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Délibérations du comité sénatorial permanent des
Peuples autochtones

Fascicule 28 - Témoignages du 5 mai 1999


OTTAWA, le mercredi 5 mai 1999

Le comité sénatorial permanent des peuples autochtones se réunit aujourd'hui à 17 h 40 pour examiner le projet de loi C-49, Loi portant ratification de l'Accord-cadre relatif à la gestion des terres des Premières nations et visant sa prise d'effet.

Le sénateur Charlie Watt (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Sénateurs, nous accueillons notre témoin, Mme Kerry-Lynne Findlay, qui représente les Musqueam Park Leaseholders Parcel «A».

Mme Kerry-Lynne D. Findlay, Musqueam Park Leaseholders Parcel «A»: Merci de l'occasion qui m'est donnée ce soir de vous présenter mes vues. Je suis une avocate de Vancouver. Je suis également présidente sortante de la Section de la Colombie-Britannique de l'Association du Barreau canadien. Comme je suis ex-présidente de la Commission de planification de la Ville de Vancouver, je suis consciente des problèmes qui sont associés à la planification, au zonage, aux lotissements, à l'utilisation du sol et à ce genre de choses. J'ai également le privilège d'être locataire à bail à Musqueam Park. Par conséquent, je porte aujourd'hui plusieurs casquettes.

J'ai préparé un mémoire écrit que certains d'entre vous avez reçu plus tôt aujourd'hui, mais la plupart des membres du comité viennent de l'avoir. J'ai également une courte vidéo qui présente un extrait d'une émission diffusée sur CPAC. CPAC a filmé une de nos premières réunions de résidents, à laquelle ont également assisté le sénateur Perrault, de même que Ted McWhinney, notre député, et le Dr Heady Fry, députée de Vancouver-Centre. J'ai amené cette vidéo pour que vous puissiez vous faire une idée de notre localité et des préoccupations des résidents. Je vous invite donc à la regarder quand vous aurez l'occasion de le faire.

J'étais présente hier soir quand vous receviez d'autres témoins. Leurs témoignages ont soulevé quelques questions que je voudrais aborder tout de suite. D'abord, quand Murray Clemens et Lou Blair ont témoigné, on leur a posé la question de savoir si on leur avait demandé de témoigner devant un comité de la Chambre des communes chargé d'étudier le projet de loi C-49. Ils ont répondu que non. Il en va de même pour les locataires à bail de Musqueam Park. On ne nous a jamais donné une telle occasion. C'est pour cela que vous ne verrez pas de témoignages de notre part devant ce comité-là.

De plus, c'est le sénateur Andreychuk, si je ne m'abuse, qui se demandait quelle serait la réaction de la Chambre des communes et, plus particulièrement, du parti au pouvoir si le comité sénatorial recommandait que certains amendements soient apportés au projet de loi et que ces recommandations-là soient acceptées par le Sénat dans son ensemble. J'ai justement déjeuné avec M. McWhinney aujourd'hui, et je lui ai posé la question en lui demandant la permission de communiquer sa réponse aux membres du comité sénatorial. Il m'a dit que si le comité recommandait des amendements clairs, concis et, de préférence, bipartisans, la Chambre les examinerait avec le plus grand sérieux. Il ne fait aucun doute que le parti de la majorité au Sénat ainsi qu'à la Chambre des communes discute justement de la possibilité d'étudier vos recommandations. Je me permets donc de vous transmettre ce renseignement et je pourrais toujours vous donner d'autres détails si vous avez des questions à ce sujet.

Pour notre part, nous espérons que le comité et le Sénat dans son ensemble envisageront d'apporter des amendements assez importants à un projet de loi qui, pour nous, a de très graves défauts. Nous ne sommes pas du tout opposés aux concepts qui sous-tendent le projet de loi. Donc, ce n'est pas le projet de loi proprement dit qui pose problème; il reste que certains éléments pourraient et devraient à notre avis faire l'objet d'amendements pour améliorer ce projet de loi, et nous vous encourageons donc à envisager cette possibilité.

L'autre question qui découle des témoignages reçus par le comité concerne ce que je considère comme un effort résolu de la part des 14 bandes signataires, du ministère et d'autres qui ont comparu devant vous d'établir une bonne distance entre vos délibérations sur le projet de loi C-49 et ce qu'on appelle à présent «la situation à Musqueam Park». Vous verrez dans mon mémoire que j'établis certains liens entre cette situation-là et le projet de loi, et rappelez-vous aussi que la bande de Musqueam est l'une des 14 bandes signataires. J'établis ces liens pour vous démontrer que bon nombre de nos préoccupations relatives à ce projet de loi découlent justement de la situation du parc Musqueam, en ce sens que le libellé très imprécis et général du projet de loi nous inquiète, vu les expériences que nous avons vécues en essayant de régler d'autres questions. De plus, les controverses qu'a suscitées la situation de la réserve de Musqueam, dont certains locataires à bail sont des non-autochtones, et notamment les possibilités d'expropriation que prévoit ce projet de loi ont complètement anéanti la valeur des maisons concernées. Il y a quelques années, elles valaient entre 550 000 $ et 800 000 $ -- nous parlons après tout du marché immobilier de Vancouver -- alors qu'elles ne valent plus rien à présent. Cet état de choses a une incidence importante sur de nombreuses personnes, et en particulier les personnes âgées qui y vivent.

J'ai assisté aujourd'hui à la période des questions depuis la tribune. La ministre Stewart a fait valoir pendant la période des questions que le vrai problème pour elle, en tant que ministre, et pour son gouvernement, consiste à concilier leur mandat en matière de protection des droits autochtones avec les besoins d'un Canada moderne. Nous estimons que dans un Canada moderne, qui veut accorder des pouvoirs accrus aux peuples autochtones, il faut également assurer un traitement juste et équitable à tous les Canadiens. Voilà le point de départ de nos préoccupations. En progressant -- et dans ce sens-là, les Canadiens sont assez unis, puisqu'ils souhaitent donner suite aux revendications fort légitimes des peuples autochtones sur le plan de l'habilitation, c'est-à-dire plus de contrôle, et de l'autodétermination -- nous ne voulons pas oublier d'autres personnes qui sont directement touchées par ces initiatives. Si nous consacrons le temps et l'effort nécessaires à la conciliation des besoins et des droits de tous les Canadiens, ce sera possible. Voilà pourquoi nous sommes là ce soir.

Il y a 74 locataires à bail non autochtones dans la réserve no 2 de la bande de Musqueam de Musqueam Park. Cette réserve compte en réalité 75 maisons, mais l'une d'entre elles appartient à un membre de la bande de Musqueam et à son mari.

Dans ces 74 autres maisons résident environ 200 hommes, femmes et enfants; 70 p. 100 d'entre elles appartiennent à un retraité ou un pensionné. Les autres 30 p. 100 appartiennent surtout à des couples qui ont des enfants et qui travaillent ou font du bénévolat. Les engagements financiers qui visent ces maisons représentent en tout environ 5,1 millions de dollars. Le rapport sur le recensement de 1996 publié par Statistique Canada indique que les revenus moyens de toutes sources avant impôts pour cette zone -- qui comprend Salish Park et Musqueam Park -- s'élèvent à 38 000 $ par an.

Il s'agit d'un terrain de 40 acres aménagé pendant les années 60, et visé par un bail principal ainsi que des actes et annexes constitutifs auxiliaires qui ont été signés en juin 1965. Ces baux prévoyaient que les taxes foncières seraient versées à la Ville de Vancouver, qui s'était chargée des évaluations foncières. En vue de céder ces biens à bail, la bande de Musqueam a renoncé à ce terrain non défriché et non aménagé. Le promoteur immobilier original et les locataires à bail ont amélioré ce terrain en prenant les dispositions nécessaires pour les services publics, la construction de routes et de maisons, et cetera. En vertu de l'accord conclu, qui prévoyait un bail de 90 ans, la bande a touché une somme considérable au départ, et les loyers annuels étaient fixés en fonction d'un calendrier précis dont la renégociation était prévue après 30 ans, 50 ans, 70 ans et 90 ans.

Les conflits entre la bande et les propriétaires de ces maisons reposent sur le niveau des taxes foncières prélevées par la bande, l'absence d'un mécanisme de responsabilisation relativement à l'utilisation de ces fonds et l'établissement de l'évaluation foncière pour les fins de la fixation des loyers annuels et des taxes foncières. Jusqu'à présent, les propriétaires ont dû dépenser environ 800 000 $ pour des frais juridiques et d'experts à cause de ces conflits. L'interprétation de l'expression «évaluation foncière actuelle» qu'on retrouve dans le bail fait maintenant l'objet d'un appel et d'un pourvoi incident devant la Cour suprême du Canada.

Les défauts de ce bail sont nombreux. Si j'en parle, c'est parce que tous ces défauts tiennent au caractère imprécis du texte et ce manque de précision a donné lieu non seulement à des conflits mais à des procédures judiciaires. Voilà justement le problème que pose le projet de loi C-49. Ce bail ne prévoit aucun mécanisme de règlement des conflits, à part le recours à la Cour fédérale, aucune clause de reprise de possession, ce qui n'est pas dans l'intérêt de la bande, et aucune clause de rétrocession, ce qui n'est pas dans l'intérêt des locataires à bail. Les délais prévus entre chaque renégociation sont trop éloignés les uns des autres et il y a une clause d'annulation par défaut de la disposition relative au loyer équitable. Si je fais mention de cette disposition, c'est parce qu'on retrouve dans le projet de loi l'expression «indemnisation équitable» dans la section du projet de loi C-49 qui traite de l'indemnisation à verser au titulaire d'une propriété expropriée. J'y reviendrai tout à l'heure, mais notre expérience à Musqueam Park nous a appris que le terme «équitable» ne signifie pas grand-chose.

De plus, aucune modification n'a été apportée au bail pour traduire la nouvelle réalité de la prise en charge par la bande en 1991 du pouvoir de taxation -- c'est-à-dire aucune possibilité de paiement par anticipation, et cetera.

Il se trouve que la bande a insisté pour que les loyers passent de 450 $ ou 500 $ en moyenne à 10 000 $ par an, et la majorité des propriétaires de maison -- c'est-à-dire tous sauf trois -- ont non seulement accepté mais absorbé cette augmentation importante, même si cela risquait de leur créer des difficultés financières dans certains cas. Maintenant, la bande demande des versements se chiffrant entre 25 000 $ et 35 000 $ par an après impôts pour la location des terrains. Et ceci en sus des 6 000 $ en moyenne de taxes foncières et des versements hypothécaires des propriétaires.

Je vous ai déjà communiqué les données du rapport sur le recensement en ce qui concerne les revenus moyens des résidents de cette zone. Leurs revenus moyens avant impôts correspondent justement à la somme après impôts qu'on leur demande de payer.

Il n'est plus possible de vendre ces maisons à aucun prix. D'ailleurs, on peut facilement en faire la preuve. Ainsi la perte totale que subissent les propriétaires de ces maisons se monte à environ 55 millions de dollars. En voilà l'effet net.

Contrairement à ce qu'on raconte dans les journaux, les conséquences de cette situation ne sont ni hypothétiques ni exagérées. Les dommages qu'ont subis les propriétaires de maison sont d'ordre à la fois moral et financier. Les banques et les institutions financières refusent à présent de consentir des prêts pour toute terre autochtone cédée à bail et certaines refusent carrément d'hypothéquer un terrain situé dans la réserve de Musqueam. J'ai d'ailleurs annexé à mon mémoire divers documents provenant de banques, de sociétés de prêts hypothécaires et de fiducies comportant les annotations d'un courtier en hypothèques qui dit: «Nous ne consentons pas de prêts pour des terres autochtones louées à bail» ou encore «Où se trouve ce terrain? Dans la réserve de Musqueam? Eh bien, nous ne consentons pas de prêts pour toute terre cédée à bail située dans la réserve de Musqueam.» Les institutions financières ne veulent plus avoir quoi que ce soit à voir avec les terrains situés dans cette zone. D'après ce qu'on m'a dit, cette situation aurait même une conséquence négative pour les bandes elles-mêmes.

À cause d'une sorte de réaction en chaîne, les baux prépayés de la zone avoisinante, appelée Salish Park, ont également été touchés. Quelqu'un de cette zone, qui compte 147 maisons, vous a d'ailleurs présenté ses doléances à cet égard. J'ai annexé à mon mémoire la lettre d'un agent immobilier qui précise que cette maison n'a absolument aucune valeur; elle est impossible à vendre.

Ce conflit nuit également à la capacité des autres Premières nations d'établir des lotissements sur des terrains cédés à bail. C'est le cas de plusieurs Premières nations au Canada, mais je vais surtout parler de la Colombie-Britannique, qui commence à peine à faire la promotion de lotissements sur des terres cédées à bail, de copropriétés, et cetera.

Vous trouverez également à l'annexe E de mon mémoire une brochure préparée par la bande de Sechelt en vue de rectifier les problèmes créés par la situation à Musqueam Park. Cette brochure d'une page cherche à répondre aux questions les plus fréquemment posées, entre autres, celle-ci: «Qu'arrive-t-il à Musqueam Park?»; on essaie justement d'expliquer dans cette brochure en quoi ce lotissement est différent. Il est donc clair que cette situation a des répercussions négatives sur d'autres Premières nations.

Je dois vraiment insister sur le point suivant, sinon je n'aurais pas de raison d'être ici devant vous. Bon nombre de ces propriétaires de maison sont des anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale. Tous, au cours de leur vie professionnelle, ont versé une portion de leur salaire durement gagné aux différents paliers de gouvernement sous forme de taxes. Ils sont maintenant tout à fait désespérés. Ils se sentent abandonnés par le gouvernement fédéral. Ils ont dû laisser en plan leurs maisons et leur vie.

Les réunions publiques fréquemment organisées permettent de constater les sentiments de colère, de tristesse, d'humiliation et de choc que ressentent ces gens. Ils risquent même de faire faillite. Plusieurs propriétaires de maison ont demandé à la bande s'il serait possible de simplement abandonner leur maison et de faire ainsi disparaître toutes leurs obligations futures. Depuis deux mois ils attendent une réponse à cette question.

La Loi sur les Indiens prévoit que les non-autochtones ne peuvent voter aux réunions des conseils de bande. Non seulement nous n'avons ni le droit de voter ni le droit d'assister aux réunions du conseil de bande, mais la bande ne nous permet même pas de présenter nos doléances lors de ces réunions. Par conséquent, nous n'avons aucun moyen d'exprimer nos vues sur la situation actuelle.

Le ministre des Affaires autochtones de la Colombie-Britannique et le chef de l'opposition à l'Assemblée législative de la Colombie-Britannique ont tous les deux écrit au gouvernement fédéral; leurs lettres sont annexées à mon mémoire. Elles indiquent que cette situation risque de nuire au processus de conclusion de traités en général et leurs auteurs demandent au ministre de trouver une solution au problème.

En fait, le dépôt du projet de loi C-49 n'a fait qu'aggraver une situation déjà difficile et volatile, si bien que les propriétaires ne savent plus quoi faire. Si leurs maisons valaient encore quelque chose avant le dépôt du projet de loi C-49, maintenant elles ne valent plus rien. Tout éventuel locataire ne s'installerait dans cette zone que si on lui offrait un bail tout à fait différent et la garantie qu'il ne serait pas visé par les dispositions du projet de loi C-49 en matière d'expropriation. Ce projet de loi a eu pour effet de saper la confiance du public en la viabilité de tout investissement visant une terre autochtone cédée à bail parce que même les baux payés par anticipation sont exclus de la loi.

Il s'agit, bien entendu, d'une loi habilitante. Elle ne touche pas uniquement les 14 bandes signataires. Une fois que ce projet de loi aura été adopté, toute bande pourra décider d'y adhérer, et je suis convaincue que bon nombre d'entre elles le feront au fil des ans. Déjà de nombreuses Premières nations qui suivent l'évolution du projet de loi s'intéressent à la possibilité d'y adhérer. Nous parlons donc d'un projet de loi qui aura une incidence sur l'ensemble du Canada.

J'ai dit au départ que je parlerais de la corrélation entre le projet de loi et notre situation à Musqueam Park avant d'aborder la question des amendements, et c'est justement ce que je voudrais faire maintenant.

À notre avis, si certains voudraient établir une certaine distance entre les délibérations relatives à ce projet de loi et la situation à Musqueam Park, c'est surtout à cause des lacunes du projet de loi; il met trop l'accent sur la bonne volonté et les bonnes intentions, plutôt que sur des textes législatifs solides et précis. Voilà longtemps que le caractère vague et ambigu des textes de loi et de contrats comme nos baux occupe les gens autour des tables de négociation et dans les salles de tribunal.

Comme je l'ai dit à certains responsables ministériels lors d'une séance d'information tenue ici en février, notez bien ce que je vais vous dire, surtout que ce sont les propos d'une avocate: Passer tout son temps devant un tribunal ou à réorganiser son calendrier en prévision des prochaines procédures judiciaires, ce n'est pas vraiment une vie.

Nous affirmons d'ailleurs que tout éventuel malentendu en ce qui concerne l'intention du législateur n'est certainement pas dans l'intérêt des citoyens canadiens. Comme la Chambre haute est une chambre de réflexion, nous avons à notre disposition les outils nécessaires pour apporter à ce projet de loi ce que nous considérons comme des amendements fort simples.

Les défenseurs du projet de loi, y compris la ministre, les fonctionnaires qui ont témoigné devant le comité, Bob Watts et Kerry Kipping, et les architectes de l'accord-cadre et du projet de loi, tels que Robert Louie du Conseil consultatif intérimaire de la gestion foncière, ont tous déclaré, dans les comptes rendus des témoignages que j'ai lus, que le pouvoir d'expropriation est essentiel à la bonne gestion et utilisation des terres. Tous soutiennent que d'autres paliers de gouvernement détiennent à présent de tels pouvoirs d'expropriation. Ces deux affirmations sont exactes. Je suis d'accord là-dessus. Mais il convient aussi de prévoir des procédures appropriées, un système adéquat de freins et de contrepoids et des paramètres raisonnables et précis.

Si je ne m'abuse, Howard Calla, qui a témoigné devant vous, et peut-être même Bob Watts, ont dit que l'expropriation constitue une mesure extraordinaire. Il s'agit effectivement d'une mesure de dernier recours. Il est donc d'autant plus nécessaire, à notre avis, de faire preuve de prudence et de s'assurer que cette mesure est axée sur des paramètres précis car on va certainement en abuser tôt ou tard. L'histoire de tous les peuples nous apprend qu'en l'absence d'un cadre juridique précis et détaillé, certains sont susceptibles de profiter de la situation.

Des textes imprécis donnent lieu à des poursuites judiciaires acrimonieuses et des conflits entre voisins autochtones et non autochtones et entre les membres des bandes. C'est d'autant plus vrai -- et j'insiste là-dessus -- lorsque l'autorité qui détient tous les pouvoirs peut définir les paramètres de leurs relations sans être responsable devant les personnes directement touchées par ses politiques.

Sans vouloir contredire la ministre, j'estime que ses affirmations publiques que ces pouvoirs d'expropriation ne seront pas abusés ne sont pas suffisantes. Elle ne sera peut-être plus la ministre responsable de ce dossier dans cinq mois et certainement pas dans cinq ans. La population canadienne ne peut absolument pas se contenter de telles affirmations ministérielles, même si elles sont bien intentionnées. Le seul moyen de contrôler nos futurs dirigeants politiques -- fédéraux, provinciaux, municipaux ou autochtones -- est d'insister pour avoir des textes législatifs clairs et précis. Ces affirmations ne tiennent aucun compte des différences qui séparent les structures canadiennes d'administration publique, qui existent depuis au moins 130 ans et qui ont fait l'objet d'améliorations et d'interprétations judiciaires au cours de cette période, et la nouvelle structure d'administration publique et système judiciaire autochtones, qui en sont à leurs premiers balbutiements et qui n'ont pas encore fait leurs preuves.

Elles ne tiennent pas non plus compte du fait que ces nouvelles structures de gestion publique sont imposées à des locataires à bail non autochtones sans que ces derniers, qui sont les plus touchés par ces mesures, aient été consultés ou aient donné leur aval. Il s'agit là d'une attaque contre une valeur fondamentale de la vie canadienne, étant donné que la résidence principale d'une famille et sa stabilité financière risquent d'être gravement compromises.

C'est une chose de savoir qu'une structure de gestion publique existe qui est différente des structures normales et de prendre ses décisions en toute connaissance de cause; c'en est une autre que de prendre un engagement financier et moral substantiel dans le contexte d'une structure particulière de gestion publique, structure dont la pérennité est garantie dans des textes contractuels et législatifs, mais de se faire imposer plus tard une structure tout à fait nouvelle et différente dont les conséquences sont fort négatives. C'est justement ce qui donne lieu souvent à la frustration des citoyens qui paient des impôts sans bénéficier d'une représentation adéquate.

Je voudrais soulever un dernier point avant d'en arriver aux amendements. Le sénateur Mahovlich aurait dit, semble-t-il, que celui qui achète une propriété le fait à ses risques et périls. Sans vouloir le contredire, nous estimons qu'il aurait peut-être raison si les règles du jeu n'avaient pas été modifiées par le gouvernement fédéral et la bande en cours de route, sans que les propriétaires actuels ou futurs de ces maisons en soient informés.

En ce qui concerne les amendements, je cite, au paragraphe 18 de mon mémoire, de nombreux extraits du rapport de la ministre Stewart intitulé: «Rassembler nos forces: Premier rapport d'étape». Elle décrit en détail les projets du gouvernement non seulement pour la durée de leur mandat mais pour les peuples autochtones. Elle dit essentiellement que le gouvernement essaie d'établir de saines structures d'administration publique axées sur la transparence et des mécanismes de recours adéquats qui placeront les relations futures entre le gouvernement et les autochtones sous le signe de la confiance.

Voilà à notre avis ce qu'il faut faire pour réaliser cet objectif dans le contexte du projet de loi C-49. D'abord, comme le projet de loi précise que le droit autochtone appliqué en vertu de cette loi l'emporte sur toute autre loi du Parlement, nous sommes d'avis que le préambule doit expliciter que les dispositions de la loi sont assujetties à la Charte canadienne des droits et libertés. Ainsi nous garantirions un certain nombre de recours, comme la révision judiciaire et la protection contre la discrimination tout en y apportant la certitude qui manque. Le ministère de la Justice m'a informée qu'à son avis, tout cela est sous-entendu dans le projet de loi. À notre sens, si c'est vraiment sous-entendu et si telle est vraiment l'intention, il n'y a pas de mal à le préciser.

Le sénateur Austin: Cette opinion ministérielle, l'avez-vous par écrit?

Mme Findlay: D'après ce qu'on m'a dit, le ministère de la Justice ne met jamais par écrit ce genre d'opinion. C'est ce qu'on m'a dit à une séance d'information tenue le 12 février à la Chambre et à laquelle ont assisté plusieurs responsables ministériels. Al Broughton, un avocat qui travaille pour le ministère de la Justice, m'a dit que telle était la position du ministère.

Pendant cette même séance d'information, Kerry Kipping a indiqué que les dispositions en matière de primauté ne s'appliquent qu'en cas de cohérence et que la bande continuerait d'être assujettie aux lois d'application générale. Mais comme vous le savez peut-être, la bande de Kamloops, par l'entremise du chef Manny Jules, vient tout juste d'adopter -- malgré les protestations du ministère fédéral -- son propre code du travail, qui interdit les grèves, les lock-out et la perception de cotisations syndicales. L'intention de la bande est d'ailleurs clairement énoncée: son code l'emporte sur la législation canadienne actuelle du travail. Si j'en parle, c'est simplement pour vous faire comprendre que dans le contexte de l'implantation progressive de l'autonomie gouvernementale et de l'autodétermination, le sens implicite des textes législatifs et les affirmations des fonctionnaires ne nous rassurent aucunement. Nous sommes actuellement en pleine évolution.

Pour ce qui est des dispositions relatives à l'expropriation -- et je sais que vous en avez entendu beaucoup parler -- nous insistons sur le fait que pour nous le libellé de ces dispositions est trop général et imprécis. Dans leurs témoignages, Bob Watts et Kerry Kipping ont déclaré que l'expression «ouvrages devant servir à la collectivité» est censée correspondre à ce qu'on appelle les ouvrages publics. Mais le problème n'est pas là. C'est surtout l'expression «à des fins d'intérêt collectif» qui pose problème; d'ailleurs, la présence du terme «or» dans la version anglaise indique clairement que le champ d'application de cette mesure est plus large que celui normalement associé aux ouvrages publics. Si le projet de loi n'est pas modifié pour supprimer cette référence ou en préciser le sens, n'importe quelle bande pourra reprendre dans son code foncier les termes très généraux qu'on trouve dans le projet de loi. À notre avis, cette terminologie imprécise touche les membres des bandes autant, sinon plus que les locataires à bail non autochtones. Il va sans dire que les pouvoirs d'expropriation visent les intérêts de tous genres.

Il convient également de vous faire remarquer que les pouvoirs d'expropriation accordés aux Nishgas par voie de traité et à la bande de Sechelt par voie législative ne reposent pas sur l'expression «à des fins d'intérêt collectif» qu'on retrouve dans le projet de loi C-49.

La question des intérêts des tierces parties revêt également une importance considérable et à cet égard, les responsables du ministère prétendent que les intérêts des locataires à bail sont protégés. Certains ont compris que cela voulait dire qu'ils étaient exclus. Mais ce n'est pas du tout le cas. Cela veut dire simplement que les conditions sont maintenues malgré l'introduction de nouveaux codes fonciers; autrement dit, l'autre partie dispose d'une monnaie d'échange en cas d'appropriation. Les intérêts des tierces parties ne sont maintenus jusqu'à la date d'expiration prévue que s'il n'y a pas d'expropriation.

L'autre problème concerne le fait que cet article laisse le soin au conseil de bande de déterminer la nécessité de procéder à l'expropriation de certains intérêts. Comme elle possède tous les pouvoirs des propriétaires fonciers, une bande pourrait décider de mettre en oeuvre une stratégie de développement économique général englobant toutes sortes d'activités et d'ouvrages qui ne sont pas normalement considérés comme étant publics. Ce genre d'expression est d'ailleurs un peu dépassée, en ce sens qu'on cherche à présent à éviter dans les textes législatifs des critères subjectifs de ce genre, et non sans raison. Nous ne voyons certainement pas pourquoi on devrait employer le genre d'expressions désuètes qu'on trouvait dans les textes législatifs il y a une quinzaine d'années.

La question de l'indemnisation équitable est également très inquiétante, parce que les dispositions concernées du projet de loi ne sont pas suffisamment complètes pour nous permettre de déterminer en quoi pourrait consister cette indemnisation. D'autres vous l'ont déjà dit, et je vais donc me contenter de préciser que si ces dispositions sont assujetties à la Loi fédérale sur l'expropriation, bon nombre de nos préoccupations à cet égard disparaîtront. Il s'agit là d'une solution possible, mais j'avoue ne pas être d'accord avec Robert Louie, qui a déclaré que l'expression «il doit être tenu compte» constitue une incorporation par renvoi. C'est faux. Ce texte indique seulement que la Première nation devra examiner les règles que prévoit cette loi. Mais les décisions de la Première nation ne sont aucunement subordonnées à ces règles.

De plus, le concept de la juste valeur marchande pose problème, notamment dans une situation comme celle de Musqueam Park où la valeur des maisons est zéro. Il faut donc une procédure d'évaluation objective. Les dispositions relatives à l'expropriation n'indiquent pas non plus à quel moment des versements seraient faits, c'est-à-dire à quel moment par rapport à l'expropriation prévue. À notre avis, il faut un préavis minimum de neuf mois, c'est-à-dire d'au moins 270 jours. La procédure d'appel prévue pour contester le montant de l'indemnisation est également trop vague et incertaine. Elle est assujettie aux règlements de la bande. En outre, la bande a la possibilité de nommer les personnes qui seront appelées à prendre une décision. Il devrait au contraire s'agir d'un processus tout à fait indépendant.

Les pouvoirs prévus relatifs aux procédures sommaires aux termes du projet de loi sont également préoccupants -- j'en parle au paragraphe 30 -- encore une fois à cause de leur incertitude. Il y est question d'amendes, de peines d'emprisonnement, d'un système judiciaire parallèle, de la possibilité d'engager des juges de paix permanents, et de la nécessité, pour les tribunaux compétents d'appliquer les textes législatifs autochtones, plutôt que les autres lois. L'incertitude considérable qui est associée à tous ces éléments nous préoccupe beaucoup.

La consultation est un autre aspect important. Bob Watt a déclaré que le projet de loi prévoit la possibilité de tenir compte des préoccupations de tierces parties, mais ce n'est pas du tout ce que dit le texte. Ce dernier donne à la bande le mandat d'informer les tierces parties. Il s'agit donc d'une activité unilatérale et non pas d'une discussion bilatérale.

Nous sommes aussi très sensibles aux préoccupations de nombreuses femmes autochtones qui sont venues vous parler des dispositions touchant l'échec du mariage, et j'ai d'ailleurs consacré trois paragraphes à cette question. Je suis la conséquence d'une de ces lois.

Mon dernier point, et c'est un point très important, concerne le manque de préavis donné aux membres de la bande par les bandes signataires. Je n'étais pas présente, mais je crois comprendre que certains membres de la bande Squamish auraient déclaré hier dans leur exposé que le chef de leur conseil ne les avait pas informés de l'existence de ce projet de loi. J'ai fourni au dernier onglet la lettre du chef de la bande de Musqueam en 1997 et 1998 dans laquelle elle affirme qu'elle n'a pas été consultée au sujet du projet de loi C-49. Elle a signé certaines modifications à l'accord-cadre. On lui a dit que la dernière ébauche serait renvoyée à la bande pour qu'elle la ratifie et pour permettre d'organiser un référendum, conformément aux dispositions de la Loi sur les Indiens, mais cela n'a jamais été fait. Elle est disposée à témoigner devant le comité, si vous souhaitez lui parler. Elle nous a remis une déclaration qu'elle-même a rédigée, et que j'ai annexée au mémoire, et nous avons également la lettre d'un aîné de la bande qui dit que seulement certains membres de la bande ont été informés de l'existence du projet de loi en février 1999, mais qu'aucune explication à ce sujet n'a jamais été fournie à l'ensemble des membres de la bande.

En conclusion, nous vous demandons, surtout à ceux et celles d'entre vous qui reconnaissent le bien-fondé des griefs passés et présents des peuples autochtones, d'envisager sérieusement de modifier ce projet de loi. Pour nous, les amendements proposés permettront de créer le climat de confiance que nous souhaitons tous pour favoriser l'évolution future de nos relations. Ils sont la garantie de collectivités plus harmonieuses et plus stables. C'est seulement dans une atmosphère de confiance et de compréhension mutuelles que les Canadiens pourront travailler ensemble pour créer la stabilité et la bonne volonté auxquelles nous tenons tous.

Le sénateur Tkachuk: Permettez-moi de vous remercier pour votre mémoire. J'ai l'impression que nous nous heurtons aux mêmes problèmes que nous avons déjà connus, lorsque des projets de loi étaient rédigés en secret, plutôt qu'en public. Cela crée toutes sortes de problèmes que nous, les parlementaires, sommes ensuite appelés à solutionner.

Les arguments que vous avancez en faveur d'une loi claire sont certainement convaincants, et je suis tout à fait d'accord avec vous pour dire qu'elle doit être claire. Elle doit inspirer la confiance, et non l'inverse. Nous avons beaucoup entendu parler de votre situation. Et certains d'entre nous qui ne sont pas de la région de Vancouver voudraient avoir d'autres renseignements à ce sujet.

Je regardais justement les chiffres relatifs à la valeur de ces baux, qui se chiffrent entre 25 000 $ et 35 000 $ par an, c'est-à-dire au bas mot environ 2 083 $ par mois, plus les taxes foncières. En général, de quel genre de maisons s'agit-il?

Mme Findlay: En général, ce sont des maisons ayant de 2 400 à 3 000 pieds carrés. Toutes ont été construites il y a environ 25 ans. Certaines d'entre elles ont été modernisées, mais la plupart n'ont pas fait l'objet de rénovations. Elles sont situées sur d'assez grands terrains dans le sud-ouest de la ville de Vancouver, pas loin de l'Université de la Colombie-Britannique -- c'est-à-dire dans le quartier de Dunbar, pour ceux qui connaissent Vancouver. Tous ont fait l'objet d'améliorations. L'aménagement paysager et d'autres choses du même genre ont été faits il y a de nombreuses années.

Le sénateur Tkachuk: Est-ce que ce sont les locataires qui ont assumé la responsabilité financière de l'aménagement paysager et des améliorations dont vous parlez?

Mme Findlay: Oui.

Le sénateur Tkachuk: Vous parlez de maisons qui ont 2 400 pieds carrés, mais selon la province, cela peut avoir des significations différentes. Dans la région des prairies, par exemple, la superficie concerne le rez-de-chaussée et l'étage, mais dans la région de la vallée de l'Okanagan, ce chiffre désigne la superficie totale.

Mme Findlay: Pour ma part, je parle de l'espace vital total, qui peut s'étendre sur deux ou trois étages.

Le sénateur Tkachuk: Merci pour cette précision. Si vous louiez une propriété dans la même zone générale mais hors réserve, que devriez-vous payer comme loyer pour une maison à deux étages ou pour un appartement ayant une superficie de 1 200 pieds carrés?

Mme Findlay: Pour ce genre de superficie, le loyer serait de l'ordre de 2 500 $. Par contre, quand vous louez une maison, vous n'êtes pas obligé de faire un investissement en capital important. Si le toit s'effondre, c'est le propriétaire qui paie les réparations. Si vous avez une fuite dans vos canalisations d'eau, le coût des réparations sera à la charge du propriétaire. Donc, vous ne prenez pas de risque et vous ne payez pas non plus de taxes foncières.

Le sénateur Tkachuk: Ces frais sont couverts par le loyer.

Mme Findlay: C'est exact. Même si les chiffres sont un peu comparables, on parle en réalité de deux choses bien différentes parce que dans le cas des terres cédées à bail, les locataires ont investi environ 500 000 $ dans une maison, ils paient des taxes foncières et l'entretien de ces maisons est à leur charge.

Le sénateur Tkachuk: On peut fixer la valeur qu'on veut quand on fait une simple évaluation foncière. On peut attacher la valeur qu'on veut au terrain concerné. C'est le marché qui détermine en fin de compte le loyer qu'on va demander. Vous pourriez toujours demander 2 400 $. Vous pourriez peut-être même l'avoir à Vancouver. Mais vous ne l'auriez jamais pour une maison qui serait deux fois plus grande à Saskatoon, n'est-ce pas?

Mme Findlay: C'est exact.

Le sénateur Tkachuk: Sur la question de la consultation, avez-vous dit que les locataires n'étaient pas au courant des consultations tenues au sujet du projet de loi C-49, consultations qui durent d'ailleurs depuis un moment?

Mme Findlay: C'est exact. Nous avons appris l'existence de ce projet de loi seulement quand nous en avons entendu parler par la presse autour de Noël. Je sais que le projet de loi a été déposé à la Chambre en juin de l'année dernière, mais nous n'en avons jamais été informés. Nous n'avons pas été informés par la bande avec laquelle nous traitons régulièrement, et nous n'avons pas non plus été informés par quelque représentant que ce soit du gouvernement. Nous l'avons appris nous-mêmes. Une fois que nous étions au courant et que nous avons eu l'occasion d'examiner le projet de loi, nous n'avons pas tardé à communiquer nos préoccupations à ce sujet. Mais avant cela, nous n'avons jamais eu l'occasion de nous prononcer sur la question.

Le sénateur Tkachuk: Vous dites qu'il vous est impossible à l'heure actuelle d'obtenir du financement. J'imagine que le financement de ces propriétés a été assuré au moyen d'un prêt hypothécaire ou d'une formule de ce genre, étant donné qu'il s'agissait de propriétés louées à bail. J'imagine qu'il s'agissait d'une formule de financement différente de celle pour les propriétaires en fief simple qui vous auraient sans doute permis de toucher 75 p. 100 de la valeur de la maison. Qu'est-ce qu'un propriétaire aurait pu s'attendre à recevoir en temps normal, avant que la situation dégénère?

Mme Findlay: En fait, avant que la situation commence à dégénérer, comme vous dites -- et c'est tout à fait cela -- les établissements de crédit traitaient ces propriétés louées à bail de la même manière qu'une propriété en fief simple, en ce sens qu'on avait la certitude que rien ne changerait au cours des 30 premières années du bail. Comme la période d'amortissement normale est de 25 ans, les banques ne voyaient aucun inconvénient à nous consentir des prêts. Donc, quand je dis que les charges se montent à 5,1 millions de dollars, je fais allusion aux prêts hypothécaires et autres consentis aux propriétaires par deux des banques à charte et par d'autres établissements de crédit, selon la même formule que pour les propriétés en fief simple. Mais en raison de tout ce qui est arrivé au cours des 10 dernières années, c'est-à-dire le transfert de la responsabilité de la taxation foncière, le projet de loi C-49 et maintenant les problèmes associés aux baux, aucun établissement de crédit n'est disposé à présent à consentir des prêts pour ces propriétés.

Le sénateur Tkachuk: Et les locateurs qu'offrent-ils comme justification en décidant d'augmenter d'autant les loyers? Quelles raisons évoquent-ils pour justifier leur décision?

Mme Findlay: J'ai récemment rencontré les responsables de la bande à plusieurs reprises. Ces derniers prétendent qu'un maximum correspondant au montant que vous avez mentionné tout à l'heure a été fixé par la Cour fédérale d'appel, et par conséquent, ils ont parfaitement le droit de demander ces loyers. Leurs arguments se résument à cela. Quand on leur parle de l'incapacité de certaines personnes de payer des loyers aussi élevés et de la nécessité d'organiser une rencontre des parties pour discuter d'une solution juste et équitable, ils se contentent d'invoquer la décision de la Cour.

Le sénateur Gill: Vos préoccupations sont multiples. Vous avez cité les propos de Mme Stewart, qui aurait dit qu'elle doit s'efforcer de protéger les droits des citoyens non autochtones et autochtones. C'est vrai, mais il faut intensifier nos efforts en ce sens. Il faut essayer de protéger les droits des non-autochtones, mais il est tout aussi important de s'assurer que les Premières nations puissent exercer les droits qui auraient dû leur être reconnus depuis longtemps.

Il faut créer un climat qui favorise la confiance entre tous les citoyens. Autrement dit, il s'agit maintenant d'établir de nouvelles relations entre les autochtones et les citoyens non autochtones. Les gens n'ont pas l'habitude, étant donné qu'autrefois tout ce qui était autochtone relevait d'autorité non autochtone, c'est-à-dire du ministère des Affaires indiennes, entre autres. Mais il faut maintenant reconnaître que la situation a changé.

Dans un cas comme celui-ci, où l'économie est en cause, les gens s'attendent toujours au pire, et voilà justement ma question: Pourquoi êtes-vous si convaincue que la situation va nécessairement être catastrophique, comme vous l'avez dit tout à l'heure? Pourquoi croyez-vous cela?

Mme Findlay: Cette conviction repose sur l'expérience que j'ai vécue au cours des huit ou neuf dernières années, années pendant lesquelles j'ai essayé de régler une situation semblable dans une réserve indienne de Vancouver. Les négociations sur les questions de fond ont posé énormément de problèmes, et ce en raison de l'imprécision du libellé des baux. Cela ne repose sur rien de concret. L'absence du droit d'être consultés, l'incapacité de voter ou de présenter nos vues à la bande -- ce sont des choses que la plupart des Canadiens tiennent pour acquis. Si le gouvernement municipal de votre localité décide d'augmenter les taxes, vous avez un recours possible. Vous avez la possibilité de demander à rencontrer les responsables municipaux et de leur dire: «Écoutez, cette mesure me touche directement de telle et telle façons.» Qu'ils soient d'accord ou non avec vous, au moins vous avez la possibilité de vous faire entendre et peut-être de les convaincre. Vous pouvez au moins faire valoir vos arguments. Mais quand vous n'avez pas la possibilité de faire valoir vos arguments et quand personne n'est obligé de vous entendre, il n'y a pas de tribune ni pour dialoguer, ni pour essayer de trouver une solution qui satisfasse tout le monde.

Il en va de même pour le projet de loi C-49. Il n'y est même pas question d'un mandat de consultation. On ne parle pas ici d'un veto. Ce projet de loi certainement très important est nécessaire pour les peuples autochtones. Nous ne sommes pas contre le projet de loi et les concepts qui le sous-tendent. Nous estimons simplement que quelques éléments sont à corriger, et si vous prenez les mesures qui s'imposent pour rectifier la situation, il sera effectivement possible de placer nos relations mutuelles sous le signe de la confiance.

Cette conviction repose également sur mes 20 années d'expérience de l'exercice du droit. S'il y a autant d'avocats en exercice aujourd'hui, c'est parce que les gens ne se comprennent pas toujours. Ou alors ils ont conclu un accord verbal, en se serrant la main et prétendent maintenant qu'il ne s'agissait pas d'un véritable marché, ou alors le contrat signé par les parties ne dit pas ce à quoi s'attendaient ces dernières, si bien qu'il n'offre aucune protection lorsque les circonstances changent. Ce sont les malentendus de ce genre qui permettent aux avocats de gagner leur vie.

Et la situation que je décris n'est guère différente. À notre avis, qu'on parle de relations entre autochtones et non-autochtones, ou encore simplement entre autochtones, dans l'intérêt de tous les Canadiens qui essaient de créer un climat de confiance pour l'avenir, il faut une structure adéquate qui garantisse l'évolution harmonieuse des relations, quelles qu'elles soient.

Je suis accompagnée ce soir de trois autres locataires à bail qui ont supporté leurs propres dépenses pour venir, parce qu'ils risquent à présent de perdre leur maison et veulent sensibiliser les parlementaires à la gravité de cette situation. C'est là justement que la théorie et la réalité se confrontent, car nous avons l'expérience directe de Musqueam Park où l'expropriation de fait a donné de très mauvais résultats, non seulement pour les non-autochtones mais pour la bande elle-même du point de vue de ses activités commerciales et autres.

Par rapport aux objectifs énoncés par la ministre Stewart, comme vous-même l'avez dit, si le gouvernement cherche vraiment à réaliser ses objectifs, il faut surtout éviter de prendre des mesures qui vont à l'encontre du but recherché.

Le sénateur Gill: Avez-vous des preuves concrètes qui indiquent que les terrains des gens vont être expropriés? Avez-vous quelque chose de concret à nous montrer maintenant qui prouve que ces gens sont menacés d'expropriation?

Mme Findlay: Nous avons tout de même une preuve des plus concrètes, puisque des maisons qui valaient autrefois 600 000 $ à Vancouver et qui sont actuellement à vendre à 150 000 $ ne se vendent pas. Nous avons également les lettres de la bande indiquant que les personnes qui n'ont pas payé l'augmentation feront l'objet de poursuites judiciaires. Nous avons évidemment ce genre d'information.

Le sénateur Andreychuk: La situation des locataires est un peu différente, puisqu'au moment où ils se sont installés sur ces terrains, ils négociaient avec le gouvernement du Canada, qui a une relation fiduciaire avec les peuples autochtones et était censé être la mandataire de ces derniers.

Ce projet de loi semble sous-entendre que dès la mise en vigueur des codes fonciers, le gouvernement fédéral n'aura plus aucune responsabilité à cet égard, et j'avoue que cela me préoccupe. Entre-temps, certains locataires m'ont dit que tout le monde essaie de se montrer coopératif pour régler le problème de l'augmentation des taxes et du traitement des locataires. Je crois comprendre que les locataires se sont réunis avec certains responsables municipaux et des représentants autochtones en vue de trouver une solution au problème, mais que la ministre Stewart refuse de les rencontrer. Est-ce exact?

Mme Findlay: Non. J'ai rencontré la ministre Stewart au nom de tous les locataires en février et mars. Vous faites plutôt allusion à une récente demande de ma part de rencontrer à nouveau la ministre et les responsables de la bande pour présenter des propositions élaborées conjointement. Il y a quelque temps, cela nous semblait plus ou moins impossible, mais nous avons fait des progrès en ce sens dernièrement. La ministre nous a écrit jeudi dernier pour nous dire qu'à son avis, ma demande est prématurée, et qu'elle aimerait voir des propositions conjointes précises avant d'accepter de rencontrer les intéressés.

Le sénateur Andreychuk: Et qui est censé élaborer ces propositions conjointes?

Mme Findlay: Les responsables de la bande et les locataires à bail. Nous sommes tout de même d'accord sur une chose: nous sommes tous convaincus que le gouvernement fédéral a la responsabilité de participer aux discussions et de nous aider à trouver une solution.

Le sénateur Andreychuk: Estimez-vous qu'il serait peut-être possible de solutionner le problème si la ministre participait aux discussions?

Mme Findlay: Oui, absolument. Les responsables ministériels nous ont dit qu'ils comprennent que cette situation pose problème, mais ils ne semblent pas vouloir participer concrètement et activement à la recherche de solutions. Nous sommes convaincus, pour notre part, que des solutions existent, tout comme nous estimons que les amendements proposés feront du projet de loi C-49 une mesure législative plus acceptable qui atteint les objectifs visés. Il y a plusieurs possibilités, mais il faut que les trois parties, c'est-à-dire la bande, le gouvernement fédéral et nous-mêmes, se rencontrent pour négocier une solution.

Le sénateur Andreychuk: Et cette négociation tripartite porterait sur quoi au juste -- l'augmentation des taxes et les droits des locataires, plutôt que sur l'expropriation?

Mme Findlay: Comme les membres du comité le savent certainement, il y a forcément un effet boule-de-neige quand tant de changements se produisent simultanément. Par conséquent, en ce qui nous concerne, les discussions doivent porter sur tous les aspects de la question.

À cause du risque d'expropriation, il deviendrait difficile de maintenir la valeur de sa maison. Pourquoi? Ce n'est pas parce qu'un gouvernement acquiert des pouvoirs d'expropriation; les administrations municipales, fédérales et provinciales détiennent déjà ce pouvoir. C'est parce que les paramètres de l'exercice de ce pouvoir sont imprécis: les procédures en matière d'indemnisation sont imprécises, les critères énoncés sont subjectifs et le tout baigne dans l'incertitude. Comme l'a fait remarquer l'honorable sénateur, c'est le marché qui détermine la valeur de sa maison. Cela ne dépend absolument pas de nous. Le marché réagit mal à l'incertitude. C'est aussi simple que cela.

Le sénateur Andreychuk: Je comprends très bien les arguments concernant l'expropriation et c'est surtout de cette question-là que traite le projet de loi C-49. Je cherche plutôt à savoir si vous êtes déjà en négociation avec la bande et si vous souhaitez que la ministre intervienne pour vous aider à régler les questions qui ne sont pas liées au projet de loi C-49.

Mme Findlay: Oui, c'est notre souhait.

Le sénateur Andreychuk: Et la ministre vous dit que toute intervention de sa part serait prématurée pour le moment?

Mme Findlay: C'est ainsi que j'interprète sa lettre.

Le sénateur Johnson: Comme le temps prévu pour discuter avec notre témoin est presque écoulé, je voudrais surtout parler de l'article 28 du projet de loi C-49, étant donné qu'il est à l'origine de bon nombre de vos préoccupations. Vous parlez notamment du caractère trop général des raisons pouvant être évoquées par la Première nation, de l'insuffisance du préavis, de la méthode d'évaluation et de l'indemnisation équitable.

Comme vous le savez, le comité a reçu des témoignages très contradictoires concernant l'expropriation. Selon un avis juridique en particulier, les dispositions relatives à l'expropriation du projet de loi C-49 ne visent que les ouvrages devant servir à la Première nation dans son ensemble, cette définition étant analogue à celle des ouvrages publics de la Loi fédérale sur l'expropriation, et ne pourrait être invoquée à d'autres fins -- entre autres, commerciales -- qui ne respectaient les critères. De plus, d'après ces avis juridiques, le paragraphe 28(5) du projet de loi C-49, à la page 15, oblige toute Première nation qui procède à une expropriation à tenir compte des règles sur l'indemnisation que prévoit cette loi et à les appliquer en bonne et due forme. Que pensez-vous donc de ces avis, selon lesquels le critère des ouvrages publics et les règles d'indemnisation de la Loi fédérale sur l'expropriation viseraient toute expropriation entreprise par une Première nation aux termes du projet de loi C-49?

Mme Findlay: À mon avis, ces avis sont inexacts, et à cet égard, je suis tout à fait catégorique. Le projet de loi dit simplement «il doit être tenu compte [...] des règles prévues». J'ai de l'expérience de la rédaction législative et encore plus des actions en justice, et je peux vous assurer que cette expression ne constitue pas une incorporation par renvoi de la Loi fédérale sur l'expropriation.

Le sénateur Johnson: Pourriez-vous nous décrire en détail quelles autres fins pourraient être considérées par les Premières nations comme des «fins d'intérêt collectif»?

Mme Findlay: Comme je l'ai dit tout à l'heure, l'expression «à des fins d'intérêt collectif» est déjà beaucoup plus générale que de parler simplement d'ouvrages devant servir à la collectivité. Le problème, c'est que nous ne savons pas du tout ce que signifie cette expression. Elle n'est pas définie dans les dictionnaires juridiques, dans la jurisprudence ou dans les lois. Pour ce qui est des trois codes fonciers déjà élaborés, si je ne m'abuse, deux bandes ontariennes n'ont pas réclamé pour l'instant des pouvoirs d'expropriation mais il reste que la bande de Muskoday s'est attribué ce pouvoir. J'insiste surtout sur le fait que ces codes fonciers pourront toujours être modifiés ou élargis. Si la loi n'impose aucune restriction, il ne faut pas s'attendre à ce que les codes fonciers le fassent.

Pour moi, l'expression «à des fins d'intérêt collectif» signifie que le conseil de bande pourra procéder à l'expropriation d'intérêt sur ses terres, et c'est là qu'intervient le critère subjectif, s'il le juge souhaitable ou dans l'intérêt de la bande.

Évidemment, contrairement à ce que ferait un autre palier de gouvernement s'il détenait ce pouvoir, si la bande décide, par exemple, qu'il faut construire des installations de lacrosse pour favoriser l'état de santé général et le bien-être des jeunes, elle pourrait procéder à l'expropriation de certaines terres en déclarant que cette expropriation était nécessaire pour des fins légitimes d'intérêt collectif. Si certains membres de la bande avaient des certificats de possession de terres avoisinant une zone civique et qu'ils voulaient construire un centre pour personnes âgées, ils pourraient décider de procéder à une expropriation.

Le sénateur Johnson: Si je comprends bien, vous souhaitez surtout que l'article 28 du projet de loi C-49 soit modifié; c'est bien cela?

Mme Findlay: C'est exact.

Le sénateur Johnson: Voulez-vous modifier le libellé?

Mme Findlay: C'est-à-dire qu'il faut soit supprimer cette expression, soit préciser qu'il s'agit de ce qu'on appelle normalement des ouvrages publics.

Le paragraphe 28(4) prévoit que les intérêts expropriés deviennent la propriété de la Première nation, libres de toutes charges. Une fois que la décision a été prise de procéder à l'expropriation, il n'est plus possible de revenir en arrière. C'est pour cela que cet article est si important et qu'il est indispensable de savoir exactement de quoi on parle.

Le sénateur Austin: Madame Findlay, au nom de tous les sénateurs de la Colombie-Britannique -- le sénateur Fitzpatrick, le sénateur Perrault et moi-même -- je voudrais vous remercier pour votre exposé et vous féliciter pour votre analyse du projet de loi C-49. Je n'ai pas de questions à vous poser au sujet de cet aspect-là de votre exposé.

Je voudrais cependant parler de la question particulièrement épineuse des locataires à bail de Musqueam Park. En répondant au sénateur Andreychuk, vous avez parlé d'une lettre que vous avez reçue de la ministre Stewart. Je ne sais pas comment j'ai réussi à l'avoir, mais il se trouve que j'ai sous les yeux une copie d'une lettre en date du 29 avril 1999. Est-ce à cette lettre-là que vous faisiez allusion?

Mme Findlay: C'est une lettre d'une page et demie environ?

Le sénateur Austin: Oui.

Mme Findlay: Oui, c'est bien celle-là.

Le sénateur Austin: J'aimerais vous poser des questions sur votre réponse à la lettre. Je vais en citer quelques extraits. Elle vous remercie pour votre lettre du 12 avril, lui indiquant que vous avez eu des entretiens avec le chef Campbell, les membres de son conseil de bande et M. Harvey, le conseiller juridique de la bande. Elle continue en disant ceci:

J'étais très contente d'apprendre que les locataires à bail et les responsables de la Première nation de Musqueam se sont réunis pour discuter de la façon de régler les questions qui sont encore en litige.

Je suis tout à fait d'accord pour dire que le dialogue est souhaitable et même nécessaire pour régler les problèmes de Musqueam Park, mais je me demande si vous êtes en mesure de nous donner d'autres détails à ce sujet, sans mettre en péril vos discussions ou vos ententes avec les responsables de la bande de Musqueam. Pourquoi la ministre est-elle si contente?

Mme Findlay: Eh bien, voilà huit ou neuf ans que nous déployons des efforts considérables pour ouvrir le dialogue entre les locataires à bail et les représentants de la bande. Ce dialogue ne s'est pas révélé très utile jusqu'à présent; il n'a pas encore permis de régler les questions en litige.

Quand les choses se sont aggravées autour de Noël, nous avons essayé d'organiser des rencontres, mais sans succès. Mais récemment, il y a environ trois ou quatre semaines, j'ai pu organiser une rencontre que nous-mêmes avons demandée avec le chef, l'avocat de la bande, cinq membres du conseil de bande, moi-même et deux autres locataires à bail. Les participants ont été tout à fait professionnels et civils, mais comme je l'indiquais tout à l'heure dans ma réponse, après la rencontre, j'avais vraiment l'impression que la bande s'appuie sur une décision judiciaire et ne cherche aucunement à trouver des façons de régler les problèmes. Elle s'attend à ce que nous proposions des solutions.

Après cela, j'ai eu une autre rencontre avec l'avocat de la bande, un entretien personnel qui s'est très bien déroulé. Il se trouve que nous avons tous les deux fréquenté l'Université de la Colombie-Britannique, et c'était plus facile, étant donné que nous nous connaissions déjà. Après cette rencontre-là, on m'a fait savoir que la bande était prête à reconnaître, comme nous, que le gouvernement fédéral n'assume pas ses responsabilités dans ce dossier. Elle était aussi tout à fait d'accord pour qu'on organise une rencontre avec la ministre. Vous avez déjà lu sa réponse. Voilà donc où en sont les choses à l'heure actuelle.

Le sénateur Austin: Donc, depuis que vous avez reçu cette lettre, vous n'avez pas rencontré le ministre?

Mme Findlay: Non. Mais je leur ai remis une copie de la lettre, et je leur ai même téléphoné, et ils vont voir ce qu'il faut faire.

Le sénateur Austin: Il semble que ni la bande de Musqueam ni les locataires à bail ne sont prêts à accepter l'offre d'un médiateur professionnel. Quelle est votre position là-dessus?

Mme Findlay: À un certain moment, j'étais favorable à cette proposition étant donné que nous n'arrivions que difficilement à dialoguer directement avec les responsables de la bande ou à les rencontrer. Il me semblait que si nous pouvions recourir aux services d'un professionnel indépendant, nous arriverions à nous parler par son entremise. Mais la bande n'aimait pas cette idée et surtout pas l'idée de demander à la ministre Stewart d'agir à titre de facilitatrice parce que les responsables de la bande veulent qu'elle participe directement aux discussions au lieu d'être un simple intermédiaire.

Mais il n'est plus nécessaire de recourir à cette solution, du moins pour le moment. Mes contacts avec la bande sont suffisamment bien établis pour que je puisse lui parler directement sans avoir besoin de ce genre d'aide. Je peux expliquer ma position et eux-mêmes m'ont expliqué la leur.

Le sénateur Andreychuk: Selon votre interprétation, le gouvernement fédéral cesse-t-il d'être responsable dès l'entrée en vigueur d'un code foncier, aux termes de ce projet de loi? Le paragraphe 16(3) semble sous-entendre que même si les baux ont été signés à l'époque où le gouvernement fédéral administrait ces terres, vos droits seront soit éteints soit transférés aux bandes dès l'entrée en vigueur du code.

Mme Findlay: Évidemment, le projet de loi C-49 part du principe que les bandes ne doivent plus avoir à demander une autorisation ministérielle pour tout ce qui concerne la gestion foncière ou l'utilisation et la possession des terres. Ainsi, dès que la ministre signe les codes fonciers, les bandes sont tout à fait indépendantes. Comme il est question dans les divers articles du projet de loi qui traitent de l'affectation des sols des intérêts de tierces parties, de gestion et de contrôle fonciers et d'expropriation, l'effet de ces dispositions, à bien des égards, est d'éliminer complètement le gouvernement.

Cependant, il faut se rappeler qu'il s'agit de terres fédérales de la Couronne. Vu cette désignation, on pourrait soutenir que la responsabilité fédérale demeure prépondérante. En tout cas, voilà l'argument que j'avancerais, puisque je veux que le gouvernement fédéral continue à participer au règlement de ces questions. Il ne fait aucun doute, cependant, que cela complique beaucoup la situation.

J'aimerais vous remercier de m'avoir donné l'occasion de faire un exposé devant le comité. Dans mon mémoire, vous trouverez aussi les propositions d'autres locataires à bail relatives aux amendements à apporter au projet de loi. Vous avez également reçu le mémoire écrit de Charles Locke, et je vous encourage à le lire. Il est de Vancouver et réside actuellement à Salish Park. Il a été juge de la Cour suprême pendant 10 ans et juge de la Cour d'appel pendant cinq ans. Il s'agit d'un éminent juriste canadien. Il vous a fourni un mémoire écrit sur le projet de loi, mais malheureusement, il n'a pas été possible de le recevoir en personne.

Le président: Nous accueillons maintenant notre prochain témoin, M. le maire Gary O'Connor, du District de Nipissing-Ouest.

M. Gary O'Connor, maire, district de Nipissing-Ouest: Monsieur le président, honorables sénateurs, je vous remercie de l'occasion qui m'est donnée ce soir de vous parler du projet de loi C-49, Loi portant ratification de l'Accord-cadre relatif à la gestion des terres des Premières nations et visant sa prise d'effet.

Avant de faire mon exposé, je voudrais vous parler un peu de mon expérience personnelle et vous présenter Joan McLeod, responsable de la gestion foncière pour la réserve no 10 de Nipissing.

[Français]

Permettez-moi de partager quelques antécédents face à mon sujet.

[Traduction]

J'ai fait mes études primaires et secondaires avec mes voisins de Garden Village, une réserve de Première nation avoisinante, et je continue d'être leur voisin. La vie est parfois étrange. J'ai profité de toutes les occasions que j'avais pour inclure les étudiants des Premières nations dans mes activités et mes loisirs, afin de profiter de leurs connaissances du district de Nipissing-Ouest, notamment en matière de géographie, domaine dans lequel je me suis d'ailleurs spécialisé en devenant éducateur.

Et en tant qu'enseignant, j'ai pu m'enrichir en partageant mes connaissances nouvellement acquises avec les enfants de mes ex-camarades de classe de Garden Village.

[Français]

À titre d'enseignant au secondaire et aux adultes, j'ai eu l'occasion de partager mes connaissances spécifiques, non seulement auprès de mes étudiants, mais aussi auprès des adultes dans des programmes connexes.

[Traduction]

Aujourd'hui, je participe aux affaires communautaires avec mes voisins de Garden Village et d'autres collectivités de Premières nations du nord de l'Ontario, et notamment avec la collectivité Temagami de Bear Island. Dans le cadre de ces activités, je n'ai jamais accepté qu'on les traite de citoyens de deuxième ordre, attitude qui est beaucoup trop présente dans la société d'aujourd'hui. J'ai toujours défendu les droits et obligations de mes amis des Premières nations à l'égard de notre communauté et de notre société; j'ai toujours dit qu'ils sont nos égaux à tous les égards, et je continuerai à le dire.

Le sénateur Janise Johnson (vice-présidente) occupe le fauteuil.

[Français]

J'ai toujours appuyé l'importance de l'égalité humaine et je le fais encore ce soir en votre présence.

[Traduction]

Le district de Nipissing-Ouest peut se vanter d'avoir trois langues et cultures vivantes: l'anglais, le français et l'ojibway. Je suis convaincu que nos collectivités profitent beaucoup de cette diversité, et cette opinion repose sur le fait que les investissements qui sont faits dans notre district sont supérieurs à la moyenne.

[Français]

Chez nous, la valeur ajoutée du bilinguisme est un atout des plus importants, grâce à nos voisins et nos voisines autochtones.

[Traduction]

Je voudrais vous parler ce soir d'un certain nombre de réalisations autochtones dignes de mention. D'abord, le siège social de l'Union of Ontario Indians est situé dans le district de Nipissing, et l'édifice qui abrite ses bureaux est connu comme un chef-d'oeuvre de l'architecture par sa façon de représenter les quatre directions et les quatre races. Deuxièmement, le complexe administratif de Garden Village offre un point d'accès centralisé aux services de santé, sociaux, culturels et administratifs. Troisièmement, de nouveaux services d'éducation permettent d'offrir à tous les étudiants l'éducation dont ils ont besoin. Quatrièmement, la récente intégration d'aînés dans l'équipe du district de Nipissing-Ouest a permis de créer un excellent partenariat. Cinquièmement, la contribution de l'ex-chef Phil Goulais, qui continue de nous offrir son aide à titre de commissaire des Indiens de l'Ontario s'est révélée essentielle pour assurer le bien-être de l'ensemble des résidents du district.

L'une des 14 Premières nations qui demande l'adoption du projet de loi est la Première nation du Nipissing, qui partage une frontière naturelle avec la municipalité du district de Nipissing-Ouest. En ma qualité de maire du district de Nipissing-Ouest, j'ai eu l'occasion ces dernières années de travailler avec le chef Penasse-Mayer dans différents dossiers, notamment celui du développement économique, qui intéresse nos deux collectivités.

J'ai écrit au comité le 3 avril 1999 pour l'informer que je soutiens le projet de loi C-49 de même que l'accord-cadre dont il porte ratification. J'avais deux raisons de vouloir comparaître devant vous ce soir. D'abord, je désire réaffirmer notre soutien vis-à-vis du projet de loi et vous donner d'autres détails sur les relations actuelles entre la Première nation et la municipalité que je représente. Deuxièmement, je veux mettre en lumière l'incidence de cette mesure législative sur nos deux collectivités avoisinantes.

Comme je l'ai déjà dit, nous avons de très bonnes relations avec la Première nation du Nipissing, et ce depuis plusieurs années, et même plusieurs décennies. Nous avons des services policiers partagés. Nous avons d'ailleurs aidé la Première nation du Nipissing lorsqu'elle n'avait pas sa propre force policière. Récemment, nous avons travaillé ensemble sur la question des frontières, et nous avons partagé nos ressources en vue de nous assurer que les résidents de nos collectivités respectives seraient bien protégés.

[Français]

Nous nous sommes toujours penchés sur la nécessité de fournir des services indispensables à nos voisins et à nos voisines.

[Traduction]

Nous avons également longuement dialogué sur un projet futur de construction domiciliaire à Garden Village, l'une des collectivités situées sur les terres d'une Première nation. Nous avons discuté d'un projet potentiel qui serait dans l'intérêt des deux collectivités. Une troisième initiative consisterait à mettre sur pied un comité mixte du développement économique, qui se chargerait d'examiner des projets économiques et de s'assurer que les bénéfices devant découler de ces projets seraient réinvestis dans les deux collectivités.

Je crois comprendre que des témoins représentant diverses municipalités dans la région de Vancouver ont comparu devant le comité pour demander que certains amendements soient apportés au projet de loi. Ces amendements obligeraient les Premières nations à consulter les administrations locales ou régionales avoisinantes concernant l'élaboration d'un code foncier ou toute décision relative à l'affectation des sols prise en application du code foncier.

Selon moi et la municipalité que je représente, cette demande n'est pas raisonnable. Les lois provinciales actuelles n'obligent pas les municipalités à informer d'avance les Premières nations de leurs projets d'aménagement foncier. C'est certainement le cas de l'Ontario. L'officialisation des relations entre les municipalités et les Premières nations serait certainement souhaitable, mais décider unilatéralement de forcer les Premières nations à respecter cette exigence ne ferait que créer de dissensions qu'il est préférable d'éviter.

Une meilleure solution consisterait à prévoir des rencontres entre les Premières nations et les municipalités avoisinantes pour trouver des solutions pratiques qui satisfont les deux parties. En vertu du projet de loi C-49, les Premières nations auront la responsabilité de gérer leurs terres, et les municipalités auront un intérêt plus marqué à rencontrer les responsables autochtones et à établir de bonnes relations de travail avec eux. Si les administrations fédérales et provinciales décident unilatéralement d'imposer la consultation, cela ne favorisera en rien le dialogue. Dans le nord de l'Ontario, nous créons actuellement un processus de consultations ouvertes et constructives.

[Français]

À titre de maire de la communauté que je représente, il m'était difficile d'appuyer la nécessité d'apporter des amendements au dossier juridique en question.

[Traduction]

Deuxièmement, cette question revêt une grande importance pour la Première nation du Nipissing. La Première nation du Nipissing a une assise territoriale considérable qu'elle peut utiliser pour favoriser la croissance économique et améliorer ainsi le niveau de vie des membres de la collectivité. Elle cherche activement à profiter des occasions qui se présentent dans notre région, mais malheureusement la Loi sur les Indiens limite considérablement leur capacité de gérer leurs propres terres et ressources.

En conclusion, nous insistons à nouveau sur le fait que ce projet de loi profitera à l'ensemble de la collectivité de Nipissing, tout en permettant aux Premières nations de participer plus activement à la planification régionale, non seulement dans le nord de l'Ontario, mais dans tout le Canada.

[Français]

Nous appuyons le projet de loi et tous les avantages qu'il nous apportera. Je vous remercie. Kipsish.

[Traduction]

Le sénateur Adams: Est-ce que la situation de votre localité est semblable à celle de la réserve de Musqueam à Vancouver? La situation de la réserve du Nipissing est-elle semblable à celle de Vancouver? Quelle est la différence entre Vancouver et l'Ontario?

M. O'Connor: Voulez-vous que je vous fasse une leçon de géographie?

Le sénateur Adams: Avez-vous des locataires à bail qui auraient investi 500 000 $ dans leurs maisons?

M. O'Connor: Nous avons eu des situations semblables, mais nous avons appris à régler les problèmes de façon amicale. Le district de Nipissing-Ouest est sans doute la plus récente municipalité à être créée au Canada et en Ontario, par suite de l'initiative du gouvernement de l'Ontario de procéder à la fusion de municipalités. Nous existons par conséquent depuis le 1er janvier de cette année. Nos voisins sont là depuis beaucoup plus longtemps que nous, et leurs collectivités s'étendent d'un bout à l'autre du district de Nipissing-Ouest. À Jocko Point, par exemple, certaines terres ont été cédées à bail par le passé et continuent à l'être de nos jours. Certaines conditions des baux ont posé problème, mais à ma connaissance, tous les problèmes ont pu être réglés à l'amiable.

Mme Joan McLeod, gestionnaire des biens fonciers, réserve no 10 de Nipissing: Nous essayons de régler ces problèmes en vertu du nouveau régime. La grande majorité de ces problèmes concernent des locataires qui ont signé leurs baux lorsque les terres en question étaient administrées par la Couronne. Si nous avons voulu mettre en vigueur un code foncier pour l'ensemble du district du Nipissing, c'était non seulement pour établir des règlements pour les membres de la bande et assurer le zonage du terrain, mais surtout pour prévoir des modalités de location qui seraient plus avantageuses.

Mme Findlay parlait tout à l'heure des possibilités de financement, et notamment des prêts hypothécaires. Nous avons des idées sur ce qu'il faut faire pour reconduire les baux et permettre à ces gens d'obtenir des prêts hypothécaires, mais c'est justement là que le développement économique de la bande du Nipissing a été gravement retardé à cause des dispositions de la Loi sur les Indiens.

Le sénateur Adams: Certains témoins prétendent que les membres de la collectivité ne sont pas consultés. Avez-vous consulté les membres de votre collectivité?

Mme McLeod: Nous avons consulté les résidents de Jocko Point et de Beaucage, de même que les membres de notre bande.

Le sénateur Adams: Avez-vous organisé des réunions publiques auxquelles vous auriez invité les membres de la collectivité, ou avez-vous rencontré seulement les responsables des bandes?

Mme McLeod: Nous avons organisé des rencontres avec nos locataires et avec les membres de notre bande.

M. O'Connor: Mais aucun vote n'a encore eu lieu.

Mme McLeod: Il s'agissait de réunions préliminaires destinées à informer les gens de nos projets futurs.

Une de nos locataires, Mme Suzanne LeClair, a comparu devant le comité la semaine dernière. Lundi, les représentants de l'Association de Beaucage et les membres du conseil de bande se sont réunis et à la fin de la réunion, tout le monde, y compris Mme LeClair, étaient en très bons termes. Ils espèrent pouvoir faire quelque chose en vertu du code foncier.

Le sénateur Adams: Donc, cela ne fait pas partie du parc. S'agit-il d'une réserve?

Mme McLeod: Oui.

Le sénateur Adams: C'est donc un peu différent de la situation de la bande de Musqueam.

M. O'Connor: Les limites territoriales sont les mêmes.

Le sénateur Adams: Et quelle est la différence entre le parce et la réserve?

Mme McLeod: Notre réserve, la réserve no 10 de la Première nation du Nipissing, a une largeur de 19 milles et une profondeur de 6 à 8 milles. Elle est située sur la rive nord du lac Nipissing. La municipalité de Nipissing-Ouest a la même limite à l'ouest et Sturgeon Falls, la plus importante de ces collectivités, est à 500 mètres de là. Elle est juste à côté.

La limite de notre territoire à l'est est partagée avec la ville de North Bay. Ces deux collectivités se sont jointes à nous vers la fin des années 80, et à partir de là elles ont établi des relations suivies. Mais nous avons toujours entretenu des relations très spéciales. Même quand nous avons mis sur pied un projet comme celui de l'usine de traitement de la fourrure, nous avions l'habitude d'aller voir les responsables de la ville de North Bay pour échanger de l'information et pour discuter de l'emploi et de la croissance économique. Il était important qu'on discute de ces questions avec eux.

Le sénateur Adams: Cela va-t-il influer sur les locataires à bail? Je suppose qu'ils ne vont pas perdre un bail de 99 ans, ou un bail de 20 ou 30 ans. Peuvent-ils le reconduire, ou s'agit-il d'un bail maximum de 99 ans?

Mme McLeod: La bande est convaincue qu'en collaboration avec ses locataires, il sera possible d'élaborer un bail qui soit plus intéressant et plus comparable à ce qui se fait normalement. Nous espérons également régler ainsi bon nombre des problèmes associés aux baux actuels et au régime foncier actuel, qui nous est imposé par la Loi sur les Indiens.

Le sénateur Adams: L'accord-cadre dont il est question dans le projet C-49 prévoit trois types d'accords. Diriez-vous que votre situation est un peu différente de celle qu'on trouve en Colombie-Britannique?

Mme McLeod: Nous n'avons pas encore élaboré de code foncier au niveau de la bande, mais nous étudions toutes les possibilités qu'il pourrait nous offrir, y compris celle de l'expropriation et de la location des terres. Nous ne voulons rien négliger, mais nous souhaitons aussi que tous les intéressés participent au processus. Ainsi les locataires à bail seraient invités à participer à l'élaboration du bail. Les membres de la bande seraient invités à participer à l'élaboration des règles relatives à la location des terrains. Sur la question de l'expropriation, tous les intéressés auraient voix au chapitre.

Mme Findlay a également parlé d'expropriation. Nous avons décidé de prévoir un pouvoir d'expropriation, parce que nous savons très bien que nous en avons besoin; en même temps, nous sommes conscients des possibilités d'abus. C'est pour cela que nous favorisons l'idée de permettre aux membres de la bande -- c'est-à-dire aux vrais propriétaires des terres -- de voter. Et nous voulons essayer d'élaborer les règlements en collaboration avec eux.

Le sénateur Perrault: Vous avez décrit une situation qui laisse supposer que les relations entre les non-autochtones et la nation Ojibway sont parfaites à tous les points de vue. C'est toujours encourageant d'entendre ce genre de témoignage. Est-ce que cela a toujours été le cas, ou ces relations harmonieuses ont-elles évoluées progressivement sur plusieurs années?

M. O'Connor: Oui, c'est au fil des ans que nous avons pu créer ces relations harmonieuses.

Le sénateur Perrault: Vous avez un conseil municipal local. Y a-t-il des réunions officielles entre les représentants de la nation Ojibway, par exemple, et les conseillers municipaux de votre district?

M. O'Connor: Nous avons eu un certain nombre de réunions mixtes -- de comités plutôt que des conseils proprement dits.

Le sénateur Perrault: Donc, vous désignez un président de comité pour organiser ce genre de chose?

M. O'Connor: Oui, certains comités ont tenu des réunions pour échanger de l'information et discuter de projets possibles. C'est quelque chose qui se fait en permanence.

Le sénateur Perrault: Dans vos témoignages, que j'ai trouvé fort éloquents, d'ailleurs, vous avez dit que vous faites confiance à vos bonnes relations et que vous préférez donc ne pas établir de processus officiel de consultation des intéressés lorsqu'il est question d'expropriation. Je peux me tromper, mais si ma mémoire est bonne, vous avez qualifié les amendements proposés d'«inutiles».

M. O'Connor: D'après ce que j'ai pu comprendre, des amendements, s'ils étaient acceptés, ne feraient que retarder les choses, si bien qu'il s'agirait d'un document historique, plutôt que d'un instrument qui nous permet de réaliser de grands progrès économiques; à mon sens, il faut agir vite.

Le sénateur Perrault: Certains d'entre nous ont l'impression que la situation varie d'une région à l'autre du pays, et que dans une certaine mesure, chaque bande est également différente. Vous semblez être convaincu que grâce aux pouvoirs que confère ce projet de loi, il sera possible de grandement améliorer le niveau de vie des autochtones de votre région. Votre région compte combien d'habitants?

M. O'Connor: Vous parlez du district de Nipissing-Ouest?

Le sénateur Perrault: Oui.

M. O'Connor: Quinze mille.

Le sénateur Perrault: Et combien d'entre eux sont des Ojibways?

M. O'Connor: Environ 10 p. 100.

Le sénateur Pearson: Madame McLeod, vous et les membres de votre bande étiez-vous contents d'avoir l'occasion, grâce à ce projet de loi, de régler certains problèmes liés aux droits des femmes en cas de divorce et de séparation?

Mme McLeod: Il est arrivé dans notre réserve que des couples se séparent. La personne qui a la garde des enfants -- qu'elle soit autochtone ou non -- a le droit d'utiliser la maison matrimoniale. Mais nous avons eu des problèmes à cause des règlements ontariens en matière de répartition des biens, de garde, et cetera, comparativement aux dispositions des lois canadiennes. La Loi sur la gestion des terres prévoit au moins la répartition des biens matrimoniaux, ou du moins la possibilité pour la bande voter sur les droits des intéressés.

Notre collectivité est assez unique. Nous avons des couples qui arrivent tout de suite à régler ces questions-là, et à ce moment-là, l'un peut décider de payer l'autre. Il est également arrivé une fois qu'un couple ne puisse pas s'entendre. Lorsqu'un règlement à l'amiable n'est pas possible et que les enfants sont touchés par la situation, nous allons proposer d'en discuter avec les membres de la bande et les conjoints non autochtones pour obtenir leurs vues. Notre réserve compte environ 80 ou 90 conjoints non autochtones.

Le sénateur Pearson: Maintenant j'ai l'occasion d'obtenir un éclaircissement au sujet des 25 p. 100. Est-ce que la très grande majorité des membres de votre bande habitent dans la réserve, ou est-ce que d'autres habitent ailleurs?

Mme McLeod: Nous avons 1 800 membres. Sur ce nombre, 790 vivent dans la réserve, selon le dernier recensement. Dans la région immédiate de North Bay et de Sturgeon Falls, il y a 230 membres de la bande qui ont un accès immédiat à la réserve en tout temps. Les autres membres de la bande habitent un peu partout en Amérique du Nord.

Le sénateur Pearson: Donc, si je comprends bien, quand vous allez tenir le vote sur le code foncier ou organiser un référendum -- s'agit-il bien d'un référendum?

Mme McLeod: Oui.

Le sénateur Pearson: Eh bien, je crois comprendre que là où il est question de 25 p. 100, ce pourcentage concerne la proportion de vos membres qui doivent voter dans le cadre d'un vote ou vous obtenez 50 p. 100 des voix plus une. Avez-vous la même interprétation que moi?

Mme McLeod: Oui.

Le sénateur Pearson: Je voulais justement m'assurer. L'idée, c'est de s'assurer qu'une proportion raisonnable de vos membres aura voté. Et sur le nombre de membres qui auront voté, il faudra 50 p. 100 des voix plus une.

Mme McLeod: Aux termes de la loi, une bande pourra prévoir dans son code foncier des exigences plus rigoureuses, si elle le souhaite.

[Français]

Le Sénateur Gill: Je vous remercie, monsieur le maire et madame McLeod pour votre présentation. Cela a été une présentation réconfortante qui, à mon sens, annonce un futur positif pour les autres autochtones.

[Traduction]

Parfois, nous n'avons pas l'impression que les autochtones et les non-autochtones peuvent vraiment collaborer. Mais après vous avoir écoutée, nous constatons que c'est possible, et je dirais même que c'est très important.

Est-ce dans le cadre d'un projet conjoint que vous avez pu établir cette confiance mutuelle il y a bien longtemps? Qu'est-ce qui a permis de créer cette confiance?

M. O'Connor: La relation dont vous parlez remonte effectivement très loin. Par exemple, mon grand-père était bûcheron dans la région du Nipissing et certains de ses ouvriers étaient membres de Premières nations. Il a donc toujours eu beaucoup de respect pour ses ouvriers et pour les autochtones en général. Telle est l'attitude qu'a adoptée notre famille, et tous les membres de la famille l'ont toujours défendue. C'était d'ailleurs le cas dans la majeure partie du territoire du district de Nipissing-Ouest.

Une fois qu'on a eu l'occasion de connaître la profondeur et l'intensité de réflexion des Premières nations, on ne peut qu'apprécier leur présence et leur contribution.

Cela se résume à un mot, honorables sénateurs -- l'éducation. Nous avons besoin de gens qui vont investir le temps nécessaire dans l'éducation des autres. C'est ce sur quoi reposent les relations harmonieuses.

D'ailleurs, si vous voulez visiter le district de Nipissing-Ouest ou la Première nation du Nipissing pour voir en quoi consiste notre approche en matière d'éducation, vous êtes évidemment les bienvenus.

La vice-présidente: Merci infiniment de votre présence. Nous avons eu un excellent échange, et je suis sûre que nous vous reverrons à l'avenir.

Je redonne donc le fauteuil au sénateur Watt.

Le sénateur Charlie Watt (président) occupe le fauteuil.

Le président: Nos prochains témoins, mesdames et messieurs, représentent la Commission intérimaire de la gestion foncière. C'est la première fois que les représentants de la Commission comparaissent devant le comité.

Vous avez la parole.

M. Robert Louie, président, Commission intérimaire de la gestion foncière: Avant de faire mes remarques liminaires, je voudrais vous présenter les chefs et membres des conseils qui m'accompagnent ce soir. Je vous présente donc le chef Bill McCue de la Première nation de Georgina Island, en Ontario; le chef Austin Bear de la Première nation de Muskoday, en Saskatchewan; et le chef Joe Mathias, le chef Bill Williams et le conseiller Harold Calla, qui représentent tous la Première nation de Squamish.

Voilà ce que nous aimerions faire: le chef McCue fera un premier exposé, ensuite ce sera le tour du chef Bear, qui sera suivi du chef Mathias, et de moi-même.

Le chef Williams et le conseiller Calla sont à votre disposition pour répondre à des questions précises, s'il y a lieu. Nous sommes également accompagnés de conseillers techniques qui pourront nous aider si jamais vous avez besoin d'éclaircissements ou de renseignements particuliers.

Si jamais vous avez des questions d'ordre juridique à poser, notamment sur la question de l'expropriation, notre conseiller juridique, Bill Henderson, est à votre disposition.

Avant d'entendre l'exposé du chef McCue, honorables sénateurs, je voudrais attirer votre attention sur une pochette contenant des documents additionnels que vous voudrez peut-être consulter pendant nos exposés. À titre d'information, je me permets de vous indiquer que cette pochette contient huit documents différents. D'abord, la lettre en date du 5 mai 1999 envoyée par la nation d'Anishinabek au sénateur Chalifoux; deuxièmement, une lettre en date du 4 mai 1999 adressée par la Banque de Montréal au sénateur Watt; troisièmement, une lettre en date du 17 novembre 1988 adressée par la Peace Hills Trust à M. Guy St-Julien, député; quatrièmement, une lettre en date du 4 mai 1999 adressée par le Centre commercial Park Royal au sénateur Watt; cinquièmement, une lettre en date du 3 mai 1999 adressée par Ratcliffe & Co. au conseil de la nation de Squamish; sixièmement, une lettre en date du 24 mars 1999 adressée par le maire Lonsdale -- de la municipalité de Squamish -- à l'honorable Jane Stewart; septièmement, une lettre en date du 2 mars 1999 adressée par Trudy Coates, du district de Squamish, à Harold Calla; et huitièmement, une lettre en date du 4 mai 1999 adressée par la Première nation de Ts'kw'aylaxw à le sénateur Chalifoux.

J'invite maintenant le chef McCue à faire son exposé.

Le chef William McCue, Première nation de Georgina Island: Monsieur le président, je voudrais tout d'abord remercier les honorables sénateurs de l'occasion qui m'est donnée aujourd'hui de vous parler, et surtout de vous informer d'un certain nombre de faits.

Ma localité est située dans le sud de l'Ontario sur le lac Simcoe, c'est-à-dire à 50 milles au nord de Toronto, qui est l'une des plus importantes villes du Canada. À l'heure actuelle, nous avons 500 locataires non autochtones avec lesquels nous avons signé des baux.

Au mois de mars, les baux prenaient fin, de même que la désignation. Je pensais que le projet de loi C-49 aurait déjà été adopté et je me demandais pourquoi nos terres n'avaient pas fait l'objet d'une redésignation.

Nous avons donc renégocié un permis d'un an avec nos locataires à bail. Il s'agit d'une entente à l'amiable conclue entre l'Association des chalets et moi-même, et cette dernière appuie vivement nos efforts en matière d'autonomie gouvernementale. J'ai eu plusieurs rencontres avec les responsables de l'association.

Étant donné que nous sommes si près du grand centre urbain de Toronto, la location constitue l'une de nos principales sources de revenus. Quand le projet de loi C-49 aura été adopté, nous pourrons adopter nos propres lois foncières. Chez nous, le code foncier a été adopté à la suite d'un vote où 88 p. 100 des intéressés ont voté en faveur.

J'aimerais vous lire une lettre rédigée par le grand chef adjoint de la Nation d'Anishinabek, qui est membre de l'Union of Ontario Indians. Je voudrais partager avec vous et les autres membres du comité la réflexion collective des 43 collectivités de la Nation d'Anishinabek sur les conséquences de l'adoption du projet de loi C-49 avant la fin de la session actuellement en cours. Cette lettre est en date du 5 mai 1999.

Le sénateur Austin: Avons-nous une copie de cette lettre sous les yeux?

M. McCue: Oui. C'est le premier document dans votre pochette d'information.

La lettre dit ceci:

À titre de grand chef adjoint de la Nation d'Anishinabek en Ontario, je suis de très près les différentes étapes du processus d'examen et d'adoption du projet de loi C-49, la Loi sur la gestion des terres des Premières nations.

Nous savons ce que c'est que l'expropriation, grâce non seulement aux débats tenus en comité et au Parlement mais à ceux auxquels nous avons pris part dans nos propres collectivités. C'est une question sérieuse. Comme M. Henderson l'a déjà dit, l'intention des Premières nations n'est pas de suivre à la lettre la Loi sur l'expropriation, mais plutôt de garantir l'équité. L'équité est au coeur de la question de l'expropriation. Et c'est la grande priorité de nos chefs et de nos collectivités.

Le sénateur Andreychuk: Vous parlez d'équité mais comment la définissez-vous?

M. Louie: Je ne sais pas s'il convient maintenant de parler longuement du concept de l'équité. J'utilise ce mot dans le sens le plus pur du terme; c'est-à-dire que quand on parle d'équité, on parle de la nécessité de protéger les intérêts de tierces parties. Il faut également que les intérêts des membres des Premières nations soient protégés. La bonne gestion publique et la bonne gestion foncière reposent nécessairement sur l'équité. Voilà donc ce que signifie pour moi le terme «équité».

Le sénateur Andreychuk: C'est en examinant l'expropriation sous un angle totalement différent que vous avez élaboré les dispositions actuelles du projet de loi. En ce qui vous concerne et en ce qui concerne les autres bandes ici représentées, le projet de loi C-49 prévoit-il des pouvoirs différents et plus larges en matière d'expropriation que l'actuelle Loi fédérale sur l'expropriation?

M. Bill Henderson, avocat: Sénateur, permettez-moi de conclure mes remarques sur l'équité. Vous vous demandiez qui est appelé à définir l'équité. Eh bien, ce travail revient en fin de compte à un groupe d'évaluateurs professionnels. Les règles de la Loi fédérale sur l'expropriation sont semblables pour toute opération d'expropriation. On détermine qui sera chargé de déterminer l'indemnisation, ce qui sera ajouté et défalqué, et les facteurs qui seront pris en compte. Certaines des règles sont assez bien comprises. D'autres sont plutôt obscures et concernent plus particulièrement le droit de l'expropriation.

Donc, des équipes d'évaluateurs sont chargées d'examiner tous ces facteurs et de procéder à ce qui finit par être un exercice de comparaison. Si quelqu'un s'écarte beaucoup de ce qui semble être une approche juste et équitable, les tribunaux sont appelés à intervenir, si cela va jusque-là.

Évidemment, la première étape consiste à négocier l'indemnisation.

Nos consultations m'ont permis de comprendre que les «fins d'intérêt collectif» dont il est question dans le projet de loi ne correspondent pas, point de vue signification, aux «fins publiques» dont il est question dans la Loi sur l'expropriation, on part ici de ce que je considère comme une fausse prémisse -- à savoir que du moment qu'il est question de pouvoirs d'expropriation, on doit nécessairement parler de «fins publiques». Mais on ne trouve pas cette expression dans toutes les lois fédérales. Il y a deux lois sur l'autonomie gouvernementale où il est question de «fins d'intérêt collectif» ou d'ouvrages «devant servir à la collectivité». Dans la version anglaise, on préfère employer l'expression «other First Nation purposes».

Les limites qui visent les fins publiques dont il est question dans une loi fédérale sont effectivement constitutionnelles. Le Canada peut décider de procéder à l'expropriation de terres pour favoriser la paix, l'ordre et le bon gouvernement, pour construire des hôpitaux de la marine dans des zones de quarantaine ou des fortifications, ou encore pour des raisons de sécurité nationale, et cetera. À mon avis, les Premières nations n'interpréteraient pas l'expression «fins publiques» comme englobant nécessairement les mêmes activités.

Le sénateur Austin: Je sais que le témoin n'a pas encore fini, mais j'ai une question à poser sur ce point-là en particulier. Il est parfois difficile d'y revenir une fois qu'on a commencé à discuter d'un grand nombre de questions différentes.

J'aimerais justement vous parler, monsieur Henderson, de la procédure de l'arbitrage. La bande sera chargée de mettre en place une procédure d'arbitrage et de nommer les arbitres. Il ne s'agira pas des évaluateurs, mais des personnes à qui les évaluateurs fournissent leurs opinions professionnelles.

Y a-t-il un mécanisme qui permettrait, à cette étape-là, d'examiner objectivement les conclusions des arbitres?

M. Henderson: La réponse à votre question est oui, sénateur. La nature de l'examen dépend de l'étape à laquelle il intervient. Si c'est la fin pour laquelle on demande l'expropriation qui fait l'objet d'une contestation, il s'agit à ce moment-là d'une demande normale, en vertu de l'article 18, de contrôle judiciaire par la Cour fédérale de l'exercice des pouvoirs d'expropriation. Si l'opposition vise l'indemnisation, en vertu de l'Accord-cadre et du projet de loi C-49 -- et la note de Ratcliffe & Company que vous avez sous les yeux en parle justement -- tout dépendrait de la personne dont relevait le processus à l'époque, c'est-à-dire un vérificateur, un arbitre, et cetera.

Le sénateur Austin: On parle donc du critère de la personne raisonnable ou du bon père de famille.

M. Henderson: Dans ce cas, seulement certains des éléments énumérés à l'article 18 de la Loi sur la Cour fédérale peuvent faire l'objet d'un contrôle. Il peut aussi s'agir d'une procédure différente. Par exemple, si c'est une commission qui réunit les opinions de tous les évaluateurs et prend une décision, à ce moment-là, ce serait une demande normale de contrôle judiciaire par la Cour fédérale en vertu de l'article 18.1 de la Loi sur la Cour fédérale.

Le sénateur Austin: Pourquoi faut-il prévoir des pouvoirs d'expropriation plus larges que ceux du gouvernement fédéral qui, comme le conseiller Henderson vient de le mentionner, sont déjà de portée considérable? Pourquoi faut-il opter pour une définition qui n'a jamais pu être définie dans le cadre du système judiciaire?

M. Henderson: Sénateur, je ne crois avoir dit que l'expression «à des fins d'intérêt collectif» prévoit des pouvoirs plus larges que ceux qu'exercerait le gouvernement fédéral en vertu de l'article de la Loi sur l'expropriation qui précise que l'expropriation est justifiée pour des «fins publiques». J'ai même dit qu'il s'agit d'un pouvoir plus limité. Les pouvoirs constitutionnels du Parlement et de l'exécutif sont bien plus considérables que ceux que détiendront les Premières nations en assumant la gestion de leurs terres et de leurs ressources aux termes de l'accord-cadre.

Le sénateur Austin: Je suis tout à fait d'accord. Quant aux pouvoirs que devrait détenir une collectivité, la Loi fédérale sur l'expropriation fixe déjà les normes à respecter en ce qui concerne l'exercice de ces pouvoirs. C'est une loi qui traite justement de ce genre d'expropriation. Je me demande donc pourquoi il faut en prévoir d'autres. Vous avez dit au sénateur Andreychuk que les pouvoirs dont il est question ici sont plus larges et plus diversifiés. Si je ne m'abuse, ce sont les termes que vous avez employés.

J'aimerais bien comprendre pourquoi ce pouvoir additionnel est nécessaire. Êtes-vous en train de nous dire que dans les exemples que vous avez cités, vous n'auriez pas besoin de pouvoirs plus importants que ceux que prévoit déjà la Loi fédérale sur l'expropriation?

M. Henderson: Sans vouloir vous contredire, sénateur, j'ai dit au sénateur Andreychuk que pour moi l'expression «fins publiques» -- et rappelons-nous qu'il s'agit de fins publiques fédérales dans la Loi sur l'expropriation -- est plus large que celle qu'on retrouve dans le projet de loi C-49, à savoir «des fins d'intérêt collectif». J'ai dit qu'elles étaient différentes. Je n'ai jamais dit que cette dernière expression conférait des pouvoirs plus importants que ceux que détient le gouvernement fédéral.

Le sénateur Austin: Aux termes de la Loi sur l'expropriation?

M. Henderson: Oui. C'est évidemment la Loi sur l'expropriation qu'invoquerait le gouvernement fédéral s'il comptait procéder à l'expropriation de ces mêmes terres, qu'elles appartiennent à des intérêts non autochtones ou non.

L'intention ici est de préciser que dans le cas de Première nation, il peut y avoir des fins particulières, que les Premières nations sont des collectivités, et des collectivités de nature distincte. Qu'on parle de «fins d'intérêt collectif» ou de la «réalisation d'ouvrages devant servir à la collectivité», c'est-à-dire l'expression employée dans d'autres lois fédérales sur l'expropriation qui visent les Premières nations du Canada -- ou qu'on emploie une autre expression -- par exemple, «First Nation purposes» de la version anglaise -- l'idée est simplement de traduire la notion d'avantages collectifs. On insiste sur l'aspect public et collectif, étant donné que la Première nation constitue effectivement une collectivité.

Ce libellé n'a rien de magique. Sans vouloir contredire tous ceux qui l'ont affirmé, je peux vous garantir que le fait de ne pas utiliser le même libellé que la Loi fédérale sur l'expropriation ne cache pas des motivations malveillantes.

Si vous regardez les autres lois fédérales et toute la gamme des lois provinciales, vous trouverez une multitude d'expressions différentes pour décrire les fins pour lesquelles une expropriation peut être autorisée.

Il n'est même pas question de «fins publiques» dans la plupart des lois qui autorisent un organe à exproprier des terres.

Le sénateur Austin: Le paragraphe 28(1) se lit ainsi:

La Première nation peut [...] procéder à l'expropriation des intérêts sur ses terres dont elle a besoin, de l'avis de son conseil, à des fins d'intérêt collectif, notamment la réalisation d'ouvrages devant servir à la collectivité.

Vous dites que deux autres lois fédérales ont le même libellé.

M. Henderson: Non. En 1984, la Loi sur les Cris et les Naskapi du Québec a été adoptée, et par rapport aux terres de la catégorie IA ou IA-N, les conseils de ces bandes cries et naskapi peuvent procéder à l'expropriation de terres à des fins d'intérêt collectif ou pour la réalisation d'ouvrages devant servir à la collectivité. Voilà ce que dit cette loi. Il n'y est pas question de la Loi sur l'expropriation.

Le sénateur Austin: Est-ce que c'est «ou» ou «et»?

M. Henderson: Je vais vérifier. Excusez-moi, c'est l'inverse dans la Loi sur les Cris et les Naskapi. On dit plutôt pour la réalisation d'ouvrages devant servir à la collectivité ou à des fins d'intérêt collectif.

L'autre loi est la Loi sur l'autonomie gouvernementale de la bande indienne sechelte adoptée en 1986, qui autorise le conseil à adopter des lois concernant l'expropriation de terres à des fins d'intérêt collectif.

Le sénateur Austin: Attribuez-vous un autre sens à l'expression «or other first nation purposes» qu'on retrouve au paragraphe 28(1) du projet de loi? En ce qui vous concerne, est-ce que cette expression-là a le même sens que «à des fins d'intérêt collectif» ou pour «la réalisation d'ouvrages devant servir à la collectivité»?

M. Henderson: Il y a quelques semaines, nous avons affirmé devant le comité qu'il n'y a aucune différence. Un tribunal qui interpréterait l'expression «à des fins d'intérêt collectif» pourrait difficilement ne pas tenir du fait que les collectivités dont il est question sont des Premières nations. De même, un tribunal qui interpréterait l'expression «or other first nation purposes» pourrait difficilement ne pas tenir compte du fait qu'une Première nation constitue une collectivité, si bien qu'en fin de compte, c'est bonnet blanc et blanc bonnet.

Le sénateur Austin: Seriez-vous prêt à recommander à vos clients qu'on retienne l'expression «à des fins d'intérêt collectif» ou pour «la réalisation d'ouvrages devant servir à la collectivité» à la place de l'expression qu'on retrouve actuellement dans la version anglaise où l'on ajoute la notion de «other first national purposes»? Vous dites que c'est la même chose, et je présume donc que vous seriez prêt à accepter qu'on amende cet article pour remplacer le libellé actuel par celui de la Loi sur les Cris et les Naskapi.

M. Henderson: Pour moi, le sens est le même. Certains prétendent que l'expression «first nation purposes» pose problème parce qu'elle ne figure dans aucun dictionnaire juridique et n'a jamais été interprétée par un tribunal. Mais il en va de même pour l'autre expression.

Le sénateur Austin: Votre réponse me satisfait. Je me demande si le chef Austin Bear en sera également satisfait.

Je ne veux pas vous mettre sur la sellette, chef Bear. Peut-être pourriez-vous répondre à ma question un peu plus tard.

Le président: Il ne convient pas maintenant d'obtenir une réponse à cette question. Nous allons la réserver pour plus tard.

Le sénateur Tkachuk: Monsieur Henderson, vous avez parlé de motivations malveillantes, mais pour moi, il n'y en a pas. Au cours des dernières semaines, j'ai écouté les préoccupations d'un bon nombre d'avocats assez compétents des différentes régions du pays qui estiment que ce texte pose problème, étant donné que tout le monde ne l'interprète pas de la même façon. Est-ce que cela ne vous semble pas préoccupant? Pour moi, cela veut dire qu'on va devoir engager des dépenses assez importantes au cours des prochains mois pour payer les frais d'avocats. Vous ne trouvez pas préoccupant qu'il existe cette divergence d'opinions sur ce qui devrait être une question de droit assez simple; ou estimez-vous simplement qu'ils ont tous tort?

M. Henderson: Je n'essaie pas d'être simpliste; d'ailleurs, je suis prêt à reconnaître que l'expression «other first nations purposes» est assez originale, mais en même temps, il faut l'interpréter en regard de toutes les autres lois qui portent sur le même sujet. Il s'agit, entre autres, de la Loi sur l'autonomie gouvernementale de la bande indienne sechelte, de la Loi sur les Cris et les Naskapi du Québec et de la Loi fédérale sur l'expropriation, qui peuvent être invoquées relativement aux terres de réserve. Parmi les autres lois, mentionnons également la Loi sur les Indiens, dont M. Louie invoque actuellement le paragraphe 18(2), en collaboration avec la ministre. Il s'agit effectivement d'un nouveau texte, mais ce dernier reprend tous les éléments des lois susmentionnées.

À mon avis, ce nouveau texte ne pose pas problème et ne conduira pas nécessairement à des actions en justice. Certains y voient peut-être des motivations sinistres, mais si l'exercice de ces pouvoirs est jugé inadéquat par certains, il y aura nécessairement des poursuites. Mais à mon avis, ce texte ne sera pas plus difficile à interpréter que si l'on se contentait de parler de «fins d'intérêt collectif» ou de «fins publiques». À mon avis, l'expression qu'on retrouve dans le projet de loi C-49 est tout à fait rationnelle. Elle est nouvelle, mais cela ne veut pas dire qu'elle est mauvaise.

M. Louie: Monsieur le président, je pense qu'il serait peut-être utile que les sénateurs examinent le texte du paragraphe 18(2) de la Loi sur les Indiens, qui traite des pouvoirs actuels d'expropriation.

Nous aimerions maintenant céder la parole au chef Austin Bear, qui va présenter le deuxième volet de notre exposé.

Le chef Austin Bear, Première nation de Muskoday: Honorables sénateurs, bonsoir. J'aimerais tout d'abord vous remercier de m'avoir invité à comparaître devant le comité au nom de la Première nation de Muskoday pour présenter nos vues sur ce projet de loi critique.

La Première nation de Muskoday est signataire du traité no 6 qui vise un territoire dans ce qu'on appelle actuellement la Saskatchewan. Nous sommes l'une des trois collectivités à avoir ratifié l'Accord-cadre. Entre 87 et 94 p. 100 de nos membres ont voté en faveur. L'accord-cadre a été ratifié par 89 p. 100 des membres de la Première nation de Muskoday. Peu de gouvernements peuvent affirmer bénéficier d'un niveau de soutien aussi élevé de la part de leurs électeurs, notamment quand il s'agit de questions qui influent directement sur leur vie et leur destin.

Par rapport aux préoccupations soulevées par des groupes de femmes membres de Premières nations représentant différentes régions du pays, et sans vouloir les contredire, je trouve intéressant que la majorité des électeurs qui ont participé au référendum sur l'accord-cadre étaient de sexe féminin. Les femmes sont très actives et s'intéressent activement à l'évolution de notre collectivité autochtone, quand il s'agit non seulement de gestion foncière mais d'autres questions qui touchent directement leur vie, leurs enfants et la vie de leurs partenaires.

Il n'est pas rare que des membres de Premières nations affirment que ce sont effectivement les femmes qui dirigent et qui prennent les décisions. Nous respectons leur volonté et nous faisons ce qu'elles nous demandent de faire.

Lorsque certains groupes de femmes ont exprimé leurs préoccupations concernant ce projet de loi, les femmes qui sont membres de notre collectivité ont pris l'initiative de préparer une pétition pour protester contre ces femmes qui se déclarent les porte-parole de toutes les femmes, y compris les femmes de la Première nation de Muskoday, sans en avoir l'autorisation. Bon nombre de ces femmes ont signé cette pétition, qui déclare que les femmes qui prétendent représenter les femmes de la Première nation de Muskoday ne les représentent pas et ne peuvent donc être leurs porte-parole officiels. Cette pétition a été officiellement présentée à la Chambre des communes, et je me permets donc d'attirer votre attention là-dessus.

Je respecte et je comprends les préoccupations d'ordre matrimonial de ces femmes, et je suis sûr que certaines d'entre elles sont parfaitement légitimes. Toutefois, il convient de noter qu'aucune de ces femmes n'est membre de la Première nation de Muskoday, et par conséquent, elles n'ont aucune expérience ni aucune connaissance de ce qui se fait chez nous. La Loi sur les Indiens est muette sur la question de la répartition des biens matrimoniaux en cas de séparation ou de divorce, et il est clair que la législation provinciale ne s'applique pas dans les collectivités ou sur les terres des Premières nations. Cela dit, cela ne servirait à rien d'aller dire à nos membres qu'étant donné que nous n'avons pas de loi qui traite de la question, ils ne peuvent pas opter pour le divorce ou la séparation. C'est une question de bon sens, et en l'absence d'une loi appropriée, nous devons être en mesure d'aborder et de régler ces questions. En fait, voilà plusieurs décennies -- et peut-être même plusieurs générations ou siècles, que nous y arrivons.

Lorsque nous avons, regrettablement, à régler des cas de divorce ou de séparation, notamment s'il y a des enfants, nous avons l'habitude d'accorder la priorité à leurs intérêts et à leur protection. La maison matrimoniale est donnée au parent -- que ce soit le père ou la mère -- qui aura la première responsabilité d'assurer la garde des enfants. À la suite d'une séparation ou d'un divorce, il peut très bien s'agir d'un père seul ou d'une mère seule; de même, il peut s'agir d'un membre de la bande ou d'un non-membre.

Nous avons également des lois et des méthodes traditionnelles qui nous permettent de protéger nos femmes contre les hommes violents. Nous avons déjà exclu des hommes qui ont menacé ou battu des femmes ou qui étaient susceptibles de menacer une femme au moment de la séparation. En dehors de l'exclusion, nous avons fait l'impossible pour aider ces hommes à régler leurs problèmes, pour qu'ils puissent un jour réintégrer la collectivité sans constituer une menace pour quiconque.

Je vais essayer d'être aussi bref que possible, mais je m'en voudrais, à titre de chef de la Première nation de Muskoday, de ne pas saisir l'occasion qui m'est offerte ce soir d'exposer les vues de nos membres aussi complètement que possible, à condition d'avoir le temps de le faire.

Nos membres deviennent impatients à présent, à force d'attendre la mise en oeuvre de notre code de gestion foncière, code qu'ils ont déjà accepté et adopté. Nous ne pouvons plus nous permettre de laisser passer les possibilités de développement économique qui se présentent, alors que nos membres continuent de dépendre de l'assistance sociale sans avoir de perspectives d'avenir. À mon avis, nous leur devons plus que cela.

Depuis plusieurs générations, nous subissons cette loi paternaliste qu'est la Loi sur les Indiens. Nous subissons les contrecoups de la Loi sur les Indiens depuis notre naissance jusqu'au moment de notre mort, et ce n'est pas une exagération. Mais il faut avoir vécu cette situation pour affirmer une telle chose. Les propos d'autres personnes qui ne l'ont pas vécue n'ont aucune valeur.

Divers articles de la Loi sur les Indiens permettent aux Premières nations d'exercer certains pouvoirs délégués en matière de gestion foncière, et ces pouvoirs leur sont conférés par le ministre ou par décret du conseil. La Première nation de Muskoday a demandé qu'on lui délègue ces pouvoirs en 1962 ou 1963, mais elle a dû attendre 15 ans avant de pouvoir réellement exercer ces pouvoirs délégués en matière de gestion foncière.

Depuis 1989, nous préparons l'accord de gestion foncière et le projet de loi C-49 -- voilà encore 10 ans qui se sont écoulés. Pourquoi les initiatives et le développement des Premières nations sont-ils si longs à se concrétiser? Nous, aussi, nous avons des besoins et des aspirations, comme tous les autres Canadiens.

Permettez-moi de vous en donner un exemple. Il y a cinq ou six ans, une entreprise de matériel agricole basée au Kansas voulait s'implanter en Saskatchewan. Elle voulait conclure une entente commerciale avec une Première nation, et elle a sélectionné la Première nation de Muskoday pour des raisons connues non seulement des responsables de l'entreprise, mais de nous-mêmes.

Pourquoi aurait-elle voulu s'implanter dans notre collectivité? Eh bien, au fur et à mesure qu'évoluaient les discussions, et que le temps passait, les responsables de l'entreprise se sont rendu compte qu'ils ne pourraient pas attendre les deux ou trois ans qu'il faudrait pour se rétablir chez nous, car aux termes de la Loi sur les Indiens, il aurait fallu attendre entre deux et trois ans pour obtenir un bail. Eh bien, les responsables de cette entreprise ont dit non; nous allons nous implanter ailleurs. Voilà donc une belle occasion et des emplois de perdus pour notre peuple. Nous, les membres de la Première nation de Muskoday, estimons que c'est à nous de déterminer l'usage que nous voulons faire de nos terres, pour favoriser la croissance et le bien-être de notre nation. Cette décision relève de nous. Elle ne devrait pas relever d'un autre palier de gouvernement.

En ce qui concerne l'expropriation, j'ai entendu les arguments et les explications des deux camps. Selon l'explication qui nous est la plus favorable -- autrement dit, si elle est conforme à nos besoins, nous allons dire: «C'est très bien, voilà ce qu'on veut.» Mais si cette explication ne cadre pas avec les besoins, les attentes ou les intérêts d'un autre, ce dernier va dire qu'elle n'est pas acceptable. Mais nous ne voulons pas être les victimes de ces diverses interprétations des textes de loi. En ce qui nous concerne, le texte doit avoir le même sens en français, l'une des langues officielles du Canada, et en anglais. On ne devrait pas avoir à en déterminer le sens ou à interpréter les textes de loi. Mais si cela devient nécessaire, nous avons toujours les tribunaux. Ne faisons-nous pas confiance à notre système judiciaire?

La Première nation de Muskoday a récemment eu l'occasion de profiter d'un programme d'emploi et de formation auquel ont participé tous les membres de notre collectivité, sauf six. Grâce à cette initiative, nous avons pu retirer de l'assistance sociale tous les membres de la collectivité sauf six. Mais une tierce partie avait un intérêt dans les terres dont nous avions besoin pour mener à bien cette initiative. Plutôt que de leur dire: «Nous procédons à l'expropriation de ces terres parce que nous en avons besoin à des fins d'intérêt collectif», nous avons préféré leur dire: «Nous allons négocier avec vous et nous vous ferons une offre juste et équitable pour vous indemniser de la perte de ces terres.» Mais lorsque cette tierce partie a su à quoi serviraient ces terres, elle a déclaré ne pas vouloir d'indemnisation. Elle a décidé de son propre chef de nous rendre ces terres. Voilà donc ce qui peut arriver quand les gens qui ont des intérêts communs décident de travailler ensemble. Voilà le résultat quand les gens se respectent. Mais quand ce respect fait défaut, il faut recourir aux lois sur l'expropriation. Et c'est ce que prévoit ce projet de loi.

En conclusion, honorables sénateurs, au terme de 10 années de consultations intensives avec les représentants de tous les groupes possibles et imaginables, nous sommes à bout de patience. Si ce petit volet de l'autonomie gouvernementale ne peut se concrétiser, il va de soi que les projets de plus grande envergure associés à l'autonomie gouvernementale vont devoir attendre des dizaines d'années encore. Entre-temps, les problèmes s'intensifient au fur et à mesure qu'augmente notre représentation au sein de la population canadienne. Nous revendiquons le droit d'être partie prenante dans la recherche d'une solution. Après des dizaines d'années de préparation, les Premières nations sont prêtes à présent à entamer le prochain millénaire dans la fierté et la dignité.

Nous, les Premières nations du Canada, ne sont pas un simple groupe d'intérêt ou tierce partie. En vertu de traités et d'autres accords qui sont reconnus et garantis dans la Constitution, nous sommes les partenaires du Canada.

Le chef Joe Mathias, Première nation Squamish: J'ai la responsabilité et le devoir de vous parler de plusieurs questions qui nous préoccupent. Je vais être aussi bref et aussi clair que possible en vous parlant de nos activités. Je m'appelle Joe Mathias et je suis le chef héréditaire et élu de la nation Squamish depuis 32 ans.

Pour gagner du temps, et pour les fins du compte rendu, j'attire votre attention sur diverses lettres de soutien que nous avons reçues d'une institution financière et d'une entreprise de la nation de Squamish.

Je vous demande tout d'abord de vous reporter à la lettre en date du 4 mai 1999 de M. Ron Jamieson, vice-président principal responsable des Services bancaires aux autochtones, pour la Banque de Montréal. Il dit ceci au quatrième paragraphe de sa lettre:

Il ne fait aucun doute que lorsqu'une institution financière envisage de financer des projets ou des intérêts touchant les terres d'une Première nation, il y a nécessairement des considérations particulières à prendre en compte, considérations qui sont plus complexes sous le régime de l'actuelle Loi sur les Indiens qu'elles ne le seront aux termes de la Loi sur la gestion des terres des Premières nations. Parmi ces nombreuses considérations, y compris les questions commerciales et de crédit normal qui entrent en ligne de compte dans toute opération de crédit, la possibilité que des pouvoirs publics décident à l'avenir d'exproprier ces termes est certainement la moindre.

Au cinquième paragraphe, il dit ceci:

D'après mon souvenir, le potentiel d'expropriation n'a jamais été un facteur dans aucune des discussions auxquelles j'ai participé au cours des années concernant le financement de projets sur des terres de réserve, et je ne crois pas non plus qu'on attache plus d'importance à cette question à l'avenir. Nous continuerons, comme par le passé, à accorder la priorité à la sécurité de nos investissements et aux garanties que nous possédons en cas de non-paiement.

Nous sommes un client de la Banque de Montréal, et nous traitons beaucoup avec les responsables de la Banque pour tout projet ou lotissement touchant les terres de réserve de la nation de Squamish.

La troisième lettre que vous avez dans votre pochette d'information est de M. Warren W. Hannay, président-directeur général de Peace Hills Trust. Au quatrième paragraphe, il dit ceci au sujet du projet de loi C-49:

Nous nous réjouissons du dépôt du projet de loi C-49 portant ratification de l'accord-cadre, qui va confier aux Premières nations la capacité juridique et le pouvoir d'administrer directement les terres de réserve, si elles le jugent approprié. Nous nous attendons également à ce que ce régime apporte d'importants avantages économiques à ces 14 Premières nations et à leurs membres, grâce à un régime juridique plus efficace et plus pratique.

À mon sens, il est significatif que ces institutions financières aient voulu exprimer leurs vues et surtout leur appui à l'égard du projet de loi C-49.

Le quatrième document que vous allez trouver dans votre pochette d'information est la lettre de la Park Royal Shopping Centre Ltd. Cette entreprise loue 55 acres à la nation Squamish, et plus précisément la réserve indienne no 5 de Capilano. Les citoyens de Vancouver-Ouest voient ce centre commercial comme une porte d'entrée à leur collectivité.

Ce lotissement a été construit en 1958, et sa valeur actuelle, pour les fins de la taxation, se chiffre à environ 213 millions de dollars. Ce terrain de 55 acres a fait l'objet de nombreuses améliorations, entre autres: les trois tours du Centre Park Royal, qui comprend 505 unités; un centre commercial régional; une tour de bureaux; une salle de quilles; des cinémas; un restaurant; un terrain d'entraînement pour le golf; et de nombreux autres services. Ce complexe est situé dans notre réserve.

Permettez-moi de vous citer le quatrième paragraphe de cette lettre, où les auteurs indiquent, en parlant du projet de loi C-49, qu'ils «ont depuis longtemps d'excellents rapports de travail avec les responsables de la nation de Squamish». Un peu plus loin au même paragraphe, ils précisent que «par rapport aux pouvoirs actuels de la nation de Squamish, en tant qu'autorité gouvernementale, nous n'avons jamais eu de problème».

Au cinquième paragraphe, ils disent ceci: «En ce qui concerne le projet de loi C-49, nous sommes d'avis, à titre de principal locataire d'une terre de réserve de la nation de Squamish, que l'adoption de ce projet de loi est dans notre intérêt».

Le septième paragraphe précise que:

Plus tôt la nation de Squamish détiendra les pouvoirs nécessaires, plus tôt elle pourra entreprendre ce travail important qu'est la définition des droits et responsabilités de tous les intéressés dans le contexte d'un régime global de gestion foncière.

Je passe maintenant au huitième paragraphe, où on dit ceci:

Quant à l'affirmation selon laquelle le financement des intérêts locatifs sera plus difficile après l'adoption du projet de loi C-49, pour notre part, nous n'en sommes pas du tout convaincus.

Enfin, le dernier paragraphe dit ceci:

Les investisseurs institutionnels et les institutions financières sont de plus en plus disposés à assurer, à des locataires comme nous, le financement d'intérêts locatifs sur des terres de réserve désignées. C'est dû en partie aux compétences dont a fait preuve la nation de Squamish à titre d'instance gouvernementale. Dans la mesure où le projet de loi C-49 favorisera l'efficacité de la nation de Squamish, à notre avis, il devrait être plus facile, plutôt que l'inverse, d'obtenir du financement à l'avenir.

Je vous demande également de consulter la lettre de Mme le maire Lonsdale de la Municipalité de Squamish, qui déclare son appui pour le projet de loi.

En terminant, monsieur le président et honorables sénateurs nous sommes actuellement à un tournant historique extraordinaire. Quelqu'un a dit tout à l'heure qu'il faut profiter de cette occasion. Si vous n'adoptez pas ce projet de loi, dans sa forme actuelle, les Premières nations seront forcément reléguées au second plan par rapport au programme législatif.

Si on peut dire que l'actuel gouvernement traduit la volonté nationale en ce qui concerne l'autonomie gouvernementale de l'ensemble des Premières nations au Canada, on peut dire que son énoncé de politique sur le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale, adopté par le caucus et le Cabinet il y a environ deux ans, en est la manifestation concrète.

C'était une démarche audacieuse de la part d'un gouvernement non autochtone que d'affirmer le droit inhérent des Premières nations à l'autonomie gouvernementale, et de déclarer publiquement son intention de mettre en branle le processus de concrétisation de ce droit inhérent dans tout le Canada. Le gouvernement a déclaré que cette reconnaissance pourrait prendre de nombreuses formes différentes, entre autres le projet de loi dont vous êtes actuellement saisis.

Le projet de loi C-49 représente une mesure de peu d'envergure, et son objectif est à la fois clair et simple. Il a pour objet de prévoir le transfert ordonné aux Premières nations des pouvoirs de la ministre en matière de gestion foncière. Ces pouvoirs pourront désormais être exercés au niveau local, dont ils relèvent.

Quand nous parlons de terres de réserve, nous ne parlons pas de terres privées. Nous parlons de terres qui appartiennent, collectivement, à l'entité culturelle, politique et sociale qu'est la nation de Squamish.

Ce sont nos villages, et nos maisons. Voilà longtemps que nous nous débattons avec les dispositions de la Loi sur les Indiens. Nous sommes comme un moulin à vent dans un pays sans vent. Nous n'arrivons pas à progresser de la manière qui correspond à nos aspirations, en tant que peuple.

S'il existe une volonté nationale et publique de reconnaître le droit des Premières nations à l'autonomie gouvernementale, le gouvernement doit concrétiser cette volonté en adoptant ce projet de loi le plus rapidement possible. Il ne faut surtout pas gaspiller les efforts considérables que nous avons consacrés à cette entreprise en laissant passer ce moment historique. À notre avis, l'éventuelle décision d'apporter des amendements au projet de loi et au régime qu'il créera mettrait certainement en péril cette mesure législative, qui risque de mourir avant d'être adoptée. Ce n'est pas le message qu'il faut communiquer aux autochtones du Canada, vu l'énoncé de politique mis en avant par le gouvernement du Canada concernant leur droit inhérent à l'autonomie gouvernementale.

Nous encourageons le comité et le Sénat à faire en sorte que ce projet de loi suive son cours normal. Il est temps de tourner la page. Nous n'avons pas la garantie que si ce projet de loi fait l'objet d'amendements à cette étape-ci, il pourra revenir et être adopté. Comme je viens de le dire, son objectif est clair et simple.

Le traité signé avec la nation Nishga est d'une grande ampleur et complexité et traite d'un volet de l'autonomie gouvernementale à laquelle a droit le peuple Nishga et de toutes sortes d'autres questions. Nous savons déjà que la ratification de cet accord a été reportée à plus tard à cause du programme législatif très chargé du Parlement. Si des amendements sont proposés au projet de loi C-49, cela va nécessairement entraîner des retards, et il est possible que ce projet de loi ne survive pas. Pour moi, ce serait un message tout à fait inopportun à communiquer aux Premières nations. À mon avis, nous devons respecter la volonté nationale de faire progresser la situation en adoptant le projet de loi C-49.

En conclusion, monsieur le président, je vous remercie, ainsi que vos collègues, d'avoir bien voulu prendre le temps d'entendre nos propos au sujet de cette mesure importante.

Le président: Merci.

M. Louie: Honorables sénateurs, nous arrivons à la fin de cette série d'exposés. Vous avez énormément d'information à assimiler.

Avant de continuer, je voudrais faire une petite mise au point pour les fins du compte rendu. Certains d'entre vous m'avez appelé «chef Louie» tout à l'heure. J'aimerais simplement vous faire remarquer que je ne suis plus le chef de ma collectivité. J'ai occupé le poste de chef pendant une dizaine d'années, mais mon mandat a pris fin il y a plus de deux ans. Mais je remercie les honorables sénateurs pour leurs égards à mon endroit.

Je vous demande maintenant de vous reporter à la lettre adressée au sénateur Chalifoux par les responsables de la Première nation de Ts'kw'aylaxw. Le chef de la Première nation de Ts'kw'aylaxw m'a demandé de faire circuler sa lettre en guise de réponse à l'exposé fait devant le comité la semaine dernière par M. Brian Wallace, qui représentait la Continental Lime Limited. Vous vous souviendrez que la société Continental Lime est une société minière qui exploite les ressources minérales des terres de réserve de la Première nation de Pavilion.

Le chef Alec et son conseil veulent vous communiquer tous les faits pertinents concernant les opérations d'extraction minérale menées par la Continental Lime Limited dans les terres de réserve de la Première nation sans l'autorisation du chef et du conseil. La Première nation de Pavilion a refusé de renouveler le bail signé avec la société Continental après 1994, étant donné que cette dernière n'avait pas répondu à ses préoccupations. Si je ne m'abuse, le chef Alec explique dans sa lettre en quoi consistaient ces trois préoccupations. Je n'ai donc pas besoin d'ajouter autre chose à ce sujet.

Le chef Alec aurait voulu nous accompagner aujourd'hui, mais il n'a pas pu investir le temps et l'argent nécessaires pour faire ce voyage. Il voulait cependant que sa lettre soit officiellement consignée au compte rendu des délibérations du comité. J'espère que vous accéderez à cette demande de la part de sa collectivité.

Le chef Joe Mathias vous a dit qu'il n'est pas nécessaire d'apporter des amendements au projet de loi. Plusieurs témoins ont soit déposé des amendements, soit demandé que le projet de loi C-49 soit modifié, mais à notre humble avis, honorables sénateurs, cette mesure législative n'a pas besoin de modifications. Vous avez entendu les propos de nos chefs et de certains de nos conseillers. Vous avez également entendu les opinions exprimées par certains de nos gestionnaires fonciers, conseillers juridiques et d'autres représentants.

Nous vous invitons par conséquent à examiner avec sérieux les arguments que nous avons fait valoir à la fois verbalement, et dans nos mémoires écrits. Ces derniers ont été préparés avec le plus grand soin et sérieux. Nous sommes convaincus d'avoir bien répondu à vos questions et à celles soulevées par les témoins qui ont enregistré leur opposition au projet de loi C-49 ou y ont proposé des amendements. Nous vous exhortons donc à trouver le temps nécessaire, malgré vos horaires très chargés, d'étudier soigneusement les documents que nous vous avons fournis. La question de l'expropriation fait d'ailleurs l'objet de longues explications.

Le président: Monsieur Louie, j'aimerais permettre aux sénateurs de poser des questions. Vous nous avez déjà fourni des documents écrits, et à mon avis, vous n'avez pas besoin de les lire, puisque nous les avons déjà sous les yeux. Je veux m'assurer que les sénateurs auront la possibilité de vous poser des questions.

M. Louie: Dans ce cas-là, monsieur le président, je voudrais simplement demander une précision au sujet du compte rendu. Ai-je donc raison de croire que vous avez une copie de mon texte et qu'il va être annexé au compte rendu de vos délibérations?

Le président: Oui.

M. Louie: À notre avis, il apporte un certain nombre de précisions très importantes à toute cette question.

Le sénateur Perrault: Nous avons reçu des suggestions intéressantes et utiles de la part des chefs qui ont comparu devant le comité. Hier, nous avons reçu un groupe de femmes qui prétend qu'elles n'ont pas pu participer de quelque façon que ce soit à tout ce processus. Vous dites qu'il n'est pas nécessaire de modifier ce projet de loi. Mais les femmes prétendent qu'elles n'ont pas pu se prononcer sur la question et que par conséquent elles n'ont pas exercé leur droit de parole. À mon avis, on doit vous donner la possibilité de répondre à cette allégation assez sérieuse.

Avez-vous organisé des réunions pour discuter du projet de loi? Combien? Les femmes ont-elles été invitées et leur avez-vous donné l'occasion de participer aux discussions?

M. Mathias: Je vais réagir en premier, et les autres chefs voudront sans doute vous donner d'autres précisions à ce sujet.

Ma réponse aura deux volets. D'abord, on a parlé tout à l'heure de l'autonomie gouvernementale dans le contexte de la conclusion de traités en Colombie-Britannique. Eh bien, j'ai été l'un des principaux instigateurs de ce mouvement. Et c'est grâce à ce mouvement que la Commission des traités de la Colombie-Britannique a vu le jour. Il a fallu des années pour créer cette institution, qui joue en quelque sorte le rôle de gardien du processus de conclusion de traités. À l'époque, le gouvernement fédéral et le gouvernement de la province de la Colombie-Britannique avaient convenu d'adopter des lois pour officialiser ce processus de conclusion de traités et pour mettre sur pied la Commission des traités de la Colombie-Britannique. Une fois que cette dernière est devenue une personne morale aux termes de la législation fédérale et provinciale, le Sommet des Premières nations a avalisé la Commission des traités de la Colombie-Britannique.

Dès la création officielle de cette commission, nous disposions d'un mécanisme officiel, qui était désormais inscrit dans la loi. J'étais chargé de diriger la négociation d'un traité au nom de la nation de Squamish. C'est un fait établi que nous avons tenu deux assemblées générales pour consulter les membres au sujet de la négociation d'un traité. Nous avons alors reçu le mandat de mener à bien ce processus de négociation.

Si je comprends bien le processus dont il est question ici, c'est le gouvernement du Canada qui doit adopter une loi. À la suite d'un travail ardu sur le projet de loi lui-même, l'accord-cadre a été ratifié par suite de l'adoption d'une résolution des Premières nations. Quant à la ministre, elle a participé à la conclusion de l'accord-cadre à la demande du Cabinet. Donc, d'après ce qu'on m'a donné à entendre, c'est ainsi que s'est enclenché le processus de ratification de l'accord-cadre.

Une fois que ce projet de loi aura été adopté, conformément à certaines de ses dispositions, notamment celles qui portent sur le code foncier, le conseil de la nation de Squamish et le peuple Squamish devront décider s'ils veulent ou non être visés par cette loi.

Le sénateur Perrault: Et cela n'a pas encore été fait?

M. Mathias: En ce qui nous concerne, c'est ce processus-là que nous avons accepté. Nous avons fait valoir -- et c'est un argument important -- que cela ne servait à rien de solliciter les vues des 1 800 ou 2 000 membres de la nation de Squamish au sujet ce régime alors que nous n'avions aucune garantie que ce projet de loi serait effectivement adopté. Il était donc clair qu'il n'y aurait aucun processus officiel de consultation auprès de nos membres tant que la loi n'aurait pas été adoptée. Ensuite, nous pourrions lancer des discussions exhaustives avec l'ensemble de nos membres en vue d'élaborer un code foncier. J'attends avec impatience ce moment, car ce sera un tournant décisif dans l'histoire du peuple de Squamish. Ce sera pour nous l'occasion de définir notre propre constitution pour ce qui est de la gestion des terres et de nos ressources et de la façon de traiter nos femmes, mes tantes, ma soeur, ma grand-mère.

Il me répugne de penser que le cimetière de la réserve indienne de Capilano, où sont enterrés mes ancêtres, appartient à la Couronne, alors que ce sont nos terres. Il faut absolument que cela change, et que ces terres relèvent de notre responsabilité.

Ma réponse est donc la suivante: nous entamerons des consultations exhaustives auprès de nos membres en temps et lieu; d'ailleurs, nous avons déjà tenu deux réunions pour présenter la question. Si le projet de loi n'est pas adopté sous peu, nous serons évidemment pris avec le régime prévu dans la Loi sur les Indiens. Si cela devait se produire, je craindrais que la nation de Squamish n'ait plus jamais l'occasion de bénéficier d'une initiative aussi novatrice que celle-ci.

Le sénateur Perrault: Le projet de loi a peut-être des défauts mineurs, mais à votre avis, il devrait être adopté, car sinon il traînera pendant longtemps et risque de mourir de sa belle mort. C'est bien cela votre position?

M. Mathias: S'il n'est pas adopté dans sa forme actuelle, à mon avis, il ne survivra pas.

Le sénateur Perrault: C'est intéressant.

Le sénateur Pearson: Permettez-moi de vous rassurer. Beaucoup de gens ne savent pas comment fonctionne le Sénat et craignent par conséquent que si on propose le moindre amendement, le projet de loi est fini. Mais ce n'est pas vrai. Nous détenons certains pouvoirs, mais nous n'avons pas vraiment le pouvoir de torpiller un projet de loi.

Le sénateur Austin: C'est faux. Vous avez parlé de «pouvoirs». Le fait est que nous avons ce pouvoir.

Le sénateur Johnson: Nous l'avons déjà fait, sénateur.

Le sénateur Austin: Par contre, il ne faut pas croire que c'est cela que nous envisageons de faire.

Le sénateur Pearson: Je reconnais mon erreur. D'ailleurs, il faut que ce soit clair. Nous pourrions voter contre le projet de loi, et à ce moment-là, la Chambre des communes pourrait nous le renvoyer. Dans ce sens-là, nous n'avons pas le pouvoir de le torpiller. Mais si nous faisons traîner les choses jusqu'au moment de la prorogation, nous pourrions effectivement le torpiller.

Le sénateur Austin: Si la Chambre nous le renvoie et que nous n'acceptons pas les amendements proposés, nous avons effectivement la possibilité de torpiller le projet de loi. Je ne voudrais pas que vous donniez une fausse impression des pouvoirs du Sénat.

Le sénateur Pearson: Pour ma part, je ne voudrais pas que les témoins pensent que si on propose des amendements, même mineurs, le projet de loi est nécessairement fini.

Le sénateur Perrault: De nombreux projets de loi ont été modifiés par le passé par suite de recommandations faites par le Sénat. Voilà où on veut en venir.

Le sénateur Pearson: Presque personne n'a déclaré son opposition au concept qui sous-tend le projet de loi. Même si des questions ont été soulevées au sujet de certaines dispositions, les gens sont généralement en faveur. À mon avis, vous n'avez pas besoin de vous faire trop de mauvais sang à ce sujet. Il va y avoir des discussions. Le Sénat prend très au sérieux non seulement son travail, mais ses responsabilités envers les personnes qu'il représente. Nous ferons donc le nécessaire pour nous assurer d'assumer ces responsabilités-là.

J'aimerais obtenir des éclaircissements au sujet des 25 p. 100. J'ai moi-même essayé de faire les calculs. À titre d'exemple, si votre bande compte 1 000 membres, dans le cadre du vote sur le code foncier, vous devez obtenir l'aval de plus de 25 p. 100 des électeurs admissibles. Mais en réalité, vous avez besoin de l'aval de plus de 25 p. 100 des personnes qui votent, à moins que les 25 votent tous en faveur. Ai-je bien compris? Pourriez-vous me donner d'autres explications à ce sujet? La question des 25 p. 100 semble entraîner une certaine confusion.

M. Henderson: Permettez-moi de vous l'expliquer brièvement. Si vous avez 1 000 membres, aux termes de l'accord-cadre, tous ces membres doivent être informés du code foncier qui est proposé et de leur droit de voter là-dessus. Cinq cents d'entre eux doivent voter. Si 50 p. 100 des électeurs ne votent pas, le vote est obligatoirement nul et non avenu. Si 50 p. 100 des électeurs votent, la majorité des votants doivent avaliser la proposition, c'est-à-dire qu'au moins 25 p. 100 doivent dire oui.

Par exemple, si seulement 36 p. 100 des électeurs votaient et 80 p. 100 d'entre eux étaient en faveur, cela ne marcherait pas. Si 49 p. 100 votaient et que 80 p. 100 d'entre eux étaient en faveur, ce ne serait toujours pas acceptable, parce qu'il faut qu'au moins 50 p. 100 des membres votent. De même, il faut qu'au moins 25 p. 100 votent en faveur.

Aux termes de l'accord-cadre, ce plancher peut être relevé par la Première nation, si cette dernière le juge approprié. Mais en temps normal, 50 p. 100 des membres doivent voter, et le code doit être approuvé par une majorité d'entre eux, ce qui signifie essentiellement que 25 p. 100 plus un votant doivent voter en faveur.

Le sénateur Pearson: Merci pour cette précision, que j'ai trouvée fort utile. Certains avaient l'impression que seulement 25 p. 100 des membres devaient voter. Merci donc d'avoir clarifié la situation.

Vous avez dit que les votants doivent être informés mais un mécanisme précis est-il prévu à cette fin?

M. Henderson: C'est à la Première nation de déterminer par quel moyen il informera ses membres. Ce processus fait ensuite l'objet d'une vérification indépendante, et ce pour garantir que le mécanisme choisi était raisonnable et que la Première nation a déployé tous les efforts nécessaires pour informer chaque membre adulte de la bande, quel que soit son lieu de résidence.

Le sénateur Adams: Si je ne m'abuse, il existe plus de 500 réserves dans tout le Canada. Pourquoi ce projet de loi vise-t-il seulement 14 d'entre elles? Les autres réserves ont-elles demandé à ne pas être touchées par cette mesure?

M. Henderson: Sénateur, cette question a été posée à maintes reprises par les députés et d'autres intéressés. La gestion foncière est une question très complexe. Nous ne nous sommes pas adressés à chacune des 610 Premières nations au Canada pour demander leur soutien. Nous n'avons pas activement sollicité l'appui de toutes les Premières nations. En fait, peu de Premières nations au Canada sont prêtes à mettre en oeuvre le genre de régime que propose ce projet de loi. On parle ici de gestion foncière, c'est-à-dire la gestion des ressources et des terres de réserve. C'est une question complexe.

Bon nombre de Premières nations nous ont fait savoir de vive voix qu'elles soutenaient cette mesure. Dans nos dossiers, nous avons des résolutions de 15 ou 16 conseils de bande indiquant qu'ils souhaitent participer au processus dès maintenant ou encore qu'ils préfèrent faire partie de la deuxième vague. Ils attendent de voir si ce projet de loi sera adopté ou non. Mais nous savons que d'autres Premières nations sont intéressées.

Ce régime deviendra une sorte de modèle. Le ministère des Affaires indiennes examine de près toute cette question. Certaines dépenses en découlent nécessairement, mais cela fait partie du processus.

De plus, il faut que les intéressés soient prêts et se sentent prêts à adhérer à ce régime. Voilà le résultat visé. Nous avons eu de nombreuses discussions avec l'Assemblée des Premières nations. Au cours des 10 dernières années, nous avons longuement débattu ces questions à l'interne avec les membres de l'Assemblée des Premières nations. Ils nous ont fait comprendre très clairement qu'il n'est pas question de forcer les chefs, les collectivités et les Premières nations au Canada à y participer. Les membres des Premières nations doivent avoir le pouvoir de décider eux-mêmes de ce qui convient pour leurs collectivités. Ils doivent pouvoir décider s'ils veulent ou non participer à ce régime.

Quatorze Premières nations ont décidé d'y participer et sont maintenant prêtes à passer à l'étape suivante. Je vous assure que cela représente énormément de travail. Trois Premières nations ont déjà adopté des codes fonciers, et il en reste donc 11 qui doivent encore le faire.

Cela rejoint ce qu'on disait tout à l'heure au sujet des membres. Il s'agit d'obtenir leur consentement éclairé. Il ne s'agit pas de cacher quoi que ce soit lorsque nous parlons de ce projet aux membres des Premières nations. Il faut tout mettre sur la table.

Et quand on parle du soutien des membres des Premières nations, on parle des membres qui vivent non seulement dans la réserve, mais aussi hors réserve. C'est une tâche difficile. Deux des témoins de ce soir sont des chefs dont les collectivités ont déjà adopté des codes fonciers; cependant, il faut bien comprendre qu'il y a énormément de travail à faire avant d'obtenir le consentement éclairé des membres et d'organiser un scrutin de cette ampleur.

Comme vous le savez, même le gouvernement du Canada et les provinces ont du mal à obtenir suffisamment de voix quand il s'agit de prendre une décision. Et pour les Premières nations, il va sans dire que c'est une exigence onéreuse.

Le sénateur Adams: Le projet de loi C-49 est très complexe. Même la Chambre des communes n'a pas vraiment voulu régler la question, et c'est pour cela qu'elle nous a renvoyé le projet de loi. Nous ne sommes pas élus, et nous pouvons donc faire ce que bon nous semble. Pour ma part, je suis là depuis 22 ans. Au cours de cette période, il est arrivé que des projets de loi soient modifiés au Sénat. Parfois la Chambre des communes n'accepte pas nos amendements, et à ce moment-là, le projet de loi meurt. En ce qui concerne le projet de loi C-49, c'est surtout la question des droits des femmes qui me préoccupe. Si le projet de loi comportait des garanties à ce sujet, cela pourrait aller. À mon avis, il conviendrait d'y apporter un amendement mineur pour répondre aux préoccupations exprimées à l'égard des droits des femmes.

Nous avons adopté la Loi portant sur les revendications territoriales du Nunavut, et trois ans plus tard, nous avons été saisis d'une soixantaine d'amendements. Nous les avons adoptés au Sénat il y a quatre ou cinq mois. Les gens ont des inquiétudes en ce qui concerne les terres, leur valeur et la possibilité qu'ils perdent leur maison. Le comité a également des inquiétudes à ce sujet. Par conséquent, nous ne voulons pas torpiller le projet de loi.

Vous avez reçu une lettre de la Banque de Montréal, et au Sénat, nous avons l'habitude de traiter de questions financières. Les banques exigent toujours des garanties en cas de défaut de paiement, et les hommes d'affaires ont besoin de prêts.

M. Henderson: Sénateur, permettez-moi de réagir à deux des points que vous avez soulevés, avant de céder la parole à mes collègues pour aborder votre troisième point sur le financement.

Je suis content d'apprendre que le Sénat n'a pas l'intention de torpiller ce projet de loi. Cependant, nous sommes déjà le 5 mai. Le Parlement a l'habitude d'ajourner en juin, et c'est ce à quoi nous nous attendons cette année. Par conséquent, le nombre de jours est limité. Il ne reste pas beaucoup de temps. D'après ce qu'on nous a dit, la procédure est la suivante: vous présentez vos recommandations et vous faites ensuite rapport du projet de loi au Sénat. Si des amendements sont proposés, le projet de loi doit être renvoyé à la Chambre des communes, et c'est là justement que nous craignons de manquer de temps. Si le Parlement décide de proroger, nous aurons un grave problème. Tous les projets de loi actuellement inscrits au Feuilleton vont mourir. C'est une préoccupation légitime, en ce qui nous concerne.

Le président: Il n'est pas question d'ouvrir un débat là-dessus maintenant. Ce n'est pas l'objet de nos audiences. Nous sommes là pour examiner un certain nombre de questions et c'est cela que nous devons faire.

Le sénateur Austin: Pour ma part, je suis très content que vous ayez fait ces commentaires.

Le président: Oui, nous sommes très contents d'apprendre ce que vous venez de dire.

M. Henderson: Le deuxième point concerne la question matrimoniale. Je sais qu'il s'agit là d'une question très importante. Comme nous l'avons fait remarquer dans d'autres exposés précédemment, nous essayons de régler ces questions de la façon la plus adéquate et juste possible. Nous avons un mécanisme qui nous permet de protéger les droits des femmes et d'assurer la protection de tous les membres, hommes et femmes, et de leurs enfants, qu'ils soient autochtones ou non-autochtones. Comme mécanisme, qu'y a-t-il de mieux que de soumettre la question à l'ensemble de la collectivité pour lui permettre d'en débattre, en sachant d'entrée de jeu que les dispositions de la Charte des droits et libertés relatives au traitement des deux sexes vont s'appliquer? Ce fait n'est d'ailleurs pas connu de bon nombre des personnes qui ont exprimé leur opposition.

C'est une question sérieuse. Nos collectivités se sont attaquées au problème et ont adopté des modifications en vue de clarifier l'accord-cadre. Donc, à notre humble avis, des mesures ont déjà été prises pour trouver une solution, si bien qu'une procédure juste et équitable est déjà en place.

Le sénateur Austin: Je remercie Robert Louie pour ses observations, qui m'ont donné satisfaction à plusieurs égards. Je n'ai donc pas besoin de poser les questions que j'avais l'intention de vous adresser.

Je voulais surtout comprendre la nature de vos préoccupations. Le comité se réunira pour décider s'il est opportun ou non de proposer un amendement. Nous n'en sommes pas encore là, mais cela se fera au cours de la prochaine semaine. Nous demanderons à la ministre de nous garantir que, par rapport au programme législatif de la Chambre des communes, le gouvernement accordera la priorité à l'examen de cet éventuel amendement. Si la ministre n'est pas en mesure de nous donner cette garantie, nous en tiendrons compte.

Je voudrais simplement répéter ce que le sénateur Pearson et le sénateur Adams vous ont déjà dit. Nous avons, à plusieurs reprises, modifié des projets de loi d'initiative gouvernementale à la demande des collectivités autochtones. Nous avons dit au gouvernement que certains changements s'imposaient. Un récent exemple serait le projet de loi concernant les parcs nationaux, qui ne prévoit pas de consultations auprès des collectivités avoisinantes. La Direction des parcs n'avait aucun foyer d'expertise qui puisse entretenir des relations suivies avec les collectivités autochtones. Par conséquent, nous avons dit au gouvernement: «Vous ne pourrez pas faire adopter ce projet de loi si vous n'acceptez pas d'y apporter cet amendement.» Nous souhaitions que le ministre nous garantisse que cet article serait incorporé dans le projet de loi, et il en a fait l'annonce cette semaine.

Dans une certaine mesure, c'est donnant-donnant, mais nous avons bien compris votre message. Je le comprends mieux maintenant qu'au début de la réunion.

Le chef Bill Williams, Première nation de Squamish: J'aimerais demander à M. Calla de répondre à la question concernant le financement.

M. Harold Calla, conseiller, Première nation de Squamish: Honorables sénateurs, pour ceux d'entre vous qui ne me connaissez pas, je suis comptable général agréé depuis 1977. J'ai grandi dans un environnement où les gens étaient travailleurs autonomes, et par conséquent, je connais bien ce domaine. L'une des plus grandes frustrations que j'ai connues en retournant travailler pour la nation de Squamish, concernait notre incapacité d'obtenir du financement dans la réserve. Nous avons dû nous mettre à genoux pour obtenir un prêt, prêt qui devait nous permettre, en négociant un montant correspondant à la juste valeur marchande, de récupérer un intérêt vendu précédemment à vil prix. Même si le gouvernement distribuait des millions à tout le monde, nous étions dans l'impossibilité d'obtenir une subvention qui nous permette de réacquérir notre propre intérêt locatif. Il a fallu neuf mois pour obtenir le financement nécessaire pour acquérir cet intérêt locatif.

Tout cela s'est passé il y a 14 ans, et à cause du bon travail et de l'intégrité de la nation de Squamish, du point de vue de l'administration et du remboursement de ses prêts, les banques nous connaissent beaucoup mieux à l'heure actuelle. Pendant ces 14 années, je n'ai pas cessé de faire du lobbying auprès des institutions financières canadiennes pour que les gens puissent plus facilement obtenir du financement pour entreprendre des projets dans la réserve.

J'étais stupéfait il y a 15 jours quand le sénateur Ghitter m'a annoncé ici même qu'une marina de la côte nord avait du mal à obtenir du financement. On n'avait pas besoin d'être un génie pour comprendre pourquoi. Je suis allé à Vancouver vendredi pour rencontrer leurs mandants, et je leur ai dit que leur position nous inquiétait beaucoup. Nous leur avons dit que nous accepterions d'agir en leur nom, comme nous l'aurions fait pour n'importe qui d'autre vivant sur nos terres, pour obtenir le financement nécessaire pour aller de l'avant. C'est dans notre intérêt de le faire.

Je vais regarder les témoignages reçus par le comité hier soir. Je préfère lire le compte rendu avant de me prononcer là-dessus. Mais je vous invite à lire les derniers paragraphes de la lettre rédigée par les responsables de la Banque de Montréal. Il y a 14 ans, sénateur Adams, cette banque n'était pas là pour nous soutenir, et si la situation a changé, c'est parce que nous y menons des activités commerciales intéressantes qui ont fait leurs preuves. En fait, avant de venir à Ottawa, j'ai informé M. Blair que la Banque de Montréal serait très heureuse de recevoir une demande de prêt pour un projet devant se dérouler sur nos terres.

Le président: Merci infiniment pour votre exposé. Je voudrais un éclaircissement au sujet d'un point soulevé par M. Mathias.

Vous avez dit que ce projet de loi n'a pas encore force de loi. C'est vrai. Il n'aura force de loi que s'il est adopté par le Sénat et renvoyé à la Chambre des communes. C'est alors seulement qu'il sera promulgué.

En réponse aux questions de certains collègues concernant les consultations menées auprès de vos membres, vous avez dit -- et corrigez-moi si je me trompe -- qu'il ne convenait pas de les consulter maintenant parce que cela créerait des attentes élevées qui pourraient être trompées. C'est-à-dire que ce projet pourrait ne pas se réaliser en fin de compte, étant donné qu'il n'est pas sûr que le projet de loi soit adopté.

Si je vous ai bien compris, vous avez également dit qu'à la fin de ce processus, vous allez retourner chez vous et consulter vos membres. C'est alors que vous déciderez, avec vos membres, si vous voulez participer au régime ou non. C'est du moins ce que j'ai cru comprendre.

Dans le même ordre d'idées, les femmes autochtones nous ont répété -- dans le cadre non seulement de notre examen du projet de loi C-49, mais aussi d'autres études portant sur la fonction gouvernementale -- qu'elles sont maltraitées par leur propre peuple. La Loi sur les Indiens est souvent pointée du doigt. Quand vous consultez vos membres, vous aurez l'occasion de vous attaquer à d'autres problèmes au sein des Premières nations, y compris ceux qui touchent les femmes.

Ai-je raison de supposer que c'est cela que vous ferez en retournant dans vos collectivités respectives? C'est-à-dire que non seulement vous allez consulter tous vos membres, mais vous leur donnerez d'autres occasions de s'attaquer aux problèmes qui sont une source d'inquiétudes pour certains? Ai-je raison de supposer que c'est cela que vous ferez?

M. Mathias: Merci infiniment pour ces questions importantes, monsieur le président.

Quand la question de l'accord-cadre, dont le projet de loi C-49 porte ratification, a surgi dans les médias, la Nation de Squamish a organisé des réunions générales. Nous en avons tenu une à Squamish Valley. Et voici ce que nous a dit un de nos membres: «Cette mesure législative, a-t-elle force de loi? Sinon, je ne veux pas en parler.» Et c'est cela la position de nos membres -- c'est-à-dire que cela ne sert à rien de parler du projet de loi tant qu'il n'aura pas été adopté en bonne et due forme et que nous n'aurons pas la possibilité de nous attaquer aux problèmes qui sont pour nous une source d'inquiétudes.

S'agissant de l'autre point que vous avez soulevé, si je ne m'abuse, le comité sénatorial permanent des peuples autochtones a le pouvoir de recommander à vos collègues du Sénat, à la ministre des Affaires indiennes, et au gouvernement du Canada qu'un comité permanent, mixte ou non, soit mis sur pied pour examiner la question importante des droits des femmes. Cela devrait relever d'un comité permanent autonome. Consacrez-y les ressources financières et humaines nécessaires pour mener à bien cette étude.

Nous parlons de terres, de ressources et de contrôle, mais nous parlons aussi de notre histoire et de nos blessures. Nous avons tous des soeurs ou une mère qui ont souffert. Nous en subissons maintenant les conséquences. Il faut agir au niveau national pour aborder la question des droits des femmes, et il faut avoir la volonté nationale d'examiner la question et de prendre les mesures qui s'imposent. Il ne faut pas se dire que ce travail se fera dans la foulée de la CRPA ou reléguer cette question au second plan en nommant une commission royale pour l'examiner.

En cherchant à régler des questions de ce genre, les gouvernements devront faire les choses étape par étape. Sinon, nous serons constamment confrontés à cette problématique. Et nous ne serons pas plus avancés, ni vous ni nous. Je recommande par conséquent qu'un comité mixte soit nommé pour faire un examen approfondi de la question d'ici le début du prochain siècle.

La Loi sur les Indiens a été adoptée en 1870, et elle a failli détruire nos collectivités. Nous avons maintenant l'occasion de progresser, d'entamer un nouveau siècle. Le gouvernement et le Sénat ont le pouvoir de faire des recommandations et de solutionner tous ces problèmes. Voilà donc ce que je propose.

Le président: Merci infiniment pour ces idées intéressantes.

J'aimerais pousser cet argument un peu plus loin pour ce qui est de l'information présentée au comité -- encore une fois, pas seulement sur le projet de loi C-49 mais sur d'autres questions, ou quand nous étudions d'autres projets de loi.

En tant qu'autochtone, j'ai la responsabilité de faire part de mes expériences aux autres. Par exemple, j'ai appris que les membres de ma collectivité prenaient des décisions entre eux sans vraiment en comprendre les conséquences, et qu'ils n'étaient pas en mesure de conjuguer leurs efforts pour régler les véritables problèmes qui suscitaient des conflits. Je me permets de vous faire remarquer que ce genre de chose n'est vraiment pas souhaitable. Je ne sais pas ce qu'en pensent les autres sénateurs, mais à titre de sénateur autochtone, je dois dire que je n'aime pas constamment entendre parler de ces situations.

Nous avons besoin d'aide. Si nous allons vraiment progresser et permettre à nos peuples de réaliser l'autonomie gouvernementale, nous devons déployer un maximum d'efforts au niveau local pour nous assurer d'avoir l'appui de tout le monde. J'ai moi-même été élevé par une femme qui a dû faire fonction de mère et de père, et cela me blesse de savoir de quelle façon nos femmes -- nos mères et nos soeurs -- sont traitées.

Encore une fois, tout découle de la Loi sur les Indiens. Mais la Loi sur les Indiens a été élaborée par des humains, comme nous, et des humains comme nous peuvent aussi prendre des mesures correctives quand c'est nécessaire. Si les autochtones adoptent ce genre d'approche et s'entraident, nous, au comité, pourrons également vous aider.

Mais un vrai dialogue s'impose, si nous voulons réussir. Pour réaliser l'autonomie gouvernementale dans les années qui viennent, nous devons travailler ensemble et nous soutenir mutuellement. Nous devons parler d'une voix et être tous sur la même longueur d'onde.

La séance est levée.


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