Le Canada doit reconstruire ses liens avec l’Afrique : sénatrice Gerba
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Dans un passé proche, le Canada a contribué aux avancées du continent africain. Les retombées de ces contributions ont profité aux pays africains et à notre pays — notamment sur le plan économique. Certaines de nos grandes sociétés sont nées de ces investissements publics et privés. Alors que nous soulignons aujourd’hui la Journée mondiale de l’Afrique, un constat s’impose : le temps est venu de reconstruire les liens du Canada avec l’Afrique.
Créée en 1963, cette journée vise à célébrer l’unité africaine et tout ce qui la concrétise telle la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf). Elle célèbre aussi les avancées économiques et sociales, technologiques et culturelles accomplies par les Africains, leurs sociétés civiles et leurs gouvernements. Elle vise également à souligner la présence des Africains dans le monde, ces diasporas dont la contribution est hautement appréciée, contribution à la société canadienne et à leur société d’origine.
Avec ses partenaires du continent, notre pays doit identifier les domaines où les intérêts canadiens et africains convergent et ensuite s’investir dans la reconstruction de son lien au continent. Cette politique contribuerait au renforcement de notre économie. Elle enrichirait les débouchés internationaux de nos sociétés y compris celles qui ont pour mandat d’investir dans le monde tels la Caisse de dépôt et placement du Québec et le Régime de retraite des enseignantes et des enseignants de l’Ontario. Elle participerait enfin au développement de nos institutions de recherche et de savoirs et enrichirait le travail de nos organisations non gouvernementales sur le continent.
L’Afrique est aujourd’hui un continent en chantier, une vaste communauté de nations en pleine mutation. Certes, le continent compte sa part de difficultés comme l’Europe, l’Asie et les Amériques. Cependant, il regorge d’occasions où notre savoir-faire trouvera de vrais débouchés. Je pense notamment à l’agriculture, à l’énergie, au transport, à l’économie numérique, sociale et circulaire, aux énergies renouvelables, à l’aménagement urbain, etc.
Sur le plan commercial, la mise en œuvre de la ZLECAf produira un marché commercial dont le produit intérieur brut est estimé à 3,4 billions de dollars américains. Allégé des droits de douane pour 90 % de ses échanges, ce marché unifié sera l’un des plus grands au monde avec le Partenariat économique régional global en Asie (en anglais seulement). Ce formidable potentiel pourra compter sur un marché en croissance, la population du continent devant doubler d’ici 2050, de 1,2 milliard à 2,4 milliards d’habitants. Bientôt, un être humain sur quatre sera africain et la population africaine sera la plus jeune de la planète.
Pour mettre du contenu dans la reconstruction de ses liens avec le continent africain, le Canada doit apporter son expertise et son savoir-faire aux équipes qui œuvrent à la mise en place de la ZLECAf. Il ne serait pas le premier pays à avoir soutenu ce grand projet. Mais ce faisant, il mettrait fin à cette espèce d’indifférence qui contraste avec un grand nombre des pays du monde qui se sont considérablement rapprochés du continent, qui se sont déclarés partenaires pour relever le défi de l’indispensable réussite de l’Afrique. À terme, Ottawa pourrait proposer un projet d’accord de libre-échange avec les pays de la ZLECAf.
Enfin, le poids stratégique de l’Afrique constitue un motif additionnel de renouer avec le continent. En effet, avec ses 55 pays et avec l’Union africaine qui cherche à obtenir un siège permanent au Conseil de sécurité des Nations Unies, le continent compte dans les forums internationaux. L’échec du Canada à obtenir un siège au Conseil de sécurité, ainsi que la capacité de la Russie à échapper en partie aux sanctions internationales en conséquence de la politique de neutralité de plusieurs pays africains, démontrent la force que peut avoir l’Afrique dans le concert des nations.
À moyen et à long terme, rien des affaires de l’Afrique n’échappera à l’attention du monde, et rien des affaires du monde ne pourra s’accomplir sans le concours des Africains. Le Canada figure dans la liste des pays qui semblent ignorer cette évidence. Il nous faut sortir de ce positionnement stérile.
J’espère qu’à l’avenir, à l’occasion d’une autre Journée mondiale de l’Afrique, je pourrai faire circuler un message plus positif et évoquer les dividendes découlant de la reconstruction des liens du Canada avec l’Afrique.
La sénatrice Amina Gerba représente la région de Rigaud au Québec.
Une version de cet article a été publiée le 25 mai 2022 dans le journal Le Devoir.
Dans un passé proche, le Canada a contribué aux avancées du continent africain. Les retombées de ces contributions ont profité aux pays africains et à notre pays — notamment sur le plan économique. Certaines de nos grandes sociétés sont nées de ces investissements publics et privés. Alors que nous soulignons aujourd’hui la Journée mondiale de l’Afrique, un constat s’impose : le temps est venu de reconstruire les liens du Canada avec l’Afrique.
Créée en 1963, cette journée vise à célébrer l’unité africaine et tout ce qui la concrétise telle la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf). Elle célèbre aussi les avancées économiques et sociales, technologiques et culturelles accomplies par les Africains, leurs sociétés civiles et leurs gouvernements. Elle vise également à souligner la présence des Africains dans le monde, ces diasporas dont la contribution est hautement appréciée, contribution à la société canadienne et à leur société d’origine.
Avec ses partenaires du continent, notre pays doit identifier les domaines où les intérêts canadiens et africains convergent et ensuite s’investir dans la reconstruction de son lien au continent. Cette politique contribuerait au renforcement de notre économie. Elle enrichirait les débouchés internationaux de nos sociétés y compris celles qui ont pour mandat d’investir dans le monde tels la Caisse de dépôt et placement du Québec et le Régime de retraite des enseignantes et des enseignants de l’Ontario. Elle participerait enfin au développement de nos institutions de recherche et de savoirs et enrichirait le travail de nos organisations non gouvernementales sur le continent.
L’Afrique est aujourd’hui un continent en chantier, une vaste communauté de nations en pleine mutation. Certes, le continent compte sa part de difficultés comme l’Europe, l’Asie et les Amériques. Cependant, il regorge d’occasions où notre savoir-faire trouvera de vrais débouchés. Je pense notamment à l’agriculture, à l’énergie, au transport, à l’économie numérique, sociale et circulaire, aux énergies renouvelables, à l’aménagement urbain, etc.
Sur le plan commercial, la mise en œuvre de la ZLECAf produira un marché commercial dont le produit intérieur brut est estimé à 3,4 billions de dollars américains. Allégé des droits de douane pour 90 % de ses échanges, ce marché unifié sera l’un des plus grands au monde avec le Partenariat économique régional global en Asie (en anglais seulement). Ce formidable potentiel pourra compter sur un marché en croissance, la population du continent devant doubler d’ici 2050, de 1,2 milliard à 2,4 milliards d’habitants. Bientôt, un être humain sur quatre sera africain et la population africaine sera la plus jeune de la planète.
Pour mettre du contenu dans la reconstruction de ses liens avec le continent africain, le Canada doit apporter son expertise et son savoir-faire aux équipes qui œuvrent à la mise en place de la ZLECAf. Il ne serait pas le premier pays à avoir soutenu ce grand projet. Mais ce faisant, il mettrait fin à cette espèce d’indifférence qui contraste avec un grand nombre des pays du monde qui se sont considérablement rapprochés du continent, qui se sont déclarés partenaires pour relever le défi de l’indispensable réussite de l’Afrique. À terme, Ottawa pourrait proposer un projet d’accord de libre-échange avec les pays de la ZLECAf.
Enfin, le poids stratégique de l’Afrique constitue un motif additionnel de renouer avec le continent. En effet, avec ses 55 pays et avec l’Union africaine qui cherche à obtenir un siège permanent au Conseil de sécurité des Nations Unies, le continent compte dans les forums internationaux. L’échec du Canada à obtenir un siège au Conseil de sécurité, ainsi que la capacité de la Russie à échapper en partie aux sanctions internationales en conséquence de la politique de neutralité de plusieurs pays africains, démontrent la force que peut avoir l’Afrique dans le concert des nations.
À moyen et à long terme, rien des affaires de l’Afrique n’échappera à l’attention du monde, et rien des affaires du monde ne pourra s’accomplir sans le concours des Africains. Le Canada figure dans la liste des pays qui semblent ignorer cette évidence. Il nous faut sortir de ce positionnement stérile.
J’espère qu’à l’avenir, à l’occasion d’une autre Journée mondiale de l’Afrique, je pourrai faire circuler un message plus positif et évoquer les dividendes découlant de la reconstruction des liens du Canada avec l’Afrique.
La sénatrice Amina Gerba représente la région de Rigaud au Québec.
Une version de cet article a été publiée le 25 mai 2022 dans le journal Le Devoir.