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Délibérations du comité sénatorial permanent des
Transports et des communications

Fascicule 12 - Témoignages pour la séance du soir


Reprise de la séance.

La présidente: Nous accueillons maintenant les représentants de la Commission de port du Fraser, M. Michael Jones, président, et M. Rick Pearce, directeur du port et président-directeur général.

M. Michael Jones, président, Commission de port du Fraser: La question qui se pose pour nous est la suivante: sommes-nous, oui ou non, en faveur du projet de loi C-9? Pour répondre à cette question, nous nous sommes demandé si le projet de loi C-9 atteint les objectifs que l'on s'était fixés quand le gouvernement a entrepris son examen de la législation portuaire du Canada. Il y avait de nombreux objectifs, mais l'un des plus importants était de renforcer la compétitivité des ports maritimes du Canada sur les marchés internationaux, en particulier face aux ports du nord des États-Unis d'Amérique.

Je reviendrai là-dessus dans un instant, mais je voudrais d'abord signaler que l'élaboration du projet de loi C-9 a exigé énormément de temps, d'énergie et de dépenses de la part d'Industrie Canada et des ports canadiens, y compris la Commission de port du Fraser.

Je vais vous répéter ce que nous avons dit au ministre Collenette quand ce dernier a rencontré récemment les administrations portuaires proposées. Nous croyons que le temps est venu de mettre fin rapidement au processus de consultation sur le projet de loi à l'étude. Le temps est venu de passer à la mise en oeuvre et à l'action.

Le projet de loi comporte des avantages qui avaient été réclamés par les sociétés de port locales et qui leur permettra de mieux rivaliser avec les ports des autres pays. Il renferme également des avantages de moindre importance pour le port administré par notre commission.

Par conséquent, il atteint effectivement l'objectif visé. Toutefois, il suscite également des déceptions, parce qu'à notre avis, on aurait pu faire plus pour rendre les ports plus compétitifs sur la scène internationale.

Je tiens à être bien clair: je ne me prononce pas contre le projet de loi C-9. Il est assez bon pour mériter notre appui. Je dois toutefois dire le fond de ma pensée sur ce projet de loi, parce qu'il met en cause la capacité du port du Fraser de réaliser son mandat, qui est de faciliter l'activité économique et commerciale aux niveaux national et régional, ce qui se traduit bien sûr par la création d'emplois et une prospérité accrue. C'est un but important. C'est une raison d'être fort importante qui doit être prise très au sérieux.

La position du port du Fraser est que la législation des États-Unis confère aux ports américains certains avantages face à leurs concurrents. Nous espérions que le projet de loi C-9 renfermerait des dispositions visant à compenser ces avantages.

Il est de notoriété publique que, tout au long des trois années qu'a duré le processus d'examen, le port du Fraser a appuyé ses positions sur des faits et qu'il a présenté des suggestions constructives en vue d'améliorer la mesure législative. Aujourd'hui, nous allons continuer dans cette veine.

Nous donnerons d'abord des exemples des avantages que la loi confère aux ports des États-Unis. Deuxièmement, nous allons énoncer nos propositions en vue d'améliorer le projet de loi C-9.

Je vais citer seulement trois avantages législatifs, le premier étant d'ordre fiscal. Les ports de la côte nord-ouest des États-Unis peuvent lever des impôts fonciers sur leurs propriétés. Par exemple, en 1995, le port de Seattle a perçu 35 millions de dollars US en impôts fonciers. Cinq autres ports, soit Longview, Bellingham, Portland, Vancouver (Washington) et Tacoma, ont perçu chacun entre 2,4 millions et 5,9 millions de dollars US.

Par contre, aux termes du projet de loi C-9, le port du Fraser devra payer plus de 2 millions de dollars par année en impôts à l'administration locale, bien que cette mesure doive être implantée graduellement sur quatre ans. Nous accueillons favorablement l'implantation graduelle, mais nous devons néanmoins insister sur notre désavantage fiscal relatif. Nous ne demandons pas qu'on nous accorde le même avantage qu'aux Américains, et nous ne cherchons nullement à éviter de payer ces impôts fonciers. Nous voulons plutôt obtenir des mesures compensatoires.

Le deuxième avantage des ports américains est que, entre autres possibilités, ces derniers peuvent émettre des obligations portant des intérêts qui ne sont pas imposables, ce qui est un outil utile pour attirer des investissements privés en vue de construire des installations portuaires.

Le troisième avantage est l'aide fédérale. Le Corps of Engineers de l'armée américaine finance le dragage des chenaux marins, ce qui réduit d'autant les dépenses d'exploitation des ports des États-Unis. Au contraire, les ports canadiens doivent commencer à payer le coût du dragage, en raison du délestage de responsabilités du gouvernement fédéral. Cette mesure ne fait pas partie du projet de loi C-9, mais il faut tenir compte des effets cumulatifs de toutes les mesures fédérales.

Voilà donc notre situation face à nos concurrents. Ayant donné des exemples des avantages dont jouissent les États-Unis, je vais maintenant passer aux trois changements que nous suggérons d'apporter au projet de loi C-9 et qui, à notre avis, nous aideraient à faire concurrence aux ports des États-Unis. Ces trois changements sont fondés sur l'hypothèse que le Canada devrait adopter une vision qui serait à la fois une source d'inspiration, un défi et un objectif réalisable, à savoir d'être la porte d'entrée maritime pour les marchandises en provenance et à destination d'une grande partie de l'Amérique du Nord. Nous ne devrions pas nous contenter de maintenir notre part actuelle du marché.

Par conséquent, nous croyons que la nouvelle mesure législative devrait permettre aux ports canadiens de maximiser leurs chances de croissance face à la concurrence américaine. Nous avons donc trois propositions à faire pour l'améliorer.

La première porte sur les frais calculés sur les revenus bruts. La pratique normale veut que les sociétés paient des impôts ou des frais sur leur revenu net, après défalcation des dépenses d'exploitation. Pourtant, aux termes de l'alinéa 8(2)h) du projet de loi C-9, l'administration portuaire paiera des frais annuels ou une taxe sur son revenu brut. Ces frais proposés, perçus à même le revenu brut et non pas le revenu net, seront un facteur de dissuasion pour ce qui est de trouver des capitaux privés. L'imposition de frais sur les revenus bruts grèvera lourdement les revenus d'une administration portuaire, et ces frais doivent être payés avant toute autre obligation comme le service de la dette. Les institutions de prêts accorderont donc un taux d'intérêt moins favorable, parce qu'elles n'auront pas préséance pour ce qui est d'avoir accès au revenu de l'administration portuaire. Cette mesure est contre-indiquée.

En conséquence, nous recommandons que les frais soient calculés sur le revenu net et non pas sur le revenu brut. Si cette recommandation n'était pas acceptable au Parlement, nous recommandons que les frais soient calculés sur le revenu après défalcation du coût du service de la dette.

La deuxième amélioration concerne les pouvoirs. Comme les administrations portuaires auront pour mandat de faciliter le commerce national et régional et qu'elles seront financièrement autonomes, il faudrait leur donner des pouvoirs étendus au lieu de leur mettre des bâtons dans les roues. À cet égard, l'article 28 est un élément crucial du projet de loi C-9. Il stipule que les activités de base de chaque administration portuaire doivent être définies dans les lettres patentes. Il est essentiel que ces documents soient rédigés de manière à accorder les plus vastes pouvoirs possibles, car les activités de base seront celles d'un organe de l'administration fédérale et seront en conséquence à l'abri de la fiscalité des entreprises et de diverses lois locales et provinciales. Ces immunités permettront d'accélérer les prises de décisions et d'abaisser les coûts, ce qui est à l'avantage de nos clients.

Une description trop étroite des activités de base pourrait sérieusement nuire à la capacité d'une administration portuaire de mener ses affaires avec efficience et efficacité. Nous proposons une disposition du projet de loi C-9 destinée à assurer la souplesse.

Nous recommandons que l'on modifie l'alinéa 28(2)a). Cette disposition stipule actuellement qu'une administration portuaire a le pouvoir de se livrer à des:

a) activités portuaires liées à la navigation, au transport des passagers et des marchandises, et à la manutention et l'entreposage des marchandises...

Nous voudrions ajouter: «et aux activités commerciales et industrielles connexes qui généreraient les fonds nécessaires pour le développement futur de l'infrastructure».

Madame la présidente, mon collègue Rick Pearce, président-directeur général et directeur de la Commission de port du Fraser, va poursuivre notre présentation et vous parler du troisième changement que nous recommandons d'apporter au projet de loi C-9; il vous fera également un résumé du mémoire que vous présente le port du Fraser.

M. Rick Pearce, directeur du port et président-directeur général, Commission de port du Fraser: Je vais vous parler de la réglementation. Dans le projet de loi C-9, il semble y avoir dédoublement des responsabilités à l'égard des activités de réglementation. Les règlements administratifs relèvent des ports, tandis que les autres fonctions de réglementation relèvent du gouvernement du Canada. Dans le meilleur des cas, cela pourrait causer de la confusion quant aux compétences de chacun. Les rédacteurs du projet de loi ont fait très peu de consultations, à ce jour, au sujet des règlements. Au moment de rédiger notre mémoire, nous n'avions reçu qu'une ébauche préliminaire du règlement proposé. On nous a laissé entendre que les ports seraient en mesure d'élaborer des règlements spécifiques pour leur domaine d'exploitation. Il ne semble pas que ce soit le cas. Nous insistons sur le fait qu'il n'y a pas de taille unique et universelle pour l'administration d'un port. J'en suis la preuve vivante.

Nous croyons qu'il est préférable de mettre la dernière main au règlement avant que la loi entre en vigueur, au lieu d'avoir à appliquer le règlement actuel, dont certains aspects auraient dû être changés depuis longtemps. À notre avis, il serait avisé de prendre le temps voulu dès maintenant. La mesure proposée prévoit la possibilité de prolonger le délai, mais tous les efforts visent à faire en sorte que les nouvelles administrations portuaires du Canada entrent en fonction le 1er janvier prochain. Nous craignons que le processus de réforme de la réglementation soit bâclé ou que nous devions continuer de nous accommoder des anciens règlements qui peuvent être conflictuels pendant une bonne partie des cinq prochaines années. Ni l'une ni l'autre de ces options ne sera avantageuse pour les administrations portuaires. Nous croyons qu'il faut prendre dès maintenant le temps de rédiger le règlement, avant l'entrée en vigueur de la loi.

Par conséquent, nous invitons le Sénat à recommander au Parlement de mettre en place, avant la date d'entrée en vigueur du projet de loi C-9, un règlement taillé sur mesure qui permettra de diriger les nouvelles administrations portuaires, même si cela devait repousser la date d'entrée en vigueur au-delà de la date-cible du 1er janvier 1999.

En résumé, dans le contexte de concurrence mondiale d'aujourd'hui, nous sommes constamment mis au défi de réduire les coûts, de devenir plus efficaces et de fournir une infrastructure qui, de par sa nature même, est coûteuse et produit un rendement qui est considéré faible en comparaison du rendement tenu pour normal en affaires. En retour, les ports du Canada servent non seulement la région immédiate, mais le pays tout entier. C'est pourquoi ils demeurent sous les auspices du gouvernement fédéral. Il est essentiel d'appuyer les ports et de les encourager à relever les défis de la concurrence des États-Unis.

Comme le transport n'a pas été inclus dans l'Accord de libre-échange nord-américain, nous n'avons pas été en mesure de contester les subventions que les États-Unis ont versées à leur système de transport et, en particulier, à leurs ports. Les capitaux bon marché, les faibles coûts de fonctionnement et la possibilité de percevoir des impôts, tout cela a suscité un défi que nous devons relever. Nous soutenons que le fait d'accroître nos coûts ne nous permet pas d'affronter ce défi.

Le Canada doit établir l'environnement propice pour que ses ports nationaux puissent rivaliser avec leur principal concurrent, les États-Unis. Le fait de restreindre indûment la liberté de manoeuvre des ports, de crainte de faire quoi que ce soit qui sortirait de l'ordinaire, ne peut qu'étouffer la créativité des dirigeants de nos ports. L'établissement du statut d'agent répond à une partie des besoins d'aide. La réussite dépendra des ingrédients de la recette. Nos concurrents américains n'ont aucune contrainte quant aux activités commerciales auxquelles ils peuvent se livrer, tandis que ce ne sera pas notre cas.

Nous soutenons que si l'activité commerciale d'une administration portuaire lui permet d'amasser les fonds voulus pour construire l'infrastructure coûteuse mais nécessaire pour transporter les produits canadiens jusqu'à leur marché, les autorités portuaires devraient fondamentalement pouvoir se livrer à ces activités dans le cadre d'un mandat spécial. Si le gouvernement souhaite restreindre certaines activités, il devrait les spécifier dès maintenant et s'en remettre aux ports pour le reste.

De plus, le gouvernement ne doit pas imposer aux ports de contraintes qui nous empêcheraient d'être compétitifs. Cela comprend le délestage des coûts, dont l'accumulation pourrait faire augmenter exagérément nos propres coûts. De plus, le gouvernement doit chercher le moyen de permettre des méthodes novatrices de financement, par l'émission d'obligations et de titres portant intérêt, pratique courante aux États-Unis. Il faut respecter les ports à titre de créateurs de croissance économique et d'emplois. Si on leur impose des contraintes à cet égard, nous risquerons de perdre des milliers d'emplois et de voir des produits canadiens détournés vers les ports américains, situation qui serait tout à fait contraire à l'esprit même du projet de loi C-9.

Aussi avons-nous recommandé que les frais à verser soient calculés d'après le revenu net et non pas le revenu brut, que le Sénat recommande au Parlement de mettre en place, avant l'entrée en vigueur du projet de loi C-9, un règlement taillé sur mesure pour cette loi, même si cela devait repousser au-delà du 1er janvier 1999 la date d'entrée en vigueur, et troisièmement, et c'est probablement là la proposition la plus importante, que l'alinéa 28(20)a) soit modifié de manière à ajouter qu'une administration portuaire est habilitée à se livrer à des «activités associées au transport maritime, à la navigation, au transport de voyageurs et de marchandises, à la manutention des marchandises et à l'entreposage des marchandises, ainsi qu'à d'autres activités commerciales et industrielles connexes». On pourrait ajouter à cela que ces activités ne comprennent pas l'exploitation d'hôtels, de restaurants, de casinos ou de condominiums, sauf autorisation expresse du ministre. Cela permettrait de générer les fonds nécessaires pour le développement futur de l'infrastructure.

Nous avons joint à notre mémoire deux documents à l'appui des arguments que nous avons soulevés. Les deux se reportent au projet de loi C-44, version antérieure de la mesure à l'étude, mais ils demeurent tous deux pertinents au projet de loi C-9. Nous vous exhortons à les lire également.

Madame la présidente, honorables sénateurs, le temps est venu de tourner la page et d'agir. Toutefois, il est essentiel que ces questions d'une importance vitale soient prises en compte et que des changements soient apportés à la mesure législative. C'est à cette condition seulement que nous aurons une mesure législative pouvant être mise en pratique et qui n'exigera aucune retouche immédiatement après son adoption. Nous exhortons le Sénat à faire ces recommandations à la Chambre des communes.

Le sénateur Forrestall: Premièrement, je vous pose la question: la Commission de port du Fraser est-elle dans une très bonne situation financière?

M. Pearce: Nous survivons.

Le sénateur Forrestall: Ne sous-estimez pas votre richesse, car vous êtes très riche en comparaison des autres ports du Canada. La chance vous a souri depuis 25 ou 30 ans et bien d'autres ports vous envient. Le sort vous a rendus assez fortunés.

M. Pearce: Nous avons fonctionné dans le cadre du système des commissions de port, qui était différent.

Le sénateur Forrestall: Vous avez créé le système des commissions de port, vous ne vous êtes pas contentés de vous en accommoder.

Cela dit, il n'est peut-être pas étonnant que vous ayez choisi d'aborder ces deux points, avec lesquels je suis d'ailleurs d'accord. Je voudrais vous poser une question précise au sujet du règlement. Vous avez dit que vous en aviez reçu une ébauche. Était-ce un document de discussion?

M. Pearce: Oui, c'est un document de discussion. Ce qui nous préoccupe, c'est qu'on vient seulement de nous le remettre.

Le sénateur Forrestall: Alors que le projet de loi est quasiment adopté.

M. Pearce: Oui, et nous approchons de la fin de l'année.

Le sénateur Forrestall: Ce document est-il volumineux? Combien de pages compte-t-il?

M. Pearce: Non, il n'est pas très volumineux. Je n'ai pas eu l'occasion de le lire moi-même.

Le sénateur Forrestall: Allez-vous l'étudier, de concert avec vos collègues?

M. Pearce: Oui. Notre directeur de port est actuellement en train d'étudier le règlement du point de vue du fonctionnement, et le secrétaire de notre conseil en étudie les aspects administratifs. Je n'ai pas encore reçu leurs rapports. Nous aurons mardi, ici à Ottawa, une réunion des présidents-directeurs généraux des 18 administrations portuaires, et c'est l'une des questions que nous allons aborder.

Le sénateur Forrestall: Le gouvernement confie rarement l'étude des règlements aux comités. Je me demande si l'on pourrait demander au greffier si notre comité ne pourrait pas les étudier.

La présidente: Le greffier peut-il répondre à cela?

Michel Patrice, greffier du comité: Je n'ai pas de copie du projet de règlement, mais je pourrais me renseigner.

Le sénateur Forrestall: J'aime toujours lire le règlement avant de lire la loi. Avec M. Martin, il faut faire attention. Pourriez-vous nous expliquer comment le projet de loi C-9 vous imposera un fardeau fiscal et nous dire ce que vous avez l'intention de faire à ce sujet?

M. Jones: Oui. Quand nous louons des terrains à bail, le preneur à bail doit payer le plein montant de l'impôt foncier à la municipalité. Cela s'applique seulement à des terrains que nous possédons en propre et que nous n'avons pas donnés à bail. Il y a des années, deux de nos principaux quais ont conclu des contrats de gestion à long terme qui spécifiaient qu'ils ne devaient pas payer d'impôts fonciers. Ils deviendront maintenant assujettis et devront ou bien payer l'impôt foncier ou renégocier ces contrats.

Nous avons 600 acres de terres fédérales pour lesquelles nous devrons peut-être payer l'impôt si nous ne parvenons pas à les mettre en exploitation. Toute cette question de l'impôt foncier est associée à notre idée relativement aux activités de base, parce que nous avons la possibilité d'exploiter ces terrains, de les rendre productifs et de confier à quelqu'un d'autre le soin d'exploiter une entreprise à même ces terrains et de payer l'impôt. Si nous n'y parvenons pas, c'est nous qui devrons payer les impôts fonciers.

La loi a été modifiée et nous avons suggéré, ou en tout cas la commission de port a suggéré que s'il fallait payer des impôts fonciers ou des subventions tenant lieu de taxes, on les mette en place graduellement, afin que nous ne soyons pas mis subitement devant l'obligation de régler une grosse facture. C'est prévu dans le projet de loi C-9. Les sociétés de port locales ont toujours payé des subventions en remplacement de taxes; les commissions de port n'en payaient pas. Quand nous serons fusionnés, on ne pourra pas enlever aux villes ce que les sociétés de port locales payaient, et il faudra donc inclure ce montant dans le paiement total.

Le sénateur Forrestall: Cela ne s'applique pas à vous, mais vous êtes conscients qu'il y en a parmi nous qui s'inquiètent de l'incidence que pourrait avoir le fait de supprimer des revenus et de ne pas les remplacer pour l'infrastructure municipale, surtout du point de vue financier.

M. Jones: On ne peut pas enlever de revenus aux villes. Nous en convenons. Les sociétés de port locales ne voudraient pas arrêter de payer, j'en suis sûr. Cela n'aurait aucun sens.

J'ajoute également, sénateur, que nous sommes la seule commission de port au Canada qui a négocié un accord de rémunération des services avec les principales municipalités où sont situées nos installations les plus importantes. Les villes recevront de nous plus d'argent que ce que nous avons payé jusqu'à maintenant, mais au moins, nous avons reconnu le droit de payer pour un service, et nous l'avons fait.

Le sénateur Forrestall: Le dragage annuel ou périodique est-il coûteux? Représente-t-il une grosse facture?

M. Pearce: Oui. Chaque année, le dragage coûte autour de deux millions de dollars et plus. Nous venons de terminer des discussions et des négociations avec la Garde côtière canadienne pour prendre en charge le dragage du fleuve.

Le sénateur Forrestall: Jusqu'où?

M. Pearce: Le dragage se fera, pour ceux qui connaissent la topographie du fleuve, depuis le pont, qui se trouve à peu près à mi-chemin de notre territoire, jusqu'à l'embouchure, ce qui représentera en moyenne 1,5 million de mètres cubes par année.

Le sénateur Forrestall: Vous en servez-vous pour la mise en valeur des terres?

M. Pearce: Une partie est déversée en mer parce que cela ne vaut rien. Une partie sert à la mise en valeur des terres. On peut recouvrer une partie du coût et nous le faisons, mais nous devons quand même payer un coût net.

M. Jones: En toute justice, nous devons ajouter que nous avons négocié une entente avec Pêches et Océans, maintenant que la Garde côtière s'en est déchargée, et qu'ils nous ont donné un paiement forfaitaire qui paiera le coût de notre dragage pour sept ans, après quoi le montant diminuera pour encore trois ans. Il y a 17 ou 18 ans, nous nous sommes positionnés pour pouvoir faire cela. Tôt ou tard, nous devrons assumer ces coûts.

Le sénateur Forrestall: Enfin, je voudrais des précisions au sujet du revenu brut et du revenu net. Le brut, c'est votre revenu total. Le net, est-ce un profit?

M. Pearce: Oui. Pour nous, le revenu net est un profit.

Le sénateur Forrestall: Ou bien est-ce une liste de dépenses spécifiques que vous ne pouvez pas déduire?

M. Pearce: Non, nous avons dit que c'était un profit. Nous fonctionnons comme n'importe quelle autre entreprise. À nos yeux, nous avons un actionnaire, qui se trouve à être le gouvernement du Canada, et notre tâche est de produire un profit. Nous disons que c'est injuste pour les ports de percevoir les frais sur le revenu brut, alors que nous avons d'autres dépenses, notamment le dragage. Nous visons tous le même but, à savoir, servir l'intérêt de la population canadienne, y compris en Colombie-Britannique, et c'est donc logique pour nous.

Le sénateur Forrestall: Vous pouvez faire payer à la Garde côtière le dragage dans la mesure où c'est un avantage pour elle.

M. Pearce: Nous n'essayons pas de lui faire payer une partie de ce coût; nous essayons seulement de conserver la plus grande partie des liquidités, afin de pouvoir faire ce que nous avons à faire.

Le sénateur Forrestall: Vous ferez toutefois du dragage au profit de certains riverains privés.

M. Pearce: Nous ferons du dragage pour assurer le passage des navires jusqu'à nos terminaux, c'est notre principale préoccupation.

M. Jones: Nous avons toujours payé le coût du dragage de ce que l'on pourrait appeler des chenaux secondaires, pour accéder à des marinas, par exemple, tandis que la Garde côtière payait le dragage du chenal principal. Maintenant, nous payons la totalité, mais on nous versera une somme importante.

M. Pearce: C'est une des raisons pour lesquelles nous estimons qu'il nous faut avoir la latitude de nous livrer à certaines activités, parce que nous ne pourrons pas augmenter les droits ou les redevances que nous payent les utilisateurs du port, simplement à cause de la concurrence des États-Unis. Nous devons avoir une marge de manoeuvre et il faut que la plus grande partie des activités que nous voulons faire soient considérées comme des activités de base.

Le sénateur Forrestall: Vous ne proposez pas d'aller jusqu'à percevoir des taxes municipales?

M. Pearce: Absolument pas.

Le sénateur Whelan: Madame la présidente, je voudrais préciser bien clairement que cet homme de Vancouver, qui s'appelle Michael Jones, a déjà habité dans ma région, de sorte qu'il connaît le port de Windsor, il connaît la rivière Détroit et il connaît le Canada. Je n'en dirai pas plus. Je voulais que ce soit clair.

La première fois que j'ai visité votre port, j'étais président du Comité de l'agriculture. C'était en 1966 et nous faisions une étude du transport et des installations de manutention des céréales et de la potasse. C'était une activité secondaire à Vancouver à l'époque.

Il y a une chose qui me chicote quand on parle de l'ALENA, du libre-échange et de la mondialisation, à savoir qu'il y a des choses qui ne sont absolument pas équitables, par exemple les obligations municipales aux États-Unis. Ceux qui investissent dans ces titres ne paient pas d'impôts sur le revenu. Ils ont un très grand avantage. Les investisseurs touchent un taux d'intérêt plus faible, mais ils ne paient pas d'impôts sur le revenu.

En additionnant les obligations et le service du génie de l'armée américaine, avez-vous déjà calculé à combien se chiffre l'avantage financier dont bénéficie le port de Seattle ou celui de Portland?

M. Jones: Nous en avons fait une approximation, oui, au comité permanent de la Chambre des communes, nous avons énuméré tout cela.

Nous avons mentionné le dragage et les impôts fonciers. Je ne me rappelle pas des chiffres, mais nous avions un tableau donnant une ventilation complète.

Le sénateur Whelan: Pourriez-vous nous le faire parvenir?

M. Jones: Oui, certainement.

M. Pearce: Nous le ferons parvenir au comité.

Le sénateur Whelan: Ceux, parmi nous, qui s'y connaissent en rédaction législative et qui ont de longs états de service au Parlement savent que le règlement peut parfois donner une toute autre apparence à une loi. Est-ce la raison pour laquelle vous voulez prendre connaissance du règlement?

M. Pearce: Absolument, je connais la musique.

Le sénateur Whelan: J'ai bien aimé ce que vous avez affirmé dans votre résumé. Vous avez dit qu'il y a un élément qui compense, à savoir que les ports du Canada servent non seulement la localité, mais le pays tout entier. C'est rafraîchissant d'entendre quelqu'un de l'extrême-occident dire cela.

Vous avez dit aussi que le transport n'était pas compris dans l'Accord de libre-échange nord-américain. Je dois dire que je suis d'accord avec vous. C'est désolant de voir les avantages et les désavantages que cet accord comporte.

Vous avez cité un discours de M. C.C. Tung. J'ignore si vous avez eu l'occasion de lire le compte rendu du comité sénatorial permanent des affaires étrangères qui étudie l'APEC. Le comité a entendu des témoins expliquer pourquoi ils s'étaient tellement trompés au sujet de l'APEC, ce véritable monstre économique, et pourquoi il en est résulté une telle déception. L'APEC a dû avoir une incidence quelconque sur votre port, étant donné les compressions et le transport de produits comme le bois d'oeuvre, le charbon et la potasse.

M. Jones: C'est intéressant de constater que les produits forestiers sont en baisse. Nos produits forestiers n'ont pas diminué autant que dans le port de Vancouver et les autres ports de la Colombie-Britannique, mais il y a quand même une baisse. Ce qui vient compenser, c'est l'importation de voitures qui sont déchargées dans notre port, et aussi de l'acier. Les deux sont en hausse, parce que les pays de l'APEC doivent exporter et que le prix de leurs biens a baissé. Notre port se débrouille encore bien, mais nous faisons maintenant plus d'importations que d'exportations.

Le sénateur Whelan: Leur devise est tellement dévaluée que leurs produits coûtent moins cher.

M. Pearce: En tant que Canadien, je préférerais que nous fassions 100 p. 100 d'exportations.

Le sénateur Whelan: Vous avez parlé du dragage. Je suis allé dans la région du fleuve Fraser il y a deux ou trois ans et j'ai vu des falaises immenses qui s'affaissaient dans le fleuve à cause de l'érosion. Avez-vous eu des discussions quelconques avec vos collègues au sujet de la conservation, de l'agriculture et des forêts?

M. Pearce: Oui, presque quotidiennement. Je pense que l'endroit dont vous parlez se situe en amont, dans la région de Chilliwack, où on a enregistré des dommages considérables. Depuis deux ou trois ans, il y a eu énormément d'érosion.

Aux alentours de notre port, tout notre dragage doit être approuvé par les autorités environnementales. Cela comprend un examen par l'inspecteur des digues, de même qu'un examen par Pêches et Océans, Environnement Canada, et la Colombie-Britannique en matière d'environnement. Nous obtenons chaque année un permis de dragage.

Nous ne draguons pas le fleuve au-delà de la profondeur désignée. Si nous le faisions, nous créerions le même problème qui s'est produit à Chilliwack. Nous draguerions trop creux et les murs commenceraient à s'affaisser. Nous aurions alors un gros problème.

M. Jones: Ce n'est pas de notre ressort.

M. Pearce: Nous respectons l'environnement. Cette préoccupation est intrinsèque dans tout ce que nous faisons, mais nous continuons à faire du dragage.

L'un des avantages est que les matériaux dragués ne sont pas toxiques. Ils ne renferment aucun produit chimique et ne posent donc aucun problème.

Le sénateur Whelan: Vous parlez de digues; or, s'il n'y a pas d'inondations épouvantables dans la région du Fraser, c'est parce que le gouvernement fédéral y a construit d'énormes digues, sous notre direction.

M. Pearce: C'est en partie grâce à cela. C'est aussi parce que le dragage a abaissé le niveau de la rivière d'un mètre depuis 25 ou 30 ans. C'est également une opération du gouvernement fédéral.

Le sénateur Fitzpatrick: Je conclus de vos observations que votre présentation vise avant tout à renforcer l'administration portuaire en la rendant plus compétitive et plus souple. Bien sûr, Vancouver représente déjà un secteur portuaire important qui pourrait apporter une contribution non négligeable à l'économie de la Colombie-Britannique.

Peut-être pourriez-vous donner au comité une idée de l'ampleur des activités que vous évoquez ou, à l'inverse, des problèmes que cela pourrait causer dans l'essor du port. Je me trompe peut-être, mais il me semble qu'il y a quelques années, Vancouver avait un peu de retard sur Seattle dans le développement des activités de conteneurs. J'espère que nous les avons maintenant rattrapés. Cela n'a rien à voir avec ce dont on discute. Toutefois, Vancouver n'a pas su soutenir la concurrence assez rapidement dans le secteur des conteneurs.

Je voudrais entendre vos commentaires au sujet de l'ampleur des avantages que vous constatez, des avantages dont nous bénéficierions ou, à l'inverse, du tort que pourraient nous causer les ports de Seattle, Portland ou San Francisco.

M. Pearce: À l'heure actuelle, nos coûts de main-d'oeuvre sont plus bas. Autrement dit, si l'on convertit nos opérations en dollars US et les opérations des Américains en dollars canadiens, nous sommes meilleur marché. C'est l'un de nos avantages.

L'autre avantage que nous avons actuellement, c'est bien sûr le dollar canadien, mais on ne peut pas s'attendre à ce que cette situation s'éternise.

Le port doit assumer un coût supplémentaire pour le dragage, en dépit du fait que nous avons conclu une entente. Celle-ci va expirer un jour et nos coûts seront de 2 millions de dollars et plus chaque année. En outre, nous verserons des subventions en remplacement de taxes d'au moins 2 millions de dollars par année. Il y a aussi le fait que nous paierons des frais au gouvernement fédéral; il faut espérer qu'ils seront perçus sur les revenus nets et non pas bruts. De plus, le ministère fédéral nous refile d'autres coûts dans le cadre de programmes de recouvrement des coûts. Par exemple, il y a Environnement Canada qui nous fait payer des frais de contrôle des déversements en mer, et aussi la Garde côtière et ses droits de services maritimes. Tout cela a un effet cumulatif sur le port. Aux États-Unis, ils n'ont rien du genre.

Si nous augmentons nos coûts, nous aurons trois choix. Nous pourrons fermer nos portes, ce qui, je pense, n'est pas la bonne solution. La deuxième possibilité est d'augmenter nos tarifs. Si nous optons pour cette solution, les marchandises seront transbordées au sud de la frontière, parce que les expéditeurs n'ont pas de préférence. La troisième option est de trouver d'autres sources de revenu qui nous aideront à rester compétitifs et à expédier les marchandises du Canada vers les marchés. C'est le choix que nous voulons faire et c'est pourquoi nous demandons que l'on apporte des changements au projet de loi.

M. Jones: Pour vous donner un ordre de grandeur, nos profits annuels sont actuellement de l'ordre de 1,5 à 2 millions de dollars. À titre de commission de port, nous remettons cela chaque année au ministre. Nous pouvons demander qu'il nous le redonne et il l'a toujours fait. C'est ainsi que nous finançons nos installations.

Comme le PDG l'a expliqué, ces coûts sont supérieurs à nos profits dans une année donnée. Si tous les coûts nous tombaient dessus subitement, il nous faudrait augmenter nos tarifs, ce qui nous acculerait à la ruine, car les armateurs peuvent facilement utiliser un autre port. Nous devons avoir la capacité de trouver d'autres sources de revenu. Nous ne sommes pas venus ici pour nous plaindre. Nous vous exhortons à adopter le projet de loi, mais nous disons que si nous voulons être des compétiteurs sérieux, nous avons besoin d'aide sur certains plans.

M. Pearce: Ce que nous demandons sera à l'avantage de tous les ports canadiens, pas seulement du nôtre. Nous avons essayé d'adopter ce point de vue désintéressé tout au long de la discussion.

Le sénateur Fitzpatrick: Il me semble que vous demandez la possibilité de promouvoir le commerce, ce qui est un objectif primordial du gouvernement.

Je voudrais faire un commentaire sur les frais calculés sur les revenus bruts plutôt que sur les revenus nets. J'ai de l'expérience dans l'industrie minière et je sais que dans ce secteur, nous n'aimons pas avoir à payer des redevances, parce que cela est prélevé dès le départ, par opposition aux impôts que nous payons sur le revenu net ou les profits. Le fait d'avoir à payer des frais sur les revenus bruts peut nuire au lancement d'une nouvelle entreprise ou à la mise en place d'un plan d'activité. Il faudrait se pencher sérieusement là-dessus, parce que la concurrence est féroce, que ce soit pour les aéroports ou les ports.

M. Jones: Sénateur, on peut aborder la question sous un autre angle et se demander quel pourcentage du revenu brut a traditionnellement été consacré aux dépenses de fonctionnement. En supposant que ce soit 80 p. 100, alors disons que le montant est calculé sur le brut, mais qu'il n'y a aucuns frais à payer sur la première tranche de 80 p. 100 du revenu brut, après quoi les frais commencent à s'appliquer. Il n'est pas nécessaire de retoucher tellement le projet de loi, il suffit de l'inscrire dans les lettres patentes. Ce qu'on a prévu pour nous, c'est une échelle mobile qui commence à 2 p. 100 et augmente immédiatement à 3, 4, 5 p. 100, etc. Il y a différentes manières de parvenir au même but. C'est un point important.

Le sénateur Fitzpatrick: Vous ne proposez pas de réduire les revenus, vous voulez seulement une façon plus équitable de les produire.

M. Jones: Oui.

Le sénateur Milne: Où se situe le port du Fraser?

M. Pearce: Notre territoire commence à l'embouchure du fleuve Fraser et s'étend vers l'amont sur une distance d'environ 50 milles, jusqu'à Kanaka Creek, et aussi le long d'un affluent du Fraser, la rivière Pitt, jusqu'à l'entrée du lac Pitt. Nous avons 227 kilomètres de rive. Notre territoire est donc assez étendu et traverse neuf municipalités ou villes. Nous avons 600 terrains riverains loués à bail, deux principaux terminaux, plusieurs autres plus petits et nous avons un revenu annuel brut versé par les terminaux, car nous prenons un pourcentage du chiffre d'affaires des terminaux, qui varie entre 10 et 12 millions de dollars par année, et notre revenu net est d'environ 2 millions de dollars, comme le président l'a dit.

M. Jones: C'est un assez bon rendement, mais nous en avons besoin pour réinvestir.

Le sénateur Milne: Vous dites que les coûts supplémentaires qu'entraînera ce projet de loi seront supérieurs à cette marge de deux millions de dollars?

M. Pearce: Oui, absolument.

Le sénateur Milne: Votre territoire s'étend-il vers le nord, comprend-il une partie quelconque de Vancouver ou Vancouver-Nord?

M. Pearce: Non. Il y a une autre commission de port sur le fleuve Fraser, entre la nôtre et Vancouver, qui s'appelle la Commission du havre de North Fraser.

Le sénateur Milne: Recommandez-vous de devenir des promoteurs immobiliers sur vos 600 acres?

M. Jones: Oui, nous recommandons de devenir des promoteurs immobiliers industriels. Les 200 acres de terrains riverains seraient réservées aux activités portuaires, les terrains situés derrière seraient consacrés au développement industriel, dans des secteurs qui ne seraient pas nécessairement associés au port. Ce sont des terres fédérales et nous ne voulons pas qu'elles restent inutilisées. Nous ne voulons pas les redonner au gouvernement fédéral pour qu'il s'en serve à d'autres fins. Les municipalités locales manquent de terrains industriels, elles veulent que ces terrains soient mis en valeur; c'est le plus grand terrain à zonage industriel dans tout le sud-ouest de la Colombie-Britannique. C'est un bien foncier très important. Nous demandons la permission de le mettre en valeur et d'utiliser les revenus ainsi gagnés pour mettre en place des installations portuaires sur les 200 acres de terrains riverains.

Le sénateur Milne: Ce terrain de 600 acres est-il situé près de l'embouchure du fleuve?

M. Pearce: Il se trouve à Richmond; c'est un grand îlot.

M. Jones: C'était marécageux, mais nous l'avons rempli de sable au fil des ans. On ne pourrait plus faire cela aujourd'hui, mais c'est là qu'on mettait auparavant le sable de dragage. C'est un terrain amélioré.

M. Pearce: On y a déjà exploité une décharge.

Le sénateur Forrestall: Combien vaut-il?

M. Pearce: Probablement pas beaucoup, parce que c'est une ancienne décharge. Je dirais 50 000 $ l'acre. En fait, nous venons de le faire évaluer; nous voulions en connaître la valeur aux fins de certains dossiers d'affaires auxquels nous travaillons. Cela ferait au total 30 millions de dollars.

La présidente: Merci beaucoup.

Capitaine Maury R. Sjoquist, président national, Guilde de la marine marchande du Canada: Honorables sénateurs, la Guilde de la marine marchande du Canada appuie le projet de loi C-9. Nous participons à des consultations depuis maintenant quelques années et nous avons témoigné devant le comité de la Chambre des communes et participé à des démarches de lobbying. Nous appuyons les efforts déployés par le ministre actuel et par son prédécesseur en vue de faire des compromis et d'élaborer une mesure législative sensée qui, à notre avis, est bénéfique pour notre secteur.

Je suis accompagné aujourd'hui de Lawrence Dempsey, qui est secrétaire-trésorier de la Guilde de la marine marchande du Canada et de l'Association des pilotes maritimes du Canada.

L'Association des pilotes maritimes du Canada fait partie intégrante de mon organisation, la Guilde de la marine marchande du Canada. Elle fonctionne dans le cadre de notre structure et nous représentons tous les pilotes du Canada.

Je vais commencer par faire de brèves observations générales sur le projet de loi C-9 et sur le processus suivi jusqu'à maintenant dans ce dossier, après quoi je commenterai certains éléments précis du projet de loi.

La Guilde de la marine marchande du Canada représente environ 5 000 capitaines, capitaines en second, officiers de pont et pilotes maritimes du Canada, qui sont tous directement et personnellement intéressés à la santé et à la croissance de l'économie maritime du Canada. Au cours des quatre dernières années, je me suis intéressé de très près à l'évolution de la mesure législative que le comité étudie actuellement, parce que tous les membres de la Guilde de la marine marchande du Canada sont aux avant-postes de l'industrie maritime et seront directement touchés par la mesure proposée.

Nous avons participé activement aux consultations dans l'ensemble du pays, et nous avons comparu à deux reprises devant des comités parlementaires. En général, nous sommes contents du processus suivi jusqu'à maintenant et nous aimerions le voir aboutir à un résultat couronné de succès. Le projet de loi C-9 représente un solide effort de réforme qui permettra de renforcer encore davantage un système de transport maritime qui est déjà compétitif.

Comme le ministre des Transports l'a lui-même fait remarquer, ce projet de loi n'est pas parfait, mais il représente un compromis entre les divers intervenants et le gouvernement, et le résultat est un bon équilibre entre des intérêts divergents.

Comme vous le savez sans doute, le secteur maritime du Canada compte de nombreux participants, qui ont tous des points de vue différents et des intérêts souvent divergents. Il n'a certes pas été facile de mettre au point une mesure législative susceptible de recevoir l'appui de bon nombre de ces groupes, et il y a lieu de féliciter le gouvernement pour ses efforts.

Compte tenu du fait que le projet de loi aborde de nombreuses questions diverses et qu'elles ne sont pas toutes directement pertinentes pour nos membres, autant la Guilde de la marine marchande du Canada que l'Association des pilotes maritimes du Canada appuient l'adoption de ce projet de loi sans modification et sans délai. À nos yeux, le projet de loi représente un progrès. Nous croyons que tout délai ou incertitude entourant cette mesure ne serait avantageux pour personne, surtout pas pour nos membres.

Le projet de loi C-9 aborde principalement trois questions: la Voie maritime du Saint-Laurent, la réorganisation du système canadien des ports, et enfin le pilotage. Les deux premiers points ont été abordés par de nombreux autres participants au cours de ces audiences et le seront par bien d'autres encore; aussi mes observations à ce sujet seront-elles brèves.

La Voie maritime du Saint-Laurent est un élément essentiel du réseau canadien de transport maritime, et doit être maintenue. Dans la mesure où le projet de loi C-9 permet des investissements futurs et un fonctionnement plus efficient de la voie maritime, nous croyons que les changements seront positifs. À l'instar de presque toutes les compagnies de transport maritime et de tous les expéditeurs qui utilisent la voie maritime, nous appuyons ces changements. La rationalisation du réseau portuaire canadien a soulevé une controverse considérable depuis qu'on a amorcé l'étude de la politique maritime. En même temps, toutefois, la viabilité économique de tout le système maritime repose sur des ports efficaces qui répondent aux besoins de leurs clients. Pour nos membres, un réseau portuaire solide est donc essentiel. Si nous reconnaissons la difficulté extrême de la tâche, nous croyons également que le gouvernement progresse sensiblement vers la reconnaissance du réseau portuaire canadien.

La question qui est la plus pertinente pour nos membres concerne toutefois le pilotage. La Guilde de la marine marchande du Canada, par l'entremise de l'Association des pilotes maritimes du Canada, représente tous les pilotes maritimes du pays. Les pilotes maritimes jouent un rôle essentiel pour la conduite sûre et efficace des navires dans les cours d'eau et les eaux côtières du Canada.

Le projet de loi C-9 introduit des changements dans le système de pilotage maritime en vue d'en améliorer la performance et l'efficience, tandis qu'il laisse délibérément de côté d'autres aspects du système. Je voudrais faire des observations sur trois points en particulier. L'administration régionale, l'efficience et le rapport coût-efficacité, et les normes de sécurité et le professionnalisme.

La Loi sur le pilotage a été adoptée en 1971 à la suite de l'étude du pilotage la plus approfondie que l'on ait jamais faite, menée par la commission Bernier dont les travaux ont duré neuf ans. Cette loi a institué un système régional de pilotage. Ce faisant, on a délégué l'essentiel de la gestion du pilotage à quatre administrations de pilotage régionales, celles du Pacifique, des Grands Lacs, des Laurentides et de l'Atlantique. Le raisonnement qui a abouti à cette structure est simple. Le pilotage est essentiellement un service régional qui exige une connaissance approfondie des plans d'eau, des conditions météo, de la topographie et du trafic de l'endroit. De plus, au Canada, pays qui possède deux langues officielles, la mise en place d'un système régional permet l'utilisation de la langue appropriée dans chaque région.

À l'Administration de pilotage des Laurentides, la langue de travail et des communications maritimes est le français. L'Administration de pilotage des Laurentides veille naturellement à ce que les pilotes parlent couramment le français et l'anglais, ce qui est obligatoire pour obtenir le permis et la certification.

Grâce à la nature régionale du système de pilotage, des rajustements au service peuvent être apportés par les gens qui connaissent le mieux la situation locale. Les expressions «décentralisation régionale», «participation des intervenants» et «prise de décisions» sont peut-être à la mode aujourd'hui, mais la Loi sur le pilotage a intégré ces concepts il y a 25 ans. Sagement, les rédacteurs du projet de loi C-9 n'ont pas tenté d'apporter des changements à cette structure régionale. Le gouvernement, après une large consultation sur les questions du pilotage, a clairement compris l'importance de maintenir le système régional.

Dans une économie mondiale, l'efficience et un rapport coût-efficacité favorable prennent une importance accrue. Le commerce international est devenu un élément encore plus important de la croissance et du succès économique du Canada. Le transport maritime est un élément-clé du commerce. Quoique les services de pilotage ne représentent pas plus de 1 p. 100 du coût total du transport maritime, il n'en demeure pas moins que le système doit être le plus efficient possible. Les services de pilotage canadiens sont déjà plus compétitifs que ceux offerts aux États-Unis, et nous continuons de nous améliorer.

Le projet de loi C-9 comprend deux mesures importantes pour accroître l'efficience du système. Premièrement, il simplifie la structure financière des administrations de pilotage en améliorant le processus de perception des droits, permettant ainsi aux administrations d'être financièrement autonomes et de gérer la totalité de leurs affaires, sans intervention du gouvernement fédéral.

Deuxièmement, il stipule que les conflits de travail entre les pilotes et les administrations de pilotage doivent être réglés par l'arbitrage des offres finales, en cas d'échec des négociations ou de la médiation. En fait, cette disposition interdit toute grève et tout lockout, empêchant ainsi de perturber les services de pilotage, en dépit du fait que les arrêts de travail dans le pilotage au Canada ont été extrêmement rares.

C'est un changement historique au système; il bénéficie de l'appui entier et sans réserve de l'Association des pilotes maritimes du Canada. Les pilotes ont reconnu qu'ils jouent un rôle essentiel dans le système canadien de transport maritime et ils sont déterminés à faire en sorte que le système soit dirigé de façon juste, selon des règles préétablies.

Compte tenu de la pratique moderne de la livraison juste à temps des marchandises, l'absence de perturbation du travail est vitale. L'Association des pilotes maritimes du Canada a travaillé dur et de bonne foi pour s'assurer que tous les pilotes acceptent le nouveau système.

Enfin, je voudrais aborder les questions de la sécurité et des normes professionnelles. C'est de propos délibéré que j'aborde ces deux questions de front, car il est impossible d'assurer la sécurité en l'absence de normes professionnelles élevées et il faut une vigilance constante pour en assurer l'application.

La sécurité maritime ne met pas seulement en cause la rentabilité des compagnies de transport maritime ou des expéditeurs, ou encore de ceux qui voudraient calculer le risque d'accident et leur coût; elle revêt également une importance primordiale pour le public. Les conséquences de la sécurité maritime sont telles que la sécurité ne doit jamais être compromise. Un seul accident mettant en cause un pétrolier ou navire transporteur de produits chimiques pourrait avoir des conséquences catastrophiques pour la santé humaine et causer des dommages irréparables à l'environnement. En outre, le comité ne doit pas négliger le fait que même des accidents mineurs peuvent néanmoins mettre grandement en danger la vie et le bien-être des gens de mer.

La sécurité devrait être et est effectivement une préoccupation pour les pilotes, les administrations de pilotage et le gouvernement. Le seul moyen de garantir la sécurité consiste à faire en sorte que les permis et certificats de pilote soient accordés seulement aux apprentis et aux pilotes qui passent avec succès des examens écrits et oraux, faisant la preuve qu'ils sont capables de naviguer sans danger sur les plans d'eau du Canada. Ces examens sont, comme il se doit, du domaine public, ce qui garantit que le processus ne donne lieu à aucun compromis ni favoritisme.

Le projet de loi C-9 n'aborde pas directement la question de l'examen et de la reconnaissance professionnelle. Il prévoit plutôt une étude de la question et d'autres questions connexes qui doit être complétée un an après l'adoption du projet de loi.

Le ministre, en consultation avec les administrations de pilotage et les parties intéressées, assumera la responsabilité de cette étude. Les pilotes travaillent actuellement, dans le cadre des administrations de pilotage régionales, au dossier de la sécurité et du professionnalisme et ils sont confiants que le ministre établira de façon convaincante que le système fonctionne bien.

De plus, tout changement nécessaire pourrait être institué par les administrations de pilotage, ce qui respecterait la nature régionale du système de pilotage, étant donné que le système actuel a un bilan de sécurité qui est sans égal et qui fait l'envie de la communauté maritime internationale.

En terminant, je répète au comité que ce projet de loi a fait l'objet d'une vaste consultation et qu'il est le résultat d'un travail ardu et de compromis. Nous exhortons le comité à adopter le la mesure législative afin qu'elle puisse être promulguée et mise en oeuvre le plus tôt possible.

Honorables sénateurs, au nom de la Guilde de la marine marchande du Canada et de l'Association des pilotes maritimes du Canada, je vous remercie encore une fois de nous avoir donné l'occasion de prendre la parole aujourd'hui devant le comité. Nous sommes à votre disposition pour répondre à vos questions.

La présidente: Quand vous avez témoigné en octobre 1996 devant le comité permanent des transports de la Chambre des communes, vous avez dit que vous étiez satisfait du mécanisme de règlement des conflits prévu dans le processus de renouvellement des contrats de travail. Pouvez-vous nous dire comment les conflits sont réglés dans le cadre du système actuel?

M. Sjoquist: En ce qui a trait au pilotage?

La présidente: Oui.

M. Sjoquist: Dans le système actuel, on a adopté pour les pilotes entrepreneurs un système d'arbitrage des offres finales. En cas de différend, une période de conciliation est établie, mais si les parties ne parviennent pas à s'entendre, chacune des parties dépose sa position finale et c'est l'arbitre qui a le dernier mot. L'arbitre ne peut pas faire de compromis; il doit adopter le point de vue de l'une ou l'autre des parties. Manifestement, la théorie est que cette façon de faire oblige les deux parties à ne pas exagérer et à déposer des positions finales qui ne sont pas trop éloignées l'une de l'autre.

La présidente: Vous avez fait allusion dans votre exposé à l'étude sur le pilotage dont il est question à la partie 7 du projet de loi. Pourriez-vous nous en dire plus là-dessus? Vos membres y participent-ils?

M. Sjoquist: Dans un délai d'un an après la promulgation du projet de loi, une étude doit être effectuée sur certains aspects précis de la Loi sur le pilotage. L'un des aspects les plus controversés a trait au processus de reconnaissance professionnelle. Le rapport doit être présenté au ministre en moins d'un an. Cette étude n'est pas en cours. Elle ne commencera pas avant la promulgation de la loi. J'ai l'impression qu'on précisera qui y participera; en fait, on fait mention des autres parties intéressées et, chose certaine, nous sommes directement intéressés. J'ai entendu dire dernièrement que l'on n'a pas encore établi la procédure que le gouvernement veut adopter pour mener cette étude. Toutefois, quelle que soit la façon dont on choisira de procéder, nous y participerons certainement et l'industrie et toute autre partie intéressée de près ou de loin au pilotage seront une fois de plus consultées. Nous avons hâte d'y participer. L'étude du pilotage a été presque ininterrompue.

Je le répète, nous avons hâte de participer à l'étude.

Le sénateur Milne: Messieurs, au début de l'après-midi, M. Morrison, qui est président de l'Association des armateurs canadiens, nous a entretenus d'une vision compétitive pour les voies navigables des Grands Lacs et du Saint-Laurent. Il a parlé du système de positionnement global numérique et du système de navigation par feu vert. De plus, il a dit que ce système rend inutile des services de pilotage obligatoires partout dans la partie inférieure de la voie navigable.

À votre avis, ce projet de loi répond-il à vos préoccupations au sujet de ces progrès technologiques? En quoi votre association est-elle touchée par cette mesure? Que prévoyez-vous?

M. Sjoquist: Elle influe de façon draconienne sur notre association. Je sais ce que M. Morrison a dit. Nous ne partageons pas son point de vue.

Pour ce qui est de ce projet de loi, je me félicite de son libellé. Il a été rédigé de manière à s'attaquer au problème. La mesure n'est pas formulée comme si l'on préjugeait de quoi que ce soit. C'est une loi qui établit un processus d'examen et j'ose croire que ce sera là l'une des principales questions qui feront l'objet de cet examen. Tous les intervenants, dont moi-même, M. Morrison et ses collègues, auront l'occasion d'exprimer leur point de vue. Si leur point de vue est accepté, le règlement et la structure du pilotage vont changer. Je suis venu ici pour dire que nous ne sommes absolument pas d'accord avec M. Morrison.

Le sénateur Whelan: Vous m'avez peut-être entendu dire que j'habite sur les rives de la rivière Détroit. En face de ma maison, il y a un phare doté d'un dispositif de chenal Livingston. Un de mes cousins était capitaine d'un cargo des Grands Lacs. Il m'a dit une fois, quand je lui ai demandé pourquoi ce truc se déclenche toutes les 30 secondes par temps de brouillard, qu'il ne le savait pas parce que les fenêtres thermiques à double vitrage qui entourent la passerelle de navigation l'empêchaient d'entendre, même si c'était juste de l'autre côté du vitrage. Ils se fient au radar pour suivre le chenal quand ils remontent et descendent la rivière.

La Commission de port du Fraser a proposé trois modifications. On dirait que vous ne voulez aucune modification, que vous voulez que ce projet de loi soit adopté tel quel et au plus tôt.

M. Sjoquist: Je ne veux pas dénigrer la présentation de la Commission de port du Fraser, mais son intérêt est ailleurs. Dans l'intérêt de nos membres, sénateur, nous espérons assurément que la mesure proposée entrera en vigueur. Toutefois, nous ne voulons pas dénigrer le processus. S'il y a des changements qui, de l'avis du comité, doivent être apportés, alors il vous incombe de les apporter. En ce qui a trait à nos intérêts, le projet de loi s'en rapproche autant qu'il est possible. Je le répète, je ne veux pas dire que l'affaire a été facile, que ce soit pour nous ou pour tout autre participant; au contraire, l'élaboration de ce projet de loi a été difficile.

Le sénateur Whelan: Je songe aux deux principales catastrophes maritimes côtières, l'une au large du Cap-Breton et l'autre sur la côte Ouest, le naufrage de l'Exxon Valdez. Pouvez-vous me dire s'il y avait un pilote à bord de l'un ou l'autre de ces pétroliers?

M. Sjoquist: Il y avait un pilote à bord de l'un d'eux.

Le sénateur Whelan: Lequel?

M. Sjoquist: Faites-vous allusion à l'Exxon Valdez?

Le sénateur Whelan: C'était sur la côte ouest. Il n'y avait pas de pilote?

M. Sjoquist: Non, il n'y avait pas de pilote à bord, mais puisque vous avez soulevé la question, je vais y répondre. On venait de changer le règlement en Alaska à ce moment-là; il n'était plus obligatoire d'avoir un pilote à bord du navire. En fait, c'était un troisième lieutenant inexpérimenté. Il y a eu des allégations quant à la sobriété du capitaine; il a été prouvé par la suite que ces allégations n'étaient pas fondées, mais plus personne ne veut le reconnaître. C'est un fait que le capitaine est descendu dans la cale et qu'un troisième lieutenant inexpérimenté qui n'avait aucune compétence de pilote a échoué le navire.

Dans le cas de l'autre navire, au large de l'île du Cap-Breton, il y a effectivement des pilotes de l'Atlantique à l'île du Cap-Breton.

Nous ne prétendons ni ne garantissons qu'il n'y aura jamais d'accidents si l'un de nos membres est à bord, mais la formation et l'expertise locale des pilotes réduiront certainement les dommages au minimum.

Le sénateur Forrestall: Quelle est la situation de la Guilde de la marine marchande du Canada de nos jours? Vous avez dit qu'elle comptait 5 000 membres. Combien d'entre eux ont un emploi, à part le pilotage?

M. Sjoquist: Je crois que nous avons un peu plus de 4 000 membres. Malheureusement, il y a actuellement un ralentissement considérable qui est en partie attribuable à ce qui se passe en Colombie-Britannique. L'économie maritime de la Colombie-Britannique est dans le marasme. Cette situation n'a pas eu une incidence sensible sur le pilotage, en dépit du fait que le transport maritime étranger a ralenti et que le volume des exportations a baissé, mais elle a touché les autres membres de la guilde, puisque nos principaux employeurs sur la côte Ouest -- les diverses compagnies de remorqueurs comme Seaspan -- sont étroitement liés à l'industrie forestière, qui traverse actuellement une récession. Quand tous les autres Canadiens étaient en récession, eux ne l'étaient pas; aujourd'hui, la situation s'est beaucoup améliorée dans les Grands Lacs, dans l'Atlantique, dans la navigation océanique et aussi pour les traversiers, mais les choses ne vont pas très bien en Colombie-Britannique ni dans aucun secteur du transport maritime associé à l'industrie forestière. En conséquence, nous avons actuellement quelques centaines de chômeurs.

Le sénateur Forrestall: Le soi-disant «feu vert» ressemble un peu au système AWOS; c'est un excellent système, mais il a besoin de nombreux changements. Il comporte beaucoup d'imperfections. Ce système peut nous apprendre bien des choses, mais pas s'il faut prendre la mer. Malgré tout, nous avons accompli beaucoup de progrès. Auparavant, je frémissais chaque fois qu'un traversier prenait la mer en direction de Port aux Basques et qu'il devait traverser cette voie en utilisant deux fréquences radio différentes. Les navires naviguant est-ouest ne pouvaient pas parler à ceux qui naviguaient nord-sud parce qu'ils utilisaient deux fréquences radio différentes.

Le sénateur Adams: Tous les pilotes du Canada font-ils partie du même syndicat, ou bien y a-t-il des syndicats différents dans les différents ports?

M. Sjoquist: Ils sont tous membres de mon syndicat. Nous avons deux sections: une section de l'ouest et une section de l'est. Il y a sur le fleuve des pilotes auxquels la STNL fait appel dans le Nord, mais ce ne sont pas les pilotes maritimes accrédités dont je parle. Je pense qu'ils sont représentés par la SIU. Nous représentons tous les officiers de pont de tous les remorqueurs qui travaillent à la STNL dans le Nord.

Le sénateur Adams: On nous a parlé tout à l'heure du syndicat de la Voie maritime du Saint-Laurent.

M. Sjoquist: Oui.

Le sénateur Adams: Ses membres sont préoccupés par les salaires et les avantages sociaux. Les pilotes n'ont rien à voir avec cela, dans le cadre de l'étude du projet de loi C-9?

M. Sjoquist: Non, le projet de loi C-9 ne les touche aucunement à cet égard. Il y a deux sortes de pilotes. Il y a les pilotes entrepreneurs qui ont leur propre régime de retraite et il y a les pilotes employés qui travaillent directement pour les administrations et qui sont visés par le régime de retraite de la fonction publique, mais rien dans le projet de loi C-9 ne les touche. Je crois comprendre que les préoccupations du syndicat des TCA, à titre de représentant des travailleurs de la Voie maritime, concernent la succession, c'est-à-dire ce qui se passera quand ils formeront leur nouvelle entité à but non lucratif. Je sympathise assurément avec eux s'ils ont des préoccupations ou tout au moins des craintes. Je connais très peu la question puisque ce n'est pas de mon domaine, mais je crois savoir que la loi répond à leurs préoccupations en la matière. Quoi qu'il en soit, c'est une autre question qui n'est pas de mon ressort.

Le sénateur Adams: Votre salaire est-il versé directement par les propriétaires de navires ou bien par les compagnies?

M. Sjoquist: Si vous parlez des officiers qui commandent les navires, leur salaire vient directement des compagnies de transport maritime. Si vous parlez des pilotes maritimes, leur salaire est versé par les quatre sociétés d'État qui ont été constituées. Celles-ci perçoivent leur revenu des compagnies de transport maritime ou de leurs représentants; ou bien elles paient directement les pilotes, dans le cadre des pilotes employés, ou bien elles ont des contrats avec des groupes de pilotes et s'entendent avec eux sur la rémunération.

Le sénateur Adams: Avez-vous une limite d'âge pour la retraite et les avantages sociaux?

M. Sjoquist: Les limites d'âge ont été retirées de la Loi sur le pilotage il y a une dizaine d'années à cause des préoccupations relatives aux droits fondamentaux. Un pilote maritime peut maintenant continuer à travailler aussi longtemps qu'il peut passer avec succès un examen médical; cet examen médical est toutefois très rigoureux et, à partir de l'âge de 50 ans, il faut le passer chaque année. Vous serez peut-être intéressé d'apprendre qu'il y a des pilotes japonais qui sont octogénaires, mais nous ne recommandons pas cela au Canada.

Le sénateur Whelan: Quand j'étais jeune, j'ai rencontré un homme qui avait navigué à voile sur les Grands Lacs en 1908. Y avait-il des pilotes à cette époque?

M. Sjoquist: Oui, il y avait des pilotes, mais ils n'étaient pas au même endroit ni dans la même structure. En fait, le pilotage dans la région des Laurentides, qui est la plus riche en histoire du pilotage au Canada, date d'avant cela et remonte au XIXe siècle.

Le sénateur Whelan: Cet homme était timonier à bord d'un bateau. À cette époque, le timonier tenait la barre debout à découvert, et le capitaine était à ses côtés. Une fois, alors qu'il naviguait vers Montréal sur le fleuve Saint-Laurent, le courant était très fort et il y avait un phare au milieu du fleuve. Il a pris la barre et le pilote lui a ordonné de ne pas y toucher, mais de mettre le cap tout droit sur ce phare. Le courant a entraîné le navire en direction du phare. Il n'a jamais oublié l'habileté de ce pilote, parce que si on l'avait laissé faire, il aurait échoué le navire.

M. Sjoquist: C'est un exemple de la connaissance des conditions locales dont nous parlons.

La présidente: Ce n'était pas une question. Simplement une observation.

M. Sjoquist: C'était intéressant.

Le sénateur Whelan: Nous ne devons pas oublier notre histoire.

La présidente: Le témoin suivant est M. Jack Frye, membre du conseil du Windsor Port Users Group.

M. Jack Frye, président, South Western Sales; membre du conseil d'administration, Windsor Port Users Group: Je m'appelle Jack Frye et je suis le président de la société Southwestern Sales et membre du conseil de la Windsor Port Users Association, c'est-à-dire l'Association des utilisateurs du port de Windsor. Je veux profiter de l'occasion pour soulever quelques questions pertinentes à la Loi maritime du Canada, le projet de loi C-9, et à son prédécesseur, le projet de loi C-44.

En venant ici ce soir, je me suis rappelé de l'homme qui conduisait sur une route et qui a vu un patrouilleur de police s'approcher de lui par l'arrière. Quand l'agent de police s'est rapproché de lui, l'homme a accéléré. Quand il a accéléré, l'agent de police a allumé sa lumière rouge et a accéléré davantage. L'agent de police a fait entendre sa sirène, et il a accéléré encore plus. L'agent a enfin réussi à obtenir que cet enfant de chienne s'arrête et se range sur le bas côté. Il va le voir et lui dit: «Jeune homme, vous ne m'avez pas vu dans votre rétroviseur?». L'homme répond «Oui, je vous ai vu». Alors l'agent de police lui demande s'il n'avait pas vu le feu clignotant. «Oui, je l'ai vu aussi.» L'agent de police dit: «Et vous avez continué à accélérer». «Oui.» L'agent de police ajoute: «Avez-vous entendu la sirène?» L'homme rétorque «Oui, j'ai entendu la sirène également.». L'agent de police demande enfin: «Pouvez-vous bien me dire pourquoi vous teniez temps à accélérer?». Et l'homme de répondre: «Eh bien, il y a quelques semaines, ma petite amie m'a quitté pour un agent de la PPO, et je pensais que ce dernier essayait de me la ramener.»

Cela dit, je voudrais maintenant revenir au projet de loi C-44 dans sa forme originale, comme il nous avait été présenté. La principale question que cette mesure posait concernait le fait que l'utilisateur final, celui qui payait, devait avoir son mot à dire.

À notre avis, cette mesure législative se fait attendre de longue date et, en conséquence, elle est d'une importance vitale pour les utilisateurs commerciaux du port de Windsor.

Plus de 5,6 millions de tonnes de marchandises ont été manutentionnées sur les quais du port de Windsor l'année dernière, soit une augmentation de près de 14 p. 100 par rapport à 1996. Une grande partie de ces marchandises était en vrac, surtout du gravier et du sel. J'ai l'honneur de représenter bon nombre des expéditeurs, des fournisseurs de services maritimes et des autres entreprises commerciales qui tirent leur subsistance, directement ou indirectement, du port de Windsor. Ce groupe de compagnies emploie des centaines de gens à Windsor et a investi des millions de dollars dans les installations portuaires.

Il y a quatre ans, quand le gouvernement fédéral a commencé pour la première fois à envisager d'apporter des changements dans la façon dont le secteur maritime canadien est administré, nous, à Windsor, à l'instar de bien d'autres qui ont besoin d'un secteur maritime compétitif, avons souscrit à l'orientation prise par le gouvernement en faveur d'un système réformé de services et d'infrastructures maritimes réglementé, contrôlé et exploité par le fédéral. C'était le projet de loi C-44. Nous souscrivions à l'intention du gouvernement de mettre en place un système fondé sur le principe voulant que l'utilisateur, celui qui paye, ait son mot à dire dans la gestion de l'infrastructure maritime sous l'égide du gouvernement.

Je voudrais d'abord faire une observation sur ce principe. C'est une excellente idée, à laquelle souscrivent sans réserve tous ceux qui paient des millions de dollars par année en frais d'utilisation au gouvernement fédéral. Notre grief, c'est que nous ne voyons vraiment que l'un des éléments de l'équation, celle qui concerne le paiement.

Les utilisateurs croient qu'il est avantageux pour les deux parties, le gouvernement et l'industrie, d'avoir une tribune ouverte et permanente où l'on peut discuter de la façon dont les services fournis par le gouvernement peuvent être mieux dispensés. À titre de clients de bon nombre de ces services, nous croyons avoir beaucoup à dire sur la façon dont ces services doivent être dispensés, gérés et financés, à supposer qu'ils doivent l'être. Quand l'utilisateur payeur a son mot à dire, il est en droit d'exiger que le gouvernement l'écoute et agisse en conséquence.

J'en arrive maintenant au projet de loi à l'étude. Nous en appuyons certains éléments, mais pas tous. Dans l'ensemble, nous nous félicitons des efforts déployés par le gouvernement pour établir un environnement plus commercial pour la Voie maritime du Saint-Laurent en instaurant la gestion directe par les usagers. J'insiste sur le fait que les utilisateurs de la Voie maritime du Saint-Laurent participent directement aux travaux de son conseil d'administration et qu'ils constituent aussi la majorité des membres du conseil.

Aujourd'hui, cependant, je voudrais discuter de deux questions qui, aux yeux des utilisateurs des ports, constituent de graves lacunes de ce projet de loi. Ces deux préoccupations ont trait à la régie proposée d'une future administration portuaire de Windsor, aux articles 8, 14 et 16 du projet de loi. Nos craintes portent sur la position que les utilisateurs du port vont occuper dans le processus décisionnel du futur port de Windsor.

Je voudrais premièrement traiter de la difficulté que nous entrevoyons au paragraphe 16e) du projet de loi. Cette disposition énumère les personnes qui ne peuvent pas siéger au conseil d'administration des administrations portuaires du Canada. Le paragraphe e) stipule qu'une personne qui est administrateur, mandataire ou employé d'une personne qui est utilisateur du port ne peut pas siéger à titre d'administrateur de ce port. Les utilisateurs du port de Windsor s'opposent catégoriquement à l'exclusion, décrétée par le gouvernement, des utilisateurs du port qui ont investi des millions de dollars dans la communauté portuaire et qui possèdent l'expérience commerciale courante d'une industrie compétitive et complexe pour avoir siégé à des conseils d'administration.

Comme je l'ai dit tout à l'heure, les marchandises qui transitent dans le port sont pour l'essentiel des matériaux en vrac de faible valeur. En fait, dans le cas du gravier que ma compagnie transporte, le coût du transport est parfois supérieur à la valeur de la marchandise. Dans le commerce du sel, produit que l'on vend essentiellement aux administrations municipales, provinciales et étatiques et dont le port de Windsor manutentionne plus de 1,7 million de tonnes par année, une différence d'un cent ou deux dans le prix livré peut faire la différence entre conclure un marché et rater une affaire.

Sénateurs, c'est là la dure réalité financière d'un secteur où la concurrence n'a jamais de répit. À Windsor, comme dans tous les autres ports, chaque sou compte si nous voulons accumuler des dollars. Nous estimons que la présence d'utilisateurs du port au conseil d'administration nous permet d'apporter notre bagage de compréhension pratique du secteur maritime et du besoin fondamental de réduire les coûts au minimum, ce qui ne peut qu'aider à assurer une bonne gestion du port à l'avenir.

Le gouvernement a déclaré que l'on avait exclu les utilisateurs de port en raison de la possibilité de conflits d'intérêts dans le cas d'un utilisateur direct qui siégerait au conseil. La pratique courante qu'ont toujours suivie les politiciens, les ministres et les titulaires de charges publiques, quand il y a conflit d'intérêts ou apparence de conflit d'intérêts, consiste pour la personne qui est en conflit à se déclarer en conflit d'intérêts, à se retirer de tout débat sur la question et à s'abstenir de voter. Le raisonnement du gouvernement est que le seul moyen de protéger les actifs de l'État est d'exclure les utilisateurs de port des conseils d'administration des APC.

Le groupe des utilisateurs du port de Windsor conteste la validité de cet argument, et il nous suffit de nous reporter au projet de loi pour prouver que nous avons raison. Le projet de loi C-9 renferme en effet de nombreuses dispositions qui garantissent une administration ouverte, exclusive et transparente. Entre autres dispositions, le projet de loi prévoit qu'il doit y avoir des réunions publiques annuelles, des états financiers publics et vérifiés, des lettres patentes que le ministre peut modifier, et un énoncé clair des obligations juridiques et fiduciaires des administrateurs; tout cela devrait offrir à l'État une protection suffisante et nous estimons que cette protection devrait permettre aux utilisateurs directs de faire bénéficier les conseils portuaires de leur expertise.

De plus, dans le cadre des lettres patentes des APC, une série de lignes directrices en matière de conflits d'intérêts viendra compléter tout un ensemble de directives légiférées pour assurer la protection.

La deuxième préoccupation à l'égard du projet de loi, si les utilisateurs de port ne peuvent pas siéger au conseil des APC, concerne les articles 8 et 14. Ces dispositions décrivent le processus de nomination des administrateurs membres des conseils des APC de manière à assurer la représentation de divers intérêts, notamment les trois niveaux de gouvernement et des représentants des utilisateurs de port.

Plus précisément, nous avons énormément de difficulté à accepter l'article qui prescrit un processus permettant de nommer au conseil des représentants des utilisateurs. Cette disposition habilite le gouverneur en conseil à nommer des personnes désignées par le ministre en consultation avec les utilisateurs. Les deux membres du conseil qui représentent les intérêts municipaux et provinciaux ne sont pas tenus de passer par ce processus d'approbation ministérielle. Nous trouvons cela inacceptable. Nous croyons que si les utilisateurs du port sont expressément exclus du conseil, le processus de consultation décrit aux articles 8 et 14 doit être plus souple pour permettre d'accommoder les souhaits de la communauté des utilisateurs du port. Nous vous pressons instamment de reformuler la disposition pour donner aux utilisateurs entière discrétion dans le choix de la liste des candidats remise au ministre, le ministre devant ensuite choisir à même cette liste les représentants des utilisateurs de port qui feront partie du conseil.

Nous croyons comprendre qu'il y a des critères spécifiques relativement aux qualités requises pour devenir membres du conseil. Nous avons pleinement l'intention de proposer des personnes hautement qualifiées pour nous représenter à ces conseils. Ce qui nous préoccupe grandement, c'est que la liste des candidats transmise au ministre par les utilisateurs de port doit être approuvée dans le cadre d'un processus politique.

Il est prévu que quatre représentants des utilisateurs du port siégeront au conseil d'administration d'une APC; nous proposons fermement qu'on nous autorise à proposer les noms de huit personnes qualifiées pour ces quatre postes. Si, pour une raison ou une autre, le ministre n'arrive pas à trouver quatre personnes qualifiées dans cette liste de huit, nous souhaitons avoir la possibilité de proposer une nouvelle liste de noms, jusqu'à ce que l'effectif complet des représentants des utilisateurs soit nommé au conseil d'administration de l'APC à même cette liste de candidats.

Je vous remercie de nous avoir consacré de votre temps aujourd'hui; nous sommes maintenant prêts à répondre à vos questions.

Le sénateur Bryden: Une bonne partie de votre exposé portait sur une question dont j'ai discuté avec un autre témoin tout à l'heure; il s'agissait de la composition de l'administration de la voie maritime, et maintenant vous nous parlez de la composition du conseil de l'Administration portuaire du Canada. Je n'ai pas obtenu de réponse très claire, pas parce que les témoins éludaient la question, mais simplement parce qu'ils ne connaissaient pas la réponse. Sauf erreur, vous avez dit que l'administration de la voie maritime peut comprendre un administrateur ou même un agent d'un utilisateur de la voie maritime, n'est-ce pas?

M. Frye: Rien ne leur interdit de siéger au conseil de la voie maritime.

Le sénateur Bryden: Tandis que, aux termes de la loi qui régit l'Administration portuaire du Canada, ils n'ont pas le droit de siéger au conseil de l'APC?

M. Frye: Exact.

Le sénateur Bryden: Comment expliquez-vous cette différence?

M. Frye: Je n'ai pas d'explication, mais j'estime que c'est injuste de le permettre pour l'un des conseils. On ne nous permet même pas de choisir les gens que nous voudrions voir siéger au conseil et qui ne sont pas membres de nos sociétés. Nous pouvons seulement proposer des candidats, si je comprends bien le texte actuellement à l'étude. Par la suite, le ministre peut choisir des gens à même notre liste, mais il n'est pas tenu de le faire. Il peut choisir quelqu'un à même cette liste et quelqu'un d'autre, n'importe qui. Je trouve que c'est loin de permettre l'application du principe voulant que l'utilisateur payeur ait son mot à dire. Je suis profondément convaincu que nous faisons l'objet de discrimination à cet égard.

Le sénateur Whelan: Le comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts a récemment tenu des audiences dans l'Ouest pendant deux semaines. Pendant ces séances, on a beaucoup discuté du choix des membres du conseil de la Commission canadienne du blé. La commission sera réorganisée selon le modèle du secteur privé. Le gouvernement nommera cinq administrateurs et les agriculteurs en éliront dix. Ils insistent beaucoup sur l'élection de leurs représentants. Vous nous dites que vous n'avez même pas votre mot à dire.

M. Frye: Non, monsieur, nous ne l'avons pas. Nous pouvons seulement proposer des noms au ministre, qui peut choisir des gens à même la liste, sans toutefois être tenu de le faire.

Le sénateur Whelan: Votre compagnie oeuvre principalement dans le secteur des granulats?

M. Frye: Oui.

Le sénateur Whelan: Dans combien de ports faites-vous affaire?

M. Frye: Nous faisons affaire dans le port de Sarnia et à Sombra. Nous avons deux bassins à Windsor et il y a le port de Kingsville.

Le sénateur Whelan: Cela fait cinq.

M. Frye: En effet.

Le sénateur Whelan: Vous n'aurez pas votre mot à dire, même si vous êtes un utilisateur des installations portuaires, parce qu'il pourrait y avoir conflit d'intérêts.

M. Frye: Oui, monsieur. Apparemment, les seules personnes qui peuvent corriger cet état de choses sont celles qui sont assises ici, dans cette salle.

Le sénateur Whelan: Vous avez entendu ce que l'Association des pilotes vient de dire. Elle ne veut pas que nous fassions le moindre changement et demande que nous adoptions ce projet de loi tel quel.

M. Frye: Nous demandons seulement d'être traités équitablement. Je ne pense pas que l'un ou l'autre d'entre vous voudrait échanger sa place avec les utilisateurs de port et voir quelqu'un choisir arbitrairement des noms. Si je vous donnais huit noms, vous pourriez en choisir quatre. Si vous étiez obligés de suivre ce processus et s'il y avait un processus accessoire, les utilisateurs de port seraient très satisfaits.

Le sénateur Whelan: Je connais bien bon nombre de ces ports. Kingsville, c'est sur le lac Érié. Il fallait le draguer très souvent. Comme utilisateur, dans le cadre de ce nouveau système, serez-vous obligés de payer des frais supplémentaires pour le dragage?

M. Frye: C'est intéressant que vous souleviez ce point. Le ministère des Transports va se débarrasser de ce port.

Oui, il faut faire du dragage tous les deux ou trois ans dans ce port. C'était un coût permanent que le gouvernement absorbait. Le port n'arrivait pas tout à fait à faire ses frais.

À titre d'utilisateurs du réseau portuaire, nous pensons que nous serons en mesure de remettre ce port sur la voie de la rentabilité. Nous croyons que nous pourrons mettre en place un fonds pour éventualités suffisant pour répondre à tous les besoins de ce port. Une fois ce fonds créé, nous pensons même pouvoir abaisser certains tarifs dans ce port et ce, parce que nous sommes des utilisateurs du port.

Le sénateur Whelan: Mais vous n'aurez pas votre mot à dire.

M. Frye: Les utilisateurs du port de la ville de Kingsville seront copropriétaires du port. L'Association des utilisateurs du port de Kingsville sera copropriétaire et fera des rajustements dans ce port.

Le sénateur Whelan: La corporation de la ville de Kingsville?

M. Frye: Oui, et les utilisateurs du port.

Le sénateur Whelan: Êtes-vous satisfaits de cette proposition?

M. Frye: Je crois que oui. Elle indique que les utilisateurs du port représentent un instrument essentiel que le gouvernement doit utiliser. Si je siégeais au conseil d'administration d'un port, j'aurais à coeur de défendre les intérêts de ce port. Si je prenais une décision, il me faudrait défendre ma décision devant les gens au nom desquels je l'ai prise, tout à fait comme vous devez le faire.

Le sénateur Whelan: Pour la gouverne des sénateurs, je précise que le port de Kingsville est un port de pêche qui possède des installations pour les bateaux de pêche. On y trouve aussi des installations pour le gros traversier qui fait la navette vers l'île Pelée. À une époque, c'était un port commercial pour le charbon et le gravier.

M. Frye: C'est exact, monsieur.

Le sénateur Forrestall: Vous avez mentionné trois ou quatre ports. Commençons par Kingsville; est-ce un port où l'on manutentionne un seul produit?

M. Frye: Non, c'est un port où transitent des marchandises diverses. Il peut approvisionner la région en charbon ou en granulats. Comme le sénateur Whelan l'a dit, le port comprend aussi un secteur important pour la pêche. De plus, c'est le point de départ du traversier qui va à l'île Pelée. Il s'y trouve donc trois composantes principales.

Le sénateur Forrestall: Pourriez-vous décrire les activités des trois autres ports?

M. Frye: Windsor est notre principal port. Il se fait très peu de dragage à Windsor; en fait, c'est un port fluvial. Ce n'est pas vraiment un port dans le vrai sens du terme.

La Commission de port de Windsor existe depuis de nombreuses années. Nous sommes présents au port de Windsor depuis 22 ans. Nous avons contribué au fonds de la Commission de port de Windsor pendant chacune de ces années. Jamais un seul dollar n'a été consacré à quoi que ce soit qui pourrait répondre aux besoins de notre compagnie dans ce port. Nous avons continué de payer, mais nous n'avons pas eu grand-chose à dire dans la répartition des fonds.

Le sénateur Forrestall: Je suppose que vous en auriez aussi à dire au sujet des deux autres ports. Sarnia est essentiellement un port pétrolier, n'est-ce pas?

M. Frye: Sarnia est un port pétrolier. Il y a toutefois deux grands docks pour granulats et des installations pour les céréales. Sarnia et Windsor sont des ports essentiels. On manutentionne à Windsor des céréales, du sel et du combustible. Les grands navires laquiers se ravitaillent en carburant dans le port de Windsor. Du sable est déchargé à Windsor pour les moules de coulage chez Ford. On décharge aussi à Windsor des matériaux destinés à l'usine de produits chimiques d'Amherstburg, où l'on fabrique du calcium liquide.

Le sénateur Forrestall: Est-il question que le gouvernement fédéral procède à l'aliénation de ces ports?

M. Frye: Je ne le pense pas, et je ne pense pas que cela devrait se faire. Sarnia et Windsor correspondent tous les deux aux critères d'Administration portuaire du Canada (APC) pour ce qui concerne l'établissement. Nous voudrions avoir des représentants au conseil, comme vous vous en rendez compte.

Le sénateur Forrestall: Vous avez fait une distinction, disant que Kingsville est candidat à l'aliénation, tandis que les autres ne le sont pas.

M. Frye: Oui.

Le sénateur Whelan: Je voudrais que les sénateurs sachent que le terminal de Morton est immense et qu'on y fait du carénage.

M. Frye: C'est exact. On répare les navires dans le port de Windsor.

Le sénateur Whelan: Vous avez aussi votre autre installation à Riverside.

M. Frye: C'est également un dock pour granulats. Vous avez raison, sénateur. De grandes quantités d'acier sont manutentionnées dans le terminal de Morton et expédiées par camion ou train. J'aurais dû aussi mentionner le bois. On manutentionne de grandes quantités de bois d'oeuvre dans ce port. Il arrive par rail et est transbordé à bord des navires, ou bien apporté jusqu'aux navires par camion.

Il y a de nombreuses activités dans ce port qui sont essentielles et je peux vous dire que les utilisateurs du port de Windsor ont voté massivement -- je pense que c'était dans une proportion d'à peu près sept contre deux -- en faveur de l'initiative fédérale pour l'établissement de l'APC. S'il nous faut payer, nous aimerions pouvoir participer.

M. Brennan, conseiller spécial du comité: En réponse à une demande du sénateur Whelan, je lis le texte de l'article 8:

(1) Le ministre peut délivrer [...] s'il est convaincu que les conditions suivantes sont réunies:

a) le port est financièrement autonome et le demeurera vraisemblablement; b) il présente une importance stratégique pour le commerce du Canada; c) il est rattaché à une ligne principale de chemins de fer ou à des axes routiers importants; d) il a des activités diversifiées.

Le sénateur Forrestall: Il y a donc tout un chapelet de ports qui s'échelonnent le long de ce tronçon de rivière?

M. Frye: Dans le port de Windsor, c'est surtout par autocurage et les navires peuvent accoster à presque n'importe quel quai de ce port. Nos matériaux sont acheminés par navires à autodéchargement dotés d'une grue d'une portée de plus de 250 pieds qui permet de décharger les matériaux sur le quai dans une pile cylindrique. C'est assez extraordinaire.

Le sénateur Forrestall: À quelle distance se trouve Pointe Pelée de votre port le plus oriental?

M. Frye: Pointe Pelée se trouve à 10 milles de Kingsville. C'est notre port le plus à l'est. De là, on va vers l'ouest ou le nord-ouest, au fond du lac Érié et dans la rivière Détroit, où se trouve Windsor, et ensuite on traverse le lac St. Clair et l'on navigue dans la rivière St. Clair. À l'embouchure de la St. Clair, juste avant d'entrer dans le lac Huron, se trouve notre dock de Sarnia.

Le sénateur Forrestall: Quelle distance y a-t-il en tout, d'un bout à l'autre?

M. Frye: Probablement une centaine de milles.

Le sénateur Forrestall: C'est un vaste territoire. Vous finirez par ressembler à Rotterdam.

M. Frye: Dans notre entreprise, nous avons des gestionnaires de docks. Chacun de ces gestionnaires de docks téléphone chaque jour au bureau principal, où l'on règle tout problème qui se pose dans l'un ou l'autre des ports.

Le sénateur Forrestall: Si l'un de ces ports est aliéné, cela ne perturbera pas vos activités courantes, mais qu'arriverait-il si l'on procédait à l'aliénation de deux ou trois d'entre eux?

M. Frye: Je crois que seul le port de Kingsville correspond aux critères pour l'aliénation. Sarnia et Windsor ont clairement les qualités requises pour obtenir le statut d'APC. Nous serons, par l'entremise de l'Association des utilisateurs du port de Kingsville, copropriétaires de ce port après son aliénation.

La présidente: Merci de votre présentation.

Nos témoins suivants représentent la Commission de port d'Oshawa; ce sont Mme Donna Taylor, présidente-directrice générale, et M. Donald Walmsley, président.

M. Donald Walmsley, président, Commission de port d'Oshawa: Merci de nous avoir permis de témoigner devant vous ce soir.

La Commission de port d'Oshawa est l'une de neuf commissions de port au Canada. Le port est situé à 35 kilomètres à l'est de Toronto et peut recevoir les plus grands navires pouvant naviguer dans la voie maritime. Le port d'Oshawa a été et demeure un port économiquement rentable qui donne un avantage compétitif à de multiples utilisateurs qui se livrent au commerce international et interprovincial. Les compagnies implantées sur les terrains du port donnent à la municipalité et à la région des emplois et des possibilités d'affaires, et leur paient des impôts fonciers.

Les marchandises qui transitent dans notre port sont très diversifiées, comprenant notamment de l'acier d'importation et d'exportation, du chlorure de calcium liquide, de l'asphalte, de la potasse et divers articles comme des réservoirs de filtration destinés à Taiwan. Cette année et l'année dernière, nous avons expédié des chars d'assaut au Chili.

J'ai lu le compte rendu des témoignages présentés aux membres du comité permanent le 2 avril 1998 et il m'apparaît qu'on vous a donné des renseignements faux et trompeurs au sujet du port d'Oshawa; je voudrais donc apporter une rectification. Pour que notre exposé d'aujourd'hui ait la moindre crédibilité, il est important d'établir le contexte permettant de comprendre la situation du port d'Oshawa, puisque vous entendrez jeudi les représentants de la Ville d'Oshawa.

Le sénateur Bryden a posé une question:

Il n'y a pas le long de la voie maritime de ports qui ne sont pas des APC, n'est-ce pas?

En réponse, M. Lewis Ranger, sous-ministre adjoint des Politiques à Transports Canada, a répondu:

Il y a un port, Oshawa, qui ne répond pas aux exigences et qui sera traité différemment.

Nous protestons contre cette affirmation car le paragraphe 6(2) du projet de loi C-9 autorise le ministre à modifier l'annexe en ajoutant de nouvelles administrations portuaires. Nous avons fait l'objet d'un examen préliminaire rapide de la part de Nesbitt Burns, qui s'est fondé sur les états financiers de 1994 pour conclure en ces termes:

Dans le cas d'Oshawa, la capacité du port d'utiliser les propriétés portuaires est sérieusement mise en doute, compte tenu de l'audition en cours devant la Commission des affaires municipales de l'Ontario. Cet obstacle a beaucoup nui à la capacité du port de créer de nouvelles sphères d'activité et ce port est actuellement peu achalandé. De plus, le port fait face à des dépenses de dragage importantes, supérieures aux réserves existantes.

Cet énoncé est désuet et fondé sur des renseignements périmés. Nous avons l'intention de demander une réévaluation sur la base des faits suivants: la Commission des affaires municipales de l'Ontario, à l'issue de l'audience tenue en novembre 1996, a rendu une décision favorable à notre port. Nous avons maintenant un zonage qui permettra un développement futur important de notre port. C'était un obstacle important au moment de l'étude de Nesbitt Burns parce que l'affaire était encore en suspens.

Deuxièmement, nous avons évalué, de concert avec les techniciens de notre port, les exigences à long terme du port en matière de dragage et nous avons élaboré un plan financièrement acceptable pour l'élimination future des déblais de dragage. Troisièmement, le tonnage manutentionné dans le port a augmenté de 73 p. 100 depuis l'évaluation de 1994 et augmentera encore en 1998.

L'application régulière de la loi permet au port d'Oshawa de devenir une administration portuaire. Je tiens à réitérer qu'aucune décision n'a été prise au sujet du port d'Oshawa. Pour le moment, le processus d'aliénation n'a pas été enclenché dans notre cas. Nous avons l'intention de demander le statut d'administration portuaire aux termes du paragraphe 6(2) et nous nous attendons à faire l'objet d'une évaluation impartiale.

C'est pourquoi la Commission de port d'Oshawa s'intéresse énormément au projet de loi C-9 et a des préoccupations à ce sujet. Nous voudrions aborder certaines dispositions du projet de loi qui, à notre avis, ne sont pas conformes à l'intention du législateur de favoriser la compétitivité du réseau portuaire canadien par une rationalisation de gestion.

Par exemple, l'alinéa 8(2)h) prévoit le versement d'une redevance calculée sur le revenu brut de l'administration portuaire. Si vous avez une impression de déjà vu, c'est que vous avez déjà entendu quelqu'un vous parler de cette question du revenu brut. Nous prévoyons que de nombreux représentants de ports vous en parleront et nous ne sommes pas les seuls à dire que si le port doit fonctionner dans un environnement commercial, alors nous proposons d'adopter les pratiques commerciales courantes, qui consisteraient à payer des dividendes sur le revenu net ou sur les bénéfices non répartis, après défalcation de toutes les dépenses de fonctionnement habituelles.

Nous vous demandons de recommander que l'alinéa 8(2)h) soit modifié de manière à stipuler que les frais doivent être payés sur le revenu net du port et non pas sur son revenu brut.

De plus, aux termes de nouvelles initiatives gouvernementales, le port d'Oshawa doit maintenant assumer des dépenses afférentes à des services qui étaient auparavant fournis par le gouvernement fédéral, notamment le dragage. De plus, comme il est indiqué à l'article 182.1, le port sera probablement assujetti à des subventions en remplacement de taxes, alors qu'en tant que commission de port, nous n'avons jamais eu à en payer auparavant.

Il est important de tenir compte de l'effet cumulatif de tout cela sur l'accroissement des coûts des ports au moment d'élaborer les lettres patentes et d'établir le montant des frais calculés d'après le revenu net.

Par conséquent, nous recommandons que le paragraphe 8(2) permette d'inscrire dans les lettres patentes la possibilité de l'implantation graduelle des frais sur le revenu net et des subventions en remplacement de taxes, le tout devant être déterminé au cas par cas, après évaluation de l'incidence, sur chaque port, de tous les nouveaux coûts pertinents qui doivent maintenant être assumés par les ports.

L'article 28 du projet de loi énonce les attributions d'une administration portuaire. Cet article est également très important à nos yeux. Nous sommes préoccupés par le fait que cette loi limite notre sphère d'activité et ne tient aucunement compte du fait que notre port possède actuellement des terrains qui pourraient être mis en valeur à des fins industrielles et commerciales.

La décision de la Commission des affaires municipales de l'Ontario, dont j'ai parlé tout à l'heure, identifie clairement un secteur de zonage industriel de prestige situé immédiatement à l'est des installations portuaires proprement dites. Le zonage approuve notamment l'industrie légère, les activités commerciales et l'entreposage. La commission consacrera les revenus tirés de cette propriété au développement portuaire.

Le libellé actuel de l'article 28 annulerait la décision de la Commission des affaires municipales de l'Ontario et éliminerait cette source potentielle de revenu pour le port. Nous estimons que c'est là un point important. Nous avons pris l'initiative d'acheter des terrains avec l'intention de créer un parc industriel afin de générer des revenus pour le port.

La commission possède également et exploite une marina et administre une cinquantaine d'acres sur le quai de l'ouest qui sont destinées à de futurs aménagements dans les secteurs du commerce et des loisirs. La commission perdrait les revenus qu'elle prévoyait tirer de ces terrains. Notre port a toujours fonctionné selon la formule d'un locateur, fournissant des terrains et de l'infrastructure devant être utilisés et mis en valeur par le secteur privé. La décision favorable de la Commission des affaires municipales de l'Ontario ouvre la porte à de nombreuses possibilités de développement futur que nous n'avons même pas fini d'inventorier.

Nous souscrivons donc à la recommandation qui vous a été faite aujourd'hui par nos collègues du port du Fraser et nous réitérons notre demande de modification du paragraphe 28(2), de manière que l'administration portuaire soit habilitée à se livrer à des activités dans les domaines du transport maritime, de la navigation, du transport de voyageurs et de marchandises, de la manutention et de l'entreposage de biens, dans le cadre d'activités commerciales et industrielles, n'incluant pas l'exploitation d'hôtels, de restaurants, de casinos ou de condominiums, sauf autorisation contraire du ministre, activités qui généreraient les fonds nécessaires au futur développement de l'infrastructure, et toute autre activité énoncée dans les lettres patentes et jugée nécessaire au fonctionnement du port.

Le port d'Oshawa est au service de ses utilisateurs depuis plus de 30 ans en leur fournissant une solution de rechange compétitive à d'autres ports et à d'autres modes de transport. La marina et la rampe publique de mise à l'eau répondent aux besoins de la collectivité depuis 20 ans. La planification exhaustive de l'utilisation des terrains par le port reflète le développement futur des terrains portuaires, conformément à la décision rendue par la Commission des affaires municipales de l'Ontario, et correspond à la vision établie par la ville d'Oshawa et aux besoins futurs de la municipalité régionale de Durham.

Nous croyons que le port peut continuer à répondre aux objectifs socio-économiques locaux, régionaux et nationaux, sous réserve d'un projet de loi C-9 amendé dans le sens que nous venons de décrire.

Nous vous remercions de nous avoir donné l'occasion de comparaître devant vous ce soir et nous nous ferons un plaisir de répondre à toute question que vous pourriez avoir au sujet du port d'Oshawa.

Le sénateur Bryden: Je vous remercie d'avoir traité des observations faites par le sous-ministre adjoint, mais vous m'avez coupé l'herbe sous le pied en m'empêchant de poser ma question la plus percutante. On m'avait laissé entendre qu'un seul port serait traité différemment. Je comprends maintenant la situation que vous avez décrite.

Étiez-vous présent quand les représentants de la Commission de port du Fraser ont fait leur exposé?

M. Walmsley: Oui.

Le sénateur Bryden: Ils obtiennent une exonération des frais de dragage d'une durée de sept ans. La présidente me laisse seulement poser une ou deux questions et je n'ai donc pas pu aller au fond des choses. Avez-vous essayé d'obtenir une telle exonération?

M. Walmsley: Absolument, sénateur, mais en vain. Le dragage nous coûte environ 700 000 $ par année, selon la quantité de déblais à draguer. On ne nous a fait aucun cadeau. On ne nous a pas accordé le moindre délai. Quand on nous a avisés que nous devions nous occuper de notre propre dragage, nous n'avons réussi qu'à négocier un partage moitié-moitié du coût du dragage cette année-là, parce que cette responsabilité nous est tombée dessus subitement.

Pour les dragages ultérieurs, nous avons dû payer 100 p. 100 des coûts. Selon le coût de l'enlèvement des déblais de dragage, les dépenses oscillent entre 450 000 $ et 700 000 $. Nous ne pouvons pas déverser nos déblais de dragage dans le lac Ontario, comme les gens du fleuve Fraser peuvent le faire dans l'océan Pacifique. La raison en est que le ruisseau d'Oshawa, qui se déverse dans le bassin du port, est pollué. À cause de cette pollution, nous devons construire une installation de retenue des déblais de dragage pour pouvoir les traiter par la suite. Nous ne pouvons pas les déverser ailleurs. Cela nous coûte plus cher. J'aimerais bien que tout soit bien propre afin qu'on puisse seulement les enlever et aller les déverser ailleurs, dans une décharge, ou simplement les déplacer latéralement. Ce serait bien de pouvoir draguer dans le chenal une sorte de chasse-neige et de simplement déplacer latéralement les déblais, mais nous n'avons pas le droit de le faire, de sorte que nos coûts sont un peu plus élevés. Nous n'avons pas réussi à obtenir le moindre allégement à cet égard.

Le sénateur Bryden: Avez-vous discuté avec des fonctionnaires du ministère des Transports de la possibilité d'être transformés en APC, depuis cette décision de la Commission des affaires municipales de l'Ontario?

M. Walmsley: Pas encore, mais nous allons présenter d'ici 15 jours notre une demande pour devenir une APC. Il nous a fallu commencer par accorder nos violons, pour ainsi dire. Nous voulons d'abord que la décision de la commission soit une affaire classée. Nous voulons pouvoir dire à nos utilisateurs du port: «Oui, notre port est viable. Vous n'avez pas à vous inquiéter, nous ne serons pas transformés en parc ou en espace vert ou en piste cyclable. Ce port est viable et important.» Grâce à nos démarches dans la communauté des transporteurs maritimes, nous avons obtenu l'année dernière une forte augmentation du tonnage. Les gens reviennent à Oshawa et notre port ne s'en porte que mieux. C'est pourquoi nous aurons de nouveau cette année une très bonne année.

Nous manutentionnons de l'acier d'outre-mer. Nous importons et exportons de l'acier. Nous exportons des produits manufacturés du Canada.

Comme je l'ai dit, le port d'Oshawa se trouve à 35 kilomètres à l'est de Toronto. L'importance du port d'Oshawa pour le Canada et pour l'Ontario tient à ce qu'il peut manutentionner des marchandises générales, des produits manufacturés. On ne peut pas transporter d'énormes chars d'assaut le long de la rue Yonge. On ne peut pas les transborder dans le port de Toronto. C'est pourquoi des compagnies manufacturières de Toronto et du nord et de l'est de Toronto apportent leurs produits jusqu'au port d'Oshawa pour les transborder. Nous sommes très optimistes quant à l'avenir du port d'Oshawa, parce que nous croyons que l'Ontario connaîtra une bonne croissance. Nous sommes convaincus qu'il y aura plus d'industries à l'avenir en Ontario, pas moins. À Toronto, tout le secteur riverain est en pleine croissance. Vous avez tous vu les gratte-ciel qu'on y construit. Oshawa devient de plus en plus important pour l'Ontario et pour notre pays, maintenant que nous avons notre administration en place, que l'on a rendu cette décision au sujet de l'avenir de nos terrains et que nous réussissons à attirer des clients. Nous avons reçu des gens qui sont venus du Texas pour discuter de l'implantation d'une nouvelle usine sur nos terrains portuaires. Ces gens qui viennent nous voir veulent construire des usines, veulent voir un parc industriel ayant un accès maritime. Nous nous sommes occupés de la question des déblais de dragage. Nous avons réglé le problème des installations de retenue des déblais de dragage.

Nous en avons calculé le coût et avons trouvé une façon de régler la question, etc. Nos techniciens s'en sont occupés. Nous pouvons maintenant offrir un meilleur bilan financier à quiconque voudra examiner notre port. Environnement Canada étudie les ruisseaux au nord et à l'ouest de notre port, pour vérifier le niveau de pollution émanant de la ville d'Oshawa. Tout se passe très bien et j'en suis très heureux.

Le sénateur Forrestall: Comment s'explique l'augmentation de 79 p. 100?

M. Walmsley: Essentiellement par le fait que nous avons réussi à convaincre les utilisateurs du port.

Le sénateur Forrestall: Avez-vous cherché activement à recruter des clients?

M. Walmsley: Absolument; il y a aussi le fait que nous avons de bonnes installations de manutention. Nous avons accès à un bon réseau routier et à un bon réseau de distribution.

Le sénateur Forrestall: Votre surplus est détourné vers l'est. La question a été soulevée à quelques reprises. Je me demande si cela a un rapport avec la Loi ontarienne sur les activités commerciales et industrielles, qui stipule:

[...] ne comprend pas l'exploitation d'hôtels, de restaurants, de casinos ou de condominiums, sauf autorisation contraire du ministre.

Qui surveille l'application de cette loi?

M. Walmsley: À Oshawa et dans la région de Durham, on a tenu un référendum et les gens ont voté contre les casinos. Les casinos n'ont aucun rapport avec les activités portuaires, mais il y a des gens qui voudraient implanter un casino sur les terrains du port. Certains élus municipaux ont lancé une campagne énergique pour implanter un casino dans la région et nous avons donc pensé que si cela pouvait être inclus, ce serait une bonne idée.

Le sénateur Forrestall: Vous avez une marina.

M. Walmsley: Oui, monsieur, nous avons une marina.

Le sénateur Forrestall: Si cette marina prenait de l'expansion et que l'exploitant voulait y construire un motel, demanderiez-vous au ministre de vous accorder une exception pour que le projet puisse être réalisé?

M. Walmsley: Nous adresserions une demande au ministre, oui.

Le sénateur Forrestall: La construction de condominiums n'ajoute absolument rien au port.

M. Walmsley: En effet.

Le gouvernement provincial fait beaucoup de délestage de ses dépenses aux dépens des villes. Il s'est déchargé de GO Transit, de l'entretien des routes, des services d'ambulance. Vous avez déjà lu tout cela et je ne vous apprends rien. Quand les élus de la ville d'Oshawa visitent le secteur riverain de Toronto, ils voient des hôtels tout en hauteur, ils voient l'aménagement du bord de l'eau et ils voient des taxes et des revenus imposables, d'énormes revenus imposables. Ensuite, ils se tournent vers nos terrains et sont fortement intéressés à y voir des gratte-ciel, des hôtels et des condominiums.

Le sénateur Forrestall: Je vous félicite pour la croissance de votre port. Si vous pouvez obtenir une croissance de 79 p. 100 tous les cinq ans, vous surpasserez bientôt Toronto.

M. Walmsley: Les choses vont très bien pour nous.

Le sénateur Forrestall: Pourquoi n'offrez-vous pas simplement d'annexer le port de Toronto?

M. Walmsley: À Toronto, on manutentionne des produits différents. Notre tonnage est beaucoup plus faible qu'à Windsor ou à Toronto. Nous avons des produits manufacturés et des marchandises diverses, tandis que les marchandises en vrac sont débarquées à Toronto, par exemple le sel pour les rues. La compagnie sucrière Red Path est installée dans le centre-ville de Toronto et elle importe des millions de tonnes de sucre brut. Au sujet des produits manufacturés, les blindés qui ont 29 pieds et demi de large ne peuvent pas se rendre au port de Toronto, et on les embarque donc au port d'Oshawa. En moyenne, une voie routière a 11 pieds de large, et il faut donc trois voies pour faire passer ces chars d'assaut.

À Oshawa, il y a de bonnes routes d'accès; de plus, le chemin de fer passe tout près. Ce sera bon pour la province et pour le pays.

Le sénateur Forrestall: Je vous félicite pour votre travail et je vous souhaite tout le succès voulu.

Le sénateur Milne: Je ne vous féliciterai pas pour l'excellence de vos entreprises tant que je ne saurai pas jusqu'où vos terrains s'étendent vers l'est. Il y a quelque temps, il y a eu toute une controverse au sujet d'un marais piriforme situé juste à l'est, entre la ville d'Oshawa et ce qui était auparavant une magnifique ferme qui a maintenant été remplacée par un immeuble à bureaux d'un grand fabricant d'automobiles.

M. Walmsley: Pour répondre à votre question, la commission de port a vendu ce terrain à la ville pour la somme de 1 $. Nous avons vendu 211 acres de marais à la ville et ce terrain est maintenant administré par une organisation qui s'appelle Friends of the Second Marsh. C'est en effet le nom de ce marais, Second Marsh.

Le sénateur Milne: C'est l'un des derniers marais de ce type qui reste le long de la rive nord du lac Ontario.

M. Walmsley: C'est vrai. Nous avons étudié la question et avons décidé qu'il serait préférable pour la population locale que ce marais soit préservé dans son état naturel. Nous avons donc remis le terrain à la collectivité.

Le sénateur Milne: Vous vous êtes déjà déchargés de cette responsabilité. C'est maintenant un espace vert.

M. Walmsley: Nous avons remis à la collectivité plus de 200 acres d'espace vert.

Le sénateur Milne: Combien d'acres vous reste-t-il maintenant?

Mme Donna P. Taylor, présidente-directrice générale, Commission de port d'Oshawa: Il nous reste 60 acres sur la ferme Gifford, du côté ouest du marais. Nous avions la ferme Beaton, du côté est du marais. Nous avons redonné le marais, mais nous avons délibérément découpé une bande de 120 mètres de large sur le flanc est de la ferme Gifford pour créer une zone-tampon. Nous avons volontairement créé cette zone, ce qui nous a fait perdre plusieurs acres, parce que c'est un très long terrain. La Commission des affaires municipales de l'Ontario a approuvé cette décision.

La General Motors possède une zone-tampon de 60 mètres de l'autre côté, et nous avons doublé cette largeur. Une nouvelle loi était sur le point d'être adoptée, mais nous l'avons fait volontairement. Cette parcelle a été mise de côté pour créer une zone verte ceinturant notre terrain industriel de 60 acres. À l'origine, nous avions prévu que la totalité de ce terrain serait consacrée à l'industrie lourde ou légère, etc. Je répète que nous avons volontairement offert de modifier le zonage pour adopter les établissements industriels de prestige, c'est-à-dire des entrepôts et des établissements commerciaux, afin d'amoindrir l'incidence sur le marais. Nous avons donc maintenant le marais, la zone-tampon, le secteur de prestige et ensuite, le secteur industriel portuaire. C'est ce plan qui a été approuvé par la Commission des affaires municipales de l'Ontario.

Le sénateur Milne: Dans ce cas, je vous félicite. C'est une bonne nouvelle pour tous ceux qui s'intéressent au marais dans ce secteur.

Vous avez entendu les représentants du port du Fraser exprimer leur intérêt envers le développement immobilier et c'est ce que vous espérez pouvoir faire sur les 60 acres qui vous restent?

M. Walmsley: Sur les terrains qui restent, parce que nous avons fait modifier le zonage. Nous avons l'intention de chercher à attirer de l'industrie légère, pour générer des revenus pour le port, en effet.

Pour votre gouverne, je précise que nous avons limité la hauteur des immeubles de manière que, depuis le marais, on ne puisse pas voir le port. À cause d'une élévation de terrain et parce que nous avons limité la hauteur des immeubles, vous aurez l'impression d'être en pleine nature. Vous ne saurez même pas qu'il y a un port tout près.

Le sénateur Whelan: La General Motors utilise-t-elle votre port?

M. Walmsley: Elle l'utilise pour importer de grandes machines à emboutir les métaux pour la fabrication de voitures. La compagnie achète ces machines par intermittence. Il peut s'écouler un certain nombre d'années sans qu'elle en achète, et puis on en importe toute une série.

Actuellement, la General Motors est en train de vendre des éléments d'une usine à un pays d'Extrême-Orient -- je préfère ne pas préciser lequel, mais c'est quelque part en Extrême-Orient -- et nous discutons avec eux à ce sujet. Elle va démanteler l'usine et l'exporter en pièces détachées par notre port.

Le sénateur Whelan: Elle va démanteler l'usine?

M. Walmsley: Oui.

Le sénateur Milne: Va-t-elle aussi démanteler les emplois?

M. Walmsley: J'ignore si cette usine est actuellement en activité. Je ne m'en suis pas mêlé. Si on me dit qu'on veut expédier une usine par bateau, je réponds: «Très bien, merci. À votre service, monsieur.»

Le sénateur Whelan: Avez-vous reçu de l'aide pour votre marina aux termes de l'ancienne politique du gouvernement fédéral à l'égard des marinas?

M. Walmsley: Non. Le gouvernement fédéral faisait le dragage du chenal et du port et installait les bouées dans le chenal. Il s'occupait aussi de l'entretien de la corne de brume.

Le sénateur Whelan: Nous avions un programme fédéral pour les marinas; nous nous occupions de tout, du dragage, des quais et des docks.

Mme Taylor: À un moment donné, au début des années 70, nous avons reçu une aide limitée pour creuser ce que nous appelons maintenant le bassin du nord, qui a été le dernier agrandissement. L'aide a été consentie sous la forme d'un montant forfaitaire d'environ 100 000 $.

Le sénateur Whelan: Avez-vous des réservoirs pour le chlorure de calcium?

M. Walmsley: Oui, nous avons d'énormes réservoirs pour le chlorure de calcium, qui provient de la General Chemical. On l'apporte par bateau et ce produit sert d'engrais.

Le sénateur Whelan: La General Chemical se trouve à un mille de chez moi et j'y ai travaillé quand j'étais jeune. Combien d'employés avez-vous au port?

Mme Taylor: Nous avons le personnel de bureau et la marina. Nous n'employons pas les débardeurs. Nous avons très peu d'employés directs. Nous n'avons plus que six personnes: moi-même, un adjoint et quatre personnes à la marina. C'est parce que nous sommes un port qui fonctionne selon la formule du locateur. Nous embauchons une compagnie de débardage qui emploie à son tour d'autres personnes. Lors de la dernière étude que nous avons faite, les retombées se traduisaient par 700 emplois locaux.

Le sénateur Whelan: Vous avez dit que la Ville d'Oshawa enverrait des représentants à Ottawa cette semaine. Que vont-ils dire?

M. Walmsley: Oui, ils seront ici jeudi. Ils diront: «Donnez-moi le port pour 1 $.»

Le sénateur Whelan: Combien en coûte-t-il pour accoster à la marina? C'est une source de revenu pour votre port, n'est-ce pas?

M. Walmsley: C'est une source de revenu, mais nous avons réinjecté l'argent dans la marina en refaisant les quais. Depuis quatre ans, tous les revenus de la marina ont été réinjectés dans la marina. Nous avons fait passer les quais de la cote A à la cote I et cette année, nous avons refait l'extérieur du club des plaisanciers avec un revêtement de vinyle.

C'est une source de revenu, mais nous nous en servons uniquement pour la marina.

Mme Taylor: Nous avons tenté de faire en sorte qu'elle demeure financièrement autonome.

La présidente: Merci beaucoup.

La séance est levée.


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