Délibérations du comité sénatorial permanent
des
Transports et des communications
Fascicule 15 - Témoignages pour la séance du soir
La séance reprend.
La présidente: Sénateurs, nous allons maintenant entendre les porte-parole du port de Nanaimo, Mme Patti Miller et M. Bill Mills.
Bonjour. Nous vous écoutons avec plaisir.
Mme Patti Miller, présidente, Port de Nanaimo: Merci, madame la présidente, membres du comité. Nous sommes heureux de pouvoir venir aujourd'hui vous parler des cinq domaines que nous estimons mériter votre attention avant que vous ne recommandiez l'adoption du projet de loi.
Vous avez déjà entendu nos collègues de Port Alberni. Comme ils représentent la seule autre commission portuaire de l'île de Vancouver, nous partageons bon nombre de leurs préoccupations. Nos deux ports sont des ports forestiers. Comme ils ont déjà couvert bon nombre des préoccupations qui sont aussi les nôtres, j'essaierai d'être brève car je sais que l'après-midi a été long.
Nos observations portent sur les administrateurs, le prélèvement sur les revenus bruts, ou les frais, les examens spéciaux, la Loi sur les subventions aux municipalités et le droit d'expropriation.
Je vais commencer par les dispositions 8(2)f) et 14(1). Selon ce projet de loi, le port de Nanaimo aura sept administrateurs, deux de plus qu'actuellement. Quatre d'entre eux seront des représentants des utilisateurs nommés par le gouverneur en conseil sur proposition du ministre en consultation avec les utilisateurs. Nous sommes en faveur de la représentation des utilisateurs au conseil. C'est quelque chose qui aurait dû se faire depuis longtemps. Mais, nous estimons que les groupes d'utilisateurs, ou tout autre groupe, ne doivent pas constituer une majorité au sein du conseil. Nous recommandons au Sénat de modifier le projet de loi pour qu'aucun groupe ne puisse détenir la majorité au conseil.
Plus précisément, un conseil de sept administrateurs devrait, selon nous, compter un représentant du fédéral, un de la province, trois des utilisateurs et deux de la municipalité. Cela permettrait le même niveau de participation qu'a connu le port de Nanaimo pendant 36 ans. La Ville et le district régional de Nanaimo ont d'importants territoires contigus aux eaux portuaires. Nous sommes donc en faveur de leur représentation au sein de la nouvelle commission portuaire.
Il nous paraît aussi important de s'assurer qu'aucun représentant des utilisateurs ne sera nommé à plus d'une commission -- ce que le projet de loi ne couvre pas -- et qu'aucune société ne puisse avoir plusieurs représentants à plusieurs conseils.
Le deuxième point que nous souhaitons aborder est celui de l'alinéa 8(2)h), concernant le montant des frais. Calculer les frais sur les revenus bruts pénalise Nanaimo, port axé sur les opérations plutôt que sur la location. Les gens de Port Alberni vous l'ont déjà dit. Nous recommandons que le projet de loi soit modifié pour que les frais soient calculés sur le revenu net des autorités portuaires.
Pour être encore plus claire, le port de Nanaimo, port autonome, encaisse dans le cours normal de ses opérations des revenus bruts de 10 millions de dollars. Après rémunération des débardeurs et autres frais d'exploitation, il en tire un bénéfice de 1 million de dollars.
Si nous louions nos installations, comme le font les ports de location, nous aurions 4 millions de dollars de recettes et 1 milliard de dollars de bénéfice. Nous n'aurions donc pas à payer les frais sur 6 millions de dollars, soit 10 millions moins 4 millions. Nous avons joint à notre mémoire un graphique où l'on peut voir comment le port sera pénalisé si l'on ne tient aucun compte de la différence entre un port exploitant et un port de location.
Pour plus d'équité dans le calcul des frais, les lettres patentes doivent permettre d'exclure des revenus bruts les coûts d'exploitation spécifiques au port, les coûts de rémunération des débardeurs, l'amortissement et l'entretien. Bien que cela puisse paraître juste en théorie, en pratique le calcul des frais sur les revenus bruts pourrait aggraver un déficit existant. C'est notre réalité actuelle, en Colombie-Britannique.
En 1997, le secteur forestier de la province a connu des difficultés économiques et notre port a perdu 600 000 $ dans le secteur cargo malgré des revenus de plus de 5 millions. La situation empire en 1998. Nous prévoyons une perte d'un million de dollars dans la manutention du fret forestier. Payer des frais dans de telles circonstances est tout à fait contraire au principe voulant que les entreprises paient des impôts sur le revenu net lorsqu'elles réalisent des bénéfices et n'en payent pas lorsqu'elles n'en font pas.
Notre troisième préoccupation concerne les articles 41, 42 et 43, sur les examens spéciaux. Ils imposent à l'autorité portuaire d'entreprendre un examen spécial au moins une fois tous les cinq ans afin de vérifier si ses livres, ses dossiers, ses systèmes et ses pratiques sont raisonnables. Nous y voyons une exigence bureaucratique coûteuse et inutile. Ces dispositions laissent en outre entendre que le travail du vérificateur indépendant et ses rapports annuels, accompagnés des états financiers vérifiés, ne suffisent pas à prouver la bonne gestion du conseil d'administration et de l'administration portuaire. De fait, le paragraphe 43(1) suggère que l'examen spécial soit entrepris par le vérificateur. S'il fait bien son travail annuel, il examinera les systèmes et les contrôles internes et présentera des recommandations appropriées à l'administration et au conseil chaque année.
Le conseil d'administration et le chef de la direction devraient être parfaitement capables de décider quand s'impose un examen de l'organisation ou une restructuration des systèmes. Au cours des dix dernières années, le port de Nanaimo a fait faire de grandes révisions organisationnelles qui ont entraîné d'importantes restructurations de ses opérations. Elles étaient le résultat de la planification stratégique, de séances de planification avec le conseil d'administration et des besoins opérationnels qu'avait cernés le chef de la direction. Elles n'ont pas été réalisées tous les cinq ans pour satisfaire à une exigence bureaucratique. Nous recommandons que cet article soit abrogé.
Le quatrième point concerne l'article 182.1 de la Loi sur les subventions aux municipalités. Celle-ci est modifiée de manière à permettre une subvention tenant lieu d'impôt sur tout bien géré par une autorité portuaire ou lui appartenant. Nous comprenons la nécessité des contributions aux municipalités où se trouvent les ports -- c'est probablement quelque chose qui aurait dû être fait depuis longtemps -- et nous savons que la loi prévoit une période de transition de trois ans. Cependant, il faut bien comprendre que les commissions portuaires n'ont jamais eu jusqu'ici à payer ce genre de subventions et qu'elles ont contribué à la communauté d'autres manières.
Nous recommandons qu'avant l'adoption du projet de loi par le Sénat, chaque port soit informé de l'incidence financière de cette subvention et que le Sénat soit informé de ses conséquences et s'assure que ces formules n'imposent pas un fardeau indu aux autorités portuaires. Nous n'avons aucune idée des effets qu'auront ces subventions pour les ports.
Le ministre a déclaré que le projet de loi avait pour but de rendre les ports canadiens plus compétitifs. Nous voulons donc que l'incidence de ces subventions tenant lieu d'impôt que devront payer les ports pour la première fois soient bien comprises et qu'elles aillent bien dans le sens des objectifs exprimés par le ministre au lieu d'y faire obstacle.
Nous n'avons jamais, dans le contexte de l'élaboration de cette loi, été informés de la formule ou du montant de la subvention municipale que nous aurons à payer. Si le port de Nanaimo doit verser une subvention de 100 000 $, cela ne pose pas de problème. Mais s'il doit verser un million, il pourrait bien ne pas être en mesure de survivre. L'objectif du ministre d'obtenir un système portuaire plus efficace et plus compétitif serait alors manqué.
Parlons maintenant du droit d'expropriation. Aux termes de la loi sur les commissions portuaires, les ports peuvent exproprier des terrains dont ils ont besoin, avec l'approbation du gouverneur en conseil. Nous recommandons que cette autorité soit reproduite dans le projet de loi avec le même libellé que contient la Loi sur les commissions portuaires. Dans les dix dernières années, nous avons eu un incident avec un chemin de fer qui menaçait d'utiliser son pouvoir d'expropriation contre le port. Nous avons alors rappelé que la Loi sur les commissions portuaires nous permettait aussi d'exproprier.
En conclusion, nous pouvons vous affirmer que pendant 36 ans le port de Nanaimo a très bien fonctionné comme commission portuaire sans représenter un fardeau financier pour le gouvernement fédéral. Nous nous sommes acquittés de notre mandat qui consiste à faciliter la réalisation des objectifs du Canada en matière de commerce international et l'application des politiques en matière de transport. Nous avons également contribué considérablement au développement social et économique de notre région. Nanaimo a connu un taux de chômage élevé et notre apport est très apprécié.
Ces dernières années, nous avons engagé ou suscité pour plus de 100 millions de dollars de réaménagement au port, y compris des constructions sur de grandes parcelles laissées à l'abandon depuis 20 ans. Ces constructions nous ont permis de ressusciter des revenus provenant de terrains vacants au bord de l'eau, d'offrir des équipements touristiques et de construire un quai pour les bateaux de croisière, diversifiant ainsi nos sources de revenu. Tout cela fait partie du plan de développement et d'exploitation du port à l'approche du XXe siècle.
La commission du port de Nanaimo et son administration équilibrent bien les activités de fret et les autres activités du port, grâce à une planification stratégique annuelle. Nous avons toujours veillé à ce que le port jouisse d'une base financière solide afin de bien pouvoir servir ses clients dans les décennies à venir. La commission considère son port comme un excellent exemple de ce que peut être un grand port canadien. Si le projet de loi C-9 est modifié comme nous l'avons suggéré dans notre mémoire, nous sommes confiants que le port continuera de contribuer positivement à notre communauté, à la politique maritime du Canada et à nos objectifs en matière de commerce international.
Le sénateur Roberge: Je vous remercie de votre exposé. Je constate que vous entretenez de bonnes relations avec la Ville. Vous recommandez deux représentants municipaux.
Mme Miller: Oui, nous avons d'excellentes relations. Nous avons fait beaucoup d'efforts pour cela.
Le sénateur Roberge: Vous dites que les représentants des utilisateurs ne doivent pas être nommés à plus d'une commission portuaire. Parlez-vous d'une personne ou d'une société ou des deux à la fois?
Mme Miller: Nous avons pensé qu'il ne serait pas juste qu'un utilisateur siège au conseil de trois ou quatre ports. Nous estimons qu'il y aurait conflit d'intérêt.
Le sénateur Roberge: Mais je veux savoir si vous parlez de la personne ou de l'entreprise? Par exemple, on peut nommer une société comme membre du conseil.
Mme Miller: Je crois qu'on songeait à une personne. Il me paraît inévitable que les entreprises siègent à plus d'un seul conseil.
Le sénateur Roberge: Merci. Comment définissez-vous le revenu net par rapport au revenu brut?
M. Bill Mills, directeur du port et président-directeur général, port de Nanaimo: C'est surtout dans le domaine du fret que nous sommes inquiets.
Comme nous sommes un port exploitant et non un port de location, nous payons les débardeurs. Nous payons aussi le personnel administratif du terminal et les réparations à l'équipement; comme Port Alberni, nous sommes propriétaires de notre équipement. Le coût d'entretien d'un chariot à fourche est considérable, comme l'est aussi l'amortissement. Nous souhaiterions que cela fasse partie des exemptions pour le calcul des frais.
Nous avons des opérations de fret et autres. Côté fret, nous obtenons peut-être 10 p. 100 contre un port de location qui encaisse peut-être 80 cents ou 90 cents par dollar de recette.
Le sénateur Roberge: Je comprends bien. Mais je me disais que vous aviez peut-être une certaine définition du revenu net, tandis qu'un autre port pourrait en avoir une différente, et imputer d'autres types de frais.
M. Mills: Oui, on craint qu'il n'y ait différentes méthodes d'arriver au revenu net. C'est comme si un comptable demandait: Combien font deux plus deux?
Le sénateur Roberge: Que recommandez-vous au gouvernement?
M. Mills: Nous préférerions le revenu net. C'est logique. C'est ce qui se fait dans les entreprises. Il est assez facile de définir et calculer le revenu net.
Le sénateur Roberge: Dans votre examen spécial, qui contrôle le contrôleur?
M. Mills: Selon le paragraphe 43(1) du projet de loi, ce serait le vérificateur.
Le sénateur Roberge: Et vous êtes contre?
M. Mills: Le comité de vérification du conseil d'administration contrôle le vérificateur. Il me semble que si ce dernier fait bien son travail, quand il fait son rapport sur les contrôles internes et rencontre le comité de vérification, il peut présenter ses recommandations concernant les systèmes. Nous avons mené à bien de grandes réorganisations, transformé toutes nos opérations, mais pas selon un cycle quinquennal. Nous estimons que dépenser de l'argent à ce type d'exercice -- s'il y a une procédure de vérification suffisante, la structure opérationnelle est constamment en examen. Nous l'avons fait deux fois en dix ans.
Le sénateur Roberge: Si l'article était maintenu, serait-il lourd de conséquences?
M. Mills: À mon avis, cela ajoute aux coûts. Il faut compter 20 000 $ à 40 000 $ pour l'examen de tous les dossiers. Je m'attends à ce que le vérificateur le fasse chaque année. Qu'il analyse les systèmes et présente des recommandations à mesure qu'il procède aux contrôles internes, prépare les états financiers pour les rencontres annuelles. Cela suffit à vérifier que l'administration et le conseil conduisent bien les affaires de l'entreprise. Nos réorganisations étaient issues des exercices de planification stratégique que nous menons chaque printemps avec le conseil d'administration.
Le sénateur Bryden: Savez-vous combien il y a de ports exploitants et combien de ports de location? Les commissions portuaires, j'imagine, sont exploitantes, n'est-ce pas?
Mme Miller: Pas nécessairement. Certains me contrediraient peut-être, mais à ma connaissance, il n'y en a que deux sur la côte Ouest: Nanaimo et Port Alberni. Je ne connais pas la situation sur la côte Est.
Le sénateur Bryden: La solution serait-elle que vous devenez un port de location?
M. Mills: Oui, mais l'esprit d'entreprise nous convient. Nous apprécions de faire de meilleurs bénéfices quand les choses vont mieux. Cela permet de réinvestir dans le port, non seulement dans les actifs du côté des cargaisons, mais aussi pour le développement social et économique de la communauté riveraine. Nous sommes des preneurs de risque. Nous avons investi dans l'équipement; nous avons plus de 40 pièces d'équipement industriel lourd. Nous avons investi dans nos quais. C'est nous qui faisons ces immobilisations, pas les locataires, et nous attendons maintenant les bénéfices.
Le sénateur Bryden: Sauf votre respect, vous ne courez pas beaucoup de risque, pas autant qu'un entrepreneur pourrait en courir. N'ai-je pas raison?
M. Mills: Que voulez-vous dire?
Le sénateur Bryden: La commission étant une société d'État, vos administrateurs et vous-même gérez des fonds et des opérations publiques. Ne pourriez-vous pas confier à des entrepreneurs ce que vous avez maintenant plaisir à faire vous-même, contre un loyer ou des dividendes pour les opérations aux quais? Vous auriez alors un revenu net.
M. Mills: Oui, nous pourrions le faire. Mais si nous l'avions fait nous n'aurions pas obtenu les niveaux de rendement que nous avons réalisés au cours des années et qui nous ont permis d'apporter toutes ces améliorations sur le bord de mer.
Prenez la «grippe asiatique», si je peux me permettre l'expression, de l'an dernier. Nous essuyons une perte contrôlée dans les opérations de fret. Autrement dit, il n'y a pas moyen de faire de l'argent. Nous savons que les volumes sont insuffisants. Si nous avions loué les installations, l'exploitant du terminal n'aurait peut-être pas pu absorber la perte et aurait peut-être voulu rompre le bail. Quant à nous, nous avons examiné nos budgets, établi nos tarifs, et nous nous sommes rendus compte que cette année nous devons demander deux dollars de plus à l'unité pour équilibrer les comptes. Nous reconnaissons que nos clients ne sont pas en mesure de payer cette augmentation. Ce serait inacceptable face à nos concurrents des ports privés sur l'île. Nous avons donc accepté de fonctionner à perte -- ce que j'appelle une perte contrôlée -- du côté du fret pour cette année.
Mais il est possible, et nous l'avons fait d'autres années, d'obtenir un meilleur rendement qu'on ne le ferait en louant les installations. C'est une bonne chose pour le gouvernement et c'est aussi bon pour la collectivité puisque nous sommes en mesure de réinvestir dans nos terminaux; nous réinvestissons sur le bord de mer où nous avons construit des équipements pour le public.
Le sénateur Bryden: Si vous n'obtenez pas la modification que vous avez demandée, avez-vous envisagé d'adopter un autre système? Je ne vois pas comment vous accepteriez de payer sur vos revenus bruts alors que vous pourriez vous réorganiser de manière à payer sur le net.
M. Mills: Nous espérons qu'en négociant nos lettres patentes il en sera tenu compte. Nous jugeons l'affaire assez grave pour l'avoir mentionnée à ce comité.
Le sénateur Bryden: Nous vous en remercions car vous êtes les seuls à l'avoir fait avec Port Alberni. Votre situation à tous deux est tout à fait particulière et elle donne de très bons résultats pour vous.
M. Mills: Oui.
Le sénateur Bryden: Au bas de la page 2, vous dites que payer des frais dans ces circonstances est totalement contraire aux principes reconnus pour les entreprises qui paient des impôts quand elles réalisent des bénéfices, impôt calculé sur le revenu net, et n'en payent pas quand elles n'en font pas. Vous nous dites qu'en 1997 -- par exemple -- vous avez perdu 600 000 $.
M. Mills: Exact.
Le sénateur Bryden: En affaire, non seulement vous ne payeriez pas d'impôt là-dessus mais vous pourriez reporter la perte sur les exercices suivants si vous faites ensuite un bénéfice. Est-ce que vous demandez cela aussi?
M. Mills: Très juste. Je crois que personne n'y avait pensé. Il me paraît important toutefois que quelqu'un examine au moins la question. Je comprends bien que les frais sur le revenu brut ne sont pas censés être un impôt, mais le concept est tout de même très proche de celui du rendement avec bénéfices. Peut-être qu'une solution serait tout simplement de fermer pendant un an, pour qu'il n'y ait pas de revenus sur lesquels payer des frais. Quand le marché japonais et les marchés asiatiques reprendront, nous pourrions rouvrir et payer des frais sur nos revenus.
Vous avez tout à fait raison. Je vais le mentionner à notre réunion de demain.
Le sénateur Bryden: Enfin, je ne pense pas que Transports Canada ait inventé cela sans qu'il y ait de précédent.
Je sais bien que ce n'est pas un centre d'achat que vous exploitez, mais la formule pour les locataires des centres d'achat est qu'ils payent un loyer de base, pour le droit d'ouvrir leurs portes, plus 1 p. 100 ou 2 p. 100, peut-être, de leur chiffre d'affaires brut. Le locateur ne peut pas s'assurer que personne ne puise dans la caisse, réduisant ainsi le net, ou n'engage des membres de sa famille pour faire croire qu'il n'y a pas de revenu net.
Si Transports Canada a choisi cette formule, c'est probablement par souci d'équité. Pour ne pas donner l'avantage à ceux qui sont les plus habiles à manipuler les chiffres entre le net et le brut.
M. Miller: Mais dans le fret, il n'est pas difficile de déterminer quels sont les coûts d'exploitation qui nous distinguent d'un port de location.
Le sénateur Bryden: Pensez-vous que cela devrait pouvoir être couvert dans les lettres patentes?
M. Miller: Oui, je pense qu'il faut de la souplesse.
Le sénateur Forrestall: Vous demandez de pouvoir garder votre droit d'expropriation. Le paragraphe 7(1) stipule:
Sous réserve du paragraphe (3), les administrations portuaires ne sont mandataires de Sa Majesté du chef du Canada que dans le cadre des activités portuaires visées à l'alinéa 28(2)a).
C'est ce lien avec la Couronne qui vous confère cette autorité. Passons maintenant au paragraphe 28(2).
L'autorisation donnée à une administration portuaire d'exploiter un port est restreinte aux activités suivantes
a) les activités portuaires liées à la navigation, au transport des passagers et des marchandises, et à la manutention et l'entreposage des marchandises, dans la mesure prévue par les lettres patentes...
Voyez-vous ici quelque chose qui m'échappe et qui accorderait, sinon une exonération, au moins une pleine restauration? Je pense que l'exclusion est assez clairement exclue, mais vous la souhaiteriez?
M. Mills: Le problème avec le chemin de fer concernait l'accès à notre terminal par un passage supérieur. La compagnie voulait fermer ce passage. Les négociations avaient même commencé en mai 1987. Elles devraient aboutir cette année. Nous discutons à nouveaux car voilà que la compagnie s'est rendu compte qu'elle avait une emprise sur l'un de nos terrains. Elle l'a entouré d'une clôture, mais l'emprise ne lui donne pas ce droit. Nous sommes donc revenus sur cette question du passage supérieur vers notre terminal. La compagnie de chemin de fer jouait les durs. Il y a quatre ou cinq ans, elle nous a menacés d'expropriation. Il m'a semblé que la discussion dégénérait. Notre avocat a alors rappelé que conformément à la Loi sur les commissions portuaires, nous aussi avions un droit d'expropriation. Tout le monde s'est calmé et s'en est allé. Je ne pense pas que le port souhaite exproprier, mais le simple fait que cette autorité existe dans la loi a permis dans ce cas de continuer à négocier raisonnablement.
Le sénateur Forrestall: C'est donc un outil qui permet une expansion et un développement ordonné.
M. Mills: Oui, c'est un outil nécessaire.
Le sénateur Forrestall: Si le vieil entêté refuse de partir, vous avez un recours. Avec la loi que l'on propose, vous n'en auriez pas. Que feriez-vous? Invoqueriez-vous des pouvoirs provinciaux? Le savez-vous?
Le sénateur Bryden: Ce ne serait pas la province.
Le sénateur Forrestall: C'est une question intéressante. Peut-être que le ministre pourrait en prendre note et s'informer avant de revenir devant le comité afin que nous puissions lui demander des précisions.
Soit dit en passant, vous n'êtes pas les deux seuls ports dans cette situation; il y en a beaucoup d'autres dans le pays qui connaissent les mêmes difficultés que vous.
Je vous félicite, en même temps que tous les autres qui ont réussi à faire marcher ces ports en construisant des infrastructures qui montrent la fierté que leur inspire leur collectivité et la foi et la confiance qu'ils ont dans leur avenir commercial. Vous méritez nos félicitations. Je ne comprends pas pourquoi nous voulons faire des changements qui vous causeront des problèmes et demanderont des années d'adaptation. Dans certains cas, ils pourraient même être catastrophiques pour votre planification à long terme. Mes meilleurs voeux vous accompagnent.
Le sénateur Johnstone: Comme l'a dit le sénateur Forrestall, nous avons entendu les représentants des ports de la côte Est jusqu'à l'Ouest. Il est intéressant, à mes yeux, de constater que les problèmes se recoupent sans être identiques.
Y a-t-il une présence navale actuellement dans votre port?
Mme Miller: Pas vraiment. Au nord, il y a Nanoose Bay, qui est une base navale.
Le sénateur Johnstone: Est-ce qu'elle n'est pas très importante ou n'ajoute ou n'enlève pas grand-chose?
Mme Miller: Non.
Le sénateur Johnstone: Vous avez parlé de la «grippe asiatique». Est-ce grave? A-t-elle d'importantes répercussions? Si on n'y trouve pas remède aussi rapidement que nous l'espérons, pourrait-elle présenter un problème grave dans deux ou trois ans?
M. Mills: Nous avons eu la chance d'avoir entrepris à notre port un certain nombre d'activités nouvelles. Une compagnie de la Georgie expédie de la barbotine qui sert dans la finition des papiers. Elle vient de construire un entrepôt de 13 millions de dollars dans notre port. Nous recevrons sept à huit navires par an. Un opérateur du domaine forestier met sur pied une installation pour le triage des billes, afin d'y ajouter de la valeur. Il y a quelques années, nous avons investi dans la construction d'une rampe d'accostage pour chalands. Elle a été peu utilisée, mais depuis six mois, trois ou quatre grands opérateurs s'y intéressent et en semaine, elle commence à être bien occupée.
Quelqu'un, là-haut, veille sur nous. Il y a des possibilités pour diversifier la base du revenu. La situation va se redresser, mais le coup est dur.
Nous avons deux scieries que nous louons sur notre propriété; toutes deux sont fermées. L'une depuis sept ou huit mois, l'autre depuis un mois, et elle restera fermée au moins deux mois. Nous voyons normalement transiter 450 à 500 millions de pieds-planche par an. Cette année nous avions établi notre budget en fonction de 300 millions de pieds-planche. Avec la fermeture des scieries, nous n'atteindrons probablement pas les 200 millions. Les volumes à la fin mars indiquaient un sérieux problème qui se répercutera dans toute la province.
Cette année nous avons parlé de «perte contrôlée». Malheureusement, il faudra attendre l'an prochain pour faire des bénéfices. Mais nous pensons qu'il y en aura.
Le sénateur Johnstone: Quand une porte se ferme temporairement, vous en ouvrez d'autres.
M. Mills: En espérant que ce ne sera pas seulement temporaire.
La présidente: D'autres questions?
Merci beaucoup d'être venus aujourd'hui. Nous vous remercions d'être venus de si loin pour nous rencontrer ici à Ottawa. Vous avez ainsi démontré combien le projet de loi C-9 vous préoccupe et vous intéresse.
[Français]
Nous recevons maintenant des gens de la Voie maritime du Saint-Laurent: M. Michel Fournier, président, M. André Latour, vice-président des ressources humaines, M. Carol Lemelin, contrôleur et trésorier et M. André Landry, directeur de la planification et du développement.
Nous vous souhaitons la bienvenue, messieurs. Vous disposez de tout le temps nécessaire pour nous faire part de vos impressions ou de votre façon de voir le projet de loi C-9 et ensuite, répondre aux questions des sénateurs.
M. Michel Fournier, président, Voie maritime du Saint- Laurent: Je vous remercie madame la présidente. Il me fait plaisir d'avoir la chance de présenter le point de vue de l'Administration de la Voie maritime du Saint-Laurent auprès du comité permanent sénatorial des transports et des communications.
Je suis ici avec M. Carol Lemelin, contrôleur et trésorier, de même que M. André Latour, vice-président des ressources humaines, qui ont joué tous deux un rôle important dans le projet de commercialisation et M. Landry, directeur de la planification et du développement de l'entreprise.
Mon but aujourd'hui est de vous informer des développements concernant la commercialisation et des efforts que nous déployons à la Voie maritime pour effectuer un changement de culture adapté à la réalité du secteur privé tout en s'assurant que la Voie maritime demeure un système de transport sécuritaire, intégré et abordable.
Durant ma présentation, je voudrais répondre à cinq questions: pourquoi la commercialisation? Comment l'entente fonctionne-t-elle? Pourquoi est-elle une solution gagnante? Que fait-on entre temps? Et qu'est-ce que qui suivra?
Commençons donc avec la première question: pourquoi la commercialisation?
La Voie maritime fournit environ 3 milliards de dollars canadiens et crée environ 17 000 emplois directs et indirects au Canada et 2 milliards de dollars et 49 000 emplois directs et indirects aux États-Unis.
En 1997, la valeur de la cargaison ayant transité par la Voie maritime s'élève à 6.7 milliards de dollars. Ceci démontre à quel point la Voie maritime est un élément important dans les opérations d'affaires courantes des propriétaires et opérateurs de navire, des expéditeurs et des receveurs.
Vu dans cette perspective, en gérant l'efficacité de la portion canadienne du système d'éclusage, l'Administration de la Voie maritime du Saint-Laurent affecte directement le temps de transit et l'aptitude des utilisateurs à être compétitifs au niveau des coûts.
En commercialisant, il est effectivement proposé aux utilisateurs d'être mieux placés pour influencer l'efficacité globale du réseau de la Voie maritime.
En ne considérant que cette seule raison, nous avons tous à gagner par la commercialisation.
Depuis 10 à 15 ans, le secteur privé a été le premier à avoir recours à d'importantes réductions des coûts afin de survivre aux pressions concurrentielles des marchés des années 1980 et 1990. Le libre échange, la mondialisation des marchés et le progrès technologique ont vite fait de transformer le monde du transport. Nous sommes à l'ère des concurrents flexibles. Devant un tel environnement, la Voie maritime doit aussi s'adapter.
Un changement est d'autant plus nécessaire qu'en plus de la pression accrue de nos concurrents, la Voie maritime doit composer avec de nouveaux coûts. Une réduction des coûts globaux du système de la Voie maritime s'impose afin de maintenir un avantage concurrentiel. Ceci pourrait être possible en rationalisant et en consolidant les opérations des 13 agences qui participent à la gestion du système.
La viabilité financière de la Voie maritime dépend de la prospérité économique en général, mais aussi de l'avantage concurrentiel de la solution de transport global à laquelle elle participe.
L'industrie du transport affiche dernièrement un grand dynamisme.
Alliances stratégiques, fusions, investissements en capital et utilisation massive de nouvelles technologies sont autant de moyens utilisés par les transporteurs pour réinventer les règles du jeu et afficher de nouveaux standard de performance.
Prenons l'exemple du CN, une autre société de la Couronne qui fut privatisée.
Depuis sa privatisation, le CN a considérablement réduit ses coûts en rationalisant sa main-d'<#0139>uvre. L'effectif total de l'entreprise est passé de 36 000 à 22 000 employés et les niveaux de gestion sont passés de 12 à 5. Ils ont aussi transformé la culture organisationnelle du CN donnant beaucoup d'importance au service à la clientèle et à la rentabilité des opérations.
Par le biais d'alliances, le CN a aussi élargi sa couverture géographique dernièrement, grâce à l'acquisition de Illinois Central Corp., le CN se positionne favorablement pour offrir un service qui s'étend jusqu'au golfe du Mexique.
Les résultats des efforts du CN à ce jour affichent une augmentation de plus de 42 p. 100 des revenus tonnes-milles par employé, depuis 1992.
Le but de cet exemple est de montrer à quel point la privatisation et la déréglementation ont permis aux chemins de fer d'atteindre des niveaux de performance supérieurs leur permettant ainsi de fixer des prix de plus en plus compétitifs.
Pour continuer d'être compté parmi les alternatives acceptables, la Voie maritime doit investir beaucoup d'énergie à améliorer sa position concurrentielle pour le futur.
De plus en plus, on voit des cargaisons qui, il n'y a pas si longtemps transitaient par la Voie maritime se retrouver aujourd'hui chez nos concurrents, les chemins de fer.
Parce que nous voulons travailler en partenariat avec nos employés, je les ai tous rencontrés récemment en petits groupes afin qu'ils comprennent la réalité de notre environnement concurrentiel: chaque cargaison perdue aux chemins de fer entraîne une perte de revenu; toute perte de revenu à long terme se traduit par une perte d'emploi.
Mon message aux employés était clair: nous devons transformer la Voie maritime, la rendre plus efficace, plus efficiente, et par le fait même, plus compétitive en réduisant les coûts et en améliorant le service à la clientèle afin d'assurer que les emplois associés à la Voie maritime seront toujours là dans les années à venir.
La commercialisation de la Voie maritime est un premier pas dans ce sens.
[Traduction]
Voyons donc comment fonctionnerait la commercialisation. Le projet de loi C-9 prévoit la création d'une société sans but lucratif dont le mandat serait de gérer les opérations de l'AVMSL. En d'autres mots, gérer le trafic, les opérations, l'infrastructure, incluant la voie en eau profonde, ainsi que toutes les infrastructures navigables de la Voie maritime. Bien entendu, ceci inclut la gestion des affaires courantes de la société. La durée prévue de l'entente est fixée à 20 ans avec un terme initial de 10 ans, renouvelable.
Des représentants des utilisateurs siégeront au conseil d'administration en même temps que des représentants du gouvernement. Pendant les négociations, les utilisateurs ont clairement indiqué qu'ils ne voulaient pas la responsabilité des actifs non directement reliés à la navigation. C'est pourquoi la gestion de tous les actifs tels que ponts, tunnels et propriétés immobilières non reliées à la navigation, demeureront la responsabilité de la Couronne. Bien entendu, tous les coûts ou revenus encourus dans la gestion de ces actifs appartiendront au gouvernement.
Au chapitre de la responsabilité financière, il a été convenu entre les parties que la société sans but lucratif aura à rendre compte pour les seules dimensions de performance qu'elle peut raisonnablement contrôler -- autrement dit, la gestion des coûts d'opération tels que la main-d'oeuvre, les salaires, les fournitures; et les dépenses en immobilisations, tel le renouvellement des actifs.
Selon l'entente proposée, le gouvernement assumera les impacts financiers associés aux fluctuations au niveau du trafic maritime et des revenus, impacts que la société ne pourra contrôler. Je crois que cette entente particulière entre le gouvernement et une agence existe parce que la Voie maritime est desservie par 40 grandes routes et 30 voies ferroviaires. Cette autoroute navigable de 2 000 kilomètres relie plus de 61 ports canadiens et américains qui dépendent d'elle pour leurs activités courantes.
L'entente proposée prévoit aussi l'établissement d'un mécanisme qui assurera des augmentations de péage stables et prévisibles et qui permettra aux utilisateurs de mieux planifier leurs opérations. L'entente suggère de gérer les finances sur le modèle du coût total, lequel imposerait à la société d'atteindre des objectifs annuels combinés pour ses coûts d'opération et ses coûts en immobilisations.
Advenant que les coûts réels encourus par la société excèdent le budget, les péages seraient augmentés les années suivantes afin de pallier aux pertes, jusqu'à concurrence d'un maximum prescrit. Si, par ailleurs, les coûts réels encourus étaient moindres que le budget, le surplus ainsi réalisé pourrait être utilisé pour couvrir des pertes ultérieures ou pour financer des rabais de péage dans les années futures.
Pour permettre la gestion financière selon le modèle proposé, il est prévu de créer un fonds de réserve de la Voie maritime avec un solde d'ouverture de près de 46 millions de dollars. Le fonds servira à couvrir les déficits associés à des baisses de trafic et à couvrir les coûts de transition. Selon l'entente proposée, des objectifs de coûts d'opération sur cinq ans devront être fixés au début de la période.
Pour ce qui est des coûts d'immobilisations, des objectifs de dépenses totales seront fixés au début de la période de cinq ans, alors que les objectifs annuels seront établis au début de chaque année, en fonction des recommandations du comité des dépenses en immobilisations.
En ce qui a trait aux péages, l'entente prévoit une augmentation annuelle de 2 p. 100 pour les cinq premières années. Pendant les cinq années suivantes, les augmentations seraient calculées en fonction de l'inflation avec un plafond fixé à 5 p. 100 par an. Selon leur performance, les utilisateurs pourront se voir accorder des rabais ou imposer des pénalités.
Tous les enjeux importants concernant la commercialisation ont été résolus avec les utilisateurs.
Voyons maintenant quelques-unes des raisons pour lesquelles nous croyons que l'entente proposée est positive. Comme les transporteurs et les expéditeurs ont beaucoup investi dans le réseau, il est dans leur intérêt de gérer la Voie maritime de façon à maximiser sa fiabilité et sa performance. En transférant la gestion de l'AVMSL au groupe d'utilisateurs, l'entente donne à ceux-ci un outil pour adapter le réseau à leurs besoins. Cela permet aussi à l'AVMSL de bénéficier de l'expertise des utilisateurs quant au secteur privé. Ce qui est proposé n'est ni plus ni moins que de mettre les utilisateurs dans une meilleure position pour qu'ils puissent faire une différence en améliorant l'efficacité du réseau. Le modèle suggéré des «coûts totaux» est particulièrement intéressant. Il encourage une discipline d'affaires dans la gestion des coûts d'opération et des dépenses en immobilisations et motive les utilisateurs à atteindre des résultats. Le groupe des utilisateurs contribue déjà à la transformation de l'AVMSL en un intervenant apte à faire face à tous ses concurrents sur le marché, aujourd'hui comme demain.
Jusqu'à l'adoption par le Parlement de la législation habilitante, j'ai la responsabilité des opérations courantes de l'AVMSL. J'aimerais donc vous faire part de quelques-unes des initiatives que nous avons entreprises en préparation à la commercialisation.
Il y a quelques années, l'AVMSL formulait ses priorités dans un énoncé de vision intitulé Vision 2002. Il avait pour but de rationaliser l'AVMSL par un processus d'attrition jusqu'en l'an 2002. Les objectifs fixés pour cette date seront de fait atteints à la fin mars 1999. En même temps, l'AVMSL a lancé deux nouvelles initiatives: l'initiative de qualité du service, et la mise en place d'équipes multifonctionnelles dont le but est d'améliorer l'efficacité dans l'exploitation et l'entretien.
L'organisation gère dix grands projets d'amélioration. En premier lieu, et de première importance, la commercialisation des activités de la Voie maritime du Saint-Laurent qui nous a permis de travailler en étroite collaboration avec les utilisateurs et avec Transports Canada. Dans le but de façonner certains des récents changements à la Voie maritime, il a été très utile de travailler avec quatre représentants du groupe d'utilisateurs qui cumulent une expérience collective de plus de 100 ans dans le domaine maritime.
J'aimerais aussi mentionner l'énorme contribution et la flexibilité qu'a su apporter M. Ranger, SMA, et toute son équipe à Transports Canada, qui a travaillé sans relâche à assurer une résolution positive au processus de négociation. Toutes ces personnes ont contribué à la réalisation des projets suivants: l'élaboration d'un plan d'entreprise décennal; la réingénierie de la structure de l'AVMSL et de ses processus en vue d'une efficacité améliorée et de meilleures pratiques opérationnelles; et la rationalisation de l'organisation par un programme d'incitation aux départs volontaires mis en place en collaboration avec le syndicat. D'ici la fin mars 1999, 119 employés auront quitté l'AVMSL, soit près de 17 p. 100 de notre main-d'oeuvre actuelle. Ce nombre inclut les employés qui se sont prévalus du programme de départ volontaire ainsi que les départs par attrition. La réduction totale de la main-d'oeuvre depuis 1991 atteindra ainsi 42 p. 100.
Les personnes mentionnées tout à l'heure nous ont également aidé à acheter un nouveau système informatique intégré de gestion, le SAP. Il sera mis en place en 1998 afin d'aider à la rationalisation des opérations proposées dans le rapport de réingénierie. L'AVMSL a aussi entrepris la création d'un partenariat avec le syndicat et les employés exclus afin d'assurer une collaboration dans nos efforts visant à transformer l'organisation pour qu'elle réponde mieux aux forces du marché et pour en améliorer la viabilité à long terme.
En décembre dernier, nous avons ratifié une nouvelle convention collective en vigueur jusqu'au 31 décembre 1998. Nous travaillons maintenant à créer un partenariat afin de développer une compréhension de nos besoins mutuels. Nous souhaitons travailler ensemble de manière proactive, afin que chaque partie puisse clarifier ses attentes et trouver des moyens pour gérer le partenariat.
Cette initiative repose sur une philosophie simple et dont je suis fermement convaincu. En augmentant la participation et l'autonomie des employés, le processus de gestion interne permettra l'épanouissement du potentiel de tous les employés. Cela contribuera à augmenter leur degré de satisfaction et, au bout du compte, conduira à une organisation plus efficace. Au cours des deux prochaines années, les systèmes régionaux de gestion du trafic maritime au sein de l'AVMSL seront remplacés par un seul système intégré afin de répondre aux besoins de nos utilisateurs.
Dans le but de répondre aux besoins de nos clients, nous poursuivons la mise en oeuvre de la phase II de notre initiative de qualité du service. De concert avec la réingénierie de l'organisation, l'AVMSL a identifié comme priorité l'élaboration et la mise en place d'un nouveau plan d'évaluation des emplois et de rémunération pour tous les employés. Nous avons tenu compte du projet de commercialisation de la Voie maritime et de la nécessité de demeurer compétitifs avec les autres modes de transport. C'est pourquoi nous avons changé la vision corporative de la Voie maritime comme suit: «Nous contribuerons à rendre la Voie maritime plus compétitive par rapport aux autres modes de transport en étant efficaces dans la livraison à nos clients de services de qualité adaptés à leurs besoins.»
Afin de relever les défis de gestion de l'AVMSL et de nous préparer à la commercialisation, nous avons mis en place une nouvelle structure corporative au sein de laquelle l'administration détient le pouvoir décisionnel. Un comité stratégique est responsable de recommander les priorités, plans et directions stratégiques, tandis qu'une équipe de gestion corporative doit gérer la réalisation des objectifs et buts corporatifs. Les membres de ces comités ont tous contribué de façon significative à l'élaboration et à la mise en place de nos grands projets.
L'AVMSL est prête pour la commercialisation de la Voie maritime et, grâce à l'apport des utilisateurs, nous serons en mesure d'entreprendre les démarches nécessaires pour assurer une transition facile vers une culture axée sur les besoins du marché.
Quelles sont les prochaines étapes après la commercialisation? L'enjeu le plus important pour les employés reste le fonds de pension. Ils ne veulent pas quitter le régime de la fonction publique. Le président sortant de l'AVMSL avait demandé au Conseil du Trésor de permettre aux employés de continuer de participer aux fonds de pension du gouvernement. Cette requête a été refusée parce que cela contrevenait à la politique actuelle sur les ressources humaines.
Suite à ma nomination, les représentants syndicaux m'ont demandé de retourner au Conseil du Trésor présenter à nouveau le point de vue des employés. Étant donné l'importance qu'ils accordaient à la question, j'ai fait appel à Transports Canada et ensemble nous sommes retournés devant le Conseil du Trésor. Celui-ci, se basant sur la politique en vigueur, n'a pas changé sa position.
Par la suite, dans le but d'obtenir le soutien et la coopération du syndicat dans le projet de coopération, l'AVMSL et les TCA ont convenu le 15 novembre 1997 de signer une lettre d'entente dans laquelle l'administration garantit que le nouveau fonds de pension offrirait à ses membres des prestations comparables et des caractéristiques semblables à celles offertes par l'AFPC. Malgré tous nos efforts, nous avons appris la semaine dernière que le syndicat était prêt à faire grève si on ne permettait pas aux employés de continuer à participer au fonds de pension du gouvernement après la commercialisation.
Il se pose donc deux problèmes. Tout d'abord, selon l'article 138 du projet de loi C-9, la société sans but lucratif offrira à ses employés des prestations comparables à celles dont ils jouissaient immédiatement avant le transfert. Nous avons effectivement l'intention d'offrir aux employés un fonds de pension globalement aussi généreux que celui de la fonction publique. Le deuxième problème découle du fait que le syndicat tient à demeurer sous le régime de la Loi sur la pension de la fonction publique après la commercialisation. Cela ne dépend absolument pas de nous. Nous avons l'intention de continuer à collaborer avec les représentants syndicaux pour la mise en place de solutions de rechange en vue d'un règlement acceptable.
En ce qui concerne l'exploitation du système, les agences canadiennes et américaines collaborent dans différents secteurs pour améliorer le service à la clientèle, mais un enjeu important et non résolu demeure: celui des péages. La section canadienne de la Voie maritime est autosuffisante et la majorité de ses revenus proviennent des péages. La section américaine, par contre, est financée à 100 p. 100 par le gouvernement fédéral américain, par le biais de crédits parlementaires annuels provenant d'un fonds de fiducie établi sous la loi américaine. Comme les intervenants de l'industrie ne veulent pas d'augmentations importantes des péages dans les années difficiles, il est essentiel de trouver une solution à long terme à cette question.
Il n'y a pas eu d'augmentation des péages depuis cinq ans. L'an dernier, le président sortant de l'AVMSL signait un projet d'entente avec SLSDC qui devait être ratifié par les deux pays avant de lier les parties. Le Canada a cependant refusé de le signer parce que les augmentations proposées sur certaines routes étaient trop élevées et mettaient le maintien de ces routes en péril. Nous voulons éviter des augmentations de péage qui nous feraient perdre des clients. Depuis, et ce malgré nos efforts répétés, il nous a été impossible d'arriver à une entente avec SLSDC. Si les péages restent gelés, le Canada pourrait avoir du mal à subvenir aux besoins financiers du système.
Quand j'ai réalisé que nous nous trouvions devant une impasse, je n'ai eu d'autres choix que de transférer le dossier à Transports Canada, en février de cette année. Les pourparlers entre Transports Canada et le Département américain des transports n'ont pas abouti à une entente. Afin de s'ajuster à l'inflation, il fut décidé de procéder en 1998 à une augmentation de 2 p. 100 qui entrera en vigueur le 1er juin, selon l'avis publié par l'AVMSL dans la Gazette du Canada, le 25 avril dernier. En 1986, en réponse à des besoins internes, les États-Unis avaient aussi décidé de modifier le mécanisme de financement de leur section de la Voie maritime en remplaçant les péages par le Harbour Maintenance Trust Fund.
Le concept d'une agence binationale pourrait être une prochaine étape une fois la commercialisation bien en place. L'AVMSL se consacre actuellement à mettre de l'ordre dans ses affaires en réduisant le plus possible ses coûts. Comme nous avons un comportement plus commercial, nos coûts par écluse sont beaucoup plus bas que ceux des États-Unis, ce qui est dans l'intérêt autant des utilisateurs américains que canadiens.
Vu les pressions qu'exerce la concurrence sur le marché, les administrations canadienne et américaine devraient rationaliser leurs opérations pour mieux s'adapter aux réalités du marché et être plus compétitives avec les autres modes de transport. Une fois qu'elles auront réduit leurs coûts, nous pourrons nous diriger vers la création d'une agence binationale, mais seulement si nous pouvons démontrer que la Voie maritime en ressortirait plus efficiente au niveau des coûts, et que les utilisateurs obtiendraient un meilleur service.
Dans ce cas, les coûts pourraient être équitablement partagés entre les deux pays. Comme vous pouvez le constater, les coûts additionnels, les nouvelles règles du jeu, les nouveaux étalons de performance du marché menacent l'attrait compétitif de la Voie maritime. Le transport maritime est encore la meilleure solution lorsqu'on souhaite minimiser l'impact environnemental pour la société en général. Nous consommons moins d'énergie que les autres modes de transport et nous faisons une meilleure utilisation des ressources disponibles. Nous devrions avoir pour objectif ultime d'opérer un service de transport continu, fiable, sécuritaire et compétitif, comme le souhaitent les expéditeurs et les destinataires, et qui soit à l'avantage de tous les Canadiens.
Au cours des neuf derniers mois, les utilisateurs ont grandement contribué à guider la transformation de l'AVMSL en une entité plus commerciale. Leur contribution sera nécessaire à l'avenir afin d'exercer un plus grand contrôle sur la compétitivité de la Voie maritime dans son ensemble.
[Français]
La présidente: Je suis contente que vous ayez mentionné les négociations avec les employés qui étaient ici la semaine dernière et qui nous faisaient part de leurs préoccupations quant au plan de retraite.
Est-ce dans une négociation que vous arriverez à régler ce dossier entre vous et vos employés?
M. Fournier: Nous nous y efforçons. Il y a des négociations depuis que j'ai été nommé président. Nous avons fait beaucoup d'efforts en vue d'un partenariat avec le syndicat, avec nos employés. Ils sont ici aujourd'hui d'ailleurs. Beaucoup de travail a été fait à ce sujet.
Il est certain, comme je le disais auparavant dans mon discours, que nous voulons donner à nos employés un système de pension équivalent sinon meilleur à celui qu'ils ont actuellement. Beaucoup de travail a été fait, beaucoup de rencontres ont eu lieu entre le groupe patronal et le groupe syndical. Beaucoup d'efforts ont été faits. D'ici deux semaines environ, nous devrions avoir un document à remettre aux gens du syndicat.
Nous allons tout faire pour régler la situation dans un partenariat complet avec eux. D'autre part, j'ai entendu ce qui a été dit la semaine dernière ici. Les employés voulaient faire la grève s'ils n'avaient pas le système PSAC du gouvernement. Ce sont des politiques gouvernementales et là-dessus, je ne peux rien y faire.
La présidente: Vous êtes liés par les politiques gouvernementales?
M. Fournier: Oui, il est certain que nous allons tout faire pour régler la situation. Avec le syndicat, nous avons déjà créé en quelques mois un très bon partenariat. Nous l'avons encore vécu la semaine dernière. Vous connaissez, en Ontario, tous les problèmes que nous avons vécus. Les syndicats font des grèves un peu partout dans chacune des villes. Il y en a eu une la semaine dernière à St. Catharines. La voie maritime était aussi visée. Nous avons quand même eu un bon partenariat avec le syndicat. On s'est organisé et il n'y a eu aucun problème pour la Voie maritime. C'est une façon de démontrer notre façon de travailler ensemble.
La présidente: C'était une préoccupation de mes collègues. Est-ce que vous avez fait une étude approfondie des possibilités d'achalandage sur la Voie maritime? Est-ce que l'on peut être optimiste et penser que le trafic va être suffisant pour assurer que la commercialisation soit un succès?
M. Fournier: Les quatre dernières années ont été très positives. Il y a deux ans, 1996 a été la meilleure année de la Voie maritime depuis les dix dernières années. Nous avons un fonds, une réserve de 46 millions de dollars. Beaucoup de choses se font aussi depuis plusieurs années. Depuis 1991, il y a eu aussi des diminutions de coût de 25 p. 100 grâce au travail fait par mon prédécesseur. Nous avons une autre rationalisation qui a déjà été acceptée par le syndicat et qui a été faite en collaboration avec eux. Il y a eu un départ volontaire. Personne n'a été mis à la porte. Cela a été fait de façon volontaire avec nos employés, dans le plus grand respect. Un autre 17 p. 100 de gens vont nous quitter d'ici la fin de mars 1998.
On se pose toujours la question de ce que sera le trafic. Depuis les quatre dernières années, notre trafic a été excellent: depuis les quatre dernière années, nous avons une moyenne de 74 millions de dollars de péage par année. Ce qui est exceptionnel. Les utilisateurs actuellement injectent beaucoup d'argent à l'intérieur du système. Comme je le mentionnais auparavant, nous avons prévu des augmentations de péage de deux p. 100 par année pour les cinq prochaines années, et les utilisateurs sont d'accord à payer plus pour s'assurer que nous allons conserver le système en bon état.
Cependant pour savoir quelle sera notre compétitivité exacte dans cinq ans ou dans trois ans, tout dépend de l'économie mondiale. C'est la raison pour laquelle il est très difficile pour les utilisateurs de prendre un système qui vaut cinq milliard de dollars et d'être responsable des revenus alors qu'ils n'ont aucun contrôle des revenus. Si l'économie mondiale va bien, s'il y a beaucoup de ventes d'automobiles, il va y avoir beaucoup d'acier ou beaucoup de minerai de fer à transporter, mais si cela ne fonctionne pas bien, tout va baisser. Vraiment, l'économie mondiale gère cela.
De notre côté, nous avons tout fait pour baisser les coûts et arriver à un système le plus compétitif possible.
[Traduction]
Le sénateur Forrestall: Je ne me souviens que trop bien de l'époque où nous avons commencé à chercher des solutions à ces problèmes. En écoutant votre présentation fort complète, je me suis rendu compte que vous n'avez pas besoin de ce projet de loi pour vous acquittez de votre responsabilité. Vous êtes déjà bien avancé, en réalité. Je me demande si vous trouvez ce projet de loi important, ou si vous pensez qu'il pourrait vous aider; le cas échéant, comment?
M. Fournier: C'est une bonne question. Comme je l'ai dit, tout ce que nous avons entrepris au cours des neuf derniers mois, nous l'avons fait avec l'entière collaboration du groupe des utilisateurs. Nous avons discuté ensemble toutes les grandes questions et nous avons travaillé en partenaires. Nous avons actuellement d'autres problèmes à régler. Pour vous donner un exemple, le CN commence à nous poser un problème. À cause de la privatisation qu'il a subie en 1991. Vous avez vu ce qu'il a réussi à faire.
Si nous restons en l'état, sans commercialisation, il est vrai que nous avons accompli beaucoup de choses au cours des neuf derniers mois, mais il reste encore beaucoup à faire. N'oubliez pas que les utilisateurs ont dû le faire dans les années 80. Pour eux, c'était une question de survie. Ils n'avaient pas le choix. Beaucoup de gens ici qui étaient en affaires à l'époque savent ce qui s'est produit alors. Il fallait restructurer, faire des tas de choses pour survivre. C'est ce que nous vivons actuellement avec la Voie maritime si nous voulons être plus compétitifs. Je n'ai pas parlé de ces puissantes locomotives que le CN a achetées l'an dernier, ou de leurs nouveaux wagons d'un tiers plus grands. Il nous faut tous les outils possibles pour bien pouvoir gérer la Voie maritime. Je dois dire que l'aide que m'a apporté le groupe des utilisateurs, avec tous les changements que nous avons mis en oeuvre au cours des neuf derniers mois, m'a été très utile et nous continuerons d'avoir besoin de leur aide à l'avenir.
N'oubliez pas que cette aide nous a été offerte à cause du projet de loi C-9. Sans celui-ci, ils ne seraient pas venus vers nous. Vous n'imaginez pas le temps et l'énergie que nous avons dû consacrer à cela.
Le sénateur Forrestall: Ils l'ont fait, convaincus que le projet de loi serait adopté.
M. Fournier: Ils ont pensé que le projet de loi serait adopté. Les organisations de propriétaires canadiens poussent en ce sens. Les fédérations d'expéditeurs, la Chambre du commerce maritime, et beaucoup d'autres affirment que ce n'est peut-être pas la perfection, mais qu'il faut l'accepter parce qu'il est important et c'est au moins un premier pas.
Le sénateur Forrestall: Mais n'agissez-vous pas sur le dos d'autres personnes? Je vous pose la question parce qu'un groupe prétend que ce projet de loi présente de sérieux défauts.
Je crains qu'il ne crée un déséquilibre. Avec la nouvelle loi, vous auriez toujours la possibilité d'emprunter de l'argent, d'obtenir des garanties du gouvernement, entre autres. Mais les ports ne le pourront pas. Si vous prenez le port d'Halifax avec sa capacité, limitée qu'elle est, et sachant qu'il doit pouvoir attirer la flotte post-Panamax que l'on est en train de créer, qu'il doit se rééquiper, acheter de plus grandes grues, à longue portée, comment voyez-vous la concurrence dans le transbordement, entre le CN et les navires plus modestes, aux dimensions de la Voie maritime? Pensez-vous qu'il pourrait un jour devenir le principal concurrent du CN?
M. Fournier: On a beaucoup parlé du transport intermodal. Tout le monde en parle depuis quelques années, et pas seulement au Canada. L'idée est partie des États-Unis. Nous parlons plutôt de transbordement. Nous aurons un navire dans le Bas Saint-Laurent -- cela pourrait être un Panamax -- de 50 000 tonnes ou plus, et nous transborderons sur un vaisseau de 25 000 tonnes ou moins, pour pouvoir remonter la Voie maritime jusqu'à Chicago, Hamilton, ou ailleurs.
C'est la même chose dans l'autre sens. Les céréales en provenance de Duluth ou Thunder Bay descendent le Saint-Laurent dans des navires à la dimension de la Voie maritime, d'environ 25 000 tonnes, puis sont transbordées sur un Panamax équipé d'un auto-chargeur.
Le sénateur Forrestall: À quels ports songez-vous?
M. Fournier: Comme je l'ai dit, nous relions 61 ports canadiens et américains, de tailles diverses.
Pour ce qui est de la loi... je ne l'ai pas faite, je m'en accommode. Je ne peux pas vous dire si elle est bonne ou non. Ce que je peux vous dire cependant, c'est que nous voyons les choses comme cela pour la Voie maritime. Le CN, bien sûr, surtout depuis l'achat d'Illinois Central Corporation, ne va plus seulement d'Est en Ouest, mais aussi du Nord au Sud. La Voie maritime devra en tenir compte.
Je ne voudrais pas non plus que les sénateurs oublient que nous n'avons actuellement aucun infrastructure capable de remplacer la Voie maritime.
Au cours des quatre dernières années, nous avons vu transiter par là près de 50 millions de tonnes par an de denrées en vrac. Nous n'avons pas d'autres installations de ce genre, et nous avons aussi une obligation face aux États-Unis. Nous ne pouvons pas l'oublier. Nos relations sont bonnes, sauf sur la question importante des péages; il y a aussi la question d'une agence binationale.
En français, nous disons que c'est le monde à l'envers, car de la manière dont ils veulent procéder, ils auront au conseil d'administration des gens dominés par le président Clinton. Nous disons quant à nous que la commercialisation est la meilleure solution parce que les gens sont directement impliqués. C'est comme cela que je vois les choses.
Le sénateur Forrestall: Pourriez-vous nous parler de la Voie maritime même? Est-ce que sa structure est solide? Prévoyez-vous de gros emprunts au cours des six ou sept prochaines années?
M. Fournier: Pas dans les six prochaines. Peut-être à moyen ou long terme, il pourrait y avoir quelque chose.
La présidente demandait tout à l'heure quel genre de trafic nous prévoyons au cours des deux à cinq prochaines années. C'est difficile à dire. L'économie est mondiale. Si elle fléchit, nous pourrions perdre beaucoup d'activités. Par exemple, il y a cinq ans, nous n'avions pas un sous en banque et un déficit de 75 ou 85 millions de dollars. Aujourd'hui, nous avons un déficit de 45 millions inscrits dans nos livres à cause de l'amortissement, et 46 millions en banque. Les choses changent rapidement.
Ce que voulait Transports Canada, quand nous en avons parlé, c'était que les utilisateurs puissent s'attaquer à la question des coûts et permettre l'autonomie. Tout le monde comprend bien qu'il ne s'agit pas d'un port d'un ou deux kilomètres de long; la Voie maritime s'étale sur 2 000 kilomètres, avec tous les problèmes que cela peut entraîner. Elle vaut 5 milliards de dollars. Elle est canadienne, elle est à nous.
Tout d'abord, à Transports Canada tout le monde veut s'assurer que nous prenons bien soin de la Voie maritime. C'est la priorité la plus importante. Deuxièmement, nous allons faire tout notre possible pour assurer notre autonomie financière. Si nous continuons d'avoir des exercices comme les quatre derniers, nous n'aurons pas besoin de crédits avant longtemps. Cela n'arrivera pas même dans les dix premières années.
Le sénateur Forrestall: Qui va payer pour le dragage en aval de la Voie maritime?
M. Fournier: Cela ne nous concerne plus. Nous nous occupons de la partie de Montréal jusqu'ici. Nous nous occupons de notre partie.
Le sénateur Forrestall: Mais si certaines sections du fleuve ne sont pas draguées, vous ne pourrez même pas y faire passer des navires de 25 000 tonnes.
M. Fournier: Tous les ports ont besoin d'être dragués. Il y a quelques mois, une de mes connaissances voulait faire quelque chose à propos du dragage dans la partie inférieure du Saint-Laurent, mais ça allait beaucoup plus loin qu'il n'est nécessaire pour la Voie maritime. Nous n'avons pas besoin d'autant.
Des articles parus récemment dans la presse négligeaient de dire que nous avons connu quatre années excellentes, que nous avons réduit nos dépenses, encaissé des bénéfices, et connu quelques très bonnes années.
La présidente: Les bonnes nouvelles ne font jamais les manchettes.
M. Fournier: Très juste.
Le sénateur Forrestall: Je vous fais tous mes voeux. Je vous rappelle cependant qu'il est important pour nous, dans les Maritimes, que la règle soit aussi équitable que possible. Si les autorités fédérales donnaient un avantage à un élément du système -- et je veux parler de tous les ports, de Thunder Bay jusqu'à St. John's, à Terre-Neuve -- qui pourrait améliorer la compétitivité d'un port par rapport à un autre, ce serait très mauvais. Ce serait contraire aux intérêts du secteur privé qui investit dans le système, dans l'équipement nécessaire pour servir ses clients. Vous le savez aussi bien que moi.
M. Fournier: Il faut bien comprendre que la Voie maritime est unique. Je ne le dis pas parce que j'en suis le président, mais elle est vraiment unique. Elle est seule de son genre au monde.
Le sénateur Forrestall: Elle est unique pour nous parce qu'elle nous permet d'être rentables.
[Français]
Le sénateur Roberge: Est-ce que la privatisation de la Voie maritime aurait été viable si vous n'aviez pas eu droit à l'emprunt?
M. Fournier: Je ne pense pas que cela aurait pu être viable. Nous avons un système énorme sur le plan physique, 2 000 kilomètres; il n'est pas jeune non plus. Des parties de notre système ont été construites en 1932, d'autres en 1959 et ainsi de suite.
Le niveau des dépenses globales nous rattrape toujours. On ne joue pas avec du neuf actuellement mais avec un système âgé et même très âgé dans certains coins. Actuellement, je peux vous garantir que ce système est en bon état. Au niveau de la sécurité, il n'y a aucun problème également. Cela va bien.
Si on regarde l'économie globale, à un moment donné, les dépenses à faire sur la Voie maritime vont nous rattraper. Pour nous, cela est très clair. Comme je le disais auparavant, notre situation est unique parce qu'il y a quand même 61 ports canadiens et américains qui font affaire avec nous. En plus de cela, il y a l'obligation internationale, ce qui est quand même très différent.
Dans combien d'années? Tout dépend de l'économie mondiale. Tant que l'économie mondiale va bien, je crois que nous allons continuer à avoir de bonnes années, de bonnes réussites et des profits. Si l'économie mondiale baisse, notre réserve va baisser.
Le sénateur Roberge: Vous avez une situation unique à maints égards. Certains ports ont des situations uniques et pour qui le phénomène que vous mentionnez est aussi vrai, mais à un degré différent. Pour eux, c'est à un degré important.
M. Fournier: C'est toujours plus unique quand c'est pour nous.
Le sénateur Roberge: Je tiens à vous féliciter de votre présentation et aussi de vos réalisations des neuf derniers mois.
M. Fournier: Je vais essayer de faire cela pour vous donner le maximum d'informations possibles.
[Traduction]
Le sénateur Bryden: Contrairement à ce qu'on pense, je n'ai aucune objection aux avantages que confère le projet de loi C-9 à la Voie maritime, et au contraire, je m'en réjouis. Dans la partie du projet de loi qui touche la Voie maritime, il est énoncé clairement que celle-ci doit viser la rentabilité commerciale, mais qu'elle doit, ce faisant, tenir compte des conditions économiques de la collectivité qui l'entoure. Il y est précisé également que l'Administration de la Voie maritime continuera d'avoir accès au Trésor public, lorsque les circonstances le justifient, afin de garantir ses emprunts ou pour les subventions qui seront payées à même le Trésor public.
Après tout ce que j'ai entendu du ministère des Transports, de vous-même et d'autres, je suis convaincu que cette voie maritime tout à fait unique mérite notre soutien. Je m'en félicite donc.
Mais il y a d'autres sections, d'autres ports, qui n'ont pas les mêmes avantages. J'aimerais parler de l'importance, par exemple, du port maritime en eau profonde de Canso, en Nouvelle-Écosse. Son développement économique, ainsi que celui des collectivités avoisinantes, est tout aussi important que le développement de la Voie maritime.
Ces ports, y compris celui d'Halifax, ne peuvent pas obtenir d'argent du Trésor. Ils doivent atteindre la rentabilité ou cesser d'exister.
Nous ne souhaitons absolument pas enlever des avantages à la Voie maritime. Mais, pour que le reste du système de transport par eau au Canada soit traité équitablement, il va falloir égaliser les règles du jeu.
Vous avez parlé du CN. Plus l'acheminement des marchandises vers l'est est rentable pour le CN, mieux cela vaudra pour le port d'Halifax, celui de Québec ou celui de Saint-Jean. Par soucis d'objectivité et d'impartialité, je parlerai d'Halifax.
Si l'on n'offre pas aux ports les mêmes avantages qu'à la Voie maritime afin de permettre la commercialisation et les améliorations au système ferroviaire, des ports comme celui d'Halifax seront lésés. Par exemple, que je sache, vous ne payez pas le brisage de glace. C'est exact?
M. Fournier: Non, ce n'est pas exact. Cela fait partie des négociations en cours avec la Garde côtière. Nous devrons, à l'avenir, payer les services de brise-glace. Nous négocions également les besoins en matière de navigation. Nous devons payer, comme tout le monde.
Le sénateur Bryden: Actuellement vous ne payez pas.
M. Fournier: Nous payons pour nos propres navires. Ceux qui transitent par là doivent payer pour eux-mêmes.
Le sénateur Bryden: Vous êtes en train de constituer un fonds de réserve de 46 millions de dollars. L'avez-vous déjà?
M. Fournier: Nous avons actuellement un fonds d'environ 45 millions de dollars.
Le sénateur Bryden: Transports Canada a publié un document d'information sur la commercialisation de la Voie maritime en date du 19 septembre 1996. On y parle de la nécessité de commercialisation, ainsi que du plan d'entreprise de 1996 où l'on prévoit l'épuisement des réserves de 45 millions de dollars. On y mentionne également un déficit de 16 millions que le gouvernement devra absorber.
M. Fournier: Nous n'avions pas prévu que 1997 serait une bonne année, mais elle l'a été, et c'est ce qui a fait toute la différence. En une année, la différence peut atteindre 5 à 10 millions de dollars.
Le sénateur Bryden: Mais ces chiffres devaient s'appliquer à 1996. À l'époque, vous prévoyiez un déficit de 56 millions de dollars.
M. Fournier: Les réductions des coûts prises en compte n'étaient pas aussi importantes que celles que nous avons obtenues. Il y a 119 employés en moins à payer. Cela représente beaucoup d'argent. Il faut compter un salaire moyen de 50 000 $, plus 30 p. 100 pour les avantages sociaux. Si vous multipliez par 119, vous constatez que cela représente une économie annuelle importante.
Le sénateur Bryden: Vous n'avez pas payé de prestations de départ?
M. Fournier: Nous payons tout cela dans l'exercice 1997-1998.
Le sénateur Bryden: Le rapport fait état d'une autre bonne raison de commercialiser la Voie maritime. Apparemment, au cours des dix dernières années, elle aurait nécessité des crédits fédéraux de 175 millions de dollars pour une importante réfection du canal Welland. Est-ce exact?
M. Fournier: Cela a été fait entre 1987 et 1993.
Le sénateur Bryden: La partie du rapport qui m'inquiète le plus est celle où l'on parle de la concurrence des expéditions ferroviaires qui aboutissent à Québec, à Halifax ou à Saint John. Si ces expéditions ferroviaires augmentaient, ces ports pourraient devenir rentables. Si la Voie maritime du Saint-Laurent continue d'avoir accès au Trésor pour financer ses travaux d'amélioration, tandis que nos ports n'y ont pas accès, vous pourrez non seulement faire concurrence aux chemins de fer, mais vous aurez aussi un avantage sur les ports de destination qui ne pourront plus faire concurrence aux vôtres.
M. Fournier: J'aimerais pouvoir vous dire que je permettrai à ces ports d'avoir accès au Trésor, mais c'est au ministre qu'il faut poser la question.
Le sénateur Bryden: Je l'ai posée et je la poserai à nouveau.
Vous l'avez dit, beaucoup de secteurs de l'industrie maritime souhaitent l'adoption de ce projet de loi, comme d'ailleurs la plupart des personnes autour de cette table. Mais nous voulons une loi qui soit avantageuse pour toutes les personnes concernées par le transport par eau au Canada, et non qui en lèse certaines.
La présidente: Merci, messieurs.
Nous allons maintenant entendre les porte-parole de la Compagnie minière IOC, de l'Aluminerie Alouette Inc. et de Wabush Mines.
Allez-y.
[Français]
M. Gilles Blouin, vice-président, Aluminerie Alouette Inc.: Madame la présidente, j'aimerais me présenter, je m'appelle Gilles Blouin, je suis à l'emploi de Aluminerie Alouette, son plus ancien employé en service mais non en âge. Je suis accompagné ce soir de M. Damien Lebel, le directeur général des Mines Wabush et de M. Keith Eldridge, vice-président à la compagnie minière IOC. Nous vous remercions de nous avoir permis de vous présenter notre mémoire qui, nous l'espérons, sera court mais touchant.
La présentation est en deux parties: premièrement, nous essaierons de vous faire un sommaire où nous sommes situés, et, dans la deuxième partie de notre exposé, nous vous exposerons plus particulièrement la composition des membres du bureau de direction d'un port tel que celui de Sept-Îles.
Cette présentation est faite au nom des trois principaux utilisateurs et des trois principaux contribuables aux revenus du port de Sept-Îles. Les entreprises que nous représentons sont Aluminerie Alouette Inc, un producteur d'aluminium qui emploie 572 personnes; la compagnie minière IOC, une entreprise d'extraction et d'enrichissement de minerai de fer qui opère à Sept-Îles, Québec et à Labrador City, Terre-Neuve et qui emploie 2 250 personnes; et Mines Wabush qui opère une mine à ciel ouvert et un concentrateur à Wabush, Terre-Neuve, ainsi qu'une usine de «boulettage» à Sept-Îles et qui emploie 750 personnes.
Sept-Îles, comme vous pouvez le constater sur la carte géographique est située à environ 1 000 kilomètres au nord-est de Montréal, et a une population d'un peu plus de 25 000 habitants. Et, élément essentiel dans notre présentation, cette ville n'est pas entourée par des banlieues pour assurer ses besoins économiques, sociaux ou industriels.
Nous aimerions vous rappeler qu'en 1997, et dans les années antérieures, le port de Sept-Îles a enregistré le deuxième plus gros volume d'activités au Canada avec 24 474 millions de tonnes, précédé seulement par Vancouver. Un extrait d'informations statistiques sur les activités du port de Sept-Îles est joint à ce document. Cet extrait provient de «National Marine Policy, Harbours and Ports Booklet», préparé par Transports Canada et publié en décembre 1995.
Les trois entreprises que nous représentons génèrent au-delà de 85 p. 100 des revenus d'exploitation reçus par le port de Sept-Îles et contribuent à plus de 95 p. 100 du tonnage transporté.
J'aimerais demander maintenant à M. Eldridge de poursuivre pour la partie que concerne la loi elle-même.
[Traduction]
M. Keith Eldridge, vice-président, Compagnie minière IOC: Dans l'ensemble, nous appuyons le projet de loi C-9 et nous attendons avec empressement sa mise en vigueur. Cependant, nous sommes aussi profondément inquiets de la partie qui définit la composition du conseil d'administration des administrations portuaires.
L'article 14 de la partie I définit la nomination des administrateurs, la durée de leur mandat et leur rémunération.
L'article 15 stipule l'expérience et les connaissances que devront posséder les administrateurs pour agir à titre d'administrateurs d'un port. Nous appuyons fortement le contenu du paragraphe 15(2) qui stipule:
Ceux nommés en conformité avec l'alinéa 14(1)d) doivent, outre ce qui est prévu au paragraphe 1, posséder des connaissances pertinentes ainsi qu'une expérience importante liées à la gestion d'entreprise, au fonctionnement d'un port ou au commerce maritime.
L'article 16 définit des personnes qui ne peuvent être administrateurs d'une administration portuaire. L'alinéa 16e) précise en effet:
16. Les personnes suivantes ne peuvent être administrateurs d'une administration portuaire:
e) les administrateurs, dirigeants et employés d'un utilisateur du port;
Nos trois entreprises en sont profondément inquiètes. Dans une collectivité peu peuplée, comme c'est le cas de Sept-Îles, cette disposition restreint considérablement les candidats possibles qui ont les connaissances et l'expérience exigées par l'article 15.
Nous sommes également inquiets de ce que les grandes entreprises, qui génèrent une part considérable des revenus d'une administration portuaire, pourraient être négativement affectées par les décisions d'administrateurs qui n'auraient pas les connaissances et l'expérience reliées à l'administration portuaire.
Nous comprenons que le gouvernement ait voulu introduire cette restriction par soucis d'éviter la perception d'un conflit d'intérêt. Mais nous pensons qu'il existe déjà des mesures pour contrer cette éventuelle perception, notamment l'arbitrage par le biais de Transports Canada.
De plus, lorsque le gouvernement du Canada a mis en place NAVCAN, il y a de cela plus de 18 mois, il a été établi que les utilisateurs pourraient avoir un siège au conseil d'administration, et ce fut notamment le cas de l'Association des transporteurs aériens du Canada. Ainsi, la nomination de représentants des utilisateurs au sein des conseils d'administrations portuaires ne constituerait pas un précédent.
Nous vous remercions de votre attention et nous espérons que vous accueillerez favorablement notre présentation.
Nous croyons que le gouvernement du Canada doit apporter les changements administratifs nécessaires au projet de loi C-9 afin de permettre aux représentants des utilisateurs de siéger aux conseils d'administration dans le cas de villes comme celle de Sept-Îles.
[Français]
Le sénateur Roberge: Je vous remercie beaucoup de votre présentation. Il n'y a pas de doute que la situation de Sept-Îles est vraiment particulière dans son contexte du port et avec les utilisateurs. Je vois très favorablement votre requête. À l'échelle canadienne, cette situation n'est pas vraiment nécessaire parce qu'il y a toujours des façons de pouvoir enlever le danger du conflit d'intérêt qui peut exister.
Les représentants du port de Canso ont témoigné la semaine dernière et ils ont fait une demande pour devenir une catégorie spéciale qui s'appellerait un «superport». D'après vous, quelle est la différence entre le port de Canso et celui de Sept-Îles?
M. Blouin: Je ne crois pas que le port de Canso ait le tonnage ou le volume qui peut être transbordé dans un port dans une année. Je crois, sauf erreur, que Canso, tout comme nous, doit être accessible à l'année longue. Ce port peut servir dans beaucoup d'activités en vrac, parce que, en fait, Sept-Îles est principalement un endroit où il se transborde beaucoup de vrac, c'est l'essentiel du volume, que ce soit du minerai de fer, de l'alumine, de l'aluminium ou ce genre de produit. En toute honnêteté, je ne suis pas vraiment familier avec le port de Canso, mais s'il doit y avoir un super port dans la région est, je crois bien que Sept-Îles pourrait en être un. C'est mon humble opinion.
Le sénateur Roberge: Quelqu'un d'autre a un commentaire là-dessus?
[Traduction]
Le sénateur Bryden: Est-ce que Sept-Îles est un port en eau profonde?
M. Blouin: Oui. L'entrée principale atteint une profondeur de 900 pieds, et de 150 brassées au quai. Le quai de la Compagnie minière IOC, à 150 pieds de la rive, a 65 à 70 pieds de profondeur. Vers nos propres installations, nous avons 50 à 60 pieds d'eau.
La baie de Sept-Îles est très profonde. Elle mesure 18 milles de long sur quatre milles de large, et son entrée est bien protégée par sept îles, d'où son nom. La baie est accessible toute l'année; l'eau y est donc très profonde.
M. Eldridge: En octobre 1993, la Compagnie minière IOC a chargé le plus gros navire qui ait jamais été chargé en Amérique du Nord: 250 000 tonnes de minerais de fer. Le port est ouvert 12 mois par an. Comme l'a dit M. Blouin, le tirant d'eau est de 60 à 65 pieds. Nous pouvons recevoir des vaisseaux de 250 000 tonnes.
Le sénateur Bryden: Devez-vous draguer?
M. Blouin: À leur quai, le dragage n'est nécessaire que tous les deux ans. Au nôtre, il n'est pas nécessaire.
Le sénateur Bryden: Nous avons entendu que Canso avait dans son port un pétrolier de 325 000 tonnes et qu'il pouvait accueillir des navires encore plus grands.
Le Port de Sept-Îles a été désigné comme port local régional en vertu de la politique maritime nationale de décembre 1995. Savez-vous pourquoi il est ensuite devenu une commission portuaire?
M. Blouin: Dans l'ancien système, le Port de Sept-Îles faisait partie de Ports Canada. Au départ, je crois que six ou sept ports avaient été maintenus dans cette structure, notamment parce qu'ils étaient rentables. C'était donc intéressant pour Ports Canada de garder le port de Sept-Îles.
Le sénateur Bryden: Je pose la question à cause de votre inquiétude devant la participation des utilisateurs au conseil d'administration. Si le port était resté local régional, il serait géré par les trois compagnies.
M. Blouin: C'est exact.
Le sénateur Bryden: Vous n'auriez pas ce problème.
M. Eldridge: C'est exact.
M. Blouin: Tout à fait. Mais ce n'est pas nous qui avons changé la loi.
Le sénateur Bryden: À votre connaissance, est-ce que c'est la ville qui a demandé ce changement?
M. Blouin: Je dirais que c'était à la demande de Ports Canada.
Disons les choses comme elles sont: Ports Canada avait besoin de revenus et le port de Sept-Îles, étant rentable, représentait une bonne source de revenu. À mon avis, c'est une assez bonne raison pour le confier à Ports Canada.
Le sénateur Bryden: On se préoccupe beaucoup de maintenir la viabilité et le dynamisme de l'industrie minière au Canada. La semaine dernière, j'ai entendu dire que 50 p. 100 de la production mondiale de minerais de fer part de Sept-Îles.
M. Eldridge: C'est en fait 18 p. 100 des boulettes de minerai de fer produites au monde qui proviennent de la Côte Nord: Wabush, la Compagnie minière Québec Cartier et la Compagnie minière IOC.
M. Damien Lebel, directeur général, Wabush Mines: C'est sans doute 50 p. 100 de la production nord-américaine.
Le sénateur Bryden: Est-il exact que 90 p. 100 de la production canadienne vient de la côte Nord?
M. Lebel: Au Canada, oui. Et ce sera bientôt 100 p. 100.
Le sénateur Bryden: Est-ce préférable pour la compétitivité que le port soit APC plutôt que port local? Est-ce qu'il y a un avantage à une désignation ou est-ce que ça ne fait aucune différence?
M. Eldridge: Si ces trois compagnies ne sont pas représentées au conseil, tandis qu'elles versent près de 7 millions de dollars au Port de Sept-Îles, nous craignons que certaines décisions puissent être prises qui ne correspondent pas aux intérêts des trois plus grands utilisateurs.
Le sénateur Bryden: Êtes-vous représenté au conseil actuellement?
M. Eldridge: Non.
M. Blouin: Actuellement, les gens sont compétents. Il y a toujours possibilité de s'adresser à Transports Canada. La nouvelle structure prévoit une administration locale et on se demande qui reste-t-il une fois exclus tous ceux que la loi interdit? C'est ce qui nous inquiète.
Le sénateur Forrestall: Je regarde ici le paragraphe 15(2).
M. Eldridge: L'article 15 stipule les connaissances ou l'expérience que doivent avoir les personnes nommées au conseil d'administration d'une autorité portuaire. L'article 14 décrit les nominations et le mandat des administrateurs. Ce qui nous inquiète, c'est l'alinéa 16e), selon lequel les administrateurs, dirigeants et employés d'un utilisateur du port ne peuvent être administrateurs d'une administration portuaire.
Le sénateur Forrestall: Est-ce que ça marcherait?
M. Blouin: À Sept-Îles, il n'y a personne qui ne travaille pas pour IOC, Wabush ou Alouette, ou qui ne soit pas propriétaire de navires.
Le sénateur Forrestall: Parfois l'épicier peut être un excellent entrepreneur.
Je vois pourquoi vous indiquez qu'il pourrait y avoir conflit d'intérêt. Mais ce genre de raison pour exclure quelqu'un d'une autorité portuaire ne vole pas très loin aujourd'hui, n'est-ce pas?
M. Blouin: Non, pas aujourd'hui.
Le sénateur Forrestall: Avez-vous un transbordement en port actuellement?
M. Blouin: Tout à fait. Nous en avons eu juste la semaine dernière.
Le sénateur Forrestall: Est-ce que vous transbordez du charbon?
M. Blouin: Oui.
M. Eldridge: Nous avons transbordé du charbon de Devco, de fait, il y a trois ou quatre ans.
Le sénateur Forrestall: Vous dites que vous pouvez accueillir des vaisseaux assez importants. Sûrement pas aussi gros que ceux que peut accueillir le port d'Halifax.
M. Blouin: Peut-être devriez-vous venir nous voir. Nous sommes de bons hôtes.
Le sénateur Forrestall: La vie de la Voie maritime dépend dans une large mesure du marché de l'acier. Nous avons vu l'effet des plastiques et autres produits synthétiques. Ils ont d'ailleurs considérablement ralenti vos propres opérations.
A-t-on des études de marché indiquant que le minerai de fer va continuer de bien se porter à l'avenir?
M. Eldridge: Nous estimons que la demande va augmenter, mais pour un minerai de fer différent de celui que la Compagnie minière IOC est en mesure de produire aujourd'hui. Le marché du fer de réduction directe va connaître une expansion importante. Grâce à l'introduction d'un système de flottation, nous sommes actuellement en mesure de réduire à environ 1 p. 100 le contenu de silice, et nous pouvons donc nous tourner vers ce marché.
Avec les nouveaux actionnaires majoritaires australiens, la Compagnie minière IOC examine actuellement la possibilité d'agrandir les installations au Labrador ou peut-être de rouvrir l'usine de boulettes à Sept-Îles qui avait fermé en 1991.
Nous prévoyons une expansion du marché. Nous avons pu diversifier notre type de production lors des temps d'arrêt. Comme l'ont dit nos collègues de la Voie maritime, les quatre dernières années ont été bonnes, mais il ne fait aucun doute que le marché du minerai de fer et de l'acier va subir un recul. Nous espérons que le moment venu, nous serons en mesure de maintenir nos niveaux grâce à la diversité de nos produits. Nous avons confiance en l'avenir.
Le sénateur Forrestall: Êtes-vous satisfait des lois environnementales actuelles touchant le port?
M. Eldridge: Relativement.
Le sénateur Forrestall: La nouvelle loi éliminerait ces exigences.
M. Eldridge: Vous parlez des questions environnementales dont traite le projet de loi C-9. Cela ne nous pose pas de problème pour nos opérations.
Le sénateur Forrestall: Vous êtes capable de mettre sur pied vos propres procédures d'évaluation qui permettraient de déclencher un examen national, et de satisfaire aux exigences provinciales?
M. Eldridge: Oui. Ce n'est pas un problème.
Le sénateur Forrestall: J'en suis heureux. J'espère que les environnementalistes nous entendent. Je ne pensais pas que c'était un gros problème. Il faut parfois faire confiance aux gens et croire qu'ils vont agir au mieux de leur intérêt.
M. Eldridge: Surtout aujourd'hui.
Madame la présidente, je ne sais pas si ceci est acceptable, mais le sénateur Bryden a posé des questions sur les coûts et le sénateur Roberge a parlé de la compétitivité dans le secteur du minerai de fer. Nous sommes en concurrence avec le Brésil et l'Australie. Je sais bien que ce n'est pas le mandat de votre comité et nous avons déjà fait des représentations devant le Comité des pêches de la Chambre des communes. Mais ce qui nous inquiète à Sept-Îles, ce sont les droits que fait payer la Garde côtière pour les services maritimes.
Les compagnies représentées ici aujourd'hui, en même temps que la Compagnie minière Québec Cartier, doivent maintenant payer 2,6 millions de dollars par an sur un total de 26 millions de dollars qu'encaisse la Garde côtière en recouvrement des coûts. Wabush Mines, la Compagnie minière Québec Cartier et IOC payent 10 p. 100 du coût total pour l'ensemble du pays. Nous voulons bien payer pour des services dont nous avons réellement besoin. Je comprends que cela n'entre pas dans votre mandat.
La présidente: Nous avons pris bonne note.
M. Eldridge: Merci.
[Français]
M. Blouin: Je voudrais vous féliciter de la façon dont ce comité nous écoute comparativement à l'autre comité auquel nous avons fait face et qui n'avait certainement pas la délicatesse de celui-ci.
La présidente: C'est peut-être pour cela qu'on le fait.
[Traduction]
Le sénateur Forrestall: Le type de port est intéressant. M. Brennan pourra peut-être, avec votre permission, nous expliquer ce qu'est un port divisionnel.
M. Martin Brennan, conseiller spécial auprès du comité: La Loi sur la Société canadienne des ports a remplacé la Loi sur les commissions portuaires. Elle permettait la création de sociétés portuaires locales et plusieurs ports canadiens ont été transformés en sociétés portuaires locales. Ils ont alors nommé leur propre conseil d'administration et sont devenus autonomes dans la prise de décision. Les sociétés portuaires locales sont Vancouver, Montréal, Halifax, St. John's, Saint-Jean, Prince Rupert; je croyais que Sept-Îles en était une. Elles sont environ sept qui ont cette autonomie supplémentaire. Ce ne sont plus vraiment des filiales de Ports Canada, mais plutôt des affiliés. Elles ont davantage de pouvoirs que n'en aurait une filiale.
Le sénateur Forrestall: Je pose la question, car il est intéressant de savoir où vous vous situez dans la loi et dans quelle situation vous allez vous retrouver. Du point de vue de Montréal, d'Halifax ou de Vancouver, l'avenir a peut-être une couleur différente.
M. Blouin: Il a été rayé de la liste originale, puis ajouté. Il y a ici des gens du port de Sept-Îles qui peuvent peut-être nous dire exactement ce qui s'est passé. Je crois que c'était suite à des pressions de l'organisation.
[Français]
La présidente: Est-ce qu'ils sont ici?
M. Blouin: Oui.
La présidente: On pourrait peut-être leur demander de venir au micro venir nous expliquer ce qui est arrivé.
M. Valmont Bourgeois, capitaine du port de Sept-Îles: Je suis Valmont Bourgeois et je suis accompagné de Guy Gingras, directeur du personnel et de l'administration au port de Sept-Îles.
[Traduction]
Le sénateur Forrestall: Le capitaine pourrait peut-être nous faire l'historique des 15 dernières années. On a parlé de délégation. J'aimerais comprendre cette situation.
[Français]
M. Bourgeois: Vous voulez savoir ce qui s'est passé à Sept-Îles depuis les 15 dernière années?
Le sénateur Roberge: En cinq minutes.
M. Bourgeois: Si on fait une rétrospective rapide, des 15 dernières années, au début des années 1980, le port de Sept-Îles a vécu la montée du prix du fer. Si on se rapporte aux années 1979-1980, on a eu une baisse dans la vente du minerai de fer. On a dû fermer la ville de Schefferville et l'usine. On a essayé de se tourner vers autre chose. À l'époque, on a essayé de trouver d'autres marchés que le minerai de fer pour survivre. Il fallait faire vivre le port. Un comité s'est formé pour essayer d'amener au moins une aluminerie ou d'autres industries à Sept-Îles.
À partir des années 1985, avec notre nouveau directeur de l'époque, M. Jean-Maurice Gaudreau, on a formé un comité avec le maire de l'époque, la chambre de commerce et le commissaire industriel pour essayer d'amener d'autres industries. De là le lobbying a commencé pour essayer d'amener une aluminerie. On a essayé avec plusieurs alumineries. Ces tentatives n'ont pas fonctionné. Pourquoi? Je ne peux pas vous répondre.
On a commencé à travailler avec la SGF pour amener une autre aluminerie. De là est venu le nom Alouette. Vous me corrigerez si j'ai tort. On a essayé d'amener une autre aluminerie. On s'est forgé un nom pour qu'il ne soit pas ébruité dans la population. De là est venu un surnom, Alouette pour ne pas le divulguer. Avec les gens de la SGF et le lobbying, l'aluminerie Alouette d'ailleurs a gardé ce nom.
C'est un peu le gros de l'ouvrage fait avec les gens de l'époque. On en est très fier d'ailleurs. Comme M. Blouin le disait, on a maintenant 572 emplois directs de plus, ce qui veut dire que l'on multiplie par trois. De là est arrivé l'aluminerie Alouette. Le fer, comme toute bonne chose, je suppose que nous sommes de bons Chrétiens, a pris de l'expansion. L'an dernier, on parlait de 24 millions de tonnes. On prévoit, avec IOC et avec Wabush Mines, cette année, que l'on devrait en avoir deux millions de plus, ce qui nous apporterait à peu près 26 millions de tonnes cette année. On a parlé de transbordement de charbon aussi.
Je dois vous avouer que c'était meilleur il y a deux ou trois ans. Depuis quelques années, c'est moins bon. On étudie la possibilité de construire un terminal de marchandises en vrac pour amener d'autres matériels à Sept-Îles. Est-ce que cela répond un peu à vos questions?
[Traduction]
Le sénateur Forrestall: Ce qui m'amène à la question suivante: le projet de loi C-9 vous donne-t-il une marge suffisante pour continuer dans le sens de l'expansion et de la recherche de nouvelles activités?
M. Blouin: Tel que nous le comprenons, le projet de loi C-9 nous paraît acceptable. Ce n'est pas la même chose qu'avec la Loi sur le pilotage, à condition que nous soyons représentés. C'est notre principale revendication.
Le sénateur Bryden: À titre de question supplémentaire: le port de Sept-Îles a-t-il demandé à devenir APC plutôt que port local?
[Français]
M. Bourgeois: Des représentants de Ports Canada et du port de Sept-Îles, dont le maire sont venus l'an passé ou il y a deux ans à Québec aux audiences avec Transports Canada pour faire une demande de APC.
[Traduction]
Le sénateur Forrestall: Mais vous avez toujours pensé que vous fonctionniez comme le port d'Halifax ou de Montréal. Vous n'avez pas mis des oeillères.
[Français]
La présidente: Nous avons apprécié votre présentation ainsi que les réponses que vous avez données à nos questions. On a tenté de vous donner tout le temps voulu.
[Traduction]
Honorables sénateurs, nous allons maintenant entendre M. John Hamm, chef du Parti progressiste-conservateur de la Nouvelle-Écosse.
M. John Hamm, chef, Parti progressiste-conservateur de la Nouvelle-Écosse: Honorables sénateurs, je vous remercie de m'avoir invité devant le Comité sénatorial permanent des transports et des communications qui examine le projet de loi C-9, la loi maritime canadienne. Je représente ici aujourd'hui tous les Néo-Écossais qui trouvent inacceptables certaines dispositions du projet de loi. Je vais parler d'abord du port d'Halifax, puis des ports régionaux.
Le port d'Halifax a l'un des plus grands havres naturels au monde. Il est constitué d'un havre extérieur de deux kilomètres de large et de huit kilomètres de long qui se rétrécit en un canal conduisant au port intérieur, le bassin de Bedford. Il a une profondeur de 16,8 mètres à marée basse et il est un des ports les plus profonds au monde. L'approche se fait directement depuis l'Atlantique. Surtout, il est accessible toute l'année, c'est-à-dire qu'il n'est jamais pris par les glaces.
Halifax est le premier port de la côte Est pour les navires qui arrivent d'Europe et le dernier pour ceux qui quittent le continent. Le fret déchargé à Halifax peut atteindre sa destination finale à Québec, en Ontario, dans l'Ouest canadien ou dans le Midwest américain en quelques heures, bien avant que ce navire arrive au premier port américain. Ceci est possible en grande partie grâce aux services de conteneurs gerbés qu'offre CN Amérique du Nord et à l'ouverture, en mai 1995, du tunnel à double hauteur qui relie Port Huron à Sarnia. Les wagons à deux étages étaient fabriqués à deux milles à peine de chez moi, à Trenton. Je suis sûr que bien des membres du comité le savent. Nous espérons pouvoir en fabriquer beaucoup d'autres à l'avenir.
Les retombées économiques du port d'Halifax sont importantes: 7 000 emplois, plus de 230 millions de dollars de chiffre d'affaires et plus de 300 millions de dépenses directes. L'avantage naturel du port d'Halifax lui permettra de s'adapter facilement aux nouvelles tendances dans le domaine de l'expédition, et plus particulièrement à l'arrivée des gros navires porte-conteneurs post-Panamax. Halifax est en fait le seul port de la côte Est nord-américaine qui jouit de toutes les caractéristiques voulues pour devenir un superport. Malheureusement, le projet de loi C-9 risque de l'empêcher de réaliser son potentiel de plus grand port de la côte Est. C'est une chose qui doit inquiéter tous les Néo-Écossais et, même, tous les Canadiens de l'Atlantique.
Le port d'Halifax a des concurrents aux États-Unis. Les ports américains ont différents moyens à leur disposition pour obtenir des capitaux, notamment par l'émission d'obligations exemptes d'impôt, la possibilité de donner leurs actifs en gage et, dans certains cas, l'impôt direct. Certains reçoivent de l'argent de l'État pour les investissements portuaires. Ainsi, les ports américains ont de nets avantages sur celui d'Halifax dans ce domaine. Nous estimons que les concurrents d'Halifax pour les navires post- Panamax sont les ports américains. Or cette loi ne fait rien pour atténuer leurs avantages; elle défavorise, au contraire, Halifax.
Le gouvernement fédéral continue de traiter le port d'Halifax comme le cousin pauvre des ports canadiens. Si l'on compare les radiations de dettes et intérêts accordées par le fédéral aux ports principaux, c'est-à-dire Montréal, Saint-Jean, Québec et Vancouver avec Halifax, on constate que celui-ci a reçu la plus faible part d'assistance fédérale.
Par exemple, les contribuables canadiens ont dépensé des centaines de millions de dollars pour subventionner les services de brise-glace dans la Voie maritime du Saint-Laurent afin que les navires puissent arriver jusqu'à Montréal, qui est en concurrence directe avec Halifax, port libre de glaces. Ce projet de loi ne se contente pas de maintenir cette inégalité, il l'accentue.
Comparez. Les articles 25 et 26 interdisent aux nouvelles autorités portuaires de recevoir des crédits du gouvernement. En outre, l'article 31 interdit à l'administration portuaire de grever les immeubles fédéraux d'une sûreté, notamment d'une hypothèque, sauf pour donner en gage une somme égale au revenu qu'elle en retire, mais pas sur le bien lui-même.
Par contre, dans la Partie 3, l'article 80 permet au ministre de conclure des ententes avec l'Administration de la Voie maritime du Saint-Laurent, s'il l'estime indiqué, pour diverses raisons, y compris le versement de subventions, de contributions ou de toute autre forme d'aide financière.
Ainsi, la loi nous décoche deux coups de poing.
Le premier, c'est que sans possibilité de mettre en gage les actifs comme sécurité pour les emprunts, les ports pourront très difficilement emprunter. Le port d'Halifax prévoit des travaux pour accueillir les navires post-Panamax. Si le projet de loi est adopté, nous aurons un avenir incertain qui pourrait être catastrophique pour l'économie néo-écossaise. Une importante érosion du trafic maritime passant par le port d'Halifax se traduirait par la perte de milliers d'emplois directs et indirects, et de millions de dollars en retombées économiques.
Le deuxième coup provient du maintien de l'inégalité, puisque la Voie maritime du Saint-Laurent continuera d'être subventionnée sans que des ports comme celui d'Halifax ne reçoivent aucune compensation en échange. Le gouvernement fédéral doit reconnaître son obligation de cohérence dans ses politiques et son devoir de soutenir tous les ports canadiens. Il est tout à fait inacceptable que le ministre accorde des subventions ou des contributions financières à la Voie maritime et n'en fasse pas autant pour les ports qui ne sont pas sur cette voie. Ces deux coups nous mettent à genoux. Il y a d'autres dispositions encore qui pourraient, chacune, avoir le même effet.
Il y a les frais facturés aux ports pour l'utilisation des biens du gouvernement. Ces frais sont cependant calculés sur les revenus bruts. On ne tient aucun compte de la capacité de payer, surtout si l'utilisation fluctue énormément d'année en année.
Pour ce qui est des petits ports, les collectivités locales n'ont pas suffisamment été consultées quant à l'impact de cette loi. En outre, on n'a réalisé aucune étude sur l'impact économique afin de déterminer exactement quel effet la loi pourrait avoir sur les plus petits ports. Beaucoup d'entre eux ont besoin de travaux de rénovation. La loi ne prévoit rien pour l'entretien ou l'amélioration des infrastructures actuelles. Par exemple, au superport de Canso, du côté de Mulgrave, je crois savoir qu'il faudrait engager des dépenses de 15 millions de dollars pour reconstruire le poste d'accostage sud. Il est impossible de financer ce type de reconstruction strictement par les frais imposés aux utilisateurs.
Il y a d'autres éléments à considérer. Les articles 47, 73 et 101 prévoient des exemptions à la Loi sur la protection des eaux navigables. Il est important de maintenir les dispositions qui prévoient le déclenchement d'évaluations environnementales. La dissolution des forces de police portuaires reporte la responsabilité sur les autres corps de police: municipaux, provinciaux ou fédéral. C'est donc dire que l'application de la loi sera différente dans chaque port. Ce que les criminels ne pourront pas facilement faire dans un port, ils pourront le faire aisément dans un autre. C'est inacceptable.
Un fonds d'aliénation de 125 millions de dollars n'ira pas loin. Certains de nos ports, comme celui de Pugwash, sont disqualifiés parce qu'ils sont rentables. Pourquoi un port ne devrait-il pas recevoir d'aide du simple fait qu'il a rapporté de l'argent au gouvernement au cours des dernières années?
L'article 140 garantit la fourniture de services en exécution des obligations constitutionnelles du Canada et la fourniture de services semblables à ceux que Marine Atlantic S.C.C. fournissait. Cet article permet au ministre de décider à quel niveau les services doivent être maintenus, et quelles seront les subventions ou contributions financières accordées. Il ne semble y avoir aucune disposition prévoyant des consultations, ni le maintien d'un niveau suffisant de financement pour assurer le niveau de service actuel. De plus, rien n'est prévu pour le cas où Marine Atlantic ne serait pas en mesure de remplir ses obligations.
Je n'ai mentionné que quelques-unes de mes réserves à l'égard de ce projet de loi. En résumé, je recommande que, tout d'abord, l'on réalise des études sur l'impact économique, et que l'on tienne des consultations appropriées avec les ports concernés avant de faire quoi que ce soit; deuxièmement, que le projet de loi prévoit un mécanisme par lequel les ports pourront garantir leurs emprunts ou obtenir des garanties du gouvernement afin d'assurer l'entretien ou l'amélioration de leurs installations; troisièmement, que les ports soient imposés sur les revenus nets et non bruts; quatrièmement, que tous les déclencheurs nécessaires pour assurer les évaluations environnementales soient maintenus dans le projet de loi C-9; cinquièmement, puisque la Voie maritime du Saint-Laurent sera subventionnée et que l'inégalité sera ainsi maintenue, que l'on prévoit une compensation en espèces équivalentes pour des ports tels qu'Halifax et Canso; sixièmement, que l'article 140 prévoit clairement le maintien du service au moins au niveau actuel, et une aide financière suffisante pour cela.
Au cours des dernières années, la Nouvelle-Écosse a subi 16 p. 100 des réductions d'emplois fédéraux alors qu'elle ne compte que 3 p. 100 de la population canadienne. Ce projet de loi continue dans le sens de l'inégalité. Le C-9 garantit l'avenir de la Voie maritime du Saint-Laurent, mais il est évident qu'il ne garantit pas la viabilité future des ports canadiens de la côte Atlantique. L'économie de la Nouvelle-Écosse, et pour tout dire du Canada, ne peuvent pas se permettre de perdre des milliers d'emplois directs et indirects et des milliers de dollars en retombées économiques parce qu'on n'aura pas su faire les améliorations nécessaires pour que nos ports restent parmi les plus compétitifs en Amérique du Nord.
Le sénateur Bryden: J'aimerais une précision. Vous avez dit que vous parliez au nom de tous les Néo-Écossais. Avez-vous été délégué par les trois partis?
M. Hamm: Non. Mais j'essaie de parler au nom de tous les ports, et non d'un seul port en particulier. Je n'ai peut-être pas été suffisamment clair.
Le sénateur Bryden: Vous avez dit que vous parliez au nom de tous les Néo-Écossais.
M. Hamm: Je ne représente ici que mon parti.
Le sénateur Bryden: Dans ce cas, vous parlez pour moins d'un tiers, un quart de la population de votre province.
M. Hamm: Sénateur, vous avez peut-être raison, mais je crois comprendre que nous n'avons pas été très représentés à cette table.
Le sénateur Bryden: Vous avez été bien représentés. Nous avons eu un porte-parole du port d'Halifax et un du superport de Canso. Étrangement, d'ailleurs. Avec beaucoup d'éloquence, ils ont dit les mêmes choses que vous.
M. Hamm: J'ai des copies de leurs rapports.
La difficulté, sénateur, c'est que beaucoup de gens des plus petits ports n'ont pas la possibilité de venir à Ottawa. Je crois que vous comprenez très bien les ports de l'Atlantique. Beaucoup d'entre eux sont très modestes et pourraient difficilement assister à cette réunion.
Le sénateur Bryden: Vous avez mentionné le port de Pugwash. Je le connais très bien; j'y joue au golf à l'occasion. Toutefois, vous avez mentionné des articles de ce projet de loi, pour ne donner qu'un exemple, qui viendrait exacerber l'inégalité en matière de brisage de la glace. De quels articles parlez-vous?
M. Hamm: Les ports de l'Atlantique sont passés à la formule du financement par l'usager. Ça ne semble pas être le cas pour le brisage de la glace dans la Voie maritime du Saint-Laurent. Il est évident que vous aussi avez des inquiétudes à ce sujet. Je dis que les règles n'ont jamais été égales. La nouvelle loi fait pencher la balance encore plus lourdement contre les ports de l'Atlantique.
Le sénateur Bryden: Je vous fais remarquer que ce projet de loi ne traite pas du brisage de la glace. C'est une autre question.
M. Hamm: Le projet de loi traite cependant de la possibilité pour la Voie maritime du Saint-Laurent d'obtenir des fonds auxquels n'auront plus droit les ports de l'Atlantique. Cela est clair.
Le sénateur Bryden: Cela ne me pose aucun problème. Je croyais que vous aviez remarqué quelque chose qui m'aurait échappé et que ce projet de loi effectivement venait accentuer l'écart dans ce domaine.
M. Hamm: On continue de briser la glace de plus belle dans le Saint-Laurent et tous les avantages dont jouissaient les ports de l'Atlantique ont tout simplement disparu depuis l'entrée en vigueur des différents frais aux usagers.
Le sénateur Forrestall: Monsieur Hamm, je suis ravi de vous avoir ici aujourd'hui. Il me paraît important que nous saluions tous ceux qui font l'effort, prennent le temps et engagent les dépenses nécessaires pour venir non seulement devant notre comité, mais devant n'importe quel comité pour des questions d'intérêt national. Ce projet de loi est particulièrement important pour nos ports côtiers. Cela ne fait aucun doute. Il pourrait avoir une très forte incidence sur leur potentiel d'expansion. Que cela s'avère ou non, le risque ne me paraît pas justifié. D'une manière ou d'une autre, nous devons essayer de convaincre le gouvernement d'apporter des modifications.
Vous parlez de règles du jeu inéquitables. Je viens de terminer une conversation avec Michel Fournier, le nouveau président de l'Administration de la Voie maritime du Saint-Laurent. Je lui ai recommandé de veiller à faire tout son possible pour que les règles du jeu demeurent égales et que l'aide publique à la Voie maritime, pour lui permettre de faire concurrence au Canadien National, ne laisse pas l'impression que le gouvernement favorise un port ou une région plutôt qu'une autre. Dans ce cas, je ne voudrais pas que l'on aide la Voie maritime au point que le CN ne ferme ses portes. Tout le trafic passerait alors par le Saint-Laurent et le port d'Halifax pourrait fermer, sans parler de celui de Saint-Jean et d'autres ports importants de la côte Est. Le risque existe.
Je ne doute pas un instant que M. Fournier puisse être le dirigeant le plus compétitif que la Voie maritime ait jamais eu. Quiconque en douterait se tromperait lourdement. Il en est parfaitement capable. Et je ne peux que l'en féliciter, mais je dois aussi m'opposer à lui, pour toutes ces autres raisons.
Monsieur Hamm, je comprends très bien ce que vous nous avez dit. En préparation de ce témoignage, avez-vous eu l'occasion de parler à des gens de Yarmouth, Sydney, Pictou, Pugwash, Shelburne, Liverpool, Bridgewater, Sheet Harbour et Country Harbour? Ce dernier pourrait bien devenir l'un des ports les plus intéressants de la côte Est au cours des deux prochaines années. Avez-vous été en contact avec les gens de ces ports?
Soit dit en passant, le docteur et moi ne nous sommes pas du tout parlé de sa comparution ici. Je ne savais même pas qu'il allait venir avant jeudi ou vendredi.
M. Hamm: Honorables sénateurs, j'ai parlé à des gens au port de Pictou. Mes collaborateurs ont eu des contacts avec des gens de Pugwash et de Canso. Malheureusement, les gens ont mis du temps à réagir à ce projet de loi. Beaucoup des petits ports de la Nouvelle-Écosse ne sont peut-être même pas encore tout à fait conscients des conséquences qu'elle pourrait avoir. Il est très important que nous l'examinions de plus près pour voir ce qu'il signifie vraiment pour ces petits ports.
L'article 78 énonce les objectifs de la Partie 3 du projet de loi. Il y est question de la Voie maritime du Saint-Laurent et de promouvoir une approche commerciale dans son exploitation; de protéger son intégrité, sa viabilité et sa compétitivité; de protéger les droits des collectivités voisines; de protéger les investissements importants que le gouvernement du Canada a effectués à l'égard de la Voie maritime; de favoriser la participation des utilisateurs et d'encourager la collaboration avec les États-Unis. Voilà un énoncé positif. Je ne vois rien de tel en ce qui concerne les ports de l'Atlantique. Ce projet de loi affirme très clairement le soutien à la Voie maritime et l'accès au Trésor.
On ne dit rien de tel pour les autres ports et en particulier pour les ports de l'Atlantique et de la Nouvelle-Écosse.
Le sénateur Forrestall: Voilà une préoccupation que je partage certainement.
Souhaitez-vous suggérer des amendements à certains articles?
M. Hamm: Je ne suis pas venu avec des textes d'amendement, mais j'ai indiqué des recommandations qui conduiraient à des amendements. Elles me paraissent très importantes.
Les petits ports jouent un rôle très important dans l'économie de ces petites collectivités.
L'économie de la Nouvelle-Écosse dépendra dans une large mesure de la bonne expansion du commerce par conteneur dans le port d'Halifax. Il y a là un potentiel énorme. Mais il sera difficile de financer cette expansion. Par exemple, dans la situation actuelle, c'est le gouvernement de la Nouvelle-Écosse qui devra principalement faciliter tout cela. Mais il est difficile d'obtenir des crédits. Comme d'autres -- car je sais que vous avez entendu les représentants de la commission et de la société -- je pense qu'avec ce projet de loi il sera extrêmement difficile de trouver les capitaux nécessaires pour nous permettre de participer à l'ère post-Panamax.
Comme nous le savons tous ici, le dragage a déjà commencé à New-York. Pendant ce temps, nous ne faisons que surnager à Halifax.
Le sénateur Forrestall: Vous avez peut-être raison. La question est celle-ci: où trouver l'argent pour ce type d'expansion? Je ne savais pas que le dragage avait commencé pour les post-Panamax, mais je sais qu'ils ont un programme excessif de dragage pour compenser toutes les années de négligence. Si toutefois ils décidaient de construire un port de haute mer -- même dans les estuaires -- par dragage, ce serait grave pour nos ports.
M. Hamm: Nous sommes bien mieux placés puisque nous avons des avantages naturels. Mais nous devons nous lancer dans l'expédition post-Panamax. Il faudra beaucoup d'argent. Je ne vois pas comment ce sera possible avec ce projet de loi. D'où mon inquiétude.
Le sénateur Forrestall: Ceux qui veulent privatiser les aéroports demandent qu'il y ait beaucoup d'installations en place avant d'accepter le transfert des responsabilités. Dans le cas des ports, on privatise, et il n'y a pas moyen d'aller emprunter l'argent. C'était simplement une observation de ma part. L'inégalité est évidente.
Merci d'avoir pris le temps de venir.
Le sénateur Bryden: Je tiens à signaler que j'ai personnellement envoyé avis de ces audiences à toutes les collectivités portuaires de l'Atlantique où j'ai pu trouver un maire, une chambre de commerce ou une administration portuaire. Certains s'en sont prévalus et sont venus. J'espère donc avoir fait ma part pour corriger cette situation.
Vous dites que vous avez parlé à des gens dans les ports que le sénateur Forrestall a mentionné. À qui avez-vous parlé à Pugwash?
M. Hamm: À Pictou, j'ai parlé à James MacKelvie. Je lui ai parlé moi-même.
Le sénateur Bryden: À qui avez-vous parlé à Canso?
M. Hamm: Ce sont mes collaborateurs qui s'en sont occupés. Je vais vous donner les noms dans une minute.
Le sénateur Bryden: Vous avez communiqué avec Pugwash, Pictou et Canso?
M. Hamm: Oui.
Le sénateur Bryden: C'est votre bureau qui s'en est chargé?
M. Hamm: Oui.
Le sénateur Johnstone: J'ai entendu avec plaisir et enthousiasme dans les présentations précédentes le potentiel du port d'Halifax. Si vous étiez sur un pied d'égalité avec vos concurrents, pensez-vous qu'Halifax serait en mesure de desservir une grande partie du marché nord-américain?
M. Hamm: Oui. Nous avons toujours été bien placés pour servir le Canada central. Avec le tunnel et les conteneurs gerbés, un porte-conteneurs peut décharger à Halifax et le conteneur peut être livré dans le centre des États-Unis. Auparavant, le même navire aurait dû se rendre à New-York.
Cela nous a donné un avantage extraordinaire par rapport aux ports américains. Si nous pouvons attirer les grands navires qui navigueront sur l'Atlantique dans les cinq prochaines années, nous pouvons continuer cette expansion. Nous avons beaucoup d'avantages naturels, mais nous manquons d'infrastructures. Sans infrastructure, notamment sans un engagement considérable de la part du CN, ce ne sera pas possible.
New York se prépare pour ce marché-là. Mais nous avons des avantages, puisque nous sommes plus proches et que nous pouvons assurer la livraison des conteneurs pour le Midwest plus rapidement. Nous avons également des avantages pour le chargement, puisque New York a un problème de place. Il est difficile d'y décharger des quantités importantes de conteneurs d'un coup. Le marché est compétitif, mais si nous jouons bien nos cartes, il peut être extrêmement avantageux pour la Nouvelle-Écosse et l'économie de la région Atlantique. Il ne faut pas l'oublier.
Le sénateur Johnstone: Je comprends que vous puissiez desservir certaines régions d'Amérique du Nord, mais pourriez-vous servir tout le continent? Je ne vois pas comment Halifax pourrait servir la Floride, par exemple. Votre principal corridor serait probablement au long de la ligne du CN, jusqu'aux Grands Lacs, vers le Midwest. Je me rends compte maintenant de l'importance d'Halifax pour notre économie. Pas seulement pour celle de l'Atlantique, mais pour l'ensemble du Canada.
M. Hamm: Avec l'évolution de l'économie asiatique, nous pourrions, à terme, devenir un port terrestre. Nous pourrions devenir un port intermodal pour l'ensemble du continent nord-américain. Nous sommes très bien placés pour devenir la porte sur l'Atlantique de ce pont terrestre.
Le potentiel est extraordinaire. J'espère que le comité se demandera sérieusement si ce projet de loi permet ou non la réalisation de ce potentiel.
Le sénateur Johnstone: Vous demandez donc des règles égales qui vous permettent d'être concurrentiels.
M. Hamm: Oui.
Le sénateur Johnson: Je viens des Prairies, où il n'y a pas beaucoup de ports. J'ai été frappée par les présentations que nous ont faites aujourd'hui les représentants des localités où il y a de petits ports et par la manière dont ils ont réagi au projet de loi. C'est semblable à l'effet de l'AMI. Le public a mis du temps à réagir. Dans ma région, ce n'est pas vraiment un problème. La situation est différente pour Churchill, et le projet de loi ne nous fait pas problème.
Mon collègue nous a dit qu'il avait envoyé des avis. J'ai été frappée par l'excellence de vos présentations et vous nous avez tous donné le même message.
Il me semble que nous devrions demander des études sur l'impact économique, surtout du point de vue de l'environnement. Est-ce que cela vous paraîtrait raisonnable?
M. Hamm: Les répercussions de ce projet de loi sont énormes. Nous sommes peut-être en train de créer une situation dans laquelle les petits ports ne pourront pas survivre. Nous ne devons pas le faire sans savoir ce qu'il adviendra de l'économie de ces collectivités.
C'est une question qui a fait son chemin lentement. L'AMI a couvé pendant longtemps avant que les flammes ne surgissent. Mais depuis, il semble que tout le monde ait un avis. C'est un peu pareil pour ce projet de loi dans beaucoup de petits ports. Pour le moment, les journaux locaux n'en ont pas encore parlé. Il est passé relativement inaperçu.
Moi-même, je n'ai décidé de venir que vendredi après-midi, parce qu'en regardant la liste des témoins, j'ai constaté avec regret l'absence de certains groupes qui auraient dû y figurer.
La présidente: Je dois vous dire, sénatreur Johnson, que ce projet de loi est en gestation depuis quatre ans. Avant cela, nous avions eu le C-44. Il n'y a rien de bien nouveau dans ce C-9.
Le sénateur Johnson: Je le comprends. L'AMI aussi est en route depuis cinq ans. Ce qui est nouveau, c'est que les gens commencent à donner leur point de vue.
La présidente: Nous avons entendu beaucoup de gens.
Le sénateur Johnson: Je ne critique pas cela. Le pays est grand. Quand on vient des Prairies, ce n'est pas le genre de question que l'on suit de très près, à moins d'être membre d'un comité comme celui-ci.
Je trouve intéressant que tous ces gens aient fait l'effort de venir. Nous avons siégé toute la journée. J'en suis heureuse, car cela nous donne l'occasion de considérer les possibilités d'amendement, éventuellement.
La présidente: Merci, monsieur Hamm, de votre exposé.
La séance est levée.