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SOCI - Comité permanent

Affaires sociales, sciences et technologie

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
affaires sociales, des sciences et de la technologie

Fascicule 8 - Annexe 1


Annexe S900 S2-C-12, 8 "1"

NOTES POUR UNE PRÉSENTATION AU COMITÉ SENATORIAL PERMANENT DES AFFAIRES SOCIALES DES SCIENCES ET DE LA TECHNOLOGIE SUR LE PROJET DE LOI C-12 (ASSURANCE-EMPLOI)

PAR
MATHILDA BLANCHARD, REPRÉSENTANTE SYNDICALE
SYNDICAT ACADIEN DES TRAVAILLEURS AFFILIÉS ET DES PÊCHES

MEMBRE FONDATEUR DU COMITÉ DES 12 POUR LA JUSTICE SOCIALE AU NOUVEAU-BRUNSWICK

MEMBRE DU COMITÉ DE LA FORMATION EN PÊCHES DE L'ÉCOLE DES PÊCHES À CARAQUET, N.-B.


La Péninsule acadienne et ses industries qui sont toutes saisonnières

La Péninsule acadienne compte de nombreuses industries qui sont toutes dépendantes des ressources naturelles. Il y a l'agriculture avec ses bleuettières, ses immenses champs de fraises, ses services de serres, sa culture de la patate, des légumes, de l'avoine, du blé, du foin et autres. Cette terre que nous cultivons depuis près de trois cents ans, est la plus fertile de tout notre pays et le climat qui complète ce cycle mystérieux de la nature, le meilleur au monde.

Il ne faudrait pas oublier que des arbres fruitiers, tel le pommier, le prunier, le cerisier et plusieurs autres qui murissent aussi chez-nous. Les fermes, que l'industrialisation avait fait disparaître, reviennent lentement mais sûrement. Le lait, les oeufs, les viandes et autres sont de plus en plus de chez-nous.

Les pêches: les espèces de poissons et de crustacés, qui remplissent les eaux gui entourent la Péninsule acadienne, sont plus nombreuses que n'importe où ailleurs et leur saveur prisent dans les eaux les plus salés de notre planète, n'ont pas d'égale. Les tourbières, qui sont aussi des pêches, produisent une mousse de première qualité.

La forêt: le centre de la Péninsule est une immense forêt où poussent de nombreuses espèces des plus beaux arbres du Canada. Bois de construction, bois de chauffage et bois qui alimente les usines de pâtes et papier. L'industrie des arbres et couronnes de Noël, provenant de nos beaux sapins, le roi de la forêt, est de plus en plus prospère. La qualité et la couleur de nos sapins est supérieurs à ceux provenants d'ailleurs nous dit-on.

Un véritable paradis terrestre que Dieu a mit à la disposition de tous les hommes afin qu'ils puissent survivre. Dieu a aussi créé un climat pour cette terre bénie. I1 a fait que durant à peu près six mois à chaque année, sans exception, toute le nature qui a tant donné durant la chaude saison, disparaisse sous d'épaisses couches de neige blanche. La terre gèle, les arbres perdent leurs feuilles et ceux qui gardent leurs parures ploient sous le fardeau de la neige qui les recouvre. Les eaux qui nous entourent ainsi que les rivières, les lacs et les baies à l'intérieur des terres, deviennent des amas de glaces solides qui tardent à fondre même lorsque le printemps est venu. La nature toute entière se repose et récupère ses énergies.

Les hommes se retirent dans leurs chaumières afin de se reposer et de reprendre, eux aussi, leurs force pour le prochaine saison de travail. Même si nous ne les avons pas nommé, en parlant d'industrie, il était quand même sous-entendu que ce sont eux, les travailleurs, qui font que la roue tourne. Sans leurs dures labeurs, la vie sur la terre ne serait pas possible. Tous ces industries, dont nous avons parlées, sont la base de tous les autres et l'économie de chez-nous, comme celle d'ailleurs, en dépend entièrement.

La force ouvrière dans la Péninsule acadienne est polyvalente et est unique en son genre. Nul part ailleurs trouve t'on une telle mosaïque. C'est peut-être la raison pour laquelle on comprend si mal les «saisonniers » de chez-nous. Si mal comprit que même certains parlementaires schizophrènes les voient «assit au bord de l'eau» durant l'été.

La saison de travail debute vers la fin d'avril, début mai. C'est alors la saison de homard, du crabe, du hareng, du gaspareau et autres espèces.

C'est aussi le temps des semailles. Puis, fin juin début juillet, on récolte les fraises. Le temps des fraises, c'est comme le temps des lilas. Tous le monde semble heureux. I1 y a aussi le temps des foins. Tous ce travai1 devient un plaisir, une sorte de vacance, des voyages dans les champs.

Les bûcherons, eux, vent déjà dans la forêt et sur les lots boisés. Ils sont bien-aise de se retrouver dans la nature malgré la chaleur et les piqûres d'insectes.

Le grand branle-bas est alors à son comble. On dirait qu'une vraie folie s'empare de toute la population. I1 se fait un va et viens constant jusqu'à vers la fin du mois de juillet. Il y a alors une accalmie juaqu'à vers le milieu d'août et la danse recommence. C'est le hareng et ses raves. Dans les champs les bleuets ont muri. C'est aussi le début de la récolte de la patate et des légumes. Puis c'est déjà le temps de la moisson avec la première pleine lune de septembre. Avec les premières gelés du mois d'octobre commence la coupe des branches de sapins pour la confection des couronnes de Noël et les chemins dans les bois seront jonchés de ballots d'arbres de Noël. Le tout sera exporté vers les États-Unis, nos voisins. Puis au mois de décembre, toute cette agitation prend brusquement fin. Le travail arrête et le chèque de paye aussi arrête. Il faudra attendre au printemps pour en toucher un autre. En général, les travailleurs ont gagné environt 3 000 $ et parfois moins durant à peu près sept (7) mois en accumulant de 12 à 20 semaines travaillées.

Les travailleurs eux, pendant tout ce temps, se balladent d'un industrie à l'autre, d'un emploi à l'autre, selon la demande. Ils vont d'une localité à l'autre, quatre semaines ici, cinq semaines là; ainsi va leur emploi. Ils voyagent de 50 à 124 milles par jour, aller et retour. Ils parcourent la Péninsule de long en large. Ils changent d'emploi, du homard au bleuets, et des bleuets au couronne de Noël et ainsi de suite. Ils sont qualifiés à faire des dizaines de différents métiers.

Ce sont donc ces hommes et ces femmes que l'on nomme « les saisonniers». J'ose espérer que vous avez compris pourquoi on les appel ainsi et j'ose aussi croire que vous le ferez comprendre aux parlementaires qui ne le savent pas et qui ont adopté, d'une manière cavalière et sans ce soucier du bien-être des travailleurs sans emploi, le projet de loi C-12.

Sachez aussi et dites leur en plus que durant l'hiver 1996, il y a eu, dans la petite localité de Paquetville dans la Péninsule acadienne, 40 emplois d'annoncés. Il y a eu 700 applications d'enregistrées. À Bathurst, la semaine dernière, la mine Caribou a annoncé 200 emplois. Il y a eu 2 000 demandes d'enregistrées. À Edmonston, au Madawaska, le premier ministre de la province du Nouveau-Brunswick a coupé le ruban pour l'ouverture d'un centre de communication avec 40 emplois. Il y a deux ans, il en avait promis 400 emplois pour ce centre. Il faut se rendre à l'évidence. L'ère industrielle prend fin. Les emplois seront de plus en plus rares. Ii faudra donc trouver un moyen raisonnable pour distribuer l'argent requit pour survivre. Un salaire saranti coûterait beaucoup moins cher que tous ces pensions et payes de ci et de ca. L'assurance-chômage n'a rien à voir avec le déficit fédéral. Le gouvernement n'y contribue pas pour un sous. Au contraire, il pige dans ses fonds pour des fins politiques qui le favorise.

Nous vous avons parlé de la richesse des ressources naturelles dans la Péninsule acadienne, et nous l'avons comparé à un paradis terrestre. Pourtant, nous accusons le plus haut taux de chômage au pays. Si on compte tous les citoyens aptent au travail, le vrai taux se situe entre 30 p. 100 et même plus. Nous avons aussi le plus haut taux d'hospitalisation et le taux de suicide va dans le même sens. Nous avons aussi le plus haut taux, per capita dans quelques municipalités, de millionnaires au pays.

Étrange que nos gouvernements, le provincial et le fédéra1, tape à tour de bras sur les plus démunis en réduisant l'assistance sociale et en n'en faisant autant avec l'assurance-chômage.

Ce sont les présidents des grandes banques et des grosses compagnies qui avisent le gouvernement fédéral sur les questions d' assistance sociale et d'assurance-chômage. Ces riches et ces pures se payent des salaires de millions de dollars par années. Dans un système capitaliste à outrance, les riches, qui ont le pouvoir de gouverner, s'enrichissent de plus en plus.

Les six plus grandes banques du pays ont réalisé des profits de 5 milliards de dollars en 1995, et cette année, ils s'enlignent pour en faire 6 milliards.

Le projet de loi C-12 a été pensé et préparé par des avocats, des juges et des fonctionnaires qui, à chaque année, soutire le tiers des fonds de l'assurance-chômage en charriant les chômeurs d'une décision des fonctionnaires à une cours d'arbitrage de l'A.-C, ou a un appel à revenu Cansda, et ensuite à un juge-arbitre et parfois même à la cours fédérale de l'impôt, pour finalement aviser le pauvre chômeur qu'il n'avait pas droit aux bénéfices de l'A.-C. et qu'il doit remettre tous les argents qu'il a reçu durant plusieurs années. Certains chômeurs emprunte même de l'argent pour payer des avocats pour les défendre. La loi est faite pour induire en erreur. Chacun l'interprète à sa manière . Les chômeurs reçoivent en bénéfices moins de la moitié de tout l'argent payé en leurs noms. La plus grosse partie va à l'administration du système.

Ce sont donc tous ces employés « saisonniers », avec qui je travaille depuis plus de trente années, que je représente ici ce soir, et c'est en leurs noms que j'interviens auprès de votre comité.

Si je demande des amendements au projet de loi C-12, plutôt que son retrait en entier, puisqu'il est inacceptable dans sa présesnte forme, c'est que je sais qu'ayant été adopté par le parlement, il deviendra loi le 1er juillet 1996, quoi que l'on dise et quoi que l'on fasse.

Puisque vous demandez un résumé d'une page, les amendements que je vous demanderai d'apporter au projet de loi C-12 y seront énumérés .

Le masculin inclus le féminin, et le pluriel le singulier, et vice-versa, partout où le texte peut l'exiger.

Mathilda BLANCHARD
Représentante syndicale, Syndicat acadien des travailleurs affiliés et des pêches
120 Blvd St-Pierre ouest
Caraquet, N.-B. E1W 1B6

Tél. : (506) 727-4802


Le 11 juin 1996

Comité permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.

Honorables sénateurs, membres du comité,

Puisque le projet de loi C-12 deviendra loi le 1er juillet 1996, et que nous ne pouvons le retenir plus longtemps, nous vous demandons donc de faire au moins les amendements suivants:

Que les nouveaux employés gui entrent sur le marché du travail pour la première fois ou qui ont été absents pour une certaine période, puissent se qualifier avec 420 heures, comme les autres employés, plutôt qu'avec 900 heures. Aucun employé ne peut atteindre ce nombre d'heure durant une année.

Que le diviseur de « plus deux » soit enlevé. Si un employé applique avec 12 semaine, on divisera le montant gagné par 14 semaines et ainsi de suite, 14 semaines gagnées sera divisé par 16, et 16 semaines par 18, ce qui aura pour effet de réduire encore plus le taux de bénéfice de l'applicant, Les taux de bénéfices sont déjà trop réduit.

Nous osons croire que les amendements que le comité permanent de la Chambre des communes avait apporté seront maintenues. Le projet de loi C-12 est tellement ambigu qu'il est très difficile de comprendre ce que le législateur veut dire. Même les fonctionnaires que nous avons consulté ne font pas l'unanimité dans leurs interprétations.

Les notes qui accompagnent ce résumé vous disent pourguoi les travailleurs de nos régions sont saisonniers. Ils disent que les emplois, il n'y en a pas. Ils vous disent que le projet de loi C-12 est un document qui permettra au gouvernement de donner l'argent provenant du fond de l'assurance-emploi aux compagnies en leur donnant des montants pour la création d'emplois et par la formation de leurs employés.

I1 a été largement question de « fraude » depuis la réforme de l'assurance-chômage. En général, il n'y a pas de fraude. La loi est interprété de différente manière dépendant de qui l'interprète.

Je dis que :

Lorsque les citoyens d'un pays doivent « frauder », si fraude il y a bien entendu, pour survivre malgré tout, c'est que le système dans lequel ils vivent a lamentablement manqué à sa fonction première, qui est celle de pourvoir au bien-être de la vie de chacun de ses citoyens et que CQUX qui adoptent les lois qui régissent ce pays ont manqué déplorablement à leurs devoirs.

Depuis plus de 40 ans que je travaille, avec d'autres, afin de trouver un système plus humain et un partage plus adéquat de nos richesses. Durant les années 1960, avec un certain Louis ROBICHAUD et sa commission Byrn, et après un certain Richard HATFIELD de regretté mémoire, et sa réforme sociale qui était une continuité des recommendations de la commission Byrn, nous avions réussi à mettre sur pied un système qui éliminait la misère et la pauvreté à un certain degré. Depuis le début des années 1990, tout le système de bien-être social s'est effondré.

Les Louis ROBICHAUD, les Norbert THÉRIAULT et les autres des années 1960 ont perdu le pouvoir. On a assassiné à coup de calomnies les plus injurieuses le meilleur premier ministre provincial de tout le Canada, Richard HATFIELD. On retrouve aujourd'hui un Jean-Maurice SIMARD, encore debout et qui essaye, contre vent et marée, de combattre la guerre que livre une société de riches et de pures contre ceux qui ne peuvent se défendre. Les événements violents que nous connaissons présentement ne sont que le début de la fin d'un système capitaliste à outrance.

Mathilda BLANCHARD,
représentante syndicale


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