Délibérations du comité sénatorial permanent de
l'Agriculture et des forêts
Fascicule 14 - Témoignages
OTTAWA, le mardi 5 mai 1998
Le comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts, auquel a été renvoyé le projet de loi C-4, Loi modifiant la Loi sur la Commission canadienne du blé et d'autres lois en conséquence, se réunit aujourd'hui à 15 h 20 pour étudier le projet de loi.
Le sénateur Eugene Whelan (vice-président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le vice-président: Il manque un membre pour constituer le quorum. Le Règlement du comité nous permet toutefois d'entendre des témoignages et de poser des questions même en l'absence de quorum. Je crois savoir que plusieurs de nos membres sont encore au Sénat puisqu'ils doivent y prendre la parole cet après-midi. Ils viendront ici dès qu'ils seront libres.
Monsieur le ministre, vouliez-vous dire quelque chose avant que la séance ne débute?
M. Ralph E Goodale, c.p. député, ministre des Ressources naturelles, interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits et ministre responsable de la Commission canadienne du blé: Non, monsieur le président. J'ai eu l'occasion de faire des déclarations au Sénat, oralement et par écrit, à plusieurs reprises. Je préférais passer aux questions. Comme mon bureau en a informé le comité, je suis libre cet après-midi jusqu'à 4 h 15 environ. Je voudrais en finir avec les questions qui n'avaient pas pu être abordées à la fin de notre réunion de la semaine dernière.
Le vice-président: Je crois qu'un membre du comité, qui fait fonction de président aujourd'hui, a dit souhaiter vous poser quelques questions.
Les deux exposés qui m'ont le plus impressionnés sont ceux du Syndicat du blé de la Saskatchewan et du Syndicat du blé du Manitoba. Je me suis senti obligé de les relire, et des questions ont alors surgi.
La plus grande coopérative agricole au Canada, soit le Syndicat du blé du Manitoba, a porté une question à mon attention. Ces gens-là ont un chiffre d'affaires annuel de 1,2 milliard de dollars, manipulent 3 millions de tonnes de céréales et de graines oléagineuses et possèdent 120 silos à grains. Ils appuient le projet de loi dans sa totalité, mais ils ont suggéré plusieurs modifications.
Une partie de mes questions, monsieur le ministre, ont trait au fonds de réserve. Comment pouvez-vous justifier pleinement la décision du gouvernement de se décharger de ses responsabilités sur le dos des producteurs en matière de garanties. Leurs revenus nets ont déjà pâti des réductions budgétaires imposées par le gouvernement, qui se sont traduites par une perte de 750 millions de dollars en subventions au transport. Si le gouvernement continuait de garantir, sans pratiquement aucun risque pour les producteurs, les rajustements initiaux aux prix, la création d'un fonds de réserve ne se révélerait-t-elle pas moins nécessaire?
M. Goodale: Monsieur le président, la création de ce fonds de réserve s'inscrit essentiellement dans le cadre des activités de développement du marché et de commercialisation dans lesquelles la Commission canadienne du blé, ainsi que son nouveau conseil d'administration, dont les deux tiers des membres seraient élus par les agriculteurs, pourraient décider de s'engager à l'avenir. Parmi les exposés que nous avons reçus ces deux ou trois dernières années et qui portent sur le fonctionnement de la commission, bon nombre expriment l'avis que, face aux conditions actuelles du marché, la Commission canadienne du blé doit avoir à sa disposition toute une série d'outils qui lui permettent d'accroître sa flexibilité -- sans qu'elle ne soit tenue d'y recourir à un moment donné ou à autre, car l'important, c'est qu'elle puisse y accéder si besoin est, de façon qu'elle soit aussi efficace que n'importe quel autre intervenant du marché. Le projet de loi C-4 met ces outils à la disposition de la Commission canadienne du blé pour le cas où elle jugerait bon d'en faire usage.
Trois de ces outils comportent certains risques. Le premier est la vente au comptant; le deuxième est le paiement forfaitaire anticipé des livraisons en commun; le troisième est l'accélération des paiements de rajustement. Le fonds de réserve, si l'on s'en tient au texte législatif, ne servirait que lorsque le conseil d'administration décide de faire usage de ces outils pour accroître sa flexibilité, et cette option ne serait envisageable qu'à l'égard des trois outils en question. Deux de ces outils sont entièrement nouveaux; ce sont la vente au comptant et le paiement forfaitaire anticipé des livraisons en commun. Quant au troisième, il est déjà prévu à l'égard des paiements d'ajustement.
Quant à l'argument voulant que le gouvernement fédéral se décharge de ses responsabilités, la question ne se pose pas à l'égard de quelque chose de tout à fait nouveau, car on ne saurait se décharger d'une responsabilité que l'on n'avait jamais assumée jusqu'à présent. Le double concept de vente au comptant et de paiement forfaitaire anticipé des livraisons en commun est tout nouveau, si bien qu'il n'est pas question de se décharger d'une responsabilité dans cette affaire. C'est une toute nouvelle innovation. Ce sont de tout nouveaux outils visant à accroître la flexibilité de la Commission canadienne du blé quand elle en sent le besoin. Mais, comme toute innovation, cet outil n'est pas sans comporter certains risques imprévus. Voilà pourquoi un mécanisme tel qu'une police d'assurance s'impose si l'on veut se protéger contre ces risques imprévus, d'où le fonds de réserve.
Pour ce qui est de l'accélération des paiements de rajustement, il s'agit ici de faire en sorte que la Commission canadienne du blé soit à même de décider quand il y a lieu d'augmenter les paiements initiaux. Comme votre longue expérience dans ce domaine vous l'aura montré, avec le système de garanties gouvernementales actuellement en vigueur, le processus consistant à tout préparer au sein de l'appareil gouvernemental pour que soient adoptés les décrets nécessaires à l'octroi des garanties quand on juge qu'une augmentation des paiements initiaux s'impose compte tenu de la situation du marché, peut prendre beaucoup de temps. Ça peut aller jusqu'à plusieurs semaines. A mes tout débuts ici, en 1993, j'ai été à même de constater que ce n'est pas des semaines mais plutôt des mois qu'il a fallu parfois attendre avant que le gouvernement n'en arrive à pouvoir trancher la question de savoir s'il convient d'accorder les garanties en vue d'un ajustement. Pendant ce temps-là, l'argent des agriculteurs était immobilisé. Sur le plan administratif, nous avons réussi ces quatre dernières années à ramener le processus à une durée plus raisonnable, soit un ou de jours, parfois trois quand des questions d'ordre financier s'avèrent plus difficiles à trancher. Mais le délai reste entier. En modifiant les règles relatives aux paiements d'ajustement, on compte éliminer entièrement ce délai de façon que les garanties puissent être sans aucune intervention de l'appareil gouvernemental. La Commission canadienne du blé serait en mesure de décider du moment où il convient de modifier les paiements initiaux et de payer les agriculteurs aussitôt que possible. Je suppose qu'il appartient à chacun de juger s'il s'agit là d'une tentative de se décharger d'un risque.
Quand on passe en revue les 60 années d'existence de la Commission canadienne du blé et plus particulièrement la période postérieure à 1943 qui a vu la commission acquérir ses principaux pouvoirs, on constate que pas une seule fois elle a mal jugé un paiement d'ajustement. Il est certes arrivé que le paiement initial ait été mal évalué, à la suite par exemple d'un déficit enregistré dans un des comptes de mise en commun. Fait à signaler, dans les rares cas où cela s'est produit, c'était toujours à la suite d'une circonstance extraordinaire ayant intervenu sur le marché. Je pense au programme de subventions aux exportations que les Américains ont instauré, perturbant les marchés du monde entier et bouleversant les plans de chacun en matière de marchés des céréales.
Le vice-président: Ils ont conservé le programme.
M. Goodale: Ils n'y ont pas eu recours ces dernières années. Ils ont encore le pouvoir de le faire et c'est dans leur plan budgétaire.
Pour ce qui est de la distinction à faire entre les paiements d'ajustement et la détermination du paiement initial au commencement de la saison, la Commission canadienne du blé n'a jamais, à ma connaissance, méjugé les circonstances. Voilà pourquoi j'estime que la Commission canadienne du blé ne court pratiquement aucun risque en assumant cette responsabilité, et l'on pourrait ainsi accélérer tout le processus.
Le président: Si cela ne sert pas à grand-chose, pourquoi le gouvernement ou le ministre responsable de la Commission canadienne du blé ne font-ils rien pour apaiser ce stress? Nous avons pu constater que des agriculteurs s'inquiétaient de ce qu'ils ne bénéficieraient plus de cette protection. Pourquoi le ministre n'apaise-t-il pas un peu le stress dont souffrent les agriculteurs et n'alloue-t-il pas une subvention à l'ancien fonds de réserve?
M. Goodale: Hypothétiquement, c'est juridiquement possible selon les dispositions du projet de loi C-4. Le défi est bien sûr de trouver les fonds nécessaires à la constitution d'une telle subvention ou contribution. Nous pourrions également être confrontés ici à une question d'équité puisqu'une telle subvention ou contribution pourrait amener d'autres organismes de commercialisation à en espérer le même traitement.
Comme je l'ai expliqué à la dernière séance, les montants nécessaires à la création d'un fonds de réserve au titre des paiements d'ajustement seraient très minimes si l'on s'en tient au très bon bilan de la Commission canadienne du blé dans ses prises de décisions, les comptes de mise en commun n'ayant jamais accusé de déficit. On a proposé d'autres solutions, comme l'imposition d'une limite au fonds de réserve global, une idée qui me plaît bien. Il serait intéressant de connaître l'avis du Sénat à ce propos.
Si j'ai bonne mémoire, le Syndicat du blé du Manitoba, dans son exposé, a parlé de 30 millions de dollars. J'aimerais savoir ce qu'en pense le Sénat.
Il conviendrait également de se pencher sur la question de savoir si le fonds de réserve devrait comporter un seul ou trois comptes. Le fonds de réserve ne peut servir qu'à trois fins explicites. Il est très strictement circonscrit. Quelqu'un a invoqué la possibilité d'un interfinancement, c'est-à-dire que l'on pourrait s'assurer contre le risque consenti pour une fin donnée ou résultant d'un type d'activité donné à même les recettes tirées d'un autre type d'activité. Il s'agit peut-être là d'un argument qui milite en faveur de la constitution de trois comptes distincts afin d'éviter tout interfinancement.
Autre point à considérer quant à l'idée d'une subvention ou contribution gouvernementale: la réaction possible de nos partenaires commerciaux. Cela pourrait être considéré comme une forme d'octroi de subventions. Il conviendrait assurément que nous tenions compte de cet aspect avant d'accorder une telle subvention ou contribution.
Nous proposons de structurer les arrangements en fonction des paiements d'ajustement. Nous réduirions probablement la menace ou le risque de susciter des mesures ou des préoccupations commerciales puisque notre arrangement s'apparenterait beaucoup au système de prêts garantis des Américains. Désormais, ceux-ci pourraient difficilement se plaindre, car notre système serait très semblable au leur.
Le vice-président: Certains d'entre nous craignent peut-être que le Canada ne finisse par trop ressembler aux États-Unis.
M. Goodale: Selon les journaux, le gouverneur de l'État du Dakota du Nord a encore renouvelé sa suggestion d'inclure son État dans la zone désignée de la Commission canadienne du blé et de faire en sorte que ses céréales soient commercialisées dans le cadre de la Commission canadienne du blé. Ce n'est certes pas la première fois qu'il formule cette suggestion, mais il n'en persiste pas moins dans son intention. C'est bon d'avoir un partisan de la Commission canadienne du blé du côté américain.
Le vice-président: Nous sommes probablement tous deux d'accord là-dessus. Il voit les avantages de la Commission canadienne du blé.
En ce qui concerne la disposition d'inclusion-exclusion, il est question d'éliminer la Fédération canadienne de l'agriculture ou les syndicats nationaux des cultivateurs. Il s'agit de groupes de producteurs. Devrions-nous, selon vous, élargir la participation?
M. Goodale: La question a provoqué beaucoup de discorde au sein des organismes agricoles qui m'ont parlé ou ont témoigné devant le comité de la Chambre des communes. La vaste majorité d'entre eux étaient d'avis que si une telle disposition devait être inscrite dans la loi, il faudrait à tout le moins définir très clairement le type de groupe qui pourrait déclencher le processus. Le texte actuel du projet de loi C-4 s'apparente beaucoup à celui de l'exposé du Syndicat du blé du Manitoba. Les mots employés ne sont pas les mêmes, mais l'intention, à mon avis, est similaire.
Seul un organisme composé exclusivement de producteurs du secteur céréalier en question pourrait présenter une demande d'inclusion. La demande doit réellement refléter la volonté des membres, non pas d'une section locale, mais de la Commission canadienne du blé tout entière.
Le vice-président: Je suis sûr que vous-même et vos collaborateurs avez étudié les recommandations des Syndicats du blé du Manitoba et de la Saskatchewan. J'y souscris entièrement. Il ne s'agit, dans certains cas, que de modifications mineures à la loi.
Je vais vous poser une question de portée générale. Combien de recommandations n'approuvez-vous pas ou les appuyez-vous toutes? Nous pourrions présenter 12 propositions d'amendement et réglé tout cela.
M. Goodale: Le dilemme avec toutes ces propositions, c'est que si un groupe se présente avec une liste de 12 bonnes idées, il se trouvera un autre groupe d'intérêts du secteur agricole de l'Ouest pour brandir une liste de suggestions allant dans le sens contraire. S'il n'existait qu'une seule et même liste valable pour tout le monde, cela nous faciliterait beaucoup la tâche, mais ce n'est malheureusement pas le cas.
Nous avons naturellement étudié les recommandations du Syndicat du blé du Manitoba et une bonne partie d'entre elles se retrouvent actuellement dans le texte législatif. Elles insistent sur l'obligation de rendre compte aux producteurs. J'ai fait état à la dernière séance du processus d'élaboration des règlements qui vise à régler cette question.
Nous avons parlé du mécanisme de sélection du président-directeur général qui exigera nécessairement une collaboration et un partenariat entre le gouvernement canadien et le conseil d'administration.
J'ai déjà abordé le dossier des paiements d'ajustement et j'estime que c'est une réponse tout à fait valable aux questions soulevées par le Syndicat du blé du Manitoba.
Pour ce qui est de savoir qui doit déclencher l'éventuel processus d'inclusion, le langage que l'on trouve actuellement dans le projet de loi épouse de près celui du Syndicat du blé du Manitoba. Ces gens-là recommandent qu'un tel processus soit public, que le public en soit bien informé. Et on retrouve cela dans le projet de loi.
À bien des égards, les propositions du Syndicat du blé du Manitoba ont été intégrées dans la version actuelle du projet de loi. Ses conseils ont été très précieux.
Le vice-président: Quand M. Hehn, le dirigeant de la Commission canadienne du blé a témoigné ici, il a expliqué les subventions auxquelles ont droit les agriculteurs en France, en Allemagne et aux États-Unis. Lorsque nous avons tenu des audiences dans l'Ouest, j'ai eu l'impression que certains étaient d'avis que nous nous montrions trop durs en supprimant les subventions au Canada, créant des difficultés pour les agriculteurs.
On accuse la Commission canadienne du blé d'être responsable de la situation des marchés mondiaux et plein d'autres choses. J'ai cru comprendre que M. Hehn reconnaissait que l'Allemagne et la France octroient encore des subventions élevées et, qui plus est, accroissent toujours leur production, alors que ces pays s'étaient engagés à la stabiliser. J'ai eu l'impression que, selon lui, nous nous montrions trop durs, alors même qu'ils ne respectent pas l'accord.
M. Goodale: La question comporte deux aspects, tout aussi important l'un que l'autre. Un aspect a trait à ce que nous faisons chez nous et l'autre aspect, à ce que nos concurrents font dans le monde.
Il ne fait aucun doute que le Canada s'est employé à assumer pleinement les obligations qui sont les siennes dans le cadre du nouvel OMC. Je crois que nous avons le droit et même le devoir de veiller à ce que nos partenaires commerciaux en fassent autant.
Ces dernières années, de modestes progrès ont été faits dans l'application de la politique agricole commune à l'Union européenne et à la Loi agricole américaine.
Le vice-président: On a dit que nous étions les boy-scouts de l'Organisation mondiale du commerce.
M. Goodale: Chose certaine, personne ne peut nous accuser de ne pas assumer nos obligations.
Le vice-président: Mais les agriculteurs peuvent vous reprocher d'avoir été durs envers eux quand ils se comparent à leurs homologues allemands, français et américains.
M. Goodale: Comme je l'ai dit, il y a là deux aspects à considérer: ce que nous faisons et ce que les autres font.
Pour ce qui est du premier aspect, nous avons honoré scrupuleusement nos engagements envers l'OMC. Il y a diverses raisons pour lesquelles il y a lieu d'honorer ces engagements. La première, c'est bien sûr qu'il s'agit de respecter les obligations de l'OMC. Je vais vous donner un exemple concret des conséquences possibles d'un non-respect.
L'OMC a exigé pendant un certain temps que les subventions à l'exportation ayant des effets de distorsion sur le commerce soient réduites, pour ce qui est des montants et des pourcentages, selon un calendrier échelonné sur une période allant de cinq à sept ans. Si nous n'avions pas pris, comme nous l'avons fait en 1993, 1994 et 1995, des mesures pour respecter la lettre de cette obligation, dans certains marchés-clés, notamment en Asie et en Amérique latine, on aurait pu nous en refuser l'accès. Cela ne se serait produit partout certes, mais nous risquions de voir notre accès à ces marchés restreint, et ce, dès l'automne 1996. Voilà pourquoi il était important pour nous, pour des raisons d'ordre commercial, d'adopter cette approche.
À propos d'un programme de subventions comme celui du tarif du Nid-de-Corbeau, il y a d'autres motifs importants qui militaient en faveur de la promotion de la valeur ajoutée et de la diversification dans les prairies ainsi que de l'élimination progressive certaines inefficacités observées dans la structure du transport et de la manutention du grain.
Mais c'est un processus qui demande du temps. Il nous faut faire deux choses. Nous devons surveiller très attentivement les iniquités ou les anomalies qui peuvent surgir en cours de route, et nous devons nous employer à faire en sorte que nos partenaires commerciaux, eux aussi, honorent leurs obligations.
M'adressant à des agriculteurs américains, j'ai à plusieurs reprises souligné ce que nous avons fait au Canada et affirmé carrément -- même s'ils n'ont peut-être pas saisi le message -- que, en ce qui a trait aux subventions à l'exportation ayant des effets de distorsion sur le commerce, le Canada, dans le secteur du grain, n'a rien à se reprocher. Demandant à ces Américains ce qu'ils avaient fait dernièrement pour mettre de l'ordre dans leurs affaires, je n'ai recueilli que des bruits nerveux, des regards tournés vers le sol, des raclements de gorge et des toussotements. Nous devons rester vigilants afin qu'eux aussi respectent leurs obligations.
Le sénateur Spivak: Vous avez parlé des iniquités et des anomalies que les subventions peuvent susciter. Ce matin, au comité sénatorial des transports, des représentants de la Prince Rupert Grain Ltd y ont fait quelque peu allusion. Nous avons appris comment l'existence de la route du nord est menacée par un virage nord-sud qui s'opère dans le transport du grain et par d'autres iniquités.
La disposition inclusion-exclusion, un aspect important de ce projet de loi, n'est pas aussi claire pour moi qu'elle devrait l'être. J'ai lu votre amendement et trouve très raisonnable. Mais je voudrais vous poser une question hypothétique. Si cette mesure législative ne comportait pas de disposition d'inclusion et d'exclusion et qu'un groupe de producteurs voulait adhérer à la Commission canadienne du blé, la procédure à suivre serait-elle la suivante: le conseil d'administration, ayant entendu la demande, prie le ministre de faire passer une mesure législative en ce sens?
Autrement dit, si l'inclusion et l'exclusion ne sont pas prévues dans cette mesure législative, cela signifie que les portes sont fermées à tout jamais, n'est-ce pas? Il y a d'autres moyens d'arriver au même résultat. La question a été soulevée à maintes reprises devant ce comité.
Le but a pu être déplacé entre-temps, si bien que des gens souhaitent se retirer. C'était un des grands enjeux politiques. On craint que l'élection du conseil d'administration ne soit faussée par la lutte entre les tenants de la disposition inclusion-exclusion et leurs adversaires. En périodes électorales, les slogans l'emportent toujours sur l'analyse rationnelle et la connaissance des faits. Cette disposition pourrait-elle être supprimée? Si oui, quelles seraient les autres solutions?
M. Goodale: Sénateur, les dispositions d'inclusion et d'exclusion pourraient assurément être supprimées. Telle est l'essence même de la proposition que j'ai faite à la fin du débat à la Chambre des communes.
Je vais en profiter pour expliquer pourquoi, en tant que question de principe, une procédure d'inclusion et d'exclusion a été prévue dans le projet de loi.
Des instances ont été présentées au comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire de la Chambre des communes lors de l'étude du projet de loi précédent, le projet de loi C-72, à la dernière législature. Un certain nombre de témoins de l'Ouest ont fait valoir devant ce comité que, si la loi devait comporter un mécanisme d'exclusion, elle devrait également comporter, pour des raisons d'équité et d'équité, un mécanisme d'inclusion. Il s'agissait tout d'abord d'assurer un certain équilibre.
L'autre motif invoqué était qu'il fallait combler un vide manifeste dans la loi actuelle sur la Commission canadienne du blé. Les règles à suivre pour modifier le mandat de la Commission canadienne du blé ne sont pas claires dans la loi actuelle.
Si les honorables sénateurs veulent bien se référer à un cas récent, M. Mayer, quand il était ministre de l'Agriculture, a modifié le mandat de la Commission canadienne du blé de façon à inclure l'avoine, et il y est parvenir en recourant à un décret.
Dans un autre cas, il a tenté de modifier le mandat de la Commission canadienne du blé en ce qui concerne l'orge, en employant la même technique, un décret. L'initiative a échoué. Elle a été contestée dans les tribunaux et elle a été invalidée.
Un décret a fait l'affaire dans un cas et pas dans un autre. Les tribunaux ont établi une nette distinction entre ce qui convient et ce qui ne convient pas.
Il y a 20 ans environ, il y a eu une discussion pour savoir si la navette, comme on disait à l'époque, devrait relever de la Commission canadienne du blé. Le ministre de l'époque ne voulait pas trancher la question tant que les producteurs ne s'étaient pas prononcés. La loi ne l'exigeait pas. Mais il estimait que les agriculteurs devaient tout d'abord exprimé leur avis à ce sujet. Et vous vous en rappellerez, les agriculteurs ont rejeté l'idée que la navette relève de la Commission canadienne du blé.
Dans les années 1970, une vive discussion a eu lieu au sujet de la politique sur les céréales fourragères. Le mandat de la Commission canadienne du blé a alors été modifié, si ma mémoire est bonne, en partie au moyen d'une loi et en partie au moyen d'un décret. M. Whelan se rappelle peut-être mieux que moi la procédure exacte.
Je cite ces quatre exemples -- le vote sur la navette; la discussion sur les céréales fourragères; le cas de l'avoine; et celui de l'orge -- pour montrer dans quel fouillis on se retrouve quand il s'agit de modifier le mandat de la Commission canadienne du blé. L'idée d'inscrire des dispositions d'inclusion et d'exclusion dans la loi visait essentiellement à clarifier la situation, non pas à dire ce qu'il fallait faire, mais plutôt à dire que, si c'était ce que les agriculteurs voulaient, telles étaient les étapes à suivre pour atteindre l'objectif ultime.
Ces dispositions que l'on trouve dans la loi proposée ont soulevé des motifs d'inquiétude. Certains groupes estiment qu'elles ordonnent d'avance une conséquence certaine, que du simple fait de les inscrire, même si elles sont de nature facultative et non pas obligatoire, on se trouve à en faire des options que les agriculteurs peuvent adopter si bon leur semble. Or, elles ne modifient en aucune façon le mandat de la Commission canadienne du blé. Elles ne font que préciser le processus à suivre dans le cas où c'est précisément ce que souhaitent les agriculteurs.
Malgré ces assurances, il y a encore des groupes et des organismes qui sont inquiets. La proposition de modification que j'ai présentée à la fin du débat sur la question à la Chambre des communes vise à supprimer dans le projet de loi les points de détail sur l'inclusion et l'exclusion. Ainsi donc, la procédure à suivre pour modifier le mandat de la Commission canadienne du blé reste inchangée.
Ce qu'il faut retenir de l'inclusion, c'est que la seule façon de modifier quoi ce soit est de passer par la voie législative. En d'autres mots, si quelqu'un avait la brillante idée d'ajouter quelque chose au mandat de la Commission canadienne du blé, il faudrait une loi du Parlement pour ce faire.
L'amendement que j'ai proposé supprime les points de détail de l'inclusion et de l'exclusion et ajoute une autre exigence, que les agriculteurs soient consultés au moyen d'un vote.
Le sénateur Spivak: Votre explication est très utile. Est-ce que cela veut dire que si, Dieu nous en préserve, Larry McGuire devenait un jour ministre de l'Agriculture, il ne pourrait pas, au moyen d'un décret, modifier le mandat de la Commission canadienne du blé et refuser de comparaître devant les tribunaux, est-ce bien cela?
M. Goodale: L'amendement, sénateur Spivak, prévoit que, si un quelconque ministre responsable de la Commission canadienne du blé décidait un jour qu'il est dans l'intérêt public de modifier le mandat de la commission, soit pour inclure ou exclure quelque chose, il lui appartiendra d'apporter cette modification. Mais il devra au préalable tenir un vote pour savoir s'il a l'aval des agriculteurs.
Le sénateur Sparrow: La proposition ne dit pas clairement si, oui ou non, il faudra obtenir l'approbation du Parlement. Je me demande si, en supprimant les dispositions d'inclusion et d'exclusion que contient actuellement la loi proposée, on ne se trouverait pas à modifier la Loi sur la Commission canadienne du blé. Que vous tentiez d'inclure d'autres produits ou d'exclure certains qui s'y trouvent déjà, il faudra bien obtenir l'approbation du Parlement. Si les dispositions d'inclusion et d'exclusion ne figurent plus dans la loi, il faudra alors l'approbation du Parlement pour inclure ou exclure un produit. Et puis le ministre responsable va consulter le conseil d'administration et faire voter les personnes concernées. Et après?
M. Goodale: C'est là où l'amendement s'arrête, sénateur Sparrow. Ce sera au gouvernement en place d'éviter un débat sur la bonne décision à prendre. Cet amendement prévoit que, si le ministre juge bon de demander au Parlement d'accroître ou de restreindre le mandat de la Commission canadienne du blé, il doit au préalable consulter les agriculteurs en tenant un vote.
Le sénateur Sparrow: Il n'est pas clair que vous faites référence au Parlement.
M. Goodale: Je crois que si. Nous pourrions modifier le libellé de l'amendement de façon à rendre l'allusion au Parlement plus transparente.
Le sénateur Sparrow: Il s'agissait de savoir si cela pourrait être fait sans le recours à un décret. Il faut clairement faire comprendre au secteur agricole qu'il faudra ensuite renvoyer l'affaire au Parlement.
M. Goodale: Oui, dans le libellé de la modification et de la proposition d'amendement que j'ai présentée à la Chambre il y a quelques mois, on fera en sorte qu'il soit dit clairement qu'il faudra présenter un projet de loi au Parlement et, avant cela, tenir un vote.
Le sénateur Stratton: M. Goodale, je suis sûr que vous pourriez fournir ces réponses dans votre sommeil, ce qui vous faites probablement. J'aimerais revenir à la question du choix. Cela ne semble pas aller de soi. J'ai appris ce matin ou tard hier soir que le Western Producer a publié un article jeudi 30 avril au sujet d'un ancien chef de la tribu des Gens-du-Sang, près de Lethbridge, a été accusé d'avoir exporté du grain qu'il avait fait pousser sur sa réserve en Alberta vers une réserve Pied-Noir au Montana, sans permis d'exportation de la Commission canadienne du blé. Il avait obtenu, comme le prévoit l'article 32 de la Loi sur les Indiens, tous les permis nécessaires pour vendre à l'extérieur des produits de la réserve. Un conseiller de la bande James Smith, près de Melfort, aurait dit que, si l'on pouvait passer outre aux restrictions imposées par la Commission canadienne du blé et permettre aux autochtones de vendre leur blé et leur orge à qui ils veulent, le paysage agricole des réserves s'en trouverait bouleversé.
Je sais que vous ne pouvez pas commenter l'affaire, mais il s'agit là d'un autre aspect de la question relative au choix.
Je n'essaie pas de vous soutirer une réponse à ce sujet, mais ce qui me préoccupe le plus dans tout ce débat, c'est que le mouvement en faveur du choix vient surtout de l'Alberta, alors que c'est déjà une réalité en Ontario. L'élection du conseil d'administration me préoccupe. On en fait un fourre-tout. Ce sont eux qui feront marcher toute la boutique. Je crains que l'élection de ce conseil d'administration ne prenne une allure par trop politisée en ce qui touche le choix. Que dois-je en penser?
M. Goodale: Sénateur, il s'agit d'une question très difficile, et ce, pour plusieurs raisons dont le fait que les agriculteurs eux-mêmes soient très divisés sur la question. Ce que certains agriculteurs considèrent comme étant un choix de commercialisation réaliste, tout à fait normal et une occasion d'exercer leurs libertés et leurs droits, d'autres le perçoivent comme une sorte de camisole de force. On se renvoie la balle. Il est très difficile de trancher la question quand les opinions sont si polarisées parmi les producteurs.
Le processus qui a débuté récemment en Ontario, sous les auspices de la Commission ontarienne de commercialisation du blé, et qui vise à instaurer un autre mode de commercialisation hors-commission, est très intéressant. Je sais que des agriculteurs de l'Ouest surveillent la situation de près. Plus instructive encore est la question de savoir comment les agriculteurs ontariens en sont venus à la décision de donner force de loi à cette option de commercialisation. C'est que, en vertu du pouvoir que leur confère la législation ontarienne, ils disposent d'une procédure de vote démocratique qui est chapeauté par la Commission ontarienne de commercialisation du blé. Certains, y compris M. Whelan, pourraient faire valoir que cette procédure de vote n'est pas sans présenter quelques lacunes, mais il n'empêche que cette loi offre aux agriculteurs un véhicule pour exprimer leurs points de vue.
En l'occurrence, ils ont exprimé l'avis que cette option méritait d'être essayée, et depuis lors, le processus fait ses preuves.
Le projet de loi C-4 prévoit une procédure grâce à laquelle les agriculteurs pourraient examiner diverses options de commercialisation, puis voter pour celle qu'ils jugent la plus avantageuse. Je ferai remarquer que, si l'Ontario a pu se donner une plus grande flexibilité, c'est que ses producteurs jouissent du droit fondamental, si je puis dire, d'exprimer leurs préférences de façon démocratique dans le cadre que leur fournit la Commission ontarienne de commercialisation du blé. Dans l'Ouest, ce n'est pas possible actuellement, mais le projet de loi C-4 comblerait cette lacune. Il conférerait aux agriculteurs le droit démocratique de façonner leur organisme de commercialisation et de modifier son mandat en tenant compte des besoins à venir.
Je ferai observer, sénateur, que, même si la démocratie est préférable en toutes choses, elle comporte de sérieuses responsabilités. Elle peut se révéler un processus fort complexe et controversé. Il n'y a rien à redire à cela, mais j'estime qu'en pareilles circonstances nous sommes confrontés à un véritable dilemme: ou autoriser un conseil d'administration élu démocratiquement et composé d'agriculteurs à décider de son mandat ou confier cette tâche aux gouvernements et aux bureaucraties. Il y aura toujours des gens pour ou contre mais, même s'il arrive parfois que la démocratie ne soit pas de tout repos, c'est quand même la meilleure méthode qui m'ait jamais été présentée.
Oui, ce ne sont pas les responsabilités sérieuses qui vont manquer ici. C'est vrai qu'il faudra prendre certaines décisions importantes, mais mieux vaut qu'elles soient prises par les agriculteurs selon les voies démocratiques plutôt qu'imposées par des gouvernements ou des bureaucraties.
Le sénateur Stratton: Je comprends. Seulement je ne voudrais pas que l'élection de ce conseil ne tourne en un nouveau Massacre à OK Corral.
En ce qui concerne les cartes tracées pour l'élection des membres, certains ont fait valoir que la Saskatchewan domine, voire prédomine, au point que les deux autres provinces, le Manitoba et l'Alberta, n'ont pratiquement pas droit au chapitre. Si la Saskatchewan vote en un sens, tout le reste suit. Ce qui est préoccupant, c'est la représentativité ou la façon dont les frontières sont définies. Je sais que c'est selon le type de sol et le nombre d'agriculteurs, soit environ 11 000 par district, mais il y a également le cas des régions frontalières. Il s'agit là d'un véritable problème. Soit, vous avez dit que la nomination de certains membres du conseil permettra d'assurer un certain équilibre. Mais ce sont les membres démocratiques élus qui tiendront les rênes dans le débat sur la question.
Avez-vous envisagé la possibilité d'avoir cinq membres élus de la Saskatchewan, trois de l'Alberta et deux du Manitoba, de façon à ce qu'il y ait un équilibre du côté de la partie élue? Si la Saskatchewan domine dans la production du blé, l'Alberta domine dans la production de l'orge. Malgré cela, la Saskatchewan a plus de représentants auprès du conseil que l'Alberta. C'est un problème.
M. Goodale: Sénateur, mon point de vue est que les diverses cartes qui ont été produites dans un effort en vue de diviser la région des Prairies en 10 secteurs cohérents ne sont nullement coulées dans le béton. J'ai l'impression, d'après vos questions, que vous voulez comme moi un processus électeur juste, légitime et en bonne et due forme qui aboutisse à un résultat crédible qui sera respecté.
Très franchement, si vous, ce comité ou quelqu'un d'autre a une meilleure configuration des limites électorales à proposer, je serai heureux que vous m'en fassiez part. Nous ne sommes pas limités par le temps. Cette question peut faire l'objet d'un règlement une fois le projet de loi C-4 adopté.
Il est important que le processus électoral soit bon. C'est autour de lui que tourne tout le reste. Il est extrêmement important que ces dix personnes soient élues en bonne et due forme. Cela dépend en partie de la délimitation des circonscriptions qu'elles représenteront. S'il est un meilleur tracé, je suis prêt à tenir compte de vos conseils.
Le sénateur Stratton: Si nous nous arrêtons à cet aspect de la question, c'est pour trouver un moyen de désamorcer la situation. Je crains que la combinaison que forment les limites électorales proposées ne déclenche un tollé.
M. Goodale: Voulez-vous dire que le fait que les limites électorales définies pour la Commission canadienne du blé chevauchent les limites électorales provinciales pose un problème?
Le sénateur Stratton: Oui. Si vous regardez les cartes, c'est dans la partie méridionale de l'Alberta et du Manitoba, en particulier, que sont cultivées la majorité des céréales. Les producteurs du Manitoba peuvent être d'un avis totalement différent de celui des producteurs de la Saskatchewan. Comme nous le savons, la Saskatchewan s'avance beaucoup plus vers le nord et produit la plus grande partie du blé, mais pas de l'orge.
Nous, ici, représentons des régions. Je représente le Manitoba, d'autres sénateurs représentent l'Alberta et la Saskatchewan. Il ne s'agit pas seulement de veiller au caractère démocratique des élections, il faut aussi essayer de trouver un moyen équitable de représenter les régions.
M. Goodale: Sénateur, j'ai consulté des organisations agricoles au sujet de la théorie derrière cette question. Après mûre réflexion, leur avis -- et je crois qu'il est unanime -- est que ce serait une bonne chose que les circonscriptions électorales définies pour la Commission canadienne du blé chevauchent les limites provinciales. Ils voient là un moyen d'atténuer les choses.
Vous avez maintenant, avec beaucoup d'éloquence, exposé l'autre aspect de la question. En vue des consultations ultérieures, une fois que nous en viendrons aux détails du règlement, la Chambre et le Sénat devraient, en consultation avec les organisations agricoles, préparer plusieurs projets de cartes couvrant toutes les méthodes imaginables de tracer les limites électorales. Je demanderai aux responsables de dresser une carte en fonction de votre proposition -- environ cinq représentants pour la Saskatchewan, trois pour l'Alberta et deux pour le Manitoba -- et de voir dans quelle mesure elle respecte les zones de sols et si le nombre de producteurs est comparable d'une région à l'autre. Ce serait très intéressant d'établir un modèle informatique et de voir ce qui en ressort. Je demanderai à mes services de le faire.
Si vous avez d'autres conseils à ce sujet, surtout n'hésitez pas à m'en faire part.
Le sénateur Sparrow: Quelles seront à l'avenir les obligations du gouvernement du Canada envers la Commission canadienne du blé? Vous avez peut-être déjà abordé cette question. Je veux savoir ce qui pourrait entraîner des obligations pour le gouvernement du Canada.
M. Goodale: Sénateur, tout cela est très clairement exposé dans la loi, à l'article -- je vais vous donner le numéro -- relatif aux garanties.
Jusque-là, ces garanties étaient essentiellement automatiques étant donné que la Commission canadienne du blé était une société de la Couronne agissant à titre de mandataire de Sa Majesté, ce dernier point est important aux fins de la Loi sur la gestion des finances publiques. Maintenant qu'elle devient une institution plus démocratique, avec un conseil d'administration dont la majorité des membres sont élus par les producteurs, elle perd automatiquement son statut de mandataire de Sa Majesté. Nous devons donc prévoir, dans la loi, le même filet financier sur lequel elle pouvait rebondir lorsqu'elle était mandataire de Sa Majesté.
Le dispositif est exposé à la page 10 du projet de loi, à l'article 19 qui traite des plans, des emprunts et des garanties. Cet article décrit les renseignements que la Commission canadienne du blé devra fournir au gouvernement du Canada. Ces renseignements sont pratiquement les mêmes que ceux que la commission fournit maintenant. Il n'y a rien de particulièrement nouveau à cela, sauf que c'est maintenant bien précisé dans la loi au lieu d'être automatique comme quand la commission agissait à titre de mandataire de Sa Majesté. Cet article décrit ensuite les pouvoirs d'emprunt de la commission. Il dit essentiellement que, une fois que ses plans de dépenses et d'emprunt ont été déposés et approuvés par le ministre des Finances, les emprunts seront approuvés. C'est au paragraphe 19(3).
Cette disposition place la Commission canadienne du blé dans la même position financière dans laquelle elle se trouve actuellement en tant que mandataire de Sa Majesté. Les dispositions relatives aux garanties sur les versements initiaux et les ventes de grains à crédit sont également maintenues, la seule différence étant -- comme le sénateur Whelan et moi en avons discuté au début -- que la garantie sur les versements initiaux s'appliquerait au versement initial établi au début d'une période de mise en commun. Les paiements effectués au titre d'ajustement aux versements initiaux durant ou après la période de mise en commun seraient la responsabilité de la Commission canadienne du blé qui, précisons-le, ne s'est jamais trompée dans ses évaluations.
Le sénateur Sparrow: Est-ce la seule garantie exigée par la loi en cas de versement initial insuffisant?
M. Goodale: Non, il y en a beaucoup d'autres.
Le sénateur Sparrow: Alors, permettez que je finisse. Le gouverneur en conseil peut consentir des prêts ou des avances à la Commission canadienne du blé, ce qui je présume équivaut à un remboursement. La garantie sur les ventes de grain à crédit, y compris les intérêts afférents, que peut exiger la Commission équivaut à une sorte de garantie individuelle contre le défaut de paiement par un gouvernement étranger ou autres, comme il en existe dans les autres industries. Ça ne vaut pas seulement pour la Commission canadienne du blé. C'est une question de jugement, n'est-ce pas?
M. Goodale: La différence, c'est que les autres offices de commercialisation qui vendent leurs produits ou leurs services sur le marché international et dont les ventes à crédit sont garanties par le gouvernement du Canada, doivent passer par exemple par la Société pour l'expansion des exportations (SEE) pour obtenir une garantie. Dans le cas de la Commission canadienne du blé, le Programme de vente de céréales à crédit la dispense de passer par un intermédiaire.
Les principes sont les mêmes, sauf que dans le cas de la Commission canadienne du blé, il s'agit d'un pouvoir interne alors que la plupart des autres offices doivent s'adresser à la SEE.
Le principe que vous décrivez est le même. Dans le cas de la Commission canadienne du blé, il s'agit d'un pouvoir interne alors que dans presque tous les autres cas, il s'agit d'un pouvoir externe puisqu'il faut passer par la SEE.
Le sénateur Sparrow: Cela devient un pouvoir externe s'il faut demander l'approbation préalable du ministre des Finances.
M. Goodale: S'agissant de la garantie de financement, c'est exact.
Le sénateur Sparrow: Cela veut dire que tout doit être approuvé, sauf la garantie sur les versements anticipés. Est-ce juste?
M. Goodale: Voulez-vous dire les avances ou les versements initiaux?
Le sénateur Sparrow: Je veux dire les versements initiaux.
M. Goodale: Les avances sont une question tout à fait distincte.
Dans le cas des versements initiaux, il faut demander l'approbation chaque année. Chaque fois qu'un ajustement est proposé durant l'année, il faut un décret en conseil en bonne et due forme, ce qui veut dire que la Commission canadienne du blé doit me recommander ce qu'elle juge approprié. Les experts financiers du ministère de l'Agriculture et moi-même examinons sa recommandation. On en fait part au ministre des Finances pour voir s'il y a un problème quelconque, puis c'est un va-et-vient entre les fonctionnaires de son ministère et ceux du ministère de l'Agriculture. Quand tout le monde est d'accord sur la garantie appropriée, ça passe par le Cabinet pour un décret en conseil.
Le sénateur Sparrow: C'est une obligation du gouvernement. Selon la loi, c'est la seule. Vous avez dit, je crois, qu'une telle garantie n'a jamais été nécessaire. Je pense que le gouvernement a déjà eu à payer la différence.
M. Goodale: Le gouvernement a dû verser la différence par rapport à un versement initial. Le compte de mise en commun n'en a pas été pour autant déficitaire.
Il y a une importante distinction entre les deux. Que je sache, jamais un ajustement à un versement initial n'a entraîné un déficit pour la Commission canadienne du blé.
Le sénateur Sparrow: C'est déroutant pour les personnes qui ne comprennent pas le fonctionnement de la Commission canadienne du blé. Il y a une différence entre le versement initial et les ajustements ultérieurs. Le gouvernement fédéral a déjà contribué à des versements initiaux. Il a fallu qu'il paie la différence.
M. Goodale: C'est arrivé seulement un très petit nombre de fois. Comme je l'ai fait remarquer au sénateur Whelan, dans presque chaque cas, ça a été à la suite d'un facteur externe extraordinaire, par exemple, au milieu des années 80, lorsque les États-Unis ont soudainement décidé de mettre en place leur Export Enhancement Program; en 1990 ou 1991, lors de l'accélération de ce programme; et une fois avant cela, lorsque les Américains ont décidé de se retirer de l'Accord international du blé.
Ce sont ces facteurs assez extraordinaires qui ont provoqué un déficit dans les comptes de mise en commun.
Le sénateur Sparrow: C'est arrivé.
Le fonds de réserve est établi de telle manière que c'est le producteur de blé qui paie la différence par rapport au versement initial, ce qui évite au gouvernement d'avoir à le faire.
M. Goodale: Répétez ce que vous avez dit, sénateur.
Le sénateur Sparrow: L'obligation incombait entièrement au gouvernement fédéral. Le versement initial était fixé sur la recommandation de la Commission canadienne du blé, du ministre des Finances, du gouverneur en conseil, et cetera parce que l'obligation incombait au gouvernement. À présent, il existe une disposition permettant de prendre de l'argent aux agriculteurs pour le verser dans le fonds de réserve. Cela ne veut-il pas dire que le gouvernement peut décider de fixer le prix initial à 50 cents par boisseau pour être sûr de n'avoir pas à payer de différence?
M. Goodale: Les dispositions relatives à la garantie sur les versements initiaux dans le projet de loi C-4, n'auraient effectivement aucun impact sur la décision que prendrait le gouvernement au début de chaque campagne agricole quant au niveau du versement initial approprié.
La décision, plus tard au cours de la campagne agricole, d'ajuster ou non le versement initial, de l'accroître, serait l'entière responsabilité de la Commission canadienne du blé. Telle que la loi est conçue, je ne vois pas quel impact elle peut avoir en pratique sur la décision concernant le montant du versement initial. Il n'y a rien de changé là.
Le sénateur Sparrow: Autrefois, c'était souvent une décision politique -- et j'utilise ce terme de façon assez libre. Personne ne savait ce qu'allait être le marché et si le paiement devait être de 2 $ ou de 3 $ par boisseau. Le décret tombait, et il était de 2,50 $ par boisseau. Les estimations approximatives se sont révélées fausses à deux ou trois reprises. Le gouvernement a payé la différence. Il n'existait pas de fonds de réserve. À présent, il y en a un. Si vous fixez le versement initial à un niveau assez bas -- à un niveau où l'on peut raisonnablement s'attendre à ce qu'il n'aille pas plus bas -- en cas de versement initial insuffisant, la différence viendrait du fonds de réserve et non du gouvernement fédéral.
Me fais-je bien comprendre?
M. Goodale: Je vois ce que vous voulez dire mais, très franchement, l'objectif du gouvernement et de la Commission canadienne du blé est de rembourser aux agriculteurs le maximum des revenus qui leur reviennent sur la vente de leur blé et ce le plus vite possible.
Quand nous avons ce genre de discussion avec mes fonctionnaires au ministère ou avec mes collègues du cabinet, l'argument est toujours de fixer le prix au niveau le plus élevé possible sans prendre un risque excessif. Il n'est jamais question de contrôler le prix. C'est toujours le contraire et, de toute évidence, ce le sera toujours. Mon but, lorsque l'on décide des prix, c'est de rembourser les agriculteurs aussi vite que possible sans faire courir un risque excessif au trésor. Fixez le prix à un niveau aussi élevé que possible.
Le sénateur Sparrow: Ces une ou deux dernières années, trois ou quatre ajustements ont été nécessaires parce que le prix initial fixé était trop bas. Quelqu'un a mal estimé la valeur du produit. On a retenu de l'argent aux agriculteurs alors que le prix initial aurait pu être beaucoup plus élevé, mais qu'à cause de certaines décisions qui ont été prises, on l'a maintenu à un niveau très bas. Je dis ça car maintenant qu'il existe un fonds de réserve, on serait encore plus porté à le fixer à un niveau encore plus bas.
M. Goodale: Je vois ce que vous voulez dire. Je ne crois pas que le gouvernement ferait ça. Ma tendance, en tant que ministre, serait de fixer le prix à un niveau aussi élevé que possible aussitôt que possible, c'est-à-dire au début de la campagne agricole.
Finalement, ce serait au conseil d'administration, avec une majorité des deux-tiers, qui aurait le contrôle.
Le sénateur Sparrow: Ce n'est pas lui qui fixe le prix initial.
M. Goodale: Non, mais il peut décider d'accélérer ou non les ajustements aux versements initiaux. Il peut décider de ne pas le faire.
Je peux voir ce qui vous préoccupe. Honnêtement, l'établissement des prix initiaux est une question de jugement. Vous devez peser entre la nécessité de rembourser les agriculteurs le plus rapidement possible et le risque de provoquer un déficit dans le compte de mise en commun. C'est un problème pour le ministre des Finances, et c'est un problème commercial. Si l'on surestime le versement initial et que le compte de mise en commun se retrouve avec un déficit qui doit être compensé par le gouvernement, on peut très vite considérer ça comme une subvention à l'exportation ayant des effets de distorsion sur le commerce.
Il y a une discipline à laquelle on doit se conformer, non seulement du point de vue du ministre des Finances, mais aussi du point de vue de la politique commerciale. Vous voulez que le montant fixé soit aussi juste que possible, sans le dépasser. Le dépasser peut provoquer non seulement un déficit mais pose aussi un risque commercial.
Le sénateur Sparrow: Verser quelque chose et créer un incident international, ça n'a pas de sens. Pour éviter cela, le versement initial est fixé à un niveau très bas.
Le sénateur Robichaud (Saint-Louis-de-Kent): Si le versement initial est bas, cet argent est toujours dans le compte. Il n'est pas nécessaire de puiser dans le fonds de réserve une fois toutes les opérations terminées.
M. Goodale: Le sénateur Sparrow demandait qui assumait le risque dans l'intervalle. Est-ce le gouvernement du Canada ou le fonds de réserve? Finalement, le résultat est le même pour le producteur, si ce n'est que l'argent dans le fonds de réserve s'accumule progressivement. Mais, dans l'intervalle, cela pose aussi un risque pour le fonds de réserve. C'est ce que voulait dire le sénateur Sparrow.
L'un des avantages de ce mécanisme, c'est que la Commission canadienne du blé peut prendre une décision sans attendre les instructions précises des fonctionnaires.
L'autre avantage que j'ai mentionné plus tôt, c'est que cela réduirait le risque que les Américains ne nous accusent de pratique commerciale déloyale. Le système ne serait pas tellement différent du système de prêt aux États-Unis, qui équivaut à une garantie sur les versements initiaux. Par ailleurs, l'obligation, s'il en est une, viendrait d'un fonds de réserve financé par les producteurs et non pas du gouvernement. On ne peut donc qualifier cela de subvention.
S'il y a des coûts, il y a aussi des profits. Il y a également des avantages et des désavantages. De façon générale, on peut dire que cette flexibilité est profitable pour la Commission canadienne du blé.
En fin de compte, c'est le conseil d'administration de l'organisme producteur-contrôleur qui porte ces jugements de valeurs. Pour ce qui est du financement du fonds de réserve et du plafonnement de ce fonds -- qui pourrait faire l'objet d'un règlement gouvernemental -- le conseil pourrait décider d'avoir recours à d'autres méthodes que les retenues à la source. On pourrait par exemple consacrer une partie des revenus tirés des transactions financières au fonds de réserve.
Comme on peut le voir dans le dernier rapport annuel de la Commission canadienne du blé, la commission a obtenu au cours de la campagne agricole de 1996-1997 des intérêts sur ses opérations monétaires de l'ordre de quelque 65 millions de dollars sur le blé uniquement. Il a également tiré des intérêts sur d'autres comptes. Tout cela a été rendu possible grâce à la bonne gestion des transactions. Cela n'a rien à voir avec la vente du grain. Ces sommes proviennent des transactions d'intérêt seulement.
Les montants tirés du blé n'étaient que de 65 millions au cours de la dernière campagne agricole. La Commission du blé pourrait décider d'affecter cette somme au fond de réserve et tenter ainsi d'éviter les retenues à la source, une mesure que les agriculteurs n'aiment pas en principe.
Le sénateur Robichaud (Saint-Louis-de-Kent): Il n'y a rien dans le présent projet de loi qui les empêchent de le faire.
M. Goodale: C'est juste. Ils pourraient décider de le faire si le conseil d'administration le juge approprié.
Le président: Je sais que nous avons largement dépassé le temps prévu monsieur le ministre. J'aimerais toutefois que nous inscrivions officiellement, même si ce n'est pas aujourd'hui, la position réelle en ce qui a trait aux producteurs de blé de l'Ontario. Il y a tellement de malentendus.
Je pourrais rapporter ici l'opinion d'un Westerner de Prince Albert en Saskatchewan qui m'écrivait souvent. À son avis, il s'agissait presque de fraude. On comparait selon lui des pommes et des oranges et il savait qu'aucun fermier de l'Ouest ne s'engagerait. Aucun producteur de blé de l'Ontario ne le ferait non plus. Lorsque les agriculteurs font leurs plantations à l'automne, quelle que soit leur surface en blé, ils n'ont d'autre choix que d'exporter ce blé. Ils ne peuvent le vendre sur le marché domestique et s'ils ne répondent pas aux normes de qualité américaines, ils ne peuvent rapporter leur produit au Canada et tenter de le vendre sur le marché canadien. Leur entente est très restrictive. On peut encore une fois se poser des questions sur le niveau de démocratie.
Le sénateur Taylor: Ai-je manqué quelque chose? J'avais l'impression qu'on devait parler du plafonnement du fonds de réserve.
Le sénateur Stratton: Nous en avons parlé.
Le sénateur Taylor: Il faudra que je relise le procès-verbal.
Le président: Nous avons discuté. Nous devons nous rencontrer de nouveau jeudi.
M. Goodale: Monsieur le sénateur, on a discuté de plusieurs points.
Le sénateur Taylor: Avons-nous établi une limite. J'essaie d'établir poliment si quelqu'un a établi une limite.
M. Goodale: Non, je ne crois pas que nous nous soyons entendus sur des chiffres en particulier. Des suggestions ont été faites. Les Syndicats du blé du Manitoba et de la Saskatchewan ont précisé je crois dans leurs mémoires qu'un plafond de 30 millions de dollars serait approprié.
D'autres montants ont été avancés également. Les opinions diffèrent à ce sujet. J'aimerais avoir l'opinion du Sénat à ce sujet.
Le sénateur Taylor: À 30 millions de dollars, combien de temps nous faudrait-il pour atteindre ce montant?
M. Goodale: Cela dépend du rythme auquel les fonds seraient accumulés. Toutefois, si le conseil d'administration décidait de recueillir ces montants à partir de ses revenus en intérêts, cela pourrait prendre moins d'un an. Ce serait fait. Toutefois, si on ne verse que quelques sous du boisseau, cela pourrait bien sûr être plus long.
On pourrait peut-être également se pencher sur la nécessité de mettre sur pied un fonds de réserve pour les ajustements en cours de campagne. Comme aucune erreur n'a jamais été commise au chapitre des ajustements en cours de campagne, on peut se demander s'il est vraiment nécessaire de prévoir un fonds de réserve ou si un fonds nominal de un dollar ne serait pas suffisant? Aux termes de la loi, le fonds de réserve peut être excédentaire ou déficitaire. Cela ne signifie pas nécessairement qu'il doit y avoir beaucoup d'argent immobilisé. Ce compte peut en fait être déficitaire pendant un certain temps, pourvu qu'on le rembourse dans un délai raisonnable.
Le conseil d'administration pourrait décider que puisqu'il n'y a jamais eu d'erreur, un montant nominal de un dollar pourrait suffire pour le fonds de réserve relatif aux ajustements en cours de campagne. Ce serait possible.
Pour ce qui est des achats au comptant et des paiements en argent, il pourrait s'avérer nécessaire de verser un certain montant dans le compte. Il faudra décider du niveau de flexibilité à adopter.
J'aimerais insister sur un point qu'on a un peu perdu de vue au cours de toute cette discussion sur le fonds de réserve et sur la possibilité que la création de ce fonds de réserve fasse en quelque sorte disparaître graduellement d'autres garanties.
Dans cette optique, le fonds de réserve prévu dans le projet de loi C-4 est très soigneusement restreint à certains objectifs seulement. Il pourrait bien y avoir des règles, comme nous venons de le souligner, qui apporteraient des restrictions supplémentaires à ce fonds de réserve. Le texte même de la loi se chargera de préciser que le fonds de réserve ne peut devenir hors de contrôle et constituer une menace.
De l'autre côté, la loi précise bien que le gouvernement du Canada doit fournir les autres garanties. Ce ne sont pas des dispositions facultatives. On a utilisé le terme «doit» pour ces emprunts généraux. C'est donc une garantie unique et très forte. Je crois que c'est une mesure unique dans toute la législation fédérale.
Le sénateur Sparrow: Vous avez souligné qu'il n'y avait jamais eu d'erreur au chapitre des ajustements en cours de campagne. Ça me semble évident puisque les ajustements ne sont faits qu'à la fin du processus de vente alors que les paiements par anticipation sont faits avant que la vente n'ait lieu. Il pourrait certainement y avoir des erreurs de comptabilité s'il y avait alors des ajustements à effectuer.
M. Goodale: Les ajustements sont faits tout au cours de la campagne agricole de façon à permettre à la Commission du blé de mieux connaître les tendances au chapitre des prix. Plus ils ont établi de prix pour la marchandise offerte, moins il y a de risques pour celle qui reste à écouler.
Le sénateur Sparrow: Le facteur d'ajustement est-il établi d'après les ventes effectuées ou d'après les ententes conclues? On ne fait pas d'estimation de ce que le marché pourrait être.
M. Goodale: Un peu des deux. La Commission du blé a fait des ajustements il y a une semaine environ sur le blé dur et sur le blé de printemps. La décision prise en rapport avec l'augmentation du paiement d'acompte était basée en partie sur le fait qu'une partie importante de la récolte de l'année dernière était déjà vendue et que le prix avait été établi à un certain niveau, mais il reste toujours trois ou quatre mois dans la campagne agricole. Il reste du blé à vendre sur un marché considéré par plusieurs comme un marché calme ou même en recul. Il y a donc toujours un certain facteur de risque correspondant à un certain volume de marchandises pendant une certaine période de temps.
Un ajustement en cours de campagne réunit toujours un facteur de certitude correspondant à la marchandise déjà vendue et un facteur d'incertitude correspondant à la marchandise qui reste à vendre à un prix qu'on peut estimer, mais dont on ne peut être sûr. Les estimations faites des paiements d'acompte tiennent compte à la fois de ces deux facteurs.
Il est bien certain que plus on avance dans la campagne agricole, plus le niveau d'incertitude est restreint. En mai et juin, on commence à avoir une idée assez précise de la situation puisque la campagne agricole prend fin avec le mois de juillet. Toutefois, les ajustements et les paiements d'acompte effectués en novembre, décembre ou janvier tiennent compte d'un facteur de risque beaucoup plus élevé puisque la campagne agricole en est alors à ses débuts.
Je vous remercie de nouveau de m'avoir donné la chance de témoigner devant vous.
Le comité suspend ses travaux.