Aller au contenu
 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Affaires juridiques et constitutionnelles

Fascicule 12 - Témoignages


OTTAWA, le mardi 16 décembre 1997

Le comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, auquel a été renvoyé le projet de loi C-16, Loi modifiant le Code criminel et la Loi d'interprétation (arrestation et entrée dans les habitations), se réunit aujourd'hui à 13 h 09 pour étudier le projet de loi.

Le sénateur Lorna Milne (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente: Soyez la bienvenue, madame la ministre. Nous vous savons gré d'être revenue à Ottawa pour témoigner devant notre comité.

Je crois que le sénateur Cogger a une question à vous poser avant que vous ne commenciez votre exposé. Après sa question, vous aurez la parole.

Le sénateur Cogger: Merci d'être là, madame la ministre. Nous pourrions mieux organiser notre après-midi si nous savions de combien de temps nous disposons avec vous. Comme vous le savez, le Sénat siège cet après-midi à 14 heures.

L'honorable Anne McLellan, députée, c.p., ministre de la Justice et procureure générale du Canada: Madame la présidente, je devrai partir au plus tard à 14 h 45. Je dois prononcer un discours à Edmonton ce soir et je n'ai pu annuler cet engagement.

Le sénateur Cogger: Merci.

Mme McLellan: Honorables sénateurs, je suis ravie d'être ici de nouveau aujourd'hui. Je vous remercie de me donner l'occasion de vous entretenir cet après-midi du projet de loi C-16 dont l'adoption est cruciale pour une administration continue efficace de la justice pénale au pays.

Le projet de loi C-16 confère aux agents de la paix le pouvoir d'entrer dans une habitation pour procéder à une arrestation. Je sais que mes fonctionnaires vous ont déjà expliqué en détail le contenu de ce projet de loi. Par conséquent, je vous parlerai plutôt des raisons qui nous ont amenés à déposer ce projet de loi, de sa validité constitutionnelle ainsi que des conséquences d'un rejet éventuel de ce projet de loi.

Vous savez sans doute que le 22 mai 1997, la Cour suprême du Canada a rendu sa décision dans l'affaire de la Reine c. Feeney. Dans cet arrêt, la Cour suprême du Canada a jugé que les pouvoirs d'arrestation et d'entrée prévus par la common law contrevenaient à la Charte canadienne des droits et libertés. Elle a statué que, pour que les agents de la paix puissent agir de façon à ne pas violer le droit à la vie privée que la Charte confère aux Canadiens, ils doivent obtenir une autorisation judiciaire avant d'entrer dans une habitation aux fins d'arrestation, tout comme ils doivent déjà le faire pour les fouilles et les saisies.

La majorité des juges de la Cour suprême du Canada ont indiqué que, si le Code criminel ne prévoit pas expressément à l'heure actuelle la nécessité d'obtenir un mandat contenant une telle autorisation préalable, cette exigence devrait être implicite. Toutefois, comme vous le savez probablement, immédiatement après qu'ait été rendu l'arrêt Feeney, les provinces et les corps policiers ont adopté des positions sensiblement différentes concernant l'interprétation du ode.

J'aimerais ici souligner que, dans l'arrêt Feeney, la Cour suprême du Canada n'a pas ordonné au Parlement d'adopter une loi. La cour a statué que, en agissant conformément à la common law, qui n'exige pas de mandat comportant une autorisation judiciaire pour l'entrée dans une habitation, l'État violait les droits constitutionnels des Canadiens.

Dans les faits, le Parlement pouvait permettre aux agents d'application de la loi de tenir pour acquis que le code prévoit déjà l'autorisation judiciaire requise par la Constitution, ou alors établir un nouveau régime de mandat.

Compte tenu de l'absence de consensus ou de clarté sur l'interprétation des dispositions proposée par la Cour suprême, le gouvernement du Canada a décidé de créer un nouveau régime de mandat pour répondre aux préoccupations des provinces et de la communauté policière qui souhaitaient un système clair et uniforme à l'échelle du pays. En prolongeant le délai, comme l'avait demandé le procureur général de la Colombie-Britannique avec mon appui et celui des autres procureurs généraux, la Cour suprême du Canada a donné au Parlement le temps d'élaborer un projet de loi en réponse à l'arrêt Feeney.

Permettez-moi maintenant de vous parler brièvement de la validité constitutionnelle du projet de loi. En bref, ce projet de loi vise à conférer aux agents de la paix le pouvoir de demander une autorisation judiciaire avant d'entrer dans une habitation afin d'y arrêter une personne qu'ils ont des motifs raisonnables de croire présente dans cette habitation. De plus, le projet de loi recense certaines situations d'urgence dans lesquelles il ne serait pas nécessaire d'obtenir une autorisation judiciaire avant d'entrer dans une habitation.

Le projet de loi C-16 ne donne pas carte blanche aux agents de la paix. Ils ne peuvent entrer dans une habitation pour y faire tout ce dont ils ont envie. Afin d'obtenir un mandat ou l'autorisation d'entrer dans une maison d'habitation, l'agent de la paix doit prouver au juge ou au juge de paix qu'il a des motifs raisonnables de croire que la personne qu'il recherche est ou sera dans cette habitation; l'agent de la paix doit avoir des motifs raisonnables pour arrêter cette personne, que l'arrestation soit faite aux termes d'un mandat existant ou de la loi.

Le projet de loi C-16 ne va pas à l'encontre des décisions rendues par la Cour suprême en matière constitutionnelle. Dans l'affaire Feeney, la Cour a laissé au Parlement le soin de déterminer s'il n'y aurait pas des situations d'urgence autres qu'une poursuite immédiate dans lesquelles on pourrait permettre l'entrée dans une habitation sans autorisation judiciaire préalable. À cet égard, le Parlement a eu l'occasion de s'exprimer et le gouvernement a déposé un projet de loi qui, estime-t-il, précisera la loi dans ce domaine.

La mesure législative contient un préambule qui donne une indication des objectifs que vise le Parlement avec le projet de loi C-16 et qui devrait aussi aider les tribunaux à en interpréter les dispositions. Il importe en particulier de noter qu'on reconnaît que le projet de loi C-16 n'entend pas limiter l'évolution de la common law relativement aux situations d'urgence ni les pouvoirs dont jouit la police pour entrer dans une habitation à des fins autres que l'arrestation.

Le projet de loi C-16 traite de l'entrée dans une habitation aux fins d'arrestation d'une personne aux termes de lois fédérales autres que le Code criminel. Autrement, il aurait été impossible de juger que le Code criminel prévoyait implicitement ces pouvoirs d'entrée. Par conséquent, sans le projet de loi C-16, les agents qui exécutent un mandat d'arrestation aux termes de lois telles que la Loi sur l'immigration, la Loi sur l'extradition et la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, entre autres, ne pourraient entrer dans des maisons d'habitation à ces fins.

Enfin, permettez-moi de vous expliquer pourquoi, à mon sens, il est impératif que le Parlement adopte le projet de loi C-16 avant le 19 décembre prochain. D'abord, si le Parlement n'adopte pas le projet de loi C-16 d'ici le 19 décembre, nous nous retrouverons dans la situation qui prévalait immédiatement après qu'ait été rendu l'arrêt Feeney. Il était alors clair que les instances ne s'entendaient pas sur la façon dont la police devrait obtenir les mandats d'entrée requis par la Constitution. Le retour à cette incohérence juridique et à cette confusion jetterait le discrédit sur l'administration de la justice.

D'une part, sans lignes directrices claires et sans pouvoir invoquer une loi adoptée par le Parlement, les agents d'application de la loi, sachant que l'arrêt Feeney exige d'eux qu'ils détiennent un mandat, risquent de s'en remettre à des solutions qui seraient elles-mêmes anticonstitutionnelles. Du coup, cela pourrait entraîner un nombre important d'acquittements sous prétexte que la police aurait violé les droits dont jouissent les accusés aux termes de la Charte.

D'autre part, craignant de mal interpréter l'arrêt Feeney, les policiers pourraient cesser tout simplement d'entrer dans des habitations pour y arrêter des suspects. C'est ce qui s'est passé à Montréal juste après la décision Feeney; les policiers se sont sentis obligés d'attendre à l'extérieur d'une maison d'habitation pendant des heures, jusqu'à ce qu'ils puissent obtenir les mandats d'arrestation et l'autorisation d'entrer. Tout le quartier a été perturbé par cet incident. En outre, l'administration de la justice en a souffert, car les membres de cette collectivité et le grand public -- cette affaire ayant fait les manchettes -- ont eu l'impression que la police avait été paralysée, mal préparée et incapable de faire ce qu'on attendait d'elle pour garantir la sécurité de la population.

Cela dit, je sympathise avec les policiers dans cette affaire car, lorsque le régime n'est pas clair, ils hésitent à agir, craignant de violer les droits constitutionnels de quelqu'un et de voir le tribunal rejeter les accusations. Par conséquent, si le projet de loi C-16 n'est pas adopté, l'application de la loi pourrait en souffrir; nous en avons déjà des exemples.

En l'absence d'un énoncé sans équivoque du Parlement concernant les situations d'urgence, les agents d'application de la loi pourraient hésiter à entrer dans une habitation dans les cas de violence familiale. Si le Parlement n'adopte pas le projet de loi C-16 avant que la décision Feeney ne s'applique de nouveau, le public pourrait avoir l'impression que les agents d'application de la loi ne sont pas en mesure de lutter efficacement contre le crime et que le Parlement refuse de donner à ces agents les outils dont ils ont besoin pour bien exercer leurs fonctions.

En terminant, j'ajouterai que le projet de loi C-16 a été élaboré en collaboration avec les provinces, les territoires et les associations de police. Il représente une approche claire et uniforme à l'égard d'une exigence prévue par la Charte et s'adapte bien à toutes les régions du Canada. Il donnera à la police la souplesse qu'il lui faut pour éviter les retards et il a été libellé de façon à être jugé constitutionnel.

Sur ce, honorables sénateurs, je suis disposée à répondre à vos questions et préoccupations concernant le projet de loi C-16. Merci beaucoup.

[Français]

Le sénateur Beaudoin: J'aimerais soulever deux points: le premier est plutôt un commentaire et concerne la question qui a été soulevée à la Chambre et qui fait partie du renvoi en comité, à savoir la Cour suprême qui déclare une pratique inconstitutionnelle, c'est-à-dire la conduite des policiers dans certains cas tels que prévu dans la common law.

Ce n'est pas la première fois que la Cour suprême, après une déclaration d'«inconstitutionnalité», donne une extension au gouvernement pour agir. Nous avons de très nombreux précédents. Il y en a eu deux de suite, un de six mois et un d'un mois. J'ai bien étudié la question et je ne vois rien qui va à l'encontre des précédents qui vont déjà dans ce sens, dont le plus illustre est le renvoi de 1985 sur les droits linguistiques au Manitoba.

Ma question porte sur la Charte des droits et des libertés: qu'il y ait deux mandats, un pour entrer dans une habitation et l'autre pour arrêter un individu, je n'y vois que du bien. Il y a des exceptions. J'aimerais savoir en vertu de quel raisonnement on peut arriver à justifier primo, le «hot pursuit», secundo, la preuve qui est en train d'être détruite et tertio, la mort imminente. Dans ces trois cas, un mandat n'est pas nécessaire.

La seule façon d'arriver à une conclusion dans le cas présent est de se demander si, selon l'article 1 de la Charte, cela est raisonnable dans une société libre et démocratique. Comme c'est la coutume au ministère de la Justice, j'imagine qu'il existe un certificat établissant que ces trois cas ne violent pas la Charte des droits et des libertés. J'aimerais entendre vos commentaires concernant les motifs de la justification selon l'article 1 de la Charte des droits et libertés.

[Traduction]

Mme McLellan: Le concept de la «poursuite immédiate» est un concept de common law. Dans l'arrêt Feeney, la Cour suprême a reconnu que les cas de poursuite immédiate constituaient une exception à ses propos dans l'arrêt Feeney.

Le sénateur Beaudoin: Cette exception est donc déjà prévue.

Mme McLellan: C'est exact. Les poursuites immédiates continuent de constituer une exception importante au cas où on exigerait un mandat d'arrestation.

M. Roy pourrait vous dire si les principes de la common law en matière de poursuite immédiate ont fait l'objet de contestation aux termes de la Charte et si on y a appliqué l'article 1. Je ne peux que présumer que ces principes sont constitutionnels et conformes aux exigences de l'article 1 et de la Charte en général.

Quant aux autres exceptions, monsieur le sénateur, je crois que vous faites allusion aux situations d'urgence prévues au paragraphe 529.3(2) du projet de loi C-16 qui reprend les termes employés par la Cour suprême du Canada. Ici encore, on dit que l'obligation d'obtenir un mandat fait l'objet d'exceptions. Nous venons de parler des poursuites immédiates. Il y a aussi ce qu'on appelle les situations d'urgence, qui n'ont toutefois pas été définies par la cour. Nous avons donc entrepris, en consultation avec les provinces et la police, de définir ces situations d'urgence, compte tenu des exigences de l'article 1 de la Charte des droits et libertés.

Le paragraphe 529.3(2) définit ces circonstances, mais pas de façon exhaustive. Nous avons décrit ces deux situations comme étant, à notre avis, des cas clairs de situations d'urgence, mais nous avons aussi voulu nous assurer qu'il serait possible d'en prévoir d'autres ou d'invoquer d'autres principes. L'alinéa 529.3(2)a) stipule que, lorsqu'un agent de la paix a des motifs raisonnables de soupçonner qu'il est nécessaire de pénétrer dans la maison d'habitation pour éviter à une personne des lésions corporelles imminentes ou la mort, il y a situation d'urgence. À mon humble avis, et sans vouloir présumer les décisions que les tribunaux pourraient rendre à l'avenir, cette disposition se justifie aux termes de l'article 1 de la Charte. On permet ici aux policiers d'entrer dans une habitation sans mandat pour prévenir des lésions corporelles ou la mort d'une personne, que ce soit l'accusé ou, ce qui est plus souvent le cas, la personne qui y habite. L'alinéa 529.3(2)b) traite des situations où le policier a des motifs raisonnables de croire que des éléments de preuve relatifs à la perpétration d'un acte criminel se trouvent dans la maison d'habitation et qu'il est nécessaire d'y pénétrer pour éviter leur perte ou leur destruction imminentes. Encore une fois, j'estime que cette disposition sera jugée conforme à l'article 1 de la Charte. C'est une restriction raisonnable des droits des accusés car il s'agit d'une situation grave où on a des motifs raisonnables de croire que des preuves pourraient être détruites, des preuves importantes de la perpétration d'un acte criminel. Je suis d'avis qu'on jugera ces dispositions conformes à l'article 1 de la Charte, mais, bien sûr, il incombera aux tribunaux d'en décider. À mon avis, ce sont des restrictions raisonnables dans le cadre de notre système de justice pénale et des enquêtes policières. L'article 1 de la Charte parle de limites raisonnables dans une société libre et démocratique, et je crois que les Canadiens et les tribunaux jugeront que c'est le cas de ces restrictions-ci.

Le sénateur Nolin: À la lumière de la réponse que vous venez de donner à mon collègue, le sénateur Beaudoin, je suis certain que vous savez que le juge Sopinka, dans sa décision, a clairement reconnu qu'une prise en chasse constituait une situation d'urgence qui justifiait l'absence de mandat.

Mme McLellan: Oui.

Le sénateur Nolin: Toutefois, après avoir lu les remarques et la décision de la juge L'Heureux-Dubé, il a exclu tout autre genre de situations d'urgence. Il a jugé que la seule urgence ne justifiait pas l'entrée dans une maison sans mandat. La décision ou plutôt la remarque de la juge L'Heureux-Dubé portait précisément sur le fait que la chemise de M. Feeney constituait un élément de preuve important.

Sachant que le juge Sopinka a décidé de ne pas faire allusion à cette partie de la procédure sans mandat, vous avez raison d'invoquer l'article 1 et de dire qu'il est normal, dans une société libre et démocratique, de permettre dans une loi une procédure sans mandat pour maintenir...

[Français]

...et s'assurer qu'une preuve soit conservée, il n'en reste pas moins, madame la ministre, que lorsqu'il s'agit d'un élément de preuve, il ne s'agit pas de l'arrestation d'un individu mais bien d'une perquisition, d'une saisie. Dans le cas de l'arrêt Feeney, le juge Sopinka a déclaré, d'une part, le droit en établissant que, dorénavant, il faudrait un mandat ou une autorisation pour entrer dans une maison d'habitation pour procéder à une arrestation. D'autre part, dans le cas d'un élément de preuve, il ne s'agit pas d'un mandat d'arrestation mais bien d'une perquisition sans mandat. Comment pouvez-vous concilier ces deux éléments?

[Traduction]

Mme McLellan: Je vais parler en général de la décision de feu le juge Sopinka en ce qui concerne les situations d'urgence. Puis, M. Roy traitera plus précisément de votre deuxième question.

Feu le juge Sopinka a dit dans l'arrêt Feeney:

Notre Cour n'a pas encore pleinement abordé la question de savoir s'il existe une exception pour les situations d'urgence en général, et il n'est pas nécessaire non plus d'y répondre dans le présent pourvoi étant donné que j'estime qu'il n'y avait pas de situation d'urgence quand l'arrestation a été effectuée.

Il est clair que feu le juge Sopinka n'a pas jugé nécessaire de définir plus avant les situations d'urgence. Il est vrai que, dans sa constatation des faits, il a aussi jugé que, en l'occurrence, il n'y avait pas de situation d'urgence. Vous avez raison de dire que lui et Mme L'Heureux-Dubé étaient fondamentalement en désaccord à ce sujet, mais il ne va pas plus loin.

Le sénateur Nolin: La question reste en suspens.

Mme McLellan: En effet, et nous tentons de répondre, ne serait-ce qu'en partie, à cette question. C'est peut-être la Cour suprême du Canada même qui déterminera un jour si nous avons réussi.

M. Yvan Roy, avocat général principal, Section de la politique en matière de droit pénal, ministère de la Justice: En ce qui concerne les situations d'urgence, à maintes reprises, la cour a déclaré que, lors de l'analyse de l'article 1 de la Charte, on doit tenir compte de la volonté du Parlement telle qu'elle s'exprime dans les lois. Avec le projet de loi C-16, le gouvernement invite le Parlement à prendre position précisément sur cette question des situations d'urgence, après avoir reconnu que la cour, dans l'arrêt Feeney, n'a pas déterminé si cela faisait partie de notre droit ou non.

La question n'a pas été résolue. Comme l'a indiqué le sénateur Nolin, le Parlement a maintenant l'occasion de participer au débat visant à combler ce vide.

[Français]

Quant à la question du sénateur Nolin concernant la possibilité de procéder à l'entrée dans une maison d'habitation aux fins d'éviter que des éléments de preuve ne soient détruits, vous retrouvez cette exception au projet de loi C-16 dans la foulée d'un autre texte de loi déjà au Code criminel. Il ne faudrait pas l'oublier. Le Parlement a adopté un texte qui se retrouve à l'article 487.(11) du Code criminel, qui permet des perquisitions sans mandat dans les cas d'urgence. Ce dont on parle dans le projet de loi C-16 est essentiellement ceci: la police étant dans une position de procéder à une arrestation sans mandat devrait attendre d'obtenir l'autorisation pour entrer dans une maison d'habitation. On parle d'une arrestation sans mandat où l'autorisation d'entrée n'a pas été obtenue. Il est important de reconnaître que le critère dans le texte de loi mentionne des motifs raisonnables et probables de croire qu'une preuve va être détruite de façon imminente. On permet à la police, qui a déjà les motifs pour arrêter quelqu'un, de simplement entrer dans cet endroit pour aller chercher cette personne et éviter que cette personne ne détruise la preuve.

Si vous n'avez pas de motif de croire que la personne que vous voulez arrêter va détruire la preuve, vous ne pouvez pas entrer. Ce n'est pas une perquisition sans mandat qui est permise mais plutôt un pouvoir d'arrêter quelqu'un lorsque vous avez ces motifs, de façon auxiliaire, ancillaire et périphérique d'empêcher que cette preuve ne soit détruite si vous devez attendre d'obtenir l'autorisation d'un juge pour entrer. Cette autorisation, en vertu du texte de loi, peut être obtenue par voie de télémandat: ceci démontre vraiment une urgence considérable.

Madame la ministre faisait allusion au fait que l'on ne peut pas aller chercher n'importe quoi dont on voudra empêcher la destruction, mais bien un élément de preuve. C'est à dessein que ce terme est utilisé dans les versions françaises et anglaises et non pas parce que l'on veut avoir de l'information.

[Traduction]

Avec ce projet de loi, nous ne voulons pas permettre à la police d'obtenir des renseignements et d'éviter la destruction de renseignements. Si la police tente d'obtenir seulement des renseignements, ces dispositions-là ne s'appliquent pas. Elles s'appliquent plutôt au cas où des éléments de preuve pourraient être détruits.

Hier, le sénateur Gigantès a parlé d'une livre d'héroïne. D'autres ont dit qu'en appuyant simplement sur une touche d'un clavier d'ordinateur, on peut détruire des preuves. C'est à ce genre de situation que s'applique cet amendement. La barre est assez haute. Il faut qu'on ait des motifs raisonnables de croire, qu'il y ait une probabilité crédible que les preuves seront détruites par la personne que vous tentez d'arrêter.

Dans de telles circonstances, la ministre, sur la foi des conseils que lui ont dispensés les avocats du ministère, estime que c'est le genre de situation qui se justifie, devant un tribunal, dans une société libre et démocratique.

C'est très important. En effet, cela est crucial pour l'administration de la justice. Les éléments de preuve risquent d'être détruits. Par conséquent, l'intérêt qu'on y porte est important et les moyens qui seront choisis seront ceux que la ministre juge raisonnables de prendre dans les circonstances.

La barre est haute. On vise à obtenir des renseignements précis, des renseignements de nature particulière. Il doit s'agir d'éléments de preuve dans une affaire, et non pas de renseignements généraux que les policiers souhaiteraient obtenir pour s'en servir plus tard au cours du processus.

Le sénateur Nolin: Merci, monsieur Roy.

Madame la ministre, si je ne m'abuse, M. Roy sera disponible après votre départ pour nous aider à comprendre certains aspects plus techniques.

Mme McLellan: M. Roy est à votre disposition.

Le sénateur Nolin: J'ai deux petites questions qui portent non pas sur le détail du projet de loi, mais plutôt sur ce qui s'est passé après la décision de la Cour suprême et du juge Sopinka, et avant le 30 octobre.

[Français]

Madame la ministre, nous avons posé la question à plusieurs de vos collègues dans le passé pour d'autres mesures législatives que nous avons jugées trop importantes pour que l'on n'y attache que quelques heures d'étude. Je vous fais la remarque suivante: pourquoi ne pas avoir invité le Parlement à procéder à une pré-étude du projet de loi alors que le projet de loi faisait l'objet de plusieurs consultations à l'intérieur de l'appareil gouvernemental fédéral et à l'extérieur du gouvernement fédéral? Il me semble qu'il y aurait eu lieu de permettre au Parlement d'offrir un éclairage, si humble soit-il, mais à tout le moins fait de bonne foi.

[Traduction]

Mme McLellan: Je prends bonne note de votre intervention et je demanderai à notre ministère d'envisager très sérieusement la possibilité de faire une étude préalable à l'avenir. Il est évident que cela aurait été avantageux pour toutes les parties intéressées. Chose certaine, mon ministère et moi-même aurions pu tirer parti d'une étude préalable. Cela ne s'est pas fait cette fois-ci. Comme vous l'avez dit, il y a eu de vastes consultations, mais manifestement pas avec le Sénat, avant que ce projet de loi ne vous soit renvoyé le 18 novembre. Je trouve votre suggestion très positive.

Le sénateur Nolin: Ma dernière question porte sur une déclaration qu'a faite M. Roy hier. Cela arrive rarement, mais je crois savoir qu'un document devant être distribué parmi vos collègues du Cabinet a été distribué à l'extérieur du gouvernement. Est-il exact qu'un document du Cabinet a été communiqué à d'autres personnes que vos collaborateurs?

Mme McLellan: Un document du Cabinet? Je suis désolée, je ne comprends pas.

[Français]

Le sénateur Nolin: Hier, dans votre témoignage, M. Roy, vous nous disiez que de façon exceptionnelle, à l'occasion de l'examen des mesures que la ministre s'apprêtait à présenter à ses collègues, vous avez jugé opportun de faire circuler ces propositions qui n'avaient pas encore reçu l'aval du Cabinet, à l'extérieur de l'appareil gouvernemental.

[Traduction]

M. Roy: Je pense que cela appelle des précisions. Hier, j'ai fait référence à une ébauche comportant une liste d'options qui ont été communiquées aux corps policiers et à d'autres groupes pour discuter avec eux de la formulation législative qu'étudierait éventuellement le Cabinet. Cela faisait partie des consultations. Au lieu d'avoir un document de consultation, comme c'est le cas habituellement, nous sommes allés plus loin. Nous avons soumis aux intéressés une ébauche pour voir quelle serait leur réaction. Chose certaine, il ne s'agissait pas d'un mémoire au Cabinet ou d'un document de cette nature. Jamais cela n'a été communiqué à quiconque à l'extérieur du ministère de la Justice.

Mme McLellan: Je peux en attester. J'ai apporté le document à mes collègues. En fait, il n'a jamais circulé à l'extérieur du comité du Cabinet sur l'union sociale et du Cabinet plénier qui l'a examiné la semaine d'après. Cependant, comme M. Roy l'a mentionné, nous avons tenu des consultations approfondies avec nos homologues provinciaux et avec les principaux intéressés du système judiciaire, particulièrement la GRC, les associations policières, les chefs de police, et cetera. Étant donné qu'il s'agit d'une question plutôt technique, nous voulions particulièrement sonder les forces policières au sujet du libellé proposé. Ensuite, nous avons réuni leurs réactions et, au ministère, nous nous sommes demandé quelle serait la politique idéale pour satisfaire aux préoccupations des représentants de l'ordre, des procureurs généraux provinciaux. Nous voulions aussi nous assurer que dans toute la mesure du possible, nos propositions étaient constitutionnelles et conformes aux exigences de la Cour suprême du Canada. Voilà le fondement de mes recommandations dans ce mémoire à mes collègues du Cabinet.

Le sénateur Cools: Je vous souhaite la bienvenue à notre comité, madame la ministre. J'espère que vous reviendrez souvent.

Mme McLellan: Oui. J'étais ici la semaine dernière. Je commence à me sentir vraiment chez moi. Nous avons eu une bonne discussion la semaine dernière.

Le sénateur Cools: Vous constaterez que nos comités sont très accueillants.

J'ai deux questions à vous poser. La première porte sur le fait que lorsque l'arrêt Feeney a été rendu, la cour n'a averti aucun des procureurs généraux, que ce soit le procureur général du Canada ou les procureurs généraux de chacune des provinces, et cela a suscité énormément de consternation. Je note que dans l'opinion des juges dissidents, on en fait mention. Cela m'a beaucoup dérangée. Lorsque j'ai fouillé la question, j'ai appris que rien dans la loi n'oblige la Cour suprême du Canada à les aviser. Par exemple, la Loi sur les tribunaux judiciaires de l'Ontario est extrêmement claire. On y précise que l'on ne saurait se prononcer sur des lois, des règlements ou des règlements administratifs avant d'en avoir avisé au préalable le procureur général du Canada et le procureur général de l'Ontario. Je voudrais savoir si vous avez l'intention de présenter un amendement à la Loi sur la Cour suprême du Canada pour l'aligner sur la Loi sur les tribunaux judiciaires de cette province afin de s'assurer que les procureurs généraux du Canada ne soient pas pris par surprise, comme cela a été le cas.

Mme McLellan: C'est une très bonne question. Le problème tient au fait que la Cour suprême rendait un arrêt relativement à la common law. Sa décision ne portait pas sur une loi du Parlement fédéral, ni sur un règlement promulgué aux termes d'une loi du Parlement ou de toute autre province. Par conséquent, la Cour suprême n'a pas donné avis de sa décision parce que la question des mandats d'arrestation relève de la common law.

Vous faites bien de nous signaler une omission possible car en l'occurrence, dans l'affaire originale, le seul procureur général présent était le procureur général de la Colombie-Britannique puisque l'affaire s'était passée sur son territoire -- et bien sûr, il n'y a rien d'inhabituel à cela. En temps normal, -- et en fait, dans la plupart des cas -- les procureurs généraux des provinces ou le procureur général fédéral ne se présentent pas comme intervenant dans une procédure au criminel.

En l'occurrence, étant donné que la Cour suprême se penchait sur des principes de common law, nous n'avons pas été avisés. J'estime que c'est un problème et à mon avis, il faut réfléchir à la façon de combler cette lacune ou omission. Nous pourrions apporter un changement à la Loi sur la Cour suprême. Nous pourrions aussi collaborer avec la Cour suprême. Par exemple, je pourrais rencontrer le juge en chef et lui expliquer les préoccupations de mes homologues provinciaux, ainsi que les miennes sur la façon dont les choses se sont déroulées dans l'affaire Feeney. Je pourrais lui faire observer que nous n'avons pas été en mesure de réagir à la situation qui allait être créée après la décision. Votre argument est valable et dans la foulée de l'affaire Feeney, j'estime qu'il faut y réfléchir et agir assez rapidement. Je consulterai mes homologues provinciaux pour voir s'ils ont des opinions arrêtées dans un sens ou dans l'autre. Cela dit, je pense pouvoir parler en leur nom lorsque je dis que nous sommes tous d'accord qu'il aurait été très utile d'avoir la possibilité d'être présents et de présenter des arguments sur les principes de common law en ce qui a trait à la nécessité d'obtenir ou non un mandat au moment de l'arrestation ou de l'appréhension d'un inculpé.

Le sénateur Cools: Je suis tout à fait d'accord. La loi de l'Ontario parle même de la réglementation, de sorte que cela est très clair. Si les procureurs généraux ont un intérêt, ils doivent être avisés et cette obligation incombe manifestement au tribunal.

Le sursis de l'instance originale a été de six mois. À mon avis, il a été catastrophique que cet arrêt soit rendu au beau milieu d'une campagne électorale. Les élections sont un exercice auquel se livrent les pays démocratiques, mais au cours des campagnes électorales, les ministres et les autres candidats sont très pris, ce qui est tout à fait compréhensible. Vous êtes devenue ministre après les élections, en juin.

Mme McLellan: J'ai prêté serment le 11 juin.

Le sénateur Cools: Il y a quelque chose de très désordonné en de la démocratie et quelque chose de très amateur en politique. À la lecture de l'affidavit de M. Roy, il semble que vous n'avez pas pris connaissance de la question, de la nécessité de coordonner ou d'ordonner une réponse législative avant la fin d'août. C'est vraiment un détail qui me dérange. Que faisaient les fonctionnaires pendant tous ces mois? Pourquoi n'ont-ils pas porté cette affaire à l'attention de la ministre?

Mme McLellan: Tout d'abord, permettez-moi de vous dire qu'au cours de ma première semaine de séance d'information, même si cette semaine est assez confuse, le problème de l'affaire Feeney et le fait qu'il nous faudrait répondre figuraient très haut sur la liste des priorités. Le procureur général de la Colombie-Britannique et nous-mêmes, de concert avec les autres procureurs généraux des provinces, avons décidé d'intervenir et nous avons demandé le 17 juin une ordonnance de suspension à la suite de la décision de la Cour suprême dans l'affaire Feeney. Nous avons commencé à travailler à ce dossier très vite après que je sois devenue ministre de la Justice et que j'aie pris connaissance de la situation. Je peux donc rassurer les sénateurs. Les fonctionnaires n'ont pas perdu de temps dans ce dossier. Ils l'ont porté à mon attention au cours de la première semaine de mon mandat à titre de ministre de la Justice. C'est le 17 juin que, de concert avec nos collègues provinciaux, nous avons réclamé une interruption de six mois, ce qui nous a été accordé.

À compter de la mi-juin, M. Roy et d'autres fonctionnaires du ministère ont commencé à collaborer avec leurs homologues provinciaux. Nous voulions engager une discussion à la Conférence sur l'uniformisation des lois du Canada, en août. En fait, il fallait que M. Roy et ses homologues provinciaux fassent un travail préparatoire. C'est à ce moment qu'ont débuté les consultations avec les parties au système de justice pénale, même si les discussions avec les forces de l'ordre n'ont eu lieu que plus tard.

Je peux vous assurer que j'ai été saisie de l'affaire immédiatement après ma nomination comme ministre, et j'ai donné ordre à mes fonctionnaires de traiter ce dossier avec tout le sérieux et la diligence qui s'imposaient. Voilà pourquoi nous nous sommes alliés à nos collègues provinciaux pour réclamer ce sursis devant la Cour suprême. Nous avons présenté notre avis de requête le 17 juin.

Le sénateur Cools: Madame la ministre, je suis très heureuse de vous entendre dire cela aujourd'hui car à la lecture de l'affidavit, on ne peut que comprendre que ce n'est qu'à la fin d'août qu'on a porté à votre attention la nécessité de fournir une réponse législative.

Ma dernière question porte sur l'article 514 du Code criminel et sur l'exécution d'un mandat. J'aurais cru que cette disposition aurait rendu inutile une bonne partie du projet de loi C-16. Jusqu'à maintenant, personne n'a mentionné l'article 514. Les juges, dans leur arrêt, n'en ont pas fait mention. Le paragraphe 514(2) se lit comme suit:

Un mandat en conformité avec la présente partie peut être exécuté par l'arrestation du prévenu:

a) en quelque lieu qu'il se trouve [...]

Pourquoi n'a-t-on pas tenu compte du tout de l'article 514? D'après mon interprétation de cet article, certaines parties du projet de loi C-16 sont inutiles.

M. Roy: Cette disposition s'applique de façon générale aux mandats qui sont émis au Canada. Cependant, une disposition comme celle-là sera subordonnée à l'arrêt de la Cour suprême du Canada selon lequel pour arrêter quelqu'un dans une maison d'habitation, on a besoin d'une autorisation judiciaire spéciale. Voilà pourquoi l'article 514 ne s'applique pas à la question soulevée par la Cour suprême du Canada qui a décidé, dans l'affaire Feeney, que pour arrêter quelqu'un dans une maison d'habitation, les forces policières ont besoin d'une autorisation spéciale. À mon avis, l'article 514 n'est pas utile.

Le sénateur Cools: Il est indéniable qu'il y aura une certaine ambiguïté entre l'article 514 et le projet de loi C-16, mais nous y reviendrons plus tard.

Je renvoie la ministre et les membres du comité à un article paru dans The Globe and Mail en date du samedi 13 décembre 1997, qui m'a été remis il y a quelques instants. Je vous renvoie plus précisément à une chronique de potins parlementaires. Au bas de la chronique, on peut lire «Dissension royale?» L'article compte trois ou quatre paragraphes et on dit qu'Antonio Lamer se rendra au Sénat pour donner la sanction royale. Je cite:

Le juge en chef porte un intérêt spécial au Sénat ces jours-ci [...]

«Où est le projet de loi C-16?», a-t-on entendu le juge Lamer demander pendant qu'il passait en revue des mesures législatives.

On parlait même de la signature de projets de loi au Canada. Nous ne signons pas les projets de loi.

C'est tout simplement que ces articles où l'on retrouve constamment le juge en chef dans cette situation commencent à être troublants.

Le sénateur Cogger: Madame la ministre, je vous remercie d'être venue comparaître.

J'ai une observation et ensuite une ou deux questions. Nous vous savons gré de votre présence ici aujourd'hui. Il est malheureux que le Sénat soit saisi d'une mesure législative aussi complexe et difficile que celle-ci en décembre, quand la Chambre des communes a déjà ajourné.

Comme je siège ici depuis un certain temps, je sais pertinemment que nous n'avons aucune chance d'apporter des amendements au projet de loi. Le Sénat est soumis à des pressions pour adopter ce projet de loi à toute vapeur. Ajoutons à cela les mots acerbes d'un rapport émanant de la Chambre des communes, où les députés se plaignent amèrement de ne pas avoir suffisamment de temps pour jouer leur rôle, et cetera.

Et pourtant, nous, sénateurs conservateurs, avons eu le privilège ce matin d'avoir une rencontre privée avec le ministre des Finances. C'est un événement très rare. Je ne pense pas vous révéler de secret en vous disant qu'il a accepté d'être là parce qu'il s'inquiète énormément du sort du projet de loi sur le Régime de pensions du Canada. Dans les entretiens privés qu'il a eus avec les sénateurs conservateurs, il a reconnu que si nous avions proposé de faire une étude préalable, nous aurions sans doute pu faire un meilleur travail et qu'il n'y avait pas de raison que nous nous retrouvions coincés à cette date tardive. Nous aurions certainement pu nous acquitter de cette tâche beaucoup plus tôt.

Mais cette volonté de collaboration semble disparaître dès que la Chambre reprend ses travaux et que la machine se remet en marche vers la prochaine impasse.

Mme McLellan: Sénateur, vous soulevez un point très important. Votre intervention fait suite aux propos du sénateur Nolin au sujet de l'instrument de l'étude préalable. Cet argument revêt énormément d'importance étant donné qu'il concerne la façon dont les deux Chambres organisent leurs travaux. Je suis la première à admettre qu'il arrive à l'occasion que l'on précipite, retarde ou remette à plus tard l'étude de certaines questions. Certains projets de loi ne sont pas déposés à la Chambre des communes aussi rapidement que nous le souhaiterions. Par conséquent, vous ne les recevez pas aussi tôt que vous le voudriez pour pouvoir faire votre travail. Vous avez donc soulevé un point très important et, à titre de ministre de la Justice, je prends cela très au sérieux étant donné que cela concerne mon propre programme législatif.

Il va de soi qu'en tant que ministre de la Justice, j'aurai l'occasion de comparaître devant vous plus souvent, ainsi que devant mes collègues du comité permanent de la Chambre des communes. Comme il faut s'y attendre, je présenterai davantage de mesures législatives qu'au cours de mon mandat à titre de ministre des Ressources naturelles.

Je prends très au sérieux votre mise en garde et celle du sénateur Nolin. Je suis heureuse de vous entendre dire que mon collègue, le ministre des Finances, a lui aussi reconnu le fait que les deux Chambres pourraient gérer leurs travaux d'une façon qui serait avantageuse pour tous les intéressés. Au bout du compte, vous auriez l'occasion de mener les études détaillées et fouillées qui font votre réputation.

Je prends très au sérieux votre mise au point et je m'excuse auprès de vous -- comme je l'ai fait auprès de mes collègues du comité de la Chambre -- du fait que vous ayez été bousculés en raison de l'urgence de la situation.

Pour en revenir à l'intervention du sénateur Cools au sujet de la chronologie de cette affaire, le projet de loi a finalement été présenté à la Chambre des communes au début d'octobre. À partir de ce moment-là, le temps nous était compté. Je m'en excuse auprès de votre comité, comme je l'ai fait auprès du comité permanent de la Chambre des communes. Je prends cela très au sérieux. Je pense qu'il faut effectivement mieux gérer nos affaires pour que nous puissions tous nous acquitter au mieux de notre tâche ici.

Le sénateur Cogger: Je ne vous demanderais pas d'excuses.

Mme McLellan: Non, mais vous avez parfaitement raison.

Le sénateur Cogger: Je vous remercie.

Hier, nous avons entendu le témoignage d'un représentant de la Criminal Lawyers' Association. Je ne sais pas si vous en avez pris connaissance. Certains de mes collègues ont fait allusion aux arguments avancés par ce représentant. C'est, je pense, le seul groupe à avoir soulevé la question concernant la dispense d'annonce préalable. C'est là-dessus que portera ma question.

À votre avis, quelle est la différence entre des «motifs raisonnables de soupçonner» et des «motifs raisonnables de croire»? Selon les membres de cette association, des «motifs raisonnables de croire» est une norme supérieure à celle des «motifs raisonnables de soupçonner».

Mme McLellan: C'est également ainsi que nous le comprenons. C'est l'intention que nous poursuivons en choisissant cette expression différente. Nous l'avons fait de propos délibéré. Il s'agit effectivement d'une norme plus élevée.

Le sénateur Cogger: Est-il fait mention ailleurs dans la loi de «motifs raisonnables de soupçonner»?

Mme McLellan: Vous voulez parler de ce projet de loi ou de l'ensemble du Code criminel?

Le sénateur Cogger: De façon générale.

M. Roy: Il y a au moins deux autres endroits où on trouve une norme identique. Tout d'abord, c'est prévu relativement à la conduite avec facultés affaiblies; dans ces cas-là, les policiers sont autorisés en vertu de la loi à appréhender n'importe qui dans la rue et à demander à la personne de souffler dans un dispositif d'alcootest, et la personne obtient un résultat positif ou négatif ou encore neutre. En fonction de ce résultat, on peut demander à la personne de souffler dans un ivressomètre.

Il existe surtout une disposition qui a été incluse dans le Code criminel à la suite de la décision rendue par la Cour suprême du Canada dans l'affaire Wise de 1992. En vertu de cette disposition, les policiers peuvent installer des balises sur les véhicules. La cour a déclaré très clairement qu'il était possible de violer les droits des Canadiens à la vie privée dans une certaine mesure en utilisant ce genre de dispositif si les policiers avaient des doutes raisonnables, sans toutefois parler de motifs raisonnables de croire que ces doutes puissent se confirmer.

Il existe donc certains précédents. Le dernier dont j'ai parlé concerne l'article 8 de la Charte, à savoir le droit à la vie privée, et c'est de cet article que nous parlons dans le projet de loi à l'étude.

Le sénateur Cogger: Je ne me souviens pas si l'exemple dont vous nous avez parlé a été soulevé hier, mais je suppose que c'est ainsi que vous y répondriez. Hier, le représentant de la Criminal Lawyers' Association a déclaré dans son mémoire écrit que le seuil des «motifs raisonnables de soupçonner» serait trop faible pour l'emporter sur le droit à la vie privée aux termes de l'article 8 de la Charte.

Mme McLellan: Comme vous le constaterez, nous ne l'avons utilisé qu'à l'alinéa 2a). Il s'agit d'une norme inférieure, qui vise à éviter des lésions corporelles imminentes ou le décès imminent d'une personne. Il s'agit là des circonstances les plus graves qu'on puisse imaginer -- c'est-à-dire un cas où la vie d'une personne est en jeu, ou encore il y a eu des lésions corporelles ou il existe un doute qu'une personne puisse subir de telles lésions.

Nous avons jugé que, dans ces circonstances considérées comme les plus graves de notre droit pénal, il était normal et justifiable aux termes de l'article 1 de la Charte d'appliquer les normes inférieures des «motifs raisonnables de soupçonner» plutôt que des «motifs raisonnables de croire».

Le sénateur Cogger: Inversement, le fait qu'il ne soit pas nécessaire de prévenir risquerait d'entraîner la mort d'un agent de police, par exemple, qui fait irruption sans s'annoncer dans un domicile et qui se fait alors tirer dessus ou gravement blesser. Les avocats de la défense pourraient-ils invoquer le fait que la personne n'avait aucun moyen de savoir que l'agent de police était habilité par la loi à entrer dans la résidence?

Mme McLellan: Je vois ce que vous voulez dire. M. Roy pourra peut-être vous répondre.

Le sénateur Cogger: Pourrait-il s'agir d'un argument de défense?

M. Roy: Nous devons être plus prudents en répondant à vos questions que nous ne l'avons été hier.

Rien dans nos lois ne nous permet de tirer sur un intrus. Vous devez invoquer la légitime défense -- et la légitime défense ne s'applique que si vous utilisez la force raisonnable dans la situation -- ou la défense de vos biens. Encore une fois, il faut être raisonnable. Vous n'avez pas le droit de tirer sur quelqu'un qui se présente à votre porte sans s'annoncer.

Le sénateur Cogger: Même si cette personne essaie de défoncer la porte et brandit un revolver?

M. Roy: Dans la vraie vie, quelqu'un attend que l'autre se présente. Il aura des équipements qui ne sont pas permis en vertu de nos lois. Par exemple, on a interdit le magnum 357 dans ce pays, mais la personne s'en servira pour empêcher à la police d'entrer dans sa maison d'habitation.

Tout dépend de la situation, mais je ne crois pas que cette personne puisse compter sur l'article 34 du Code criminel et invoquer la légitime défense, ou citer l'article 38 et dire qu'elle a tiré pour défendre ses biens.

Nous sommes d'accord avec M. Koziebrocki pour dire que dans certaines situations, si vous ne vous annoncez pas, vous risquez de provoquer la violence que nous essayons d'éviter. Toutefois, en vertu de l'article 529.4, les policiers ne sont pas tenus de s'annoncer dans des situations appropriées.

Comme la ministre l'a expliqué, la norme moins élevée s'applique seulement pour éviter des lésions corporelles imminentes. Les policiers auront à faire preuve de jugement. En proposant une telle mesure, tant la ministre que le gouvernement estiment que les policiers en sont capables.

Le sénateur Moore: Je voudrais commencer en parlant d'un point que le sénateur Cogger a déjà couvert sur la différence entre «soupçonner» et «croire» qui fait partie de la définition de «situations d'urgence».

Deuxièmement, le sénateur Cools a dit que le ministère n'a pas travaillé sur le projet de loi pendant l'été. C'est confirmé dans l'affidavit de M. Roy. Pour être juste envers le ministère, j'ai ici un exemplaire de cet affidavit. En effet, le ministère a fait des efforts considérables à l'époque. J'ai pris soin d'expliquer ce point en détail quand j'ai pris la parole au moment de la deuxième lecture, madame la présidente. Je le dis pour les besoins du procès-verbal, car je ne veux pas que quelqu'un conteste les remarques de mon honorable collègue. Je sais pertinemment que le ministère a travaillé sur ce projet de loi pendant ces mois.

La présidente: Le ministère sera sans doute reconnaissant envers vous, sénateur Moore.

Le sénateur Jessiman: Madame la ministre, est-ce que quelqu'un vous a mis au courant du témoignage que nous avons entendu hier de M. Robert E. Hawkins, qui est professeur de droit public à l'Université Western Ontario?

Mme McLellan: Oui, M. Roy me l'a expliqué brièvement ce matin.

Le sénateur Jessiman: Pendant son témoignage, il a cité les policiers, en disant:

Le système de mandats pourrait nous imposer un deuxième fardeau administratif, plus de paperasse. Rendre notre travail plus difficile sur le terrain.

Le professeur a continué en disant que si nous avons ce projet de loi, c'est en raison d'un obiter dictum de l'affaire Feeney et que cela n'a rien à voir avec le ratio decidendi. Selon lui, ce projet de loi n'est vraiment pas nécessaire dans le système de common law. Toutefois, le projet de loi est là, et vous imposez tout ce travail supplémentaire aux policiers. Manifestement, vous n'êtes pas d'accord avec ce professeur. Pourquoi est-ce que vous n'êtes pas d'accord avec lui?

Mme McLellan: En effet, comme l'Association canadienne des policiers et l'Association canadienne des chefs de police vous l'ont dit, ils ne sont pas d'accord avec lui non plus. En fait, ils vous diraient que si nous ne créons pas un système de mandats, le simple policier dans la rue qui mène des enquêtes n'aura pas la moindre idée de ce qu'il doit faire. Je vous ai dit ce qui s'est passé à Montréal.

En fait, l'Association canadienne des policiers ainsi que l'Association canadienne des chefs de police sont très en faveur de notre position, compte tenu de la décision dans l'affaire Feeney. Soyons francs. La décision dans l'affaire Feeney nous a pris un peu par surprise. Cependant, cela ne signifie pas qu'il faille rester sans rien faire et ne pas essayer de résoudre les problèmes et la confusion découlant de la décision. Cela serait tout à fait irresponsable de notre part. Si je veux faire adopter ce projet de loi en temps opportun, c'est en partie parce que je sais que la police a déjà eu des problèmes et prévoit d'en avoir d'autres si l'on ne met pas en place un régime de mandats.

Il se peut que la décision soit interprétée de façon différente selon la province et la situation. Les agents de police se trouveront exposés à certains dangers ou éviteront d'agir avec leur zèle habituel car ils auront peur de vider les droits de quelqu'un. Si nous ne faisons rien sur le plan législatif et ne mettons pas en place un régime pour tenir compte de la décision dans l'affaire Feeney, les policiers ne sauront pas dans quelles circonstances ils peuvent procéder à une arrestation.

Le sénateur Jessiman: Madame la ministre, ne convenez-vous pas qu'il a raison de dire qu'il s'agit d'un cas d'obiter dictum? Si vous n'êtes pas d'accord, c'est une chose. Si vous êtes d'accord, prétendez-vous que quoiqu'il s'agisse de remarques incidentes, ils s'en sont inspirés pour arriver à leur décision?

Mme McLellan: Je dis que les résultats de l'affaire Feeney...

Le sénateur Jessiman: Je parle de ce qu'il dit. Il dit que ces mesures ne se fondent pas sur le ratio decidendi de l'affaire Feeney. Je ne dis pas que vous avez tort de faire ce que vous faites, mais il estime que la mesure proposée est fondée sur les remarques incidentes du juge. Sur des affirmations supplémentaires.

Est-ce que le ministère a décidé qu'il s'agissait de remarques incidentes, mais qu'il fallait quand même ne pas prendre de risques et faire adopter le projet de loi, ou bien avez-vous décidé que les remarques n'étaient pas incidentes?

Mme McLellan: Je ne crois pas qu'on puisse distinguer facilement entre la ratio decidendi et les remarques incidentes dans cette affaire. Par exemple, le juge Sopinka a signalé qu'une situation d'urgence pourrait exister ou ne pas exister, mais qu'il n'était pas obligé de les définir dans cette affaire. Cela crée une incertitude énorme. Cette remarque du juge Sopinka est une opinion incidente. Cependant, le gouvernement estime, et je suis d'accord, qu'en réponse à la décision dans l'affaire Feeney, il faut créer un régime de mandats qui définit clairement dans quelles circonstances les agents chargés d'exécuter la loi doivent posséder un mandat, et dans quelles circonstances, par exemple en situation d'urgence, ils peuvent procéder à l'arrestation ou à l'appréhension d'un suspect sans être munis d'un mandat.

Je ne connais pas le monsieur en question. Je suis moi-même un ancien professeur d'université, tout comme le sénateur Beaudoin. Il arrive parfois que les universitaires coupent les cheveux en quatre sans se rendre compte des conséquences pratiques d'un arrêt ou de la confusion ou de l'incertitude qui en découlent, que les remarques soient faites sous forme d'opinion incidente ou dans la ratio decidendi. Je sais que c'est très bon pour les avocats de pouvoir présenter leurs arguments devant les tribunaux et pour les professeurs de droit d'écrire leurs articles. Cependant, cela n'a pas beaucoup d'importance pour les agents de police dans l'exécution de leurs tâches. Quand ces derniers veulent arrêter ou appréhender un suspect, ils doivent comprendre clairement la loi concernant les mandats. Nous avons essayé de corriger une situation qui nous semblait inadmissible à cause de la décision dans l'affaire Feeney. Nous avons essayé dans la mesure du possible d'établir un équilibre constitutionnel entre d'une part les droits de tous les Canadiens à la protection de leur vie privée et, d'autre part, leur droit de vivre en sécurité dans leurs collectivités respectives, ce qui exige que la police puisse faire son travail de façon prompte et expéditive.

Le sénateur Jessiman: Le début du paragraphe 529.3(1) se lit comme suit: «L'agent de la paix peut, sans que soit restreint ou limité le pouvoir d'entrer qui lui est conféré...». Tout ce qui suit n'est donc pas limité. Cependant, le paragraphe (2) se lit comme suit:

Pour l'application du paragraphe (1), il y a notamment urgence dans les cas où [...]

et vous les énumérez. Êtes-vous satisfaits du terme «notamment», ou y a-t-il d'autres situations en common law qu'on pourrait inclure aussi?

Mme McLellan: Oui.

Le sénateur Jessiman: Vous ne croyez pas qu'il soit nécessaire d'inclure «sans que soit restreint ou limité le pouvoir d'entrer» dans le paragraphe (2) aussi?

Mme McLellan: Le paragraphe (2) se lit comme suit:

Pour l'application du paragraphe (1), il y a notamment urgence dans les cas où l'agent de la paix, selon le cas [...]

Nous avons fait cela exprès pour tenir compte de deux situations précises que le Parlement, si le Sénat adopte le projet de loi C-16, définit clairement comme des situations d'urgence. Nous avons signalé clairement que le Parlement estime qu'il y a des situations d'urgence légitimes et constitutionnelles. Cependant, nous disons aussi qu'il pourrait y en avoir d'autres. C'est pour cela que nous avons utilisé le terme «notamment». Il se peut fort bien que les tribunaux définissent à l'avenir d'autres situations.

Le sénateur Jessiman: J'aurais peut-être pensé que vous auriez utilisé la même expression que dans le paragraphe (1): «sans que soit restreint ou limité». Est-ce que vous pensez que cela suffit?

Mme McLellan: Oui, mais je partage votre opinion qu'il faut le plus de clarté possible. C'est un défi pour nous tous.

Le sénateur Cools: Vous avez parlé à plusieurs reprises des répercussions du projet de loi C-16 sur d'autres lois. Comme vous le savez, j'ai siégé à la Commission nationale des libérations conditionnelles. À ce titre, j'ai accordé et révoqué beaucoup de libérations conditionnelles, et j'ai souvent ordonné que des gens soient arrêtés à nouveau. Pourriez-vous nous parler brièvement des répercussions éventuelles du projet de loi C-16 sur l'arrestation d'une personne dans ces circonstances? Un détenu pourrait être en liberté conditionnelle, mais il se produit quelque chose et la Commission nationale des libérations conditionnelles décide d'annuler sa libération. On donne l'ordre et les agents de libération conditionnelle délivrent le mandat.

Quelle serait l'incidence du nouveau régime dans ce genre de situation?

Mme McLellan: De façon générale, le projet de loi C-16 aura clairement pour effet de prévoir un régime de mandats d'arrestation ou d'appréhension qui dépasse le Code criminel.

Comme je l'ai signalé dans mes remarques liminaires, cela est important parce que, lorsque la Cour suprême parlait d'«interpréter» les pouvoirs d'entrée, elle faisait clairement allusion au Code criminel, et on ne pourrait pas le faire avec d'autres lois, comme vous l'avez expliqué. Il nous importe donc de préciser le régime de mandats prévu dans le projet de loi C-16 et de nous assurer qu'il ne s'applique pas seulement au Code criminel mais aussi à d'autres lois fédérales comme la Loi sur la citoyenneté, la Loi sur l'extradition et le Règlement sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition.

Pour en revenir à votre exemple précis, il est certain que les dispositions du projet de loi C-16 s'appliqueront à un grand nombre de situations auxquelles les agents de police, les agents de douanes et d'autres fonctionnaires doivent répondre. Ils devront se conformer aux exigences du projet de loi C-16.

M. Roy: Madame le sénateur, je n'ai pas grand-chose à ajouter à la réponse très complète de la ministre. Il serait peut-être utile de donner un exemple. Dans le cas des détenus en liberté conditionnelle, dès que la Commission décide d'annuler la libération, on délivre un mandat pour faire arrêter la personne concernée. Nous croyons que la décision dans l'affaire Feeney est assez large pour exiger qu'on respecte la protection de la vie privée dans ces situations, et il faut donc obtenir l'autorisation nécessaire avant de pouvoir pénétrer dans une maison d'habitation pour arrêter quelqu'un.

Selon notre interprétation de la décision dans l'affaire Feeney, la cour affirme qu'une telle autorisation judiciaire est implicite dans le Code criminel. La décision dans l'affaire Feeney ne dépasse pas le cadre du Code criminel. En vertu de la décision, on aurait besoin d'une autorisation spéciale pour violer la vie privée de quelqu'un, et il faudrait donc que quelqu'un autorise la délivrance du mandat même dont nous avons parlé. C'est la raison pour laquelle la ministre a chargé son personnel d'inclure l'article 4 dans le projet de loi, lequel modifie la Loi d'interprétation par l'ajout d'un nouvel article 34.1. Cela signifie que la personne qui délivre le mandat, par exemple contre un détenu en libération conditionnelle, aura donc le pouvoir d'autoriser quelqu'un à pénétrer dans une maison d'habitation à cette fin. Cependant, quelqu'un doit décider d'accorder cette autorisation, et c'est en vertu de l'article 34.1 que cela se fera.

Le sénateur Cools: La Commission des libérations conditionnelles est un tribunal puissant qui a le pouvoir d'émettre des mandats par l'entremise des surveillants de liberté conditionnelle. C'est un concept intéressant parce que chaque détenu fait l'objet d'un mandat lorsqu'il est emprisonné. Par exemple, sa date de relaxation est dite «date d'expiration du mandat». Nous parlons donc d'une personne qui fait déjà l'objet d'un mandat. Cette personne a été détenue et on lui accorde une mise en liberté sous condition en vertu de la Loi sur la libération conditionnelle et d'un acte de clémence. La question n'est pas simple.

M. Roy: Vous avez raison.

Le sénateur Cools: Madame la ministre, nous allons faire face à un problème de taille un de ces jours. Je dis cela, parce qu'il s'agit d'un mandat par-dessus un autre mandat. C'est un mandat pour contourner le fait que, grâce à un acte de clémence dont ils font l'objet, ils ont le droit de se trouver à l'extérieur du pénitencier.

Mme McLellan: Nous pourrons demander au solliciteur général ce qu'il en est à cet égard.

Le président: Merci beaucoup pour cette aide que vous nous avez donnée aujourd'hui. Vous nous avez aidés énormément pour la suite de nos délibérations.

Mme McLellan: Ce fut un plaisir que d'être ici. Je vous souhaite à toutes et à tous de Joyeuses Fêtes. J'ai bien hâte de vous voir dès la nouvelle année puisqu'en ma qualité de ministre de la Justice, je m'attends à comparaître devant vous beaucoup plus souvent que lorsque j'étais ministre des Ressources naturelles.

Le sénateur Nolin: Madame la ministre, M. Roy vous saisira probablement d'un projet de loi omnibus visant à modifier le Code criminel d'ici peu. Il en a probablement déjà un sur ses tablettes.

Mme McLellan: Il en est justement question.

Le sénateur Nolin: Ce serait un bon point de départ pour une étude préalable.

La présidente: Revenons à nos moutons et à M. Roy.

[Français]

Le sénateur Nolin: Je voudrais examiner la question du préambule du projet de loi. Dans le premier attendu, vous faites référence, selon moi, au droit de l'inviolabilité de la maison d'habitation. La Charte des droits n'y fait pas spécifiquement référence. N'est-ce pas un précédent dans un projet de loi que de reconnaître, d'instituer et de créer un droit fondamental même si la Charte n'est pas claire et spécifique à cet effet?

M. Roy: Le premier attendu auquel vous vous référez se veut purement et simplement un exposé de l'état du droit actuel. En vertu de l'article 8 de la Charte, on sait qu'il y a un droit à la vie privée et les tribunaux, à de nombreuses reprises depuis 1984, ont répété qu'il y avait une probabilité à la vie privée encore plus élevée dans une maison d'habitation. Ceci correspond essentiellement à la notion de common law, où on s'est prononcé d'une façon on ne peut plus claire.

Cet attendu n'ajoute rien à l'état du droit, c'est plutôt une déclaration de ce qu'est le droit et c'est ainsi que cela sera vu par les tribunaux.

Le sénateur Nolin: Dans votre troisième attendu, vous faites référence au Parlement en mentionnant qu'il reconnaît, par ailleurs, que ce même intérêt exige une bonne administration de la justice ainsi qu'une police efficace pour faire appliquer la loi et, qu'à cette fin, il est nécessaire que les agents de la paix puissent pénétrer dans les maisons d'habitation pour y procéder à l'arrestation d'auteurs d'infraction au Code criminel ou à d'autres lois fédérales autorisant l'arrestation. Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu de préciser que l'arrestation à laquelle on fait référence dans le troisième alinéa, consiste bien en une arrestation légale. Le juge Sopinka dans sa décision fait une distinction entre une arrestation légale et une arrestation qui ne l'est pas.

Je ne veux pas y apporter un amendement, ce n'est pas notre intention, nous allons vous accorder votre projet de loi dans sa forme actuelle, mais vous serez invité, je présume, à revenir devant nous, à l'améliorer si cela est nécessaire. Je crois que le Parlement veut faire référence à une arrestation légale.

M. Roy: Je vois mal comment le Parlement pourrait reconnaître autre chose qu'une arrestation légale et dire dans un texte de loi, que ce n'est que dans les cas d'une arrestation légale, cela m'apparaîtrait comme étant un peu incongru.

Une arrestation illégale n'est pas une arrestation. Ce sont des voies de fait exercées sur une personne.

Je préfère parler d'une arrestation légale, autrement je ne voudrais pas parler d'une arrestation illégale dans un texte de loi. En jurisprudence, on peut parler d'une arrestation illégale, mais dans un texte de loi, cela me choquerait un petit peu.

Le sénateur Cogger: Vous avez raison à ce sujet. Je suis d'accord avec vous. Par contre, c'est une définition que l'on retrouve constamment. Il n'y pas une obligation émise par le gouvernement du Canada, et même dans la majeure partie des provinces, qui ne dit pas que cette obligation est payable en monnaie légale du Canada ...

[Traduction]

... comme s'il existait une monnaie illégale. Allez-y voir vous-même. On trouve sur chaque obligation émise avec le mot «Canada» en haut, les mots suivants: «Cette obligation est payable en monnaie légale du Canada.» J'ai vérifié, un jour, et il n'y a rien dans la loi à propos de monnaie légale. Il y a une loi qui s'appelle la Loi canadienne sur la monnaie. Je crois que cela devrait se lire: «Cette obligation est payable en monnaie canadienne.» Ça, serait légal.

[Français]

Le sénateur Nolin: Au dernier alinéa, une clause nonobstant mentionne que le Parlement tient également à préciser qu'il n'a pas non plus l'intention de restreindre le pouvoir d'entrer dans des maisons d'habitation, qui peut être à d'autres fins que l'arrestation conféré aux agents de la paix par une loi ou une règle de droit, notamment la common law. Ne croyez-vous pas que la décision dans l'arrêt Feeney prohibe cela?

M. Roy: Ce paragraphe mentionne l'entrée dans une maison d'habitation à des fins autres qu'à des fins de procéder à une arrestation. Lorsque je lis cela, je note le pouvoir donné à des agent de la paix d'inspecter certains lieux.

Et vous avez cela par voie de loi comme, par exemple, la Loi sur les armes à feu qui prévoit certaines formes d'inspection. Dans d'autres lois et même en common law, lorsque quelqu'un a un devoir de procéder à certaines choses, il a un pouvoir concurrent, mis entre les mains de l'État, pour permettre ce type d'inspection.

Plus souvent qu'autrement, cela est prévu dans un texte de loi, cela ne l'est pas dans la common law. C'est ce qui doit être protégé dans une loi comme celle-ci. On ne veut pas, par un texte de loi comme celui-là requérir, chaque fois qu'il doit y avoir une inspection dans ce pays, qu'il y ait un mandat qui soit émis lorsque cela touche à une maison d'habitation.

Le sénateur Nolin: À l'article 529.(1), M. Koziebrocki faisait aussi, dans son mémoire, référence à ce manque de clarté.

À l'article 529.(1), il s'agit d'un mandat d'arrestation pour une accusation d'acte criminel ou d'un mandat d'arrestation pour tout type d'infractions?

M. Roy: C'est un mandat d'arrestation émis en vertu du droit criminel, et un mandat d'arrestation peut être émis pour une infraction sommaire. Il n'y a pas de doute.

Le sénateur Nolin: Cela aussi va un peu plus loin que la décision Feeney. Le juge Sopinka dit: «[...] ou pour un acte criminel.» Je pense que l'on retrouve cela au paragraphe 51, lorsqu'il résume son point.

M. Roy: Je ne suis pas certain que je vous comprends. En matière d'arrestation sans mandat, la loi prévoit déjà, à l'article 495.(1)b), que vous pouvez arrêter une personne sans mandat lorsque vous trouvez cette personne en train de commettre une infraction criminelle, ce qui inclut, à ce moment, une infraction sommaire.

Le sénateur Nolin: Dans la traduction du paragraphe 51 du jugement, le juge Sopinka dit en résumé que les conditions ci-après doivent généralement être remplies. C'est la traduction française parce que cela a été rédigé en anglais. En résumé, et je cite:

[...] les conditions ci-après doivent généralement être remplies pour qu'une arrestation relative à un acte criminel dans une maison privée soit légale [...]

Il énumère ses conditions. Je rejoins l'opinion du témoin d'hier. Dans l'article 529.(1), c'est beaucoup plus large: ce ne sont pas uniquement les actes criminels, et sans aller aussi loin que l'article 495.(1), c'est tout ce qui permet l'émission d'un mandat d'arrestation?

M. Roy: Sénateur Nolin, lorsque vient le temps de partager entre les intérêts, d'une part, entre le droit à la vie privée, et d'autre part, le pouvoir que l'État doit exercer d'aller arrêter quelqu'un, on demande à un juge de partager les choses en matière de mandat d'arrestation.

La loi dit à ce juge que s'il y a un mandat d'arrestation qui a été émis pour une infraction sommaire, ce qui est certainement possible dans l'exercice de ce droit, le juge peut aller un pas plus loin et permettre cette arrestation avec un mandat, dans une maison d'habitation.

Le juge devra départager, par exemple, par rapport à la gravité du crime et ne pas autoriser un policier ou une policière, si le crime n'est pas suffisamment grave. Il pourrait, par ailleurs, y avoir des circonstances où cela serait suffisant pour permettre qu'une telle arrestation puisse avoir lieu. La loi ne fait que donner ce pouvoir, elle ne va pas plus loin que cela.

Le juge Sopinka, lorsqu'il rend sa décision, dans les faits de Feeney, parle de «read in something that does not exist». Cette situation est bien différente. Je ne pense pas que l'on puisse dire que le juge Sopinka restreint cela à ces cas seulement. Il le restreint aux faits qu'il a dans cette affaire et au pouvoir qu'il veut créer par voie judiciaire.

Je suis d'avis que le Parlement est tout à fait bien placé pour prendre connaissance des paramètres de l'article 529 et, à mon humble avis, c'est en bout de ligne une décision que le juge devra prendre par rapport aux faits de chacune des affaires. C'est une faculté qui est donnée et non pas un ordre.

Le sénateur Nolin: Toujours à l'article 529.(1), hier vous faisiez référence au fait que la formule 7 n'était pas limitative à une seule maison d'habitation, mais pouvait en inclure plusieurs. Est-ce qu'il y aurait lieu de modifier la formule parce qu'elle va faire partie du code? Un tel amendement a été suggéré à la Chambre des communes par un de nos collègues et, pour des raisons que j'ignore, il n'a pas été accepté. Est-ce qu'il y avait une raison?

M. Roy: Cette question du singulier et du pluriel me cause certains problèmes parce que la loi d'interprétation est claire à cet égard. Lorsque la loi parle au singulier, elle parle en même temps au pluriel.

Le sénateur Nolin: La loi oblige de désigner les maisons d'habitation: ce ne sont pas les maisons d'habitation ou la maison d'habitation.

M. Roy: Il est clair qu'avec la formule que nous avons, notre opinion est qu'il pourrait y avoir une autorisation sur le même document qui parlerait de différentes maisons d'habitation.

Le sénateur Nolin: Cela pourrait, entre autres, être un pâté de maisons.

M. Roy: Non, vous ne pouvez pas avoir une autorisation disant que toutes les maisons d'habitation dans la ville d'Ottawa sont maintenant assujetties.

Le sénateur Nolin: Si on n'est pas dans un cas d'urgence et que le policier prend le temps, par télémandat, de communiquer la description du périmètre où un individu est circonscrit à l'intérieur de ce quadrilatère, et voici la description du quadrilatère. Est-ce qu'il faudrait que cela soit plus précis que la formule 7?

M. Roy: À mon avis, il est nécessaire d'être plus précis que cela. N'oublions pas que c'est le droit constitutionnel à la vie privée qui est en jeu. Ce dont on parle là, c'est essentiellement «a fishing expedition», sauf qu'au lieu d'y aller dans un grand lac, on y va dans un plus petit lac.

La loi ne permet pas cela. Il faut qu'en vertu de la loi, vous puissiez donner des motifs raisonnables de croire que la personne recherchée se trouve à cet endroit.

Le sénateur Nolin: J'avais en tête le troisième attendu dans le préambule: l'efficacité de la police.

M. Roy: Un texte de loi doit chercher à satisfaire une série de contraintes dont celle de l'efficacité de la police. Mais les droits constitutionnels doivent arriver en deuxième lieu. Si on ne peut pas réconcilier les deux, le droit constitutionnel va l'emporter.

Le sénateur Beaudoin: C'est bien la première fois que j'entends cela.

M. Roy: J'ai dit exactement le contraire de ma pensée, je m'en excuse. Le droit constitutionnel va toujours passer en premier. Le droit constitutionnel à la vie privée, s'il ne peut pas être réconcilié avec l'efficacité de la police, devra arriver en deuxième.

D'ailleurs, lorsque j'ai témoigné devant le comité de l'autre Chambre, j'ai référé les parlementaires à un passage tiré d'une décision de la Cour suprême des États-Unis, justement pour illustrer ce point.

La Cour suprême ayant décidé, dans l'affaire Payton c. New York en 1979, que clairement, les contraintes administratives à la police, vont arriver bien loin deuxième, par rapport aux droits constitutionnels conférés d'avoir la plus grande liberté dans sa maison d'habitation.

Le sénateur Nolin: Les policiers auront à décrire, à tout le moins, la maison d'habitation ou les maisons d'habitation où l'individu peut se réfugier.

M. Roy: Ils doivent non seulement les décrire, mais ils doivent donner les raisons pour lesquelles ils pensent que l'individu pourrait s'y rendre.

Le sénateur Nolin: C'est dans la décision Macooh, entre autres, qu'on réfère à un simple abri qui pourrait difficilement être identifié en tant que maison ou résidence.

M. Roy: C'est une décision de 1993 de la Cour suprême du Canada.

Le sénateur Nolin: L'article 529.(1) mentionne une dénonciation sous serment sans préciser si celle-ci doit doit être présentée par écrit ou non; est-ce que cela est volontaire? Autrement dit, elle pourrait être sous serment sans être écrite, parce que dans l'article 529 vous spécifiez qu'elle doit être «écrite». Est-ce que c'est voulu comme cela? L'article 529.(1) dit que s'il est convaincu, et je réfère à l'article faisant référence au juge de paix, et je cite:

[...] sur la foi d'une dénonciation sous serment, [...]

Alors qu'à l'article 529 on dit:

[...] sous la foi d'une dénonciation, sous serment, écrite.

M. Roy: Plutôt que de vous répéter ce que mon collègue Michael Zigayer me souffle à l'oreille, je pourrais lui demander de répondre à la question.

M. Michael Zigayer, avocat-conseil, Politique en matière de droit pénal, ministère de la Justice: Sénateur Nolin, suite à nos consultations avec les provinces, la suggestion nous a été donnée de limiter ou d'enlever le mot « par écrit » dans cet article. Dans certaines provinces, pour rendre plus efficace le travail de la police, on permet aux policiers de se présenter devant un juge de paix avec une enregistreuse pour demander et obtenir le mandat. Le but ultime est d'avoir un dossier de ce qui s'est dit pendant la demande d'émission du mandat. On voulait avoir quelque chose plus à la portée de la main des policiers. C'est pour cela que nous avons présenté cet article de cette façon, et c'est même un collègue de la province de l'Ontario qui nous l'a proposé.

Le sénateur Nolin: Dans l'article 529.(1)b), vous dites, et je cite:

Il existe des motifs de l'arrêter sans mandat aux termes des alinéas 495.(1)a) et b);

Est-ce qu'on doit comprendre que les restrictions de l'article 495.(2) vont s'appliquer dans ce cas dans le Code criminel?

M. Roy: Tout à fait.

Le sénateur Nolin: La limitation relève du type d'infraction permise, donc l'article 495.(1)a)b), s'applique. Il y a certaines infractions pour lesquelles un policier ne pourrait pas se servir de l'article 529.(1) parce que, entre autres, c'est une infraction à la fois par conviction sommaire et par acte d'accusation ou uniquement par conviction sommaire. Je pense, entre autres, à une infraction de conduite avec facultés affaiblies.

M. Roy: La limitation ou la restriction, en français, à l'article 495 du Code criminel n'est pas absolue. Elle est une manière de dire à l'agent de la paix: «N'arrêtez pas sans mandat, sauf lorsque vous aurez des raisons qui sont des raisons d'intérêt public.»

Le sénateur Nolin: Il faut la lire a contrario.

M. Roy: C'est une formulation de common law.

Le sénateur Nolin: Mais ma lecture est bonne.

M. Roy: Oui.

Le sénateur Losier-Cool: Sur la question de maison d'habitation, «dwelling-house», je ne voudrais pas commencer encore un débat sur les termes français, mais est-ce que ce terme «maison d'habitation», ne serait pas une maison habitée? Est-ce qu'une maison d'habitation peut être une maison abandonnée?

M. Roy: Oui.

Le sénateur Losier-Cool: Le mot «dwelling», je le vois comme la signifiant, demeure.

Le sénateur Nolin: Justement, on a la jurisprudence à laquelle on faisait référence tout à l'heure, à savoir l'arrêt Macooh, une décision de 1993, où la cour a interprété le terme de façon tellement large.

M. Roy: Les mots «dwelling-house» en anglais, et la «maison d'habitation» en français sont des termes définis au Code criminel. Vous avez la définition de ce qu'est une maison d'habitation à l'article 2 du Code criminel, et on utilise cette définition depuis des temps immémoriaux. Comme le sénateur Nolin le disait, c'est aussi un terme qui a fait l'objet d'interprétations judiciaires. Et dans les circonstances, étant donné que cela a cette reconnaissance, tant par la loi que par la jurisprudence, on préfère utiliser quelque chose qui apparaît peut-être comme étant un terme qui n'est pas tout à fait parfait, mais au moins dont la signification est connue dans notre droit. C'est la raison pour laquelle partout, dans le projet de loi, on parle de «maison d'habitation», «dwelling-house», mais non pas comme étant l'appellation ou l'utilisation du terme de façon générale dans le parler quotidien, mais plutôt en fonction du sens légal qui lui a été donné au cours des années.

Le sénateur Losier-Cool: Et dans ce sens légal, «maison d'habitation» ne signifie pas une maison abandonnée.

Le sénateur Nolin: Si la personne s'y trouve et qu'elle considère que c'est son refuge, cela sera interprété ainsi.

M. Roy: Laissez-moi vous lire les trois premières lignes de la définition, cela va vous éclairer:

[...] l'ensemble ou toute partie d'un bâtiment ou d'une construction tenue ou occupée comme résidence permanente ou temporaire [...]

Donc, à partir du moment où elle est occupée à ces fins, cela devient la maison d'habitation de cette personne.

Le sénateur Losier-Cool: Cela peut être un abri temporaire?

Le sénateur Nolin: Cela peut être un abri de carton.

Le sénateur Beaudoin: Elle peut-être abandonnée même pendant un certain temps et le redevenir. Elle ne cesse pas d'être une maison d'habitation.

Le sénateur Gigantès: Si un criminel se réfugie dans une église, c'est la maison du Seigneur. Est-ce qu'on peut aller l'y chercher?

M. Roy: Dans le cadre d'une «hot pursuit», peut-être. Je ne voudrais pas traiter la question de façon légère. Il pourrait y avoir, et je ne saurais vous répondre spécifiquement là-dessus, une forme de privilège qui s'applique aux lieux de culte d'une façon générale. Cela pourrait être une question de privilège ou de restriction que les forces de l'ordre auront sans qu'elle soit reconnue nécessairement par la loi. La personne qui se réfugie dans un endroit, qui pourrait être une église, à mon avis, risque fort d'être un endroit public. De la même manière, quelqu'un qui se réfugie dans un centre commercial ne pourrait pas prétendre que le centre commercial est devenu sa maison d'habitation. Cela continue d'être un endroit public. Mais si c'était au presbytère ou à des fins particulières, les circonstances devraient être explorées avant de se prononcer de façon plus précise.

Le sénateur Gigantès: Il y a un droit d'asile. Des gens se sont réfugiés déjà dans des églises.

Le sénateur Losier-Cool: À Moncton.

Le sénateur Gigantès: C'est arrivé en France.

M. Roy: C'est pourquoi j'hésite à me prononcer plus avant.

Le sénateur Cogger: Des Tamouls qui faisaient l'objet de déportation se sont réfugiés dans le sous-sol d'une église à Montréal.

Le sénateur Gigantès: Si vous remontez aux temps anciens, le roi Brasidas de Spartes s'est réfugié dans un temple et il ne voulait pas sortir. On l'a emmuré. On l'a laissé mourir à l'intérieur.

Le sénateur Beaudoin: Je suis d'accord avec les propos de monsieur Roy. On est sur un terrain dangereux. Si on lit l'histoire du droit, il est certain que le droit d'asile a existé. Il est certain que le temple a un statut assez spécial. Cela dépend des siècles et cela dépend des pays: la Grèce, par exemple, ou d'autres pays. Je pense que vous avez répondu à la question. Le simple fait que dans le Code criminel les mots «dwelling-house», «maison d'habitation» sont définis, pour moi, cela règle le problème. On n'est pas obligé d'aller plus loin.

[Traduction]

La présidente: Nous devrons peut-être faire appel aux services de soeur Butts pour nous éclairer là-dessus.

Le sénateur Gigantès: J'ai une question à propos de l'article 34.1 de la Loi d'interprétation. Cet article se lit comme suit:

Toute personne habilitée à délivrer un mandat pour l'arrestation d'une personne en vertu d'une autre loi fédérale que le Code criminel est investie, avec les mêmes réserves, des pouvoirs que le Code criminel confère aux juges ou juges de paix pour autoriser quiconque est chargé de l'exécution du mandat...

Voici ma question: est-ce qu'un membre de la Commission des libérations conditionnelles est une de ces personnes?

M. Roy: Cela dépend de la loi. Dans le cas de la Loi sur la libération conditionnelle, il y a peut-être des fonctionnaires qui ne sont pas des juges parce qu'ils n'ont pas été nommés à un poste de cette nature et qui ont cependant ce genre de pouvoir, c'est-à-dire le pouvoir d'arrêter un libéré conditionnel. Comme le soulignait le sénateur Cools, dans le cas d'un libéré conditionnel, ce dernier est toujours sous le coup de la sentence même s'il purge sa sentence dans un contexte communautaire. Jusqu'à l'expiration du mandat d'incarcération, ce détenu, en gros, se trouve sous la surveillance de l'État.

Ce que cet article signifie, c'est qu'avant de pouvoir pénétrer dans un domicile pour aller y arrêter quelqu'un, il faut obtenir une autorisation à cet effet. On donne donc à la personne qui émet le mandat, disons, en vertu de la Loi sur la libération conditionnelle, les pouvoirs d'un juge ou d'un juge de paix aux fins de cette autorisation.

Le sénateur Gigantès: Donc, si le sénateur Cools siégeait à la Commission des libérations conditionnelles, elle aurait ce pouvoir?

M. Roy: Si, à cause de son poste, la loi lui donnait le pouvoir d'émettre un mandat d'arrestation ou un mandat visant, en gros, l'arrestation d'une personne, cet article lui conférerait alors le pouvoir d'émettre l'autorisation de pénétrer dans une maison d'habitation. On appelle cela l'accusation du principal. Si vous pouvez émettre un mandat d'arrestation, vous devriez alors avoir le pouvoir de permettre à quelqu'un de pénétrer dans une maison d'habitation.

Le sénateur Gigantès: Donc, un membre de la Commission des libérations conditionnelles qui peut dire: «Arrêtez cette personne parce qu'elle a enfreint les conditions de sa libération conditionnelle» peut aussi dire: «Et je vous autorise aussi à pénétrer dans une maison d'habitation pour arrêter cette personne»?

M. Zigayer: Monsieur le sénateur, pour ajouter une petite précision à ce que mon collègue vient de dire, il s'agit aussi d'une question de politique ministérielle. Il se peut que ces agents de liberté conditionnelle ne soient pas dotés de ce pouvoir, auquel cas ils pourraient toujours émettre un mandat d'arrestation, ce qui revient à révoquer cette libération conditionnelle, mais il faudrait alors obtenir un mandat d'un juge ou d'un juge de paix en vertu de l'article proposé 529.1.

Le sénateur Gigantès: Mais on dit ici qu'il peut s'agir d'une personne autre qu'un juge ou un juge de paix.

M. Zigayer: Oui, en effet. Vous avez absolument raison. Vous en interprétez bien le sens. Je crois qu'il est important de préciser qu'il faudra tenir compte de la politique ministérielle ou de la politique de la commission. Ce pouvoir existe.

Le sénateur Gigantès: De la politique ministérielle du solliciteur général ou du ministère de la Justice?

M. Roy: Dans ces circonstances, il s'agirait du solliciteur général puisqu'il a la responsabilité en la matière. Il y a aussi une autre possibilité et je crois qu'il s'agit là de la question que soulevait le sénateur Cools, c'est-à-dire qu'il faudra peut-être un jour songer à limiter ces pouvoirs conférés par la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition à d'autres fonctionnaires. Cependant, il revient au Parlement de prendre une telle décision. À l'heure actuelle, ces gens ont ce pouvoir et, comme je l'ai dit, c'est l'accessoire suivant le principal. Ils auraient donc le pouvoir d'autoriser quiconque à pénétrer dans une maison d'habitation désignée.

Bien franchement, à l'heure actuelle, ils n'ont même pas besoin d'y penser. En vertu de cette modification, ils devraient le faire. À l'heure actuelle, cela peut se faire et cela se fait d'emblée, présumément parce qu'on se dit que ces gens sont sujets à surveillance, qu'ils purgent une peine et que l'État a donc le droit de les ramener. Cela dit, vu l'affaire Feeney et son application au niveau des autres lois fédérales, le ministère s'est dit que l'inviolabilité du domicile est telle que quelqu'un doit se demander si l'État devrait avoir le pouvoir d'arrêter quelqu'un et c'est ce qui explique la présence de l'article 34.1 proposé.

Le sénateur Gigantès: Vous avez tiré bien des choses au clair. Merci. Ce n'est pas ce à quoi nous sommes habitués de la part du ministère de la Justice.

[Français]

Le sénateur Nolin: Nous avons eu l'opinion du Barreau du Québec en ce qui concerne le paragraphe 529.4(1), qui revoit la question de l'autorisation, l'omission de s'annoncer. Le Barreau du Québec nous dit que le projet de loi va plus loin que ce que la jurisprudence avait reconnu en incluant l'imminence de la lésion corporelle ou de la mort du policier. Avez-vous lu le mémoire présenté par le Barreau du Québec?

M. Roy: J'ai lu celui qui a été présenté au comité de la Chambres des communes.

Le sénateur Nolin: C'est le même.

Mr. Roy: Si c'est le même, j'en ai pris connaissance.

Le sénateur Nolin: Avez-vous une opinion à émettre sur le fait que le Barreau du Québec nous alerte du fait que l'on va plus loin que la jurisprudence ne le reconnaît?

M. Roy: Ma réaction a été de m'interroger sur les autorités sur lesquelles on s'appuie pour appuyer cette assertion.

Le sénateur Nolin: Il n'y en a aucune.

M. Roy: La common law permet de passer outre au devoir inscrit par la common law qui prescrit de s'annoncer avant d'entrer. On le retrouvait dans l'arrêt Landry et cela faisait suite à une lignée d'arrêts du common law. J'ai toujours compris que l'on pouvait facilement éviter de s'annoncer lorsque l'on risquait d'être reçu par une arme à feu. Je ne connais pas d'autorité qui met cela en doute. De fait, aux États-Unis où l'affaire a fait l'objet de litige devant les tribunaux, cela a été reconnu de façon fort explicite. En droit canadien, je ne connais pas les autorités sur lesquelles le barreau s'appuie.

Le sénateur Nolin: J'ai bien l'intention de demander au bâtonnier, M. Francoeur, d'où il tient ces affirmations.

Ma dernière question concerne le télémandat. À l'autre endroit, un député a présenté un amendement qui visait à étendre l'option du télémandat et d'en faire une mesure d'application générale. Autrement dit, le télémandat serait disponible à un agent de la paix. Le ministère de la Justice a-t-il une politique pour ne pas étendre le télémandat de façon générale?

M. Roy: Sénateur Nolin, un de vos collègues me disait hier relativement au télémandat qu'il était de ceux qui croyait en la possession d'un document lorsque l'on vient pour exercer un pouvoir de l'État. C'est une vision partagée par de nombreux Canadiens.

Dans la même foulée on pense, pour des raisons de politique, qu'il est souhaitable, dans la majorité des cas, qu'un agent de la paix doive se présenter devant un juge pour obtenir un pouvoir et qu'il voit ce juge en bonne et due forme. C'est pourquoi le régime du télémandat continue d'être un régime d'exception. C'est une raison de politique qui procède de la logique générale du mandat.

Il faut aussi garder un équilibre pour permettre que les ordonnances judiciaires puissent être émises. Lorsque l'on parle du grand Nord, cela rend les choses passablement difficiles d'aller à Yellowknife pour obtenir un mandat lorsque l'on habite à Resolute Bay. Il faut prendre connaissance de la géographie du pays. Les tribunaux empruntent une connaissance judiciaire. Cela fait partie de la réalité avec laquelle on doit composer. Ce sont aussi les exceptions. À Ottawa, Montréal et Vancouver et dans les grandes agglomérations de ce pays, il est possible pour la police de se présenter devant un juge de paix pour obtenir le mandat requis. Justement, cette politique législative est reflétée dans les texte de l'article 527.5.

Le sénateur Nolin: Autrement dit, la règle générale veut que le juge de paix ou le juge puisse interroger le demandeur pour s'informer davantage de ses allégations.

M. Roy: J'ajouterai, sénateur Nolin, que même par voie de télémandat, le juge de paix a non seulement ce pouvoir, il a ce devoir. Le juge de paix doit être convaincu et si le policier ne divulgue pas suffisamment, c'est son devoir de ne pas émettre le télémandat. Il a certainement la faculté d'en demander plus et s'il ne l'obtient pas, je le répète, c'est son devoir de ne pas accorder la requête qui est présentée.

[Traduction]

La présidente: Je vous remercie beaucoup, monsieur Roy.

Le sénateur Lewis: Je propose que le comité passe à l'étude article par article du projet de loi.

La présidente: Êtes-vous d'accord?

Des voix: D'accord.

La présidente: Adopté. L'article 1 est-il adopté?

Le sénateur Beaudoin: Adopté.

La présidente: Adopté. L'article 2 est-il adopté?

Des voix: Adopté.

La présidente: Adopté. L'article 3 est-il adopté?

Des voix: Adopté.

La présidente: Adopté. L'article 4 est-il adopté?

Des voix: Adopté.

La présidente: Adopté. Le préambule est-il adopté?

Des voix: Adopté.

La présidente: Adopté. Le titre est-il adopté?

Des voix: Adopté.

La présidente: Adopté. Le projet de loi est-il adopté?

Des voix: Adopté.

La présidente: Adopté. Dois-je faire rapport du projet de loi au Sénat?

Des voix: D'accord.

La présidente: Adopté.

J'ai une question à soumettre au comité. Nous avons tous trouvé à redire aux circonstances ayant mené à notre étude de ce projet de loi. On propose le texte suivant:

Le comité a pris note des circonstances qui ont mené au dépôt du projet de loi au Parlement. Ces circonstances préoccupent certains membres du comité. Néanmoins, dans l'intérêt du bien public, nous avons accéléré notre étude du projet de loi, mais nous espérons que le Sénat aura l'occasion de se pencher sur certaines des importantes questions de processus qui ont été soulevées.

J'ai la version française. Quand je préparerai le rapport, j'aimerais y inclure ce paragraphe.

Le sénateur Beaudoin: C'est très vague. Parlez-vous de toute la question de l'exécutif, du législatif et du système judiciaire?

La présidente: Il y a certains points qui portent là-dessus. Il y en a aussi d'autres qui portent sur la vitesse avec laquelle on nous demande d'examiner des projets de loi. Ces questions ont été soulevées par les sénateurs Nolin et Cogger. Le sénateur Nolin a aussi soulevé la question de l'étude préalable. L'étude du projet de loi a fait ressortir beaucoup de questions secondaires, qui m'inquiètent.

Le sénateur Beaudoin: On a utilisé le mot «accéléré». Je n'aime pas trop ce mot-là.

La présidente: Mais nous avons bien accéléré nos audiences.

Le sénateur Moore: La ministre a bien dit qu'elle prendrait nos questions au sérieux.

Le sénateur Gigantès: Le Sénat peut jouer un rôle de chef de file. Les questions de processus sont importantes. Nos collègues de l'autre parti les ont soulevées, tout comme nous-mêmes.

Le sénateur Cogger: Je croyais avoir compris que le sénateur Cools avait l'intention de regrouper les préoccupations des sénateurs et de les renvoyer à ce comité. Cela serait un exercice distinct.

La présidente: Ce texte découle des préoccupations du sénateur Cools.

Le sénateur Cogger: Attendons un peu. Si elle soulevait la question -- et je ne sais pas dans quel contexte elle le ferait -- on pourrait la renvoyer à ce comité.

Le sénateur Gigantès: Nous avons tous soulevé la question des délais; nous n'avons pas eu assez de temps. Si je comprends bien, le Sénat a souvent trop peu de temps pour étudier les projets de loi qui lui sont renvoyés. Cela se produisait déjà avant que je ne sois nommé à la Chambre, je m'en souviens pendant mes années du gouvernement conservateur, et maintenant on voit le gouvernement libéral faire la même chose. Cette préoccupation est tout à fait légitime. On ne nous donne pas assez de temps pour faire notre travail comme il faut.

Le sénateur Lewis: Mais vous ne voulez pas donner l'impression que nous n'avons pas eu le temps de faire notre travail comme il faut.

Le sénateur Cogger: Sénateur Gigantès, c'est dans cet état d'esprit que j'ai dit au sénateur Cools que les questions qu'elle voulait soulever portaient sur la genèse du projet de loi. Il s'agit de savoir s'il convient que la Cour suprême ordonne au Parlement de faire quelque chose. D'après elle, c'est ce qui s'est produit. Certains sénateurs ne sont pas d'accord.

J'ai proposé au sénateur Cools de séparer ses préoccupations de notre étude du projet de loi C-16 et de demander un renvoi spécial en février, quand le Sénat reprendra ses travaux.

Le sénateur Gigantès: Mais cette question a déjà été étudiée. Les documents qu'on nous a présentés et les témoignages que nous avons entendus démontrent très clairement que la Cour suprême ne nous a jamais ordonné de faire quelque chose. Pourquoi devons-nous passer notre temps à étudier une question qui n'existe pas, juste parce qu'un sénateur veut la soulever?

La présidente: Je ne prétends pas savoir ce que pense le sénateur Cools.

Le sénateur Gigantès: Personne ne pourrait le faire.

La présidente: J'estime que la question qu'elle voulait en fait soulever porte sur l'interaction entre l'aspect judiciaire et l'aspect législatif du gouvernement de ce pays.

Le sénateur Beaudoin: D'après moi, votre texte n'exprime pas du tout cela. Il est très vague.

La présidente: Non, mais on laisse la porte ouverte. Un autre sénateur pourrait en profiter à l'avenir.

Le sénateur Beaudoin: La porte est toujours ouverte. Nous pouvons toujours renvoyer une question à un comité pour qu'elle soit étudiée.

Le texte est trop général. Le comité va peut-être l'adopter, mais moi je voterai contre. Il est trop vague. Nous ne parlons pas d'un problème découlant spécifiquement de ce projet de loi. Ce n'est pas la première fois que nous nous trouvons dans cette situation. Mais si le sénateur Cools demande qu'on renvoie toute la question à ce comité, je voterai pour.

Le sénateur Gigantès: Oui, mais cela dépendrait du sujet.

Le sénateur Beaudoin: C'est ça. Mais en ce moment, la question est trop générale et trop vague. Le texte est comme un pot-pourri. Il est vrai qu'il y a un problème, mais ce texte ne le décrit pas de façon adéquate. Je m'abstiendrai donc de voter, parce que le texte est trop vague. Mais si quelqu'un demandait qu'on se penche sur l'interaction entre les volets législatif et judiciaire du gouvernement, je voterais pour. Cette étude serait très intéressante. Mais le libellé de ce texte ne dit pas du tout ça.

Le sénateur Cogger: Mais ce n'est pas ce qu'il est supposé dire. Sénateur Beaudoin, ce texte n'est pas un renvoi. Un renvoi viendra peut-être d'un sénateur à la Chambre même, peut-être du sénateur Cools.

Avec ce texte, le sénateur Milne essaie simplement d'indiquer que toutes sortes de questions ont été soulevées même avant que le projet de loi ne soit renvoyé à ce comité. Nous irons de l'avant quand le renvoi sera fait.

La présidente: C'est cela.

Le sénateur Nolin: N'oubliez pas le rapport à la Chambre des communes.

La présidente: Si quelqu'un propose la motion, nous pourrons voter.

Le sénateur Gigantès: Je suis d'accord en général, madame la présidente. Or, je préfère que ce texte ne soit pas inclus dans le rapport. J'aimerais que la question soit renvoyée au comité. Cela fait, nous pourrons nous pencher là-dessus après avoir établi certains paramètres. Entre autres, je ne veux pas que cela soit interprété comme une invitation au sénateur Cools de se présenter ici pour parler sans arrêt.

La présidente: Je m'en remets au comité.

Le sénateur Losier-Cool: Je préfère que vous fassiez rapport du projet de loi sans amendement.

La présidente: Très bien. D'accord?

Des voix: D'accord.

J'aimerais aussi officiellement remercier les membres du personnel de leur appui et de leurs efforts. D'après moi, Mme Lank est la meilleure greffière du Sénat. Elle a accompli un travail merveilleux, surtout étant donné les nombreux problèmes découlant du projet de loi. Certains membres du comité ont même été attaqués ou critiqués. J'aimerais féliciter Mme Lank et son personnel de la façon qu'ils ont géré la situation.

Des voix: Bravo, bravo!

La séance est levée.


Haut de page