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Délibérations du comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles

Fascicule 12 - Témoignages


OTTAWA, le jeudi 1er juin 2000

Le comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd'hui à 9 h 05 pour examiner des questions concernant l'énergie, l'environnement et les ressources naturelles au Canada (la sécurité des réacteurs nucléaires).

Le sénateur Nicholas W. Taylor (vice-président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le vice-président: Ce matin, nous accueillons des témoins du ministère des Ressources naturelles du Canada. Vous avez la parole.

M. Ric Cameron, sous-ministre adjoint, Secteur de l'énergie, Ressources naturelles Canada: Honorables sénateurs, je vous remercie de me donner l'occasion de vous entretenir de la Loi sur la responsabilité nucléaire (LRN). Je suis accompagné par MM. Peter Brown, Dave McCauley et Jacques Hénault.

Nous suivons avec intérêt les travaux de votre comité, plus particulièrement ceux qui portent sur la sécurité des réacteurs nucléaires. Vous avez demandé à Ressources naturelles Canada de vous présenter un exposé sur la LRN. Vous vous êtes dits particulièrement intéressés à la responsabilité civile maximale que prévoit la loi et à l'état actuel de notre examen de la loi. Notre exposé abordera donc ces deux points. Cependant, permettez-moi d'abord de vous brosser un tableau de la LRN.

La Loi sur la responsabilité nucléaire est une loi fédérale promulguée en 1976 dans le but d'indemniser les victimes d'un accident nucléaire dans une installation nucléaire canadienne. Le terme «installation nucléaire» est défini dans la loi et vise les réacteurs nucléaires, comme les centrales nucléaires, les réacteurs de recherche, ainsi que les installations qui traitent les substances nucléaires.

La LRN comporte un double objectif. Premièrement, elle établit un régime général de responsabilité envers les tiers qui subiraient des blessures et des dommages en raison d'un accident nucléaire et elle établit un système d'indemnisation des victimes d'un accident nucléaire. Deuxièmement, elle offre à l'industrie du nucléaire et à ses fournisseurs un régime de responsabilité stable et prévisible.

L'une des principales dispositions de la loi est d'établir la responsabilité absolue de l'exploitant en cas de dommages nucléaires à un tiers. On entend par dommages nucléaires les blessures, y compris la mort, et les dommages, y compris la perte de biens, les dommages aux biens, et les dommages découlant de la perte et des dommages aux biens. La responsabilité absolue implique que l'exploitant est responsable des dommages nucléaires causés aux tiers sans qu'il puisse recourir aux défenses traditionnelles qu'il pourrait normalement invoquer. Une autre importante caractéristique de la loi est la responsabilité exclusive de l'exploitant. Cela signifie que ni l'exploitant ni les tiers ne peuvent poursuivre en dommages les entrepreneurs et fournisseurs.

Ces deux dispositions ont pour effet de faire porter sur l'exploitant toute la responsabilité envers les tiers. Les victimes potentielles y trouvent leur compte en ce sens qu'il est clairement établi qu'une seule partie est responsable des demandes d'indemnisation. Parallèlement, ces dispositions soustraient les fournisseurs et les entrepreneurs de l'installation aux poursuites en dommages-intérêts et leur permettent de participer à une industrie à laquelle ils n'auraient pas accès autrement s'ils devaient s'inquiéter de leur responsabilité civile dans le cas improbable d'un accident nucléaire.

La LRN prévoit également que les exploitants doivent souscrire une assurance obligatoire d'un montant bien précis, actuellement fixé à 75 millions de dollars pour les centrales nucléaires. Cette assurance est fournie par la Nuclear Insurance Association of Canada (NIAC). Pour les dommages que ne couvre pas la NIAC, par exemple les préjudices non corporels et les maladies latentes détectées après 10 ans, le gouvernement fédéral supplée à l'assurance de la NIAC au moyen de contrats de réassurance. La responsabilité de l'exploitant se limite à 75 millions de dollars et les demandes d'indemnisation doivent être présentées dans les dix ans qui suivent l'accident. En vertu de la LRN, il est sous-entendu que le gouvernement fédéral peut offrir une indemnisation supérieure à la responsabilité civile de l'exploitant, en ce sens que le Parlement peut autoriser une limite plus élevée.

La LRN prévoit également que le gouverneur en conseil peut promulguer la création d'une commission des réparations des dommages nucléaires dans les cas où les dommages découlant de l'accident vont sans doute dépasser la limite de responsabilité civile prévue dans la loi ou s'il est jugé dans l'intérêt public de le faire. La Commission des réparations instaurerait un système administratif pour traiter d'un grand nombre de dossiers d'indemnisation, système qui se substituerait au processus judiciaire. Nous croyons qu'un tel système pourrait régler de manière plus efficace et plus équitable les demandes d'indemnisation.

La LRN est administrée par la Commission de contrôle de l'énergie atomique, qui devient aujourd'hui la Commission canadienne de sûreté nucléaire. La commission est chargée de désigner des installations visées par la loi et d'établir le montant de la protection dont doivent disposer les exploitants.

Avant d'aborder l'examen de la LRN, j'ajouterai que la vaste majorité des pays où existent des installations nucléaires ont adopté des lois semblables à la nôtre. Quand je dis semblables, j'entends que les lois de la plupart des pays renferment les trois grands principes suivants: responsabilité absolue et exclusive de l'exploitant; responsabilité civile limitée; protection financière obligatoire. En outre, deux conventions internationales contiennent des dispositions semblables. Il s'agit de la Convention de Paris sur la responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire, ratifiée en 1960, et de la Convention de Vienne relative à la responsabilité civile en matière de dommages nucléaires, ratifiée en 1963. Cette convention a été révisée en 1997, et les travaux sont en cours pour mettre à jour la Convention de Paris.

J'aimerais maintenant aborder l'examen de la LRN. Les principes fondamentaux qui sous-tendent la LRN demeurent valides, mais la loi remonte à environ 25 ans. Nous sommes conscients qu'il faut la mettre à jour pour qu'elle soit au diapason des tendances internationales et qu'elle puisse répondre aux préoccupations qui ont émergé au fil des ans.

De fait, on avait admis lors de débats en comité parlementaire qui avaient précédé la promulgation de la loi en 1976 qu'il faudrait probablement la revoir. À l'époque, il avait été recommandé d'examiner la loi cinq ans après sa promulgation. C'est ainsi qu'en 1982, le président de la CCEA a chargé un groupe de travail interministériel d'examiner la loi et de formuler des recommandations quant aux modifications qu'il fallait lui apporter. Le 9 mars 1984, le groupe de travail a présenté un document de travail pour obtenir des commentaires du public sur les modifications qu'il serait possible d'apporter à la loi. En février 1990, le président de la CCEA a transmis au ministre de l'Énergie, des Mines et des Ressources un rapport renfermant les recommandations du groupe de travail sur les révisions à apporter à la Loi sur la responsabilité nucléaire. En présentant son rapport au ministre, le président de la CCEA a recommandé que le ministère poursuive l'examen de la loi et en accepte la responsabilité administrative. Le sous-ministre d'Énergie, Mines et Ressources a accepté cette recommandation.

À la même époque, la loi a été contestée. Le litige a commencé en 1987 et le ministère a pris le dossier en mains. Il portait sur la constitutionnalité de la LRN. En 1991, le litige était déjà bien engagé et avait préséance sur l'examen que le ministère faisait de la loi. Le procès s'est ouvert en 1993 et, en 1994, la Cour de l'Ontario (Division générale) a rejeté l'action avec dépens. Un appel interjeté par la suite a été retiré en 1996.

En 1995, un comité d'examen interministériel, dirigé par Ressources naturelles Canada, a établi de nouvelles propositions pour réviser la LRN. Au cours de l'été et de l'automne 1996, ces propositions ont fait l'objet de discussions avec les principaux intervenants: les centrales nucléaires, EACL, les gouvernements des provinces qui ont des centrales nucléaires (l'Ontario, le Québec et le Nouveau-Brunswick) et les assureurs d'installations nucléaires. Après ces discussions, on a peaufiné les propositions au cours des consultations interministérielles et on les a soumises à nouveau aux parties prenantes en 1999 pour leur demander encore leur avis. Nous allons remettre au ministre des recommandations de modifications à apporter à la loi et lui demander comment il entrevoit les prochaines étapes.

Nos propositions porteront sur quatre grands domaines: améliorer l'indemnisation des victimes; clarifier les principales dispositions de la loi; clarifier les responsabilités du gouvernement fédéral; et régler les problèmes techniques qui se posent dans la loi.

L'un des principaux objectifs de la révision de la loi est d'améliorer le régime d'indemnisation des victimes. Comme je vous le disais plus tôt, la loi limite la responsabilité civile des exploitants à 75 millions de dollars, montant qui n'a pas changé depuis que la loi a été promulguée en 1976. L'inflation est venue gruger la valeur de cette limite, et le Canada est le pays du G-7 dont la responsabilité civile nucléaire est la plus basse. Ainsi, l'un des grands éléments de la révision de la loi sera de relever la limite de la responsabilité pour qu'elle tienne compte de l'inflation et des tendances internationales.

Nous voulons également offrir de la souplesse aux exploitants quant aux garanties financières qu'ils doivent souscrire en matière de responsabilité nucléaire. À l'heure actuelle, ils doivent souscrire une assurance privée auprès d'un assureur approuvé. Nous avons étudié le bien-fondé de permettre aux exploitants d'avoir recours à d'autres types de protection financière pour garantir la responsabilité civile.

Nous examinons la période de prescription prévue dans la loi. À l'heure actuelle, la période de prescription des demandes d'indemnisation est de dix après l'accident nucléaire. Plusieurs pays ont rallongé la période de prescription et nous examinons en quoi ces périodes plus longues influent sur la couverture d'assurance et le règlement des sinistres.

Malgré son âge, la LRN est assez innovatrice sur le plan du règlement des sinistres, en ce sens qu'elle prévoit une démarche administrative pour le règlement des sinistres plutôt que de laisser les tribunaux trancher la question. Divers pays adoptent maintenant une démarche semblable. À l'occasion de l'examen, nous voulons clarifier et définir certains des processus de règlement des sinistres liés à la Commission des réparations des dommages nucléaires et élaborer maintenant les règles qui seraient nécessaires à son fonctionnement.

Nous étudions les définitions de la loi pour nous assurer qu'elles sont claires et non ambiguës, particulièrement dans le domaine des dommages indemnisables.

Nous examinons également les obligations qui échoient au gouvernement fédéral en vertu de la loi. Nous aimerions réduire le besoin de réassurance par le gouvernement fédéral et le préciser quand il est impératif. Il ne fait aucun doute qu'en augmentant la responsabilité civile des exploitants, on réduirait les obligations du gouvernement fédéral, mais il serait également possible d'apporter d'autres révisions qui abaisseraient le montant de réassurance que le gouvernement fédéral doit fournir aux exploitants.

Enfin, la loi présente certains problèmes techniques qu'il faudrait régler à la faveur de l'examen, notamment mettre à jour certaines dispositions. En outre il serait utile de la remanier pour qu'elle soit plus facile à comprendre et pour supprimer les ambiguïtés qu'elle contient.

Pour conclure, nous sommes conscients que la Loi sur la responsabilité nucléaire doit être révisée. Elle remonte à environ 25 ans et n'a jamais été mise à jour. Mais elle a bien résisté à l'épreuve des ans. Elle est fonctionnelle et, à certains égards, innovatrice. Néanmoins, nous procédons à sa révision et espérons soumettre des propositions au ministre avant la fin de l'été.

Le sénateur Christensen: Vous dites que la loi a bien résisté à l'épreuve des ans, toutefois l'a-t-on jamais invoquée?

M. Cameron: Il n'y a jamais eu de mise en cause concernant un accident nucléaire qui serait survenu au Canada. Quant à savoir si la loi a été invoquée, dans ce contexte, non. Toutefois, en ce qui concerne la nature des dispositions, les principaux éléments de la loi sont encore conformes à la façon dont fonctionne ce type de loi dans d'autres pays. Nous croyons que certaines des dispositions de la loi étaient avant-gardistes, et d'autres pays d'ailleurs envisagent d'aller de l'avant.

Le sénateur Christensen: Les exploitants nucléaires doivent avoir une assurance de 75 millions de dollars. Un montant plus réaliste s'établirait à combien d'après vous? Quand on pense aux genres de situations qui pourraient survenir, 75 millions de dollars ce n'est pas beaucoup d'argent.

M. Cameron: Le montant de la couverture varie passablement d'un pays à l'autre. Si l'on rajustait ce montant pour ne tenir compte que de l'inflation il se situerait aux environs de 250 millions de dollars.

Le sénateur Christensen: Dans certains cas, les limites de responsabilité correspondent à des montants de 400 à 600 millions de dollars.

M. Cameron: Selon les normes internationales, on se situe aux environs de 600 millions de dollars, quoique les régimes diffèrent selon la façon dont ils sont constitués et financés. Un montant de 600 millions de dollars ne serait pas exorbitant dans le contexte international.

Le sénateur Christensen: Est-ce un montant que nous devrions envisager?

M. Cameron: Dans les discussions avec les intéressés, il est question d'un montant de cet ordre, oui.

Le vice-président: Savez-vous quels sont les ordres de grandeur et pour quels pays? Dans quel pays fixe-t-on la limite de responsabilité la plus élevée?

M. Cameron: Nous avons quelques comparaisons sous forme de tableaux qui pourront vous éclairer.

Le sénateur Wilson: Je me réjouis, je dois dire, que vous examiniez cette question. Je pensais que l'Église était lente à prendre des décisions jusqu'à ce que j'arrive au gouvernement.

Lorsque vous avez parlé des parties prenantes, vous avez mentionné tout le monde, sauf nous, les victimes. Avez-vous songé à permettre au public de participer à la révision de la loi? Quand pensez-vous avoir au moins un document public que nous pourrons examiner? Quand pensez-vous qu'un rapport final pourra être publié?

M. Peter Brown, directeur, Division de l'uranium et des déchets radioactifs, Secteur de l'énergie, Ressources naturelles Canada: Pour ce qui est des parties prenantes, nous avons eu de nombreuses discussions avec les représentants du secteur de l'assurance, les compagnies de services publics et EACL afin de déterminer quelles sont les révisions à apporter à la loi. Nous avons discuté du montant que l'industrie de l'assurance pourrait couvrir, pour répondre à la question précédente quant à savoir si ce chiffre pourrait aller jusqu'à 600 millions de dollars.

Le sénateur Wilson: Je comprends, mais ce sont les gens qui subissent les dommages.

M. Brown: Pour le moment, nous n'en avons pas encore discuté avec le public, les ONG et les autres intéressés. C'est un des éléments que nous soumettrons au ministre une fois que nous aurons fait tout ce travail.

Le sénateur Wilson: Quand pensez-vous que vous pourrez le faire?

M. Brown: Nous comptons présenter le rapport au ministre avant la fin de cette année.

Le sénateur Wilson: L'invitation à participer aux consultations publiques va-t-elle être largement diffusée?

M. Brown: Nous allons soumettre nos recommandations au ministre. Il devra notamment décider s'il désire entamer un processus de consultations publiques ou soumettre plutôt la question au processus parlementaire.

Le sénateur Wilson: Ma question suivante fait suite à celle du sénateur Christensen. Quel devrait-être le montant de l'assurance selon vous?

M. Brown: Mon collègue, M. Cameron, a plus ou moins répondu à cette question. Pour tenir compte de l'inflation, il faudrait le porter à environ 250 millions de dollars. Pour aligner cette assurance sur celle des autres pays -- vous avez maintenant ce tableau sous les yeux --, il faudrait la porter à environ 600 ou 650 millions de dollars canadiens. Il y a deux pays qui ont une assurance responsabilité illimitée, mais cela veut dire que l'État intervient.

Le sénateur Wilson: Comme nous exportons des réacteurs nucléaires vers d'autres pays, cette loi couvre-t-elle les dommages qui pourraient se produire dans d'autres pays? Je pense à des pays comme la Chine et la Roumanie, qui ne sont pas équipés. Dans le cas des États-Unis, il pourrait s'agir de pollution transfrontière. Que se passerait-il?

M. Brown: Tous les pays à qui nous avons vendu des réacteurs nucléaires ont un régime semblable. Cette loi s'applique au Canada. Nous avons un régime de réciprocité avec les États-Unis, mais la plupart des autres pays ont leur propre régime d'assurance responsabilité. La plupart de ces régimes sont très semblables à celui-ci.

Le sénateur Christensen: Nous n'avons plus aucune responsabilité une fois que nous avons vendu et livré le réacteur?

M. Brown: Les régimes de responsabilité civile des pays à qui nous vendons nos réacteurs sont très semblables à notre Loi sur la responsabilité nucléaire. Par conséquent, ces pays ont une assurance responsabilité civile, mais elle s'applique seulement aux pays en question.

M. Cameron: Les réacteurs sont également exploités conformément aux régimes de permis et de réglementation de ces pays. Nous n'imposons pas notre réglementation aux autres pays, mais ils adhèrent tous aux diverses conventions internationales qui déterminent le mode de fonctionnement de ces réacteurs.

Le sénateur Wilson: Discutez-vous avec eux? Je pense à la Roumanie qui n'est vraiment pas bien équipée pour ce genre de choses. Le Canada aide-t-il ce pays à s'occuper de ces questions et dans quelle mesure apportez-vous votre aide? Vous contentez-vous de vous laver les mains une fois le marché conclu?

M. Dave McCauley, conseiller, Division de l'uranium et des déchets radioactifs, Secteur de l'énergie, Ressources naturelles Canada: La législation roumaine est fidèle à la convention de Vienne, dont s'inspire la Loi sur la responsabilité nucléaire du Canada. Le régime d'assurance roumain est semblable au régime canadien.

Le sénateur Wilson: Ont-ils de l'argent au cas où quelque chose arrive?

M. McCauley: Oui, ils sont assurés. Les assureurs européens assurent le réacteur nucléaire.

Le vice-président: Avec le progrès, ou l'absence de progrès, il y aura de plus en plus de pays du tiers monde qui envisageront les réacteurs nucléaires comme source d'énergie. Jusqu'ici, ils n'avaient pas d'argent. La liste de sites de réacteur que vous nous avez montrée correspond presque à une liste des pays riches du monde. Les pays du tiers monde n'auront pas d'assurance ni rien d'autre. Envisage-t-on un système qui permettrait d'offrir de l'assurance par notre intermédiaire lorsque les pays du tiers monde achètent nos réacteurs nucléaires?

M. McCauley: Il y a deux conventions internationales: la convention de Vienne dans le cadre de l'Agence internationale de l'énergie atomique et la convention de Paris dans le cadre de l'OCDE. Celle de Paris s'applique aux pays de l'Europe occidentale alors que celle de Vienne est plus mondiale. Beaucoup de pays d'Europe de l'Est tels que la Roumanie participent à la convention de Vienne. Pour y participer, le signataire doit accepter un minimum de responsabilité. Cela permet d'établir un genre de régime commun international.

Le vice-président: Vendrait-on un réacteur nucléaire à quelqu'un qui n'est pas membre de la convention de Vienne?

M. McCauley: Nous avons vendu des réacteurs à des pays qui ne sont pas membres de cette convention. La Chine et la Corée, par exemple, ne sont signataires ni de la convention de Vienne, ni de la convention de Paris.

Il faudrait que vous demandiez à Énergie atomique du Canada Ltée mais, si je comprends bien sa politique, elle exige que l'acheteur, ou le pays achetant le réacteur, accepte les obligations en matière de responsabilité internationale.

M. Brown: J'ajouterais aussi que nous ne sommes membre ni de la convention de Vienne, ni de la convention de Paris.

Le sénateur Banks: Nous ne sommes pas signataires de ces conventions internationales. Toutefois, en réponse au sénateur Wilson, vous avez dit que nous avons une entente réciproque avec les États-Unis. Quelle est la nature de cette entente? Je n'ai pas bien compris la réponse à la question du sénateur Wilson. À supposer, Dieu nous en garde, que nous ayons un incident nucléaire et que l'on puisse prouver des dommages au Michigan et en Ohio. Quel est le risque pour nous? Est-il limité?

M. McCauley: C'est limité par notre loi et les victimes américaines pourraient présenter une demande d'indemnisation au Canada, du fait de cette entente de réciprocité.

Le sénateur Banks: Est-ce que notre responsabilité, en cas de demande d'indemnisation présentée par une partie lésée aux États-Unis, est limitée au montant prévu dans notre loi ou au montant en vigueur aux États-Unis?

M. McCauley: Au nôtre. Dans notre loi, le plafond est de 75 millions de dollars à moins que le Parlement ne fournisse des fonds supplémentaires.

M. Brown: Et vice-versa.

Le sénateur Banks: Je ne veux pas entrer dans les détails ésotériques du droit international, mais cela me semble bizarre.

Je remarque d'autre part que d'après ce tableau, comme vous l'avez signalé, nous sommes vraiment en retard. J'aimerais que vous nous précisiez ce que sont ces deux autres niveaux de responsabilité.

Je note que la révision a commencé en 1982 et que nous en sommes à dire que nous soumettrons peut-être cela aux ministres d'ici à la fin de l'année. Je suis nouveau et il y a des tas de choses qui me semblent ahurissantes. C'en est une.

Le sénateur Christensen a posé cette question mais, encore, je n'ai pas très bien compris la réponse. Y a-t-il déjà eu des demandes d'indemnisation dans le cadre de la Loi sur la responsabilité nucléaire?

M. Cameron: Non.

Le sénateur Banks: On peut donc, en conclure qu'il n'y a jamais eu de dommages dont on a pu prouver qu'ils avaient été causés par des activités nucléaires au Canada.

M. Cameron: Et cette loi prévoit des demandes d'indemnité pour dommages à des tiers hors site. Il n'y a pas eu de cas semblable au Canada.

Le sénateur Banks: Il n'y a pas eu de cas de poursuite contre un tiers, je puis le comprendre, parce qu'ils sont protégés par la loi. Y a-t-il eu des demandes d'indemnisation dans le cadre de la loi? Y a-t-il eu un assureur qui ait payé une somme à quiconque pour des dommages au Canada causés par une activité nucléaire?

M. Brown: Non, pas sous le régime de la loi.

Le sénateur Banks: L'a-t-on vu sous un régime?

M. McCauley: Il existe de l'assurance contre les dommages matériels dus au nucléaire, pour la protection courante des biens, et, bien sûr, les exploitants d'installations nucléaires sont assurés auprès des assureurs nucléaires, mais il ne s'agit pas de la Loi sur la responsabilité nucléaire. Il s'agit essentiellement de l'assurance des biens -- la protection courante des biens.

Le sénateur Banks: Cela n'a rien à voir avec un incident nucléaire.

M. McCauley: Non, en effet.

Le sénateur Kelleher: Je suis à la page 1 des notes de M. Cameron. Au dernier grand paragraphe de cette page, je lis: «Une autre importante caractéristique de la loi est la responsabilité exclusive de l'exploitant. Cela signifie que ni l'exploitation ni les tiers ne peuvent poursuivre en dommages les entrepreneurs et fournisseurs.» J'ai un peu de mal à comprendre. Je ne vois pas pourquoi, si les entrepreneurs ou fournisseurs sont ceux qui sont responsables des dommages, en particulier dans les cas de faute lourde, l'exploitant -- c'est-à-dire nous -- ne pourrait avoir droit de les poursuivre. C'est du moins la façon dont j'interprète ce que j'ai là. Cela, très franchement, ne me semble pas très normal. Peut-être pourriez-vous expliquer.

M. Cameron: Je demanderais à M. Brown d'entrer un peu dans les détails, mais il s'agit des tiers qui ne peuvent poursuivre en dommages.

Le sénateur Kelleher: Je comprends bien mais, habituellement, en cas de poursuite, vous le savez certainement, l'exploitant, dans des circonstances normales, intenterait une action récursoire. Je ne vois pas pourquoi nous -- l'État, les propriétaires, les contribuables -- ne pourrions pas poursuivre ces entrepreneurs ou fournisseurs s'ils ont provoqué ces dommages.

M. Brown: Ontario Power Generation, l'Hydro-Québec et la Société d'Énergie du Nouveau-Brunswick sont les exploitants des réacteurs. Ils seraient responsables aux termes de cette disposition sur la responsabilité exclusive. Si l'on pouvait montrer qu'il y a intention criminelle de la part du fournisseur, ils pourraient poursuivre ce fournisseur. S'il n'y a pas d'intention criminelle, ils ne pourraient pas le faire. En gros, l'intention générale qui a présidé à l'adoption de la Loi sur la responsabilité nucléaire est que l'exploitant soit exclusivement responsable, de sorte que des indemnités puissent être payées à des tiers. Aussi, les victimes n'ont pas à aller devant les tribunaux comme, par exemple, dans le cas de l'usine chimique de Bhopal en Inde. Les victimes ont dû avoir recours aux tribunaux et il a fallu huit ou dix ans avant que les gens ne soient effectivement indemnisés. L'intention est que l'on sache que c'est l'exploitant qui est responsable et que l'on peut ainsi poursuivre.

Le sénateur Kelleher: Je vous dirais, en toute déférence, que cela ne répond pas à ma question. Je ne parle pas de demandes d'indemnité présentées par des tiers. Je conviens en effet qu'entre exploitant et victimes, il faut prévoir une responsabilité absolue. Ce n'est pas ce que je conteste. Toutefois, je demande pourquoi nous empêchons l'exploitant d'intenter une action contre les fournisseurs ou entrepreneurs en cas de faute lourde.

Je ne parle pas d'intention criminelle, car c'est poser un obstacle impossible. Je ne pense pas qu'un fournisseur ou un sous-traitant puisse avoir l'intention criminelle de provoquer des blessures ou dommages. Je ne vois pas pourquoi nous devrions protéger ces gens contre un recours de l'exploitant qui a dû payer des tas de dommages et intérêts aux victimes. Je ne comprends pas pourquoi, s'il n'est absolument pas responsable, par exemple, il ne pourrait pas intenter une action contre les entrepreneurs et fournisseurs. J'aimerais que vous me l'expliquiez.

M. Jacques Hénault, analyste, responsabilité nucléaire et planification d'urgence, Division de l'uranium et des déchets radioactifs, Secteur de l'énergie, Ressources naturelles Canada: Un des facteurs est que dans le cas d'un incident nucléaire, il serait très difficile de prouver qui a été coupable de faute lourde. Cela pourrait mener à une embrouille judiciaire qui traînerait pendant des années au détriment des victimes.

Le sénateur Kelleher: Attendez un instant, s'il vous plaît. Vous n'avez pas compris. Je n'essaie pas du tout d'empêcher que l'on indemnise les victimes et peu m'importe que ce soit ou non difficile à prouver parce que c'est aux tribunaux et aux avocats de l'exploitant de le faire. Je ne comprends pas pourquoi je ne puis obtenir de réponse.

M. Cameron: Je crois, sénateur, que cela porte en grande partie sur la structure de l'industrie. C'est aussi la question du débat que nous avons sur la plafond de 75 millions de dollars que certains voudraient voir beaucoup plus élevé. Beaucoup d'entrepreneurs et de sous-traitants dans ce secteur n'ont pas de grosses affaires; pour eux, ce n'est pas l'essentiel de leur activité. Si on venait à les obliger à s'assurer ou s'ils étaient exposés à une responsabilité éventuelle de cette ampleur, on peut se demander en fait s'ils accepteraient le contrat ou la sous-traitance. Je crois que c'est pour cela que cela a été structuré de cette façon pour commencer et que c'est la raison pour laquelle c'est devenu en quelque sorte un modèle international. Il s'agit essentiellement de la nature de la chose et des réalités du risque. Dans ce genre de secteur, quelle est la relation avec l'entrepreneur, et ces entreprises accepteraient-elles d'entrer dans ce scénario?

Le sénateur Kelleher: Je vous suggérerais d'examiner cela et j'espère que vous le ferez parce que j'ai bien parlé de «faute lourde». J'ai bien choisi mes mots. Il y a beaucoup de gros entrepreneurs.

Je ne considère pas que General Electric, par exemple, soit une société pauvre et sans ressources. Je vous accorde que la situation est différente s'il s'agit d'un petit plombier qui vient faire des travaux mineurs, mais la plupart des entrepreneurs dans ce secteur sont d'énormes conglomérats internationaux. J'ai donc un peu de mal à accepter cet article.

M. Brown: Lorsque la loi a été instituée, elle avait deux objets fondamentaux qui s'équilibraient. L'un était la possibilité d'exploiter l'énergie nucléaire. La loi prévoyait cette responsabilité exclusive pour que tous ces fournisseurs, petits et grands, se sentent à l'aise lorsqu'ils fournissaient ces éléments à l'exploitant nucléaire. D'autre part, la loi prévoyait essentiellement des dommages et intérêts pour les tiers et éliminait la nécessité d'action en justice. Elle réalisait cet équilibre entre les deux éléments et offrait un bon régime d'indemnisation aux victimes d'accidents éventuels. Elle permettait néanmoins la construction de réacteurs nucléaires. Il est évident que c'est toujours l'exploitant qui a cette responsabilité.

Le sénateur Kelleher: Je ne conteste pas cela. Ce qui me préoccupe ici, indépendamment des victimes, qui doivent être considérées en premier lieu, ce sont les pauvres contribuables car ce sont en fait eux qui sont propriétaires. Je ne vois pas pourquoi nous, contribuables, devrions exclure une action en justice contre General Electric si cette société s'est rendue coupable de faute lourde.

M. Cameron: Vous avez raison, sénateur. Nous parlons là de la responsabilité civile. Il y a aussi des dispositions qui prévoient qu'un entrepreneur peut faire l'objet de poursuites pour d'autres raisons. Il y a d'autres aspects du droit commercial et certaines situations dans lesquelles il peut exister des remèdes à l'extérieur du contexte de la Loi sur la responsabilité nucléaire. Toutefois, il s'agit là spécifiquement des demandes d'indemnité présentées par des tiers à la suite d'un accident nucléaire.

Le sénateur Kelleher: Je n'insisterai pas plus là-dessus.

Par ailleurs, monsieur le président, je voudrais m'associer aux commentaires des sénateurs Wilson et Banks. Je ne serai pas aussi diplomate qu'eux. Très franchement, je ne suis pas du tout impressionné par la vitesse à laquelle votre ministère avance. C'est très joli de dire que vous y viendrez mais cela fait 25 ans. J'estime que c'est horrible. Vraiment. Je répète que les autres ont été un peu trop diplomates pour mon goût. J'estime que c'est terrible. Vous avez dit dans vos observations liminaires que vous «espériez» présenter des propositions au ministre -- c'est un engagement très faible.

Le sénateur Wilson: M. Brown a bien dit «d'ici la fin de l'année». Nous lui en tiendrons rigueur.

Le sénateur Kelleher: Et ensuite. Qui sait combien de temps il faudra. Monsieur le président, j'aimerais qu'il soit consigné au procès-verbal que lorsque le temps viendra de formuler nos recommandations, le comité présentera des propositions et des recommandations très claires pour apporter des modifications à ce sujet. Je trouve horrible que rien n'a été fait.

Le vice-président: Évidemment, c'est la raison pour laquelle nous sommes ici. Je peux peut-être mentionner, en ma qualité de géologue et d'ingénieur, comme certains de nos témoins, que nous calculons en millions d'années. Peut-être ont-ils confondu la politique et la géologie.

Le sénateur Buchanan: Ce que dit le sénateur Kelleher est intéressant. Supposons qu'il y ait un accident au Nouveau-Brunswick. Aux termes de la loi, la poursuite de la part d'un tiers sera lancée contre la Société d'Énergie du Nouveau-Brunswick. En vertu des mécanismes prévus ici, la Société d'Énergie du Nouveau-Brunswick et ses assureurs doivent payer les dommages aux tiers. Toutefois, la Société d'Énergie du Nouveau-Brunswick n'est pas du tout reconnue coupable de faute lourde. C'est l'entrepreneur qui est fautif. Par conséquent, vous dites que la Société d'Énergie du Nouveau-Brunswick versera l'indemnité, mais qu'à cause des dispositions de cette loi, elle ne pourra pas intenter une action récursoire contre l'entrepreneur. Est-ce bien cela?

Le sénateur Kelleher: Oui.

Le sénateur Buchanan: Manifestement, cette loi doit avoir préséance sur une loi provinciale. Comment peut-il en être ainsi dans les cas où l'exploitant a le droit d'intenter des poursuites de la part d'un tiers contre l'entrepreneur pour faute lourde ayant lésé un tiers?

M. McCauley: Le pouvoir découle du pouvoir du gouvernement fédéral de légiférer dans le domaine nucléaire.

Le sénateur Buchanan: D'où le gouvernement fédéral tire-t-il cette compétence?

M. McCauley: La Loi constitutionnelle prévoit essentiellement que les activités à l'avantage général du Canada sont réputées être du ressort du gouvernement fédéral. La Loi sur le contrôle de l'énergie atomique, maintenant la Loi sur la sûreté et la réglementation nucléaires...

Le sénateur Buchanan: Permettez-moi de poursuivre. De quelle Loi constitutionnelle parlez-vous, celle de 1867 ou celle de 1982?

M. McCauley: Je parlais de la loi de 1982.

Le sénateur Kelleher: Sénateur Buchanan, vous êtes de cette époque.

Le sénateur Buchanan: Oui, je devrais m'en souvenir, mais ce n'est pas le cas.

Le vice-président: Vous avez hypothéqué la ferme, sénateur Buchanan.

Le sénateur Kelleher: Vous avez hypothéqué les pêches.

M. Cameron: Sénateur, il y a eu contestation devant les tribunaux comme je l'ai mentionné précédemment. On a contesté la compétence constitutionnelle ainsi que toute une gamme de questions rattachées à la Charte. La cour a jugé que la loi était valable.

Pour revenir à ce que vous disiez, encore une fois, l'entreprise de service public n'aurait pas le droit d'intenter des poursuites à l'entrepreneur pour récupérer les indemnités versées à un tiers. Toutefois, si ses installations avaient été endommagées ou si elle avait perdu de revenus, s'il fallait fermer les installations, il y aurait alors des recours.

Le sénateur Buchanan: Est-ce essentiellement la même chose qu'aux États-Unis?

M. McCauley: Les principes fondamentaux -- la responsabilité absolue, la responsabilité exclusive et la responsabilité limitée -- sont essentiellement les mêmes. Aux États-Unis, les recours sont différents, mais à toutes fins utiles, ils sont essentiellement les mêmes. Les principes juridiques sont les mêmes.

Le sénateur Banks: Je veux être certain d'avoir bien compris la réponse. J'aimerais des précisions. Monsieur Cameron, vous venez de dire que l'exploitant ne pourrait pas intenter de poursuites à un fournisseur pour faute grave afin de recouvrer les 75 millions de dollars, mais pourrait intenter des poursuites dans le cas d'autres dommages démontrables. Est-ce exact?

M. Cameron: Oui, la LRN porte sur les dommages causés aux tiers.

Le sénateur Banks: Vous dites également que le fournisseur est protégé afin de l'encourager à participer à cette industrie. Nous craignions à une certaine époque que si nous ne donnions pas cette protection, il ne participerait pas à l'industrie.

Je suis un peu perdu. Si je fournis le béton par exemple pour construire un hôtel, l'entrepreneur exigera que je souscrive à une assurance avant de même commencer à discuter du prix avec moi. Si je n'ai pas d'assurance, il ne me parlera même pas. C'est la même chose pour les fournisseurs d'acier de construction. Si je suis le fournisseur d'acier de construction ou de béton de construction ou de toute autre matière qui sert à la fabrication d'une centrale nucléaire, je cours le même genre de risques, même si ce n'est pas pour un montant équivalent dans l'éventualité où je commets une faute lourde. L'exploitant de l'hôtel ou l'entrepreneur ou quelqu'un d'autre peut intenter des poursuites contre moi. D'ailleurs ils vont s'assurer qu'ils peuvent le faire avant de faire affaire avec moi.

Dans la même veine que la question du sénateur Kelleher, pouvez-vous me dire quels entrepreneurs pensions-nous, ou pensons-nous maintenant, ne seraient pas intéressés à participer, comme fournisseurs, à la construction ou à l'exploitation d'une centrale nucléaire à cause du risque de responsabilité? Y a-t-il toujours des gens comme ça?

M. McCauley: Je suppose qu'il s'agit de façon générale des fournisseurs de l'industrie nucléaire. Je ne peux pas vous donner de nom précis, mais c'est une chose que l'on voit dans toutes les régions du monde. L'entière responsabilité est celle de l'exploitant et exclut les fournisseurs et les entrepreneurs.

Le sénateur Banks: C'est une bien bonne affaire.

Le vice-président: L'entrepreneur ne peut pas faire l'objet de poursuites par un tiers pour dommages-intérêts, mais il peut faire l'objet de poursuites par l'exploitant si le travail est de mauvaise qualité. Ce n'est peut-être pas aussi grave qu'on pourrait le croire à première vue.

Le sénateur Banks: On ne récupérerait pas les 75 millions de dollars.

Le sénateur Kelleher: Les dommages importants ici découlent des recours de tiers, des demandes d'indemnisation des victimes.

Le vice-président: J'essaie de bien comprendre cette question des dommages causés aux tiers. Si je comprends bien, un tiers ne peut pas poursuivre le sous-traitant. S'il y a poursuite de moins de 75 millions de dollars et que la somme est versée, l'exploitant nucléaire peut alors intenter des poursuites au sous-traitant pour un travail mal fait.

Le sénateur Banks: Sans toutefois recouvrer les 75 millions de dollars.

Le vice-président: Je pensais que c'était deux choses différentes, le recours de tiers contre et la poursuite le sous-traitant. Voulez-vous dire que l'exploitant ne peut jamais intenter de poursuites contre le sous-traitant?

M. Cameron: L'exploitant peut intenter des poursuites contre le sous-traitant pour dommages et pour perte de revenus si par exemple on doit arrêter les réacteurs, mais il ne peut intenter de poursuite pour dommages causés à un tiers dont il est exclusivement responsable.

Le vice-président: Voilà justement ce à quoi je voulais en venir. L'exploitant peut intenter des poursuites pour du travail mal fait, mais uniquement sur le projet et non pour des dommages à un tiers.

Le sénateur Buchanan: L'exemple que vous donnez se trouve dans le mémoire. Il s'agit du litige qui portait sur la constitutionnalité de la LRN. J'aimerais lire ce dossier.

M. McCauley: Il s'agit de l'affaire Energy Probe, Ville de Toronto et Dr Rosalie Bertel c. le procureur général du Canada. La décision a été rendue en 1994.

Le sénateur Buchanan: L'affaire a-t-elle été portée en appel à la Cour suprême du Canada?

M. McCauley: Il s'agissait de la Cour de l'Ontario, division générale. Un appel a par la suite été retiré en 1996.

Le sénateur Buchanan: La Cour suprême du Canada ne s'est donc pas prononcée dans cette affaire.

M. McCauley: Non, en effet.

Le sénateur Adams: Monsieur Cameron, combien y a-t-il de mines d'uranium actuellement au Canada?

M. Cameron: Les seules mines d'uranium se trouvent actuellement en Saskatchewan. Quelques-unes viennent tout juste de commencer la production.

M. Brown: Autrefois, nous avions de nombreuses mines d'uranium au Canada. Au début des années 50 et 60, il y avait des mines à Elliot Lake ainsi qu'à Bancroft. On a fermé celles de Bancroft dans les années 60 et la dernière mine à Elliot Lake a fermé ses portes en 1996. Les seules mines en production en ce moment se trouvent dans le nord de la Saskatchewan. Il y a également des mines plus anciennes dans les Territoires des Nord-Ouest qui ont fermé leurs portes il y a de nombreuses années.

Le sénateur Adams: Ce chiffre concernant la responsabilité était de 75 millions de dollars. Est-ce que cela comprend les mineurs ou simplement les exploitants? Comment cela fonctionne-t-il?

M. Brown: La Loi sur la responsabilité nucléaire ne s'applique pas à ces mines d'uranium.

Le sénateur Adams: Il y a environ 50 à 100 personnes qui travaillent dans une mine. S'agit-il de simples mineurs ou continuent-ils à travailler pour l'industrie nucléaire. S'agit-il de simples mineurs qui n'ont rien à voir avec la responsabilité nucléaire? La situation est légèrement différente dans les cas de mines d'or ou de diamant, mais en ce qui concerne l'avenir -- y a-t-il des facteurs susceptibles de toucher d'autres personnes ou les mineurs? Comment fonctionne le régime d'assurance des sociétés d'exploitation minière?

M. Brown: Je tiens à dire que les sociétés d'exploitation minière qui font l'extraction minière de l'uranium s'occupent extrêmement bien de leurs employés et ont des exigences très strictes en matière de radioprotection, c'est-à-dire en ce qui concerne la quantité de radiation que reçoivent les mineurs et ainsi de suite. Les mécanismes de contrôle sont très sévères, beaucoup plus que ceux qui existent dans une mine normale. En fait, les conditions sont nettement meilleures que celles qui existent dans une mine normale. On s'occupe extrêmement bien des travailleurs. Et le régime d'assurance est le même que celui qui existe dans une société d'exploitation minière normale.

Le sénateur Adams: Avez-vous des problèmes avec les mineurs qui sont là depuis de nombreuses années? Étant donné que certaines de ces mines ont été fermées depuis 1950 et que la politique gouvernementale n'a été adoptée que depuis 25 ans, que se passe-t-il dans le cas de ces personnes qui ont été touchées il y a 50 ans et qui sont peut-être en train de mourir à cause de leur travail dans les mines?

M. Brown: Sénateur, je pense que l'on peut dire que toute l'industrie nucléaire et la prospective en matière de radioprotection constituent une science de ce siècle. Des progrès très importants ont été réalisés. Au tout début, il ne s'agissait pas uniquement d'extraction minière de l'uranium mais aussi de l'extraction de fluorite et d'autres genres d'extraction minière. Le problème c'était surtout le radon présent dans l'atmosphère, inhalé par les mineurs. Il ne s'agit pas d'un problème propre aux mines d'uranium, il est présent dans de nombreuses mines. On a trouvé une solution simple, la ventilation.

Depuis les 20 à 50 dernières années, la science a fait d'incroyables progrès. Aujourd'hui les conditions qui existent dans les mines d'uranium modernes sont extrêmement bonnes, l'air y est très pur et on s'occupe très bien des travailleurs.

Vous voudrez peut-être vous rendre dans le nord de la Saskatchewan pour visiter les nouvelles mines en exploitation là-bas. Je crois que vous serez très impressionnés par la qualité de l'exploitation minière. Les mines sombres et humides sont une chose du passé. Il s'agit d'installations très modernes.

Le sénateur Adams: Le ministre de l'Énergie, des Mines et des Ressources est-il responsable de l'exploitation minière et ainsi de suite dans les régions du Nord, surtout dans les territoires et au Nunavut?

M. Cameron: Au nord du 60e parallèle, le ministre des Affaires indiennes et du Nord est responsable entre autres du pétrole, de l'exploitation minière et ainsi de suite. Notre ministre n'a pas de pouvoir au nord du 60e parallèle.

Le sénateur Christensen: Certains de nos témoins ont indiqué que la Loi sur la responsabilité nucléaire compromet en fait la sécurité parce qu'elle limite la responsabilité des exploitants à 75 millions de dollars. Avez-vous des commentaires à faire à ce sujet?

M. Cameron: Nous ne croyons pas que le régime d'assurance est ou devrait être le principal facteur qui détermine la sécurité de l'industrie. Nous avons un régime réglementaire très solide. Nous croyons aussi que les exploitants nucléaires sont pleinement conscients de leurs responsabilités. Il y a des aspects qui vont au-delà de la responsabilité. La plupart de ces installations sont administrées comme des entreprises, et si vous voulez rester en affaires, surtout dans un secteur d'activité lié au nucléaire, il existe des normes strictes en matière de santé et de sécurité qui doivent être maintenues, car vous faites l'objet d'une surveillance permanente de la part d'une instance de réglementation très vigilante.

Comme je l'ai dit, je ne crois pas qu'un régime d'assurance différent influerait d'une façon ou d'une autre sur la sécurité. Je pense qu'un régime d'assurance différent permet dans certains cas de transférer plus facilement la responsabilité des gouvernements aux exploitants. Nous sommes en train de parler des différences entre une responsabilité de 75 millions de dollars et certains autres chiffres. La loi renferme une disposition selon laquelle le Parlement peut déterminer qu'il faut faire appel aux contribuables canadiens pour combler ce manque si un incident malheureux l'exige.

Je ne crois pas que le niveau d'assurance soit un facteur important qui influe sur la sécurité des activités. Je pense que la sécurité doit continuer de relever de l'instance de réglementation, grâce à un régime de réglementation rigoureux et fidèlement observé, et grâce à une industrie qui est formée, vigilante, réceptive et qui tient vraiment à poursuivre ses activités. Ce qui la motive, c'est de poursuivre ses activités et surtout maintenant d'exercer une concurrence sur un marché de l'électricité de plus en plus ouvert et concurrentiel. J'ai moi aussi entendu cet argument, sénateur, mais quant à moi, je ne crois pas que le régime d'assurance soit un facteur important au niveau de la sécurité.

Le vice-président: Je pense que j'ai demandé à la Nuclear Insurance Association si des primes sont réservées pour constituer un fonds, et on me dit que non. On vous en a fait la demande, mais vous absorbez les primes, donc nous n'avons pas, comme cela se ferait dans l'industrie normale de l'assurance, un fonds constitué de primes accumulées de manière à atteindre un niveau adéquat. Les assureurs attendent de savoir si vous pouvez réserver un fonds distinct pour leurs primes. Quelle est votre réponse?

M. McCauley: Nous n'avons pas reçu de demande en ce sens de la part des assureurs. Nous sommes en train de discuter avec eux de différents régimes financiers et de la façon dont on pourrait fournir de l'assurance, mais ils ne nous ont pas fait de requête de ce genre, à savoir qu'ils aimeraient qu'une telle disposition soit prévue dans le régime de responsabilité nucléaire. S'ils nous en faisaient la demande, nous l'examinerions.

Le vice-président: J'ai peut-être mal compris, parce que je suis celui qui a posé la question lors d'une séance précédente. J'ai cru les avoir entendus dire qu'ils étaient en train de présenter une demande de ce genre. Nous vérifierons nos chiffres et nos témoignages à ce sujet.

Le sénateur Banks: Je vous renvoie à ce tableau que vous avez distribué. Comme je l'ai déjà dit, je pense que nous devrions en être gênés. Pourriez-vous parler un peu des montants du volet 2 et du volet 3 indiqués ici en ce qui concerne les autres pays. Pourriez-vous faire le lien avec notre discussion actuelle? Par exemple, je pars du principe que la partie en vert de ce tableau représente les engagements pris par le gouvernement pour suppléer à la responsabilité générale. Dans la plupart de ces cas, existe-t-il aussi des plafonds prévus par la loi? Veuillez décrire en quoi consiste ce troisième volet de fonds commun. Avez-vous envisagé l'un ou l'autre de ces deuxièmes volets comme partie du régime d'assurance canadien?

M. McCauley: Oui sénateur, je pense que vous avez compris essentiellement l'objectif du deuxième volet. Ces pays sont signataires de la convention de Paris et à la convention supplémentaire de Bruxelles. Il s'agit pour la plupart de pays d'Europe de l'Ouest ayant accepté l'indemnisation réciproque dans l'éventualité d'un accident nucléaire dans l'un de ces États. Le volet en rouge est le montant de l'assurance privée qui est obligatoire dans chacun de ces pays. Essentiellement, ils indiqueraient qu'un montant non inférieur à tant d'assurance privée ou d'autres garanties financières semblables seraient exigées de l'exploitant. Ils limiteraient la responsabilité nationale à l'égard de victimes d'un pays tiers à un montant légèrement plus élevé. Cet écart entre l'assurance de l'exploitant ou la garantie financière de l'exploitant et la limite nationale équivaudrait au montant qui serait assuré par le gouvernement fédéral.

Le troisième volet découle de leur adhésion à la convention supplémentaire de Bruxelles, qui obligerait tous les États parties à la convention de mettre des fonds en commun afin de fournir une indemnisation supplémentaire aux victimes. Leur taxe ou le montant qu'ils seraient tenus de fournir seraient basés sur leur capacité nucléaire ainsi que sur leur PIB. C'est essentiellement la façon dont le système fonctionne.

Nous avons bien sûr envisagé un volet fédéral qui pourrait inclure des fonds publics supplémentaires jusqu'à concurrence d'une certaine limite. Comme M. Cameron l'a mentionné, en vertu de la loi actuelle, le Parlement peut envisager de fournir des fonds supplémentaires si ce montant de 75 millions de dollars devient périmé.

Pour ce qui est d'adhérer à un fonds commun international, à cause de notre emplacement géographique, nous serions moins portés à adhérer à une convention telle que la convention supplémentaire de Bruxelles avec des pays de l'Europe de l'Ouest. Ce sera la prochaine étape que nous examinerons lorsque nous procéderons à l'examen de la loi.

Le sénateur Banks: Revenons à un événement hypothétique que j'ai décrit à propos d'un accident nucléaire au Canada qui causerait d'importants dégâts aux États-Unis, disons, parce que c'est l'endroit le plus logique. Je suis tout à fait sûr que cette question a été étudiée. Est-il absolument vrai qu'une tierce partie lésée aux États-Unis, qui intente des poursuites pour dommages démontrables, qui dans ce genre de cas pourraient être énormes, serait liée par nos limites internes prévues par la loi canadienne? Aurait-elle recours au droit international et pourrait-elle obtenir des dommages-intérêts supplémentaires?

Nous sommes signataires d'un certain nombre de conventions internationales. Nous avons un rôle à jouer sur la scène internationale. C'est très bien pour un pays de dire que peu importe ce que nous faisons, nous avons une loi qui nous protège et notre responsabilité est limitée à 3,75 $, peu importe où les poursuites sont intentées et peu importe le montant réclamé. Pouvons-nous vraiment nous fier sur cette limite de responsabilité?

M. Brown: Selon le système actuel, si les dommages dépassent 75 millions de dollars, on s'attend à ce que le gouvernement fédéral intervienne.

M. McCauley: Il s'agit de déterminer si la victime américaine serait satisfaite de l'indemnisation accordée par les tribunaux canadiens. Il faudrait en juger au moment voulu.

Le sénateur Kelleher: Il existe un certain nombre de lois en vigueur au Canada, comme vous le savez sans doute. La Loi sur l'exécution réciproque des jugements autorise les Américains à faire exécuter leurs jugements au Canada. Il faudrait examiner ces lois, mais il existe certains textes de loi qui permettent ce genre de chose.

Le vice-président: Je tiens à remercier nos témoins. Notre comité poursuit ses travaux, mais nous allons parler du tabac qui est sans doute à l'heure actuelle une menace plus grave pour la population que la question nucléaire. Merci encore.

Le comité de direction a besoin de certaines indications, bien que je ne croie pas que le sénateur Kenny pense que nous ayons besoin d'indication. Pour vous situer le contexte, le président a écrit aux présidents-directeurs généraux de Rothmans, Benson and Hedges, de RJR-Macdonald et de Imperial Tobacco. Je vais demander au sénateur Kenny de nous donner plus de détails.

Le sénateur Kenny: Nous avons des audiences qui commencent mardi prochain sur le projet de loi S-20, le projet de loi sur le tabac. Le comité a adopté une motion qui réserve déjà du temps pour l'audition des témoins. Nous avons une liste de témoins qui ont accepté de comparaître.

Les seuls témoins qui n'ont pas accepté de comparaître sont les présidents des trois principales compagnies de tabac, ce qui préoccupe le comité de direction. M. Bob Bexon est le président- directeur général de Imperial Tobacco. J'ai trois lettres adressées à M. Bexon ici. M. John Barnett est président-directeur général de Rothmans, de Benson & Hedges, et M. Michel Poirier est le président-directeur général de RJR-Macdonald Corp. Tous les trois ont refusé de comparaître devant le comité.

Le comité a délégué au comité de direction le pouvoir de choisir des témoins. Le comité de direction, en votre nom, s'est réuni le 16 mai 2000 et s'est entendu sur une liste de témoins. Le 17 mai 2000, le greffier a envoyé des lettres invitant les témoins à comparaître. Les réponses que nous avons reçues des présidents ont été vagues, c'est le moins qu'on puisse dire. Je vais peut-être laisser notre greffier vous décrire le genre de réponses qu'il a reçues de ces individus.

Auparavant, j'aimerais toutefois attirer l'attention du comité sur la gravité de la situation. Le comité a reçu un ordre de renvoi du Sénat pour étudier cette question. Le comité a le pouvoir et le privilège inhérents d'une Chambre du Parlement de s'assurer que les témoins qu'il souhaite entendre comparaissent devant lui. Le pouvoir de convoquer des témoins est prévu dans ce cas par l'article 90 du Règlement du Sénat du Canada.

Le processus est le suivant: le comité demande au greffier d'inviter les témoins voulus pour lui permettre d'étudier l'ordre de renvoi qui lui a été donné par le Sénat. Si un témoin refuse de comparaître ou ne répond pas à l'invitation qui lui est faite de comparaître, la chose raisonnable à faire serait, avant de le citer à comparaître devant le comité, de l'inviter de nouveau à comparaître. L'invitation devrait cependant préciser qu'il est possible à un comité parlementaire de citer des témoins à comparaître. Si le témoin refuse toujours de coopérer avec le comité, il faudrait que l'un des membres du comité dépose un certificat expliquant l'importance de ce témoignage. Le comité adopterait ensuite une motion citant le témoin à comparaître, après quoi le témoin recevra une sommation lui indiquant l'heure, la date et l'endroit où il doit comparaître.

Si le témoin accepte ensuite de comparaître, le problème est réglé. Il aura été officiellement invité à comparaître. S'il ne comparaît pas et ne se conforme pas à la sommation qui lui a été signifiée, le comité, par l'intermédiaire de la présidence, fera rapport de sa conduite à la Chambre. Il appartiendra ensuite à la Chambre de régler le problème. Celle-ci pourrait prendre diverses mesures. Je vous explique simplement que le comité a le pouvoir d'émettre une sommation pour forcer ces témoins à comparaître.

Permettez-moi de vous expliquer pourquoi le témoignage de ces hauts dirigeants des compagnies de tabac est nécessaire. Par le passé, ils se sont toujours faits représenter par un porte-parole, M. Rob Parker. Les hauts dirigeants de ces compagnies ne sont donc pas venus eux-mêmes répondre aux questions des parlementaires. M. Parker est un lobbyiste bien connu à Ottawa. Il a représenté d'autres compagnies avant les compagnies de tabac dont il est maintenant le porte-parole depuis un certain temps. À ma connaissance, aucun dirigeant d'une compagnie de tabac n'a comparu devant un comité sénatorial ni devant un comité parlementaire au cours des 10 dernières années. Il semblerait que ce soit un élément de la stratégie qu'ils ont décidé d'adopter pour éviter de devoir aborder certaines questions importantes.

Voici un article que certains d'entre vous ont peut-être déjà vu et qui a paru dans le Globe and Mail cette semaine. Il y est question du fait que Purdy Crawford d'Imasco cible les jeunes fumeurs. D'Imasco a depuis lors changé de propriétaires. M. Crawford n'est plus le président de cette compagnie.

Le sénateur Buchanan: Il n'a jamais fumé de sa vie.

Le sénateur Kenny: À mon avis, le comité est en droit d'entendre ceux qui dirigent ces entreprises. M. Parker nous a déjà dit, et je suppose que nous devons le croire, que ces compagnies ne s'intéressent pas aux jeunes. Le projet de loi ne porte que sur les jeunes. M. Parker a laissé savoir au comité qu'il serait prêt à comparaître devant lui. Les présidents des compagnies de tabac demandent que nous leur donnions plus de temps pour se préparer. Il en a toujours été ainsi. Leurs dirigeants estiment avoir remporté la partie s'ils obtiennent un report. Plus ils peuvent reporter le moment où ils auront à répondre à nos questions, plus ils sont heureux. Je ne comprends pas pourquoi les présidents de ces compagnies ne souhaiteraient pas venir dissiper tout malentendu au sujet de leurs entreprises, en particulier lorsque des articles comme celui que j'ai cité paraissent dans le Globe and Mail. Je ne comprends pas pourquoi ils ne viendraient pas remettre les pendules à l'heure, le cas échéant.

Le sénateur Adams: Quand cet article a-t-il paru?

Le sénateur Kenny: Le lundi 29 mai 2000 dans le Globe and Mail. Si la présidence n'y voit pas d'inconvénient, je distribuerai volontiers cet article aux membres du comité.

Le président: Nous devons insister sur le délai que nous leur avons donné. La première lettre leur a été envoyée le 17 mai 2000. Je conviens avec vous que les dirigeants des compagnies de tabac ont adopté comme stratégie d'essayer de gagner du temps, mais le 17 mai 2000, c'était il n'y a pas très longtemps.

Le sénateur Kenny: En toute justice, cependant, c'est à ce moment-là que tous les témoins ont reçu la première lettre.

Le président: Quand ont-ils envoyé une réponse?

Le sénateur Kenny: Nous n'avons pas encore reçu de réponse écrite. Le greffier leur a envoyé une deuxième lettre le 26 mai 2000.

Le président: Neuf jours plus tard.

Le sénateur Kenny: Après cela, le sénateur Spivak, notre présidente, leur a envoyé une lettre dont voici la teneur:

Les 17 et 26 mai 2000, le comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles vous a envoyé une lettre vous invitant à témoigner le 8 juin 2000, à 10 heures, dans le cadre du projet de loi S-20, Loi visant à donner à l'industrie canadienne du tabac le moyen de réaliser son objectif de prévention de la consommation des produits du tabac chez les jeunes au Canada.

Toutefois, le comité n'a toujours pas reçu de réponse concernant votre comparution.

À titre d'information, je vous envoie copie d'un article sur les pouvoirs des comités parlementaires rédigé par l'ancien avocat général de la Chambre des communes, paru dans le numéro du printemps de 1995 de la Revue parlementaire canadienne.

Je vous demanderais de bien vouloir aviser le greffier du comité de vos intentions avant le mercredi 31 mai 2000, à 17 heures.

C'était hier soir. Avec votre permission, monsieur le vice-président, je demanderais peut-être au greffier de nous décrire la nature des échanges qu'il a eus avec les fabricants de tabac.

M. Michel Patrice, greffier du comité: Hier, j'ai reçu deux appels téléphoniques de M. Parker, du Conseil canadien des fabricants des produits du tabac. Il m'a dit que ses collègues et lui-même étudiaient la question et essayaient de se mettre en rapport avec les différents PDG. Il a ajouté qu'il me tiendrait au courant. Il m'a appelé la première fois à 11 h 30. M. Parker pensait qu'il serait en mesure de me rappeler avant 17 heures. Cela dit, j'ai reçu un deuxième appel téléphonique le même jour m'informant qu'il n'a pas réussi à communiquer avec l'un des PDG et qu'il me rappellerait jeudi. Je ne sais toujours pas s'ils ont l'intention de témoigner ou non.

Le sénateur Kenny: Avez-vous communiqué avec les responsables des compagnies?

M. Patrice: J'ai communiqué directement avec les compagnies en question. Le 23 mai 2000, j'ai appelé différents PDG pour m'assurer qu'ils avaient bien reçu la lettre et qu'ils avaient compris la demande du comité. J'ai même parlé à deux d'entre eux directement. Ils m'ont affirmé qu'ils étudieraient la question et qu'ils se mettraient en rapport avec leur association avant de me rappeler. De plus, j'ai parlé à l'adjointe d'un troisième PDG qui m'a assuré qu'elle ferait le message à son patron et qu'elle me tiendrait au courant.

Le sénateur Kenny: Quel jour était-ce, s'il vous plaît?

M. Patrice: C'était le 23 mai. Il y a plus de deux semaines.

Le sénateur Kenny: C'était il y a deux semaines. Or leurs porte-parole semblent dire qu'ils n'ont pas eu le temps d'arrêter une position.

Le vice-président: Ils m'ont appelé hier soir, étant donné qu'ils ne pouvaient joindre la présidente. M. Parker a demandé à avoir plus de temps, car les trois PDG voulaient avoir le temps de discuter ensemble, mais l'un d'entre eux était encore à l'étranger. Ils pensaient que celui-ci serait de retour le lendemain, mais compte tenu de cette nouvelle lettre, qui leur rappellera un peu les pouvoirs du comité, ils ont demandé à avoir un peu plus de temps, peut-être un jour ou deux de plus avant de nous répondre. Ils voulaient également consulter leurs conseillers juridiques à ce sujet. Voilà donc ce qui s'est passé.

Le sénateur Kenny: Voilà qui nous renseigne certes. Je voudrais vous signaler qu'une assignation ne serait pas nécessaire s'ils comparaissent. En effet, s'ils viennent témoigner, ce sera la fin de tout cet épisode. Ils auront fait leur devoir et il n'y aura pas de conséquences. Par contre, l'assignation ne pose problème que s'il faut consulter un conseiller juridique pour ne pas comparaître devant le comité ou si l'on a l'intention de contester la convocation. À mon avis, nous sommes allés au-delà de l'exigence des deux lettres. En effet, nous leur avons envoyé trois lettres et nous leur avons parlé au téléphone. Je ne comprends pas pourquoi les responsables des trois compagnies éprouvent le besoin de discuter entre eux. Nous ne leur avons pas demandé de faire un seul témoignage. En fait, nous avons demandé à chacun des responsables de représenter sa propre société. Je trouve le simple fait qu'ils veuillent discuter entre eux un peu curieux.

J'ai préparé la documentation nécessaire en vue de la proposition d'une motion. Si cette motion est adoptée, cela voudrait simplement dire qu'on remettrait une assignation aux témoins. S'ils décident de comparaître, tant mieux et ce sera la fin de cet épisode. En revanche, s'ils refusent de témoigner, ce sera à l'ensemble du Sénat de trancher la question.

Le vice-président: C'est ce qui me dérange un peu, c'est-à-dire avoir à faire intervenir tout le Sénat. Envisageons un plan B. Selon le plan A, il n'y a pas de problème; ils comparaissent et tout s'arrête là. Selon le plan B, toutefois, ils décident de ne pas témoigner et de contester l'assignation. Il faudra alors que l'on s'en remette à l'ensemble du Sénat. Sommes-nous certains d'avoir suffisamment de preuves pour convaincre la Chambre du Sénat d'appuyer notre assignation? Je crois que cela sera capital. La seule autre possibilité serait de leur accorder quelques jours de plus. Ainsi, ils verraient que nous nous sommes mis en quatre pour leur donner toutes les chances possibles, avant de leur remettre une assignation.

Le sénateur Kenny: Il faudra non seulement que nous soyons justes envers eux, mais nous devons aussi montrer que nous le sommes. Cela étant dit, nous avons discuté de la question au sein du comité de direction et nous avons non seulement demandé au greffier d'envoyer les deux lettres requises, mais aussi de leur faire parvenir une troisième lettre; nous leur avons même rappelé les dispositions de la loi à cet égard. En outre, nous avons demandé au greffier de les appeler personnellement et d'attirer leur attention sur la question. Pour ce qui est de convaincre la Chambre du Sénat de l'importance de la chose, c'est une autre paire de manches.

La première chose que la Chambre du Sénat voudrait savoir, c'est la raison pour laquelle un témoin refuserait de comparaître pour discuter d'une question dont elle a saisi l'un de ses comités. La Chambre a voté à l'unanimité le renvoi de cette question à notre comité. La Chambre nous a investis de cette responsabilité.

D'autre part, un quotidien qui se veut le quotidien national canadien par excellence laisse entendre que les fabricants de tabac ciblent les jeunes consommateurs. Parallèlement à cela, nous sommes saisis d'un projet de loi qui se rapporte à des déclarations faites par les représentants de ces fabricants de tabac concernant les jeunes. Or, ce projet de loi porte justement sur les jeunes. Évidemment, la question qui me vient spontanément à l'esprit est la suivante: ces déclarations reflètent-elles les véritables intentions des fabricants de tabac? Sans entendre la réponse de la bouche des responsables de ces sociétés, on ne pourra en avoir le coeur net.

Le simple fait qu'ils ne soient pas disposés à venir nous voir pour répondre à nos questions devrait être une raison suffisante pour la Chambre du Sénat. De plus, il ne faut pas perdre de vue tout ce que les médias rapportent régulièrement au sujet du comportement de ces fabricants. En effet, ceux-ci obstruent systématiquement la recherche de la vérité, retardent la divulgation d'informations et cherchent à cacher les faits. On apprend maintenant qu'ils veulent se réunir avant de comparaître devant nous. Ils nous ont même informés qu'ils veulent discuter ensemble pour trouver une réponse commune avant même que nous n'ayons eu le temps de leur poser des questions individuellement. Quelqu'un d'autre a-t-il des doutes à ce sujet?

Le sénateur Buchanan: Comme c'est souvent le cas, je n'aurai pas grand-chose à dire à ce sujet, mais qu'en est-il des précédents?

Le sénateur Kenny: Il y a de nombreux précédents. Le greffier pourrait peut-être nous les citer.

M. Patrice: Il y a un précédent qui remonte à 1995. Le comité spécial sur les accords de l'aéroport Pearson avait remis une assignation à deux avocats du ministère de la Justice.

Le sénateur Buchanan: Leur avait-on remis des assignations?

M. Patrice: Oui, et ils y ont fait droit. En 1999, le comité de l'agriculture a convoqué un témoin, qui a accédé à la convocation. Avant cela, il faudrait remonter au début du XXe siècle.

Le sénateur Buchanan: Il y a trois précédents au cours des huit ou neuf dernières années?

M. Patrice: Oui, il y en a eu trois. D'après mes recherches, la seule fois où un témoin a refusé de faire droit à une assignation remonte à 1891.

Le sénateur Buchanan: Durant les 24 ans que j'ai passés à l'Assemblée législative de la Nouvelle-Écosse, je ne me rappelle pas d'une fois où un comité a remis une assignation à un témoin qui n'y a pas fait droit immédiatement. En fait, je ne me rappelle pas qu'on ait eu à remettre d'assignations.

Le sénateur Kenny: C'est parce que c'est une telle absurdité. Normalement les gens disent: «Si vous voulez nous entendre, nous sommes prêts à venir, naturellement».

Le sénateur Buchanan: Si les trois nous répondent: «Oui, nous sommes prêts à comparaître ensemble»?

Le sénateur Kenny: C'est ce que nous demandons.

Le sénateur Buchanan: Je croyais que vous disiez que nous voulions les faire comparaître individuellement.

Le sénateur Kenny: Nous voulons qu'ils viennent individuellement, mais ils siégeront l'un après l'autre.

Le sénateur Adams: Je ne suis pas membre du comité de direction, mais je suis ici en tant que membre du comité. Je crois que nous avons une règle concernant le comité de direction.

Le vice-président: Oui.

Le sénateur Adams: La présidente du comité a été présentée et doit mentionner l'ordre de référence du sujet de l'étude. Quelle était la motion?

Le sénateur Kenny: Quel était l'ordre de renvoi?

M. Patrice: C'était qu'après la deuxième lecture, le projet de loi S-20 soit renvoyé à notre comité.

Le sénateur Adams: Donc, cet ordre de renvoi venait du président à la Chambre.

M. Patrice: Non, pour ce qui est de convoquer des témoins, le président n'a pas besoin de s'adresser à la Chambre, simplement au comité.

M. Patrice: Le Règlement du Sénat permet à un comité d'émettre une citation à comparaître.

Le sénateur Adams: Sénateur Kenny, ce qui vous intéresse, ce sont uniquement ces trois témoins?

Le sénateur Kenny: Il y a trois témoins en tout. Toutes les personnes que nous voulions entendre ont accepté de venir.

M. Patrice: Une lettre analogue à celle qui vous a été distribuée, et reprenant essentiellement le même texte, a été adressée aux deux autres PDG.

Le sénateur Finnerty: Je trouve leur arrogance incroyable. Nous devrions leur envoyer une citation à comparaître. Je pense que le public s'attend à ce que nous le fassions. Je veux en finir avec mes lettres. Il faut régler cette question. Le public le veut. J'habite à côté d'une école secondaire et je vois cela à chaque fois que je suis chez moi. Il faut aller de l'avant le plus rapidement possible là-dessus.

Le sénateur Wilson: Je suis d'accord. Pourrions-nous le faire cet après-midi? Sinon, ce sera mardi.

Le sénateur Kenny: Si nous présentons la motion maintenant, la lettre partira aujourd'hui. Nous allons devoir attendre la date de convocation, le 8 juin 2000, pour voir s'ils comparaissent ou non.

Le sénateur Wilson: Plus nous agirons vite, mieux cela vaudra.

Le sénateur Christensen: Je conviens qu'il faut agir vite, mais je crains que nous n'ayons aucun document écrit prouvant ce que nous avons fait jusqu'à présent. J'imagine que nous envoyons ces lettres en recommandé de façon à avoir des traces et des documents.

Le vice-président: Le greffier peut-il nous expliquer ce qu'il a fait?

M. Patrice: Les lettres ont été envoyées par fax, et j'ai les confirmations. Quand j'ai fait mes premiers appels téléphoniques de suivi, je me suis assuré qu'ils avaient bien reçu la première lettre. Ils ont accusé réception de cette lettre. J'ai fait un deuxième appel de suivi pour connaître leurs intentions avant de leur envoyer une deuxième lettre à tous les trois. Ils ont toujours accusé réception des lettres, soit par l'intermédiaire de leurs bureaux, soit par celui de Rob Parker qui était mon contact. À partir d'un certain point, je n'ai plus eu aucun contact avec les PDG, et c'est Rob Parker qui répondait en leur nom.

Le sénateur Christensen: Ce qui me dérange, c'est que nous n'ayons pas de preuve écrite. Nous n'avons que des appels téléphoniques.

Le sénateur Kenny: Nous avons des preuves écrites puisque quand un fax est réceptionné, on reçoit un document indiquant que le fax a bien été reçu.

M. Patrice: Nous avons la confirmation de la réception de chacune de ces lettres.

Le vice-président: Je préférerais ne pas envoyer de lettre avant lundi. Est-ce que ce serait trop tard, lundi?

Le sénateur Kenny: À mon avis oui, puisqu'ils sont censés comparaître jeudi prochain.

Le sénateur Banks: Nous envoyons une lettre ou une citation à comparaître?

Le sénateur Kenny: Nous allons leur envoyer une citation à comparaître.

Le sénateur Buchanan: Est-ce que cela ne doit pas être approuvé par le Sénat?

Le sénateur Kenny: Non, l'affaire est renvoyée au Sénat seulement s'ils ne s'exécutent pas, s'ils refusent de se présenter.

Le sénateur Buchanan: Vous n'allez pas envoyer cette citation à comparaître aujourd'hui?

Le sénateur Kenny: Si, nous pourrions.

Le sénateur Buchanan: Je croyais que la procédure prévoyait que le Sénat...

Le sénateur Kenny: Non, le Sénat n'intervient que s'ils refusent de comparaître.

Le vice-président: Je sais que le comité en a le pouvoir et que nous ne faisons rien de mal, mais je suis préoccupé. Cette affaire va avoir du retentissement. Ne devrions-nous pas consulter les leaders des deux côtés?

Le sénateur Kenny: Je vais répondre à cela. L'attitude traditionnelle de l'industrie du tabac a consisté à accumuler les obstacles en allant s'adresser aux dirigeants pour essayer de les amener à nous détourner de nos recherches. Je suis sûr que nos leaders ne se laisseront pas abuser par les manoeuvres des compagnies de tabac. Toutefois, ces compagnies sont fortement suspectées d'avoir de l'influence auprès de personnes haut placées. Nous sommes un comité dûment constitué, et j'ai l'impression que la majorité du comité est en faveur de cette initiative. J'aimerais le vérifier si nous le pouvons, monsieur le président. Le sénateur Finnerty a dit qu'elle était prête à présenter une motion.

Le vice-président: J'hésite un peu à m'aventurer sur cette pente sans m'assurer d'avoir l'appui de mon parti. Le sénateur Wilson a vérifié avec son parti et elle n'a pas de problème.

Le sénateur Wilson: Oui, mon parti est tout à fait d'accord.

Le vice-président: Je sais que vous vous occupez de cette question depuis longtemps et que vous avez eu de multiples frustrations. Vous êtes un peu comme le vautour perché sur un arbre qui en a assez d'attendre que sa proie agonise et qui veut lui sauter dessus pour l'achever.

Le sénateur Kenny: Je suis outré par cette remarque. Je la trouve scandaleuse et je vous demande de la retirer.

Le vice-président: Je dis simplement que vous êtes pressé.

Le sénateur Kenny: Votre allusion au vautour est parfaitement inacceptable. Depuis le début, je m'évertue à dire qu'il faut non seulement faire les choses correctement, mais qu'il faut aussi qu'on ait l'impression qu'elles sont faites correctement. Nous devrions écrire deux lettres, nous en avons écrit trois. Nous avons eu de nombreux entretiens téléphoniques avec ces personnages. Ils prétendent qu'ils ne peuvent toujours pas contacter l'un des membres du groupe pour savoir ce qu'ils vont faire.

Je pense qu'il est important de faire les choses correctement. Je crois que notre greffier a rédigé un texte à ce sujet. À ma connaissance, c'est lui l'expert sur la façon dont le Sénat doit procéder en l'occurrence. Il nous a présenté la procédure à suivre et nous l'avons suivi à la lettre. Nous sommes allés plus loin que ce qui était exigé. Si nous ne l'avions pas fait, si nous ne faisions les choses qu'à moitié, je serais inquiet.

Le sénateur Buchanan: Sénateur Finnerty, vous proposez cette motion?

Le sénateur Finnerty: Je suis prête à la proposer.

Le sénateur Buchanan: Je n'ai pas d'objection à l'appuyer à une réserve près. Il faudrait que ce soit sous réserve d'en discuter avec John Lynch-Staunton et éventuellement deux autres personnes pour m'assurer que j'ai leur appui. Je pense que c'est le cas.

Le vice-président: Quand nous réunissons-nous de nouveau?

Le sénateur Kenny: Nous siégeons de nouveau le mardi 6 juin 2000. En cas de refus, vous allez donner l'impression qu'ils ont le sénateur Lynch-Staunton dans leur poche.

Le sénateur Buchanan: C'est vrai.

Le sénateur Kenny: Je ne suis pas sûr de vouloir le placer dans une telle situation. C'est pour cela que j'ai demandé que cette réunion soit ouverte et non pas secrète. Elle est télévisée. Vous dites qu'il y aurait une réunion privée où l'on décidera si ces personnes vont être convoquées ou non?

Le sénateur Buchanan: C'est impossible.

Le vice-président: C'est un argument, effectivement.

Le sénateur Banks: J'ai deux questions. Premièrement, sommes-nous sûrs de vouloir faire comparaître ces trois PDG ensemble? C'est ma première question. Je me demande si c'est vraiment ce qu'il y a de plus judicieux. Je m'en remets à l'opinion du sénateur Kenny à ce sujet. À vous de voir.

Deuxièmement, et indépendamment de la première question, l'argument du président est valable. Ces personnages sont les PDG de grosses organisations et, bien que je ne croie pas un seul instant qu'il soit impossible de contacter l'un d'entre eux, je me demande si nous ne pourrions pas -- à moins que vous pensez qu'il y a eu une objection -- pour donner l'impression que nous agissons de façon parfaitement équitable, ce qui est notre préoccupation, émettre immédiatement une citation à comparaître le mardi 13 juin 2000 afin de formuler clairement l'exigence, si c'est le bon terme, de comparution devant notre comité et deuxièmement de leur laisser suffisamment de temps, comme ils l'ont apparemment demandé. Je pose la question au sénateur Kenny.

Le sénateur Kenny: Merci, sénateur Banks. Si nous voulons les faire comparaître en groupe, c'est parce que le comité a prévu un certain temps pour les interroger. Nous regroupons d'autres groupes de personnes qui ont des intérêts analogues. Nous leur donnons une deuxième possibilité d'intervenir lorsque c'est leur association qui comparaît. Si nous modifions la séquence de nos audiences, nous allons devoir reporter la comparution d'autres témoins qui ont déjà accepté.

Le sénateur Banks: Bon. Quelle serait la date?

Le sénateur Kenny: Les seules dates disponibles, étant donné que nous approchons de la fin de la session, sont le mardi soir et le jeudi matin. Nous avons prévu un jeudi matin pour ces témoins et deux autres groupes. Le jeudi prévu est le jeudi en huit.

N'oublions pas qu'ils ont été informés pour la première fois de cette invitation par écrit le 17 mai, et ensuite par un appel téléphonique de suivi. Du 17 mai à maintenant, ils ont largement eu le temps de savoir s'ils voulaient venir ou non.

Le vice-président: Même si nous leur envoyons une citation à comparaître, il n'est pas impossible qu'ils demandent à ce que la date soit reportée. Cela ne les empêche pas de demander à comparaître à une date qui leur convient mieux. Je pense que nous avons suffisamment discuté de cette question.

Le sénateur Finnerty: J'aimerais savoir si le sénateur Spivak est au courant de l'éventualité de cette démarche.

Le vice-président: Oui.

Le sénateur Finnerty: Je propose:

Que Bob Bexon, Michel Poirier et John Barnett soient sommés de comparaître devant le comité permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles le jeudi 8 juin 2000 à 10 heures à la salle 505 de l'édifice Victoria, 140, rue Wellington, Ottawa, et que le vice-président soit autorisé à prendre les dispositions nécessaires pour leur transmettre cette citation à comparaître.

Le sénateur Kenny: La motion n'a pas besoin d'être appuyée.

Le vice-président: Êtes-vous tous d'accord, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Le vice-président: La motion est adoptée.

La séance est levée.


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