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Délibérations du comité sénatorial permanent des
Banques et du commerce

Fascicule 2 - Témoignages


OTTAWA, le mardi 28 octobre 1997

Le comité sénatorial permanent des banques et du commerce auquel est renvoyé le projet de loi S-3, Loi modifiant la Loi de 1985 sur les normes de prestation de pension et la Loi sur le Bureau du surintendant des institutions financières, se réunit aujourd'hui à 9 h 35 pour examiner le projet de loi.

Le sénateur Michael Kirby (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Honorables sénateurs, M. Nick Le Pan est notre témoin aujourd'hui. Il a toutefois changé de poste depuis sa dernière comparution devant nous. Bon nombre d'entre vous se rappelleront qu'il était auparavant surintendant adjoint du secteur des politiques du Bureau du surintendant des institutions financières (BSIF). Il y a environ deux semaines, M. Le Pan a été nommé surintendant adjoint des opérations.

M. Le Pan a commencé à s'occuper du projet de loi S-3 lorsqu'il était au ministère des Finances et ensuite au secteur des politiques du BSIF; il s'y intéresse maintenant en sa qualité de surintendant adjoint du secteur des opérations du BSIF.

Nous entamons la première série d'audiences sur la Loi sur les normes de prestation de pension. Si je comprends bien, deux autres séries de témoins ont demandé à comparaître; il s'agit des représentants du Multi-Employers Benefit Plan Council of Canada et de l'Association internationale des machinistes.

Monsieur Le Pan, je vous cède la parole.

M. Nick Le Pan, surintendant adjoint (Opérations), Bureau du surintendant des institutions financières: Monsieur le président et honorables sénateurs, c'est un plaisir pour moi que d'être ici ce matin. Je suis accompagné de Patty Evanoff, directrice de la Division des initiatives stratégiques du BSIF, et de Carol Taraschuk, de notre groupe de conseillers juridiques.

Ce matin, je vais parler de certains éléments clés du projet de loi S-3 et vous donner des informations générales quant à la raison d'être de ce projet de loi. Je vais également parler de dispositions connexes qui ne figurent pas dans la loi, mais qui sont importantes en ce qui a trait à l'évolution de la politique générale de réglementation des régimes de pension; c'est ce qui a été annoncé dans le livre blanc du gouvernement sur la règle de prudence relative à la Loi sur les normes de prestation de pension. Le livre blanc a été distribué aux membres du comité.

Le gouvernement fédéral et le BSIF, en particulier, assurent la surveillance de près de 1 100 régimes de pensions sur les quelque 14 000 qui existent au pays. Par rapport aux banques, sociétés d'assurance, et cetera, assujetties à la réglementation des institutions financières où le gouvernement fédéral joue un rôle important, nous ne représentons, en termes de participants, que 10 p. 100 environ de l'activité nationale, les autres grandes compétences étant l'Ontario, le Québec, la Colombie-Britannique et l'Alberta. Près de 80 p. 100 des 1 120 régimes se retrouvent dans les secteurs des banques, des transports, des sociétés d'État et autres secteurs de l'emploi fédéral. Quelque 360 régimes sont des régimes de bandes autochtones créés, en large mesure, en vertu du Programme des avantages sociaux des employés des bandes.

En termes de participants, près de 90 p. 100 de nos régimes sont à prestations déterminées, tandis que 10 p. 100 sont à cotisations déterminées. En termes de régimes, 40 p. 100 sont à prestations déterminées et 60 à cotisations déterminées.

Je vais maintenant parler de la raison d'être du projet de loi S-3, de certaines des ses dispositions clés, de quelques directives connexes en voie de préparation qui feront l'objet d'autres consultations, et de plusieurs autres points visés par le projet de loi. Je vais en particulier parler d'un point relatif aux initiatives fédérales-provinciales en matière d'harmonisation.

Je souligne qu'il s'agit essentiellement d'assurer de bonnes pratiques du commerce. La Loi sur les normes de prestation de pension a divers objectifs et englobe, en plus des éléments de bonnes pratiques du commerce et de réglementation, plusieurs dispositions liées à des questions relevant davantage de la politique sociale. Ces dernières ne forment pas le fond du projet de loi, lequel vise essentiellement les aspects de bonnes pratiques du commerce et de prudence aux termes de la Loi sur les normes de prestation de pension, ainsi que le cadre de réglementation prévu pour la surveillance des régimes de pension sous réglementation fédérale.

Comme je l'ai dit plus tôt, un livre blanc a été publié en juillet 1996. Suite à d'autres consultations, il a donné lieu à ce projet de loi.

Pourquoi les modifications proposées à la Loi sur les normes de prestation de pension visent-elles les bonnes pratiques du commerce? En fait, la Loi sur les normes de prestation de pension n'a pas subi de modification importante depuis son entrée en vigueur au début de 1987. Entre-temps, comme les honorables sénateurs le savent bien, les systèmes de surveillance et prudentiels aux termes de la Loi sur les institutions financières ont été renforcés en 1992, en 1995, puis en 1997. Le gouvernement a estimé, tout comme nous, qu'un renforcement semblable s'imposait pour la Loi sur les normes de prestation de pension. Le cadre actuel de la Loi sur les normes de prestation de pension ne comprend pas les pouvoirs et les outils de réglementation requis pour traiter des régimes ayant des problèmes de solvabilité ou d'observation.

Par ailleurs, une grande part du mandat du BSIF en vertu de l'actuelle Loi sur les normes de prestation de pension consiste à examiner les documents relatifs aux régimes. Pour vous donner une idée de ce que cela représente, quelque 21 membres du personnel ont examiné l'année dernière environ 4 000 documents relatifs aux régimes. Nous croyons que notre mandat devrait être davantage axé sur ce qui compte, comme les bonnes pratiques du commerce, et moins sur l'examen de tous les documents relatifs aux régimes et de leurs modifications.

J'aimerais maintenant parler de quelques autres principes fondamentaux à l'origine du projet de loi S-3, en plus des dispositions adéquates permettant à l'organe de réglementation de faire observer les bonnes pratiques du commerce.

Les participants aux régimes de pension doivent recevoir des renseignements adéquats au sujet de la situation financière de leur régime. C'est l'un des principes d'où découlent plusieurs dispositions que je vais souligner dans un instant. Il y aura en outre d'autres dispositions et lignes directrices sur une meilleure divulgation des renseignements au sujet de la situation financière du régime.

Il importe également de se rendre compte, comme nous l'avons dit au sujet d'autres réglementations relatives aux institutions financières fédérales, que la réglementation et la surveillance ne sauraient garantir le respect des engagements pris dans le cadre de contrats de régimes de pension, voire elles ne le garantissent pas. Le projet de loi S-3 renferme une modification proposée au mandat du BSIF pour que cela soit bien clair, comme cela l'est déjà dans notre actuel mandat à l'égard d'autres institutions financières fédérales dont nous assurons la surveillance.

En ce qui concerne les bonnes pratiques du commerce, il est important de comprendre que les régimes de pension et les régimes de pension à prestations déterminées en particulier, sont fondamentalement différents de ceux d'autres institutions financières qui sont réglementés et surveillés par le BSIF. Dans les régimes à cotisations déterminées, le versement des pensions en fonction de la valeur de l'actif du régime est l'engagement qui est pris. Dans les régimes à prestations déterminées, le versement d'un certain montant de prestations est l'engagement qui est pris. Toutefois, fondamentalement, ce montant des prestations découle d'ententes contractuelles entre employeurs et employés.

À l'instar de toutes les autres lois sur les pensions au Canada, il est possible, en vertu de la Loi sur les normes de prestation de pension, de prévoir des prestations plus élevées que la valeur de l'actif accumulé, à condition de combler progressivement l'écart. Le cas des institutions financières est différent. Nous nous attendons à ce que l'institution ait un capital supérieur à son passif, c'est-à-dire à ses engagements envers les déposants ou les participants au régime. Dans un régime de pension, il n'est pas nécessaire d'avoir constamment ce genre de marge.

Il s'ensuit que les administrateurs de régimes et leurs actuaires doivent présenter des rapports réguliers sur la solvabilité du régime dans la période de validité de celui-ci ou après sa cessation. La situation financière d'un régime de pension dépend donc fondamentalement de la volonté des parties contractantes de verser les cotisations nécessaires pour financer ces engagements. Ce versement dépend de la situation financière de l'employeur, ainsi que de la volonté des employés participant à des régimes prévoyant des cotisations d'employés. Sinon, il est possible de rajuster les prestations de manière qu'elles correspondent davantage aux cotisations prévues.

Permettez-moi d'aborder certains des éléments clés du projet de loi. Je ne vais pas les aborder dans l'ordre dans lequel ils apparaissent dans le projet de loi, mais plutôt dans l'ordre de la structure du rapport surveillance-réglementation. Je vais faire quelques renvois utiles aux éléments clés du projet de loi.

À la page 5 de mon mémoire, je donne une explication du mandat de surveillance du BSIF qui doit porter essentiellement sur des questions relatives à la situation financière. Selon un amendement au mandat du BSIF, à l'article 29 du projet de loi, il apparaît clairement que le BSIF a la responsabilité de protéger les participants aux régimes de pension. Toutefois, l'article 29 précise également que le BSIF ne garantit pas que tous les engagements seront respectés et cela, pour les raisons que j'ai indiquées plus tôt.

L'obligation actuelle pour le BSIF d'examiner tous les documents relatifs aux régimes et à leurs modifications ne figure plus dans la Loi sur les normes de prestation de pension. Cette obligation positive existe actuellement en vertu de la Loi sur les normes de prestation de pension, mais nous ne croyons pas qu'elle soit pertinente. Nous pensons qu'il vaut mieux utiliser nos ressources pour ce qui compte.

C'est la raison pour laquelle un meilleur système d'auto-évaluation est prévu pour permettre aux administrateurs de régime d'indiquer au BSIF que les modifications éventuelles qu'ils apportent sont conformes aux dispositions de la Loi sur les normes de prestation de pension.

Le président: Que signifie «auto-évaluation»?

M. Le Pan: Cela signifie en fait «attestation» au nom du régime. En cas de modification, les administrateurs du régime devront produire une attestation indiquant que la modification en question répond aux exigences de la Loi sur les normes de prestation de pension et de ses règlements.

Nous ferons alors des vérifications au hasard dans certains cas et des vérifications approfondies, dans d'autres. Cette obligation en matière d'attestation donnera aux administrateurs de régime le sentiment qu'ils ont une certaine responsabilité et qu'ils doivent s'assurer que les modifications et les dispositions du régime sont conformes à la Loi sur les normes de prestation de pension. D'après notre expérience à propos d'autres modèles d'auto-réglementation, nous savons qu'une telle obligation positive pour ces genres d'attestation tend à améliorer la conformité, bien qu'elle ne soit pas efficace à 100 p. 100.

Le président: Cela s'apparente-t-il au certificat de conformité que les dirigeants de société doivent présenter pour indiquer qu'ils répondent aux règlements environnementaux et autres?

M. Le Pan: C'est exact. Nous ne prescrivons pas en détail la forme que cela doit prendre, car beaucoup de régimes sont simples et directs.

Le président: S'agit-il de déclarations écrites?

M. Le Pan: C'est exact.

Le sénateur Tkachuk: Jouerez-vous un rôle de vérification?

M. Le Pan: Oui, dans certains cas, si un changement important est apporté, nous vérifierons tout; toutefois, ce sera plutôt un genre de vérification après le contrôle.

Nous nous occupons de près de 1 100 régimes de pension. Actuellement, la Loi sur les normes de prestation de pension n'exige pas que le BSIF examine chaque régime tous les ans, mesure qui existe dans d'autres lois régissant les institutions financières. Nous faisons de 20 à 30 examens par an.

Par ailleurs, à cause, en partie, de ce genre de mandat prévu, nous essayons d'axer davantage notre méthodologie d'examen sur les risques dans les secteurs qui, selon nous, le méritent. Nous adoptons une approche semblable en ce qui concerne la vérification des attestations, dont j'ai fait mention.

Diverses dispositions du projet de loi S-3 portent sur la gestion des régimes de retraite et les pouvoirs du surintendant. Prenons par exemple la gestion des régimes de retraite. Le surintendant est autorisé à convoquer des rencontres avec l'administrateur ou à exiger qu'un administrateur convoque une réunion avec les participants afin de régler une question particulière. Par exemple, si le surintendant est d'avis que la divulgation ne se fait pas correctement, il peut demander aux administrateurs du régime de rencontrer les participants afin de mieux leur expliquer ce qui se passe.

Une série de dispositions permet de renforcer les pouvoirs conférés au bureau du surintendant, dont un bon nombre sont analogues aux pouvoirs prévus par d'autres lois régissant les institutions financières et ajoutés à la fin des années 80 et au début des années 90. Par exemple, le projet de loi S-3 donne au surintendant, en vertu de la Loi sur les normes de prestation de pension, le pouvoir de prendre des directives à l'égard d'un régime de pension. Le surintendant a également le pouvoir d'entreprendre toute procédure judiciaire que peut prendre une personne ayant droit à une indemnité ou à un remboursement. Il peut également révoquer l'administrateur lorsqu'un régime est liquidé.

Pour mettre un tel changement en perspective, le principal pouvoir correctif actuel du surintendant consiste à ordonner la cessation du régime. Il existe quelques options entre une pression morale générale qui oblige à rencontrer le BSIF pour discuter de points que le BSIF n'apprécie pas et la simple cessation du régime. Dans d'autres lois régissant les institutions financières, plusieurs mesures d'intervention progressive sont prévues.

Comme nous l'avons fait pour d'autres règlements régissant les institutions financières, nous préparons ce que nous appelons un «guide d'intervention» qui explique ces diverses étapes. Il y a deux ans environ, nous avons publié un tel guide pour les institutions de dépôt et les sociétés d'assurance. Nous terminons actuellement un guide semblable pour les régimes de pension. Avant de le finaliser, nous le distribuerons pour informer les intéressés et savoir ce qu'ils en pensent. Ce guide donnera à ceux qui sont responsables de régimes de pension une indication de la façon dont nous prévoyons exercer ces pouvoirs.

C'est un genre d'approche progressive, comme vous pouvez l'imaginer, que l'on adopte en fonction de la gravité de la situation et une fois des correctifs apportés dans les étapes précédentes. La cessation du régime par le surintendant est l'une des ultimes sanctions.

Plusieurs autres points précisent les pouvoirs que nous avons dans d'autres domaines. Par exemple, en vertu de l'article 9 du projet de loi, le surintendant a le pouvoir de préciser les modifications aux méthodes actuarielles et aux principes comptables qui s'appliqueraient à l'évaluation des régimes de pension.

Vous trouverez à la page 9 de la documentation les dispositions qui portent sur les exigences en matière de financement et de placement. Nous n'avons pas modifié l'hypothèse actuarielle de base. Comme je l'ai indiqué plus tôt, il est possible d'avoir un régime de pension qui ne soit pas à capitalisation intégrale dans la mesure où il y a engagement de capitalisation sur cinq ans, par exemple.

Par contre, si un régime a un ratio de solvabilité inférieur à un, c'est-à-dire si le régime était interrompu aujourd'hui, il n'y aurait pas assez de fonds pour respecter les engagements pris en matière de pension. Ce régime ne devrait pas être en mesure de prévoir des prestations plus élevées. Par conséquent, en cas de ratio de solvabilité inférieur à un, nous croyons qu'il faudrait en priorité combler cet écart et non prévoir des prestations plus élevées.

Selon l'article 10.1 du projet de loi, les modifications au régime seront limitées aux cas où on laisse le ratio de solvabilité être inférieur à un. Nous avons également une obligation positive relative au placement selon le principe de gestion prudente du portefeuille, initiative que l'on retrouve dans de nombreux autres domaines.

Je pourrais revenir là-dessus plus tard et répondre à vos questions, monsieur le président. Je pense avoir ainsi traité largement des aspects du projet de loi relatifs aux bonnes pratiques du commerce.

Une autre disposition du projet de loi prévoit la divulgation du ratio de solvabilité aux participants au régime. Ce n'est pas le cas actuellement. Nous prévoyons que les règlements exigeront cette divulgation également. Par ailleurs, si le ratio de solvabilité est inférieur à un, nous prévoyons que les règlements exigent que les administrateurs de régime de pension annoncent aux participants un plan de redressement permettant de passer d'une insuffisance en matière de solvabilité à une capitalisation intégrale.

J'aimerais également souligner l'article 6 du projet de loi qui habilite le ministre des Finances à conclure, avec d'autres autorités compétentes de provinces, des accords multilatéraux de surveillance. Plusieurs accords bilatéraux, maintenant en place, visent les régimes dont les participants relèvent de la compétence fédérale ainsi que d'une compétence provinciale. Les surveillants de régimes de pension fédéraux et provinciaux ont mis au point un accord multilatéral de surveillance permettant, dans ces cas-là, la surveillance des régimes par un surveillant qui aurait recours à une série de règles, au lieu de plusieurs séries de règles.

Pour l'instant, le gouvernement fédéral n'est pas habilité à conclure un tel accord. On peut avancer qu'en général, les intervenants manifestent un certain intérêt à propos de ce genre d'accord. Bien qu'aucune province n'ait signé pour l'instant, on s'attend à ce qu'elles le fassent. Toutefois, sans changement à la Loi sur les normes de prestation de pension, le gouvernement fédéral ne peut signer ce genre d'accord. Par conséquent, il ne peut jouer un rôle de leadership et ne peut accélérer les dernières étapes menant à la réalisation d'un tel accord.

Cet accord proposé viserait un certain nombre de régimes fédéraux dont les participants relèvent de secteurs d'emploi provincial et fédéral. Je sais que votre comité a toujours été en faveur de la suppression de tout double emploi ou chevauchement entre les gouvernements fédéral et provinciaux.

On retrouve toute une série de modifications techniques à la loi. Certaines sont énumérées à la page 11 de la documentation. Il s'agit entre autres de conférer au surintendant le pouvoir d'interviewer des tiers et d'accroître les amendes et pénalités conformément aux lois et règlements régissant les institutions financières.

Un autre élément du projet de loi S-3 vise les procédures d'arbitrage pour les droits sur l'excédent. Il ne s'agit pas fondamentalement d'une question de bonnes pratiques du commerce, bien que cela ait des répercussions sur le fonctionnement du BSIF.

Actuellement, les droits sur l'excédent sont déterminés par le texte des régimes.

Le président: Vous sautez sur le mot «excédent». Il est important que l'on comprenne au départ qu'il existe essentiellement deux genres de régimes. Il y a les régimes à prestations déterminées où l'employé obtient l'équivalent de 2 p. 100 par an multiplié par le nombre d'années au cours desquelles il a travaillé multiplié par le revenu moyen des cinq meilleures années, ou quelque chose du genre. Il y a également les régimes à cotisations déterminées où l'employé verse de l'argent. L'argent que retire l'employé d'un tel régime équivaut au montant d'argent accumulé pendant la durée du régime.

De toute évidence, dans le cas des régimes à cotisations déterminées, il n'y a pas d'excédent, car il s'agit de l'argent des employés. Allez-vous parler des régimes à prestations déterminées qui obligent l'employeur au moment de la retraite de l'employé à lui verser un montant d'argent selon une certaine formule, indépendamment de la somme dont dispose le régime?

M. Le Pan: C'est effectivement ce qui se produirait dans le cas d'un régime à prestations déterminées.

Le président: Revenons en arrière, peut-être pourriez-vous expliquer ce que vous entendez par «excédent». Qu'est-ce que signifie «excédent» dans ce contexte?

M. Le Pan: Monsieur le président, j'ai parlé plus tôt des régimes qui accusent un déficit et des règles prudentielles à cet égard. Toutefois, dans le cas d'un régime à prestations déterminées, l'engagement n'est pas directement lié à l'actif du régime; c'est un engagement qui fait partie de l'entente contractuelle à l'origine du régime. Il est possible que le montant des cotisations versées au régime soit plus élevé que nécessaire pour respecter l'engagement pris à l'égard des retraités.

Nous avons parlé de ce qui se produit lorsqu'il est inférieur, c'est-à-dire lorsque le ratio de solvabilité est inférieur à un. Il peut y avoir également des régimes dont la valeur de l'actif est supérieure à la valeur actuarielle calculée en fonction de la valeur actuelle de tous les engagements pris dans les documents du régime à l'égard des retraités. L'excédent représente cette différence.

Le sénateur Stewart: Pourriez-vous nous indiquer ce qu'il advient de l'actif?

M. Le Pan: Il est normalement géré par un conseil de fiducie. En fait, c'est une fiducie ou un contrat d'assurance dans certains cas.

Le sénateur Stewart: Les fiduciaires achètent-ils des obligations, des actions ou placent-ils l'argent dans des banques?

M. Le Pan: Généralement, oui. On peut avoir un portefeuille qui inclut des obligations, des actions ou d'autres placements comme les biens immobiliers ou les prêts commerciaux. Je suis prêt à donner au comité une liste de la composition générale de l'actif des régimes dont nous assurons la surveillance.

Le projet de loi S-3 prévoit le principe de gestion prudente du portefeuille. Nous sommes en train d'élaborer des lignes directrices relatives à ce que cela signifie en pratique. Toutefois, nous n'avons pas de liste détaillée des genres d'actifs prescrits. Dans une grande mesure, c'est laissé à la discrétion des fiduciaires responsables du régime.

Le président: Monsieur Le Pan, si une société fait faillite, l'actif du fonds de pension est-il en lieu sûr ou peut-il disparaître? Essentiellement, les cotisations de l'employeur et de l'employé sont-elles hors de portée de la société au cas où celle-ci aurait des problèmes? Dans quelle mesure sont-elles en fiducie?

M. Le Pan: Il s'agirait normalement d'un plan fiduciaire. L'actif est en fiducie pour les bénéficiaires du régime ou pour respecter les exigences du contrat. À cet égard, l'actif est à part, légalement parlant. Je crois que la loi prévoit une telle protection de l'actif de l'employeur ou d'un syndicat représentant les employés. Dans le cas d'un régime où les cotisations sont versées par des participants syndiqués et des employés, ces cotisations sont censées être distinctes de l'actif de ces entités.

Le sénateur Oliver: Est-ce comme dans le cas de Eaton's où l'actif était dans un compte à part?

M. Le Pan: Effectivement, l'actif de ces régimes est à part, légalement parlant.

En cas d'excédent, on ne sait toujours pas à qui appartient l'actif ou l'excédent. À l'heure actuelle, il n'existe pas de réponse universelle à cette question. Il n'y a pas de réponse simple, universelle, que ce soit dans la Loi sur les normes de prestation de pension ou dans la common law.

N'oubliez pas que nous parlons essentiellement d'un contrat entre employeurs, employés, retraités, et cetera. Selon les dispositions actuelles de la Loi sur les normes de prestation de pension relatives à l'excédent, si les documents du régime et les contrats sont clairs quant aux droits de l'employeur sur l'excédent et si le surintendant est d'avis qu'il n'y a pas de problème de solvabilité, l'excédent peut alors être versé à un employeur. Si les documents relatifs au régime indiquent clairement que l'excédent revient à l'employeur et qu'il n'y a pas de problème de solvabilité, on pourrait alors verser l'excédent à l'employeur. De même, si les documents relatifs au régime indiquent de façon absolument claire que l'excédent ne revient pas à l'employeur, peu importe la situation, ce sont les documents relatifs au régime qui l'emportent. À moins de modifier les documents par un processus de renégociation, l'employeur ne peut pas modifier les droits sur l'excédent.

Dans de nombreux cas, sinon dans la majorité, les documents ne sont pas clairs.

Le rôle de notre bureau consiste à émettre un avis: les documents sont-ils clairs ou non. Comme je l'ai dit, dans la plupart des cas, ils ne le sont pas.

Les droits sur l'excédent, d'un point de vue légal -- parce que souvent, ce n'est pas une question de clarté du contrat d'origine -- ont fait l'objet d'innombrables litiges tant aux paliers fédéral que provincial. Les décisions juridiques ne sont pas uniformes et ces procédures sont coûteuses.

Dans ce domaine, plusieurs personnes nous ont indiqué qu'il serait souhaitable que le gouvernement fédéral émette un avis. Le gouvernement aurait pu émettre trois sortes d'avis. Il aurait, évidemment, pu se taire. Le problème alors, c'est que la situation ne serait pas très claire. Ceux qui veulent arriver à un règlement de la situation de l'excédent d'un régime particulier risquent d'avoir à supporter des coûts considérables pour obtenir ce règlement.

Au lieu de ne rien faire, le gouvernement aurait pu prendre une décision politique. Par exemple, dans de nombreux cas, les employeurs ont des problèmes en cas de déficit. En cas d'excédent, par contre, ils devraient y avoir accès pour assurer le financement au cours des périodes de déclin. Ils devraient à tout le moins profiter de toute remontée causée par l'évolution de la situation économique et de l'emploi. Si le régime affiche un excédent, ils devraient en profiter, puisqu'ils subissent les conséquences des périodes de déclin.

On aurait pu, en troisième lieu, décider qu'en aucun cas l'excédent ne doit être mis à la disposition des employeurs; on aurait pu aussi trouver une solution intermédiaire.

Ce projet de loi ne décide pas officiellement et légalement parlant qui a droit sur l'excédent. Toutefois, dans certains cas, il propose une procédure simplifiée d'arbitrage pour décider des droits sur l'excédent. Il ne retire pas le droit de qui que ce soit d'avoir recours aux tribunaux, s'il le souhaite, pour décider des droits sur l'excédent d'un régime particulier. Il offre une autre option pour décider de cette question de l'excédent. Nous croyons que cela présente un avantage. Je m'arrête ici avant de passer aux prestations.

Le président: Compte tenu de la nature technique de cette question et du fait qu'elle est la plus délicate du projet de loi, je veux m'assurer que tout le monde a bien compris ce que vous venez de dire.

Je demande aux honorables sénateurs de ne pas hésiter à interrompre M. Le Pan pour lui poser des questions, car il importe de bien comprendre.

Le sénateur Meighen: Le manque de clarté de la plupart des régimes est-il dû au fait qu'il n'en est pas du tout question dans les documents, à la terminologie employée ou à la médiocrité des avocats?

M. Le Pan: Je laisse ma collègue Carol Taraschuk, de notre groupe de conseillers juridiques, répondre à cette question étant donné qu'elle a examiné beaucoup de ces situations.

Mme Carol Taraschuk, conseillère juridique, Bureau du surintendant des institutions financières du Canada: Sénateur, c'est une combinaison de tous les facteurs que vous venez de mentionner. De nombreux régimes de retraite datent des années 30, 40 ou 50, si ce n'est auparavant. À l'époque, l'excédent ne posait pas de problème, et il n'en était donc pas question. Au fil des ans, les régimes ont été modifiés, et l'on en est venu à se demander si ces modifications sont exécutoires.

Les documents concernant d'autres régimes ont été mal rédigés. On y trouve des expressions conflictuelles. Il arrive aussi que deux documents portant sur le même régime se contredisent. Il existe toujours une certaine part d'incertitude et de flou dans de nombreux régimes établis. Les plus récents sont plus explicites.

Le sénateur Meighen: Vous avez parlé des choix dont disposait le gouvernement, et nous savons quelle décision il a prise. Je pose la question en toute sincérité. Le fait d'exiger le consentement des deux tiers des participants actuels et passés est-il destiné à faire la vie dure à l'employeur qui souhaite retirer l'excédent? Cette exigence n'est-elle pas nettement défavorable à l'employeur? Pour l'instant, je ne porte pas de jugement.

M. Le Pan: Votre question est honnête.

Avant d'y répondre, monsieur le président, il faudrait peut-être que je vous situe en contexte.

Le président: Nous pouvons peut-être mettre cette question de côté pendant quelques instants et entendre celle du sénateur Oliver, puis celle du sénateur Stewart, car je crois qu'ils veulent parler de questions que vous avez déjà abordées.

Le sénateur Oliver: Vous avez dit plus tôt que le projet de loi à l'étude ne tranche pas, sur le plan juridique, la question de savoir qui a droit à l'excédent. Vous avez ensuite ajouté qu'en fait, le projet de loi sert à établir un régime d'arbitrage en quelque sorte. Cela ne signifie-t-il pas que le projet de loi a des lacunes et notre comité n'est-il pas l'endroit où il faut y voir? Pourquoi ne pas soumettre tout de suite un libellé qui règle le problème plutôt que de prévoir une solution symbolique? Il me semble que l'arbitrage est une solution uniquement symbolique et qu'il ne règle pas le problème de fond. Pourquoi ne pas le faire immédiatement, à cette étape-ci?

M. Le Pan: C'est le gouvernement qui en décide. Par contre, je ne conseillerais pas cette voie pour plusieurs raisons.

Le manque de clarté de nombreux régimes témoigne essentiellement du fait que les personnes responsables de créer et d'administrer ces régimes n'avaient pas d'opinion à ce sujet. Pour ma part, je me sens plus à l'aise dans ce contexte où il existe une procédure qui permet de régler les problèmes. Ainsi, bien que nous ne décidions pas officiellement si l'excédent appartient ou non à l'employeur, nous envisageons certes un éventuel régime dans le cadre duquel la possibilité ne serait pas exclue. Cependant, si les documents ne lui donnent pas ce droit, il faut en conclure que l'employeur devra obtenir le consentement d'un groupe de participants et qu'en échange, il devra peut-être prendre des engagements à leur égard et bonifier les prestations. Il s'agit essentiellement d'un cadre qui permet de renégocier les contrats et d'en venir à de nouvelles ententes.

Je me sens plus à l'aise avec cette idée parce que, si nous en décidions d'avance, nous imposerions notre façon de voir. Je ne suis pas sûr que cette opinion sera toujours raisonnable. Il se peut fort bien que, dans certaines situations, il ne soit pas raisonnable que l'employeur, par exemple, jouisse de tout l'excédent du régime. Par contre, je puis comprendre que, si l'employeur s'expose à des pertes durant les périodes de vaches maigres, il voudra aussi profiter de l'excédent.

De plus, le fait de se limiter à une seule solution pourrait avoir des répercussions plutôt importantes, par exemple si nous décidions que l'excédent appartient toujours à l'employeur. En ce qui concerne les régimes auxquels cotisent les employés, nous pourrions débattre longtemps de la part de l'excédent qui revient à chacun. C'est un peu comme le retrait de la forme mutuelle des compagnies d'assurances, sujet dont il a été question au sein de ce comité-ci. À qui va l'excédent? Le verse-t-on aux anciens souscripteurs, aux souscripteurs actuels, à d'anciens retraités, à des retraités actuels, à ceux qui ont cotisé il y a cinq ans ou il y a sept ans?

Je ne suis pas convaincu que ce soit utile à ce stade-ci. Il est probablement plus constructif d'inclure dans le projet de loi une procédure comme celle dont nous avons parlé, procédure qui permet aux participants de régler la question entre eux, mais qui va aussi encore plus loin que ce qui existe actuellement puisqu'elle reconnaît que l'employeur peut couramment avoir droit à l'excédent, pas seulement à la suite d'une décision en ce sens.

La solution constructive est dans ce cas-ci une meilleure politique gouvernementale qu'une décision prise une fois pour toutes selon laquelle l'excédent appartient à A ou à B. Cependant, il m'arrive aussi d'être pragmatique.

Le sénateur Stewart: Le sénateur Oliver a posé la question que je voulais moi-même vous poser, mais la réponse obtenue entraîne une autre question. Vous dites qu'il peut y avoir des situations dans lesquelles l'employeur pourrait avoir droit à l'excédent et le réclamer et d'autres situations où il ne pourrait pas le faire. Pouvez-vous nous en donner des exemples?

M. Le Pan: L'exemple utilisé dans la réponse était simple, sénateur. Moralement, par exemple, on pourrait soutenir que le régime auquel les employés ne cotisent pas est différent de celui auquel cotisent à la fois l'employeur et les employés. Même si les documents relatifs au régime ne sont pas clairs, il se pourrait fort bien qu'on en soit venu à une entente quelconque en 1950 au sujet de cette éventualité. Toutefois, les documents relatifs au régime pourraient fort bien être invalidés par un tribunal contemporain, étant donné les jugements rendus au cours des 15 dernières années. Il se peut que, si nous pouvions remonter dans le temps jusqu'à la date à laquelle un régime particulier a été négocié, par exemple en 1955, nous constations qu'à l'époque, ceux qui avaient négocié les modalités du régime estimaient que l'excédent irait fort probablement à X. Toutefois, depuis lors, des procès ont eu lieu. Il est possible que la personne impartiale qui examine cette affaire juge que, bien que les employeurs et les employés aient bien compris les modalités du régime et que telle était l'intention de ceux qui ont négocié le régime en 1955, la situation est tout autre aujourd'hui. Ceux qui ont négocié le régime en 1955 n'en sont pas les administrateurs actuels.

Étant donné ce qui est arrivé à la situation financière du régime, en common law, entre ce qui était visé et ce qui est en réalité possible aujourd'hui, la gamme des possibilités est infinie. Voilà deux genres d'exemples.

Il se peut aussi que les gens aient cru qu'il était bien entendu que l'employeur n'aurait jamais droit à l'excédent. Ceux qui ont participé à l'établissement des modalités du régime en 1955 en jureront peut-être, mais les documents n'en seront pas plus clairs.

Il y a toutes sortes de dimensions à cette question, de ce qui avait été convenu moralement à ce qui est juste d'un point de vue analytique en passant par ce qui est correct du point de vue de la politique gouvernementale. C'est le genre de problème où il n'y a pas d'injustice, en partie.

Le sénateur Tkachuk: Qui offre ce genre de régime? Sont-ce surtout des sociétés d'État ou des entreprises privées?

Mme Taraschuk: Ce sont surtout des entreprises privées dont les régimes de retraite tombent sous le coup de règlements fédéraux. Il s'agit essentiellement des plus importants régimes.

Le sénateur Tkachuk: Pouvez-vous nous en donner des exemples?

Le président: Nous parlons par exemple des régimes offerts par les banques, Bell Canada, toutes les sociétés de compétence fédérale.

Le sénateur Tkachuk: En ce qui concerne plus particulièrement l'excédent, est-il question ici d'un genre précis de régime de retraite?

Mme Taraschuk: Il est question des régimes à prestations déterminées.

Le sénateur Tkachuk: Exactement! La plupart de ces sociétés ont-elles comme les banques des régimes de retraite à prestations déterminées?

Mme Taraschuk: Oui. Il y a plusieurs variantes. Certaines grandes sociétés peuvent en réalité avoir deux ou trois régimes dont les modalités varient. Il pourrait par exemple s'agir d'un régime à cotisations déterminées et d'un autre régime à prestations déterminées. Bon nombre des anciens régimes de retraite établis sont des régimes à prestations déterminées.

Le sénateur Tkachuk: La plupart des sociétés d'État offrent-elles des régimes de retraite à prestations déterminées?

Mme Taraschuk: Je l'ignore.

Le président: Que je sache, dans le secteur public, tous les régimes, qu'ils soient fédéraux ou provinciaux, sont à prestations déterminées.

Quant à votre dernière observation, je connais des sociétés assujetties à la réglementation fédérale qui offrent un régime à cotisations déterminées à leurs travailleurs horaires et un régime à prestations déterminées à leurs employés salariés. Elles ont donc deux régimes relevant tous deux de la compétence fédérale.

Le sénateur Tkachuk: Lorsqu'il y a un excédent, une autre question me vient à l'esprit dans le cas des sociétés d'État ou des institutions publiques. Nous parlons ici de deniers publics. Dans le cas des banques, par exemple, elles ont peut-être conclu une entente qui n'est pas tout à fait structurée. Elles doivent livrer bataille pour mettre la main sur les excédents existants. C'est pourquoi j'ai posé la question.

En termes de pourcentages ou de dollars, combien de ces régimes de retraite sont offerts par des gouvernements ou par des organismes gouvernementaux comme les sociétés d'État fédérales et combien de ces régimes sont privés? Avons-nous ces renseignements?

M. Le Pan: Nous avons effectivement des renseignements généraux, mais il faudra, je crois, les faire suivre d'un tableau plus précis. Il est un peu difficile de vous répondre parce que, parmi les 41 p. 100 des 1 100 régimes qui sont à prestations déterminées, si l'on en retranche les régimes des bandes et ainsi de suite, moins de 50 sont sous-financés au cours d'une même année donnée. La plupart des régimes ont un coefficient de capitalisation positif parce que les cotisations sont un peu plus élevées que les prestations promises.

Par contre, sur le plan technique, il peut y avoir un excédent. Souvent, il n'est pas très élevé parce que, entre autres, il peut y avoir une période d'exonération des cotisations. C'est un moyen d'éviter l'accumulation d'excédents. En réalité, ce ne sont pas tous les régimes qui ont des excédents. Seuls ceux qui ont un excédent élevé aimeraient se prévaloir de cette option.

La demande n'a pas été très prononcée. Actuellement, au plus une demi-douzaine d'organismes nous demandent chaque année si le libellé des documents est clair. Nous parlons donc de quatre ou cinq cas sur 500 environ. Nombre d'entre eux ne sont pas très sérieux au départ. Ils souhaitent simplement se faire une petite idée de la situation. Ils ne cherchent pas vraiment à mettre la main sur l'excédent.

Nous pouvons vous donner une idée du nombre de régimes à prestations déterminées auxquels participent des sociétés d'État et du nombre de régimes offerts dans le secteur privé. Cependant, si vous me demandez maintenant si le nombre de régimes dont on voudra obtenir l'excédent est élevé, je ne le crois pas. Nous parlons d'une petite poignée de régimes au cours d'une certaine période donnée. Je vous ferai parvenir avec plaisir, sénateur, un tableau dans lequel les données seront ventilées en ce sens.

Le sénateur Kelleher: Pour en revenir à la page 12 de votre mémoire, monsieur Le Pan, au dernier paragraphe, si le seuil de 50 p. 100 est atteint, l'arbitrage est obligatoire pour les régimes en voie de liquidation, mais facultatif pour les régimes actifs. Qu'entendez-vous par «facultatif»? Qui en décide? Cette expression pose-t-elle problème?

Prenons l'exemple d'un régime actif. Grâce à des investissements très judicieux, contrairement à ce qui est arrivé à la Bourse hier, nous avons accumulé tout un surplus. L'employeur décide qu'il aimerait en prélever une partie à d'autres fins. On dit bien: «facultatif pour les régimes actifs».

M. Le Pan: C'est au choix de l'employeur. C'est déjà la procédure.

Le sénateur Kelleher: En règle générale, la nature humaine étant ce qu'elle est, je soupçonne qu'il est dans l'intérêt des employés que cela ne se produise pas, de toute évidence. Ils ne le laisseront pas faire. Qu'arrive-t-il si l'employeur n'obtient le consentement que de 48 p. 100 d'entre eux? Il a perdu?

M. Le Pan: Oui.

Le sénateur Kelleher: N'y a-t-il rien qu'il puisse faire?

M. Le Pan: Il serait utile de faire plusieurs observations au sujet de la page 12 en réponse, en partie, à votre question, sénateur Kelleher, ainsi qu'à la vôtre, sénateur Meighen.

Nous avons établi un cadre de négociation. Voilà qui répond directement à la question posée plus tôt par le sénateur Meighen, soit savoir si le cadre est plus -- je ne veux pas utiliser le mot «biaisé» parce qu'il a une connotation péjorative -- favorable à l'un qu'à l'autre.

Qu'en est-il du cadre au juste? Il s'agit d'un cadre de négociation. Nous prévoyons que, si vous êtes un employeur et que vous voulez obtenir l'excédent, puisque comme vous l'avez dit, sénateur Kelleher, ce n'est pas forcément à l'avantage des employés ou des retraités d'y consentir, il faudra y mettre le prix. Il s'agit donc d'un cadre de négociation. Il faut alors se demander: quels sont les éléments déclencheurs? Le cadre est-il suffisamment bien équilibré que, si l'objectif visé est de permettre des prélèvements sur l'excédent sans passer par un tribunal, il sera possible de le faire? Par contre, le cadre est-il suffisamment équitable que l'employeur ne peut simplement se servir, puisqu'il n'a pas été déterminé avec certitude à qui appartient l'argent?

Voilà qui crée trois genres de situation. Dans l'une, plus des deux tiers consentent, et nous parlons ici du consentement de tous les participants.

Le sénateur Meighen: Morts ou vifs?

M. Le Pan: Pas morts.

Le sénateur Meighen: Qu'en est-il des successions?

M. Le Pan: Cela ne vise que les époux survivants, pas les héritiers.

Toutefois, ce ne sont pas uniquement les deux tiers qui répondent à l'envoi postal. À nouveau, pour être franc, les modalités exactes sont l'élément clé qui permet de juger.

Le président: Pourquoi ne pas nous l'expliquer point par point? Nous attendrons, pour poser nos questions, que vous ayez fini de décrire la proposition détaillée. La page 13 est facile à comprendre. Passons-la en revue, point par point, puis les sénateurs poseront leurs questions.

M. Le Pan: À titre indicatif, je signale qu'il est ici question de l'article 9.2 du projet de loi à l'étude.

L'article 9.2 laisse entrevoir trois situations. Dans la première, l'employeur prépare une proposition combinant un retrait d'excédent et une bonification des prestations versées soit aux employés actuels, aux retraités ou à qui sais-je encore. Une proposition comme l'autre pourrait récolter le consentement des deux tiers ou plus, et il s'agit-là du consentement de tous les participants. Les participants au régime sont divisés en groupes. Il y aurait habituellement une forme quelconque de vote par groupe soit de personnes retraitées soit de participants actifs, étant donné que l'on isole habituellement les retraités des autres. Si la proposition obtient le consentement des deux tiers, elle est alors réputée être une modification au régime. C'est comme si on avait obtenu le consentement de tous. On peut alors retirer l'excédent.

Dans la deuxième situation, moins des deux tiers mais plus de la moitié des participants ont donné leur consentement. C'est alors qu'intervient l'arbitrage exécutoire. L'employeur peut décider de soumettre sa proposition à l'arbitrage exécutoire. Le projet de loi précise comment s'effectue le choix de l'arbitre, et cetera.

Vous avez parlé plus tôt du seuil de 50 p. 100. Si ce seuil est atteint, l'arbitrage devient obligatoire pour les régimes en voie de liquidation. Il faut mettre fin au régime et ne pas laisser traîner les choses pendant des années. Nous devons clairement établir qui a droit à l'excédent. Dans le cas des régimes actifs, l'arbitrage est facultatif.

Vous voulez savoir ce qui arrive dans les cas où le seuil est de 48 p. 100? En vertu de la loi, l'employeur ne peut aller de l'avant avec sa proposition. Il peut choisir d'en soumettre une nouvelle et de reprendre le processus. Si le seuil est inférieur à 50 p. 100, l'employeur ne peut, à notre avis, avoir droit à l'excédent.

L'article 9.2 fournit d'autres précisions, mais je vous en ai donné les grandes lignes. J'ajouterai que le surintendant doit être convaincu que le retrait de l'excédent ne place pas le régime dans une situation financière difficile, mais je n'ai pas l'intention d'aborder cette question.

Le sénateur Meighen: J'aimerais revenir au commentaire plus au moins drôle que j'ai fait tantôt au sujet des participants morts ou vifs. Je n'ai toujours pas compris. L'alinéa 9.2(2)b) précise:

...les participants anciens et les autres personnes qui entrent dans les catégories prévues par règlement.

Qu'est-ce qu'on entend par les autres personnes qui entrent dans les catégories prévues par règlement? Où pourrais-je trouver ces renseignements?

Mme Taraschuk: Nous sommes en train d'élaborer les règlements. Ces personnes comprennent les conjoints survivants qui ont droit aux prestations de pension d'un participant décédé et toute autre personne désignée par ce participant.

Le sénateur Meighen: Je suppose que cela pourrait comprendre un enfant, n'est-ce pas?

Mme Taraschuk: Oui.

Le sénateur Meighen: Ainsi qu'un enfant mineur?

Mme Taraschuk: Seulement s'il a été désigné selon les modalités du régime de pension, si le régime prévoit une telle disposition, et bon nombre d'entre eux n'en prévoient pas.

Le sénateur Meighen: Donc, il faudrait obtenir le consentement de l'enfant mineur par la voie réglementaire. Vous devez obtenir le consentement de gens qui sont incapables d'exprimer leur volonté légalement.

Je simplifie peut-être les choses outre mesure, mais d'après ce que je comprends, le surintendant peut exercer son pouvoir discrétionnaire dans les cas où l'on essaie, par tous les moyens, d'obtenir le consentement de deux tiers des membres de chacun des deux groupes. Le surintendant peut toujours dire, «Désolé, je ne suis pas d'accord. La réponse est «non».»

Mme Taraschuk: C'est exact.

Le sénateur Meighen: Toutefois, il ne peut pas faire l'inverse. Si, dans un cas particulièrement difficile, vous n'arrivez qu'à obtenir, disons, 48 p. 100, le surintendant ne peut pas dire, «Dans ce cas-ci, on se rapproche du seuil. Vous pouvez aller de l'avant avec la proposition.»

M. Le Pan: C'est exact. Nous intervenons dans le but de nous assurer que les bonnes pratiques du commerce sont respectées, pas pour déterminer si la proposition ou le processus de négociation est adéquat ou si, d'un point de vue moral ou légal, une partie a droit à l'excédent. Nous voulons être en mesure de dire qu'un régime est conforme aux bonnes pratiques du commerce. Nous ne voulons pas nous retrouver avec un régime dont le ratio de solvabilité est presque nul; nous voulons qu'il y ait encore une certaine marge de manoeuvre.

Le projet de loi S-3 laisse le processus de négociation entre les mains des partis. Le gouvernement ou le BSIF n'interviendra pas pour déterminer qui a raison et qui a tort.

Le sénateur Meighen: Pouvez-vous nous en dire plus sur le fait que l'on exige le consentement de deux tiers des participants des deux groupes? Il me semble qu'il s'agit là -- et je me trompe peut-être -- d'un objectif non pas impossible, mais à tout le moins difficile à atteindre.

M. Le Pan: C'est une question de jugement, sénateur. Celui-ci peut varier selon les cas. La nécessité d'obtenir le consentement de deux tiers de tous les participants, et non pas simplement des participants qui répondent, peut sembler un objectif difficile à atteindre. Il existe des précédents. Certaines provinces exigent le consentement de tous les participants. D'autres interdisent le retrait de tout excédent que pourraient comporter les régimes actifs, sauf s'il est question de mettre fin à un régime. Quand on tient compte des exigences que fixent les provinces, la nécessité d'obtenir le consentement de deux tiers des participants pour avoir droit à l'excédent demeure un objectif plus que réaliste.

Du côté des entreprises, il faut obtenir le consentement de deux tiers ou de 90 p. 100 des participants dans le cas d'une prise de contrôle ou d'une fusion.

Si l'excédent est considérable et que l'employeur propose d'utiliser une partie de celui-ci pour bonifier les prestations, et si la proposition alternative est de tout simplement laisser l'excédent dans le régime, de sorte que ni les participants actuels ni l'employeur ne pourront y avoir accès, on se retrouve dans une sorte d'impasse à la mexicaine. Il ne serait pas très difficile, dans ce cas, d'obtenir de deux tiers des participants actuels ou anciens qu'ils acceptent de recevoir des prestations bonifiées en permettant à l'employeur de toucher une partie de l'excédent. C'est mieux que de ne rien recevoir du tout.

C'est tout ce que je peux vous dire, sénateur. Nous avons regardé tout cela et essayé de répondre à la question que vous avez posée: est-ce un bon point de départ pour les négociations?

Nous avons préféré opter pour le consentement de «deux tiers de tous les participants». La formule qui prévoit le consentement de «deux tiers des répondants» est plus difficile à appliquer.

N'oubliez pas qu'à défaut d'obtenir le consentement de deux tiers des participants, vous pouvez passer directement à l'arbitrage. Si vous partez du principe qu'il devrait y avoir un moyen plus simple pour les employeurs d'avoir accès à l'excédent, vous devez quand même atteindre le seuil de 50 p. 100 pour rester dans la partie. S'ils obtiennent 50 p. 100, ils peuvent soumettre leur proposition à l'arbitrage. Cela leur permettra d'une manière ou d'une autre d'obtenir des résultats.

Le consentement de deux tiers des participants ne constitue pas, pour moi, l'unique critère. Vous pouvez toujours vous adresser aux tribunaux si vous estimez avoir des arguments à toute épreuve, qui sont fondés sur l'arrêt Singer et les autres précédents qui existent. Un tel recours est toujours possible.

Le sénateur Meighen: Pourquoi avez-vous décidé de soumettre les participants anciens et actuels à la même exigence? À mon avis, les participants anciens seraient moins concernés que les participants actuels. Pourquoi exigez-vous le consentement de deux tiers des participants anciens et actuels?

M. Le Pan: Ce que nous disons essentiellement, c'est que les participants anciens doivent se mettre à la place des participants actuels. C'est ainsi que fonctionne le régime.

Le sénateur Meighen: Je n'ai pas bien compris.

Le président: Je vous demanderais de nous dire ce que vous entendez par un ancien participant.

M. Le Pan: Je veux dire les conjoints des bénéficiaires.

Le sénateur Meighen: Vous ne faites pas allusion aux anciens employés d'une entreprise?

Mme Taraschuk: Non. Les participants anciens comprennent les retraités et les employés qui ont quitté l'entreprise, mais qui n'ont pas transféré leurs fonds.

Le sénateur Meighen: Est-ce que cela comprend la personne qui a travaillé pour le gouvernement pendant deux ans, qui a contribué «X» nombre de dollars au régime, et qui a ensuite quitté la fonction publique?

Mme Taraschuk: Oui, si vous avez laissé vos fonds dans le régime.

Le sénateur Meighen: Ce sont des fonds que j'aurai droit un jour, n'est-ce pas?

Mme Taraschuk: Vous pourriez y avoir droit. Cela dépend du libellé du régime de pension.

Le sénateur Meighen: Ne pourrais-je pas avoir le droit de toucher ces fonds, et aussi de participer au vote?

Mme Taraschuk: C'est possible. Cela dépend des modalités que prévoit le régime concernant l'excédent.

Le sénateur Meighen: J'aurais pu renoncer à mes droits à pension, mais je pourrais toujours être considéré comme un ancien participant, de sorte que mon vote serait requis.

Le président: Je m'excuse, je ne suis pas censé dire que tout cela est ridicule, mais pourquoi la personne qui n'a pas accès aux fonds du régime devrait-elle avoir le droit de voter? C'est insensé.

Mme Taraschuk: Les participants anciens sont ceux qui ont laissé leurs fonds dans le régime. En vertu du régime de pension, ils peuvent ou non avoir droit à l'excédent. Toutefois, comme ils ont laissé leurs fonds dans le régime, ils ont le droit de voter.

Le sénateur Meighen: Ils ont droit à une pension quelconque.

Mme Taraschuk: Oui.

M. Le Pan: C'est exact. Ils ont peut-être transféré leurs fonds lorsqu'ils ont changé d'employeur, mais ils n'ont pas transféré leurs droits à pension. Ils ont toujours droit à une pension en vertu du régime.

Le sénateur Meighen: Je me souviens avoir occupé un emploi pendant une très courte période et l'argent n'était plus là. Je n'avais aucun droit.

M. Le Pan: Non, nous ne faisons pas allusion à ce cas-là. Nous ne faisons pas non plus allusion à la personne qui n'a pas effectué de placements. Nous faisons allusion ici aux personnes qui ont mis fin à leur participation, mais qui ont conservé leurs droits à pension parce qu'elles n'ont pas transféré leurs fonds. Les conjoints font partie de cette catégorie.

Le président: Compte tenu de la confusion que cette question suscite chez huit ou neuf de nos membres, puis-je vous demander de nous définir clairement ce que vous entendez par un «participant ancien», que ce soit dans la loi -- dans lequel cas nous accepterions volontiers d'apporter une modification -- ou dans les règlements?

Mme Taraschuk: Nous avons modifié la définition de «participant ancien».

Le président: Vous êtes en train de lire quelque chose. Qu'est-ce que c'est?

Mme Taraschuk: Je suis en train de lire le projet de loi modifié, à la page 1, alinéa 1(3)a)(i).

M. Le Pan: Il est question ici d'une personne qui a mis fin à sa participation, mais qui n'a pas transféré ses droits à pension. Ces droits existent toujours.

Le président: Elle a droit à une pension quelconque.

M. Le Pan: Oui. Par conséquent, on pourrait soutenir qu'elle aurait droit à une partie de l'excédent.

Le sénateur Meighen: Je ne vois toujours pas pourquoi vous devez obtenir le consentement de deux tiers de ces participants.

M. Le Pan: Permettez-moi de revenir à cette question maintenant que nous avons fait la distinction entre ces groupes. C'est difficile à dire. Beaucoup d'opinions ont déjà été émises à ce sujet. Par exemple, un employé aurait pu cotiser au régime pendant une certaine période et mettre fin à sa participation, tout en conservant ses droits à pension, deux ans avant de prendre sa retraite. Comparez cela à l'employé qui a participé au régime pendant 20 ans. Pourquoi le vote d'une personne compterait-il plus que le vote de quelqu'un d'autre? J'aurais de la difficulté à justifier cela.

Par ailleurs, il peut y avoir des cas où une personne n'a travaillé pour un employeur que pour une courte période. Les conditions d'acquisition ne sont peut-être pas les mêmes qu'il y a dix ans, mais on pourrait soutenir que cette personne ne devrait pas pouvoir voter au même titre que les autres participants. Je dois avouer qu'il n'est pas facile de savoir où fixer les limites.

Il n'y a rien dans ce projet de loi qui dit que la proposition doit, pour être soumise au vote, prévoir le versement de prestations bonifiées et à la personne qui a travaillé pour un employeur pendant 20 ans, et à celle qui a travaillé pour lui pendant trois ans. Je préférerais m'en tenir à cela plutôt que de décider qui des deux personnes a le droit de voter.

Le président: Vous pourriez avoir un régime où le droit à pension serait proportionnel au nombre d'années que vous avez participé au régime.

M. Le Pan: Exactement.

Le sénateur Tkachuk: J'aimerais parler de l'expression «droit à l'excédent» qui figure à l'alinéa 9.2(1)a) et au paragraphe 2 du même article. Ces deux dispositions sont rattachées, n'est-ce pas?

Mme Taraschuk: Oui.

Le sénateur Tkachuk: Supposons que nous avons un fonds de pension de 100 000 $ avec un ratio de solvabilité de 60 000 $. Vous laissez 10 000 $ dans le fonds, et vous enregistrez un excédent de 30 000 $. Si l'employeur a le droit de participer à ce régime, ne compliquez-vous pas les choses dans la loi en disant, «Oui, vous y avez droit?» Lorsque vous dites que quelqu'un a droit à quelque chose, il me semble que ce quelque chose lui appartient, qu'il y a droit. Toutefois, en même temps que vous confirmez les droits de la personne qui reçoit une pension, ne dites-vous pas, «Vous avez droit à l'excédent en tant qu'employeur, mais les bénéficiaires ont le droit, par le biais d'un vote, de dire que vous ne pouvez pas y toucher, et donc que vous n'y avez pas droit»?

M. Le Pan: Vous soulevez non seulement une question de fond, mais aussi de forme.

Sur ce point, nous avons utilisé à l'alinéa 9.2(1)a) le mot «droit», sauf que nous précisons que l'employeur a droit à l'excédent au titre du régime de pension ou de l'article.

L'employeur peut avoir droit à l'excédent si le régime le précise clairement. C'est ce que prévoit le régime, c'est ce qui a été négocié. Nous avons ajouté que ce droit peut également être justifié au titre des autres dispositions de l'article.

Le sénateur Tkachuk: S'il y a droit, il n'est pas nécessaire pour lui de tenir un vote, n'est-ce pas?

M. Le Pan: C'est exact. S'il peut établir qu'il a droit à l'excédent en vertu de la Loi sur les normes de prestation de pension et des documents relatifs au régime, il n'a pas à tenir de vote. Si les documents ne le précisent pas clairement, ce qui est le cas d'un grand nombre de régimes, il doit alors tenir un vote.

On pourrait se demander s'il a vraiment droit à l'excédent s'il est obligé de tenir un vote. Je conviens avec vous que, avant que cette procédure ne soit prévue, l'employeur n'y avait pas droit. S'il y avait eu droit, il n'aurait pas tenu de vote. Les documents n'étaient pas clairs. L'employeur a établi, en procédant à un vote, qu'il avait légalement droit à cet excédent. C'est ce que confirme cette disposition.

Franchement, l'employeur qui obtient le consentement de deux tiers des participants prouve qu'il a droit à cet excédent. Point à la ligne.

Le sénateur Tkachuk: Je présume que les syndicats ne seraient pas d'accord. Ils préféreraient garder cet argent dans le régime pour leurs membres, n'est-ce pas?

M. Le Pan: Il faut décider si l'on préfère avoir des prestations bonifiées, ou rien du tout. Si l'argent reste dans le régime, personne n'y aura droit. Ni l'employeur, ni les autres. L'argent va tout simplement rester là.

Le sénateur Tkachuk: Donc, logiquement, personne n'aura le droit de toucher à cet argent, n'est-ce pas?

Vous parlez politique, même s'il s'agit d'une mesure législative. Les syndicats diraient, «Non, nous ne croyons pas que l'employeur devrait avoir accès à cet excédent.» On assisterait alors à une épreuve de force entre ceux qui défendent les intérêts des travailleurs et l'employeur qui veut mettre la main sur l'excédent, n'est-ce pas? C'est ce qui se produirait.

En fait, vous incitez l'employeur à mettre la main sur un actif qui, d'après lui, lui appartient. Vous l'incitez à se lancer dans une épreuve de force en offrant des prestations bonifiées.

M. Le Pan: C'est exact.

Le sénateur Tkachuk: Dans le but de mettre la main sur le reste de l'argent.

M. Le Pan: C'est exact, en sachant que tout le monde a certains droits, ainsi de suite. Il n'est pas dit que l'employeur ne peut faire de proposition qui aura pour effet de bonifier les prestations.

Par ailleurs, nous revenons au point soulevé par le sénateur Meighen. Le syndicat, dans l'exemple que vous utilisez, sénateur Tkachuk, ne peut empêcher cette démarche pour plusieurs raisons. La question qu'il faut se poser est la suivante: est-ce que cette mesure-cadre permet d'avoir accès à l'excédent? Est-ce qu'elle sert les intérêts d'un groupe au détriment d'un autre? Je ne le crois pas. Mais ce n'est que mon opinion. C'est pour cette raison, en partie, que nous sommes ici. Nous sommes en train de faire exactement ce que vous avez dit. C'est exactement le genre de scénario que nous prévoyons.

Le sénateur Tkachuk: Vous voulez que les choses se déroulent selon ce scénario?

M. Le Pan: Oui. Vous devez négocier, non pas vous lancer dans une épreuve de force. Vous devez vous asseoir et dire, «Supposons que, en tant qu'employeur, nous faisons ce qui suit...» C'est ce que vous devez faire.

Le président: Pour en revenir à ce que disait le sénateur Tkachuk, l'alinéa 9.2(1)a) ne serait-il pas plus clair si l'on disait que le paiement est subordonné à la justification par l'employeur du droit à tout ou partie de l'excédent au titre de ce régime de pension ou que le droit à cet excédent est accordé à l'employeur en vertu de cet article?

Il me semble que cet alinéa fait référence à un droit que l'employeur obtient à la suite d'un processus et non à quelque chose auquel il a automatiquement droit. Pourriez-vous étudier cette question?

M. Le Pan: Avec plaisir, monsieur le président.

Le président: Illustrons en chiffres ce que disait le sénateur Tkachuk. Si, par exemple, un employeur souhaite mettre la main sur un excédent actuariel de 10 millions de dollars, il ne peut le faire sans l'approbation des participants au régime. L'employeur va donc les voir pour leur dire qu'il aimerait avoir cette somme mais, comme il sait bien qu'il ne pourra l'obtenir sans donner quelque chose en retour, il leur propose de se la partager équitablement. Soit l'employeur obtient ainsi 5 millions, tout comme les bénéficiaires, soit chaque partie a 1 p. 100 de plus par année ou quelque chose du genre. Est-ce essentiellement ce que vous tentez de faire?

M. Le Pan: Tout à fait.

Le président: Vous êtes en train de nous dire, en termes simples, qu'un vote serait alors pris à ce sujet. Si moins de 50 p. 100 des participants appuient la proposition présentée, c'est fini. Par contre, si plus des deux tiers de chaque catégorie l'approuvent, cette proposition devient une entente. Si l'on se retrouve à mi-chemin entre ces deux pourcentages, un arbitrage exécutoire obligatoire doit intervenir.

M. Le Pan: C'est exact.

Le sénateur Meighen: Toutefois, cette entente n'est pas entérinée tant que le surintendant n'y consent pas, n'est-ce pas?

M. Le Pan: Oui.

Le sénateur Meighen: Pour quelle raison?

M. Le Pan: Je comprends.

Dans l'exemple que vous avez donné, je ne pense pas que nous approuverions une entente qui abaisserait le seuil de solvabilité à 1. La science actuarielle n'est pas précise à ce point. Les normes permettant d'évaluer ces régimes évoluent constamment. Notre économie a subi une restructuration assez considérable et cela signifie que les marges qu'on avait à l'origine cru importantes se révèlent, deux ou trois ans plus tard, ne pas l'être autant qu'on le pensait. Je ne voudrais pas qu'un régime, trois ans après qu'on a ramené le seuil de solvabilité à un, se retrouve avec un déficit.

Le président: Êtes-vous en train de dire que le surintendant va essentiellement décider, comme il se doit de le faire pour des raisons de solvabilité financière, du montant d'argent qui peut être retiré de ce régime, même si ce n'est pas ce que cet article précise, ou le surintendant peut-il décider qu'il n'aime pas par exemple la répartition sur laquelle les personnes concernées se sont entendues? Si c'est le premier cas qui s'applique, très bien, mais pourquoi ne le précisons-nous pas? J'imagine que vous n'êtes pas en train de suggérer qu'on lui donne un pouvoir discrétionnaire absolu qui lui permettrait de rejeter une proposition.

Le sénateur Tkachuk: Dans quelle mesure le surintendant serait-il de toute façon au courant de tout cela?

M. Le Pan: Nous pourrions exiger une évaluation à jour du régime.

Le sénateur Tkachuk: Parlons-nous alors de 1,1, de 1,2 ou de 1,3?

Le président: C'est une question de jugement.

M. Le Pan: Nous sommes payés pour juger ce genre de choses. Je n'ai pas d'objectif pour l'instant.

Mme Taraschuk: Les règlements d'application de la loi exigent également qu'un régime de pension actif prévoie un coussin de sécurité. Si je ne m'abuse, ce montant correspond à deux années de cotisations ou à 25 p. 100 du passif. Nous devons nous assurer que ce coussin existe toujours et que les règlements sont respectés avant de remettre l'excédent.

Le président: Comprenez-vous notre question? Nous comprenons tout à fait les raisons pour lesquelles vous pourriez opposer votre veto pour des raisons d'insolvabilité. La question est la suivante: pourquoi auriez-vous le droit d'opposer votre veto si vous avez déjà approuvé le montant d'argent maximal qui peut être retiré de ce régime?

D'ailleurs, pourquoi quelqu'un voterait-il sur une proposition à moins qu'elle n'ait déjà été approuvée? Prenez mon exemple de dix millions de dollars. Pourquoi demanderais-je aux employés de se prononcer à cet égard si votre bureau n'a pas déjà consenti à ce qu'on retire dix millions de dollars? Nous perdrions notre temps.

M. Le Pan: C'est ce qui se produira. Les gens viendront tout d'abord nous voir, comme ils le font pour d'autres transactions.

Le président: Ne pourrions-nous pas le préciser?

Le sénateur Stewart: Il croit que cela n'est pas nécessaire parce que la situation se produira de toute façon.

M. Le Pan: Non. La situation se produira de toute façon en raison de ce que prévoit le projet de loi.

Le sénateur Meighen: C'est en quelque sorte une décision par anticipation, votre façon de dire qu'une proposition semble adéquate.

M. Le Pan: Nous vous demanderions si vous avez par exemple un rapport actuariel à jour. Nous agirions ainsi parce que vous seriez obligés d'obtenir notre consentement. Je suis tout à fait d'accord avec vous, monsieur le président; une personne qui sait que nous rejetterons sa proposition n'ira pas de l'avant avec celle-ci.

Le président: Je vois les choses un peu différemment. Je crois que ces personnes voudront savoir que vous êtes d'accord avec leur proposition.

M. Le Pan: C'est exact.

Le président: Ce n'est pas la même chose. Les gens concernés voudront obtenir une décision par anticipation alors que la décision du BSIF précisera uniquement que le régime demeurera sain financièrement parlant si cet argent est retiré. Au-delà de cela, la façon dont l'argent est réparti entre les différents intervenants ne vous concerne pas.

M. Le Pan: Que fait-on de la divulgation des renseignements? Quelque chose a-t-il été prévu à cet égard? Je vais être franc. Nous exerçons des pressions et nous évoluons, surtout depuis la proposition du nouveau livre blanc et le projet de loi, mais nous avons à une ou deux reprises au cours des 12 à 18 derniers mois exercé d'immenses pressions pour qu'on informe adéquatement les participants de la situation réelle de ces régimes. Nous avons en partie eu recours à notre pouvoir d'approbation pour différentes autres choses prévues dans la loi, notamment l'exigence d'approuver les modifications apportées aux régimes. Si vous nous éliminez complètement du processus ou si vous nous confinez aux bonnes pratiques du commerce, nous ne jouerons aucun rôle en ce qui concerne la qualité du processus. Je devrai y réfléchir avant de me prononcer. Il est peut-être possible de circonscrire l'alinéa 9.2(1)c) proposé d'une façon quelconque, mais il me faudra réfléchir sur les autres types de rôles que nous pourrions jouer dans le processus.

Le président: Comprenez-vous notre inquiétude?

M. Le Pan: Oui.

Le président: Si un processus équitable, comme celui décrit ici, a eu lieu, s'il a été mis à l'épreuve et si le régime est toujours sans risque, vous ne devriez pas avoir le droit de le modifier.

M. Le Pan: Vous avez raison et notre intérêt est le même que celui du comité. Nous ne voulons pas avoir à décider si la répartition devrait être de 10,1 ou de 10,2 ou encore de 5,1 ou 6,2. Nous ne voulons pas nous retrouver dans cette situation. De fait, cette disposition du projet de loi vise dans une certaine mesure à éviter cela.

Le président: Pouvez-vous réfléchir à cette question et nous faire connaître vos vues à cet égard?

M. Le Pan: Nous pourrions peut-être régler le problème plus directement qu'en limitant tout simplement le pouvoir.

Le sénateur Kelleher: J'ai deux questions. Je désire tout d'abord revenir à la première question que j'ai posée concernant la situation dans laquelle on se retrouverait si moins de 50 p. 100 des gens concernés étaient d'accord. Si je ne m'abuse, le président a utilisé les mots «c'est fini», mais vous avez ensuite dit que les personnes concernées auraient toutefois encore le droit d'aller devant les tribunaux si elles le souhaitaient. Mes inquiétudes découlent du fait que je pense strictement comme un avocat. Si une loi précise qu'on ne peut aller en arbitrage si on n'obtient pas un appui de 50 p. 100, je crains que, si je me présente devant les tribunaux, on me dira que je ne peux le faire en raison du système et du régime qui ont été établis. En tant qu'avocat, je serais beaucoup plus heureux si ce projet de loi comportait une disposition protégeant mon droit d'aller devant les tribunaux en l'absence d'un appui de 50 p. 100. Cela constitue une menace pour moi en tant qu'employeur si je dois me présenter en cour. Ai-je ce droit? Ce projet de loi ne le protège pas.

M. Le Pan: Oui. Ce droit n'est pas protégé, mais il n'est pas retiré.

Le sénateur Kelleher: Je n'en suis pas certain. On pourrait affirmer qu'il est retiré parce que le projet de loi établit la procédure à suivre.

Mme Taraschuk: Je ne crois pas que ce droit ait été retiré parce que l'alinéa 9.2(1)a) proposé permet à l'employeur de justifier son droit. Je n'aimerais pas qu'une disposition d'exemption soit ajoutée au sujet des tribunaux parce que cela engendrerait une certaine incertitude par rapport au caractère obligatoire du processus d'arbitrage que nous voulons instaurer. Je crois que ces personnes auront encore la possibilité d'aller devant les tribunaux même si elles n'obtiennent pas un appui de 50 p. 100.

Le sénateur Kelleher: Ce n'est certainement pas ce que dit le projet de loi.

M. Le Pan: Je comprends.

Le sénateur Kelleher: C'était là ma première inquiétude.

La deuxième concerne le texte qui apparaît à la page 12 du projet de loi. Si le seuil de 50 p. 100 est atteint, l'arbitrage est obligatoire pour les régimes en voie de liquidation, mais il est facultatif pour les régimes actifs. Généralement parlant, d'après mon expérience, la seule raison de liquider un régime, c'est que l'entreprise a été liquidée. On se retrouve avec une faillite.

Mme Taraschuk: Pas toujours.

Le sénateur Kelleher: Pas toujours mais, dans un certain nombre de cas, un régime est en liquidation parce que l'entreprise a fait faillite, est-ce exact?

M. Le Pan: C'est exact.

Le sénateur Kelleher: Cela signifie que le régime se retrouve quelque part entre les mains d'un liquidateur quelconque et que les employés n'en retireront pas grand-chose. Le liquidateur, qui représente les créanciers, souhaitera mettre la main sur cet argent pour rembourser ces derniers. Vous êtes en train de vous assurer que si ce seuil de 50 p. 100 n'est pas atteint, et il ne le serait probablement pas en pareil cas, l'affaire se retrouvera devant les tribunaux et le litige sera très onéreux parce que les deux parties ont beaucoup à perdre. Dans un cas comme celui-ci, lorsqu'un régime est en liquidation, surtout quand il y a insolvabilité, je me demande si le seuil de 50 p. 100 est une bonne idée parce que les parties se retrouveront certainement devant les tribunaux. Ne serait-il pas préférable pour les parties en cause que nous laissions tomber ce seuil et que nous les obligions à aller en arbitrage pour que l'argent leur revienne?

M. Le Pan: J'ai une ou deux choses à dire sur le plan de la logique. Je crois que vous axez votre intervention presque exclusivement sur les cas de liquidation.

Le sénateur Kelleher: En effet.

M. Le Pan: Il y a pourtant des cessations qui ne sont pas des liquidations. Je ne crois pas que votre argument tiendrait en pareil cas.

Le sénateur Kelleher: C'est exact.

M. Le Pan: Deuxièmement, en ce qui concerne les liquidations, nous avons vu des liquidations qui ne sont pas des liquidations en bonne et due forme mais plutôt des restructurations.

Le sénateur Kelleher: Ce fut le cas d'Eaton.

M. Le Pan: Oui. Et ce n'est pas le seul.

Le sénateur Kelleher: C'est le plus récent.

M. Le Pan: Oui, bien qu'il ne s'agisse pas d'un régime fédéral. Dans les cas où les employeurs, les syndicats et les employés souhaitent parvenir à une entente...

Le sénateur Kelleher: Des pressions sont exercées quand tous ces gens veulent procéder à une restructuration, mais ces pressions sont inutiles lorsque l'entreprise est liquidée.

M. Le Pan: Vous parlez exclusivement des cas de liquidation.

Le sénateur Kelleher: Oui.

M. Le Pan: Il ne s'agit même pas d'un cas où il pourrait y avoir une restructuration.

Le sénateur Kelleher: Je tente tout simplement d'épargner de l'argent à tous.

M. Le Pan: Je comprends. C'est un point intéressant.

Le sénateur Kelleher: Cette solution est très onéreuse.

M. Le Pan: De notre point de vue, nous cherchons à obtenir une certitude quelconque pour ce type de cas parce que, si les choses s'éternisent, on retarde la cessation du régime et même, comme vous l'avez indiqué, les procédures d'insolvabilité. Je n'ai pas d'opinion ferme d'un côté ou de l'autre.

Mme Taraschuk: Je voudrais soulever deux points. Premièrement, si nous n'établissons pas un seuil quelconque, quel type de proposition l'employeur présentera-t-il aux participants? De cette façon, on s'efforce au moins d'obtenir le consentement des participants même pour une cessation.

Le sénateur Kelleher: Dans un cas d'insolvabilité, pourquoi serait-il si abominable d'obliger les participants à aller en arbitrage au lieu de se présenter devant les tribunaux? L'entreprise est insolvable parce qu'elle n'a pas assez d'argent.

Mme Taraschuk: Oui, je comprends. L'arbitre examine la proposition. L'une des différences avec la cessation, c'est qu'elle stabilise les droits contrairement au cas où les participants ont peut-être droit à l'excédent si le régime n'est pas clairement à l'avantage de l'employeur. Les droits sont alors stabilisés. Les participants détiennent donc un intérêt réel dans ce processus. Ils courent davantage de risques en portant l'affaire devant les tribunaux. De cette façon, le processus est plus facilement réalisable, il garantit la présentation d'une proposition convenable et il fait en sorte que celle-ci puisse aller en arbitrage.

Le sénateur Kelleher: Je n'ai peut-être pas bien compris. Dans l'exemple que j'ai donné, si l'appui n'atteint pas 50 p. 100, les parties vont devant les tribunaux.

Mme Taraschuk: Ou elles peuvent présenter une nouvelle proposition.

Le sénateur Kelleher: Quand une entreprise fait faillite, il n'y a pas d'argent. C'est pour cette raison que l'entreprise a fait faillite. Pourquoi risquer de perdre le peu d'argent qui reste dans une longue procédure? Pourquoi ne pas obliger les parties à aller en arbitrage?

M. Le Pan: On revient encore une fois aux créanciers par opposition aux retraités.

Le sénateur Kelleher: Cette solution ne fait pas mal aux créanciers. L'arbitrage aidera toutes les personnes concernées.

M. Le Pan: D'accord. Il n'y a aucun doute là-dessus. Si nous avions l'arbitrage comme solution la moins coûteuse, tout le monde en sortirait gagnant.

Le sénateur Tkachuk: Clarifiez la situation pour moi et pour le sénateur Kelleher. S'il s'agit d'un excédent, comment cette solution pourrait-elle faire mal aux retraités?

M. Le Pan: Je n'ai pas utilisé l'expression «faire mal».

Le sénateur Tkachuk: Oui, vous l'avez fait.

M. Le Pan: Divers intérêts sont en jeu. Il s'agit d'un excédent et nous tentons d'établir quelle somme doit aller à chacun lorsque cela n'est pas clair. D'autre part, l'excédent qui provient d'une entreprise en liquidation sera versé aux créanciers de cette entreprise. Nous parlons du seuil établi pour le genre de négociations et d'ententes que nous décrivons ici.

Si nous abaissions le seuil beaucoup en deçà de 50 p. 100, cela risque de modifier le genre de propositions faites aux participants, anciens et actuels, et nous nous retrouverons vraisemblablement avec une proposition prévoyant qu'une plus grande part de l'excédent va à l'employeur -- l'entreprise en liquidation -- et une moindre part aux participants actuels.

Votre exemple faisait référence à une scission à parts égales. S'il me suffit d'avoir un appui de 10 p. 100 au lieu d'un appui de 50 p. 100, je ne proposerai pas une scission à parts égales.

Le sénateur Tkachuk: Vous venez de me perdre, parce que je voulais que vous clarifiiez certains des problèmes rencontrés. Le sénateur Kelleher a soulevé un très bon point. Si ces fonds sont considérés comme excédentaires, les retraités n'en verront jamais la couleur.

M. Le Pan: C'est faux.

Le sénateur Tkachuk: Disons qu'il y a une faillite. Il sera plus facile d'établir les tables actuarielles et de déterminer la façon d'assumer les obligations envers les employés qui restent et ceux qui ont quitté l'entreprise et qui reçoivent des prestations. Vous connaissez le montant que vous devez leur verser en vertu de l'entente qu'ils ont signée avec l'entreprise. Il y a encore des fonds excédentaires. Êtes-vous en train de nous dire que, dans le cas d'une faillite, il faut déterminer s'il y a vraiment un excédent et que celui-ci appartient aux retraités par opposition aux créanciers?

M. Le Pan: C'est exact. C'est tout à fait le même problème ou, du moins, c'est de cette façon que je vois les choses. Je ne pense pas que la disparition de l'entreprise résout la question de savoir à qui appartient l'argent.

Le sénateur Tkachuk: Non, l'affaire se retrouvera devant les tribunaux.

M. Le Pan: En conséquence, on se demande encore si l'argent devrait aller aux retraités ou à l'employeur. Nous tentons actuellement de préciser les points qui ne sont pas clairs. Si je ne m'abuse, le sénateur Kelleher a suggéré que nous rabaissions le seuil parce que, en pareil cas, les parties concernées sont plus susceptibles de se retrouver devant les tribunaux et que nous privilégions cette solution au lieu d'une poursuite en justice.

Comme nous l'avons dit plus tôt, on parle toujours d'une négociation entre les parties concernées pour obtenir le consentement des participants. On parle toujours de l'équilibre des forces dans cette négociation. Plus le seuil est bas, moins il y a de chances qu'une proposition convenable soit présentée aux retraités.

Encore une fois, comme je l'ai dit plus tôt, les chiffres ne font pas de miracles. Il faut faire preuve de jugement. Je peux comprendre que certaines personnes soient d'avis qu'il faille rabaisser ce seuil pour augmenter la probabilité de recourir à l'arbitrage dans le cas d'une entreprise qui se retire. Je crains toutefois que, si ce seuil est vraiment bas, plus rien n'incite les employeurs à présenter une proposition sérieuse.

Le sénateur Kelleher: Je ne parle pas de ramener ce chiffre à zéro, mais un seuil inférieur à 50 p. 100 conviendrait bien dans ce genre de situation.

Le président: Vous revenez mardi prochain. Pouvez-vous réfléchir à cette question d'ici là?

M. Le Pan: Bien sûr.

Le sénateur Stewart: Nous avons parlé maintes et maintes fois de négociations. Quelle est la situation réelle en ce qui concerne la façon dont les employés sont organisés? À quel point la plupart de ces groupes sont-ils organisés?

M. Le Pan: Cela varie. Dans certains cas, les participants au régime ont une très bonne représentation syndicale. Dans d'autres, les employés sont syndiqués, mais le syndicat ne s'occupe pas particulièrement des questions liées à la retraite. En outre, certains groupes ne sont pas syndiqués. Vous avez la gamme complète.

Mme Taraschuk: Dans certains cas, les retraités sont regroupés au sein d'une association quelconque alors que, dans d'autres, ils ne disposent pas de tel regroupement.

Le sénateur Stewart: Je comprends. Merci beaucoup.

M. Le Pan: Ce processus nous amène à croire qu'il faut absolument avoir des interlocuteurs.

Pouvons-nous faire quelque chose quand il ne s'agit pas de groupes actifs, sinon tenter d'établir différentes catégories pour inciter les personnes concernées à s'organiser entre elles lorsqu'elles ne se retrouvent pas dans l'une de ces catégories? Je ne pense pas vraiment qu'on puisse les obliger à se faire représenter. J'ai réfléchi à cette question lorsque nous avons préparé cet exposé. Nous revenons toujours au même problème: si l'on exige un consentement significatif, il faut pouvoir parler à un interlocuteur. Aux personnes qui craignent qu'il soit trop difficile pour les employeurs d'obtenir une partie des fonds excédentaires, on peut répondre que si ces seuils sont trop bas, les employeurs sentiront moins la nécessité d'obtenir le consentement des employés, des anciens participants ou des retraités et, par le fait même, ceux-ci sentiront moins le besoin de s'organiser d'une façon quelconque. Cela fait partie de la démarche que nous avons adoptée pour déterminer si nous avons ou non établi ces seuils au bon niveau.

Le sénateur Oliver: Mme Taraschuk a parlé des règlements. Pouvez-vous nous dire où ceux-ci en sont rendus en ce qui concerne la mise en oeuvre de ces propositions de financement? Avez-vous l'intention de nous les apporter et de nous les présenter afin que nous puissions les examiner?

M. Le Pan: Nous serons heureux de vous les remettre si c'est là votre désir. J'ai toujours envisagé les choses de cette façon.

Le sénateur Oliver: De quel échéancier parlons-nous?

Mme Taraschuk: Nous avons déjà une ébauche qui fait actuellement l'objet de modifications, mais nous serons heureux de vous la fournir.

M. Le Pan: Nous n'aborderons pas cette question à moins que les membres du comité le veuillent, parce que nous en avons parlé dans notre exposé, mais différentes autres lignes directrices sont en voie d'élaboration, notamment les lignes directrices qui régiront la bonne gestion et la divulgation des renseignements. Ces dernières seront disponibles d'ici quelques jours sous forme d'ébauche à des fins de discussion et de consultation, comme le seront les autres par la suite. Nous serons bien sûr heureux de fournir celles-ci au comité. Elles s'inspirent davantage d'autres politiques que du projet de loi, mais elles appuient certains des buts fondamentaux du projet de loi.

Le président: Le comité s'est déjà penché sur la question de la bonne gestion. Nous avons examiné la situation de certaines sociétés et nous sommes sur le point d'étudier le cas des grands investisseurs. Lorsque l'ébauche des lignes directrices sera disponible, j'aimerais non seulement que vous la mettiez à notre disposition mais que vous reveniez pour en discuter avec nous pendant qu'on en est encore à l'étape de l'ébauche.

M. Le Pan: Nous serons très heureux de le faire.

Le sénateur Callbeck: Je souhaite revenir à la page 10 de votre document, où il est question d'autoriser le ministre des Finances à conclure un accord multilatéral de surveillance. Si l'Île-du-Prince-Édouard signait une telle entente avec le ministre des Finances, qu'est-ce que cela impliquerait et de quel régime de retraite serait-il question?

M. Le Pan: Les régimes de retraite visent deux types de participants. Certains d'entre eux sont des employés du gouvernement fédéral régis par la Loi sur les normes de prestation de pension, tandis que d'autres sont des employés d'un gouvernement provincial régis par la législation provinciale pertinente. Prenons l'exemple d'un régime qui serait visé par l'accord multilatéral proposé. Supposons que les participants à l'emploi du gouvernement fédéral, par le fait même assujettis à la Loi sur les normes de prestation de pension, constituent la majorité des membres de ce régime. Un autre 25 p. 100 serait assujetti à la législation provinciale de l'Île-du-Prince-Édouard. Aux termes d'un tel accord, le gouvernement fédéral et le BSIF pourraient surveiller l'ensemble du régime en vertu des règles prévues dans la Loi sur les normes de prestation de pension. Ils ne sont pas autorisés à le faire à l'heure actuelle. Deux séries de règles s'appliquent actuellement à ce régime, à savoir les règles de l'Île-du-Prince-Édouard et celles découlant de la Loi sur les normes de prestation de pension.

Dans le cadre de cette surveillance, nous pouvons conclure d'autres ententes avec l'Île-du-Prince-Édouard. Prenons ainsi l'exemple d'un régime qui regroupe uniquement des participants de cette province. Les administrateurs de ce régime peuvent notamment demander au BSIF, sur une base contractuelle, de les aider à surveiller leur régime de retraite, et ce, sans obtenir d'autorisation légale de la part de l'Île-du-Prince-Édouard. Nous agissons déjà de cette façon dans un certain nombre de provinces avec les compagnies d'assurance, les sociétés de fiducie et les sociétés de prêts et nous pourrons faire de même dans le domaine des régimes de retraite.

Ce qui est vraiment nouveau dans ce projet de loi et dans l'accord multilatéral proposé, c'est qu'il ne s'agit pas uniquement d'appliquer des règles différentes. Dans l'exemple que je vous ai donné, le nombre de séries de règles passerait de deux à un, et ce, tant pour le fédéral que pour le provincial. Si la plupart des participants au régime sont à l'emploi de l'Île-du-Prince-Édouard et seulement quelques-uns sont des employés du gouvernement fédéral, cette province pourrait administrer l'ensemble du régime en vertu de ses propres lois.

Le sénateur Callbeck: Vous parlez d'un régime qui regrouperait des employés du fédéral et du provincial.

M. Le Pan: Oui.

Mme Taraschuk: Cette situation se produit rarement et, en règle générale, seulement dans le cas de régimes relevant de plusieurs employeurs, où l'on retrouve une entreprise provinciale qui s'est regroupée avec des sociétés fédérales.

Le sénateur Callbeck: Une demande a-t-elle été faite à cet égard?

M. Le Pan: Vous parlez de la modification?

Le sénateur Callbeck: Oui.

M. Le Pan: Nous travaillons sur cet accord multilatéral depuis cinq ou sept ans. Les administrateurs des régimes qui regroupent des participants du fédéral et des provinces aimeraient qu'il y ait moins de chevauchement entre les deux ordres de gouvernement. Dans le cas des régimes qui fonctionnent bien, cette proposition est bien accueillie. Cette solution pourrait entraîner une nouvelle répartition des responsabilités, mais rien n'indique pour l'instant, sur le plan tant fédéral que provincial, qu'on procédera à un important remaniement en ce qui concerne le rôle de chacun.

Pour revenir à ce que je disais, le gouvernement fédéral ne représente qu'environ 10 p. 100 des participants à l'échelle nationale. Pour procéder à un remaniement majeur des responsabilités -- parce que, à l'heure actuelle, le gouvernement fédéral et les provinces oeuvrent en quelque sorte dans ce secteur --, il faudrait obtenir l'appui des provinces où l'on retrouve un grand nombre de participants.

L'autre facteur qui influerait sur la possibilité de procéder à un remaniement majeur, c'est que les lois sur les pensions, tant fédérales que provinciales, comportent deux éléments, comme je l'ai indiqué au début de mon exposé. Il y a tout d'abord les bonnes pratiques du commerce, qui vont par exemple des pouvoirs attribués aux surveillants aux règles d'investissement, puis un certain nombre de facteurs sociaux délicats, qui incluent notamment la définition du terme «conjoint», les dispositions relatives aux excédents dont nous avons parlé, les règles d'acquisition, et cetera.

À mon avis, les règles qui s'appliquent dans le second cas sont beaucoup moins uniformes que celles qui s'appliquent dans le premier. Si le gouvernement fédéral était chargé de mettre en oeuvre les règlements en matière de pension au nom de toutes les provinces ou d'un grand nombre d'entre elles, ou vice-versa, l'un des premiers obstacles à surmonter serait ces facteurs sociaux délicats que l'on retrouve dans les lois sur les pensions et qui ont soulevé une certaine controverse et donné lieu à beaucoup de discussions et compromis dans différentes juridictions. Je ne suis pas très optimiste en ce qui concerne notre capacité à conclure avec cinq ou six provinces une entente quelconque au sujet d'une seule série de règles. Nous ne cherchons pas à obtenir un remaniement majeur des responsabilités. Nous avons plutôt adopté une approche progressive en cherchant la sorte d'ententes dont j'ai parlé plus tôt et qui visent des régimes regroupant des participants du fédéral et des provinces.

Nous avons développé un certain savoir-faire en ce qui concerne les examens. À l'heure actuelle, les provinces qui disposent de spécialistes chargés d'examiner les régimes de retraite sont peu nombreuses. Nous procédons à un nombre assez élevé d'examens et nous avons appris à axer nos efforts sur les enjeux vraiment importants. Si une province désire discuter de cette question avec nous sur le plan administratif, nous sommes là. Cette démarche progressive nous permet de procéder à une certaine rationalisation qui donne de meilleurs résultats que si l'on effectuait un remaniement majeur, parce que cette dernière solution ne peut être réalisée dans le peu de temps dont nous disposons. De nombreux employeurs s'inquiètent de plus en plus des chevauchements. Il y a un écart important entre le fait de formuler une inquiétude et l'adoption d'une solution, comme nous l'avons constaté dans un certain nombre de domaines où la réglementation financière relève à la fois du fédéral et du provincial et où il n'a pas été possible d'en arriver à une entente.

Le sénateur Meighen: Vous avez parlé de régimes provinciaux qui exigent le consentement de tous les participants. Le seuil des deux tiers me préoccupe toujours. Je pense surtout aux anciens participants dont il est question à l'alinéa b). Je crois avoir trouvé la réponse à ma question: si vous n'obtenez pas ce pourcentage, vous soumettez la proposition à l'arbitrage.

M. Le Pan: C'est exact.

Le sénateur Meighen: Prenons l'exemple d'une entente conclue entre un employeur et un syndicat. Les deux parties se présenteraient probablement devant l'arbitre en disant qu'une entente est intervenue, mais qu'il est matériellement impossible de retrouver les deux tiers des anciens participants. L'arbitre répondrait vraisemblablement qu'il accepte la proposition.

M. Le Pan: Tout à fait. La marge de manoeuvre est plus grande que ce qu'on pourrait croire. Imaginons que les anciens participants ne représentent qu'un petit pourcentage des membres du régime. Encore une fois, pareille situation inciterait un arbitre à agir de cette façon.

Je ne veux pas revenir là-dessus, mais je vous répète que nous ne voulons pas avoir à fixer les limites.

Le sénateur Meighen: Il est pratiquement impossible de retrouver tous les participants.

M. Le Pan: Pour vous dire la vérité, certaines lois provinciales interdisent que l'excédent soit remis à l'employeur lorsque le régime est actif ou permettent qu'il soit versé uniquement pour les régimes en voie de cessation. Sinon, elles exigent le consentement de tous les participants pour un régime actif.

Le sénateur Meighen: Quel que soit le régime?

M. Le Pan: Oui. Nous avons ramené ce pourcentage aux deux tiers. Certaines provinces ne permettent pas du tout d'agir ainsi. Nous avons examiné les règles provinciales et nous nous sommes inspirés de certaines d'entre elles. Le recours à l'arbitrage existe par exemple en Colombie-Britannique. Nous avons repris ce mécanisme et sommes allés plus loin.

Je vais être franc compte tenu du genre de discussion que nous avons actuellement. Pour revenir à une question qui a été posée plus tôt, nous cherchions une solution qui avait une chance raisonnable de se concrétiser mais qui ne risquait pas de nous faire tomber dans une crise dont nous ne pourrions plus sortir. Notre décision a été prise en fonction de ces facteurs.

De la même façon, la discussion que nous avons eue entre nous a permis de constater qu'aucun chiffre n'est miraculeux. Une certaine souplesse peut être exercée à ce chapitre et, comme vous l'avez vu, nous sommes prêts à discuter.

Le président: Honorables sénateurs, avant de lever la séance, je tiens à vous signaler que ces témoins reviendront mardi prochain. Je leur demanderais de se préparer à répondre aux questions qui sont restées en suspens aujourd'hui et à celles qui pourraient surgir plus tard cette semaine lorsque d'autres témoins comparaîtront.

M. Le Pan: Monsieur le président, j'aimerais faire un ou deux commentaires sur des points que je n'ai pas eu l'occasion d'aborder plus tôt.

Comme je l'ai indiqué, le projet de loi découle d'un livre blanc. Il a été déposé durant la législature précédente et une trentaine de mémoires ont été présentés. Un grand nombre d'entre eux étaient brefs, quelques-uns étaient plus détaillés. Nous avons apporté certaines modifications au projet de loi pour tenir compte des commentaires reçus, mais nous en avons laissé tomber d'autres, dont certains formulés par des témoins qui comparaîtront plus tard. Je serais heureux de vous en parler maintenant ou à une date ultérieure.

Le président: Lorsque vous reviendrez mardi prochain, vous pourrez répondre aux commentaires que nous entendrons jeudi ou à ceux que vous avez entendus ici même aujourd'hui. Vous pourrez également parler des amendements de forme et revenir sur certains éléments d'orientation dont nous avons parlé aujourd'hui avec vous.

La séance est levée.


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