sarah, alors que nous discutons et débattons du projet de loi S-249. J’espère même que nous aurons l’occasion de voter à l’étape de la troisième lecture avant la fin de la séance d’aujourd’hui.

Les victimes de violence entre partenaires intimes ne sont pas toutes des femmes, mais un grand pourcentage d’entre elles le sont. Par conséquent, au cours de mon intervention, je parlerai souvent des femmes et des filles, mais il n’en demeure pas moins que bien d’autres groupes de tous les horizons sont victimes de ce type de violence, comme les hommes, les garçons, les membres de la communauté LGBTQIA+, les membres des communautés autochtones et bien d’autres.

Au cours des dernières années, j’ai rencontré plus de 130 victimes de violence entre partenaires intimes. J’ai organisé plusieurs tables rondes avec des victimes, des familles de victimes, des représentants des gouvernements fédéral et provinciaux, des membres des forces de l’ordre, des membres du système de justice et bien d’autres encore.

J’ai visité des refuges pour femmes dans plusieurs régions du pays. J’ai eu de nombreuses discussions avec beaucoup d’entre vous dans cette enceinte et j’ai travaillé en étroite collaboration avec le bureau de la ministre Marci Ien pour faire avancer ce projet de loi vital et important à chacune des étapes de notre processus législatif.

Au cours de ces discussions avec le cabinet de la ministre, il a été convenu que le projet de loi S-249 porterait le nom de « loi de Georgina », ce qui m’a à la fois ravi et ému. Cela donne une touche personnelle à cette loi. Cela fera en sorte qu’un plus grand nombre de personnes pourront découvrir l’histoire de Georgina, mais cela leur permettra aussi de trouver le courage de raconter leur propre histoire.

J’espère que, à l’instar de la loi de Clare, la loi de Georgina franchira la ligne d’arrivée et deviendra une loi au Canada.

Je veux profiter de cette occasion pour remercier toutes les personnes qui ont participé à ce processus, parfois frustrant, mais je suis très reconnaissant d’être arrivé là où nous sommes aujourd’hui.

Il nous reste encore un long chemin à parcourir avant que le projet de loi soit adopté à la Chambre des communes, mais je crois sincèrement que nous franchirons la ligne d’arrivée. Même si ce projet de loi ne mettra pas fin à la violence entre partenaires intimes, j’espère qu’au moins une vie sera sauvée et que, grâce à nos discussions continues sur la violence entre partenaires intimes, les victimes partout au pays sauront qu’il y a de l’aide, que des personnes et des services sont disponibles pour les aider et que l’éducation est la clé de la réussite.

Au cours des dernières années, vous avez été nombreux à vous exprimer dans cette enceinte sur mon projet de loi, qu’il s’agisse de la version initiale, que j’ai présentée en avril 2018 — oui, j’ai bien dit avril 2018 —, ou de la dernière version du projet de loi, qui a fait l’objet d’une première lecture au Sénat le 8 juin 2022. Je suis impatient d’entendre plusieurs d’entre vous plus tard dans la soirée à l’étape de la troisième lecture.

Tous ceux qui ont pris la parole ont beaucoup contribué à l’élaboration du projet de loi tel qu’il est aujourd’hui et, plus encore, au processus de sensibilisation à la grave épidémie de violence entre partenaires intimes qui secoue notre pays et le monde actuellement.

La violence entre partenaires intimes est un comportement qu’adopte une personne pour contrôler l’autre. Les partenaires peuvent être mariés ou non, hétérosexuels, membres de la communauté LGBTQIA+, cohabiter, être séparés ou sortir ensemble. Parmi les exemples de violence, on peut citer les injures ou les insultes, le fait d’empêcher un partenaire de contacter sa famille ou ses amis, de retenir de l’argent, d’empêcher l’autre d’obtenir ou de conserver un emploi, les blessures physiques réelles ou la menace de blessures physiques, l’agression sexuelle, le harcèlement et l’intimidation. La violence peut être criminelle et comprend l’agression physique, les coups, les poussées, la violence sexuelle, les relations sexuelles non désirées ou forcées et le harcèlement. Bien que la maltraitance émotionnelle, la maltraitance psychologique et la maltraitance financière ne soient pas des comportements criminels, elles constituent assurément des formes de mauvais traitements et peuvent conduire à la violence criminelle.

Que vous ayez parlé de mon projet de loi ou de l’interpellation sur la violence entre partenaires intimes menée par la sénatrice Boniface, j’ai écouté attentivement et j’ai beaucoup appris, et je vous suis très reconnaissant à tous pour votre soutien continu.

Selon l’Organisation mondiale de la santé :

La violence entre partenaires intimes est considérée comme un important problème de santé publique à l’échelle mondiale qui est lié à la violence intergénérationnelle et qui entraîne des conséquences physiques, émotionnelles et économiques préjudiciables pour les victimes, les témoins et la société dans son ensemble.

Plus de 7 victimes de violence entre partenaires intimes sur 10, soit 71 %, ont subi de la violence physique. L’agression physique est le type de violence le plus courant que subissent les victimes de violence entre partenaires intimes, soit dans 77 % des cas; viennent ensuite les menaces, dans 8 % des cas, et le harcèlement criminel, dans 6 % des cas. Les données fournies par la police montrent que les conjoints, actuels ou anciens, et les autres partenaires intimes ont commis environ 42 % des crimes violents impliquant des victimes féminines. D’autres membres de la famille et des connaissances sont à l’origine de 43 % de ce genre de crimes. La violence familiale est définie comme tous les types de crimes violents perpétrés par un membre de la famille et signalés à la police.

Chers collègues, bien que la situation puisse être difficile à comprendre pour certaines personnes, des études ont montré que 70 % des cas de violence conjugale, peu importe leur type, ne sont pas signalés à la police. De nombreuses victimes de violence conjugale — et j’ai parlé à beaucoup d’entre elles — subissent des formes graves de violence. Plus précisément, 25 % de toutes les victimes de violence conjugale ont été agressées sexuellement, battues, étranglées ou menacées avec une arme à feu ou un couteau, et 24 % de toutes les victimes de violence conjugale ont reçu des coups de pied, ont été battues ou ont été frappées avec un objet.

En 2017, le site d’information Femmes au Canada : rapport statistique fondé sur le sexe de Statistique Canada indiquait ceci :

Les personnes de sexe féminin étaient surreprésentées parmi les victimes d’agression sexuelle (88 % des affaires) et les victimes d’autres infractions sexuelles (83 % des affaires) [...] Parmi les autres infractions signalées à la police qui ont surtout été commises contre des victimes de sexe féminin figurent la séquestration et les infractions connexes (79 %), le harcèlement criminel (76 %) et les appels téléphoniques menaçants ou harcelants (71 %). Toutes les victimes (100 %) d’infractions faisant partie de la catégorie de la « marchandisation des activités sexuelles » étaient des femmes.

Les taux de presque « tous les types de victimisation avec violence » étaient « plus élevés chez les Autochtones ». Plus particulièrement, le taux d’agressions sexuelles chez les Autochtones, — 58 incidents par tranche de 1 000 personnes — correspondait à près de trois fois celui des non-Autochtones, qui était de 20 incidents par tranche de 1 000 personnes, alors que le taux d’agression physique chez les Autochtones, de 87 incidents pour 1 000, était près du double de celui des non-Autochtones, soit 47 incidents pour 1 000. En outre :

[c]hez les Autochtones de sexe féminin, le taux de victimisation avec violence [...] était 2,7 fois plus élevé que celui observé chez les non-Autochtones de sexe féminin [...].

Puis, il ne faut jamais oublier que 1 181 femmes autochtones ont disparu ou ont été assassinées entre 1980 et 2001.

Sénateur Manning, je regrette de devoir vous interrompre. Vous disposerez du reste de votre temps de parole lorsque le débat reprendra à la fin de la période des questions.

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