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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

1re Session, 39e Législature,
Volume 143, Numéro 76

Le mercredi 28 février 2007
L'honorable Noël A. Kinsella, Président


LE SÉNAT

Le mercredi 28 février 2007

La séance est ouverte à 13 h 30, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

L'UNIVERSITÉ DU MANITOBA

LE CENT TRENTIÈME ANNIVERSAIRE

L'honorable Sharon Carstairs : Honorables sénateurs, je vous invite à vous joindre à moi pour féliciter l'Université du Manitoba, qui célèbre aujourd'hui son 130e anniversaire.

Fondée en 1877, elle fut la première université de l'Ouest canadien. Elle a produit 170 000 diplômés à ce jour, dont 86 boursiers de la Fondation Rhodes. Son campus a été érigé à Fort Garry, dans le secteur sud de Winnipeg, où il occupe un vaste terrain. En raison principalement de sa vocation agricole, le campus comporte encore aujourd'hui de grands espaces verts, contrairement à beaucoup d'autres universités urbaines de notre pays.

L'université offre de nombreux programmes de premier cycle et abrite des facultés de médecine, de droit et de dentisterie. Même si je n'en suis pas une diplômée, j'étais au fait de l'existence, vers la fin des années 1950, de son département d'écologie humaine — devenu plus tard le département d'économie domestique — qui accordait une place particulière à la décoration intérieure.

À l'heure actuelle, l'université compte plus de 35 000 étudiants, dont 2 661 étudiants étrangers. Le programme Access revêt une importance particulière pour moi. Il s'agit d'un programme voué à l'accessibilité et à la réussite scolaire qui est principalement destiné aux étudiants autochtones. Il aide les étudiants autochtones à surmonter leurs difficultés financières, scolaires et personnelles.

Je vous invite à vous joindre à moi pour transmettre à cette grande université vos félicitations ainsi que vos meilleurs vœux de succès pour l'avenir.

[Plus tard]

L'honorable Mira Spivak : Honorables sénateurs, dans les années 1950, les billets canadiens de un dollar ont porté un certain temps la signature de deux diplômés de l'Université du Manitoba qui ont été boursiers de la fondation Rhodes et qui sont revenus à Ottawa pour servir leur pays avec intelligence et conviction. L'un de ces hommes était Robert Beattie, premier sous-gouverneur de la Banque du Canada, et l'autre, James Coyne, gouverneur de la Banque du Canada de 1955 à 1961. Il s'agit de faits peu connus concernant les diplômés de cette université qui célèbre aujourd'hui son 130e anniversaire.

Certains hauts faits d'autres diplômés sont notoires. D'ailleurs, les noms de plusieurs de ces diplômés nous sont familiers : Mitchell Sharp, Edward Schreyer, Lloyd Axworthy, Brian Dickson, Bernard Ostry, Marshall McLuhan, Israel Asper, John Hirsch, Monty Hall et Phil Fontaine. Cette université remarquable des Prairies, de taille plutôt modeste, a donné à ces diplômés des bases intellectuelles et morales qui les ont aidés à façonner le tissu politique, juridique, artistique, commercial et intellectuel de notre pays pour plusieurs générations. L'Université du Manitoba est mon alma mater et c'est également l'alma mater d'autres sénateurs.

Aujourd'hui, elle accueille plus de 35 000 étudiants inscrits à des programmes menant à un grade ou à des programmes d'éducation permanente. Elle offre aussi un programme bien connu qui vise à aider les étudiants d'origine autochtone ou autre devant surmonter des difficultés financières, scolaires ou personnelles à s'adapter à la vie universitaire. Il ne fait aucun doute que cet établissement aide à forger le caractère des jeunes qui façonneront notre pays dans les années à venir.

Au nom du Sénat, je remercie l'université pour ses anciens diplômés, je félicite les professeurs, l'administration et les étudiants actuels qui célèbrent les 130 ans de l'établissement et, bien sûr, je transmets à tous nos meilleurs vœux pour de nombreuses autres années de succès.

LES PROGRAMMES DE TRAITEMENT DE LA TOXICOMANIE BASÉS SUR L'ABSTINENCE

L'honorable Gerry St. Germain : Honorables sénateurs, la criminalité, le désordre et la maladie associés à la toxicomanie affligent les habitants de Vancouver d'un terrible sentiment de désespoir, de colère, de confusion et de doute. Les habitants de Vancouver sont à la recherche de solutions. Personne ne met en doute la complexité du problème. Les toxicomanes sont des personnes qui n'ont plus de dignité humaine. Beaucoup souffrent également de maladie mentale et des effets d'autres abus de la société.

Jusqu'ici, notre réponse ne leur a été d'aucune utilité. Elle a été insatisfaisante, mal ciblée et dénuée de compassion. Une ville prospère, moderne et magnifique comme Vancouver ne peut plus tourner le dos aux victimes de toxicomanie. Nous ne pouvons plus éliminer tout un quartier en isolant des gens dans un secteur et en espérant que le problème sera invisible pour la plupart des citoyens. Une nouvelle stratégie s'impose de toute urgence.

Le gouvernement fédéral peut jouer un nouveau rôle en mettant en œuvre une stratégie qui s'attaque au problème de Vancouver, mais qui est également cohérente dans son approche face au problème dans tout le pays. Une stratégie doit viser son objectif ultime : une société exempte des dommages associés à la toxicomanie. La réalisation de cet objectif doit supposer une approche complexe et à multiples facettes.

Ces dernières années, d'aucuns ont préconisé une approche reposant sur quatre piliers et alliant l'atténuation des dommages à des stratégies plus traditionnelles de prévention, de traitement et d'application de la loi. Je ne vais pas faire valoir le bien-fondé de chacun de ces quatre piliers. Il suffit de dire que l'objectif ultime est le traitement efficace d'un toxicomane et, une fois qu'il est entièrement rétabli, l'abstinence améliore son style de vie et élimine les dommages de la maladie sur le plan humain.

Étant donné ce genre de logique et de raisonnement pratique, honorables sénateurs, comment peut-on appuyer une stratégie antidrogue qui préconise une substitution par des drogues légales en tant que prétendu traitement de la toxicomanie? La réponse proposée, soit la « Transformation intérieure », au problème répandu de la consommation de drogue à Vancouver est, au pire, mal pensée et fondée sur des recherches non valables, et à tout le moins, une proposition hasardeuse. Ce programme de substitution de drogue favorise davantage une culture de la drogue, renforçant la notion de consommation socialement acceptable de drogue. En outre, le programme néglige de témoigner de la compassion envers ceux qui souffrent de toxicomanie en rejetant le traitement basé sur l'abstinence comme solution médicale privilégiée.

La proposition « Transformation intérieure » constitue un pas de plus dans une campagne insidieuse pour changer les attitudes culturelles et pour étiqueter les personnes affligées par la toxicomanie comme étant handicapées en permanence et incapables de modifier leur style de vie. Une telle orientation stratégique n'offre aucune compassion, elle permet peu d'espoir et elle représente un risque énorme.

Honorables sénateurs, j'exhorte le ministre de la Santé et le gouvernement fédéral à adopter la Stratégie canadienne antidrogue, qui comprend une aide fédérale accrue dans des programmes de traitement résidentiel basés sur l'abstinence à Vancouver et ailleurs — une stratégie fondée sur l'espoir.

(1335)

[Français]

LA JOURNÉE INTERNATIONALE DE LA FEMME

L'honorable Pierrette Ringuette : Honorables sénateurs, le 8 mars prochain, nous célébrerons la Journée internationale de la femme. Le thème cette année est « La violence faite aux femmes : Agir pour en finir ».

Souvent, lorsqu'on invoque la violence faite aux femmes, nous, au Canada, avons tendance à penser à la situation des femmes vivant dans des pays en développement — ce qui est tout à fait justifiable, compte tenu de leur état de pauvreté continue, parfois dans un régime totalitaire, dictatorial, militaire ou religieux.

Il est certes plus facile de parler des régions du monde où la violence faite aux femmes est tellement plus évidente et médiatisée. Par contre, lorsqu'on regarde la situation de la violence faite aux femmes ici même, au Canada — oui, dans notre propre cour — il faut admettre que des milliers de Canadiennes de tout âge en sont victimes. Non seulement sont-elles victimes de violence physique, elles sont aussi victimes d'autres formes de violence par leur contrepartie masculine.

La discrimination systémique de nos politiques gouvernementales a mené à une certaine violence sociale. Des mesures d'action positive d'embauche, des programmes de garderie et d'aide à l'alphabétisation et même le programme d'assurance-emploi n'ont pas toujours aidé les femmes à sortir de leur situation. La discrimination économique à l'égard de certaines femmes constitue aussi une forme de violence.

Dans notre pays dit riche et développé, l'iniquité salariale pour les Canadiennes continue d'être évidente tant dans le secteur public que dans le secteur privé.

(1340)

Pour nos Canadiennes plus âgées, nos politiques fiscales et notre programme de fonds de pension sont archaïques dans leur conception et dans leur livraison. En somme, nos femmes aînées doivent être séparées de leur conjoint afin de profiter de la justice économique de ces programmes. Quinze pour cent de nos enfants et leurs mères vivent dans une situation de pauvreté au Canada.

À l'âge de 16 ans, 51 p. 100 des femmes au Canada ont déjà été victimes d'au moins un acte de violence physique ou sexuel. En d'autres mots, près de huit millions de Canadiennes ont été des victimes. Vous conviendrez que ce chiffre est alarmant et mérite une attention particulière. Les Canadiennes ont raison de revendiquer des programmes proactifs visant à éliminer la violence sous toutes ses formes.

Rétablissons le Conseil canadien pour le statut de la femme afin de garder les dossiers de la condition féminine dans la fenêtre gouvernementale!

Restaurons le programme d'alphabétisation afin d'outiller des milliers de Canadiennes pour un avenir meilleur!

Instaurons un vrai système universel de garderies afin que nos jeunes mères puissent s'épanouir et contribuer à l'économie canadienne en toute quiétude!

Réévaluons notre programme d'assurance emploi afin de permettre aux femmes œuvrant dans notre économie saisonnière de sortir du marasme de la pauvreté!

Augmentons l'aide pour l'hébergement des femmes victimes de violence!

C'est maintenant possible puisque le budget du gouvernement fédéral est en situation excédentaire. Le 19 mars prochain, le budget du gouvernement Harper sera déposé. Notre premier ministre fera-t- il un pas vers une justice économique et sociale ou maintiendra-t-il le cap sur son retour vers la dominance de l'extrême droite, justice sociale et économique du chacun pour soi?

Plus de 52 p. 100 des électeurs de ce pays sont des femmes, monsieur Harper, il faut agir afin d'en finir!

L'honorable Maria Chaput : Honorables sénateurs, le 8 mars 2007 marquera le 30e anniversaire de la Journée internationale de la femme.

Cette importante journée nous donne l'occasion de célébrer les progrès accomplis dans la promotion des droits des femmes, mais aussi d'évaluer les difficultés auxquelles elles sont encore confrontées.

(1345)

Célébrons les femmes du Canada, celles d'autrefois et celles d'aujourd'hui, et le rôle essentiel qu'elles ont joué et continuent de jouer pour faire de ce pays l'un des meilleurs au monde.

C'est une célébration des femmes ordinaires qui ont façonné et qui façonnent l'histoire. Les femmes de tous les continents, malgré leurs différences ethniques, linguistiques, culturelles, économiques et politiques, s'unissent pour célébrer cette journée.

Cessons la violence faite aux femmes : « Agir pour en finir » est le thème adopté par le Canada pour la Journée internationale de la femme de 2007.

Nous connaissons tous une personne, une femme qui a souffert la violence. Il existe un désir de la part de tous les Canadiens et Canadiennes de faire une différence dans la vie de ces femmes qui sont confrontées à tant de défis.

Espérons qu'ensemble, nous prendrons les mesures nécessaires pour mettre fin à cette violence afin que toutes les femmes et les filles du monde entier puissent vivre en paix, en toute sécurité, et participer pleinement à la vie de la société.

Sur une note plus personnelle, j'aimerais exprimer ma reconnaissance et mon amitié à toutes les femmes que j'ai croisées, à celles qui ont été sur mon chemin lorsque j'avais besoin d'elles, à celles qui m'ont comprise et appuyée tout au long de ma vie.

Chapeau aux femmes, et aujourd'hui, plus particulièrement, à mes collègues du Sénat.

[Traduction]

LA COUR PÉNALE INTERNATIONALE

L'honorable A. Raynell Andreychuk : Honorables sénateurs, l'Action mondiale des parlementaires, une coalition d'environ 1 300 parlementaires de divers parlements démocratiquement élus, a entrepris une campagne pour la ratification et la mise en œuvre du Statut de Rome de la Cour pénale internationale.

En ma qualité de responsable du programme du droit international et des droits de la personne de l'Action mondiale des parlementaires, je suis heureuse de souligner deux importants développements survenus hier qui permettront d'accroître l'efficacité et l'universalité de la Cour pénale internationale. Tout d'abord, à La Haye, le procureur Luis Moreno-Ocampo a déposé des preuves auprès de la Chambre préliminaire sur les atrocités qui auraient été commises par le sous-ministre de l'Intérieur du Soudan et un chef de la milice janjaweed relativement à 51 chefs d'accusation de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre présumés, incluant des actes de persécution, de torture, de meurtre et de viol commis au Darfour en 2003 et en 2004.

À Tokyo, dans un autre important développement qui constituera un jalon en ce qui a trait à la CPI, le gouvernement du Japon a déposé au Parlement un projet de loi d'adhésion au Statut de Rome de la Cour pénale internationale.

Le sénateur T. Inuzuka, responsable adjoint du programme du droit international et des droits de la personne de l'AMP, qui s'est rendu au Darfour en août 2006, a souligné en ces termes l'importance des documents soumis à la Chambre préliminaire :

[...] en cette période où le gouvernement du Japon a décidé de remplir son engagement de souscrire au Statut de Rome de la Cour pénale internationale en déposant un projet de loi d'adhésion au Comité de la législation de la Diète du Japon. Les membres de la communauté internationale ont la responsabilité collective de protéger la population sans défense du Darfour et doivent dès maintenant appuyer les décisions judiciaires de la Cour.

Le Soudan n'a pas encore souscrit au Statut de Rome de la Cour pénale internationale, bien qu'il l'ait signé le 8 septembre 2000, acceptant ainsi le principe de s'abstenir de s'attaquer à l'objet et au but du traité, tel que prévu dans la Convention de Vienne sur le droit des traités. J'espère que ces mesures permettront de réduire la violence et de mettre un terme à l'impunité au Darfour.

(1350)

LE PROGRAMME POUR L'AUTONOMIE DES ANCIENS COMBATTANTS

L'honorable Catherine S. Callbeck : Honorables sénateurs, le gouvernement fédéral ne devrait pas avoir besoin de se faire rappeler sa responsabilité envers le bien-être de ceux qui ont combattu pour notre liberté et de ceux qui ont appuyé nos anciens combattants au Canada. Le gouvernement fédéral devrait faire en sorte que personne ne soit laissé pour compte. Nous avons une dette sans borne envers nos anciens combattants et leurs êtres chers.

Les honorables sénateurs se souviendront que je suis à l'origine d'une interpellation au Sénat sur les inégalités du Programme pour l'autonomie des anciens combattants, le PAAC, notamment en ce qui a trait à l'admissibilité des conjoints aux prestations aux survivants. Le 7 décembre 2004, j'ai été ravie d'apprendre de la bouche de l'ancienne ministre des Anciens Combattants que le PAAC avait été élargi et que cette inégalité avait été rectifiée.

Malheureusement, il y a toujours des gens qui mériteraient de profiter du PAAC, mais qui en sont incapables. Je parle des conjoints survivants des anciens combattants qui auraient été admissibles mais qui n'ont jamais présenté de demande de participation au PAAC, que ce soit par orgueil ou par réticence à accepter l'aide du gouvernement. Peut-être que le couple s'occupait des travaux ménagers ensemble ou que le conjoint était suffisamment en forme pour effectuer seul les travaux. Les conjoints survivants se rendent compte maintenant qu'ils ont besoin d'aide pour les travaux ménagers et l'entretien extérieur, mais ils n'y sont pas admissibles.

Pendant la campagne électorale, le premier ministre s'était engagé à élargir le Programme pour l'autonomie des anciens combattants afin d'inclure les conjoints de tous les anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale et de la guerre de Corée, peu importe la date du décès de l'ancien combattant. C'était il y a plus d'un an et les veuves et les veufs attendent toujours.

Honorables sénateurs, on nous dit souvent à quel point il est bon pour les personnes âgées de demeurer chez elles, près de leur famille, de leurs amis et de leurs êtres chers. En fin de compte, il est plus rentable d'élargir un programme tel que le PAAC, car aider une personne à vivre de façon autonome coûte beaucoup moins cher que de la placer dans un foyer. Nous devons faire tout ce que nous pouvons pour aider ces femmes et ces hommes à rester chez eux aussi longtemps que possible.

Pendant toute leur vie, les conjoints survivants des anciens combattants ont dû composer avec les répercussions de la carrière militaire qu'avaient choisi de mener leurs partenaires. Ils ont attendu à la maison pendant que leur conjoint était à la guerre. Ils ont appuyé nos anciens combattants et se sont occupés d'eux pendant leurs vieux jours. Ces conjoints ont certainement rendu service au Canada et participé à l'effort de guerre. J'exhorte le gouvernement conservateur à respecter sa promesse électorale et à élargir le Programme pour l'autonomie des anciens combattants.


AFFAIRES COURANTES

RÉGIE INTERNE, BUDGETS ET ADMINISTRATION

PRÉSENTATION DU TREIZIÈME RAPPORT DU COMITÉ

L'honorable George J. Furey, président du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, présente le rapport suivant :

Le mercredi 28 février 2007

Le Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration a l'honneur de présenter son

TREIZIÈME RAPPORT

Votre Comité a approuvé les prévisions budgétaires du Sénat pour l'exercice financier 2007-2008 et recommande leur adoption. Il fait remarquer que le budget proposé totalise 87 030 000 $.

Un document donnant les grandes lignes du budget de 2007-2008 sera envoyé à tous les bureaux des sénateurs.

Respectueusement soumis,

Le président,
GEORGE FUREY

(Le texte du budget figure en annexe aux Journaux du Sénat d'aujourd'hui, p. 1134.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport?

(Sur la motion du sénateur Furey, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

[Français]

PROJET DE LOI MODIFIANT LA LÉGISLATION RÉGISSANT LES INSTITUTIONS FINANCIÈRES

PREMIÈRE LECTURE

Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu des Communes un message accompagné du projet de loi C-37, Loi modifiant la législation régissant les institutions financières et comportant des mesures connexes et corrélatives.

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons- nous ce projet de loi pour la deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Comeau, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'après-demain.)

(1355)

[Traduction]

L'ASSOCIATION PARLEMENTAIRE CANADA-EUROPE

LA RÉUNION DE LA COMMISSION DES QUESTIONS ÉCONOMIQUES ET DU DÉVELOPPEMENT ET LA SESSION DE L'ASSEMBLÉE PARLEMENTAIRE, TENUES DU 18 AU 26 JANVIER 2007—DÉPÔT DU RAPPORT

L'honorable Lorna Milne : Honorables sénateurs, conformément au paragraphe 23(6) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de la délégation parlementaire canadienne de l'Association parlementaire Canada-Europe ayant trait à la réunion de la Commission des questions économiques et du développement, tenue à Londres, du 18 au 19 janvier 2007, et à sa participation à la première partie de la session ordinaire 2007 de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, tenue à Strasbourg, en France, du 22 au 26 janvier 2007.

[Français]

TRANSPORTS ET COMMUNICATIONS

AVIS DE MOTION TENDANT À AUTORISER LE COMITÉ À SIÉGER DURANT L'AJOURNEMENT DU SÉNAT

L'honorable Lise Bacon : Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que, conformément à l'article 95(3)a) du Règlement, le Comité sénatorial permanent des transports et des communications soit autorisé à siéger le mardi 13 mars 2007 et le mercredi 14 mars 2007, même si le Sénat est alors ajourné pour une période de plus d'une semaine.

[Traduction]

AFFAIRES JURIDIQUES ET CONSTITUTIONNELLES

AVIS DE MOTION TENDANT À AUTORISER LE COMITÉ À ÉTUDIER LES CHANGEMENTS APPORTÉS PAR LE GOUVERNEMENT AUX COMITÉS CONSULTATIFS RECOMMANDANT LES CANDIDATS POUR LES NOMINATIONS AU POSTE DE JUGE

L'honorable Serge Joyal : Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles soit chargé de revoir les changements apportés par le gouvernement à la composition et au mandat des comités consultatifs recommandant les candidats pour les nominations au poste de juge, de manière à déterminer leur impact sur le principe de l'indépendance judiciaire et de l'impartialité, et la manière par laquelle ce principe constitutionnel devrait être protégé dans le processus des nominations; et

Que le Comité soumette au Sénat son rapport à ce sujet au plus tard le 30 octobre 2007.


[Français]

PÉRIODE DES QUESTIONS

LA JUSTICE

LA LOI ANTITERRORISTE—L'EXAMEN DES RECOMMANDATIONS

L'honorable Céline Hervieux-Payette (leader de l'opposition) : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Dans la foulée de l'examen du renouvellement des articles controversés de la Loi antiterroriste et du vote négatif qui a suivi dans l'autre endroit, et suite au dépôt des deux rapports des deux Chambres commandant plusieurs mesures qui non seulement garantiraient les droits des citoyens, mais assureraient aussi leur protection, madame le leader du gouvernement peut-elle nous dire si ce gouvernement s'engagera à étudier ces mesures de façon responsable et réfléchie à la lumière des recommandations et surtout des principes d'équilibre retenus par les juges de la Cour suprême du Canada dans une décision unanime rendue le 23 février? Peut-elle nous dire également si le gouvernement s'abstiendra de manipuler l'opinion publique en utilisant de façon grossière les émotions des victimes d'attentat?

[Traduction]

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et secrétaire d'État (Aînés)) : Je remercie l'honorable sénateur de sa question.

Le gouvernement a bien précisé que, compte tenu de la décision de la Cour suprême et des activités d'hier, il étudierait tous les points de ce dossier crucial et important et qu'il considérerait les recommandations sérieuses et valables du Comité sénatorial spécial sur la Loi antiterroriste, présidé par le sénateur Smith. Le gouvernement agira de manière judicieuse et responsable dans l'intérêt des Canadiens et de leur sécurité.

Je m'offusque des commentaires de l'honorable sénateur concernant la manipulation de l'opinion publique, alors qu'en réalité le chef adjoint de l'opposition à l'autre endroit a qualifié les victimes de la tragédie du 11 septembre de spectacle forain. Le nouveau député libéral, Garth Turner, les a même qualifiées d'« accessoires ». Je peux affirmer aux honorables sénateurs que jamais des victimes ne devraient être qualifiées de « spectacle forain » ou d'« accessoire ».

(1400)

[Français]

LE PREMIER MINISTRE

L'ENQUÊTE SUR LA TRAGÉDIE DU VOL D'AIR INDIA—LES PROPOS TENUS À L'ÉGARD DU BEAU-PÈRE DU DÉPUTÉ DE MISSISSAUGA—BRAMPTON-SUD—DEMANDE D'EXCUSES

L'honorable Céline Hervieux-Payette (leader de l'opposition) : Honorables sénateurs, dans la foulée de réflexions sur cette question importante, madame le leader du gouvernement peut-elle s'assurer que son gouvernement cessera d'attaquer la réputation des parlementaires par des allusions insidieuses, fallacieuses, personnelles ou par association avec leur famille?

Son gouvernement va-t-il également recommander au premier ministre de présenter des excuses pour tous ces actes qui portent atteinte à la réputation de nos institutions parlementaires?

[Traduction]

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et secrétaire d'État (Aînés)) : Honorables sénateurs, j'ai déjà répondu à ces questions. Les observations auxquelles madame le sénateur fait allusion se rapportent à un article publié dans le Vancouver Sun sous la plume de Kim Bolan, spécialiste de l'enquête sur l'attentat contre un appareil d'Air India. Comme on l'a dit et proposé, si certains ont des réserves à propos de cet article, ils devraient s'adresser à la direction du Vancouver Sun.

LES FINANCES

LA LOI SUR LA FAILLITE ET L'INSOLVABILITÉ—LA PRÉSENTATION D'UN PROJET DE LOI MODIFICATIF

L'honorable Yoine Goldstein : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement. Nous nous rappelons tous que, dans les jours ultimes de la dernière session, le gouvernement a présenté le projet de loi C-55, qui portait sur la faillite et l'insolvabilité et proposait des modifications de la loi en la matière. À ce moment-là, le projet de loi n'a pas été amendé comme il aurait dû l'être. Les honorables sénateurs se souviendront également que nous avons accepté d'adopter le projet de loi, sous réserve que le gouvernement s'engage à ne pas le promulguer tant que le Comité sénatorial des banques ne l'aurait pas étudié et n'aurait pas apporté les modifications voulues.

Nous attendons depuis un certain temps la mesure modificative. En octobre, j'ai demandé à madame le leader du gouvernement au Sénat quand le projet de loi serait présenté, et elle m'a répondu en privé qu'elle espérait et prévoyait que ce serait avant la fin de l'année. La parole du leader a été respectée, car une motion des voies et moyens a été présentée à l'autre endroit, mais elle n'a jamais été déposée, car le gouvernement n'a jamais pu obtenir le consentement unanime des autres partis.

Il y a des centaines de milliers d'intéressés, des centaines de milliers de personnes chaque année qui font faillite. Des milliers d'entreprises d'un bout à l'autre du Canada font l'objet d'une restructuration et des milliers de travailleurs perdent leur emploi et ne peuvent profiter des dispositions sur la protection des salaires que le projet de loi C-55 contenait. Il est urgent de présenter ce projet de loi. Le texte existe bien, car j'en ai un exemplaire. Rien ne justifie qu'il ne soit pas étudié à l'autre endroit et renvoyé au Sénat pour que nous puissions l'examiner dans l'intérêt de tous les Canadiens. J'avoue qu'il n'est pas aussi attrayant que peuvent l'être d'autres lois que le gouvernement préfère présenter, mais il est de la plus haute importance pour des centaines de milliers de Canadiens.

Voici ma question : quand ce projet de loi sera-t-il présenté à la Chambre basse et sera-t-il renvoyé ici?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et secrétaire d'État (Aînés)) : Je remercie le sénateur de sa question. Il a tout à fait raison. Il a souvent abordé le sujet avec moi à l'automne. Mon collègue, le sénateur Angus, me rappelle régulièrement le problème. Il l'a encore fait hier.

La motion a été déposée à l'autre endroit et, comme le sénateur l'a fait remarquer, il n'y a pas eu accord. C'est une question que je continue de soulever, mais on dirait que c'est comme essayer de débrouiller des œufs brouillés. Il s'agit d'une loi difficile. Il y a même des gens du secteur privé qui estiment qu'il vaudrait peut-être mieux tout abandonner et repartir à zéro.

J'espère que le sénateur acceptera ma réponse comme le signe que je prends sa question très au sérieux. Je comprends sa préoccupation, tout comme mon collègue, le sénateur Angus. Je suis au courant de l'engagement pris de renvoyer à nouveau le projet de loi devant le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce. Tout ce que je peux promettre à l'honorable sénateur, c'est que j'essaierai encore et encore.

(1405)

Le sénateur Goldstein : Honorables sénateurs, je voulais savoir à quel moment le projet de loi serait déposé. Aucun consentement unanime n'était nécessaire pour déposer le projet de loi. Le gouvernement a décidé d'essayer d'obtenir ce consentement, et ne l'a pas obtenu, mais le projet de loi ne nécessite pas le consentement unanime.

Ma question reste donc la même : quand le projet de loi sera-t-il déposé?

Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, cette question est sérieuse et directe. Je la prends donc très au sérieux. Je sais que mon collègue, le sénateur Angus, veut également avoir une réponse à ce sujet. Je vais encore une fois aller aux renseignements pour essayer de répondre à cette question précise et directe.

Le sénateur Goldstein : Au sujet de la même question, puis-je demander au leader du gouvernement au Sénat de prendre note de la question pour être en mesure, lorsque nous serons rentrés à la mi- mars, de nous donner la date et l'heure précises auxquelles le projet de loi sera déposé?

Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, je prends note de la question, mais sans tenir compte des propos exacts du sénateur. Je ne peux pas m'engager absolument à donner une date. J'espère pouvoir le faire. Je prends donc note de la question et ferai tous les efforts possibles pour avoir une réponse à notre retour, dans la semaine du 19 mars.

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein : Je voudrais poser une question supplémentaire. Madame le leader du gouvernement se souviendra sans doute que, lorsque nous occupions les banquettes ministérielles, nous avions été pressés de déposer cette mesure législative. Lorsqu'elle a été renvoyée à notre comité dans les derniers jours de la législature précédente, le comité a jugé à l'unanimité que le projet de loi avait sérieusement besoin d'être remis en état. Comme nous ne pouvions pas le faire dans la période dont nous disposions, nous avions reçu ce que je considère comme un engagement solennel de la part du gouvernement précédent, comme de la part de l'opposition, de présenter de nouveau cette mesure législative, dans sa forme modifiée, pour que le Parlement la réexamine avant la fin juin, je crois, date prévue de proclamation.

J'espère que le leader du gouvernement gardera à l'esprit ce qu'a dit le sénateur Goldstein et ce que pensait le Comité des banques. C'est une mesure législative non partisane. Le comité a jugé qu'elle jouait un rôle important dans l'efficacité et la productivité de notre économie et permettait d'assurer un traitement juste et équitable à ceux qui connaissent le problème de l'insolvabilité.

Cela étant dit, il s'agit d'une mesure législative d'une grande importance. Comme le sénateur Goldstein l'a dit à juste titre, elle est invisible parce qu'elle n'attire pas particulièrement l'attention. Elle n'est peut-être pas très attrayante, mais elle est importante.

En gardant à l'esprit l'engagement pris par le parti de madame le ministre, lorsqu'elle était dans l'opposition, engagement repris par notre parti lorsque nous étions au gouvernement, est-ce que le leader veut bien porter la question à l'attention du gouvernement en précisant qu'il retarde sans motif valable un important projet de loi?

Le sénateur LeBreton : Je remercie l'honorable sénateur de sa question. Je ne chercherai pas à déterminer quelles mesures législatives sont attrayantes et lesquelles ne le sont pas. Toutefois, les préoccupations du sénateur sont fondées. Je me souviens bien de l'engagement pris lorsqu'il était du côté du gouvernement. Je me souviens également de la position que nous avions adoptée, dans l'opposition. Ce qu'a dit le sénateur est exact et sérieux. Je ferai part au ministère du point de vue énergique qu'il a exprimé.

Comme je l'ai dit au sénateur Goldstein, il peut être frustrant d'essayer de démêler cet écheveau, mais ce projet de loi complexe exige un second regard sérieux. Cela ne veut pas dire qu'il existe une raison particulière de le retarder.

(1410)

L'AGRICULTURE ET L'AGROALIMENTAIRE

LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ—LE RÉFÉRENDUM SUR LA COMMERCIALISATION DE L'ORGE

L'honorable Lorna Milne : Honorables sénateurs, j'ai interrogé à maintes reprises le leader du gouvernement au Sénat au sujet du référendum sur la commercialisation de l'orge, actuellement en cours dans l'Ouest canadien. J'ai posé des questions sur le libellé curieux utilisé dans le référendum, et nous avons discuté du retard causé par une erreur que le gouvernement a commise en demandant aux agriculteurs d'inscrire à la fois le volume et la superficie de l'orge vendue au cours des cinq dernières années, afin de valider les bulletins de vote.

Je voudrais maintenant poser une question simple et plus sérieuse au leader : pourquoi ne se sert-on pas dans ce référendum du scrutin secret?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et secrétaire d'État (Aînés)) : Je remercie madame le sénateur de sa question. Dans ce référendum, le vote est mené en toute indépendance par l'éminent cabinet KPMG. Quiconque a déjà eu affaire à KPMG n'envisagera même pas de contester son intégrité. Je me garderai bien de mettre en doute les méthodes de KPMG. Il est évident que les responsables de ce cabinet prendront toutes les mesures nécessaires pour assurer la confidentialité du vote. Nous connaîtrons les résultats quand tout le monde aura voté.

Le sénateur Milne : Honorables sénateurs, je remercie madame le leader de sa réponse. Je suis persuadée de sa sincérité. Toutefois, a-t- elle entendu parler du dernier groupe de protestataires de l'Ouest? Il s'agit d'une nouvelle organisation de céréaliculteurs appelée Real Voice for Choice. C'est un groupe agricole non partisan qui s'est formé par réaction à l'action du gouvernement conservateur, qui a résolument entrepris d'affaiblir la Commission canadienne du blé.

Je demande encore une fois au leader : quel motif possible peut-il y avoir aux numéros qui identifient les bulletins de vote, à part de permettre au gouvernement de savoir qui a fait ou n'a pas fait preuve de rectitude en votant?

Est-ce que madame le leader peut expliquer aux sénateurs à quoi peut autrement servir la numérotation des bulletins de vote remis aux producteurs qui participent au référendum?

Les agriculteurs qui se méfient du gouvernement se proposent de ne pas voter par crainte de représailles. Le gouvernement pourrait retarder par exemple leurs paiements de stabilisation du revenu agricole de l'année prochaine s'ils ne votaient pas selon ses vœux.

Les Canadiens ne devraient jamais avoir peur d'exprimer leur opinion. Ils ne devraient jamais craindre des représailles de la part de leur propre gouvernement. Pourtant, les producteurs d'orge de l'Ouest ont peur de voter selon leur conscience parce qu'ils se méfient de ce que le gouvernement peut faire en conséquence.

Est-ce que madame le leader ressent une honte quelconque?

Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, c'est vraiment quelque chose de mettre en doute l'intégrité d'une maison aussi réputée que KPMG. Le vote est secret. Aucun représentant du gouvernement ne verra les bulletins ni n'aura accès aux renseignements dont KPMG se sert pour mener le vote.

Comme je l'ai dit, madame le sénateur fait injure aux membres du secteur agricole en disant qu'ils ont peur. Je ne crois pas qu'on puisse dire cela des membres de la communauté agricole. Ce sont des gens intelligents, qui comprennent parfaitement les questions et savent qu'une maison aussi réputée que KPMG ne fait pas circuler des renseignements personnels.

(1415)

Je ne connais pas le nouveau groupe de protestataires dont il a été fait mention, mais j'ai lu quelque part qu'un groupe de ce genre s'était formé sous la direction d'un certain David Orchard.

Le sénateur Oliver : Bonne réponse.

L'honorable Tommy Banks : Honorables sénateurs, je ne connais rien à l'agriculture, mais je me demande si madame le leader a vu le bulletin de vote. Je l'ai vu. Il comprend un numéro et il y a un nom juste à côté. Comment cela peut-il être un bulletin de vote secret? Madame le leader a-t-elle vraiment vu et examiné un bulletin? Ce n'est manifestement pas un bulletin de vote secret. Il contient un numéro et, sur la partie que l'on conserve, il y a un numéro et un nom à côté. Cela ne ressemble pas à un bulletin de vote secret.

Le sénateur LeBreton : Je n'ai pas vu le bulletin de vote. Je sais quelles questions y figurent parce que j'ai dû me renseigner pour répondre à une question posée par madame le sénateur Milne.

Je n'ai pas vu le bulletin de vote. Si l'honorable sénateur en a vu un, c'est évidemment parce qu'un producteur d'orge lui a montré. Je n'ai pas vu le bulletin de vote; cela ne m'intéresse pas. KPMG dirige le processus de manière indépendante et, pour ma part, je n'ai pas l'intention de remettre en question l'intégrité d'une firme aussi réputée que KPMG.

Chaque fois que nous votons à des élections, notre nom apparaît sur une liste d'électeurs numérotée. On nous remet un bulletin de vote. Il y a un numéro et un nom et d'autres renseignements, sinon nous ne pourrions pas voter.

Toutefois, je ne crois pas que l'information que KPMG utilise pour identifier les personnes admissibles à voter — information que la firme garde pour elle — mine le respect de la vie privée des producteurs d'orge. Je suis absolument convaincue que le gouvernement ne s'intéresse qu'aux résultats et que KPMG, peu importe qui lui demande, ne divulguerait jamais les renseignements ayant servi à la distribution des bulletins de vote aux personnes admissibles. Je n'arrive pas à croire que quiconque doute d'une firme comme KPMG, qui jouit d'une très solide réputation. Je ne voudrais pas donner l'impression que cette firme est suspecte, d'une manière ou d'une autre.

Le sénateur Banks : Les Canadiens n'accordent pas leur confiance à KPMG; ils l'accordent au gouvernement du Canada et au processus électoral. Sauf erreur, je crois que la différence notable, c'est que lorsque je déchire le bulletin de vote lors d'élections et que je le mets dans l'urne, il ne comporte plus de numéro. Un numéro est inscrit sur le bulletin de vote qu'on me donne et que je remets au directeur du scrutin ou à l'un de ses agents, et ce dernier raie mon nom de la liste. Le bulletin de vote que je dépose dans l'urne ne porte pas de numéro pour éviter qu'on puisse faire un lien entre le bulletin de vote et moi.

Je crois qu'il serait utile, étant donné qu'on pose à madame le leader des questions sur le caractère secret du scrutin dans le cadre de ce référendum, qu'elle s'intéresse au bulletin de vote.

Le sénateur LeBreton : L'honorable sénateur a raison. Les Canadiens font confiance au gouvernement et s'attendent à ce qu'il mène un processus électoral qui soit équitable. Il est clair que nous sommes en faveur du choix en matière de commercialisation, mais maintenant que la société KPMG a assumé la responsabilité du déroulement du vote, les honorables sénateurs seraient les premiers à bondir si le gouvernement demandait à KPMG de divulguer des renseignements personnels secrets dont ses employés ont besoin pour tenir le vote.

Je crois que les Canadiens font confiance au gouvernement pour administrer un processus équitable; le gouvernement a confié cette responsabilité à KPMG. Le gouvernement fait confiance à KPMG et je crois qu'il en va de même de la population.

(1420)

Le sénateur Milne : J'ai une autre question complémentaire, si vous le permettez. J'aimerais savoir si KPMG a également conçu les questions posées sur le bulletin de vote. Non seulement le bulletin de vote proprement dit n'est pas secret, mais, si cette a société a si bonne réputation, comment diable a-t-elle pu concevoir des questions aussi absolument tendancieuses?

Le sénateur LeBreton : C'est là l'opinion de l'honorable sénateur. J'ai lu les questions. Elles sont très claires et très équitables. La responsabilité de la tenue de ce vote a été confiée à KPMG.

Quant à la question précise de l'honorable sénateur sur l'instance qui a conçu les questions, j'en prends note. Je crois que nous avons déjà discuté de cela. Au bout du compte, ce sont les producteurs d'orge qui exprimeront leur préférence.

LES RESSOURCES HUMAINES ET LE DÉVELOPPEMENT SOCIAL

L'INITIATIVE NATIONALE POUR LES SANS-ABRI—LA SOUS- UTILISATION DU BUDGET

L'honorable Sharon Carstairs : Ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Honorables sénateurs, dans les grandes villes du Canada, à pied ou en voiture, nous côtoyons jour après jour des personnes sans abri. Bon nombre de ces personnes souffrent de maladie mentale, d'autres de problèmes liés aux drogues, et d'autres n'ont tout simplement pas réussi à s'intégrer à notre société. Elles errent dans nos rues. Elles manquent de nourriture et trop souvent de logement, et les services médicaux dont elles disposent sont inadéquats ou inexistants.

Madame le leader du gouvernement au Sénat peut-elle nous expliquer pourquoi, en dépit de cette tragédie qui se déroule tous les jours devant nos yeux, les administrateurs de l'initiative pour les sans-abri du gouvernement fédéral n'arriveront pas à dépenser 70 millions de dollars du budget dont ils disposent?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et secrétaire d'État (Aînés)) : Je remercie l'honorable sénateur de la question. J'en prends bonne note.

Le sénateur Carstairs : Le leader du gouvernement au Sénat voudra bien ajouter la question suivante : combien de repas aurait-on pu servir à ceux qui ont faim, combien de nuitées aurait-on pu offrir dans des lieux d'hébergement adéquats, et combien d'interventions médicales aurait-on pu faire si on avait dépensé ces 70 millions de dollars?

Le sénateur LeBreton : Je vais ajouter cela à la question.

LA SÉCURITÉ PUBLIQUE

L'AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS—L'ARMEMENT DES GARDES-FRONTIÈRES

L'honorable Daniel Hays : Ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Au cours des derniers jours, à savoir le 22 et le 27 février, j'ai lu dans le Sun d'Ottawa des articles concernant l'armement les gardes-frontières. Si j'ai bien lu, le gouvernement engage un milliard de dollars pour armer 5 000 gardes-frontières.

Selon les articles, entre 25 et 30 p. 100 des gardes-frontières ne veulent même pas porter d'arme à feu au travail. Non seulement il sera coûteux d'armer les gardes-frontières mais, étant donné qu'ils seront tous armés, il ne sera pas possible d'embaucher des étudiants durant les mois d'été, et de donner ainsi l'occasion à ces étudiants de travailler, tout en réduisant les coûts à l'avantage des Canadiens.

Madame le leader du gouvernement au Sénat peut-elle nous informer au sujet de cette décision d'armer tous les 5 000 gardes- frontières au coût d'un milliard de dollars, décision qui, selon les articles dont j'ai parlé, est en voie de révision, à savoir que l'on pense l'abandonner ou l'appliquer en partie seulement, de manière à réduire, au minimum si possible, le coût effarant qu'elle implique?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement et secrétaire d'État (Aînés)) : Je remercie l'honorable sénateur de sa question. La décision d'armer les gardes-frontières a été prise en août dernier et annoncée à ce moment-là. Elle a été prise à la suite de consultations poussées avec les personnes qui travaillent le long des frontières.

(1425)

En fait, il y a sept ou huit ans, j'ai fait partie d'un comité devant lequel comparaissaient des gardes-frontières. Déjà, ils demandaient d'être armés en invoquant comme raisons les contrebandiers et les gens armés qui traversaient la frontière.

En août 2007, jusqu'à 100 agents auront été formés. Pour répondre à la question relative aux emplois d'été, le marché de l'emploi semble très favorable aux étudiants. En fait, il y a une pénurie de main-d'œuvre dans tout le pays. Dans certaines régions du pays, le programme d'emplois d'été est même à court d'étudiants.

Par conséquent, je ne pense pas que les étudiants se retrouveront sans emploi à la suite de la décision d'armer nos gardes-frontières.

Le sénateur Hays : Je ne pense pas que les 1 300 étudiants qui sont normalement employés à la frontière se réjouiront de cette réponse.

Je me pose une autre question au sujet de ces articles. Il semble que la principale raison invoquée pour armer nos gardes-frontières est le danger qu'ils courent lorsqu'une personne potentiellement armée se présente à la frontière. Selon l'article, au cours de l'année dernière, les gardes-frontières ont abandonné leurs postes en bloc à 44 reprises, sous prétexte que, non armés, ils étaient forcés à travailler dans des conditions dangereuses non conformes au code du travail.

Après enquête, aucune de ces situations ne représentait en fait un danger pour les gardes-frontières.

Madame le leader pourrait-elle confirmer que c'était bien le cas?

Le sénateur LeBreton : Évidemment, si les gardes-frontières abandonnent leurs postes, c'est parce que, sur le coup, ils estiment avoir une bonne raison de le faire, même s'il est démontré plus tard que cela n'était pas justifié.

À l'origine, il s'agissait essentiellement de protéger nos frontières et d'empêcher l'importation dans le pays, à travers nos frontières, de drogues et d'armes à feu. Les gardes-frontières demandent en fait le droit de porter une arme depuis très longtemps.

Au sujet des emplois d'été pour les étudiants, à une certaine époque, les emplois de gardes-frontières étaient peut-être la seule option qui s'offrait à eux. Il y a maintenant de nombreuses possibilités d'emploi ailleurs qu'à la frontière.

Le sénateur Hays : L'article signale que le syndicat des gardes- frontières a exprimé de sérieuses préoccupations au sujet des étudiants qui sont embauchés pour l'été et qu'il préférerait qu'aucun étudiant ne soit embauché.

Ma dernière question complémentaire porte sur les deux mêmes articles. Les articles font mention d'une note de service destinée au ministre Stockwell Day. Si on fournit des armes courtes aux agents des services frontaliers, d'autres agents de la paix, dont les 450 gardes de parc, les 6 800 agents de correction et les 1 700 agents de libération conditionnelle, vont également demander de telles armes. Cela veut dire qu'il faudrait des armes courtes pour 10 000 personnes, ce qui représente une dépense additionnelle de 2 milliards de dollars. Madame le leader du gouvernement peut-elle nous dire si de telles dépenses sont prévues?

Le sénateur LeBreton : En ce qui concerne cet article, je précise qu'il s'agissait du texte d'un chroniqueur de la chaîne de journaux Sun. Les chroniqueurs ont droit à leur opinion. C'est précisément pour cela qu'ils font ce métier. Les chroniques ne sont pas nécessairement basées sur des faits. Il arrive souvent qu'elles soient basées sur des rumeurs. Par conséquent, je n'entrerai pas dans un débat sur ce chroniqueur en particulier et la justesse de ses propos.

(1430)

Pour en revenir à la question des emplois pour les étudiants à la frontière et au sujet d'un plan particulier à leur intention cette année, je vais demander des précisions et je vais voir s'il y a d'autres plans pour les étudiants désireux de travailler à la frontière.


[Français]

ORDRE DU JOUR

LE CODE CRIMINEL

PROJET DE LOI MODIFICATIF—DEUXIÈME LECTURE

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Eyton, appuyée par l'honorable sénateur Meighen, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-26, Loi modifiant le Code criminel (taux d'intérêt criminel).

L'honorable Céline Hervieux-Payette (leader de l'opposition) : Honorables sénateurs, dans une vie antérieure, ayant siégé pendant plusieurs années au Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, j'ai eu l'occasion d'étudier en profondeur avec une ex-collègue, madame le sénateur Plamondon, les problèmes que peuvent éprouver les Canadiens ayant des difficultés financières suite à des prêts à des taux usuraires.

Comme on le sait, le Sénat a adopté le projet de loi S-9 le 28 juin 2005. Ce projet de loi s'attaquait directement à l'article 347 du Code criminel et traitait de la question du taux d'intérêt usuraire. Nous avons étudié le projet de loi en profondeur et entendu plusieurs témoins y compris des institutions financières, des groupes représentant les consommateurs ainsi que certains consommateurs.

Le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce devra accorder le travail qui a déjà été fait avec le projet de loi C-26.

Le projet de loi C-26 du gouvernement va permettre un taux d'intérêt de 60 p. 100, que je considère totalement anormal. Ce projet de loi est tellement mince qu'il ne permettra pas d'éviter des abus auprès des personnes démunies qui, pour des raisons fondamentales de survie, doivent emprunter des montants souvent très peu élevés mais dont le taux d'intérêt, avec les frais afférents, peut atteindre jusqu'à 150 p. 100.

La définition des termes « taux d'intérêt », la nature de la protection et la conciliation des travaux de notre comité lors de l'étude du projet de loi C-26 nécessiteront beaucoup de travail pour que le consommateur soit protégé de ce fameux taux d'intérêt de 60 p. 100.

Honorables sénateurs, la province de Québec a adopté un projet de loi où le taux d'intérêt, qui est censé ne pas être abusif et qui est déjà très élevé, se limite à 35 p. 100. Malheureusement, les autres provinces n'ont pas légiféré en ce sens et le projet de loi actuel invite les provinces à le faire.

Je trouve intéressant et en même temps décourageant que les citoyens canadiens ne soient pas protégés de la même façon dans toutes les provinces. Les personnes pauvres d'autres provinces où cette législation n'existe pas ne seront pas protégées contre les abus de ces institutions qui font beaucoup d'argent sur le dos des petites gens.

Je rappelle aux honorables sénateurs qu'un travail important a déjà été fait par le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce et qu'aujourd'hui, ce comité va se pencher sur le projet de loi C-26. Je tenais quand même, après avoir assisté à des dizaines d'heures d'audience lors de l'étude du projet de loi S-19, à m'assurer que l'on puisse réconcilier et surtout protéger les petites gens.

Son Honneur la Présidente intérimaire : Il est proposé que ce projet de loi soit lu pour la deuxième fois. Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois.)

RENVOI AU COMITÉ

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Comeau, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent des banques et du commerce.)

LE BUDGET DES DÉPENSES DE 2007-2008

ADOPTION DE LA MOTION TENDANT À AUTORISER LE COMITÉ DES FINANCES NATIONALES À ÉTUDIER LE BUDGET DES DÉPENSES

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement), conformément à l'avis du 27 février 2007, propose :

Que le Comité sénatorial permanent des finances nationales soit autorisé à étudier, afin d'en faire rapport, les dépenses projetées dans le Budget des dépenses pour l'exercice se terminant le 31 mars 2008, à l'exception du crédit 10 du Parlement.

(La motion est adoptée.)

ADOPTION DE LA MOTION TENDANT À RENVOYER LE CRÉDIT 10 DU PARLEMENT AU COMITÉ MIXTE PERMANENT DE LA BIBLIOTHÈQUE DU PARLEMENT

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement), conformément à l'avis du 27 février 2007, propose :

Que le Comité mixte permanent de la Bibliothèque du Parlement, dès que le comité sera formé, le cas échéant, soit autorisé à étudier les dépenses projetées au crédit 10 du Parlement contenues dans le Budget des dépenses pour l'exercice se terminant le 31 mars 2008; et

Qu'un message soit transmis à la Chambre des communes pour l'en informer.

(La motion est adoptée.)

LE CODE CRIMINEL

MOTION EN APPLICATION DU PARAGRAPHE 83.32(1)—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur LeBreton, C.P., appuyée par l'honorable sénateur Di Nino,

1. Que, en application du paragraphe 83.32(1) du Code criminel, les articles 83.28, 83.29 et 83.3 de cette loi soient prorogés pour une durée de trois ans à compter de la date à laquelle la présente résolution est adoptée par la deuxième chambre.

2. Que la présente résolution entre en vigueur à la date de son adoption par la deuxième chambre.

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Reporté.

[Traduction]

L'honorable Lowell Murray : Honorables sénateurs, ma curiosité est trop forte et j'estime qu'il y a en l'occurrence une question de procédure qu'il faut éclaircir. Est-ce que je me trompe en disant qu'il s'agit de la même résolution qui a été rejetée à l'autre endroit hier ou avant-hier? Où en est cette résolution? Il n'est pas possible, à ma connaissance, de la modifier. La forme que peut prendre une résolution est prescrite par la loi. La résolution a été rejetée à la Chambre des communes. Le gouvernement est-il en train de demander la permission de la retirer du Feuilleton du Sénat?

Le sénateur Comeau : Oui, c'est la motion qui a été rejetée à l'autre endroit hier, ce qui fait que, si nous en discutons au Sénat, c'est en fait assez nouveau. Cela étant dit, c'est une motion intéressante à avoir dans notre Feuilleton et nous pourrions envisager la possibilité de l'examiner plus tard.

Je propose que nous la laissions là afin que nous puissions, qui sait, en discuter à une date ultérieure.

Le sénateur Murray : N'y a-t-il pas une date, un délai au-delà duquel elle devient caduque? Elle deviendra caduque demain, n'est- ce pas?

Le sénateur Comeau : En effet, de sorte que nous avons jusqu'à demain pour l'examiner. Faisons-le demain.

(Sur la motion du sénateur Carstairs, le débat est ajourné.)

(1440)

LA LOI SUR LES RELATIONS DE TRAVAIL AU PARLEMENT

PROJET DE LOI MODIFICATIF—DEUXIÈME LECTURE—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Joyal, C.P., appuyé par l'honorable sénateur Robichaud, C.P., tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-219, Loi modifiant la Loi sur les relations de travail au Parlement. —(L'honorable sénateur Comeau)

L'honorable Serge Joyal : Honorables sénateurs, j'ai déjà pris la parole au sujet de cette motion. Elle est inscrite au nom du sénateur Comeau depuis 14 jours. J'aimerais savoir si l'honorable sénateur accepterait que nous reprenions le compte à zéro.

Le sujet est lié à une autre motion, qui se trouve un peu plus loin dans le Feuilleton, soit au no 104, à la page 10, et qui est inscrite au nom du sénateur Andreychuk. Les deux questions sont liées et j'ai l'intention de prendre la parole pour appuyer la motion du sénateur Andreychuk cet après-midi. Je voulais m'assurer que le projet de loi n'allait pas être abandonné parce que le délai est écoulé.

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : J'apprécie ce geste. J'aurais dû me noter un rappel pour le quatorzième jour. J'ai discuté de cette question avec madame le sénateur Andreychuk. Compte tenu de l'importance de ce projet de loi, nous ne voulons pas qu'il soit rayé du Feuilleton.

Or, je sais que le sénateur Andreychuk souhaite prendre la parole à ce sujet à un autre moment. Je vais donc demander l'ajournement au nom du sénateur Andreychuk, et nous allons pouvoir étudier cette importante question.

Son Honneur le Président : Je veux m'assurer d'avoir bien compris. Le sénateur Comeau vient de prendre la parole sur cette question, et il propose d'ajourner le débat au nom du sénateur Andreychuk.

Étant donné que madame le sénateur Andreychuk est présente actuellement, c'est elle qui devrait présenter la motion d'ajournement elle-même.

(Sur la motion du sénateur Andreychuk, le débat est ajourné.)

[Français]

PROJET DE LOI DE MISE EN ŒUVRE DU PROTOCOLE DE KYOTO

DEUXIÈME LECTURE—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Mitchell, appuyé par l'honorable sénateur Trenholme Counsell, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C- 288, Loi visant à assurer le respect des engagements du Canada en matière de changements climatiques en vertu du Protocole de Kyoto.

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'ai discuté de ce projet de loi avec mes collègues de l'autre côté. L'ajournement de ce projet de loi est inscrit au nom du sénateur Tkachuk. Le paragraphe 37(3) du Règlement du Sénat prévoit que le deuxième orateur se voit accorder une période de 45 minutes. Toutefois, le sénateur Tkachuk n'est pas prêt à prononcer son discours aujourd'hui. Étant donné que madame le sénateur Spivak veut prononcer son discours aujourd'hui, nous ne voulons pas retarder son droit de le faire. Je demande la permission aux honorables sénateurs de réserver le temps de parole de 45 minutes au nom du sénateur Tkachuk.

[Traduction]

L'honorable Claudette Tardif (leader adjoint de l'opposition) : Nous acceptons que, si un sénateur veut prendre la parole aujourd'hui, il ne soit pas considéré comme le deuxième intervenant, aux termes du paragraphe 37(3) du Règlement du Sénat.

Son Honneur le Président : Est-ce d'accord pour dire que le deuxième intervenant est le sénateur Tkachuk? Il conserve ainsi son temps de parole de 45 minutes, et je crois comprendre qu'un autre sénateur voudrait prendre la parole maintenant.

Des voix : D'accord.

L'honorable Mira Spivak : Je remercie les leaders adjoints du gouvernement et de l'opposition. Comme il se peut que je ne sois pas de retour avant un certain temps, je voudrais prendre la parole aujourd'hui.

Honorables sénateurs, des changements profonds se sont produits chez nous. Sauf dans des cénacles qui se complaisent dans l'ignorance — par exemple, l'Institut Fraser —, il n'y a pas bien des gens qui essaient de nier les acquis scientifiques dans le dossier du réchauffement de la planète. Aujourd'hui, l'argumentation, présentée avec des formulations qui défient parfois l'imagination, vise à dénoncer le Protocole de Kyoto.

Non seulement les objectifs sont irréalistes, prétend-on, mais les conséquences seraient catastrophiques pour l'économie canadienne s'ils étaient atteints. Le traité est présenté comme un rêve à mettre au même rang que la croyance aux fées — et on dit que c'est un suicide politique, de la folie.

On a même avancé que le Protocole de Kyoto était un complot socialiste, malgré un fait un peu gênant, soit que les dirigeants qui ont fait adhérer le Canada à la Convention sur les changements climatiques n'ont guère de crédit dans les milieux socialistes, puisqu'il s'agit de Jean Charest et de Brian Mulroney.

Il n'est pas inutile de préciser qui sont les opposants. D'abord, certains sont des dirigeants d'industrie — dans l'industrie pétrolière, mais il ne s'agit pas de tous les dirigeants de cette industrie, loin de là. Même Exxon a reconnu la réalité des changements climatiques après avoir dépensé des millions de dollars pendant des années pour tenter de nier cette réalité.

Il y a aussi des députés, mais on peut difficilement les blâmer. Le roulement a été rapide. Et puis les journalistes, soudain alertés, essaient de comprendre le dossier en lisant des notes schématiques.

Il y a eu une campagne bien orchestrée et bien financée qui a été lancée par Friends of Science, coalition de donateurs anonymes et de spécialistes des relations publiques dans l'industrie pétrolière. On a fait appel au Science Education Fund albertain pour appuyer la cause de la lutte contre le Protocole de Kyoto. Non qu'il y ait là quoi que ce soit de mal, comme le disait Seinfeld, mais il est bon de ne pas oublier l'existence de ces liens. Nous sommes en démocratie.

Jusque récemment, la campagne a réussi à influencer l'opinion publique et la politique canadienne sur les changements climatiques et le Protocole de Kyoto. Si la campagne avait échoué, le projet de loi C-288 n'aurait pas été nécessaire. Je ne crois pas qu'il ait été nécessaire, de toute façon. Du reste, comme mon collègue peut le soutenir, il n'est peut-être même pas constitutionnel.

Le gouvernement du Canada n'a d'autre choix que d'honorer ses obligations aux termes du Protocole de Kyoto d'une façon ou d'une autre. Le Canada est lié par ce protocole, et il s'expose à des sanctions s'il ne s'y conforme pas. Le Canada a aussi l'obligation morale, comme les autres pays industrialisés, de s'attaquer aux changements climatiques mondiaux, et le Protocole de Kyoto est pour l'instant le seul instrument international qui permet de s'attaquer à ce qui est vraiment une crise planétaire.

Lorsque nous aurons adopté le projet de loi, le gouvernement sera tenu de produire chaque année un plan pour honorer les engagements qui découlent du protocole. Le plan doit préciser les limites des émissions et les normes de rendement, il doit décrire les mécanismes du marché qui ont été adoptés, etc.

Si le gouvernement n'atteint pas les objectifs, le Protocole de Kyoto ajoutera 30 p. 100 à notre écart par rapport aux objectifs, et il sera d'autant plus difficile d'atteindre les prochains objectifs au cours de la période postérieure à 2012. Ce n'est peut-être pas juste, mais telle est la réalité.

La question se pose : que nous faut-il pour appliquer le Protocole de Kyoto ou tenter de le faire? Premièrement, il nous faut du leadership, le type de leadership dont Tony Blair a fait preuve dans ce dossier. L'industrie demande au gouvernement du Canada de montrer la voie à suivre. Selon un sondage récent commandé par le Globe and Mail, un nombre étonnant de PDG et de directeurs financiers ne considèrent pas la Loi sur la qualité de l'air comme un texte susceptible de remplacer le Protocole de Kyoto. Cette loi est peut-être bonne, mais ce n'est pas un plan de lutte contre les changements climatiques.

Les dirigeants d'entreprise semblent atteindre un point tournant, celui où ils prennent conscience qu'il y a des avantages économiques à appliquer le programme environnemental au lieu de le combattre. Le PDG de CCL Industrial, Donald Lang, dit que des clients l'exigent — des clients comme Proctor and Gamble et Unilever — car ils ne veulent pas que leur réputation soit ternie par des fournisseurs, mais les cadres attendent que les gouvernements fixent des objectifs, proposent une orientation et leur donnent ce dont l'entreprise a besoin : un climat de certitude.

Le Royaume-Uni a déjà réalisé une réduction de 15 p. 100, et il s'attend à faire deux fois mieux que son engagement de Kyoto d'ici 2010. On doit cette réalisation en grande partie au leadership de Tony Blair.

Un projet de plan gouvernemental de lutte contre les changements climatiques fondé sur la réduction de l'intensité des émissions de gaz à effet de serre mènera, d'après les chiffres présentés dans le document, à une augmentation de 46 p. 100 des émissions de gaz à effet de serre dans la production pétrolière et gazière entre 2000 et 2010. Leur intensité sera réduite de 15 p. 100, mais les émissions de gaz à effet de serre attribuables à la production des sables bitumineux seront 179 fois plus élevées en chiffres absolus. Voilà le scénario que permet d'envisager l'augmentation estimée de la production de pétrole des sables bitumineux. Selon des critiques, il s'agirait d'une estimation conservatrice. En effet, les émissions entraînées par une production accrue pourraient augmenter sans fin tant qu'on se contentera de réduire les émissions par unité de production.

(1450)

Par exemple, Suncor Energy, une société qui exploite les sables bitumineux, a réduit de plus d'un tiers ses émissions par baril depuis 1990. Dans le rapport sur les changements climatiques publié par Suncor Energy en 2006, Rick George, le chef de la direction de la société reconnaît ceci :

Bien que nous ayons réussi à réduire l'intensité des émissions de gaz à effet de serre que nous produisons, la croissance de notre entreprise donne nécessairement lieu à une augmentation des émissions en chiffres absolus.

En fait, l'augmentation de 27 p. 100 des émissions polluantes du Canada depuis 1990 est doublée d'une réduction de 43 p. 100 de l'intensité des émissions. Selon Jeffrey Rubin, économiste en chef de Marchés mondiaux CIBC, les émissions auront peut-être augmenté de 40 p. 100 à la fin de la décennie. Pourtant, parallèlement, les émissions par unité de PIB auront diminué de 20 p. 100. La stratégie portant sur la réduction de l'intensité des émissions ne permettra pas d'atteindre les objectifs du Protocole de Kyoto.

Il est nécessaire de faire preuve d'équité dans la mise en œuvre de la mesure. Les émissions augmentent plus rapidement dans les secteurs de l'industrie lourde, qui sont responsables de près de la moitié des émissions du Canada. Il faudra imposer des plafonds stricts pour ces secteurs, particulièrement le secteur de la production d'électricité et le secteur pétrolier et gazier en amont où les émissions ont augmenté de 35 et de 58 p. 100 respectivement depuis 1990. Toutefois, cela ne libère pas les consommateurs de leur responsabilité. Nous pourrions imiter l'Australie et interdire l'utilisation des ampoules incandescentes dans les maisons et les entreprises. Nous pourrions avoir des voitures plus éconergétiques et prendre diverses mesures axées sur la consommation, car les consommateurs ont aussi un rôle à jouer.

Des représentants de l'Institut Pembina ont comparu devant un comité de la Chambre des communes la semaine dernière et ils ont recommandé l'imposition d'une cible de réduction des émissions de 6 p. 100 en chiffres absolus en deçà des niveaux de 1990 pour chacun de ces secteurs et pour les secteurs énergivores. Selon eux, ces industries lourdes pourraient atteindre les objectifs du Protocole de Kyoto en réduisant leurs émissions sur place ou en achetant des crédits nationaux ou internationaux fondés sur des projets qui appliquent des solutions qui coûtent moins cher. Il en coûterait environ un dollar le baril de pétrole produit. Cela nous donnerait le temps nécessaire de nous doter des technologies de pointe, car la solution réside dans ces technologies.

Cette semaine, l'économiste Jeffrey Rubin, un nouveau converti à la logique du plafonnement et des échanges, a vanté le succès que le système a eu aux États-Unis dans la réduction des émissions de dioxyde de soufre. Ces émissions ont chuté de 40 p. 100 par rapport aux niveaux de 1980. Ces dernières semaines, certains ont brandi des chiffres indiquant que l'atteinte de nos objectifs face au Protocole de Kyoto coûterait environ 25 milliards de dollars en achat de crédits à l'étranger. On nous dit que le projet de loi provoquera un effondrement de l'économie du Canada comparable à ce que l'Ukraine et la Russie ont connu.

Il ne fait jamais de tort de connaître les faits. En voici quelques- uns : en 2002, Marc Jaccard, coauteur de l'ouvrage The Cost of Climate Policy, a fait une estimation des coûts directs pour le Canada de l'atteinte des cibles de Kyoto. Même à un coût s'établissant entre 45 et 60 milliards de dollars, cela aurait un effet négatif relativement mineur sur les revenus des familles; il y aurait une amélioration de la qualité de vie et des collectivités, qui deviendraient plus écologiques; et les répercussions sur le style de vie seraient limitées.

Pour ce qui est de l'économie dans son ensemble. M. Jaccard a prédit des pertes cumulatives pour le PIB de 3 p. 100 avant 2010. Cela signifierait qu'une économie dont la croissance prévue est de 30 p. 100 aurait une croissance de 27 p. 100. Je me demande si le coût de l'inaction ne ferait pas paraître ces chiffres bien inoffensifs.

En plus des solutions pensées au Canada, nous achèterions des crédits au moyen du mécanisme de développement propre, un mécanisme véritable qui n'est pas un coûteux écran de fumée. Le groupe de lobbying de l'organisme Manufacturiers et Exportateurs du Canada a soutenu que le coût serait d'environ 20 milliards de dollars. En vérité, il pourrait n'être que la moitié de cela selon des personnes qui connaissent bien les chiffres, soit l'Institut international du développement durable et l'Association internationale pour l'échange des droits d'émission.

On s'inquiète également de savoir si l'industrie peut réagir à temps. Sachez ceci : l'industrie canadienne des pâtes et papier a déjà réduit ses émissions de gaz à effet de serre de 43 p. 100 depuis 1990. En 2000, les producteurs de produits chimiques avaient également réduit leurs émissions de 43 p. 100 et ils prévoient avoir atteint 56 p. 100 avant 2010. Depuis 1990, Alcan a réduit ses émissions de 30 p. 100 tout en accroissant sa production de 50 p. 100. Du Pont a réduit ses émissions de 80 p. 100 tout en augmentant ses revenus de 3 milliards de dollars au cours de la même période.

Amory Lovins, fondateur de l'Institut Rocky Mountain et gourou de la conservation de l'énergie, a récemment fait valoir que les discussions politiques, de nos jours, s'arrêtaient aux coûts, à la lourdeur de la tâche et aux sacrifices nécessaires. Il a expliqué que la protection de l'environnement ne coûtait pas cher, puisque l'efficacité énergétique est moins coûteuse que le pétrole. C'est meilleur marché d'économiser le pétrole que de l'acheter. Il y a bien des années, Michael Porter, de l'Institut Harvard, avait dit la même chose.

M. Lovins compte les sociétés Pentagon, Coca-Cola et Wal-Mart parmi ses clients. Pensons seulement à Wal-Mart, dont les ventes totalisaient 312 milliards de dollars US l'an dernier, ce qui équivaut au quart du PIB du Canada.

Il y a environ deux ans, le PDG de Wal-Mart, M. Lee Scott, a annoncé un plan visant à réduire de 20 p. 100 les émissions de gaz à effet de serre au plus tard en 2012. En avril dernier, un vice- président de l'entreprise a pris la parole au Congrès américain pour exhorter les législateurs à imposer un plafond obligatoire aux émissions de CO2. Serait-ce que Wal-Mart est mal informée sur le plan économique? Comme Wal-Mart, les sociétés Shell, General Electric et Duke Energy, entre autres, ont demandé des plafonds obligatoires qui pourraient amener la Californie et les États du Nord-Est des États-Unis à faire des échanges de droits d'émission, comme on le fait dans le cadre de programmes mis au point dans la foulée de Kyoto.

La société General Electric double son budget de R-D pour la recherche sur les technologies vertes. Son budget passera ainsi de 700 millions à 1,5 milliard de dollars d'ici 2010. Ce n'est pas par altruisme qu'elle le fait. Le PDG Jeff Immelt est à l'écoute des demandes du marché et il répond aux attentes. En outre, cela lui rapportera de l'argent.

Il y a quelques années, General Electric a créé 500 projets de conservation de l'énergie, réduit les émissions de CO2 d'un quart de million de tonnes et épargné 14 millions de dollars par année en coûts énergétiques. On est loin du désastre économique.

Darryl King, le directeur de la société Direct Energy, l'une des plus importantes sociétés de commercialisation du gaz et de l'électricité en Amérique du Nord, a réclamé qu'on mette un terme aux subventions à l'électricité, au pétrole et au gaz parce que, comme il dit, elles envoient le mauvais message sur le plan de la conservation. Il considère que cet argent serait mieux dépensé s'il servait à subventionner des appareils de chauffage à haut rendement énergétique, par exemple.

Je reconnais que certains analystes crédibles ont qualifié ce projet de loi de mission impossible. Toutefois, sans lui, rien ne changera et les émissions continueront d'augmenter. Le Canada a besoin de règlements permettant à nos sociétés de planifier et d'agir. Nous devons déplacer certains impôts. On pourrait imposer moins les revenus et les biens, et imposer davantage le gaspillage, la pollution et les gaz à effet de serre.

La réduction des gaz à effet de serre peut avoir de très bons côtés. Le recours à des technologies plus vertes peut réduire la facture énergétique et supprimer la nécessité d'accumuler des réserves. C'est ce qu'en pense Eric Lloyd, directeur de la Petroleum Technology Alliance, qui regroupe la plupart des grands noms du domaine pétrolier.

Comme on dit en Israël...

Son Honneur le Président : J'ai bien peur que le temps de parole de l'honorable sénateur soit écoulé.

Madame le sénateur demande une prolongation de cinq minutes. La permission est-elle accordée?

Des voix : D'accord.

(1500)

Le sénateur Spivak : Comme on dit en Israël : « Ein brera », ce qui veut dire « Il n'y a pas d'autre choix ». C'est l'attitude qu'ont dû adopter les Israéliens pour survivre. Ils ont réussi à cultiver des déserts où rien ne poussait auparavant. Au Canada aussi, nous n'avons pas d'autre choix. Nous devons saisir les occasions incroyables et sans limite qui s'offrent à nous et passer à l'action.

(Sur la motion du sénateur Tkachuk, le débat est ajourné.)

DROITS DE LA PERSONNE

MOTION TENDANT À AUTORISER LE COMITÉ À ÉTUDIER LA RÉSOLUTION DE 2006 SUR LA LUTTE CONTRE L'ANTISÉMITISME ET LES AUTRES FORMES D'INTOLÉRANCE DE L'ORGANISATION POUR LA SÉCURITÉ ET LA COOPÉRATION EN EUROPE—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Fraser, au nom de l'honorable sénateur Grafstein, appuyée par l'honorable sénateur Cook,

Que la Résolution suivante sur la lutte contre l'antisémitisme, et les autres formes d'intolérance, adoptée à la 15e session annuelle de l'Association parlementaire de l'OSCE, à laquelle le Canada a participé, à Bruxelles, Belgique le 7 juillet 2006, soit renvoyée au Comité sénatorial permanent des droits de la personne pour étude et que le comité présente son rapport final au Sénat au plus tard le 31 mars 2007 :

RÉSOLUTION SUR LA LUTTE CONTRE L'ANTISÉMITISME ET LES AUTRES FORMES D'INTOLÉRANCE

1. Rappelant les résolutions sur l'antisémitisme qui ont été adoptées à l'unanimité par l'Assemblée parlementaire de l'OSCE à ses sessions annuelles de Berlin en 2002, de Rotterdam en 2003, d'Édimbourg en 2004 et de Washington en 2005,

2. Souhaitant faire mieux percevoir la nécessité de lutter contre l'antisémitisme, l'intolérance et la discrimination à l'égard des Musulmans, de même que contre le racisme, la xénophobie et la discrimination, tout en se préoccupant de l'intolérance et de la discrimination auxquelles sont confrontés les Chrétiens et les membres d'autres religions ainsi que les minorités dans différentes sociétés,

L'Assemblée parlementaire de l'OSCE

3. Prend acte des mesures adoptées par l'OSCE et le Bureau des Institutions démocratiques et des Droits de l'homme (BIDDH) pour aborder le problème de l'antisémitisme et d'autres formes d'intolérance, notamment les travaux de l'Unité pour la tolérance et la non-discrimination au sein du BIDDH, la nomination des Représentants personnels du Président en exercice et l'organisation de réunions d'experts sur la question de l'antisémitisme;

4. Rappelle aux États participants que « par antisémitisme, on entend une certaine perception des Juifs qui peut se traduire par de la haine.

Les manifestions rhétoriques et physiques de l'antisémitisme visent les Juifs ou les non-Juifs et/ou leurs biens, de même que les institutions communautaires et installations religieuses juives » [définition de l'antisémitisme adoptée par les représentants de l'Observatoire européen pour les phénomènes racistes et xénophobes (EUMC) et du BIDDH];

5. Prie instamment ses États participants d'établir un cadre juridique pour des mesures ciblées en vue de lutter contre la diffusion de documents racistes et antisémites par l'Internet;

6. Prie instamment ses États participants d'intensifier les efforts qu'ils déploient pour lutter contre la discrimination à l'encontre des minorités religieuses ou ethniques;

7. Prie instamment ses États participants de présenter des rapports écrits à la session annuelle de 2007 sur leurs activités de lutte contre l'antisémitisme, le racisme et la discrimination à l'encontre des Musulmans;

8. Se félicite de l'offre du Gouvernement roumain d'accueillir en 2007 une conférence de suivi sur la lutte contre l'antisémitisme et toutes les formes de discrimination en vue d'examiner toutes les décisions adoptées lors des conférences des l'OSCE (Vienne, Bruxelles, Berlin, Cordoue, Washington), au titre desquelles les États participants ont pris des engagements, avec une demande de proposition visant à améliorer leur mise en œuvre, et invite les États participants à adopter une décision à ce sujet lors de la prochaine Conférence ministérielle à Bruxelles;

9. Prie instamment ses États participants de fournir périodiquement au Bureau des Institutions démocratiques et des Droits de l'homme des informations faisant le point sur la mise en œuvre des 38 engagements pris lors des conférences de l'OSCE (Vienne, Bruxelles, Berlin, Cordoue, Washington);

10. Prie instamment ses États participants d'élaborer des propositions pour des plans d'action nationaux visant à lutter contre l'antisémitisme, le racisme et la discrimination à l'encontre des Musulmans;

11. Prie instamment ses États participants de faire mieux percevoir la nécessité de protéger les institutions juives et d'autres institutions de minorités dans les diverses sociétés;

12. Prie instamment ses États participants de désigner des médiateurs ou des commissaires spéciaux chargés de présenter et de promouvoir des lignes directrices nationales sur les activités pédagogiques visant à favoriser la tolérance et à lutter contre l'antisémitisme, y compris un enseignement consacré à l'Holocauste;

13. Souligne la nécessité d'un large appui du public ainsi que de coopérer avec les représentants de la société civile qui participent au recueil, à l'analyse et à la publication des données sur l'antisémitisme, le racisme et les violences connexes et de favoriser leur action;

14. Prie instamment ses États participants d'aborder l'histoire de l'Holocauste et de l'antisémitisme et d'analyser le rôle des institutions publiques dans ce contexte;

15. Demande à ses États participants de prendre position contre toutes les formes actuelles d'antisémitisme, où qu'elles se manifestent;

16. Décide d'associer d'autres organisations interparlementaires, telles que l'Union interparlementaire, l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe (APCE), l'Assemblée parlementaire euro-méditerranéenne (APEM) et l'Assemblée parlementaire de l'OTAN, à ses efforts visant à donner suite aux requêtes formulées ci- dessus.—(L'honorable sénateur Segal)

L'honorable Hugh Segal : Honorables sénateurs, j'interviens aujourd'hui au sujet de la motion qu'a présentée le sénateur Grafstein concernant la Résolution sur la lutte contre l'antisémitisme et les autres formes d'intolérance, adoptée par l'Association parlementaire de l'OSCE.

Permettez-moi de citer la définition que donne le Petit Larousse du mot « sémite » :

sémite : Nom donné à un ensemble de peuples du Proche- Orient parlant actuellement ou ayant parlé dans l'Antiquité des langues sémitiques. (Les plus importants des peuples sémitiques anciens ou modernes sont les Akkadiens [Assyro- Babyloniens], les Amorrites, les Araméens, les Phéniciens, les Arabes, les Hébreux, les Éthiopiens.)

Ainsi, la définition officielle du mot « sémite » nous rappelle que le terme lui-même désigne un vaste groupe de peuples parlant des langues sémitiques et que ces peuples comprennent notamment les Arabes et les Juifs. La résolution met l'accent sur cette réalité et même si l'antisémitisme est plus souvent qu'autrement perçu comme de la haine et du sectarisme envers les Juifs, il ne faut pas perdre de vue la définition plus large du terme. En effet, le terme désigne également les Arabes. Dans le contexte social actuel, il ne faut pas laisser un type de sectarisme se substituer à un autre. La lutte contre l'antisémitisme doit aussi comprendre le rejet de la haine et du sectarisme contre les Arabes.

Le 22 novembre, Elie Wiesel, survivant de l'Holocauste et lauréat du prix Nobel de la paix, a pris la parole devant 1 200 personnes à l'Université Queen's. Le moment le plus touchant et le plus marquant de son allocution a été celui où il a rappelé à l'auditoire que le plus grand péché de tous est de demeurer silencieux et indifférent. Il a ajouté qu'une personne indifférente à la souffrance des autres est complice du crime.

La résolution dont nous sommes saisis et qui a été adoptée à l'unanimité par l'Assemblée parlementaire de l'OSCE demande à tous les États membres de dénoncer l'indifférence en se penchant sur les cas d'intolérance, en les dénonçant, en légiférant sur la question, et ce qui est plus important encore, en prenant des mesures pour la combattre.

Pour autant que je sache, je n'ai jamais été victime d'antisémitisme. Cependant, n'est-ce pas là précisément la question? Le sectarisme, le racisme et la discrimination sont rarement manifestes; c'était du moins le cas auparavant. Évidemment, ces problèmes existaient, mais la plupart des gens avaient bien trop de rectitude pour exprimer ouvertement leurs préjugés ou leurs opinions sectaires. Si mon appartenance religieuse a déjà été perçue comme un problème, je doute que qui que ce soit ait exprimé une telle opinion en public.

[Français]

Aujourd'hui toutefois, en cette ère de l'après-11 septembre, il est devenu acceptable dans certains milieux de mettre un milliard de nos semblables dans le même panier — les musulmans, en fait tous les Arabes, peu importe leur religion, sont étiquetés de la même façon. Et cet étiquetage est au cœur de la discrimination — avoir des opinions préconçues sur toutes les personnes de la même race, de la même religion ou de la même culture. Les paroles et les gestes ne sont plus subtils. L'attribution des opinions et des actes de quelques extrémistes enragés à tous les membres d'une même religion ou d'une même culture est le fondement même du racisme et du sectarisme.

[Traduction]

J'aimerais prendre un instant pour lire un extrait d'un discours prononcé le 11 septembre 2006 au Cercle canadien de Montréal, par Tony Comper, président et chef de la direction de la Banque de Montréal. Avec son épouse, il a fondé l'organisme FAST — Finissons-en avec l'antisémitisme sans tarder. Je le cite :

Nous croyons, comme la majorité des Canadiens, qu'il est depuis longtemps terminé le temps où nous pouvions garder un silence poli devant l'antisémitisme et les autres formes de haine, de fanatisme et de racisme. Ce que nous espérons contribuer à faire, à la fois avec FAST et par notre programme éducatif « Choisissez votre voix », c'est d'inciter les Canadiens de toutes origines à ne pas rester de simples spectateurs et à ne plus permettre que les antisémites et leurs semblables répandent impunément leur poison. Nous souhaitons enhardir et encourager ceux qui ont le cœur et l'esprit ouverts à s'élever contre la discrimination, chaque fois qu'elle réapparaît dans toute son horreur et où que ce soit, à marginaliser les antisémites, les brutes et les fanatiques et à leur retirer leur pouvoir d'intimidation.

La résolution sur la lutte contre l'antisémitisme et les autres formes d'intolérance adoptée par l'OSCE exhorte tous les États participants, y compris le Canada, à intervenir dans ce dossier. C'est une bonne chose que tant de pays, de dirigeants et de cultures décident d'unir leurs efforts pour combattre ce problème insidieux.

[Français]

La planète est devenue petite. Les divers pays, façonnés par leur culture et leur patrimoine, ne fonctionnent plus de manière indépendante. La communauté, dorénavant planétaire, et les voyages et déplacements faciles font en sorte que l'immigration, l'intégration et l'assimilation constituent la nouvelle norme. La tolérance est maintenant exigée de tous, et la tolérance est le fruit de l'éducation et parfois mêmes des lois. Le Canada n'est pas indifférent. La Déclaration canadienne des droits de M. Diefenbaker énonçait pour la première fois que tous les Canadiens ne devaient pas faire l'objet de discrimination en raison de leur sexe, de leur religion, de leur race, de leur couleur ou de leur langue. Cette déclaration fut le précurseur de la Charte canadienne des droits et libertés.

[Traduction]

De nos jours, en souvenir de l'histoire tragique causée par une certaine forme d'antisémitisme au début du XXe siècle et à la lumière des paroles d'Elie Wiesel, « l'indifférence, c'est la mort avant le décès », la longue tradition de tolérance du Canada devrait être célébrée publiquement dans un rapport écrit, comme l'a demandé l'Assemblée parlementaire de l'OSCE.

J'appuie la motion portant que cette résolution soit renvoyée au Comité sénatorial permanent des droits de la personne pour examen. Conformément à l'entente conclue par le Canada à Bruxelles en juillet dernier, nous devrions préparer un rapport qui serait présenté à la session de 2007 de l'Association parlementaire de l'OSCE.

C'est le temps de dire à l'association que nous tous, dans cette enceinte, sommes entièrement d'accord avec le très honorable John Diefenbaker, qui a déclaré, le 1er juillet 1960 :

Je suis Canadien, un Canadien libre, libre de m'exprimer sans crainte, libre de servir Dieu comme je l'entends, libre d'appuyer les idées qui me semblent justes, libre de m'opposer à ce qui me semble injuste, libre de choisir les dirigeants de mon pays. Ce patrimoine de liberté, je m'engage à le sauvegarder pour moi-même et pour toute l'humanité.

Honorables sénateurs, les parlements britannique et français ont pris l'initiative et ils ont réalisé des progrès remarquables dans l'élaboration de cette résolution. Je propose à tous les honorables sénateurs des deux côtés de cette assemblée que notre institution, qui fait partie intégrante du Parlement du Canada, s'acquitte de ce devoir important à l'égard des autres pays membres de l'OSCE.

(1510)

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein : Le vote!

L'honorable Anne C. Cools : J'aimerais intervenir dans ce débat.

Le sénateur Grafstein : Cette résolution est inscrite au Feuilleton depuis cinq ans. Tous les sénateurs ont eu la chance de l'examiner. Je propose l'adoption de cette résolution.

Son Honneur le Président : La motion dont le Sénat est saisi est claire. Elle est proposée par le sénateur Fraser, au nom du sénateur Grafstein, et appuyée par le sénateur Cook. C'est de cette motion dont le Sénat est actuellement saisi. Nous avons entendu le sénateur Segal. Y a-t-il d'autres sénateurs qui désirent intervenir? Je donne la parole au sénateur Cools.

Le sénateur Cools : Je voudrais vraiment, honorables sénateurs, intervenir dans ce débat. J'attends depuis plusieurs mois le discours du sénateur Segal, qui, comme nous le savons, est un grand esprit de cette assemblée.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Cools : Le sénateur Segal peut attester que j'étais ici il y a quelques minutes. Quand j'ai quitté, j'ai dit que je reviendrais écouter son discours.

(Sur la motion du sénateur Cools, le débat est ajourné.)

RÈGLEMENT, PROCÉDURE ET DROITS DU PARLEMENT

ADOPTION DE LA MOTION DE RENVOI DE LA QUESTION DE L'ÉLABORATION D'UN PROCESSUS SYSTÉMATIQUE POUR L'APPLICATION DE LA CHARTE DES DROITS ET LIBERTÉS AU SÉNAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Andreychuk, appuyée par l'honorable sénateur Tkachuk :

Que le Sénat renvoie au Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement la question de l'élaboration d'un processus systématique pour l'application de la Charte des droits et libertés au Sénat du Canada. —(L'honorable sénateur Andreychuk)

L'honorable A. Raynell Andreychuk : Honorables sénateurs, j'ai présenté cette motion, qui a été appuyée par l'honorable sénateur Joyal, C.P., car j'estime qu'il est temps que le Sénat aborde la question de l'application de la Charte des droits et libertés pour faire en sorte qu'il y ait un processus systématique pour l'application de la Charte et d'autres lois pertinentes en matière de droits dans cette assemblée.

Il y a 25 ans que la Charte des droits et libertés est en vigueur. Nous aurions tort de ne pas veiller à ce que les pratiques et procédures du Sénat qui s'appliquent à tous ceux qui ont des liens avec le Sénat et à tous ses employés respectent parfaitement la Charte des droits et libertés.

Bien que je félicite le Sénat et les sénateurs pour leur connaissance de la Charte et pour leurs travaux à cet égard, je crois qu'il nous incombe d'examiner nos pratiques, procédures et politiques pour faire en sorte que nous soyons parfaitement conscients de nos façons d'appliquer la Charte des droits et libertés et pour nous assurer de la conformité de nos procédés avec les comportements d'aujourd'hui et les décisions des tribunaux.

En fait, le Parlement n'est pas au-dessus de la loi, il est lié par la loi. Même lorsque le privilège parlementaire s'applique, il nous incombe d'établir un processus veillant à l'application rigoureuse de la Charte. C'est uniquement de cette façon que nous pourrons assurer aux citoyens du Canada que nous appuyons résolument la Charte des droits et libertés et que nous prenons toutes les mesures nécessaires pour la respecter.

La Cour suprême du Canada a rendu une décision le 20 mai 2005 relativement à l'affaire Vaid, dans laquelle elle décrit les questions de privilège parlementaire au Canada et leurs effets subséquents sur l'application de la Charte des droits et libertés à la Chambre des communes. Les honorables sénateurs se souviendront que cette affaire mettait en cause le chauffeur du Président de la Chambre des communes, qui avait été avisé qu'une réorganisation rendrait son ancien poste excédentaire. Le chauffeur s'est plaint à la Commission canadienne des droits de la personne en invoquant la Loi canadienne sur les droits de la personne. En résumé, le Président et la Chambre des communes ont invoqué le privilège parlementaire portant sur le principe général de « gestion du personnel », selon lequel les parlementaires ont l'immunité en ce qui a trait à toutes les questions relatives à tous les employés, sans exception, de l'organe législatif du gouvernement.

Bien que cette décision soit très élaborée et qu'elle s'applique certainement au Sénat, il y a quelques points qui méritent d'être soulignés. Voici quelques extraits de la décision de la Cour suprême :

Les organismes législatifs créés par la Loi constitutionnelle de 1867 ne constituent pas des enclaves à l'abri de l'application du droit commun du pays.

Selon l'opinion majoritaire, le privilège parlementaire ne pouvait être invoqué à l'égard d'un acte discriminatoire interdit par la Charte ou par la Loi canadienne sur les droits de la personne parce que la conduite en cause, si elle était établie, porterait en fait atteinte à l'intégrité et à la dignité de la Chambre, sans améliorer sa capacité de remplir son mandat constitutionnel.

La cour a ajouté :

Dans le contexte canadien, le privilège parlementaire est la somme des privilèges, immunités et pouvoirs dont jouissent le Sénat, la Chambre des communes et les assemblées législatives

provinciales ainsi que les membres de chaque Chambre individuellement, sans lesquels ils ne pourraient s'acquitter de leurs fonctions.

Dans une autre partie de l'arrêt, la cour a dit :

Toutefois, si l'existence et l'étendue d'un privilège n'ont pas été établies péremptoirement, le tribunal devra déterminer si ce privilège satisfait au critère de nécessité — qui sert d'assise à tout privilège parlementaire. En pareil cas, pour justifier leur revendication de privilège, l'assemblée ou le membre qui cherchent à bénéficier de l'immunité qu'il confère doivent démontrer que la sphère d'activité à l'égard de laquelle le privilège est revendiqué est si étroitement et directement liée à l'exécution de leurs fonctions d'assemblée législative et délibérante, y compris de la tâche de l'assemblée législative de demander des comptes au gouvernement, qu'une intervention externe saperait l'autonomie dont l'assemblée ou le membre ont besoin pour accomplir leur travail dignement et efficacement. Une fois l'existence d'un privilège établie, la Cour n'évaluera pas le bien-fondé de son exercice dans un cas particulier.

La cour a fait valoir que le large éventail de privilèges invoqués par les demandeurs n'a pas été péremptoirement établi dans les tribunaux au Canada ou au Royaume-Uni et n'est pas considéré comme une question de principe selon le critère de nécessité. La cour a fait des observations sur le rapport du comité mixte britannique, qui dit :

La ligne de démarcation entre les activités privilégiées et les activités non privilégiées de chaque Chambre n'est pas facile à tracer. La meilleure façon de déterminer où elle se situe consiste peut-être à dire que les questions à l'égard desquelles les cours de justice ne devraient pas intervenir s'étendent au- delà des travaux du Parlement, mais que les questions privilégiées doivent être si étroitement et si directement liées aux travaux du Parlement que l'intervention des cours de justice serait incompatible avec la souveraineté du Parlement en sa qualité d'assemblée législative et délibérante.

La Cour suprême a souscrit à cet argument en disant :

À mon avis, il faut diriger notre attention non pas sur les motifs qui sous-tendent l'exercice du privilège, mais en premier lieu sur la question préalable de l'existence et de l'étendue du privilège invoqué par le Parlement.

La cour a souligné en outre ceci :

C'est suivant un principe d'une grande sagesse que les tribunaux et le Parlement s'efforcent de respecter leurs rôles respectifs dans la conduite des affaires publiques.

En ce qui concerne le Sénat, il est nécessaire que nous examinions de façon approfondie la décision dans l'affaire Vaid de manière à déterminer comment elle s'applique au Sénat du Canada et, deuxièmement, que nous assurions le respect maximal des droits tout en maintenant l'équilibre entre les droits et le privilège parlementaire. Un tel processus systématique pourrait être une défense adéquate contre toute incursion future dans les activités du Sénat et il donnerait aux personnes qui ont des relations avec le Sénat, que ce soit par affaires ou à titre d'employés, l'assurance que nous respectons et appliquons la Charte des droits et libertés.

Personnellement, j'ai choisi de ne pas intervenir dans l'affaire Vaid, car je croyais qu'une intervention de ma part constituerait une ingérence dans les affaires de la Chambre des communes. Je tenais à m'assurer que toutes les différences seraient maintenues et qu'aucun jugement ne visait tous les législateurs au Canada. Quant à mon cher collègue, le sénateur Joyal, qui a appuyé la motion, il a choisi d'intervenir et je crois qu'il a expliqué et qu'il continuera d'expliquer sa position à cet égard.

(1520)

Je crois cependant que nous convenons tous deux que le Comité du Règlement peut examiner les différents aspects de cette situation ainsi que l'affaire Vaid et qu'il serait temps pour le comité de terminer ses travaux afin de s'assurer que nous respectons les dispositions de la Charte. Autrement, on pourrait nous reprocher à juste titre de ne pas accepter de respecter pleinement la Charte et d'autres lois, tout en exigeant des autres de le faire. Par souci de cohérence et par suite de notre engagement envers la Charte des droits et libertés, il importe que nous examinions l'affaire Vaid et la Charte pour déterminer comment les appliquer.

Le sénateur Joyal a noté qu'il existe différentes catégories d'employés. Certains travaillent pour les sénateurs. Certains sont couverts par le privilège parlementaire tandis que d'autres ne le sont pas. Le sénateur Joyal a déposé le projet de loi S-219, qui accompagne et complète cette évaluation. Nous devrions examiner soigneusement cette mesure législative pour bien comprendre toute lacune dans notre application de la Charte des droits et libertés.

L'honorable Serge Joyal : Honorables sénateurs, madame le sénateur Andreychuk a défini les paramètres de la question bien mieux que je ne l'aurais moi-même fait. J'attire l'attention des honorables sénateurs sur la motion qui précède celle du sénateur Andreychuk dans le Feuilleton d'aujourd'hui. Il s'agit de la motion no 21, dans laquelle le sénateur Segal attire l'attention du Sénat sur l'effet que la Charte des droits et libertés a eu depuis 24 ans sur les droits des Canadiens et des Canadiennes et sur les prérogatives du Parlement du Canada. Les deux motions se rencontrent à un point donné. Comme l'a mentionné le sénateur Andreychuk, le sujet qu'elle soulève est lié à un projet de loi que j'ai déposé plus tôt au cours de la session au sujet d'un aspect de ces questions. La motion du sénateur Andreychuk traite de l'autre aspect.

Honorables sénateurs, permettez-moi de vous expliquer brièvement la situation dans laquelle se trouvent les employés du Parlement. Quand je parle des « employés du Parlement », je pense non seulement aux employés du Sénat, mais aussi à ceux de l'autre endroit ainsi qu'à ceux qui travaillent pour les deux Chambres, comme le personnel de la Bibliothèque du Parlement.

De quelle façon la Charte s'applique-t-elle aux employés du Parlement du Canada? D'après l'arrêt rendu par la Cour suprême le 20 mai 2005, il y a environ deux ans, la Loi canadienne sur les droits de la personne s'applique à tout le monde, y compris aux employés du Parlement. Le problème découlait du fait qu'en cas de plainte de discrimination, le traitement de la plainte peut suivre au moins trois voies différentes. Un employé du Parlement, qu'il travaille pour le Sénat, l'autre endroit ou la Bibliothèque, doit d'abord déterminer s'il est assujetti ou non à la Loi sur les relations de travail au Parlement. S'il fait partie de l'une des unités de négociation relevant de cette loi, il doit passer par un conseil d'arbitrage établi en vertu de la loi.

S'il ne fait pas partie de l'une de ces unités, il doit alors se demander s'il occupe un poste couvert par le privilège parlementaire. Si ce n'est pas le cas, il doit s'adresser au Tribunal des droits de la personne. Autrement, son seul recours est de s'adresser directement à l'une des deux Chambres.

Qui sont ces personnes qui occupent des postes couverts par le privilège parlementaire? C'était la question à laquelle la Cour suprême devait répondre dans l'affaire Vaid. La cour a réfléchi à la question et en est arrivée à la conclusion que les greffiers au Bureau occupent un poste privilégié. Pourquoi? Parce qu'ils ont un lien direct avec les fonctions législatives et de délibération du Sénat. L'huissier du bâton noir occupe également un poste privilégié. La décision de la cour mentionne précisément ces personnes. Si l'une de ces personnes croit faire l'objet de discrimination, elle doit s'adresser à notre assemblée — à notre Chambre.

Supposons qu'un des greffiers au Bureau — et je ne vise personne en particulier — veuille déposer une plainte pour discrimination, qui serait, disons, fondée sur la race. À qui pourrait-il s'adresser? Pas aux tribunaux, puisque le Sénat échappe à toute intervention des tribunaux. Cette personne devrait donc s'adresser à nous. Le point qu'a soulevé le sénateur Andreychuk porte sur la situation dans laquelle se trouvent ces gens et tous ceux qui ne sont pas couverts par la Loi sur les relations de travail au Parlement.

Honorables sénateurs, c'est une question qui semble complexe, mais deux ans après la décision rendue par la cour, il est temps que nous tentions de mettre de l'ordre dans tout cela. C'est le Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement qui est le mieux placé pour se pencher sur la question et en faire rapport au Sénat. Le comité voudra tout probablement étudier la possibilité de proposer des amendements au Règlement du Sénat afin d'établir une procédure. Cette procédure régirait l'étude de toute affaire de discrimination présumée contre un employé du Sénat, ou contre tout employé qui ne serait pas couvert par la Loi sur les relations de travail au Parlement.

Honorables sénateurs, je vous invite à appuyer la présente motion parce que je suis d'avis que c'est une question qui nous préoccupe tous. Comme le sénateur Andreychuk l'a souligné, s'il y a une institution qui devrait être au-dessus de tout reproche en ce qui a trait à l'application de l'esprit et de la lettre de la Charte des droits et libertés, c'est bien cette Chambre du Parlement. Bon nombre de sénateurs ont déclaré publiquement à plusieurs occasions que nous avons la responsabilité de protéger les minorités. Nous devons à tout le moins démontrer que nos propres employés sont protégés, qu'ils ont accès à un mécanisme de recours en cas de besoin et que leurs préoccupations seront jugées en toute impartialité, d'une manière qui répond à la nature de nos obligations constitutionnelles. J'invite tous les sénateurs à appuyer cette motion.

[Français]

L'honorable Pierre Claude Nolin : Le sénateur Joyal accepterait-il de répondre à une ou deux questions?

Le sénateur Joyal : Honorables sénateurs, dans les limites du temps qui m'est imparti.

Le sénateur Nolin : Sénateur Joyal, le gentilhomme huissier et le greffier de cette Chambre sont-ils considérés comme des employés privilégiés même s'ils sont ici en vertu d'un décret du gouverneur en conseil?

Le sénateur Joyal : Oui. Dans la décision Vaid, la Cour suprême a fait référence directement à ces employés parce qu'ils sont si intimement liés aux fonctions législatives et délibératives de cette Chambre qu'elle ne pourrait fonctionner s'ils n'étaient pas présents. Même si leur statut est confirmé par un arrêté en conseil, cela ne modifie pas la nature de la responsabilité et du rôle essentiels qu'ils jouent dans la capacité du Sénat à assumer sa fonction délibérative.

En d'autres mots, le Sénat ne pourrait pas fonctionner sans ces employés. C'est la limite que la Cour suprême a définie pour déterminer que ces employés, que vous venez de mentionner, font partie du privilège parlementaire au même titre que vous et moi, puisque vous et moi sommes couverts, ainsi que tous les honorables sénateurs, tout comme Son Honneur le Président, par le privilège parlementaire. C'est la raison pour laquelle la cour a défini des paramètres très précis pour déterminer quels employés bénéficient du privilège parlementaire.

Dans le cas de M. Vaid, qui était le chauffeur du Président de l'autre endroit, la Chambre des communes alléguait qu'il était couvert par le privilège parlementaire. Cependant, en pratique, la cour a défini que cette personne occupait une fonction importante mais pas essentielle à la fonction délibérative et législative de la Chambre, même si elle est en contact régulier avec Son Honneur le Président de l'autre endroit ou de cette Chambre.

(1530)

[Traduction]

L'honorable Anne C. Cools : L'honorable sénateur Joyal a-t-il l'intention de mettre fin au débat? J'aimerais prendre la parole dans ce débat, si c'est possible. Puis-je proposer l'ajournement?

Le sénateur Joyal : Honorables sénateurs, j'ai pris la parole pour appuyer cette motion et la renvoyer au Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement, de manière à ce qu'il l'étudie et nous fasse les recommandations nécessaires.

Son Honneur le Président : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

L'honorable sénateur Andreychuk, avec l'appui de l'honorable sénateur Tkachuk, propose que le Sénat renvoie au Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement la question de l'élaboration d'un processus systématique pour l'application de la Charte des droits et libertés au Sénat du Canada.

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée.)

L'ÉTUDE DE L'ÉTAT ACTUEL DES INDUSTRIES DE MÉDIAS

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT AU RAPPORT DU COMITÉ DES TRANSPORTS ET DES COMMUNICATIONS—INTERPELLATION—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Fraser, attirant l'attention du Sénat à la réponse du gouvernement au deuxième rapport du Comité sénatorial permanent des transports et des communications intitulé Rapport final sur les médias d'information canadiens. —(L'honorable sénateur Banks)

L'honorable Jim Munson : J'ai le privilège de faire partie du Comité sénatorial permanent des transports et des communications et je suis fier du travail que nous avons accompli dans notre étude des médias canadiens. Le rapport final du comité est exhaustif et comprend 40 recommandations. C'est le résultat d'un travail sérieux. Le comité sénatorial y décrit entre autres certains aspects inquiétants de la concentration des médias qui sont contraires à l'intérêt du public.

Cette concentration réduit bel et bien la diversité des voix que les Canadiens peuvent entendre par l'intermédiaire des médias. Dans ses recommandations, le comité réclame notamment un mécanisme d'examen public des cas de propriété mixte et de concentration de la propriété.

Bien entendu, nous nous sommes aussi intéressés à d'autres questions. Nous avons recommandé que le CRTC examine les projets de fusion d'entreprises médiatiques dans le but de préserver la diversité des émissions d'information offertes par les stations de télévision et de radio communautaires.

Nous avons aussi examiné la Loi sur la concurrence et nous nous sommes posé la question qui sautait aux yeux : si les fusions de banques peuvent faire l'objet d'un examen afin d'en déterminer les répercussions sur le public, pourquoi les fusions de médias ne font- elles pas aussi l'objet d'un examen?

La réponse du gouvernement du Canada à ce rapport a été tellement décevante. Pour résumer, disons que le gouvernement nous a répondu : « Ne vous inquiétez pas. Soyez heureux. »

La réponse du gouvernement ne tient pas compte des tendances du marché qui limitent les sources d'information à quelques grandes organisations qui deviennent de plus en plus puissantes grâce à une réglementation qui leur permet de s'étendre à l'infini.

Je ne vous apprends rien en disant que le Canada est un immense pays comptant beaucoup de régions différentes et une population diversifiée. Si nous permettons à des géants des communications d'avoir la haute main sur l'information diffusée, nous manquons à notre devoir de protéger les intérêts de la population. Les médias d'information sont très concentrés dans deux de nos plus grandes villes, Montréal et Vancouver. Canwest Global contrôle non seulement la télévision et les journaux, mais elle commence maintenant à acheter des journaux communautaires. Au Nouveau- Brunswick, ma province, les sociétés du groupe Irving possèdent presque tous les journaux.

D'énormes contrats sont conclus entre géants des communications, qui deviennent ainsi encore plus gros, et personne, aucun organisme gouvernemental, ne tente de mettre le holà pour qu'on puisse d'abord examiner les conséquences de ces fusions.

Le rapport du Sénat est fondé sur les témoignages de nombreux intéressés. Si l'on veut des médias en santé et une presse libre et vigoureuse, il est clair que ce n'est pas la taille des sociétés mères qui compte.

[Français]

Le gouvernement a manqué le bateau dans sa réponse à notre rapport. Bien qu'il reconnaisse que les Canadiens obtiennent leurs nouvelles d'une gamme diversifiée de médias comme les blogues, les baladodiffusions, Internet, la radio et la télévision, il ne reconnaît pas la diversité dans la livraison du message et ne garantit pas la diversité dans le message. La réalité est qu'à travers les blogues, les baladodiffusions, Internet, les émissions de radio et les autres sources d'information, nous entendons les mêmes nouvelles, modifiées peut-être, mais pareilles néanmoins.

La réponse du gouvernement semble confondre la diversité des plateformes avec la diversité des sources et des voix.

[Traduction]

Le comité sénatorial estime que les intérêts du Canada et des Canadiens sont le mieux servis lorsque les médias sont forts et dynamiques. Avec nos 40 recommandations, nous affirmons clairement que le statu quo n'est pas acceptable.

Le statu quo ne sert pas bien les intérêts des Canadiens, ni aujourd'hui, ni certainement pour l'avenir.

Notre comité sénatorial s'est également penché sur le rôle de la Société Radio-Canada pour évaluer la possibilité d'améliorer sa gouvernance. Une fois de plus, c'est l'impasse.

Cette expérience a été frustrante pour notre comité et pour le sénateur Tkachuck, j'en suis convaincu, lui qui a siégé avec moi au comité et parcouru le pays en ma compagnie, puisque nous sommes parvenus à ces conclusions après avoir étudié ces questions ensemble, sans esprit de parti. Nous avons étudié tous les aspects. Je suis certain que le sénateur Tkachuk doit s'inquiéter aujourd'hui de voir le peu de réaction que suscitent nos recommandations chez ses collègues ministériels. Je suis impatient d'entendre le sénateur Tkachuk prendre la parole à ce sujet un bon jour, étant certain que nous sommes tous d'accord avec les 40 recommandations et qu'il a pris connaissance de la réponse de la ministre Oda.

Je trouve la situation frustrante à deux égards. Tout d'abord j'ai une accoutumance incurable aux nouvelles depuis mon tout jeune âge. Je me souviens en effet que j'écoutais les nouvelles à la radio étant jeune et, aujourd'hui, à titre d'ancien journaliste, je suis un passionné de la nouvelle et de la profession de journaliste. On constate au Canada des tendances inquiétantes qui ont des incidences sur la pratique du journalisme. L'indépendance de pensée, la diversité des perspectives, ces aspects qui constituent le fondement-même d'une démocratie vigoureuse et saine, dépendent de nombreuses sources d'information, et non pas simplement de celles qui sont les plus importantes et les plus rentables. Au Canada, nous devons agir pour garantir la multiplicité des voix que nous entendons et des points de vue qui nous sont présentés.

Le deuxième aspect qui m'inquiète a trait à la réponse du gouvernement du Canada au travail d'ensemble entrepris par le Comité sénatorial permanent des transports et des communications. Le Sénat a un rôle à jouer dans notre démocratie. Nous avons un travail à faire et nous le faisons bien. Il est inquiétant de voir le gouvernement balayer du revers de la main les réflexions et les recommandations formulées par un comité sénatorial permanent. Dans sa réponse, le gouvernement nous dit qu'il estime que les Canadiens sont bien servis par l'équilibre que représente le cadre législatif, réglementaire et politique actuel, que viennent étayer divers programmes gouvernementaux.

Ce comité sénatorial a étudié des questions importantes, il a soulevé des préoccupations importantes et il a formulé des recommandations importantes. Je suis troublé de constater que notre travail a été écarté avec autant de désinvolture.

Des voix : Bravo!

L'honorable Francis William Mahovlich : Je m'interrogeais sur les nombreux Canadiens qui sont propriétaires de journaux et qui ont acheté d'autres journaux en Angleterre ou aux États-Unis. Est-ce que les autres pays ont des règles ou des règlements régissant les journaux?

Le sénateur Munson : Je remercie le sénateur de sa question.

Il est certain que les États-Unis d'Amérique ont des règles ou des règlements précisant ce qu'il est permis de posséder et ce qu'il n'est pas permis de posséder dans chacun des marchés.

Il existe des règlements précisant s'il est permis de posséder un journal, une station de radio ou une chaîne de télévision. Il y a certainement des règles à ce sujet dans le monde entier, que ce soit aux États-Unis, au Royaume-Uni et dans de nombreux autres pays. Il y a là des exemples que, selon moi, notre pays pourrait suivre ou dont il pourrait s'inspirer.

(1540)

Le sénateur Mahovlich : Est-ce que ce n'est pas Conrad Black qui, à la tête de la société Hollinger, était propriétaire, je crois, du Chicago Tribune, et qui a été autorisé à acheter une entreprise publiant un grand journal? Je suis persuadé que tous les pays accueillent à bras ouverts quelqu'un qui souhaite acheter tel ou tel journal.

Est-ce que ce n'est pas la famille Thomson qui a acheté un journal à Édimbourg, en Écosse?

Le sénateur Munson : Oui, c'est exact, et je ne m'oppose pas aux familles ou aux entreprises qui achètent des journaux. Nous sommes préoccupés par la possession de plus d'un type de moyen de communication et par les marchés où il n'y a ni freins, ni contrepoids.

Nous avons des règles applicables aux investissements étrangers dans notre pays. Un citoyen étranger ne peut acheter plus qu'une certaine part d'un journal de notre pays.

Dans notre rapport, au sujet de cette question des journaux, nous cherchions à établir un seuil, 33 p. 100 peut-être, concernant la propriété des journaux et des stations de radio et de télévision dans une ville comme Vancouver. Il nous faut un mécanisme qui s'enclencherait en vertu de la Loi sur la concurrence et qui nous permettrait, dans un forum très public, un forum transparent, de nous poser les questions suivantes : est-ce bon pour notre démocratie? Avons-nous accès à des points de vue variés? Les plus petits, si j'ose m'exprimer ainsi, se font tasser dans les coins. Notre préoccupation, c'est qu'une seule voix dans un marché n'est pas une bonne chose dans une démocratie vibrante comme la nôtre.

(Sur la motion du sénateur Banks, le débat est ajourné.)

LES ENTENTES ENTRE LE GOUVERNEMENT FÉDÉRAL ET LES PROVINCES ET LES TERRITOIRES SUR LA GARDE D'ENFANTS

INTERPELLATION—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Trenholme Counsell, attirant l'attention du Sénat sur les inquiétudes suscitées par les accords de principe signés par le gouvernement du Canada et les provinces entre le 29 avril et le 25 novembre 2005 sous le thème Pour aller de l'avant : l'apprentissage et la garde des jeunes enfants, ainsi que par les accords de financement conclus avec l'Ontario, le Manitoba et le Québec et les accords de principe préparés pour le Yukon, les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut. —(L'honorable sénateur Cordy)

L'honorable Jane Cordy : Honorables sénateurs, je suis très heureuse de poursuivre le débat sur l'interpellation de madame le sénateur Trenholme Counsell au sujet de l'éducation préscolaire et la garde des jeunes enfants, et plus particulièrement sur les accords de principe signés par le gouvernement du Canada et les provinces entre le 29 avril et le 25 octobre 2005. Je la félicite pour son initiative et tout le travail qu'elle a accompli.

Le processus ayant permis de conclure les accords de 2005 sur la garde des enfants ont exigé la participation de l'ensemble des provinces et des territoires, ainsi que de centaines de parents et d'intervenants qui ont été entendus par le ministre Dryden. Il est dégagé de ces consultations le consensus suivant : un réseau de garderies était nécessaire au Canada.

Je crois que l'éducation préscolaire et la garde des enfants devraient être à l'avant-plan de tout programme politique. En fait, selon un sondage récent de la firme Environics, 76 p. 100 des Canadiens interrogés estiment que le manque de places abordables en garderie est un problème grave ou très grave et 82 p. 100 croient que les gouvernements devraient jouer un rôle important dans le domaine de la garde des enfants. La majorité des Canadiens, 76 p. 100, approuvent le programme national de garderies établi par le gouvernement libéral précédent sous la direction du ministre Ken Dryden. Il n'y a rien de surprenant.

Le programme d'éducation préscolaire et de garde des enfants découlait de consultations entre le gouvernement fédéral et les provinces et les territoires. Il n'arrive pas souvent que des négociations soient aussi fructueuses, mais, partout au pays, le consensus était qu'il fallait faire quelque chose. En tant qu'ancienne enseignante au primaire, je sais que les premières années de la vie d'un enfant sont extrêmement importantes.

J'aimerais citer l'accord conclu entre les gouvernements de la Nouvelle-Écosse et du Canada en matière d'enseignement préscolaire et de garde des enfants :

Les recherches démontrent que des soins d'apprentissage et de garde des jeunes enfants de grande qualité peuvent jouer un rôle important afin de favoriser le développement social, émotionnel et cognitif des jeunes enfants. La promotion de l'apprentissage et du développement chez les jeunes enfants encourage la participation des parents dans l'emploi et l'éducation tout en soutenant les parents dans leur responsabilité première concernant les soins prodigués à leurs enfants en permettant d'améliorer la qualité des soins d'apprentissage et de garde des jeunes enfants offerts aux familles [...] La vision de la Nouvelle-Écosse consiste à faire en sorte que tous les enfants profitent d'un bon départ dans la vie et soient soutenus et stimulés au sein de familles et de communautés qui les ont à cœur.

John Hamm, premier ministre au moment de la signature de l'entente de principe, avait déclaré ceci :

Notre avenir appartient à nos enfants et cette entente de principe nous permettra de leur accorder un meilleur soutien dans les années à venir.

Toutefois, nous avons maintenant un nouveau premier ministre en Nouvelle-Écosse, Rodney MacDonald. Qu'a-t-il à dire au sujet de la garde des enfants? On sait qu'il exhorte le nouveau gouvernement conservateur, qui n'est pas si nouveau que ça, à honorer l'entente sur cinq ans conclue avec le ministre Dryden. Il veut aussi conserver l'allocation de 1 200 $ avant impôt offerte aux parents d'enfants de moins de six ans. Il appelle cela l'approche mixte. Évidemment, en tant que premier ministre, il voudrait profiter des deux mesures. Il reconnaît la nécessité d'accroître le nombre de places en garderie en Nouvelle-Écosse. Je ne suis pas toujours d'accord avec le premier ministre MacDonald, mais en l'occurrence, je pense comme lui.

En Nouvelle-Écosse, il nous faut davantage de places dans des garderies de qualité. L'accord libéral signé par les premiers ministres Hamm et Martin visait la création de 7 167 places avant la fin des cinq années du programme. Cet investissement pour les jeunes enfants aurait permis à la province de tabler sur ses points forts, de fournir plus de programmes de développement de l'enfant et d'offrir plus de services d'éducation préscolaire et de possibilités de garde pour les enfants de moins de six ans.

Honorables sénateurs, dans la majorité des familles canadiennes, les deux parents sont sur le marché du travail. C'est différent de l'époque de notre enfance, mais c'est la réalité d'aujourd'hui. Les garderies sont une nécessité pour les parents qui travaillent, suivent une formation ou se recyclent. Elles sont aussi une nécessité pour les familles qui doivent trouver et garder des emplois pour réussir à s'arracher à la pauvreté et à l'aide sociale.

L'allocation pour garde d'enfants des conservateurs est au centre de la politique des services de garde du gouvernement actuel. Ces 100 $ par mois avant impôt ne constituent pas un programme de garderies. Il s'agit d'une simple allocation familiale, politique rejetée par le gouvernement de Brian Mulroney. Elle ne crée pas de places en garderie. On ne trouve pas des services de garde de qualité dans la boîte aux lettres. Les conservateurs prétendent que ces 100 $ par mois permettent de faire des choix en matière de services de garde. Honorables sénateurs, lorsqu'on dispose de 3,50 $ par jour avant impôt, les choix sont plutôt limités.

Dans sa réponse au discours du Trône, le sénateur John Bryden nous a proposé une excellente analyse de la valeur réelle de l'allocation de 1 200 $ pour garde d'enfants. Il a expliqué avec force détails comment les paiements feraient diminuer les prestations accordées après vérification des revenus et feraient augmenter les impôts. La plupart des familles canadiennes auront en fin de compte bien moins que 1 200 $.

Lorsque les Canadiens produiront leur déclaration de revenus au printemps, ils constateront qu'ils doivent déclarer 1 200 $. Comme si cela ne suffisait pas, le premier ministre Harper a supprimé l'an dernier le supplément pour les jeunes enfants, privant ainsi les familles de 400 millions de dollars. Honorables sénateurs, j'ai tendance à être d'accord avec le sénateur Bryden, qui a dit qu'il s'agissait d'une politique injuste, parce que les familles pauvres et à revenu modeste recevront moins de prestations que les familles à revenu moyen ou supérieur. Pour citer le sénateur Bryden, c'est mal, et c'est une mauvaise politique d'intérêt public.

Le plan du gouvernement conservateur consiste à accorder un incitatif fiscal aux entreprises et aux groupes communautaires pour, censément, créer 125 000 places en garderie. Cela correspond en fait à un crédit ponctuel de 10 000 $ pour la création de chaque place, mais 85 p. 100 des coûts des places en garderie sont des coûts opérationnels. Le plan conservateur ne propose rien pour garder cette place ouverte. Rien non plus pour garantir la qualité des services. La méthode des incitatifs fiscaux a déjà été tentée en Ontario par le premier ministre Mike Harris. Elle a connu un échec lamentable; pas une seule place n'a été créée. C'est bien cela : pas une seule nouvelle place.

(1550)

La réponse du monde des affaires au plan du gouvernement conservateur n'a pas été enthousiaste, c'est le moins que l'on puisse dire. Catherine Swift, présidente de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante a déclaré :

Ce n'est tout simplement pas pratique. Au Canada, 75 p. 100 des entreprises comptent moins de cinq employés.

Plusieurs ministres provinciaux ont rejeté l'idée des incitatifs fiscaux parce qu'ils sont jugés inefficaces. En fait, dans un cahier d'information préparé pour l'ancienne ministre Finlay, on lisait que les incitatifs fiscaux ont eu un succès limité dans le passé et n'ont attiré que peu de participants.

Le plan vise également les groupes communautaires et à but non lucratif, mais on ne sait pas trop comment ils pourraient être admissibles à des crédits d'impôt puisqu'ils ne paient pas d'impôt. Les places en garderie en milieu de travail peuvent certainement faire partie d'un plan global, mais je ne crois pas qu'elles puissent remplacer une initiative nationale bien planifiée sur les garderies.

Le 5 septembre 2006, l'ancienne ministre des Ressources humaines et du Développement social, la ministre Diane Finlay, a annoncé la création d'un comité consultatif ministériel chargé de la conseiller sur l'élaboration de l'Initiative sur les places en garderie. Le comité, présidé par M. Gordon Chong, de Toronto, était constitué de neuf membres qui devaient faire rapport à la ministre l'automne dernier. Je crois savoir que ce rapport est actuellement entre les mains du ministre actuel, Monte Solberg. Le communiqué diffusé par la ministre en septembre dit que RHDSC rendra le rapport public. J'espère que cela se fera sous peu, afin que nous puissions examiner de façon plus détaillée l'Initiative sur les places en garderie que le gouvernement conservateur a proposée.

Honorables sénateurs, les défenseurs du programme de garderies n'ont pas accordé la note de passage au gouvernement conservateur et au premier ministre Stephen Harper. Le programme national d'éducation préscolaire et de garde d'enfants a été supprimé. Il a été remplacé par une allocation familiale de 100 $ par mois, avant impôt, et par une Initiative sur les places en garderie qui, jusqu'ici, n'a créé aucune nouvelle place en garderie. Les services de garderie sont très importants pour des milliers de familles canadiennes et le gouvernement devrait prendre ce dossier au sérieux.

Encore une fois, je tiens à remercier le sénateur Trenholme Counsell d'avoir pris l'initiative de cette interpellation et les autres sénateurs d'avoir pris la parole sur un sujet d'une si grande importance pour les familles canadiennes.

L'honorable Elizabeth Hubley : Je me demande si madame le sénateur Cordy accepterait de répondre à une question.

Premièrement, je la félicite pour son rapport détaillé sur les besoins en matière de places en garderie. Il y a beaucoup de domaines dans lesquels les gouvernements peuvent investir afin de s'attaquer aux nombreux problèmes de la société d'aujourd'hui. Vous avez mentionné l'alphabétisme et la pauvreté. J'aimerais ajouter le problème du décrochage scolaire au niveau secondaire et les défis auxquels les familles monoparentales sont confrontées.

Dans quelle mesure est-ce important pour les gouvernements de vraiment prendre cette question au sérieux et d'y voir une intervention qui, à long terme, répondra à certaines des préoccupations dont elle nous a fait part aujourd'hui? Peut-être aurait-elle quelques exemples à nous donner de garderies qui ont entrepris une telle démarche?

Le sénateur Cordy : Merci de votre question. Je crois effectivement qu'il est très important pour les gouvernements d'intervenir et d'assumer leurs responsabilités. Comme je l'ai dit plus tôt, mon expérience à titre d'enseignante au primaire pendant de nombreuses années m'a convaincue de l'importance de la petite enfance. Comme le dit le titre d'un livre bien connu, presque tout ce que je devais savoir pour mener ma vie, je l'ai appris dans ma petite enfance.

Pendant environ dix ans, j'ai enseigné dans une localité voisine de Dartmouth, où j'habite. Cette localité s'appelle East Preston et elle est peuplée principalement de Noirs. Il y avait une garderie à East Preston qui était financée par la province et par le gouvernement fédéral. Cependant, c'était plus qu'une simple garderie : c'était le cœur de la localité. Quand j'enseignais à l'école de cette localité, j'ai rencontré, à de nombreuses occasions, les dirigeants de la garderie et ils m'ont parlé de ce qu'ils faisaient, du fait qu'ils préparaient les enfants à bien commencer leur scolarité. C'était en effet bien plus qu'une garderie : les enfants qui en sortaient avaient une longueur d'avance. Même les enfants dont les parents restaient à la maison allaient à la garderie; ils y étaient conduits en autobus.

Tout le monde à East Preston connaissait la garderie. N'importe qui pouvait y entrer pour voir ce qui s'y faisait. C'était un des centres de la localité. Ses efforts étaient couronnés de succès. D'ailleurs, Joyce Ross, la fondatrice de la garderie, a été largement honorée par différents ordres de gouvernement pour le travail qu'elle y a accompli.

Ce n'est là qu'un exemple, mais il est important. Cette garderie va au-delà de ce à quoi on s'attend d'une garderie typique.

(Sur la motion du sénateur Tardif, au nom du sénateur Mercer, le débat est ajourné.)

AGRICULTURE ET FORÊTS

AUTORISATION AU COMITÉ DE SIÉGER PENDANT L'AJOURNEMENT DU SÉNAT

L'honorable Joyce Fairbairn, conformément à l'avis du 27 février 2007, propose :

Que, conformément à l'alinéa 95(3)a) du Règlement, le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts soit autorisé à se réunir du lundi 5 mars 2007 au vendredi 9 mars 2007, inclusivement, même si le Sénat est ajourné à ce moment pour une période de plus d'une semaine.

Son Honneur le Président : Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

(La motion est adoptée.)

(Le Sénat s'ajourne au jeudi 1er mars 2007, à 13 h 30.)


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