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La Loi sur le ministère de la Santé

Projet de loi modificatif--Deuxième lecture--Suite du débat

4 avril 2019


Honorables sénateurs et sénatrices, c’est avec plaisir que je prends la parole en qualité de marraine à l’étape de la deuxième lecture du projet de loi C-326, Loi modifiant la Loi sur le ministère de la Santé (lignes directrices relatives à l’eau potable). Ce projet de loi a été déposé à l’autre endroit par Francis Scarpaleggia, député de Lac-Saint-Louis. L’objectif du projet de loi est d’assurer la bonne qualité de l’eau potable en exigeant que Santé Canada prenne en considération les normes de qualité élevées des autres pays ou agences internationales en adoptant leurs recommandations pour le traitement de l’eau.

Honorables sénateurs, permettez-moi tout d’abord de vous expliquer un peu la manière dont l’eau potable est analysée et traitée au Canada. Au pays, la grande majorité de l’eau potable provient des nappes phréatiques ou des cours d’eau locaux. Bien qu’elles soient généralement d’excellente qualité, ces sources ne sont jamais pures. Elles peuvent contenir des substances indésirables telles que des minéraux, des particules de sol ou du matériel biologique, mais aussi des substances nocives telles que des engrais ou des pesticides. Certains de ces contaminants peuvent poser un risque pour la santé; c’est pourquoi l’eau doit être traitée.

La responsabilité du traitement de l’eau incombe aux provinces et aux territoires. Elle est assumée à l’échelle municipale au moyen d’installations de purification d’eau. Ces installations utilisent une série de procédés mécaniques et physico-chimiques traditionnels comme la coagulation, la sédimentation, la filtration et la désinfection pour éliminer les sédiments et tuer les agents pathogènes de manière à obtenir des niveaux sécuritaires pour le transport de l’eau dans les réseaux de canalisations, jusqu’aux maisons et aux entreprises.

En général, l’eau potable des villes dotées de systèmes sophistiqués de traitement de l’eau est de grande qualité. Malheureusement, certaines municipalités, de nombreuses régions rurales et des communautés des Premières Nations au Canada n’ont pas accès à une eau potable de même qualité.

Au Canada, les procédés de traitement de l’eau correspondent en général aux méthodes employées ailleurs dans le monde à quelques petites différences près. Ainsi, le désinfectant utilisé peut varier entre les villes, les provinces et les pays selon la disponibilité des produits chimiques et les préférences des responsables. Il reste que nous pouvons tirer des enseignements de ce qui se fait ailleurs. En Europe, par exemple, on accorde une grande importance à la protection de la source, ce qui diminue les coûts de traitement, et les programmes d’entretien préventif du réseau de distribution réduisent la désinfection nécessaire une fois l’eau en circulation. Les nouvelles technologies comme la filtration sur membrane et la désinfection par rayonnement ultraviolet et ozonation, qui réduisent les coûts, sont employées ici et à l’étranger pour traiter l’eau potable.

Pour ce qui est des éléments que l’on traite, Santé Canada établit une concentration maximale acceptable pour les contaminants qui se retrouvent dans l’eau potable. Certains éléments se retrouvent naturellement dans l’environnement. Le manganèse, par exemple, est essentiel au métabolisme de l’humain et des animaux, mais il peut entraîner des effets indésirables, comme changer la couleur ou le goût de l’eau et causer une prolifération microbienne dans le système de distribution de l’eau.

Par contre, des études récentes démontrent que l’ingestion d’une trop grande quantité de manganèse provenant de l’eau potable peut avoir des effets sur la santé des enfants en bas âge. Cela montre bien que les lignes directrices doivent évoluer constamment pour ce qui est de l’établissement et de la vérification des concentrations maximales acceptables et de la surveillance des nouveaux éléments qui pourraient avoir une incidence sur les sources d’eau potable.

Certains composés présents dans l’eau potable sont toutefois plus nocifs pour la santé humaine. J’ai déjà parlé au Sénat de la catastrophe environnementale causée par les plastiques à usage unique et les microparticules. Saviez-vous que ces produits, c’est-à-dire les plastiques, les emballages alimentaires et les appareils électroniques contiennent des composés et des produits chimiques qui peuvent perturber les hormones dans le corps humain? Par exemple, les ignifugeants, les phtalates et le bisphénol A sont des substances qui peuvent réagir avec les récepteurs des oestrogènes dans le corps humain et jouer un rôle dans la pathogenèse des troubles endocriniens comme l’infertilité et le cancer du sein et de la prostate. Même à très faible dose, il peut être dangereux pour une personne de consommer des composés qui perturbent le système endocrinien.

Un rapport publié par Ecojustice en 2014 a comparé les concentrations maximales acceptables au Canada aux normes correspondantes aux États-Unis, en Europe et en Australie et à celles de l’Organisation mondiale de la santé. Dans 24 cas, le Canada avait la norme ou la ligne directrice la plus stricte ou celle-ci était à égalité avec la plus stricte. Dans 27 cas, le Canada avait la norme ou la ligne directrice la moins stricte ou celle-ci était à égalité avec la moins stricte. La constatation la plus importante est toutefois la suivante: dans 105 cas, le Canada n’avait aucune norme en matière d’eau potable.

Par exemple, il n’existe aucune norme ou ligne directrice en matière d’eau potable pour le pesticide 2,4-D au Canada.

Honorables sénateurs, je vous ai donné de l’information et des exemples qui expliquent l’importance d’avoir des normes qui sont conformes à la réalité présente et aux découvertes scientifiques afin de protéger la santé humaine et celle des écosystèmes. Ce projet de loi exigerait que le ministre de la Santé identifie et reconnaisse les gouvernements étrangers ainsi que les agences internationales qui ont des normes de qualité d’eau potable qui devraient être étudiées et comparées aux normes canadiennes. Les comparaisons devraient seulement être faites auprès des pays qui respectent des critères rigoureux et basés sur la science pour déterminer la concentration maximale admissible de produits chimiques et composés que l’on trouve dans l’eau potable.

De nombreux scientifiques étudient l’hydrologie et la qualité de l’eau au Canada; toutefois, ils ne peuvent simultanément étudier les millions de combinaisons de types d’eau et les millions de produits chimiques et de substances biologiques. Par contre, nous pouvons absolument apprendre des recherches et des normes adoptées par les autres nations. Si d’autres pays ont su acquérir une compréhension plus avancée du comportement des contaminants et de leur taux maximal acceptable dans l’eau potable, je crois que le Canada devrait prendre en considération cette information.

Ce projet de loi a été adopté à l’unanimité à la Chambre des communes après l’adoption d’un amendement en comité, amendement qui a élargi la portée de la comparaison pour inclure tout gouvernement étranger et agence internationale qui a adopté des normes élevées de qualité de l’eau.

Honorables sénateurs, le projet de loi renforcera les normes canadiennes sur la qualité de l’eau. Je l’appuie et j’espère que vous ferez de même.

Merci beaucoup.

L’honorable Lillian Eva Dyck [ - ]

La sénatrice accepterait-elle de répondre à une question?

La sénatrice Dyck [ - ]

Merci de votre excellent discours. La seule question qui m’est venue à l’esprit en vous écoutant est celle de savoir si le projet de loi mentionne les produits pharmaceutiques sur ordonnance, car il semblerait que beaucoup de personnes les jettent à la toilette lorsqu’il leur en reste. Bien sûr, on a déterminé qu’il s’agit de composés actifs qui affectent non seulement les humains, mais aussi les êtres vivants dans l’eau.

Merci beaucoup de cette question. Vous avez tout à fait raison. C’est pourquoi je parlais des millions de composés; les lignes directrices n’en mentionnent que quelques centaines. Chaque année, l’industrie lance de nouveaux composés sur le marché. Il est vrai que nous pouvons maintenant dépister des antibiotiques, des produits contraceptifs et des produits analgésiques, entre autres, dans les cours d’eau et dans les usines de traitement des eaux usées. Il est important que nous connaissions les concentrations maximales permises pour la consommation humaine.

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