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Le système de soins de santé du Canada pourrait-il mieux se porter? : Sénatrice Forest-Niesing

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La médecine n’est pas mon domaine de compétence, mais je dis souvent à la blague que je pourrais presque faire certains examens de médecine.

Pourquoi?

En prenant ma santé en main, j’ai appris plein de choses. Aux prises avec de graves problèmes de santé depuis un diagnostic qui ne laissait rien présager de bon en mars 2007 (alerte au divulgâcheur – cette histoire se termine bien), je suis passée en presque 12 ans de la patiente type qui s’en remet entièrement à son médecin à celle qui connaît tout de sa maladie, des symptômes et des conséquences de ses choix quotidiens sur sa santé.

On estime à plus de deux millions le nombre de Canadiens atteints de maladies auto-immunes. Parmi la cinquantaine de maladies auto-immunes connues à ce jour au Canada, les plus courantes sont le lupus, l’arthrite rhumatoïde, la sclérose en plaques, la maladie de Crohn et le syndrome de Sjögren. Le système immunitaire, qui réagit de façon excessive, se met à mal fonctionner et s’attaque aux cellules et aux tissus sains de l’organisme plutôt que de combattre les menaces extérieures. Lorsque la maladie auto-immune cible un organe vital ou plus, la vie du patient est menacée. Dans tous les cas, toutefois, les patients souffrent de divers symptômes à l’intensité variable. La cause de la maladie est inconnue, et à ce jour, il n’existe aucun remède. Il faut apprendre à vivre avec la maladie et malgré elle. Conséquences? On prend des tonnes de médicaments, on consulte beaucoup de médecins et on nage dans la confusion.

Où intervient le gouvernement fédéral?

Je reconnais qu’il est difficile pour la plupart des Canadiens de démêler ce qui relève du provincial et du fédéral en matière de soins de santé.

En fait, chaque province doit légiférer pour établir son propre régime de soins de santé et l’appliquer. En conséquence, les régimes provinciaux ont tous été institués à divers moments, sont administrés et fonctionnent différemment et sont très différents l’un de l’autre puisque chaque province connaît ses propres contraintes démographiques et géographiques. 

Le rôle du gouvernement fédéral est d’exercer un leadership et d’établir les objectifs globaux pour instaurer des pratiques exemplaires partout au pays. Il doit également adopter des mesures législatives concernant la santé de certains groupes relevant de sa compétence, notamment les Premières Nations vivant dans des réserves, les Inuits, les membres de la Gendarmerie royale du Canada et des Forces canadiennes ainsi que les détenus dans des pénitenciers fédéraux, notamment, et leur fournir des soins. Comme il est responsable du financement, il fournit des modèles de financement permanent et gère les relations avec les provinces selon les fonds offerts et les conditions dont ils sont assortis.

Comme le système de soins de santé du Canada a été créé de façon progressive et non uniforme, il gagnerait à être revu et amélioré. Par exemple, la plupart des experts conviennent qu’il est indispensable d’élargir l’accès aux soins de santé primaires partout au pays pour réduire les temps d’attente et faciliter l’accès dans les localités éloignées et mal desservies. Il serait également bénéfique pour les Canadiens de normaliser le système de soins de santé en fonction des pratiques exemplaires. De plus, grâce aux énormes progrès technologiques, les dossiers électroniques à jour des patients pourraient être accessibles aux prestataires de soins de santé, et vraisemblablement aux patients eux-mêmes, ce qui amènerait les patients à jouer un rôle actif dans leur traitement. Il est démontré que la participation des patients à leur plan thérapeutique a des effets très positifs : elle accroît la transparence, la sensibilisation et l’adhésion au traitement, bref, elle donne de meilleurs résultats. Et les résultats se traduisent par des gains d’efficience.

Dans un monde idéal, on pourrait même envisager un régime de soins de santé axé sur les patients, où les hôpitaux auraient certes leur raison d’être, mais où les cliniques de proximité auraient accès aux dossiers électroniques des patients, prodigueraient les soins de santé primaires et prendraient en charge les malades externes, et où des professionnels de la santé de tous les domaines fourniraient sur place des soins multidisciplinaires, allant des pratiques médicales occidentales traditionnelles à d’autres formes de traitement complémentaires pour mieux prendre en charge le patient.

Sans vouloir simplifier à l’excès une situation extrêmement complexe où interviennent deux ordres de gouvernement, je proposerais simplement au gouvernement fédéral d’exercer un rôle de leadership dans la création, le financement et l’établissement de systèmes de soins de santé uniformes, intégrés et globaux partout au Canada, garantissant ainsi la prestation de services de soins de santé non seulement aux populations qui relèvent de sa compétence, mais également aux patients mal desservis par les régimes provinciaux. Les cliniques de proximité devraient être à la fois intégrées et globales.

L’objectif d’un régime de soins de santé intégré est principalement l’efficience. Les prestataires de soins, qu’il s’agisse du personnel de soutien, des infirmières, des médecins ou des spécialistes, travaillent en équipe et communiquent. Chaque membre de l’équipe prodigue des soins selon son champ de compétence en travaillant en collaboration et le plus efficacement possible. En gros, il s’agirait d’un « guichet unique » pour le patient. L’avantage pour les membres de l’équipe de soins est qu’ils ont des rôles clairement définis et qu’ils peuvent fournir uniquement les soins nécessaires, sachant que le patient bénéficiera d’un plan de traitement complet.

Un régime de soins global, quant à lui, repose principalement sur un plan de traitement complet. Au cours des dernières années, on a beaucoup appris sur les bienfaits des médecines parallèles. Je me souviens d’une époque où les patients devaient choisir entre un plan de traitement traditionnel ou parallèle, intégrant par exemple la naturopathie, l’ostéopathie, la médecine traditionnelle autochtone et la médecine chinoise ancienne. On sait maintenant que les méthodes des médecines parallèles peuvent être complémentaires à un plan de traitement. La plupart des patients, si on leur donnait le choix, voudraient avoir accès à l’ensemble des méthodes thérapeutiques pour soigner leurs symptômes tout en essayant de trouver la cause profonde de leurs maux et de s’y attaquer. Mieux encore, on pourrait faire davantage grâce à la médecine préventive pour traiter les maladies, voire empêcher complètement leur apparition. 

En tant que gardiens des fonds publics, le gouvernement fédéral pourrait créer un modèle de soins de santé axé sur la population, intégré et global, ce ne serait pas une mauvaise stratégie nationale sur les soins de santé à mettre de l’avant à l’approche des élections.


Avis aux lecteurs : L’honorable Josée Forest-Niesing est décédée le 20 novembre 2021. Apprenez-en davantage sur son travail au Parlement.

Cet article a été publié le 4 février 2019 dans le journal The Hill Times (en anglais seulement).

La médecine n’est pas mon domaine de compétence, mais je dis souvent à la blague que je pourrais presque faire certains examens de médecine.

Pourquoi?

En prenant ma santé en main, j’ai appris plein de choses. Aux prises avec de graves problèmes de santé depuis un diagnostic qui ne laissait rien présager de bon en mars 2007 (alerte au divulgâcheur – cette histoire se termine bien), je suis passée en presque 12 ans de la patiente type qui s’en remet entièrement à son médecin à celle qui connaît tout de sa maladie, des symptômes et des conséquences de ses choix quotidiens sur sa santé.

On estime à plus de deux millions le nombre de Canadiens atteints de maladies auto-immunes. Parmi la cinquantaine de maladies auto-immunes connues à ce jour au Canada, les plus courantes sont le lupus, l’arthrite rhumatoïde, la sclérose en plaques, la maladie de Crohn et le syndrome de Sjögren. Le système immunitaire, qui réagit de façon excessive, se met à mal fonctionner et s’attaque aux cellules et aux tissus sains de l’organisme plutôt que de combattre les menaces extérieures. Lorsque la maladie auto-immune cible un organe vital ou plus, la vie du patient est menacée. Dans tous les cas, toutefois, les patients souffrent de divers symptômes à l’intensité variable. La cause de la maladie est inconnue, et à ce jour, il n’existe aucun remède. Il faut apprendre à vivre avec la maladie et malgré elle. Conséquences? On prend des tonnes de médicaments, on consulte beaucoup de médecins et on nage dans la confusion.

Où intervient le gouvernement fédéral?

Je reconnais qu’il est difficile pour la plupart des Canadiens de démêler ce qui relève du provincial et du fédéral en matière de soins de santé.

En fait, chaque province doit légiférer pour établir son propre régime de soins de santé et l’appliquer. En conséquence, les régimes provinciaux ont tous été institués à divers moments, sont administrés et fonctionnent différemment et sont très différents l’un de l’autre puisque chaque province connaît ses propres contraintes démographiques et géographiques. 

Le rôle du gouvernement fédéral est d’exercer un leadership et d’établir les objectifs globaux pour instaurer des pratiques exemplaires partout au pays. Il doit également adopter des mesures législatives concernant la santé de certains groupes relevant de sa compétence, notamment les Premières Nations vivant dans des réserves, les Inuits, les membres de la Gendarmerie royale du Canada et des Forces canadiennes ainsi que les détenus dans des pénitenciers fédéraux, notamment, et leur fournir des soins. Comme il est responsable du financement, il fournit des modèles de financement permanent et gère les relations avec les provinces selon les fonds offerts et les conditions dont ils sont assortis.

Comme le système de soins de santé du Canada a été créé de façon progressive et non uniforme, il gagnerait à être revu et amélioré. Par exemple, la plupart des experts conviennent qu’il est indispensable d’élargir l’accès aux soins de santé primaires partout au pays pour réduire les temps d’attente et faciliter l’accès dans les localités éloignées et mal desservies. Il serait également bénéfique pour les Canadiens de normaliser le système de soins de santé en fonction des pratiques exemplaires. De plus, grâce aux énormes progrès technologiques, les dossiers électroniques à jour des patients pourraient être accessibles aux prestataires de soins de santé, et vraisemblablement aux patients eux-mêmes, ce qui amènerait les patients à jouer un rôle actif dans leur traitement. Il est démontré que la participation des patients à leur plan thérapeutique a des effets très positifs : elle accroît la transparence, la sensibilisation et l’adhésion au traitement, bref, elle donne de meilleurs résultats. Et les résultats se traduisent par des gains d’efficience.

Dans un monde idéal, on pourrait même envisager un régime de soins de santé axé sur les patients, où les hôpitaux auraient certes leur raison d’être, mais où les cliniques de proximité auraient accès aux dossiers électroniques des patients, prodigueraient les soins de santé primaires et prendraient en charge les malades externes, et où des professionnels de la santé de tous les domaines fourniraient sur place des soins multidisciplinaires, allant des pratiques médicales occidentales traditionnelles à d’autres formes de traitement complémentaires pour mieux prendre en charge le patient.

Sans vouloir simplifier à l’excès une situation extrêmement complexe où interviennent deux ordres de gouvernement, je proposerais simplement au gouvernement fédéral d’exercer un rôle de leadership dans la création, le financement et l’établissement de systèmes de soins de santé uniformes, intégrés et globaux partout au Canada, garantissant ainsi la prestation de services de soins de santé non seulement aux populations qui relèvent de sa compétence, mais également aux patients mal desservis par les régimes provinciaux. Les cliniques de proximité devraient être à la fois intégrées et globales.

L’objectif d’un régime de soins de santé intégré est principalement l’efficience. Les prestataires de soins, qu’il s’agisse du personnel de soutien, des infirmières, des médecins ou des spécialistes, travaillent en équipe et communiquent. Chaque membre de l’équipe prodigue des soins selon son champ de compétence en travaillant en collaboration et le plus efficacement possible. En gros, il s’agirait d’un « guichet unique » pour le patient. L’avantage pour les membres de l’équipe de soins est qu’ils ont des rôles clairement définis et qu’ils peuvent fournir uniquement les soins nécessaires, sachant que le patient bénéficiera d’un plan de traitement complet.

Un régime de soins global, quant à lui, repose principalement sur un plan de traitement complet. Au cours des dernières années, on a beaucoup appris sur les bienfaits des médecines parallèles. Je me souviens d’une époque où les patients devaient choisir entre un plan de traitement traditionnel ou parallèle, intégrant par exemple la naturopathie, l’ostéopathie, la médecine traditionnelle autochtone et la médecine chinoise ancienne. On sait maintenant que les méthodes des médecines parallèles peuvent être complémentaires à un plan de traitement. La plupart des patients, si on leur donnait le choix, voudraient avoir accès à l’ensemble des méthodes thérapeutiques pour soigner leurs symptômes tout en essayant de trouver la cause profonde de leurs maux et de s’y attaquer. Mieux encore, on pourrait faire davantage grâce à la médecine préventive pour traiter les maladies, voire empêcher complètement leur apparition. 

En tant que gardiens des fonds publics, le gouvernement fédéral pourrait créer un modèle de soins de santé axé sur la population, intégré et global, ce ne serait pas une mauvaise stratégie nationale sur les soins de santé à mettre de l’avant à l’approche des élections.


Avis aux lecteurs : L’honorable Josée Forest-Niesing est décédée le 20 novembre 2021. Apprenez-en davantage sur son travail au Parlement.

Cet article a été publié le 4 février 2019 dans le journal The Hill Times (en anglais seulement).

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