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Délibérations du comité sénatorial permanent des
Banques et du commerce

Fascicule 7 - Témoignages du 24 février 2000


OTTAWA, le jeudi 24 février 2000

Le comité sénatorial permanent des banques et du commerce se réunit aujourd'hui à 11 heures pour examiner la situation actuelle du régime financier canadien et international (l'impôt sur les gains en capital).

Le sénateur Leo E. Kolber (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Nous poursuivons notre étude de l'impôt sur les gains en capital. Nous avons le très grand plaisir, ce matin, d'accueillir un homme qui jouit d'une réputation internationale, M. Allen Sinai, qui est actuellement le chef de la direction et économiste en chef spécialiste de la mondialisation de Primark Decision Economics, Inc. Il est également économiste en chef spécialiste de la mondialisation du Groupe WEFA. Avant de remplir ses fonctions, M. Sinai était économiste en chef et directeur général chez Lehman Brothers. M. Sinai est un pionnier de la conception de modèles économétriques et de l'utilisation des systèmes d'information économique pour la prévision, l'analyse et la surveillance des marchés économiques et financiers.

M. Sinai est professeur adjoint d'économie et de finances au Lemberg Program of International Economics and Finance de Brandeis University. Il a également enseigné à la Sloan School of Management de MIT, à l'Université de New York, l'Université de Boston et à l'Université de l'Illinois. Il est également membre du conseil des économistes de Time Magazine.

C'est là un CV très abrégé. J'en ai lu la version complète hier soir et cela m'a pris assez longtemps. Au cours des années, les administrations des deux partis politiques, les administrations Clinton, Bush et Reagan, ont consulté M. Sinai sur les grandes questions économiques. Soyez le bienvenu, monsieur Sinai. La parole est à vous.

M. Allen Sinai, chef de la direction et économiste en chef spécialiste de la mondialisation, Primark Decision Economics, Inc.: Au cours de cette nouvelle ère d'excédents budgétaires aux États-Unis, au Canada et ailleurs, les pays vont pouvoir faire d'agréables choix financiers et sociaux. Il s'agira pour eux de faire une utilisation optimale des excédents budgétaires pour parvenir à leurs objectifs économiques et sociaux. La plupart des scénarios macro-économiques annoncent la continuation des excédents budgétaires du gouvernement fédéral aux États-Unis comme au Canada. Selon des estimations conservatrices, cet excédent pourrait atteindre 96 milliards de dollars au cours des cinq prochaines années. C'est le chiffre qui figurait dans la mise à jour économique et financière que le ministère des Finances a présentée en novembre et il est sans doute trop bas étant donné la façon dont les choses se présentent dans l'économie canadienne.

D'autres pays comme le Royaume-Uni, la Finlande, le Danemark, l'Irlande, la Suède et l'Australie ont actuellement un excédent budgétaire et d'autres pays encore, surtout dans la zone de l'euro, vont sans doute les rejoindre grâce à des réductions structurelles dans la croissance des dépenses, un gain d'efficacité dans le secteur public et des gains cycliques dans les recettes fiscales résultant de ce qui s'annonce comme une expansion extraordinairement longue et vigoureuse du commerce mondial.

La façon dont chaque pays utilisera les excédents budgétaires du gouvernement fédéral influera sur son économie en ce qui concerne la croissance économique intérieure, l'emploi et le chômage, l'inflation, la compétitivité internationale, les profits, le niveau de vie et le rendement de l'investissement en plus d'exercer une profonde influence sur sa société. Les choix à faire pour l'utilisation des excédents budgétaires sont sans doute les choix économiques les plus cruciaux auxquels un pays comme le Canada se trouvera confronté. C'est beaucoup plus agréable, mais non moins important que la dure tâche d'éliminer les déficits budgétaires qui s'est imposée aux gouvernements dans les années 90.

Dans ce mémoire, j'examine la réduction de l'impôt sur les gains en capital en général et de façon analytique, surtout dans le contexte de l'expérience des États-Unis et de son application possible à la situation canadienne. J'aborderai quatre sujets: premièrement, le pour et le contre de la réduction de l'impôt sur les gains en capital; deuxièmement, ses effets sur l'activité économique, l'emploi, l'esprit d'entreprise, la productivité et la croissance de la production potentielle -- cette dernière étant une approximation du taux durable de croissance économique ou du niveau de vie potentiel d'une économie ou d'un pays; troisièmement, ses effets sur l'épargne, l'investissement et la création de nouvelles entreprises; quatrièmement, le rôle que la réduction de l'impôt sur les gains en capital joue dans l'augmentation de la compétitivité internationale, dans une économie mondiale de plus en plus concurrentielle.

Étant donné que chaque pays qui doit faire les choix fiscaux que lui offre un excédent budgétaire se trouve dans une situation particulière en ce qui concerne son économie, sa dette publique et sa monnaie ainsi que son environnement politique et social, c'est avec prudence qu'il faut formuler des solutions pour un pays. Toutefois, l'expérience des États-Unis peut à certains égards s'appliquer au Canada si bien que je proposerais quelques observations et quelques opinions à l'égard de la situation canadienne.

La principale proposition s'appliquant au Canada est qu'une réduction du taux d'imposition des gains en capital pour les particuliers et les sociétés serait une bonne façon d'utiliser les excédents budgétaires de façon à promouvoir la croissance économique, l'emploi, l'épargne, l'investissement, l'esprit d'entreprise et l'innovation, la formation de nouvelles entreprises et l'augmentation de la production potentielle et cela, sans entraîner une trop lourde perte de recettes fiscales. En tant que mesure fiscale qui s'inscrit dans un programme de réduction de la dette, de réduction des impôts et d'augmentation des dépenses gouvernementales dans des domaines productifs comme la santé -- qui fait partie de l'infrastructure de tout pays -- l'éducation et la technologie de l'information, la réduction de l'impôt sur les gains en capital a beaucoup à offrir.

Grâce à l'effet de déblocage, qui constitue une caractéristique particulière de la réduction de l'impôt sur les gains en capital, la perte de recettes sera sans doute minime tandis que le gain de production obtenu par dollar de recettes perdues sera assez élevé. D'autre part, en ce qui concerne le Canada, étant donné que l'économie se dirige vers le plein emploi, une augmentation de la croissance potentielle ou de l'offre serait la bienvenue.

Enfin, les effets stimulateurs d'une réduction du taux marginal d'imposition du revenu des particuliers, associée à une réduction du taux d'imposition des gains en capital, peuvent être très efficaces pour stimuler l'effort au travail, l'emploi, l'esprit d'entreprise, l'innovation et la création d'entreprises, qui représentent actuellement une dynamique importante dans le monde. Les incitatifs de la fiscalité canadienne devront être concurrentiels au niveau international de façon à attirer les entreprises, les travailleurs, les entrepreneurs et la nouvelle technologie qui sont nécessaires pour soutenir la concurrence dans une économie mondiale fondée sur la technologie, qui est de plus en plus concurrentielle.

Je voudrais maintenant examiner le pour et le contre de la réduction de l'impôt sur les gains en capital. L'imposition des gains en capital, son existence ou son absence varie beaucoup d'un pays à l'autre, mais il est certain que, dans la plupart des pays, la tendance est à une imposition plus faible ou parfois nulle de ces gains. Ils ne sont pas imposables en Belgique, à Hong Kong, aux Pays-Bas, à Singapour et à Taïwan. Il n'y a pas d'impôt sur les gains en capital à long terme en Allemagne. La période de détention est de six mois. L'impôt sur les gains en capital est très limité au Japon et aux États-Unis où il atteint un maximum de 20 p. 100 pour les particuliers, après une période de détention d'un an. Par contre, vous trouverez un impôt effectif sur les gains en capital assez élevé dans des pays comme le Royaume-Uni, la Suède et le Canada. Le Royaume-Uni est en train d'abaisser son impôt sur les gains en capital. Au Canada, l'effet de l'impôt sur les gains en capital pour les particuliers n'est pas très élevé au niveau fédéral par rapport aux autres pays, mais il l'est lorsque vient s'y ajouter le taux d'imposition marginal et provincial sur le revenu des particuliers qui s'applique à 75 p. 100 des gains en capital.

Aux États-Unis, les périodes pendant lesquelles l'impôt effectif sur les gains en capital était plus bas, en termes absolus et par rapport au taux d'imposition du revenu ordinaire, ont été marquées par une forte performance économique, une bonne croissance de l'emploi, une augmentation de l'activité des entreprises et une amélioration du niveau de vie, surtout au cours de la dernière décennie. Les résultats de l'économie américaine ne peuvent pas être entièrement attribués à la réduction de l'impôt sur les gains en capital ou à une réduction du taux marginal d'imposition sur le revenu des particuliers qui a pour effet d'abaisser le taux d'imposition des gains en capital, mais il y a là une coïncidence frappante.

Dans le domaine de la politique fiscale, un certain nombre de critères servent à évaluer un impôt. Dans le cas de l'impôt sur les gains en capital, il y en six. Il y a d'abord l'équité, suivant le principe que la fiscalité doit traiter de la même façon ceux dont la situation est la même. Le deuxième est la distorsion des prix relatifs ou l'efficacité de l'impôt. Le troisième est le coût du capital. Le quatrième est l'effet d'une mesure fiscale sur la compétitivité internationale. Le cinquième est le degré d'imposition du capital dans une économie en plein essor. Le sixième est l'effet sur la croissance et la performance macro-économique. Le dernier critère a peu retenu l'attention par rapport aux autres étant donné que la plupart des études de l'impôt sur les gains en capital étaient micro-économiques et que seul un petit nombre ont pris en compte l'ensemble des effets macro-économiques.

Dans de nombreux pays, l'évaluation politique et sociale du critère d'équité qui sert à juger l'impôt sur les gains en capital a suscité la controverse, un débat entre riches et pauvres. Il s'agit moins d'une question économique que d'une question sociale et politique. Pour les familles riches et les familles pauvres, il s'agit certainement d'une question très émotionnelle. On croit que la réduction de l'impôt sur les gains en capital est injuste, qu'elle favorise les très riches aux dépens des pauvres et qu'elle augmente l'inégalité dans la distribution des revenus. Ces arguments sont défendables à bien des égards et chaque pays doit décider de l'importance à accorder à une mesure fiscale donnée en tenant compte de son équité et des autres critères que j'ai énumérés. Je ne conteste pas les arguments émotifs qui se rapportent à la question de l'équité. Je soulignerais simplement que les autres critères concernant l'impôt sur les gains en capital militent généralement en faveur d'un abaissement de cet impôt.

Dans l'économie mondiale moderne où la compétitivité internationale, la mobilité interne des ressources, la main-d'oeuvre et l'investissement financier jouent un rôle crucial, les critères qui servent à juger la réduction de l'impôt sur les gains en capital par rapport aux autres formes de réduction d'impôt n'auront probablement pas le même poids que par le passé. À l'heure actuelle, dans de plus en plus de pays, même les pauvres sont reliés, directement ou indirectement, au marché boursier étant donné que la propriété des actions est davantage répartie entre les niveaux de revenu. Les groupes de citoyens à revenu moyen et à revenu élevé sont de plus en plus nombreux à se partager le capital, surtout aux États-Unis, en participant au marché boursier directement ou indirectement par l'entremise des caisses de retraite et, de plus en plus, en recevant, à titre de rémunération, des actions de l'entreprise qui les emploient.

La réduction de l'impôt sur les gains en capital est généralement souhaitable si l'on se fie au critère des distorsions dans les prix relatifs ou de l'efficacité fiscale, selon les conditions initiales. C'est également une bonne chose en ce qui concerne le coût du capital et la compétitivité internationale. Quant à savoir si l'impôt sur les gains en capital a des effets négatifs dans une économie en plein essor, cela dépend de la situation, mais dans la plupart des pays, le capital est davantage imposé qu'il ne devrait l'être selon les critères qui servent actuellement à juger les impôts. Mes travaux font état des effets positifs d'une réduction de l'impôt sur les gains en capital sur la croissance macro-économique et la performance économique par rapport à la perte de recettes qu'entraîne cette réduction. Seul le critère de l'équité pourrait donner des résultats négatifs, selon les objectifs sociaux visés.

L'American Council for Capital Formation a réalisé de nombreuses études sur la question de l'équité, aux États-Unis. Je crois qu'un de ses membres a témoigné devant votre comité. Cet organisme a fait valoir que cette mesure n'était pas aussi injuste qu'on le pensait. Je préfère réserver mon opinion sur la question de la polarisation des riches et des pauvres et de l'équité et me pencher plutôt sur les autres critères qui, dans le monde moderne, devraient selon moi avoir beaucoup plus de poids qu'avant. Quels sont les effets sur l'économie d'une réduction de l'impôt sur les gains en capital?

Ce que j'ai à vous dire se fonde sur des travaux réalisés à partir de simulations informatiques portant sur la totalité du système économique américain et incluant les nombreux effets que l'impôt sur les gains en capital exercent sur les marchés financiers, le coût du capital, l'activité économique, l'esprit d'entreprise, la production potentielle et les recettes fiscales en raison des répercussions d'une réduction de l'impôt sur les gains en capital sur l'économie, le marché boursier et la réalisation des gains en capital. Mon analyse est le résultat de plusieurs années de recherches qui sont englobées dans ce modèle à grande échelle de l'économie américaine, qui a été mis à jour au milieu de 1999 et inclut donc la plupart des nouveaux facteurs et nouvelles tendances qui ont émergé aux États-Unis ces dernières années.

Les travaux qui se fondent sur des modèles économétriques présentent certaines limitations. Ces modèles se tournent vers le passé. Ils se basent sur des données qui couvrent des périodes de temps passées et des situations structurelles qui ne seront peut-être pas les mêmes à l'avenir. Ils représentent seulement des moyennes pour ce qui est des résultats quantitatifs et les réponses qu'ils peuvent donner. Néanmoins, je les crois très utiles en tant que mesures approximatives et comme moyen quantitatif d'évaluer les résultats passés et peut-être également futurs des divers changements de politique.

Je ne peux pas affirmer que le travail que j'ai effectué avec ce modèle de l'économie américaine s'applique nécessairement de façon précise à la situation canadienne. Néanmoins, nous étudions le Canada en détail et nous suivons ses politiques. De façon générale, il s'apparente aux États-Unis pour ce qui est du cycle des affaires et des systèmes qui existent dans l'économie américaine, comme bien d'autres économies que nous étudions et analysons, y compris les pays du G-7 et au total, 46 pays. Je suis assez certain que ce que je vais vous dire quant aux effets d'une réduction de l'impôt sur les gains en capital s'applique au Canada dans les grandes lignes. En même temps, pour ne rien vous cacher, je ne peux pas affirmer, en tant que chercheur, que telle est la vérité absolue en ce qui concerne l'économie canadienne. Cela vise à vous informer, car j'ai certainement mon opinion personnelle quant à la façon dont la réduction de l'impôt sur les gains en capital pourrait être utilisée et appliquée dans l'économie canadienne à la suite des travaux que j'ai réalisés.

La réduction de l'impôt sur les gains en capital a pour effet d'augmenter l'épargne, les dépenses d'immobilisation et la formation du capital, ce qui, à son tour, contribue à la croissance économique. Cette croissance stimule la création d'emplois et la productivité et grâce à la hausse de la productivité, le potentiel de production de l'économie augmente.

Les gains sont certainement importants par rapport à ce qu'il en aurait sans doute été autrement, mais je dirais qu'ils restent d'une importance limitée ou modeste. Il n'est pas question ici d'une mesure fiscale propre à augmenter la croissance économique sur le plan de la demande globale autant que le ferait une importante réduction du taux marginal d'imposition du revenu des particuliers. C'est une mesure fiscale qui a, je crois, les effets que je vais décrire, mais qui ne représente que des montants d'argent assez modestes.

Vous devez payer pour bénéficier de la réduction de l'impôt sur les gains en capital en ce sens que les recettes fiscales diminuent au départ. Néanmoins, la stimulation exercée sur l'économie par dollar de recettes perdues est très importante. Il ne coûte pas très cher de se servir de la réduction de l'impôt sur les gains en capital. L'effet produit est important en ce qui concerne le ratio de production et d'emplois qu'entraîne chaque dollar de recettes fiscales perdues. Cette mesure ne s'autofinance pas entièrement, comme certains pourraient le prétendre, en débloquant massivement les gains en capital non réalisés. C'est peut être l'effet obtenu pendant une période très brève, mais la rétroaction de la réduction de l'impôt sur les gains en capital sur les recettes fiscales est une augmentation du revenu et des bénéfices des sociétés. C'est la façon habituelle de stimuler l'économie.

Cela crée des recettes fiscales qui aident à payer la réduction d'impôt initiale. Dans ce cas, la hausse du marché boursier augmentera la richesse et les dépenses ainsi que le nombre d'emplois, les revenus et les profits. Cela rapportera également des recettes fiscales supplémentaires. Puis il y a la réalisation des gains en capital qui se trouvent débloqués et qui émanent de l'amélioration du marché boursier. Cela rapporte des recettes fiscales supplémentaires au gouvernement même si l'impôt des gains en capital a été abaissé. Cette mesure fiscale a davantage de répercussions positives sur les recettes du gouvernement que toute autre mesure fiscale existante.

La réduction du taux d'imposition des gains en capital et de l'impôt effectif sur les gains en capital qui s'applique aux particuliers augmente le rendement après impôt des actions pour les actionnaires et réduit le coût moyen pondéré après impôt du passif et de l'actif. Les cours de la bourse s'en trouvent rehaussés du fait que les particuliers investissent davantage dans les actions. Cela augmente la richesse des ménages en accroissant la valeur de leur portefeuille d'actions, ce qui a un effet positif sur la consommation.

Je signale en passant que l'effet sur la consommation est loin d'être aussi marqué que celui que produit l'augmentation des revenus. Néanmoins, cette mesure produit quand même un effet positif important sur la consommation, ce qui augmente la production, les bénéfices des entreprises et, par voie de conséquence, stimule les achats de biens d'équipement et la construction d'usines. Ce résultat a pour effet d'augmenter le PIB réel.

La formation de nouvelles entreprises va également s'intensifier avec la croissance de l'activité économique et les effets incitatifs accrus de l'abaissement de l'impôt sur les gains en capital. Il y a stimulation de l'esprit d'entreprise du côté de l'offre. La création d'emplois augmente, de même que les gains et bénéfices des sociétés, ce qui entraîne une croissance de la consommation et de l'activité économique. Tout cela augmente les dépenses de consommation et les investissements et accroît les espérances de gain sur le marché boursier. Le coût du capital s'en trouve réduit, ce qui stimule davantage l'esprit d'entreprise.

Telle est la série d'interactions simultanées et le cercle vertueux qu'entraîne la réduction de l'impôt sur les gains en capital pour les particuliers et, dans une certaine mesure, également pour les sociétés. Toute cette activité permet aux gouvernements fédéral et provinciaux de percevoir des impôts supplémentaires auprès des particuliers et des sociétés, sous la forme d'impôt sur le revenu, de taxes de vente, de taxes d'accise et de charges sociales. Par conséquent, dans une certaine mesure, le coût statique ou ex ante de la réduction de l'impôt sur les gains en capital diminue.

Lorsqu'on évalue cette mesure fiscale et, dirais-je même, toutes les mesures fiscales, il est important de tenir compte des coûts initiaux -- il y a presque un investissement initial sous la force de recettes fiscales perdues -- et d'essayer de voir dans quelle mesure ce coût initial est compensé par les effets positifs de cette mesure fiscale afin d'évaluer son coût net ou ex post. Aux États-Unis, les comités budgétaires ont adopté ce concept. Il a fallu longtemps avant qu'ils analysent les mesures fiscales de cette façon en faisant la distinction entre les recettes fiscales ex ante et ex post.

Une voie importante par laquelle les effets de la réduction de l'impôt sur les gains en capital sont canalisés est ce qu'on appelle l'effet dit de la richesse sur la consommation. Dans le modèle de l'économie américaine que nous utilisons, la propension à consommer la richesse par une appréciation accrue des cours boursiers représente, si elle est permanente, environ 5 <#00A2> au dollar. Le délai est d'un an et demi à deux ans. Lorsque le revenu disponible augmente d'un dollar, peut-être à cause d'un nouvel emploi, la consommation augmente de 70 <#00A2> au bout d'un an ou deux.

De plus, les gains en capital réalisés suite à l'abaissement de l'impôt sur les gains en capital sont dépensés à raison de 11 <#00A2> par dollar de réalisation sur une période d'un an et demi. L'effet de richesse se trouve augmenté. C'est une des nouvelles conclusions de nos derniers travaux: 5 <#00A2> par dollar d'augmentation de la richesse, sur une période de 18 mois à deux ans. Lorsque les investisseurs réalisent leurs gains en capital, ils dépensent 11 <#00A2>.

Aux États-Unis, le gouvernement fédéral reçoit 20 <#00A2> au maximum. Le reste est épargné. Cette épargne sert à accumuler des éléments d'actif financier ou à rembourser des dettes. Dans la mesure où les gains en capital sont réalisés après une réduction de l'impôt sur les gains en capital, il ne faut pas oublier que le gouvernement obtient une partie de ces gains, que les ménages en dépensent une certaine proportion, mais que la majeure partie est économisée et sert à acheter d'autres éléments d'actif financier ou à rembourser des dettes.

Je constate que les effets incitatifs importants de cette mesure sur l'esprit d'entreprise, l'épargne et la formation de capital entraînent une hausse de la productivité, de l'efficacité et de la production potentielle et que l'épargne nationale a augmenté aux États-Unis. Néanmoins, notre analyse de la réduction de l'impôt sur les gains en capital montre que le taux d'épargne personnelle n'augmentera pas nécessairement, car cela dépend de l'impact sur la consommation.

La réduction de l'impôt sur les gains en capital augmente aussi les dépenses d'immobilisation en raison de l'abaissement des coûts en capital et de l'accroissement de l'activité économique. Selon le déblocage qui se produit aux nouveaux taux d'imposition plus bas des gains en capital et de l'accroissement de la réalisation qui génère de nouvelles recettes fiscales, le coût ex post de la réduction d'impôt sur les gains en capital peut être très faible.

Nous en avons tenu compte dans notre modèle. En raison de l'effet de rétroaction sur les revenus, le coût net de la réduction de l'impôt sur les gains en capital est assez limité. Si vous examinez le ratio coûts-avantages sur le plan de la production ou de l'emploi, vous obtenez un ratio assez élevé. Néanmoins, la création d'emplois et la croissance du PIB ne se comparent pas à ce que vous obtiendriez grâce à une réduction de l'impôt sur le revenu des particuliers.

La réduction de l'impôt sur les gains en capital a plus de chance que toute autre politique fiscale de minimiser la perte de recettes fiscales nettes par rapport aux gains sur le plan de l'activité économique, de l'esprit d'entreprise, de la productivité et de la production potentielle.

Quels seraient les effets d'une réduction de l'impôt sur les gains en capital dans le contexte canadien? Je formulerais les observations suivantes. La réduction du taux de l'impôt sur le revenu des particuliers ou sur les gains en capital devrait stimuler la consommation, les immobilisations des entreprises, l'épargne, l'investissement, la création d'emplois, le marché boursier et la productivité, l'esprit d'entreprise et la formation de nouvelles entreprises ainsi que la production potentielle, et cela en coûtant moins cher en recettes fiscales perdues, en tout cas pour ce qui est de la réduction de l'impôt sur les gains en capital. Les effets ne seraient sans doute pas considérables, mais ils seraient quand même importants par rapport aux effets macro-économiques d'autres mesures fiscales à beaucoup plus grande échelle.

En fait, dans le cas des États-Unis, d'après nos recherches, il ne faudrait pas procéder à une réduction importante du taux marginal d'imposition des particuliers étant donné que les États-Unis sont très près du plein emploi et que cela produirait une augmentation de la demande globale ou un effet inflationniste tandis que l'effet potentiel du côté de l'offre serait nettement moindre. Il serait préférable de réduire l'impôt sur les gains en capital, car cette mesure n'augmenterait pas autant la demande globale, mais soutiendrait l'offre. Elle n'aurait donc pas d'effets inflationnistes comme une réduction importante des taux d'imposition marginaux pourrait en avoir.

Le diagnostic de la situation canadienne n'est toutefois pas le même et je n'avancerais pas le même argument à l'égard d'une réduction du taux marginal d'imposition des revenus ou des profits, des impôts des sociétés ou de ce que proposera le budget la semaine prochaine. Le Canada est loin de se rapprocher du plein emploi comme les États-Unis. À notre avis, il en est beaucoup plus loin et n'a pas de problème d'inflation si bien qu'une réduction du taux marginal d'imposition du revenu des particuliers, associée à une réduction de l'impôt sur les gains en capital, serait une excellente mesure fiscale à prendre et une excellente façon d'utiliser l'excédent budgétaire.

Dans le cas du Canada, la réduction de l'impôt sur les gains en capital ne devrait pas constituer la seule façon d'utiliser l'excédent budgétaire du gouvernement. Je l'ai souligné en raison du sujet de cette réunion, mais je tiens à répéter clairement qu'en examinant les solutions pour la situation canadienne, même si je crois nécessaire de faire preuve de prudence et d'humilité dans mes prescriptions, je suis convaincu que la réduction de l'impôt sur les gains en capital serait une mesure positive à prendre pour le moment et progressiste pour le pays.

Le Canada devrait également utiliser d'autres façons ses excédents budgétaires. La réduction de la dette et la réduction des taux d'intérêt qui s'ensuivra libéreront des fonds que le gouvernement pourra utiliser à d'autres fins plus productives que le paiement de l'intérêt sur la dette nationale. Une partie de tout excédent budgétaire devrait servir à rembourser la dette.

Il est également souhaitable d'augmenter de façon sélective les dépenses publiques en se servant de l'excédent du budget fédéral et ces dépenses pourraient augmenter le potentiel de production de l'économie si elles étaient concentrées sur les aspects de l'économie propres à produire le plus de résultats. Selon moi, cela devrait inclure des dépenses pour l'enseignement postsecondaire de même que l'enseignement primaire et secondaire, des investissements publics dans l'infrastructure et des dépenses visant à améliorer la qualité de la vie, par exemple dans le domaine de la santé. J'insiste sur le fait que la santé fait maintenant partie de l'infrastructure de tout pays et que les dépenses qui augmentent l'efficacité ou qui aident à promouvoir des solutions commerciales dans un secteur qui, dans la plupart des pays, fait une utilisation inefficace des ressources destinées à la santé, auraient un effet positif. Il y a aussi le financement de la technologie de l'information et des nouvelles entreprises technologiques par l'entremise du secteur privé. Ce serait une bonne façon d'utiliser l'excédent budgétaire fédéral.

D'autres réductions d'impôt semblent souhaitable dans le cas du Canada étant donné que les recettes fiscales sont près d'atteindre des niveaux records en proportion du PIB. Une réduction du taux marginal d'imposition du revenu des particuliers de même qu'une réduction de l'impôt sur les gains en capital pourrait avoir des effets stimulateurs sur l'offre proportionnellement à la demande.

Enfin, le principal avantage qu'une réduction de l'impôt sur les gains en capital présente pour le Canada est sans doute qu'elle améliorerait sa compétitivité internationale, particulièrement vis-à-vis des États-Unis, ce qui constitue maintenant la norme pour de nombreuses activités commerciales et financières nouvelles et hautement concurrentielles. Tant que le taux marginal de l'impôt sur le revenu des particuliers et le taux d'imposition des gains en capital sera beaucoup plus bas, en termes absolus et par rapport à l'impôt sur le revenu ordinaire, aux États-Unis qu'au Canada, les ressources, c'est-à-dire la main-d'oeuvre, les ressources financières et l'investissement iront vers les États-Unis, ce qui drainera le Canada de ressources productives importantes pour son avenir économique et pour l'amélioration du niveau de vie de sa population.

Le président: Merci, monsieur Sinai.

Le sénateur Meighen: Monsieur Sinai, nous apprécions votre présence parmi nous et la délicatesse avec laquelle vous formulez vos prescriptions. Je vais avouer, ce qui n'étonnera personne, que je trouve ces prescriptions attrayantes et pleines de bon sens.

Bien entendu, comme vous l'avez souligné, chaque chose a du pour et du contre et la réduction de l'impôt sur les gains en capital entraîne certaines conséquences. Vous avez indiqué que si l'on hésite à réduire l'impôt sur les gains en capital c'est surtout parce que les conséquences seraient ou pourraient paraître injustes.

En fait, hier soir, c'est ce que nous a fait valoir un témoin très éloquent de la Osgoode Hall Law School, un professeur spécialisé dans la fiscalité. C'était le thème central de son mémoire. Il s'est prononcé énergiquement contre toute réduction de l'impôt sur les gains en capital en raison de l'iniquité d'une telle mesure. Je crois que vous en avez parlé, mais je voudrais vous soumettre un ou deux des autres arguments du professeur Brooks pour voir ce que vous en pensez.

M. Brooks a également ajouté qu'une réduction de l'impôt sur les gains en capital entraînerait une perte de recettes fiscales considérables, mais je crois que vous en avez traité à fond dans votre exposé.

Je vais vous énumérer ses autres arguments en vrac. Il a dit que le fait de ne pas imposer les gains en capital comme un revenu ordinaire augmenterait très probablement les inefficacités économiques. Il a ajouté que le prétendu problème du blocage causé par l'imposition des gains en capital ne se pose vraiment que lorsque les investisseurs vendent leur actif et non pas chaque année lorsqu'ils accumulent des gains. Selon lui, la situation n'est pas aussi grave qu'on l'a laissé entendre.

Il a dit aussi qu'en accordant un traitement préférentiel aux gains en capital on complique énormément la fiscalité; plus particulièrement, ce genre de mesure impose un lourd poids mort à l'économie parce que cela complique les transactions et favorise une planification fiscale qui n'est pas productive. Il a fait allusion à la situation qui régnait au Canada avant la mise en place de l'impôt sur les gains en capital en 1972. Tout le monde liquidait ses actifs pour transformer tout revenu en gains en capital afin d'éviter l'impôt ou le réduire.

Enfin, il a fait valoir qu'il était insensé de vouloir subventionner des petites entreprises ou des entreprises risquées en accordant une concession fiscale pour tous les gains en capital.

Je suis désolé de vous lancer tous ces arguments, mais peut-être pourriez-vous répondre à certains d'entre eux.

M. Sinai: Pour ce qui est des recettes fiscales -- même si, comme vous l'avez dit, j'en ai parlé dans une autre perspective -- dans les pays qui ont réduit leur impôt sur les gains en capital, on ne constate pas la perte de recettes fiscales à laquelle certains s'attendent. C'est le contraire. Ce n'est peut-être pas nécessairement à cause de la réduction de l'impôt sur les gains en capital uniquement, mais c'est peut-être dû aussi au climat économique général. On constate des recettes fiscales étonnamment élevées. Par conséquent, j'affirmerais le contraire: si vous abaissez l'impôt sur les gains en capital, vous aurez la surprise d'obtenir des recettes fiscales meilleures que vous ne le pensez. Je ne crois pas que mon modèle permet de saisir totalement de quelle façon cela fonctionne, dans le contexte du climat des affaires qui existe dans un pays.

Vous aviez une question concernant l'argument voulant qu'il ne soit pas efficace de ne pas imposer les gains en capital comme un revenu ordinaire. J'affirme le contraire. Dans la plupart des pays, nous imposons le capital plus d'une fois, par divers instruments, de même que lorsqu'il est gagné. C'est le cas de la plus-value des entreprises, par exemple, pas nécessairement dans le cas d'un titre secondaire que vous achetez sur le marché boursier et dont le prix augmente sous l'effet de l'offre et de la demande, mais à la suite d'activités qui font progresser la valeur d'un actif et qui sont reliées au fait que l'entreprise devient plus productive. Étant donné qu'il s'agit d'une entreprise risquée, le rendement doit être plus élevé, selon moi, pour avoir un effet incitatif. Nous savons que la petite entreprise est à l'origine d'une bonne partie de la croissance de l'emploi aux États-Unis et peut-être aussi au Canada. La prise de risques devrait être suffisamment récompensée une fois l'impôt payé. Autrement dit, il est inefficace d'avoir le même taux d'imposition que pour un revenu ordinaire gagné par un salarié pour qui le risque est beaucoup plus faible.

Le déblocage qui résulte d'une réduction d'impôt sur les gains en capital a été assez bien documenté aux États-Unis où il y a eu beaucoup de recherches scientifiques sur le sujet. Il s'agit maintenant de voir combien de temps les effets positifs dureront et si, d'ici quelques années, il y aura moins de réalisation et une perte de revenus. Je ne pense pas qu'il y ait encore beaucoup de discussions sur le déblocage de fonds importants qui rapportent des recettes fiscales au gouvernement. Une partie de l'argent ainsi débloqué est dépensée, mais une forte proportion de cet argent est épargnée. Nos travaux établissent qu'il est épargné en grande partie, ce qui est un aspect positif. Je n'aime pas beaucoup l'argument du blocage.

La complexité des transactions varie d'une société à l'autre. Il est sans doute utile d'avoir un taux d'imposition différent pour l'actif détenu à court terme et l'actif détenu à long terme étant donné que les transactions journalières qui se produisent actuellement dans les marchés boursiers compliquent les choses. Ces opérations ne permettent pas nécessairement de disposer de plus d'argent pour investir dans une nouvelle entreprise. Ce sont seulement des variations d'un jour à l'autre. Si l'on appliquait l'impôt sur les gains en capital à ce genre de transactions, la situation serait très compliquée. Néanmoins, la solution est de ne pas imposer les gains en capital. Pour éviter cette complexité, il suffit de n'avoir aucun impôt sur les gains en capital. Je n'en suis pas tout à fait là, mais je sais que le président de la Federal Reserve des États-Unis, M. Greenspan, a déclaré bien souvent qu'en raison des grandes distorsions, le taux devrait être de zéro.

Pourquoi subventionner tous les gains en capital? C'est en fait une excellente question. Il est difficile d'apporter ces distinctions dans la loi pour une question de politique. Je comprends toutefois ce point de vue dans le genre de situation ci-après. J'achète une action et un an et un jour plus tard, j'ai une bonne plus-value. Il se peut que je ne sache rien au sujet de cette action; l'argent qui m'a servi à l'acheter n'ira peut-être nulle part, sauf dans le système financier et ne servira pas vraiment à financer une nouvelle entreprise qui a besoin d'argent pour démarrer et qui peut seulement l'obtenir des fonds de capital de risque ou des émissions initiales d'actions sur le marché boursier. Il se peut que le traitement préférentiel que j'obtiens pour mes gains en capital ne devrait pas être aussi important que si je risquais de l'argent pour créer une nouvelle entreprise qui aura un jour une influence importante sur la création d'emplois. Le raisonnement suivi est que toutes ces transactions déboucheront, d'une façon ou d'une autre, sur le marché boursier. Ce marché aura à son tour une influence sur le coût du capital, ce qui est important pour les nouvelles entreprises commerciales productives. Il faut accepter d'accorder un traitement préférentiel pour les gains en capital non productifs afin d'obtenir une utilisation productive de cette mesure pour financer de nouvelles entreprises légitimes ainsi que les entreprises nouvelles et existantes qui font régulièrement appel au marché boursier.

Le sénateur Meighen: Monsieur Sinai, en 1997, les États-Unis ont réduit leur taux d'imposition des gains en capital de 28 p. 100 à 20 p. 100. Je ne suis pas fort en calcul, mais cela donne une réduction d'environ 28 p. 100.

D'après les rumeurs qui circulent en ville, le gouvernement se propose -- et nous le saurons lundi -- de réduire l'impôt sur les gains en capital de 75 p. 100 à 66 p. 100, ce qui, selon mes calculs, donne une diminution d'environ 10 p. 100. Il y a une différence importante entre les deux pays pour ce qui est du pourcentage de réduction.

Vous avez dit que vous n'iriez pas aussi loin que M. Greenspan en préconisant l'élimination de l'impôt sur les gains en capital et je reconnais que toute réduction dépend de choses comme une réduction simultanée du taux marginal de l'impôt sur le revenu des particuliers ou du taux d'imposition des sociétés. Y a-t-il d'autres critères dont les législateurs devraient tenir compte, selon vous, pour prendre ces décisions?

M. Sinai: Si c'est effectivement ce qui se passe, ce sera seulement une réduction du montant de gains en capital assujetti à l'impôt sur le revenu ordinaire; il s'agit d'une exclusion, ce qui représente la façon la plus limitée et la moins efficace de procéder.

Si le taux marginal d'imposition est abaissé en même temps, étant donné le changement dans le pourcentage d'exclusion et l'abaissement du taux marginal d'imposition, le taux d'imposition de gains en capital se trouvera réduit de plus de 10 p. 100. Je crois que ce serait une bonne chose.

D'après tout ce que j'ai lu, on peut sans doute s'attendre à une certaine réduction du taux marginal d'imposition, comme il y en a déjà eu les deux dernières années. La réduction de l'impôt sur les gains en capital sera peut-être plus importante que les 10 p. 100 dont on parle un peu partout. Je dirais que ce n'est pas suffisant. Si l'exclusion est de 66,67 p. 100, ce serait beaucoup trop.

Le problème est qu'il n'y a pas de différence entre le taux d'imposition ordinaire et celui qui s'applique aux gains en capital pour inciter à prendre des risques et à créer des entreprises dans un pays comme le Canada. Si vous regardez ce qui se passe ailleurs dans le monde, vous verrez que certains pays abaissent ou ont déjà largement abaissé leur taux. Le Royaume-Uni, par exemple, va sans doute le réduire beaucoup plus.

Ce dont vous parlez semble être une mesure minimale. C'est un pas dans la bonne direction, mais nous sommes très loin de ce qui serait optimal et, je le répète, d'une utilisation optimale de l'excédent budgétaire que ce pays continuera d'enregistrer, et ça notamment parce que le coût d'une réduction de l'impôt sur les gains en capital ex post est vraiment limité.

Le sénateur Kenny: Nos témoins d'hier soir, M. Dobson et M. Soutar, ont fait valoir qu'une réduction de l'impôt sur les gains en capital était la principale chose que le gouvernement puisse faire pour stimuler l'économie. Selon eux, cette mesure est meilleure pour les investisseurs, elle augmente les recettes gouvernementales et elle retient chez nous les gens les plus compétents. Ils ne voyaient pas de problème d'équité du fait que le gâteau à se partager serait plus gros et que tout le monde en aurait sa part.

Vous ne semblez pas dire que la réduction de l'impôt sur les gains en capital constitue, à elle seule, la solution la plus efficace pour l'économie. Si j'ai bien compris, vous préconisez une solution plus complexe, n'est-ce pas?

M. Sinai: Oui, c'est exact. J'estime que le taux d'imposition du revenu des particuliers est trop élevé au Canada, en termes absolus et par rapport aux autres pays, pour permettre de créer un climat propice à l'investissement. Ce pays possède de merveilleux atouts qui devraient attirer les investisseurs du monde entier et vos revenus après impôt devraient vous permettre de vous prévaloir des possibilités formidables qui s'offrent à vous, mais il ne semble pas que ce soit entièrement le cas.

Une réduction du taux marginal d'imposition aura des effets incitatifs plus importants. Elle risque également d'entraîner une augmentation des dépenses. Je ne crois toutefois pas que ce soit là un gros risque pour l'économie canadienne en ce moment.

La solution que je préfère consiste à allier une réduction du taux marginal de l'impôt sur le revenu des particuliers à une réduction de l'impôt sur les gains en capital plus importante que celle qui s'annonce, afin de rendre le pays plus rapidement concurrentiel sur le plan fiscal, tant pour les particuliers que pour les entreprises.

Les travaux que j'ai réalisés aux États-Unis ne reconnaissent pas à une réduction de l'impôt sur les bénéfices des sociétés ou sur les gains en capital des sociétés le même pouvoir économique que les réductions qui s'appliquent aux particuliers. L'argent disponible est limité et cet excédent budgétaire doit également servir à d'autres fins, notamment à réduire la dette, ce qui est très important, et à faire des dépenses publiques ciblées. Vous ne disposez pas d'un montant d'argent illimité; par conséquent, il est sans doute logique d'adopter une stratégie étapiste ou progressive.

Si le budget est tel qu'on s'y attend, je lui reprocherais de ne pas réduire suffisamment l'impôt sur les gains en capital. Il aurait coûté très peu d'en faire plus.

Le sénateur Kenny: Si nous laissons de côté le prochain budget, vu qu'il est difficile d'en deviner le contenu, pourquoi préférerait-on réduire l'impôt sur les gains en capital des sociétés plutôt que le taux marginal de l'impôt sur le revenu, surtout pour les tranches d'imposition inférieures alors qu'au Canada, comme vous l'avez dit, nous avons encore une marge de manoeuvre et nous risquons moins de stimuler l'inflation? Cela soulève directement le problème social. Vous évitiez le problème social de l'équité, pour des raisons évidentes.

M. Sinai: Vous voulez savoir pourquoi quelqu'un ferait ce genre de recommandations?

Le sénateur Kenny: Pourquoi ne les feriez-vous pas? Pourquoi ne préconisez-vous pas une réduction d'impôt pour les bas revenus? Vous savez que cela stimulerait l'économie. Vous n'auriez pas à résoudre le problème de l'équité, alors pourquoi ne pas orienter vos recommandations dans cette direction?

M. Sinai: J'ai été frappé par les effets incitatifs d'une réduction générale du taux marginal, pour tous les niveaux de revenu. Les systèmes de marché sont financés en grande partie par les hauts revenus. Le taux d'épargne est plus élevé en haut qu'en bas de l'échelle des revenus. Par conséquent, j'ai tendance personnellement à favoriser une réduction générale du taux marginal d'imposition au lieu de la limiter au bas de l'échelle des revenus, à moins qu'on ait pour objectif social d'aider les personnes à bas revenus ou qu'on ne souhaite rétrécir l'écart dans les revenus, par exemple. Néanmoins, pour ce qui est des effets incitatifs économiques, je préfère une réduction générale du taux d'imposition, accompagnée d'une réduction de l'impôt sur les gains en capital.

Le sénateur Kenny: La question sociale se pose et posons-la. L'un des principaux arguments invoqués contre une réduction des gains en capital est peut-être qu'on estime, à tort ou à raison, que l'écart se creuse entre le haut et le bas de l'échelle des revenus au Canada. Comment expliqueriez-vous aux Canadiens à faible revenu en quoi la réduction de l'impôt sur les gains en capital serait avantageuse pour eux?

M. Sinai: Qu'ils puissent le voir ou non, cela créerait de nombreux emplois pour le montant d'argent que le gouvernement consacrera à cette réduction d'impôt et des pauvres qui, autrement, seraient sans emploi, pourraient trouver du travail. Même s'ils ne peuvent pas voir d'avantage direct, ils en retireront un avantage indirect du fait de la stimulation de l'économie qui résulte parfois, que cela nous plaise ou non, des risques pris par les personnes et les familles riches qui recherchent un rendement plus élevé après impôt et qui disposent de l'argent voulu. Ces personnes ont des économies supplémentaires qu'elles cherchent à déployer.

Ce n'est pas le cas des familles à faible revenu ou des familles pauvres, mais dans les pays qui ont un régime fiscal amical, je veux dire par là les pays où le problème du déficit budgétaire ne se pose pas, où les dispositions fiscales sont favorables en ce qui concerne le revenu des particuliers, le revenu des sociétés et les gains en capital, il y a généralement un climat très propice à la croissance de l'emploi.

Le sénateur Kenny: Les contribuables pauvres ne seraient-ils pas aussi avantagés si on abaissait le taux marginal d'imposition des gens qui gagnent 35 000 $ par an et moins?

M. Sinai: Non, ils le seraient beaucoup moins. Les gens dépenseraient tout cet argent et même davantage, ce qui augmenterait la consommation, et si vous vous rapprochez du plein emploi, cela créerait de l'inflation.

Le sénateur Kenny: Mais vous avez dit que ce n'était pas le cas. Vous avez dit que le Canada disposait d'une plus grande marge de manoeuvre que les États-Unis.

M. Sinai: Oui, mais cet argent irait surtout du côté de la consommation. Il servirait en partie à générer des investissements supplémentaires dans des nouvelles entreprises, mais il serait surtout dépensé pour acheter des choses que les familles à faible revenu achètent normalement, les choses indispensables, ce qui n'entraînerait pas la création de nouvelles capacités de production ou de nouveaux investissements.

Le sénateur Kenny: L'achat de téléviseurs ne crée pas de nouveaux emplois?

M. Sinai: Cela crée des emplois dans ce secteur, mais pas autant de nouvelles entreprises qui pourront augmenter la productivité et la production potentielle d'une économie. Cela ne créera pas non plus le capital qui sert à améliorer la croissance de la productivité, ce qui finit par rehausser le niveau de vie des travailleurs. Il est très difficile de convaincre ceux qui ne comprennent pas le phénomène.

C'est le principe des vases communicants. C'est une réalité. Je dois l'admettre malgré moi. J'ai grandi à Detroit dans un quartier très pauvre, mais nous avons appris que ce principe fonctionne vraiment et ceux qui ne s'en rendent pas compte en bénéficient quand même.

Une réduction de l'impôt sur les gains en capital coûtera, en fin de compte, moins cher que bien d'autres mesures. La réduction du taux marginal pour les contribuables au bas de l'échelle des revenus se répercutera positivement sur les recettes fiscales et va donc s'autofinancer en partie, mais aux États-Unis, les chiffres sont de l'ordre de 20 <#00A2> au dollar, si bien que cela coûte quand même 80 <#00A2> au gouvernement. Dans le cas d'une réduction de l'impôt sur les gains en capital, nous récupérons des recettes fiscales de 40 à 45 <#00A2> pour chaque dollar dépensé. Par conséquent, cette mesure ne s'autofinance pas entièrement, mais le gouvernement dispose de 25 <#00A2> supplémentaires. Toutefois, les gens ne s'en rendent pas compte.

Le sénateur Kenny: Vos arguments sont très convaincants, mais ils sont très difficiles à traduire en arguments politiques. Notre comité a là un très sérieux défi à relever. Nous avons grandement besoin de traducteurs.

M. Sinai: La moitié des ménages américains sont maintenant sur le marché boursier si bien que la polarisation des riches et des pauvres est un problème qui s'atténue aux États-Unis. De nombreux démocrates américains, qui n'avaient jamais été pour une réduction de l'impôt sur les gains en capital, sont maintenant d'accord parce que les caractéristiques de leur électorat sont en train de changer. C'est sans doute aussi ce qui se passe au Canada. Il est peut-être un peu tôt, mais lorsque de nombreux Canadiens, riches et pauvres, dépendent des fluctuations du marché boursier et sont propriétaires d'une partie de leur propre entreprise, parce qu'ils en possèdent des options, comme le veut la tendance aux États-Unis, ils finissent par mieux comprendre certains de ces avantages.

Je ne connais pas suffisamment bien ce pays pour dire si vous en êtes arrivés là. D'après ce que vous dites, sénateur, ce n'est pas encore le cas et ce n'est donc pas facile à faire accepter. Sur le plan politique, il est très difficile pour tout gouvernement d'insister sur cette mesure fiscale en soi, car elle est compliquée, elle suscite de nombreuses réactions émotives et l'électorat n'a peut-être pas suffisamment d'intérêts personnels en jeu. Toutefois, aux États-Unis, l'électorat change très rapidement. La moitié des ménages possède maintenant des actions dans le marché boursier. Je crains que nous devenions tellement associés à ce marché que notre économie ne soit menacée si les choses vont mal de ce côté-là et que nous aurons intérêt à faire en sorte que les indices boursiers augmentent constamment. Les décideurs politiques ne devraient pas penser à cela. Ils devraient prendre les mesures qui s'imposent et le marché boursier suivra.

Le sénateur Tkachuk: Si le gouvernement décide d'abaisser l'impôt sur les gains en capital, devrait-il y avoir, comme certains l'ont déjà dit, un rapport entre l'impôt sur les gains en capital et l'impôt sur les dividendes et des revenus d'intérêt?

M. Sinai: Aux États-Unis, nous n'avons pas d'impôt préférentiel sur le revenu net. Nous avons également des impôts supplémentaires au niveau de l'État. Par conséquent, les dividendes sont imposés et l'argent qui les a créés a été imposé plusieurs fois au niveau des sociétés. Nous n'avons pas une double imposition, mais une triple imposition. Nous avons ensuite un autre impôt, l'impôt sur les successions. L'accumulation des dividendes dans une succession est encore imposée. Les analystes comme moi considèrent que cette imposition est mauvaise et crée des distorsions.

Il est très difficile de mettre en place un régime fiscal qui évite la double imposition des dividendes. Il est difficile d'avoir un régime fiscal qui impose les dividendes à un taux et les gains en capital à un autre taux. Je ne pense pas que je toucherais à cela. Malgré les distorsions, je n'essaierais même pas de modifier le régime d'imposition des dividendes.

Le sénateur Tkachuk: Vous avez mentionné le taux d'imposition des gains en capital. Vous avez dit, je crois, que nous avions un taux d'inclusion effectif de 75 p. 100 pour les gains en capital. Je me préoccupe de moins en moins de l'argument politique. Si les États-Unis abaissent leur impôt sur les gains en capital, de nombreux Canadiens penseront qu'ils font tout pour aider les riches, mais quand le paradis socialiste qu'est l'Allemagne en fait autant, cela amène beaucoup de gens à réfléchir à ce qui se passe dans le monde. C'est ce qui m'amène à ma question suivante.

Nous avons des arguments économiques qui militent fortement en faveur d'une réduction de l'impôt sur les gains en capital. Il y a aussi des arguments moraux solides. Néanmoins, dans le journal d'aujourd'hui, on peut lire que le Canada est une passoire pour l'argent des investisseurs. Nous avons perdu 135 milliards de dollars au profit des marchés étrangers au cours des 10 dernières années. La concurrence est maintenant une bonne raison d'abaisser l'impôt sur les gains en capital. Nous perdons des gens, ce qui représente une perte considérable pour notre pays et nous commençons tous à le ressentir. Les riches comme les pauvres perdent leurs fils et leurs filles. Tout cet argent s'en va parce que les autres pays ont compris ce qu'il fallait faire et ont abaissé leur impôt sur les gains en capital.

Vous n'avez pas dit exactement quels devraient être les chiffres au Canada, mais pourriez-vous nous indiquer quel serait, selon vous, un taux concurrentiel pour l'imposition des gains en capital afin que nous ne perdions pas autant notre capital et nos gens?

M. Sinai: Il y a deux façons de répondre à cette question. Ma première réponse porte sur le taux d'imposition des gains en capital et la façon d'imposer ces gains individuellement ou dans le cadre de l'ensemble de la fiscalité. Au Canada, vous devez créer un climat fiscal attirant pour les entreprises et les particuliers. Cela veut dire qu'il faut réduire à la fois le taux de l'impôt sur le revenu des particuliers et de l'impôt sur les gains en capital. Vous devriez sans doute aligner davantage vos taux sur ceux des États-Unis qui sont votre principal concurrent en Amérique du Nord.

Vous avez parfaitement raison de souligner les mesures prises par l'Allemagne. Je dirais que c'est une question de concurrence. C'est à ce niveau que se fait la concurrence mondiale. Dieu merci, il n'y a pas de guerre entre les grandes puissances. Nous ne consacrons pas de ressources à l'armement pour faire la guerre ou s'y préparer. Notre concurrence se situe maintenant sur le plan économique. C'est là que ça se joue. C'est entre les pays. C'est une concurrence pour les gens, l'argent et la richesse. C'est un jeu amusant. Tous les pays du monde le jouent très intensément. L'Allemagne va y participer, tout comme vous le pensez. Vous ne voulez pas être les derniers. Ce serait une grave erreur. Si vous êtes les derniers, ceux qui préconisent de rester à la traîne se feront évincés du pouvoir dès que leurs électeurs en auront l'occasion.

C'est une question que vous devez étudier -- je ne peux pas vous donner des chiffres précis -- pour veiller à être concurrentiels. Cela dépend du climat général, mais les impôts en représentent un élément important, car il faut être concurrentiel vis-à-vis des États-Unis. En ce qui concerne la réduction de l'impôt sur les gains en capital, les taux effectifs canadiens sont tout à fait excessifs, mais vous avez également l'impôt provincial qui s'y ajoute. Si le taux d'imposition effectif maximum des gains en capital était de 37 p. 100 -- autrement dit, s'il y avait un pourcentage d'exclusion de 66 p. 100 et s'il était abaissé à 33 p. 100 environ, il resterait trop près du taux d'imposition des revenus ordinaires et beaucoup trop élevé par rapport au taux américain. La réduction serait donc insuffisante.

Le sénateur Tkachuk: Ma dernière question concerne une chose que M. Sinai a dite à propos de la politique américaine. Il y a actuellement un grand débat au sein du Parti républicain. Vous dites que vous seriez contre une diminution du taux marginal d'imposition aux États-Unis, parce que cela pourrait créer des pressions inflationnistes. Voulez-vous dire que l'excédent budgétaire devrait servir à rembourser la dette nationale?

M. Sinai: N'oubliez pas que j'ai dit que les conditions initiales variaient d'un pays à l'autre. C'est seulement à ses propres risques que l'on peut se permettre de conseiller à un pays ce qu'il doit faire alors qu'on vient de l'extérieur. Je n'ai pas été tendre avec vous. Je vous ai énoncé des solutions sans équivoque. J'ai dit qu'il est important de tenir compte des conditions initiales. C'est difficile à expliquer du point de vue politique. Même lorsqu'on parle de «conditions initiales» cela ne plaît pas aux gens. Vous avez dit poliment que vous n'étiez pas sûr d'avoir compris mon propos. Les économistes ne sont pas connus pour s'exprimer clairement.

En ce qui concerne la situation aux États-Unis, il semble que nous nous rapprochions du plein emploi. Nous avons un marché du travail serré. Les réductions du taux marginal d'imposition que propose le candidat Bush produiront, selon moi, une trop grande stimulation de la demande étant donné où nous en sommes. Au début des années 90, j'aurais été tout à fait pour. Par exemple, lorsque notre économie a nettement ralenti, j'aurais aimé qu'il propose une réduction de l'impôt sur les gains en capital, ce qui constitue en soi une intervention économique de nature plus chirurgicale que la réduction d'impôt de 483 milliards de dollars proposée aux Américains. Je crois que cela va lui faire perdre du terrain. La meilleure façon d'utiliser une bonne partie de l'excédent budgétaire que nous avons aux États-Unis serait de réduire la dette et de faire des dépenses sélectives en réfléchissant au rôle qui revient au gouvernement fédéral dans le monde d'aujourd'hui. Ce n'est plus le même monde qu'il y a 20 ans ou 30 ans. Les États-Unis ont un gouvernement plutôt anachronique.

Les grosses réductions d'impôt que propose le candidat Bush visent aussi à faire sortir l'argent de Washington avant qu'il ne soit dépensé. Un autre aspect des réductions d'impôt, qui est surtout non économique et politique, est la propension des gouvernements centraux à dépenser l'argent qu'ils ont, souvent de façon non productive. Le raisonnement sur lequel s'appuient les réductions d'impôt que propose Bush est sans doute le plus défendable. Nous avons eu l'habitude de gaspiller l'argent à Washington lorsque nous en avions.

Le sénateur Tkachuk: C'est ce que nous faisons ici également. Ne le prenez pas personnellement.

M. Sinai: C'est le défaut de tous les gouvernements centraux. En fait, c'est un bon argument en faveur d'une baisse du taux marginal d'imposition. Il suffit de dire aux gens que nous voulons établir le budget des dépenses publiques. Si nous le faisons, les dépenses du gouvernement sont plus productives et plus efficaces. C'est une assez bonne façon de voir les choses.

Le sénateur Kroft: La terminologie est très importante. Peut-être pourrions-nous trouver une autre expression pour désigner la théorie des vases communicants. L'expression «stimulation verticale» serait peut-être plus éloquente.

J'ai une question précise, semi-technique, que le sénateur Meighen a bien voulu me laisser poser aujourd'hui. Mais avant cela, en ce qui concerne le blocage, pourriez-vous nous dire brièvement ce que vous pensez de notre système et de l'impôt sur les successions qui incite à transmettre les biens, même si cela représente une dépense, par opposition à la réalisation présumée que nous avons lors du décès? Nous n'avons pas d'impôt sur les successions, comme vous le savez sans doute. Le gain est réputé réalisé au moment du décès et vous payez alors l'impôt sur les gains en capital. Je ne sais pas si vous connaissez le sujet. Je me demande si, à votre avis, cela pourrait avoir des répercussions sur le calcul de l'effet de blocage.

M. Sinai: C'est une question intéressante. Je veux être certain d'avoir bien compris. J'ai toujours espéré que je vivrais éternellement et comme je n'aime pas penser à l'impôt sur la succession, c'est un sujet auquel je ne connais pas grand chose. Voulez-vous dire que les gains en capital non réalisés qui se trouvent inclus dans une succession sont imposés au taux d'imposition des gains en capital?

Le sénateur Kroft: Au moment du décès, vous êtes réputé avoir réalisé la totalité de vos gains non réalisés et vous êtes imposé au taux des gains en capital et il y a donc un effet de blocage lors du transfert d'une génération à la suivante.

M. Sinai: Cela veut dire que juste avant leur décès, les gens vont s'empresser de s'en débarrasser.

Le sénateur Kroft: D'autant plus que nous n'avons pas d'impôt sur les dons.

M. Sinai: Cela crée d'énormes distorsions. Il faudrait changer cette situation. Même un impôt sur les successions est préférable, selon moi, à ce que vous venez de décrire.

Quant à savoir dans quelle mesure cela bloque les gains en capital, je suppose que beaucoup de dons sont faits dans le cadre des successions et que les gains en capital se trouvent bloqués lors du transfert d'une génération à la suivante. Que prévoit la loi lorsqu'il y a un transfert, en l'absence d'impôt sur les dons, lorsque les gains qui se sont appréciés se retrouvent dans le porte-feuille d'un membre de la famille? Je suppose qu'ils restent là et que le membre de la famille aura à son tour le même problème. À vous écouter, il me semble que la façon dont les successions sont imposées favorise le blocage. Je ne sais pas quelle est vraiment la situation au Canada.

Le sénateur Kroft: Je pensais que vous aviez eu des raisons de vous intéresser à la question.

M. Sinai: Non.

Le sénateur Kroft: Je vais changer de sujet. Je voudrais en revenir à ceux qui croient qu'une réduction importante de l'impôt sur les gains en capital pourrait avoir d'importantes répercussions dans l'économie. Cela devient presque un acte de foi. Comme le sénateur Kenny, vous dites qu'il est difficile de faire accepter ce point de vue sur le plan politique, mais vous voulez qu'on vous croit sur parole. Cet impôt présente-t-il des aspects particuliers qui permettraient de mettre l'accent sur l'investissement ou la création d'entreprises? Existe-t-il des moyens de formuler cet impôt dans ce sens?

Par exemple, vous avez mentionné en passant la durée de détention de l'actif. J'ai l'impression que si vous prévoyez des dispositions fiscales plus avantageuses pour une période de détention plus longue, en oubliant les transactions purement boursières, il serait plus encourageant pour les investisseurs providentiels d'investir dans une entreprise pour l'aider à prendre de l'expansion, car ils seraient incités à réaliser leurs gains plus tard. Existe-t-il des techniques fiscales ou autres, ou auriez-vous deux ou trois méthodes efficaces à proposer pour modifier les comportements?

M. Sinai: Chaque méthode comporte ses avantages et ses inconvénients sur le plan politique. Il y a certains mouvements de fonds qui sont davantage susceptibles de créer de nouvelles entreprises productives que de simples gains sur le marché boursier secondaire. On pourrait donc établir des taux différents pour l'impôt sur les gains en capital selon la façon dont les gains en capital sont accumulés et selon leur source. D'autres que moi ont sans doute examiné cette solution et je crois qu'elle poserait des problèmes sur le plan de l'administration et des transactions. Cela pourrait être également difficile à faire accepter du point de vue politique. Ce serait toutefois la bonne façon de procéder.

Il s'agit d'établir des taux d'imposition différents pour les gains en capital, mais en établissant ce qui est plus productif et ce qui l'est moins. Dans un certain sens, c'est ce que vous faites lorsque la période de détention est différente. Quand vous exigez que l'argent reste investi pendant un an ou plus, cela revient à dire que si vous réalisez votre gain au bout de deux semaines, ce n'est pas la même chose que si vous permettez que votre argent soit utilisé pendant un an ou plus. La récompense après impôt est donc plus importante si vous prenez le risque de laisser cet argent travailler plus longtemps ou parce que cet argent sera probablement utilisé pour une entreprise plus productive que dans l'exemple des transactions journalières dont j'ai parlé. Vous pouvez mettre au point un système qui aura cet effet.

Vous vous trouvez devant des difficultés administratives et politiques, car la réduction de l'impôt sur les gains en capital n'est déjà pas facile à comprendre pour l'électeur moyen à moins qu'il n'ait réalisé lui-même des gains en capital, payé l'impôt et trouvé cela déplaisant. Cela devient alors plus facile à comprendre.

Le sénateur Kroft: En principe, vous pensez que ces choses sont efficaces.

M. Sinai: Absolument.

Le sénateur Kroft: Vous avez dit une chose à propos d'une question qui préoccupe un grand nombre d'avocats, d'analystes fiscaux et d'économistes et dont j'ai eu certains échos avant 1972. Je veux parler de la complexité, de la restructuration et des frais de transaction, de tout ce qui caractérise les revenus obtenus sous la forme de gains en capital. Nous n'avions pas d'impôt sur les gains en capital à l'époque et c'était une industrie en plein essor. Je n'ai pas très bien compris, car je pensais que vous disiez qu'à cet égard, il serait plus simple de supprimer cet impôt que de l'abaisser. Je ne comprends pas tout à fait pourquoi.

M. Sinai: Vous avez raison. Cela veut dire que vous n'auriez pas à mettre en place diverses dispositions pour l'impôt sur les gains en capital. Vous saurez seulement, quelle que soit la source de vos gains en capital, qu'il ne seront pas imposables. À cause de certaines subtilités, les différences dans le traitement fiscal ont donné naissance à toute une industrie.

Le sénateur Kroft: Il y a différents types de gains en capital.

M. Sinai: Oui. Toute une industrie inutile a vu le jour à cause de cela. Vous aurez quand même toute une industrie qui cherchera des moyens de réduire l'impôt en profitant des dispositions visant les gains en capital par opposition aux revenus ordinaires. Cela a également des conséquences négatives, car si l'impôt sur les gains en capital était réduit à zéro, de nombreux investissements seraient faits uniquement pour réduire l'impôt, sans qu'il s'agisse nécessairement d'investissements productifs. C'est pour cette raison que, chez nous, nous avons établi des taux d'imposition égaux. Nous en sommes revenus à une différence importante entre le taux d'imposition du revenu ordinaire et des gains en capital et nous avons toute une industrie des options qui s'est mise à proliférer autour des entreprises américaines et qui donne actuellement d'excellents résultats sur le plan de la productivité, mais qui cessera peut-être de le faire un jour.

J'ajouterais que le taux d'imposition préférentiel accordé pour les actions qui sont détenues pendant au moins un an a eu des effets incitatifs importants chez les cadres et les travailleurs de l'économie américaine, de même que des effets marqués sur la croissance de notre productivité. Cet effet n'a pas encore été entièrement étudié ou compris, mais lorsqu'on écrira l'histoire de cette période et de l'énorme croissance de la productivité à laquelle nous assistons, je suis certain qu'on le devra beaucoup au mantra américain selon lequel il faut maximiser le rendement pour les actionnaires. Je suis certain qu'un jour nous irons trop loin et que cela engendrera de l'instabilité, car c'est ainsi que les choses évoluent naturellement. Toutefois, cela a été un facteur de motivation très puissant pour augmenter la productivité aux États-Unis et je serais extrêmement étonné si ce modèle n'était pas copié dans le monde entier.

Le sénateur Graham: Monsieur Sinai, j'ai trouvé votre exposé très intéressant et vos arguments tout à fait convaincants.

Vous avez mentionné que l'économie canadienne se dirigeait vers le plein emploi. Quelle est votre définition du «plein emploi»?

M. Sinai: C'était une prévision. Le taux de chômage se situe autour de 6,6 à 6,8 p. 100. Du côté du marché de la main-d'oeuvre, dans la nouvelle économie -- cette réponse vous étonnera -- je crois que vous pouvez abaisser le taux de chômage à 4 ou 5 p. 100 sans avoir de problème d'inflation.

Vous en êtes loin, mais la croissance de l'emploi a été exceptionnelle au Canada. Le taux de chômage baisse assez rapidement et, bien entendu, vous perdez des gens au profit d'autres pays, car ils cherchent des possibilités ailleurs. La croissance de la main-d'oeuvre pourrait ralentir. Je crois que le taux de chômage va nettement diminuer d'ici un an ou deux. Votre pays sera étonné de voir à quel point le chômage pourra baisser sans causer d'inflation.

Le sénateur Graham: Par contre, certains diront que des travailleurs qualifiés d'autres pays viennent chez nous en plus grand nombre que ceux qui contribuent à l'exode des cerveaux, selon l'économiste ou le parti politique à qui vous parlez. Je crois que quel que soit le côté de la table où nous sommes assis, nous sommes désireux d'améliorer l'économie et de créer des emplois.

Le taux de chômage moyen à l'échelle nationale est, je crois, 6,8 p. 100. Vous avez dit que nous nous dirigions peut-être vers un taux de 5 p. 100 ou 4 p. 100. Notre pays est l'un des plus difficiles à gouverner étant donné la taille et la complexité de ses régions, et le fait que la majeure partie de la population réside dans un corridor de 250 à 300 milles de large, le long de la frontière canado-américaine.

J'en reviens à ce que disait le sénateur Kenny. Il a dit qu'il était difficile de faire accepter cette proposition en raison de notre diversité. Le taux de chômage à Terre-Neuve et au Labrador atteint 20,5 p. 100. Dans l'est de la Nouvelle-Écosse, d'où je viens, nous avions un taux de chômage officiel moyen de 18,2 p. 100 en 1999. Le taux non officiel est davantage de l'ordre de 30 à 40 p. 100, car un tas de gens ont renoncé à chercher du travail et ne sont plus inscrits. La ville de Halifax se porte bien. Elle a un taux de chômage de 6,9 p. 100.

Comme je n'ai cessé de le répéter, nous ne pouvons pas avoir deux catégories de gens en Nouvelle-Écosse, ceux de Halifax et tous les autres. C'est vrai pour la plupart des régions du pays. Dans le nord du Québec, le taux de chômage est de 7,2 p. 100. À Hull, au Québec, il est de 7,2 p. 100. À Ottawa, il est de 6,5 p. 100, à Toronto, de 6,2 p. 100 et à Hamilton, de 5 p. 100. À Calgary, Regina et Saskatoon, il va de 5 à 6 p. 100.

Le sénateur Meighen: J'attends votre question, sénateur.

Le sénateur Graham: Je souligne seulement que, quand vous dites que nous nous dirigeons vers le plein emploi, que ce n'est pas vrai dans de nombreuses régions du pays.

C'est un pays difficile à gouverner. Je cherche des moyens de faire accepter votre théorie au public. Quelle est la meilleure solution? La réduction de l'impôt sur les gains en capital vaut-elle mieux que d'accorder, par exemple, des subventions et des prêts pour stimuler la croissance économique dans les diverses régions du pays qui en ont le plus besoin?

M. Sinai: Vous avez raison en ce qui concerne la répartition du chômage. Je parlais de la situation d'ensemble au niveau national. Ce genre de statistique cache toujours un tas de détails.

Il y a d'importantes variations. En fait, je trouve ces variations très intéressantes. Elles sont beaucoup plus marquées qu'aux États-Unis. Il y a davantage de régions qui ont des taux de chômage élevés par rapport à la moyenne nationale que ce n'est le cas aux États-Unis où la répartition des taux de chômage d'un État à l'autre se rapproche davantage de la moyenne nationale d'après les chiffres que vous avez cités, sénateur. C'est une particularité regrettable. Je suis sûr que vous n'en êtes pas satisfait. Personne n'a lieu de s'en satisfaire.

Comment y faire face? Le problème serait sans doute résolu en partie par une forte croissance de l'économie canadienne, supérieure au taux de croissance potentiel du Canada, ce qui pourrait être toléré sans restriction politique pendant un certain temps. Mon avis sur la question n'est sans doute pas le même que celui de bien des gens, y compris probablement la Banque du Canada.

Pendant des années, j'ai eu les mêmes idées en ce qui concerne les États-Unis. J'estimais que nous pouvions abaisser le taux de chômage beaucoup plus que tout le monde ne le pensait. J'étais pratiquement le seul de ma profession et des cercles politiques à dire qu'il n'existait pas de taux naturel et que, s'il y en avait un, il était de moins de 5 p. 100. J'ai la même opinion en ce qui concerne l'Europe. Les Européens peuvent également abaisser leur taux de chômage plus qu'ils ne le pensent sans avoir à craindre l'inflation.

Dans le cas du Canada, cela nous ramène à ce que vous pouvez faire avec l'argent supplémentaire que vous avez dans votre budget pour stimuler l'ensemble de l'économie sans risquer de vous heurter à l'obstacle du plein emploi. Je suis maintenant plus convaincu que jamais, étant donné vos chiffres, que vous pourriez parvenir au plein emploi à quelques endroits, mais pas dans l'ensemble du pays. Laissez l'économie prendre de l'expansion sans essayer de la retenir du côté monétaire. C'est la première chose.

Deuxièmement, l'excédent budgétaire ne doit pas être utilisé d'une seule et même façon. Il faudra en consacrer la majeure partie à une réduction d'impôt, ce qui aura d'importants effets sur la demande globale. Il faudrait également augmenter certaines dépenses, ce qui va créer une demande supplémentaire et, selon les secteurs dans lesquels le gouvernement dépensera son argent, cela aidera également l'économie sur le plan de l'offre. Il faudra aussi réduire la dette. Il faut faire ces trois utilisations de l'excédent. Comme je l'ai déjà dit, je regrette seulement que vous ne réduisiez pas davantage l'impôt sur les gains en capital.

Aucune mesure ne peut à elle seule absorber le chômage dans les diverses régions, étant donné qu'il est d'origines différentes. Je suppose que certains taux de chômage élevés sont reliés à l'agriculture et à la pêche. Je ne sais pas vraiment quels sont les autres domaines où les taux de chômage sont si élevés. Une forte croissance économique, favorisée par une réduction importante des impôts de toutes sortes est la meilleure solution que je puisse proposer du côté macro-économique pour résoudre le problème du chômage excessif. Selon moi, cela vaut mieux que l'octroi de prêts, de subventions ou d'une aide à certains segments de la population pour venir à bout du chômage localisé.

Le sénateur Graham: Vous avez parlé de «plein emploi». À quel niveau le situez-vous? Est-ce 5 p. 100, 4 p. 100, 3 p. 100? Que considériez-vous comme le plein emploi étant donné que certaines personnes sont inemployables?

M. Sinai: Je vais éluder quelque peu la question en disant que je n'ai pas étudié la situation canadienne en ce qui concerne le taux de plein emploi. Bien entendu, nous avons des chiffres détaillés pour les États-Unis, et cela depuis des années. Pour le moment, je peux seulement vous citer un chiffre de l'ordre de 4 à 5 p. 100. Si d'ici trois ou quatre ans nous connaissons un grave problème d'inflation quand on se rapprochera de ce chiffre, vous pourrez revenir me voir pour me dire que je me suis trompé. Néanmoins, je suis prêt à vous parier un dîner à votre restaurant favori ici, à Ottawa, que mes chances d'avoir raison l'emportent sur celles de me tromper. Je ne peux pas vous citer de chiffre précis quant à ce qui constitue le taux de plein emploi.

En ce qui concerne les inemployables, j'aurais deux réponses à vous donner. J'adopte un peu l'attitude du médecin. Servez-vous de toute la technologie à votre disposition pour garder le patient en vie, à moins qu'il n'ait pratiquement aucune chance de survivre, auquel cas vous laissez la vieillesse et la mort faire leur oeuvre. En ce qui concerne le chômage et l'emploi, je n'ai jamais accepté tant du point de vue politique qu'en tant que citoyen de mon pays, l'idée qu'il n'est pas possible de faire mieux. Je rejette totalement l'idée que certaines personnes sont inemployables. Je ne l'accepte pas. Nous devons chercher des moyens de parvenir à un taux de chômage plus bas en assurant la stabilité des prix. Lorsque nous voyons des gens qui semblent inemployables, nous devons nous servir de l'appareil gouvernemental, en travaillant par l'entremise du secteur privé ou directement, pour rendre ces personnes employables.

Je vais vous donner un exemple. Aux États-Unis, nous avons une administration démocrate qui a modernisé et révisé la législation sur l'aide sociale. Nous voyons maintenant travailler -- et vous le constatez quotidiennement dans presque tous les magasins de détail -- des gens qui n'avaient jamais travaillé avant. Il y a quatre ans, de nombreux citoyens de notre pays se disaient inemployables. Ils ne parlent pas la langue. Ils ne peuvent même pas faire d'additions et de soustractions. Il y a toutefois des machines avec des images et grâce auxquelles il leur suffit d'appuyer sur un bouton pour rendre la monnaie au client qui achète un hamburger chez McDonald. Ces gens prétendument inemployables sont employables. Ils touchent peut-être que le salaire minimum, mais ils gagnent de l'argent pour la première fois dans leur vie. Un grand nombre d'entre eux ne traînent plus dans les rues de Harlem ou des régions urbaines où ils se livraient à des activités criminelles. Le taux de criminalité est en diminution aux États-Unis. Et que se passe-t-il? Ces gens ne sont plus inemployables et nous avons un taux de chômage de 4 p. 100 aux États-Unis. Nous n'avons pas de problème d'inflation.

Si nous affirmons qu'il existe un taux de chômage en dessous duquel nous ne pouvons pas descendre ou qu'il y a des gens inemployables au lieu de chercher des façons d'abaisser le taux de chômage tout en maintenant la stabilité des prix et de rendre employables les gens inemployables, c'est une attitude trop défaitiste à mon goût. Je ne critique personne, mais ma façon de voir vient peut-être du fait que j'ai été témoin d'énormément de souffrances à Detroit où j'ai grandi en période de chômage élevé. Je rejette totalement cette idée. Rien n'est impossible. Rien n'est impossible à un pays qui veut atteindre un faible taux de chômage et donner du travail aux gens.

Le président: Merci, monsieur Sinai. Vous nous avez apporté un grand bol d'air frais.

Quand vous avez lu votre mémoire, vous avez omis une phrase dont j'espérais que vous nous parleriez. À la page 2, vous dites:

L'imposition des gains en capital a été peu étudiée dans le contexte du rendement macro-économique et de la compétitivité internationale.

Savez-vous s'il y a eu des études sur la question au Canada? Nous avons du mal à en trouver. Il y en a une qui a été publiée récemment et qui était raisonnable. Êtes-vous au courant des travaux réalisés au Canada sur la question?

M. Sinai: Non. Je me ferai un plaisir de me renseigner. C'est une question dont on ne parle pas beaucoup actuellement aux États-Unis car personne ne propose de le faire. Ce n'était pas pareil il y a quelques années. Il y a eu beaucoup d'études macro-économiques. Une bonne partie des études négatives ont été faites par le bureau de la Bibliothèque du Congrès ou un organisme de ce genre. Je me ferai un plaisir de vous donner la référence des études qui ont été faites aux États-Unis. Je crois que presque rien d'autre n'a été fait au Canada à part l'étude que vous avez citée. Vous devrez peut-être faire faire vous-mêmes une étude sur la question si vous voulez en apprendre davantage.

Le président: Je vous remercie infiniment au nom du comité, monsieur Sinai.

La séance est levée.


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