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De lourdes peines ne résoudront pas la crise du fentanyl au Canada : sénatrice Pate

Vue sur des clôtures à mailles métalliques couronnées de barbelés depuis une cellule d’isolement à la prison d’Agassiz, en Colombie-Britannique.

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Les Canadiens méritent une intervention digne de ce nom pour mettre fin à la crise du fentanyl au lieu d’idées draconiennes et malavisées, encore moins des peines minimales obligatoires couteuses. 

Prétendre que les peines à perpétuité (en anglais seulement) sont des solutions à la crise des drogues toxiques, comme l’avance le chef des conservateurs Pierre Poilievre, est à la fois trompeur et dangereux. Une telle approche ne ferait qu’aggraver le problème au lieu de l’enrayer. Pire encore – cette voie aurait pour conséquences davantage de mesures d’austérité, de prisons surpeuplées et encore plus de gens abandonnés et obligés de vivre dans des conditions minables et précaires, mais surtout, plus d’itinérance dans notre société. 

Pendant presque cinquante ans, j’ai travaillé aux côtés de ces personnes visées par des programmes prétendument censés sévir contre la criminalité et lutter contre les stupéfiants. Ces programmes sont toujours les plus durs à subir pour les personnes les plus vulnérables de notre société et, comme le directeur parlementaire du budget le montre, ils coutent une fortune aux contribuables. En effet, le directeur parlementaire du budget a estimé qu’ils ont déjà couté des milliards de dollars aux contribuables canadiens.

Les gens les plus faciles à arrêter, à poursuivre en justice et à condamner à de lourdes peines de prison ne sont certainement pas les barons de la drogue. Ceux qui profitent le plus des crises d’opioïdes ont les moyens d’éviter d’être identifiés, de blanchir leurs narcodollars et, si jamais ils sont arrêtés, d’embaucher des équipes d’avocats qui les aideront à échapper à la justice et à ne pas répondre de leurs actes.

Nous sommes maintenant pris avec les conséquences : une crise des drogues illicites qui perdure et des prisons remplies non pas de ceux qui causent le plus de tort ou qui profitent le plus du narcotrafic, mais de ceux qui sont les plus faciles à coffrer et à criminaliser – les pauvres, les sans-abris, les toxicomanes, les personnes avec des problèmes de santé mentale et les personnes racisées de manière démesurée.

Pour remédier à la crise du fentanyl, les gouvernements devront enfin reconnaitre l’intersectionnalité de plusieurs facteurs comme la toxicomanie, la pauvreté, les problèmes de logement et de santé mentale, et agir en conséquence.

Les preuves s’accumulent au Canada : la garantie d’une sécurité financière et la réduction du stress financier font baisser le nombre de crimes violents (en anglais seulement) – précisément 350 crimes violents en moins et 1 400 crimes totaux en moins par tranche de 100 000 habitants, soit une réduction de 17,5 %. Dans la même optique, une étude sur les homicides commis avec une arme à feu menée à New York dans les années 1990 montre qu’une hausse de 10 % du nombre de jeunes adultes bénéficiaires d’aide financière va de pair avec une diminution de 10,5 homicides (en anglais seulement) par tranche de 100 000 habitants. La sécurité financière engendre aussi un accroissement de l’emploi, des emplois mieux rémunérés et de meilleurs résultats scolaires. 

Il nous faut repenser les méthodes actuelles qui sont couteuses (en anglais seulement), inefficaces et inutiles. Des investissements judicieux dans la sécurité financière des Canadiens peuvent réduire la pauvreté, diminuer les dépenses et rendre notre gouvernement plus efficace et efficient.

M. Poilievre a clairement exprimé son intention de sabrer les dépenses fédérales (en anglais seulement) d’un côté et, de l’autre, d’injecter des milliards de dollars dans des mesures pénales (en anglais seulement) qui feront beaucoup de tort.

Il n’a pas expliqué pourquoi il préférait s’attaquer aux personnes les plus faciles à arrêter au lieu des plus grands profiteurs du narcotrafic, y compris les entreprises et même les banques qui blanchissent les produits de la criminalité et de leur narcotrafic.

Comment entend-il obliger les gens qui se cachent derrière des compagnies à numéro et autres profiteurs du blanchiment des produits de la criminalité à répondre de leurs actes? Pourquoi ne propose-t-il pas un processus plus transparent qui oblige le véritable propriétaire à déclarer son identité et à l’inscrire dans les registres d’entreprises? Pourquoi ne propose-t-il pas une solution à des situations comme celle de la Banque TD? En effet, celle-ci n’a pratiquement pas été tenue responsable de ses actes même si elle a admis (en anglais seulement) connaitre l’existence d’au moins 670 millions de dollars blanchis dans ses coffres à cause de son non-respect des lois et politiques visant à la prévention de telles activités.

Nous allons payer une fortune si nous jetons en prison davantage d’Autochtones, de Noirs et de pauvres ainsi que des personnes avec des problèmes de toxicomanie et de santé mentale. À leur libération, s’ils l’obtiennent, ces Canadiens devront surmonter davantage d’épreuves et auront peu de possibilités d’acceptation ou de réinsertion sociale. Voulons-nous vraiment provoquer davantage d’itinérance, de pauvreté et de désespoir?

Nous méritons tous de connaitre les couts humains et financiers de l’application et du financement de ces politiques de lutte contre la criminalité de façade. Quelles compressions fera-t-on pour trouver les milliards de dollars des contribuables nécessaires pour payer l’emprisonnement des pauvres et des sans-abris?

M. Poilievre doit donner des explications claires le plus vite possible. Trop de Canadiens peinent à joindre les deux bouts et ils méritent de savoir ce qu’ils ont à perdre.


La sénatrice Kim Pate représente l’Ontario.

Cet article a été publié dans The Globe and Mail le 11 octobre 2025 (en anglais seulement).

Les Canadiens méritent une intervention digne de ce nom pour mettre fin à la crise du fentanyl au lieu d’idées draconiennes et malavisées, encore moins des peines minimales obligatoires couteuses. 

Prétendre que les peines à perpétuité (en anglais seulement) sont des solutions à la crise des drogues toxiques, comme l’avance le chef des conservateurs Pierre Poilievre, est à la fois trompeur et dangereux. Une telle approche ne ferait qu’aggraver le problème au lieu de l’enrayer. Pire encore – cette voie aurait pour conséquences davantage de mesures d’austérité, de prisons surpeuplées et encore plus de gens abandonnés et obligés de vivre dans des conditions minables et précaires, mais surtout, plus d’itinérance dans notre société. 

Pendant presque cinquante ans, j’ai travaillé aux côtés de ces personnes visées par des programmes prétendument censés sévir contre la criminalité et lutter contre les stupéfiants. Ces programmes sont toujours les plus durs à subir pour les personnes les plus vulnérables de notre société et, comme le directeur parlementaire du budget le montre, ils coutent une fortune aux contribuables. En effet, le directeur parlementaire du budget a estimé qu’ils ont déjà couté des milliards de dollars aux contribuables canadiens.

Les gens les plus faciles à arrêter, à poursuivre en justice et à condamner à de lourdes peines de prison ne sont certainement pas les barons de la drogue. Ceux qui profitent le plus des crises d’opioïdes ont les moyens d’éviter d’être identifiés, de blanchir leurs narcodollars et, si jamais ils sont arrêtés, d’embaucher des équipes d’avocats qui les aideront à échapper à la justice et à ne pas répondre de leurs actes.

Nous sommes maintenant pris avec les conséquences : une crise des drogues illicites qui perdure et des prisons remplies non pas de ceux qui causent le plus de tort ou qui profitent le plus du narcotrafic, mais de ceux qui sont les plus faciles à coffrer et à criminaliser – les pauvres, les sans-abris, les toxicomanes, les personnes avec des problèmes de santé mentale et les personnes racisées de manière démesurée.

Pour remédier à la crise du fentanyl, les gouvernements devront enfin reconnaitre l’intersectionnalité de plusieurs facteurs comme la toxicomanie, la pauvreté, les problèmes de logement et de santé mentale, et agir en conséquence.

Les preuves s’accumulent au Canada : la garantie d’une sécurité financière et la réduction du stress financier font baisser le nombre de crimes violents (en anglais seulement) – précisément 350 crimes violents en moins et 1 400 crimes totaux en moins par tranche de 100 000 habitants, soit une réduction de 17,5 %. Dans la même optique, une étude sur les homicides commis avec une arme à feu menée à New York dans les années 1990 montre qu’une hausse de 10 % du nombre de jeunes adultes bénéficiaires d’aide financière va de pair avec une diminution de 10,5 homicides (en anglais seulement) par tranche de 100 000 habitants. La sécurité financière engendre aussi un accroissement de l’emploi, des emplois mieux rémunérés et de meilleurs résultats scolaires. 

Il nous faut repenser les méthodes actuelles qui sont couteuses (en anglais seulement), inefficaces et inutiles. Des investissements judicieux dans la sécurité financière des Canadiens peuvent réduire la pauvreté, diminuer les dépenses et rendre notre gouvernement plus efficace et efficient.

M. Poilievre a clairement exprimé son intention de sabrer les dépenses fédérales (en anglais seulement) d’un côté et, de l’autre, d’injecter des milliards de dollars dans des mesures pénales (en anglais seulement) qui feront beaucoup de tort.

Il n’a pas expliqué pourquoi il préférait s’attaquer aux personnes les plus faciles à arrêter au lieu des plus grands profiteurs du narcotrafic, y compris les entreprises et même les banques qui blanchissent les produits de la criminalité et de leur narcotrafic.

Comment entend-il obliger les gens qui se cachent derrière des compagnies à numéro et autres profiteurs du blanchiment des produits de la criminalité à répondre de leurs actes? Pourquoi ne propose-t-il pas un processus plus transparent qui oblige le véritable propriétaire à déclarer son identité et à l’inscrire dans les registres d’entreprises? Pourquoi ne propose-t-il pas une solution à des situations comme celle de la Banque TD? En effet, celle-ci n’a pratiquement pas été tenue responsable de ses actes même si elle a admis (en anglais seulement) connaitre l’existence d’au moins 670 millions de dollars blanchis dans ses coffres à cause de son non-respect des lois et politiques visant à la prévention de telles activités.

Nous allons payer une fortune si nous jetons en prison davantage d’Autochtones, de Noirs et de pauvres ainsi que des personnes avec des problèmes de toxicomanie et de santé mentale. À leur libération, s’ils l’obtiennent, ces Canadiens devront surmonter davantage d’épreuves et auront peu de possibilités d’acceptation ou de réinsertion sociale. Voulons-nous vraiment provoquer davantage d’itinérance, de pauvreté et de désespoir?

Nous méritons tous de connaitre les couts humains et financiers de l’application et du financement de ces politiques de lutte contre la criminalité de façade. Quelles compressions fera-t-on pour trouver les milliards de dollars des contribuables nécessaires pour payer l’emprisonnement des pauvres et des sans-abris?

M. Poilievre doit donner des explications claires le plus vite possible. Trop de Canadiens peinent à joindre les deux bouts et ils méritent de savoir ce qu’ils ont à perdre.


La sénatrice Kim Pate représente l’Ontario.

Cet article a été publié dans The Globe and Mail le 11 octobre 2025 (en anglais seulement).

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