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Délibérations du comité sénatorial permanent des
Banques et du commerce

Fascicule 14 - Témoignages pour la séance du matin


HALIFAX, le mercredi 18 mars 1998

Le comité sénatorial permanent des banques et du commerce se réunit aujourd'hui, à 11 heures, pour poursuivre son examen des dispositions sur la régie contenues dans la Loi sur l'Office d'investissement du régime de pensions du Canada (anciennement le projet de loi C-2).

Le sénateur David Tkachuk (vice-président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le vice-président: Conformément à l'ordre de renvoi du Sénat du jeudi 12 février 1998, le comité poursuit son examen des dispositions sur la régie contenues dans la Loi sur l'Office d'investissement du régime de pensions du Canada, anciennement le projet de loi C-2.

Je souhaite la bienvenue devant nous aujourd'hui à notre premier témoin. Il s'agit de M. Peter Van Loon, directeur des placements au ministère des Finances du gouvernement de la Nouvelle-Écosse. M. Van Loon s'est occupé activement du nouveau projet de loi sur le RPC. Je pense qu'il siège également au comité consultatif chargé de soumettre des recommandations à M. Martin relativement au conseil d'administration.

M. Van Loon va nous faire un court exposé. Il va également nous expliquer brièvement ses antécédents. Nous passerons ensuite à la période des questions.

M. Peter Van Loon, directeur des placements, ministère des Finances, gouvernement de la Nouvelle-Écosse: Le président du comité m'a demandé de vous faire un petit résumé de ma carrière dans le domaine des placements. Elle remonte jusqu'en 1963, lorsque les obligations à long terme avaient un rendement de 4,5 p. 100, et depuis c'est les montagnes russes. J'ai passé 14 ans chez Mutual Life of Canada, terminant ma carrière là-bas au poste de trésorier-adjoint. J'ai déménagé à Vancouver en 1977 où j'ai pendant cinq ans dirigé les opérations en matière de pensions de Canada Trust. J'ai ensuite traversé la rue pour y occuper pendant huit ans le poste de gérant des ventes d'actions institutionnelles chez Nesbitt Burns Inc. J'ai ensuite décidé de me replonger dans la gestion de capitaux et je me suis établi en Alberta où j'ai pendant cinq ans travaillé pour le trésor de l'Alberta en tant que gestionnaire d'investissements en obligations.

Il y a un peu plus de trois ans, j'ai accepté le poste de directeur des placements pour les fonds de pension de la Nouvelle-Écosse. Nous gérons à l'heure actuelle 5,5 milliards de dollars au titre des fonds de pension de la Nouvelle-Écosse. Je me ferai un plaisir de répondre à toutes vos questions relativement à nos styles d'investissement au fil de ma présentation.

J'aimerais commencer par vous exprimer, au nom de tous les néo-Écossais, notre reconnaissance pour la possibilité qui nous a été donnée de comparaître devant le comité dans le cadre de son examen de la nouvelle loi sur le régime de pensions du Canada. Il s'agit en effet d'un important projet de loi qui, je pense, est unique parmi les pays du G-7 et peut-être même au monde. La nécessité de nous doter d'une telle loi face aux engagements futurs de régime de pensions du Canada était manifeste depuis quelque temps.

J'ai fait un examen approfondi de la législation. Un certain nombre d'aspects notables m'amènent à conclure que le cadre nécessaire à une mise en oeuvre réussie du projet de loi est en place. Je mentionnerai tout d'abord le modèle de gérance indépendant qui a, je pense, été tiré de l'étude récente de l'Association canadienne des gestionnaires de fonds de retraite, et que vous avez je pense tous reçue. J'endosse pleinement ce genre de structure de gérance. Si la chance est avec nous, nous comptons mettre en oeuvre quelque chose de semblable en Nouvelle-Écosse dans un très proche avenir.

Le deuxième aspect notable est que l'office sera régi par 12 administrateurs dotés de l'indépendance et des compétences requises. Troisièmement, l'office sera assujetti aux mêmes règles en matière d'investissement que celles visant les autres régimes de pension canadiens. Cet élément est des plus importants.

J'aimerais m'attarder maintenant sur le processus de sélection des membres du conseil d'administration. J'ai le privilège de siéger au comité de nomination depuis l'automne dernier, et j'ose espérer que cela ne changera pas. Il s'agit d'un comité permanent. Il ne sera pas dissout une fois élus les membres du premier conseil d'administration.

Le ministère fédéral des Finances nous a donné des instructions quant aux compétences et qualités que devraient avoir les personnes siégeant au conseil d'administration. Tout d'abord, il a souligné la nécessité d'avoir un conseil d'administration compétent, professionnel et indépendant, avec, en son sein, un noyeau d'experts en investissement. Deuxièmement, étant donné qu'il s'agira du tout premier conseil d'administration de l'Office d'investissement du régime de pensions du Canada, la confiance du public à l'égard de ses politiques sera largement influencée par la crédibilité des membres du conseil d'administration. Cela laisse entendre qu'au moins certains d'entre eux devront déjà être connus par les Canadiens et jouir de leur respect. Enfin, troisièmement, le ministère a souligné la nécessité qu'il y ait une représentation régionale au sein du conseil.

Je peux vous assurer que ces lignes directrices ont été suivies de très près. En invitant les membres du comité à soumettre des nominations, nous avons fait appel aux services de l'un des plus gros cabinets d'organisation au Canada, qui nous a fourni une liste de candidats potentiels. On nous a également demandé de soumettre une liste de candidats potentiels de notre province.

Par ailleurs, la province de la Nouvelle-Écosse a nommé deux messieurs qui ont chacun d'excellents antécédents en matière d'investissement. Ils avaient en fait demandé de siéger au conseil.

Le comité a examiné les dossiers de plus de 160 candidats lors de sa première réunion. Au bout d'une demi-journée, nous avions ramené la liste à 35. Nous avons ensuite demandé des biographies plus détaillées de ces 35 personnes et, à l'occasion de la deuxième réunion, nous avons ramené la liste à 20. C'est cette liste qui a été déposée auprès de M. Paul Martin. Je peux vous assurer qu'elle comporte les noms de nombreux Canadiens de renom et de spécialistes en matière de placement qui sont très bien qualifiés.

La seule réserve que j'ai en ce qui concerne la composition du conseil d'administration est qu'ont été déclarés non admissibles les professionnels en matière d'investissement qui sont fonctionnaires au Canada. D'après nos chiffres, près de 20 p. 100 de la population active canadienne travaille dans la fonction publique. J'ai moi-même plusieurs collègues qui sont fonctionnaires mais qui auraient été de bons candidats. L'un d'eux est à l'heure actuelle président de l'Association canadienne des gestionnaires de fonds de retraite. Dans le cadre de discussions que j'ai eues avec certains de mes collègues au ministère des Finances, lorsque je leur ai dit que nous n'aurions aucune voix au sein du conseil d'administration, ils ont répondu en disant «nous sommes des gens nous aussi».

Une autre partie du projet de loi que je n'ai pas aimée est la limite à la propriété étrangère. Il n'y a aucun doute dans mon esprit que la limite des 20 p. 100 est tout à fait dépassée. Les actuels fonds de pension de la province de la Nouvelle-Écosse comptent 19,8 p. 100 de leurs avoirs à l'étranger. À l'avenir, nous comptons augmenter largement cette proportion grâce au recours à des produits dérivés indiciels. Nombre de nos collègues spécialistes de la gestion de fonds de retraite ont déjà fait cela, et je sais que certains affichent jusqu'à 35 p. 100 de biens étrangers, ce grâce à l'utilisation de produits dérivés indiciels.

Je peux vous assurer que si cette augmentation du contenu étranger est faite graduellement cela n'aura pas d'incidence significative sur les marchés financiers canadiens. En fait, l'énorme travail fait au cours des quatre dernières années par les gouvernements fédéral et provinciaux a résulté en une réduction sensible de la dette publique et donc des émissions devant la financer. Les fonds de pension canadiens sont en train de se bousculer pour trouver d'autres moyens d'investir prudemment leur argent.

À la réunion d'avril de l'Association canadienne des gestionnaires de fonds de retraite, l'un des principaux sujets au programme était les possibilités, les défis et l'opportunité offerts par des investissements de rechange. Lorsque je dis «investissements de rechange», j'entends par là des actions canadiennes privées, des contrats à terme d'indice, des obligations de pacotille, et ainsi de suite. J'arrêterai là la liste. J'estime qu'il s'agit d'une question importante car j'ai déjà vécu l'opposition à l'idée d'investir dans des actions privées canadiennes par l'entremise d'une société très compétente à Toronto. Mon comité consultatif en matière d'investissement avait peur de franchir ce pas. Il n'était pas suffisamment à l'aise avec cette idée.

Je suis néanmoins très fier de dire qu'à l'heure actuelle 5 p. 100 de nos avoirs sont investis dans de petites participations canadiennes. Il s'agit de sociétés qui sont maintenant cotées à la bourse.

Nous aimerions investir une partie de notre argent dans des sociétés qui sont allées au-delà de l'étape capital-risque mais qui sont encore trop petites pour émettre des actions cotées à la bourse. Nous pensons qu'il y a pour les fonds de pension canadiens un rôle à jouer en appuyant ce genre d'investissement, et nous allons continuer de nous efforcer d'investir dans ce genre de valeurs.

La dernière question dont j'aimerais discuter aujourd'hui concerne le débat sur la participation active versus la participation passive. Je sais que vous avez déjà entendu des témoignages là-dessus. Je crois fermement dans la gestion active. En effet, il y a de nombreux vendeurs avec de solides dossiers remontant sur plusieurs années d'activité au Canada qui ont fait prové qu'ils peuvent régulièrement battre l'indice. Pour utiliser nos fonds de pension à titre d'exemple, pour l'année se terminant en décembre 1997, nous avions trois gestionnaires qui géraient pour nous de petites valeurs en capital. Il s'agit de conseillers en investissement canadiens. Le pire résultat enregistré a été le seuil repère plus 17 p. 100. Le rendement total de ce gestionnaire a été d'environ 24 p. 100. Le meilleur gestionnaire a ajouté 44 p. 100 au seuil, pour un rendement supérieur à 50 p. 100 pour l'année.

Du côté des gros capitaux, nous avons là aussi trois gestionnaires canadiens. Encore une fois, le pire résultat a été de 2,5 p. 100 au-dessus de l'indice du Toronto Stock Exchange, et le meilleur résultat a été de 15 p. 100 supérieur à cet indice. Voilà des preuves éloquentes. Il y a au Canada de bons gestionnaires et j'ose espérer que le RPC recourra à l'avenir à certains d'entre eux.

En résumé, j'aimerais répéter que la loi sur le RPC est bien conçue pour la situation actuelle relativement au fonds de pension. Les règles destinées à faire en sorte que l'office fonctionne à distance par rapport au gouvernement sont bien en place. La seule fausse note est qu'environ 20 p. 100 de la population active du Canada, principalement des fonctionnaires, n'auront aucun mot à dire dans la gérance du fonds.

Le sénateur Kenny: J'aimerais discuter brièvement de la règle des 20 p. 100. Le comité ici réuni a déjà exprimé un point de vue là-dessus. Que devrions-nous faire à cet égard?

M. Van Loon: Je pense qu'une approche graduelle serait indiquée à l'heure qu'il est. En d'autres termes, 2 p. 100 par an, disons, pendant peut-être cinq ans. Cela nous amènerait à 30 p. 100. Je préférerais pour ma part que les limites soient éliminées, mais je reconnais l'opportunité pratique d'un changement graduel. Cela n'aurait qu'un effet minime sur les marchés financiers au Canada si l'augmentation était de 2 p. 100 par an.

Le sénateur Kenny: Si c'était 2 p. 100 par an, votre premier objectif serait que cela reste en place pendant cinq ans, après quoi vous voudriez réévaluer la situation et décider si vous voulez pousser plus loin; est-ce bien ce que vous dites?

M. Van Loon: Il y a une autre raison pour laquelle je m'oppose à la règle des 20 p. 100. Comme je l'ai dit, nous prévoyons augmenter notre contenu étranger grâce au recours à des instruments dérivés indiciels. Je ne pourrais qu'obtenir le rendement indiciel. Je n'aurais pas de gestionnaire de capitaux qui puisse vraisemblablement battre l'indice. Cela nuirait au rendement du fonds. Nos gestionnaires d'investissements étrangers ont prouvé qu'il y a de nombreuses inefficiences sur les marchés étrangers, tout comme c'est le cas du marché canadien.

Le sénateur Meighen: Vous avez dit que vous ne pensiez pas que le fait de passer à au moins 30 p. 100 aurait un effet significatif sur les marchés financiers. Pensez-vous que cela puisse avoir pour effet de réduire le taux de change du dollar?

M. Van Loon: Je ne pense pas que ce soit là un gros risque. Sur les marchés d'aujourd'hui, avec les mouvements de capitaux, ce serait très faible, relativement à ce qui se passe à l'heure actuelle.

Le sénateur Meighen: Il me semble que ce doit être là l'une des raisons pour lesquelles le ministre des Finances a semblé hésiter. Il dit que la question n'est pas «si» mais «quand». Peut-être qu'il s'inquiète pour le dollar. Je serais quant à moi de votre avis à vous.

M. Van Loon: Je pense que le dollar canadien est aujourd'hui une très belle affaire.

Le sénateur Kenny: Il semble que nous avancions à peu près tous dans la même direction. Personne ne nous dit que nous ne devrions pas augmenter le plafond. Le sénateur Meighen a laissé entendre qu'il pourrait peut-être y avoir une incidence négative sur le dollar. Quels désavantages voyez-vous?

Il y a avec tout changement des compromis à faire. Si le fait de passer à 100 p. 100 ne posait aucun problème, il est évident que c'est 100 p. 100 qui serait proposé. Qu'est-ce qui vous ferait hésiter à bouger rapidement? Quels avertissements auriez-vous à formuler relativement à l'idée de dépasser 30 p. 100 et, de façon générale, quelles préoccupations avez-vous relativement à l'abandon de la règle des 20 p. 100?

M. Van Loon: En ce qui concerne l'idée de passer tout de suite à 30 p. 100, je présume qu'il y aurait d'importants mouvements de capitaux et il est évident que cela aurait une incidence sur le dollar. Tout dépendrait de la rapidité avec laquelle les fonds de pension réagiraient aux changements dans la loi. Je crois pour ma part -- et j'ai une longue expérience des rapports aux comités des fonds de pension -- il faut aux comités un long délai avant qu'ils n'adoptent de nouvelles règles. En ce moment même, certain des meilleurs conseillers en placement au Canada ne recommandent que 15 p. 100 car ils n'ont pas l'expérience nécessaire sur les marchés internationaux.

Le sénateur Kenny: Quel est le message là-dedans?

M. Van Loon: Le message est que si l'on bougeait rapidement, cela aurai une forte incidence sur certains des plus gros fonds, comme le fonds de retraite des enseignants de l'Ontario et nous-mêmes. Nous déciderions peut-être de bouger immédiatement.

Le sénateur Kenny: Devrions-nous créer la nouvelle entité et nous lancer à tâtons ou bien devrions-nous foncer tout de suite?

M. Van Loon: Je recommanderais qu'ils aillent jusqu'à 20 p. 100 tout de suite.

Le sénateur Kenny: Outre l'incidence sur le dollar et l'insécurité de certains gestionnaires à l'office d'investissement, qui repose sans doute sur certains faits, y a-t-il autre chose que vous pourriez dire au comité pour nous éclairer quant aux risques qui seraient courus si l'on allait au-delà de ce seuil?

M. Van Loon: La réaction de Canadiens qui verraient une part importante de leur argent se faire investir ailleurs -- par exemple, notre fonds de pension a des actions en Russie, au Sri Lanka et ainsi de suite -- serait peut-être de se demander pourquoi l'on investit de l'argent dans ces pays. La réponse évidente à leur donner est que la diversification réduit les risques. Ils doivent avaler cette idée.

Le sénateur Kenny: Avez-vous entendu que cela pourrait avoir une incidence sur l'emploi?

M. Van Loon: Non. Comme je vous l'ai déjà dit, nous avons voulu investir dans des actions privées d'entreprises canadiennes qui se situent entre le stade du capital-risque et l'émission initiale d'actions cotées à la bourse. Vous verrez ce genre de choses se multiplier. Cela a été un processus naturel. Personne ne nous a dit qu'il nous fallait le faire; nous pensons tout simplement qu'il existe de bonnes occasions. Lorsque de bonnes occasions se présentent, les fonds de pension devraient les saisir.

[Français]

Le sénateur Hervieux-Payette: Je suis sûre que le sénateur Oliver va vous parler de la composition du conseil d'administration. Je vais lui laisser l'honneur de vous poser la question.

J'ai trois petites questions à vous poser. Dans le cas des placements privés dans les PME, est-ce que le pourcentage du fonds dans ce placement doit être géré par le personnel du fonds, donc à l'interne ou via des firmes qui se spécialisent dans ce domaine?

Est-ce que ce pourcentage doit être fixé par un règlement du gouvernement, c'est-à-dire qu'on autorise, par exemple, la Régie à investir 5 p. 100 dans ce secteur et non pas des sommes supérieures?

En ce qui concerne les marchés étrangers et l'expertise canadienne, je vous donne l'expérience de la Caisse de dépôt et de placement du Québec où l'on envoie des équipes de fonctionnaires de la Caisse de dépôt étudier le marché afin d'effectuer des placements au Viêtnam. Je doute fort qu'on ait des experts à l'intérieur de nos corporations qui connaissent le marché vietnamien. Quelles suggestions nous feriez-vous si l'on augmentait le pourcentage d'investissements à l'étranger, quelle est la méthode la plus sûre et la plus efficace pour effectuer ces placements sans avoir à déplacer à travers le monde entier tout le personnel de la nouvelle régie?

Une suggestion qui nous a été faite par certains témoins était d'avoir trois, quatre, cinq différents fonds afin d'être concurrent à l'intérieur de la Régie lorsqu'on aura des sommes considérables. Je pense bien qu'au tout début, ce ne sera pas nécessaire, mais au moment où l'on atteint les 100 milliards, est-ce que vous verriez d'un bon oeil qu'on ait différentes équipes, qu'il y ait une espèce de concurrence ou une séparation dans le management de la Régie?

[Traduction]

M. Van Loon: J'aimerais être certain d'avoir bien compris les questions. La première était: pensez-vous que le RPC devrait recruter des gestionnaires de l'extérieur pour gérer les placements privés? Est-ce bien cela?

[Français]

Le sénateur Hervieux-Payette: Les placements des petites et moyennes entreprises.

[Traduction]

Les petits capitaux, les placements privés.

M. Van Loon: Je pense qu'un fonds de l'envergure du Régime de pensions du Canada devrait disposer des ressources nécessaires pour faire ce genre de choses lui-même. La caisse de retraite des enseignants de l'Ontario, par exemple, est un bon exemple, mais même ce fonds-là recourt à des spécialistes de l'extérieur. Il s'agit d'un domaine qui commence tout juste à se développer au Canada.

Le sénateur Hervieux-Payette: Comment géreriez-vous l'investissement étranger? Comment faites-vous ces placements partout dans le monde? Envoyez-vous des équipes un peu partout sur la planète?

M. Van Loon: Non. La province de Nouvelle-Écosse ne dispose pas des ressources nécessaires pour faire ce genre de choses. En ce qui concerne les marchés naissants, nous utilisons deux gestionnaires et, dans les deux cas, ils ont des relations avec des personnes établies à Hong Kong, en Amérique du Sud, en Inde, et ainsi de suite, et ils évaluent les possibilités en matière d'investissement sur ces marchés. Ils n'investissent pas, pour notre fonds de pension, dans des placements privés sur les marchés étrangers.

[Français]

Le sénateur Hervieux-Payette: Ma dernière question concerne la séparation du fonds. Lorsque le fonds atteindra 100 milliards, est-ce que vous pensez qu'on devrait séparer le fonds en plusieurs tranches?

[Traduction]

M. Van Loon: Notre fonds n'ayant jamais été aussi gros que cela, il m'est difficile de répondre à cette question, mais je dirais que le régime de pensions du Canada aura vraisemblablement différentes stratégies d'investissement. Vous pourriez avoir une équipe qui gérerait ce que l'on appelle les actions de croissance, une autre qui s'intéresserait au marché des valeurs et encore une autre qui essaierait d'afficher le même rendement que l'indice, ou presque.

Il y a au Canada un certain nombre de gestionnaires de fonds indiciels. L'une des banques est le plus important gestionnaire de fonds indiciels. Elle abordera, mettons, la Nouvelle-Écosse, et nous dira que si nous lui donnons 100 millions de dollars, elle a la stratégie nécessaire pour nous garantir un rendement au moins aussi bon que celui de l'indice 300 du TSE, et peut-être même plus.

Vous pourriez avoir trois différentes équipes ou plus, l'une d'entre elles étant également responsable de gérer les actions américaines. Une fois que le fonds sera devenu aussi gros que cela, il faudra qu'il y ait plusieurs équipes.

[Français]

Le sénateur Hervieux-Payette: Je suppose que vous n'avez pas d'inquiétude qu'un fonds aussi important -- disons 100 milliards de dollars, et que nous investissons 5 pour 100, cela fait 5 milliards de dollars à investir dans des placements privés -- ou qu'un organisme quasi gouvernemental ait la discrétion d'investir en placements privés sans créer aucune distorsion dans le marché canadien? On a souvent un problème au Québec où la Caisse de dépôt investit dans des sociétés semblables. Ils vont mettre un certain montant dans trois compagnies du même secteur et, évidemment, pour le consommateur comme pour le citoyen, on a tendance à accorder moins de crédibilité au fait que l'influence importante de ces investissements peut avoir une répercussion sur la productivité des entreprises.

Je le répète, on a trois compagnies qui sont, par exemple, dans le domaine alimentaire, on met 20 millions dans chacune et on a des administrateurs dans chacune des trois. Cette pratique est peut-être juste au point de vue investissements. Face au consommateur comme face aux investisseurs, qui sont les futurs pensionnés, on pense que cela peut affecter la productivité puisque, de toute façon, chacun obtient sa quote-part de la Caisse. C'est pour cela que je vous posais la question: est-ce que vous croyez que l'on peut confier cette opération d'investissement de presque 5 milliards de dollars dans des petites et moyennes entreprises? Cela ne peut-il pas créer des distorsions dans le marché à travers le Canada?

[Traduction]

M. Van Loon: C'est une question intéressante. Le processus d'investissement adopté par le régime de pensions du Canada ne devrait pas résulter en une situation où les fonds du régime sont investis dans trois compagnies oeuvrant dans le même secteur. Les fonds devraient être investis dans la meilleure entreprise. C'est là l'essentiel.

Le sénateur Hervieux-Payette: Ce n'est pas ainsi que les choses fonctionnent au Québec.

M. Van Loon: Ce doit être très clair dans la structure de gérance du régime qu'il s'agit de décisions d'investissement, qu'il ne s'agit pas de ce que j'appellerais une «subvention du gouvernement».

Le sénateur Kenny: Certains appellent cela «développement régional».

M. Van Loon: Précisément. Je dirais que 5 milliards de dollars c'est une grosse somme d'argent à investir dans une petite entreprise, mais notre économie connaît une très bonne croissance. En l'an 2007, l'économie de ce pays se portera encore mieux. La façon dont le secteur de la technologie, à Ottawa, par exemple, se développe depuis quelques années fait ressortir que le pays a un avenir très prometteur. Il y aura de nombreuses excellentes possibilités d'investissement.

Le vice-président: J'aimerais poser une question au sujet de la répartition des fonds. Quel a été le rendement de votre fonds au cours des dix dernières années?

M. Van Loon: Je pense qu'il était près de 14 p. 100. Je n'ai pas ce chiffre avec moi.

Le vice-président: Quel était-il l'an dernier?

M. Van Loon: Le fonds de pension pour les fonctionnaires pour la période se terminant en décembre 1997 a affiché un rendement de 16,4 p. 100, et pour les trois années précédentes, le taux de rendement annuel avait été de 19 p. 100.

Le vice-président: La plupart des provinces ont leur propre équipe chargée de gérer leur propre fonds de pension. Je sais qu'en Saskatchewan ils ont un comité d'investissement doté d'un conseil qui gère les fonds de pension du gouvernement. Je pense qu'il y a en fait dans cette province un office distinct.

M. Van Loon: C'est exact.

Le vice-président: Eux aussi ont obtenu de bons résultats.

Si quelqu'un vous écrivait un chèque de plusieurs milliards de dollars en vous chargeant de gérer cet argent, cela poserait-il un gros problème à votre boîte?

M. Van Loon: J'ai été autorisé à vous offrir aujourd'hui nos services pour gérer quelque milliards de dollars pour le Régime de pensions du Canada, si cela vous intéresse. Nous pourrions nous en occuper.

Le vice-président: En d'autres termes, les compétences requises existent partout au pays. Il y a des gens qui sont très calés là-dedans et qui obtiennent de très bons rendements.

M. Van Loon: Lorsque je me suis installé à Vancouver en 1977, il y avait un seul conseiller en investissement. Je pense qu'aujourd'hui ils sont au nombre de cinq, et celui qui était là à l'époque gère aujourd'hui des avoirs de plus de 25 milliards de dollars. Il y a à Halifax un conseiller en placement, que vous allez entendre aujourd'hui et qui a plus que triplé les avoirs qu'il gère au cours des trois dernières années. Ce sont des personnes très capables. Partout au pays il y a des gens compétents. Il n'est pas difficile de gérer des fonds à partir de Halifax.

Le vice-président: Nous avons discuté de la possibilité d'avoir des régimes distincts et de celle de répartir les fonds de façon à ce qu'il y ait une certaine concurrence, en plus de servir les besoins des régions partout au pays, car ce fonds va finir par se retrouver ou à Toronto ou à Ottawa.

Le sénateur Oliver: Ma première question concerne les procurations et je suis certain que vous avez vu les règlements. Les règlements, dans leur libellé actuel, n'exigent pas qu'il y ait une politique quant à l'utilisation des procurations. On ne nous dit pas non plus si ces déclarations seront rendues publiques. Nous pensons que ce devrait être le cas. Que pensez-vous des procurations et de la nécessité pour ces déclarations d'être transparentes? CalPERS, par exemple, et d'autres fonds importants, ne voient pas d'inconvénient quant à l'exercice de leurs droits de vote.

Comment exercez-vous vos droits de vote quant aux procurations pour votre fonds de 5 milliards de dollars, et comment devrait faire à cet égard l'Office d'investissement du régime de pensions du Canada?

M. Van Loon: Je suis tout à fait au courant de la politique de CalPERS. En Nouvelle-Écosse, nous déléguons la tâche relativement aux procurations à notre gestionnaire de placement externe.

Le sénateur Oliver: Leur donnez-vous carte blanche -- tout cela relève-t-il entièrement de leur pouvoir discrétionnaire?

M. Van Loon: Oui. Cependant, nous contrôlons cela lorsqu'il s'agit de sujets controversés. Il est évident que toute question controversée va faire la manchette.

Le sénateur Oliver: Votre instruction est-elle en fait qu'ils utilisent les procurations?

M. Van Loon: Oui.

Dans le cas du Régime de pensions du Canada, je recommanderais fortement que votre personnel compte des membres chargés de contrôler les procurations et que vous les utilisiez vous-mêmes car il s'agit d'une fonction très importante sur le plan gérance, et aujourd'hui, la gérance est une question très chaude.

Le sénateur Oliver: Vous avez laissé cela aux soins de vos gestionnaires. Pourquoi auriez-vous une politique qui est le contraire de ce que vous recommandez pour l'office fédéral?

M. Van Loon: L'élément déterminant est que nous ne disposons pas des ressources nécessaires pour embaucher quelqu'un pour ce genre de travail. Comme je l'ai dit, nous suivons d'extrêmement près les questions controversées. L'Association canadienne des gestionnaires de fonds de retraite nous envoie presque chaque jour une liste des procurations qui seront exercées, et elle envoie un avertissement si elle a le sentiment que la question est controversée que nous devrions nous y pencher. Même si nous déléguons cette responsabilité, nous en contrôlons l'exécution par l'intermédiaire de l'Association canadienne des gestionnaires de fonds de retraite.

Le sénateur Oliver: Vous avez répondu à la première partie de ma question en disant que vous pensez que ces droits devraient être exercés et ce, activement. Qu'en est-il de la deuxième partie de ma question quant à leur déclaration publique afin qu'il y ait davantage de transparence?

M. Van Loon: Si vous vous trouviez confronté à une situation controversée relativement à l'exercice de droits de vote par procuration, vous en parleriez vraisemblablement publiquement. Chaque fois que la caisse de retraite des enseignants de l'Ontario est mêlée avec une question controversée relativement à des sociétés, toute l'affaire est rendue publique. Dans cette situation-ci, tout pourrait être rendu public, et ce ne serait pas un problème.

Le sénateur Oliver: Vous nous avez parlé de votre rendement. Dans les règlements proposés pour l'Office d'investissement du régime de pensions du Canada, il est mention de l'exigence d'investir dans des titres provinciaux. En tant que fonds provincial, êtes-vous tenus d'acheter des titres néo-écossais? Est-ce là l'une des conditions préalables pour le fonds?

M. Van Loon: Non.

Le sénateur Oliver: Si ce n'est pas une condition préalable en Nouvelle-Écosse, pourquoi devrait-on exiger que le fonds fédéral achète des valeurs provinciales assorties de faibles taux de rendement?

M. Van Loon: La quantité de produits disponibles est en train de diminuer, comme vous le savez, mais le rendement sur l'investissement est plus élevé que pour les titres du gouvernement du Canada. Il y a un écart.

Le sénateur Kenny: D'autre part, ces placements sont plus sûrs.

M. Van Loon: Je n'irais pas jusque-là. Nous avons misé lourdement sur les titres provinciaux et cela a été payant puisque nous avons affiché des taux de rendement nettement supérieurs. Cela est dû au fait que, comme vous le savez, au cours des cinq dernières années, les écarts provinciaux ont de beaucoup rétréci, ce qui nous a valu un bon rendement.

Le sénateur Oliver: Hier, à Ottawa, l'un des témoins était un professeur de la Colombie-Britannique et un autre représentait l'Institut C.D. Howe. L'un d'eux a dit que lorsque les Canadiens se pencheront sur la sécurité du nouveau fonds, qui atteindra rapidement les 100 milliards de dollars, ils évalueront sa fiabilité en passant en revue le conseil d'administration et son rendement.

S'il y a une quelconque ingérence gouvernementale ou l'apparence d'ingérence gouvernementale dans la nomination des membres du conseil d'administration ou dans les directives en matière d'investissement données au conseil -- s'il devrait y avoir des investissements régionaux, des investissements non seulement dans des titres provinciaux mais également dans des entreprises provinciales, et ainsi de suite -- pensez-vous que cela amènera la fiabilité et la sécurité qu'aimeraient voir la plupart des Canadiens?

Que recommanderiez-vous au comité de faire pour veiller à ce qu'il n'y ait aucune perception d'ingérence politique ou gouvernementale dans l'administration du fonds?

M. Van Loon: D'après mon interprétation, le texte du projet de loi stipule très clairement que le fonds ne doit pas être exploité et qu'il doit être administré à distance. Si vous adoptez une bonne structure de gérance et si le fonds est administré conformément aux mêmes règles que celles qui s'appliquent aux autres fonds de pension canadiens, vous n'aurez pas ce problème. Si quelqu'un devait m'aborder et me dire qu'il me faut investir dans une certaine entreprise dans cette province et si cette suggestion ne me paraissait pas du tout bonne, alors je préférerais démissionner plutôt que de faire un tel investissement. L'Institute of Chartered Financial Analysts a un code déontologique qui nous interdit de faire quoi que ce soit du genre. Je m'attendrais à ce que les experts en matière d'investissement que vous recruterez pour gérer le fonds de pensions du Canada soient assujettis au même genre de code de conduite. En d'autres termes ils n'accepteraient pas et ne pourraient pas accepter d'ingérence politique.

Le sénateur Oliver: Je me souviens que vous avez par deux fois dans votre exposé, lorsque vous parliez de la composition du conseil d'administration et de la compétence de ses membres, utilisé l'expression «experts en matière d'investissement». Plusieurs témoins, y compris des cadres supérieurs au ministère du Travail, ont laissé entendre que la dernière chose que nous voudrions c'est avoir un conseil d'administration composé uniquement d' «experts en investissement», comme vous les appelez.

Quels antécédents devraient avoir les membres du conseil d'administration idéal de l'Office d'investissement du régime de pensions du Canada?

M. Van Loon: Il est certain que la fonction vérification du conseil d'administration est très importante, et il faudrait par conséquent que le conseil d'administration compte une ou deux personnes qui aient de solides antécédents en comptabilité et en vérification. Je pense par ailleurs que vous voudriez avoir une personne qui ait dirigé une grosse organisation, et celle-ci devrait vraisemblablement être nommée président ou présidente du conseil d'administration. Il n'est nul besoin que lui ou elle soit un expert en investissement. Ce sont deux domaines dans lesquels je pense qu'il y a de la place pour au moins six professionnels avec des antécédents dans des domaines autres que celui de l'investissement.

Le sénateur Oliver: Le conseil d'administration devrait-il comporter un représentant d'un important syndicat afin de veiller à ce que soit respecté le concept selon lequel l'investissement doit produire des emplois et réduire le chômage?

M. Van Loon: C'est une question chargée. Encore une fois, je reviens à l'idée que ce fonds de pension sera géré comme tout autre fonds de pension. Les investissements seront choisis strictement sur la base de leur mérite financier.

Le sénateur Callbeck: Vous êtes membre du comité de nomination?

M. Van Loon: C'est exact.

Le sénateur Callbeck: J'imagine que vous approuvez le processus qui a été suivi dans le choix des administrateurs, sauf que vous aimeriez voir y participer des fonctionnaires. C'est bien cela, n'est-ce pas?

M. Van Loon: Vous devriez avoir au moins un fonctionnaire.

Le sénateur Callbeck: Vous avez mentionné que vous avez déposé une liste de 20 noms.

M. Van Loon: Non, deux noms pour la province de Nouvelle-Écosse.

Le sénateur Callbeck: Je pensais que vous aviez dit 20.

M. Van Loon: Oui, nous avons déposé une liste de 20 noms auprès du ministre.

Le sénateur Callbeck: Quels critères a utilisé le comité de nomination dans sa préparation de cette liste de 20 noms? Vous venez tout juste de mentionner la comptabilité et la vérification ainsi que le PDG d'une grosse société. Avez-vous songé à la représentation régionale; avez-vous songé à une participation féminine? Avez-vous songé à des représentants du mouvement syndical? Quels étaient les critères?

M. Van Loon: Nous avons reçu de nombreuses nominations de différentes provinces. Nous avons reçu des nominations de candidates. Je peux vous assurer que la liste des 20 compte les noms de plusieurs femmes qui ont eu une carrière très distinguée, qui ont servi au conseil d'administration d'autres fonds de pension. On y trouve également les noms d'administrateurs retraités qui ont de très solides antécédents en matière de gestion. Que je sache, il n'y a pas de représentant du mouvement syndical.

Je soulignerais que lorsqu'ils ont annoncé la création du comité de nomination et qu'ils ont invité des gens à se porter volontaires, ils leur ont expliqué comment faire. En fait, en Nouvelle-Écosse, deux personnes ont donné leur nom et nous les avons transmis car il s'agissait de personnes distinguées.

Le sénateur Callbeck: Avez-vous songé aux minorités?

M. Van Loon: Je ne connais pas toutes les personnes alors je ne peux pas répondre à cette question.

Le sénateur Callbeck: Je pensais que le comité s'était réuni et avait déposé les 20 noms. N'est-ce pas ainsi que cela a fonctionné?

M. Van Loon: Nous nous sommes réunis à Vancouver en novembre. C'est à ce moment-là que nous nous sommes penchés sur la liste de 160 noms. Nous devions nous revoir en décembre à Winnipeg. Le mauvais temps dans les Maritimes nous a empêchés de nous déplacer alors nous avons participé par téléphone.

Le sénateur Callbeck: Le comité de nomination va-t-il continuer d'exister?

M. Van Loon: Oui.

Le sénateur Callbeck: Est-ce afin de pouvoir nommer des personnes aux postes qui pourraient devenir vacants au sein du conseil d'administration?

M. Van Loon: Les 12 personnes qui ont été nommées au conseil d'administration auront des mandats échelonnés, comme vous le savez, et les noms des huit personnes qui n'ont pas été nommées resteront sur une liste devant servir à combler les postes vacants, s'il y en a. Par conséquent, on pourra les pressentir. Si la liste devait passer en dessous de huit, alors le comité de nomination tiendrait sans doute une conférence téléphonique et se pencherait sur d'autres possibilités, afin que nous ayons toujours en réserve huit personnes qui seraient prêtes à siéger au conseil.

Le sénateur Callbeck: Pensez-vous que le mandat du conseil d'administration devrait être de trois ans ou de cinq ans, ou bien recommandez-vous autre chose là-dessus?

M. Van Loon: Ma recommandation serait trois ans. Je sais qu'au départ ce sera échelonné dans le temps, mais les personnes nommées pour un an pourront demander un renouvellement de deux ans. La continuité au sein du conseil d'administration est une chose très importante.

Le sénateur Callbeck: Vous avez parlé brièvement du style de votre régime de pension. Vous avez mentionné que vous avez trois gestionnaires et vous savez manifestement comment les choisir. Quelles instructions ou directives donnez-vous à vos gestionnaires? La priorité, bien sûr, serait de réaliser un bon taux de rendement. Y a-t-il certains secteurs dans lesquels vous ne voudriez pas qu'ils investissent, ou bien est-ce que le champ est grand ouvert?

M. Van Loon: Dans le cas des gestionnaires canadiens de gros capitaux, nous leur disons que leur but doit être de battre d'une bonne marge, sur une période de quatre ans, l'indice de la bourse de Toronto, et nous comparons leur rendement avec celui de leurs pairs.

Quant à d'autres directives, nous ne leur permettons pas de jouer sur le marché à terme, ni de faire des opérations à découvert. Nous limitons le pourcentage d'actions d'une seule et même société qu'ils peuvent posséder.

Le sénateur Callbeck: Quel est ce pourcentage?

M. Van Loon: La limite est de 5 p. 100.

Le sénateur Callbeck: Ma dernière question concerne la reddition de comptes. Vous savez que le projet de loi et que les règlements traitent de certaines déclarations, de réunions publiques, de rapports annuels, et cetera. Êtes-vous à l'aise avec ce qui est prévu dans la loi et dans les règlements en matière de reddition de comptes?

M. Van Loon: Cela ressemble à ce qui est prévu pour la caisse de retraite des enseignants de l'Ontario, qui est un modèle auquel tout le monde devrait aspirer. Les gestionnaires de ce fonds produisent un rapport annuel très bien détaillé. Vous pourriez recommander qu'ils produisent ce genre de rapport.

Le sénateur Meighen: Si je ne m'abuse, vous êtes le premier témoin que j'aie entendu dire que trois années, c'est assez long. La plupart sinon tous les témoins ont dit qu'ils pensent qu'un tel mandat est trop court. Il faut certainement du temps pour apprendre à connaître un quelconque secteur ou une quelconque entreprise, et une période de trois ans n'est-ce pas ce qu'il faut pour se mettre à la page?

M. Van Loon: J'imagine que la plupart des personnes qui seront nommées au conseil d'administration seront déjà à la page en ce qui concerne les fonds de pension, les lois en matière de pensions et le jargon du monde des investissements. Mon comité des investissements est tout à fait à la page, mais il lui a fallu un certain temps pour y parvenir. Cependant, maintenant que nous avons ces gens-là, nous ne voulons pas les perdre.

Le sénateur Meighen: Combien de temps leur a-t-il fallu pour se mettre à la page?

M. Van Loon: Environ un an.

Le sénateur Meighen: Et pendant combien de temps les garderez-vous?

M. Van Loon: Nous revoyons sans cesse cela.

Le sénateur Meighen: N'y a-t-il aucune exigence législative?

M. Van Loon: Non, il n'y rien à ce sujet dans la loi.

Le sénateur Meighen: Rendez-vous des comptes à l'assemblée législative?

M. Van Loon: Je rends des comptes au directeur exécutif des investissements, qui, lui, relève du sous-ministre, qui, lui-même, relève du ministre des Finances.

Le sénateur Meighen: Un rapport annuel est-il déposé auprès de l'assemblée législative?

M. Van Loon: Oui. Il n'est pas aussi gros que le rapport sur le fonds des enseignants de l'Ontario. Il est très petit.

Le sénateur Meighen: Auriez-vous des recommandations à nous faire relativement au mécanisme de rapport pour le Régime de pensions du Canada et au rôle du vérificateur général? Êtes-vous satisfait des dispositions dans leur libellé actuel?

M. Van Loon: Nos opérations sont vérifiées non seulement par le vérificateur général mais également par le ministère des Finances, qui a un vérificateur externe. Vous devriez avoir les deux. Le vérificateur général devrait être là. Même si l'office doit fonctionner à distance, il n'en demeure pas moins qu'il s'agit très clairement d'une responsabilité du gouvernement du Canada et du ministère des Finances.

Le sénateur Meighen: Le comité de nomination a-t-il éprouvé une quelconque difficulté à trouver des personnes compétentes et chevronnées qui n'aient pas de conflit d'intérêt?

M. Van Loon: Oui. Nous avons eu quelques difficultés, mais le texte de loi dit très clairement qu'il pourrait y avoir des conflits d'intérêt potentiels dans le cas de certains membres du conseil d'administration et que, si c'est le cas, ces personnes devraient se retirer des processus pour lesquels il pourrait y avoir problème et ne pas participer au vote.

Lors de notre première réunion, le président du comité de nomination a élargi les règles en matière de conflits d'intérêt à un point tel qu'il n'y avait plus aucun expert en investissement sur la liste. Grâce au ministre dont je relève, M. Gillis, et au ministre de l'Ontario, qui a communiqué certaines préoccupations à Paul Martin, nous avons maintenant une liste de candidats qui est à mon sens parfaitement acceptable. Le risque de conflits d'intérêt était source de préoccupations. Il y aura sans aucun doute une ou deux situations qui mettront en cause un certain nombre de membres du conseil d'administration.

Le sénateur Meighen: J'aimerais revenir sur la question du comité consultatif et de la nomination de remplaçants en cas de vacances. Avez-vous dit que votre comité de nomination va continuer d'exister?

M. Van Loon: Oui.

Le sénateur Meighen: Je ne pense pas que ce soit une exigence de la loi, ou bien est-ce que je me trompe?

Le vice-président: Ce n'est pas une exigence.

Le sénateur Meighen: Vous souvenez-vous d'avoir entendu un représentant du ministre dire que l'intention était de conserver ce comité de nomination?

M. Van Loon: Oui.

Le sénateur Meighen: Si vous mettez maintenant votre chapeau de citoyen, préféreriez-vous que ce soit une exigence qu'il y ait un comité de nomination composé de représentants provinciaux?

M. Van Loon: Oui, certainement.

Le sénateur Meighen: Toujours en votre qualité de citoyen de la province, pensez-vous qu'il devrait y avoir un droit de véto des provinces à l'égard des nominations, ou bien cela vous satisfait-il que le ministre puisse choisir parmi les noms sur la liste?

M. Van Loon: Ce n'est pas dans la loi, mais je sais que le ministre Martin va consulter les autres ministres des Finances avant la création du conseil d'administration.

Le sénateur Meighen: Vous faites, tout comme nous, entièrement confiance au ministre Martin, et nous avons d'ailleurs exprimé cette confiance qui nous habite au Sénat. Cependant, heureusement pour le ministre Martin, il ne sera pas toujours ministre des Finances et il ne sera peut-être même pas toujours un homme public, et qui sait qui le remplacera. Si nous nous retrouvions avec un autre ministre des Finances qui n'avait pas la sagesse de suivre l'exemple du péché originel commis par le ministre Martin et qui ne consultait pas autant que lui, nous vivrions peut-être une situation plus difficile, n'est-ce pas?

M. Van Loon: C'est exact.

Le sénateur Meighen: Conviendriez-vous avec moi qu'il serait bon d'avoir cela par écrit?

M. Van Loon: Oui.

Le sénateur Meighen: Revenons maintenant au régime de la Nouvelle-Écosse. Y a-t-il un débat à l'assemblée législative sur le rapport de votre fonds de pension?

M. Van Loon: Pas que je sache.

Le sénateur Meighen: Comme vous le savez, le ministre a eu la gentillesse de déposer les règlements afin que nous puissions avoir notre mot à dire. En temps normal, le Parlement ne s'occupe des règlements que bien après leur entrée en vigueur. Certains d'entre nous avons été préoccupés à cause du désir général de veiller à ce que tout ceci soit libre de toute ingérence politique, avec un «p» minuscule, et nous pensons qu'il serait peut-être bon que les règlements soient soumis pour examen à un groupe comme par exemple le comité sénatorial permanent des banques et du commerce avant leur entrée en vigueur. Voyez-vous un mérite à cela?

M. Van Loon: J'ai les règlements. Ils sont plus stricts que ceux qui s'appliquent à d'autres fonds de pension canadiens, alors j'en suis très satisfait.

Le sénateur Meighen: Ma question concernait les règlements subséquents que nous verrons peut-être de temps à autre.

M. Van Loon: Oui, ils seraient examinés.

Le sénateur Meighen: Il n'y a aucune exigence -- ce qui serait, j'en conviens, une pratique inhabituelle -- qu'ils soient examinés avant leur entrée en vigueur.

M. Van Loon: Oui, ce serait inhabituel.

Le sénateur Meighen: Pensez-vous que ce soit judicieux ou nécessaire?

M. Van Loon: Je ne pense pas que ce soit nécessaire, car je les ai vus.

Le sénateur Meighen: Je songe aux règlements futurs. Cette fois-ci, on nous a donné la possibilité de proposer des améliorations. Par la suite, nous n'aurons plus cette possibilité.

M. Van Loon: Je dirais qu'il faudrait qu'ils soient portés à l'attention au moins du comité des banques. Je pense que tout règlement futur aura sans doute pour effet d'imposer davantage de restrictions et de rendre les choses plus difficiles plutôt que plus faciles pour les gestionnaires de fonds de pension.

Le sénateur Meighen: Enfin, monsieur Van Loon, vous autres en Nouvelle-Écosse -- et vous pouvez sans doute vous en attribuer en grande partie le mérite -- avez affiché d'excellents rendements. Je pense que le gouvernement prévoit un taux de rendement réel de 3,8 p. 100. Nous savons que vous pourriez, du jour au lendemain, trouver un investissement qui vous rapporterait 4,25 p. 100. Un rendement de 3,8 p. 100 est-ce un taux de rendement réaliste? À votre avis, leurs projections sont-elles faibles ou bien est-ce qu'il s'agit là d'un objectif plus réaliste étant donné qu'il y a peu de chances que nous jouissions des mêmes taux que ceux que nous connaissons depuis plusieurs années?

M. Van Loon: En ce qui concerne l'avenir, je prie pour que nous ayons des taux de rendement à un seul chiffre en 1998 car les choses vont si bien depuis si longtemps. J'estime qu'un rendement de 3,8 p. 100 est tout à fait acceptable dans la situation qui s'annonce à partir de maintenant. Nous nous attendons à un taux de rendement réel de 4,5 p. 100. C'est ce qui est utilisé dans nos calculs.

Le sénateur Meighen: Voulez-vous dire que ce pourrait être inférieur même à 3,8 p. 100?

M. Van Loon: Oui, ce le pourrait. Nous avons vécu des périodes, par exemple de 1975 à 1985, où c'était la dévastation totale pour les gestionnaires d'investissements.

Le sénateur Meighen: Pour résumer mon interprétation de ce que vous avez dit tout à l'heure, êtes-vous d'avis qu'avec une gestion compétente vous devriez être en mesure de dépasser de façon régulière les indices?

M. Van Loon: C'est exact. L'un des facteurs les plus importants est la dotation de cet Office d'investissement du régime de pensions. Je peux vous dire que vous aurez vraiment du mal à recruter des experts en investissement par les temps qui courent parce que les marchés très dynamiques que nous avons connus au cours des cinq dernières années ont eu une incidence sur les salaires des experts en placement au Canada. Les chiffres vous surprendraient beaucoup. Le rapport sur le fonds des enseignants de l'Ontario donne les niveaux de rémunération des cadres supérieurs. Il vous faut accepter le fait qu'il vous faudra payer des sommes du genre pour obtenir les personnes du calibre qu'il vous faut.

Le sénateur Meighen: Le gouvernement de Nouvelle-Écosse a-t-il entrepris de faire une étude d'impact en ce qui concerne la Loi sur le régime de pensions du Canada?

M. Van Loon: Non.

Le sénateur Meighen: Était-ce faute de ressources?

M. Van Loon: Oui.

Le sénateur Moore: J'aimerais enchaîner sur les questions du sénateur Meighen relativement au taux de rendement réel projeté de 3,8 p. 100. Je suis confus. Je pensais vous avoir entendu dire que vous avez affiché pour l'année écoulée un taux de rendement de 16 p. 100. N'est-ce pas le cas?

M. Van Loon: Si. Je parlais de l'hypothèse actuarielle selon laquelle notre régime de pension affichera un taux de rendement réel de 4,5 p. 100 pour couvrir ses engagements. Ce que dit le gouvernement du Canada est qu'il nous faut obtenir un taux de rendement réel de 3,8 p. 100.

Le sénateur Meighen: Le gouvernement du Canada?

M. Van Loon: Oui.

Le sénateur Moore: J'aimerais être certain de bien comprendre. Ce dont nous parlons donc ici c'est du taux de rendement que vous devez réaliser, moins les obligations envers les retraités et qui seront retirées du fonds chaque année. Vous voulez un taux de rendement réel net de 4,5 p. 100, moins l'inflation, une fois vos obligations rencontrées, c'est bien cela?

M. Van Loon: C'est exact.

Le sénateur Moore: Vous avez mentionné que vous avez trois gestionnaires de fonds externes?

M. Van Loon: Nous avons 17 gestionnaires de fonds externes qui gèrent des placements pour nos fonds. Ils se trouvent au Canada, à Portland, dans l'Oregon, à Charlotte, en Caroline du Nord, à San Francisco, et à Londres, en Angleterre. Nous avons des gestionnaires partout dans le monde.

Le sénateur Moore: Y en a-t-il qui sont établis en Nouvelle-Écosse?

M. Van Loon: Oui.

Le sénateur Moore: Combien parmi les 17?

M. Van Loon: Un. Il y a un seul conseiller en placement en Nouvelle-Écosse. Soit dit en passant, ils n'ont pas obtenu d'argent à gérer pour le compte de la Nouvelle-Écosse parce qu'ils étaient néo-Écossais, ils l'ont obtenu parce qu'ils avaient un bon dossier de rendement et des capacités éprouvées. La raison pour laquelle ils ont connu une si forte croissance au cours des dernières années est qu'ils ont enfin pu obtenir des consultants en Ontario auxquels ils peuvent faire appel pour les recherches lorsque des fonds de pension de l'Ontario sont en quête d'experts financiers.

Le sénateur Moore: Cela rejoint la question posée par le président au sujet de la répartition des ressources dans le pays. Votre conseil d'administration prévoit-il qu'il y aura des gestionnaires dans différents endroits du pays? Je ne voudrais pas que le tout se retrouve à Toronto ou à Ottawa.

M. Van Loon: Il serait très difficile d'être compétitif à Toronto avec les niveaux de rémunération qui y sont offerts.

Le sénateur Moore: J'ai été intéressé par les réponses que vous avez données au sénateur Callbeck relativement aux candidats dont les noms ont été proposés. Y a-t-il eu un effort concerté ou une politique visant à soumettre des noms de candidates ainsi que de candidats et de membres de minorités visibles?

M. Van Loon: Je sais qu'il y a eu un effort concerté visant à proposer autant de noms de femmes que possible. Je ne sais pas ce qui s'est passé en ce qui concerne les minorités. Je ne connais pas tous les candidats.

Le sénateur Moore: Ce serait intervenu une fois les noms des candidats proposés. Ma question vise à savoir si le comité de nomination a ou non discuté de la question d'essayer de trouver des Canadiens membres de minorités visibles et qui possèdent les compétences voulues.

M. Van Loon: Il n'y a eu aucune discussion à ce sujet.

Le sénateur Moore: Cela m'a intéressé de constater que votre comité de nomination durera pour toujours. Quel est le mandat des différents membres du comité de nomination, comme par exemple vous-même?

M. Van Loon: On ne nous a pas donné de mandat. Encore une fois, ce n'est pas par écrit. Je voudrais peut-être passer le flambeau à quelqu'un d'autre, mais ce n'est pas une tâche écrasante en ce sens que nous ne nous rencontrerons sans doute qu'une fois par an, et peut-être même par téléphone.

Le sénateur Moore: Êtes-vous là en tant que représentant de la Nouvelle-Écosse pour aussi longtemps qu'il plaira au ministre fédéral des Finances?

M. Van Loon: Non. J'ai été nommé par M. Gillis, l'actuel ministre des Finances de ma province.

Le sénateur Kenny: J'aimerais souligner la question soulevée par le sénateur Meighen relativement à l'examen des règlements. Il s'agit là d'une question sur laquelle le comité devrait se pencher, et c'est une chose qui m'intéresse beaucoup.

J'aimerais revenir sur la question -- et cela a tendance à devenir un petit peu politique -- de savoir où devraient se trouver les gestionnaires de placement. Serait-il juste de supposer qu'au moins une personne arguerait que ce devrait être à Toronto. Si j'ai bien compris, votre position est que le seul critère devrait être la compétence. C'est bien cela, n'est-ce pas?

M. Van Loon: Oui, c'est le seul critère.

Le sénateur Kenny: La répartition géographique ne devrait avoir aucune pertinence?

M. Van Loon: C'est exact. Comme je l'ai dit, Halifax est un merveilleux endroit où vivre et il devient de plus en plus facile pour nous d'attirer des gens qui habitent à l'ouest d'ici.

Le sénateur Kenny: Avez-vous subi beaucoup de remontrances politiques à ce sujet? Lorsque vous mentionnez qu'il y a quelqu'un à Portland, dans l'Oregon, cela ennuie-t-il les gens ou bien est-ce accepté? Votre argument voulant que ce soit la compétence qui compte est-il accepté?

M. Van Loon: Parfaitement.

Le sénateur Kenny: C'est tout ce qu'il y a et il n'y a pas de réaction d'un côté ou de l'autre?

M. Van Loon: Pas du tout.

Le sénateur Kenny: Par conséquent, si vous défendez votre choix sur la base de la compétence, cela n'est pas une cible politique. Nous choisirons les gestionnaires où qu'ils se trouvent, et nous choisirons les meilleurs. Est-ce bien cela?

M. Van Loon: C'est exact.

Le sénateur Kenny: Ma dernière question a à voir avec les procurations et, si je vous ai bien compris, vous recommandez l'exercice de ces droits seulement si sont bien en place les mécanismes de gouvernance appropriés. Existe-t-il des situations où vous entreverriez une plus grande intervention?

M. Van Loon: Dans le cas de la prise de contrôle de Scott Paper Canada, l'un de nos gestionnaires est venu me voir et m'a dit qu'il pensait que l'offre pour Scott Paper était beaucoup trop basse. Il a dit que nous devrions voter contre et que tout ce qu'il nous faudrait ce serait qu'un fonds mutuel aux États-Unis se range de notre côté et nous pourrions alors bloquer la mainmise. En fin de compte, le fonds mutuel ne nous a pas appuyés et la prise de contrôle de Scott Paper a eu lieu en dépit du fait que nous ayons voté contre.

Le fonds de retraite des enseignants de l'Ontario est une autre situation que vous devriez suivre de très près, et vous devriez poser cette question aux responsables si vous en avez l'occasion.

Le sénateur Kenny: Nous avons abordé certaines de ces questions dans notre examen de la gérance. J'aimerais que vous éclairiez le comité sur l'intervention que ces grosses masses d'argent devraient avoir quant à l'administration des entreprises dans lesquelles elles investissent, outre veiller à ce que les meilleures pratiques soient suivies dans la façon dont elles sont structurées, à ce qu'elles soient dotées de conseils d'administration de la taille appropriée et à ce qu'elles aient une division entre les présidents et les PDG, en supposant que vous pensez qu'il s'agit là d'une bonne pratique. À votre avis, jusqu'où devrions-nous intervenir dans l'administration des entreprises? Est-ce sain qu'un actionnaire et que ceux qui interviennent en son nom -- dans ce cas-ci, nous savons de qui nous parlons -- participent activement aux décisions d'affaires concrètes, ou bien ceux-ci devraient-ils tout simplement veiller à ce que les structures en place soient les bonnes, et advienne que pourra?

M. Van Loon: L'on devrait s'attendre à ce que les gestionnaires du Régime de pensions du Canada suivent de très près les compagnies et veuillent que celles-ci aient les meilleures pratiques d'affaires possibles. Ils devraient intervenir. C'est leur travail.

Le sénateur Kenny: Lorsque vous dites «les meilleures pratiques d'affaires» cela suppose que soient en place les structures appropriées. Dans le cas de la mainmise dont vous avez parlé, votre analyste vous a dit qu'il y avait eu mauvais jugement et que quelqu'un n'avait pas vu que l'entreprise valait plus. Ce n'était pas une question de mauvaises pratiques, c'était une question de mauvais jugement, si je peux faire la distinction entre les deux. Ces personnes devraient-elles intervenir dans les questions de jugement en matière de gestion?

M. Van Loon: En ce qui concerne des cas isolés, il me faudrait répondre par oui. De temps à autre, vous constatez des problèmes manifestes de mauvaise gestion d'entreprise et, si vous en êtes un important actionnaire, vous avez pour responsabilité d'exprimer vos préoccupations et de veiller à ce que l'entreprise s'attaque à ces problèmes. C'est incontournable.

Le sénateur Kenny: Quels genres de problèmes sont créés lorsque vous avez dans le cas de telles entreprises d'importants capitaux qui interviennent?

M. Van Loon: J'ignore si de nombreux problèmes ont été créés à cet égard jusqu'ici, mais je n'ai rien à voir avec la caisse de retraite des enseignants de l'Ontario ni avec la Caisse de dépôt.

Le sénateur Kenny: Mais vous voyez ce qui se passe.

M. Van Loon: Oui. Dans certains cas, j'ai l'impression qu'il est tout à fait justifié qu'ils interviennent.

Le vice-président: Vous avez mentionné que les gens peuvent se porter candidat pour des postes à l'office. Y a-t-il eu des annonces dans les quotidiens du pays?

M. Van Loon: J'ignore s'il y a eu des annonces dans les quotidiens, mais je sais qu'il en a été question dans un communiqué de presse diffusé par le ministère des Finances. J'ai téléphoné à quelqu'un à Toronto qui est à la retraite et qui devait, selon moi, se porter candidat. Je lui ai dit où déposer sa candidature, mais il ne l'a pas fait. J'avais l'adresse.

Le vice-président: N'y a-t-il pas eu un effort à grande échelle?

M. Van Loon: Je dirais que non. Que je sache, il n'y a eu qu'un communiqué de presse, mais je peux me tromper.

Le vice-président: Le sénateur Callbeck a soulevé une question qui, je le sais, préoccupe nombre des membres du comité. C'est la question de l'équilibre au sein du conseil d'administration. Combien de femmes étaient sur la liste que vous avez déposée auprès du ministre des Finances?

M. Van Loon: Je n'ai pas de réponse à cette question. S'il me fallait deviner, je dirais qu'il y en avait sept ou huit.

Le vice-président: Sept ou huit sur 20. C'est bien cela?

M. Van Loon: Oui. Comme je le disais, je peux me tromper. Il me faudrait retourner dans mon bureau et vérifier.

Le vice-président: Si le ministre des Finances vous disait qu'il voulait un représentant syndical, mettons, quelqu'un de la Fédération du travail du Canada, quelle serait votre réaction?

M. Van Loon: J'apprécierais qu'il nous soumette ces noms avant de faire une quelconque annonce. Il lui incomberait d'au moins consulter le comité de nomination et de nous demander d'examiner certaines candidatures. J'aimerais bien avoir la possibilité de le faire. Je m'attendrais à ce qu'il le fasse, et cela ne m'ennuierait aucunement.

Le vice-président: Je souhaite maintenant la bienvenue à M. Don Cayo, président de l'Atlantic Institute for Market Studies.

M. Don Cayo, président, Atlantic Institute for Market Studies: Monsieur le président, le Régime de pensions du Canada a été une bonne affaire pour certains Canadiens, pour ceux qui ont pris leur retraite ou qui sont sur le point de le faire, et qui vont toucher des pensions nettement supérieures à ce à quoi ils pouvaient s'attendre, sur la base de leurs cotisations, étant donné le rendement passé du fonds. Cependant, ce n'aura pas été un bon investissement pour les Canadiens dans leur ensemble. L'aspect contribution progressive au régime s'est avéré, a posteriori, être un fardeau immense pour les travailleurs qui ont récemment intégré ou qui intégreront sous peu le marché du travail.

J'applaudis à certains des changements qui sont envisagés à l'heure actuelle, mais je ne pense pas qu'ils aillent suffisamment loin. Pour citer un extrait d'un mémoire que je vous ai fait distribuer, un mémoire de mon collègue, Fred McMahon, et que j'ai déposé auprès du comité des finances de la Chambre des communes, mémoire portant sur les changements au régime de pensions, nous croyons que ceux-ci «aggravent tout simplement une situation qui est déjà mauvaise». Il s'agira maintenant d'utiliser la possibilité qui nous est ici offerte de changer les choses pour en tirer un maximum d'avantages et pour en minimiser l'impact négatif.

Tout examen de l'avenir du Régime de pensions du Canada devra comporter deux éléments clés: tout d'abord, le régime doit produire suffisamment d'argent pour payer les pensions qu'il s'est déjà engagé à verser, et, deuxièmement, il devra accumuler un fonds qui couvrira le coût des pensions futures qui devront être versées à ceux et celles qui font aujourd'hui partie de la population active. Le premier élément est, du fait de la pratique passée, une dépense énorme, qui viendra drainer l'économie. Même si c'est une question à trancher, peu importe, à mon avis, que l'argent provienne de primes excessives, qui sont en fait une charge sociale glorifiée, ou d'une forme de taxation équitable: en bout de ligne, il faudra payer le même montant d'argent.

Nous autres de l'AIMS, pensons que la meilleure solution serait de couvrir le coût des engagements existants à partir des recettes générales et de permettre aux Canadiens de choisir les régimes de type REER où ils veulent voir investies leurs économies. Étant donné que cette solution ne semble pas être sur la table pour l'heure, je me passerai de discuter de la myriade d'avantages qu'offrirait la décision d'opter pour des régimes privés concurrentiels, et je limiterai mes remarques à ce que nous avons devant nous. Je me retiendrai par ailleurs de fournir quelque conseil que ce soit sur la façon dont le régime de pension devrait être administré et sur la façon dont devrait être structuré son conseil d'administration. Vous allez vous entretenir avec des gens qui vous fourniront de bien meilleurs conseils que je ne le pourrais. Ce que j'aimerais faire c'est me concentrer sur certains principes généraux en fonction desquels le fonds devrait, selon l'AIMS, être géré.

Le premier principe est que l'administration du fonds ne peut avoir qu'un seul objet, soit de faire des investissements prudents et productifs qui rapportent de l'argent de façon à payer les pensions des cotisants. Le deuxième principe est que l'ingérence politique, directe ou indirecte, partisane ou régionale, doit être évitée à tout prix. Troisièmement, les décisions sur la façon d'investir les fonds du Régime de pensions du Canada ne devraient être assujetties à aucune contrainte artificielle, par exemple l'obligation d'investir des parts du fonds dans toutes les régions du pays ou le respect de la limite en matière d'investissement étranger.

Ces principes se chevauchent quelque peu. Prévoir plus d'un objectif dans le mandat: si nous visions et la création d'emplois et de solides investissements, par exemple, ce serait une forme d'ingérence politique de facto et cela violerait et le premier et le deuxième principes que j'ai esquissés. De la même façon, exiger des investissements régionaux ou limiter l'investissement étranger constituerait également de l'ingérence politique et supposerait sans aucun doute plus d'un objectif pour le fonds. Partant, il y aurait vraisemblablement chevauchement de ces trois principes. Il demeure utile, je pense, d'examiner séparément chacun de ces trois principes, alors je vous demande votre indulgence car je vais en faire un examen plus détaillé.

La récente histoire économique du Canada regorge d'exemples des raisons pour lesquelles cela ne fonctionne pas lorsque des programmes essaient de combiner plus d'un objectif, aussi louables soient-ils tous. Dans le Canada Atlantique, nous avons vu l'exemple du programme régionalement enrichi d'assurance-emploi/assurance-chômage. Depuis des décennies, ce programme s'efforce d'être à la fois un véritable programme d'assurance pour les travailleurs temporairement déplacés et un programme de bien-être social pour ceux et celles qui ont l'habitude de faire du travail saisonnier. Le résultat a été un sérieux changement dans la dynamique du marché du travail, une perte de la flexibilité de la main-d'oeuvre dans la région et une perte de mobilité. Les populations rurales sont demeurées élevées ici, ce qui n'alimente guère la création d'emplois à temps plein pour les personnes vivant ici. Les gens ont acquis un sentiment d'ayant-droit qui a affaibli leur désir de travailler. Les employeurs rapportent de temps en temps qu'ils ont du mal à trouver des travailleurs, même non qualifiés, et le plus récent exemple dont j'ai entendu parler était au Cap-Breton, si vous pouvez vous l'imaginer.

Notre institut a en fait fait un examen approfondi de la plus vaste question de la dépendance à l'égard des paiements de transfert en ce qui concerne les gouvernements, le secteur privé, les travailleurs, en fait tous les segments de l'économie de l'Atlantique. Nous avons constaté que les billions de dollars d'investissements nets faits dans la région par Ottawa au cours des 30 dernières années ont, en fait, fait plus de tort que de bien. Cet argent a déformé les décisions commerciales de telle sorte que l'on a plutôt cherché à plaire au gouvernement qu'à satisfaire les clients; cela a par ailleurs ralenti le développement d'entreprises et, comme je l'ai déjà mentionné, cela a amené des distorsions sur le marché du travail.

Encore plus dramatique est le rôle des politiques à objectifs mixtes dans le domaine des pêcheries. Le régime d'assurance-emploi/assurance-chômage est un facteur qui a débouché sur une énorme surcapacité, la capacité, dans le cas, je pense, de certaines espèces, de sortir de l'eau jusqu'au tout dernier spécimen. D'autres politiques, par exemple le subventionnement de bateaux et de la construction d'usines, ajoutées à une tendance générale voulant que l'on traite la pêcherie comme étant l'économie de dernier recours, ont également joué un rôle important. Même si un objectif de la politique sur les pêcheries a été de bâtir une industrie viable, celle-ci a été vouée à l'échec par des conflits amenés par un autre objectif, celui-ci incompatible avec le premier: la création d'emplois à presque n'importe quel coût. Le Régime de pensions du Canada tel qu'il existe est, je pense, un autre exemple de la façon dont la combinaison d'objectifs ne fonctionne pas. Son rôle traditionnel de fonds général dans lequel le gouvernement puisait pour couvrir ses emprunts a paralysé sa capacité de production de revenu.

Comme je l'ai souligné, le simple fait de prévoir un mélange d'objectifs pour le Régime de pensions du Canada constituerait de l'ingérence politique dans la façon dont le fonds est géré, mais le danger d'ingérence politique va bien au-delà de cela et ce n'est pas la seule perspective de politiques partisanes qui est source d'inquiétudes. Les politiques régionales risquent tout autant de déformer le processus décisionnel.

Le premier écueil possible est la façon dont sont faites les nominations au conseil d'administration de l'Office d'investissement. Les personnes choisies ne devraient pas présenter comme principal atout des relations politiques ou des liens avec le parti au pouvoir et elles ne devraient pas non plus être des représentants de groupes d'intérêts. Le principal élément devrait être leurs compétences en matière de placements, et les conditions de leur nomination doivent être isolées par tous les moyens possibles de toute influence politique, comme c'est cas avec les vérificateurs généraux.

Il est également important que toutes les personnes nommées se perçoivent comme étant responsables de représenter tous les cotisants au régime plutôt que d'étroits intérêts régionaux ou sectoriels. Nous avons pu voir comment les rivalités régionales ont amené des distorsions dans le processus décisionnel de différentes agences fédérales de développement régional au cours des dernières décennies. Je ne parle pas seulement du fait qu'il y ait eu des manoeuvres pour obtenir de l'influence parmi les grosses régions du pays -- la dilution de l'impact régional des programmes de l'ancien ministère de l'Expansion industrielle régionale, par exemple, en les élargissant pour englober presque toutes les régions du pays -- mais également des problèmes persistants des factions à l'intérieur de ces vastes régions, un cas classique étant les querelles interprovinciales dans le Canada atlantique.

Parmi les nombreux défauts de l'actuel programme de l'APECA, par exemple, le petit provincialisme compte sans doute parmi les pires. Dès qu'une province obtient une industrie qui réussit, par exemple une usine de traitement de bleuets, chacune des autres provinces veut des fonds pour faire la même chose. Lorsqu'une circonscription obtient une nouvelle usine de conditionnement du poisson, sa voisine en veut une elle aussi. Le propriétaire d'un hôtel qui marche bien se trouve tout d'un coup entouré par des concurrents qui ont bénéficié de subventions gouvernementales, et ainsi de suite. Souvent, le résultat est que le marché devient si saturé que personne ne réussit vraiment bien ou, dans certains cas, ne parvient même à survivre.

Je sais que la pression monte déjà pour qu'une partie des fonds du Régime de pensions du Canada soit réservée pour telle région ou telle autre. Je sais que certains Albertains veulent une garantie qu'une part considérable de l'argent sera investie chez eux car ils estiment qu'ils se débrouillent bien et ils ne comptent pas que les banquiers torontois vont voir les mêmes possibilités en matière d'investissement qu'eux. Je serais prêt à parier mes bottes que vous trouverez des habitants des provinces de l'Atlantique qui voudront des garanties semblables pour notre partie du pays, et ce pour des raisons tout à fait contraires. Ils pensent que les choses vont plutôt mal et ils craignent que personne ne viendra investir ici si ce n'est pas une obligation.

Nous autres à l'AIMS contestons ces deux arguments. Nous croyons qu'un conseil d'administration bien choisi reconnaîtra les bonnes possibilités où qu'elles se trouvent et nous croyons que les fonds du Régime de pensions du Canada ne doivent être investis que là où le marché offre des possibilités prudentes.

Cela mène directement au troisième point dont je voulais traiter: la gestion du fonds ne doit être entravée par aucune contrainte artificielle. La préoccupation que j'ai exprimée relativement à l'imposition d'obligations en matière d'investissement régional s'étend à tous les autres domaines: exiger que les investissements soient faits au Canada plutôt qu'à l'étranger; exiger qu'il y ait un mélange précis de types d'investissements; exiger que l'investissement se fasse dans certains secteurs, et ainsi de suite. Tout cela ne peut que nuire à ce qui devrait être le principal, voire l'unique, mandat du fonds, soit investir sagement de façon à faire de l'argent pour les cotisants.

Je sais que vous avez déjà entendu un point de vue différent. Je sais que d'autres arguent en faveur d'un mandat mixte qui repose sur la création d'emplois et sur des investissements prudents, ainsi que d'un conseil d'administration de l'office dont les membres seraient choisis en vue de représenter différents segments de la société. Vous êtes confrontés à un choix difficile car vous ne pouvez pas plaire à tout le monde.

Cela étant, permettez-moi de conclure avec un petit renseignement un peu encourageant qui n'est selon moi pas suffisamment bien compris, et je vais placer cela dans un contexte historique. Dans les années 1960, le PNB par tête d'habitant dans cette région augmentait à un taux qui était près du double de la moyenne nationale, même si nous avions encore beaucoup de rattrapage à faire. Ottawa avait décidé de nous venir en aide au départ avec un petit peu d'argent devant servir à mettre à la page nos systèmes d'éducation et de soins de santé, et cela a semblé fonctionner. La théorie à l'époque était la suivante: si un petit peu d'argent de démarrage fait un peu de bien, beaucoup d'argent fera plus de bien encore. Les paiements de transfert sont montés en flèche et les cibles ont été élargies pour englober presque tous les aspects de l'économie de la région de l'Atlantique. Ce qui s'est passé, en fait, est que notre croissance par tête d'habitant a ralenti pour passer bien en dessous de la moyenne nationale, et elle y est restée pendant très longtemps, jusqu'au moment où, il y a à peine quelques années, Ottawa a commencé à sabrer massivement dans les paiements de transfert fédéraux. Que s'est-il passé? Aujourd'hui, notre croissance par tête d'habitant est de nouveau supérieure à la moyenne nationale. Nous avons certains problèmes mais nous nous tirons d'affaire.

Je vous invite à regarder très attentivement cette ville pendant votre séjour ici. Jusqu'ici, pour la décennie en cours, les subventions aux entreprises ont chuté pour atteindre des niveaux qu'on n'avait pas vus depuis plusieurs dizaines d'années. La région métropolitaine de Halifax a en même temps perdu 10 000 emplois au gouvernement. C'est un double coup dur, les coupures massives que nous avons vécues ayant été beaucoup plus graves, par tête d'habitant, que n'importe où ailleurs au pays. Or, aujourd'hui, le taux de chômage ici dans la région métropolitaine de Halifax est à peine supérieur à 8 p. 100, soit sensiblement moins que la moyenne nationale. Loin d'avoir souffert du fait de la réduction des paiements de transfert, Halifax apprend à se débrouiller. Notre secteur privé est en train de se tailler sa place au soleil avec une créativité et une vigueur tout à fait remarquables.

La même chose est arrivée à Moncton -- un autre exemple heureux dans les Maritimes -- il y a quelques années lorsque CN, qui avait à une époque été presque le seul employeur en ville, a imposé des réductions massives.

Je pourrais poursuivre encore, mais ce que je tenais à souligner est que les forces du marché fonctionnent bel et bien lorsque vous les laissez faire. L'argent que pourra investir le Régime de pensions du Canada sera une force du bien dans toutes les régions du Canada, mais je ne pense pas que nous puissions exiger cela; il nous faut laisser cet argent faire son chemin pour l'amélioration de notre sort à tous et faire de l'argent pour payer les pensions des personnes âgées.

Le sénateur Kenny: J'ai trouvé très originales les idées du témoin que nous venons d'entendre. Je pense que cela vous aurait bien servi de les conserver.

L'exposé que vous venez de nous faire a été très convaincant. Admettons que ce que vous dites est juste. Je me sens plutôt à l'aise avec ce que je vous ai entendu dire et avec ce que j'ai lu. Cependant, cela va à l'encontre de l'essence même du processus décisionnel canadien. En effet, le processus décisionnel canadien tend à être une affaire de compromis, où l'on dit que si l'entente n'est pas assez bonne à elle toute seule, on y ajoutera certains éléments pour que cela fonctionne sur le plan politique. Vous pouvez regarder Hibernia et voir 50 raisons différentes vous convaincant d'aller de l'avant avec cet investissement, ou bien vous pouvez prendre des achats militaires et vous savez que les besoins des soldats constituent l'une des cinq composantes qui entreront en ligne de compte.

Vous dites, en gros, que nous devrions avoir un conseil d'administration qui ne tienne pas compte de questions de sexe, de race ou de région. Vous recommandez que le conseil se détache complètement de cela et vous parlez de la nécessité de mettre l'accent sur une seule chose.

Conviendriez-vous que cela va à l'encontre de la façon dont nous prenons en règle générale nos décisions au Canada, et que la «façon de faire canadienne», si je peux utiliser cette expression, est en fait tout le contraire de ce que vous proposez?

M. Cayo: Je suis d'accord avec vous en ce qui concerne la première partie de votre question. Pour ce qui est de la deuxième, vous exagérez peut-être un peu les choses. Vous avez un certain nombre de choix difficiles à faire. Mon travail est plutôt facile: je viens tout simplement ici et je vous dis quoi faire. D'autres personnes devront le faire. C'est là l'avantage d'être membre du groupe de réflexion. C'est difficile, mais cette question est trop importante pour qu'on puisse se permettre de tout gâcher. Nous sommes confrontés à des problèmes énormes avec le Régime de pensions du Canada. La situation était telle que Paul Martin devait absolument faire quelque chose. Je ne suis pas entièrement satisfait, comme je l'ai dit, avec ce qu'il a fait, mais il a fait quelque chose et il a fait d'importants pas vers une solution. S'il ne l'avait pas fait, l'armée de gens qui craignent de ne jamais rien obtenir du régime de pensions du Canada aurait sans doute eu raison. Les choses allaient très mal. La situation était le résultat du genre de processus décisionnel dont vous avez parlé.

Les Canadiens en sont arrivés à un point où il y a une plus grande volonté que par le passé d'opter pour des solutions qui fonctionnent par opposition à des solutions qui font plaisir. Ce n'est pas tout le monde qui en est arrivé là, et vous entendrez beaucoup gémir les groupes d'intérêt qui aimeraient être représentés, mais je pense que ces groupes parlent au nom d'un nombre de plus en plus petit de Canadiens.

J'ai également le sentiment que si vous parvenez à résister pendant quelque temps, l'expérience de la Nouvelle-Écosse pourrait bien être une petite leçon pour vous. Ce que j'ai entendu M. Van Loon dire, au sujet des pressions politiques exercées sur le conseil pour faire ceci ou cela et au sujet de controverses, est que personne ne s'en préoccupe parce que personne ne remarque rien.

Ce sera difficile, il y aura une certaine clameur et je me demande bel et bien combien de vrais Canadiens ils représentent, mais je pense qu'une fois franchi cet obstacle, si le régime fonctionne bien, le problème disparaîtra.

Le sénateur Kenny: Se pourrait-il que les Canadiens aient adopté ce genre de processus décisionnel hybride, si je peux utiliser cette expression, ou de choix multiples en matière d'objectifs, parce qu'ils pensent que c'est un élément important dans le tissu même du pays et parce qu'ils en sont arrivés à la conclusion que ces genres de compromis -- c'est-à-dire avoir moins qu'un rendement optimal dans toute une gamme de domaines, et pas seulement du côté des régimes de pension -- sont acceptables si, en contrepartie, le pays reste uni et l'on parvient à tenir compte des différentes préoccupations régionales qui existent?

M. Cayo: Oui. J'appuie toujours cela à bien des égards, mais je pense que cela survient dans certains domaines. Par exemple, dans le domaine constitutionnel, la façon de faire canadienne de s'en sortir tant bien que mal est en réalité une assez bonne pratique car le pays est si vaste et si diversifié géographiquement, économiquement et culturellement qu'il n'existe pas de solution absolue, du genre «taille unique», qui convienne à tout le monde.

Le problème est qu'au cours des 30 dernières années, ce genre de processus s'est étendu à de nombreux domaines dans lesquels certains Canadiens -- et je pense qu'ils sont assez nombreux, et j'en fais partie -- auraient préféré voir autre chose se passer.

Je ne suis pas opposé au processus dans tous les domaines. Il y a de nombreux compromis que je dois faire en tant que Canadien, et cela a été mon cas au cours des 31 dernières années, en tant que Canadien de l'Atlantique plutôt engagé mais qui aime beaucoup les Prairies où j'ai grandi. Il y a de nombreux compromis que je dois faire pour que ce pays fonctionne, et je l'ai fait de bon gré et souvent même dans la joie. Cependant, il y a d'autres domaines où nous avons constaté que cette approche ne fonctionne tout simplement pas, et il s'agit surtout des domaines qui sont les moteurs de l'économie.

Si vous prenez l'étude réalisée par notre groupe de réflexion -- il s'agit d'un livre sur le transfert de la dépendance intitulé: «Looking The Gift Horse in the Mouth» --, vous verrez que le coût de ces compromis où l'on se débrouille tant bien que mal et de ces dépenses politiques d'un demi billion de dollars que le gouvernement fédéral nous a consacrées au cours des 30 dernières années, aurait suffi pour presque rembourser la dette nationale. Je parle ici de l'apport net de fonds fédéraux, de l'argent que nous avons reçu en excédent par rapport à ce que nous avons renvoyé à Ottawa sous forme de taxes. Ç'aurait été assez pour rembourser la dette.

Ce que nous avons constaté est que nous nous en portons plus mal. Cela a entravé notre économie, nous a nui. C'était un compromis typiquement canadien. Je pense que cela s'appuyait largement sur de bonnes intentions, mais c'était largement mal pensé, et nous commençons à voir que, lorsqu'il s'agit d'un outil purement financier comme celui de savoir comment nous allons faire pour que des gens comme moi qui sont à la limite du baby-boom puissent prendre leur retraite, la question devient celle de savoir comment nos enfants vont avoir les moyens de payer cela car ils ne sont pas suffisamment nombreux. Nous ne laissons pas venir au Canada suffisamment d'immigrants.

Le sénateur Kenny: Lorsque nous avons imposé des coupures nous avons par la même occasion perdu tous nos sièges dans la région. Il y a un message là-dedans pour les gouvernements: dans le vrai monde, lorsque le gouvernement suit le genre de conseils que vous offrez, ils le font à leur péril.

M. Cayo: Les partis gagnent et les partis perdent; les politiciens gagnent et les politiciens perdent. C'est le temps qui nous le dira. Cela m'est égal que certaines personnes aient perdu leur siège. Je ne suis pas très politisé. Je veux parler ici de choix difficiles. Voulez-vous avoir une bonne gérance ou non? En ce qui concerne la question qui nous occupe ici, la bonne gérance est une exigence impérative. La question est trop importante pour que nous nous trompions, comme je le disais, car si nous faisons fausse route, cela pourrait amener la faillite de tout le pays.

Le sénateur Kenny: Si nous faisons ce que vous recommandez, quel est le meilleur moyen de nous y prendre? Par exemple, nous avons parlé de transparence. La transparence semble être une solution confortable dans l'esprit de nombre d'entre nous. D'un autre côté, si vous avez moins de transparence, vous pouvez aller de l'avant et faire certaines des choses que vous préconisez sans vous exposer à toutes les remontrances que cela pourrait susciter. Comment mettez-vous les gens qui s'occupent de tout cela à l'abri de critiques du genre: «Je viens de l'Alberta et nous y avons mis X p. 100, mais regardez ces chiffres; nous n'en récupérons que la moitié. Ce sont ces gens à Halifax qui gèrent le fonds»? Comment réglez-vous ce genre de problèmes?

M. Cayo: Le processus de nomination devrait être dépolitisé au maximum. Je n'ai entendu que la dernière partie du témoignage de M. Van Loon, mais je pense qu'il a dit que le processus de nomination prévoyait deux nominations de chaque province. C'est faux. Il est difficile de croire que, comme par hasard, si vous prenez les 20 meilleurs candidats au Canada, il y en aura deux pour chaque province. C'est précisément de ce genre de choses que je veux parler. Ce ne devrait pas être ainsi. Si sept des meilleurs candidats viennent de la Nouvelle-Écosse, alors ces personnes devraient être retenues. Et, à l'inverse, si aucun bon candidat ne peut être trouvé en Nouvelle-Écosse, alors personne de cette province ne devrait être choisi. Il faut que ce soit aussi simple que cela. Les personnes nommées doivent être protégées par des mécanismes du genre de ceux qui protègent, mettons, un vérificateur général ou un ombudsman, afin qu'elles puissent s'acquitter de leurs fonctions sans avoir à s'inquiéter des conséquences au jour le jour ou de savoir qui va s'attaquer à elles aujourd'hui et où. Je pense, parce que les questions liées aux pensions sont si mystérieuses, que, si le fonds fait de l'argent, l'intérêt des gens va très vite s'estomper.

Le sénateur Oliver: J'ai apprécié vos observations, disons, «stimulantes». J'ai particulièrement apprécié vos commentaires au sujet de la pêcherie et des effets qu'a eus sur l'économie du Canada atlantique l'argent en provenance d'Ottawa.

Le comité sénatorial permanent des banques et du commerce est aujourd'hui saisi d'un texte réglementaire sur le RPC qui a été adopté et qui s'est vu accorder la sanction royale en décembre, exception faite de certains articles. On nous a également demandé de nous pencher sur certains règlements concernant la gérance.

J'aimerais que vous nous conseilliez sur les principes en matière de gérance que nous devrions recommander au ministre des Finances d'insérer ou de modifier.

Comme l'a dit le sénateur Kenny, nous nous penchons sur des principes en matière de reddition de comptes et de transparence. Dans votre déclaration, vous dites au deuxième paragraphe de la page un:

[...] l'ingérence politique -- directe ou indirecte, partisane ou régionale -- doit être évitée à tout prix.

Quelles recommandations devrions-nous faire au ministre des Finances pour veiller à ce que les règlements et la loi évitent toute ingérence politique, directe ou indirecte, partisane ou régionale, à tout prix?

M. Cayo: Ce n'est pas moi qui peux répondre à cette question.

Avant d'accepter votre gentille invitation à comparaître, j'ai discuté avec M. Benoit pour savoir quels aspects de la loi vous préoccupaient. Au départ, j'avais pensé que vous alliez chercher à obtenir des détails et des connaissances bien au-delà de mon domaine de compétence. Cependant, M. Benoit a eu l'amabilité de m'envoyer certains documents qui m'ont éclairé sur certains des arguments qui vous avaient été soumis, et je songe tout particulièrement au mémoire du CTC qui traitait de deux objectifs particuliers. Ma position était au pôle opposé. En gros, je pense qu'il s'agit d'une transaction commerciale et que cela doit être administré conformément à des principes d'affaires. Il vous faut mettre de côté vos histoires politiques. Faire de la politique, c'est un talent important et c'est une activité importante pour le Canada, mais cela ne devrait jouer aucun rôle dans l'investissement d'argent devant servir à financer les pensions. La preuve en a été amplement faite par le dossier plutôt triste du Régime de pensions du Canada et de nombreuses autres initiatives de gestion que les gouvernements fédéral et provinciaux ont tenté d'entreprendre dans ce pays au cours des dernières années. Ils ne se tirent pas très bien d'affaire. De façon générale, donc, je vous encouragerais à m'écouter moi, et non pas eux, et à adhérer à des principes d'affaires.

J'ai examiné d'autres documents que M. Benoit a eu la gentillesse de me faire parvenir et, bien franchement, les détails ont véritablement plongé ma pauvre petite tête dans l'ahurissement. Je ne saisis pas très bien tous les détails.

Le sénateur Oliver: En même temps que nous examinons cette loi sur le RPC, le comité mène également une autre étude, celle-ci portant sur les investisseurs institutionnels. Nous sommes en effet en train d'examiner les principes en matière de gérance pour les investisseurs institutionnels. J'ignore à quelles conclusions en arrivera le comité, car cette étude n'est pas encore terminée. Nous avons encore de nombreux témoins à entendre.

Nous avons entendu dire que des groupes comme CalPERS utilisent leurs pouvoirs et leur influence avec les procurations et font des suggestions aux cadres supérieurs de certaines entreprises pour essayer d'augmenter leur rendement sur leur investissement dans celles-ci. Pensez-vous que l'Office d'investissement du régime de pensions du Canada devrait exercer ses droits de vote par procuration? Quel rôle direct le conseil d'administration devrait-il jouer auprès de certaines des entreprises dans lesquelles il investit?

M. Cayo: Je pense qu'il devrait exercer ses droits de vote par procuration pour des questions financièrement responsables. Le cas précis dont vous avez discuté avec M. Van Loon serait, pour moi, facile à trancher. Si des gestionnaires de fonds d'investissement ont le sentiment qu'une de leurs valeurs est en train d'être vendue pour moins que sa valeur, alors il serait tout à fait indiqué d'intervenir.

Il y a eu ces derniers temps toutes sortes de mouvements visant à encourager les investisseurs à s'occuper de faire des investissements éthiques. En tant que particulier qui a un portefeuille personnel très modeste, cela me préoccupe considérablement. Cependant, j'ai beaucoup de difficulté lorsque des institutions commencent à faire ces jugements pour mon compte et lorsqu'on se lance dans des débats sur ce qui est politiquement correct, etc. Je m'intéresse aux choses comme les embargos, et je suis ces dossiers. J'étais à Haïti peu après la levée de l'embargo. L'horreur que cet embargo avait imposée au peuple haïtien avait été épouvantable. Il s'agit là de questions désespérément difficiles et je suis tout à fait prêt à y réfléchir moi-même. Je ne pense cependant pas qu'un conseil d'administration responsable d'un fonds de pension devrait s'occuper de ce genre de choses.

Cependant, il faut qu'il y ait optimisation de l'investissement. Nous devons veiller à ce que les meilleures pratiques d'affaires soient suivies régulièrement dans l'administration de toute société dans laquelle investit l'office.

Le sénateur Oliver: Ma dernière question concerne le mandat des personnes nommées au conseil d'administration. Si le fonds devait atteindre, mettons, 50 ou 100 milliards de dollars, certains investissements seraient vraisemblablement des investissements à long terme. Cela étant, certaines décisions à long terme devront être prises. Pensez-vous qu'un mandat de trois ans pour les personnes responsables de prendre ces décisions soit approprié?

M. Cayo: J'aurais tendance à dire que ce serait trop court. Cependant, cela déborde du domaine que je considère comme étant ma spécialité. Je n'ai jamais géré plusieurs milliards de dollars et je ne le ferai sans doute jamais. S'il me fallait décider de la durée de leur mandat, je demanderais tout simplement conseil à des personnes qui ont déjà eu à gérer plusieurs milliards de dollars, et je ferais ce qu'elles me recommanderaient.

Le sénateur Oliver: Auriez-vous des commentaires à faire au sujet des salaires des membres du conseil d'administration?

M. Cayo: Je pense que la rémunération devrait correspondre à ce qui se retrouve au sein de ce secteur et au rendement.

Le sénateur Callbeck: Je sais que nous sommes ici pour parler du Régime de pensions du Canada, mais j'aimerais dire quelques mots au sujet de votre mémoire, et plus particulièrement de vos observations relativement à l'APECA. Nous avons bien sûr des opinions différentes. Vous dites:

Dès qu'une province a une industrie qui réussit -- une usine de transformation de bleuets, par exemple -- chacune des autres provinces veut obtenir la même chose. Lorsqu'une circonscription obtient une nouvelle usine de conditionnement du poisson, ses voisines réclament la même chose.

Cela n'a pas été le cas dans ma propre expérience. Nous avons des bleuets qui sont parmi les meilleurs et des terres qui sont parmi les meilleures en Amérique du Nord pour la culture du bleuet.

M. Cayo: C'est très bien, et je pense que si une entreprise pouvait s'y implanter et réussir sans aide gouvernementale, je lui souhaiterais bonne chance. Je pense également que si vous avez une grosse usine de traitement du bleuet de classe mondiale qui est à une longueur de tir d'une autre province, alors celle-ci en voudra une elle aussi. Cela est arrivé maintes et maintes fois. Ne me dites pas qu'il n'y a pas d'usine de conditionnement du poisson dans des circonscriptions adjacentes, car à une époque, la péninsule acadienne en comptait 200. C'est de la folie.

Le sénateur Callbeck: Je ne peux parler que de l'Île-du-Prince-Édouard et je tiens à dire, pour que cela figure au procès-verbal, que l'Île-du-Prince-Édouard a bénéficié de l'APECA. Nous souhaitons devenir plus autosuffisants et l'APECA nous a certainement aidés à cet égard.

M. Cayo: Sénateur Callbeck, je vous invite à lire notre livre, car je vous soumets que l'Île-du-Prince-Édouard a été retenue, non seulement par l'APECA mais par de nombreux autres programmes de subvention. Rien de tout cela n'a servi les intérêts à long terme de cette région.

Le sénateur Callbeck: Je ne peux que parler de l'APECA, que je connais bien, et de l'Ile-du-Prince-Édouard. Les statistiques montrent que nous devenons de plus en plus autosuffisants et j'estime que l'APECA a joué un rôle.

M. Cayo: Vous devenez de plus en plus autosuffisants parce qu'ils vous envoient moins d'argent ces jours-ci.

Le vice-président: Nous devrions peut-être revenir à la question du Régime de pensions du Canada. M. Cayo présente ses arguments sur la toile de fonds de ses croyances et, franchement, je suis d'accord avec lui sur l'incidence des programmes gouvernementaux sur l'économie, mais ce n'est pas là une question dont nous pouvons discuter ici. Le débat dure depuis 1867 et cela s'est accéléré un petit peu avec Karl Marx.

Le sénateur Callbeck: Si j'ai bien compris votre exposé, vous pensez qu'il y a trois choses qui entrent en ligne de compte: le taux de rendement; la nomination au conseil d'administration de personnes ayant des compétences en matière de placement; et le libre jeu des forces du marché.

M. Cayo: Oui.

Le sénateur Kelleher: Au dernier paragraphe de la page deux de votre mémoire, vous dites:

Le régime de pensions du Canada est encore un autre exemple de la façon dont cela ne fonctionne pas lorsqu'on a plusieurs objectifs. Son rôle traditionnel de fonds général dans lequel le gouvernement puisait pour couvrir ses emprunts a paralysé sa capacité de production de revenu.

Bien sûr, nous savons tous que cela fait des années que les provinces empruntent de l'argent auprès du fonds à des taux inférieurs aux taux du marché, c'est le moins qu'on puisse dire; or, nous nous inquiétons de voir à l'article 8 des règlements proposés qu'il y est prévu un engagement permanent à investir dans les obligations correspondant aux dettes provinciales. Cela ne me semble pas, de prime abord, cadrer avec vos objectifs quant à la façon dont l'office devrait s'acquitter de ses responsabilités en matière d'investissement. Pourriez-vous nous expliquer un petit peu mieux cela?

M. Cayo: Je suis tout à fait opposé à ce genre d'engagement permanent. Cela ne veut pas dire que je m'oppose automatiquement à l'idée que le fonds prête de l'argent aux provinces. Ce pourrait en fait être une bonne chose. Selon moi, lorsqu'il est question de gérer d'importants fonds, il vous faut investir une certaine partie de l'argent dans des instruments très sûrs à faible rendement. Si le financement de la dette provinciale est une bonne affaire et amènerait le bon mélange, alors je ne pense pas que cela doive être interdit, mais je ne pense pas qu'il devrait y avoir un quelconque engagement en ce sens. Ce devrait être une décision d'affaires d'y garer une certaine partie de l'argent ou non.

Le sénateur Kelleher: Vous êtes toujours prêt à inclure l'Île-du-Prince-Édouard en tant que possibilité?

M. Cayo: Absolument.

Le sénateur Moore: Où l'Atlantic Institute for Market Studies obtient-il son financement?

M. Cayo: Nous sommes un groupe de réflexion financé par le secteur privé. Nous existons depuis environ trois ans et demi. Pendant les trois premières années, nous avons bénéficié d'un financement général plutôt généreux consenti par la Fondation canadienne Donner. Il s'agissait d'un engagement de trois ans pour nous aider à démarrer. Nous avons dépensé cet argent. Toutes nos activités essentielles sont financées par des entreprises, dont bon nombre ont leur siège dans la région de l'Atlantique et dont la quasi-totalité ont de solides liens avec les provinces de l'Atlantique. Certains de nos projets qui débordent de notre financement de base continuent d'être financés par des fondations. Nous ne recevons absolument rien du gouvernement.

Le sénateur Moore: J'ai été intéressé par votre exemple de l'usine de traitement de bleuets. Obtenez-vous de l'argent de qui que ce soit dans le secteur du bleuet?

M. Cayo: Oui. Un de nos administrateurs est actif dans le secteur du bleuet.

Le vice-président: Cela met fin à notre séance. Nous allons reprendre à 15 heures.

La séance est levée.


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