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Délibérations du comité sénatorial permanent
des affaires étrangères

Fascicule 7 - Témoignages


OTTAWA, le mercredi 3 mai 2000

Le comité sénatorial permanent des affaires étrangères, auquel a été renvoyé le projet de loi S-18, Loi modifiant la Loi sur la défense nationale (non-déploiement de personnes de moins de 18 ans sur des théâtres d'hostilités), se réunit aujourd'hui, à 15 h 35, pour en étudier la teneur.

Le sénateur Peter A. Stollery (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Aujourd'hui, nous allons étudier le projet de loi S-18, Loi modifiant la Loi sur la défense nationale. Nos premiers témoins sont des représentants du ministère de la Défense nationale.

[Français]

Mme Louise Bellefeuille-Prégent, directrice, Politique sur le contrôle des armements et de la prolifération: Monsieur le président, c'est avec plaisir que je prends la parole devant vous cet après-midi pour vous parler de la proposition du gouvernement de modifier les dispositions de la Loi sur la défense nationale, ayant trait au déploiement des membres des forces canadiennes âgés de moins de dix-huit ans.

J'espère que notre l'équipe saura répondre à toutes vos interrogations concernant le projet de loi S-18 sur la Loi de la défense nationale. Comme vous le savez déjà, le gouvernement ne propose pas d'apporter de grands changements à la loi.

[Traduction]

En réalité, le projet d'amendement ne consiste qu'à modifier un seul article dans chaque langue officielle, et il ne ferait qu'officialiser, par voie législative, la pratique courante dans les Forces canadiennes qui est de ne pas déployer dans des théâtres d'hostilités des militaires ayant moins de 18 ans.

Pour mieux comprendre les motivations du gouvernement, il faut voir la modification proposée comme faisant partie des grands objectifs du Canada, des objectifs que nous cherchons à atteindre, de concert avec d'autres pays, décidés, comme nous, à résoudre le problème, véritable fléau, que posent les enfants soldats et les enfants touchés par la guerre.

[Français]

En 1996, un rapport de l'Organisation des Nations Unies a étalé au grand jour l'effet dévastateur que les conflits modernes ont sur les enfants. Il a souligné qu'au cours des dix années antérieures, les conflits armés ont causé la mort de près de deux millions d'enfants, handicapé plus de quatre millions d'enfants, rendu un million d'enfants orphelins, causé à plus de six millions d'enfants des cicatrices psychologiques dues aux traumatismes causés par la violence faite à leurs familles.

L'ONU estime qu'environ 300 000 enfants sont présentement impliqués dans des conflits armés un peu partout dans le monde. Certains d'entre eux n'ont que sept ans. Ces enfants servent dans les armées régulières et les guérillas en tant que combattants, cuisiniers, porteurs, esclaves sexuels, poseurs de mines ou espions.

[Traduction]

L'ONU cherche depuis plus d'une décennie à régler le problème des enfants soldats et des enfants touchés par la guerre. En 1989, l'ONU a adopté la Convention relative aux droits de l'enfant. À l'époque, il n'a été possible de parvenir à un consensus que sur l'âge minimal de 15 ans pour le recrutement, volontaire ou obligatoire, et la participation directe à des hostilités.

En 1994, la Commission des droits de l'homme des Nations Unies a mis sur pied un groupe de travail pour élaborer un protocole facultatif s'ajoutant à la convention qui relèverait l'âge minimal de recrutement et de participation à des hostilités. Au mois de janvier dernier, après six ans de travaux, on est parvenu à un consensus sur le texte du protocole. Les États signataires du protocole facultatif s'engagent à porter à 18 ans l'âge minimal du recrutement obligatoire, à porter à au moins 15 ans l'âge minimal du recrutement volontaire et à prendre toutes les mesures possibles pour faire en sorte que les membres de leurs forces armées ayant moins de 18 ans ne participent pas directement à des hostilités.

Le protocole facultatif devrait être adopté par l'Assemblée générale des Nations Unies cet été. Nous espérons que lorsqu'il sera adopté, les pays membres commenceront à le ratifier avant la fin de l'année.

Les politiques et les pratiques des Forces canadiennes sont tout à fait conformes aux dispositions du protocole facultatif. Le Canada ne pratique pas le recrutement obligatoire. Chez nous, l'âge minimal pour le recrutement volontaire est de 16 ans, et les militaires canadiens qui n'ont pas 18 ans ne sont pas autorités à servir dans des théâtres où il y a des hostilités ou des risques d'hostilités.

Les Forces canadiennes recrutent des jeunes de 16 et de 17 ans, environ 1 000 par année. Ces jeunes s'enrôlent dans les Forces canadiennes sur une base strictement volontaire. Nous exigeons à la fois une preuve d'âge fiable et le consentement des parents. La majorité des militaires servent dans la réserve, bien qu'il y en ait quelques-uns dans la force régulière, inscrits pour la plupart au Collège militaire royal de Kingston. L'enrôlement à 16 ou 17 ans permet aux Forces canadiennes d'attirer des candidats de haut calibre dès qu'ils obtiennent leur diplôme d'études secondaires. Cela est particulièrement vrai dans le cas du Québec, où les élèves terminent leurs études secondaires plus tôt que les autres Canadiens. En ce qui nous concernent, nous sommes en mesure d'offrir à ces jeunes Canadiens des possibilités d'emploi intéressantes, ainsi qu'une éducation et une formation.

[Français]

Le fait de servir dans la Réserve permet à certains de nos jeunes militaires de financer leurs études postsecondaires. Par ailleurs, nos cours de leadership les exposent aux principes de l'éthique et de la responsabilité. D'autres programmes d'instruction leur permettent d'acquérir des compétences utiles dans divers domaines, notamment la lutte contre les incendies, les rudiments du secourisme et la mécanique. Je tiens cependant à vous rappeler que ces militaires ne peuvent pas être déployés dans des théâtres où il y a effectivement des hostilités ou des risques d'hostilité.

La modification à la Loi sur la défense nationale proposée par le gouvernement renforcerait cette politique en lui donnant force de loi. En modifiant la Loi sur la défense nationale, le Canada témoignerait clairement de son engagement à respecter le protocole facultatif.

Je terminerai en rappelant que la modification à la Loi sur la défense nationale n'est qu'une étape dans l'atteinte de l'objectif premier du Canada qui est de promouvoir la protection des enfants touchés par la guerre.

Comme l'a rappelé le représentant spécial du secrétaire général de l'ONU, M. Olara Otonu lors de sa visite au Canada le mois dernier, il reste beaucoup à faire pour aider les enfants sur le terrain.

[Traduction]

Le Canada a l'intention d'examiner, au cours des prochains mois, de quelles autres façons la communauté internationale peut venir en aide aux enfants touchés par la guerre.

Le sénateur Andreychuk: Le projet de loi est très court et très facile à comprendre. Vous avez expliqué la politique. C'est plutôt l'administration actuelle qui m'inquiète. Vous avez parlé d'hostilités imminentes ou réelles. Envoyons-nous effectivement des militaires de moins de 18 ans servir d'une façon ou d'une autre à l'étranger? Si nous le faisons, comment déterminons-nous qu'il y a un théâtre d'hostilités? Comme nous le savons, il y des situations de paix qui n'en sont plus le lendemain. Aujourd'hui, les facteurs de risque ne sont pas connus comme ils l'étaient dans les guerres traditionnelles d'avant. Comment gérez-vous cela?

Le capitaine Stephen King, conseiller spécial, sous-chef d'état-major de la Défense, ministère de la Défense nationale: C'est le chef d'état-major de la Défense qui va décider et déclarer s'il s'agit d'un théâtre hostile ou non. Il prend sa décision en fonction des renseignements fournis et en consultation avec nos alliés. Nous ne déployons personne dans des théâtres d'hostilités de ce genre.

Le sénateur Andreychuk: Envoyez-vous des militaires de 16 ou 17 ans à l'étranger?

Capt King: Dans la marine, à bord des navires qui s'éloignent souvent de la limite de 12 milles, on verra parfois des officiers ou de jeunes marins en formation pendant l'été.

Le sénateur Andreychuk: Est-ce la formation de l'OTAN?

Capt King: Non, une formation d'été, ce genre de choses.

Le sénateur Andreychuk: S'il y avait une crise civile et qu'on faisait appel à l'armée, les militaires de 16 et 17 ans seraient-ils déployés dans les situations de ce genre?

Capt King: Parlez-vous de l'aide aux pouvoirs civils que nous apporterions, par exemple, dans des situations comme la crise d'Oka ou en prison?

Le sénateur Andreychuk: Oui.

Capt King: Ce n'est pas prévu dans l'amendement en question, mais le chef d'état-major de la Défense a dit clairement qu'il ne veut pas envoyer d'enfants prendre part à ces opérations.

Le sénateur Andreychuk: Avons-nous déjà déployé des militaires de 16 et 17 ans dans des prisons ou des situations comme celle d'Oka?

Capt King: Je ne peux pas vous l'affirmer à 100 pour cent, mais probablement pas.

Le sénateur Andreychuk: Il n'y a pas de politique bien définie à ce sujet?

Capt King: Il n'est pas possible de fouiller dans les anciens dossiers pour vérifier si on l'a fait. Ce n'est probablement pas le cas. Les jeunes de 16 ou 17 ans que nous recrutons n'ont généralement pas terminé leur formation de base, leur formation linguistique et leur formation militaire avant l'âge de 18 ans. Il est rare de voir, dans les unités d'opérations terrestres, navales ou aériennes des jeunes qui n'ont pas 18 ans bien sonnés. La formation de base prend un certain temps.

Le sénateur Andreychuk: Évidemment, le protocole ne s'adresse pas au Canada, mais à beaucoup d'autres pays, et nous donnons l'exemple. Du moins, j'espère que c'est ce que nous faisons. Il y a des discussions sur le sujet et, dans des documents que j'ai reçus, on indique que nous donnerions probablement un meilleur exemple si nous ne recrutions pas de jeunes de 16 et 17 ans. Je comprends les avantages de la formation et de la participation de jeunes recrues, mais avez-vous pensé que nous rendrions un meilleur service à la communauté internationale si nous ne recrutions personne de moins de 18 ans pour faire quoi que ce soit?

Mme Bellefeuille-Prégent: On examine la question depuis un certain temps. Le Canada a fait beaucoup d'efforts pour proposer le protocole facultatif de protection des enfants le plus rigoureux que pourraient accepter la plupart des pays. Les résultats sont ceux que j'ai signalés. Nous avons constaté que nos politiques et nos pratiques y étaient tout à fait conformes. Nous essayons de veiller à ce qu'aucun jeune de 16 ou 17 ans ne soit déployé dans un théâtre d'hostilités. C'est la mesure que le projet de loi propose, même si elle fait déjà l'objet d'une politique. Nous avons pris en considération le fait que nous offrons aux jeunes de 16 et 17 ans une formation de qualité et des possibilités intéressantes, et que nous devons faire concurrence à d'autres employeurs au moment où ces jeunes terminent leurs études secondaires. Nous voulons leur offrir tout de suite des perspectives de carrière et non deux ans plus tard. Toutes ces questions sont importantes.

De plus, les réservistes ont besoin du salaire qu'ils touchent dans les Forces canadiennes pour payer leurs études postsecondaires. Ce sont de bons emplois à temps partiel pour eux.

Pour ce qui est des négociations sur le protocole facultatif, M. Snyder pourrait peut-être vous répondre.

M. Ross Snyder, directeur adjoint, Direction de la consolidation de la paix et de la sécurité des personnes, Direction générale des enjeux humains et mondiaux, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international: Durant la dernière ronde de négociations sur le protocole facultatif qui a lieu en janvier, ceux qui avaient pris part à une bonne partie des discussions ont conclu qu'il était à la fois réaliste et souhaitable, dans le contexte actuel, de tout mettre en oeuvre pour que les jeunes de moins de 18 ans ne soient pas déployés dans des théâtres d'opérations. Au début des négociations, on a voulu fixer l'âge minimal à 18 ans pour tout, mais il n'y a pas eu de consensus à ce sujet. On s'est plutôt entendu pour déployer des militaires de plus de 18 ans et prévoir des mesures pour assurer que les jeunes de moins de 18 ans sont recrutés de façon purement volontaire et qu'ils ne participent pas à des opérations. Les pratiques des Forces armées canadiennes sont déjà conformes à ces règles. Ce qu'on veut, c'est tenir les jeunes de moins de 18 ans loin du danger.

[Français]

Le sénateur Corbin: Est-ce qu'un jeune homme ou une jeune femme de dix-huit ans a la maturité émotionnelle nécessaire pour être envoyé dans un conflit? En d'autres mots, vous n'envoyez pas n'importe qui de dix-huit ans et plus. J'ai un problème avec cela, d'après mon expérience une jeune femme de dix-huit ans est probablement plus mûre qu'un jeune homme de dix-huit ans, peu importe leur formation. C'est dans la nature des choses. Du moins, c'est ce que j'ai appris dans mes cours de psychologie et ai noté dans mon expérience personnelle de la vie.

Je trouve carrément insatisfaisant que l'on adopte un critère d'âge légal pour décider ou non d'envoyer une jeune personne dans un conflit armé quelconque, que la nature du conflit soit une mission de maintien de la paix ou une guerre réelle. Dans la pratique, envoyez-vous des jeunes de dix-huit ou dix-neuf ans dans de telles situations?

[Traduction]

Le colonel Gord Grant, directeur, Besoins en ressources humaines militaires, ministère de la Défense nationale: Au cours des dernières années, j'ai effectué trois opérations qui auraient pu présenter de grands dangers. Nous nous limitons peut-être en exigeant que les militaires aient 18 ans pour participer à une opération, mais je ne le pense pas. À titre de commandant, j'ai eu la responsabilité de confirmer que tous les soldats sont aptes à partir ou prêts à affronter l'environnement dans lequel nous voulons les déployer.

Le capitaine King a signalé qu'il y a un certain nombre de directives. Dans les trois opérations auxquelles j'ai participé, je dirigeais un grand nombre de soldats. Il y en avait parmi eux qui avaient 18 ans, mais la plupart était plus âgés. Il n'y en avait aucun de 17 ans. Je n'avais pas l'autorisation de les affecter à ces missions. J'ai dû lire un certain nombre de directives qui précisent, entre autres, l'état de santé physique, mental et dentaire qui est requis pour partir. Il y avait une très grande formation à suivre. Dans les trois cas, 15 évaluateurs avaient été affectés à mon service. On avait préparé des centaines de scénarios auxquels mes soldats devaient réagir. Tous les militaires qui ont reçu la formation étaient prêts à partir à mon avis. On m'a ensuite donné 24 heures pour exécuter une opération d'entraînement. Ceux qui ont évalué les membres de mon unité devaient confirmer si tous les militaires avaient les aptitudes voulues pour servir dans une situation de ce genre.

Vous pouvez bien comprendre la responsabilité qui leur incombait. Je devais ensuite signer un document et fournir la liste de tous les membres des Forces armées canadiennes qui allaient m'accompagner. Je devais déclarer que chacun d'entre eux était prêt à partir pour cette opération. Je ne signerais pas ce document si je n'étais pas raisonnablement certain que ces militaires ont la maturité voulue pour travailler dans ce contexte et aussi pour faire face peut-être aux pires situations de leur vie. Les trois opérations auxquelles j'ai participé ne sont pas les seules du genre et tous les commandants continuent d'assumer des responsabilités de cette nature tous les jours. Ces opérations sont dirigées par les militaires les plus hauts gradés. Tous les commandants qui participent à une opération savent à quoi s'en tenir et ce n'est pas une responsabilité facile à assumer.

Le sénateur Corbin: Merci de ces renseignements.

Le sénateur Grafstein: Combien de militaires ont été évalués par ces 15 personnes?

Col Grant: Ils en ont évalué 700 lors de la première opération, 250 pour la deuxième et un peu moins de 200 pour la troisième. Ces opérations se sont déroulées à Sarajevo, au Congo et en Bosnie.

Le sénateur Corbin: Au retour, quel était l'état mental et psychologique des militaires qui avaient vu toutes sortes d'horreurs? Nous savons que, dans d'autres circonstances, des personnes très équilibrées ont été complètement démolies. Quelle est, d'après votre expérience, la réaction des jeunes militaires de 18 ou 19 ans dans des situations de cette nature?

Col Grant: On s'éloigne peut-être de ce dont on m'a demandé de parler.

Le sénateur Corbin: Vous n'êtes pas obligé de répondre.

Col Grant: D'après mon expérience, il y a des militaires de tous les âges qui ont eu des problèmes.

Le sénateur Corbin: Je ne vous vise pas personnellement.

Col Grant: Je ne me sens pas visé.

Le sénateur Corbin: J'ai peut-être un parti pris ou un préjugé au sujet du déploiement de jeunes gens dans des situations de conflit. Des membres de ma famille ont participé à des missions de maintien de la paix en Corée, à Chypre et ailleurs. Heureusement, ils s'en sont assez bien tirés, mais ce n'est pas le cas de tout le monde. Je sais que les militaires canadiens sont plus préoccupés que jamais par le bien-être et la formation de leur personnel. Quoi qu'il en soit, nous devons être réalistes. Je trouve qu'on ne devrait pas être exposé à un âge aussi jeune que 18 ou 19 ans à des situations comme celles dont nous parlons.

On peut les former, on peut en faire des machines, on peut les conditionner mentalement, mais j'aimerais qu'on réponde à ma question. Combien d'entre eux, à leur retour, peuvent mener une vie normale après avoir vu les horreurs auxquelles ils sont parfois exposés? Est-ce vraiment nécessaire?

Le sénateur Di Nino: Pour revenir à l'objet du projet de loi un instant, un paragraphe donne force de loi à la pratique actuellement en vigueur au sein de nos forces armées?

Mme Bellefeuille-Prégent: Oui.

Le sénateur Di Nino: Parmi les jeunes de 16 et 17 ans qui sont inscrits à un collège militaire ou qui font partie de la réserve, y a-t-il un nombre raisonnable de femmes? Quels sont les chiffres?

Col Grant: Je n'ai pas de chiffres précis à ce sujet. Dans mon unité, il y a environ 20 à 30 p. 100 de femmes, mais je ne sais pas si ce pourcentage est représentatif de l'ensemble des forces armées. Il y a plus de femmes dans certains secteurs que d'autres.

Le sénateur Di Nino: On retrouve surtout les jeunes de 16 et 17 ans dans la réserve ou les collèges, et ils ne font pas vraiment partie des effectifs militaires, n'est-ce pas?

Col Grant: Pas tout à fait, sénateur. Nous recrutons des jeunes de 17 ans dans la force régulière. Cependant, ils reçoivent une formation de 12 à 18 mois.

Le sénateur Di Nino: Les activités dans les collèges militaires ou ailleurs font vraiment partie d'un programme d'enseignement et de formation?

Col Grant: Oui, sénateur.

Le sénateur Di Nino: Si jamais on devait songer à les déployer dans une situation de conflit, ils auraient probablement 18 ans de toute façon?

Col Grant: Non. La directive indique qu'ils doivent avoir au moins 18 ans, qu'ils aient terminé leur formation à 17 ans ou non.

Le sénateur Di Nino: Comment définit-on un théâtre d'hostilités? Par exemple, les inondations à Winnipeg n'étaient pas considérées comme un théâtre d'hostilités. Les jeunes de moins de 18 ans y participeraient. Nous comprenons cela. Y a-t-il des zones grises que vous voulez peut-être nous expliquer, ou est-ce essentiellement une situation où quelqu'un peut avoir à tirer et à tuer?

Col Grant: Je vais laisser le spécialiste de la politique répondre.

Capt King: Le chef d'état-major de la Défense a donné deux définitions officielles, la première en 1998. Selon lui, un théâtre hostile d'opérations est toute zone ou région où des hostilités sont engagées ou pourraient très bien éclater ou reprendre, ou toute zone ou région désignée par le chef d'état-major de la Défense comme un théâtre hostile d'opérations. Encore une fois, c'est au chef d'état-major de la Défense qu'il appartient de déterminer si une zone est un théâtre hostile.

Le sénateur Di Nino: C'est donc une zone où quelqu'un peut tuer ou être tué?

Capt King: Oui, ou une zone qui est très dangereuse.

Le sénateur Di Nino: Les jeunes membres des forces seraient-ils affectés à des postes de défense ou de soutien plutôt que sur la ligne de front, ou est-ce que l'âge ne fait aucune différence?

Capt King: L'âge n'a rien à voir. Les gens recrutés par les Forces canadiennes exercent toutes sortes de métiers et occupent toutes sortes de postes. J'ai joint les rangs des forces à 17 ans, et je suis dans la marine depuis cette époque. Ma formation a duré quatre ou cinq ans. J'ai terminé mes études universitaires et ma formation de base dans la marine avant d'être affecté à une opération. J'avais 21 ans quand j'ai participé à ma première opération.

Le sénateur Di Nino: Pour satisfaire ceux qui proposent de ne pas recruter des jeunes de moins de 18 ans, pourrait-il y avoir une classification ou une désignation autre que celle de membre de la force régulière?

Mme Bellefeuille-Prégent: Nous avons tenu compte des avantages auxquels ces jeunes ont droit. Nous ne voulions pas qu'il y ait deux catégories de membres des Forces canadiennes. Les jeunes reçoivent tous les mêmes avantages et ces années de service comptent dans le calcul de leur pension. Ils sont visés par le même régime de discipline et sont traités comme les autres, sauf qu'ils ne sont pas déployés dans les théâtres d'hostilités. Comme mon collègue l'a dit, il y a une définition de théâtre d'hostilités et ils sont protégés à ce sujet. Ils reçoivent les mêmes avantages, et nous pensons qu'il est plus avantageux que les jeunes de 16 et 17 ans soient considérés comme des membres à part entière des Forces canadiennes.

Le sénateur Di Nino: Est-il exact qu'un théâtre d'hostilités peut être national ou international?

Capt King: C'est exact, mais il y a bien des années que nous avons fait l'expérience d'un théâtre d'hostilités au Canada.

Le sénateur Di Nino: Oka n'était pas un théâtre d'hostilités?

Capt King: Non.

Le sénateur Di Nino: Ainsi, un soldat de 16 ou 17 ans aurait pu être envoyé à Oka?

Capt King: En théorie, la réponse est oui. Dans la pratique? Certainement pas. En tant que leaders, nous exerçons une responsabilité morale.

Le sénateur Bolduc: Il n'y pas d'empêchement législatif.

Le sénateur Di Nino: Merci.

Le sénateur Pearson: Quelles pratiques utilisez-vous pour recruter les jeunes? Les jeunes eux-mêmes expriment-ils un intérêt? Font-ils savoir qu'ils souhaitent joindre les rangs des forces armées? Étant donné que cela se fait sur une base volontaire, je présume que les candidats qui souhaitent entrer dans les forces armées doivent subir un certain nombre de tests, en plus de fournir un certificat de naissance et d'avoir l'autorisation de leurs parents. Cependant, faites-vous des pour découvrir pourquoi ils veulent s'engager?

Capt Grant: Pour répondre brièvement, oui. Qu'ils souhaitent joindre les rangs de la réserve ou des forces régulières, ils doivent subir une gamme de tests d'aptitudes et satisfaire à des critères qui varient selon les professions. Nous ne voulons pas confier certains postes à des jeunes de 17 ans. C'est une question d'aptitudes. Nous courons toujours un risque lorsque nous décidons qu'un candidat a de bonnes chances de réussir dans tel ou tel métier ou profession car au bout du compte, nous voulons aussi obtenir un bon rendement sur l'investissement des contribuables canadiens.

Les candidats fournissent-ils les raisons que les poussent à s'engager? Oui, et elles sont multiples. Dans de nombreux cas, c'est une façon pour eux de trouver du travail, mais souvent, ils évoquent aussi le caractère enthousiasmant de la vie militaire. La plupart souhaitent participer à des missions de l'ONU et de l'OTAN. Il y a d'autres raisons également. Nous cherchons un moyen de faire en sorte que les Forces canadiennes soient l'employeur de choix, à le rendre aussi attrayant que possible. Lorsqu'un citoyen canadien est prêt à passer au monde du travail, ce qui se produit habituellement autour de 16 ou 17 ans, nous ne voulons pas fermer notre porte à ceux qui feront d'excellents soldats et ambassadeurs de notre pays. L'une de mes tâches consiste à coordonner le recrutement et la production dans les Forces canadiennes, et notre pire crainte c'est que chaque fois que l'on fait obstacle à une garantie de plein emploi, nos candidats potentiels nous abandonnent pour aller chercher du travail ailleurs, que ce soit chez Nortel ou Postes Canada. Nous voulons pouvoir offrir des emplois comme n'importe quelle autre institution, agence ou industrie au Canada, à l'âge où les jeunes sont prêts à les assumer.

Nous appliquons des tests d'aptitudes et nous essayons évidemment d'orienter les candidats dans les emplois et les programmes de formation qui conviennent.

Le sénateur Pearson: Je voulais savoir pourquoi ils veulent s'engager. Dans le contexte de la discussion sur l'âge du déploiement, avez-vous constitué ou savez-vous si une autre entité a constitué des groupes de recherche composés de jeunes eux-mêmes, de recrues, pour connaître leurs idées au sujet de leur contribution?

Capt Grant: Autrement dit vous voulez savoir si nous avons des groupes de consultation auprès des jeunes? Oui. Y a-t-il eu des groupes de consultation portant précisément sur la question de savoir si à 18 ans, ils devraient participer à des opérations ou non? Non, mais j'estime que c'est hypothétique car au moment où nous les recrutons et les formons, ils ont déjà plus de 18 ans.

Le sénateur Pearson: Ce n'est pas ce à quoi je pensais. Je souhaiterais que vous ayez des discussions avec les jeunes participant aux programmes de formation. J'aimerais savoir ce qu'ils ont à dire au sujet du problème des enfants soldats. En effet, les jeunes Canadiens ont toujours des opinions valables à exprimer. Je vous recommanderais de faire cela.

Capt Grant: Au sujet des enfants soldats, non. Nous organisons des cours de formation psychosociale, de formation sur la diversité, de formation sur le harcèlement et de formation culturelle. J'ajouterai que la plainte que l'on entend le plus souvent de la part des réserves, qui sont les entités où l'on retrouve le plus de recrues de 16 et 17 ans, concerne les restrictions quant à la participation des opérations. C'est le grief le plus souvent exprimé par les jeunes, y compris ceux qui ont plus de 18 ans.

Le sénateur Pearson: Je peux comprendre car à mon avis, il y a une chose que nous devons tous reconnaître, c'est qu'il existe des guerres justes, et cela a une résonnance particulière pour ceux qui sont suffisamment âgés pour se rappeler la Seconde Guerre mondiale. Il est difficile de dire à des jeunes que simplement parce qu'ils ont moins de 18 ans, ils ne peuvent participer à ce genre d'activités. Je ne connais pas la solution, mais plus nous serons à l'écoute des jeunes eux-mêmes, mieux cela vaudra et plus nous serons en mesure de régler ce problème à l'échelle internationale.

Le sénateur Grafstein: Je faisais partie des cadets à l'âge de 13 ans. J'aurais voulu y adhérer plus tôt, mais la limite d'âge était de 13 ans. Cela correspondait à l'entrée au secondaire. Il était impossible d'y adhérer au niveau primaire. Dans ma jeunesse, nous admirions les personnes qui portaient l'uniforme. Je suis de ceux qui croient que plus tôt vaut mieux que plus tard pour toutes sortes de raisons. Je n'ai rien contre l'intention morale du projet de loi. Je vais exprimer mon parti pris et mes préjugés à cet égard et ensuite, prendre un peu de recul et poser certaines questions générales.

Quelle a été la norme jusqu'ici à l'OTAN, organisation dont le Canada fait partie? À quel âge sont recrutés les cadets et à quel âge les jeunes sont-ils acceptés directement dans les réserves ou les forces armées régulières? Comment notre système se compare-t-il à ceux de nos alliés de l'OTAN?

Deuxièmement, quelle est la situation dans l'armée chinoise? N'est-ce pas la plus grande armée permanente du monde? Quelle est l'expérience des Chinois? Sont-ils partie au protocole optionnel?

Troisièmement, quelle est l'expérience de la Suisse où, si je ne m'abuse, a encore cours une forme de conscription obligatoire pour tous les jeunes d'un certain âge? À quel niveau sont-ils invités à participer? Peuvent-ils éviter de faire leur service militaire s'ils ont consacré de longues périodes à de telles activités à un plus jeune âge? Il y a un contingentement quelconque. Je soulève ces questions pour avoir une idée de notre système par rapport à d'autres en vigueur dans le monde, qui pourraient nous aider. Que signifie le terme «optionnel» sur le plan juridique lorsqu'il est question du protocole?

Le lieutenant colonel Dominic McAlea, directeur du droit international, Bureau du juge-avocat général, ministère de la Défense nationale: Je n'ai pas de réponse exhaustive à la première question. Je peux vous dire qu'il n'y a pas de normes communes au sein de l'OTAN en matière de recrutement. Lorsque vous avez parlé des cadets, entendiez-vous cela au sens canadien ou parliez-vous de personnes en formation qui sont membres d'une force armée?

Le sénateur Grafstein: Je parlais des cadets en tant que niveau préalable à l'entrée dans les forces armées.

Lcol McAlea: Il n'y a pas de normes communes au sein de l'OTAN. Chaque pays de l'Organisation a une approche différente qui reflète une philosophie différente. Même si l'OTAN tente de standardiser bien des choses, ce n'est pas l'une d'entre elles.

Pour ce qui est de votre deuxième question, je ne peux commenter l'expérience chinoise, sauf pour dire que les Chinois étaient présents à Genève pour les négociations sur le protocole optionnel et qu'ils n'ont pas soulevé d'objections sérieuses au texte final.

Quant à votre troisième question, au sujet de la Suisse, il va de soi que l'expérience suisse est bien différente de l'expérience canadienne. Pratiquement tout au long de leur vie adulte, les Suisses sont tenus de participer à un service national, ce qui n'existe pas au Canada. Ils sont disposés à accepter 18 ans comme âge minimum.

Le sénateur Grafstein: L'âge minimum pour quoi?

Lcol McAlea: Pour le recrutement.

Le sénateur Grafstein: Pour le service à temps plein?

Lcol McAlea: Oui, mais le service y est obligatoire. Leur approche est différente de la nôtre, de sorte que c'est comme comparer des pommes et des oranges. Même s'il existe là-bas des officiers de carrière, leur système n'est pas fondé sur le service volontaire, le consentement parental et le critère des 18 ans.

En ce qui a trait à l'adjectif «optionnel», il s'agit d'un mécanisme de droit international qui permet de relever les normes lorsqu'il est impossible de dégager un consensus exhaustif. Ce protocole optionnel est rattaché à la Convention relative aux droits de l'enfant. Ce véhicule permet à certains États de relever leurs propres normes, même si la totalité des États ne peut adhérer. La Convention relative aux droits de l'enfant a été largement ratifiée, à l'exception de deux pays. Quant au protocole, on s'attend qu'il soit lui aussi largement ratifié, mais peut-être pas dans une aussi grande mesure ou aussi rapidement.

Le président: Je ne peux résister. Quels sont les deux pays en question? Vous devez le savoir.

Lcol McAlea: Les États-Unis et la Somalie.

M. Snyder: Une disposition du protocole optionnel permet aux pays qui n'ont ni signé ni ratifié la convention générale de signer et de ratifier le protocole. Par conséquent, même si les États-Unis ont signé la Convention relative aux droits de l'enfant, sans la ratifier, ils pourraient signer et ratifier le protocole optionnel. Qui plus est, au cours des négociations, ils ont affirmé que s'ils le faisaient, ils respecteraient les parties de la Convention relative aux droits de l'enfant applicables au protocole optionnel proprement dit.

Le président: Je remercie les témoins du ministère de la Défense nationale.

Nos prochains témoins représentent Vision mondiale Canada et Amnistie internationale, section canadienne.

Mme Kathy Vandergrift, analyste de politiques principale, Vision mondiale Canada, groupe de travail sur les enfants dans les conflits armés: J'apprécie l'occasion qui m'est donnée de présenter un exposé sur cette question. Le projet de loi S-18 est bref, mais il se rattache à une facette plus complexe et très importante de la politique étrangère du Canada. Je prends la parole aujourd'hui au nom de Vision mondiale Canada, mais Vision mondiale est un partenariat réunissant une coalition internationale de six membres qui vise à empêcher le recours à des enfants soldats et qui a été le principal champion du protocole optionnel.

L'âge du recrutement et du déploiement n'est qu'un élément d'une stratégie globale concernant le problème des enfants dans les conflits armés. Je vous laisserai un énoncé de politique exhaustif que nous avons rédigé au sujet des enjeux de la prévention, de la protection et de la réintégration des enfants soldats ainsi que des autres enfants touchés par la guerre. C'est une composante parmi tant d'autres d'une stratégie beaucoup plus vaste.

Aujourd'hui, je veux vous demander d'envisager de recommander que le Canada adopte la même norme qu'il entend appliquer aux forces armées non gouvernementales dans le protocole optionnel. Cela signifie qu'il faut modifier la loi pour que l'âge du recrutement et du déploiement soit 18 ans.

Comme l'explique clairement la documentation que vous avez reçue, cela est considéré comme une façon pour le Canada de présenter le protocole optionnel et d'affirmer son leadership dans le dossier des enfants dans les conflits armés. Les négociations entourant le protocole optionnel ont donné lieu à un important compromis, de sorte que le résultat final est un outil relativement faible. La coalition internationale espère régler le problème en persuadant un grand nombre de nations d'adopter volontairement une position plus cohérente et ainsi, établir une norme internationale plus rigoureuse.

Je m'attacherai à un domaine lacunaire du protocole optionnel et je mettrai en lumière le manque d'efficacité de cet instrument pour régler le problème. Nous abordons cette question d'un point de vue pratique car Vision mondiale est présente dans de nombreux pays où, quotidiennement, des enfants sont touchés par la guerre et où l'on a recours à des enfants soldats. Il y a plus de 5 000 anciens enfants soldats dans le nord de l'Ouganda seulement. Je trouve préoccupante la norme différente applicable aux forces armées non gouvernementales. Il est difficile d'obtenir de ces groupes armés non gouvernementaux qu'ils respectent les dispositions relatives à la protection des enfants, et c'est un défi pour la communauté mondiale. C'est d'ailleurs pourquoi la campagne internationale cible particulièrement ce problème. Le fait d'astreindre ces groupes armés à une norme plus élevée que les États ne sont prêts à adopter pour eux-mêmes risque d'entacher notre crédibilité.

Sous sa forme actuelle, le protocole optionnel fixe à 16 ans l'âge minimum du recrutement, mais on le fixe à 18 ans pour le recrutement par des forces armées non gouvernementales, en demandant aux États de considérer le recrutement de personnes plus jeunes comme une infraction criminelle. Il y a donc deux poids deux mesures. En droit international, les règles de conduite en cas de conflits armés doivent partir du principe que les mêmes règles s'appliquent aux deux camps. Essentiellement, la campagne internationale dont je me fais le porte-parole aujourd'hui vise à demander aux pays d'adopter volontairement une norme plus élevée. Nous espérons obtenir 100 ratifications, ce qui constituerait une majorité. J'estime que c'est un objectif raisonnable étant donné que sur les 191 nations qui ont ratifié la Convention relative aux droits de l'enfant, moins de 50 permettent officiellement le recrutement de jeunes de moins de 18 ans. Par conséquent, nos chances d'atteindre cet objectif sont raisonnablement bonnes et à ce moment-là, le Canada ne sera plus un leader dans ce dossier. Si nous voulons continuer d'agir en chef de file, j'espère que le comité recommandera que la Canada adopte une norme plus élevée.

À titre d'organisation non gouvernementale, nous avons eu certaines discussions avec des représentants du ministère de la Défense nationale sur les moyens à prendre pour arriver à cette fin tout en permettant la transition de l'école aux forces armées. Je cite l'exemple du gouvernement de la Norvège, qui a mis au point une solution. Il y a diverses façons de résoudre ce problème, sans pour autant permettre le recrutement officiel d'enfants de moins de 18 ans. Vous avez en mains notre mémoire écrit intégral.

M. Alex Neve, secrétaire général, Amnistie internationale (section canadienne): Je vous remercie de m'avoir invité à comparaître cet après-midi. Amnistie internationale est ravie de cette occasion de communiquer son point de vue sur le projet de loi S-18. Je suis accompagné aujourd'hui de Hilary Homes, coordonnatrice de notre programme pour les jeunes et les étudiants. C'est également elle qui a piloté nos travaux sur cette importante question.

Comme tous les députés du comité le savent sûrement, nous sommes un groupe international de défense des droits de la personne. Dans notre travail, nous avons été amenés à accorder de plus en plus d'attention aux droits des enfants. Dans ce contexte, nous avons décidé de nous attacher à la situation des enfants dans les conflits armés. D'ailleurs, nous considérons le problème de l'utilisation d'enfants soldats comme un enjeu crucial dans le domaine des droits de la personne. Voilà donc la perspective dans laquelle nous venons cet après-midi à la table partager nos vues avec vous. Je demanderais à Mme Homes de vous communiquer notre analyse spécifique du projet de loi.

Mme Hilary Homes, coordonnatrice, Programme des jeunes et des étudiants, Amnistie internationale (section canadienne): Comme vous pouvez l'imaginer, notre point de vue ne diffère guère de celui de notre collègue de Vision mondiale. Nos deux organisations font partie d'un groupe de travail composé d'ONG qui s'est penché sur le sujet et qui a eu des entretiens avec un certain nombre de personnes aux Affaires étrangères et à la Défense nationale. Mes collègues de la Défense nationale ont présenté un très bon survol de la situation des enfants touchés par la guerre et du processus qui débouché sur le protocole optionnel sous sa forme actuelle. Ils ont signalé, à juste titre, que l'actuelle politique du Canada, dont découle le présent projet de loi, est en complète concordance avec l'ébauche de protocole optionnel à laquelle on est arrivé. Ce document représente un compromis et il importe de se reporter à l'idée originale qui avait donné le coup d'envoi au processus. Il y a eu énormément de discussions autour de l'âge de 18 ans, et j'y reviendrai tout à l'heure.

Cette question s'inscrit dans un contexte international. Dans notre discussion sur l'ébauche de protocole optionnel, il ne faut pas oublier qu'elle concerne la situation des enfants soldats. Nous avons entendu énormément d'histoires à leur sujet. En préparant mon exposé pour aujourd'hui, je me suis rappelé que la dernière fois que j'ai pris part à un panel sur cette question, c'était à l'occasion de consultations sur l'édification de la paix. J'étais assise à côté de Paska Otto, une enfant soldat de l'Ouganda associée à un autre groupe armé dont le nom m'échappe pour l'instant. Elle se trouve ici au Canada. Maintenant dans la vingtaine, elle étudie à l'Université de Guelph. Son histoire est plutôt accablante. L'une des seules choses encourageantes à son sujet, outre le fait qu'elle est toujours vivante, c'est qu'elle soit demeurée aussi normale, compte tenu du fait que sa vie, sa famille, ses amis et son village ont été déchirés par la guerre. Au moment même où nous siégeons ici, avec tous les conflits qui ont cours dans le monde et qui impliquent des enfants, nous savons qu'un nombre de plus en plus considérable de vies est détruit. Cela semble une réalité lointaine mais en fait, elle est beaucoup plus près de nous que nous le croyons. Cela a un rapport important avec le projet de loi à l'étude. Il est facile d'être obnubilé par la situation canadienne, mais il convient de se rappeler le contexte international.

Le cadre original du protocole optionnel proposait que le recrutement ne se fasse pas avant l'âge de 18 ans. On a déjà discuté quelque peu ici de la situation de ces jeunes de moins de 18 ans. Je veux réfléchir à tout cela. À l'âge de 17 ou 18 ans, si j'avais entendu parler de la Convention internationale relative aux droits de l'enfant, j'aurais été offusqué d'être appelé un enfant. Voilà pourquoi nous marquons un temps d'arrêt pour nous interroger: «Quelles options s'offrent aux jeunes de 16 ou 17 ans dans leur vie? À quoi aspirent-ils?» Le sénateur Pearson a fait allusion à cela. À ce stade de sa vie, on souhaite exercer un certain contrôle. Personnellement, j'ai quitté la maison familiale à l'âge de 17 ans. Je me demande également s'il n'aurait pas été préférable que je parte un peu plus tard, mais ce n'est pas là le propos de notre séance.

Nous attachons de l'importance à l'âge de 18 ans, et le cadre original du protocole optionnel fait de même. Le Canada a appuyé ce cadre, ainsi que l'idée originale. C'était une bonne idée. Dans notre société, nous considérons cet âge comme un passage entre la protection que nous assurons à un enfant et la transition vers la protection et les responsabilités connexes de l'âge adulte. C'est aussi l'âge minimal fixé par la loi pour être électeur. C'est également l'âge associé à une participation pleine et entière dans les forces armées. Nous établissons toutes sortes de limites, par exemple pour l'achat de cigarettes et d'alcool. D'ailleurs, la limite d'âge est même plus élevée dans certaines provinces. C'est vraiment un âge critique, ce qui est fort pertinent dans notre discussion aujourd'hui.

Le projet de loi fixe à l8 ans l'âge du déploiement. Nous accueillons cela favorablement. Cependant, lorsqu'on nous a dit qu'Oka n'était pas considéré comme un théâtre d'hostilités, ce qui implique que des jeunes couraient un certain risque --, j'ai retraité mentalement par rapport à l'opinion que j'avais exprimée, selon laquelle «c'est une excellente phrase dans la mesure.» Néanmoins, cela s'harmonise au protocole optionnel sous sa forme actuelle. Au départ, le Canada a appuyé l'idée de fixer à 18 ans l'âge du recrutement. Cela demeure une excellente idée, et nous estimons qu'il devrait en être ainsi.

J'ai soulevé certains arguments. L'un des plus vigoureux concerne les répercussions d'une telle décision sur les groupes armés. Le Canada souhaitait être un chef de file dans ce dossier. Établir cette différence entre 16 et 17 ans était en fait un compromis. Pourquoi le Canada devrait-il s'attacher à ce compromis étant donné que les gouvernements ont convenu que l'idée originale était la bonne? Ce sera tout un défi que de persuader les forces armées non gouvernementales, qui ont une liste horriblement longue de raisons justifiant de faire appel à des jeunes de moins de 18 ans, liste qui est assez semblable aux raisons pour lesquelles nous souhaitons que le protocole vise ces jeunes.

Cela sera très difficile. Par contre, si nous donnons l'exemple, les choses seront beaucoup plus faciles. Nous serons confrontés à des groupes armés pendant longtemps. Si l'on considère combien de conflits dans le monde sont internes et non transfrontières, on comprend clairement à quel point il importe de prêcher par l'exemple.

J'ai écouté avec beaucoup de respect ce qu'avaient à dire mes collègues du ministère de la Défense nationale au sujet des débouchés que nous offrons aux jeunes de 16 et 17 ans. Nous devons aussi reconnaître que même si nous disons que les forces armées sont un employeur, ce n'est certes pas un employeur comme un autre. Nous vivons dans une société qui offre beaucoup de diversité et de choix, et nous pouvons offrir des débouchés à des jeunes de 16 et 17 ans de multiples autres façons. Je ne veux pas du tout minimiser par là l'adhésion aux forces armées. En fait, je veux plutôt signaler le sérieux d'un tel engagement. On ne saurait dissocier notre action de ses répercussions sur la scène internationale. Si le Canada respecte l'option originale des 18 ans seulement, au bout du compte cela aura une incidence beaucoup plus marquante sur le sort des enfants affectés par la guerre dans le monde que s'il s'en tient au strict minimum énoncé dans le protocole optionnel.

Le sénateur Grafstein: Si je comprends bien, vous n'avez pas d'objections à ce que se poursuive la formation des cadets, pour autant qu'il n'ait pas de recrutement dans les forces armées régulières avant l'âge de 18 ans. Ou est-ce que je vous cite hors contexte?

Mme Homes: Vous ne me citez pas du tout hors contexte. Le modèle que nous voulons proposer fait en sorte de distinguer entre le moment où des jeunes peuvent officiellement faire partie des forces armées et où ils ne le peuvent pas. Nous ne disons pas qu'ils ne devraient pas entamer un cheminement qui les amènera à adhérer aux forces armées. J'ai moi-même un demi-frère qui, à l'adolescence, souhaitait joindre les rangs des forces armées américaines et aurait certainement pu le faire. En fin de compte, il a décidé d'attendre d'avoir 18 ans pour entrer à l'Académie de l'aviation américaine. Ce fut une décision difficile. L'affaire a donné lieu à une saine discussion au sein de la famille, mais la démarche de mon demi-frère n'a pas été bloquée. Notre intention n'est pas d'empêcher qui que ce soit d'opter pour cette voie, mais de faire en sorte qu'on reconnaisse le sérieux d'un tel engagement et qu'on se rappelle qu'il s'inscrit dans un contexte international.

Bon nombre des arguments concernant le recours aux enfants soldats découlent de crises internationales où la protection des droits de la personne a été fortement compromise et où la participation des jeunes est une forme d'exploitation. Ce n'est pas la même chose ici, au Canada. L'exemple que nous offrons est convaincant. Le Canada souhaite être un chef de file; il aspire au leadership dans des dossiers comme celui-là. Voilà pourquoi il est tellement important de donner l'exemple et pourquoi cette question transcende une simple décision prise au sein d'une famille canadienne. Les cadets ne font pas partie des forces armées officielles.

Le sénateur Grafstein: Cela pose toute la question de la différence de maturité entre 16 et 18 ans. Cette période cause aux législateurs de nombreux problèmes dans bien des dossiers, particulièrement dans le domaine du droit pénal où il faut établir à quel moment la responsabilité entre en jeu. Tout cela n'est pas encore très clair dans ma tête. Je comprends la volonté de rehausser l'âge, mais il faut aussi penser aux jeunes eux-mêmes. Ces derniers veulent assumer le contrôle de leur vie. Par exemple, nous mettons une arme appelée automobile entre les mains de jeunes de 16 ans. C'est une arme très dangereuse que nous leur permettons d'utiliser comme bon leur semble. Nous leur permettons même d'en être propriétaires.

Le président: C'est à 15 ans, d'après ce que j'ai entendu dernièrement. Personnellement, j'ai obtenu mon permis de conduire en Ontario à l'âge de 15 ans, avec le consentement de mes parents.

Le sénateur Grafstein: Avez-vous réfléchi à cela? Vous avez évoqué cette question dans votre témoignage. Il y a la question de l'âge, mais aussi la question de la responsabilité et du moment où les enfants sont suffisamment matures pour être en mesure de les assumer. Que cela nous plaise ou non, il me semble que l'âge de la responsabilité va en s'abaissant au lieu de monter, compte tenu de ce que nous voyons les jeunes d'aujourd'hui faire à divers âges. C'est un dilemme psychologique sérieux pour les adultes. Certains jeunes de 16 ans peuvent être suffisamment solides mentalement, d'après certains tests psychologiques, et être mus par un ardent désir de prendre leurs propres décisions. En réalité, nous disons à ces jeunes -- et je ne suis pas contre le principe --: «Nous voulons vous dicter le moment où vous serez en mesure de prendre en main votre vie. Nous avons décidé que vous ne deviendrez responsables de votre vie qu'à l'âge de 18 ans.» Vous avez abordé cette question, et je sais qu'elle suscite des préoccupations. Y avez-vous mûrement réfléchi?

Mme Vandergrift: Les groupes que nous représentons embrassent sans réserve l'idée d'une participation active des jeunes dans leurs collectivités. Nous nous faisons les champions d'une participation accrue des adolescents dans leurs communautés. Chose certaine, dans les populations comportant un pourcentage important d'adolescents, et en particulier de jeunes mâles, c'est un facteur qui joue énormément dans la vie du pays. Par exemple, en Sierra Leone, nous constatons un problème à cet égard. Nous souhaitons vivement que ces jeunes participent activement à la vie sociale et à la prise de décisions. Il y a de multiples façons pour eux de le faire sans pour autant adhérer aux forces militaires. Comme nous l'avons déjà dit, dans notre situation, il y a de multiples façons d'effectuer cette transition sans passer par le recrutement officiel.

Je voudrais évoquer deux autres facteurs. Les experts sur le terrain font valoir qu'il est plus facile pour un jeune de 14 ans de prétendre qu'il a 16 ans plutôt que 18. C'est une réalité physique. Par conséquent, lorsque ce sont des jeunes de 14, 12 ou même 9 ans qui sont en cause, il va de soi qu'un seuil de 18 ans faciliterait les choses dans ces circonstances concrètes.

Deuxièmement, la distinction entre l'adhésion volontaire et obligatoire n'est pas aussi claire qu'elle l'est ici. Nous avons affaire à un grand nombre de jeunes qui nous disent: «J'ai adhéré volontairement.» Cependant, lorsqu'on peut leur parler seul à seul, il ressort que leur adhésion n'avait rien de volontaire. Elle était mue par de strictes raisons de survie ou par la volonté de protéger d'autres membres de leur famille. Voilà le genre de raisons pour lesquelles ces jeunes ont cru nécessaire de joindre les rangs de l'armée. Dans la plupart des cas dont nous nous occupons, la différence entre l'adhésion volontaire et obligatoire n'est pas claire. Dans ce contexte, Grac'a Machel, qui a effectué une étude détaillée de l'incidence de la guerre sur les enfants, estime que fixer l'âge du recrutement à 18 ans est la meilleure façon de protéger les jeunes en pareil cas.

Le sénateur Di Nino: Pouvez-vous nous décrire le modèle norvégien?

Mme Vandergrift: J'aurais du mal à le faire étant donné que je n'en connais pas les détails. Je crois savoir qu'en Norvège, on offre une certaine formation qui met l'accent sur le volet maintien de la paix, mais les jeunes ne sont pas officiellement recrutés avant l'âge de 18 ans. Il y a donc une voie officielle qui leur permet, après l'école secondaire, d'adhérer aux forces armées, mais le recrutement officiel ne se fait pas avant l'âge de 18 ans.

Le sénateur Di Nino: Pourriez-vous nous communiquer cette information?

Mme Vandergrift: Bien sûr.

Le sénateur Di Nino: Ce dont il est vraiment question, c'est d'apprendre à un jeune homme ou à une jeune femme de 18 ans comment faire sauter la cervelle de quelqu'un d'autre. Le sénateur Corbin est intervenu à ce sujet et vous avez évoqué cela à l'instant. Il a posé la question: quelle est vraiment la différence entre apprendre à quelqu'un à tuer à l'âge de 18 ou de 17 ans? Y a-t-il tellement de différence?

Mme Vandergrift: Dans les démocraties -- au Canada, par exemple -- les jeunes de 18 ans ont le droit de voter sur les politiques du gouvernement. Allons-nous demander aux jeunes de défendre des politiques à l'égard desquelles ils n'ont pas le droit de vote?

Le président: Nous l'avons fait lors de la Seconde Guerre mondiale.

Le sénateur Di Nino: J'ai demandé à nos invités précédents s'il y avait une façon de faire en sorte que les jeunes de moins de 18 ans puissent être désignés de façon particulière, au lieu d'être membres des forces militaires. Voilà pourquoi le modèle norvégien m'intéresse. Je voulais savoir si c'est un exemple dont nous pouvons nous inspirer. En fait, les Norvégiens ont adopté une bonne démarche. Dans leur système d'éducation, certains jeunes qui fréquentent l'école sont appelés membres des forces armées. C'est peut-être d'une simple définition dont nous avons besoin. Je suis plutôt sympathique à votre position, qui consiste à attendre que ces jeunes aient atteint l'âge de 18 ans avant de les appeler des soldats et de leur donner le droit de tirer sur quelqu'un d'autre. C'est un défi. Vous nous demandez de vous donner un moyen de répondre aux besoins de ces jeunes tout en adoptant la mesure proposée. Y a-t-il autre chose que vous voulez ajouter sur la façon dont nous pourrions y arriver?

Mme Vandergrift: D'autres pays mettent en oeuvre diverses options pour y arriver. La Norvège est le meilleur exemple à l'heure actuelle. À ce sujet, j'obtiendrai l'information que vous souhaitez. Il existe des options.

Le sénateur Pearson: Je vous remercie de votre exposé. Il est utile qu'il figure au compte rendu, et je suis heureuse que vous ayez pu venir. Nous savons que ce protocole optionnel ne résoudra pas le problème. Les guerres vont continuer et des jeunes continueront d'être utilisés comme soldats, malheureusement même de très jeunes enfants. Cet instrument sera sans doute utile, mais c'est une norme. Dans le contexte international, d'après ce que je sais des négociations qui ont eu cours, il y a certains pays auxquels nous souhaitons imposer une norme élevée car ce sont eux qui connaissent surtout ces problèmes. Par ailleurs, il y a d'autres pays, très puissants, que nous voulons amener à faire sienne la norme, comme les États-Unis, la Chine et la Russie. Par conséquent, en un sens, cela représente un compromis car il aurait été impossible d'obtenir leur signature en faveur d'une norme fixée à 18 ans.

L'un des aspects enthousiasmants du protocole optionnel -- et aussi de celui sur la prostitution infantile, qui a été adopté de la même façon --, c'est que si nous pouvons obtenir des États-Unis qu'il le signe, ce que les Américains sont disposés à faire, alors éventuellement, ils auront ratifié la convention par la bande. Pouvez-vous nous parler de cet effort pour faire en sorte que les acteurs puissants se rallient?

Mme Homes: Il y a une différence entre le processus qui préside aux négociations du traité international et celui par lequel nous le mettons en oeuvre sur le plan national. Nous savons pertinemment que la Convention relative aux droits de l'enfant, à l'instar d'autres traités internationaux, est le fruit d'un compromis. Permettez-moi de revenir en arrière.

Le droit international concernant les droits de la personne n'est pas très détaillé. Il établit des principes qui s'équilibrent les uns les autres. Lorsqu'un État signe et ratifie un instrument international, il ne laisse pas pour autant dans le vague sa législation nationale. Il prend ces principes et les précise. Notre propre Charte des droits et libertés en est un exemple patent. C'est ainsi que nous avons assumé ces principes et que nous en avons précisé le détail dans notre propre contexte, et dans certains cas, cela a débouché sur la création d'une norme plus élevée que celle qui existe dans le droit international consacré aux droits de la personne. Ainsi, le droit international interdit uniquement la peine de mort pour les jeunes contrevenants. Or, au Canada, la peine de mort n'existe pas. Nous avons appliqué une norme plus élevée que celle en vigueur dans le domaine international. L'ébauche du protocole optionnel est le fruit d'un compromis sur l'âge du recrutement, et nous comprenons le jeu des forces en cause. Cela se traduira par un taux de ratification plus élevé.

À l'origine, nous avons appuyé l'option des 18 ans -- autrement dit, l'idée de relever l'âge du recrutement. Dans ce cas, pourquoi aligner notre propre mise en oeuvre sur le compromis international? Pourquoi ne pas appliquer une norme plus élevée chez nous? Nous le faisons d'autres façons, par le biais d'autres mesures législatives. Pourquoi ne pas le faire dans ce cas-ci étant donné que l'une des faiblesses du protocole tient au fait que nous espérons que les forces armées non gouvernementales respecteront une norme plus élevée que les gouvernements. Ces forces armées ne se soucient guère d'un instrument législatif international. Cela serait un excellent exemple. Il y avait au départ cette volonté de fixer à 18 ans l'âge du recrutement. Pourquoi ne pas essayer de lui donner corps à l'échelle nationale? La distinction que je fais est-elle suffisamment claire?

Le sénateur Pearson: Oui. Je ne suis pas tout à fait sûre que cette volonté existait.

Mme Homes: J'ai un communiqué des Affaires étrangères.

Le sénateur Pearson: Cela représente la position des Affaires étrangères et non de l'ensemble du gouvernement.

Le sénateur Andreychuk: En guise d'intervention supplémentaire, je signale que j'étais là en 1989. C'était assurément la volonté du gouvernement de l'époque de fixer la norme à 18 ans. À la suite des compromis qui ont été négociés, nous avons devant nous un document édulcoré. Il y a eu énormément de parenthèses. Ce fut très difficile d'en arriver au point de créer une convention. Une fois cela fait, nous sommes passés au volet optionnel.

Le sénateur Pearson: La position du gouvernement du Canada était de fixer à 18 ans l'âge du recrutement?

Le sénateur Andreychuk: Oui. C'était censé être 18 ans de façon générale.

Mme Vandergrift: Nous ne critiquons pas le fait d'avoir négocié un compromis pour favoriser un plus grand nombre d'adhésions. Nous comprenons cela. En l'occurrence, le compromis en question a donné lieu à de véritables faiblesses. La meilleure stratégie pour contrer ces faiblesses est d'avoir une majorité de nations qui choisissent volontairement d'être cohérents. À ce moment-là, c'est à nous qu'il revient de faire l'éducation des groupes armés non gouvernementaux en particulier. Nous pouvons alors faire état de cette position cohérente volontaire.

Le sénateur Corbin: Nous avons parlé des groupes armés non gouvernementaux. Je voudrais savoir qui ils sont et combien ont adhéré à cette option.

Mme Vandergrift: Je ne pense pas être en mesure de vous dire combien il y en a. Permettez-moi simplement de citer un bon exemple. À un moment donné, le SPLA c'est-à-dire le groupe d'opposition au Soudan, a convenu d'arrêter de recruter des enfants soldats et en a libéré un grand nombre. En Amérique latine, nous avons été en mesure d'obtenir également certains accords. C'est une situation très difficile. Il serait bon d'avoir une position cohérente de notre côté si nous voulons être un chef de file dans ces discussions.

Le sénateur Corbin: Mais est-ce que ce ne sont pas eux qui font le plus de dommages, les groupes armés non gouvernementaux?

Mme Vandergrift: Il y a beaucoup de troupes du gouvernement qui utilisent des enfants comme soldats. Le gouvernement du Congo, il n'y a pas très longtemps, a ramassé tout un tas d'enfants dans les rues pour les mettre dans l'armée. Nous voyons beaucoup de situations de ce genre, où c'est le gouvernement qui est en cause.

Le sénateur Corbin: J'aurais aimé voir des chiffres.

Le président: Lorsque vous parlez d'enfants soldats, j'imagine des jeunes qui n'ont pas 18 ans, ou même 16 ans. Nous savons tous que ceux-là servent de soldats. Je connais très bien la FARC, de la Colombie. Je connais ces groupes. Lorsque je pense à des enfants soldats, je vois des jeunes de 12, 13 et 14 ans. Je discutais justement avec notre conseiller juridique. Même au Canada, en vertu de la Loi sur les jeunes contrevenants, un contrevenant peut être déclaré un adulte dès l'âge de 14 ans. Je ne peux pas imaginer que quiconque puisse être d'accord qu'il y ait des enfants soldats. Le problème est de savoir à quel point un soldat peut être déclaré un enfant?

Le sénateur Corbin: Je ne pense pas qu'on puisse s'attendre à ce que les groupes armés non gouvernementaux se plient à la règle d'aucune façon. Les gorilles du Sierra Leone et les trafiquants de drogue ne porteront aucune attention à ce genre de choses, mais quand même, si on n'en convainc que quelques-uns, ce sera toujours ça de gagné. Je suis tout à fait d'accord pour dire que le moindre gain en vaut la chandelle. Quoi qu'il arrive, tout progrès, si petit soit-il, est le bienvenu.

Ce que je n'ai pas aimé des déclarations des témoins qui ont comparu devant nous -- c'est d'ailleurs pourquoi je les ai invités à rester, pour que nous puissions en discuter -- est le fait qu'ils aient parlé de compétition dans le recrutement et de rendement des investissements. Leur langage a changé et il me semble qu'on fait tout à fait fausse route. Est-ce que l'armée est maintenant dirigée comme une entreprise? Je ne comprends pas dans quoi nous nous embarquons. Un objectif plus humain serait certainement de réduire les risques. Je compatis beaucoup avec le point de vue qu'ont présenté ces deux groupes. La compétition avec les entreprises privées pour le recrutement, le rendement des investissements -- si c'est de cela qu'il s'agit, très franchement, je préférerais qu'on reprenne tout à zéro.

Mme Homes: Il est tout à fait pertinent de s'interroger sur ce qu'est un enfant, parce que c'est en partie ce qui brouille les cartes. Les lois internationales ne peuvent que dire si quelqu'un est un enfant ou non. L'un des groupes les plus vulnérables, lorsqu'il y a recrutement de force des enfants pour en faire des soldats, est celui des adolescents. Dans le contexte canadien, nous parlons de jeunes de 16 et 17 ans. La loi nous oblige à les inclure sous la rubrique des «enfants soldats». C'est un langage complexe.

La Convention relative aux droits de l'enfant, à l'article 1, définit un enfant comme quelqu'un qui est âgé de moins de 18 ans, à moins que l'âge de la majorité soit autre. Quelqu'un a posé une question sur l'OTAN. En Europe, la norme, pour la majorité est de 18 ans. Elle s'applique à toutes sortes de choses, comme le droit de vote, et cetera. À l'âge de 16 ans, on peut posséder une arme dangereuse, une voiture. En Ontario, ce n'est plus aussi facile. Ils ont institué un système selon lequel cette arme particulière ne peut être entièrement la propriété des jeunes pendant un certain temps. Ils penchent maintenant de l'autre côté et remettent tout en question. C'est un sujet auquel il vaut vraiment la peine de bien réfléchir.

L'autre chose qui a été mentionnée est la terminologie utilisée, à propos des forces armées comme employeur. Il y a sûrement matière à réflexion, parce que la publicité dit bien «Si la vie vous intéresse». Il y a un certain degré de risque, à tel point que l'Organisation internationale du Travail a déclaré que si un enfant est forcé à devenir soldat, c'est un type d'emploi dangereux dans n'importe quel pays. Nous ne devons pas l'oublier.

Ces jeunes gens veulent trouver un sens à leur vie. Sur le plan personnel, je peux très bien le comprendre. Je consacre beaucoup de temps à amener les jeunes à prendre eux-mêmes le contrôle de leur vie. Il y a une énorme différence entre se joindre à un club, comme Amnistie, en dehors de ses activités courantes, et s'engager dans l'armée. Avec tout le respect que j'éprouve pour ma propre organisation et l'importance de notre rôle dans la société, j'affirme que ce n'est pas la même chose, et il est impératif que nous le reconnaissions.

M. Neve: Je voulais revenir à ce qui préoccupe le sénateur Corbin, comment on pourrait bien arriver à composer avec les actions des groupes d'opposition armés, avec des rebelles meurtriers comme ceux du Sierra Leone? Nous ressentons la même frustration, les mêmes préoccupations. C'est un défi énorme au plan des travaux humanitaires, des travaux de secours et des droits de la personne que de trouver des moyens de faire assumer leurs responsabilités à des groupes comme ceux-là, mais nous comprenons de mieux en mieux dans quelle mesure, dans de nombreux pays du globe, ce sont des violateurs des droits de la personne à très grande échelle. La seule réponse que nous ayons est que c'est incrémentiel. Comme d'autres l'ont déjà dit, ce genre de mesures ne peut pas faire que, du jour au lendemain, la FARC ou d'autres groupes du même genre acceptent soudainement de ne plus recruter de jeunes âgés de moins de 18 ans. Cependant, on peut observer dans les lois de la guerre et dans les travaux de la Croix Rouge, avec les Conventions de Genève, une lente progression vers la formulation de dispositions qui permettent de composer et, nous l'espérons, de réglementer les actes de groupes non gouvernementaux. Il y a des progrès, bien qu'ils soient lents. Certains groupes, par exemple au Soudan, se montrent disposés de temps en temps à participer à ces discussions, à prendre des engagements. Le fait que nous ayons des documents internationaux qui traitent des obligations des acteurs non gouvernementaux est, en soi, un progrès phénoménal, puisque cela n'existait pas il y a 15 ou 20 ans. Nous formulons des normes dans le domaine, nous déterminons les bonnes pratiques et nous allons doucement vers un monde où les droits de la personne seront réellement protégés. C'est très souvent un processus lent et graduel, mais les lois et des mesures du genre sont la seule façon d'y parvenir.

Le sénateur Andreychuk: Merci, monsieur Neve, d'avoir abordé les questions que je comptais soulever. La distinction entre les groupes armés et les pouvoirs légitimes de n'importe quel pays dépend souvent de qui s'est emparé du pouvoir en premier; alors que doit-on faire? Avez-vous plus de respectabilité parce que vous avez été consacré et avez obtenu l'appui international, ou vous êtes-vous caché pour devenir un vilain? C'est là qu'est la clé. Ce n'est pas tellement un problème au Canada. J'ai confiance que nous agissons comme nous le faisons pour de bonnes raisons. Peut-être nous trompons-nous sur leur compte.

Nous devons reformuler ce que nous disons. Le fait d'entraîner des gens et de les discipliner à 16 et 17 ans en vue d'une carrière dans les forces armées me semble valable, mais si c'est dans un but de concurrence et pour essayer d'en faire une profession égale aux autres, j'aurais des inquiétudes.

Est-ce que ce que vous dites, c'est qu'en raison des conflits que connaissent ces pays du globe dans lesquels nous nous laissons embarquer -- par le biais de l'aide humanitaire, des opérations de maintien de la paix et tout cela -- nous devons collaborer avec tout le monde? Dites-vous que nous devons appuyer ceux qui ont le pouvoir et ceux qui ne l'ont plus, et aussi ceux qui tentent de s'en emparer, et qu'il aurait mieux valu pour le gouvernement canadien diffuser un message clair que l'âge adulte est à 18 ans, et nous en tenir à ce que dit la Convention? J'admets que c'était arbitraire. On aurait pu dire 19 ans ou 17 ans. Nous avions un message sur lequel nous pouvions faire fond. Il semble maintenant que nous fassions marche arrière -- pour d'excellentes raisons, comme le disait le sénateur Pearson -- pour tenter d'arriver à un consensus. Nous réduisons la norme à laquelle nous avions consenti en 1989, et ce n'est pas le bon signal à donner, parce que maintenant, d'autres trouveront de bonnes raisons de s'abstenir de participer au protocole facultatif ou à la Convention, ou de la réinterpréter de façon créative. Est-ce que c'est ce qui vous inquiète?

Mme Vandergrift: Précisément. Lorsque des seigneurs de guerre deviennent des chefs d'État, les différences ne sont plus très nettes, de nos jours. Nous traitons avec les deux parties, et nous serons plus efficaces si nous avons une position ferme et constante.

Le sénateur Di Nino: Pour l'entraînement de tueurs, je pense encore que des jeunes de 16 et 17 ans sont des enfants, même à 18 ans. Très franchement, je pense que ce que vous demandez, c'est en quelque sorte une toute petite mesure qui a une grande valeur symbolique. Est-ce que c'est bien ce dont il s'agit?

Mme Vandergrift: Il n'y en a pas beaucoup, et il y a un autre moyen.

Le président: Je vous remercie de votre précieux témoignage. J'aimerais maintenant inviter les membres du comité à faire l'étude du projet de loi S-18, la loi modifiant la Loi sur la défense nationale.

Le sénateur Di Nino: Quelqu'un a proposé un bon moyen de régler cela. Je ne sais pas ce que fait la Norvège, mais est-ce que cela ne vaudrait-il pas la peine d'attendre d'avoir cette information, et ainsi nous pourrions formuler les choses d'une manière qui satisfasse le gouvernement et, peut-être, aussi les ONG?

Le sénateur Pearson: Rien que d'être parvenus à amener la Défense nationale jusque là a été un exploit. Je suis sûre que vous avez raison, sénateur, le gouvernement avait déjà donné son avis là-dessus. S'il avait vraiment été adopté et qu'il avait fallu obtenir le consentement de tout le monde, ça aurait été très difficile. Nous pouvons sembler avoir fait marche arrière, mais je ne pense pas que ce soit vrai. Nous avons été de l'avant. C'est mon opinion, après environ quatre ans de participation au débat. À mon avis, il serait bon de laisser le dossier ouvert, mais ce serait très difficile d'amender cette loi sans perdre du terrain. Vous pourriez le mentionner dans votre rapport. Je n'ai pas droit de vote aujourd'hui, de toute façon.

Le président: Mais oui, vous pouvez voter, sénateur. Normalement, quelqu'un qui présente un projet de loi est fait membre du comité.

Le sénateur Pearson: Très bien. Je m'intéresse au fondement du problème depuis longtemps, et j'en saisis tous les aspects. Je détestais l'idée que de très jeunes enfants soient mêlés à des conflits armés. Cependant, comme d'autres, je suis un peu embrouillée sur la question de l'adolescence. Je sais que bien des enfants n'aiment pas être traités comme s'ils ne valaient rien. Si leur famille est attaquée, ils n'ont pas le droit de la protéger. Je crois que tout cela est très difficile pour les jeunes. J'ai décidé que je me contenterais de ne pas les mêler aux hostilités avant l'âge de 18 ans, parce que s'ils n'ont pas le droit de vote, le gouvernement n'a aucun droit de les envoyer se faire tuer.

Le recrutement volontaire ne me pose pas le même problème. Le raisonnement qui s'oppose au recrutement volontaire doit être examiné à la lumière de notre rôle sur le reste de la planète. Ça n'a rien à voir avec le contexte du Canada. J'aimerais que nous adoptions cet amendement en particulier, qui donne force de loi à ce qui est déjà en pratique, puis passer à l'autre aspect de la question et voir si cela fait une différence, si l'autre question a autant d'importance. Je ne me fais pas très bien comprendre.

Le sénateur Di Nino: Pourquoi tellement nous presser?

Le président: Vous vous faites très bien comprendre, sénateur. Étant donné que c'est vous qui proposez cet amendement, il me semble, si on veut être réalistes, que ceci est une politique du ministère de la Défense nationale et que le changement à la Loi sur la défense nationale lui donne force de loi et le fait entrer en vigueur.

Le sénateur Pearson: Il est essentiel que nous adoptions le protocole.

Le président: Aucun de nous n'apprécie le concept des enfants soldats, et nous comprenons très bien les arguments des témoins, du moins moi, je les comprends. En tant que président, je vous invite maintenant à poursuivre avec l'étude article par article du projet de loi S-18, la loi modifiant la Loi sur la Défense nationale.

Le sénateur Grafstein: Peut-être notre conseiller juridique a-t-il une réponse à donner. Je n'ai pas très bien compris le lien entre le protocole facultatif et ce projet de loi. C'est important, parce que nous examinons les deux aspects de l'équation, c'est-à-dire qu'il nous faut le protocole facultatif pour avoir le projet de loi, ou il nous faut le projet de loi pour avoir le protocole facultatif.

Le sénateur Pearson: Non. Il nous faut la loi qui est proposée pour pouvoir signer le protocole facultatif.

Le sénateur Grafstein: Pourquoi? Nous n'avons jamais procédé ainsi. Nous faisons un traité, puis il entre en vigueur par le biais de la loi.

M. David Goetz, attaché de recherche, Bibliothèque du Parlement: C'est une question sur laquelle des gens très raisonnables peuvent avoir des avis différents. Le protocole facultatif force les États à prendre toutes les mesures possibles. J'ai entendu un témoin dire que nous faisons tout ce qui est possible dans une certaine mesure.

Le sénateur Grafstein: Mon intention n'est pas de m'y opposer. Je suis prêt à approuver ce projet de loi. J'ai entendu deux points de vue différents, et cela me trouble. Selon le premier, nous appliquons la loi proposée qui ne répond pas à l'objectif que viennent d'exposer les derniers témoins. Par conséquent, nous nous retrouvons dans une position où nous prônons des normes peut-être plus élevées pour nous dans un protocole, tout en ayant fait entre en vigueur une loi qui, de fait, renferme des normes moins élevées. C'est là que c'est embrouillé. Je ne peux pas me rappeler que ce genre de chose soit jamais arrivé à ce comité. L'exécutif exerce son droit de s'engager dans un protocole, un traité, une convention, une norme internationale ou quoi que ce soit d'autre, et ensuite, en signant ou en ratifiant le document, il doit adopter des lois connexes. Où nous situons-nous là-dedans?

Le président: Actuellement, l'exécutif, le Cabinet, adhère à des protocoles et ce genre d'accords, mais s'il est nécessaire d'effectuer des changements aux lois du Parlement, comme dans ce cas-ci, le Parlement fait ces changements, ce que nous faisons actuellement avec la Loi sur la Défense nationale.

Le sénateur Andreychuk: L'exécutif peut signer un protocole, puis s'efforcer d'adhérer aux normes qu'il contient, mais s'il ratifie le protocole et n'en respecte pas les normes, il viole le protocole. Généralement, il préfère avoir la loi habilitante en place avant la ratification. Est-ce que le protocole doit être signé? J'ai cru comprendre qu'il le fallait.

Le sénateur Pearson: C'est ça, la ratification.

Le sénateur Andreychuk: Pourtant, le protocole établit une norme qui correspond à notre politique mais est supérieure à notre loi.

Le sénateur Grafstein: Est-ce que cela suffit alors pour présumer que nous avons ratifié le protocole?

Le sénateur Andreychuk: L'exécutif ne l'a pas encore ratifié.

Le président: Est-ce que nous pouvons entamer l'étude article par article du projet de loi S-18, la Loi modifiant la loi sur la Défense nationale (non-déploiement des personnes de moins de 18 ans sur les théâtres d'hostilités)? L'honorable sénateur Pearson propose que le comité fasse l'étude article par article du projet de loi S-18. Le titre demeure-t-il tel quel?

Des voix: D'accord.

Le président: Adopté. L'article 1 est-il adopté?

Des voix: D'accord.

Le président: Adopté. Le titre est-il adopté?

Des voix: D'accord.

Le président: Adopté. Le projet de loi est-il adopté?

Des voix: D'accord.

Le président: Adopté. Puis-je faire rapport au Sénat du projet de loi S-18 non modifié?

Le sénateur Di Nino: Avec dissidence. J'aimerais voir s'il y a moyen d'intégrer des suggestions au projet de loi. Si vous ne voulez pas l'amender, ça va. Je sympathise avec le sénateur. J'aimerais voir ce que font d'autres pays, que nous pourrions peut-être recommander à la Défense nationale. Peut-être y a-t-il un autre terme, pour que ces jeunes ne soient pas considérées des recrues, mais que le résultat soit le même. Je n'ai pas suffisamment examiné le projet de loi pour en faire une recommandation.

Le sénateur Andreychuk: Pour l'avenir, j'aimerais préciser qu'à d'autres comités auxquels je siège, nous prévoyons une soirée de réflexion, parce qu'on entend des témoignages, on peut être séduits par certains points de vue, puis on est déchirés par l'obligation de prendre immédiatement une décision. Par souci d'équité pour les témoins et pour qu'on ait la possibilité de pondérer tous les témoignages, cette pause d'une soirée est très utile, à moins qu'il y ait vraiment urgence et que ça ne puisse pas attendre un jour de plus. À l'avenir, si nous pouvions procéder ainsi, cela nous permettrait de réfléchir à nos arguments et de bien les soupeser. Nous avons fait ainsi parce que nous étions toujours obligés d'adopter les propositions avec dissidence, pour laisser les choix ouverts. Je vous le propose pour l'avenir, ainsi, ça réglerait le problème.

Le sénateur Corbin: J'aurais aimé que vous disiez cela avant que les questions soient posées.

Le sénateur Bolduc: Ce n'est pas que je ne suis pas d'accord avec ce que vient de dire ma collègue. Il est vrai que nous ne devrions pas envoyer sur le théâtre d'hostilités des jeunes âgés de moins de 18 ans. Devrait-il y avoir une politique de recrutement des jeunes de moins de 18 ans? Je suis aussi d'accord avec cela. C'est une bonne chose que l'on puisse entrer au collège militaire à l'âge de 17 ans. Nous verrons bien ensuite comment nous organiser pour qu'ils n'aient pas le titre de soldats. Il s'agit seulement de définir le régime de pension, les avantages sociaux, et ce genre de détails. Par contre, je ne vois pas comment on peut le faire dans le projet de loi lui-même.

Le président: Nous avons adopté le projet de loi avec dissidence, et je le présenterai à la Chambre. Je réfléchirai sérieusement au conseil du sénateur Andreychuk. La séance est levée.

La séance est levée.


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