Délibérations du comité sénatorial permanent
des finances nationales
Fascicule 9 - Témoignages
OTTAWA, le mercredi 6 mai 1998
Le comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd'hui à 17 h 30 pour examiner le Budget des dépenses principal déposé au Parlement pour l'exercice se terminant le 31 mars 1998 (maintien de l'effectif et rémunération à la fonction publique).
Le sénateur Terry Stratton (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président: La séance est ouverte. Je vous souhaite la bienvenue, mesdames et messieurs, à cette réunion du comité sénatorial des finances nationales. Aujourd'hui, nous étudions le maintien de l'effectif et la rémunération à la fonction publique fédérale. Nous accueillons aujourd'hui M. Daryl Bean, qui est le président national de l'Alliance de la fonction publique du Canada. Il est accompagné de Mme Nycole Turmel, vice-présidente exécutive, et de M. Steve Jelly, adjoint exécutif au comité exécutif.
Monsieur Bean, nous vous remercions beaucoup d'être des nôtres cet après-midi pour discuter de la question du maintien de l'effectif et de la rémunération à la fonction publique fédérale. Je pense que les membres du comité ont tous reçu votre mémoire. Croyez-le ou non, je l'ai entièrement lu; il est assez détaillé.
Pour vous expliquer un peu comment le comité en est venu à s'intéresser à cette question, nous en avons entendu parler l'automne dernier lors d'une émission radiophonique du réseau CBC du samedi matin, The House. Cette question a alors été couverte par d'autres médias, c'est-à-dire la télévision et les journaux.
Depuis lors, nous avons tenu deux réunions: la première, le 18 février 1998, avec l'honorable Marcel Massé, président du Conseil du Trésor; et la deuxième, le 29 avril, avec M. Lawrence Strong, président du comité consultatif du maintien en fonction et de la rémunération du personnel de direction.
Monsieur Bean, si vous voulez bien commencer.
M. Daryl T. Bean, président national, Alliance de la fonction publique du Canada: Monsieur le président, je tiens à remercier le comité de tenir ces séances et d'inviter l'Alliance à comparaître.
Comme vous l'avez indiqué, Mme Nycole Turmel et M. Steven Jelly m'accompagnent aujourd'hui. Mme Turmel et moi-même partagerons la lecture d'un bref énoncé, après quoi nous nous ferons un plaisir de répondre à vos questions.
Permettez-moi d'abord de dire que les discussions sur la rémunération du secteur public ont été relativement calmes entre 1996, lorsque l'expiration de la Loi sur la rémunération du secteur public a été annoncée, et la fin de 1997.
Au cours de cette période, le gouvernement a mis sur pied des comités chargés d'examiner la question de la rémunération du Parlement. Le groupe exécutif a institué une augmentation salariale initiale pour les militaires et brisé tout espoir qu'avaient les travailleuses et les travailleurs de la fonction publique fédérale de récupérer une partie du revenu perdu à cause du programme légiféré de contrôle des salaires, en vigueur de 1991 à 1997.
Cela n'était sûrement que le calme avant la tempête puisque le printemps s'est avéré plutôt chargé sur le plan de la rémunération. Entre le 18 février et le 27 mars 1998, le gouvernement faisait quatre annonces distinctes concernant l'augmentation des salaires et de la rémunération de plus de 75 000 travailleuses et travailleurs de la fonction publique fédérale.
J'attire votre attention sur les tableaux que nous avons avec nous. Le gouvernement a accru la rémunération des cadres supérieurs de 4 à 19 p. 100; a annoncé qu'il allait remplacer le régime de rémunération au rendement du groupe de la direction par un régime de rémunération «à risque» (rémunération au rendement); a présenté des modifications législatives à la Loi sur les juges, dans le but de majorer les salaires et les avantages de la magistrature d'au moins 12 p. 100 sur une période de deux ans; a augmenté la solde militaire de plus de 9 p. 100 sur une période de deux à trois ans, selon la classification; a augmenté la rémunération des membres de la GRC de près de 4 p. 100, et a promis d'autres augmentations plus élevées en 1999.
Le gouvernement a beau prétendre qu'il n'y aura aucun rattrapage et qu'il ne tolérera aucun effort de la part des travailleuses et travailleurs de la fonction publique visant à récupérer la perte de revenu causée par l'inflation, l'importance de ces augmentations contredit ses dires.
Le mémoire présenté par l'Alliance à votre comité aborde cet aspect de façon détaillée et présente ce que je crois être la preuve irréfutable qu'au moins une partie de ces diverses augmentations salariales représente la perte subie pendant la période de gel des salaires.
Nous tenons toutefois à préciser clairement, au départ, qu'à l'exception de certaines augmentations de la rémunération des cadres supérieurs, des primes de rendement et du manque de transparence qui caractérise certains régimes de rémunération, l'Alliance ne s'oppose pas aux augmentations consenties à ces groupes. Au contraire, nous comprenons pleinement que ces travailleuses et travailleurs ont été soumis à des périodes de gel salarial prolongées, et que des augmentations de l'ordre de 4 à 6 p. 100 sont non seulement justifiables et souhaitables mais aussi, dans beaucoup de cas, inférieures à celles qui auraient été nécessaires pour compenser la baisse du revenu réel découlant des mesures adoptées entre 1991 et 1997.
Cela étant dit, l'Alliance et la grande majorité de ses membres trouvent aberrante la façon dont un bon nombre de ces augmentations ont été annoncées et mises en oeuvre. Le mémoire que nous vous présentons démontre qu'il est impossible de bien comprendre les mesures prises par le gouvernement dans le domaine de la rémunération puisque les données qu'il a cru bon de rendre publiques sont incomplètes et prêtent à confusion.
Dans le but d'éclaircir cette situation, l'Alliance a présenté une demande en vertu de la Loi sur l'accès à l'information afin d'obtenir des renseignements précis sur la ventilation des augmentations des salaires et des primes de rendement accordées au groupe de la direction, au cours des quatre prochaines années.
Nous avons également demandé des renseignements qui prouveraient ou réfuteraient la déclaration de M. Massé à votre comité, à savoir que les salaires de la plupart des travailleuses et travailleurs de la fonction publique fédérale sont «égaux ou supérieurs à ceux qui sont versés dans le secteur privé pour la grande majorité des catégories».
À la fin de la semaine dernière, nous avons obtenu une réponse qu'on ne peut que qualifier d'inadéquate à notre demande. Ainsi, ni votre comité, ni l'Alliance, ni le public ne peuvent savoir quelles seront les véritables conséquences du régime de rémunération des cadres supérieurs annoncé le 20 février 1998.
Malgré le manque de données, les renseignements que nous possédons sont pour le moins troublants. Nous savons que les travaux du comité consultatif sur le maintien en poste et la rémunération du personnel de direction sont entourés de secret et que le comité n'a même pas fourni une liste des gens qu'il a consultés. Nous savons que le comité consultatif était surtout composé de cadres supérieurs d'entreprises et qu'il n'était aucunement représentatif de la population.
Nous savons que le comité consultatif a commandé des recherches qui ont donné lieu à des recommandations de changements au régime de rémunération au rendement afin de réduire les primes de rendement de la majorité des membres du groupe de la direction pour permettre au gouvernement de réaliser des économies. Nous savons aussi que le comité consultatif n'a pas tenu compte de ces conseils éclairés et qu'il a recommandé un nouveau régime de rémunération au rendement encore plus généreux et plus coûteux que le régime actuel.
[Français]
Mme Nycole Turmel, vice-présidente exécutive, Alliance de la fonction publique du Canada: Avant d'aborder les particularités du régime de rémunération au rendement, vous voudrions présenter, sous forme récapitulative, les quatre grandes préoccupations que nous soulevons dans notre mémoire concernant les augmentations salariales de 4 à 19 p. 100 consenties aux cadres supérieurs, à compter du 1er avril 1998.
Nous tenons d'abord à souligner l'augmentation astronomique du salaire de départ au niveau EX-1.
Le comité consultatif en est venu à la conclusion qu'il faut remédier au problème qui touche la rémunération du groupe EX-1 découlant du programme légiféré de contrôle des salaires. Le ministre n'a publié, à notre connaissance, aucune information indiquant comment on entendait procéder. Selon les informations vérifiables fournies à l'Alliance de la fonction publique du Canada, le gouvernement a résolu le problème en augmentant de façon incroyable -- 17,4 p. 100 -- le taux minimal de la catégorie EX-1. Ce n'est là qu'un autre exemple de la logique du gouvernement qui annonce pompeusement qu'il ne tolérera pas de mesures visant à compenser les effets du gel et qui fait exactement le contraire.
Deuxièmement, nous trouvons la fourchette d'augmentation de 4 à 19 p. 100 révoltante.
Si les augmentations de l'ordre de 4 à 6,3 p. 100 qui ont été attribuées aux classifications EX-1 à EX-3 sont acceptables, celles de 11 à 19 p. 100 consenties aux sous-ministres ne le sont certes pas.
Troisièmement, nous estimons que l'écart entre les taux les plus élevés et les taux les moins élevés payés aux employés fédéraux s'est creusé de façon dangereuse par suite des augmentations en pourcentage accordées aux cadres supérieurs.
À cet égard, nous rappelons au comité qu'un grand nombre de travailleurs fédéraux ne gagne pas beaucoup d'argent compte tenu du travail qu'ils accomplissent au nom de la population canadienne. Des milliers d'employés fédéraux gagnent moins de 25 000 $ par année, et le taux normal de niveau de travail dans bon nombre de classifications est encore inférieur à 30 000 $. Si l'on compare ces chiffres à l'augmentation de 33 500 $ que touchaient, le 1er avril dernier, les sous-ministres au niveau le plus élevé, il est évident que le régime de rémunération est tout a fait déphasé.
L'AFPC croit fermement que les augmentations en pourcentage ne devraient pouvoir dépasser un certain plafond correspondant à un montant spécifique. Autrement, comme l'indique l'augmentation du 1er avril 1998 de la rémunération des cadres supérieurs, l'écart entre les catégories d'employés fédéraux s'accentuera au point d'entraîner une sérieuse détérioration du moral qui est déjà à un niveau inacceptable.
Quatrièmement, nous estimons que le groupe de la direction ne devrait pas recevoir d'augmentation tant que le processus de détermination des salaires n'aura pas donné lieu à une augmentation pour les travailleurs syndiqués de la fonction publique.
Le groupe de la direction est chargé de mettre en oeuvre le programme du gouvernement lorsqu'il s'agit d'accorder des augmentations de salaire aux travailleurs syndiqués de la fonction publique fédérale. Sur l'ordre du gouvernement, il tente actuellement de fixer la norme pour les augmentations salariales aux environs de deux p. 100. À notre avis, il est pour le moins indécent que ce groupe reçoive quelques augmentations salariales que ce soit tant que le processus de détermination des salaires n'est pas terminé pour la majeure partie de la fonction publique. Il est tout aussi évident, et tout aussi important, selon nous, que l'augmentation de la rémunération des cadres soit plus ou moins alignée sur ce qui est accordé au reste de la fonction publique.
Bien que sérieuses, nos critiques à l'égard des augmentations de traitement du groupe de la direction n'ont vraiment rien à comparables à l'indignation de nos membres face à la rémunération au rendement et au nouveau régime que le gouvernement est en voie d'adopter à la suite de recommandations fort discutables du comité consultatif sur le maintien en poste et la rémunération du personnel de direction.
Selon les renseignements fournis à votre comité par le président du Conseil du Trésor, M. Massé, le 18 février 1998, les augmentations au titre de la rémunération des cadres supérieurs entraîneront pour le gouvernement des dépenses de 68 millions de dollars. Selon les calculs de l'AFPC, les augmentations de salaire qui sont entrés en vigueur le premier avril 1998 coûteront au gouvernement 16,3 millions de dollars. On ne sait trop quelle part des dépenses ira à la rémunération au rendement et on ne connaît pas vraiment les modalités de mise en oeuvre. Si on est dans le noir, c'est parce que le ministre n'a pas divulgué les données ni répondu à la demande présentée par l'AFPC en vertu de la Loi sur l'accès à l'information.
Dans la pratique, cela signifie que les membres de la direction au niveau EX-1 à EX-3, pourront retirer, en vertu du nouveau régime de rémunération «à risque», le même avantage, 10 p. 100, que celui qui s'appliquait en vertu de l'ancien régime de rémunération, 10 p. 100, tant que les EX-4, EX-5 et DM-1 pourront obtenir une prime de risque de 15 p. 100.
Comme dans le cas des augmentations conjoncturelles qui ont été annoncées le 20 mars 1998 et qui sont entrées en vigueur le 1er avril 1998, les grands gagnants à la loterie du comité consultatif sont les DM-2 et DM-3 qui pourront accroître leur rémunération grâce à une prime de risque de 20 p. 100.
Par conséquent les sous-ministres de rang supérieur qui avaient la possibilité de gagner 188 000 $ entre le 1er avril 1997 et le 31 mars 1998 pourront toucher 223 850 $ durant l'année de transition comprise entre le 1er avril 1998 et le 31 mars 1999.
Le gros avantage se situe dans la deuxième année, alors qu'un sous-ministre de rang supérieur aura la possibilité de gagner de 244 200 $. En résumé, le comité consultatif a enclenché un processus susceptible d'accroître de 30 p. 100 en deux ans la rémunération des sous-ministres de rang supérieur.
Et ce n'est pas tout. Votre président déclarait au comité la semaine dernière que le comité consultatif n'a pas rejeté la possibilité d'autres augmentations conjoncturelles. De plus, le comité consultatif examine la possibilité de créer un nouveau palier supérieur de sous-ministre. Si cette mesure entre en vigueur, un employé du nouveau niveau DM-4 toucherait un salaire d'au moins 227 920 $ et aurait la possibilité de toucher une prime de rendement supplémentaire de 45 600 $. Jusqu'où cela ira-t-il?
[Traduction]
M. Bean: J'aimerais conclure notre énoncé en décrivant tout d'abord certaines des mesures que votre comité pourrait prendre, selon nous, pour veiller à ce que la rémunération à la fonction publique fédérale soit déterminée de manière ouverte, honnête et transparente.
Ensuite, je vous présenterai une vidéo d'une durée de deux minutes pour vous rappeler les conséquences des régimes de rémunération mis en oeuvre à huis clos par les gouvernements.
L'Alliance estime que votre processus d'audiences est un bon premier pas puisqu'il a contribué à faire connaître sur la place publique la question de la rémunération dans le secteur public fédéral, et plus particulièrement la rémunération du groupe de la direction.
Bien que nous applaudissions aux mesures que vous avez prises jusqu'à présent, nous sommes convaincus que ces questions vont demeurer dans l'ombre à moins que vous ne fassiez plus que tenir des audiences. C'est pourquoi nous exhortons votre comité à songer à une approche plus proactive. Plus précisément, nous vous demandons d'envisager ce qui suit: tout d'abord, d'appuyer la plainte de l'Alliance de la fonction publique du Canada déposée auprès du Commissaire à l'information du Canada pour ce qui est de la divulgation de documents ayant trait au régime de rémunération des cadres supérieurs annoncé le 20 février 1998, et de toute donnée dont le gouvernement dispose pour appuyer l'affirmation du président du Conseil du Trésor selon laquelle son gouvernement verse des salaires «qui sont égaux ou supérieurs à ceux qui sont versés dans le secteur privé pour la grande majorité des catégories».
Deuxièmement, nous vous demandons d'envisager de donner suite à la demande du sénateur Kinsella à Lawrence Strong, et d'insister pour que votre comité obtienne une copie de toutes les études qui ont été commandées par le comité consultatif sur le maintien en poste et la rémunération du personnel de direction, ainsi que de toute donnée préparée, produite ou commandée par le Conseil du Trésor pour appuyer les augmentations de rémunération dans le secteur public fédéral.
Sans ces données, nous estimons que personne ne peut évaluer adéquatement le régime de rémunération des cadres que le ministre a annoncé le 20 février 1998.
Troisièmement, nous recommandons que le comité consultatif sur le maintien en poste et la rémunération du personnel de direction soit dissous ou reconstitué, afin d'en rendre la composition plus représentative et le processus plus transparent.
Quatrièmement, nous recommandons que le gouvernement établisse un organisme de comparabilité des salaires, semblable au Bureau de recherches sur les traitements, qui a été aboli en 1992.
Cinquièmement, nous recommandons que vous continuiez à surveiller la mise en application des propositions concernant la rémunération des cadres, et que vous teniez des audiences sur le système de rémunération au rendement «à risque», avant sa mise en application.
Enfin, tel que promis, nous vous présentons la vidéo. Dans notre société où la plupart des gens ont du mal à joindre les deux bouts en raison de salaires insuffisants, la rémunération des cadres supérieurs au sein des secteurs public et privé demeure une question explosive.
Cela dit, il ne servira à rien, à long terme, de dissimuler les données et de déguiser les augmentations. Nous avons vraiment pris conscience de cette réalité de la vie démocratique le 26 avril dernier alors que nous préparions l'exposé que nous devions présenter à votre comité. En effet, nous apprenions que CTV News venait de remporter le prestigieux prix de journalisme d'enquête de l'Association canadienne des journalistes pour son reportage sur les augmentations importantes qu'ont empochées les cadres supérieurs de la fonction publique.
Cet événement nous a aussi rappelé que même si la vérité finit toujours par se savoir, cela prend parfois trop de temps. CTV a raison d'être fière de son prix mais n'oublions pas que près de 16 mois se sont écoulés entre le versement des primes du 1er juin 1996 et le reportage du 22 septembre 1997.
[Français]
Le sénateur Lavoie-Roux: Vous vous êtes adressé à nous en français, c'est une vraie musique à l'oreille. Pouvez-vous nous dire combien d'employés de la fonction publique ont été touchés par les augmentations comparativement au nombre de cadres supérieurs sous-ministres qui ont reçu une augmentation fort substantielle?
Mme Turmel: Si vous regardez à la page 1, sénateur Lavoie-Roux, 75 000 employés fédéraux, au niveau des cadres supérieurs, ont été affectés depuis le 20 février 1998. Environ 130 000 travailleurs membres de l'Alliance que nous représentons ont été affectés, depuis 1991, soit par le gel des salaires ou par les décisions du gouvernement en terme de la politique de réaménagement des effectifs et par l'équité salariale.
Le sénateur Lavoie-Roux: Vous élevez-vous contre l'augmentation très substantielle, pour dire le moins, que les cadres supérieurs ont reçue par rapport aux employés des autres catégories de la fonction publique?
Mme Turmel: Au niveau des cadres supérieurs, on peut comprendre que certains groupes aient reçu entre quatre et 6 p. 100. Nous nous élevons aussi contre tout le processus qui a entouré cette révision des cadres supérieurs. Le comité n'est pas nécessairement représentatif et celui-ci n'a pas tenu d'auditions publiques. Il est aussi difficile de recevoir de l'information détaillée du comité.
Le rattrapage des employés de la fonction publique nous préoccupe car il est dit qu'il ne devrait pas y en avoir. D'une part, on voit des augmentations qui varient de quatre à 20 p. 100 plus la bonification à risque qui est extrême; d'autre part, si on fait la comparaison entre un employé gagnant 25 000 dollars et celui gagnant 125 000 dollars, on peut comprendre qu'il y a une très grande différence entre une augmentation de cinq ou de 10 p. 100
Le sénateur Lavoie-Roux: Que veux dire exactement l'expression «employé à risque»?
Mme Turmel: Ce sont les bonis au niveau du pourcentage, indépendamment de l'évaluation. C'est un autre terme employé par le Conseil du Trésor. Nous appelons cela des bonis, tout simplement.
Le sénateur Lavoie-Roux: Ils appellent cela des bonis «à risque»?
Mme Turmel: C'est apparemment le nouveau terme.
Le sénateur Lavoie-Roux: Mais pourquoi «à risque»? Cela veut quand même dire quelque chose.
Mme Turmel: D'après leur définition, ce n'est pas nécessairement tout le monde qui pourrait recevoir ce pourcentage. En réalité, d'après ce qui a été démontré antérieurement, presque 100 p. 100 le reçoivent.
Le sénateur Lavoie-Roux: Finalement, les mots «à risque» ne veulent plus rien dire.
Mme Turmel: C'est vous qui le dites et je le croirais.
Le sénateur Lavoie-Roux: Quel salaire reçoit le premier ministre du Canada?
Le président: Autour de 150 000 $.
Le sénateur Lavoie-Roux: Certains sous-ministres auraient la possibilité de gagner 244 000 dollars et plus. Plus loin dans votre texte vous parlez de «rémunération au rendement»: comment mesure-t-on le rendement dans la fonction publique pour les différentes catégories d'employés?
Mme Turmel: Si on parle des employés que nous représentons, ce sont des échelles de salaires plus les augmentations, quand il y en a, dans la convention collective. Les augmentations au rendement touchent seulement les hauts fonctionnaires et des catégories excluent l'employé.
Le sénateur Lavoie-Roux: Que ce soit des employés de haut niveau ou des employés ordinaires -- excusez l'expression, je ne pense pas qu'il y ait des employés ordinaires, s'ils font bien leur boulot -- comment mesure-t-on le rendement?
Mme Turmel: Le rendement se situe par rapport aux objectifs établis par la description des fonctions propres à leur travail. Ces fonctions sont déterminées par le directeur au plus haut niveau auquel l'employé se rapporte.
Le sénateur Lavoie-Roux: Je comprends ce qu'est une prime au rendement de façon générale, mais a-t-on des critères précis pour mesurer la performance d'un employé? Est-ce que cela dépend de la bonne volonté d'un supérieur?
[Traduction]
M. Bean: C'est l'un des problèmes. Le comité consultatif a déclaré dans son rapport qu'il n'existe pas vraiment de moyens efficaces d'évaluer le rendement. Si nous avions le rapport de CTV, vous auriez pu constater que 97 p. 100 de ceux qui étaient admissibles à la rémunération au rendement l'ont obtenue. Vous auriez pu également constater qu'un certain nombre d'entre eux avaient en fait obtenu une rémunération supérieure à celle prévue par les lignes directrices sur la rémunération au rendement.
Il ne fait aucun doute qu'en tant que syndicat, nous n'approuvons pas la rémunération au rendement, car dans la pratique l'augmentation que vous obtenez a tendance à dépendre de la personne qui fait l'évaluation du rendement. Ce n'est pas une méthode uniforme et objective. Elle est très subjective.
Le comité consultatif a proposé un nouveau système: le système de rémunération au rendement «au risque». Il n'a pas encore mis au point ce système mais il prévoit une rémunération supérieure à celle qui existait selon le système de rémunération au rendement. En ce qui concerne la première question que vous avez posée, vous avez raison. S'ils ajoutent le niveau DM-4, leur rémunération serait supérieure à 244 000 $. En fait, si je me souviens bien, je pense qu'elle serait plutôt de 260 000 $ ou 270 000 $, mais il n'y a rien encore de définitif.
Le comité voudra peut-être convoquer M. Strong à nouveau pour qu'il explique de façon plus détaillée comment le comité consultatif compte établir un système qui est avant tout objectif. J'estime qu'un tel système devrait être ouvert et transparent.
Le sénateur Lavoie-Roux: Je suppose que votre unique ambition dans la vie maintenant est de devenir sous-ministre.
M. Bean: Non merci, ce n'est pas mon ambition. Mon ambition est de prendre ma retraite dans deux ans.
Le sénateur Cools: Je pensais que vous alliez dire que votre ambition dans la vie était de devenir sénateur.
M. Bean: Bien sûr, cela aussi.
Le président: Mais n'appelez pas ça la retraite.
M. Bean: Si vous êtes au courant de possibilités, je suis prêt, mais que ce soit avant que vous vous engagiez dans ce processus électif. J'en ai assez du processus électif.
Le sénateur Lavoie-Roux: Cela dépend de la province d'où vous venez et du district. Il y aura peut-être des gens bien disposés de l'autre côté qui favoriseront votre nomination.
Le sénateur Forest: Je suppose toutefois qu'avec des critères satisfaisants, vous n'avez pas d'objection à la rémunération au mérite.
M. Bean: Je suppose qu'il y a place pour la rémunération au mérite. Ce que nous reprochons au système de rémunération au mérite ou au rendement, ou peu importe comment vous l'appelez, c'est qu'on n'a pas trouvé de moyen de le rendre objectif.
Souvent plusieurs personnes font des évaluations et bien entendu elles n'utilisent pas toutes les mêmes critères de la même façon. Lorsque je travaillais au gouvernement fédéral, je faisais les évaluations du rendement des employés dont j'assurais l'encadrement. Je leur donnais la cote «entièrement satisfaisant» ou peut-être «très satisfaisant» parce qu'ils faisaient bien leur travail.
Un autre superviseur avec qui je travaillais accordait aux employés la cote «supérieur» lorsqu'en fait, nous savions tous qu'ils n'étaient pas d'aussi bons employés que ceux dont je cotais le rendement «entièrement satisfaisant».
Le sénateur Forest: Ce serait votre opinion, bien entendu.
M. Bean: Le problème, c'est que nous étions tous deux censés utiliser le même système. Nous savions tous deux quel était le système. Je n'ai pas reçu de plaintes des employés que j'ai évalués jusqu'à ce que je constate que mon collègue accordait la cote «supérieur» aux employés.
Je partais du principe que si vous faites votre travail, vous méritez la cote «entièrement satisfaisant». C'est le problème qui se pose avec l'évaluation du rendement en fonction du mérite. Si la même personne connaissait tout le monde et évaluait tout le monde à l'aide des mêmes critères, peut-être alors le système fonctionnerait-il.
Le sénateur Forest: D'après les témoignages du comité et mon expérience personnelle, à cause des taux de traitement en vigueur, nous perdons beaucoup de gens des échelons supérieurs et nous avons beaucoup de difficulté à attirer des gens compétents. Je ne parle pas uniquement du gouvernement, je parle aussi de l'entreprise privée, où j'ai travaillé. Le phénomène est-il le même parmi les catégories d'employés dont vous êtes responsable?
M. Bean: Oui. Il est toujours dangereux de généraliser mais c'est la même situation pour certains groupes, pas tous les groupes. Nous pouvons certainement produire des données pour certains de nos membres dont les salaires sont près de 60 p. 100 inférieurs à ceux d'emplois comparables dans le secteur privé. Il y en a d'autres dont le salaire est de 10 à 20 p. 100 inférieur.
Je vois que des représentants de l'Institut professionnel sont ici. Je sais qu'ils ont soulevé cette préoccupation en ce qui concerne les vérificateurs et les informaticiens en particulier. Donc j'imagine qu'ils en parleront plus tard. Mais la même chose est vraie dans le cas d'un certain nombre de nos groupes, également.
Oui, les gens partent. Souvent les gens restent s'ils ont un certain nombre d'années de service à cause du régime de pension. Ils ont tendance à rester même s'ils ne sont pas satisfaits et vous avez alors une main-d'oeuvre très démoralisée.
Ils restent parce que leurs pensions sont immobilisées. S'ils sont là depuis 30 ans, il leur reste encore cinq ans pour terminer leur service. Je ne crois pas que ce soit un très bon moyen de garder les employés.
Le sénateur Forest: Non. Nous avons entendu dire que dans les cas où les fonctionnaires sont moins payés, si vous tenez compte de l'ensemble des avantages sociaux qu'ils reçoivent et qui est en majeure partie plus intéressant que dans le secteur privé, cela aurait tendance à égaliser les choses. Êtes-vous de cet avis?
M. Bean: Non, je ne suis pas de cet avis. Le fait est que pendant six ans, il n'y a eu absolument aucun changement. En fait, dans notre cas, il s'agit plutôt de neuf ans car la dernière convention collective a été négociée en 1989.
En 1991, lorsque nous avons fait la grève, le gouvernement a adopté une loi pour nous obliger à retourner au travail. Il n'y a eu aucune négociation jusqu'en 1997, mais elles n'ont mené à rien et nous sommes en 1998. C'est pourquoi nous vous demandons de recommander que l'on remette sur pied un bureau de recherches sur les traitements.
Nous avions tous deux des données qui au moins étaient produites en consultation avec l'employeur et les agents de négociation. Nous pouvions discuter de l'endroit, dans l'échelle des données, où nous devrions nous situer, mais nous ne pouvions pas contester la validité des données.
Aujourd'hui, nous produisons des données que le gouvernement considère satisfaisantes. Il s'agit de gros employeurs, 500 employés ou plus. Il en existe sans doute de plus petits, et le gouvernement prend aussi toutes les petites entreprises et leur attribue un certain poids. C'est pourquoi nous aimerions que l'on procède à une véritable évaluation comme celle qui se faisait à l'époque du bureau de recherches sur les traitements.
Le sénateur Forest: Vous parlez d'une évaluation en comparaison avec le secteur privé.
M. Bean: Oui, parce que vous devez faire l'évaluation en fonction d'un emploi comparable. Il ne s'agit pas simplement de dire que tel employé est un CR-4 ou un AS-2 et que quelqu'un dans le secteur privé est comparable. C'est peut-être le cas, mais il faut examiner les fonctions de leur poste avant de déterminer s'ils sont effectivement comparables. C'est pourquoi nous avons fait cette recommandation. Nous estimons qu'il est temps d'avoir des données fiables, c'est-à-dire des données qui sont utilisables tant par les agents de négociation que par le Conseil du Trésor. Je pense que cette information, certainement en fonction de nos données, montrera qu'il est faux que le secteur public a tous ces avantages que le secteur privé n'a pas.
Le sénateur Forest: Non, ce n'est pas ce que je voulais dire, mais bien entendu nous devons reconnaître que beaucoup de contribuables diront que leur rémunération a diminué aussi au cours des dernières années dans certains domaines. Je vous remercie, monsieur le président.
[Français]
Le sénateur Lavoie-Roux: À la page 9, à la recommandation numéro 3 du document en français, il est mentionné que le comité consultatif sur le maintien en place et la rémunération du personnel de direction soit dissous ou reconstitué afin d'en rendre la composition plus représentative et le processus plus transparent. Est-ce que vous pourriez élaborer un peu là-dessus? Quelle en est la composition présentement? Pour quelles raisons dites-vous que la composition ne semble pas suffisamment représentative et que le processus n'est pas suffisamment transparent?
Mme Turmel: Comme nous l'avons mentionné au début, le comité n'a pas la liste des personnes et autres représentants des compagnies, des personnes en général, des Canadiens et des Canadiennes et des syndicats. Il y a une représentation pour regarder la composition et la rémunération en général afin que ce soit un processus ouvert où il y aurait une consultation publique sur le sujet.
Le sénateur Lavoie-Roux: Si vous demandez quels sont les membres de ce comité consultatif, est-ce qu'on va vous donner les noms?
Mme Turmel: On a déjà fait la demande et c'est une des parties pour laquelle nous n'avons pas reçu de réponse. On a reçu une réponse du président du comité ainsi qu'une réponse mentionnant qu'il y avait un représentant des syndicats, mais comme on l'a mentionné dans une de nos lettres, le représentant du syndicat est un ex-leader d'un des syndicats de la fonction publique fédérale. Il travaille présentement au niveau de la gestion dans un autre dossier. Il n'est plus représentant des syndicats.
Le sénateur Lavoie-Roux: Serait-il faux de dire qu'on n'a pas été très ouvert à votre demande de connaître les noms des membres de ce comité et que ceci semble se faire, comme vous le dites, sans consultation?
Mme Turmel: On va plus loin que cela. On dit que tout le processus n'a pas été ouvert et qu'il a été gardé secret. Quand on pose des questions sur la composition, les statistiques, les augmentations, les salaires, l'évaluation en termes du pourcentage, on n'a pas de réponses précises.
[Traduction]
Le sénateur Lavoie-Roux: Voulez-vous ajouter quelque chose?
M. Bean: Oui, j'aimerais ajouter que si vous regardez aux pages 4 et 5, nous parlons des différentes méthodes qui ont été suivies. Le comité consultatif du maintien en poste et de la rémunération du personnel de direction se compose essentiellement de cadres supérieurs de l'entreprise privée.
De plus, vous constaterez qu'en ce qui concerne les travaux de la Commission de 1995 sur le traitement et les avantages des juges, il s'agissait d'un processus ouvert. Au moins, il avait été annoncé et les gens avaient eu l'occasion de faire des présentations.
Les travaux du comité consultatif n'ont pas été annoncés mais je peux vous assurer que nous avons comparu devant lui. Nous avons exprimé nos réserves au sujet du secret dont il s'entourait au lieu d'être ouvert et transparent. Mais cela n'a pas donné grand-chose.
Le sénateur Lavoie-Roux: Comment le gouvernement justifie-t-il sa décision de créer un nouveau palier supérieur de sous-ministre. Quelle en est la raison? Les membres de cette catégorie recevront-ils une rémunération supérieure à celle que reçoivent à l'heure actuelle les sous-ministres? Vous en parlez quelque part dans votre mémoire.
M. Bean: Je ne crois pas pouvoir répondre pour le gouvernement et expliquer ses agissements sauf qu'il semble assez clair qu'ils sont en train de perdre un grand nombre de sous-ministres à long terme. C'est sans doute surtout pour des questions de rémunération qu'ils envisagent de créer un nouveau palier de sous-ministre.
Ils partent sans doute du principe que si la rémunération offerte est suffisamment élevée, moins de sous-ministres risquent de quitter la fonction publique pour aller dans le secteur privé.
Le sénateur Lavoie-Roux: À votre avis, ce serait l'unique motif de cette décision.
Le sénateur Cools: À la page 1 de votre mémoire, lorsque vous dites que le «printemps s'est avéré plutôt chargé sur le plan de la rémunération», je constate que votre troisième point à la page suivante énonce, «le gouvernement a présenté des modifications législatives à la Loi sur les juges, dans le but de majorer les salaires et les avantages de la magistrature d'au moins 12 p. 100 sur une période de deux ans.»
À première vue, l'augmentation d'un salaire que bon nombre jugent déjà élevé peut sembler remarquable, je suppose. Je me demande si vous pouvez nous en dire plus au sujet de ce que vous entendez par cette phrase.
M. Bean: Tout d'abord, je précise que je ne suis pas ici pour débattre du mérite d'accorder aux juges une augmentation de salaire. En principe, je suis en faveur d'augmentations salariales pour tous les travailleurs, quel que soit leur niveau, y compris au Sénat, soit dit en passant.
Le sénateur Cools: Vous avez toute ma gratitude.
Le sénateur Lavoie-Roux: Vous êtes peut-être le seul à le penser.
M. Bean: Je suis peut-être le seul, mais j'aborde ces augmentations sous deux angles différents. D'une part, il s'agit d'une augmentation plutôt considérable, alors que les travailleurs de niveau opérationnel, si vous me permettez de désigner ainsi ceux qui gagnent entre 25 000 $ et 30 000 $, négocient pour obtenir des augmentations depuis un an et qu'ils ne se sont vus offrir qu'entre 1 et 1,5 p. 100.
Quelque chose ne tourne pas rond quand on accorde des augmentations aux mieux rémunérés mais qu'on les refuse aux travailleurs à revenu modeste. Par ailleurs, le fait que le salaire des travailleurs les moins rémunérés ait été bloqué pendant six ans alors que celui de certains groupes -- je crois que les juges en sont -- n'est bloqué que depuis quatre ans nous préoccupe.
C'est aussi injuste, selon moi. À nouveau, je précise que je ne cherche pas à déprécier les juges -- je ne suis pas ici pour déprécier quelque groupe qui obtient une augmentation salariale --, mais je représente les travailleurs les moins bien rémunérés. Sans eux, le gouvernement actuel, le gouvernement tout court, ne pourrait pas offrir des services aux Canadiens.
Le sénateur Cools: Le projet de loi auquel vous faites allusion -- et je crois qu'il faudrait le préciser officiellement -- est le projet de loi C-37. L'avez-vous examiné?
M. Bean: Non. Je ne l'ai pas examiné. Je l'ai vu, je l'ai feuilleté, mais je ne l'ai pas examiné en détail.
Le sénateur Cools: Ce projet de loi est censé venir du fait que, si j'ai bien compris, d'après les juges, le gouvernement ne peut pas toucher à leur salaire, ce qui est une affirmation plutôt étonnante, voire sidérante. Je me demandais simplement si vous aviez lu le projet de loi et si vous aviez des commentaires à faire au sujet du principe selon lequel on ne peut pas toucher au salaire des juges sans nuire à l'indépendance judiciaire.
En fait, le véritable principe d'indépendance judiciaire, qui est une notion parlementaire, ne leur appartient pas; il ne leur confère aucun droit. Il dit essentiellement que leur salaire est fixé par le Parlement et par lui seulement. Il est très intéressant de voir que ce projet de loi particulier cherche maintenant à mettre en place un tout autre ordre de mécanismes de rémunération. Je travaille à ce dossier depuis quelques années déjà et je pensais avoir à peu près tout vu, mais cette manipulation est plutôt osée. Je me demandais simplement si vous aviez une opinion à cet égard.
M. Bean: Tout comme vous, je crois moi aussi que les juges ne sont pas très différents des autres travailleurs, sauf qu'ils gagnent plus et qu'ils sont peut-être plus instruits que d'autres. Manifestement, si le gouvernement peut bloquer le salaire des autres travailleurs, il a le droit, selon moi, de bloquer celui des juges.
J'ai été estomaqué d'entendre les juges dire, à propos de leur rémunération, que, s'ils n'obtenaient pas une augmentation, leur intégrité en souffrirait en quelque sorte. J'ignorais qu'il existe un pareil lien entre les deux.
Le sénateur Cools: Je déduis de vos propos que vous êtes en vif désaccord, mais vous le dites très poliment. Quoi qu'il en soit, c'est sans rapport. Vous êtes simplement le premier à l'avoir mentionné dans un exposé. Je m'étonne que vous ayez été au courant de cette question et que vous y ayez porté attention. Je vous en remercie.
Le sénateur Moore: À la page 2 de votre mémoire, vous mentionnez l'espoir des fonctionnaires fédéraux de récupérer une partie du revenu perdu à cause de l'inflation. Vous parlez de la période allant de 1991 à 1997, si j'ai bien compris. Depuis deux ans, l'inflation est assez bien contenue. Dans certains secteurs de l'économie, on parle même de déflation. A-t-on une idée des pertes subies?
M. Bean: Je crois que notre salaire a reculé d'environ 10 p. 100 par rapport au coût de la vie. Le mémoire le mentionne peut-être, quelque part. Je ne me souviens pas exactement de la page. Je croyais aussi que cela figurait au tableau, mais je ne le vois pas.
Le président: Je crois que le taux est de 9,1 p. 100.
Le sénateur Lavoie-Roux: Sur une période de six ans?
M. Bean: C'est cela, sur six ans.
Le sénateur Moore: Le sénateur Lavoie-Roux vous a posé une question au sujet de la rémunération au rendement «à risque». Qu'est-ce que cela signifie? Je ne crois pas que nous ayons obtenu une réponse claire.
M. Bean: Voilà! J'ai trouvé. Le recul est de 9,8 p. 100. Si vous regardez à la page 10, au deuxième paragraphe, il figure dans les pertes. Je ne crois pas pouvoir bien vous répondre en ce qui concerne la rémunération à risque. Il faudra en parler à M. Strong. Si j'ai bien compris, après la brève rencontre que j'ai eue avec lui, on n'a pas encore élaboré de critère qui permette de fixer la rémunération à risque.
C'est un nouveau régime de rémunération au rendement que l'on propose. Le comité consultatif est censé accoucher d'un critère, mais que je sache, il ne l'a pas encore fait.
Le sénateur Moore: Que croyez-vous que cela veut dire?
M. Bean: Je suppose que, là où auparavant la rémunération au rendement était plafonnée à 10 p. 100, il n'y a plus de plafond. Ainsi, certains obtiendront 10 p. 100, d'autres 15 p. 100, d'autres encore 20 p. 100.
Il faut supposer que le comité arrêtera un critère qui gravitera autour de la réalisation de certains objectifs.
Le sénateur Moore: Quel pourrait être ce critère, selon vous?
M. Bean: Par exemple, si un sous-ministre, dans la réalisation de l'objectif que s'est fixé un ministère concernant l'équité en matière d'emploi, obtient un nombre «X» de points, il aura droit à une prime au rendement plus élevée.
Le sénateur Moore; Qu'entend-on par l'expression «à risque», selon vous?
M. Bean: D'après moi, cela veut dire que vous n'obtiendrez peut-être pas une prime de 20 p. 100 au niveau de sous-ministre. Vous pourriez obtenir moins peut-être.
Le sénateur Moore: Je ne saisis pas très bien la nature du risque. Quand on vous engage pour faire un travail, vous le faites. Nous le faisons tous, tous les jours. Où est le risque? Je ne comprends pas ce que l'on entend par cette expression.
M. Bean: Le risque est, je suppose, que vous n'obteniez peut-être pas la prime de 20 p. 100. Je l'ignore. La recommandation a été faite par le comité de M. Strong.
[Français]
Le sénateur Ferretti Barth: Vous représentez 155 000 employés de la fonction publique. Est-ce que vous pouvez me dire quelle proportion de ces employés approche de la retraite? Si vous connaissez ce nombre, avez-vous un programme prévoyant la relève nécessaire afin de combler les postes vacants?
[Traduction]
M. Bean: J'avoue être incapable de vous fournir toute suite des données sur le nombre de personnes sur le point de prendre leur retraite ou ayant atteint l'âge de la retraite. Dans le cadre du programme de réduction des effectifs du gouvernement fédéral, si je puis utiliser cette expression, le poste de quelque 50 000 fonctionnaires a été déclaré excédentaire. Beaucoup de fonctionnaires, de travailleurs plus âgés, ont choisi soit de prendre une retraite anticipée, ce qui signifiait qu'ils pouvaient le faire à 50 ans sans perdre 5 p. 100 de leur pension par année, soit, s'ils n'avaient pas atteint l'âge de 50 ans, qu'ils aient accepté une prime de départ anticipé plutôt que de demeurer en fonction et de courir le risque d'être mis à pied. Je n'ai pas encore vu les chiffres à ce sujet, parce que l'étude sur l'âge au sein de la fonction publique fédérale n'est pas achevée. Par contre, je sais que l'âge moyen de la plupart des personnes qui travaillent encore au sein de la fonction publique fédérale varie entre 40 ans et 50 ans.
Si nous parvenions à négocier de véritables augmentations salariales, je ne crois pas, étant donné la situation de l'emploi au Canada, qu'on aurait beaucoup de difficulté à recruter au sein de la fonction publique fédérale. Pour l'instant, naturellement, on ne se bouscule pas aux portes parce qu'on sait qu'on peut gagner plus dans le secteur privé. En fait, j'ai rencontré un groupe hier, des employeurs du secteur privé avec lesquels nous traitons maintenant en raison des différents modes de prestation des services. On m'a fait remarquer qu'on prenait en charge un groupe d'employés à Moose Jaw. On leur avait déjà consenti une augmentation salariale de 10 p. 100 en raison de l'écart qui existe entre ce qu'ils gagnent et ce que gagnent les autres employés.
[Français]
Le sénateur Ferretti Barth: Le gouvernement, surtout le ministère responsable de la fonction publique, est très préoccupé par les coupures de postes de cadres supérieurs. Cela crée un exode de cerveaux.
Vous n'avez pas tenu un colloque avec le ministère pour leur dire: qu'allons-nous faire? Vous êtes conscientes que les emplois à la fonction publique vont être de plus en plus rares. Est-ce que nous voulons recruter des jeunes pour remplacer ces gens qui vont prendre leur retraite? Est-ce que votre syndicat ne peut pas mettre sur pied un programme de recrutement et redonner aux gens le goût d'être fonctionnaires de la fonction publique? Il appartient au syndicat de rétablir un peu l'image de la fonction publique.
Vous êtes le porte-parole des travailleurs. Vous avez une grande responsabilité morale de rétablir cette image de la fonction publique.
[Traduction]
M. Bean: Oui, cela me préoccupe également. Nous faisons de notre mieux pour rétablir l'image de la fonction publique. Il est cependant difficile de le faire dans un contexte aussi démoralisant, quand les employés que vous représentez attendent depuis 14 ans une équité salariale qui n'existe toujours pas, même si la loi la prévoit au Canada.
J'ai rencontré des cadres des ressources humaines de Bombardier. Ils m'ont dit qu'ils offraient d'office au fonctionnaire pris en charge une augmentation salariale de 10 p. 100. Les salaires des fonctionnaires fédéraux sont une véritable peau de chagrin par rapport à ce que Bombardier verse à ses travailleurs. Il est difficile de convaincre des gens qu'il fait bon travailler dans la fonction publique.
Le sénateur Ferretti Barth: Il faut convaincre le gouvernement que c'est ainsi qu'il attirera des gens dans la fonction publique.
M. Bean: Oui. Rien ne nous plairait davantage que de négocier la dotation, et nous avons demandé à pouvoir le faire. La Loi sur les relations de travail dans la fonction publique et la Loi sur l'emploi dans la fonction publique nous interdisent de parler de dotation à la table des négociations.
[Français]
Mme Turmel: Avec le départ des employés permanents, on voit de plus en plus des employés à terme. Ceci n'aide pas la relève à l'intérieur de la fonction publique fédérale.
La Commission de la fonction publique est en train de mettre sur pied des programmes de formation. On a décidé de participer à certains comités pour que la formation ne s'adresse pas seulement au haut niveau de la gestion mais à tous les employés de tous les niveaux pour préparer cette relève.
Le sénateur Ferretti Barth: Le sénateur Lavoie-Roux a demandé tantôt s'il était possible d'avoir les noms des membres qui composent le comité consultatif.
Le sénateur Lavoie-Roux: Ce n'est pas ce que j'ai demandé. J'ai demandé si les représentants de la fonction publique les avaient.
Le sénateur Ferretti Barth: Oui, vous avez demandé s'ils les avaient. Ils ont dit non. Vous ne les avez pas?
M. Bean: Non.
[Traduction]
M. Bean: Non.
Mme Turmel: J'ai dit que nous ne les avions pas. Je suis navrée. J'ai fait erreur.
[Français]
Le sénateur Ferretti Barth: Vous l'avez?
M. Bean: Oui.
Le sénateur Ferretti Barth: Est-ce qu'il serait possible de connaître les membres de ce comité consultatif?
Le sénateur Lavoie-Roux: Est-ce que vous accepteriez de nous transmettre la liste?
[Traduction]
M. Bean: Nous vous l'enverrons.
Le président: Ces données sont publiques. M. Strong, quand il a témoigné, a passé en revue certains noms.
M. Bean: Si vous le désirez, nous pouvons certes en envoyer la liste à la greffière. Ce n'est pas un problème.
Le sénateur Lavoie-Roux: Monsieur le président, j'aimerais poser une autre question. Vous avez fait cinq recommandations. Je vous en suis reconnaissante et je puis vous assurer que notre comité les examinera pour voir s'il y a quelque chose que nous pouvons faire. Je vous remercie d'être venus.
Le président: En ce qui concerne la publication des documents ayant trait au régime annoncé de rémunération des cadres supérieurs, y a-t-il une raison pour laquelle vous n'avez pas reçu cette information? Vous ont-il dit pourquoi vous ne pouviez pas la recevoir ou ont-il simplement refusé de vous la communiquer?
M. Bean: Non. Ils ont affirmé qu'un certain article de la Loi sur l'accès à l'information s'appliquait. Nous ne sommes pas d'accord. Nous enverrons certes à votre comité la lettre que nous avons adressée au commissaire pour demander ces renseignements. Elle vous expliquera aussi pourquoi nous avons contesté la décision. Votre comité recevra ces documents.
Le président: Comme l'a dit le sénateur Lavoie-Roux, nous reviendrons au point 2. Le sénateur Kinsella a demandé à Lawrence Strong de remettre à notre comité un exemplaire de toutes les études. Il se peut que nous butions contre le même mur; c'est pourquoi j'ai posé la première question. Je ne devrais pas parler de mur. Il existe peut-être des raisons légitimes que nous ignorons. Cependant, nous essayerons au moins de les découvrir.
Vous avez fait un excellent exposé. Je vous en remercie. J'ai une dernière question qu'on me pose toujours. Les fonctionnaires acceptent ces primes de départ anticipé et prennent leur retraite. Par la suite, le gouvernement les engage, non pas comme fonctionnaires, mais comme consultants. Cette question en tracasse plus d'un parmi nous, surtout ceux qui viennent du secteur privé. À part l'ouï-dire, avez-vous des preuves tangibles du phénomène?
M. Bean: Je ne crois pas que j'ai des preuves récentes. Je tiens à être juste. Je crois que le gouvernement a fait du meilleur travail, cette fois-ci.
Auparavant, cela se produisait souvent. Des cadres supérieurs quittaient la fonction publique puis revenaient, parfois au bout d'un week-end ou d'une semaine seulement.
Certaines personnes qui ont quitté la fonction publique -- je serais peut-être capable de vous trouver des renseignements à ce sujet -- sont maintenant cadres supérieurs d'une entreprise qui assure la prestation de services selon un mode différent.
Le président: Si vous pouviez nous trouver ces renseignements, nous vous en serions reconnaissants.
M. Bean: Le phénomène existe, mais il n'a pas l'ampleur qu'il avait auparavant.
Le président: Vous m'en voyez ravi, car c'est important.
Nous accueillons maintenant M. Steve Hindle, président de l'Institut professionnel de la fonction publique du Canada, qui est accompagné de M. Bob McIntosh, conseiller politique, et de M. Richard Bellaire, agent de recherche et analyste de la rémunération.
Monsieur Hindle, nous vous sommes très reconnaissants d'être des nôtres aujourd'hui pour discuter du maintien en fonction de l'effectif et de la rémunération dans la fonction publique fédérale. Je ne crois pas qu'il faille expliquer à nouveau pourquoi ou comment s'est amorcé cet examen, mais sachez que la question préoccupe le comité depuis un bon bout de temps déjà.
Si vous avez un exposé à nous faire, la parole est à vous.
M. Hindle, président, Institut professionnel de la fonction publique du Canada: L'Institut professionnel de la fonction publique du Canada est heureux de pouvoir se présenter devant le comité sénatorial permanent des finances nationales pour traiter de l'importante question du maintien de l'effectif et de la rémunération des fonctionnaires fédéraux.
L'Institut est l'agent négociateur accrédité de quelque 33 000 professionnels et scientifiques de la fonction publique du Canada, du Nouveau-Brunswick et du Manitoba. Vous trouverez à l'annexe A du mémoire une liste plus complète. La vaste majorité de nos membres travaillent au sein de ministères fédéraux pour lesquels le Conseil du Trésor agit comme employeur aux fins de la négociation collective. Voilà pour le contexte.
Dans le cinquième rapport annuel sur la fonction publique qu'elle a adressé au premier ministre, Jocelyne Bourgon, greffière du Conseil privé, fait état de l'existence d'une «crise tranquille» dans la fonction publique. De fait, la situation est tellement grave que la viabilité opérationnelle de certains secteurs de la fonction publique peut être menacée, car on ne peut y maintenir ni recruter du personnel professionnel expérimenté. La greffière croit qu'un ambitieux programme de réforme est la solution, mais rien n'est changé dans le milieu de travail des personnes représentées par l'institut. Peu de gestes concrets ont été posés pour résoudre les problèmes fondamentaux qui sont à la base même de la crise censément «tranquille». Je vous épargne les citations de tous les rapports, mais il se peut que je vous en lise certains tout à l'heure.
Tous conviennent qu'il faut s'attaquer au recrutement. En plus des documents de La Relève, le vérificateur général réitère une fois de plus ce point dans son dernier rapport. À titre simplement d'exemple des pénuries, il mentionne les analystes de politique, les économistes, les vérificateurs, les spécialistes en système d'ordinateur, les agents financiers, les mathématiciens, les statisticiens et les ingénieurs. De plus, la Commission de la fonction publique, organe parlementaire chargé des nominations dans la fonction publique, continue à sonner l'alarme en raison d'un manque accru de professionnels. Dans sa liste, elle inclut les ingénieurs, les analystes des systèmes informatiques, les mathématiciens, les statisticiens, les économistes, les vérificateurs, les agents financiers et les agents du service extérieur.
Les stratégies de recrutement, même subtiles, ne fonctionneront pas si l'on ne résout pas d'abord les problèmes à leur source, soit un environnement de travail négatif.
Nos membres oeuvrent au sein d'un environnement négatif caractérisé par un accroissement de la charge de travail et par une diminution des ressources. Leur salaire a été gelé pendant cinq des six dernières années. La plupart des membres en sont à leur septième année sans aucun ajustement salarial en vue. Au gel des salaires est venue s'ajouter une suspension de deux ans des augmentations d'échelle de salaire, ce qui a maintenu arbitrairement les employés à des taux de rémunération inférieurs aux taux établis pour leurs fonctions. Un grand nombre d'entre eux ont dû composer avec la menace d'une perte d'emploi; ils ont vu des collègues de haut calibre et de grande expérience être déclarés excédentaires et quitter les rangs de la fonction publique. Ce savoir-faire n'a pas été remplacé, et les programmes importants en ont souffert. Pour un grand nombre de nos membres, les compressions dues à l'examen des programmes témoignent d'un manque flagrant de compréhension des services et des programmes auxquels ils ont consacré toute leur vie professionnelle.
On prétend que les forfaits de cessation d'emploi généreux à l'excès et comportant une exemption de la pénalité d'une retraite anticipée ont donné lieu à un surplus de demandes de départ. Selon nos membres, toutefois, ce n'est pas une prime de départ trop généreuse qui les a attirés, mais plutôt la détérioration de l'environnement de travail qui s'annonçait qui a incité un grand nombre d'entre eux à mettre fin prématurément à leur carrière de fonctionnaire.
Dans une certaine mesure, le dernier rapport du vérificateur général reconnaît les réalités du milieu de travail.
Une conséquence directe d'un environnement de travail négatif est «l'exode des compétences» qui a mené à la migration de professionnels chevronnés vers d'autres employeurs. Le recrutement de travailleurs professionnels et expérimentés devient problématique; la fonction publique devient de plus en plus l'école pratique pour les autres employeurs.
Les employés d'un grand nombre de professions représentées par l'Institut professionnel ont vu leurs possibilités d'avancement dans le secteur privé s'élargir en raison d'une demande accrue pour des employés tels que les administrateurs des systèmes d'ordinateurs, des CS, pour traiter du problème de l'an 2000, les vérificateurs, des AU, expérimentés dans l'administration de la Loi sur l'impôt et les scientifiques possédant des aptitudes particulières. Au Centre de recherches sur les communications à Industrie Canada, 67 de nos 129 membres ingénieurs et scientifiques ont été recrutés depuis 1993; 29 d'entre eux ont déjà quitté la fonction publique pour accepter de meilleures offres dans le secteur privé. Ces offres d'emploi comportent des augmentations salariales variant entre 10 p. 100 et 80 p. 100 de plus que les niveaux de rémunération comparables dans la fonction publique.
Revenu Canada fait état d'un problème de recrutement et de maintien en fonction des vérificateurs et gestionnaires de systèmes ordinateurs. Je vais, à cet égard, vous lire un extrait de La Relève, un document sur le recrutement pour Revenu Canada:
La conservation des AU et des CS est une source de préoccupation au sein du ministère. Étant donné que Revenu Canada emploi 95 p. 100 des AU de la fonction publique fédérale, le risque de perdre des AU au profit d'autres ministères est faible. On s'inquiète toutefois du taux d'attrition chez les AU de la région du sud de l'Ontario, où les entreprises privées prospèrent -- au cours du mois de janvier, 32 AU de cette région ont quitté Revenu Canada pour le secteur privé.
Ainsi, en un mois, environ 1,5 p. 100 des AU ont quitté le ministère pour le sud de l'Ontario.
Les démissions étaient les plus élevées dans la catégorie scientifique et professionnelle, trois fois plus que dans la catégorie de la direction. L'insatisfaction ajoutée aux conditions de travail et à une demande pour des scientifiques professionnels d'expérience dans le marché extérieur a contribué à cet exode. Nous vous avons fourni un tableau où les catégories et groupes indiqués correspondent aux anciennes catégories utilisées dans la fonction publique. La plupart des employés que nous représentons feraient partie de la catégorie scientifique et professionnelle. Ils comptaient pour 17,7 p. 100 des démissions.
Les caractéristiques démographiques des survivants de l'Examen des programmes ajoutent une nouvelle dimension au problème du maintien des effectifs. Parmi les employés représentés par l'Institut dont le Conseil du Trésor est l'employeur, près du quart possèdent 20 ans d'expérience ou plus et 10 p. 100 en possèdent 25 ou plus. Dans quelques années, ce pourcentage sera encore plus élevé. Par exemple, en l'an 2001, 25 p. 100 du groupe Recherche scientifique posséderont 25 ans de service ou plus au sein du gouvernement fédéral. Dans certains cas, ces professionnels hautement qualifiés ont déjà travaillé pour d'autres employeurs.
Le profil de l'âge des fonctionnaires n'a pas échappé à la vigilance du vérificateur général. L'âge moyen des fonctionnaires est passé de 40 à 42 ans depuis 1995.
La Relève parrainée par le greffier est destinée à offrir aux Canadiens une fonction publique professionnelle dans le prochain millénaire. Malheureusement, elle ne traite pas des questions fondamentales des niveaux adéquats de financement, de la sécurité d'emploi et des niveaux équitables de rémunération. Des ministères ont déployé des efforts pour se conformer aux directives sur la planification opérationnelle prévue dans les orientations de La Relève. Nous avons reproduit ici un extrait des lignes directrices du Conseil du Trésor sur l'élaboration des plans opérationnels.
Les plans relatifs aux ressources humaines ne permettront pas d'atteindre les objectifs sans résoudre les problèmes fondamentaux qui minent l'efficacité de la fonction publique.
La planification est venue tout compliquer en demandant que les ministères recherchent des organisations candidates à la diversification. Le gouvernement demeure déterminé à restructurer la fonction publique afin de créer de nouvelles agences de prestation des services. Ces initiatives soulèvent un grand nombre de questions relatives aux relations de travail, la sécurité d'emploi n'étant pas la moindre. Le refus du gouvernement de revenir à la directive de 1991 sur le réaménagement des effectifs, comme il l'avait promis en 1995, constitue une question fondamentale contribuant à un environnement de travail négatif.
J'aimerais maintenant vous parler des enjeux de la rémunération. Une rémunération compétitive constitue un prérequis à une mise en application fructueuse des stratégies de recrutement. Au cours des dernières années, les fonctionnaires fédéraux ont supporté une part disproportionnée de la réduction des déficits. Les chiffres révèlent que les règlements salariaux du secteur privé ont augmenté de 15 p. 100 depuis 1991 alors que ceux du secteur public ont enregistré une hausse de 3 p. 100 au cours de la même période. Le tableau ci-dessous témoigne des conséquences du gel des salaires sur les employés fédéraux comparativement aux changements survenus dans le coût de la vie et les gains des travailleurs en général. J'attire votre attention sur les totaux: entre 1991 et 1997, l'indice des prix à la consommation a enregistré une augmentation composée de 15,3 p. 100, le gain hebdomadaire moyen, de 18,2 p. 100, les règlements salariaux du secteur privé, de 15,2 p. 100. Les groupes représentés par l'Institut ont, quant à eux, enregistré une hausse salariale de 3 p. 100. Il s'agit-là d'un écart considérable. Cela vous donne une idée de ce que nos membres ont perdu au titre de l'inflation, des gains hebdomadaires moyens des autres travailleurs.
Passons maintenant aux prévisions. Comme l'indique le tableau, les augmentations salariales projetées pour 1997 varient entre 2,6 et 3,6 p. 100. Pour 1998, elles varient entre 2,6 et 3,8 p. 100. Pour 1999, elles sont fixées à 2,7 p. 100. Ces augmentations rendent la fonction publique de moins en moins concurrentielle sur le marché de l'emploi pour les travailleurs professionnels dont elle a besoin. L'écart ne cesse de s'élargir entre la rémunération des travailleurs fédéraux et les employés de niveaux comparables du secteur privé, comme l'illustre les exemples ci-dessous.
J'aimerais maintenant vous parler de certains de nos groupes. Les ingénieurs constituent un des plus gros groupes représentés par l'Institut. Traditionnellement, les salaires de nos membres ont été comparés aux salaires des ingénieurs professionnels de l'Ontario déclarés par l'Association of Professional Engineers of Ontario. Il s'agit d'une comparaison valable puisque 43 p. 100 des ingénieurs que nous représentons travaillent en Ontario, et 15 p. 100 travaillent du côté québécois de la région de la capitale nationale.
Lorsque nous comparons le salaire moyen de nos membres au salaire moyen des ingénieurs de l'Ontario d'après l'année au cours de laquelle ils ont reçu leur diplôme d'ingénieur, le salaire des ingénieurs au service du gouvernement fédéral accuse un retard d'environ 18,5 p. 100 par rapport au marché extérieur. Veuillez noter qu'il faudrait lire, au graphique 1, non pas B.A., mais plutôt B.Eng.
Les salaires versés aux ingénieurs du marché extérieur en 1991 étaient légèrement supérieurs à ceux des ingénieurs au service du gouvernement fédéral en 1997. La situation est à peu près la même pour les membres des groupes Sciences physiques et Chimie. Les salaires actuels de ces employés du gouvernement fédéral sont égaux à ceux du marché extérieur en 1991. Nous accusons donc six années de retard par rapport au secteur privé. Les écarts sont davantage dramatiques dans le cas du groupe Vérification. La fonction publique est forcée de concurrencer le marché qui verse jusqu'à 85,7 p. 100 de plus pour les vérificateurs principaux expérimentés. Un récent document de Revenu Canada révèle que le manque de vérificateurs a fait que le ministère n'a pas atteint ses objectifs de recouvrement des recettes. Dans le sud de l'Ontario, les pertes de recettes fiscales dues à un manque de personnel atteignaient un demi-milliard de dollars, ce qui représente 39 p. 100 de l'objectif ministériel de la région. Encore une fois, il ne s'agit ici que d'une seule région qui a perdu 500 millions de dollars. La masse salariale de Revenu Canada en ce qui concerne les vérificateurs oscille autour de 250 millions de dollars.
Le ministère conclut que le fait de ne pas offrir des salaires compétitifs à ceux d'autres employeurs l'empêche de recruter des employés et de les maintenir en poste. Je n'ai pas le document sous mes yeux, mais dans son dernier rapport, le vérificateur général indique qu'un grand nombre de vérificateurs quittent la fonction publique sans bénéficier d'aucune mesure d'encouragement. En fait, ils n'ont pas droit à de telles mesures. Plus de 400 vérificateurs ont quitté, mais seulement 30 ont bénéficié de mesures d'encouragement. Il y a manifestement quelque chose qui les attire à l'extérieur de la fonction publique.
En ce qui concerne la recherche scientifique au niveau fédéral, il y a un autre tableau qui compare les minimums et les maximums des divers niveaux dans les universités de l'Ontario. La plupart des universités de cette province n'ont pas de salaire maximum pour les diverses catégories professorales. Par conséquent, il se pourrait fort bien que le tableau sous-estime l'écart pour les scientifiques fédéraux. Toutefois, comme vous pouvez le constater, il existe un écart à tous les niveaux.
En ce qui concerne les négociations collectives, lorsqu'elles ont repris dans la fonction publique en 1997, l'Institut professionnel s'attendait à un dialogue constructif avec le Conseil du Trésor dans le but de résoudre les problèmes de rémunération. Toutefois, la plupart des équipes de négociations ont reçu des offres salariales minables de l'ordre de 1 p. 100 à 1,5 p. 100 par année, et des demandes de concession pour les autres conditions d'emploi. On n'a pas reconnu qu'il existait des problèmes de rémunération. Le tableau figurant à la page 12 fait état de la situation des négociations entre l'Institut professionnel et le Conseil du Trésor. Il englobe tous les membres de l'Institut qui sont à l'emploi du Conseil du Trésor, c'est-à-dire 29 000 employés.
J'aimerais vous parler brièvement de la rémunération des hauts fonctionnaires. Le traitement très différent que les hauts fonctionnaires ont reçu en matière de rémunération contraste grandement avec notre expérience à la table. D'abord, le président du Conseil du Trésor a rassemblé des experts indépendants de l'extérieur pour étudier la question de la rémunération des hauts fonctionnaires. Toutefois, pour le reste de la fonction publique, le gouvernement avait déjà suspendu par une loi l'arbitrage fait par une tierce partie. Par la suite, le comité consultatif sur le maintien en poste et la rémunération du personnel de direction a préparé des recommandations basées sur la comparabilité avec le marché extérieur. Il ne s'agissait pas d'une politique unique comme celle qui nous est imposée à la table par les négociateurs du Conseil du Trésor. Enfin, le ministre s'est empressé d'adopter les recommandations de la révision effectuée par cette tierce partie.
J'attire votre attention sur le tableau de la page 15 qui calcule les rajustements de salaire accordés aux taux de rémunération actuels des EX et des DM. Ces hausses sont fortement supérieures à l'augmentation totale de 7,96 p. 100 que le Conseil du Trésor prétend avoir accordée à ses cadres pour les quatre prochaines années. Les offres salariales de 1,5 p. 100 et 1 p. 100 faites à ses professionnels ne se comparent nullement aux augmentations de 42 p. 100 accordées aux cadres.
L'Institut professionnel ne met pas en doute le mérite des cadres supérieurs qui touchent ces augmentations provenant de l'enveloppe de la rémunération approuvée par le ministre plus tôt cette année. Il s'interroge plutôt sur la norme apparente des deux poids deux mesures adoptée par le Conseil du Trésor. Il existe des problèmes de rémunération pour la catégorie scientifique et professionnelle. Le Conseil du Trésor refuse toutefois de tenir compte de cette réalité et semble plutôt rechercher la confrontation à la table.
Les études effectuées en faveur des recommandations pour les hauts fonctionnaires le reconnaissent également. À la demande du Conseil du Trésor et de la fonction publique, le Centre de recherche sur la gestion publique a demandé les points de vue des hauts fonctionnaires sur leur environnement de travail et leurs salaires, de même que leurs plans d'avenir. Fait intéressant, ces hauts fonctionnaires indiquent qu'ils perdent des gens de fort calibre à un rythme étonnant. Or, ils ne parlent pas du personnel de la direction, mais des gens qui travaillent pour la direction.
Il est fort à parier que les politiques de rémunération de l'employeur pour ses travailleurs professionnels aggraveront les problèmes actuels de maintien en poste et de recrutement. Ce n'est pas de cette manière qu'on construira et maintiendra une fonction publique de calibre mondial.
Le tableau à la page 15 indique la différence pourcentuelle qui existe entre le salaire minimum actuel des hauts fonctionnaires et le nouveau minimum qui leur est accordé. Les pourcentages, qui varient entre 17,3 et 23,2 p. 100, représentent les changements apportés à la rémunération minimale versée aux hauts fonctionnaires. Ces changements sont notables.
Que devons-nous faire? L'Institut estime qu'il est temps d'agir. La fonction publique du Canada constitue une partie vitale de l'infrastructure publique nécessaire au maintien et à la progression du bien-être économique et social des Canadiens. Il est urgent d'apporter une attention particulière aux responsables des programmes et des conseils dispensés au gouvernement. Les progrès qui seront réalisés dans les quatre secteurs suivants solutionneront en partie le problème de recrutement et de maintien de l'effectif, et contribueront à rétablir la fierté dans la fonction publique canadienne. Premièrement, il faut solutionner les problèmes en matière de rémunération. En raison de l'économie canadienne, il existe une forte demande pour les services de professionnels compétents. Or, la position du Conseil du Trésor en matière de rémunération reflète la mentalité de récession d'un employeur qui en est encore à réduire ses effectifs. Les négociateurs du Conseil du Trésor doivent arriver à la table en pensant à l'avenir et non en regardant en arrière. Il faut donner un nouveau mandat aux représentants de l'employeur afin de solutionner le problème des salaires inférieurs et les autres conditions d'emploi.
Deuxièmement, il y a l'appréciation des employés et des services publics. Il nous faut un leadership et une implication visibles et soutenus pour régler la «crise tranquille» qui sévit au sein de la fonction publique. Dans leurs déclarations et par leurs gestes, le premier ministre et les ministres doivent reconnaître la valeur des services dispensés par les fonctionnaires fédéraux et admettre qu'ils constituent la pierre angulaire de l'avenir de notre pays.
Troisièmement, les investissements dans les services publics. L'approche de la réduction aveugle de l'Examen des programmes a donné lieu à un environnement de travail difficile pour les survivants. Il est temps de revoir les niveaux de financement et les ressources nécessaires à la prestation des programmes. Dans de nombreux cas, il faudra injecter de nouvelles ressources.
Quatrièmement, la stabilisation des organisations. La prédisposition à transférer les responsabilités, à privatiser, à commercialiser ou à éliminer des programmes et des organisations a déstabilisé la fonction publique et n'incite nullement les employés à s'engager personnellement envers leur organisation. La loyauté et le dévouement ont toujours leur place; il faut les cultiver. La restructuration du gouvernement devrait avoir lieu uniquement lorsqu'il y a analyse de rentabilisation après avoir consulté les employés et en avoir discuté publiquement.
Je vous remercie, monsieur le président, de nous avoir permis de comparaître devant vous aujourd'hui. Nous sommes prêts à répondre à vos questions.
Le président: À la page 12 de votre mémoire, vous dites qu'il y a eu entente avec les groupes Gestion des systèmes d'ordinateurs et Contentieux. Pouvez-vous nous dire en quoi consiste cette entente?
M. Hindle: Le groupe Contentieux est le deuxième avec lequel le gouvernement a conclu une entente après la reprise des négociations. Cette entente s'inspire de la décision arbitrale rendue en 1991, mais qui a été annulée par la loi qui mettait fin aux grèves et imposait le gel salarial. L'entente prévoit une augmentation d'environ 5 p. 100.
Le président: Par année?
M. Hindle: C'est une entente de deux ans.
En ce qui concerne le groupe Gestion des systèmes d'ordinateurs, l'entente a été conclue à la fin d'octobre 1997 et prévoit une augmentation de 12,5 p. 100 sur deux ans.
Le président: Et dans le cas du groupe Contentieux, est-ce que l'augmentation était de 5. p. 100 sur deux ans, ou de 5 p. 100 pour chacune des deux années?
M. Hindle: Elle est de 5 p. 100 pour chacune des deux années. Dans le cas du groupe Contentieux, l'entente est fondée sur une décision arbitrale rendue en 1991. L'unité de négociation ne compte qu'environ 64 avocats. Ils représentent un très faible pourcentage des avocats qui travaillent pour la fonction publique fédérale.
L'entente négociée avec le groupe Gestion des systèmes d'ordinateurs a été conclue à la fin d'octobre 1997, après des négociations très difficiles. L'employeur a reconnu qu'il perdait des spécialistes en informatique. Il continue d'ailleurs d'en perdre. L'entente conclue en octobre dernier n'aurait peut-être pas été jugée assez satisfaisante par les employés aujourd'hui. Le secteur privé continue d'attirer les spécialistes en informatique.
Le Conseil du Trésor lui-même a reconnu l'urgence du problème et a accepté de rouvrir les négociations trois mois plus tôt que prévu en vertu de la loi. Le groupe Gestion des systèmes d'ordinateurs va donc retourner à la table au début de novembre de cette année plutôt qu'en 1999.
Le président: Le groupe Vérification a fait l'objet d'un article du Globe and Mail la semaine dernière, n'est-ce pas?
M. Hindle: Oui.
Le président: L'article montre la frustration que ressentent ces employés. Pouvez-vous nous expliquer d'où vient ce sentiment de frustration?
M. Hindle: Ce sentiment de frustration existe depuis très longtemps. Les vérificateurs se sont joints à l'Institut à la fin des années 80. Leur frustration tient en partie au fait que l'Institut n'a jamais réussi, depuis la fin des années 80, à négocier une convention collective au nom du groupe Vérification. Leur convention, d'ailleurs, indique toujours que l'Alliance de la fonction publique est l'agent négociateur du groupe.
Nous avons essayé de négocier une première entente à la fin de 1989, début 1990. Nous nous sommes retrouvés devant une commission de conciliation. Celle-ci a formulé une recommandation. Il n'y a eu aucune offre intéressante de la part du Conseil du Trésor. Les vérificateurs ont déclenché des mouvements de grève en 1990 et 1991. Ils ont été visés par la loi de 1991 qui mettait fin aux grèves dans la fonction publique.
Ils ont eu droit, si je ne m'abuse, à une augmentation de 4,5 p. 100 pour une année avant de se retrouver assujettis au programme de restrictions salariales, qui prévoyait des augmentations de 0 et 3, 0 et 0, 0 et 0. Au cours des périodes où il n'y a eu aucune augmentation, nous avons essayé de négocier avec le Conseil du Trésor des questions autres que la rémunération.
Je tiens à souligner que nous avons essayé de faire changer le nom de l'agent négociateur. Nous voulions être reconnus en tant qu'agent de négociation du groupe, puisque c'est nous qui avions le certificat d'accréditation. On nous a laissé entendre à la table de négociation que si nous voulions remplacer le nom de l'Alliance de la fonction publique par celui de l'Institut professionnel, il faudrait réimprimer la convention. Comme il s'agissait d'une question d'ordre financier, le Conseil du Trésor n'était pas d'accord. C'est essentiellement l'attitude qu'a adopté le Conseil du Trésor au cours de la période de restrictions salariales, période où nous avons plutôt essayé de régler les questions qui ne relevaient pas de la rémunération.
Nous avons ressenti beaucoup de frustration. Les vérificateurs n'ont reçu que de piètres offres à la table de négociation. Ils négocient depuis plus d'un an. Nous avons commencé à négocier avant l'expiration de leur convention collective. Cela fait un an, si je ne m'abuse, soit depuis le 4 mai, que leur convention est expirée.
Nous ne sommes plus visés par la loi sur les restrictions salariales, mais cela fait plus d'un an que le groupe AU aurait dû toucher ce qui aurait été sa première augmentation salariale. Cette augmentation aurait dû lui être versée le 4 mai 1997.
Le président: Si la direction du groupe Gestion des systèmes d'ordinateurs a dit au Conseil du Trésor qu'elle manque désespérément de personnel et qu'elle perd des employés, la même chose ne s'est-elle pas produite dans d'autres groupes? Pourquoi n'a-t-on pas fait la même chose pour le groupe Vérification?
M. Hindle: À mon avis, Revenu Canada, qui est essentiellement l'unique employeur de vérificateurs, a fait état au Conseil du Trésor des problèmes qui existent en matière de rémunération, de maintien en poste et de recrutement des vérificateurs. Il s'agit d'un ministère parmi d'autres. Il a donc été assez facile pour le Conseil du Trésor de ne pas tenir compte des doléances du ministère.
Dans le cas des spécialistes en systèmes informatiques, le problème est plus généralisé. Il vise l'ensemble de la fonction publique. Il y a sans doute une vingtaine de sous-ministres qui ont essayé d'accaparer l'attention de Peter Harder, de lui dire qu'ils ont des problèmes avec ce groupe, qu'il doit trouver de l'argent pour eux. C'est donc l'ensemble de la fonction publique qui a porté plainte ou fait des recommandations au Conseil du Trésor. Dans le cas des vérificateurs, Revenu Canada est le seul à être intervenu en leur nom.
Le sénateur Forest: À la page 6 de votre mémoire, vous faites allusion à la directive sur le réaménagement des effectifs. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet?
M. Hindle: La directive de 1991 est entrée en vigueur à la fin des mouvements de grève dans la fonction publique. Elle garantit une offre d'emploi raisonnable à chaque employé de la fonction publique.
Le sénateur Forest: Et vous dites que le gouvernement a refusé de revenir à cette directive?
M. Hindle: Quand il a supprimé la garantie relative à l'offre d'emploi raisonnable, établi la liste des ministères les plus et les moins touchés et introduit la prime de départ anticipé et le programme d'encouragement à la retraite anticipée, le gouvernement nous a dit que l'élimination de cette garantie avait pour but de lui permettre de réduire ses effectifs. À la fin de 1995, le ministre responsable du Conseil du Trésor a déclaré que le Conseil comptait rétablir la directive, une fois terminé le programme de réduction des effectifs.
Ce programme a maintenant pris fin, ou du moins nous le croyons, puisque c'est ce que le gouvernement nous a dit. Il nous a dit qu'il était terminé. Or, lorsque nous avons, au cours des discussions, évoqué la possibilité de revenir à la directive de 1991, nous avons constaté que l'employeur, le gouvernement, n'était pas prêt à rétablir la garantie relative à l'offre d'emploi raisonnable. Il voulait quelque chose de différent.
Le sénateur Forest: Merci beaucoup. Monsieur le président, je dois malheureusement vous quitter puisque j'ai un autre engagement et que je suis déjà une dizaine de minutes en retard. Je tiens à remercier les témoins ainsi que les autres membres du comité. Nous convenons tous que nous avons effectivement besoin d'une fonction publique qui est bien rémunérée.
Le président: Merci, messieurs, de votre exposé fort intéressant. Nous allons y revenir quand nous poursuivrons nos discussions la semaine prochaine.
Je tiens à indiquer aux membres du comité que le vérificateur général, Denis Destautels, doit comparaître devant nous à 17 h 30. J'espère que vous serez présents -- la conversation devrait être intéressante. Nous allons examiner les chapitres 1 et 2 du rapport du vérificateur général, qui portent sur les réductions des dépenses et des effectifs au sein de la fonction publique. Vous devriez tous en avoir une copie. Sinon, nous pouvons vous en obtenir une. Veuillez vous adresser au greffier. Je crois que nous devrions analyser ces chapitres.
M. Hindle: Avant de partir, sénateur, j'aimerais remercier le comité de nous avoir écoutés et aussi de l'intérêt qu'il porte à la fonction publique. Si vous avez d'autres questions à nous poser au sujet du mémoire, vous n'avez qu'à communiquer avec l'Institut.
Le président: Nous allons sans aucun doute le faire.
Le comité poursuit ses travaux à huis clos.