Délibérations du comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles
Fascicule 16 - Témoignages
OTTAWA, le mardi 1er décembre 1998
Le comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd'hui à 9 h 10 pour procéder à l'étude du projet de loi C-38, Loi modifiant la Loi sur les parcs nationaux (création du parc Tuktut Nogait).
Le sénateur Ron Ghitter (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président: Honorables sénateurs, la séance est ouverte. Il me fait plaisir d'inviter notre témoin, M. Jose Kusugak, à prendre la parole. M. Kusugak est président de Nunavut Tunngavik Inc. Il a préparé un exposé, dont nous venons de recevoir copie.
Vous avez la parole.
M. Jose Kusugak, président, Nunavut Tunngavik Inc.: Honorables sénateurs, j'apprécie ce temps qui m'est alloué par le comité pour présenter mon exposé.
Vous avez entendu bon nombre de témoins, dont Mme Nellie Cournoyea, présidente-directrice générale de la Inuvialuit Regional Corporation.
Votre étude porte entre autres sur une partie du territoire inuvialuit, soit la partie ouest de ce qui deviendra le 1er avril 1999 le territoire du Nunavut. Je viens de la partie est du territoire, Iqaluit, qui constituera la capitale du Nunavut, mais j'ai passé quelque temps dans la région entourant le nouveau parc Tuktut Nogait.
L'assemblée générale de la Nunavut Tunngavik, organisation chargée des revendications territoriales, a été saluée d'une pluie de météorites il y a quelques semaines. C'était comme un incroyable accueil. Pas de doute, ils savent comment faire un feu d'artifices.
Je dois aussi souligner que l'accord sur les revendications territoriales conclu avec le gouvernement du Canada et les Canadiens a permis aux Inuit et aux Inuvialuit d'assumer avec fierté le rôle de gardiens de cette région du Canada. Les Inuit sont les gardiens de leur région, tout comme vous êtes les gardiens de votre province ou de votre région.
Nous faisons tout en notre pouvoir pour nous assurer de protéger le caribou, notre principale source de nourriture. Personne ne voudrait mettre en danger sa principale source de nourriture. C'est dans cette optique que Mme Nellie Cournoyea s'est adressée à vous, et je vais poursuivre dans la même veine ce matin.
Nous ne pouvons dépendre des emplois offerts par le gouvernement. Lorsque se présentent des possibilités de développer nos terres, il nous faut en profiter. À une époque, avant les revendications territoriales, quand John Diefenbaker a proposé pour la première fois le concept du Nunavut, les Inuit se sont totalement opposés au développement du territoire, parce qu'ils croyaient que les promoteurs viendraient dans le Nord, voleraient la terre et partiraient ensuite.
Depuis les revendications territoriales, nous avons été en mesure de nous doter de comités et de politiques minières afin de nous assurer que la terre soit laissée dans son état d'origine une fois que les compagnies minières auraient quitté. Nous sommes à une ère totalement nouvelle du développement.
Au même moment, nous avons tout fait pour empêcher que notre principale source de nourriture disparaisse, c'est-à-dire le caribou, le phoque et le poisson. Il faut prendre soin de ces éléments.
Je peux vous assurer que depuis qu'on nous a redonné la responsabilité de notre terre, et ce même avant que les Européens débarquent ici pour partager cette terre avec nous, nous avons fait très attention à la manière de prendre soin de la terre.
Je vais maintenant m'en remettre à ma présentation écrite, dont vous avez copie. Je vais la lire, après quoi je serai très heureux de tenter de répondre à vos questions, le cas échéant.
Le terme «Tunngavik» signifie fondation, comme dans les fondations d'une maison. «Nunavut» se traduit par «notre terre», ce qui donne, en français, «les fondations de notre terre». Notre organisation est responsable de la mise en oeuvre de l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut, inscrit dans la législation fédérale il y a plus de cinq ans, le 9 juillet 1993.
Cet accord historique, similaire à celui conclu avec les Inuvialuit, a fait suite à de nombreuses années de négociations, années durant lesquelles nous avons examiné soigneusement les différentes solutions envisageables pour nous aider à préserver nos terres et notre style de vie tout en procurant à nos enfants et à nous-mêmes un espoir pour l'avenir.
Nous avons choisi de faire état de nos préoccupations et de déclarer officiellement notre appui aux modifications proposées à la frontière ouest du parc national Tuktut Nogait, ainsi qu'aux amendements proposés au projet de loi C-38, comme nous l'a demandé la Inuvialuit Regional Corporation. Coïncidence, le terme «Tuktut Nogait» signifie le caribou et ses petits.
Nous espérons que le Sénat n'approuvera pas le projet de loi C-38 dans sa forme actuelle. Il semble que le gouvernement fédéral n'ait pas honoré l'accord de 1996 sur la création du parc Tuktut Nogait; cet accord avait pourtant été créé en toute bonne foi et l'article 22.1 prévoyait certaines dispositions concernant l'étude et l'amendement possible de l'accord.
Nous avons des appréhensions sérieuses quant à la manière avec laquelle le gouvernement du Canada semble négocier avec les Inuvialuit, peuple voisinant le Nunavut à l'ouest.
Je comprends que le gouvernement fédéral puisse craindre que la modification de la frontière ouest du nouveau parc établisse un précédent qui pourrait ouvrir la voie à la modification des frontières d'autres parcs nationaux pour favoriser le développement économique. En fait, le refus du gouvernement d'honorer l'article 22.1 de l'accord de 1996 et de revoir l'emplacement de la frontière ouest du nouveau parc national Tuktut Nogait est un signe qui pourrait amener les Inuit à être beaucoup plus prudents relativement à la création de parcs nationaux à l'intérieur du Nunavut.
Il faut toutefois souligner que l'accord relatif au parc inuvialuit stipule que le parc Tuktut Nogait sera un parc en cogestion. Comme vous l'a déclaré Nellie Cournoyea le 20 octobre dernier:
Les parcs en cogestion constituent un concept nouveau au Canada et le projet de loi C-38 créera donc des précédents relativement à la manière d'instaurer les principes de cogestion.
Elle a poursuivi en disant:
Comme le stipule le projet de loi, le précédent n'est pas parfait, parce que le projet de loi C-38, dans sa forme actuelle, outrepasse les intérêts des Inuvialuit et rejette le principe accepté voulant qu'on obtienne le consentement absolu des autochtones avant d'établir un parc sur leurs terres ancestrales.
Il serait malheureux que ce signe transmis par le gouvernement entrave le développement et l'établissement éventuel d'autres zones de conservation au Nunavut. En guise d'exemple, mentionnons le projet de parc national à Wager Bay, pour lequel les négociations sont toujours en cours relativement aux répercussions éventuelles sur les Inuit et aux avantages qu'ils pourraient en tirer. Ce projet fait l'objet d'un examen minutieux, parce qu'il pourrait signifier la perte de certaines avenues de développement économique et de certains avantages pour les Inuit et l'ensemble des Canadiens. Dans la zone proposée pour le parc de Wager Bay, on trouve des caribous, des ours polaires et de l'omble chevalier, probablement le meilleur au Canada.
De plus, l'établissement du parc territorial de Katannilik prévu dans la partie sud de l'île de Baffin a été retardé jusqu'à ce qu'on puisse disposer de plus de renseignements concernant d'éventuelles avenues de développement économique. L'établissement de la partie est du parc Tuktut Nogait a déjà été ralenti en raison du précédent établi par le gouvernement. La liste des parcs et des zones de conservation prévus au Nunavut est relativement longue. Toutes les organisations chargées des revendications territoriales doivent relever chaque jour le défi posé par le mandat de promouvoir le développement économique tout en préservant l'habitat de la faune sauvage dont dépend notre survie quotidienne.
Comme vous le savez peut-être, les représentants de Parcs Canada ont approché les résidents de Kugluktuk relativement aux demandes pour étendre le parc national Tuktut Nogait dans les limites du Nunavut. Je crois comprendre qu'il y a peu d'appui à la proposition présentée dans la version préliminaire du plan d'utilisation des terres du Kitimeot Ouest préparé par la Commission de planification du Nunavut en consultation avec la population de Kugluktuk. Qui plus est, je crois comprendre que les préoccupations soulevées à l'occasion des audiences publiques tenues par la Commission de planification du Nunavut concernant le projet d'établir un parc au Nunavut ne visaient pas tant le parc en lui-même, mais plutôt la réticence du gouvernement fédéral à appuyer les demandes antérieures des Inuvialuit pour que soit modifiée la frontière ouest.
La plupart des arguments utilisés par le gouvernement pour justifier son refus de considérer l'amendement proposé au projet de loi C-38 se fondent sur des inquiétudes concernant le caribou. Je voudrais par conséquent vous faire part de certaines de nos inquiétudes au sujet du caribou.
Les terrains de mise bas du caribou au Nunavut couvrent près de 33 p. 100 des terres émergées comprises dans la région visée par le règlement de revendication foncière. Le 23 novembre 1998, Nunavut Tunngavik Inc., en consultation avec le gouvernement du Canada, les Territoires du Nord-Ouest et les groupes revendicateurs et non revendicateurs, décidait du format de l'atelier sur la région ouest des Territoires du Nord-Ouest et du territoire du Nunavut. Cet atelier portera sur la gestion des activités de développement et sur les façons d'en atténuer les conséquences pour le caribou. L'atelier, qui reposera sur le concept de coexistence, se tiendra au début de la prochaine année. On s'attend à ce que tous les groupes autochtones de la région ouest des Territoires du Nord-Ouest et du territoire du Nunavut, ceux pour qui le caribou constitue une source essentielle de nourriture, travaillent ensemble en vue de traiter des préoccupations concernant les effets du développement sur le caribou, dans les terrains de mise bas, de migration et d'hivernage. On s'attend à ce que des idées novatrices ressortent de cet atelier quant à la façon de gérer les activités de développement tout en tenant compte du problème du caribou.
De plus, cet atelier servira également à discuter des lacunes en matière d'information et à établir les priorités en matière de recherches. Nous sommes actuellement en train d'élaborer des outils pour protéger le caribou. Par exemple, nous sommes en train d'améliorer les mesures de protection du caribou élaborées par le gouvernement fédéral durant les années 70. Notre accord sur les revendications territoriales prévoit certaines dispositions concernant l'élaboration d'un système de surveillance des effets cumulés qui permettrait de surveiller et d'évaluer les conséquences non seulement pour le caribou, mais aussi pour toute la faune sauvage et l'environnement.
Les mesures de protection du caribou ont été conçues parce que tout le monde, sauf les Inuit, pensait que le caribou était en déclin. Toutefois, nous parlons ici d'une incroyable terre émergée. De temps en temps, les caribous émigrent vers une région totalement différente. Je suis certain que Dieu avait prévu cela, pour que les aires de nutrition puissent se régénérer. Après un certain temps, ils reviennent. Les caribous sont revenus par centaines de milliers après qu'on nous a dit qu'ils disparaissaient. Toutefois, nous avons compris qu'il fallait se doter de mesures de protection du caribou. C'est une bonne chose que le gouvernement fédéral ait mis de l'avant des mesures de protection du caribou.
Nous élaborons actuellement ce système en collaboration avec la Commission de planification du Nunavut et le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. Les Inuit se préoccupent également de la question du contrôle du développement autour des routes de migration et des terrains d'hivernage. Il est important de souligner que les Inuit travaillent à l'élaboration d'outils qui leur permettront de s'assurer des populations de caribous en santé; ils cherchent notamment des façons d'atténuer les conséquences sur toutes les espèces et non seulement sur les terrains de mise bas. De nouveau, la définition des projets de recherche et des outils pour gérer ces activités sera faite en collaboration avec le gouvernement, les organisations non gouvernementales, l'industrie et les Inuvialuit, les Inuit, les Dénés et les métis du Nord du Canada. Les projets de recherche et les outils ainsi définis tiendront compte du fait qu'il faut atténuer les répercussions du développement dans les terrains de mise bas le long des routes de migration et dans les terrains d'hivernage. En bref, les outils qui seront conçus permettront de réduire au minimum les répercussions du développement sur le caribou tout en optimisant les avenues de développement économique.
Je comprends que dans les années 80 le gouvernement canadien ait pu faire d'énormes pressions politiques sur le gouvernement américain durant l'étude d'une proposition visant le développement des terres 1002 de l'Alaska. On parle ici d'une région située sur le versant nord de l'Alaska et couvrant une large partie des principaux terrains de mise bas de la harde de caribous de la Porcupine.
On croyait que les répercussions de la prospection et de l'exploitation pétrolifères sur les principaux terrains de mise bas de la harde de caribous de la Porcupine seraient trop importantes. La position adoptée par le gouvernement canadien, et d'autres, pour protéger les terrains de mise bas de la harde de caribous de la Porcupine a en effet forcé le gouvernement de l'Alaska à renoncer à d'importants projets de développement économique dans la région. C'est ainsi qu'est né le National Wildlife Refuge de l'Alaska, qui j'en suis certain constitue un moyen positif et nécessaire de protéger l'habitat menacé de cette harde. Toutefois, nous croyons, pour des raisons politiques, qu'il ne faut pas appliquer à l'ensemble les circonstances particulières à une certaine zone de protection de la faune.
Néanmoins, il semble que parce que le gouvernement a adopté une position encourageant la protection légiférée des terrains de mise bas de la harde de caribous on veuille forcer les organisations Inuvialuit et Nunavut à faire de même. De telles pressions demeurent, même si le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, aidé de biologistes spécialistes des caribous, a déclaré qu'il y avait peu de ressemblances entre la harde de caribous de la Porcupine et les autres hardes des territoires de l'Ouest et du Nunavut.
Dans notre partie du Canada, rien ne nous assure que le caribou mettra bas au même endroit année après année. Peut-être que des recherches plus poussées pourraient prouver en bout de ligne qu'il n'est pas possible de continuer à établir des zones de conservation des terrains de mise bas permanentes au sein des régions visées par le règlement du Nunavut et des Inuvialuit.
Il reste beaucoup de recherches à faire dans le domaine. Les décisions visant à protéger les terrains de mise bas du caribou et qui ont été prises pour préserver une certaine image politique pourraient entraîner des résultats déplorables pour le gouvernement, de même que pour les Inuvialuit et les Inuit du Nord du Canada. Il faudra bien mesurer la portée des décisions qui ont été prises et qui visaient à protéger 400 kilomètres carrés d'habitat contre un éventuel développement économique, et qui par conséquent ont privé la collectivité de possibles avantages économiques et sociaux. Nous voulons tous d'une population saine de caribous, mais nous voulons aussi des collectivités en santé et autonomes.
Il pourrait être utile de souligner ici que si tous les terrains connus de mise bas du caribou au sein du Nunavut devaient être transformés en parcs nationaux, près de 45 p. 100 du territoire du Nunavut serait constitué de parcs nationaux et d'aires de conservation. On parle d'un total de 855 000 kilomètres carrés, soit presque la superficie de la Colombie-Britannique.
En conclusion, je voudrais dire que Nunavut Tunngavik appuie les recommandations de la Inuvialuit Regional Corporation pour que soit modifiée la frontière ouest du parc Tuktut Nogait, modification qui ne toucherait qu'un peu moins de 2 p. 100 de la superficie totale en question. Notre appui moral à l'amendement du projet de loi C-38, qui se traduira par un changement relativement mineur à la frontière ouest du parc proposé, repose sur un passé historique commun avec les Inuvialuit et sur une vision de l'avenir commune.
Nunavut Tunngavik demeure confiant que le projet de loi C-38 ne sera pas adopté, à moins que soit modifiée la frontière ouest du parc, conformément à la demande de la Inuvialuit Regional Corporation.
Je vous remercie pour cette occasion qui m'est donnée aujourd'hui de m'adresser à vous, honourables sénateurs. Je serais heureux de répondre à vos questions.
En passant, les Inuvialuit ont fait partie de notre organisation jusqu'en 1976 environ. C'est à cette époque qu'ont eu lieu les audiences de la Commission Berger concernant le projet de pipeline dans la région ouest de l'Arctique. Les Inuvialuit ont à ce moment été politiquement forcés d'en venir à un règlement de leurs revendications territoriales, et c'est pourquoi il existe maintenant une corporation inuvialuit. Le projet hydroélectrique de la baie James a également forcé les peuples du Nord québécois d'en venir à un règlement de leurs revendications territoriales. Les habitants des régions désignées du règlement des revendications foncières du Nunavut, du centre de l'Arctique et de l'île de Baffin ont pu ainsi prendre leur temps, aucun développement forcé n'étant prévu dans leur région. Nous avons finalement conclu une entente en 1993. C'est pourquoi on parle maintenant de deux régions distinctes.
Le président: Merci, monsieur Kusugak. Nous apprécions que vous soyez ici et que vous ayez fait un si long voyage pour nous présenter votre exposé.
Le sénateur Adams: J'aimerais féliciter M. Kusugak. Son horaire est très chargé. Il était ici la semaine dernière, il est retourné chez lui vendredi dernier, puis est revenu à Ottawa aujourd'hui. Les changements qui entreront en vigueur le 1er avril 1999 signifient pour lui beaucoup de travail.
Avant d'arriver ici aujourd'hui, j'ai écouté les nouvelles à la radio. J'y ai entendu Jack Anawak, qui donnait hier soir une conférence à Edmonton. Il a traversé tout le Canada pour s'assurer que les Canadiens comprennent que le territoire du Nunavut sera créé le 1er avril 1999.
J'aurai peu de questions pour le témoin. Je suis d'accord avec tout ce qu'il a dit concernant la création du parc Tuktut Nogait.
Je pense qu'une réunion a eu lieu avec quelques organisations le 23 novembre, où on a discuté de l'avenir des mammifères au Nunavut et dans les territoires. La semaine dernière, nous avons entendu les représentants du ministère des Pêches et des Océans, qui étaient à Iqaluit il y a trois semaines environ pour rencontrer quelques organisations, dont Nunavut Tunngavik et le Conseil de la région de Baffin. Ils ont discuté du contrôle des baleines et des phoques, tâche dont s'acquitte Ottawa depuis plus de 100 ans. Nous avons vécu au côté de ces mammifères toute notre vie, tout comme le font les fermiers avec les vaches et les autres animaux de la ferme. Nous ne voulons pas entrer dans cette nouvelle ère en nous battant avec le gouvernement du Canada au sujet du caribou.
L'organisation de M. Kusugak, comme d'autres organisations, se préoccupe de l'avenir des mammifères au Nunavut, dans la région des Inuvialuit et même dans le Grand Nord. Ceux qui travaillent à la gestion du caribou, en collaboration avec les compagnies minières, ont fait jusqu'ici un excellent travail. Nous avons déjà des systèmes en place.
Nous savons que Parcs Canada a fait du bon travail avec la collectivité, et les organisations, à commencer par le parc national Tuktut Nogait. Le caribou se trouve dans cette région depuis nombre d'années. Nous ne l'appelons pas le «caribou Bluenose». Nous l'appelons simplement «caribou». Maintenant nous avons le caribou de la Porcupine.
Peut-être le témoin voudrait-il discuter de la réunion tenue le 23 novembre. Qui participait à cette réunion?
M. Kusugak: Le responsable de l'élaboration de notre politique minière était à cette réunion. C'est lui qui devrait normalement être ici pour faire cet exposé, mais il est retenu dans la région ouest de l'Arctique; comme j'habite juste au nord d'Ottawa, à trois heures de vol, c'est moi qui suis ici.
Les Inuvialuit viennent de la région inuvialuit, alors que nous provenons de la région du Nunavut; si nous devions avoir quelque préoccupation que ce soit relativement aux conséquences de cette proposition sur le caribou de la région du parc Tuktut Nogait, je m'opposerais aux suggestions des Inuvialuit de la région inuvialuit, parce que le caribou constitue un élément essentiel de notre régime alimentaire. Si je croyais qu'il existait un risque de détruire l'habitat du caribou, je m'opposerais au projet. Nous faisons la même chose dans notre région pour toutes les discussions concernant nos parcs nationaux. Nous sommes avant tout des conservationnistes. C'est pourquoi nous avons tenu ces réunions dont vous parlez, sénateur Adams.
À un certain moment, nous ne voulions d'aucune compagnie minière dans nos régions. Nous avons conservé cette position pendant des années, jusqu'à ce que survienne l'entente sur les revendications territoriales et que nous mettions sur pied des comités chargés d'examiner les conséquences d'une éventuelle exploitation minière. Nous sommes maintenant en mesure de nous assurer que nos régions demeureront sacrées, et propres. Nous ne pouvons pourtant pas continuer à dépendre complètement du gouvernement fédéral. Nous avons conçu les revendications territoriales pour pouvoir contrôler l'usage de nos terres. C'est pourquoi nous faisons cela. En même temps, les animaux constituent la toute première priorité. Ça a toujours été comme ça. Nous ne voulons rien faire pour les mettre en danger.
Une fois encore, nous parlons à propos des parcs nationaux qui, dans la région du Nunavut seulement, représentent à peu près la superficie de la Colombie-Britannique. On parle d'une vaste région.
Le sénateur Adams: Monsieur le président, il ne s'agit pas d'un très grand territoire pour les Inuvialuit. Selon une lettre de Mme Nellie Cournoyea, le parc représente 29 p. 100 du territoire inuvialuit. Les gens devront pouvoir avoir des emplois s'ils veulent continuer à vivre là. Le gouvernement du Canada s'est réservé environ 29 p. 100 du territoire dans la région inuvialuit. Je suis inquiet de ce que cela pourrait signifier pour l'avenir des gens du Nunavut.
Le sénateur Gustafson: Vous dites que la superficie de ce parc équivaut à peu près à celle de la Colombie-Britannique. Vous précisez que le changement que vous demandez ne représente qu'environ 2 p. 100 du territoire, soit une très petite parcelle. Ma préoccupation est que vous parlez de négociations futures. Je serais porté à croire qu'il serait très important pour le gouvernement du Canada et votre peuple d'avoir de bonnes négociations, d'être en bons termes, d'être en mesure de coopérer pour ce qui est de futures négociations concernant les revendications territoriales. À titre de membre de ce comité, je voudrais dire que je ne crois pas que vous soyez trop exigeant quand vous demandez au gouvernement de faire un petit compromis pour l'avenir des négociations.
Ce n'est pas une question, mais une constatation. Si vous souhaitez apporter quelque commentaire, vous êtes libre de le faire.
M. Kusugak: Merci sénateur. Je dirai simplement que pour ce qui est du 1er avril, nous avons trois personnes qui préparent actuellement ce que j'appelle un «message de bienvenue» au Nunavut. Une partie du message laisse entendre qu'il y a du caribou et que si les gens veulent qu'il leur fournisse une bonne viande et une bonne progéniture, il faudra prendre grand soin de ce dernier. C'est dans cette optique que je veux assurer aux membres de ce comité que nous accordons une très grande importance à la conservation. Comme je l'ai dit plus tôt, s'il y avait le moindre danger pour le caribou, je n'appuierais pas les suggestions des Inuvialuit. Toutefois, je comprends que le changement qu'ils veulent faire concerne une toute petite zone. Le sénateur Adams a dit précédemment que le caribou ne se trouve pas toujours dans cette région. La zone de migration est très grande. Ils ne mettent pas nécessairement bas dans la même région au fil des années.
Le président: Si je puis me permettre d'intervenir, vous nous avez fourni des renseignements très récents. Vous nous dites qu'un groupe s'est réuni la semaine dernière pour organiser la tenue d'audiences au début de la prochaine année afin d'étudier la harde de caribous. Est-ce exact? Vous dites que le 23 novembre, la semaine dernière, une entente a été conclue entre le gouvernement du Canada, les Territoires du Nord-Ouest et les groupes touchés en vue d'étudier la harde de caribous et de déterminer ce qui peut être fait pour sa conservation. Vous avez également dit qu'une réunion aura lieu la semaine prochaine. Est-ce exact, monsieur?
M. Kusugak: Oui. Je n'y étais pas personnellement, parce que mon portefeuille concerne le développement économique, la formation et l'administration de Nunavut Tunngavik. Les personnes chargées de la question des terres et de la faune se trouvent dans une autre région, et elles étaient à cette réunion. Je ne peux pas parler de la teneur de leurs discussions, mais je peux vous assurer que c'est exactement ce que nous faisons.
Nous avons aussi abordé ce sujet sur le plan international à l'occasion des réunions de la Conférence circumpolaire inuit. À l'échelle internationale, on tient un registre couvrant un cycle de 50 ans. On consigne par écrit ce qui arrive non seulement au caribou, mais aussi à la morue et aux phoques, et ainsi de suite. Ce registre contient des renseignements assez complets sur le cycle des animaux et des saisons. Nous ne sommes pas surpris lorsque nous entendons que les réserves s'amenuisent ou qu'elles augmentent, parce le registre est bien tenu.
Le président: Est-ce Parcs Canada a eu quelque chose à voir avec la tenue de ces réunions, ou est-ce seulement l'affaire du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien?
M. Kusugak: Parlez-vous de la réunion tenue la semaine dernière?
Le président: Oui, je parle de la décision prise la semaine dernière. Savez-vous si Parcs Canada y a participé ou en a entendu parler?
M. Kusugak: Je ne peux vous dire. Je n'y étais pas personnellement, mais je peux certainement me renseigner.
Le président: Nous pouvons demander au ministre de nous répondre; il sera ici un peu plus tard ce matin.
Si ce groupe d'étude établissait que les terrains de mise bas du caribou Bluenose se trouvent dans cette région située à la frontière ouest du parc, changeriez-vous d'idée par rapport à ce que vous nous avez dit aujourd'hui?
M. Kusugak: J'étais là quand les biologistes nous ont dit que la population de caribous était en déclin en raison d'une chasse à outrance au Keewatin. Le sénateur Adams était là à cette époque. La réalité était tout autre. Je n'ai jamais mis les pieds dans la région proposée pour le parc national, mais les Inuvialuit habitent là. Je leur fait confiance, parce que leur priorité tient à la survie des hardes de caribous. Je connais les Inuvialuit. Je travaille avec eux depuis les années 70, alors que j'avais 20 ans. J'ai été envoyé dans la région ouest de l'Arctique, dans la région inuvialuit, pour réaliser une étude sur l'utilisation et l'occupation des terres. Ils sont tout simplement pareils à nous qui habitons la région est de l'Arctique. S'ils pensaient qu'ils pourraient mettre en danger les terrains de mise bas du caribou, je suis certain qu'ils ne viendraient pas ici présenter un exposé pour qu'on modifie la frontière du parc. Je crois fermement ce que je dis.
Le président: Êtes-vous actuellement en négociations concernant les frontières de ce parc? Nous avons entendu dire qu'une expansion du parc avait été proposée. Je suppose que vous négociez sûrement une certaine entente de cogestion relativement à ces terres. Est-ce exact?
M. Kusugak: C'est exact. Cette expansion du parc serait située dans la partie ouest du Nunavut. Les Inuit et les Dénés de la région ont exprimé leurs intérêts à ce sujet. Il s'agit plus d'un intérêt tripartite dans le parc Tuktut Nogait.
Le président: Vous nous dites que vous vous méfiez maintenant davantage du gouvernement fédéral, en raison de la manière avec laquelle il négocie cette entente concernant la possibilité pour vous de conclure d'autres ententes.
M. Kusugak: Oui, en ce qui a trait aux différentes négociations que nous avons au sujet des parcs nationaux. Lorsque nous concevons des parcs nationaux, nous prenons une grande partie du territoire. Nous ne disons pas: «Cette région peut être développée». Nous suggérons de capturer les animaux qui se trouvent dans les parcs nationaux pour les destiner entre autres à la consommation. Nous ne mettons pas d'affiche disant «Défense de passer ou de chasser», parce que nous croyons qu'il faut continuer de capturer ces animaux de temps en temps pour empêcher toute surpopulation d'une espèce.
Les végétaux qui poussent au Nord ne sont pas les mêmes qu'au Sud. Ici, il est possible de faire pousser chaque saison les produits destinés à l'alimentation animale. Le rythme de croissance est très rapide. Au Nord, une fois que les animaux ont mangé les végétaux, il faut plusieurs années avant qu'ils repoussent. Les animaux se déplacent alors à un autre endroit afin de permettre aux végétaux de repousser. Si vous vous étiez trouvés à Iqaluit au cours des deux dernières années, vous auriez vu des caribous en pleine ville. Ils ont mangé toute la végétation qu'ils ont pu trouvée et ont donc quitté la région pour environ sept ans pour permettre à la végétation de repousser. Le caribou agit ainsi. Il est difficile de dire «C'est un parc et c'est là qu'iront les animaux», parce qu'ils vont toujours se déplacer. La situation est hors de notre contrôle. C'est le moyen auquel Dieu a pensé pour permettre à la végétation de pousser. Nous parlons d'une région pour les parcs parce que les terrains de mise bas s'y trouvent, mais la mise bas ne se produira pas nécessairement seulement à ces endroits.
Le sénateur Spivak: Selon certains témoins provenant des compagnies minières, ils vont exploiter des mines qu'il y ait ou non sept points chauds. On ne parle que d'un seul de ces points chauds. Ils peuvent exploiter une mine et faire ce qu'ils veulent sans avoir besoin de ça.
Le sénateur Taylor n'est pas ici, mais il est un expert en exploitation minière. Il dit qu'ils ne savent pas. Au même moment, ils peuvent aller de l'avant et prospecter toutes les autres régions, puis attendre pour voir ce qui se produira. Je suis certain que vous êtes au courant de cette pratique. Pouvez-vous commenter?
M. Kusugak: C'est la vieille mentalité. Avant les ententes sur les revendications territoriales, c'est exactement de cette façon que les choses se passaient. Nous avons mis un frein aux projets de pipeline polaire et à l'utilisation de réservoirs dans les régions polaires, et ainsi de suite. Nous ne possédons pas de politique minière, et ainsi de suite. S'il était vrai que les compagnies minières pouvaient venir dans le Nord, exploiter la terre puis quitter, Mme Cournoyea ne m'aurait pas demandé de venir ici faire un exposé. Qui plus est, je n'aurais pas besoin de venir ici vous faire aujourd'hui cette suggestion si je croyais que mon intervention ne servait à rien et qu'ils développeraient la région de toute façon.
Nous sommes en négociation avec les entreprises minières. Nous discutons avec elles et essayons de les convaincre de venir parfois voir nos régions. Ce n'était pas comme ça il y a quelques années, mais maintenant nous contrôlons totalement la manière de développer ou non ces régions.
Le sénateur Spivak: Dans sa présentation, l'entreprise a affirmé qu'elle avait toujours l'intention de respecter ses obligations envers les Inuvialuit, et qu'elle peut continuer à le faire avec les 80 p. 100 qui sont à l'extérieur du parc. Je ne fais que vous répéter ce que l'entreprise a dit devant ce comité. Je m'arrête ici.
Le sénateur Hays: D'après ce que le sénateur Spivak a dit, et d'après les témoignages entendus, la limite ouest du parc devrait comprendre des terres du territoire Nunavut, particulièrement au-delà du lac Cariboo. Peut-être que vous n'êtes pas au courant de l'état des négociations; toutefois, si vous l'êtes, je serais intéressée à savoir ce qu'il en est, et si elles sont assez avancées pour que soit abordée la question de la région minéralisée du parc que les Inuvialuit souhaitent voir exclure. J'aimerais connaître tout renseignement ou commentaire sur l'état des négociations et savoir s'il y a eu des négociations depuis que la position des Inuvialuit à propos de la limite a changé.
M. Kusugak: Un peu plus tard ce matin je téléphonerai à mon vice-président dans cette région, qui traite avec les gens des mines et des parcs, et je vous ferai part des renseignements obtenus, monsieur.
Le sénateur Hays: Merci. J'ai peut-être confondu les limites est et ouest. C'est la limite est dont il est question. Merci.
M. Kusugak: C'est ce que nous appelons le Canada.
Le président: Merci monsieur de nous avoir fait connaître votre opinion. C'était très important que nous puissions vous entendre.
Notre prochain témoin est M. Andy Mitchell, secrétaire d'État (Parcs).
Monsieur le ministre, nous vous remercions de rendre visite au comité ce matin. Nous sommes heureux de pouvoir vous écouter à nouveau. Ce sera la fin de nos audiences, nous espérons terminer aujourd'hui et aller de l'avant avec votre projet de loi. Je dois ajouter que nous avons apprécié le fait que vous avez suivi de près les audiences auxquelles vous vous êtes grandement intéressé.
Si vous souhaitez faire des commentaires avant que mes collègues ne vous posent des questions, veuillez le faire maintenant.
L'honorable Andy Mitchell, secrétaire d'État (Parcs): Je suis heureux de revenir devant le comité et de pouvoir vous parler à nouveau. C'est ma troisième présence ici cet automne. J'ai l'impression de rencontrer de vieux amis.
Honorables sénateurs, j'espère que ce jour marquera définitivement la conclusion de ce qui a été une révision approfondie, la législation étant devant le parlement depuis huit ou neuf mois. Pendant cette période, nous avons eu la possibilité d'étudier les questions relatives à l'établissement du parc -- questions qui existaient déjà lorsque l'accord sur le parc a été conclu en 1996. Plus encore, nous avons discuté en profondeur de l'impact de la législation actuelle telle qu'elle devrait être adoptée d'ici la fin de 1998.
Aujourd'hui, j'aimerais prendre quelques instants pour parler de ce que je crois être le noeud du problème. D'un côté, je pense qu'il y a des risques dans le fait de modifier les limites, et je prendrai quelques minutes pour énumérer quels sont ces risques. D'un autre côté, il existe une croyance selon laquelle les Inuvialuit subiraient des pertes d'ordre économique si les limites ne sont pas modifiées. Je crois que ce sont là les deux principales questions qui préoccupent le comité à ce jour.
Monsieur le président, à ma connaissance il existe trois conséquences potentielles négatives particulières au changement de limites. J'ai déjà discuté de ce sujet avec le comité ainsi que personnellement, avec certains membres du comité.
Tout d'abord, je crois qu'il y aura recherche de compromis sur les lieux de mise bas; la deuxième question est celle de l'intégrité de ce parc; la troisième, c'est la question de la situation internationale du Canada en ce qui a trait aux 1002 terres contrôlées par l'Alaska et les États-Unis. Je prendrai quelques minutes pour aborder chacune de ces questions.
Comme l'illustrent les témoignages, un des principaux objectifs des Inuvialuit et des autres dans l'établissement du parc national Tuktut Nogait est de protéger les lieux de mise bas des hardes de caribous. En proposant d'apporter des modifications aux limites du parc, certains ont suggéré que le choix de la zone visée n'aurait pas d'impact sur ces lieux de mise bas. Mais la réalité est différente.
Le comité a demandé à John Nagy, biologiste, de venir témoigner. En lisant le témoignage de M. Nagy, il est évident qu'il croit que cette zone est réellement située dans les lieux de mise bas des caribous. Dans son témoignage, M. Nagy affirme:
Environ 75 p. 100 de la zone centrale est située dans le parc national Tuktut Nogait.
Il a expliqué:
La région que l'on propose d'exclure est une région importante, parce que c'est là que se situent les lieux où vont les caribous avant et pendant la période de vêlage et d'élevage. Les caribous qui utilisent cette région et dont c'est l'habitat doivent être protégés.
Il est intéressant de souligner qu'aucun des témoins entendus n'a mis en doute le témoignage de M. Nagy sur ce sujet.
Je crois qu'il n'existe aucun doute à l'effet qu'une politique qui comprendrait la protection des hardes de caribous doit, pour être efficace, respecter les limites qui ont été établies en 1996.
De plus, il est intéressant de remarquer -- je serais heureux de déposer cela devant le comité, bien que cela a peut-être déjà été fait -- que deux des signataires de l'accord, le Conseil Inuvialuit de gestion du gibier et la Regional Corporation, l'IRC, ont envoyé une lettre au prédécesseur de la ministre Copps en 1994, où on pouvait lire:
Les permis de Darnley Bay comprennent des terres publiques et des terres privées qui appartiennent aux Inuvialuit à l'intérieur de la région de peuplement Inuvialuit, tant dans les limites qu'à l'ouest du parc proposé. Les permis comprennent certaines des principales ressources du parc proposé, y compris les canyons des rivières Brock et Hornaday, et les chutes La Ronclere. Ils comprennent aussi les lieux de mise bas de la harde de caribous Bluenose situés dans les limites de la région de peuplement Inuvialuit. Manifestement, d'après deux signataires de l'accord de 1994, le Conseil Inuvialuit de gestion du gibier et la Regional Corporation, les lieux de mise bas étaient inclus dans cette zone spécifique.
La deuxième conséquence négative a trait à l'intégrité du système des parcs nationaux; ce serait créer un dangereux précédent d'accepter de modifier les limites du parc dans le but de faire de la prospection de ressources et après qu'un accord concernant ce parc ait été signé. En plus des limites du parc Tuktut Nogait, on a conclu des accords sur les limites de sept autres parcs, qui ne sont toutefois pas encore annexés à la Loi sur les parcs nationaux. Apporter des modifications aux limites convenues de Tuktut pourraient rendre ces autres parcs vulnérables à des demandes de modification des limites afin de satisfaire à des exigences d'exploration et d'extraction de ressources.
Honourables sénateurs, c'est réellement inquiétant. Il existe peut-être des ressources dans plusieurs des parcs de cette région. Apporter des modifications aux limites afin de permettre l'extraction de ressources dans une région donnée peut certainement amener d'autres entreprises, dans d'autres régions, à soulever la question: «Si on procède ainsi dans une région donnée, pourquoi ne pas faire de même dans une autre région?»
La troisième conséquence négative, d'après moi, c'est qu'en apportant des modifications aux limites, nous agirions de manière non conforme avec la politique fédérale visant à décourager les États-Unis de permettre l'extraction de ressources dans les 1002 terres d'Alaska, où sont situés les lieux de mise bas de la harde de caribous de la Porcupine. Pendant des années, le premier ministre a affirmé haut et clair qu'il était urgent que le gouvernement des États-Unis protège les lieux de mise bas de la harde de caribous transfrontalière de la Porcupine. Il est indispensable que nous ayons de la crédibilité auprès des Américains lorsque nous leur demandons avec insistance de protéger, sur leur territoire, l'habitat du caribou qui est menacé. Autrement dit, nous devons agir selon nos principes.
Je reviens à la même lettre parce qu'elle aborde aussi la question des 1002 terres. Il s'agit encore du Conseil Inuvialuit de gestion du gibier et de la Regional Corporation. Il y est dit:
L'émission de ces permis ne concorde pas avec la position du gouvernement fédéral à l'effet qu'il n'y aura pas de mise en valeur du pétrole et des mines sur des lieux de mise bas des 1002 terres de l'Alaskan National Wildlife Refuge.
Même en 1994, tous les groupes signataires de l'accord comprenaient les implications, au plan international, qu'aurait la protection des lieux de mise bas et l'impact sur notre position vis-à-vis des 1002 terres en Alaska.
Honorables sénateurs, voilà ce que je considère comme étant les conséquences négatives qui découleraient d'une modification des limites.
L'autre point de vue, c'est que certains considèrent que les Inuvialuit pourraient souffrir du fait que les modifications ne soient pas apportées. Au cours des séances du comité, on a beaucoup discuté de ces conséquences, qui ne seraient pas significatives. Les conséquences que je viens juste d'énumérer ne feraient pas le poids face à la nécessité de fournir des possibilités de développement économique aux Inuvialuit. Je ne suis pas totalement d'accord avec cette affirmation, parce qu'elle n'est pas le reflet des circonstances actuelles. Je dis cela parce que, même si les limites demeurent inchangées, les Inuvialuit recevront, comme c'est le cas actuellement, des compensations d'ordre économique pour les ressources minérales qui existent à l'extérieur du parc. Il y a actuellement un débat sur la manière dont cette activité économique pourrait leur profiter, mais il est évident que la valeur économique progresse et continuera à le faire.
Comme les sénateurs le savent, il y a eu en 1995 un accord de concession entre les Inuvialuit et Darnley Bay Resources. Les retombées resteront les mêmes que les limites du parc soient modifiées ou non. L'accord de concession n'a pas été signé sous réserve d'une modification des limites. En réalité, cet accord a été signé après le retrait des terres, lorsque l'entreprise a su que toute la région à fort potentiel minier était située dans les terres retirées, que ces terres feraient probablement partie du parc et qu'elles ne seraient pas disponibles pour exploitation minière. Elle savait de toute évidence que cette terre avait été retirée. Malgré cela, elle a signé un accord de concession avec les Inuvialuit.
Selon les renseignements diffusés au grand public par Darnley Bay Resources par l'intermédiaire de sa page Web, l'entreprise a fixé un montant d'argent précis qu'elle prévoyait ou prévoit remettre aux Inuvialuit. Il est question de 820 000 $ entre octobre 1995 et septembre 1998, et du montant potentiel de un million de dollars payable plus tard en 1998. Il est aussi question de frais d'administration de 100 000 $, plus 48 $ du kilomètre carré sous exploration. De plus, les Inuvialuit ont la possibilité de former avec elle un partenariat à 35 p. 100 pour toute exploration qui pourrait être entreprise.
Je crois que le témoignage des entreprises de l'industrie des ressources établit clairement que les avantages dont bénéficient les Inuvialuit demeureront, que les limites soient modifiées ou non. Les représentants de l'industrie minière qui ont parlé devant la comité ont clairement indiqué que 80 p. 100 des anomalies qui sont situées à l'extérieur du parc ont un potentiel très élevé et qu'ils se préparent à explorer, développer et, par conséquent, employer de la main-d'oeuvre locale en comptant sur les 80 p. 100 qui sont à leur portée.
L'avocat qui représente Darnley Bay Resources a dit, et je cite un extrait de son témoignage:
[...] nous allons choisir les meilleurs endroits pour y faire des forages. Nous savons déjà que la région où il semble que ce soit le plus près de la surface est celle qui est la plus rapprochée du Paulatuk.
Paulatuk est à l'ouest du parc.
Nous demanderons des permis pour forer d'abord à cet endroit parce que c'est là que c'est le plus près de la surface. C'est la zone la plus à l'ouest.
Les représentants de Darnley Bay Resources et de Falconbridge ont précisé que leur intention de poursuivre l'exploration n'est pas conditionnelle à des modifications des limites du parc. M. Prince, de Falconbridge, a affirmé que si la population du Canada décide de conserver une partie -- de l'anomalie -- dans le parc, cela n'empêchera pas l'entreprise de poursuivre son programme d'exploration. Plus tard, dans son témoignage, M. Allen de Darnley Bay Resources est allé dans le même sens.
Avant de répondre aux questions, monsieur le président, j'aimerais aborder la question du compromis. On a suggéré qu'une diminution de 2,5 p. 100 de la superficie du parc serait un compromis très raisonnable. Je veux souligner plus clairement qu'un compromis significatif a déjà été accepté. L'accord signé en 1996 comprend des frontières qui sont déjà un compromis entre la conservation et le développement, entre la protection des lieux de mise bas et l'exploration de nouvelles ressources minières.
La limite de ce parc national est un compromis entre les objectifs des Inuvialuit et ceux du gouvernement fédéral, un compromis obtenu à la suite de sept ans de consultations et de négociations qui ont conduit à l'accord de 1996. Aucune des parties n'a atteint 100 p. 100 de ses objectifs, mais toutes les parties ont signé l'accord. C'est là que réside tout l'art du compromis.
Le parc national ne comprend pas 100 p. 100 des lieux de mise bas, pas plus qu'il n'inclut la totalité du bassin hydrographique de la rivière Hornaday ni aucune zone côtière. Les négociateurs gouvernementaux ont accepté des compromis sur tous ces points et ont obtenu un équilibre acceptable.
La demande récente des Inuvialuit, faite deux ans après que l'accord a été signé, aurait pour conséquence que 100 p. 100 de l'anomalie serait située à l'extérieur du parc national, mais que la proportion des lieux de mise bas situés à l'intérieur du parc diminuerait aussi. Là n'est pas l'équilibre et ce n'est certainement pas un compromis.
Toute modification visant à diminuer la superficie du parc national Tuktut Nogait aurait les conséquences négatives que j'ai énumérées au début de ma présentation, sans garantir en aucune façon des avantages économiques additionnels pour les Inuvialuit. La réalité est que les avantages qui proviennent des ressources minières continueront, comme l'ont clairement indiqué les entreprises, parce que ces dernières continueront leur exploration et leur développement, que les limites soient modifiées ou non.
J'espère avoir expliqué clairement la position du gouvernement fédéral sur le sujet et avoir bien répondu aux préoccupations exprimées devant ou par le comité au cours des dernières semaines.
Je m'en voudrais de ne pas féliciter le comité pour le travail accompli et la diligence dont il a fait preuve dans l'examen de la question.
Le président: Merci, monsieur le ministre. Nous avons apprécié vos commentaires.
Le sénateur Cochrane: Nous avons attendu une décennie pour obtenir une législation comme celle-ci pour établir formellement le parc national de Gros Morne, à Terre-Neuve, et il y a d'autres parcs désignés dans le pays qui sont dans la même situation. L'accord qui a permis de créer Tuktut Nogait a été obtenu il y a deux ans à peine.
Ce ne sont pas tous les témoins que nous avons entendus qui veulent aller de l'avant maintenant avec cette question. Pourquoi le gouvernement est-il si pressé de faire adopter ce projet de loi lorsque, apparemment, on ne se hâte pas en ce qui concerne les autres parcs?
M. Mitchell: Il est urgent de protéger tous nos parcs. À mesure que nous serons capables de régler le problème dans un parc en particulier, nous le ferons.
Les sept années de négociation qui ont conduit à l'accord de 1996 ont été menées dans la perspective de placer les terres sous la protection de la Loi des parcs nationaux. À la table de discussions, de nombreuses et importantes questions ont été abordées, depuis le début des discussions en 1989 jusqu'à la conclusion de l'accord en 1996. Ces questions ont été réglées une à une. En 1996, chacun était satisfait que ses objectifs soient atteints et chacun était d'accord pour apposer sa signature sur le document. Nous avons donc pu faire adopter le projet de loi.
Le processus suivi pour mener à l'établissement de ce parc est quelque peu différent du processus utilisé par le passé. Dans ce cas précis, nous nous sommes assurés que la population locale était d'accord, ce que nous ferons toujours à l'avenir. Elle doit faire partie de la négociation et de l'accord.
Lorsque nous avons conclu l'accord, en 1996, les six parties étaient satisfaites de la création de ce parc national. Dans les négociations avec les autres parcs nationaux, nous n'avons pas atteint le point où nous pouvons signer un accord sur la question parce que les parties ne sont pas encore satisfaites. La position du Service canadien des parcs sur le sujet est claire. Nous signerons un accord et établirons un parc lorsque toutes les parties intéressées seront d'accord avec le projet.
En ce qui concerne la situation du Tuktut Nogait, toutes les parties étaient à l'aise. Nous avions trouvé des réponses à toutes les questions à la satisfaction de toutes et elles ont signé l'accord. Dans le cas des autres parcs, il y a des questions qui ne sont pas toujours pas réglées avec les collectivités locales.
Le sénateur Cochrane: Comme nous l'avons entendu, les gens n'étaient pas au courant de l'existence de cette anomalie à l'intérieur des limites proposées pour le parc, ni du fait que cela apporterait des emplois à la population locale. C'est la question qui se pose maintenant.
M. Mitchell: Sénateur, j'ai beaucoup de difficultés à accepter cela, parce que l'enquête géologique qui a été faite en 1994 indiquait qu'il y avait un potentiel de ressources minières relativement élevé dans l'anomalie et que l'anomalie existe à l'intérieur du parc. C'est dans le dossier. L'entreprise Darnley Bay, à la demande des Inuvialuit, a dit qu'elle se retirait volontairement. Comme je l'ai dit précédemment, nous ne considérons pas des terres pour en faire un parc national seulement une fois que toutes les ressources en ont été utilisées; nous croyons qu'il est important de protéger notre héritage naturel et nous exercerons ce pouvoir de protection en créant des parcs nationaux.
La preuve est faite que le potentiel de ressources minières relativement élevé est connu depuis 1994 et que les parties se sont quand même mises d'accord sur la création de ce parc naturel. Personne n'a caché le fait que le potentiel minier de la région était élevé. En réalité, 80 p. 100 de l'anomalie, selon le témoignage des entreprises minières devant ce comité, et probablement le meilleur 80 p. 100, sont situés à l'extérieur du parc; les Inuvialuit auront donc une possibilité de participer à l'exploration et au développement de ces ressources de concert avec les entreprises et ils en retireront des avantages économiques.
Le sénateur Cochrane: Comme vous venez de le mentionner, les entreprises minières nous ont fait savoir qu'elles avaient l'intention de faire de l'exploration à l'extérieur des limites du parc, même si le projet de loi C-38 est adopté. Toutefois, elles ont aussi affirmé qu'elles croient que l'anomalie la plus prometteuse pour l'exploration est située à l'intérieur des limites du parc. Le Service canadien des parcs et votre gouvernement seraient-ils prêts à accepter un compromis?
M. Mitchell: Sénateur, nous sommes toujours ouverts à un compromis. Nous avons travaillé pendant sept ans pour parvenir au compromis actuel, à la suite de quoi 80 p. 100 de l'anomalie restent accessibles et 20 p. 100 sont compris dans le parc. Franchement, l'opinion qui veut que le Service canadien des parcs engloutisse les richesses minières potentielles du Nord est tout à fait fausse. Ma foi, ce que nous protégeons avec les parcs nationaux est de l'ordre de 2 ou 3 p. 100. Cela signifie qu'il reste 97 p. 100 qui ne sont pas protégés par des parcs nationaux. Nous n'engloutissons aucun territoire. Nous avons travaillé pendant sept ans pour parvenir à ce compromis raisonnable.
Vous avez dit que l'entreprise a affirmé que le meilleur potentiel se trouvait à l'intérieur du parc. J'aimerais obtenir des clarifications là-dessus, parce d'après ce que je sais des témoignages, la meilleure partie, qui est à la disposition des entreprises et qui semble être le plus près de la surface, est celle qui est située le plus près de Paulatuk, à l'ouest du parc; mais il est possible que je sois mal renseigné.
Le sénateur Cochrane: Les entreprises ont fait un relevé aérien et elles ont remarqué cette anomalie qui leur semble particulièrement intéressante, mais ce ne sont pas nécessairement les entreprises qui souhaitent que les limites soient modifiées. Ce sont les gens. Ce sont les gens qui y voient des avantages, non nécessairement les entreprises. Les entreprises ont affirmé qu'elles feraient de l'exploration à l'extérieur des limites.
Voilà le compromis que je propose: laissez les entreprises aller de l'avant dans l'exploration et le forage à l'extérieur des limites du parc -- ce qu'elles feront de toute manière -- mais si ces zones s'avèrent ne pas être viables ou rentables du point de vue économique, laissons-les faire de l'exploration et du développement à l'intérieur des limites du parc. Pouvons-nous amender le projet de loi C-38 en ce sens?
M. Mitchell: Vous en avez le pouvoir, tout comme la Chambre, mais je ne souscrirais pas à une telle initiative. Pas plus qu'à l'initiative d'une société forestière qui me dirait: «Nous avons examiné la forêt du parc national Puckasaw en Ontario et les possibilités économiques sont énormes en ce qui a trait au bois d'oeuvre. Les prix ont monté en flèche dernièrement. Le nord de l'Ontario en retirerait des profits énormes si vous nous laissez bûcher dans le parc.» Je répondrais simplement que je ne pourrais donner une telle permission.
Le sénateur Adams: Votre mémoire m'apparaît comme du déjà vu. Rien ne semble avoir changé dans les préoccupations concernant le parc Tuktut Nogait. Le sénateur Cochrane a posé des questions sur les frontières. D'après ce que j'ai compris dans les réponses, les instruments disponibles au moment du levé magnétique n'étaient pas vraiment précis. Qu'en pensez-vous?
M. Mitchell: J'en comprends, sénateur, que l'étude géologique réalisée en 1994 a permis de faire des évaluations minérales avec des résultats satisfaisants. La technologie ne cesse d'évoluer, les appareils sont sans cesse perfectionnés. Je ne suis pas un spécialiste de la prospection minérale, mais le comité compte un expert parmi ses membres.
Le sénateur Adams: Selon Darnley Bay Resources, les instruments utilisés avaient 23 ans. Est-ce bien l'âge des instruments en moyenne?
M. Mitchell: Sénateur, je comprends votre question, mais je ne crois pas que le problème soit l'âge des instruments, ni la précision des résultats de l'étude. Le point important est que, selon l'information donnée aux Inuvialuit en 1986, fût-elle exacte ou non -- et je crois qu'elle était exacte -- le potentiel du projet allait de moyen à élevé. C'était peut-être inexact, mais c'est ce qu'on leur a dit. Et parce que le potentiel avait été qualifié de moyen à élevé, ils ont pris la décision consciente de permettre que 20 p. 100 de l'anomalie fasse partie du parc. Si cette information était inexacte, c'est une toute autre histoire. Cependant, ils ont effectivement pris cette décision en 1996, alors qu'ils connaissaient le potentiel minier. Ils ont consenti, par une entente avec le gouvernement du Canada et les autres parties, de placer le territoire sous la protection d'un parc national, en toute connaissance des résultats de l'étude diffusés en 1994.
Pour ce qui est de la superficialité de l'anomalie, dont Mme Cournoyea a discuté assez longuement, M. Lawyer, de Darnley Bay, estime que l'anomalie est relativement superficielle dans l'ouest et qu'elle s'approfondit à mesure que l'on progresse vers l'est. En fait, Darnley Bay Resources nous indique que plus on se rapproche de Paulatuk à l'extérieur du parc, plus l'anomalie est superficielle; si vous allez vers l'est, en direction du parc et vraisemblablement à l'intérieur du parc, l'anomalie semble de plus en plus profonde. C'est l'opinion de spécialistes du domaine. Du moins, je suppose que Darnley Bay détient cette expertise. C'est leur domaine. Ils ont eux-mêmes affirmé au comité que les produits d'extraction aux confins sont les mêmes que ceux à l'extérieur du parc et à proximité de Paulatuk.
Le sénateur Adams: Avez-vous une idée du pourcentage des terres inuvialuit qui a été amputé par Parcs Canada?
M. Mitchell: Aucune partie, à mon avis. Ce sont des terres de la Couronne, au titre fédéral. Le parc ne recouvre aucune terre inuvialuit.
Le sénateur Adams: Selon l'information que j'ai eue, Parcs Canada a déjà amputé 29 p. 100 du territoire inuvialuit.
M. Mitchell: Je ne comprends pas, sénateur.
Le sénateur Adams: Parcs Canada a déjà envahi 30 p. 100 du territoire inuvialuit. Ne s'est-on jamais interrogé auparavant sur le pourcentage que grugerait Parcs Canada dans le territoire inuvialuit, alors que d'autres terres étaient disponibles dans d'autres régions?
M. Mitchell: C'est une très bonne question. Ce n'est pas comme si les Inuvialuit ne nous avaient pas demandé d'établir un parc dans cette région. S'ils nous avaient dit en 1996: «Vous en avez déjà trop pris; nous ne voulons pas que vous preniez d'autres parties de notre territoire», ce qui aurait été surprenant parce qu'ils sont de très bons intendants des terres, alors nous ne serions pas allés de l'avant. Mais, si je lis bien les rapports, ce n'est pas ce qui s'est passé. En réalité, les Inuvialuit eux-mêmes ont demandé au gouvernement, en 1989, d'établir un parc. Ce n'est pas le gouvernement qui a pris les devants pour leur imposer un parc.
En 1996, après 7 années de négociations, ils ont volontairement signé l'entente. Parcs Canada ne s'est pas impunément approprié leur territoire. Nous avons agi à leur demande. Après sept années de négociations, ils ont signé l'entente. J'ai de la difficulté à voir comment on peut nous accuser de s'être accaparés de leur territoire.
Le sénateur Adams: On a beaucoup discuté du fait que le gouvernement du Canada refusait de reconnaître l'article 22.1 de l'entente. Ce matin, Jose Kusugak s'est montré très soucieux à ce sujet. Si vous arrivez dans le Nunavut et que vous vous mettez à créer des parcs, comme vous l'avez fait à la baie Wager, sans consulter la population locale, nous serons toujours confrontés aux mêmes difficultés.
M. Mitchell: Il semble que le comité ne soit pas au fait que Parcs Canada a entamé des discussions et des négociations sérieuses avec les Inuit de la région de la baie Wager. Je l'ai dit publiquement, et je le répète: nous allons créer un parc dans la région de la baie Wager si nous arrivons à une entente avec les autochtones qui y vivent. Je tiens de plus à préciser la chose suivante: s'ils nous proposent une entente et que nous signons une entente concernant la nature du parc, nous nous attendrons à ce que l'entente soit respectée.
Nous n'en sommes pas là pour ce qui est de la baie Wager. Nous en sommes à l'étape où nous en étions pour ce parc en 1996. Toutes les propositions ont été déposées, et nous tentons d'atteindre le consensus. Parcs Canada s'est montré favorable à des négociations; de toute façon, nous tenons toujours à négocier avec la communauté autochtone locale avant de signer une entente concernant la création d'un parc, afin de nous assurer qu'elle a obtenu satisfaction. Nous leur disons simplement ceci: «Nous négocierons aussi longtemps que vous voudrez; nous sommes prêts à discuter de toutes les questions que vous nous soumettrez; nous allons étudier toutes les difficultés que vous soulèverez; peut-être ne serons-nous pas d'accord sur tous les points, mais nous sommes toujours prêts à prendre votre point de vue en considération.» Quand nous avons trouvé un terrain d'entente et que nous avons signé une entente pour la création d'un parc, nous nous attendons à ce que toutes les parties s'y conforment, à moins que toutes ne s'entendent pour rouvrir les négociations.
Le sénateur Adams: Existe-t-il une zone tampon dans le parc national?
M. Mitchell: Non. Aucune disposition de la Loi sur les parcs nationaux ne nous permet d'établir une zone tampon. Il peut arriver qu'une zone tampon soit délimitée de façon informelle quand les autorités provinciales ou territoriales souhaitent protéger dans une certaine mesure les terres avoisinantes. J'enjoindrais mes homologues des territoires et des provinces à agir ainsi.
Le sénateur Adams: Selon l'information dont je dispose, une zone tampon stricte pourrait s'étendre à 10 ou 20 milles de la frontière. Ainsi, on ne pourrait exploiter les abords du parc. On parle d'exploration aux confins du parc. Si une zone tampon était délimitée, 20 ou 30 milles de terre supplémentaires pourraient être assujettis à la réglementation.
M. Mitchell: Il n'existe pas de zone tampon. Je vais me référer une fois de plus à l'exemple du parc Puckasaw. On bûche et on cultive les terres situées à l'extrême limite du parc. Au Manitoba, au mont Riding, l'activité agricole s'étend jusqu'à la frontière du parc. À vol d'avion, le parc ressemble à une île sertie dans la vaste prairie. Il n'y a pas de zone tampon.
Le sénateur Butts: Merci, monsieur le ministre. J'ai une seule question, que j'essaierai de rendre la plus précise possible.
Vous avez dit que Darnley Bay ira de l'avant avec les 80 p. 100 qui restent, si c'est ce qu'on leur attribue; , et qu'ils ont promis des emplois à la population locale. En outre, il devrait y avoir des emplois créés dans le parc. Nous avons entendu ici des propos contradictoires sur le fait que le gouvernement fédéral aurait promis, si ce n'est déjà fait -- je ne sais plus -- de dépenser 10 millions de dollars pour la création de 2 emplois. J'aimerais que vous me donniez l'heure juste à ce sujet.
Pouvez-vous faire des projections sur les sommes qu'investira le gouvernement fédéral dans ce projet, et sur le nombre d'emplois qui pourraient en découler en plus des emplois dans les mines?
M. Mitchell: Je sais que le sénateur Adams ne se fait pas prier pour énoncer haut et fort cette comparaison de la dépense de 10 millions de dollars pour 2 emplois.
Le sénateur Butts: Ce serait merveilleux de créer un emploi de 5 millions de dollars.
M. Mitchell: Bien que nous souhaitions que l'établissement du parc résulte en la création d'emplois, il faut considérer tous les facteurs. Oui, il en coûtera 10 millions de dollars pour créer ce parc, mais tout cet argent ne vise pas uniquement la création d'emplois. Nous tenons à ce projet parce que nous croyons qu'il est important de protéger l'écosystème de ce parc, et qu'il devrait être représentatif de la région.
Si nous faisions partie de DRHC et que notre projet visait uniquement la création d'emplois, le sénateur aurait tous les droits de le décrier, et il aurait tous les droits de dire au ministre responsable de DRHC: «Vous avez dépensé 10 millions de dollars pour créer 2 emplois.» Il y aurait certes à redire si DRHC mettait en branle un tel projet. Mais notre projet n'est pas un programme de création d'emplois. Oui, certains emplois seront créés, et j'en suis heureux, mais l'argent investi servira à protéger l'environnement naturel et l'écosystème en place, et à donner aux Canadiens un échantillon représentatif de cette région.
Des sommes seront dépensées et des emplois iront aux citoyens locaux, mais le sénateur Adams a raison: ce n'est pas une panacée aux problèmes des Inuvialuit ou du peuple de Paulatuk. Les rues ne seront pas pavées d'or et on ne trouvera pas deux autos dans chaque garage. La création d'un parc n'entraînera pas de tels miracles. Cependant, il constituera un plus pour l'activité économique de la région.
De plus, et il s'agit là de considérations économiques, 80 p. 100 de l'anomalie est située à l'extérieur du parc. Les sociétés ont été claires sur leurs intentions d'aller dans cette région. Elles investissent déjà là-bas, et elles continueront de le faire si le parc est établi selon les modalités proposées.
Pour ce qui est des 10 millions de dollars, il faut comprendre que cet argent est un investissement. Comme je l'ai déjà dit, il ne s'agit pas à proprement parler d'un programme de création d'emplois, mais il est certain que le projet stimulera l'activité économique. Nous avons dépensé près de 1 million de dollars l'été passé. Nous avons engagé des résidents locaux. Nous nous sommes engagés à le faire. Tout comme les sociétés minières se sont engagées auprès de la population locale à collaborer avec elle pour des projets qui auront des retombées économiques bénéfiques pour les Inuvialuit. De même, Parcs Canada, en signant des ententes avec les Inuvialuit, s'engage à les faire participer à toutes les activités économiques générées.
Le sénateur Butts: Si vous étiez capables de paver les rues d'or, je vous aurais demandé de créer un parc sur l'ensemble du territoire du Cap-Breton.
Le sénateur Gustafson: Monsieur le ministre, vous avez soulevé trois sujets. Premièrement, vous avez dit que vous aviez fait des compromis. J'aimerais à cet effet suggérer que le compromis demandé était très négligeable. Je suis convaincu de cela. Je viens d'une région rurale. Nous, les entrepreneurs agricoles, voyons la population rurale diminuer. Sur le plan politique, il faudrait se préoccuper en fait de l'expansion affolante de la jungle de béton et des problèmes environnementaux. Il faudrait se pencher très sérieusement sur ces questions. Ces gens demandent un très petit compromis. Comme l'ont indiqué des témoins précédents, les parcs et les zones de conservation couvrent au total 85 000 kilomètres carrés, soit un peu moins que la superficie de la Colombie-Britannique. C'est un estimé équitable.
Deuxièmement, vous avez parlé d'un dangereux précédent; pour ma part, j'estime que vous créez un dangereux précédent en refusant de coopérer avec la population locale. Il suffit de voir les faits en face. J'ai entendu ce matin le débat entre le premier ministre de la Colombie-Britannique et le chef de l'opposition, et il est clair que la situation est grave là-bas. Il faut revoir sérieusement notre façon de traiter avec ces peuples et cesser d'agir comme les «tout-puissants d'Ottawa», comme cela a toujours été le cas. Le compromis proposé pourrait être vraiment important.
Vous nous avez parlé finalement de l'approche globale, en reconnaissant la position des Américains, qui nous disent: «Voilà ce que nous voulons. C'est notre entente. Les Canadiens ne respectent pas leur partie de l'entente.» Si vous examinez la façon de faire des Américains dans ce genre d'expansion territoriale, je crois que nous figurons très bien en comparaison.
Quelle est la situation en Alaska? Quelle superficie ont-ils cédé dans l'État de l'Alaska?
M. Mitchell: Sénateur, vous le savez peut-être, je représente une région très rurale de l'Ontario.
Le sénateur Gustafson: J'ai été député pendant quatorze ans et secrétaire durant neuf de ces quatorze années. Il survient un étrange phénomène aux députés devenus ministres. Ils bénéficient d'une certaine de protection à titre de ministre -- à titre de bureaucrate, à vrai dire -- et ils ont tendance à rentrer facilement dans les rangs. Ils lisent tout le matériel et ils suivent les recommandations. Je suis certain que vous avez lu plus de documents produits par les bureaucrates que par les autochtones. C'est là que le bât blesse à mon avis. Il est temps que le comité se réveille et se rende à l'évidence qu'une autre partie du Canada mérite considération.
M. Mitchell: Premièrement, je pourrais m'offenser quand vous affirmez que je perds de la crédibilité dans l'exercice de mes fonctions de parlementaire, à titre personnel et au chapitre de mes convictions du seul fait d'avoir été nommé ministre. Je me sens offusqué. Je suis tout à fait en mesure de faire valoir mes convictions et de forger mes propres opinions, que je sois ou non ministre, un rôle d'ailleurs que je suis très fier et très content d'exercer.
Le sénateur Gustafson: J'ai vu beaucoup de cas où le contraire était la norme.
M. Mitchell: Je disais donc que je représente une circonscription rurale, Parry Sound--Muskoka. C'est l'une des plus rurales de l'Ontario. Mon prédécesseur est encore actif et nous faisons beaucoup de choses ensemble dans la circonscription.
Je citerai en exemple une situation vécue dans ma circonscription. Il s'y trouve des plans d'eau douce parmi les plus beaux du Canada, ainsi qu'un parc national. Nous subissons des pressions considérables. Muskoka abrite le Parc national des Îles-de-la-Baie-Georgienne. Huit millions de personnes sont à sept heures de route; il n'est pas irréaliste de penser qu'un propriétaire de chalet vienne nous voir et nous demande: «Donnez-moi 100 pieds de l'île Beausoleil. C'est tout ce que je veux. L'île est grande. Donnez-moi 100 pieds pour construire mon chalet. Je serais si heureux, plus heureux que jamais.» On pourrait dire que c'est un petit compromis. Tout ce qu'il demande, c'est le centième de 1 p. 100 du Parc national de l'Île-Beausoleil pour construire son chalet. Nous subissons le même genre de pressions.
J'ai été président du comité des ressources naturelles de la Chambre des Communes et j'ai été confronté à beaucoup de difficultés qui sont votre quotidien. En 1986, j'ai voyagé dans tout le pays afin de dresser un rapport sur le Canada rural et sur les préoccupations de la population rurale. Je comprends bien les facteurs en jeu. Et j'exerçais mon mandat en m'appuyant sur cette expérience.
Pour ce qui est de la collaboration avec les autochtones et les groupes représentant les Premières nations, nous avons consacré sept années à ce dossier, à des négociations avec ce peuple, pour en venir à une entente qu'ils ont signée. Parcs Canada a payé les frais, à leur demande, de sorte qu'ils pourraient bénéficier des conseils et des avis d'experts au cours du processus. Nous les avons aidés à négocier avec nous et nous avons payé les frais. Ils ont choisi leurs représentants, mais nous les avons payés. Nous négocions avec les Nunavut de la baie Wager. Tous les projets d'établissement de parcs dans le Nord canadien illustrent notre ouverture aux négociations.
Je l'ai dit dans mes commentaires, nous ne refusons pas les compromis. Nous avons pris 7 ans pour arriver à un compromis signé par toutes les parties en 1996. Je dis simplement que, maintenant que nous en sommes arrivés à ce compromis et à une entente, il faut s'y conformer et passer à la mise en oeuvre.
Nous éviterons les répercussions négatives en maintenant les frontières, et les Inuvialuit pourront bénéficier des retombées économiques découlant des 80 p. 100 de l'anomalie située à l'extérieur du parc. Ils obtiennent des bénéfices maintenant et les entreprises ont affirmé que, si les frontières restent inchangées, elles poursuivront l'exploitation dans cette région. Les sociétés ont clairement affirmé que la partie de l'anomalie située la plus à l'ouest, soit à proximité de Paulatuk, est la plus près de la surface. Plus on avance à l'intérieur du parc, plus elle est enfouie. À leurs dires, c'est la partie située à l'extérieur du parc qui recèle le plus grand potentiel économique. Devant ces faits, je crois qu'il est tout à fait indiqué d'adopter le projet de loi C-38 sans modification.
Le sénateur Gustafson: Vous avez cité plusieurs exemples de compromis. J'aimerais en citer un à mon tour. De nos jours, une loi sur le contrôle des armes à feu et l'enregistrement est en vigueur. Eh bien, j'ai pu entendre les propos d'autochtones du Nord ainsi que de trois, sinon quatre, provinces qui souhaitaient que l'on arrive à un léger compromis concernant cette loi. Ces personnes ont à mon sens une notion très différente de l'utilité des armes à feu que les résidents de Montréal ou de Toronto. Quand on vient d'une circonscription rurale, on connaît très bien ces différences. Pourtant, on n'a fait aucun compromis quand est venu le temps d'imposer cette loi aux autochtones. Pour eux, un fusil est tout simplement un outil. Ils utilisent leurs fusils de la même façon que j'utilise mes outils agraires, comme mon tracteur, sur ma ferme. C'est leur façon de vivre. Cette décision était purement politique. Le gouvernement a senti qu'il avait l'appui de la majorité, alors il a décidé de faire exécuter la loi.
C'est la même chose pour le sujet à l'ordre du jour. J'en suis convaincu. J'ai écouté le sénateur Adams, dont la contribution à ce comité est inestimable, qui le fait bénéficié d'une longue expérience. D'autres témoins en ont fait autant. Mais le gouvernement ne fait aucun effort d'ouverture. Un diktat politique le pousse à aller droit de l'avant, selon le plan établi, sans faire de place aux modifications.
M. Mitchell: Ce n'est ni le temps ni le lieu pour discuter de la loi sur les armes à feu. À mes yeux, il n'y a pas de lien entre le projet de loi C-68, adopté par le Parlement précédent, et le projet C-38 à l'étude aujourd'hui. Nous pourrons vous et moi discuter du contrôle des armes à feu plus tard. Ce n'est pas à mon avis du ressort de ce comité.
J'ai énormément de respect pour le sénateur Adams et ce qu'il tente de réaliser. Je le considère non seulement comme un collègue, mais aussi comme un ami.
Le sénateur Buchanan: Je suis d'accord avec vous quand vous parlez de l'importance de protéger l'écosystème et l'environnement, et je m'opposerais fortement à toute velléité de modification des frontières du Parc national du Cap-Breton. Il y a eu des tentatives à cet effet et nous nous y sommes fortement opposés dans les années 80. Cependant, j'ai de la difficulté à comparer cette région avec le Nord, surtout si on pense que ce sont environ 2 p. 100 de la superficie totale du parc qui sont en cause. Ces 2 p. 100 pourraient être à l'origine de quelques emplois dans la région, qui n'existeront tout simplement pas s'ils ne sont pas capables d'exploiter les ressources minérales ce petit 2,5 p. 100. On me dit que, en plus de ces 2 emplois, de nombreux autres emplois seront créés s'ils développent ces 2,5 p. 100. Il s'agit d'une infime partie de la superficie totale, et je ne vois pas comment l'écosystème du Nord pourrait en souffrir.
Cela étant dit, je m'inquiète du fait que le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, les Inuvialuit, les Nunavut Tunngavik et les habitants de la baie Darnley souhaitent que l'on apporte cet amendement.
Le sénateur Adams: Le territoire appartient aux Inuvialuit.
Le sénateur Buchanan: Beaucoup d'autres témoins ont demandé que l'on apporte cet amendement et qu'on l'on protège l'écosystème, mais ces 2,5 p. 100 ne seront pas vraiment sources de dommages importants.
Supposons que nous ne soyons pas en 1998 mais en 1996, et que les relevés aériens effectués en 1997 aient en fait été effectués en 1996, montrant que des ressources minérales très importantes se trouvaient dans le parc proposé. N'auriez-vous pas exclu ces 2,5 p. 100?
M. Mitchell: Je ne peux pas dire si nous les aurions exclus. Cependant, j'imagine que les Inuvialuit auraient demandé que l'on exclut en effet cette partie. Ils nous auraient donné une série de raisons. Puis, selon la réponse du gouvernement, ils auraient dit: «Nous ne pouvons arriver à une entente; nous ne pouvons signer une entente. Il n'y aura pas de parc.» Ce n'est pas ce qui s'est passé. Nous en sommes plutôt arrivés à un compromis, comme je l'ai indiqué dans mon mémoire.
Si vous examinez la carte du parc, vous constaterez qu'il ne touche pas à la mer. Il a été reculé parce qu'ils ne voulaient pas qu'il touche à la mer. Une partie des eaux d'amont a été exclue. Voilà pourquoi il est difficile de spéculer sur une réponse possible à cette époque. Avant l'entente, il y aurait eu un signataire. Elle aurait fait l'objet de discussions et de négociations, et elle aurait été intégrée dans le processus d'entente lié à la baie Darnley.
Il y a des incidences négatives. Les sociétés minières continueront d'explorer 80 p. 100 de l'anomalie, et à créer de l'emploi. C'est la réalité. Cependant, personne ne peut dire si les 2,5 p. 100 feront une différence sur le plan de l'activité économique générée par les sociétés minières. Ce qui compte, c'est qu'elles sont prêtes à poursuivre leurs activités sans cette parcelle. Elles ont clairement indiqué dans leur déclaration que les produits d'extraction qui sont le plus près de la surface sont les plus éloignés du parc. Nous ne sommes pas devant une situation où, si nous ne changeons pas d'avis concernant les 2,5 p. 100, toute exploitation minière cessera. L'activité minière se poursuit et les sociétés minières ont indiqué qu'elles continueront l'exploration. Par ailleurs, il faudra prévoir les incidences négatives que j'ai mentionnées.
Le président: Le sujet de la discussion d'aujourd'hui pourrait relever de la pure rhétorique, puisqu'il est possible qu'il ne s'y trouve aucune ressource. Si nous abordons la chose sous un angle plus optimiste, il pourrait s'agir de l'un des plus importants gisements du monde. Les sociétés minières nous ont laissé entendre que l'anomalie la plus riche se trouvait peut-être à l'intérieur du parc. Elles nous ont dit aussi que nous ne saurons jamais si le filon principal se trouve dans le parc parce que, quand la loi aura été adoptée, les dés seront jetés, et il n'y aura plus moyen de le savoir.
Ce qui me trouble, monsieur le ministre, est l'empressement à clore le dossier et les allégations de mauvaise foi. Si j'avais signé cette entente et que j'avais vu que l'on permettait à toutes les parties de demander une révision par les parties d'une partie ou de l'ensemble de l'entente, j'aurais eu l'impression que j'aurais pu, advenant de nouvelles données, demander au gouvernement fédéral de réexaminer l'entente. Nous avons vu que les données avaient changé substantiellement depuis 1996. Nous avons vu que 800 000 $ avaient été dépensés, ce qui est beaucoup plus semble-t-il que ce qui était prévu à l'origine. Les habitants de la région examinent actuellement les principales aires de mise bas, afin de mieux comprendre les phénomènes en cours. Ils se rassembleront de nouveau au début de la prochaine année.
Ce sont des questions tout à fait liées à notre ordre du jour. Je ne comprends pas votre refus de prendre ces questions en considération, afin qu'on puisse en discuter et réviser les positions. Si j'avais la moindre conviction que les terrains de mise bas étaient menacés, je voterais immédiatement contre la modification des frontières. Mais ce n'est pas l'écho que je reçois des habitants de la région. Pourquoi êtes-vous si pressés? Pourquoi voulez-vous faire adopter ce projet de loi si rapidement? Pourquoi refusez-vous un nouvel examen du dossier, comme vous vous êtes engagés à le faire en vertu de l'entente, alors que cinq ou six parties estiment qu'il est nécessaire?
M. Mitchell: Je ne suis pas de votre avis sur plusieurs de vos allégations. Les Inuvialuit eux-mêmes, en 1994, ont affirmé clairement dans une lettre que j'ai citée que cela n'avait aucune incidence sur les principaux terrains de mise bas. Pour des raisons quelconques, ils ont changé d'idée. Votre comité a invité un biologiste qui travaille dans le Nord, qui a affirmé qu'une partie des terrains de mise bas était touchée. De plus, vous avez cité une partie seulement de l'article 22.1 de l'entente. Pourquoi n'avez-vous pas donné la citation complète? On y dit que toutes les parties doivent acquiescer à une éventuelle demande de révision.
Le président: On y stipule que la révision doit être amorcée avant 90 jours. C'est là qu'il faut obtenir la majorité pour l'entente. Si vous aviez besoin de la majorité, cet article serait inutile, parce que si six parties s'entendent pour poser un geste, elles peuvent à toutes fins utiles brûler l'entente. En vertu de la loi en matière de contrats, cet article indique uniquement que toutes les parties peuvent l'invoquer; autrement, il devient inutile.
M. Mitchell: Au cours des négociations, chaque partie qui a négocié cet article a indiqué qu'elle n'avait jamais suggéré qu'il accordait à une partie quelconque la capacité de forcer une révision devant faire l'unanimité afin d'être intégrée à l'entente. Je ne suis pas avocat, et je ne souhaite aucunement entreprendre un débat juridique avec vous.
Le gouvernement n'a pas agi en mauvaise foi. Les parties intéressées ont volontairement demandé la création de ce parc, et la baie de Darnley a renoncé à ses ressources minérales en sachant que le potentiel d'exploitation allait de moyen à élevé. Elles ont volontairement signé l'entente en 1996. Le gouvernement n'a pas fait preuve de mauvaise foi. En fait, il a défrayé les Inuvialuit pour leur représentation, parce qu'il voulait être absolument sûr que ce peuple était tout à fait satisfait de l'entente signée en 1996. Cependant, des changements sont survenus entre 1996 et 1998, et d'autres changements auront lieu entre 1998 et 2002. Si l'on se fie à votre logique, je pourrais revenir en arrière et dire: «Comme il y a eu des changements, je veux modifier les frontières du parc.» Je ne veux pas que cela se produise.
En incluant les 2,5 p. 100 en cause dans les frontières du parc, nous évitons les conséquences néfastes. Les Inuvialuit ont profité d'avantages économiques découlant des 80 p. 100 qui seront exploités par les sociétés minières. Si on exclut ces 2,5 p. 100 du parc, on n'a aucune assurance que cela aura une influence sur les avantages économiques pour l'exploitation minière, mais nous sommes sûrs toutefois des incidences négatives. Le plus prudent est d'adopter le projet de loi C-38 tel quel. J'enjoins ce comité à agir ainsi.
Le débat a été très vivant. Je remercie les membres du comité pour le temps et l'énergie que vous consacrés à cette question.
Le président: Merci, monsieur le ministre. Vous vous êtes montré très ouvert aux propos des membres du comité.
Chers collègues, nous en sommes arrivés à la conclusion de ce qui devait être un examen très bref du projet de loi, qui perdure pourtant depuis un bon bout de temps. Le comité a entendu beaucoup de témoins, et je vous remercie tous de votre présence et de votre engagement. Nous avons pu assister à un examen des plus intéressants du projet de loi.
Nous étudions le projet de loi C-38, visant la modification de la Loi sur les parcs nationaux. Je crois que les membres du comité sont prêts à voter.
Premièrement, le titre est-il adopté?
Des voix: Le titre est adopté.
Le président: Le titre est adopté.
Le sénateur Butts: Monsieur le président, je propose que l'on adopte l'article 1 du projet de loi.
Le sénateur Adams: Monsieur le président, avant d'adopter l'article 1 du projet de loi, j'aimerais faire remarquer que nous avons entendu beaucoup de témoins qui s'opposaient au projet de loi. Nous avons entendu ce matin M. Kusugak, président de Nunavut Tunngavik Inc. Les questions concernant la migration des caribous et les terrains de mise bas n'ont pas été réglées.
Nous avons aussi entendu des témoins en faveur du projet de loi C-38, des gens qui ne vivent pas dans le Nord. C'est toujours la même histoire. Ces peuples ont obtenu satisfaction pour leurs revendications territoriales, et nous devons maintenant les écouter.
Pourquoi est-on si pressés? Cela dure depuis sept ans. Quelle différence y aura-t-il à attendre quatre ou cinq mois encore? Nous condamnons les peuples de ces régions quand nous ne les écoutons pas. Je m'oppose à l'adoption de ce projet de loi s'il n'est pas modifié.
Le président: Sénateur Adams, votre allocution touche-t-elle uniquement la motion de le sénateur Butts? Vous y opposez-vous? Pouvez-vous clarifier votre position, s'il vous plaît?
Le sénateur Adams: Je souhaite que l'adoption du projet de loi soit repoussée. Je veux que l'on permette à d'autres personnes de nous parler des conséquences du projet de loi. Nous avons entendu M. Kusugak ce matin. Pourquoi devons-nous entamer dès aujourd'hui le processus d'adoption article par article? Allons-nous adopter le projet de loi aujourd'hui?
Le président: Oui. C'est fondamentalement ce que la motion déposée suggère.
Le sénateur Adams: Je m'y oppose.
Le président: Vous opposez-vous à l'ensemble du projet de loi, ou proposez-vous que l'on reporte la question?
Le sénateur Adams: Je propose à tout le moins que l'on ajourne toute autre discussion relative à ce projet de loi.
Le président: Une motion relative à l'article 1 du projet de loi a été déposée. Si je veux être juste, je ne vous ai pas vu lever la main avant, sénateur Adams.
Sénateur Butts, permettez-vous que le sénateur Adams présente sa motion d'ajourner cette question, après quoi vous pourrez revenir à votre motion? Avez-vous des objections?
Le sénateur Adams: J'ai levé la main, monsieur le président.
Le président: Je suis désolé, je n'ai rien vu.
Pour agir selon la règle, je suggère que l'on se prononce sur la motion d'ajournement en premier, puis que l'on revienne à la motion du sénateur Butts.
Le sénateur Butts: Cela me semble acceptable.
Le président: Sénateur Adams, proposez-vous d'ajourner à une date précise ou indéfiniment?
Le sénateur Adams: Le témoin entendu ce matin nous a suggéré de rester à l'affût des développements dans la région. Je ne souhaite pas imposer un délai, mais je crois que nous devrions reconsidérer le sujet avant l'ajournement d'été.
Le président: J'en déduis que vous proposez d'ajourner indéfiniment et que le sujet soit remis à l'ordre du jour après l'évaluation des résultats des séances du comité à la lumière des propos entendus ce matin. Est-ce bien ce que vous suggérez?
Le sénateur Adams: Oui.
Le sénateur Buchanan: J'appuie la motion.
Le président: D'autres commentaires sur la motion?
Le sénateur Hays: Je m'oppose à cette motion. Le sénateur Adams a dit ce qu'il avait à dire.
Le sénateur Buchanan: J'ai toujours pensé que les habitants des zones locales doivent être consultés. J'ai toujours prôné une philosophie politique en Nouvelle-Écosse selon laquelle il ne faut jamais ignorer les habitants visés. Les gens ne se trompent pas. Les gouvernement set les politiciens peuvent se tromper, mais pas les citoyens.
Quelque 90 p. 100 des propos entendus ici étaient l'opinion des habitants de cette région. Même le gouvernement local des Territoires du Nord-Ouest veut que l'on exclue cette petite parcelle de terrain parce qu'il en bénéficierait sur la plan économique. Cette région souffre d'un taux de chômage très élevé. Encore une fois, nous faisons fi des gens. Je n'ai entendu personne de cette région nous dire: «Nous voulons que ce projet de loi soit adopté tel quel; nous ne voulons pas de cet amendement.» Nous avons entendu des groupes de la région. Le gouvernement. Même un biologiste nous a parlé des terrains de mise bas des caribous Bluenose, et du fait qu'ils se déplacent partout. J'ai aussi entendu des gens qui savent que les terrains de mise bas seront protégés même si des activités d'exploration ont lieu dans ces 2,5 p. 100.
La loi, dans sa forme actuelle, permettra au gouvernement fédéral et au gouvernement des Territoires du Nord-Ouest de protéger ces zones en cas de problèmes. Mettons ces considérations de côté pour l'instant. Le sénateur Adams souscrit à cette proposition.
Nous avons entendu le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, la corporation Inuvialuit et le groupe de ce matin. Ils vivent dans cette région. Ils sont le peuple. S'il y a des retombées économiques, ils veulent en bénéficier.
Pourquoi écoutons-nous Parcs Canada à Hull, au Québec, et à Ottawa, en, Ontario? Ils nous disent d'adopter le projet de loi tel quel. C'est ce qu'ils font. C'est ce que les bureaucrates nous disent de faire. Ils n'écoutent pas les gens, même s'ils ont accepté voilà quelques années de réviser le dossier. Ils disent maintenant qu'ils ne veulent pas le réviser. Si je comprends bien, ils soutiennent cette position parce que la Chambre des Communes a adopté le projet de loi, et que l'affaire est bâclée.
Eh bien, le Sénat n'a-t-il pas un rôle? N'avons-nous rien à dire? Je croyais que nous avions notre mot à dire sur cette question. Nous demandons simplement au gouvernement fédéral de reporter l'adoption de ce projet de loi pour un court laps de temps. Le sénateur Adams et M. Kusugak aimerait qu'elle soit reportée jusqu'à ce que nous disposions de plus d'information, pour que nous puissions déterminer s'il est correct, incorrect ou sans importance d'exclure ce 2,5 p. 100. Voilà pourquoi j'appuie la motion du sénateur Adams, non pas dans l'intérêt du gouvernement, des politiciens ou des bureaucrates, mais dans l'intérêt de la population des Territoires du Nord-Ouest, qui attend de notre comité qu'il pose le bon geste.
Le sénateur Hays: Ce n'est pas facile quand un membre s'oppose. Je ne suis pas tout à fait contre le point de vue du sénateur Adams. À la lumière des audiences que nous avons tenues, je perçois un écart de valeurs. Je crois que le mot «valeurs» est assez ambigu.
Il y a disparité entre un groupe à prédominance inuit, représenté par les Inuvialuit, et un groupe à prédominance non inuit, représenté par Parcs Canada au sujet d'un dossier qui touche l'optimisation de la possibilité -- ou peut-être de la probabilité -- de la création d'une mine dans cette région, avec les avantages économiques qui en découleraient. Les deux parties se sont prononcées sur les signaux d'alarme émis par Parcs Canada, qui a spécifié les éventuelles incidences négatives si cette loi n'était pas adoptée sur la création de nouveaux parcs. Elles ont aussi parlé des signaux d'alarme de l'autre partie concernant les négociations qui doivent se poursuivre avec les peuples du Nord en ce qui a trait à la création de nouveaux parcs, surtout dans les réserves fauniques nationales en Alaska. Leurs commentaires sont fondés et nous devrons en tenir compte, dépend de ce qui advient avec ce projet de loi. Les deux points de vue sont valides.
Je considère que l'article 22.1 pose problème. Une lettre plutôt caustique expédiée par les Inuvialuit le 30 novembre dernier contient des allégations de mauvaise foi. Parcs Canada leur a répondu qu'ils avaient signé une entente, dont nous avons bien entendu la preuve écrite. Leur refus de rouvrir les négociations est le plus difficile à accepter selon moi parce que ce n'est pas un dossier qui pourrait être fermé en deux à quatre mois; les discussions pourraient perdurer éternellement. Ce ne serait pas une bonne chose, et ce n'est pas une bonne façon d'envisager la création de parcs au Canada.
En ce qui a trait aux terrains de mise bas, il n'existe aucune preuve formelle. Nous serons confrontés au problème des espèces nomades, que l'on mette un parc ou une mine en place. Je n'ai aucun doute sur la connaissance supérieure des Inuit du domaine, parce que ces espèces sont directement liées à leur mode de vie et à leur survie. Cependant, des progrès sont réalisés, et je ne vois pas que cette question soit déterminante.
Cette loi est importante pour le gouvernement et il m'est avis que des dommages sont inévitables, que le projet de loi soit adopté ou non. Je ne crois pas toutefois que les dommages seront irréparables. J'en suis persuadé parce que 80 p. 100 de l'anomalie se trouve à l'extérieur du parc.
Il faut éviter de repousser la création du parc. Je ne suis pas totalement contre la position du sénateur Adams, mais nous en sommes arrivés au point où il faut décider, et je décide de ne pas appuyer la motion du sénateur Adams de soumettre le projet de loi à la discussion, pour une période indéterminée ou non.
Je remercie le sénateur Adams, car sa motion m'a donné la possibilité d'expliquer pourquoi j'adopterai cette position à l'endroit du projet de loi lors de l'examen article par article, en tenant pour acquis que le projet de loi ne sera pas adopté.
Le sénateur Spivak: Pour revenir à l'opinion de la population, je comprends les points de vue du sénateur Adams, mais il a voté sur plusieurs questions soumises au Sénat qui touche le Manitoba. C'est son droit, bien entendu.
Le sénateur Buchanan: Cela n'est pas juste. Ce n'est pas ce qu'il dit.
Le sénateur Spivak: Je ne veux pas attaquer personne, mais je suis d'avis que, à titre de Chambre fédérale, nous avons l'obligation d'adopter une perspective large. Le Canada appartient à toute la population, même si les Inuit en contrôlent une partie.
Il serait intéressant d'avoir une discussion sur la définition de la population. Je suis certaine que vous n'êtes pas d'accord pour dire que le reste du Canada n'a rien à dire sur la possibilité du Québec de se séparer, et vous n'êtes sûrement pas d'accord pour que les autochtones n'aient pas non plus leur mot à dire. Notre définition de la population dépend de notre position. Je comprends votre point de vue, mais je n'y souscris pas.
Jose Kusugak a dit qu'il serait indiqué à ce moment de noter que, si tous les terrains de mise bas répertoriés dans le Nunavut étaient constituées en parcs nationaux, 45 p. 100 environ de ce territoire deviendraient des parcs nationaux et autres zones de conservation. Cela correspond à 855 000 kilomètres carrés, un territoire quasiment aussi grand que la Colombie-Britannique.
Toutefois, si je comprends bien, 97 p. 100 de cette zone est ouverte au développement. La situation changera probablement au cours des 20 ou 25 prochaines années, et le contexte sera très différent de ce que nous connaissons aujourd'hui. Par exemple, le nord de l'Alberta a beaucoup changé. Le Canada est un berceau de la vie sauvage et nous devons préserver cette richesse. Nous parlons d'une petite parcelle de territoire.
Le sénateur Adams: Nous parlons d'une petite parcelle de terrain, et nous demandons un petit 2 p. 100.
Le sénateur Spivak: Oui, je sais, mais le principe important à retenir est qu'il faut laisser libre cours au développement. Cependant, il ne doit pas lui laisser la bride; il faut conserver des terres sauvages. Si nous oublions ce principe, tout le territoire sera développé et le pays ne sera plus celui que nous voulons. Il sera transformé à jamais.
Je sais que mon point de vue est loin de faire l'unanimité, du moins de ce côté-ci de la table, mais je ne peux faire autrement que de voter en faveur de ce principe. Ce n'est pas le développement qui est menacé; ce sont les terres et la conservation qui sont en cause partout. Ceux d'entre nous qui souscrivent à ce principe doivent le défendre d'une manière très pratique. Dans les faits, les sociétés vont faire de l'exploration, qu'elles disposent ou non de cette zone névralgique particulière. Ce n'est pas comme si le principe de la conservation freinait le développement. En fait, une grande partie des activités de développement suivront leur cours.
Le sénateur Butts: Je comprends que la motion vise le report de l'adoption de la loi.
Le président: C'est cela.
Le sénateur Butts: Quel serait l'avantage d'un délai? À mon avis, nous ne pouvons tout simplement pas changer les frontières. Si nous ne sommes pas d'accord avec cela, nous devons obtenir l'accord de tous pour modifier l'entente de 1996.
Le sénateur Buchanan: Ils ont déjà dit qu'ils donnaient leur accord à cette proposition.
Le sénateur Butts: Il faut obtenir l'accord de six groupes.
Le sénateur Buchanan: Cinq groupes ont donné leur accord. Seulement Parcs Canada a refusé.
Le sénateur Butts: L'avocat de Parcs Canada a dit qu'ils ne donneraient pas leur accord.
Ce délai sera indéfini parce que, pour modifier les frontières, il faudrait revoir l'entente de 1996.
Le sénateur Adams: J'aimerais faire quelques commentaires. Supposons que le projet de loi est adopté aujourd'hui. Qu'arrivera-t-il si les caribous ne sont pas là dans dix ans? Laisserons-nous le parc en place, en interdisant aux sociétés de faire de l'exploitation minière? C'est un élément crucial pour le futur des mines.
Nous avons entendu de la bouche du témoin de ce matin que ce n'était pas comme au Manitoba, où on peut faire pousser du foin. Les caribous vont là où se trouve la nourriture. Les caribous ne retournent pas au même endroit avant cent ans. C'est cela qui m'interpelle. Nous allons laisser un parc en place, de sorte que personne n'y sera admis. Comment aidons-nous les gens qui vivent dans la région? Vous inquiétez-vous plus des gens ou des caribous? Les caribous iront n'importe où, pourvu qu'ils trouvent à manger. Nous agissons contre la communauté et contre les habitants du Nord. Ils ont déjà perdu 29 p. 100 de leur territoire après le règlement de leurs revendications territoriales. Combien le gouvernement veut-il de plus? Actuellement, ils veulent un territoire en réserve en vue d'en faire l'exploitation minière, et nous allons leur refuser cela? J'ai vu des parcs au Manitoba où l'on trouve des chalets. Personne là-haut ne se construira un chalet. Ils cherchent simplement à se protéger.
Le président: Sénateur Adams, peut-on soumettre votre motion au vote, alors? Ceux qui sont en faveur de la motion du sénateur Adams visant l'ajournement du projet de loi, veuillez lever la main droite. Ceux qui s'opposent? La motion est rejetée.
Nous allons maintenant revenir à la motion de le sénateur Butts visant l'adoption de l'article 1. Y a-t-il des commentaires concernant cette motion? Nous allons donc procéder au vote. Tous ceux qui sont en faveur de cette motion, veuillez lever la main droite. Ceux qui s'y opposent? La motion est adoptée.
Le projet de loi est-il adopté en vertu de ce vote de sept contre cinq?
Des voix: Adopté.
Le président: La motion est adoptée.
Le président doit-il faire rapport du projet de loi sans modifications au Sénat, en vertu du même vote?
Des voix: Adopté.
Le président: La proposition est adoptée.
Merci, messieurs les sénateurs et mesdames les sénateurs.
La séance est levée.