Délibérations du comité sénatorial permanent
des
Pêches
Fascicule 9 - Témoignages pour la séance du 28 mai 1998
OTTAWA, le jeudi 28 mai 1998
Le comité sénatorial permanent des pêches se réunit aujourd'hui à 8 h 30 pour étudier les questions de privatisation et d'attribution de permis à quota dans l'industrie des pêches au Canada.
Le sénateur Gerald J. Comeau (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président: Honorables sénateurs, le premier témoin que nous entendrons ce matin est M. Klaus Sonneberg, de la Fédération des pêcheurs de l'Est.
La Fédération des pêcheurs de l'Est a été formée en 1979 afin de fournir une voix régionale à un certain nombre d'organisations de pêcheurs des Maritimes et du Québec. La fédération est un organisme cadre qui regroupe surtout de petits propriétaires de bateaux. Je suis certain que Klaus nous fournira plus de renseignements à ce sujet au fur et à mesure que nous avancerons dans nos travaux.
Bienvenue à notre comité. Je vois que vous avez certains collègues à vos côtés. Je présenterai d'abord les membres du comité, après quoi vous pourrez présenter vos collègues. Sont présents aujourd'hui le sénateur Robichaud, du Nouveau-Brunswick, que vous connaissez, je crois, le sénateur Stewart, le sénateur Butts, de la Nouvelle-Écosse et le sénateur Adams, des Territoires du Nord-Ouest. Sont aussi présents Claude Emery, notre adjoint de recherche, et Marie-Danielle Vachon, greffière du comité.
Présentez d'abord votre déclaration, après quoi nous passerons aux questions.
Mme Melanie Sonnenberg, coordonnatrice exécutive, Fédération des pêcheurs de l'Est: Bonjour. À mes côtés se trouvent M. Osborne Burke, de North of Smokey, qui est également membre de la Fédération des pêcheurs de l'Est (FPE) et M. Klaus Sonnenberg; de la Grand Manan Fishermen's Association.
Je me propose de faire une brève déclaration liminaire, après quoi je céderai la parole à Osborne et à Klaus.
Merci beaucoup de nous donner l'occasion de comparaître aujourd'hui devant le comité du Sénat. La FPE est un organisme cadre qui représente plus de 2 000 pêcheurs des Maritimes et du Québec. Ces pêcheurs appartiennent à 21 regroupements de pêcheurs du Nouveau-Brunswick, de la Nouvelle-Écosse, de l'Île-du-Prince-Édouard et du Québec. Il s'agit d'associations indépendantes de petite taille, dont les intérêts sont variés.
En 1996, la fédération a révisé ses objectifs pour mettre à la disposition des membres des occasions d'échanger de l'information et de se constituer en réseau, au moyen d'assemblées trimestrielles et de manifestations spéciales. En vertu de son nouveau mandat, la fédération n'est pas habilitée à prendre position sur des enjeux locaux. L'orientation du MPO vers la cogestion revêt, croyons-nous, de plus en plus d'importance pour nos membres.
Étant donné le large éventail de problèmes auxquels les pêcheurs sont en butte, l'échange d'information est essentiel à une gestion efficace de nos ressources. Nos membres représentent un large éventail de pêcheries côtières et de types d'engins. Dans le contexte de ces antécédents variés, nous disposons d'une mine d'information et de points de vue.
Dans l'élaboration du présent mémoire, il nous est apparu à tous évident que nous devrions nous concentrer sur l'application des QIT dans divers secteurs des Maritimes et du Québec, du concept d'océan modèle en cours d'élaboration en Gaspésie au rachat de permis de pêche du poisson de fond dans le sud du Golfe, en passant par les conseils de gestion communautaire du sud-ouest de la Nouvelle-Écosse et la pêche à permis multiples dans le sud-ouest du Nouveau-Brunswick. Dans chacun des cas, on obtient un aperçu unique des QIT et de la privatisation ainsi que de leurs effets sur la pêche côtière.
Sur ce, je demanderai maintenant à M. Osborne Burke de vous donner un petit aperçu de la situation dans ce secteur.
M. Osborne Burke, directeur, North of Smokey Fishermen's Association: (Phrase non traduite) Notre organisme représente les pêcheurs du nord du Cap-Breton, qui font appel à des engins fixes et mobiles, exploitent de nombreuses espèces et détiennent de multiples permis. Nous sommes uniques dans la mesure où nous représentons des pêcheurs dans sept ports, à la fois dans la région de Scotia-Fundy et dans la région du Golfe. Nous avons été très actifs dans le dossier de la rationalisation de la flottille.
Notre organisme s'oppose aux QIT tels qu'on les définit actuellement.
Je crois que chaque région est unique et diversifiée, dotée de besoins différents. Le régime actuel place le contrôle des ressources entre les mains de quelques-uns, sans tenir compte des besoins des collectivités côtières.
Nous avons été très actifs dans le dossier de la rationalisation de la flottille et de l'étude des solutions de rechange au régime actuel des QIT. À l'heure actuelle, nous étudions la possibilité de conclure un partenariat avec sept autres organismes de la région du Golfe, en Nouvelle-Écosse, et nous avons formé le Gulf of Nova Scotia Fleet Planning Board. Le conseil, qui représente huit organismes, regroupe des représentants élus représentant les pêcheurs à permis multiples qui exploitent des espèces multiples dans la région du Golfe, en Nouvelle-Écosse. Il représente 75 p. 100 des 685 véritables pêcheurs désignés présents dans la région du Golfe, en Nouvelle-Écosse.
Nous avons exploré de nombreuses options. Dans notre démarche, nous étudions notamment la possibilité de réduire la capacité de pêche, tout en conservant le plus grand nombre possible de pêcheurs dans nos collectivités côtières. À de nombreuses reprises, nous avons entendu le MPO déclarer que de trop nombreux pêcheurs s'emploient à capturer des poissons trop peu nombreux. Les efforts déployés dans le cadre du programme fiscal initial visaient à réduire le plus possible le nombre de pêcheurs. Toutefois, le gouvernement n'a pas prêté l'oreille aux pêcheurs, qui ont clairement laissé entendre que le fait de réduire le nombre de pêcheurs n'entraîne pas nécessairement une réduction de la capacité de pêche.
Notre démarche, qui est à participation volontaire, consiste à réduire la capacité de pêche. Dans la région du Golfe, en Nouvelle-Écosse, nous avons conclu une entente historique avec les neuf navires dotés d'un QIT qui font partie de la flottille des navires de 45 à 65 pieds. Suivant une entente volontaire, on achètera leurs permis et leurs quotas en vertu d'un programme combiné de rachat de permis postérieur à LSPA et d'octroi de prêts sans intérêts aux pêcheurs.
Les personnes concernées prendront leur retraite. Les quotas ainsi achetés seront régis par le conseil de planification de la flottille et redistribués dans le secteur de la pêche côtière. En contrepartie du droit d'utiliser le quota et de débarquer du poisson, on imputera des frais, établis pour chaque livre de poisson débarqué, et les sommes ainsi récoltées serviront au financement des prêts sans intérêts. De plus, les éventuelles recettes additionnelles seront investies dans les nouveaux efforts de rationalisation de la flottille que nous envisageons actuellement dans des secteurs autres que celui de la pêche du poisson de fond.
En vertu du mécanisme décrit ici, le Gulf of Nova Scotia Fleet Planning Board détiendrait un QIT. La principale différence, c'est, cependant qu'il le détiendrait en fiducie pour tous les pêcheurs côtiers de la région du Golfe, en Nouvelle-Écosse. Cette démarche aura pour effet de ramener à essentiellement neuf le nombre de pêcheurs dans la région et de stabiliser la majorité, soit plus de 650, nos collectivités côtières bénéficiant de la plupart des retombées économiques.
Nous avons déjà engagé environ 200 000 dollars en fonds industriels dans cette initiative. Notre proposition a été présentée au ministre des Pêches et des Océans, au ministre du Développement des ressources humaines du Canada de même qu'à divers députés et à d'autres parties intéressées.
En conclusion, je tiens à souligner qu'il y a des solutions de rechange au régime actuel des QIT. Je rappelle aussi aux membres du comité que chaque secteur et chaque région est unique, ce qui exclut le recours à une approche commune pour tous. Nous croyons avoir mis au point, pour notre région, une solution de rechange qui se révélera efficace. De même, cette approche est conforme à celle du gouvernement, qui consiste à réduire la récolte et à assurer la stabilité future de nos collectivités côtières. Merci.
M. Klaus Sonnenberg, Grand Manan Fishermen's Association, et trésorier, Fédération des pêcheurs de l'Est: Je n'ai pas eu l'occasion de féliciter le sénateur Robichaud de sa nomination. J'en profite donc pour le faire.
La Grand Manan Fishermen's Association s'est jointe à la Fédération des pêcheurs de l'Est en 1982. Nous avons toujours déployé des efforts pour assurer l'élaboration d'une politique des pêches au profit des pêcheurs du sud-ouest du Nouveau-Brunswick et, plus particulièrement, de Grand Manan, ceux d'aujourd'hui aussi bien que ceux de demain. Nous avons eu notre part de problèmes. Nous avons dû lutter pour être acceptés comme organisme du Nouveau-Brunswick dans la région de Scotia-Fundy. Durant les années 80 et au début des années 90, nous nous sommes malgré tout bien tirés d'affaire. Nous nous sommes familiarisés avec les règles du jeu, et nos pêcheurs ont établi une pêche à permis multiples qui, à maints égards, constituent une entreprise privée dans la mesure où elle est négociable. En fait, il s'agit de permis négociables auxquels ne se rattache pas le poids des prises. Toute personne qui souhaite négocier un permis doit s'adonner à la pêche. Tel est le point fort de la pêche côtière. Les titulaires d'un permis doivent pêcher.
L'un des problèmes que nous avons rencontrés a trait à la clause de droits acquis dont bénéficient les exploitants désignés, ce qui a permis à certaines personnes d'exploiter plus d'un navire. Ce genre de scénario s'est traduit par l'exercice de pressions plus fortes sur la pêche de même que par la multiplication du nombre de personnes qui dépendent de cette activité. À l'instar du banquier, le pêcheur de salon se réserve une part des revenus de la pêche. La Fédération des pêcheurs de l'Est et la Grand Manan Fishermen's Association sont favorables à l'idée d'une pêche axée sur les propriétaires-exploitants. Avec l'avènement de l'accessibilité à des quotas privés, à des quotas qui sont transférables, on craint que ce modèle ne s'écarte de nous.
À l'occasion des premières discussions relatives aux QIT ou aux QI dans la pêche mobile du poisson de fond -- et, monsieur le président, vous êtes très au fait de ce débat --, nous nous sommes dits d'accord avec l'idée des quotas individuels. Toutefois, nous nous sommes dits en désaccord avec l'idée des quotas individuels transférables. Pour nous, les quotas qui n'étaient ni suffisamment importants ni utilisés auraient dû être retournés dans la réserve, afin d'être redistribués aux pêcheurs actifs.
Les bureaucrates du MPO ne voient pas les choses sous cet angle. Ils se sont montrés favorables à l'idée qu'on puisse vendre les QI à des fins de cumul, ce qui a entraîné la création d'une catégorie de pêcheurs de salon. Ils ont préféré cette option à celle qui consiste à établir une pêche axée sur des pêcheurs qui pêchent eux-mêmes.
Dans le sillage du mouvement vers la privatisation, on a intégré l'idée populaire selon laquelle on doit utiliser les quotas, faute de quoi on risque de les perdre. L'économie du sud-ouest du Nouveau-Brunswick, où la pêche est axée sur les permis multiples plutôt que sur les permis uniques, a fait l'objet d'une discrimination particulière. En raison des cycles des espèces individuelles et du passage des saisons, de nombreux pêcheurs se sont adonnés à la pêche du pétoncle lorsque cette activité était lucrative et ont décidé de bouder la pêche du poisson de fond pendant les quelques années de vaches maigres qu'on a connues.
Dans le sud-ouest du Nouveau-Brunswick, la pêche était en difficulté bien avant qu'on entreprenne l'élaboration des QI dans la mesure où cette dernière est liée à l'activité américaine dans le golfe du Maine. Lorsque le moment a été venu d'allouer les quotas en fonction du rendement, nous avons été manifestement très désavantagés.
Dans le cadre des rencontres que nous avons eues avec le ministre Tobin, nous avons tenté de le convaincre que la démarche qui a donné lieu à l'établissement de QIT dans la pêche à engins mobiles dans la région de Scotia-Fundy a encouragé les titulaires de permis de pêche à engins multiples à redoubler d'ardeur. Ainsi, la mentalité selon laquelle on doit utiliser les permis, à défaut de quoi on risque de les perdre, a entraîné une recrudescence marquée de l'activité des pêcheurs de homard et de pétoncles de la Baie de Fundy en particulier et des pêcheurs de homard de toute la côte de l'Atlantique: en effet, chaque pêcheur comprend que, un jour ou l'autre, les allocations seront fondées sur le rendement antérieur. Il en résulte que les personnes qui détiennent plus d'un permis, plutôt que d'utiliser un permis après l'autre, les utilisent tous, dans différents navires, dans la mesure du possible, ce qui a pour effet de créer un «historique». Ils agissent ainsi pour éviter d'être victime de discrimination.
Dans l'élaboration des nouveaux systèmes, nous pensons que vous devriez vous fonder sur les points forts du nouveau régime, plutôt que de tenter de concilier des considérations politiques et la volonté d'une majorité qui se fait entendre haut et fort. À nos yeux, c'est un peu comme fréquenter un collège pendant trois ans, en vertu d'un régime donné. À la fin de la troisième année, le doyen du collège change toutes les règles et, à la fin de la quatrième année, on vous refuse votre diplôme parce que les règles ont changé. Depuis les années 70, les pêcheurs du sud-ouest du Nouveau-Brunswick et de nombreux secteurs de la partie continentale de la région de Scotia-Fundy, en particulier, ce sont taillé une place en vertu de ces règles. Aujourd'hui, elles changent. Bon nombre de ces pêcheurs, qui ont planifié leur carrière pendant dix ou vingt ans, se voient aujourd'hui exclus de la pêche. Pour les pêcheurs côtiers que nous représentons, il s'agit d'un problème majeur.
Un autre problème qui se pose a trait à ce qui se produit lorsqu'on alloue des QI. Nous comptons sur une pêche à l'oursin de renom. Cette pêche a été créée par six pêcheurs de Grand Manan. En trois mois, on en a fait une pêcherie d'une valeur de plus de un million de dollars, qui était le fait d'embarcations non pontées. Vous imaginez le tohu-bohu d'autres pêcheurs souhaitant participer à cette pêche. Nous avons été en mesure d'élargir cette pêche et d'allouer douze permis, le ministère en ajoutant un autre, pour un total de treize. Cette pêcherie a aujourd'hui une valeur de deux millions de dollars. Sa durée est de trois mois. Comme vous l'imaginez, les personnes qui participent à cette pêche et celles qui les représentent vont s'opposer à la venue de tout nouveau pêcheur. Dans certains cas, nous créons des millionnaires à l'aide des ressources publiques du Canada, au détriment de secteurs qui sont surexploités, comme la pêche du poisson de fond. En fait, nous pourrions marier les deux: en favorisant la libre entreprise, nous créerions, dans les faits, une économie communautaire.
Le sud-ouest du Nouveau-Brunswick compte un conseil communautaire du poisson de fond. Il s'agit d'un des huit conseils en activité que compte la région de Scotia-Fundy, et il montre bien comment on peut marier la privatisation puisque nous sommes en voie de privatiser un quota pour le secteur. Ce dernier n'est pas donné à des particuliers; il est cédé à la collectivité, qui a charge de l'exploiter. Cette collectivité est en mesure de faire bien davantage que ce qu'auraient fait les particuliers à qui le quota aurait été cédé. L'un des meilleurs exemples a trait au conseil de la région d'Osborne, où on a acheté un quota au profit de la collectivité, ce qui a eu pour effet d'accroître le revenu communautaire et de stimuler les efforts communautaires, plutôt que les droits de propriété individuels.
De toute évidence, le ministère et les bureaucrates sont en désaccord avec certaines de nos idées. À notre avis, la voie qu'ils empruntent n'est pas celle qui répond le mieux aux intérêts de la pêche côtière.
Le président: Merci beaucoup, Klaus, Melanie et Osborne. Nous allons maintenant passer aux questions. Avant que je demande au sénateur Stewart de débuter, je vous présente le sénateur Meighen de Toronto et de St. Andrews, au Nouveau-Brunswick, qui a fait son entrée tout juste après que j'ai eu présenté les autres membres.
Nous nous tournerons maintenant vers le sénateur Stewart, qui posera la première question.
Le sénateur Stewart: Ma première question s'adresse à M. Burke. Si j'ai bien compris, M. Burke, votre groupe de North of Smokey pêche dans la région de Scotia-Fundy, qui correspond à ce que j'appellerais le côté atlantique du Cap-Breton, et dans le Golfe. Est-ce exact?
M. Burke: Oui, c'est exact.
Le sénateur Stewart: Votre groupe se compose de pêcheurs qui exploitent différentes espèces, n'est-ce pas?
M. Burke: C'est exact.
Le sénateur Stewart: Quelles sont les principales espèces?
M. Burke: Ils font partie de la flottille compétitive qui détiennent de multiples permis et qui exploitent de multiples espèces, dans des embarcations de moins de 45 pieds. Ils pêchent une diversité d'espèces.
Le sénateur Stewart: Que pêchent-ils? Le flétan, le homard?
M. Burke: Ils pêchent le homard, le poisson de fond, le hareng, le maquereau, le crabe, toute une diversité d'espèces.
Le sénateur Stewart: Vous avez fait état d'un conseil de planification de la flottille. D'après les propos louangeurs que M. Sonnenberg vient tout juste de tenir à propos de votre région, je suppose que l'idéal serait que votre groupe de North of Smokey bénéficie d'un quota communautaire. Est-ce exact?
M. Burke: Notre organisme est l'un des huit organismes de la région du Golfe qui se sont réunis. Il se compose de tous les groupes qui représentent la majorité des pêcheurs côtiers de la région du Golfe, en Nouvelle-Écosse. Pour nous, «collectivité» s'entend de la région qui s'étend de la baie Saint-Laurent, au nord du Cap-Breton, à la pointe de la région du Golfe, à la frontière de la région de Scotia-Fundy, jusqu'au secteur de Pugwash ou de Wallace en Nouvelle-Écosse. Notre collectivité se compose en fait de toute la région du Golfe de la Nouvelle-Écosse.
Le sénateur Stewart: Je vis dans le village de pêche de Bayfield, dans le petit comté d'Antigonish, de sorte que je connais une partie de la région.
Elle est relativement grande, et on y exploite de multiples espèces. Vous avez décrit la région comme une «collectivité», et vous avez évoqué un conseil de planification de la flottille. Ce conseil se charge-t-il de la planification de la flottille de l'extrémité nord du Cap-Breton jusqu'à Pugwash?
M. Burke: Oui. Nous avons déjà organisé quelques ateliers avec les organismes et les représentants des pêcheurs. Nous avons un plan. La première étape de notre plan consiste à réallouer à la flottille côtière les QIT de poissons de fond que détiennent, dans la région du Golfe, en Nouvelle-Écosse, les neuf navires existants, à condition qu'Ottawa approuve notre plan. Ce plan est le résultat d'une entente volontaire.
Le sénateur Stewart: Combien de titulaires de permis de pêche côtière y a-t-il? Je tiens pour acquis qu'il y a un permis par bateau.
M. Burke: Non, la région du Golfe, en Nouvelle-Écosse, compte 685 pêcheurs désignés ou véritables. Je dirais que plus de 650 de ces bateaux détiennent au moins trois ou quatre permis.
Le sénateur Stewart: Un seul et même navire ne peut, disons, détenir plus de un permis de pêche au homard.
M. Burke: C'est exact.
Le sénateur Stewart: On fait une exception dans le cas des frères, je crois. Je pense que votre idée est bonne. Permettez-moi maintenant de faire mon travail et d'établir si elle comporte des lacunes.
Imaginons que, à mon arrivée dans une région, je déclare: «Ce n'est pas une entreprise, mais, ma foi, on le dirait presque. Ce conseil de planification de la flottille est un club fermé, et on refuse de m'y admettre, ce qui est très injuste. C'est anti-démocratique.» Comment réagissez-vous à ce genre de commentaires -- je suis certain que vous en avez déjà entendu.
M. Burke: Non, nous n'en avons jamais entendu parce que nous sommes constitués en société. Nous nous sommes dotés d'une structure de comité. Nous avons un mandat. Nous avons des objectifs en matière d'expansion de la pêche. Dans l'entente, que nous appuyons sans réserve et à l'origine de laquelle nous avons été, en partenariat avec le MPO, on a établi clairement que tout QIT que nous achetons doit être mis à la disposition de tous les pêcheurs de poisson de fond autorisés de la région du Golfe, en Nouvelle-Écosse. Nous appuyons ce principe sans réserve. La principale différence, c'est que les QIT sont accessibles à tous.
Le sénateur Stewart: Seriez-vous favorables à l'idée qu'on admette de nouveaux pêcheurs dans la région en délivrant de nouveaux permis?
M. Burke: En vertu du régime actuellement en vigueur dans la région du Golfe, en Nouvelle-Écosse, on ne peut se procurer un nouveau permis qu'en rachetant celui d'un autre pêcheur. Foncièrement, on n'a délivré aucun nouveau permis, si ce n'est pour des pêches exploratoires.
Le sénateur Stewart: Voyez-vous le problème où je veux en venir -- c'est-à-dire que, dans les faits, vous constituez un club fermé dans la mesure où on ne délivre plus de nouveaux permis.
M. Burke: Non. On n'a délivré aucun nouveau permis dans la région du Golfe, en particulier pour le poisson de fond.
Le sénateur Stewart: Êtes-vous constitués en société sous le régime des lois de la Nouvelle-Écosse?
M. Burke: Oui. Nous avons nommé un vérificateur, un comptable et un avocat, et nous bénéficions du soutien des pêcheurs faisant partie des organismes de pêcheurs. Notre conseil se compose de représentants élus, et les élections sont ouvertes. Comme je l'ai déjà indiqué, il est très clair que le MPO compte parmi nos partenaires et que tous doivent avoir accès aux quotas, comme nos buts et nos objectifs l'indiquent clairement.
Le sénateur Stewart: Peut-on avoir là un exemple de cogestion?
M. Burke: Oui, d'une certaine façon. Chaque fois que nous nous assoyons à la table, nous débattons des rapports entre les QIT et la pêche côtière ou la pêche semi-hauturière. En vertu des quotas actuels, 20 p. 100 des pêcheurs détiennent pratiquement 80 p. 100 des quotas.
De toute évidence, 20 années de lutte ne suffiront pas à résoudre le problème. Nous pouvons aboutir à une démarche en vertu de laquelle, au moyen d'une entente volontaire, nous rachèterons les permis et nous réallouerons le poisson aux pêcheurs côtiers de notre région qui ont un permis et qui sont autorisés à pêcher. À nos yeux, cette solution ne fait que des gagnants.
Le sénateur Stewart: Vous avez évoqué la rationalisation de la flottille. À la lumière de mon expérience, le mot «rationalisation» signifie «réduction». Dans certaines industries, il est synonyme d'augmentation du taux de chômage. Est-ce ainsi qu'on doit comprendre la rationalisation de la flottille?
M. Burke: Il s'agit d'un programme à participation volontaire. Je participe de très près à certaines enquêtes centrales qui montrent que l'avenir de la pêche du poisson de fond, dans la région du Golfe, est loin d'être rose, du moins pour les cinq à dix prochaines années. Il y a des pêcheurs qui souhaitent se retirer volontairement. Nous voulons réduire au minimum le nombre de personnes qui quittent la pêche. Dans l'exemple qui nous préoccupe, neuf pêcheurs ont accepté volontairement de prendre leur retraite, et ces neuf pêcheurs représentent essentiellement 100 p. 100 des pêcheurs de poisson de fond de la flottille semi-hauturière. Le retrait de ces neuf pêcheurs nous permet de stabiliser la situation de plus de 650 pêcheurs. Le tout se fait de façon volontaire, à l'aide de sommes investies par l'industrie.
Le sénateur Stewart: Êtes-vous parvenu à convaincre le dernier récalcitrant?
M. Burke: Oui. Ils ont tous signé l'entente.
Le sénateur Stewart: Félicitations.
M. Burke: Ils sont prêts à aller de l'avant. Foncièrement, c'est la première fois que nous sommes témoins de ce genre de dialogue volontaire, d'où se dégage un consensus général. Les intéressés reconnaissent qu'ils ne pourront survivre dans l'industrie de la pêche du poisson de fond sur la foi, essentiellement, d'un permis pour une seule espèce, et ils sont disposés à renoncer à la pêche. Nous veillons simplement à ce que les quotas soient redistribués dans la majorité des collectivités côtières.
Nous avons le soutien des pêcheurs côtiers.
Le sénateur Stewart: Je vous remercie beaucoup, et bonne chance.
Le sénateur Butts: Combien de pêcheurs la FPE représente-t-elle exactement?
Mme Sonnenberg: Elle regroupe 21 organisations membres représentant près de 2 000 pêcheurs.
Le sénateur Butts: Y a-t-il d'autres syndicats à l'extérieur de votre territoire? Est-ce que vous vous opposez à ce que je qualifie votre organisme de «syndicat»?
Mme Sonnenberg: La fédération, je tiens à le souligner, n'est pas un syndicat. Notre région est représentée par des syndicats dont les activités ne relèvent pas de la fédération.
Le sénateur Butts: En quoi n'êtes-vous pas un syndicat?
Mme Sonnenberg: Cet organisme a été créé selon la vision de Roméo LeBlanc, bien avant mon temps. Il a veillé à ce que des fonds soient consentis, et il croyait que la vraie force des pêcheurs réside dans le rassemblement et la collaboration des organismes sur les grandes questions qui touchent la pêche. Avec ces fonds, il a stimulé l'organisation cadre qu'on appelait «la fédération». À cette époque, l'organisation cadre abritait un syndicat, mais depuis, le syndicat a choisi de quitter la fédération.
Le sénateur Butts: Êtes-vous financés par des cotisations?
Mme Sonnenberg: Non, nous ne le sommes pas. Les fonds initiaux, les capitaux de démarrage qui ont été consentis à la fédération en 1979, ont été déposés. Nous vivons des intérêts de cet argent et des projets spéciaux que nous établissons.
Le sénateur Butts: C'est l'argent du MPO qui vous a permis de démarrer.
Mme Sonnenberg: Oui.
M. Sonnenberg: J'aimerais corriger ce que j'ai dit. L'argent provient de la vente de calmars, et c'est cette vente qui a procuré de l'argent à l'organisme. Le gouvernement du Canada n'a pas versé l'argent, mais Roméo LeBlanc a fait en sorte que les recettes de la vente du calmar puissent être utilisées pour financer cette organisation cadre.
Comme vous le savez, il y a deux écoles: ceux qui pensent qu'un pêcheur est un employé, ce qui laisse supposer que l'organisme est un syndicat, et ceux qui pensent que le pêcheur est un entrepreneur, un homme d'affaires qui exploite une entreprise. La deuxième façon de penser correspond davantage aux idées de la fédération.
Le sénateur Butts: À un moment donné, vous avez mentionné que la fédération a investi 200 000 $ dans le plan, et c'est ce commentaire qui m'a poussée à poser cette question.
M. Burke: Cela provenait du Gulf of Nova Scotia Fleet Planning Board. Les pêcheurs nous ont volontairement versé ces fonds obtenus grâce aux allocations temporaires de crabe des neiges dans la zone 12, où nous partagions temporairement les allocations entre nos organismes de pêche côtière. En 1995 et en 1996, nous avons mis des fonds de côté pour planifier l'avenir de la pêche côtière. Les 200 000 $ que j'ai mentionnés sont liés à cette planification.
Le sénateur Butts: J'aimerais en savoir plus sur ce plan. Vous parlez souvent de zone. Qu'est-ce qu'une «zone»?
M. Burke: Voulez-vous dire en terme de pêcherie, comme la région du Golfe ou la région de Scotia-Fundy?
Le sénateur Butts: Quelle est votre interprétation du terme «zone»?
M. Burke: Avec le Gulf of Nova Scotia Fleet Planning Board, notre zone s'étend du nord du Cap-Breton jusqu'à la zone Wallace. Quand je parle de «notre zone», je fais référence à toute la côte du golfe de la Nouvelle-Écosse.
Le sénateur Butts: Le terme est donc purement géographique.
M. Burke: Oui.
Le sénateur Butts: Y a-t-il un nombre précis de pêcheurs dans votre zone?
M. Burke: Oui, cette zone compte environ 685 pêcheurs côtiers professionnels désignés. Notre organisme regroupe tous les organismes de cette zone du Golfe de la Nouvelle-Écosse qui représente ces pêcheurs. Malheureusement, certains pêcheurs ne sont pas membres d'organismes, mais nous représentons leurs intérêts aussi. Nous représentons tous les pêcheurs côtiers titulaires d'un permis, soit 685 pêcheurs dans la région du Golfe de la Nouvelle-Écosse.
Le sénateur Butts: Y a-t-il une limite quant au nombre de permis qu'une personne peut détenir?
M. Burke: Si vous parlez de permis individuels, oui. Toutefois, si vous parlez du nombre de permis, si un pêcheur a un permis de pêche au homard et un permis de pêche au poisson de fond et qu'il souhaite acheter un permis pour le hareng ou un autre permis, il doit l'acheter d'un autre pêcheur professionnel désigné. On émet très peu de nouveaux permis, alors ceux qui existent sont échangés ou achetés. En général, le pêcheur en détient un pour chaque espèce, de sorte qu'il peut pêcher un peu de chaque espèce dans chaque zone et générer des revenus pour l'année.
Le sénateur Butts: Est-ce qu'un pêcheur peut avoir un permis pour chaque espèce?
M. Burke: Oui, s'il est possible d'obtenir ces permis auprès d'un autre pêcheur, mais, à l'heure actuelle, le MPO n'émet pas de permis pour toutes les espèces à tous les pêcheurs. La politique officielle pour le golfe a gelé le nombre de permis pour un bon nombre d'années.
Le sénateur Butts: Klaus Sonnenberg a parlé de QI. Le QI constitue-t-il une forme de privatisation?
M. Sonnenberg: Sénateur, le quota individuel peut être un quota temporaire annuel attribué à un titulaire de permis. Bien sûr, ce qu'on envisage, c'est de rendre cette décision permanente. Le QI deviendrait alors un bien économique, comme un terrain. Un quota individuel est cessible. S'il ne l'est pas, il pourrait tout de même être privé, sous un régime réglementaire différent.
Le sénateur Butts: Sous votre régime réglementaire, considérez-vous le QI comme une forme de privatisation?
M. Sonnenberg: Je ne fixe pas les règles. Nous ne pouvons qu'espérer que la réglementation permettra de protéger la pêche côtière. Sous le régime réglementaire actuel, on pense qu'un quota individuel serait attribué à une personne ou une entreprise, qui aurait ensuite la possibilité de l'échanger, comme on le fait avec une automobile. C'est le genre de règlement que nous n'appuyons pas. Nous appuyons l'idée selon laquelle cette décision de privatisation se limiterait à une collectivité déterminée en fonction, peut-être, de critères géographiques. Cela signifie non pas que la pêcherie se limite à certaines zones, mais bien que la participation au sein de la collectivité est restreinte. Par conséquent, la décision quant au fonctionnement de la pêcherie correspondrait aux choix de la collectivité, comme l'a signalé M. Burke concernant la question de la planification de la flotte.
Le sénateur Butts: Si un QI est éliminé, la valeur du QI est réaffectée. À qui l'offre-t-on?
M. Sonnenberg: À l'heure actuelle, les quotas individuels transférables pour la pêche du poisson de fond au moyen d'engins mobiles sont répartis entre les pêcheurs et les entreprises. La structure actuelle va à l'encontre des intérêts de la pêche côtière, car les coûts liés à l'achat de quotas individuels sont si élevés que les pêcheurs autonomes n'ont pas la possibilité de se les procurer. Seules les multinationales ont l'occasion de le faire.
Le sénateur Robichaud: Je tiens à vous remercier d'avoir pris le temps de nous aider. Je vous félicite de votre travail auprès des diverses associations et de la coopération que vous avez offerte au MPO.
J'aimerais aborder le sujet de la pêche exploratoire. Je crois que nous avons beaucoup de travail à faire à cet égard. Vous avez mentionné la pêche à l'oursin, qui s'est révélée plutôt lucrative.
Un des organismes membres de la FPE, la Botsfords Fishermen's Association, dans le sud-est du Nouveau-Brunswick, a pêché le crabe commun l'an dernier. L'expérience s'est révélée passablement payante. L'an dernier, on lui a attribué un quota communautaire, qui a été divisé entre les pêcheurs de l'Association. C'était une très bonne idée. Cette année, le MPO envisage de rendre permanents les permis exploratoires et d'offrir un quota modeste aux autres pêcheurs. Ils font ce que vous avez mentionné, c'est-à-dire qu'ils transforment ceux qui pêchent le crabe en millionnaires. Je ne crois pas qu'ils deviendront millionnaires, mais ils feront de l'argent. Pourriez-vous aborder la question de l'oursin? Cette question me semble aller dans le même sens.
M. Sonnenberg: Monsieur le sénateur, l'oursin a fait tout ce chemin. Cette pêche n'était pas visée par un permis. Jusqu'à il y a un an, c'était une pêche exploratoire. Elle est ensuite devenue une pêche à accès limité, et nous sommes passés de six permis à treize. Il s'agit d'un quota individuel. Il n'est pas transférable, et pourtant, ceux qui détiennent les permis sont capables de charger d'autres personnes de pêcher l'oursin pour eux. En effet, on a le propriétaire, confortablement installé chez lui, qui prend sa part. Je crois que cela va à l'encontre des intérêts de la pêcherie canadienne.
Dans le cas qui nous occupe, nous avons une pêcherie dont la valeur s'élève presque à 2 millions de dollars, partagée par 13 titulaires de permis, pour trois mois de pêche. De toute évidence, si on cite cette situation comme exemple d'une pêcherie axée pleinement sur le QI, des dispositions doivent être mises en place lorsque les pêcheurs commencent à vivre confortablement grâce à cette pêche de trois mois. Après les trois mois, ces pêcheurs partent à la pêche au homard, au pétoncle ou au hareng. Nous devons établir un mécanisme afin de veiller à ce qu'ils ne deviennent pas -- comme vous le dites -- des millionnaires pendant leurs compatriotes qui pêchent le poisson de fond dans le sud-ouest du Nouveau-Brunswick éprouvent des difficultés à payer leurs bateaux.
Nous subissons des pressions énormes pour accroître le nombre de permis à l'égard de cette pêche. En même temps, les promoteurs de cette pêcherie, les titulaires de permis, exerceront d'énormes pressions pour qu'on ne le fasse pas. De fait, je crois que le ministère des Pêches a signé une entente de cogestion avec ces 13 titulaires de permis prévoyant qu'aucun autre permis ne sera ajouté. Le principal obstacle auquel doivent faire face les bureaucrates, c'est le type de méthode de planification communautaire des pêches que nous préconisons. Trop souvent, les bureaucrates, qui n'ont pas l'esprit ouvert et croient qu'il est beaucoup plus simple de ne plus attribuer de permis à l'égard de cette pêcherie, sont le principal obstacle. Nous considérons qu'ils devraient laisser la collectivité se charger des pêcheries et déterminer les procédures permanentes.
Nous avons toujours appuyé des initiatives comme celle de M. Burke, qui a accueilli les pêcheurs côtiers et ceux qui utilisent des engins mobiles au sein d'un conseil de gestion de la pêche du poisson de fond du sud-ouest. Nous avons toujours dit que nous avons le choix. On peut mettre 100 tonnes de poisson sur un bateau, un très gros bateau, très coûteux à exploiter. C'est le bateau d'un titulaire de permis -- dans la plupart des cas, une entreprise -- et tous les autres sont des employés de cette entreprise. C'est un choix. Le Canada a ce choix. L'autre option, c'est d'attribuer les 100 tonnes à un conseil de planification de la flottille ou au Southwestern New Brunswick Groundfish Management Board. C'est l'un des huit conseils du genre de Halifax à St. Andrews. Cette quantité de poisson peut être réaffectée à 20, 30 ou 40 bateaux, exploités par un propriétaire différent. De cette façon, vous permettez au Canada d'appuyer la vision d'une pêche côtière qui ne dépend pas d'un seul bateau. On appuie l'industrie des services maritimes. On appuie les comptables, les avocats. On appuie l'industrie pétrolière. On appuie tout le monde qui est lié à la pêche. Il ne s'agit pas seulement d'«employés», il y a aussi les gestionnaires d'entreprise dont la force tient au fait qu'il n'y a non pas un titulaire de permis, mais bien 100 titulaires différents.
À titre de membre de la Fédération des pêcheurs de l'Est, en ce qui concerne le problème de la privatisation, je ne crois pas que ce soit une bonne idée pour le Canada d'attribuer ses ressources à de grandes sociétés qui traitent ensuite le public canadien comme des employés.
Le sénateur Robichaud: Je suis d'accord avec une grande partie de ce que vous dites. Je ne suis pas d'accord avec l'idée d'affecter les ressources à un nombre limité de personnes. Nous avons beaucoup de travail à faire, et votre association, ainsi que toutes les autres associations de pêcheurs, a beaucoup de travail à faire pour convaincre les dirigeants qu'il y a une autre façon de faire les choses.
Les permis exploratoires sont attribués aux gens qui sont disposés à assumer certaines dépenses et à prendre des risques. Ceux qui se lancent dans ce type de pêcherie le font avec l'espoir -- et, parfois, quelque indice -- que si cette pêche se révèle rentable, on leur émettra un permis permanent. Ce type de pêcherie prend de l'ampleur d'année en année, comme c'est le cas pour l'oursin ou le crabe commun dans ma région. Si une pêche exploratoire devient permanente, les pêcheurs qui détiennent des permis ne veulent pas qu'on attribue de permis supplémentaires. Si j'étais à leur place, je suppose que j'adopterais le même point de vue, car c'est payant.
On pourrait peut-être attribuer ces permis de pêche exploratoire à des groupes de pêcheurs au lieu de les donner à des personnes. Est-ce possible?
M. Sonnenberg: C'est possible, et on l'a proposé, mais le système actuel n'est pas si mauvais, car il leur permet de continuer à pratiquer cette pêche lorsqu'elle devient lucrative. Je ne crois pas que les personnes qui pêchent l'oursin s'attendaient à ce que leur investissement soit aussi rentable qu'à l'heure actuelle. Nous ne suggérons pas de les éliminer de la pêcherie. Toutefois, nous tenons à signaler que lorsqu'on donne la pêcherie à des personnes, on risque de donner les richesses historiques du Canada non pas aux collectivités, mais aux individus.
La pêche est domaine très changeant. Si la pêche à l'oursin est rentable aujourd'hui, elle ne le sera peut-être pas demain. Nous devons établir des mécanismes qui nous permettront de nous adapter à ces changements dans notre économie. Une personne ne peut s'adapter à ces changements dans l'économie, et c'est le danger qui nous guette si la privatisation est attribuée à des personnes. Ces commentaires s'appliquent tant aux pêches en voie de développement qu'aux pêches déjà établies.
Le sénateur Meighen: C'est peut-être parce que je proviens de St. Andrews, près de la frontière, mais j'aimerais vous poser une question concernant notre interaction avec les Américains. D'après ce que j'ai compris, les Américains ont imposé un moratoire sur les QIT, qui durera encore quelques années. Au Canada, il semble que le ministère veuille privilégier le recours aux QIT, du moins à l'égard de certaines pêches. Seriez-vous en faveur d'un moratoire canadien sur les QIT dès maintenant?
M. Sonnenberg: Nous estimons qu'on doit prendre du recul pour voir si l'engouement pour les QIT entraîne un accroissement exagéré de l'effort dans les pêcheries qui n'ont pas encore été converties aux QI. Nous constatons, par exemple, dans la pêche au homard, que, trop souvent, les gens déploient de plus en plus d'efforts car, si la pêche au homard devient une pêche à QI, ils veulent s'assurer que leurs antécédents leur permettront de devenir des millionnaires grâce à la politique de péremption qui a cours et que le ministre Tobin a critiquée. Le communiqué de presse du 27 avril 1994 indique clairement sa volonté que le ministère mise sur les points forts d'une entreprise qui exploite plusieurs espèces.
De fait, comme en témoigne l'exemple des pêcheurs à engins mobiles de la Nouvelle-Écosse, on a évincé tous les pêcheurs qui n'avaient pas d'antécédents, y compris les pionniers de la pêche mobile. Les pêcheurs de Grand Manan ont été les premiers à exploiter le Banc Georges, mais, aujourd'hui, aucun pêcheur néo-brunswickois muni d'un engin mobile n'est capable de pêcher à cet endroit, car ils n'étaient tout simplement pas là pendant cette période.
Le sénateur Meighen: Pourquoi n'étaient-ils pas là?
M. Sonnenberg: Ils n'étaient pas là parce que les poissons n'étaient pas là.
Le sénateur Meighen: C'est une bonne raison.
M. Sonnenberg: En réalité, les pêcheurs qui affichaient des antécédents à l'égard du Banc Georges pendant ces années pêchaient près de Whitehead, dans la Baie de Fundy, ou près de Grand Manan. Ils affirmaient que les poissons qu'ils prenaient provenaient du Banc Georges. La section près de Whitehead était appelée «Petit Georges», car c'est de là que venaient les poissons.
Le sénateur Meighen: Si je me fie au témoignage que j'ai entendu de la côte Ouest et de la côte Est, il semble que le QIT a au moins l'avantage de pouvoir s'appliquer de manière sélective, en fonction du type de pêche, de facteurs géographiques et des circonstances particulières. Êtes-vous d'accord avec cette généralisation excessive?
M. Sonnenberg: Je crois que cela correspond au principe de la Fédération des pêcheurs de l'Est. Aujourd'hui, vous avez entendu les exposés de deux associations plutôt différentes. Notre association exerce ses activités d'une façon plutôt autonome sous la structure de la Fédération des pêcheurs de l'Est. Notre rôle, à titre de fédération, consiste à permettre aux organismes de se faire entendre par le Parlement. La fédération nous permet de discuter des divergences d'opinions entre nos groupes, dont certains sont en faveur d'attributions individuelles.
Le sénateur Meighen: La notion d'affectations communautaires semble fort intéressante pour M. Burke. Mais comment définir la collectivité? Le terme «collectivité» désigne-t-il les membres d'une association ou les personnes qui vivent dans la zone dont il est question? Par exemple, hier, une pêcheuse de la côte Ouest nous a dit qu'elle vivait dans une zone autre que celle où elle pêchait et que, néanmoins, elle faisait partie de l'association régionale.
M. Burke: En ce qui concerne particulièrement notre conseil de planification de la flotte, on y trouve des pêcheurs qui vivent dans ces localités côtières, pêchent au large de ces ports et ramènent de l'argent dans la localité en question. Notre conseil est ouvert aux commentaires de tout pêcheur ou de toute organisation qui existe actuellement dans ce secteur. Ils peuvent tous siéger au conseil, et nous n'avons jamais refusé quiconque a un enjeu ou un intérêt dans la question. Il s'agit d'un processus ouvert. Nous avons procédé à des consultations, et en sommes arrivés à notre plan.
Le sénateur Stewart a posé une question au sujet des débouchés accessibles aux personnes qui entrent pour la première fois dans le secteur de la pêche. L'un de nos principes directeurs est que la planification de la flotte ne doit pas empêcher l'entrée de nouveaux participants dans le secteur de la pêche côtière. Le sénateur Butts a posé une question au sujet de ce qui arrive aux QIT quand le pêcheur prend sa retraite. Nous envisageons de redistribuer les quotas relatifs aux permis de pêche au poisson de fond dans la région du golfe, en Nouvelle-Écosse. Lorsque nous parlons d'une «collectivité», nous faisons allusion à tous ceux qui, dans cette région, en profitent directement. Nous voulons que les quotas de pêche soient redistribués aux localités côtières pour que tous puissent en retirer les profits, qu'il s'agisse du travailleur d'une usine de transformation, de l'usine de transformation proprement dite, du travailleur de quai, du chauffeur de camion ou du propriétaire de l'épicerie locale.
Le sénateur Meighen: On peut supposer que tout régime de quota est fondé sur une évaluation des stocks. J'ai entendu dire que les pêcheurs ne pensent habituellement pas que les bureaucrates savent faire cette évaluation ou que leurs estimations ne sont pas très exactes. Cette opinion est-elle toujours valide, ou les estimations sont-elles fiables maintenant?
M. Burke: Nous avons participé très activement à l'évaluation centralisée des pêches dans le golfe de la Nouvelle-Écosse. Avant les demandes de réduction formulées dans le passé par des ministres comme M. Crosby, ce sont les pêcheurs côtiers qui pouvaient constater des problèmes concernant la pêche et qui demandaient qu'on y fasse quelque chose. Les pêcheurs sont très au courant des dernières évaluations des stocks.
Il y a d'énormes augmentations le long de la côte ouest du Cap-Breton et à l'Île-du-Prince-Édouard. Dans les secteurs comme la Gaspésie et le Nouveau-Brunswick, et dans d'autres parties de la région du golfe, par exemple, on n'arrivait pas à capturer suffisamment de poisson au cours de l'ensemble de la campagne d'évaluation centralisée pour payer l'essence. Ça varie d'un endroit à l'autre.
Les quotas que nous envisageons d'acheter sont déjà établis, et ils sont fondés sur le total des prises admissibles de 1991. Par exemple, si nous l'achetions et que nous le pêchions complètement en 1998, il serait grandement réduit. Cependant, comme les stocks reviennent, les quotas vont augmenter.
M. Sonnenberg: Dans la Baie de Fundy, nous avons un quota pour la zone 4X, mais on a exagéré dans l'autre sens. Si on nous accorde un quota de 100 tonnes pour l'ensemble de la zone 4X -- il faut dire que le poisson n'est pas dans la partie est de la zone 4X. Il y a eu un déplacement d'activité, et nous avons redoublé d'efforts dans la Baie de Fundy, qui fait partie de la zone 4X, de sorte que, plutôt que de ne donner qu'une partie du quota de 100 tonnes, cette région particulière nous procure presque la totalité de ce quota.
La compartimentalisation des quotas va trop loin, parce qu'il faut tenir compte des efforts qu'il faut déployer pour parvenir à ce quota, et c'est pourquoi bon nombre d'entre nous appuyons la pêche à l'engin fixe, qui permet de capturer le poisson dans un filet en, disons, une demi-heure si le poisson est rare, de sorte que l'on peut parvenir aux 100 tonnes.
Le président: Je remercie les témoins d'être venus nous aider ce matin.
Notre prochain témoin est M. Michael O'Connor. Au milieu des années 80, une restructuration a entraîné la fusion d'un certain nombre d'usines de transformation du poisson qui exploitaient des flottes de chalutier le long de la côte. Deux grandes entreprises industrielles verticalement intégrées en sont issues, l'une à Terre-Neuve, Fisheries Product International, et l'autre en Nouvelle-Écosse, Compagnie nationale des produits de la mer Ltée. Il s'agit d'une entreprise canadienne cotée en bourse qui transforme et met en marché du poisson et des fruits de mer sous la marque Highliner en Amérique du Nord, Fisher Boy aux États-Unis et au Mexique et Booth aux États-Unis. Les actions ordinaires de la société sont cotées à la bourse de Montréal et de Toronto. Veuillez commencer.
M. Michael O'Connor, chef des opérations de la flotte et des relations gouvernementales, Compagnie nationale des produits de la mer: Merci de me donner l'occasion de comparaître devant votre comité.
Les droits de propriété sont prévus pour certaines pêcheries au Canada depuis 1982, et ils ont gagné en popularité dans le monde entier, y compris pour certaines pêches côtières. Par exemple, en 1998, les pêcheurs de Baie de Plaisance, à Terre-Neuve, ont franchi une première étape et accepté un régime de quotas individuels pour la morue de la zone 3PS. L'annonce a été faite ce matin, en ce qui concerne ce stock.
La nécessité d'une pêche bien administrée leur a semblé très claire après les déceptions de la pêche en 1997, qui a entraîné une course au poisson et des prises débarquées de piètre qualité. Cette année, s'ils pêchent plus tard dans la saison, certains transformateurs obtiendront un meilleur rendement et verseront des prix plus élevés pour la morue des zones côtières. Les pêcheurs qui veulent tirer profit d'une pêche plus tardive récolteront aussi moins de poisson pour obtenir le même poids au quota, comparativement à des pêcheurs qui sont poussés à se faire concurrence pour capturer du poisson tout juste après le frai, et dont la qualité et le poids sont inférieurs.
À l'aide de droits de propriété établis au Canada et d'affectations d'entreprise apparentées à un régime, notre entreprise a pu établir des marchés à longueur d'année pour une diversité de produits de la mer. Nous avons changé nos habitudes de pêche en fonction de la demande du marché plutôt que de nous disputer le poisson et de chercher à battre nos concurrents de vitesse au moment de nous rendre aux zones de pêche. Plutôt que de se soucier du volume, notre entreprise s'est axée sur le marché. Les affectations d'entreprise nous ont permis de planifier plus efficacement et de nous concentrer sur la qualité et sur la forme du produit. Nous avons modifié la structure et les opérations de notre flotte, adapté nos stratégies pour améliorer la composition et l'efficience de nos navires en réduisant la capacité de pêche et en maintenant de bons revenus pour les pêcheurs restant. Des investissements fondés sur la qualité ont été faits dans le reste de la flotte, on a modifié les pratiques de pêche et instauré un système et des prix axés sur la qualité. Les structures et les activités de transformation du poisson dans notre usine ont également changé. Les stocks de filet et de blocs ont diminué, et la production de poisson de fond exprimée sous forme d'heures par tonne a augmenté, puisque les produits comportaient davantage de valeur ajoutée. Ce qui précède décrit certains des changements qui se sont produits par la Compagnie nationale des produits de la mer au cours du milieu des années 80 en ce qui concerne notre position concurrentielle antérieure dans le secteur des pêches.
On a aussi fait de l'apprentissage en ce qui concerne les pratiques de pêche. Avec les affectations d'entreprise sont venus la sélection et l'établissement des catégories de qualité. La sélection a été facilitée par la réglementation gouvernementale qui permettait le tri des prises en mer. Il a fallu plusieurs années pour modifier les habitudes des pêcheurs et établir des systèmes de façon à mettre un terme à ces pratiques. Depuis lors, notre entreprise a instauré un programme de conformité relative au poisson de fond qui comprend l'inspection des engins au départ et à l'arrivée du navire, le contrôle en mer à l'aide de boîtes noires, l'affectation d'observateurs à bord, l'installation de registres électroniques et de caméras vidéos, le rapport journalier des prises et de la taille de celles-ci, une politique de débarquement intégral des prises, le contrôle exercé à quai par des tiers et les conditions d'emploi des gestionnaires de notre flotte.
Ces mesures visaient à éviter les erreurs de rapport, le rejet global et le rejet sélectif. Ainsi, on peut être certain que les limites d'allocation d'entreprise ne sont pas dépassées, ce qui permet d'éviter des sanctions ou des amendes. Selon nous, ces mesures remédieront aux lacunes de n'importe quel régime axé sur la gestion des quotas puisqu'on saura toujours quelle quantité de poisson a été récoltée.
En 1998, nous exploitons deux usines dans les Maritimes, cinq chalutiers côtiers et plusieurs navires indépendants. Depuis 1992, nous avons vendu un nombre important de nos navires. Nous n'en aurions pas vendu autant si les pêches actuelles et les perspectives de pêche avaient été meilleures.
Il faut établir une distinction entre les véritables droits de propriété et notre régime d'affectation d'entreprise, pour les raisons suivantes: tout d'abord, nos affectations d'entreprise ne sont que des droits de récolte. D'autres mesures de gestion biologique, par exemple les fermetures saisonnières, le total des prises admissibles, les restrictions à l'égard des engins de pêche et les protocoles relatifs au poisson de petite taille limitent l'étendue de ces droits. Nous n'avons pas le droit de pêcher des stocks dans leur habitat naturel.
Ensuite, la transférabilité permanente des allocations d'entreprise est soumise à l'approbation ministérielle. Nous savions que les transferts, dans une même région, des allocations seraient débattus avec les provinces avant qu'on puisse ou qu'on veuille prendre une décision.
Enfin, le ministre des Pêches et des Océans jouit de pouvoirs discrétionnaires pour l'octroi des permis, de sorte qu'il peut révoquer ou modifier les conditions de notre permis. Ce dernier point suscite de l'incertitude quant aux quotas et aux parts annuelles de chaque secteur et risque de déstabiliser les plans d'investissement, les marchés et les plans de production. Nous travaillons actuellement avec le gouvernement à l'établissement d'ententes de partenariat à long terme qui définiraient clairement nos rôles respectifs dans le secteur de la pêche.
En retour d'une sécurité d'accès à notre part des ressources, nous sommes prêts à assumer davantage d'activités de gestion des pêches en procédant, par exemple, à des enquêtes scientifiques permanentes, en participant à des contrôles par échantillonnage, à des activités de collecte de données et de surveillance en mer. Nous procédons actuellement à plusieurs enquêtes scientifiques sous les auspices d'une association d'entreprises côtières appelée Groundfish Enterprise Allocation Council, et nous assurons un contrôle intégral à quai de tous les débarquements, en plus d'exercer un contrôle par échantillonnage au port dans certaines usines hauturières.
Les principes sous-jacents de ces ententes sont les suivants: la propriété la plus libre possible habilitera les pêcheurs et les propriétaires de navire à être plus responsables de la gestion des ressources. Une stabilité plus grande donnera aux propriétaires plus de temps pour trouver des façons précieuses d'utiliser les ressources.
Les allocations d'entreprise et les QIT favorisent, d'un certain nombre de façons, une utilisation efficiente des ressources. S'ils sont sûrs que leur droit de récolte de poisson sont protégés, les pêcheurs et les propriétaires de navire n'auront pas à gaspiller de l'argent à construire des navires plus gros et à les équiper d'engins plus modernes afin de s'efforcer de capturer du poisson. La transférabilité permanente des quotas permet de cesser les activités excessives actuelles tout en satisfaisant ceux qui abandonnent le secteur des pêches et ceux qui y restent.
Les affectations d'entreprise et les QIT favorisent également une gestion ordonnée et éclairée des pêches. Si leurs précieux actifs sont liés à leurs droits de propriété à un certain pourcentage des prises, les pêcheurs et les propriétaires de navire seront, pour des raisons économiques, intéressés à assurer une gestion adéquate des stocks de poisson. Il y a aussi la conservation des ressources utilisées pour la récolte, ce qui signifie moins de carburant, d'engins de pêche, d'acier, de machinerie et de ressources qui sont gaspillés en raison de l'obligation de maintenir une capacité de récolte exagérée en raison du style compétitif des pêches.
Les pêches axées sur les QIT pour la morue charbonnière et l'aiglefin dans le Pacifique ont aussi permis de prouver que les QIT peuvent sauver des vies. Les chiffres relatifs à la sécurité dans ces pêches se sont améliorés de façon spectaculaire, lorsqu'on les compare à ceux du passé, lorsque les pêches s'apparentaient à un derby.
Il n'est pas facile d'entreprendre un régime axé sur les droits de propriété. Les pêcheurs doivent être prêts à accepter une autre façon de gérer les pêches, les formules de partage doivent être négociées, et il y aura au départ une modification du nombre de pêcheurs et de navires lorsque le marché commencera à s'adapter aux QIT. Si l'on se fie à l'expérience du Canada et d'autres pays en ce qui touche les droits de propriété, une foule d'informations permettent d'évaluer les mérites de ce régime.
Le sénateur Stewart: Nous avons entendu un assez grand nombre de témoins qui s'opposaient aux quotas individuels transférables. Je pense qu'on peut dire sans se tromper qu'une grande part de ces témoins provenaient du secteur de la pêche côtière. Cela m'amène à vous demander où vos usines sont situées. Je pense que vous nous avez dit que vous avez cinq navires côtiers et que vous avez mentionné plusieurs autres navires desquels vous achetez du poisson. Où donc vos cinq navires côtiers pêchent-ils, et quelles autres sources de poisson avez-vous pour vos usines de la Nouvelle-Écosse?
M. O'Connor: Nous exploitons deux usines, l'une à Lunenburg, en Nouvelle-Écosse, et l'autre à Arnold's Cove, à Terre-Neuve.
Les cinq navires pêchent principalement de la sébaste, de la morue et de la goberge. La pêche au vivaneau ouvrira au mois d'août, et nous pêcherons probablement du turbot au large de la côte nord-est de Terre-Neuve.
Les navires indépendants que nous utilisons sont basés au sud-ouest de la Nouvelle-Écosse. Ils fonctionnent en vertu d'un programme particulier, le Temporary Vessel Replacement Program, et ils pêchent principalement de la goberge.
Le sénateur Stewart: Y a-t-il de vos navires ou de ces autres bateaux qui concurrencent les pêcheurs côtiers dans les eaux côtières?
M. O'Connor: Tout navire côtier est visé par une restriction de permis qui l'empêche de pêcher hors de la zone des 12 milles. Parfois, nous nous retrouvons face à des petits navires visés par des QTI et qui pêchent eux aussi dans cette zone. Les pêcheurs qui travaillent avec des engins fixes dans la Baie de Fundy et les petits navires à engins mobiles sont plus susceptibles de manifester de l'animosité. Nous n'avons pas la permission de pêcher à l'intérieur de la zone des 12 milles ou à l'intérieur de la Baie de Fundy.
Le sénateur Stewart: Vous vous êtes démarqués de vos concurrents. Si je gagnais un gros montant d'argent à la loterie et que je décidais de me lancer dans une grande entreprise de pêche, diriez-vous que j'aurais tort de le faire?
M. O'Connor: J'en ai contre les pêches compétitives qui donnent lieu à une capacité excédentaire et à une accumulation de frustrations qui font en sorte que les prises sont bien supérieures à ce qu'elles devraient être. Voilà ce qui m'inquiète.
Le sénateur Stewart: Dans l'entreprise privée, la règle de marché veut que les gens puissent ouvrir de petits commerces de détail, des restaurants et ainsi de suite. Cependant, ce n'est pas ça que vous voulez: vous voulez une pêche semi-socialisée.
M. O'Connor: Je ne pensais pas présenter des arguments en faveur d'une pêche semi-socialisée.
Le sénateur Stewart: C'est moi qui y mets cette étiquette. Pourquoi n'est-elle pas exacte?
M. O'Connor: Elle est inexacte parce que l'exemple n'est pas juste. Il serait meilleur s'il avait trait à une industrie du secteur primaire, comme l'exploitation forestière ou celle d'une autre ressource renouvelable. Comme il s'agit de ressources limitées, ces industries exigent une certaine protection. Par conséquent, il vous faut un régime de gestion, une réglementation, une certaine forme de contrôle.
Le sénateur Butts: Vous avez actuellement une usine de transformation du poisson en Nouvelle-Écosse. Combien en avez-vous fermé dans cette région?
M. O'Connor: En Nouvelle-Écosse, nous avons fermé une usine, celle de Louisbourg, que nous louons actuellement à Han Beek Seafoods, qui transforme du merlu argenté et d'autres espèces sous-utilisées.
Le sénateur Butts: Vous possédez l'usine, et cette entreprise vous verse un loyer, n'est-ce pas?
M. O'Connor: Oui.
Le sénateur Butts: Quelle est l'importance de la transformation du poisson que vous faites au large à bord des navires? Faites-vous également de la transformation dans d'autres pays?
M. O'Connor: Nous ne faisons aucune transformation à bord des navires, mais nous avons effectivement une usine de transformation du poisson à Portsmouth, aux États-Unis.
Le sénateur Butts: La surveillance à bord ou à quai est-elle effectuée par vos employés?
M. O'Connor: Non. Les observateurs sont des tiers qui sont autorisés par le ministère des Pêches et des Océans, tout comme les surveillants à quai. Nos autres activités de surveillance prennent la forme d'un système de caméras vidéo, qui est tout à fait passif, mais qui entraîne lui aussi un changement de comportement en mer.
Le sénateur Butts: Vous avez mentionné que le MPO a le pouvoir de révoquer ou de modifier les permis. Est-ce que cela est déjà arrivé?
M. O'Connor: Le ministre des Pêches et des Océans dispose du pouvoir discrétionnaire nécessaire pour révoquer les permis ou les modifier. À ma connaissance, il n'y a jamais eu de permis révoqué dans le secteur des pêches hauturières. Toutefois, cela est déjà arrivé dans le cas des pêches côtières. Tout de même, les conditions changent assez souvent.
Le sénateur Butts: Je comprends maintenant vos politiques économiques en ce qui concerne votre société. Quelles politiques sociales avez-vous en place, car vous avez un engagement envers les travailleurs, les usines, les collectivités?
M. O'Connor: Récemment, nous nous sommes classés au premier rang parmi les grandes sociétés de la Nouvelle-Écosse pour ce qui est du prix de l'alphabétisation. De fait, c'est à l'échelle canadienne que cela se faisait. Nous avons chez nous un solide engagement envers les employés, ce dont témoigne notre capacité de continuer à exploiter au moins deux usines.
Le sénateur Robichaud: Ceux qui ne sont pas favorables aux QIT ni aux AE affirment que ceux-ci permettent aux grandes sociétés, comme la Compagnie nationale des produits de la mer, de s'emparer de la plus grande part du quota, de se la réserver, et que cela mène à la création de sociétés qui contrôlent une grande part de la ressource, ce qui donne des pêcheurs de salon, toujours prêts à céder leur quota pour en tirer un loyer. Qu'en pensez-vous?
M. O'Connor: Ce n'est pas notre place d'encourager les «pêcheurs de salon». Le phénomène est probablement plus fréquent dans certaines zones de pêche côtière. Cela est peut-être davantage lié à la pêche au homard où ceux dont la pêche est la plus fructueuse ne sont pas visés par un QIT et louent leur bateau à quelqu'un d'autre. Je ne crois pas que cela soit le propre des QIT en ce qui concerne la pêche côtière ni que ce soit un phénomène propre à une pêcherie en particulier.
La Compagnie nationale des produits de la mer n'a pas absorbé toutes les autres sociétés dans le secteur de la pêche hauturière pour accroître son allocation à l'entreprise. Nous avons conservé nos allocations parce que nous les jugeons importantes. C'est un élément clé de notre survie dans la région de l'Atlantique; sans elles, nous ne saurons survivre.
En ce qui concerne la pêche hauturière, où nous disposons d'allocations aux entreprises depuis 1982, il n'y a pas eu de concentration des allocations au sein d'une société ou une autre. À nos débuts, il y avait une vingtaine d'entreprises environ. Ensuite, il y en a eu 14, et cela demeure le cas depuis 1984. Il n'y a pas eu beaucoup de concentration dans le régime de l'allocation à l'entreprise dans les zones de pêche hauturière; d'ailleurs, les parts auraient de fait diminué depuis 1984, le plus gros morceau allant à certains autres secteurs.
Le sénateur Meighen: Quel pourcentage du poisson que vous pêchez provient des eaux canadiennes et quel pourcentage vient d'ailleurs?
M. O'Connor: En 1997, 15 p. 100 environ provenaient des bateaux que nous exploitons, et 85 p. 100 environ, d'autres sources. Les autres sources seraient la mer de Bering et la mer de Barents.
En 1992, lorsque les stocks ont connu une diminution marquée dans la région de l'Atlantique, nous avons eu la chance de pouvoir convertir nos usines à l'étêté et à l'éviscéré.
Le sénateur Meighen: Qu'est-ce que vous entendez par là?
M. O'Connor: Un poisson que l'on étête et que l'on éviscère puisque l'on congèle. Les usines ont acquis une grande spécialisation dans le poisson transformé à valeur ajoutée -- en coupant la tête du poisson et en le vidant de ses viscères, puis en le surgelant, on pouvait en retirer juste assez et transformer le poisson de manière à en arriver à des produits novateurs. En fait, c'est ce qui a assuré la rentabilité de l'entreprise. C'est ce que nous tenons pour une offre changeante. En 1998, nous sommes aux prises avec une réduction notable de l'offre mondiale de poisson de fond provenant de la mer de Bering.
Le sénateur Meighen: Ai-je raison de dire que tout le poisson que vous pêchez est transformé dans vos deux usines au Canada, ou à celle de Portsmouth?
M. O'Connor: Presque tout le poisson que nous pêchons est transformé à Lunenburg. De temps à autre, il est transformé à Arnold's Cove. Le poisson que nous pêchons n'est jamais transformé aux États-Unis.
Le sénateur Meighen: Le poisson qui est transformé aux États-Unis est-il pêché pour quelqu'un d'autre en votre nom?
M. O'Connor: Le poisson transformé aux États-Unis est surtout de la goberge de l'Alaska et du mulet rouge. Ils proviennent de plans d'eau douce comme le lac Winnipeg. Ils proviennent aussi de la mer de Bering.
Le sénateur Meighen: Vous êtes le tout-puissant ministre des Pêches et Océans. Vous pouvez faire ce que bon vous semble. Quelle est la loi, quelles sont les lois que vous croyez qu'il importe d'adopter aujourd'hui? Vous ne disposez que d'une journée pour exercer ce pouvoir; et vous n'avez pas à traiter avec le Sénat.
M. O'Connor: Il n'est pas juste de poser une telle question. Je ne crois pas qu'une seule et unique loi permette de régler tous les problèmes.
Le sénateur Meighen: Quels sont les problèmes qui vous préoccupent d'abord et avant tout?
M. O'Connor: La plus grande question avec laquelle nous sommes aux prises aujourd'hui, c'est celle de la «matière première».
Le sénateur Meighen: Il serait difficile d'adopter une loi qui aurait pour effet d'accroître le nombre de poissons de fond du jour au lendemain.
M. O'Connor: J'essaierais de faire en sorte que l'intervention des gouvernements provinciaux dans le secteur des pêches soit un peu plus transparente.
Le sénateur Meighen: Pouvez-vous nous préciser ce que vous voulez dire par «transparente»?
M. O'Connor: Les intérêts économiques des provinces ont tendance à créer des pressions sur le gouvernement fédéral pour qu'il agisse comme il ne le ferait pas autrement, par exemple pour qu'il intervienne pour «sauver» une usine. Comme nous sommes dans le domaine du possible, choisissons une usine quelque part, en Nouvelle-Écosse, où il n'y a pas de poisson, mais où la collectivité ne veut pas démordre. Les membres de celle-ci s'adressent aux députés provinciaux et fédéraux de la localité et les somme de «faire quelque chose». Il y a peut-être une ressource près de l'usine, mais la mise en valeur de celle-ci peut être mise en doute, car il y a peut-être d'importantes questions liées à la conservation. Toutefois, la situation de l'emploi est à ce point prioritaire que le gouvernement provincial doit se pencher là-dessus. Par conséquent, il met autant de pression qu'il peut sur le gouvernement fédéral et sur les organismes fédéraux afin de débloquer les fonds qui permettront de sauver les usines, sans par contre étudier les effets à long terme d'une telle intervention.
Le secteur des pêches est déréglé par un si grand nombre d'influences qui s'exercent sur le ministre. Nous avons mis des pouvoirs considérables entre les mains d'un seul homme; en fait, c'est beaucoup trop pour qu'on s'attende à ce qu'un être humain puisse prendre des décisions éclairées. Nous avons une lourde bureaucratie qui produit un effet tampon, pour régler les compromis, mais nous attendons d'un seul homme qu'il prenne ces décisions. Nous en demandons probablement trop aux structures en place.
Les droits de propriété ont tendance à institutionnaliser certains aspects du secteur des pêches et à éliminer un grand nombre des pressions qui s'exercent constamment. Pour notre entreprise, cela semble être l'approche logique.
Le président: En l'absence d'une politique nationale, d'un débat public ou d'une politique publique sur les quotas privés, le MPO tend à s'attaquer à la question des QIT et ainsi de suite un secteur à la fois, une zone de pêche à la fois ou une région à la fois, un peu de la façon dont le premier ministre s'attaque aux problèmes, un à la fois. Par contre, dans les zones de pêche, cela incite les utilisateurs ou les titulaires de permis à continuer à pêcher pour maintenir un historique. Celui-ci doit être bon au moment où le MPO vient privatiser les choses ou crée des QIT s'appliquant à une partie quelconque de la zone de pêche. Cela crée toutes sortes de pressions sur tous ces zones de pêche. Cela pose des difficultés du point de vue des quotas et des stocks. Tout cela se fait en l'absence d'une politique ou d'un débat public. Que dites-vous aux gens qui affirment qu'il s'agit là de l'une des inquiétudes légitimes de l'industrie de la pêche -- qu'il n'y ait pas de débat sur la politique publique avant que les stocks ne soient privatisés davantage?
M. O'Connor: Il y a trois ans environ, il y a eu à Montréal un débat public sur la politique des pêches, auquel ont assisté les représentants de pratiquement toutes les régions de notre côte de l'Atlantique. La discussion a surtout porté sur les droits de propriété. Une des conclusions du groupe présent, c'était qu'à moins que les deux tiers des pêcheurs dans une zone conviennent d'y instaurer un régime privé, cela ne se ferait pas.
L'exemple que j'ai évoqué au début de mon exposé à propos de la morue dans la zone 3PS concernait la volonté des deux tiers des pêcheurs de la baie de Plaisance. Il y a une politique que, tout au moins, certaines personnes ont accepté.
Le président: Je parlais d'une «politique publique». Cela touche non seulement les pêcheurs, mais aussi les coiffeurs, les chauffeurs de taxi, les vendeurs d'assurance, les médecins et les membres des collectivités. Je parle du public. Je trouve cela bien de vous entendre dire qu'il y a eu à Montréal une réunion des représentants des groupes du secteur des pêches. Par contre, je parle ici d'un débat public pour savoir si le public accepte cette idée de la privatisation. Est-ce que cela devrait se poursuivre en l'absence d'une politique publique?
M. O'Connor: Cela dépend du degré de participation que peut avoir le public dans un tel débat. Il y a beaucoup de choses à voir. J'imagine qu'il le pourrait. Vous semblez vouloir m'engager dans une discussion sur les quotas communautaires et sur ce qu'il faut faire lorsqu'une entreprise ou un pêcheur muni d'un QIT décide de le vendre à un autre pêcheur qui se trouve dans une autre collectivité. C'est là que vous voulez en venir.
Les collectivités ont bel et bien un impact. La Compagnie nationale des produits de la mer, à la seule usine de Lunenburg, compte pour 10 p. 100 de la facture d'électricité du comté de Lunenburg dans son ensemble. L'évolution de notre productivité à Lunenburg aura donc visiblement un impact sur tous les contribuables de la collectivité de Lunenburg. Il n'y a aucun doute là-dessus.
Fondamentalement, notre approche consiste à mettre sur pied dans chaque collectivité des entreprises solides, viables et durables qui subviendront aux besoins des collectivités. Je ne suis pas sûr qu'on puisse venir de l'extérieur et organiser un débat public où tous ces points de vue différents sont exposés. Je ne suis pas sûr que cela vous avancerait même. Pour avoir des collectivités fortes et durables, il faut des entreprises viables, et c'est le régime sous lequel nous vivons actuellement.
Le président: Il y a huit ou neuf ans, vous avez fermé votre usine à Louisbourg. Le poisson qui auparavant était débarqué à Louisbourg est maintenant débarqué à Lunenburg. Si cette collectivité avait compté sur un secteur où les petits bateaux ont toute la place, ou encore sur un grand nombre de bateaux plutôt que sur un ou deux, le poisson qui reste n'aurait-il pas été débarqué à Louisbourg plutôt qu'à Lunenburg?
M. O'Connor: Je vous comprends. Je peux vous donner des faits qui sont plus exacts. À raison de 40 p. 100, le poisson qui allait à Louisbourg était de la morue du Nord. L'usine de Louisbourg était une usine de morue du Nord. C'est pourquoi nous avons investi dans cette usine, et on nous a encouragés à investir dans cette usine.
Le reste du poisson qui provenait de Louisbourg, c'était de la morue de la zone 4Vsw, qui est fermée depuis 1992. L'usine est fermée depuis 1993. Le poisson que nous pêchons aujourd'hui se compose à raison de 45 p. 100 de goberge, le reste étant de la perche. Nous avons toujours pêché la perche à Lunenburg: la collectivité en a profité. En règle générale, nous ne pouvons pêcher la goberge que dans la zone 4X et au banc Georges, quand c'est ouvert. L'endroit où nous pouvons pêcher la goberge pose tout un problème, même si c'est un stock qui est relativement stable. La bureaucratie hésite beaucoup à nous laisser pêcher dans d'autres zones, même si nous pouvons démontrer que nous pouvons y aller au chalut pélagique avec un observateur en tout temps. Par contre, il y a toute cette perception «politique» qui se présente lorsque la Compagnie nationale des produits de la mer est à l'oeuvre, de sorte qu'on se pose la question: pourquoi les pêcheurs ne pourraient-ils pas y aller aussi? Cela provient de certains des autres secteurs. Nous vivons avec cela. C'est ce qui se passe à Lunenburg.
Cela ne veut pas dire que si Han Beek Seafoods décide de s'établir à Louisbourg et que la pêcherie est ouverte à nouveau que nous ne pêcherions pas le poisson que nous mettions à Louisbourg par le passé pour le mettre à Lunenburg, pour que l'installation y soit viable.
Le sénateur Stewart: Vous avez parlé de 14 sociétés de pêche hauturière. Ces 14 sociétés ont-elles leur part du gâteau dans votre région?
M. O'Connor: Chacune des entreprises a un pourcentage du quota en mer, mais non pas du quota canadien dans son ensemble.
Le sénateur Stewart: Quand vous parlez de «quota canadien en mer», vous laissez entendre que des sociétés étrangères ont une partie de ce quota. Quelle part du quota en mer est la part canadienne?
M. O'Connor: Ce sont toutes des entreprises détenant un permis canadien. Elles ont toutes leur siège dans la région de l'Atlantique au Canada. Il n'y a pas d'élément étranger là-dedans.
Le sénateur Stewart: Devez-vous concurrencer les bateaux qui ne battent pas pavillon canadien en haute mer pour obtenir la perche, la morue, le goberge et le vivaneau?
M. O'Connor: Non.
Le sénateur Stewart: C'est donc que les histoires que nous entendons à propos des chalutiers étrangers, les Espagnols et les Russes et ainsi de suite, relèvent de la fiction?
M. O'Connor: Le seul bateau étranger dont j'ai entendu qui ait pêché dans la zone canadienne l'an dernier, c'est un bateau japonais qui a récolté 355 tonnes de sébaste de la zone 30, allocation que le Canada lui avait attribuée dans la zone canadienne. Il n'y avait qu'un bateau. Il y a peut-être eu un bateau russe qui a pêché du turbot pour Seafreeze à Canso, dans la zone O, bien au nord de toute zone où nous pêcherions nous-mêmes. La majeure partie de la pêche étrangère se fait en dehors de la zone des 200 milles. Certains bateaux cubains ont pêché dans la boîte à merlu argenté du côté de la plate-forme Scotian.
Le sénateur Stewart: Quel pourcentage du quota canadien de perche, de morue et de goberge appartient à la Compagnie nationale des produits de la mer?
M. O'Connor: Du quota canadien de pêche hauturière, nous avons 45 p. 100 de la goberge et 38 p. 100 environ de la perche. Le reste, c'est quelques points de pourcentage ici et là.
Le sénateur Stewart: La perche et la goberge sont-elles maintenant vos espèces principales.
M. O'Connor: Oui.
Les Français se voient attribuer une partie du quota canadien, mais pas du quota canadien de pêche hauturière.
Le sénateur Stewart: Autour de Saint-Pierre-et-Miquelon.
M. O'Connor: Tout à fait.
Le président: J'apprécie que vous ayez pris le temps de venir témoigner ici aujourd'hui. Merci beaucoup. Notre prochaine réunion aura lieu jeudi, à 9 heures.
La séance est levée.