Aller au contenu
Séances précédentes
Séances précédentes
Séances précédentes

Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

3e Session, 40e Législature,
Volume 147, Numéro 72

Le mercredi 1er décembre 2010
L'honorable Noël A. Kinsella, Président



LE SÉNAT

Le mercredi 1er décembre 2010

La séance est ouverte à 13 h 30, le Président étant au fauteuil.

Prière.

L'Afghanistan—Le soldat tombé au champ d'honneur

Minute de silence

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, avant de passer à nos travaux, je vous invite à vous lever et à observer avec moi une minute de silence à la mémoire du capitaine Francis Cecil Paul, un héros de l'Afghanistan mort en service.

Les honorables sénateurs observent une minute de silence.


DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

M. Alexander Colville, C.P., C.C.

Félicitations à l'occasion de son quatre-vingt-dixième anniversaire de naissance

L'honorable Donald H. Oliver : Honorables sénateurs, une des légendes vivantes du Canada vient de célébrer son 90e anniversaire de naissance. Il s'agit de l'artiste visuel de renommée mondiale Alexander Colville, de la Nouvelle-Écosse.

Le 13 novembre dernier, j'ai eu le bonheur de participer à une réception en son honneur à la Galerie d'art de la Nouvelle-Écosse, à Halifax. Cet établissement a souligné le 90e anniversaire de naissance d'Alexander Colville en organisant une exposition commémorative d'une partie de ses œuvres. Cette exposition se poursuivra jusqu'au 20 février 2011.

Alex Colville est né à Toronto en 1920, mais sa famille a rapidement déménagé en Nouvelle-Écosse, où il vit toujours avec son épouse, avec qui il partage sa vie depuis 60 ans. Il a étudié les beaux-arts à l'Université Mount Allison, où il a obtenu son diplôme en 1942. Peu après, il s'est rendu en Europe en tant que peintre de guerre officiel afin de consigner ses impressions artistiques de la Seconde Guerre mondiale. Il est rentré au Canada après la guerre et a enseigné à l'Université Mount Allsion.

En 1963, il a finalement décidé de se consacrer entièrement à l'art. Il n'a pas fallu bien longtemps pour que ses œuvres — des toiles, des croquis et des estampes — fassent l'objet d'expositions partout au Canada et à l'étranger. On le considère comme l'un des plus grands peintres réalistes du Canada.

L'une de ses toiles de 1953, intitulée « Homme sur la véranda », a été vendue 1,3 million de dollars la semaine dernière lors d'une vente aux enchères. C'est un nouveau record canadien pour une œuvre réalisée par un artiste canadien toujours vivant.

Le style de M. Colville allie surréalisme et symbolisme, auxquels se mêlent des éléments oniriques. Ses œuvres font partie de nombreuses collections permanentes dans des villes comme Ottawa, Halifax, Montréal, Paris, New York, Berlin et Vienne.

Dans un article du Globe and Mail paru le 22 novembre dernier, le journaliste Sandor Fizli l'a décrit comme étant probablement le meilleur artiste-peintre canadien à l'heure actuelle.

Shannon Parker, conservatrice de la Galerie d'art de la Nouvelle-Écosse, a dit ceci de lui :

En Nouvelle-Écosse, il n'est pas uniquement cet incroyable artiste-peintre connu bien au-delà de nos frontières. Il est aussi quelqu'un que tout le monde connaît en tant que personne, et non pas seulement en tant qu'artiste.

Pour moi, le nom d'Alex Colville évoquera toujours le talent, mais surtout, la compassion. En 1991, Alex Colville a présenté un éloge funèbre touchant aux funérailles de ma mère. Il avait reconnu en elle une artiste dont la créativité n'avait malheureusement pas été pleinement exploitée. J'ai fait encadrer l'original manuscrit de cet éloge funèbre que j'ai accroché dans mon bureau.

À ce jour, M. Colville, maintenant âgé de 90 ans, continue à dessiner et à peindre, et il produit chaque année quelques œuvres importantes.

Dans le cadre d'une entrevue accordée à la chaîne anglaise de Radio-Canada en 2000, on lui a demandé pourquoi ses œuvres suscitaient parfois la controverse. Il a répondu ceci :

Ce qui dérange dans mon travail, dans lequel les gens perçoivent du mystère et de l'intrigue, c'est peut-être l'idée que les choses ordinaires sont importantes.

Honorables sénateurs, une chose est certaine : l'interprétation que fait Alex Colville des situations humaines les plus simples a fait de lui l'un des artistes visuels les plus importants du Canada. M. Colville est un Canadien extraordinaire et une légende vivante dont la production artistique est à la fois inspirée et inspirante.

Je vous invite à vous joindre à moi pour souhaiter un heureux 90e anniversaire à Alex Colville.

Le décès de l'honorable David C. (See-Chai) Lam, O.C.

L'honorable Vivienne Poy : Honorables sénateurs, je rends aujourd'hui hommage à l'honorable David C. Lam, le premier lieutenant-gouverneur canadien d'ascendance asiatique, qui a servi la Colombie-Britannique de 1988 à 1995. David était un pionnier, un entrepreneur, un pilier de la collectivité, un philanthrope et un ami très cher. Il nous a quittés la semaine dernière à l'âge de 87 ans.

À titre de lieutenant-gouverneur, David est demeuré un homme du peuple, peu impressionné par la pompe et les cérémonies. Il a rempli ses fonctions avec un tel enthousiasme que lui et son épouse ont tous deux dû recevoir un traitement médical après avoir serré la main de milliers de personnes.

David est né à Hong Kong d'un père qui était ministre de l'Église baptiste. Il a laissé une carrière dans le secteur bancaire pour immigrer à Vancouver avec sa famille en 1967, parce que, de son propre témoignage, la beauté de la ville l'a ému aux larmes.

En 20 ans, grâce à son esprit d'entreprise, il a amassé une fortune estimée à 100 millions de dollars. Lorsqu'il a pris sa retraite à l'âge de 60 ans, il a décidé de faire don d'un million de dollars par année à des institutions canadiennes.

Dans une entrevue accordée en 1987 au quotidien Vancouver Sun, il a dit ceci :

J'ai vu énormément de richesse — de l'or, de l'argent, des diamants et de l'argent en banque. Mais c'est une richesse morte. Elle ne signifie rien à mes yeux. La vraie richesse est celle de l'esprit.

(1340)

Tout au long de sa vie, David a combiné la philosophie confucianiste, qui prône l'harmonie et la modération, et la théologie baptiste évangélique. De ce fait, il avait une profonde appréciation pour les valeurs, l'éducation et la beauté dans sa plus simple expression. À son avis, une éducation de qualité, une économie souple et une main-d'œuvre capable de s'adapter constituent les clés de la prospérité et de la réussite du Canada.

Ses activités philanthropiques avaient souvent pour but de jeter des ponts entre les néo-Canadiens d'origine asiatique et l'ensemble de la société. Pensons au Centre David Lam pour la communication internationale, à l'Université Simon Fraser, qui axe ses efforts sur le renforcement de la compréhension interculturelle. David savait que le seul moyen de vaincre l'ignorance, c'est d'encourager les gens à mieux se connaître. Il a dit : « Il est facile de légiférer contre la discrimination, mais personne ne peut légiférer pour obliger les gens à s'aimer. »

En 1993, David a dit à un journaliste qu'il voulait qu'on se souvienne de lui comme d'« un homme qui prêchait l'harmonie, la bonté et la compréhension ». Le legs impérissable qu'il laisse à l'ensemble des Canadiens, c'est que la richesse, tant monétaire que spirituelle ou intellectuelle, doit être partagée généreusement.

Honorables sénateurs, je vous invite à vous joindre à moi pour offrir nos condoléances à sa famille et à sa province, la Colombie-Britannique, qui viennent de perdre un grand homme.

[Français]

La Coupe Grey de 2010

Félicitations aux Alouettes de Montréal

L'honorable Leo Housakos : Honorables sénateurs, j'aimerais saluer la victoire des Alouettes de Montréal.

[Traduction]

Depuis des générations, le terrain de football met à l'épreuve l'endurance, l'habileté et le courage. Le football permet aux athlètes de manifester ces qualités et de nous montrer la force de l'esprit humain. La Coupe Grey est le plus ancien trophée de sport professionnel au Canada et elle est synonyme de consécration au football canadien. Ce trophée existe depuis 1909. L'équipe de l'Université de Toronto a été la première équipe à le remporter et cette année, ce sont les Alouettes de Montréal qui l'ont gagné.

Dans la finale du championnat, le courage, la persévérance, la bravoure et l'honneur qui caractérisent les Canadiens ne cessent de captiver notre attention et notre imagination. Dimanche dernier, l'affrontement des Alouettes de Montréal et des Roughriders de la Saskatchewan pour la Coupe Grey a une fois de plus illustré ces qualités canadiennes.

[Français]

Il ne pouvait y avoir qu'un seul gagnant. Cette fois-ci, les Alouettes de Montréal ont remporté la victoire pour la deuxième année consécutive, à la grande joie et pour la plus grande fierté de tous les Montréalais.

[Traduction]

Montréal a une longue tradition pour ce qui est des sports de compétition. La ville a non seulement célébré des championnats de la Coupe Grey, mais elle a aussi vu son lot de Coupes Stanley. D'ailleurs, nous avons initié le monde au hockey et nous avons aidé à faire connaître le football en Amérique du Nord.

[Français]

En cette journée spéciale, nous sommes heureux de fêter la victoire des Alouettes de Montréal. Félicitations au personnel d'entraîneurs et aux joueurs, de même qu'à leurs familles, pour cette grande victoire.

[Traduction]

Quand on parvient jusqu'à la finale de la Coupe Grey, on n'est pas un perdant. Alors, je voudrais féliciter les Roughriders de la Saskatchewan pour leur effort magnifique et pour nous avoir offert un match mémorable. Cependant, ce moment de l'histoire appartient à nos Alouettes. Nous sommes très fiers de vous!

Les travailleurs migrants

L'honorable Mobina S. B. Jaffer : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui au sujet des droits des milliers de travailleurs migrants du Canada qui travaillent dans le cadre du Programme des travailleurs étrangers temporaires. La semaine dernière, j'étais l'hôtesse d'un atelier destiné à informer les gens sur cette importante question. L'atelier était animé par M. Kerry Preiebisch et Mme Evelyn Encalada. Nous avons appris à cette occasion que plus de 130 travailleurs agricoles étrangers temporaires employés à Simcoe, en Ontario, avaient été licenciés et renvoyés au Mexique et dans les Antilles. Les employeurs devaient à chacun de ces travailleurs plus de 1 000 $ en salaire impayé. Lorsque des journalistes et des défenseurs des droits des travailleurs migrants ont fait enquête sur le différend concernant le paiement des salaires, ils ont découvert des conditions de vie déplorables, notamment des pavillons-dortoirs surpeuplés et sans chauffage, avec des fuites dans les canalisations sanitaires.

Ces hommes travaillaient fort pour nourrir leur famille, restée dans leur pays d'origine. Ils étaient à pied d'œuvre jusqu'à 12 heures par jour, sept jours par semaine, au salaire minimum. Lorsque ces hommes adultes ont raconté ce qu'ils étaient en train de vivre, ils ont eu de la peine à réprimer leurs sanglots à l'idée de ne pas pouvoir acheter à leurs enfants des cadeaux pour Noël, ni même nourrir leur famille, en raison de leur manque à gagner.

Comme les travailleurs migrants sont obligés de rentrer chez eux lorsque leur contrat se termine ou lorsqu'il est résilié, comme dans ce cas, ils ne peuvent pas demeurer sur le territoire canadien pour porter plainte devant la justice. Même si chacun des travailleurs de Simcoe a payé des centaines de dollars en cotisations d'assurance-emploi, cette année, leur licenciement ne leur donne pas droit aux prestations d'assurance-emploi. Donc, ils ont dû retourner dans leur pays, cette semaine, découragés et les mains vides.

Honorables sénateurs, des injustices comme celle-là se produisent chaque jour un peu partout au pays. Les droits et la dignité des travailleurs migrants sont violés régulièrement parce qu'aucune loi ne prévoit de surveillance systématique des employeurs et des recruteurs de main-d'œuvre. Ces travailleurs ne reculent devant rien pour pouvoir conserver la chance de travailler au Canada, et c'est pourquoi ils ne se plaignent pas lorsqu'ils se voient refuser de la formation ou de l'équipement pour assurer leur santé et leur sécurité.

Depuis plus de quatre décennies, de nombreux travailleurs agricoles saisonniers travaillent dur pour mettre de la nourriture sur nos tables et pour maintenir en vie l'industrie essentielle qu'est notre industrie agricole. Malgré qu'ils aient passé plus la moitié de leur vie dans notre pays, nous ne leur offrons pas de services de soutien aux migrants ni la possibilité de devenir résidents permanents.

Honorables sénateurs, il serait temps que le Canada accorde des protections et des droits à chacun des 300 000 travailleurs migrants temporaires qui viennent travailler au Canada dans le cadre du Programme des travailleurs étrangers temporaires. Il serait temps que l'on crée un organe de réglementation indépendant, une commission des travailleurs migrants, chargée de faire enquête et de régler les problèmes que présentent les programmes de migration de travail du Canada et d'assurer la protection de l'héritage du Canada en tant que société juste et équitable.

Nous nous nourrissons des aliments qu'ils produisent; nous devons maintenant commencer à protéger les droits des travailleurs migrants.

Le Global Institute for Water Security

L'honorable Pamela Wallin : Honorables sénateurs, chez nous, en Saskatchewan, nous accordons une grande importance à l'eau parce que, malgré toutes nos ressources stratégiques et tous nos produits de première nécessité, notre province demeure une province agricole où la pluie et la neige sont essentielles, imprévisibles et parfois dévastatrices. Nombreux sont ceux qui se souviennent encore des tourments de la Grande Crise, lorsque la terre desséchée des prairies s'envolait littéralement. Le printemps dernier, et encore à l'automne, des pluies abondantes et des inondations ont laissé de nombreux agriculteurs sans grain dans le silo.

L'eau et sa gestion sont indispensables dans un monde où la nourriture et l'eau manquent et où les besoins en matière d'énergie sont insatiables. Seulement 0,5 p. 100 de la population mondiale vit au Canada, mais la masse terrestre du Canada contient approximativement 9 p. 100 des ressources mondiales en eau renouvelables. Quelles ressources stratégiques!

À l'Université de la Saskatchewan, une Chaire d'excellence en recherche du Canada a été créée et dotée de 30 millions de dollars, dont 10 millions de dollars du fédéral, afin d'établir un institut mondial de la sécurité de l'eau. Cet institut viendra compléter ce qui se fait dans le cadre du réputé programme de recherche sur les eaux de l'Université de la Saskatchewan en recrutant 85 personnes qui viendront s'ajouter à l'effectif actuel de 65 chercheurs. Ensemble, ils chercheront à résoudre les problèmes liés à l'eau à l'échelle mondiale et ils formeront la prochaine génération de scientifiques de l'eau.

M. Howard Wheater, titulaire de la Chaire d'excellence en recherche du Canada sur la sécurité de l'eau et directeur de l'institut, est un expert mondial en matière de sciences hydrologiques. Il a quitté l'Imperial College London pour venir en Saskatchewan. Il est le vice-président du Programme mondial de recherche sur le climat (expérience mondiale sur les cycles de l'énergie et de l'eau) et il dirige le Programme sur les ressources hydriques des zones arides de l'UNESCO.

La recherche hydrologique est une entreprise interdisciplinaire très complexe faisant appel à l'écologie, la toxicologie et l'hydrologie. Le Global Institute for Water Security aura des partenaires à Environnement Canada et au Saskatchewan Research Council et, bien entendu, dans l'industrie. C'est une bonne nouvelle pour la planète parce que 900 millions de personnes n'ont pas accès à de l'eau potable et 1,6 milliard ne disposent même pas d'installations sanitaires de base, qui exigent un approvisionnement en eau fiable.

Honorables sénateurs, le Programme des chaires d'excellence en recherche du Canada a été créé par le gouvernement actuel en 2008 pour attirer les meilleurs chercheurs et universitaires dans diverses disciplines. Le programme vise à mettre le Canada à la fine pointe des percées dans des champs de recherche prioritaires, à créer des avantages pour les Canadiens et à positionner le Canada comme lieu de prédilection pour la recherche de pointe en sciences et en technologie.

Je félicite l'Université de la Saskatchewan pour son leadership, pour s'être vu attribuer une chaire d'excellence en recherche du Canada et pour avoir créé le Global Water Security Institute. Je souhaite beaucoup de succès à M. Wheater et à son équipe. Il en va de notre avenir à tous.

L'honorable Danny Williams

L'honorable George J. Furey : Honorables sénateurs, je rends hommage à une personne que je connais depuis toujours, quelqu'un qui a toujours été membre du parti politique adverse, quelqu'un avec qui il m'arrivait d'être en désaccord sur le plan politique, quelqu'un qui a toujours été un excellent ami et quelqu'un, honorables sénateurs, dont la famille a toujours été amie avec la mienne.

Danny Williams s'est lancé en politique à Terre-Neuve-et-Labrador avec une grande fierté, une grande dignité et une intégrité impeccable. En dépit de ses nombreuses réalisations, cette semaine il laisse, par son départ, tous les Terre-Neuviens et les Labradoriens dans la tristesse, mais aussi enrichis par une partie de cette fierté, de cette dignité et de cette intégrité dont il a fait preuve.

(1350)

En tant que premier ministre de notre province, Danny Williams a toujours cherché résolument à améliorer la qualité de vie des Terre-Neuviens et des Labradoriens. Danny Williams a toujours tenu fermement à favoriser l'épanouissement de la province.

Dès le début de son mandat à titre de premier ministre, Danny Williams s'est bâti une réputation de négociateur tenace sur la scène politique. Toutefois, cet habile négociateur sait également faire preuve de bonté et de générosité à l'endroit des personnes dans le besoin.

S'il ne cherche jamais ses mots lorsqu'il négocie avec des entreprises ou d'autres administrations publiques, j'ai souvent vu ce négociateur aguerri rester bouche bée devant la majestueuse beauté des côtes de notre province, muet de joie en compagnie de ses petits-enfants et sans voix devant la situation désespérée des pauvres et des défavorisés.

Son gouvernement et son style de gouvernance ont toujours mis l'accent sur les simples citoyens de Terre-Neuve-et-Labrador et du Canada. Danny Williams n'a jamais été intéressé par le pouvoir, la richesse et l'influence, et je crois bien qu'il ne le sera jamais.

Aujourd'hui, honorables sénateurs, j'aimerais exprimer ma reconnaissance à Danny Williams, en mon propre nom ainsi qu'au nom de ma famille et de mes compatriotes Terre-Neuviens et Labradoriens. Merci de nous avoir si bien servi et d'avoir fait preuve d'un tel altruisme. Merci de nous avoir montré qu'avec de la persévérance, de l'enthousiasme et de l'intégrité, nous, Terre-Neuviens et Labradoriens, pouvons nous tailler une place bien à nous au sein de cette grande confédération qu'on appelle le Canada.

Par-dessus tout, honorables sénateurs, Danny Williams nous a montré que la politique peut et doit avoir pour objectif de servir les gens, de transcender l'esprit partisan et de faire ce qu'il y a de mieux pour les gens que nous servons. Au moment où il tourne une page de sa carrière politique, quelle meilleure façon de lui rendre hommage qu'en consignant dans les registres historiques que cet homme, Danny Williams, a grandement contribué à améliorer la vie des Terre-Neuviens et des Labradoriens?

Merci, Danny, de votre présence et de votre fidèle amitié.

Le Centre de recherches pour le développement international

Félicitations à l'occasion de son quarantième anniversaire

L'honorable Hugh Segal : Honorables sénateurs, je tiens aujourd'hui à souligner le travail remarquable réalisé par le Centre de recherches pour le développement international, le CRDI, qui fête le 40e anniversaire de son existence cette année.

La Canada déploie de l'expertise et des ressources dans une multitude de régions du monde afin d'aider ses partenaires dans des pays en développement à perfectionner leurs compétences et à adopter des pratiques exemplaires qui leur permettent de bâtir des collectivités et des pays plus forts et de monter dans l'échelle du développement. Cette aide canadienne s'inscrit dans l'excellente tradition de la politique étrangère du pays : des objectifs ambitieux, une position publique humble et le respect des cultures, des traditions et de l'histoire des pays où travaille le CRDI. Cette attention humanitaire et rigoureuse aux questions de compétence et de valeur empirique de la recherche a d'énormes répercussions dans le monde entier.

En 1995, l'ancien président de l'Afrique du Sud, Nelson Mandela, a fait la remarque suivante :

Les Sud-Africains ont bénéficié énormément de l'aide du CRDI.

Le CRDI a travaillé en étroite collaboration avec des chercheurs sud-africains en vue de préparer l'après-apartheid et la transition vers la démocratie dans le cadre d'une entente qu'avaient conclue en ce sens l'ancien premier ministre Mulroney et M. Mandela lui-même. Plus de la moitié des membres du cabinet du gouvernement sud-africain constitué après les élections historiques de 1994 avaient déjà pris part à des projets financés par le CRDI.

Le CRDI soutient la recherche au Chili depuis 1977. Il a aidé le pays à se doter de solides capacités de recherche et à améliorer les politiques de l'État. Les travaux que le CRDI a subventionnés au Chili ont permis aux décideurs de mieux comprendre l'économie, le marché du travail, la prestation des services sociaux et les grands secteurs fondés sur les ressources.

Depuis que le CRDI a ouvert son bureau régional en septembre 1971, l'Asie a subi des changements spectaculaires. Grâce à ses travaux de recherche, le CRDI aide les États à axer leurs politiques sur les collectivités pauvres et isolées et à avoir accès aux technologies modernes de communication, comme Internet, et il joue un rôle énorme dans la modernisation des démocraties asiatiques.

Il s'agit là d'un petit échantillon des nombreux projets qui ont une importance et un effet équivalents. Le conseil des gouverneurs du CRDI a toujours compté des ressortissants étrangers distingués, prêts à faire profiter les membres canadiens de leurs conseils et de leurs compétences. Le président du CRDI, David Malone, incarne ce que le Canada a de mieux à offrir en matière de service extérieur et de présence sur la scène internationale. Dans son poste actuel, M. Malone peut mettre à profit la vaste expérience qu'il a acquise aux Nations Unies en tant que haut-commissaire du Canada en Inde et ambassadeur au Bhoutan et au Népal.

Honorables sénateurs, le service extérieur canadien n'est pas parfait — ceux des autres pays ne le sont pas non plus —, mais il joue un rôle essentiel pour maintenir la présence de notre pays à l'étranger, où il peut faire rayonner les valeurs canadiennes durables que sont la liberté, la démocratie, les droits de la personne, la prospérité économique et la justice sociale.

Le CRDI est un organisme de la Couronne indépendant où les priorités en recherche, politique étrangère et développement se rejoignent pour servir le monde d'une manière dont nous pouvons tous être fiers. Le CRDI est un organisme qui reflète la mentalité canadienne. Il mérite nos félicitations.

Nous présentons au CRDI nos félicitations et lui exprimons notre gratitude pour 40 années de remarquables services au Canada dans le but de bâtir un monde meilleur, et ce, avec la promesse ferme que ces services se révéleront encore plus efficaces à l'avenir.


AFFAIRES COURANTES

Projet de loi sur la Journée du patrimoine national en matière de chasse, de piégeage et de pêche

Première lecture

Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu de la Chambre des communes le projet de loi C-465, Loi instituant la Journée du patrimoine national en matière de chasse, de piégeage et de pêche, accompagné d'un message.

(Le projet de loi est lu pour la première fois.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Comeau, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'après-demain.)

L'Association parlementaire Canada-Europe

La Conférence des parlementaires de la région de l'Arctique, tenue du 13 au 15 septembre 2010—Dépôt du rapport

L'honorable Percy E. Downe : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de la délégation parlementaire canadienne de l'Association parlementaire Canada-Europe concernant sa participation à la neuvième Conférence des parlementaires de la région de l'Arctique, tenue à Bruxelles, en Belgique, du 13 au 15 septembre 2010.

Je dois informer le Sénat qu'aucun sénateur ne faisait partie de la délégation.

[Français]

Le Sénat

Avis de motion tendant à exhorter l'Union européenne à mettre en œuvre une politique de conservation du stock de thon rouge de l'Atlantique Est

L'honorable Céline Hervieux-Payette : Honorables sénateurs, je donne avis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que, attendu que les scientifiques sont d'avis qu'il existe une menace sur la durabilité du stock Est-Atlantique de thon rouge (Thunnus Thynnus);

Attendu que l'Union internationale pour la conservation de la nature a classé Thunnus Thynnus en « danger critique d'extinction » et a appelé à un moratoire sur cette pêche;

Attendu que l'empreinte écologique de l'Union Européenne sur le stock Est-Atlantique de thon rouge est considérable, la France, l'Espagne, l'Italie et Malte étant les principaux préleveurs de jeunes thons rouges;

Attendu que la Commission internationale pour la conservation des thonidés de l'Atlantique a accordé un quota de pêche en 2011, ne laissant que 60% de chance à la population de thon rouge de se reconstituer d'ici à 2022 et ce, sans tenir compte ni de la pêche illégale ni des défaillances du système de déclarations;

Attendu que le gouvernement du Canada, l'industrie et le milieu scientifique canadiens travaillent ensemble afin de veiller à ce que les stocks de thon rouge de l'Atlantique Ouest puissent soutenir la pratique d'une pêche durable;

Le Sénat du Canada demande à l'Union européenne de s'inspirer des fondements moraux de sa nouvelle réglementation sur la chasse au phoque — bien que le phoque du Groenland ne soit pas une espèce menacée — pour protéger le thon rouge, de respecter les avis scientifiques et d'inciter ses pays membres à mettre en œuvre une politique adéquate afin de garantir la préservation de l'espèce Thunnus Thynnus pour les générations à venir.


(1400)

[Traduction]

PÉRIODE DES QUESTIONS

L'environnement

La politique sur les changements climatiques

L'honorable Grant Mitchell : Honorables sénateurs, il est clair que, dans le dossier des changements climatiques, le gouvernement du Canada emboîtera le pas au gouvernement des États-Unis. Fait intéressant, le gouvernement américain vient tout juste d'annoncer que, étant donné les changements qui sont survenus au Congrès, il ne pourra prendre un certain nombre de mesures et réglementera donc les grands pollueurs en vertu de la législation actuelle sur la protection de l'environnement. Même si bien des gens sont au courant de cela, il était clair que le ministre de l'Environnement à temps partiel, M. Baird, n'avait pas la moindre idée de ce dont il s'agissait lorsqu'il a été interrogé à ce sujet.

Madame le leader pourrait-elle nous dire quand le premier ministre daignera se préoccuper suffisamment de l'environnement pour nommer un ministre de l'Environnement à temps plein, ou si le simple fait d'avoir un ministre qui n'a pas le temps de prendre les mesures qui s'imposent dans ce dossier important le satisfait amplement?

Une voix : Eh bien, nous en faisons beaucoup plus que vous n'en avez fait.

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Absolument, honorables sénateurs. Nous en faisons 100 fois plus que ce qui a été fait auparavant.

Une voix : C'est tout à fait vrai.

Le sénateur LeBreton : L'honorable John Baird est actuellement ministre de l'Environnement. Il a une vaste expérience de ce portefeuille. Il a pris en main les dossiers rapidement après le départ de Jim Prentice, l'ancien ministre de l'Environnement. De toute évidence, nous participons tous aux délibérations qui ont lieu au Cabinet. M. Baird était au courant de ces questions. Il se rendra à Cancun la semaine prochaine et y représentera le gouvernement en tant que ministre de l'Environnement.

Le sénateur Mitchell : Étant donné que le gouvernement s'attribue tout le mérite de tant de mesures visant à lutter contre les changements climatiques, il doit avoir des critères d'évaluation. Il doit disposer d'un rapport qui indique dans quelle mesure il a réduit les émissions de carbone. Après tout, le premier ministre reçoit des rapports sur le nombre de panneaux qui font la publicité de ses projets de relance. Il pourrait certainement avoir un rapport sur la mesure dans laquelle il a réduit les émissions de carbone.

En toute honnêteté, puisque madame le leader ne cesse d'en parler, peut-elle nous fournir des données quant à la réduction des émissions de carbone au cours de la dernière année ou des deux dernières années, grâce aux programmes de réduction des gaz à effet de serre que le gouvernement vante tant?

Une voix : Jouez franc-jeu!

Le sénateur LeBreton : Voyez-vous cela! Un libéral qui dit à un conservateur de jouer franc-jeu!

Le sénateur Comeau : Il est le temps d'aller chercher les sacs de papier brun!

Le sénateur Di Nino : Vous devriez avoir honte à jamais!

Le sénateur Mercer : Avez-vous enfin le droit de parler à Brian?

Des voix : Oh, oh!

Le sénateur LeBreton : Je l'ai déjà dit à plusieurs reprises, le sénateur Mercer n'occupe pas le bon emploi. On devrait le mettre sur un petit remorqueur dans le port d'Halifax et l'utiliser comme corne de brume. Il y serait beaucoup plus efficace.

Des voix : Oh, oh!

Le sénateur Comeau : Dans un phare, mettez-le en faction dans un phare!

Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, à Cancun, le Canada cherchera à obtenir des engagements de tous les principaux émetteurs afin de refléter l'équilibre atteint grâce à l'Accord de Copenhague, le seul accord qui réunit tous les principaux émetteurs. J'en viendrai à la question du sénateur sur le carbone dans une minute.

L'Accord de Copenhague bénéficie de l'appui de 139 pays, qui produisent environ 85 p. 100 des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Il est important de s'appuyer sur cette réalisation. Comme le sénateur le sait, en vertu de cet accord, nous nous sommes engagés à réduire les émissions du Canada de 17 p. 100 en deçà du niveau de 2005 d'ici 2020, ce qui est conforme aux objectifs visés par les États-Unis. Nous travaillons déjà avec l'administration Obama dans le cadre de la mise en œuvre des règlements nord-américains, comme le sénateur le sait, et d'importantes initiatives comme le Dialogue sur l'énergie propre. Nous harmonisons déjà la réglementation dans des secteurs comme les véhicules légers. Dans d'autres domaines, nous travaillons à l'élaboration de normes équivalentes. Comme l'a récemment mentionné le ministre Baird, c'est l'approche que nous comptons adopter.

En ce qui concerne les émissions de gaz à effet de serre, l'une des principales mesures prises par le gouvernement a consisté, comme nous l'avons annoncé en juin, à entreprendre la fermeture graduelle des polluantes centrales au charbon. Cette mesure devrait permettre de réduire de beaucoup les émissions produites par ce secteur industriel. Je crois, honorables sénateurs, que tous les principaux émetteurs de la planète se rendront à Cancun dans le but de donner suite à l'Accord de Copenhague. Peut-être, après cela, aurons-nous un indicateur clair dont l'ensemble des pays pourront se servir pour déterminer la mesure dans laquelle ils ont réduit leurs émissions de gaz à effet de serre.

Le sénateur Mitchell : On croirait entendre un des grands émetteurs en question. Disons que, comme réponse, on peut difficilement avoir plus brumeux.

Le pays compte 700 grands émetteurs. Évidemment, vers la fin de la semaine, M. Baird a dit qu'il allait les réglementer, puisque les États-Unis les réglementaient. Génial. Madame le leader peut-elle nous dire quand il va réglementer ces grands émetteurs, exactement? La réponse se trouve-t-elle dans le plan? Avons-nous un calendrier de mise en œuvre? Madame le leader pourrait-elle par hasard nous donner une date, ou serait-ce que le ministre Baird est trop occupé pour en fixer une?

Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, nous sommes en train de préparer un plan. Dès que nous serons prêts à en faire l'annonce, nous le ferons.

Le sénateur Mitchell : Je vais quand même continuer de poser la question.

Enfin, ne serait-ce que pour éviter que le ministre Baird ne se serve de ce problème comme d'une excuse — le problème étant que, si cela s'avérait, certains régimes d'échange des émissions de gaz à effet de serre engendreraient des excédents régionaux nets qui désavantageraient certaines provinces, comme l'Alberta —, il s'avère que, d'après une étude publiée par l'Institut C.D. Howe, ce même institut de droite qui n'en a que pour le marché et que madame le leader doit très certainement tenir en haute estime, ces régimes ne doivent pas nécessairement comporter de transferts régionaux nets. Madame le leader pourrait-elle vérifier auprès de M. Baird s'il est au courant de cette nouvelle donnée et de cette nouvelle analyse, ne serait-ce que pour éviter qu'il ne prétexte qu'il est trop occupé pour faire ce qu'il devrait faire dans ce dossier d'importance?

Le sénateur LeBreton : Je puis garantir au sénateur que le ministre Baird n'a pas besoin que ni moi ni personne d'autre ne lui donne la moindre instruction pour être au courant de ce que tel ou tel institut, serait-ce le C.D. Howe, a dit. Je suis convaincue qu'il le sait déjà. Je n'ai pas besoin que le sénateur me pousse dans le dos, et le ministre n'a pas besoin que je le pousse dans le dos pour savoir ce qu'il a besoin de savoir pour la bonne marche de son portefeuille.

L'honorable Bill Rompkey : Honorables sénateurs, s'il participait au développement du projet d'aménagement du cours inférieur du Churchill, qui profitera à toutes les provinces de l'Atlantique, dont la province d'où est originaire le sénateur Comeau, le gouvernement aurait l'occasion d'investir immédiatement dans la réduction des émissions de gaz à effet de serre et dans la production d'énergie verte. En fait, ce serait profitable à l'ensemble du Canada. Le secteur de la construction est réparti dans le centre du pays. Les intervenants de ce secteur pourront prendre part à ce projet et ils y seront très intéressés.

Le gouvernement de Terre-Neuve-et-Labrador a demandé au gouvernement du Canada d'y consacrer une somme d'environ 327 millions de dollars. Si le ministre était prêt à signer un chèque dès aujourd'hui et à se rendre à St. John's pour le remettre officiellement, le leader ferait la joie des quatre provinces de l'Atlantique.

Le sénateur LeBreton : Je remercie le sénateur de sa question. C'est avec plaisir que je soumettrai la suggestion au ministre.

[Français]

Le patrimoine canadien

La dualité linguistique aux Jeux panaméricains de 2015

L'honorable Maria Chaput : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat et concerne les Jeux panaméricains de Toronto, qui auront lieu en 2015.

Le 29 novembre dernier, un article paru dans le quotidien Le Devoir nous apprenait que l'échec linguistique qui s'est produit lors de l'ouverture des Jeux olympiques et paralympiques d'hiver à Vancouver, en 2010, risque de se reproduire aux Jeux panaméricains de Toronto en 2015.

Selon cet article — et je cite :

[...] l'entente qui lie le comité organisateur au gouvernement n'est pas plus précise que celle signée avec Vancouver.

L'article dit aussi qu'il n'y aurait aucune trace des recommandations du commissaire des langues officielles à l'égard de cette entente.

(1410)

Ma question à madame le leader du gouvernement au Sénat est la suivante : le gouvernement fédéral a-t-il tiré des leçons de l'échec d'un événement qui n'a laissé au français que l'espace d'une chanson et qui est devenu un fiasco linguistique lors de la cérémonie d'ouverture des Jeux de Vancouver en 2010? Ne faudrait-il pas être plus sévère et prévoyant pour respecter la dualité linguistique?

[Traduction]

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, le gouvernement a fait des investissements inégalés pour que les deux langues officielles soient présentes dans tous les aspects des Jeux olympiques d'hiver de 2010, y compris à l'Olympiade culturelle, lors du parcours de la flamme olympique et sur tous les sites olympiques.

Plus tôt cette année, le commissaire aux langues officielles a déclaré à La Presse Canadienne que, mis à part les cérémonies d'ouverture, il était très satisfait du bilinguisme aux Jeux olympiques d'hiver.

Honorables sénateurs, j'ai déjà admis dans cette enceinte, comme l'a fait de son côté le gouvernement, que les cérémonies d'ouverture ont été décevantes. Nous l'avons dit, tout comme le ministre du Patrimoine canadien, le ministre responsable des Jeux olympiques. Cela dit, on a investi des sommes inégalées dans les Jeux olympiques de Vancouver et déployé de grands efforts.

J'espère que le comité organisateur des Jeux panaméricains tiendra compte de ce qui s'est passé lors des cérémonies d'ouverture des Jeux olympiques de Vancouver, car il n'est question que de ces cérémonies.

[Français]

Le sénateur Chaput : Je remercie madame le leader de sa réponse. Elle aura remarqué que je parlais des cérémonies d'ouverture, qui ont été un échec. Ce ne serait pas arrivé si les responsabilités avaient été plus définies dans l'accord signé entre le gouvernement fédéral et Vancouver.

Ma prochaine question est la suivante : n'y a-t-il pas lieu de s'assurer d'inclure dans l'accord de contribution, en ce qui concerne les Jeux panaméricains de 2015, des clauses linguistiques qui encadreront davantage les organismes bénéficiaires quant à leurs obligations pour assurer l'égalité réelle des deux langues officielles?

[Traduction]

Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, je crois que j'ai déjà répondu à cette question. En ce qui concerne les Jeux olympiques d'hiver de Vancouver, il ne fait aucun doute que les cérémonies d'ouverture étaient décevantes, en dépit des efforts énormes déployés par le gouvernement et en dépit du fait que le commissaire aux langues officielles était très satisfait de tout ce que le gouvernement a fait et de tous les aspects des Jeux olympiques de Vancouver. Je n'irais toutefois pas jusqu'à dire qu'elles étaient un échec. Par contre, sur le plan du respect de la Loi sur les langues officielles et de la politique canadienne sur les langues officielles, elles étaient décevantes.

Je vais certes attirer l'attention du ministre du Patrimoine canadien sur les commentaires du sénateur afin que les fonctionnaires rappellent les incidents entourant la cérémonie d'ouverture des Jeux olympiques d'hiver de Vancouver aux organisateurs responsables de la planification des Jeux panaméricains lorsqu'ils les rencontreront.

[Français]

Le sénateur Chaput : Je remercie sincèrement madame le leader de sa réponse. J'aimerais maintenant lui demander de s'assurer, lorsqu'elle en parlera avec le ministre Moore — nous avons le temps, c'est en 2015 —, que les clauses linguistiques soient suffisamment détaillées afin d'éviter que cette erreur ne se reproduise.

Madame le leader peut-elle demander au ministre de s'assurer que l'entente soit suffisamment détaillée pour que les fonds du gouvernement fédéral soient dépensés en fonction du respect de la dualité linguistique et de l'égalité des deux langues officielles lors de ces cérémonies?

[Traduction]

Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, je serais ravie de transmettre les commentaires du sénateur au ministre du Patrimoine canadien. Je dois cependant répéter que, à l'exception de la cérémonie d'ouverture, la Loi sur les langues officielles a été respectée lors des Jeux olympiques d'hiver de Vancouver et de tous les événements organisés dans le cadre des Jeux olympiques. J'en prends pour preuve le rapport positif du commissaire aux langues officielles en ce qui a trait aux services.

[Français]

Les finances

Le Québec—La taxe de vente harmonisée

L'honorable Francis Fox : Honorables sénateurs, ma question s'adresse également au leader du gouvernement au Sénat. La ministre peut-elle nous renseigner sur l'état actuel des discussions et négociations entre le gouvernement du Canada et le gouvernement du Québec sur la question de la compensation due au Québec par suite de l'harmonisation de la taxe de vente? À quel moment peut-on s'attendre à un dénouement positif dans ce dossier?

[Traduction]

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Je remercie le sénateur de sa question. Je ne puis que confirmer la déclaration faite par le ministre des Finances, à savoir que des négociations et des discussions positives sont en cours, même si elles n'ont pas encore abouti. Ils discutent et travaillent sur ce dossier, et le dialogue est positif. Je n'ai rien d'autre à déclarer à ce sujet.

[Français]

Le sénateur Fox : La ministre nous dit qu'elle n'est pas en mesure, et cela me surprend, de nous assurer d'une conclusion positive. Pourrait-elle faire un commentaire sur le fait que le gouvernement actuel a dit oui à la Colombie-Britannique et à l'Ontario au sujet de la compensation? De quelle façon le gouvernement pourrait-il dire non au Québec pour ce qui est de la compensation?

[Traduction]

Le sénateur LeBreton : Comme le sait le sénateur, le Québec est un cas à part puisque les taxes y sont perçues différemment que dans les autres provinces. Je répète, honorables sénateurs, que la responsabilité incombe au ministre des Finances. Celui-ci a indiqué qu'il a eu d'excellents échanges avec le ministre des Finances du Québec. Comme il a déjà été ministre, le sénateur Fox devrait savoir que, en ma capacité de leader du gouvernement au Sénat, il n'y a pas grand-chose que je puisse ajouter à cette étape-ci.

[Français]

Le sénateur Fox : J'ai une question complémentaire : madame le leader du gouvernement au Sénat a mentionné la question de la perception de la taxe. Est-ce que la façon de percevoir la taxe est importante dans le dénouement de ce dossier? Est-ce que cela fait vraiment une différence si la taxe est perçue par le gouvernement du Québec, comme elle l'est en ce moment, ou faut-il absolument qu'elle soit perçue par le ministère du Revenu du gouvernement du Canada? Est-ce vraiment inscrit dans l'ADN du ministère du Revenu que lui seul est apte à percevoir des taxes?

[Traduction]

Le sénateur LeBreton : Pour répondre bien franchement, honorables sénateurs, c'est là un dossier dont je n'ai aucune connaissance et dans lequel je ne me prononcerai pas. Je vais me contenter de prendre la question du sénateur en délibéré. Je m'adresserai aux fonctionnaires compétents du ministère des Finances et du ministère du Revenu national, qui sont en mesure de répondre à la question. Je ne vais pas m'aventurer dans un domaine de compétence que je connais peu, voire pas du tout.

[Français]

L'industrie

Le recensement de 2011

L'honorable Claudette Tardif (leader adjoint de l'opposition) : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Le deuxième rapport annuel relatif à la mise en œuvre du Code de bonnes pratiques de la statistique européenne, produit par le Comité consultatif européen pour la gouvernance statistique, a été déposé la semaine dernière. Parmi les recommandations du comité, on note que les lois statistiques doivent garantir que les services statistiques puissent élaborer, produire et diffuser des statistiques en toute indépendance et dans la transparence. Le rapport utilise à cet effet l'exemple du Canada et le rejet de la nature obligatoire de son recensement au formulaire long pour souligner l'importance de l'indépendance professionnelle des autorités statistiques.

Madame le leader, la communauté internationale déplore publiquement notre gestion des statistiques par l'entremise de ce rapport. Comment comptez-vous redresser la réputation du Canada dans ce domaine, et comment répondez-vous à ce rapport?

(1420)

[Traduction]

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'ai lu le rapport avec grand intérêt et le gouvernement ne changera pas de position quant au questionnaire détaillé du recensement.

Le sénateur Tardif : C'est dommage, parce que le rapport indique clairement que les services statistiques devraient pouvoir fonctionner sans ingérence de la part du gouvernement. Votre gouvernement minoritaire a choisi de rester sourd à Statistique Canada, aux experts, aux professionnels, aux provinces, aux organisations et aux municipalités en maintenant sa décision fortement critiquée de rendre facultatif le questionnaire détaillé du recensement. Comment le gouvernement peut-il continuer de justifier cette mesure irrationnelle?

La communauté internationale en a pris note. Voilà notre réputation souillée dans un autre domaine. Qu'est-ce que le gouvernement sera disposé à faire si les prédictions relatives à l'Enquête nationale auprès des ménages s'avèrent justes, à savoir que les données qu'elle générera seront incomparables à celles des années précédentes et contaminées par le biais de non-réponses, et que le taux de participation sera nettement plus faible?

Le sénateur LeBreton : La partie la plus importante de la question du sénateur est un des mots les plus courts de la langue, soit « si », parce que notre collègue présume que les Canadiens ne rempliront pas le questionnaire facultatif de l'enquête auprès des ménages, qui, comme je l'ai déjà dit, compte le même nombre de questions et sera distribué à un plus large échantillon.

Nous avons toutes les raisons de croire que les Canadiens rempliront ce questionnaire détaillé facultatif et que les renseignements recueillis lors de cette enquête seront aussi utiles qu'auparavant pour tous ceux qui les utilisent. C'est bien mal nommer les choses que de parler d'un formulaire détaillé de recensement obligatoire. « Obligatoire » veut dire obligatoire, ce qui est le cas du questionnaire abrégé du recensement envoyé à tous les Canadiens et qu'ils sont tenus de remplir. Un questionnaire détaillé envoyé à 20 p. 100 des Canadiens peut difficilement être qualifié d'obligatoire, même si c'est ainsi qu'on le qualifiait.

Nous croyons que le questionnaire de l'Enquête nationale auprès des ménages, qui contient les mêmes questions que le formulaire détaillé et qui est envoyé à un échantillon plus large, sera rempli et renvoyé par les gens sans la menace d'amendes ou de harcèlement et qu'il fournira les données voulues. Je mets en garde le sénateur Tardif contre la tentation de supposer que si ceci ou cela ne se produit pas, quelqu'un sera irrité. Je crois que nous devrions attendre et nous fier aux Canadiens et compter sur eux pour remplir le questionnaire de l'enquête qui leur sera envoyé.

Le sénateur Tardif : Je ne suppose rien. Je parle d'un rapport produit pour le Parlement européen.

J'ai une troisième question sur le recensement.

Le sénateur Tkachuk : Oh, oh!

Le sénateur Tardif : Le sénateur voudra peut-être poser une question lorsque nos rôles seront inversés?

Le sénateur Mercer : Ils le seront bientôt.

Le sénateur Tardif : J'ai une troisième question à poser sur le recensement. Est-ce que les résultats de la nouvelle enquête avec un questionnaire détaillé seront traités exactement comme les anciens? C'est-à-dire, est-ce qu'ils seront envoyés à Bibliothèque et Archives Canada pour entreposage permanent et conservation sûre, avec un accès au public après 92 ans?

Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, je prends note de la question. Beaucoup de pays, dont les États-Unis et la Grande-Bretagne se retirent complètement des activités liées aux recensements. Il y a eu récemment des changements qui ont fait suite aux efforts déployés au Sénat par le sénateur Milne. J'obtiendrai une réponse à cette question précise auprès du ministre de l'Industrie, qui est responsable de Statistique Canada.

La santé

La Stratégie de lutte contre le tabagisme

L'honorable Grant Mitchell : Honorables sénateurs, je veux poser une question sur le tabagisme, et j'espère qu'il n'y aura pas de filtre à la réponse, mais je n'y compte pas trop.

La science et la recherche nous apprennent que les avis et les mises en garde sur les emballages des produits du tabac doivent être modifiés régulièrement, sinon les gens deviennent insensibles aux messages. En fait, la réglementation prévoit que ces changements doivent être faits mais, bien sûr, les fabricants de cigarettes ne veulent pas procéder à ces changements, parce que cela nuit à leur image. Or il se trouve que le gouvernement conservateur est très heureux de leur permettre de faire fi de cette règle et de ne pas exiger qu'ils modifient les messages de mise en garde.

Pourquoi le gouvernement prendrait-il le parti des fabricants de cigarettes et de produits du tabac au lieu de s'en remettre à la science et de protéger la santé des Canadiens? En fait, il n'en coûterait pas un sou aux contribuables canadiens d'exiger le respect de la réglementation.

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Je vais donner une réponse sans filtre au sénateur. Ce qu'il dit est absolument faux, et il le sait. Le fait est que notre programme de subventions et contributions, dans le contexte de la Stratégie fédérale de lutte contre le tabagisme, est doté d'un budget annuel de 15,7 millions de dollars pour aider les gens à cesser de fumer, dissuader les jeunes de commencer à fumer et protéger les Canadiens de la fumée secondaire. La semaine dernière, les sénateurs ont entendu parler des dangers de la fumée secondaire.

Pour ce qui est des mises en garde relatives à la santé sur les emballages des produits du tabac, malgré ce qu'en dit le sénateur, Santé Canada n'a pas mis un terme à ce programme. Le ministère étudie la question de ces mises en garde et décidera comment procéder, à savoir si l'on renouvellera ou si l'on changera ces avis, mais il n'a pas rejeté la possibilité de renouveler les mises en garde sur les paquets de cigarettes.

Le sénateur Mitchell : Je suppose que le gouvernement n'a pas non plus rejeté la possibilité de prendre des mesures concernant les changements climatiques, mais Dieu sait combien de temps nous devrons attendre avant qu'il se passe quelque chose à cet égard.

En fait, le gouvernement a pris une décision. Nous le savons, et les responsables le savent. Il a déclaré qu'il se concentrerait plutôt sur l'élimination de la contrebande de cigarettes, comme s'il ne pouvait pas faire les deux en même temps. Ne comprend-il pas qu'il est possible de faire les deux? On peut réduire le taux de tabagisme au moyen des mises en garde sur les paquets de cigarettes et on réduit du même coup la demande concernant les cigarettes de contrebande, ce qui rendrait le travail plus facile.

Le sénateur LeBreton : Le sénateur Mitchell improvise. Où donc a-t-il pris l'idée que le gouvernement se concentrerait simplement sur le tabac de contrebande ou qu'il ne profiterait pas de notre programme de subventions et contributions en vue de faire tout ce qui est en son pouvoir pour dissuader les jeunes de commencer à fumer, convaincre les adultes de cesser de fumer et faire connaître les dangers de la fumée secondaire? J'aimerais que le sénateur Mitchell cesse de fabuler.

Le sénateur Tkachuk : Oui, cessez de fabuler. Vous passez votre temps à fabuler de la sorte.

Le sénateur LeBreton : Absolument. Le sénateur Mitchell, en bon libéral, est le genre de personne qui s'imagine que, lorsqu'elle dit quelque chose, c'est censé être la vérité.

Le sénateur Tkachuk : Exactement.

Le sénateur Mitchell : Je n'allais pas faire ce jeu de mots trop évident, mais je dois dire qu'il est évident qu'à son habitude, quand madame le leader répond aux questions, ses réponses sont fumeuses.

Le gouvernement finira-t-il par comprendre que, en mettant en place ces mesures, il pourrait faire un pas de plus et exiger que les cigarettiers, les compagnies de tabac, modifient leurs étiquettes, ce qui pourrait contribuer à réduire le tabagisme et, partant, le coût des soins de santé, sans qu'il en coûte un sou au contribuable canadien? Pourquoi le gouvernement n'arrive-t-il pas à comprendre cela?

Le sénateur LeBreton : Le sénateur Mitchell dit que mes réponses sont fumeuses. Il fait lui-même bien de la fumée lorsqu'il s'échauffe et lance ses commentaires ridicules.

Le gouvernement est vraiment déterminé à régler le problème de la contrebande du tabac et il appuie sans réserve le programme de lutte au tabagisme. Honorables sénateurs, pas besoin d'être la tête à Papineau pour comprendre que n'importe quel gouvernement, quelle que soit son orientation politique, ferait l'impossible pour réduire les graves conséquences du tabagisme sur la santé des Canadiens.

(1430)

L'honorable Sharon Carstairs : Honorables sénateurs, nous venons dans cette enceinte et nous posons des questions en fonction de l'information qu'on nous a donnée. Nous n'improvisons pas.

Des voix : Bravo!

Le sénateur Carstairs : La ministre de la Santé a participé à une réunion avec les ministres de la Santé de toutes les provinces. Les ministres de la Santé provinciaux s'attendaient à ce que de nouvelles annonces soient imprimées sur les paquets de cigarettes. La ministre de la Santé, malgré le fait que son ministère ait travaillé sur cette question pendant des mois, a annoncé qu'il n'y aurait pas de nouvelles annonces sur les paquets de cigarettes.

Madame le leader du gouvernement prétendra-t-elle maintenant que les ministres de la Santé de toutes les provinces « fabulent »?

Le sénateur LeBreton : Premièrement, vous n'avez pas besoin de crier ainsi. J'entends parfaitement bien.

Le sénateur Cordy : Je ne le crois pas.

Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, je ne sais pas ce que les ministres provinciaux de la Santé s'attendaient à ce que la ministre de la Santé leur dise. Je ne peux répondre que sur les orientations actuelles de la ministre de la Santé. La ministre de la Santé est une ministre remarquable qui travaille dans de nombreux dossiers importants. Elle fait honneur à notre pays et à la région du Nord où elle est née.


ORDRE DU JOUR

Décision de la présidence

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je me suis engagé hier à rendre cet après-midi une décision sur le recours au Règlement qui a été soulevé hier.

Honorables sénateurs, hier, durant le débat sur le sixième rapport du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, il y a eu rappel au Règlement pour savoir si le rapport, qui recommande que le Sénat n'étudie pas davantage le projet de loi S-216, avait été présenté au Sénat dans le respect des règles. Cette préoccupation tenait au fait que le comité n'avait pas effectué l'étude article par article du projet de loi comme l'exige normalement l'article 96(7.1) du Règlement. Aux termes de cet article, « [à] moins de permission de ses membres présents, un comité ne peut omettre l'étude article par article d'un projet de loi ». Par contre, l'article 100 prévoit notamment que, « [s]i un comité chargé d'examiner un projet de loi estime qu'il n'y a pas lieu pour le Sénat de l'étudier davantage, il présente à la Chambre un rapport en ce sens, avec raisons à l'appui ».

[Français]

À ce jour, les comités sénatoriaux ont très peu recouru au processus prévu à l'article 100. On a identifié huit fois depuis 1975 où on a fait recours à cet article, la plus récente étant en 1998, dans le cas du projet de loi C-220. D'après les renseignements disponibles, les comités ayant décidé de faire rapport contre un projet de loi ont pris cette décision sans jamais entreprendre l'étude article par article. Autrement dit, la décision fondamentale d'étudier davantage ou non un projet de loi se prend explicitement ou, le plus souvent, implicitement, avant l'étude article par article. Si un comité décide de faire une recommandation conformément à l'article 100, il ne se rend même pas à l'étape de l'étude article par article.

[Traduction]

Cela nous aide à comprendre comment s'applique l'article 96(7.1), qui a été ajouté au Règlement du Sénat en 2005. Cet article s'applique seulement si le comité se rend, dans les faits, à l'étape de l'étude article par article. S'il ne se rend pas à cette étape parce qu'il estime qu'il n'y a pas lieu d'étudier davantage ledit projet de loi conformément à l'article 100 du Règlement, l'exigence prévue à l'article 96(7.1) du Règlement n'entre pas en jeu. Il serait contradictoire et illogique d'exiger qu'un comité procède à l'étude article par article d'un projet de loi lorsqu'il a déjà décidé de faire un rapport négatif à son endroit.

[Français]

Un examen des bleus de la réunion du 25 novembre du Comité des banques montre que, même si les mots « omettre l'étude article par article » ont été utilisés à un moment donné, cette expression a été rapidement remplacée par « ne pas procéder à l'étude article par article ». Une motion à cette fin a été mise aux voix par appel nominal et a été adoptée. Un rapport recommandant que le Sénat n'étudie pas davantage le projet de loi a alors été proposé. Ce rapport, qui a aussi fait l'objet d'un vote par appel nominal, a été adopté. Les délibérations, sauf pour le bref renvoi à l'omission de l'étude article par article qui a été corrigé, respectaient donc les règles. Le fait de ne pas procéder à l'étude article par article lorsque le comité recommande de ne pas étudier davantage le projet de loi est, comme on l'a souligné, une pratique acceptable.

[Traduction]

Honorables sénateurs, pour reprendre les termes d'une décision rendue le 16 septembre 2009, « [o]n dit souvent que les comités sont maîtres de leurs procédures, mais ils n'en doivent pas moins se conformer au Règlement du Sénat ». Cela est conforme à l'article 96(7) du Règlement, qui interdit aux comités d'adopter, sans l'approbation du Sénat, des procédures ou des pratiques spéciales incompatibles avec les pratiques et les usages du Sénat, et il correspond également à ce que l'on peut lire aux pages 1047-1048 de la deuxième édition de l'ouvrage La procédure et les usages de la Chambre des communes.

Cela dit, la pratique veut que nous accordions à nos comités une grande liberté à l'égard de leurs délibérations. Si la pertinence des délibérations d'un comité suscite des préoccupations, il vaut mieux exprimer ces préoccupations au moment même où elles surviennent et au sein même du comité, afin que des mesures correctives puissent être prises plus facilement.

Je déclare que le sixième rapport a été correctement présenté au Sénat, et le débat peut continuer.

L'honorable Wilfred P. Moore : Honorables sénateurs, j'ai lu le texte de la décision du Président en même temps qu'il la rendait et je n'y ai vu aucune référence au fait que le comité...

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, on ne débat pas de la décision. Si un appel de la décision est interjeté, alors on m'informera que ma décision fait l'objet d'un appel, mais il n'y a pas de débat sur la décision.

Le sénateur Moore : Honorables sénateurs, je ne prétends pas remettre en question l'autorité du Président, mais je suis préoccupé du fait qu'il y a des choses sur lesquelles nous ne nous sommes pas penchés. En comité, nous avions un accord, deux accords...

Son Honneur le Président : À l'ordre, s'il vous plaît.

Le Code criminel

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Hervieux-Payette, C.P., appuyée par l'honorable sénateur Tardif, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-204, Loi modifiant le Code criminel (protection des enfants).

L'honorable Donald Neil Plett : Honorables sénateurs, il y a quelques semaines, j'ai reçu un coup de téléphone de mon frère, qui vit en Colombie-Britannique, qui venait aux nouvelles et voulait savoir ce qui se passait au Sénat. Quand je lui ai dit que j'allais prendre la parole pour parler du projet de loi S-204, le projet de loi anti-fessée, il a été choqué. Il m'a dit : « Ne devriez-vous pas vous préoccuper de la reprise économique, qui est fragile, plutôt que de gaspiller l'argent public et perdre du temps à expliquer aux parents responsables comment élever leurs enfants? »

Honorables sénateurs, je dois dire que je tends à être du même avis que lui. Cependant, étant donné que, conformément au processus démocratique que nous suivons, nous pouvons présenter tous les projets de loi d'initiative parlementaire, quels qu'ils soient, je vais mettre à profit les 40 prochaines minutes payées par les contribuables pour essayer d'expliquer pourquoi nous ne devrions pas permettre à des parents responsables, lesquels parents ont mis des enfants au monde, de punir et discipliner leurs enfants de manière responsable.

Le projet de loi S-204, Loi modifiant le Code criminel (protection des enfants), a pour objet d'abroger l'article 43 du Code criminel. L'article 43 dit ceci :

Tout instituteur, père ou mère, ou toute personne qui remplace le père ou la mère, est fondé à employer la force pour corriger un élève ou un enfant, selon le cas, confié à ses soins, pourvu que la force ne dépasse pas la mesure raisonnable dans les circonstances.

(1440)

En 2004, la Cour suprême du Canada a donné une interprétation restreinte à l'article 43 du Code criminel. Cette décision a restreint la portée du moyen de défense que constitue l'article 43, établissant des limites compatibles avec tant la Charte des droits et libertés que la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant.

Ainsi, seuls les parents qui peuvent prouver qu'ils ont utilisé une force raisonnable dans les circonstances et que la correction imposée était mineure et n'a eu que des effets minimes et insignifiants sur l'enfant, peuvent invoquer ce moyen de défense. Depuis la décision que la Cour suprême a rendue en 2004, les parents qui ont infligé à leur enfant un châtiment corporel qui a laissé des marques, qui ont utilisé un objet, qui ont frappé l'enfant à la tête, ou dont l'enfant ne comprend pas la correction, ne peuvent pas invoquer ce moyen de défense.

L'abrogation du moyen de défense que constitue l'article 43 du Code dans le cadre d'une interdiction des punitions corporelles n'est pas inoffensive. En tant que gouvernement, nous irions trop loin, car il appartiendrait désormais au gouvernement plutôt qu'aux parents de déterminer la façon d'élever un enfant

Selon moi, la loi actuelle, dont la Cour suprême du Canada a confirmé la validité, représente le meilleur équilibre qui soit, à savoir qu'elle protège les enfants des parents violents tout en laissant aux parents responsables le soin de décider de la façon d'élever leurs enfants. Je ne crois pas que l'abrogation du moyen de défense que l'article 43 offre aux parents donnera lieu à un meilleur équilibre que celui que la décision de la Cour suprême du Canada a permis de réaliser.

Honorables sénateurs, en abrogeant l'article 43 du Code criminel on ne fait pas que retirer aux parents responsables la capacité raisonnable de donner la fessée, on leur retire leur rôle de parent. Si l'article 43 était abrogé, les dispositions du Code portant sur les voies de fait s'appliqueraient aux parents, aux enseignants ou aux tuteurs qui emploient la force contre un enfant sans son consentement. Il ne serait plus possible d'invoquer un moyen de défense prévu par la loi, celui fondé sur le caractère raisonnable de la correction.

Comme l'article 265 du Code criminel interdit l'emploi de la force sans consentement et que l'article 279 interdit de séquestrer quelqu'un sans autorisation légitime, certains craignent que l'abolition du moyen de défense qu'offre l'article 43 ait pour effet de criminaliser la conduite des parents pour des gestes qui ne sont pas généralement considérés comme un châtiment corporel, par exemple immobiliser un enfant récalcitrant dans un siège d'auto ou forcer un enfant qui fait une crise de colère à se coucher.

Quiconque a de jeunes enfants sait très bien combien de fois par jour, pendant qu'on vaque à ses occupations normales de parent, on touche son enfant sans son consentement ou menace de le faire. Parmi les activités quotidiennes ordinaires, notons celles consistant à vêtir un enfant, à le faire manger, à l'installer dans l'auto, à le conduire à l'école et à l'en ramener, à lui donner un bain et à le mettre au lit. Prenons le cas d'un jeune enfant qui refuse d'aller à l'école. Comment un parent responsable est-il censé amener l'enfant à l'école sans le prendre dans ses bras contre sa volonté et le transporter?

Honorables sénateurs, cela n'est pas de la violence faite aux enfants; c'est le rôle normal et quotidien du parent responsable. Dans son discours au Sénat, madame le sénateur a dit ceci :

Les enfants n'appartiennent pas à leurs parents. Ils sont des individus à part entière. Leur protection devrait donc avoir préséance sur la protection des adultes et sur le risque imaginaire que représentent les éventuelles poursuites dont ils pourraient faire l'objet [...]

Madame le sénateur a raison de dire que les enfants sont des individus à part entière, mais ils sont des individus mineurs qui ne sont pas encore capables de voler de leurs propres ailes ou de prendre des décisions comme des adultes. Dans notre société, les parents sont responsables du bien-être et de la protection de leurs enfants jusqu'à l'âge adulte, soit l'âge de 18 ans. Les parents sont peut-être responsables de leurs enfants, mais ils devraient pouvoir choisir comment ils exerceront leur rôle de parent.

Tout au long de son discours, madame le sénateur a laissé entendre que la fessée est un acte de violence de la part d'un parent. Le fait de corriger un enfant n'a rien à voir avec la violence ou les mauvais traitements. Malheureusement, madame le sénateur n'en fait qu'une seule catégorie dans le projet de loi S-204. Il existe une nette différence entre donner une claque avec le plat de la main sur le derrière d'un enfant à qui on a expliqué pourquoi on le punit et donner un coup de poing au visage qui cause une ecchymose. Dans un cas, c'est une correction, et dans l'autre, de la violence.

Je vais être clair. Il y a une grande différence entre punir et agresser un enfant. Les parents qui agressent leurs enfants devraient être incriminés, mais les parents responsables punissent leurs enfants. Ils ne les agressent pas. En abrogeant l'article 43, nous éliminons cette distinction, et des parents responsables risquent d'être accusés à tort d'infractions criminelles.

En abrogeant l'article 43, nous franchirions une limite où ce serait le gouvernement, plutôt que les parents, qui déterminerait comment éduquer un enfant.

Comme l'a souligné Dave Quist, directeur général de l'Institut du mariage et de la famille Canada :

[...] Nous devons nous demander si l'État a un rôle à jouer dans l'éducation de nos enfants.

Je crois que le rôle de l'État consiste uniquement à limiter les droits et libertés de la société si ces droits et libertés sont préjudiciables pour la société et ses membres. Rien n'indique que l'État doit intervenir dans ce dossier.

Nous devons également utiliser avec beaucoup de précautions les conclusions des recherches et des études sur la punition des enfants. Dans son discours, madame le sénateur a fait référence à plusieurs études récentes selon lesquelles le recours à la force est inefficace, voire préjudiciable dans l'éducation des enfants. Malheureusement, la plupart du temps, ces études confondent corrélation et causalité et comportent des lacunes sur le plan méthodologique. Qui plus est, la plupart n'établissent pas une distinction claire entre la fessée et l'agression physique, ce qui, par conséquent, fausse leurs conclusions.

Madame le sénateur a également mentionné, dans le discours qu'elle a prononcé dans cette enceinte le 10 juin, que : « [...] une étude fort exhaustive effectuée par Statistique Canada [qui] en montre tous les effets négatifs, dont j'ai déjà parlé lors d'un discours antérieur. »

Ce que le sénateur a omis de mentionner au sujet de cette étude, c'est que l'étude elle-même conclut ce qui suit :

Ces résultats ne démontrent pas que les pratiques parentales punitives provoquent un comportement agressif ou de l'anxiété ou qu'elles restreignent le comportement prosocial de l'enfant.

Un article paru dans le Medical Journal of Pediatrics et intitulé « A Review of the Outcomes of Parental Use of Nonabusive or Customary Physical Punishment » conclut que :

Le constat le plus important de cette analyse est que le nombre d'études de qualité sur les effets néfastes des punitions corporelles non abusives n'est pas suffisant pour permettre d'appuyer des conseils ou des politiques qui vont à l'encontre de cette pratique parentale séculaire. Seulement 30 articles de journaux dignes d'intérêt ont été publiés entre 1974 et 1995, soit une moyenne inférieure à 1,5 article par an. Ensuite, nombre de ces études présentaient des faiblesses sur le plan méthodologique et les études les plus solides tendaient à démontrer les effets bénéfiques des punitions corporelles. Une faiblesse particulièrement répandue est qu'aucune étude prospective ou rétrospective n'a évalué la fréquence ou la gravité du problème de comportement de l'enfant, ce qui reviendrait à étudier la récurrence d'un cancer après des traitements de radiothérapie sans tenir compte de la gravité ou de l'existence du cancer initial. Des recherches de qualité sur les punitions corporelles non abusives sont nécessaires. La recherche de qualité sur la question générale de la discipline exercée par les parents doit devenir une priorité des organismes publics et privés.

La façon dont les parents utilisent les stratégies de discipline pourrait être plus importante que les stratégies qu'ils considèrent inacceptables. Les effets des punitions corporelles, comme ceux des punitions non corporelles, dépendent probablement plus du moment et de la façon dont les parents les appliquent, du rôle de ces punitions dans l'approche globale de la discipline exercée par les parents et de la relation générale entre l'enfant et le parent. Certains autres aspects de la discipline exercée par les parents pourraient être des indicateurs de dysfonctionnement plus importants que le fait d'administrer ou non la fessée.

(1450)

Aussi, dans la publication Akron Law Review de 2009, Jason M. Fuller, de la faculté de droit de l'Université d'Akron, a publié un article intitulé « Les données scientifiques et les statistiques sur la fessée laissent penser que les lois permettant les punitions corporelles sont dans l'intérêt de l'enfant ». Dans cet article, il décrit certains des problèmes liés aux recherches actuelles sur la fessée comme suit :

[...] un grand nombre des opposants de la fessée entament leurs recherches en partant d'une conclusion, et non d'une hypothèse. Par exemple, Murray Straus admet que son objectif est de prouver que la fessée « en soi a des effets psychologiques néfastes sur les enfants et qu'elle est préjudiciable à l'ensemble de la société ». De plus, un examen des études sur la fessée révèle que 83 p. 100 des articles sur les punitions corporelles publiés dans les journaux cliniques et psycho-sociaux ne sont que les éditoriaux, des critiques ou des commentaires d'opinions ne tenant pas compte des nouvelles données empiriques.

Lorsque des scientifiques commencent leurs recherches en ayant déjà formulé une conclusion, il y a plus de chances que leurs conclusions viennent confirmer leurs idées préconçues plutôt que de les modifier ou de les réfuter. En effet, les opposants de la fessée sont connus pour concevoir des études qui conviennent étrangement à leurs idées préconçues. Ils sont connus pour parler des problèmes survenus pendant leur étude uniquement dans les notes à la fin de leur rapport que peu de gens lisent et ils sont connus pour simplement omettre de publier des données qui ne confirment pas leurs hypothèses.

Tout au long de son allocution, madame le sénateur a déclaré à tort que la fessée est une méthode d'éducation violente et est l'application violente de la force. Je crois que le sénateur comprend mal nos lois actuelles. Comme on l'a été mentionné, depuis 2004, les parents ne peuvent plus invoquer l'article 43 du Code criminel pour se défendre lorsqu'un enfant porte des marques, qu'un objet a été utilisé, que la tête de l'enfant a été visée ou que l'enfant est incapable de tirer leçon de la correction. En vertu de la disposition en vigueur, techniquement parlant, les punitions corporelles des enfants sont interdites en vertu des lois canadiennes. En outre, le dictionnaire donne comme définition de la violence l'emploi de la force physique pour blesser ou maltraiter. Cela dit, il est assez clair que le sénateur ne fait pas la distinction entre maltraiter et punir un enfant.

C'est de la maltraitance lorsqu'un parent blesse un enfant ou lui fait du mal. C'est de la discipline lorsqu'un parent s'efforce d'orienter le développement d'un enfant, en l'amenant à tirer des leçons de son expérience et à assumer la responsabilité de ses actes, en lui enseignant la différence entre un comportement acceptable et un comportement inacceptable. Le Sioux Star a traité de ce sujet dans un éditorial : « Notre société a-t-elle atteint un niveau de stupidité tel que nous ne sommes plus en mesure de faire la différence entre la fessée aux fins de la discipline et la maltraitance? »

La fessée ne vise pas à blesser ou à maltraiter un enfant et elle ne doit s'accompagner d'aucune violence. Elle a pour but de corriger l'enfant qui a mal agi. La fessée ne devrait être utilisée que dans le cadre d'une approche claire et cohérente de la discipline des enfants. Je ne crois pas que la fessée devrait être la seule forme possible de discipline des enfants. Je crois que la fessée devrait être contrôlée, structurée et appliquée en privé. La fessée devrait être administrée sans méchanceté ni colère. La fessée permet de faire passer un message à l'enfant : « Tu as dépassé les bornes et ton comportement est inapproprié ». La raison de la fessée devrait être expliquée. Il est très important d'expliquer à l'enfant pourquoi il est puni avant de lui administrer une fessée. La fessée ne devrait pas servir à humilier un enfant. À mon avis, la fessée ne devrait pas être administrée en public, mais seulement en privé, à la maison.

Honorables sénateurs, je siège au Sénat depuis un peu plus d'un an. J'ai eu l'occasion de constater que certains sénateurs ont recours à des anecdotes personnelles pour illustrer leurs propos lorsqu'ils s'adressent au Sénat. Conformément à cette tendance, j'ai l'intention de faire quelques commentaires d'ordre personnel et de raconter trois courtes anecdotes.

Lorsqu'il était âgé de quatre ou cinq ans, mon fils aîné a fait quelque chose qui, à mon avis, méritait une fessée. Comme c'était la première fessée que je m'apprêtais à lui administrer, en tant que jeune père je tenais à ce que la discipline soit appliquée dans les règles. J'ai emmené mon fils dans notre chambre à coucher. Je me suis assis sur une chaise en installant mon fils sur mon genou. J'ai commencé par lui expliquer ce qu'il avait fait de mal en lui disant quelle était la raison pour laquelle j'allais le punir en lui donnant la fessée.

C'est à ce moment que mon fils me regarda, les yeux pleins de larmes, et qu'il me dit : « Papa, je comprends que tu doives me punir, mais je voudrais te dire une chose auparavant ». Je me disais qu'il devrait avoir la chance de se défendre. Je lui ai donc répondu : « D'accord, mon fils, qu'est-ce que tu as à me dire? » C'est là qu'il est venu placer ses bras autour de mon cou en disant : « Papa, je veux simplement te dire que je t'aime ». Inutile de dire que, ce jour-là, il a échappé à la fessée. Je ne sais pas encore pourquoi il n'a pas fini par devenir politicien.

À une autre occasion, après avoir fait une bêtise qui méritait une fessée, il a essayé le même stratagème, sans succès. Dans l'ensemble, je n'ai pas donné beaucoup de fessées à mon fils. C'était une façon comme une autre de maintenir la discipline. Par contre, il n'a pas été traumatisé par les quelques fessées qu'il a reçues. La fessée est une mesure disciplinaire qui a porté ses fruits. Aujourd'hui, il est l'heureux père de deux merveilleux enfants et n'a, à mon avis, aucun problème psychologique.

Je ne crois pas que la fessée, comme mesure disciplinaire, ait les mêmes effets chez tous les enfants. Chaque parent doit trouver les mesures disciplinaires qui fonctionnent pour son enfant. Mon plus jeune fils, par exemple, a une personnalité bien différente de celle de mon fils aîné, comme le montre l'anecdote suivante. Un jour, alors que je rentrais du travail, j'ai trouvé ma femme très fâchée contre lui. Il avait, lui aussi, environ quatre ans à l'époque et avait éparpillé toutes les serviettes et tout le linge de maison sur le plancher de la salle de bain. Ma femme me dit qu'il refusait de les ramasser et me pria de m'en occuper.

Je le pris par le bras, l'amenai dans la salle de bain et je lui dis fermement qu'il devait nettoyer cette pagaille. Il me regarda droit dans les yeux et me défia en criant « non ». Je le pris alors plus fermement par le bras et lui ordonnai de nettoyer cette pagaille, sans quoi je n'aurais d'autre choix que de lui donner une fessée. Il me regarda de nouveau droit dans les yeux et cria « non ».

À ce point-ci, j'ai senti le besoin de lui donner une fessée. Je l'ai mis sur mes genoux et je lui ai donné quelques tapes sur le derrière. Il s'est mis à pleurer. Je lui ai répété qu'il devait ramasser le dégât qu'il avait fait. Devant un nouveau refus, je l'ai remis sur mes genoux pour lui donner à nouveau quelques tapes. Nous étions désormais tous les deux en larmes.

Quand j'ai eu terminé, je lui ai une fois de plus demandé de ramasser son dégât. « Non », m'a-t-il répondu. J'étais alors au bout du rouleau et je me demandais quoi faire pour que cet enfant m'écoute. J'ai donc décidé d'essayer autre chose. J'ai regardé mon fils en pleurs et je lui ai demandé : « Mon garçon, si je t'aide, ramasseras-tu ce dégât avec moi? » Il m'a immédiatement répondu : « Oui, papa, je vais le faire. »

Cette anecdote montre bien que la fessée peut être efficace avec un enfant, mais pas avec un autre. Ce qui ne veut pas dire que mon fils n'a jamais eu d'autres fessées. Aujourd'hui, son frère et lui sont à la tête d'une entreprise de plomberie et de chauffage à Landmark — je fais un peu de promotion pour ma collectivité. Sa femme et lui attendent leur deuxième enfant. J'espère que ce sera un garçon. Mon fils n'est pas un tenant de la fessée, mais son fils est discipliné et très bien élevé.

Je vais maintenant vous raconter une anecdote me concernant. Quand j'avais 12 ou 13 ans, j'ai assisté à un match de football local dans la cour de mon école. Comme tout bon adolescent, je ne pouvais pas me contenter de simplement regarder le match; moi et quelques autres garçons de mon âge avons alors décrété qu'il nous fallait des cigarettes. Il y avait une maison sur le terrain de l'école. Comme nous savions que son propriétaire fumait, nous avons décidé d'entrer chez lui par effraction et de lui voler quelques cigarettes.

Quelques jours plus tard, en rentrant à la maison, le soir, je suis passé devant le magasin d'équipement de plomberie et de chauffage qui appartenait à mon père. Il est sorti et m'a ordonné de le suivre à l'intérieur. Il m'a ensuite demandé si j'avais entendu parler qu'un cambriolage avait eu lieu récemment dans le voisinage et que les voleurs avaient dérobé des cigarettes. J'ai tout de suite su que les carottes étaient cuites et j'ai tout avoué.

Mon père m'a dit qu'il allait me donner une fessée. Il m'a ordonné de grimper sur une chaudière qui se trouvait sur place afin que la traction soit à son maximum. Il m'a dit avant de commencer que la fessée qu'il s'apprêtait à me donner lui ferait plus mal à lui qu'à moi. Après quelques coups bien sentis, il m'a ordonné de déguerpir, d'aller présenter mes excuses au propriétaire de la maison et de lui rendre ce qui lui appartenait. Je ne sais toujours pas ce qui a été le pire pour moi, la fessée ou les excuses.

Quelques jours avant que mon père meure, je lui ai rendu visite. J'étais assis à son chevet lorsque je lui ai rappelé cette histoire. Je lui ai alors demandé s'il se rappelait la fessée qu'il m'avait donnée. Il s'en rappelait très clairement.

(1500)

Puis, je lui ai demandé s'il croyait encore que la fessée lui avait fait plus de mal qu'à moi. Il m'a répondu « non » en souriant.

Je serais curieux de savoir, honorables sénateurs, combien d'entre vous ont reçu des punitions physiques lorsqu'ils étaient jeunes? Combien diraient qu'ils en gardent des cicatrices sur le plan affectif et qu'ils sont devenus violents à cause de cela? Lorsque je jette un coup d'œil dans cette enceinte, j'y vois des gens qui ont l'air passablement normaux.

Selon moi et selon de nombreux autres Canadiens, les parents devraient être libres de décider comment ils comptent punir leurs enfants, pourvu que ce soit raisonnable et que cela ne revienne pas à infliger des sévices.

En janvier 2004, le soir précédent la décision de la Cour suprême sur la légalité de l'article 43 du Code criminel, SES-Sun Media a sondé 1 000 personnes au Canada pour connaître leur opinion sur l'usage de la force par les parents en vue de punir un enfant, par exemple en lui donnant la fessée. Les personnes sondées ont répondu dans une proportion de 64 p. 100 qu'elles étaient favorables à l'usage de la force par les parents pour punir un enfant. Seulement 7 p. 100 d'entre elles étaient favorables à l'idée que l'on intente des poursuites criminelles contre les parents qui donnent la fessée à leurs enfants. Ce résultat est clair : les Canadiens souhaitent que les parents responsables puissent choisir eux-mêmes comment punir leurs enfants.

Au Canada, le problème provient en partie des incohérences importantes entre les dispositions sur la délinquance juvénile et les responsabilités parentales. En abrogeant l'article 43 du Code criminel, nous risquons d'aggraver ces incohérences. D'une part, trois provinces — le Manitoba, l'Ontario et la Colombie-Britannique — se sont dotées de lois qui permettent de tenir les parents responsables des actes commis par leurs enfants. Ainsi, les parents sont civilement responsables des dommages causés par leurs enfants.

Le Code civil du Québec contient lui aussi une disposition portant sur la responsabilité des parents. Ceux-ci sont responsables de réparer les préjudices causés par leurs enfants, que ces préjudices soient corporels, moraux ou matériels. Ces lois provinciales signifient que les parents sont considérés comme responsables du comportement de leurs enfants.

En revanche, l'avortement est accessible d'un bout à l'autre du Canada sans que le consentement des parents ne soit nécessaire. Cela fait passer le message contraire, à savoir que les parents n'ont pas à s'immiscer dans les affaires de leurs enfants.

Dans un article publié dans le Today's Family News, on lit ceci :

Entre-temps, La Presse Canadienne rapporte que la juge Suzanne Tessier, de la Cour supérieure du Québec, a statué, vendredi, qu'un parent divorcé ayant la garde légale de sa fille âgée de 12 ans n'a pas le droit de refuser à cette dernière la permission de participer à une excursion scolaire de trois jours afin de célébrer la fin de ses études primaires. En opposant ce refus à sa fille le père voulait la punir parce qu'elle avait affiché des photos indécentes d'elle-même sur Internet alors qu'il lui avait interdit de le faire, et ce, à plusieurs reprises.

Appuyée par sa mère, la jeune fille a intenté une poursuite contre son père, car elle devait obtenir le consentement de ses deux parents pour participer à l'excursion scolaire en question. La juge Tessier a conclu que le fait de priver la jeune fille de cette excursion constituait une punition trop sévère, car la jeune fille et ses parents étaient déjà pris dans une bataille difficile concernant la garde de l'enfant. Le père a juré qu'il interjetterait appel de la décision.

Lorne Gunter, chroniqueur au National Post, qualifie de renversant le raisonnement de la juge Tessier. Il écrit ceci : « D'un côté on a un père qui a la garde légale de sa fille à temps plein, un père qui veille à ce que sa fille ne se fasse pas prendre dans l'univers des prédateurs qui sévissent sur Internet, un père qui doit prendre des mesures disciplinaires et gérer les conflits déchirants découlant du divorce, de l'autre on a une juge qui lui rend la tâche beaucoup plus difficile. »

Le paradoxe, comme l'a indiqué l'Ottawa Citizen, c'est que le comportement de ce père devrait être applaudi par ceux qui s'opposent à l'usage d'une « force raisonnable » pour corriger les enfants indisciplinés.

« Il ne s'agit pas d'un cas d'autorité cruelle ou arbitraire. Il n'y a eu aucune violence, loin de là. Il semble que le père a fait des mises en garde claires et cohérentes et qu'il a indiqué à sa fille que son comportement inapproprié entraînerait des conséquences. Voilà comment on apprend aux enfants à être responsables, à comprendre les conséquences de leurs actes. C'est une approche disciplinaire qui devrait être encouragée par l'État, et non interdite.

En abrogeant l'article 43 du Code criminel, nous risquons davantage d'affaiblir la responsabilité parentale. Il n'appartient pas au gouvernement de dire à des parents responsables comment ils devraient élever leurs enfants. Je ne crois pas que ce soit à nous de dire aux parents responsables comment ils devraient élever leurs enfants. Les parents ont le devoir de s'acquitter de leurs responsabilités envers leurs enfants et c'est ce que font les parents responsables. Ces derniers veulent ce qu'il y a de mieux pour leurs enfants et que ces derniers deviennent des membres productifs de la société. Les parents responsables méritent qu'on leur donne la marge de manœuvre dont ils ont besoin pour le faire, sans que l'État les surveille. Ils méritent d'avoir le choix d'élever leurs enfants comme ils le veulent.

Le sénateur propose que nous suivions l'exemple suédois et que nous interdisions, comme les Suédois l'ont fait il y a 30 ans, le recours à la force dans le cadre de l'éducation des enfants. Voici ce qu'a dit Theodore Kettle dans un article de Newsmax :

Une étude basée sur 2 600 entrevues portant sur les châtiments corporels, qui comprenait également les réponses de 179 adolescents à des questions sur la fessée et autres châtiments corporels administrés par leurs parents, a été menée par Marjorie Gunnoe, professeure de psychologie au Calvin College de Grand Rapids au Michigan.

Les constatations de Mme Gunnoe, qui ont été annoncées cette semaine, précisent que « les affirmations voulant que l'on ne doive pas donner la fessée aux enfants ne tiennent pas. Elles ne correspondent pas aux données recueillies. »

Selon les constatations de Mme Gunnoe, les enfants qui avaient reçu des châtiments corporels avaient de meilleurs résultats que les autres dans bon nombre de catégories, y compris les notes scolaires. Ils avaient un point de vue optimiste sur la vie, étaient disposés à faire du bénévolat et ils avaient l'ambition de faire des études collégiales. De plus, ils ne réagissaient pas différemment de ceux qui n'avaient pas reçu de correction, tant au niveau des activités sexuelles précoces, de la participation à des batailles ou d'épisodes de dépression. Elle a constaté très peu de différences entre les sexes et les races.

Une autre étude, qui a été publiée l'an dernier dans l'Akron Law Review, s'est penchée sur les casiers judiciaires et a établi que les enfants qui ont grandi dans un milieu où les châtiments corporels étaient interdits étaient beaucoup plus susceptibles d'être impliqués dans des actes criminels.

L'un des éléments clés du travail de Jason M. Fuller de l'University of Akron Law School a porté sur l'expérience de la Suède qui avait été, il y a 30 ans, le premier pays à interdire les châtiments corporels imposés aux enfants et qui constitue à bien des égards « un laboratoire de rêve pour étudier l'interdiction de la fessée » selon M. Fuller.

Depuis l'interdiction de la fessée, le taux de violence envers les enfants a grimpé de plus de 500 p. 100 selon les rapports de police. Même une année après la mise en œuvre de cette interdiction, et après une imposante campagne publique de sensibilisation sur l'éduction des enfants menée par le gouvernement, M. Fuller a établi que « non seulement les parents suédois avaient davantage le réflexe de pousser, d'empoigner et de bousculer leurs enfants que les parents américains, mais ils les battaient deux fois plus souvent qu'eux. »

Dix ans après l'entrée en vigueur de l'interdiction, « le taux de mauvais traitements des enfants en Suède avait atteint un niveau trois fois supérieur à ce qu'il était aux États-Unis » et « de 1979 à 1994, le taux de mauvais traitements des enfants de moins de sept ans en Suède a augmenté de six fois, » révèle l'analyse de M. Fuller.

Le rôle parental « éclairé » semble également contribuer à la violence plus tard dans la vie. « La violence parmi les adolescents suédois a monté en flèche au début des années 1990, quand les premiers enfants nés après l'interdiction des fessées sont devenus adolescents, » indique M. Fuller. « Les préadolescents et adolescents de moins de 15 ans se montraient encore plus violents avec leurs pairs. En 1994, le nombre de voies de fait criminelles perpétrées par des adolescents était six fois supérieur à ce qu'il était dix ans plus tôt. »

Pour terminer, honorables sénateurs, je voudrais ajouter que j'ai cru bon de ne pas me contenter de citer ce que disent les adultes, c'est pourquoi j'ai décidé de demander à une fillette de 10 ans ce qu'elle pense des fessées.

Ma petite-fille de 10 ans nous a rendu visite il y a quelque temps. Alors qu'elle était assise sur mes genoux, je lui ai mentionné combien elle est gentille et sage, parce qu'elle aidait sa grand-mère à faire la cuisine, et sa mère à s'occuper de ses jeunes frères et sœurs. Ma petite-fille m'a regardé droit dans les yeux et m'a dit : « Grand-papa, ça fait trois ans que je n'ai pas reçu de fessée. » Je lui ai expliqué qu'elle était trop vieille pour cela. Elle m'a répondu : « Oh non, pas du tout. Si je me comporte mal, je mérite encore une fessée. » Quand je lui ai répondu qu'il vaudrait peut-être mieux qu'on l'envoie dans sa chambre, elle m'a dit : « Non, je n'ai pas peur qu'on m'envoie dans ma chambre; ça n'a aucun effet. »

(1510)

J'ai demandé à ma petite-fille si elle voulait bien m'écrire une lettre expliquant son opinion et elle a accepté. Je vous présente ici la lettre d'une fillette de 10 ans. Elle m'a été remise dans une enveloppe scellée lors de notre souper de l'Action de grâce. Même ses parents n'avaient pas lu la lettre.

À qui de droit,

Je m'appelle Emily Summer Plett. Je suis la fille de Brad et Cynthia Plett, la petite-fille du sénateur Don et de Betty Plett. Je vis à Camp Cedarwood. J'ai 10 ans et je suis en sixième année. J'aime les enfants et aider les gens, comme les personnes âgées. J'ai très hâte d'être assez vieille pour garder des enfants et pour un jour devenir mère.

Lorsque je serai mère, je veux que mes enfants soient disciplinés. Je veux qu'ils fassent bien à l'école, qu'ils puissent se trouver un travail, qu'ils soient responsables et qu'ils soient de bons citoyens. Afin de discipliner un enfant, il est important de le punir lorsqu'il désobéit. Il y a différentes manière de punir un enfant. Pour certains, une période d'isolement fera l'affaire, mais d'autres pourraient se sentir mis de côté et abandonnés et pourraient aussi planifier de s'évader ou de se venger contre leurs parents.

Je me souviens lorsque ma mère et mon père m'envoyaient réfléchir dans ma chambre. Je me disais qu'ils étaient méchants de m'envoyer toute seule dans ma chambre plutôt que de penser à ce que j'avais fait de mal. Je crois que la fessée est le moyen le plus efficace de discipliner un enfant parce que l'enfant sait alors que ça fait mal de faire quelque chose de mal et, lorsqu'il grandit, il n'aura pas à en payer les conséquences. Par exemple, si un enfant vole quelque chose à un ami et que vous le battez, il saura qu'il ne doit pas faire cela.

La fessée est aussi un moyen rapide de régler un problème et l'enfant peut oublier ce qui s'est passé et retourner jouer. Mais les parents ne devraient jamais battre un enfant sans raison. Comme je l'ai déjà dit, enlever quelque chose à un enfant ou l'envoyer dans sa chambre peut fonctionner, mais d'autres n'apprendront pas tant que ça ne leur fera pas physiquement mal. Par conséquent, on devrait permettre aux parents de choisir le châtiment qui convient à leurs enfants et il ne devrait pas être interdit de donner la fessée.

J'espère que le reste de l'année sera beau pour vous.

Sincèrement,

Emily Summer Plett

Honorables sénateurs, est-ce que cela ressemble à une enfant soumise à de mauvais traitements ou à quelqu'un qui n'a pas bien appris? Cela ressemble plutôt aux mots d'une enfant de 10 ans bien adaptée.

En terminant, je veux revenir sur un autre élément du discours du sénateur, où elle cite Alice Miller, une philosophe et sociologue française :

Quand on éduque un enfant, il apprend à éduquer. Quand on fait la morale à un enfant, il apprend à faire la morale; quand on le met en garde, il apprend à mettre en garde; quand on le gronde, il apprend à gronder, quand on se moque de lui, il apprend à se moquer, quand on l'humilie il apprend à humilier […]

J'ajouterai simplement à cela que, lorsque vous disciplinez un enfant avec amour, vous lui apprenez à discipliner avec amour.

L'honorable David P. Smith : Puis-je poser une question au sénateur?

Le sénateur Plett : Oui.

Le sénateur Smith : Par curiosité, car je m'intéresse à votre santé, concernant cette entrée par effraction pour voler des cigarettes, les preuves médicales ont-elles fait effet dans votre cas? Avez-vous vu la lumière, ou fumez-vous toujours?

Le sénateur Plett : Merci beaucoup de cette question, sénateur. Ce fut ma dernière entrée par effraction, et j'ai cessé de fumer il y a environ 30 ans.

Son Honneur le Président : Quelqu'un d'autre veut intervenir?

L'honorable Céline Hervieux-Payette : J'aimerais dire que je reste sans voix, mais j'espère que nous pourrons discuter de cette question au comité.

Le sénateur Cowan : Elle pose une question.

Le sénateur Hervieux-Payette : Peut-être quelques questions pour être sûre que je comprends votre raisonnement. Ma première est la suivante : savez-vous que les Nations Unies ne nous ont jamais donné une note parfaite en ce qui concerne cette question de la fessée, parce que cette pratique est toujours admise dans notre pays alors que 24 pays l'ont abolie, pour la plupart des pays de l'OCDE? Je me demande si vous le savez, parce que vous avez cité la Charte des Nations Unies — que nous ne respectons pas. Êtes-vous conscient du fait que nous ne respectons pas la Charte?

Le sénateur Plett : Honorables sénateurs, je vais répondre d'abord à la deuxième partie de la question. Je me demande combien de ces 30 pays qui ont interdit cette pratique se retrouvent dans la même catégorie que la Suède, où cela n'a pas fonctionné, de toute évidence. Pour ce qui est de la première question, la réponse est non.

Le sénateur Hervieux-Payette : Honorables sénateurs, j'ai une autre question. Vous avez parlé d'« essayer autre chose ». J'aimerais savoir pourquoi, quand on aime quelqu'un, autre chose ne fonctionnerait pas mieux qu'une fessée.

Le sénateur Plett : Je vous remercie de poser la question. Honorables sénateurs, je crois avoir dit clairement, à plusieurs reprises, dans mon discours, qu'il existe d'autres méthodes de discipline. En parlant de ma propre famille, j'ai dit qu'un de mes fils n'était pas un partisan de la fessée et qu'il a un fils très bien élevé parce que les parents utilisent d'autres moyens — ce qui ne veut pas dire qu'il n'a jamais donné de tape à son fils.

J'encourage certainement les gens à avoir recours à d'autres formes de discipline. Je dis seulement qu'un parent responsable devrait avoir le choix et ne pas se faire dire comment discipliner son enfant, parce que les enfants ne réagissent pas tous de la même façon à différentes tactiques disciplinaires.

Le sénateur Hervieux-Payette : J'ai une troisième question, honorables sénateurs. Si vous administrez le même genre de fessée à un enfant qui se trouve chez vous, qu'il s'agisse de l'enfant d'un voisin ou d'un enfant en visite qui se conduit mal, que pensez-vous qu'il vous arrivera?

Le sénateur Plett : Je ne suis pas certain d'avoir compris la question. Est-ce que vous me demandez ce qui m'arriverait si je donnais la fessée à l'enfant de mon voisin?

Le sénateur Hervieux-Payette : Oui.

Le sénateur Plett : Permettez-moi de dire que si mon voisin donnait la fessée à mon enfant, je voudrais certainement savoir de quoi il en retournait. Je ne crois pas avoir laissé entendre un seul instant dans mon discours que nous devrions permettre à nos voisins d'administrer une fessée à nos enfants.

Je suis responsable de l'éducation de mes enfants, comme vous l'êtes des vôtres et comme mon voisin l'est des siens. Je serais certainement très contrarié si mon voisin avait administré une fessée à mes enfants.

Le sénateur Hervieux-Payette : Honorables sénateurs, j'en conclus que cela serait considéré comme un acte criminel et que, en conséquence, il est interdit de poser un tel geste sur quiconque n'est pas son enfant. Êtes-vous de cet avis?

Le sénateur Plett : Je ne vais pas dire si cela mérite ou non une accusation au pénal. Je suppose que, en fonction des circonstances et de ma capacité à pardonner, je pourrais décider de passer l'éponge. Je ne suis pas certain. Je crois qu'il est très hypothétique de me demander comment je réagirais à une situation qui ne m'est jamais arrivée.

Le sénateur Hervieux-Payette : Honorables sénateurs, je tiens à rappeler au sénateur Plett que, même s'il n'était pas présent, 60 enfants sont venus étudier ce projet de loi au Sénat. L'événement a été enregistré par certaines stations de télévision. Parmi ces 60 enfants, pas un seul n'était d'avis que la fessée constituait un remède approprié à leur conduite. Ils nous ont donné une grande variété de punitions qu'on pourrait leur imposer et qui, en fait, les avaient aidés à réfléchir à ce qu'ils avaient fait.

Vous avez le témoignage de votre petite-fille. Je conviens que presque tous les représentants de la génération précédente considèrent que la fessée est une forme de discipline. Toutefois, j'espère que, dans votre province, on fait confiance aux recherches menées par les psychologues, les psychiatres et autres membres de professions médicales. Ils se sont tous prononcés contre la fessée.

Que peut-on répondre à ces gens qui sont responsables de la santé de nos enfants?

Le sénateur Plett : D'abord, honorables sénateurs, j'ai tout simplement donné l'exemple de ma petite-fille pour faire connaître mon point de vue. Ma petite-fille n'a pas été psychologiquement affectée par ce geste, ni mes enfants ni moi.

Suis-je d'avis que nous devrions permettre aux enfants de rédiger nos lois? Non, désolé, ce n'est pas ce que je crois. Je ne crois pas que 60 enfants, ou ma petite-fille, devraient déterminer le contenu des lois. Je lui ai demandé son avis, et j'aurais aimé qu'on ait consulté 61 enfants ce jour-là, car il y en aurait eu un qui n'aurait pas été de cet avis.

Le sénateur Hervieux-Payette : Honorables sénateurs, je pose une dernière question, qui sera peut-être aussi une observation. Je souhaite que vous acceptiez de renvoyer le plus rapidement possible le projet de loi au comité pour qu'il soit étudié en profondeur. Toutefois, je me demande si vous avez vu des marques sur les fesses de votre fils la deuxième fois où vous lui avez donné la fessée.

Le sénateur Plett : Non, je crois qu'elles avaient disparu.

Son Honneur le Président : Y a-t-il d'autres interventions?

Le sénateur Plett : Si je puis me permettre, c'était il y a 30 ans, bien avant que l'article 43 du Code criminel n'entre en vigueur.

(Sur la motion du sénateur Carstairs, le débat est ajourné.)

(1520)

[Français]

Projet de loi d'urgence de 2010 sur la gestion interne des entreprises commerciales canadiennes

Deuxième lecture—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Hervieux-Payette, C.P., appuyée par l'honorable sénateur Tardif, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-205, Loi prévoyant des moyens pour rationaliser la gestion interne des entreprises commerciales canadiennes durant la période d'urgence nationale résultant de la crise financière mondiale qui porte atteinte à la stabilité économique du Canada.

L'honorable Gerald J. Comeau (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, le sénateur Gerstein est absent en ce moment, et je note que nous en sommes à la quatorzième journée de cet article inscrit au Feuilleton. Je voudrais donc proposer l'ajournement en son nom pour le reste du temps qui lui est alloué.

(Sur la motion du sénateur Comeau, au nom du sénateur Gerstein, le débat est ajourné.)

Projet de loi concernant la réorganisation et la privatisation de la société énergie atomique du Canada limitée

Deuxième lecture—Suspension du débat

L'honorable Céline Hervieux-Payette propose que le projet de loi S-225, Loi concernant la réorganisation et la privatisation de la société Énergie atomique du Canada limitée, soit lu pour la deuxième fois.

— Honorables sénateurs, je prends aujourd'hui la parole à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi S-225, Loi concernant la réorganisation et la privatisation de la société Énergie atomique du Canada limitée et prévoyant d'autres mesures qui se rapportent à l'énergie nucléaire.

Ayant pris conscience de l'indifférence du gouvernement conservateur à des secteurs stratégiques de l'économie du Canada et de son attachement aux avantages politiques et financiers à court terme, j'ai donc décidé de donner suite aux recommandations que l'industrie nucléaire a formulées au cours des audiences que le Comité sénatorial permanent des finances nationales a consacrées à EACL au cours de l'été dernier.

Les solutions proposées dans le projet de loi visent en fait à réorganiser EACL en une entité rentable dont le Canada pourra continuer de profiter. Elles tendent aussi à insuffler un regain de confiance dans la capacité d'EACL de mener des recherches et des travaux de génie, et de fabriquer, installer, réparer et remettre en état des réacteurs CANDU, aussi bien au Canada qu'à l'étranger.

[Traduction]

EACL contribue de bien des façons à notre réputation internationale, à notre économie et aux domaines de la médecine et de la physique nucléaire. En dépit de ces exploits, la société risque d'être vendue sans qu'il soit vraiment tenu compte des retombées qu'elle a engendrées pour les Canadiens.

Cette semaine, le gouvernement de l'Ontario a décidé d'affirmer sa confiance en l'industrie nucléaire canadienne en dévoilant un plan énergétique à long terme pour la province qui prévoit la remise en état de 10 réacteurs nucléaires et la construction de deux autres. Assorti de coûts estimés entre 30 et 40 milliards de dollars et de la création d'environ 25 000 emplois, cet engagement est loin de représenter un modeste investissement. Si le gouvernement de l'Ontario croit en la technologie nucléaire du Canada, pourquoi le Canada refuse-t-il d'y croire? Comme il ne reste plus beaucoup de temps pour protéger notre industrie nucléaire, j'ai décidé la semaine dernière de présenter le projet de loi S-225 afin de sauver Énergie atomique du Canada limitée.

Le projet de loi S-225 vise à faire en sorte que l'un des joyaux de l'État, Énergie atomique du Canada limitée, demeure la responsabilité du gouvernement fédéral, avec la participation minoritaire du secteur privé, afin de réunir des capitaux et d'accroître la qualité marchande des réacteurs de la société. Pour demeurer concurrentielle et conquérir de nouveaux marchés, EACL doit pouvoir compter sur des entrées de capitaux. Cela dit, ce projet de loi établira des règles qui protégeront l'industrie nucléaire pour qu'elle ne voie pas l'intégralité de ses recettes et de ses innovations s'envoler entre les mains d'entités étrangères.

[Français]

Le secteur nucléaire du Canada est une industrie de 6,6 milliards de dollars par année, qui rapporte des recettes fiscales fédérales et provinciales de 1,5 milliard de dollars par année, et fournit 71 000 emplois, soit 21 000 emplois directs, 10 000 emplois indirects et 40 000 emplois dérivés. L'industrie regroupe 150 entreprises et réalise des exportations de 1,2 milliard de dollars par année.

Depuis 48 ans, l'industrie nucléaire canadienne affiche un excellent dossier en assurant, dans trois provinces, une production d'électricité fiable, sûre et économique.

Depuis, en qualité d'organisation de recherche et développement nucléaire national, EACL met à profit ses capacités de recherche en sciences et en génie pour assurer le développement et le soutien des produits et services CANDU commerciaux, de la médecine nucléaire et de la recherche sur les matériaux pour un large éventail d'industries.

Certes, il nous faut nous attaquer rapidement à la réorganisation d'EACL pour atténuer les répercussions préjudiciables des retards sur la société et les milliers de petites entreprises qui la soutiennent, mais je dois souligner que la vente d'EACL au secteur privé ou à des sociétés étrangères hors de tout cadre réglementaire risque de saper nos capacités comme chef de file mondial dans le domaine nucléaire et de compromettre des dizaines de milliers d'emplois.

L'industrie nucléaire forme un club très exclusif où on ne trouve qu'environ six grands protagonistes qui, d'une façon ou d'une autre, sont appuyés financièrement par un gouvernement. La participation de l'État à ce secteur est impérative. Le gouvernement fédéral est le seul acteur qui soit en mesure de financer la recherche et le développement qui préservera la compétitivité d'EACL dans le monde. Qui plus est, le gouvernement fédéral est le seul qui puisse réglementer ce secteur de façon sûre pour qu'il demeure un avantage pour les Canadiens dans les domaines de l'énergie, de la médecine et de la science.

[Traduction]

Honorables sénateurs, le temps presse en ce qui concerne le projet de loi S-225. L'industrie nucléaire canadienne ne peut rester à rien faire en attendant de voir comment EACL sera réorganisée. Devant la volonté du gouvernement de démanteler EACL, c'est maintenant qu'il faut agir et amener un heureux dénouement qui sera avantageux pour l'industrie nucléaire canadienne. Le gouvernement conservateur, le ministre des Ressources naturelles et le premier ministre ont laissé tomber l'industrie nucléaire canadienne.

Le projet de loi S-225 prévoit un nouveau rôle pour le secteur privé et EACL. Le secteur privé, dont la participation dans l'entreprise sera de 30 p. 100, se chargera de la gérer, tandis que le gouvernement fédéral, dont la participation sera de 70 p. 100, veillera à ce que les décisions soient prises dans l'intérêt supérieur des Canadiens et à ce que l'on investisse davantage dans la recherche et le développement dans le domaine des sciences nucléaires. La participation majoritaire du gouvernement fédéral dans EACL garantira l'application de normes de sécurité, protégera la pension des employés et fera en sorte que les employés puissent travailler dans les deux langues officielles.

Comme des dizaines de témoins l'ont dit au Comité sénatorial permanent des finances nationales dans le cadre de son étude du projet de loi C-9, projet de loi fourre-tout d'exécution du budget, le monde est à l'aube de la renaissance nucléaire, la construction de 400 nouveaux réacteurs nucléaires étant prévue à l'échelle mondiale au cours des 20 prochaines années.

[Français]

On perçoit dans le monde entier les signes précurseurs d'une renaissance du nucléaire. Le 1er février 2010, on comptait 54 réacteurs nucléaires en construction, 148 prévus et 342 à l'étude. Le Canada peut et devrait profiter de cette renaissance grâce à la création d'emplois, de l'innovation et à l'investissement dans les universités, les entreprises et les collectivités. En fait, cette renaissance garantit que le Canada formera, en anglais et en français, des milliers d'ingénieurs, de physiciens nucléaires, de soudeurs, et cetera.

Par conséquent, toute mesure prise par EACL pour s'implanter sur de nouveaux marchés devrait rapporter des avantages directs aux Canadiens. Une association du gouvernement avec le secteur privé, qui aurait une participation minoritaire, voilà la solution idéale pour régler tous les problèmes inhérents à la structure actuelle d'EACL.

Comme nous l'avons observé par le passé, les ventes de réacteurs nucléaires sont souvent l'aboutissement d'une rencontre entre chefs d'État, comme ce fut le cas pour le plus important marché d'EACL, conclu par le gouvernement Chrétien et le gouvernement chinois. EACL est vraiment une société mondiale. Le Canada a vendu des réacteurs nucléaires CANDU aux quatre coins du monde, par exemple en Argentine, en Corée du Sud, en Chine, au Pakistan et en Inde.

(1530)

Avant que des sénateurs de l'autre parti ne disent qu'EACL n'est qu'un joueur modeste au milieu des sociétés plus imposantes et dotées de technologies différentes, permettez-moi de signaler qu'EACL comble une lacune sur le marché du nucléaire et est en fait devenue un spécialiste sur un marché à créneaux. Tout comme Bombardier est devenu un joueur important sur le marché des petits jets d'affaires, EACL est aujourd'hui synonyme d'une production d'énergie nucléaire sûre, efficace et fiable à partir d'uranium non enrichi ou de combustible nucléaire recyclé dans des centrales à l'eau lourde.

L'industrie nucléaire canadienne emploie en gros 70 000 personnes dont des universitaires, des chercheurs et des scientifiques, avec la participation de petites entreprises, des services publics, des gouvernements provinciaux et le gouvernement fédéral.

[Traduction]

Il est essentiel qu'EACL demeure la propriété d'intérêts canadiens pour préserver les emplois existants et en créer de nouveaux. Les universitaires ont souvent affirmé que sans EACL, il n'y aurait pas de grandes facultés de sciences nucléaires au Canada. Le Canada a formé bon nombre de ses spécialistes du domaine nucléaire dans les nombreuses facultés de nos universités canadiennes. Si EACL passait aux mains d'un gouvernement étranger, cela entraînerait l'exode des nouveaux diplômés dans le domaine des sciences nucléaires et aurait des répercussions sur les besoins dans les domaines connexes comme l'ingénierie, le droit, les finances et autres.

Nos compétiteurs sont financés par leurs gouvernements et ils ont donc accès à d'énormes ressources monétaires. Ils n'hésiteront pas à absorber nos spécialistes de ce domaine. Honorables sénateurs, il nous faut évaluer le dossier de cette industrie comme étant une confrontation entre pays. Si nous ne défendons pas notre industrie nucléaire, un autre pays s'en emparera et la fera sienne.

EACL est une industrie stratégique et, à ce titre, elle a besoin de protections qui assureront la sécurité des Canadiens. En abandonnant ce secteur à un autre pays, nous sonnerions le glas de notre souveraineté et de notre capacité à garder la maîtrise des infrastructures importantes comme les réacteurs nucléaires. Nous ne pouvons pas nous permettre de renoncer à notre indépendance énergétique et nous ne pouvons pas non plus accepter que d'autres pays s'approprient nos scientifiques et nos technologies.

[Français]

Honorables sénateurs, à titre de législateurs, nous avons l'obligation d'agir dans l'intérêt supérieur de nos concitoyens, mais il arrive aussi que nous ayons l'obligation de songer à l'intérêt supérieur de la planète. À un moment où la sécurité mondiale est fragile, le Canada doit continuer de faire entendre une voix forte sur la scène internationale.

Nous avons constaté le mois dernier que la communauté internationale avait jugé sévèrement le Canada à l'ONU à cause des positions qu'il a prises sur la scène internationale. EACL est un outil idéal pour renouveler la diplomatie canadienne dans le monde et un porte-flambeau pour l'électrification des petits pays ou des pays en développement.

[Traduction]

EACL est un excellent outil diplomatique. La menace de la prolifération nucléaire est toujours très présente. Il suffit de penser à des pays comme l'Iran ou la Corée du Nord, ou même à des groupes terroristes. Les réacteurs nucléaires CANDU d'EACL sont la façon idéale d'exporter une énergie nucléaire sûre et fiable vers les pays en développement, car ils utilisent de l'uranium naturel qu'il est impossible de raffiner pour en tirer un produit de type militaire. Cette caractéristique unique procure aux produits d'EACL un avantage concurrentiel sur les technologies offertes par les autres fabricants et permet de préserver l'équilibre géopolitique dans les régions où la situation est délicate.

De plus, la réputation du Canada comme fournisseur de technologies de pointe libre des compromis politiques auxquels d'autres entreprises peuvent devoir se soumettre procure aux réacteurs CANDU un statut spécial dans les négociations avec des pays qui ont besoin de plus d'énergie pour développer leur économie.

Le projet de loi S-225 vise un autre élément du mandat d'EACL, soit la production d'isotopes médicaux essentiels au traitement et au diagnostic d'une grande variété de maladies. Le Canada fournit plus de 50 p. 100 de l'approvisionnement mondial en isotopes médicaux destinés à la médecine nucléaire. Ces isotopes sont utilisés dans plus de 50 000 interventions par jour dans le monde, dont 5 000 au Canada. Ce projet de loi fera en sorte que le gouvernement fédéral continuera de s'acquitter de sa responsabilité envers les Canadiens et le reste du monde de façon en leur assurant un approvisionnement sûr en isotopes médicaux. La récente pénurie d'isotopes a illustré la nécessité d'un approvisionnement sûr et bien géré de ces matériaux de diagnostic et de traitement.

[Français]

Le gouvernement doit s'engager publiquement à maintenir le réacteur NRU de Chalk River opérationnel au-delà de la date arbitraire de 2016 aussi longtemps que nécessaire et jusqu'à ce qu'il existe d'autres sources sûres d'approvisionnement en isotopes ou d'autres agents radiopharmaceutiques éprouvés et bien en place.

Les laboratoires de Chalk River demeurent les laboratoires de recherche nucléaire au Canada. Ils emploient plus de 2 700 personnes, appuient des milieux scientifiques qui regroupent plus de 400 chercheurs et ingénieurs dans l'industrie canadienne, les services de l'État et plus de 50 départements universitaires au Canada. Ils appuient aussi le fonctionnement d'un réseau mondial d'installations à faisceaux de neutrons, attirant la collaboration de plus d'une centaine d'établissements dans plus de 20 pays.

[Traduction]

Dans une lettre datée du 4 octobre 2010 le ministre des Ressources naturelles confirme qu'une des priorités du gouvernement du Canada est d'assurer l'approvisionnement du système de santé canadien en isotopes médicaux. Le ministre a défendu le contraire devant le Comité sénatorial permanent des finances nationales lorsqu'il a reconnu que le gouvernement appuyait sans réserve la vente d'EACL. Honorables sénateurs, quand le gouvernement conservateur va-t-il prendre des mesures dans l'intérêt des Canadiens?

En 2009, les délégués au Conseil général de l'Association médicale canadienne ont adopté une résolution par laquelle ils demandent au gouvernement fédéral de préserver la capacité du Canada de produire et d'exporter des isotopes médicaux et de revoir sa décision de se retirer de la production d'isotopes médicaux.

La décision du gouvernement de renoncer aux responsabilités internationales et au rôle de chef de file du Canada dans ce secteur va à l'encontre des objectifs du gouvernement en matière d'innovation et de productivité. La stratégie d'approvisionnement du Canada est basée sur le renouvellement de la licence du réacteur de Chalk River cinq ans après la licence actuelle et rien ne garantit actuellement que le réacteur recommencera à produire et continuera de le faire. L'absence apparente de plan fédéral d'intervention d'urgence si, en 2016, les autres fournisseurs et les autres technologies émergentes ne répondent pas aux besoins cliniques est inacceptable.

La décision du gouvernement d'abandonner le rôle de chef de file international que le Canada joue depuis fort longtemps dans ce secteur est démoralisante et l'absence de solutions immédiates et à moyen terme qui permettraient de relever les défis auxquels la médecine nucléaire est confrontée et sera confrontée de façon imminente est inacceptable.

La fermeture du réacteur de Chalk River a entraîné la diminution du nombre d'examens médicaux, soit 12 000 de moins, nécessitant des isotopes. Cela est inacceptable. EACL compte 70 000 employés et permet à des milliers de Canadiens de rester en vie. Ai-je besoin de rappeler aux sénateurs les propos méprisants de l'ancienne ministre des Ressources naturelles, Lisa Raitt, qui était fière de dire que la crise des isotopes était « sexy »? Cela illustre le mépris du gouvernement conservateur à l'égard de la santé des Canadiens. Je vous invite à avoir cela en tête lorsque vous déciderez d'appuyer le projet de loi ou pas.

[Français]

Certains de mes honorables collègues ont insisté sur le fait qu'il est possible de démembrer EACL sans qu'il y ait la moindre conséquence pour la qualité des recherches et des produits de cette société. C'est tout simplement ridicule. EACL est fondée sur l'interdépendance : interdépendance du NRU avec la production d'isotopes à des fins médicales, interdépendance entre EACL et l'appui du gouvernement fédéral et, enfin, interdépendance des milliers de PME qui créent et fournissent les outils et les matériaux dont EACL a besoin pour s'acquitter efficacement de son mandat.

De plus, le contrôle d'EACL par le gouvernement fédéral garantira que les fonds seront investis dans la recherche nucléaire. Par sa nature même, la recherche n'est pas une activité rentable. Pourtant, elle est moralement nécessaire et constitue un élément essentiel à la réussite de la filière des réacteurs CANDU d'EACL.

(1540)

Le contrôle exercé par le gouvernement fédéral garantira aux Canadiens un approvisionnement sûr et fiable en isotopes à des fins médicales tout en faisant en sorte que nos plus brillants éléments dans la recherche nucléaire puissent poursuivre des recherches qui aboutiront à des percées en médecine, et pour que soit renforcée la capacité d'EACL de créer des réacteurs nucléaires insurpassés dans leur catégorie et à la fois économiques, fiables et sûrs.

[Traduction]

J'aimerais rétablir les faits quant aux chiffres que mes collègues d'en face lancent souvent au sujet du coût d'EACL pour les contribuables canadiens. Ils ont prétendu à maintes reprises qu'EACL avait englouti près de 20 milliards de dollars de l'argent des contribuables en 50 ans. Même si c'était vrai, ce chiffre représenterait 400 millions de dollars par année. Pour mettre les choses en perspective, le gouvernement conservateur a dépensé 850 millions de dollars pour les sommets du G8 et du G20 qui ont duré deux jours. Ce montant équivaut à plus de deux années d'investissements dans EACL. Dans un des deux cas, l'argent des contribuables a été gaspillé, mais ce n'est certainement pas dans EACL.

Le gouvernement conservateur souhaite-t-il vraiment abandonner des recettes fiscales de 1,5 milliard de dollars qui sont versées dans les coffres du gouvernement fédéral et des provinces? Je ne pense pas devoir rappeler aux sénateurs que notre déficit budgétaire dépasse les 50 milliards de dollars.

Pour comprendre les coûts véritables, nous devons séparer les investissements dans la recherche et le développement des budgets opérationnels. La recherche ne permettra jamais de générer des profits. C'est une activité coûteuse, qui prend beaucoup de temps et qui nécessite la participation de professionnels hautement spécialisés. Les investissements dans la recherche et le développement profitent au secteur des réacteurs et ils continueront de le faire pendant encore des années. Nos réacteurs sont très prisés partout dans le monde, et des mesures doivent être prises pour maintenir notre capacité de répondre à la demande croissante en matière d'énergie nucléaire.

Permettez-moi de citer un témoin qui a comparu devant le comité qui s'est penché sur le projet de loi C-9 concernant le budget pendant l'été. Voici ce qu'il a déclaré :

Le Congrès de l'Argentine a adopté un projet de loi l'an dernier — il a fallu plus de temps que prévu — visant la remise à neuf de leur réacteur CANDU et la fabrication de deux nouveaux réacteurs de ce genre. Cela s'est passé, pour ainsi dire, dans notre cour. Le contrat nous appartenait, mais les Argentins tentaient sans cesse de se renseigner auprès des représentants du gouvernement canadien pour savoir où ils en étaient. S'ils procédaient à la restructuration, soutiendraient-ils toujours l'entreprise d'une façon quelconque? Posséderaient-ils toujours une part de la société? Ils n'ont pas obtenu de réponse et franchement, ils en ont marre.

[...] et ils envisagent de poursuivre le gouvernement fédéral.

Quand le gouvernement commencera-t-il à aider les Canadiens qui ont besoin de travail en cette période économique difficile et à protéger cette fière industrie canadienne? Des pays sont prêts à acheter nos produits et, pourtant, le gouvernement leur dit de chercher ailleurs. Cela dépasse l'entendement.

[Français]

EACL est une organisation qui travaille pour le bien des Canadiens et de l'humanité. Ses découvertes font partie de notre patrimoine et de notre propriété intellectuelle commune. Des millions de dollars ont été injectés dans la recherche nucléaire au Canada, ce qui a produit des résultats et des réalisations reconnus de par le monde. Certains sénateurs grinceront des dents, mais je vais leur dire qu'il ne faut pas commettre la même erreur que dans le dossier de l'Avro Arrow. Nous devons défendre cette industrie bec et ongles et prendre des mesures pour veiller à ce que son renouvellement ouvre la voie à la prospérité au lieu de priver l'entreprise de sa permanence sur la scène mondiale.

Si nous appuyons la rationalisation d'EACL au moyen d'une solide participation minoritaire du secteur privé, le Canada restera un chef de file dans le secteur des sciences nucléaires et tirera profit de la renaissance prochaine de l'industrie nucléaire. Des pays qui se développent comme la Chine, l'Inde et le Brésil ont un appétit insatiable d'énergie et de ressources non renouvelables. Les réacteurs CANDU constituent une façon de répondre à leurs besoins d'énergie, tout en atténuant les répercussions de leur consommation d'énergie sur l'environnement.

[Traduction]

Nos concurrents sont financés par leur gouvernement et disposent donc d'énormes ressources financières. Ils ne se feront pas prier pour embaucher nos travailleurs doués dans ce domaine. Honorables sénateurs, vous devez penser à cette industrie comme à un commerce entre pays et, si le Canada ne défend pas son industrie nucléaire, un autre pays la conquerra et se l'appropriera.

[Français]

Le ministre Paradis a promis une décision dans un avenir rapproché. Le gouvernement a déjà trop tardé à mettre sur la table les avenues qui sont examinées depuis plusieurs années. Il a promis de soumettre le tout à l'attention des parlementaires en vue d'une discussion franche et transparente. Pendant que nous attendons ses propositions, des hommes et femmes de talent attendent avec impatience une position rationnelle du gouvernement.

Avec la modernisation des réacteurs actuels à l'aide de composants tout à fait innovateurs, tant au niveau du design que des matériaux composites, avec l'ouverture de nouveaux marchés grâce au CANDU de nouvelle génération, le Canada possède l'expertise de haut niveau nécessaire pour relever le défi énergétique qui frappe aux portes de l'humanité. Notre industrie nucléaire y est prête et nous voulons procéder dès maintenant.

[Traduction]

L'honorable Nicole Eaton : Madame le sénateur accepterait-elle de répondre à une question?

Le sénateur Hervieux-Payette : Oui.

Le sénateur Eaton : Je suis d'accord pour dire que la recherche ne rapporte pas d'argent, mais je trouve intéressant que madame le sénateur veuille que le gouvernement conserve une participation majoritaire dans Énergie atomique du Canada limitée. Est-ce parce qu'elle veut protéger les syndicats dans le cadre de leurs négociations des nouvelles conventions au printemps? Est-ce la protection des syndiqués qui explique notre précipitation?

Le sénateur Hervieux-Payette : Dans une industrie qui existe depuis 48 ans, il ne m'est jamais venu à l'esprit que les employés avaient perdu le droit à la syndicalisation, que ce soit dans le secteur privé ou le secteur public. Pour autant que je sache, cette question n'est pas en jeu.

L'honorable W. David Angus : Madame le sénateur accepterait-elle de répondre à une autre question? J'en ai quelques-unes pour elle.

Le sénateur Hervieux-Payette : Oui.

Le sénateur Angus : Je veux d'abord féliciter madame le sénateur pour son exposé détaillé, complet et instructif et pour avoir souligné l'actuelle renaissance du nucléaire.

Je pense que madame le sénateur est au courant que, au cours des dernières semaines, le Comité de l'énergie s'est rendu non seulement à Chalk River, aux installations de recherche et au réacteur NRU, mais aussi aux installations de l'OPG à Darlington et aux installations de Bruce Power au Lac Huron.

Il est dommage que certaines des données sur lesquelles madame le sénateur a fondé son exposé soient dépassées. Elle a dit, par exemple, que le NRU assure 50 p. 100 de la production mondiale d'isotopes. Le chiffre exact, selon le NRU, est de 20 p. 100.

Je vais poser ma question à madame le sénateur parce que je suis très confus. S'oppose-t-elle à la vente d'EACL, ou de quelque partie que ce soit de la société, ou s'oppose-t-elle à la vente d'EACL à un pays étranger souverain?

Je sais pertinemment, comme nous le savons tous ici, que madame le sénateur croit fermement au génie du secteur privé et aux dispositions des Canadiens en matière d'entreprenariat. S'oppose-t-elle à ce que le secteur privé dirige une filiale d'EACL qui s'occuperait du réacteur CANDU?

Le sénateur Hervieux-Payette : Je sais que le sénateur n'a pas eu le temps de lire le projet de loi, mais j'ai proposé que le secteur privé soit propriétaire de 30 p. 100 des actions. Dans le modèle que j'ai présenté, je parle un peu de la première étape de la privatisation de Petro-Canada. Lorsque nous avons privatisé une partie de la société, il y avait des gestionnaires du secteur privé et un conseil d'administration.

Je veux qu'Énergie atomique du Canada reste une propriété canadienne. Cependant, j'ai prévu que 30 p. 100 de ces 30 p. 100 pourraient être détenus par des étrangers. Par exemple, si nous établissions un partenariat avec l'Inde, des sociétés canadiennes pourraient s'associer à des partenaires pour vendre des réacteurs dans le monde.

Je suis d'avis que le secteur privé est compétent pour la commercialisation et pour la gestion d'entreprise. Cependant, je crois que le gouvernement est le principal vendeur dans l'affaire. Le marché ne peut être conclu sans le gouvernement fédéral et sans la recherche. Je ne vois pas comment nous pourrions accepter de laisser les profits de l'entreprise à d'autres alors que nous avons investi « X » millions de dollars par année en recherche et développement.

Le sénateur Angus : J'ai une question complémentaire, si je puis me permettre.

Le comité produira bientôt un rapport avec ses constats, après avoir visité ces incroyables centrales. Il ne fait aucun doute que le Canada possède une industrie nucléaire formidable. Ce que nous avons vu à la centrale Bruce Power, qui appartient entièrement au secteur privé et qui fonctionne bien, est des plus impressionnants.

(1550)

Madame le sénateur serait-elle contre l'idée qu'Énergie atomique du Canada demeure une société d'État et conserve la propriété des laboratoires de recherche de Chalk River et du réacteur NRU, qui, soit dit en passant, n'a jamais eu pour vocation d'être un fournisseur commercial d'isotopes? Il l'est devenu simplement parce qu'il produisait des isotopes. Aujourd'hui, on ne fait que remettre les isotopes à MDS Nordion, une société privatisée par le très bon gouvernement de Brian Mulroney. Madame le sénateur se souviendra qu'elle était contre cette idée. Cette entreprise est la seule à faire la commercialisation et la vente des isotopes.

La question que je pose à madame le sénateur est la suivante : serait-elle contre l'idée de vendre seulement la production, le commerce et la maintenance des réacteurs CANDU à des propriétaires privés canadiens, tandis que le reste continuerait d'appartenir à l'État?

Le sénateur Hervieux-Payette : Oui, je serais contre cette idée, et voici pourquoi. Lorsque nous privatisons une société canadienne, ses acheteurs peuvent par la suite la revendre à n'importe qui, sans aucune limite. Voilà pourquoi j'ai des réserves, et aussi parce que la sécurité est un facteur important dans ce secteur d'activité.

Il ne s'agit pas d'une banale société pétrolière et gazière, mais bien d'énergie nucléaire. En ce qui me concerne, j'estime que c'est un privilège pour nous d'avoir des réserves importantes d'uranium; nous avons la matière première, et nous attirons d'importants investissements étrangers.

Personnellement, j'aimerais que nous puissions faire concurrence à une grosse entité comme la société française, modèle dont je me suis inspirée. Si nous appuyons la recherche et le développement, je ne vois pas pourquoi les Canadiens ne pourraient pas participer à la valeur ajoutée produite par la société; en effet, les contribuables deviendraient des actionnaires et bénéficieraient de cet investissement au même titre que le secteur privé.

L'honorable Michael A. Meighen : Honorables sénateurs, j'avoue d'entrée de jeu que je n'ai pas eu la chance de lire le projet de loi.

Pour revenir au pourcentage de 30 p. 100, je me demande pourquoi madame le sénateur s'est arrêtée là. Pourquoi pas 49 p. 100 ou 51 p. 100? Qui donc achèterait 30 p. 100 des parts, une proportion suffisamment importante pour représenter une somme considérable mais pas assez importante pour prendre le contrôle de la compagnie? La stratégie de sortie serait plutôt difficile puisqu'il faudrait vendre une grande partie de la compagnie. Je pense qu'il est problématique de fixer la limite à 30 p. 100. Peut-être madame le sénateur a-t-elle une raison d'avoir choisi ce chiffre-là plutôt qu'un autre.

Le sénateur Hervieux-Payette : Étant donné que je veux que l'entreprise reste entre des mains canadiennes et non en majorité dans des mains étrangères, le comité, je pense, pourrait envisager une autre solution. J'admets que je ne détiens plus d'actions de SNC, mais j'ai été vice-présidente chez SNC. Nous avons eu des échanges avec Canatom quand j'occupais ce poste. Le président de Canatom était un vice-président de SNC et il était mon voisin. C'est pour cela que je connais l'industrie nucléaire depuis longtemps. Les entreprises ont leur place, mais je ne peux penser à aucune entreprise canadienne qui puisse obtenir les milliards de dollars nécessaires à la recherche et au développement. Je pense que nous devrions partager les risques. Si le comité pense que 40 p. 100 est ce qui est le plus approprié, on peut justifier cela. C'est ce que je propose. Cela pourrait être un début, je pense, et nous pourrions discuter de cette possibilité.

L'honorable Elizabeth (Beth) Marshall : Madame le sénateur accepterait-elle de répondre à une autre question?

Le sénateur Hervieux-Payette : Oui.

Le sénateur Marshall : J'ai trouvé les commentaires du sénateur très intéressants. Je siège au Comité des finances nationales et nous avons entendu beaucoup de témoins parler d'Énergie atomique du Canada limitée. La plupart des témoins ont dit que l'entreprise avait besoin de deux choses : d'une nouvelle direction et d'un afflux de capitaux privés.

Madame le sénateur croit-elle que si le gouvernement détenait la majorité des actions dans la société, cette dernière prendrait une nouvelle orientation?

Je crains que, si le gouvernement demeure actionnaire majoritaire de la compagnie, ce soit du pareil au même. Madame le sénateur croit-elle que diviser la participation avec le secteur privé dans une proportion de 70-30 aiderait à concrétiser la nouvelle orientation que doit prendre la société?

Le sénateur Hervieux-Payette : Au Québec, il y a aujourd'hui une loi stipulant qu'il doit y avoir parité hommes-femmes dans les conseils d'administration. Les chasseurs de têtes sont invités à recruter des administrateurs indépendants qui peuvent contribuer à l'avenir de la société. Je présume qu'une nouvelle société devrait former une équipe d'administrateurs qui représenteraient bien le milieu des affaires, notamment des utilisateurs, et je ne vois pas en quoi le fait que certains administrateurs, mais pas la majorité, proviennent du gouvernement poserait un risque de conflits.

C'est ce que nous avons fait avec Petro-Canada. Nous ne détenions pas la totalité des sièges au conseil d'administration. Le conseil d'administration établit l'orientation que prendra la société. Autant que je sache, il s'agit d'un partenariat. À mon avis, ce genre de partenariat atténuerait le risque, car c'est bel et bien une entreprise risquée. Nous avons vu, avec la remise en état de la centrale nucléaire de Point Lepreau, que passer à la prochaine génération est une tâche ardue. C'est pourquoi nous devrions accompagner les entreprises canadiennes vers cette nouvelle génération de réacteurs nucléaires. Je crois que tout le monde est gagnant si les secteurs public et privé travaillent main dans la main dans ce dossier.

Le sénateur Marshall : Madame le sénateur répondrait-elle à une question supplémentaire à la suite de cette réponse?

Le sénateur Hervieux-Payette : Oui.

Le sénateur Marshall : C'est au sujet du partage dans une proportion de 70-30. Quand nous avons entendu les témoins, au Comité des finances nationales, une autre question qui revenait sans cesse était la nécessité de trouver des capitaux privés.

Madame le sénateur croit-elle qu'une société du secteur privé investira de l'argent dans une société qui est toujours contrôlée par le gouvernement? On sait que, de tout temps, les gouvernements ont eu de la difficulté à générer des bénéfices, et je suis sûre que toute société privée voudra faire des profits. J'imagine qu'on risque d'avoir de la difficulté à amener des entreprises du secteur privé à investir dans une société détenue majoritairement par le gouvernement. Qu'en pense le sénateur?

Le sénateur Hervieux-Payette : J'ai réfléchi à cette question. Nous avons au Québec plusieurs exemples de sociétés contrôlées par des familles. Il y a la famille Bombardier, qui détient la société en majorité mais qui vend des parts sur le marché public. Nous avons aussi la chaîne Jean Coutu et la Power Corporation. Il y a chez nous de nombreux exemples de sociétés du secteur privé où un groupe d'actionnaires contrôlent l'entreprise en raison du nombre de leurs votes. Cela n'a jamais empêché ces entreprises de trouver du soutien financier au sein du monde des affaires. Cette situation, où des actionnaires détiennent une majorité des parts et obtiennent quand même du financement, existe aussi dans le secteur public. C'est généralement le cas des fonds de pension.

L'honorable Richard Neufeld : Madame le sénateur répondrait-elle à une autre question?

Le sénateur Hervieux-Payette : Oui.

Le sénateur Neufeld : Je remercie le sénateur de ses observations. Le cas de Petro-Canada était un peu différent. Le gouvernement libéral de l'époque avait décidé d'acheter des entreprises solvables, qui fonctionnaient, et de créer une marque détenue par le gouvernement dans le secteur du pétrole et du gaz. Le cas d'AECL est totalement différent. Elle a été fondée en tant qu'entreprise du secteur public au Canada. Elle existe depuis bien des années et a des réalisations extrêmement bénéfiques à son actif.

Madame le sénateur a parlé de compétitivité, disant que seul le gouvernement pourrait maintenir cette compétitivité. Pourrait-elle nous dire pourquoi pas un seul réacteur n'a été vendu en 13 ans, alors que d'autres sociétés en ont vendu?

Deuxièmement, je siège également au Comité des finances nationales, comme le sénateur Marshall. Je trouve inquiétant qu'AECL ait réclamé plus de 1 milliard de dollars seulement au cours de l'année dernière, pour se maintenir à flot. Je vais arrondir les chiffres parce que je ne suis pas certain des chiffres exacts. Cette année, je crois qu'elle a obtenu 402 millions de dollars pour commencer. Le Budget supplémentaire des dépenses (B) vient d'être présenté, et on y voit une autre demande, cette fois de 296 millions, et l'année n'est pas terminée. La société coûtera donc probablement bien au-delà de 1 milliard de dollars, et ce simplement pour assurer son fonctionnement.

Nous devrions repenser à notre manière de gérer EACL en gardant l'entreprise et son personnel au Canada. Je crois qu'ils font un excellent travail et je crois que nous devrions leur permettre de continuer ce travail. Leurs réacteurs CANDU sont formidables. Ces gens nous disent qu'ils sont formidables et ces réacteurs utilisent un uranium pauvre. Pourquoi ces réacteurs ne sont-ils pas vendus partout sur la planète? Le sénateur affirme que c'est parce que le gouvernement est le seul qui peut faire cela, mais il ne l'a certainement pas prouvé — et je parle tant d'un gouvernement conservateur que d'un gouvernement libéral.

Madame le sénateur peut peut-être réagir à ces observations et avoir l'amabilité de dire aux sénateurs combien d'argent nous devrions encore injecter dans EACL au cours des 50 prochaines années si nous voulons la conserver.

Le sénateur Hervieux-Payette : Honorables sénateurs, j'espère que le sénateur Neufeld m'écoutait lorsque j'ai dit que l'Argentine nous suppliait presque à genoux de lui vendre deux réacteurs CANDU. Je me suis rendue dans divers pays avec le Forum interparlementaire des Amériques et cette question est souvent abordée. Même nos ambassadeurs sont gênés parce que, lorsqu'on leur pose des questions, ils ne peuvent rien promettre quant à la vente de réacteurs parce qu'ils n'obtiennent pas de réponses du gouvernement.

Il faut dire que la situation économique a aussi pesé dans la balance. Nous devons penser au coût unitaire final, mais sans pour autant oublier que les autres moyens traditionnels de production d'électricité nous permettent désormais d'arriver au même résultat. Je crois que l'Ontario a bien fait en choisissant de construire deux nouvelles unités.

Nous parlons de « renaissance »; or, nous ne sommes pas les seuls à utiliser ce terme. Les représentants de l'industrie n'ont que ce mot-là aux lèvres. Nous sommes à un tournant, et la concurrence est féroce. La Russie et la France réussissent à vendre leurs unités partout sur la planète. Si nous voulons que ces investissements se concrétisent et si nous voulons que cette entreprise soit viable, il faut que nous les laissions en faire la promotion. Je suis fermement convaincue que nous y trouverons tous notre compte.

Bruce Power et SNC pourraient être propriétaires-partenaires, et il y a assez de pays dans le monde qui seraient intéressés à acheter leurs produits. Par contre, il faudra que l'entreprise puisse compter sur une véritable force de vente, qui serait active sur le terrain et qui brasserait des affaires partout dans le monde, sans pour autant oublier le soutien du gouvernement, qui aura toujours son mot à dire, puisqu'au final, les transactions se font de gouvernement à gouvernement. Nous savons qu'Exportation et développement Canada a proposé de contribuer au financement, mais si nous avons réussi à trouver 9 milliards de dollars pour GM, c'est-à-dire pour une entreprise américaine, je crois que nous devrions réussir à trouver l'argent pour assurer la survie d'Énergie atomique du Canada limitée.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, comme il est 16 heures, conformément à l'ordre adopté par le Sénat le 15 avril 2010, je déclare que le Sénat s'ajourne au jeudi 2 décembre 2010, à 13 h 30, par décision du Sénat.

(Le Sénat s'ajourne au jeudi 2 décembre 2010, à 13 h 30.)


Haut de page