Aller au contenu
 

Délibérations du comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles

Fascicule 1 - Témoignages du 22 mars 2001


OTTAWA, le jeudi 22 mars 2001

Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd'hui à 9 h 15 pour étudier les questions qui pourraient survenir occasionnellement se rapportant à l'énergie, à l'environnement et aux ressources naturelles en général, notamment la sécurité des réacteurs nucléaires (politique de l'eau).

Le sénateur Nicholas W. Taylor (président) occupe le fauteuil.

Le président: Honorables sénateurs, le comité étudie actuellement la politique canadienne de l'eau, s'il en est, le mandat du gouvernement fédéral concernant cette ressource naturelle, les ressources fédérales-provinciales, la gestion de l'eau potable, les exportations d'eau en vrac, le traitement de l'eau en tant que denrée et d'autres questions pertinentes. Nos premiers témoins sont des représentants d'Environnement Canada.

Je vous cède la parole.

Mme Jennifer Moore, directrice générale, Écosystèmes et ressources environnementales, Service de la conservation de l'environnement: Monsieur le président, je vous présente, immédiatement à ma gauche, Mme Cynthia Wright, directrice générale, Direction générale des politiques stratégiques à notre Service de la protection de l'environnement. À ma droite, M. Mike Wong, qui est l'un des spécialistes des lignes directrices de notre ministère.

Le président: Comme vous le savez, tout le monde est libre d'intervenir au sein de nos comités. Vous verrez comment nous procéderons une fois que vous aurez fait votre exposé. Quand vous aurez terminé, nous vous poserons méthodiquement certaines questions. Notre comité n'est pas un comité antagoniste; ce que nous voulons, c'est obtenir de l'information.

Mme Moore: Je vais faire ressortir certains points saillants, donner quelques commentaires, après quoi nous nous ferons un plaisir de répondre aux questions des membres du comité.

Nous sommes heureux d'être ici ce matin au nom d'Environnement Canada et du gouvernement du Canada. Je remercie le président et le greffier de nous avoir invités.

La gestion de l'eau au Canada est une question stratégique complexe et multidimensionnelle. Les Canadiens et Canadiennes sont de plus en plus préoccupés par la salubrité et la viabilité de nos ressources hydriques, plus particulièrement de la sécurité de notre eau potable et de la protection de notre alimentation en eau, comme en témoignent les médias presque tous les jours.

Partout au pays, les gouvernements tentent de répondre à ces préoccupations en organisant des consultations publiques et en adoptant des mécanismes, des règlements, des politiques et des stratégies. On s'intéresse suffisamment à la qualité de l'eau actuellement pour nous permettre de tirer vraiment parti des expériences des autres et de travailler ensemble à trouver une solution globale.

Vous savez peut-être qu'aujourd'hui, 22 mars, c'est la Journée mondiale de l'eau, la date idéale pour amorcer vos discussions. La Journée mondiale de l'eau a été créée par les Nations Unies au début des années 90. Le thème de cette année est «L'eau et la santé». Là encore, ce thème rejoint particulièrement nos réflexions actuelles. Le thème de la Journée mondiale de l'eau nous fournit matière à réflexion, tant à l'échelle nationale qu'internationale.

À l'échelle internationale, l'eau est considérée comme l'un des grands défis environnementaux du XXIe siècle. Les statistiques et les données provenant des nombreux organismes internationaux nous indiquent que plus d'un milliard de personnes n'ont pas accès à une eau potable propre et salubre.

Cinquante pour cent de la population n'a pas les conditions sanitaires nécessaires pour répondre à ses propres besoins. À l'échelle mondiale, environ cinq millions de personnes meurent chaque année de maladies qui sont directement liées à des pathogènes d'origine hydrique. En un sens, l'eau figure parmi le cancer et d'autres problèmes de santé qui touchent l'ensemble des citoyens et des citoyennes. La Journée mondiale de l'eau permet de réfléchir à ces choses.

Sur un autre plan, les conflits autour de l'eau sont de plus en plus connus et concernent en grande partie les questions de salubrité et de protection de l'environnement.

Mais où le Canada se situe-t-il dans tout cela? Le Canada fournit 9 p. 100 du renouvellement de l'approvisionnement en eau douce de la surface du globe. Il vient après le Brésil, qui en fournit 18 p. 100, la Chine, également 9 p. 100, et les États-Unis, 8 p. 100. S'agissant de l'approvisionnement en eau à l'échelle mondiale, le Canada est un grand fournisseur.

Il nous faut réfléchir à certaines questions concernant l'eau au Canada: notre eau est-elle là où nous voulons qu'elle soit? Où s'écoule-t-elle? Effectivement, environ 60 p. 100 de nos cours d'eau coulent vers le nord, c'est-à-dire dans le sens opposé des besoins de la population pour ses activités résidentielles, industrielles, agricoles ou autres. Comme nous le savons tous, la majorité de notre population vit dans un corridor horizontal le long de la frontière méridionale.

Au Canada, nous avons des défis à relever en ce qui concerne la disponibilité de notre propre eau si on regarde ce qui se passe dans les Prairies et ailleurs. Environ 26 p. 100 des Canadiens et Canadiennes comblent leurs besoins quotidiens en eau en puisant dans la nappe phréatique. La nappe phréatique coule sous le sol et alimente ensuite les rivières et les lacs, mais c'est la source où nos puits vont extraire l'eau potable. Certaines régions du pays comme l'Île-du-Prince-Édouard, le Nouveau-Brunswick, la Saskatchewan et le sud de l'Ontario dépendent beaucoup de la nappe phréatique. Sur le plan de la politique gouvernementale, nous nous intéressons de plus en plus à cette situation.

Sur le plan mondial, nous sommes de grands consommateurs d'eau. Selon les dernières statistiques, publiées au printemps 2000 dans un rapport de l'OCDE, les ménages canadiens utilisent environ 326 litres d'eau par jour. Ils se classent ainsi après les États-Unis. Nous sommes les deuxièmes consommateurs d'eau les plus avides par tête d'habitant de tous les pays du monde, soit environ le double de la moyenne européenne et dans des ordres de grandeur beaucoup plus élevés que dans bien d'autres pays.

Monsieur le président, dans vos observations liminaires, vous avez dit que le comité est en partie intéressé par la gouvernance et la gestion de l'eau. À notre avis, nous avons tous un rôle à jouer à cet égard.

D'après notre constitution, ce sont les provinces qui sont responsables de la gestion de l'eau. Elles sont responsables de la gestion quotidienne et à long terme de l'eau, y compris des infrastructures, de la qualité de l'eau, de l'utilisation que l'on en fait et des permis à cet égard. Au fur et à mesure que le processus de dévolution s'intensifie dans les territoires du Nord, on constate que ces territoires acquièrent certaines responsabilités de type provincial en matière de gestion de l'eau.

Les gouvernements provinciaux délèguent certaines responsabilités aux municipalités. Elles doivent fournir des services d'eau potable et de gestions des eaux usées. Elles ont un rôle très important dans la gestion de l'eau comme l'établissement de politiques de planification de l'utilisation des terres, ce qui a des répercussions certaines sur la politique régissant la nappe phréatique et les eaux de surface.

Le gouvernement fédéral exerce une influence considérable dans ce réseau de gouvernance. Effectivement, dans toute la structure organisationnelle du gouvernement fédéral, 14 ministères distincts assument des responsabilités en matière d'eau. Des responsabilités directes qui touchent les terres fédérales, les réserves, le Nord pour l'instant, le domaine international, les eaux limitrophes, les pêches et la navigation. Nous jouons un rôle de leadership dans le domaine de la recherche sur les systèmes aquatiques, sur l'impact des contaminants et des toxines, et sur les pratiques d'utilisation des terres. Nous partageons certaines responsabilités avec les provinces dans les domaines de l'agriculture et de la santé. En outre, il nous faut nous occuper des individus et des peuples autochtones. Voilà ce qui constitue notre structure de gouvernance en matière d'eau.

Le dernier discours du Trône nous informe sur les principales initiatives fédérales dans le domaine de l'eau. Le gouvernement du Canada a fait part de son engagement à protéger les Canadiens et Canadiennes contre les contaminants et les substances toxiques, et a mentionné qu'il pourrait jouer un rôle de leadership en établissant des lignes directrices sur la qualité de l'eau, investir dans la R-D et créer des systèmes informatiques avancés.

Le gouvernement fédéral, de concert avec les provinces, a annoncé récemment qu'il allait renouveler les infrastructures. C'est ce que dit le budget de février 2000. Nous avons annoncé des fonds de plus de 2 milliards de dollars pour les programmes d'infrastructures. Les provinces et les municipalités devront faire leur part. Une partie de cet argent sera consacrée au renouvellement des infrastructures de gestion de l'eau et des eaux usées.

Dans le budget, le gouvernement a également annoncé qu'un accord de contribution a été conclu avec la Fédération canadienne des municipalités dans le but de consentir des prêts aux municipalités afin d'améliorer et d'établir des pratiques nouvelles et innovatrices concernant la qualité de l'air et de l'eau, et d'assurer une utilisation rationnelle de l'eau. Dans le cadre du programme d'infrastructures, le Conseil national de recherche, dans son domaine, prépare actuellement un guide national des infrastructures municipales durables: innovations et pratiques exemplaires. Ce guide aidera les municipalités et d'autres intervenants à planifier leurs investissements et à prendre des décisions dans leur choix des technologies les plus efficaces et les plus récentes dans le domaine du traitement de l'eau. Il s'agit des quelques dernières initiatives en matière d'infrastructures.

Le gouvernement fédéral travaille également à élaborer des lignes directrices. En général, ce sont les provinces et les territoires qui appliquent les lignes directrices, mais nous travaillons au sein d'un réseau fédéral-provincial pour créer des lignes directrices sur la qualité de l'eau potable, des lignes directrices visant davantage la protection de l'alimentation en eau, par l'entremise du Conseil canadien des ministres de l'Environnement. Il s'agit d'un vaste réseau fédéral-provincial- territorial sur l'élaboration de lignes directrices.

En ce qui concerne la recherche sur l'eau, l'Institut national de recherche sur les eaux à Environnement Canada est notre principale source de données scientifiques sur la qualité de l'eau au Canada. Les recherches actuelles et continues portent sur les répercussions de l'utilisation des terres sur les écosystèmes aquatiques, les changements climatiques et les ressources en eau douce, la gestion des eaux urbaines et l'évaluation de la santé des écosystèmes. Parmi les autres priorités, mentionnons la recherche sur les nutrients, les effluents d'eaux usées dans les municipalités, etc. L'Institut compte environ 320 scientifiques renommés dans le monde entier dans plusieurs domaines concernant la recherche sur l'eau douce.

Il existe également plusieurs mesures législatives fédérales sur l'eau. Selon Environnement Canada, les principaux règlements découlent des dispositions sur la prévention de la pollution et la gestion des déchets toxiques de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement et de l'application de l'article 36 de la Loi sur les pêches. Nous donnons également des lignes directrices scientifiques et techniques par le truchement de la Loi du Traité des eaux limitrophes internationales, qui est appliquée par le ministère des Affaires étrangères.

Le comité a également reçu des notes d'information sur le rôle et les règlements du gouvernement fédéral. J'espère que cela vous donnera une idée de notre cadre législatif fédéral.

Outre les outils législatifs, le gouvernement mène diverses activités axées sur les collectivités. L'une d'elles consiste en une série d'initiatives sur les écosystèmes qui portent surtout sur les Grands Lacs, la région de l'Atlantique, la Colombie-Britannique et le Nord. Nous essayons de trouver des solutions en menant, en collaboration avec les collectivités, une vaste gamme d'activités sur la gestion des eaux.

Monsieur le président, vous avez mentionné dans votre présentation d'ouverture une autre question d'intérêt: les prélèvements massifs d'eau. Jusqu'à maintenant, j'ai surtout parlé de qualité de l'eau, de cet aspect de la gestion de la ressource. Manifestement, la question de l'utilisation et de la demande suscite beaucoup d'intérêt. L'une des dernières initiatives fédérales a été la stratégie de prélèvement de l'eau en vrac annoncée par le ministre de l'Environnement et le ministre des Affaires étrangères en 1999. Cette stratégie comprend trois grands éléments. Nous avons élaboré une stratégie environnementale qui est conforme aux exigences commerciales, respecte les responsabilités des provinces et territoires et prévoit des modifications à la Loi sur le Traité des eaux limitrophes internationales. Ces modifications ont été déposées à nouveau le mois dernier à la Chambre des communes et visent à interdire les prélèvements massifs d'eau dans la région des Grands Lacs, un des principaux bassins visés par la loi. Il y a également des dispositions sur la délivrance des permis pour d'autres cours d'eau.

En ce qui concerne les prélèvements d'eau en vrac, une loi visant à renforcer notre politique nationale interdisant cette pratique est en train de faire son chemin. En outre, compte tenu de l'intérêt accru pour comprendre nos écosystèmes et assumer nos responsabilités, nous avons demandé à la Commission mixte internationale d'examiner les effets du prélèvement des eaux limitrophes et de leur utilisation à d'autres fins. Il y a un an, la Commission a publié un rapport, que je vais laisser au comité, sur la protection des eaux des Grands Lacs, un bassin hydrographique d'une extrême importance. Ce rapport a reçu l'approbation du public et les gouvernements du Canada et des États-Unis l'étudient actuellement.

Outre les travaux sur la question des prélèvements d'eau en vrac, la collaboration à l'échelle fédérale, provinciale et territoriale se poursuit à d'autres niveaux. Quand on pense à la gouvernance de l'eau au Canada, il s'agit en réalité d'une gouvernance qui se fait à plusieurs échelons différents. Par le truchement du Conseil canadien des ministres de l'Environnement, nous avons élaboré des stratégies sur les prélèvements massifs d'eau et nous recherchons actuellement des intérêts communs, surtout dans les domaines de la recherche, des lignes directrices et de la surveillance.

Honorables sénateurs, mon exposé avait pour but de vous donner un aperçu de la question de l'eau et de sa gestion en matière d'approvisionnement, de vous présenter la position du Canada à l'échelle mondiale, de souligner quelques grandes préoccupations universelles et de vous sensibiliser à la formation et à la structure de nos systèmes de gestion de l'eau au Canada. Je vais m'arrêter ici et tenter de répondre à vos questions.

Le sénateur Spivak: J'aimerais poser trois questions. Pourquoi, au Canada, n'avons-nous que des lignes directrices alors que les États-Unis se sont dotés d'une politique nationale de l'eau qui est une loi? Ils ont une loi, nous n'avons que des lignes directrices. L'un des grands problèmes concernant nos lois, c'est leur application au niveau provincial. Je pense en particulier à notre code national de sécurité des transports qui existe depuis 1988. Seulement deux dispositions des 16 articles du code sont appliquées par toutes les provinces. L'exécution est très importante.

Ma deuxième question porte sur le rôle du gouvernement fédéral concernant les eaux de ruissellement en agriculture, phénomène qui se produit partout et qui est une source majeure de pollution de l'eau au Québec. Le problème s'aggrave encore plus à cause des grosses porcheries qu'on y exploite.

L'exploitation forestière est un autre problème. Nos bassins hydrographiques sont très souvent boisés. Là encore, on revient à la question de l'exécution. Un comité du Sénat a produit un rapport sur la forêt boréale. Nous en avons beaucoup appris sur la question. À cet égard, le gouvernement fédéral a effectivement des moyens d'intervenir. Vous avez parlé de la navigation et des pêches.

Ma troisième question concerne l'exportation de l'eau en vrac. Je sais qu'on est en train d'adopter une loi, et j'ai lu diverses opinions, mais dans tous les autres domaines où l'ALENA devait nous protéger, il y a actuellement de nouvelles négociations qui se font au sein de l'OMC et en regard de la ZLEA. On ne connaît pas vraiment la position du gouvernement là-dessus. Pouvez-vous nous donner la position du gouvernement sur l'exportation d'eau en vrac dans ces négociations, que nous n'avons pas eu encore la chance d'examiner?

Mme Moore: Dans votre première question, vous vouliez savoir pourquoi les lignes directrices canadiennes ne font pas l'objet d'une loi comme c'est le cas aux États-Unis.

Les États-Unis ont leur Clean Water Act. La Constitution américaine est assez différente de la nôtre. Du point de vue des responsabilités fédérales, au Canada, nous devons fournir les données scientifiques et les connaissances qui sont utilisées pour préparer les lignes directrices. En ce qui concerne les lignes directrices sur la qualité de l'eau potable, Santé Canada assure la coordination de toute cette structure de comités qui rédige les lignes directrices sur ce sujet. Il appartient ensuite aux provinces de les appliquer. Il y a toute une gamme de lignes directrices, mais c'est aux provinces d'en faire des lois. Certaines provinces l'ont fait, d'autres pas. En gros, c'est ainsi que les choses fonctionnent au Canada. Le gouvernement fédéral joue un rôle de leadership dans le domaine de la science et de la rédaction des lignes directrices.

La différence repose dans nos pouvoirs constitutionnels. Je ne suis pas une spécialiste constitutionnelle, et si vous voulez vraiment examiner la question, quelqu'un d'autre devra venir témoigner.

Le sénateur Spivak: J'aimerais bien connaître ces pouvoirs constitutionnels.

Le sénateur Kenny: On a trop souvent été en mesure de constater que même lorsque nous avons des lois, nous n'avons pas les moyens de les faire appliquer. Les lois semblent merveilleuses, mais personne ne vérifie quoi que ce soit. Si quelqu'un doit venir nous entretenir de l'aspect constitutionnel de la question, peut-être que cet expert devrait nous dire combien de personnes ont le pouvoir de faire respecter les lois.

Le sénateur Spivak: Si quelqu'un vient nous parler de cette question, j'aimerais qu'elle porte une attention particulière à la LCPE utilisée comme outil d'exécution. Nous étions supposés entendre à nouveau le ministre, de toute façon.

Le président: Le sénateur Spivak a fait remarquer que la pollution et les ruissellements en surface, qui ne proviennent pas seulement de l'agriculture mais de petites villes qui ne traitent pas leurs eaux usées comme il se doit, peuvent traverser les frontières provinciales. Est-ce que cela relève de vos compétences? C'est bien beau de dire que la province est responsable de l'eau potable, mais il y a des cas où la couche aquifère et les eaux de surface traversent les frontières provinciales. Lorsqu'un problème de gaz naturel ou de pétrole se présente, nous intervenons simplement et exerçons le pouvoir fédéral, mais quelle est la procédure pour l'eau douce?

Mme Moore: Je vais demander à Mme Wright de vous expliquer la LCPE.

Pour ce qui est des frontières provinciales, nous n'avons pas mentionné la gestion intégrée de l'eau. Au Canada, il y a beaucoup d'organismes qui se penchent sur la question de l'eau en général. La Commission des eaux des provinces des Prairies en est un exemple. Elle examine les écosystèmes qui ne respectent pas les frontières politiques des provinces. C'est une façon de transmettre des connaissances et de s'assurer que les provinces en amont et en aval sont protégées grâce à notre gestion collective de l'eau. Essentiellement, nous assurons la gestion de l'eau en nous partageant les rôles et les responsabilités.

Le président: Vous dites que l'Administration du rétablissement agricole des Prairies (ARAP) et les administrations communes, surtout dans l'Ouest, que le gouvernement fédéral a créées dans les années 30, étaient le fruit de la collaboration, qu'elles n'ont pas été imposées aux provinces par le gouvernement fédéral?

Mme Moore: Ces organismes collaborent maintenant pour traiter des questions et des enjeux que nous étudions actuellement. L'ARAP et la Commission de protection des eaux des provinces des Prairies examinent le bassin du Mackenzie où les Autochtones ont des pouvoirs de représentation de même que les gouvernements territoriaux et provinciaux. Je dis qu'en tant que mécanisme de gestion intégrée du bassin hydrographique, ces entités essaient d'amener les provinces à examiner les règles, les règlements et les politiques, ainsi que les besoins relatifs au bassin hydrographique dans cette perspective plus large.

Mme Cynthia Wright, directrice générale, Priorités stratégiques, Service de protection de l'environnement, Environnement Canada: J'aimerais peut-être ajouter certains détails aux observations de ma collègue, surtout en ce qui concerne la Loi canadienne sur la protection de l'environnement.

Votre question portait sur l'encadrement des lignes directrices dans une loi. Notre approche, en général, est que les lignes directrices influent sur les normes qui régissent l'eau. La Loi canadienne sur la protection de l'environnement nous permet de gérer des substances que l'on appelle des toxines, et nous devons prouver qu'une substance est toxique en vertu de la loi.

Nous examinons toutes sortes de substances présentes dans l'eau. Ainsi, nous protégeons les sources hydriques et préservons une bonne qualité de l'eau potable ou une qualité de l'eau pour différents usages. Cependant, la LCPE nous astreint à nous fonder sur des données scientifiques pour déclarer une substance toxique. Après, nous adoptons des mesures de contrôle, lesquelles peuvent nécessiter un règlement et des mesures d'exécution. La nouvelle Loi canadienne sur la protection de l'environnement nous fournit également un certain nombre d'autres outils pour atteindre ces objectifs.

Notre budget d'exécution a été augmenté dernièrement. Nos ressources seront accrues de 50 p. 100 de ce que nous recevions avant que la LCPE ne soit modifiée en 1999. Peut-être voudrez-vous examiner cette question plus en détail.

Le sénateur Kenny: Cinquante pour cent de zéro, ça donne toujours zéro.

Mme Wright: C'est un peu plus élevé que zéro. Nous allons quand même doubler le nombre d'agents d'exécution au cours des quatre à cinq prochaines années.

Le sénateur Kenny: Dites-nous ce que vous allez doubler.

Mme Wright: Pour l'inspection et l'exécution, je crois qu'il s'agit d'environ 80 personnes. Je n'ai pas le chiffre exact.

Le président: La deuxième question qu'a posée le sénateur Spivak concernait l'exploitation forestière et les bassins hydrographiques.

Mme Moore: En ce qui concerne le rôle du gouvernement fédéral sur les pratiques régissant l'utilisation des terres dans les secteurs de l'agriculture et de la foresterie, nous faisons passablement de recherche pour comprendre les effets des activités sur les bassins hydrographiques ainsi que sur les espèces qui vivent sur la terre, dans les airs et sous l'eau. Là encore, le rôle du gouvernement fédéral se limite à la recherche.

Pour ce qui est de la question du ruissellement des eaux provenant de l'agriculture, je vais en référer à nos collègues d'Agriculture Canada; mais là encore, le cadre qui nous permet d'aborder ces questions est de plus en plus centré sur le travail de collaboration avec les provinces pour élaborer des plans environnementaux.

Pour ce qui est des outils du gouvernement fédéral, nous avons parlé aujourd'hui de la LCPE et de certains de ces liens. C'est ainsi que je décrirais l'influence du gouvernement fédéral. Une influence dans le domaine de la recherche et de la science.

La troisième question concerne l'exportation de l'eau en vrac et la position du gouvernement fédéral dans les négociations. Notre stratégie fédérale sur les prélèvements d'eau en vrac a été établie en se fondant sur le fait que nous voulions concevoir l'eau comme une ressource intégrée à l'écosystème qui l'entoure. Nous assumons que l'eau en vrac dans un bassin versant doit être protégée et nous voulons nous assurer d'avoir un cadre qui délimitera les paramètres permettant d'aborder la question de l'eau à sa source.

Nous avons présenté notre politique sur les prélèvements massifs d'eau en 1999. Compte tenu de l'approche constitutionnelle du gouvernement fédéral en matière de gestion de l'eau, pratiquement toutes les provinces ont établi des stratégies interdisant le transfert de l'eau d'un bassin fluvial à un autre. Comme je l'ai dit, ce sont là des stratégies. Les provinces ont adopté des règlements, des lois et, dans un ou deux cas, des politiques. À l'échelle nationale, l'objectif commun est d'interdire les prélèvements d'eau en vrac.

Le sénateur Banks: Est-ce que cela se limite aux eaux limitrophes?

Mme Moore: La politique concerne l'écoulement d'un bassin à un autre. Il y a six grands bassins de drainage au Canada comme le Pacifique, la Baie d'Hudson, les Grands Lacs et, à l'est, le Saint-Laurent. Nous disposons de mesures de protection qui n'existaient pas il y a deux ans.

En ce qui concerne l'ALENA et les liens avec le commerce, notre approche à l'égard de l'eau est de la traiter comme une ressource et de la protéger comme telle, et pas seulement lorsque c'est intéressant de le faire.

Si vous voulez examiner en détail les accords de l'ALENA, je vous conseillerais de vous adresser aux spécialistes du commerce. Les politiques autres que celles sur l'eau embouteillée ne sont pas mentionnées dans l'ALENA. À l'époque, toutes les parties ont convenu que l'eau ne tombait pas sous la compétence de l'ALENA. Conscients de l'importance de l'eau au Canada et de notre stratégie sur l'eau en vrac, nous nous sommes efforcés d'introduire une interdiction spécifiant que nous n'enlèverons pas d'eau des bassins de drainage parce qu'il est important que l'eau reste dans son aire de drainage originale. Ensuite, nous nous intéressons au cycle hydrologique d'un bassin. Et c'est là-dessus que portent principalement nos politiques.

En ce qui a trait aux modifications à la Loi sur le Traité des eaux limitrophes internationales, qui établit la compétence fédérale sur les eaux limitrophes, nous tentons d'encadrer ces mêmes objectifs dans une loi. Ces modifications sont à l'étude à la Chambre des communes.

Le président: Peut-être pourrions-nous demander à un spécialiste de l'ALENA de venir témoigner sur le transfert de l'eau en vrac parce que nous voudrons certainement examiner la question. Nous pourrions consacrer toute une séance à ce sujet.

Le sénateur Spivak: La question ne relève pas seulement de l'ALENA, mais aussi de la ZLEA et des négociations avec l'OMC. Nous avons besoin de cette information.

Le sénateur Banks: Je crois que vous avez dit qu'il est actuellement interdit, de par la loi, de procéder à des prélèvements d'eau en vrac dans tous nos grands systèmes de drainage. Je suis heureux d'entendre cela parce que je pensais que la disposition était restreinte aux systèmes limitrophes. Je suis très content de savoir qu'une telle interdiction existe.

Le président: Sénateur Banks, peut-être pourrais-je apporter une petite correction. Il n'y a pas de loi qui interdise les prélèvements d'eau, comme l'eau nécessaire pour l'irrigation et ce genre de choses. Les nouvelles lois concernent le transfert d'eau d'un bassin à un autre. On peut prendre de l'eau dans un bassin, mais on ne peut pas la transférer dans un autre, comme de la rivière Saskatchewan Nord à la rivière Red Deer et à la rivière Saskatchewan-Sud.

Le sénateur Spivak: Mais qu'en est-il de l'eau en vrac?

Le sénateur Banks: C'est la question que je veux poser. Le titre de ce document de travail est «Les prélèvements massifs et les exportations d'eau». Je comprends les raisons pour lesquelles nous ne voulons pas interdire l'exportation de l'eau en vrac parce qu'on vient reconnaître que c'est une bonne pratique. Adoptons plutôt une loi qui interdit d'enlever d'importantes quantités d'eau d'un cours d'eau. J'espère que c'est ce que dit la nouvelle loi. Est-ce exact?

Si une société ouvre une usine d'embouteillage dans une quelconque rivière du nord de l'Alberta, j'espère qu'elle sera accusée de transgresser une loi fédérale si elle commence à enlever l'eau de ce cours d'eau et à la vendre. Est-ce bien cela? Je crois que c'est ce que veulent les Canadiens.

Le président: Sénateur Banks, je ne veux pas vous interrompre, mais je crois que nous en sommes venus à la conclusion que toute la question du transfert et du prélèvement de l'eau pourrait faire l'objet d'une autre réunion parce que Mme Moore a admis qu'elle n'est pas une spécialiste juridique et commerciale du domaine. Je pense que votre question n'est pas pertinente pour l'instant, mais qu'elle le sera plus tard. Gardez vos munitions en réserve.

Le sénateur Banks: Je vais donc poser ma question suivante. Le témoin a dit également qu'elle ne voulait peut-être pas aborder cette question, mais j'aimerais avoir son impression. Je crois que nous sommes tous ici préoccupés par la question de l'efficacité. Les problèmes qui concernent l'eau ces derniers temps sont très répandus et constituent des préoccupations légitimes et générales.

On se heurte toujours à la question des compétences. Je crois que le message à retenir des commentaires du président était que lorsque l'on aborde la question des eaux limitrophes, parfois certaines responsabilités devraient être éliminées de la compétence des provinces.

Ma question concerne l'application de mesures qui doivent être prises à la suite de votre recherche. Je suppose que des tensions vont surgir entre le gouvernement fédéral et les provinces -- peut-être entre les provinces elles-mêmes -- lesquelles, en raison des questions bureaucratiques en cause, desserviront l'application efficace de vos résultats de recherche. D'accord? Je constate que mis à part les eaux souterraines, les cours d'eau coulent aussi d'une province à l'autre. Si une ville d'une province gère mal un cours d'eau d'une façon ou d'une autre, que se passera-t-il lorsque ces eaux se déverseront dans la province voisine? Dans quelle mesure le gouvernement fédéral peut-il reconnaître qu'il y a là un problème de caractère national parce qu'il s'agit d'une question interprovinciale?

Peut-être quelqu'un d'autre devrait-il répondre à cette question ultérieurement, mais ces tensions existent-elles vraiment?

Mme Moore: Premièrement, les provinces et les territoires désirent un régime efficace de gestion de l'eau. Les provinces et les territoires sont conscients que les Canadiens veulent améliorer les systèmes et les rendre plus performants.

Les provinces valorisent la recherche. Nous utilisons deux mécanismes à long terme basés sur nos connaissances pour établir des lignes directrices sur la qualité de l'eau potable. Toutes les provinces participent à la création de ces lignes directrices. La collaboration s'accentue dans ces domaines, tant en ce qui concerne ce que nous savons déjà que le travail qui reste à faire.

En ce qui a trait à la protection de la ressource, les intervenants de notre réseau fédéral-provincial-territorial ont intérêt à joindre leurs efforts pour adopter des normes et des lignes directrices environnementales.

Quant à savoir comment les résultats feront l'objet de lois provinciales, cela repose sur la volonté de la province. Les provinces délivrent les permis d'utilisation de l'eau et elles travaillent avec les municipalités.

Je crois que l'un des objectifs de la participation des provinces au Conseil canadien des ministres de l'Environnement est de bénéficier de la recherche qui se fait actuellement, et nous communiquons davantage avec elles à ce sujet. Nous nous acharnons à la mise en place de ce système fonctionnel de gestion de l'eau à la dimension du pays que nous voulons tous avoir.

Les responsables de la recherche ont conçu des mécanismes pour améliorer et renforcer notre base de connaissances et nous assurer que ces connaissances sont transmises aux décideurs, aux Canadiens et aux autres scientifiques.

M. Michael Wong, directeur, Direction générale de la qualité de l'environnement, Environnement Canada: Le Conseil canadien des ministres de l'Environnement dispose d'un processus très efficace pour élaborer des lignes directrices sur la qualité de l'eau. Le processus a été instauré au milieu des années 80 et il a favorisé la publication de documents extrêmement valables qui sont mondialement reconnus comme figurant parmi les meilleurs documents scientifiques sur les lignes directrices touchant la qualité de l'eau. En fait, de nombreux pays s'y réfèrent pour leurs programmes de gestion de l'eau.

La dernière étude indique que plus de 40 pays des Nations Unies utilisent actuellement les lignes directrices canadiennes sur la qualité de l'eau pour leurs programmes de gestion. Je crois que nous avons maîtrisé le processus qui nous permet de produire l'information scientifique nécessaire pour élaborer les lignes directrices.

Le sénateur Banks: Je le crois aussi. Je pense que les Canadiens sont parfois, peut-être à tort, frustrés par le processus, ils se demandent quand il sera mis en <#0139>uvre, quand en verrons-nous les résultats.

Je vais vous poser une question hypothétique, monsieur Wong. Si vous étiez maître à bord, seriez-vous convaincu que l'information scientifique, le processus et les consultations aboutiront à l'application exacte, prudente et opportune de la recherche aux systèmes hydriques du Canada? Si la réponse est oui, je serai extrêmement content.

M. Wong: Mme Moore a mentionné l'apparition de quelques problèmes et irritants menaçant l'eau comme les changements climatiques, les différentes utilisations des terres, les pratiques agricoles et les nouveaux produits chimiques toxiques que l'on retrouve dans l'environnement. Nous avons de grands défis à relever pour effectuer la recherche nécessaire qui nous permettra de concevoir de nouveaux outils de gestion et d'autres lignes directrices, et nous devons accélérer le pas.

Le sénateur Christensen: L'eau est très importante pour tout le monde. Une chose m'inquiète plus particulièrement, cependant.

On parle de «gestion de l'eau». Cela me fait peur. Protéger l'eau, d'accord, mais quand on parle de la gérer, bien des choses peuvent se produire.

Dans un de vos commentaires, vous avez déploré que tous nos cours d'eau au Canada s'écoulent vers le nord. Étant moi-même du Yukon, je pense que c'est une très bonne idée: tous les cours d'eau devraient s'écouler vers le nord. Durant les années 50, les auteurs du projet Frobisher voulaient détourner le fleuve Yukon vers le sud. On avait réservé des terres à cette intention. On ne pouvait pas obtenir de terrains pour des chalets ou rien d'autre parce que tout le fleuve allait couler vers le sud. Heureusement, le projet a avorté.

De quelle mesure législative fédérale de protection nos cours d'eau jouissent-ils si, en fait, la gestion entre dans l'équation? Je ne parle pas de gestion au sens d'empêcher que les cours d'eau s'écoulent dans une certaine direction, mais au sens de les détourner afin qu'ils puissent faire des méandres et qu'ils soient exploités davantage avant de couler vers le nord. Est-ce qu'il existe une loi fédérale ferme à cet égard, ou si on en est encore à l'étape de la politique?

Mme Moore: La décision de dévier des cours d'eau dans les provinces est la seule responsabilité des provinces. Notre stratégie sur les prélèvements massifs d'eau porte sur le transfert d'eau à l'extérieur des bassins, et la déviation d'un cours d'eau dans les bassins hydrographiques entrerait dans cette stratégie. Outre la Loi sur le Traité des eaux limitrophes internationales, qui inclut les cours d'eau internationaux, la Loi sur les ouvrages destinés à l'amélioration des cours d'eau internationaux porte sur les eaux qui viennent dans l'autre direction.

Cependant, la protection est du ressort fédéral. Il faut bien avoir des pratiques régissant la protection de nos bassins hydrographiques. De même, il faudrait bien que les provinces assurent concrètement cette protection en l'encadrant dans des lois et des règlements.

Les recherches que nous faisons afin de mieux comprendre les cours d'eau et la diversion de ces eaux ont un impact important sur les espèces envahissantes et sur bien d'autres choses qui nous inquiètent beaucoup. Avoir une base de connaissances constitue une première étape cruciale pour que nous recevions toute la protection nécessaire.

John Cooper voudra peut-être ajouter quelques éléments de réflexion au sujet des outils nécessaires.

M. John Cooper, directeur, Enjeux hydriques nationaux, Écosystèmes et ressources environnementales, Service de la conservation de l'environnement, Environnement Canada: À l'échelle fédérale, deux mesures législatives sont assez efficaces pour aborder les grands projets de gestion de l'eau: la Loi sur la protection des eaux navigables et la Loi sur les pêches renforcent l'application de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement. Lorsqu'on propose un projet majeur qui pourrait avoir des répercussions sur la navigation ou les pêches, le projet est examiné très attentivement pour déceler s'il menace l'environnement et les collectivités environnantes. Ces deux lois sont des outils de protection.

Les préoccupations soulevées au sujet de l'écoulement des cours d'eau vers le nord ou qui traversent des frontières, et les impacts en aval ont donné lieu à l'adoption de diverses mesures sur les écosystèmes au cours de la dernière décennie. L'Étude sur les bassins des rivières du Nord s'intéressait à l'impact du développement -- pâtes et papiers, mines, etc. -- dans les régions en amont et les parcs provinciaux de l'Alberta et de la Saskatchewan ainsi qu'aux impacts cumulatifs de ces développements plus au nord. Cette étude a donné lieu à l'Initiative des écosystèmes des rivières du Nord, qui poursuivra ce travail pour s'assurer que le développement en amont ne touche pas sérieusement les résidents, les communautés et les écosystèmes du Nord.

Dans la même veine, l'Entente-cadre sur les eaux frontalières du bassin du Mackenzie, conclue avec les Territoires, la Saskatchewan, la Colombie-Britannique, l'Alberta et le gouvernement fédéral porte sur la gestion de ces eaux partagées, dont la plupart se déversent dans le Mackenzie en provenance du sud. L'entente vise à éviter que les impacts en amont aient des effets négatifs sur les communautés en aval.

Le sénateur Christensen: Cela ne me rassure pas tellement parce que ça me paraît être un système de replâtrage. Certains spécialistes internationaux nous disent que nous n'avons que 20 ans pour régler le problème, sinon nous aurons des problèmes encore plus graves. Je me demande si nous en faisons suffisamment.

Le sénateur Watt: Vous savez tous très bien que nos terres dans l'Arctique et la zone subarctique sont recouvertes d'eau ou de neige. Il existe deux problèmes fondamentaux dans ces deux régions. Le premier concerne les eaux de surface qui, bien sûr, n'ont pas de frontières. Elles se déversent d'un lac à un autre. Nous nous retrouvons donc avec un grave problème de pollution toxique qui fluctue à cause du champ magnétique dans l'Arctique.

Le deuxième problème ou facteur résulte des changements climatiques. On a noté des effets concrets depuis trois ans. Les résidus militaires de la guerre froide reposent sur le pergélisol. Le pergélisol commence à fondre ou à s'infiltrer dans les eaux souterraines et dans les systèmes de drainage, pour atteindre ensuite les lacs, ce qui cause toutes sortes de problèmes dans le Nord. Nos gens meurent de cancer.

Je crois que nous faisons face à un problème national. Nous n'avons pas la technologie appropriée actuellement pour vérifier l'eau et les eaux d'infiltration. Nous utilisons encore des produits chimiques comme le chlore pour tuer les bactéries dans notre eau potable. Je crois que le chlore est aussi une substance cancérigène.

Le gouvernement fédéral s'est penché sur les moyens de mieux gérer notre eau. Dans les Territoires du Nord-Ouest, on cherche à intéresser les Autochtones aux conseils de gestion de l'eau. C'est une nouvelle approche. Le gouvernement tente de cerner les connaissances traditionnelles des peuples autochtones pour voir s'il peut les utiliser à bon escient. Parfait, mais il reste encore beaucoup de problèmes. Nous devons trouver une façon de restreindre ces problèmes et d'y trouver des solutions. Sinon, ils s'amplifieront.

Il y a des groupes de personnes qui essaient de se procurer une meilleure eau potable. Ils creusent des puits en profondeur dans le pergélisol pour accéder à l'eau douce. Ces groupes ne sont assujettis à aucune réglementation, ni provinciale, ni fédérale. Ces gens-là agissent de leur propre chef et tentent d'avoir une meilleure eau potable parce que les décès par cancer augmentent à cause du chlore que nous buvons. Ce phénomène s'intensifie depuis trois ans. La plupart des gens meurent du cancer du foie, ce qui veut donc dire qu'il y a un lien quelconque avec ce que l'on consomme.

Est-ce que le gouvernement fédéral est à la recherche d'une solution adéquate pour contrôler et filtrer l'eau potable? Jusqu'à maintenant, personne ne nous a informés si le gouvernement du Canada est en voie de créer un service ou s'il a un service qui se préoccupe de la façon d'améliorer l'eau potable en utilisant la nouvelle technologie. Des technologies sont actuellement mises au point. J'espère que l'on offrira quelque chose bientôt parce qu'on en a vraiment besoin. Pourriez-vous nous dire simplement ce que vous pensez de cette question?

Mme Moore: La recherche et la gouvernance dans le Nord sont de plus en plus marquées. Depuis deux jours, la CBC parle de la conférence qui se tient à Whitehorse sur les changements climatiques. Certains de nos scientifiques et de nos technocrates y assistent. On parle beaucoup des liens et des préoccupations.

Les trois territoires sont impliqués dans la rédaction des lignes directrices sur la politique de l'eau potable et sur la protection de l'eau. Cela signifie que les plus récentes données scientifiques et la recherche sont assimilées et intégrées aux lignes directrices.

Les gens parlent de plus en plus des technologies et de leur application. La semaine dernière, le ministre de l'Industrie a annoncé la création d'un centre d'excellence pour l'eau propre et une infusion de 15 millions de dollars dans un réseau d'universités et d'industries de tout le Canada qui se penchera exclusivement sur la question de l'eau propre et sur la science et la technologie de la salubrité.

Nous devons nous assurer que dans ce contexte, les besoins et les intérêts des collectivités du Nord font partie des efforts déployés pour trouver des solutions aux problèmes. En ce qui concerne les questions qui touchent le Nord, le Canada a fait preuve de leadership à l'échelle internationale dans les discussions touchant la convention sur les polluants organiques persistants. Les scientifiques ont sérieusement mis leurs connaissances en commun pour tenter de trouver des solutions collectives.

Comme vous le savez très bien, le Conseil de l'Arctique, qui représente les régions polaires, se réunit régulièrement. Il est en voie de mettre au point une stratégie de développement durable pour répondre aux divers besoins et intérêts, dont l'eau, dans le cadre de ses travaux. Je crois que l'on tient compte des points de vue du Nord et des besoins spécifiques de l'écosystème nordique. Nos recherches sont orientées vers l'action pour bénéficier de ces technologies et les mettre en oeuvre là où il faut.

Le sénateur Watt: Dans une certaine mesure, j'ai participé à ces divers organismes comme le Conseil de l'Arctique, qui ont été créés par le gouvernement du Canada et les autres pays de l'Arctique. Il semble que les discussions sont axées sur l'action et sur les mesures nécessaires pour trouver des solutions. Je crains cependant que cela ne soit rien d'autre que des pourparlers actuellement, comme on l'a vu depuis un bon nombre d'années.

Je suis membre du Conseil de l'Arctique depuis cinq ans. Je ne crois pas qu'il soit sur le point de trouver une solution. Ce dont on a besoin dans l'Arctique, c'est de l'implication directe du gouvernement fédéral et non d'un gouvernement qui cherche à gauche et à droite pour trouver des solutions à son problème. Laissons cela de côté. Le gouvernement fédéral doit inciter davantage les gens à prendre soin de leur région parce qu'elle s'en va à vau-l'eau.

Le sénateur Buchanan: J'aimerais maintenant aborder la question du merveilleux ensemble de lacs que nous avons au Canada, voire en Amérique du Nord ou peut-être dans le monde, le lac Bras d'Or. Que fait votre ministère en ce qui concerne la préservation du lac Bras d'Or?

Je comprends qu'il y a des problèmes de compétences, mais le lac Bras d'Or est unique: c'est un lac saumâtre. Malheureusement, depuis 10 ou 12 ans, la pollution menace le lac. Ce qui est des plus malheureux parce que ce lac a été et continue d'être probablement le plus pur de l'Est du Canada.

Je connais deux organisations du Cap-Breton dont le mandat est de préserver le lac Bras d'Or. L'une est la Bras d'Or Preservation Society, l'autre, la Bras Stewardship Society. L'une est présente à Baddeck, l'autre à Whycocomagh, à l'extrémité inférieure du lac. Je rencontre ces gens à l'occasion, et je m'y suis directement impliqué depuis les années 80 à titre de membre du gouvernement et du Sénat.

On se préoccupe beaucoup du bassin du lac Bras d'Or. Je sais que le gouvernement fédéral travaille avec ces organisations, tout comme le gouvernement provincial. Il y a des riverains qui manifestent pour préserver le lac, mais qui se méfient en même temps de la mainmise du gouvernement.

Que savez-vous de la situation du lac Bras d'Or?

Mme Moore: Je ne connais pas ces deux associations ni les mécanismes dont vous avez parlé.

Le sénateur Buchanan: L'une de ces organisations est présidée par l'arrière-petit-fils d'Alexander Graham Bell. Est-ce que cela vous aide?

Mme Moore: Non. Je suppose que la question des eaux saumâtres et des autres effets est liée aux égouts et aux diverses activités autour du lac, mais je n'ai pas l'expertise nécessaire et je ne connais pas suffisamment ce qui se passe sur le terrain.

Je sais cependant que c'est un lac merveilleux, un réseau extraordinaire. Des images du lac Bras d'Or font le tour du monde à l'occasion, et c'est l'image qui s'impose.

Environnement Canada et nos programmes communautaires administrent des projets secondaires à l'échelle locale. Je ne peux vous donner de détails sur ce qui se passe actuellement au lac Bras d'Or, mais je peux m'assurer d'informer le greffier à votre intention.

Le sénateur Buchanan: Pourriez-vous voir au ministère qui ou quel groupe est impliqué et peut-être me faire parvenir l'information?

Mme Moore: Je me ferai un plaisir de le faire, sénateur. Notre bureau d'Halifax administre les programmes régionaux. Je vais m'assurer qu'il vous informe de ce qui se passe actuellement dans cette région.

Le sénateur Kenny: Je suis moins curieux de la propreté de l'eau, dont on a parlé ici aujourd'hui, que du volume d'eau. Vous avez parlé des bassins d'écoulement. On suppose que le volume d'eau dans ces bassins varie passablement. C'est un phénomène saisonniers. Quand on dit qu'il ne faut pas prélever d'eau de ces bassins, ça veut dire, dans mon esprit, qu'il faut attendre longtemps pour que le volume ne se renouvelle. Combien de temps cela prend-il pour remplacer de l'eau qui est enlevée d'un bassin? Si on en prélève une quantité importante, est-ce que l'eau revient ou est-ce que le bassin en subit les effets néfastes pendant un certain temps? Qu'est-ce qui se passe exactement?

Mme Moore: Je vais demander à mon collègue John Cooper de répondre à la question.

M. Cooper: Un bon exemple serait la CIM, la Commission internationale mixte et l'étude qu'elle a faite sur les Grands Lacs. La Commission a dit qu'en moyenne, seulement 1 p. 100 du volume d'eau des Grands Lacs est remplacé chaque année. La majeure partie de l'eau qui s'y trouve est un dépôt de l'ère glaciaire. En moyenne, le taux de remplacement est de 1 p. 100 par année.

Si je peux utiliser encore l'exemple des Grands Lacs, seulement environ 5 p. 100 de toute l'eau utilisée dans le bassin l'est pour des fins de consommation. Cette eau ne revient pas dans le système.

Le sénateur Kenny: Juste pour comprendre, monsieur Cooper, l'eau est un élément qui atteint un équilibre. Si on n'en prend que 1 p. 100, il me paraît raisonnable qu'il va en revenir 1 p. 100. Qu'est-ce qui arrive si on en prend 10 p. 100? Si 10 p. 100 de l'eau est enlevée, est-ce que vous avez des données scientifiques indiquant que cette lacune serait comblée?

M. Cooper: Vous supposez que l'on prend ces 10 p. 100 et qu'ils sont perdus pour le bassin?

Le sénateur Kenny: Je suppose qu'on met l'eau dans des citernes et qu'on l'amène en Arizona.

M. Cooper: En ce sens, on parle d'une perte de capital plus que de l'intérêt. L'eau ne reviendra pas.

Le sénateur Kenny: Comment en êtes-vous certain?

M. Cooper: Nous évaluons le flot renouvelable d'un bassin, et cette quantité, c'est la quantité qui sera remplacée chaque année. La majeure partie de l'eau utilisée dans le bassin revient dans le bassin une fois qu'elle est traitée, peu importe. Cependant, 5 p. 100 de l'eau utilisée dans les Grands Lacs -- ce n'est pas le volume total, mais seulement de l'eau qui est retirée des Grands Lacs -- est en fait perdue dans le système. C'est un très petit pourcentage de ce 1 p. 100, mais nous comptons sur les précipitations de pluie ou de neige pour combler le déficit.

Le sénateur Kenny: Si la nappe phréatique baisse parce que les gens utilisent de l'eau, est-ce que vous êtes en train de me dire que l'eau provenant d'autres endroits ne coule pas et ne viendra pas éventuellement rétablir la nappe phréatique?

M. Cooper: Oui. Si on parle d'un régime aquifère, il y a alors un taux de réalimentation d'une nappe souterraine. Si on retire de l'eau en plus grande quantité que ce taux de réalimentation, à ce moment-là, le niveau de la nappe phréatique diminuera. C'est ce qui se passe actuellement dans de nombreuses régions des États-Unis.

Le sénateur Kenny: Je comprends. Cependant, s'il y a plus d'eau que normal dans la région provenant d'importantes chutes de neige l'hiver et que la fonte est importante, à ce moment-là le taux de réalimentation n'est plus du tout le même. L'eau va ailleurs parce que les niveaux sont plus élevés dans ce bassin en particulier.

M. Cooper: Éventuellement, cette eau va se déverser dans les océans ou dans la baie d'Hudson.

Le sénateur Kenny: Très bien, mais elle ne va pas nécessairement suivre le même tracé. Ce que je veux dire, c'est que l'eau va se déverser par le bas. Si le niveau a augmenté, à ce moment-là, ce n'est pas attirant. Par contre, si le niveau est plus bas que prévu, ça devient une destination plus intéressante pour elle.

M. Cooper: Oui, mais c'est toujours limité au volume d'eau qu'il y a dans le système. Nous sommes toujours contraints par le volume d'eau qui va entrer dans le système. Certes, l'eau s'écoulera dans le secteur inférieur, mais cela dépend du bassin. L'eau ne circule pas d'un bassin à un autre.

Le président: L'eau va s'écouler dans un bassin, mais M. Cooper explique qu'un bassin obtient seulement tant d'eau qui tombe sous forme de neige ou de pluie, et ainsi de suite. Par conséquent, si le niveau de la nappe phréatique diminue dans un bassin, il n'y a rien pour la réalimenter. C'est la raison pour laquelle on appelle ça un bassin, parce qu'un bassin est autonome.

Mme Moore: Il y a des interactions, un cycle hydrologique entre l'atmosphère, les précipitations et le taux de réalimentation naturelle.

Le président: Oui, mais il n'y a vraiment pas d'interactions entre les bassins, par définition.

Mme Moore: Il existe un système de suivi hydrométrique dynamique au pays qui nous permet d'obtenir des données sur cette question. Le gouvernement fédéral travaille en collaboration avec les provinces, et nous fournissons l'information aux provinces qui l'utilisent pour leurs stratégies de gestion de conservation, les demandes de permis, et ainsi de suite.

Le principe est le suivant: comme l'eau est tirée d'un bassin hydrographique donné, les taux de réalimentation et d'autres facteurs environnementaux ne permettraient peut-être pas qu'elle revienne à ses niveaux historiques. En ce qui a trait au cadre de gestion intégrée des bassins hydrographiques, par conséquent, nous devons nous intéresser à la relation entre les activités d'utilisation des terres adjacentes, les besoins naturels comme les utilisations animales et pour les espèces, et ainsi de suite. Ces facteurs sont tous reliés et complexes.

En bout de ligne, selon nos experts scientifiques, on ne peut pas prétendre, en se basant sur divers éléments, que l'eau reviendra à ce que nous, les profanes, considérons comme un niveau historique.

Le président: Je pense que vous conviendrez peut-être que dans un bassin, il peut y avoir une compensation entre la surface et la subsurface.

Mme Moore: Il est également intéressant de noter qu'au fur et à mesure que l'eau passe de la surface à la subsurface, les eaux de surface enregistrent des contaminants. La question est alors de savoir ce qui s'infiltre au niveau de la subsurface. Comme nous l'avons dit, bien des gens dépendent des approvisionnements en eau provenant de la nappe phréatique. Là encore, nos scientifiques font des recherches pour comprendre cette interrelation.

Le sénateur Kenny: Je m'inquiète lorsque j'entends des gens dire qu'il ne doit pas y avoir d'exportation d'eau et qu'ils n'envisageront ni ne toléreront l'idée d'exporter de l'eau. Politiquement, cela me paraît très clair -- trop clair. C'est trop précis pour me convaincre. Je me demande à quel moment le bel argument politique cédera à l'ostracisme et que nous affirmerons que cette eau nous appartient et que nous ne la partagerons pas avec ceux qui en ont le plus besoin. À quel moment un région affrontera-t-elle une autre région, ou quand serons-nous en conflit avec nos voisins du sud? Il y a un grand nombre de ressources naturelles que nous aimerions exporter vers le sud et que nous nous efforçons d'envoyer chez nos voisins du sud.

Je comprends notre obligation en tant que politiciens canadiens de satisfaire aux besoins du Canada, mais je ne vois aucun compromis. Je suis mal à l'aise quand on dit arbitrairement que l'eau est une denrée trop précieuse pour qu'on l'exporte. Qu'en pensez-vous?

M. Cooper: Bien sûr, nous nous sommes penchés sur ce problème. La solution qui nous paraît la mieux protéger l'écosystème et les collectivités dans un bassin est d'interdire les prélèvements massifs d'eau.

Au Canada, il y a eu diversion de cours d'eau environ 54 fois entre des sous-bassins. Dans la plupart des cas, c'était pour deux projets hydro-électriques. Nous avons appris de ces diversions qu'elles peuvent avoir des impacts importants sur l'accroissement de la turbidité, la sédimentation, le déplacement de communautés autochtones, l'introduction d'espèces étrangères, la pollution par le mercure et de nombreux autres problèmes environnementaux et sociaux.

Nous basons notre approche sur le fait que les écosystèmes et les communautés dépendent d'un approvisionnement naturel d'eau dans un bassin. Dès qu'on examine la question du capital, l'eau dans ce bassin, sa diversion, on commence à en ressentir les impacts. Si on examine l'impact et les changements climatiques et que l'on sait que la disponibilité et la distribution de l'eau vont changer, ça devient beaucoup plus préoccupant.

Nous devons également tenir compte de la croissance de la population urbaine et industrielle dans des régions comme les Grands Lacs, par exemple, et des faibles niveaux d'eau que l'on a connus dans les Grands Lacs l'an dernier. L'eau n'est pas une ressource inépuisable et elle est très importante pour les écosystèmes.

Il est beaucoup plus normal que des techniques et des technologies de conservation comme la désalinisation soient mises en <#0139>uvre dans des régions arides des États-Unis où on désertifie pour créer des terrains de golf. Il faut examiner la question de la conservation et d'autres mesures pour assurer un approvisionnement durable en eau.

L'approche qu'a adoptée le gouvernement fédéral est qu'on pourrait prévoir des prélèvements d'eau à court terme pour des raisons humanitaires, lorsque le profit n'est pas en cause et où on pourrait donner de l'eau lorsqu'on est obligé.

Le sénateur Kenny: Quand vous parlez des transferts qui ont eu lieu jusqu'à maintenant, vous avez établi toute une liste d'effets négatifs. Vous avez négligé les effets positifs. Je ne peux pas croire qu'il n'y en a pas. De vastes régions du pays profitent de projets d'irrigation, par exemple. Manifestement, on constate des améliorations importantes dans la vie des gens qui reçoivent cette eau.

M. Cooper: Absolument, mais il faut tenir compte aussi, dans l'équation, du bassin donateur et du bassin receveur.

Le sénateur Kenny: Je ne vous ai pas entendu parler des avantages. Je me demandais si vous pourriez nous illustrer certains avantages qu'il y a à déplacer de l'eau d'un endroit à un autre.

Mme Moore: Il faut faire une distinction entre les transferts inter-bassins, qui se produisent entre d'importants régimes hydrographiques, et les détournements d'eau de bassin à des fins agricoles. Il y a une grande différence. Même aux États-Unis, où il y a eu beaucoup plus de transferts inter-bassins qu'avant, les scientifiques s'intéressent de plus en plus à ces impacts parce qu'ils causent plus de problèmes. Il y a beaucoup d'études sur ce qui s'est produit dans le passé et sur les divers impacts de ces projets.

Le sénateur Kenny: Donc, tout est négatif.

Mme Moore: Oui, dans le sens que lorsqu'on déplace de l'eau d'un grand bassin versant à un autre, on en voit les effets négatifs sur l'environnement.

Le sénateur Kenny: Vous dites qu'il n'y a pas d'effets positifs.

Mme Moore: Je pense qu'on parle actuellement d'effets environnementaux. Ce sont en général ceux qui ont créé de nombreuses inconnues dans l'échange des espèces et des problèmes connexes.

Le sénateur Finnerty: Je viens du nord de l'Ontario, et je fulmine de voir que le développement économique semble avoir la priorité sur l'eau. Au fil des ans, j'ai vu nos eaux claires polluées par les sociétés minières, et ainsi de suite. Ensuite, on se retire et on voit qu'une mine à ciel ouvert au lac Kirkland pourrait devenir un projet d'enfouissement pour les déchets de Toronto. Puis, on voit que deux provinces, le ministère des Affaires indiennes et notre gouvernement fédéral se retirent pour laisser les choses se détériorer. Il a fallu une bataille serrée de la part des citoyens -- nous étions nombreux -- pour faire stopper cette proposition temporairement. J'aimerais que le gouvernement fédéral adopte une position plus rigoureuse dans des cas comme celui-là.

Le président: Vous pouvez en déduire que le comité, même si nous apprécions votre témoignage, n'est pas heureux de voir que le gouvernement fédéral ne fait que jouer les prêcheurs du dimanche, qui donne son sermon et qui espère que les provinces vont suivre les lignes directrices que vous avez établies. Les membres du comité estiment que nous devrions explorer davantage la question de savoir si le gouvernement fédéral n'est pas assez sévère ou s'il cède.

Après le scandale de Walkerton notamment, les Canadiens ont vraiment l'impression qu'il y a peut-être trop de sermons et pas suffisamment de véritable administration. Nous aimerions savoir quelles sont les limites qu'impose la Constitution.

Je vous remercie d'être venus comparaître devant nous aujourd'hui. Vous nous avez aidés à nous ouvrir les yeux. Si vous n'avez pas d'objections, nous pourrions peut-être vous demander de revenir.

Mme Moore: Avec plaisir. Je tiens à remercier le comité de nous avoir donné la possibilité de témoigner ce matin. J'ai certains documents et des renseignements techniques portant sur des sujets dont nous avons parlé. Je laisserai volontiers des exemplaires au greffier.

N'oubliez pas que c'est aujourd'hui la Journée mondiale de l'eau.

Le président: Merci.

La séance est levée.


Haut de page