DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS — L'honorable David Richards
Remerciements
7 octobre 2025
Merci, Votre Honneur.
Honorables sénateurs, je vais essayer de lire rapidement, et je n’ai pas grand-chose à dire. En fait, mon ami à la tribune m’a dit : « Parleras-tu beaucoup de Cicéron? » Eh bien, non, pas aujourd’hui. Mon discours d’adieu est d’un autre type. Je vais raconter comment je suis arrivé ici. Pas comment j’ai rempli le formulaire de candidature, mais comment je suis arrivé au Sénat. Ainsi, j’espère que vous serez patients avec moi.
Chers collègues, je tiens à remercier les agents de sécurité de cet important édifice, qui sont prêts chaque jour à protéger les sénateurs et à risquer leur vie pour eux. Ils font partie des véritables héros du Canada, même s’ils sont parfois méconnus. Je remercie également la greffière du Sénat, Shaila Anwar, le sous-greffier, Gérald Lafrenière, de même que leur équipe, ainsi que les pages, qui sont notre équipe de soutien pendant que nous sommes à nos sièges. Je tiens à remercier l’huissier du bâton noir, Greg Peters, un homme dont j’ai découvert la noblesse de caractère et l’imperturbabilité.
Je tiens également à remercier les greffiers des comités de leur diligence, ainsi que les analystes de la Bibliothèque du Parlement et les interprètes de la leur. Sans eux, aucun comité ne pourrait fonctionner. Je remercie aussi tout notre personnel dévoué.
Je voudrais remercier ma directrice des affaires parlementaires, Diane Lacombe, qui est à mes côtés depuis huit ans maintenant. Elle organisait constamment mes affaires, revoyait méticuleusement mes discours et les traduisait, corrigeait mon orthographe affreuse et continuait, jour après jour, d’être une véritable bénédiction pour moi, et ce, tout au long de ce voyage, un voyage assez étrange pour moi.
Bien sûr, je remercie ma femme Peg, qui m’accompagne depuis que nous sommes enfants, faisant la route de Fredericton à Ottawa d’innombrables fois en hiver, au printemps et à l’automne. Même si ce n’était jamais facile, elle s’assurait toujours que je sois bien habillé avant de partir pour le Sénat.
Je voudrais exprimer ma gratitude envers tous les membres du Sénat qui ont eu la gentillesse de se lier d’amitié avec moi durant cette époque de ma vie — ceux avec qui j’étais d’accord aussi bien que ceux avec qui je ne l’étais pas. Vous avez été aimables avec moi et, dans certains cas, vous avez été parmi les plus gentilles personnes que je connaisse. Je vous remercie tous d’avoir fait de mon séjour ici une période révélatrice de ma vie.
Comment en suis-je arrivé là? Je ne le sais pas trop.
Voyez-vous, je ne parle pas de la façon dont je suis arrivé ici en remplissant une demande et en l’envoyant au Cabinet du premier ministre. Je ne parle pas non plus du fait que lorsque le premier ministre m’a appelé, j’ai accepté — car lorsque le premier ministre appelle, il convient non seulement de répondre, mais aussi de répondre par oui.
Non, ce n’est pas de cela que je vais parler. Cependant, je me demande encore comment je me suis rendu de la rue Metcalfe à la salle du Sénat, dans l’édifice du Centre, sans me faire arrêter.
Voyez-vous, je n’avais aucune idée où se trouvait le Sénat. Je n’étais jamais allé sur la Colline auparavant. J’avais vu des images de la Colline du Parlement. J’étais passé devant en voiture une fois, en soirée, à 23 h. Je n’étais nullement un expert des affaires canadiennes.
Tout ce que je savais, c’était que Marie Jose Entwistle m’avait téléphoné pour me demander de la rencontrer dans le foyer de la salle du Sénat, située du côté gauche de l’édifice du Centre.
Or, comme mon sens de l’orientation fait souvent défaut, j’ignorais de quel côté gauche on parlait. Autrement dit, était-ce du côté gauche de l’édifice du Centre lorsque j’y faisais face, ou était-ce à ma gauche, en direction opposée? Ou encore, était-ce dans l’édifice à ma droite, qui est situé à gauche de l’édifice du Centre et qui, comme je devais l’apprendre plus tard, est appelé l’édifice de l’Est? Ou bien s’agissait-il peut-être de l’édifice à la droite de l’édifice du Centre, qui était, comme vous l’aurez deviné, à ma gauche et qui, comme je l’ai découvert, est appelé l’édifice de l’Ouest?
J’ai donc commencé à errer d’abord vers la gauche, puis vers la droite, puis vers la gauche, pour finir par tourner en rond, jusqu’à ce qu’un agent de la GRC, qui m’observait avec un certain étonnement, s’approche et me dise : « Puis-je vous être utile, monsieur? Vous semblez ne pas savoir où vous êtes. Vous semblez distrait. »
« Eh bien, où dois-je aller pour devenir sénateur? », dis-je aussi dignement que possible.
Il m’a regardé avec une certaine pitié, comme s’il pensait que j’étais légèrement timbré.
Il n’a toutefois rien dit de la sorte. Il a répondu : « Monsieur, vous devez être choisi. »
Une fois encore, en essayant d’être vénérable, j’ai répondu après une pause : « Oui, vous voyez, j’ai été choisi. »
« Vous avez été choisi? », a-t-il demandé.
« Tout à fait », répondis-je. « Oui, j’ai été choisi, et je suis choisi. Alors, puisque j’ai été choisi, où dois-je aller pour être choisi? Si vous voyez ce que je veux dire. »
Il a mis les mains derrière son dos et m’a regardé de haut, d’un air imposant. « Eh bien, monsieur, je ne suis pas sûr de comprendre ce que vous voulez dire, mais je suis certain que je ne peux pas vous laisser vous rendre au Sénat pour le moment. »
C’est bel et bien ce qu’il m’a dit.
Je l’ai regardé, assez perplexe. J’ai haussé les épaules. J’ai regardé à droite et à gauche. Puis, j’ai dit d’un ton très sévère : « Eh bien, si ce n’est pas maintenant, alors quand? » J’ai cligné des yeux. J’ai cligné des yeux rapidement. J’essayais de montrer que je n’étais pas dangereux.
À ce moment-là, un autre agent de la GRC s’est approché. Il semblait toutefois me reconnaître pour une raison mystérieuse. J’essayais d’ailleurs de paraître aussi distingué que possible.
« Oh, dit-il, vous êtes le nouveau sénateur du Nouveau-Brunswick? »
« C’est bien moi », lui ai-je répondu.
Il m’a donc dirigé vers l’enceinte du Sénat, où m’attendait ma chère Marie Jose. J’imagine que ces deux agents se sont dit : « Un nouveau sénateur. Il est aussi allumé qu’une plante verte. »
Cependant, même si la plupart des gens ici savent que je peux facilement être déconcerté et désorienté, je pense tout de même être plus allumé qu’une plante verte.
Puis vint le grand jour où je devais entrer dans la Chambre rouge. Je me suis réveillé tôt ce matin-là et j’ai décidé de me préparer pour être aussi élégant que possible. Or, dès que j’ai vu mes grosses chaussures neuves et lourdes, j’ai commencé à m’inquiéter. Étant donné que je suis depuis longtemps presque complètement instable sur mes jambes, j’ai demandé à Peggy si je devais vraiment porter des chaussures : « Ne serait-il pas préférable pour tout le monde que je ne porte pas de chaussures? Juste des chaussettes plus épaisses? »
« Pourquoi? »
« Je vais trébucher et tomber sur le derrière. »
« Mais non », m’a-t-elle répondu.
« Tu verras... je te le dis, je vais trébucher. »
« Ne sois pas stupide, a-t-elle ajouté, tout ira bien. »
« C’est ça, ai-je répondu, tu verras... tout ira bien. »
Le moment est donc venu, comme nous le savons, nous les sénateurs. J’ai marché vers les deux sénateurs qui allaient me guider, le sénateur Harder et feue la sénatrice McCoy, deux sénateurs que j’ai appris à beaucoup admirer. Alors que j’entrais dans le foyer pour les rencontrer, un photographe m’a dit : « Monsieur Richards, regardez par ici. » C’est ce que j’ai fait, et j’ai foncé tête première dans l’un des drapeaux canadiens gardant la salle du Sénat.
Je ne crois pas que le drapeau serait tombé, mais comment pouvais-je le savoir avec certitude? Je l’ai donc agrippé rapidement et vigoureusement, les deux bras tendus, au moment où la photo était prise, avec un air de panique soudaine sur le visage. On aurait vraiment dit que j’essayais de l’étrangler.
J’étais donc très inquiet à l’idée qu’un journal imprime cette photo le lendemain matin avec la légende : « Le nouveau sénateur David Adams Richards déteste notre drapeau canadien. »
Heureusement, cela ne s’est pas produit, et, à mon arrivée au Sénat, j’ai été accueilli par certaines des personnes les plus brillantes et les plus remarquables que j’aie jamais rencontrées.
J’ai aussi quelques regrets. Je n’ai jamais invoqué le Règlement, car je ne savais pas vraiment ce qu’était un recours au Règlement. J’avais le sentiment que j’aurais marqué les esprits si j’avais pris la parole ne serait-ce qu’une seule fois pour dire : « Votre Honneur, j’invoque le Règlement. » Cependant, je n’ai jamais été en mesure de le faire.
Je n’ai jamais présenté de projet de loi non plus. J’aurais aimé le faire, mais je n’ai vraiment pas trouvé d’idée valable. Soyez sans crainte, si j’avais trouvé une bonne idée, je l’aurais certainement proposée.
J’ai siégé avec trois groupes et deux fois en tant que sénateur non affilié. J’ai appuyé certains projets de loi du gouvernement, mais je m’y suis opposé dans la plupart des cas. Je ferais de même s’ils étaient présentés à nouveau. Je ne les ai pas appuyés uniquement parce que je les jugeais néfastes pour notre pays. C’est toujours mon opinion aujourd’hui.
Je me suis appuyé sur mes discours pour informer le public que le Canada mérite mieux que certains projets de loi qui sont présentés par l’autre endroit. C’est ainsi que les choses se passaient et qu’elles se passent encore.
Comme l’a dit un biographe à mon sujet :
À 19 ans, David Adams Richards était non seulement en désaccord avec l’autorité, mais aussi avec tous ceux qui étaient en désaccord avec l’autorité. Il devait être impossible de vivre avec lui.
Je laisse les autres en décider.
J’ai passé la majeure partie de ma vie en semi-réclusion à écrire mes livres. En revanche, j’ai rencontré ici tant de personnes formidables qui m’ont offert leur amitié comme une bénédiction.
Ne nous méprenons pas : le Sénat joue un rôle essentiel au Canada. Sans lui, aucun gouvernement ne pourrait fonctionner. J’ai pris conscience du rôle extrêmement important de la Chambre rouge. Si nous nous penchons sur des problèmes plus vastes plutôt que sur nos propres problèmes, nous pourrons améliorer un peu les choses, car si tous faisaient part de leurs petits problèmes dans cette enceinte, chacun de nous se concentrerait d’abord sur ses propres problèmes.
Tâchons de ne pas oublier que c’est la personne qui importe avant tout, car la vie n’est rien sans cela. Toutes les politiques gouvernementales et tous les caprices au monde ne pourront jamais changer cela.
N’oublions pas non plus que Dieu ne veut pas que nous soyons satisfaits, mais que nous soyons exceptionnels.
Comme un personnage d’un de mes livres l’a dit il y a longtemps : « Je vous aime tous. » Je crois que je vais en rester là.
Je suis très heureuse de ne pas avoir eu à interrompre le sénateur Richards.