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Délibérations du comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles

Fascicule 2 - Témoignages du 23 avril 2001 (séance de l'après-midi)


VANCOUVER, le lundi 23 avril 2001

Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd'hui à 13 h 30 afin d'examiner les questions qui pourraient survenir occasionnellement se rapportant à l'énergie, à l'environnement et aux ressources naturelles.

Le sénateur Nicholas W. Taylor (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Honorables sénateurs, nous nous réunissons aujourd'hui à Vancouver pour examiner deux questions. Ce matin nous avons entendu des témoignages sur le projet de loi S-15, la Loi sur la protection des jeunes contre le tabac. Cet après-midi, nous entendrons d'autres témoignages dans le cadre de notre étude des questions liées à l'énergie.

Le premier témoin cet après-midi est Gerry Scott, directeur de la Campagne du changement climatique de la Fondation David Suzuki. Je vous remercie beaucoup d'être avec nous aujourd'hui. Le témoin suivant sera Jim Fulton, un vieil ami à moi, qui a déjà été député dans une circonscription du nord de la Colombie-Britannique. Je pense qu'il s'agissait de Skeena, n'est-ce pas? Et nous entendrons ensuite Dermot Foley, voilà un nom à consonance irlandaise, si je ne m'abuse.

Chacun d'entre vous pourrait-il se présenter brièvement? Cela pourrait nous aider à nous situer. Je commence par vous, Gerry.

M. Gerry Scott, directeur, Campagne du changement climatique, Fondation David Suzuki: Je m'excuse, monsieur le président. J'aurais dû vous informer par l'entremise de votre personnel que M. Fulton serait le premier à s'adresser à vous. Nous avons un mémoire écrit, il est dans la trousse que nous vous avons distribuée.

Je dirige la Campagne du changement climatique qui est l'un des projets de la Fondation David Suzuki. Dermot est notre directeur de la recherche pour la campagne et, bien entendu, Jim Fulton est le directeur exécutif de la Fondation. Après ces brèves explications, j'aimerais céder la parole à Jim et, par la suite, nous pourrons répondre à toutes vos questions.

Le président: Ce sera le seul exposé? Très bien.

M. Jim Fulton, directeur exécutif, Fondation David Suzuki: Monsieur le président, tout d'abord, j'aimerais vous dire que nous regrettons que tous nos documents ne soient pas dans les deux langues officielles, certains le sont, et si les sénateurs souhaitent obtenir les versions françaises de certains documents, nous ferons volontiers le nécessaire.

J'aimerais passer rapidement en revue avec vous le contenu de la trousse afin que vous ayez une idée du genre de choses que nous faisons. Le livre à couverture rouge intitulé «Canadian Solutions» porte sur le genre de changement stratégique qu'il serait pratique et économique d'entreprendre au Canada en vue de contrer le changement climatique. Le livre à couverture bleu clair, intitulé «Taking Our Breath Away, the Health Effects of Air Pollution and Climate Change» est un outil très utile. Nous collaborons actuellement avec l'Ontario Medical Association, la B.C. Medical Association ainsi qu'avec un éventail de groupes d'intérêts de tout le pays qui s'intéressent à certains impacts de la pollution résultant de l'utilisation des combustibles fossiles.

De l'autre côté de la trousse, vous trouverez un livre à couverture verte intitulé «Climate Crisis: Energy Solutions for B.C.». Il s'agit d'un document qui jette un regard plus approfondi et plus régional sur la façon dont une province de la taille et de la population de la Colombie-Britannique peut facilement atteindre et même dépasser les objectifs de réduction des émissions de 6 p. 100 du Protocole de Kyoto. Il y a également quelques communiqués de presse dans cette chemise, particulièrement en rapport avec Kyoto.

Nous espérons, monsieur le président, que l'une des mesures que prendra votre comité consistera à exhorter la Chambre et le gouvernement à aller de l'avant avec la ratification du Protocole de Kyoto d'ici les 12 prochains mois.

Je vais commencer avec mon exposé. Je vous citerai seulement certains extraits du texte pour référence, et ensuite je répondrai à vos questions.

Nous sommes heureux de l'occasion qui nous est offerte de nous présenter devant ce comité du Sénat, et je vous remercie de l'intérêt que vous portez à ces questions importantes et même pressantes qui sont associées à la production et à la consommation de l'énergie au Canada.

Nous sommes de plus en plus préoccupés de l'attitude de notre pays en ce qui concerne les tendances en matière de développement et de consommation d'énergie ainsi que les émissions dans l'atmosphère qui y sont associées, c'est-à-dire les polluants atmosphériques et les gaz à effet de serre courants. Nous sommes préoccupés parce que ces tendances renforcent et aggravent notre dépendance à l'égard des combustibles fossiles, que ce soit pour la consommation sur le marché intérieur ou pour le développement économique axé sur l'exportation. Cette dépendance croissante est intimement liée à l'analyse politique que l'on peut faire des impacts qui y sont associés: accroissement de la pollution atmosphérique, des gaz à effet de serre et de la volatilité des prix. Parallèlement, l'expansion presque illimitée des réserves de combustibles fossiles mine le développement et la croissance de solutions de rechange plus écologiques telles que les mesures d'efficacité et les énergies renouvelables.

Nous nous trouvons à la croisée des chemins pour ce qui est de la formulation de la politique en matière d'énergie. En effet, la décision que doit prendre le gouvernement fédéral au cours de la prochaine décennie déterminera si oui ou non le Canada remplira les engagements qu'il a pris dans le cadre de traités internationaux, dans des domaines aussi importants que la protection du climat et l'air pur. Étant donné ces engagements, et l'incidence dramatique des changements climatiques documentée très récemment par le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution climatique, il faut de toute nécessité que tous les paliers du gouvernement déterminent une politique énergétique tenant compte de toutes les répercussions, et non seulement des gains économiques immédiats.

Les répercussions complètes de nos actuelles politiques en matière d'énergie comprennent notamment:

Premièrement, le risque que les émissions toujours croissantes du Canada ne violent nos obligations au titre de la Convention-cadre sur les changements climatiques, le Protocole de Kyoto et possiblement les accords sur la qualité de l'air transfrontalier avec les États-Unis.

Deuxièmement, une augmentation de la menace pour la santé publique découlant de la détérioration de la qualité de l'air dans les régions ainsi que du changement climatique en cours. Le gouvernement canadien a déclaré dans ses représentations auprès des États-Unis que la pollution résultant des combustibles fossiles est la cause de 16 000 décès prématurés chaque année dans notre pays.

Troisièmement, des pressions à long terme sur les prix pour les consommateurs canadiens de pétrole et de gaz qui feront en sorte que les dépenses énergétiques représenteront un pourcentage de plus en plus important du total des dépenses sans générer en contrepartie un rendement optimal sur le plan économique et social. La production de l'énergie est exigeante en investissements, et non en main-d'oeuvre. Elle se concentre dans un nombre relativement petit d'endroits, de sorte que les avantages ne sont pas répartis uniformément.

Quatrièmement, le Canada laisse passer des occasions associées aux nouvelles technologies de l'énergie telles que l'énergie éolienne, l'énergie solaire, l'énergie géothermique et d'autres. Des investissements sont réalisés en Europe, aux États-Unis et ailleurs, mais pas au Canada, avec le résultat que nous ne pourrons bénéficier de ces nouvelles industries et des nouveaux emplois qui seront créés. En Allemagne, par exemple, le secteur de l'énergie éolienne emploie 35 000 personnes et exporte partout dans le monde.

Cinquièmement, de lourdes conséquences directes sur les utilisateurs de ressources naturelles au Canada par suite d'une évolution climatique sans entraves, notamment dans le domaine de l'agriculture, des pêches, des forêts et du tourisme. Ces répercussions sont particulièrement inquiétantes pour un certain nombre de régions fortement tributaires des ressources naturelles ainsi que pour les Première Nations. Je suis persuadé que le sénateur Adams est très au courant des réunions qui se tiennent actuellement dans le Nord en vue d'examiner les impacts énormes que l'on peut déjà déceler dans cette région en raison du changement climatique.

Sixièmement, les impacts de plus en plus importants sur les particuliers, les entreprises et les collectivités à mesure que les changements climatiques entraînent des anomalies de plus en plus graves sur le plan des conditions météorologiques comme les sécheresses, les inondations, les feux de forêt, les tempêtes violentes et les vagues de chaleur.

Dans l'exposé qui suit, nous donnons un aperçu de la science de l'évolution climatique ainsi que des modèles de commerce des produits énergétiques ayant cours actuellement au Canada. De plus, nous résumons les conclusions d'un rapport récent, intitulé «Climate Crisis, Energy solutions for B.C.». Dans la trousse d'information, nous avons joint un exemplaire de ce rapport ainsi que deux autres rapports pertinents présentés par notre fondation et auxquels j'ai fait référence tout à l'heure.

J'invite maintenant les sénateurs à aller à la fin de l'exposé, à l'avant-dernière page, sous la rubrique: «recommandations». Je vais les passer en revue avec vous, et ainsi vous aurez une idée du sens dans lequel nous aimerions que votre comité aille et des recommandations que nous pensons que vous devriez faire à la Chambre pour le bénéfice de notre pays.

Afin de respecter nos engagements dans le cadre du Protocole de Kyoto et de prémunir les Canadiens contre les incertitudes du marché de l'énergie, nous devons diversifier nos sources d'énergie et réduire la demande globale. L'administration fédérale devrait elle-même donner l'exemple en matière d'efficacité énergétique et d'énergie renouvelable. Nous vous exhortons à défendre les mesures suivantes auprès du gouvernement du Canada:

Premièrement: ratifier le Protocole de Kyoto en 2002, l'année du dixième anniversaire du Sommet de la Terre de Rio en même temps que de nombreux autres pays du monde entier vont le ratifier.

Deuxièmement: rejeter le «pacte énergétique continental» qui fera grimper les émissions de gaz à effet de serre en même temps qu'il entraînera une augmentation de la production de pétrole et de gaz, et se concentrer plutôt sur l'efficacité énergétique et les sources d'énergie renouvelable alternatives, en collaboration avec les États-Unis et le Mexique s'il y a lieu, notamment en ce qui a trait aux normes d'efficacité énergétique.

Troisièmement: entreprendre un examen complet et une mise à jour des normes en matière d'efficacité énergétique pour tous les gros appareils et le matériel industriel. Nous avons quelques excellents exemples qui en disent long sur ce sujet.

Quatrièmement: mettre en oeuvre la norme R-2000 pour toutes les nouvelles maisons au Canada. Si la norme n'est pas de la compétence de l'administration fédérale, dans ce cas, un programme qui éliminerait l'écart de prix entre une maison R-2000 et une maison ordinaire devrait être mis en oeuvre.

Cinquièmement: élaborer et mettre en oeuvre une nouvelle norme en matière d'efficacité énergétique pour les automobiles qui repose sur le déploiement massif potentiel des technologies disponibles aujourd'hui, comme les véhicules hybrides fonctionnant au gaz et à l'électricité. Nous avons insisté sur ce dernier exemple en particulier, monsieur le président, et vous voudrez peut-être vous y intéresser de plus près. En effet, en 1981, on a adopté une loi sur un programme énergétique pour les parcs de véhicules. Je le sais, j'y étais, et j'avais voté en faveur de cette loi à l'époque. Nous avons eu cinq premiers ministres depuis lors. Cette mesure a également été approuvée par le Sénat. La seule étape qui reste à franchir pour que cette loi entre en vigueur serait de la soumettre au gouverneur général pour obtenir la sanction royale. Toutefois, depuis vingt ans, elle attend toujours son heure.

Sixièmement: offrir des mesures d'encouragement pour le développement de sources d'électricité renouvelables écologiques comme l'énergie éolienne, l'énergie solaire et la microproduction d'électricité. Ces mesures d'encouragement pourraient inciter les services d'utilité publique à acheter de l'énergie renouvelable, ou encore stimuler les producteurs à créer de nouveaux projets permettant de commercialiser l'électricité. Par ailleurs, monsieur le président, il faudrait restreindre les subventions accordées pour la production et la consommation des combustibles fossiles.

Finalement et septièmement: afin d'encourager l'adoption de technologies renouvelables par les services publics et les autres consommateurs d'électricité, et aussi d'atteindre les objectifs fixés dans le Protocole de Kyoto sur le changement climatique d'une manière rentable, mettre en oeuvre un instrument économique global, comme une taxe sur le carbone ou un système de commerce du carbone doté d'une limite nationale ferme en ce qui concerne les émissions globales.

Monsieur le président, je suis prêt à répondre à toutes les questions d'ordre général. M. Scott répondra aux questions portant plus particulièrement sur le climat. Pour ce qui est de toute question technique nécessitant une réponse détaillée, M. Foley va s'en occuper.

Le président: Merci. Pensez-vous qu'il est possible pour le Canada de maintenir son engagement à l'égard du Protocole de Kyoto si les États-Unis ne le font pas, si l'on tient compte de l'accord de libre-échange qui lie nos deux économies si étroitement?

M. Fulton: Nous le pouvons très certainement. Notre évaluation globale de la situation est la suivante: même si nous avons de toute évidence des échanges économiques énormes avec les États-Unis, il se trouve que nous avons également une relation environnementale avec ce pays et avec le reste du monde. Les meilleurs scientifiques du monde ont réussi à obtenir le plus grand consensus jamais atteint dans le domaine de la science, dans le cadre du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution climatique. Selon les participants, il faut effectuer une réduction de 60 p. 100 des émissions de gaz à effet de serre dans le monde entier afin de stabiliser l'atmosphère. Par conséquent, le Canada doit respecter ses obligations, se montrer à la hauteur de ses engagements passés en matière de ratification et de solidarité avec les autres pays du monde entier lorsqu'il s'agit de signer des accords sectoriels multilatéraux et multinationaux. Nous devons respecter la parole donnée. Si le Canada décidait de se retirer du processus de ratification du Protocole de Kyoto simplement parce que George Bush a un autre plan en tête, ce serait complètement irrationnel.

Nous disposons des connaissances scientifiques nécessaires ce qui concerne le changement climatique et nous savons également ce qu'il faut faire pour stabiliser l'atmosphère. Nous avons rédigé plusieurs rapports, dont l'un affirmait que grâce aux technologies déjà disponibles, le Canada peut réussir à réduire de moitié ses émissions de manière rentable.

Le Canada est l'un des consommateurs les plus énergivores de la planète. Nous sommes le plus grand consommateur d'énergie par habitant, et le deuxième plus grand émetteur de gaz à effet de serre par habitant. Nous émettons au Canada l'équivalent de près de huit tonnes métriques de dioxyde de carbone par personne par année, alors qu'en Inde ou en Afrique, la personne moyenne dégage environ une tonne métrique de dioxyde de carbone dans l'atmosphère. Par conséquent, des raisons extrêmement importantes, d'une portée planétaire, nous forcent à respecter cet engagement, et l'une de ces raisons, et non la moindre, est que le Canada a toujours tenu paroles. Je pense que M. Scott aimerait ajouter quelque chose à cette importante question.

M. Scott: Le débat économique autour de Kyoto pose plusieurs hypothèses fondamentales, et j'aimerais mettre débat économique entre guillemets parce que je pense que l'on fait valoir strictement les aspects économiques de ce protocole et, très souvent, certains secteurs adoptent un point de vue qui, à mon sens, pourrait être qualifié de défaitiste à l'occasion. Nous pensons qu'une perspective mieux équilibrée des occasions qui se présentent et des différents moyens d'atteindre les objectifs sur lesquels nous nous sommes entendus à Kyoto devrait, en fait, déboucher sur des résultats très positifs, même en adoptant un point de vue strictement économique. J'insiste sur le mot «strictement» parce que, dans un sens plus large, de nombreux changements pourraient résulter de diverses politiques énergétiques, des changements qui ne sont pas toujours quantifiés et calculés comme faisant partie du volet économique.

M. Fulton a cité les chiffres du gouvernement fédéral concernant le nombre de décès imputables à la pollution atmosphérique, mais nous savons également par Santé Canada, par Environnement Canada ainsi que par des organismes de santé provinciaux, que nous dépensons chaque année des milliards de dollars en soins de santé directement liés à la qualité de l'air. D'ailleurs, ce chiffre est probablement encore plus élevé car les preuves médicales établissant un rapport avec l'asthme s'accumulent. Donc, les chiffres d'Environnement Canada en rapport avec les coûts de la pollution atmosphérique, qui s'établissent en milliards de dollars, n'incluent pas ce lien de plus en plus marqué avec l'asthme.

Pardonnez-moi cette digression. J'aimerais revenir plus particulièrement sur la façon dont nous abordons la relation qui existe entre notre économie et celle des États-Unis. Dans un scénario incluant le Protocole de Kyoto, nous pensons que nous pouvons tirer des avantages économiques en optant pour l'efficacité.

L'efficacité correspond à l'élimination du gaspillage et dans pratiquement toute entreprise classique, le gaspillage est l'ennemi numéro un. Si vous parlez aux dirigeants de General Motors ou de l'hôtel où nous nous trouvons présentement, ils vous diront que le gaspillage est l'ennemi qu'ils traquent sans relâche et qu'ils s'efforcent d'éliminer. Sauf qu'en matière d'énergie, étant donné les multiples lacunes structurelles du système, il arrive souvent que ceux qui paient la note ne sont pas les mêmes que ceux qui examinent les coûts des investissements. C'est particulièrement vrai dans de nombreux immeubles commerciaux, mais ce l'est également dans les sociétés.

J'aimerais attirer votre attention sur un livre intitulé Cool Companies, écrit par Joe Romm, qui était l'équivalent d'un sous-ministre adjoint au département fédéral de l'Énergie des États-Unis. Je pense que son poste correspondait à celui de sous-secrétaire d'État. Donc, son livre expose la situation cas par cas. Il examine Boeing, les grandes sociétés d'assurance, et comment ces entreprises ont éliminé le gaspillage de leurs activités, et il arrive que ce soit possible, souvent en raison de l'effet de silo, même au sein des grandes sociétés. Nous savons tous que cela est possible dans les grandes institutions du secteur public, de même que du secteur privé. Toutefois, M. Romm a démontré que non seulement il est possible de réaliser de grandes économies en réduisant la consommation d'énergie, mais qu'il est également possible de doubler la productivité des employés. Par exemple, les employés du secteur de la production voient leur productivité s'améliorer avec un éclairage plus adéquat qui permet, par le fait même, de consommer moins d'énergie. Il y a de nombreux exemples de ce type de modifications.

L'un de mes exemples favoris est celui de la tour Canterra, au centre-ville de Calgary. Ironiquement, cette tour loge de nombreuses sociétés pétrolières qui se battent contre le Protocole de Kyoto. Elle est administrée par Oxford Properties qui en est également la propriétaire et qui est l'une des plus grandes sociétés immobilières au Canada. Aujourd'hui, au moment où je vous parle, cette société fonctionne en deçà de 28 p. 100 des normes de Kyoto. Les gens d'Oxford ont pu réduire leurs émissions en appliquant les principes de l'efficacité énergétique à différents systèmes de ventilation, de conditionnement de l'air, d'éclairage et de chauffage et ainsi de suite. Par-dessus le marché, ils ont des locataires beaucoup plus heureux, ce qui signifie que l'immeuble est tout le temps plein, et à des loyers très intéressants.

Monsieur le président, j'ai peut-être pris trop de votre temps, mais il me semble que ces rapports et bien d'autres démontrent que si nous pouvons atteindre ce niveau d'efficacité, nous pouvons en fait également obtenir un avantage économique de la mise en oeuvre des normes de Kyoto, plutôt que de continuer à souffrir de ce désavantage qui est fondé sur un gaspillage continuel de l'énergie et qui équivaut plus ou moins à jeter de l'argent par les fenêtres.

Le sénateur Spivak: Je n'ai pas encore lu votre rapport au complet, mais j'ai jeté un coup d'oeil sur le résumé du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution des changements climatiques. Il me semble que la plupart des faits ayant trait à cette situation devraient déjà faire partie du discours dominant. De plus, tout le monde devrait immédiatement être frappé par le fait que tout a commencé avec Michael Porter, il y a déjà longtemps avec la théorie des avantages comparés. Il est plus intelligent et, à long terme, plus rentable économiquement, comme vous l'avez dit, d'opter pour l'écoefficacité. L'autre sujet de préoccupation, bien entendu, est la santé.

Aussi, je n'ai qu'une seule question à vous poser et elle vise à déterminer comment nous devons orienter nos efforts. À mon avis, même si nous arrivons à respecter les objectifs de Kyoto, nous devons dès aujourd'hui réduire nos émissions de 26 p. 100. Toutefois, afin de maintenir le changement de température à une augmentation de trois degrés, il faudrait que les émissions dans le monde entier soient réduites de 60 à 70 p. 100. De toute évidence, aucun gouvernement n'est prêt à s'atteler à cette tâche, et aucun gouvernement sensé ne voudrait instaurer une taxe sur le carbone. Alors, par quoi devons-nous commencer?

S'il en est ainsi, j'ai deux questions à vous poser. Tout d'abord, il semble qu'une stratégie générale doive porter sur l'intérêt personnel conscient: est-ce que ce sera bon pour nous; est-ce que cela sera rentable? La deuxième question est la suivante: que devons-nous faire pour éviter de tomber malade et de détériorer gravement notre santé?

Nous ne sommes pas les seuls à avoir abordé ce sujet. David Schindler, par exemple, parle d'une crise de l'eau douce et de l'effondrement des pêcheries. Dans ce cas, que devons-nous faire valoir dans notre rapport, quelle contribution pourrions-nous faire de manière à mettre davantage de pression dans le sens où nous voulons aller? Autrement dit, sur quoi devons-nous nous concentrer?

M. Dermot Foley, analyste des politiques, Fondation David Suzuki: Comme Gerry l'a mentionné un peu plus tôt, l'avantage économique, le gain, qu'il y aurait à passer à l'efficacité et à améliorer l'efficacité énergétique serait distribué sur la totalité de l'économie. Partout au Canada, l'hiver dernier, en particulier, nous avons constaté que les consommateurs ont payé pour le gaz naturel les prix les plus élevés jamais enregistrés. Nous avons constaté la même chose pour les prix de l'essence. Par conséquent, le message comme quoi l'efficacité réduit les coûts, que nous jetons l'argent par les fenêtres, ce message est vraiment très puissant et je pense qu'il y a un auditoire réceptif pour ce message.

À titre d'exemple, j'ai visité récemment le site Web du gouvernement de l'Alberta où l'on décrie les remises que la province a consenties et tout l'argent qui a été redistribué. On explique en détail comment cet argent est remis aux consommateurs, qui à leur tour, bien entendu, vont devoir le remettre aux sociétés pétrolières. Ce n'est pas réellement l'argent des consommateurs, il ne fait que retourner dans le système.

Toutefois, le site Web présente trois exemples d'efficacité énergétique, comme baisser le thermostat dans la maison, porter un chandail à l'intérieur et mettre une enveloppe de protection autour du chauffe-eau. Un gouvernement qui se préoccupe réellement des consommateurs et des citoyens devrait prendre un peu plus d'initiatives, aller au-delà de ce type de conseils et penser à des solutions à long terme. Lorsque vous mettez en oeuvre l'efficacité énergétique à l'échelle de l'économie, les épargnes s'accumulent année après année, tandis qu'une remise ne vous permet que de passer à travers un hiver difficile. L'hiver prochain, nous verrons bien quelles seront les conditions du marché. Par conséquent, je pense qu'il y a un auditoire très réceptif au message de l'efficacité et des gains qu'elle permet de réaliser et qui sont les mêmes que ceux que l'on obtient en réduisant les gaz à effet de serre. Autrement dit, il y a moyen de vendre ce concept, et je pense qu'il y a des choses que le gouvernement - fédéral en particulier - peut faire pour essayer d'instaurer ces programmes.

M. Fulton: J'aimerais ajouter quelques points. Le premier est que je pense que nous devons garder à l'esprit l'échelle de la consommation d'énergie au Canada. Nous utilisons la même quantité d'énergie que l'Inde au cours d'une année, sauf qu'il y a un milliard d'habitants en Inde. Par exemple, dans certaines provinces comme l'Alberta - et je sais que notre président est très au courant de la question - au cours des 12 derniers mois, l'énergie éolienne produite en Alberta à raison de quatre cents le kilowatt-heure est maintenant concurrentielle, nez à nez avec le gaz naturel albertain. D'ici 2010, l'Union européenne se situera à au moins 20 p. 100 pour ce qui est de l'utilisation de l'énergie renouvelable et cette situation lui conférera toutes sortes d'avantages, dont celui mentionné dans ce rapport que nous avons produit à l'aide des chiffres fournis pas le gouvernement fédéral n'est pas le moindre. L'année dernière, 16 000 Canadiens sont morts prématurément et leur mort est un résultat direct de la pollution imputable aux combustibles fossiles. Ce chiffre est probablement dix fois plus élevé aux États-Unis. Il est important de faire connaître ces chiffres sur la morbidité et la mortalité au grand public, le fait que 160 000 personnes meurent aux États-Unis, et qu'il en meure 16 000 au Canada à cause de ce type de pollution. Actuellement, les États-Unis économisent de 150 à 200 milliards de dollars par année grâce aux mesures d'efficacité énergétique. Ce sont des choses que les contribuables et les citoyens aiment entendre. En d'autres mots, quels avantages y a-t-il à respecter les normes de Kyoto et à aller au-delà de ces normes?

Je pense qu'il faut se rappeler que l'un des rapports que le Parlement a produits entre 1989 et 1991 était un peu exagéré. Je me rappelle très clairement que mon voisin de siège durant ces trois années était Paul Martin, et aujourd'hui Paul Martin a un poste relativement important au sein du gouvernement. Il est ministre des Finances. Lorsque nous avons déposé ce rapport, la conclusion qui figurait sur la première page disait que «l'impact du changement climatique pour le Canada vient seulement en deuxième lieu après celui d'une guerre nucléaire totale». Paul Martin était d'accord avec cette affirmation, il a signé. Il a également signé le rapport demandant que l'on réduise le niveau des émissions de 20 p. 100 par rapport à ceux de 1988 d'ici 2005.

Le sénateur Spivak a raison. Nous avons promis. Nous nous sommes engagés en 1997 à Kyoto à faire des réductions de 6 p. 100 sous le niveau de 1990 d'ici 2012, pas plus tard que 2012. Actuellement, nous sommes en hausse de 13 à 14 p. 100, par conséquent nous n'allons pas du tout dans la bonne direction.

En Alberta, chaque fois qu'usine d'exploitation des sables bitumineux produisant 150 000 barils entre en service, cela équivaut à ajouter 1,35 millions de voitures sur les routes canadiennes par jour, à cause des émissions de dioxyde de carbone dans l'atmosphère du secteur en amont. Il faut s'ouvrir les yeux. Nous ne pouvons pas continuer d'ajouter du charbon, des sables bitumineux, encore plus de pétrole et de gaz.

Combien de Canadiens savent que, non seulement nous sommes le plus grand fournisseur au monde d'énergie aux États-Unis et - je me demande même si George Bush est au courant de ça - mais que nous fournissons plus de pétrole et de gaz aux États-Unis que nous n'en utilisons nous-mêmes. Combien de Canadiens savent cela? Les Canadiens arrivent à peine à acquitter leur facture de chauffage à la fin du mois, et le premier ministre Klein leur envoie un petit chèque par la poste. Ces chèques iront directement dans les poches des sociétés pétrolières et reviendront ensuite directement dans celles des actionnaires. Cet argent devrait être consacré à l'énergie éolienne, l'énergie solaire, l'énergie marémotrice afin d'améliorer l'efficacité, la conservation et la création d'emplois dans un secteur plus exigeant en main-d'oeuvre. Voilà quels sont nos besoins en matière d'énergie, nous sommes les plus gourmands de la Terre pour ce qui est de l'énergie.

Le sénateur Spivak: Je voterai pour vous, Jim. Les gens comme vous savent comment dire les choses carrément - et l'une des choses que j'ignorais est cette économie de 115 à 200 milliards de dollars par année. Toutefois, voici ma question: qui devrions-nous contacter pour former une coalition? Le Sénat a des ressources, et nous avons une certaine influence - du moins le président possède une certaine influence au sein de ce gouvernement. Moi je n'en ai plus.

Le président: Je n'ai aucune influence. Je n'arrive même pas à vous contrôler.

Le sénateur Spivak: Voilà où je veux en venir, penser à une stratégie. Nous devons déterminer à qui bénéficient la santé et l'écoefficacité, qui devons-nous viser dans ce pays, à qui devons-nous écrire des centaines de lettres expliquant ce qu'il faut faire. Soit dit en passant, je pense que Paul Martin procéderait ainsi s'il le pouvait. C'est mon point de vue, je peux me tromper.

M. Scott: C'est sûrement ce que ferait M. Martin pour son budget. Nous l'avons rencontré, il y a peu de temps, je pense qu'il y a un an ou 18 mois. M. Fulton et moi-même avons rencontré le ministre et avons naturellement essayé d'obtenir des changements de politique. Bon nombre de ces changements visent deux grands secteurs et je pense que votre terme «écoefficacité» pourrait être un cri de ralliement - peut-être pas les mots, mais certainement le concept pourrait devenir un cri de ralliement pour les Canadiens qui veulent de l'aide pour ce qui est des prix de l'énergie. L'élément critique est qu'ils ne se préoccupent pas vraiment des coûts unitaires; ils pensent davantage à la facture finale. Je pense que si nous nous concentrons sur la facture finale, nous arrivons à ce concept d'efficacité auquel vous avez fait référence. Les deux côtés de ce concept trouveraient une résonance, le côté «écologique», la santé publique, la santé de l'environnement et le côté de «l'efficacité» ayant trait aux dépenses énergétiques des entreprises, des organismes publics tels que les hôpitaux et les écoles qui doivent constamment affronter de nouvelles restrictions budgétaires de même que les ménages des particuliers. Je pense que c'est un domaine où votre comité peut réellement faire preuve de leadership stratégique en faisant en sorte que les Canadiens adoptent l'idée que nous devons cesser de jeter notre argent par les fenêtres dans ce qu'il est convenu d'appeler le gaspillage de l'énergie. Je pense vraiment qu'il y a une avenue prometteuse ici.

Pour ce qui est de la façon dont nous pourrions nous rallier davantage de personnes, et vous avez utilisé le terme de «coalition», nous y sommes favorables, nous devons avoir une perspective plus large, dans le sens que nous voulons que votre comité aide particulièrement les entreprises à voir l'avantage économique qu'il y aurait à réduire cette forme de gaspillage.

Avec cet objectif à l'esprit, nous avons posté le livre de Joe Romm au chef de la direction des 500 plus grandes sociétés de ce pays, et nous en avons également posté aux 250 ministres du cabinet fédéral et provincial. Nous en avons également envoyé des exemplaires aux 150 maires des plus grandes villes et des gouvernements régionaux du Canada. Nous recevons des réponses très positives et très intéressantes de la part de ces chefs de la direction dans le secteur privé et l'administration. Bon nombre de ces lettres ont été adressées à David Suzuki.

Fait à noter, nos partenaires dans ce petit projet de distribution gratuite de livres étaient deux des plus grandes sociétés gazières de ce pays et qui consacrent certains volets de leurs entreprises à l'efficacité et à la réduction de la demande. Les commentaires étaient positifs à bien des égards et disaient dans les grandes lignes: «aidez-nous, donnez-nous les outils pour obtenir ce type d'efficacité dont parle l'auteur de ce livre dont vous vous faites les défenseurs.»

Encore une fois, je pense que votre comité doit faire preuve de leadership en diffusant certaines de ces histoires et des techniques relatives à l'efficacité.

Le président: J'aurais une question sur un point qui me chicote. Vous avez parlé des prix. La semaine dernière, j'ai lu des choses intéressantes. Dans un de ces textes, on disait que la Saskatchewan était le plus grand gisement d'uranium au monde à l'heure actuelle et que la province peut extraire de l'uranium à un quart du prix de tout autre concurrent. J'ai également lu qu'un bureau de courtiers en valeurs mobilières de New York a effectué l'analyse et je pense que vous avez dit ce matin au cours de votre exposé que le coût de production de l'électricité partir du gaz naturel se chiffrait autour des quatre cents par kilowatt, ou 4,4 cents mais que le prix avec une centrale nucléaire n'est que de 2,2 cents.

Lorsque je suis allé en Chine durant quelques semaines pour parler au ministre de l'Énergie de là-bas, il m'a confié qu'ils ne veulent pas convertir leurs centrales au charbon au gaz naturel; ils les convertissent directement à l'énergie atomique, parce qu'ils pensent qu'il s'agit d'une source d'électricité bon marché et écologique.

J'aimerais mentionner que Jim Gray, qui a été M. Gaz naturel au Canada pendant de nombreuses années, a indiqué dans son dernier discours que la seule chose qui permettrait de contrôler les prix du gaz naturel serait l'énergie atomique, que ce serait véritablement le seul adversaire qui permettrait de lui couper l'herbe sous le pied et de réduire les prix pour le grand public.

Qu'est-ce que vous pensez de l'énergie nucléaire?

M. Fulton: Monsieur le président, j'aimerais répondre à celle-ci. Il faut se rappeler qu'il n'y a pas eu de construction de nouvelle centrale nucléaire en Amérique du Nord depuis une trentaine d'années.

Le président: Je sais que c'est vrai en Amérique du Nord, mais on en construit en France, en Espagne, en Allemagne, en Chine - partout, sauf en Amérique du Nord. Il semble que ça soit un rite de passage et qu'étant donné que nous avons été les premiers à jeter la bombe, peut-être que nous voulons également être les premiers à la breveter après coup.

M. Fulton: Il existe un certain nombre de très bonnes études, et je m'assurerai qu'elles vous seront transmises, pour ce qui est du cycle complet du coût de l'énergie nucléaire. On indique que lorsque l'on fait les calculs à partir de l'entrée dans le réseau de distribution, elle revient moins cher que le charbon, le gaz naturel et le pétrole, mais lorsque l'on ajoute les coûts en temps réel, particulièrement ceux ayant trait au stockage des déchets à long terme. Il n'y a aucun site sur terre où les déchets ont pu être entreposés de façon adéquate et permanente. C'est laissé aux générations futures qui devront en assumer les coûts. Notre génération trouve qu'il en coûte trop cher de payer les coûts réels pour s'occuper de ces déchets.

Il y a une comparaison directe à faire ici avec le changement climatique. Au début de la révolution industrielle, il y avait 280 parties par million de dioxyde de carbone dans l'atmosphère, aujourd'hui il y a 368 parties par million, donc il y a eu une augmentation de 30 p. 100.

Voici à quoi je veux en venir: nous avons la même attitude avec les combustibles fossiles que celle que nous avions adoptée durant un certain temps, dans les années 50 et 60, avec l'énergie nucléaire. Nous avons décidé de passer la facture liée aux déchets aux générations futures. Aujourd'hui que nous avons projeté la pollution dans l'atmosphère, au point où tous les grands scientifiques de la terre nous préviennent que nous devons réduire nos émissions de 60 p. 100. Si vous avez une maladie cardiaque et que votre docteur vous dit «il faut réduire votre consommation de tel et tel produit de 60 p. 100», si vous voulez vivre, vous faites ce qu'il vous dit. Si vous voulez mourir, et bien vous laissez faire.

Nous refilons la facture de ce type de pollution atmosphérique aux générations futures, par exemple pour ce qui est des conditions météorologiques extrêmes dont parle le secteur de l'assurance internationale. Ici au Canada, nous avons l'exemple des tempêtes de neige dans l'est du pays et de toutes ces autres manifestations, et à moins que nous ne commencions une analyse du cycle complet du coût des différentes sources de combustibles, nous n'arriverons jamais à la solution.

Nous savons, par exemple, que les impacts écologiques des panneaux solaires photovoltaïques sont très faibles. Nous savons également que les parcs d'éoliennes en Alberta, qui produisent de l'électricité à raison de 4 cents le kilowatt-heure, ont également une très faible incidence sur le plan écologique. Cependant, lorsque l'on remonte la chaîne du carbone du plus léger au plus lourd, et que l'on passe du gaz naturel au brut léger, au brut lourd et au sable bitumineux, lorsqu'on arrive finalement au sable bitumineux, on réalise qu'il y a un énorme débordement de dioxyde de carbone à cette étape de la production. Les sables bitumineux diffèrent donc énormément des autres combustibles plus écologiques. Le charbon, bien entendu, est le moins écologique dans tous les cas.

Si le Sénat pouvait faire une chose en particulier, ce serait de produire une grille bien précise. Vous avez du personnel de recherche très compétent, que je reconnais ici aujourd'hui. Ces personnes font des recherches à la bibliothèque du Parlement et pour le Sénat, et elles pourraient produire une grille précise et très évoluée de toutes les grandes sources de production de l'électricité. Cette grille pourrait comparer ces sources les unes avec les autres pour ce qui est des avantages à long terme en matière de production d'emplois, de leur impact sur l'atmosphère, de l'impact sur la santé - par exemple, pourquoi y a-t-il tellement de gens qui décèdent dans le corridor Toronto-Windsor-Montréal et dont personne ne parle? Pourquoi y a-t-il tellement de gens qui meurent entre cet hôtel et Hope chaque année?

Monsieur le président, si le Sénat commençait à produire des renseignements précis et s'il les diffusait dans le grand public sur les options qui s'offrent à nous sur le plan énergétique, je pense que ces renseignements seraient bien accueillis. Lorsque nous avons fait notre tournée sur le glissement du rapport de force dans tout le Canada avec David Suzuki, partout où nous nous sommes arrêtés, nous avons vendu toutes les places, nous avons même dû refuser du monde. Par ailleurs, toutes les industries que vous pouvez imaginer avaient un représentant sur place; les fabricants d'automobiles, le secteur pétrolier essayaient tous de se faufiler. Tout le monde voulait assister à la conférence et en apprendre un peu plus sur la façon de procéder pour obtenir une réduction de 50 p. 100 d'une manière tout à fait économique sans mettre en péril l'économie canadienne. Actuellement, le Parlement se démène pour essayer de justifier pourquoi il n'est pas en mesure de respecter ses engagements pris dans le cadre du Protocole de Kyoto qui consistait à réduire ses émissions de 6 p. 100. Si nous ne commençons pas dès maintenant à aller dans la bonne direction pour ce qui est de ces réductions, et bien les dés sont jetés. La dernière fois que nous avons interrompu le cycle du carbone sur cette planète, il y a eu une extinction de masse.

Le sénateur Adams: J'aimerais poser quelques questions au sujet des parcs d'éoliennes. Avant de devenir sénateur, j'étais électricien. Et je continue de faire certains travaux d'électricité. Je ne veux pas perdre la main, aussi chaque fois que je rentre à la maison, j'essaie de faire quelques menus travaux d'électricité.

Vous avez mentionné qu'en Allemagne, on employait environ 35 000 personnes dans la production de l'électricité grâce aux éoliennes. Je pense, si je ne me trompe pas, que nous avons entrepris un programme semblable en Alberta il y a environ dix ans, aux alentours de Pincher Creek. Il y a 15 ou 20 ans, quelqu'un ou une entreprise quelconque a démarré un projet de ce genre, mais je ne sais pas ce qui est arrivé par la suite. Je suppose que le gouvernement n'était pas très intéressé. Mais quelqu'un a voulu investir dans un projet de cet ordre, c'est-à-dire construire un parc d'éoliennes.

D'une manière ou d'une autre, avons-nous un avenir dans cette nouvelle technologie? Est-ce qu'ici au Canada nous sommes en mesure de suivre l'exemple de l'Allemagne, de la Suisse, de la Finlande et du reste de l'Europe?

M. Scott: La technologie a fait des progrès immenses au cours de la dernière décennie, en particulier. Cette industrie a démarré de façon massive au Danemark, et maintenant elle donne du travail à 14 000 personnes. Comme nous l'avons souligné dans notre introduction, en Allemagne cette industrie emploie 35 000 personnes. Une grande partie de cette électricité est destinée à l'exportation, et on raffine constamment la technologie afin de la rendre plus efficace, pour les facteurs de coûts ainsi que pour toutes sortes d'applications diverses.

Elle est bien positionnée actuellement en Europe, et je pense qu'il en sera de même en Amérique du Nord et certainement en Asie d'ici cinq ans. Nous pouvons prévoir de grands parcs d'éoliennes continentaux. Par conséquent, une bonne partie des efforts consacrés à la recherche et développement sur le plan de la technologie sont actuellement dirigés vers les parcs d'éoliennes continentaux où il y a, bien entendu, encore plus d'espace et de débouchés. Par ailleurs, la technologie permet de réduire les coûts. Dans des pays comme l'Inde, on voit apparaître de nouvelles industries ainsi que de nouvelles applications de haute technologie alors que dans d'autres régions on en est encore à produire de l'électricité à l'aide de centrales au charbon, par exemple.

À mon avis, le Canada doit tirer son épingle du jeu. Les États-unis peuvent décider de ne pas respecter l'accord de Kyoto, mais juste au cours des deux derniers mois dans le Nord-Ouest, nous avons eu deux importantes annonces. La Florida Light and Power a annoncé la construction du plus grand parc d'éoliennes en Amérique du Nord, avec une production de 300 mégawatts, qui se trouvera à la frontière de l'Oregon et du Washington. Par la suite, la Bonneville Power Authority, BPA, qui est probablement la plus grande ou l'une des plus importantes sociétés d'énergie aux États-Unis, a commandé un autre parc d'éoliennes de 1 000 mégawatts qui proviendra des producteurs du Nord-Ouest.

Dans tout le midwest américain, les caractéristiques économiques changeantes de l'énergie éolienne, qui dépend de la technologie, ont eu pour effet que bien des états agricoles du midwest ont mis sur place des programmes d'énergie éolienne actifs, à la fois dans le secteur privé et public. L'énergie éolienne est concurrentielle avec le gaz naturel dans presque tous les cas là où le vent comme ressource existe, ce qui est le cas de la majeure partie de l'Amérique du Nord. Les agriculteurs tirent maintenant des revenus intéressants de l'installation de parcs d'éoliennes dans leurs champs. Au Texas, au Minnesota, en Ioha et dans de nombreux autres États du midwest, on note des développements vraiment positifs dans ce domaine. Je pense que l'annonce faite par la Saskatchewan il y a dix jours au sujet des parcs d'éolienne incluait des dispositions relatives à la sélection de propriétés agricoles privées en vue de l'installation de parcs d'éoliennes, suivant plus ou moins la même approche. La technologie évolue vraiment.

Encore une fois, si nous pouvons attirer l'attention sur les débouchés qui existent pour l'activité économique canadienne dans ce domaine, non seulement en ce qui concerne l'installation des sites des parcs d'éoliennes, mais également en s'intéressant au côté productif de cette industrie, qui crée de nouveaux emplois, de nouvelles industries et de nouveaux débouchés, je pense qu'il y a là un potentiel intéressant pour nous. Il est certain que cette industrie peut se développer dans des contextes économiques très évolués comme ceux du Danemark et de l'Allemagne, mais je ne vois pas pourquoi nous ne pourrions pas envisager les mêmes possibilités.

Le sénateur Adams: Oui. Nous avons assisté à la conférence sur le changement climatique à Whitehorse, il y a environ un mois, et nous sommes allés voir l'installation de Yukon Energy. Cette installation comporte deux éoliennes, une de 650 kilowatts et l'autre de 150 kilowatts. Nous avons maintenant une éolienne installée à Rankin. Elle ne produit que 60 kilowatts, elle n'est donc pas très grosse, mais au moins elle a permis de réduire la production d'électricité et de diminuer la consommation de diesel qui servait auparavant à la production de l'électricité dans cette collectivité.

Pour ce qui est des ressources renouvelables, notre ministre Ralph Goodale, qui a passé quelques heures à Whitehorse, a annoncé que son gouvernement avait l'intention de mettre en place une nouvelle politique énergétique en rapport avec le changement climatique. Il a mentionné que le gouvernement investirait de l'argent. Il me semble qu'il a avancé le chiffre d'un milliard de dollars, quelque chose dans les 40 quelque chose, je ne sais pas exactement quel est le montant. Mais je ne sais pas non plus si cet argent sera consacré à la mise en place de méthodes comme la production d'électricité à partir d'éoliennes ou s'il servira à trouver des moyens de réduire la production de CO2. Il n'a pas donné de précisions, mais il a seulement dit qu'ils avaient un milliard de dollars à dépenser.

Peut-être que vous avez une meilleure idée de ce que le ministre a l'intention de faire avec cet argent dont il a parlé à Whitehorse. Peut-être que vous avez de meilleurs contacts et de meilleures connaissances dans ce domaine, étant donné que vous vous préoccupez du changement climatique et de l'énergie renouvelable.

Quant à moi, dans ma collectivité de Rankin Inlet, je paye 40 cents le kilowatt-heure, alors qu'en Colombie-Britannique, je pense que vous payez seulement de 8 à 10 cents le kilowatt-heure. Les coûts du combustible sont très élevés à Rankin. Le combustible et l'électricité sont très chers, et les gens ne peuvent se le permettre. Même s'ils ont construit leur propre maison, les gens qui vivent dans l'Arctique, dans le Nord, n'ont pas les moyens de payer les factures d'électricité et de chauffage.

M. Fulton: Il ne fait aucun doute que bien des régions du Canada se prêteraient à l'installation de projets pilotes d'énergie renouvelable. Nous examinons le projet des Premières nations à l'intérieur de la Colombie-Britannique. Nous avons eu des discussions avec Kip Smith concernant la possibilité d'utiliser l'une de leurs premières centrales autonomes de 250 watts dans cette région et la micro-production d'électricité, l'énergie éolienne et l'énergie solaire - autrement dit, de se tourner vers des sources différentes pour produire une alimentation énergétique de base et ensuite vers la pile à combustible Ballard à titre de systèmes de redistribution de cette énergie en s'en servant davantage comme un système de batterie pour redistribuer cette énergie dans la collectivité.

Le gouvernement fédéral a exprimé un certain intérêt pour l'étude d'autres sites, particulièrement dans les collectivités des Premières Nations, qui sont rurales, éloignées, souvent dépourvues de réseaux routiers et, dans bien des cas n'ont même pas d'aéroports, ne sont accessibles ni par bateau ni par petits aéronefs et sont finalement dépendantes du diesel. Il arrive très souvent que ces centrales au diesel se trouvent en plein centre de la ville et qu'elles produisent des particules très désagréables. Nous savons que ces centrales au diesel sont directement reliées à des problèmes respiratoires très sérieux. Il y a également la question du bruit, et en plus, elles sont très inefficaces.

Il y a toute une gamme d'endroits où le gouvernement fédéral pourrait dépenser cet argent, plutôt que de faire ce qu'il a fait au cours du dernier quart de siècle, c'est-à-dire, comme l'a révélé le vérificateur général, pelleter plus de 40 milliards de dollars, distribués dans des petites enveloppes brunes à l'industrie pétrolière de ce pays par l'entremise de mesures fiscales, et il est grandement temps...

Le président: Si vous me permettez, juste une seconde, pour mentionner les mesures fiscales. Personne n'a encore parlé du fait que le secteur des hydrocarbures est comme celui de l'alcool: ce secteur est soumis à l'imposition d'une taxe, aussi lorsque vous vous présentez à la pompe, près des deux tiers du prix relèvent de la taxe. Le même raisonnement s'applique au gaz naturel; en fait, nous avons une taxe sur le carbone depuis des années. Pour le gaz naturel, étant donné les redevances qui sont payées, le pourcentage est un peu inférieur, il se situe autour des 15 p. 100 de taxes gouvernementales.

Ces possibilités dont vous avez parlé, vous dites qu'elles seront concurrentielles avec le prix d'aujourd'hui, mais que fera le gouvernement lorsqu'il perdra toutes les recettes qu'il tire des hydrocarbures? C'est en quelque sorte une sainte taxe.

M. Scott: Pour commencer, nous reconnaissons que le changement devra être très graduel; que cette transformation des combustibles à base de carbone vers des énergies renouvelables et, si possible, efficaces, devrait s'effectuer très progressivement. Il n'y aura pas de chute immédiate et radicale des recettes. Toutefois, nous devons également revenir sur deux parties de ce scénario, tout d'abord sur le fait que cette industrie génère d'importantes recettes fiscales. Le vérificateur général les a quantifiées, il est vrai que nous dépensons de l'argent, et que nous en faisons aussi un peu, mais la composante de la recette fiscale a sa contrepartie dans le sens de subventions directes, mesures d'encouragement et dispositions fiscales.

Deuxièmement, en raison du changement climatique, de la pollution atmosphérique régionale, il y a un important facteur de coûts dans la production et la consommation des combustibles fossiles. Par conséquent, si nous évaluons et pondérons cette situation dans le sens économique pur et simple, comme l'a souligné M. Fulton un peu plus tôt, et nous avons tous plus ou moins fait référence à divers moments au fait que la consommation des combustibles fossiles a un prix et que ce prix doit être évalué. Ce prix est en effet constitué de dérangements climatiques violents, qu'il s'agisse d'inondations, de dommages à la santé humaine, de dommages aux cultures et ainsi de suite. Nous devons par conséquent compiler toutes ces pertes et ces coûts et essayer de déterminer qui les assume. Lorsque nous perdons des cultures à cause de la consommation de combustibles fossiles, comme c'est le cas ici à Abbotsford, nous savons que l'industrie des combustibles fossiles ne paie pas la note. C'est le secteur public fait les frais. Par conséquent, nous devons examiner le cycle complet des coûts et des avantages.

M. Fulton: J'étais sur le point de vous signaler une section de notre exposé. C'est la section sur le contexte, et dans le dernier paragraphe de cette section il y a une citation que j'aimerais vous lire:

D'autres effets escomptés comprennent notamment des modifications de la teneur en humidité du sol, une élévation du niveau de la mer ainsi que des possibilités accrues d'événements atmosphériques extrêmes, comme les inonda tions et les sécheresses.

Le secteur de l'assurance mondiale a déjà remarqué une augmentation des catastrophes naturelles au cours du dernier demi-siècle. Les catastrophes naturelles liées aux conditions atmosphériques ont quadruplé depuis 1950, et les coûts ont été multipliés par 14. En 1998, les coûts économiques découlant des catastrophes naturelles dépassaient les 90 milliards de dollars américains. Entre 1984 et 1998, les pertes économiques au Canada ont grimpé de plus de 30 fois, passant de 39 millions de dollars à 1,45 milliard.

C'est de ce genre de coûts que nous aimerions vous encourager à parler dans votre rapport afin d'en faire part aux Canadiens.

Le président: Merci beaucoup. Votre temps est écoulé, mais je vais laisser le sénateur Spivak poser une autre question.

Le sénateur Spivak: J'ai beaucoup d'autres questions, mais j'en poserai seulement une très rapide au sujet de la Care Coalition. Vous faites partie de cette coalition, n'est-ce pas?

M. Scott: Non, non.

Le sénateur Spivak: C'est une coalition en rapport avec le Pembina Institute?

M. Scott: Oui, il est vrai que nous travaillons avec Pembina sur de nombreuses questions.

Le sénateur Spivak: Très bien. Ils ont demandé à Paul Martin deux choses: des crédits d'impôts et j'ai oublié l'autre volet.

M. Scott: Pour les producteurs et les consommateurs. Il y avait deux volets, avec un certain nombre de compagnies d'électricité.

Le sénateur Spivak: Oui, mais maintenant un milliard de dollars a été affecté, je pense, à partir de sommes non attribuées - est-ce que c'est exact?

M. Scott: La plus grande partie de ce milliard de dollars dont le ministre Goodale a annoncé l'attribution lors de la conférence de Whitehorse a été injectée dans le mini-budget qui a été présenté à l'automne de l'année dernière, et la majeure partie de cet argent a déjà été attribué au moment où l'on se parle.

L'effort de la Care Coalition Vise à obtenir de nouvelles dispositions fiscales à la fois pour les producteurs et pour les consommateurs, des dispositions qui agiraient à titre de mesures d'encouragement pour la production et la consommation d'énergie renouvelable, y compris l'énergie éolienne.

Le sénateur Spivak: Je vois. Je n'avais pas réalisé que la majeure partie de ce milliard de dollars avait déjà été attribuée, parce que j'allais vous demander, à quoi pourrait bien servir cet argent? Autrement dit, quelles sont vos priorités? Par exemple, disons que nous disposerions d'un autre 500 millions de dollars ou même d'un milliard?

Le président: Je pense qu'il faudra plus de deux minutes pour répondre à cette question.

Le sénateur Spivak: Oui, en effet. Alors, plus simplement, quelles sont vos priorités?

M. Fulton: Je pense que si vous jetez un coup d'oeil à la liste, c'est très bien expliqué dans notre mémoire. Nous pensons réellement qu'à l'échelle nationale le gros des efforts devrait viser à informer les Canadiens de la façon dont nous entendons procéder pour respecter notre engagement pris à Kyoto sur la réduction de 6 p. 100, et comment nous prévoyons opérer les réductions de 50 à 60 p. 100 que nous devons effectuer. Les Canadiens doivent absolument être informés de cette question. Comme le sénateur Adams le sait probablement mieux que quiconque, lorsque vous commencez à parler aux aînés qui vivent au Nord du 60e parrallèle, vous réalisez qu'ils sont à même de constater le changement climatique. Le poids corporel des ours polaires a diminué de 20 p. 100 depuis 1990. Depuis 1960, 50 p. 100 de la calotte polaire a fondu en Arctiques. Ces types d'érosion et de perte au niveau de la population et des espèces au nord du 60e parallèle sont phénoménaux. Si les Canadiens avaient seulement une idée de ce qui se passe réellement dans notre Nord, le gouvernement serait forcé de se diriger vers l'énergie renouvelable plutôt que d'essayer de trouver encore de nouveaux moyens de consommer davantage de charbon.

M. Scott: Monsieur le président, je serai bref. Mise à part la question de l'investissement, nous insistons pour que des aspects comme la question des normes soient examinés. On réalise souvent les gains les plus importants sans qu'il soit nécessaire de débourser un sou. Nous disposons de la technologie pour les immeubles que nous avons décrits un peu plus tôt, nous avons les meilleurs architectes pour la construction d'immeubles écologiques au monde, ici au Canada, et nombre d'entre eux sont en Colombie-Britannique, nous savons que la technologie automobile existe, il suffit de la mettre en production de masse, secteur par secteur. Il est inutile de dépenser l'argent durement gagné par les contribuables. Nous avons besoin de normes qui donneront aux consommateurs, à l'industrie, aux entreprises, aux hôpitaux et aux écoles la possibilité d'économiser de l'argent.

Le président: C'est un excellent commentaire de conclusion. Merci beaucoup, messieurs. Nous sommes très heureux de vous avoir eus avec nous ici cet après-midi. Vous nous avez aussi donné beaucoup de documentation écrite à étudier.

J'aimerais maintenant accueillir M. Stephen Kukucha. Peut-être pourriez-vous nous décrire en quelques mots votre expérience afin de nous aider à bien comprendre quelle sorte d'expert que vous êtes.

M. Stephen Kukucha, conseiller principal, Affaires extérieures, Ballard Power Systems: Monsieur le président, sénateur Spivak et sénateur Adams, je suis le conseiller principal de Ballard Power Systems pour les affaires extérieures, ici à Vancouver.

Pour ce qui est de mes antécédents, je suis en fait avocat de formation, mais j'ai une certaine expérience du gouvernement fédéral. J'ai occupé dans le passé le poste de conseiller principal auprès du ministre de l'environnement. Autrement dit, j'ai récemment quitté l'administration fédérale pour faire le saut dans le secteur privé, et l'expérience me satisfait. Ballard est une entreprise unique et vraiment correcte, je suis ravi d'en faire partie. Je suppose que vous avez tous un exemplaire de mon exposé?

Le président: Oui.

M. Kukucha: J'avais pensé commencer par vous donner un aperçu de la technologie, si cela vous convient, je vous présenterais un cours qui pourrait s'intituler «Piles à combustible 101», faute d'une meilleure expression. Est-ce que cela vous convient?

Voici les éléments d'une pile à combustible. Si vous passez à la première diapositive, je vais vous expliquer comment fonctionne une pile à combustible.

La plaque épaisse est l'une des premières que nous avons mises au point à Ballard Power Systems. Une pile à combustible est formée de deux plaques réunies en sandwich autour d'une membrane échangeuse de protons, qui est la pièce - oui, voici la membrane. Les sénateurs Taylor et Adams en ont une.

Pour vous donner une idée des progrès que nous avons réalisés en matière de technologie, la plaque lourde a été, comme je l'ai déjà mentionné, mise au point par Ballard il y a quelques années. Au début, ces plaques étaient usinées à la main et très lourdes, comme vous pouvez le voir, et le coût des matériaux était très élevé. Depuis, nous sommes passés à une nouvelle technologie, avec des plaques beaucoup plus légères, qui sont fabriquées en usine, et vous pouvez voir la différence de poids ainsi que les différents...

Le président: Combien faut-il de ces plaques pour faire fonctionner une automobile?

M. Kukucha: Ces plaques sont différentes selon qu'il s'agit d'une automobile ou d'un autobus ou encore d'un matériel portatif, et en fait le nombre réel de piles qu'il y a dans une pile à combustible complète pour un seul véhicule n'est pas divulgué. Nous ne donnons pas cette information publiquement.

Le sénateur Spivak: S'agit-il d'une pile complète?

M. Kukucha: C'est la moitié d'une pile. Si vous prenez l'autre plaque, ceci va au milieu, et ensuite vous prenez cette plaque et si vous tenez ça tout ensemble, la partie centrale de la pile à combustible est la petite pièce que le sénateur Taylor tient dans sa main, et qu'on appelle la membrane échangeuse de protons. Voici comment ça fonctionne: vous mettez de l'hydrogène dans un côté de la plaque et l'hydrogène passe par toutes les rainures, vous mettez de l'oxygène de l'autre côté de la plaque et l'oxygène traverse par les rainures. C'est ce que l'on appelle une pile à combustible à membrane échangeuse de protons, la membrane se trouve au milieu. Les protons traversent la membrane et les électrons circulent autour de la membrane. C'est un procédé chimique très simple au moyen duquel vous chassez les électrons d'une source d'hydrogène pour créer de l'énergie pure. Le seul produit dérivé de ce processus est un peu d'eau et de chaleur. Il n'y a aucun polluant, et aucun gaz à effet de serre.

Le président: Le combustible peut être n'importe quoi?

M. Kukucha: Eh bien voilà le défi qui se pose aux piles à combustible actuellement, l'infrastructure de combustible. Dans le cas présent, le combustible utilisé est de l'hydrogène. Vous pouvez utiliser soit de l'hydrogène gazeux ou de l'hydrogène liquide, il est possible de l'utiliser sous des formes différentes. Vous pouvez réformer du méthanol pour produire de l'hydrogène, ou encore réformer du gaz naturel pour produire de l'hydrogène, vous pouvez l'utiliser dans sa forme pure gazeuse ou liquide, mais pour arriver à ces étapes, vous aurez probablement besoin d'un reformeur, si vous ne voulez pas utiliser de l'hydrogène pur.

Le président: Pouvez-vous utiliser de l'eau ou de l'essence?

M. Kukucha: Vous pouvez en fait utiliser de l'eau. L'électrolyse est un des moyens utilisés pour produire de l'hydrogène. Ce procédé nécessite un électrolyseur et une société de Toronto appelée Stuart Energy en produit. En fait, vous branchez leur appareil dans une prise avec un cordon électrique et un tuyau et il en sort de l'hydrogène.

Le sénateur Spivak: Par conséquent, ce processus ne nécessite pas vraiment une autre source d'énergie? A-t-il besoin d'électricité ou est-il entièrement autonome - je ne comprends pas.

M. Kukucha: En fait, il a besoin d'électricité parce qu'au cours du procédé d'électrolyse, l'électricité sépare l'eau en hydrogène et en ses autres composants. En réalité, la formule de l'eau est H2O, donc c'est deux parties d'hydrogène et une partie d'oxygène. L'électricité sépare ces deux éléments et on obtient ainsi l'hydrogène. Par conséquent, vous avez effectivement besoin de l'électricité produite par une centrale pour y arriver.

Tandis qu'avec le méthanol, les choses sont un peu différentes. Si vous passez à la deuxième diapositive, notre composant ici est la figure bleue sur le diagramme, la pile de combustible est dans le milieu. Sur la diapositive que vous regardez actuellement, sénateur Spivak, vous voyez que le méthanol ou le gaz naturel arrive du côté gauche de la diapositive; il faut utiliser un reformeur interne ou externe qui permet de séparer l'hydrogène du méthanol ou du gaz naturel, et cela crée l'hydrogène nécessaire pour alimenter la pile à combustible.

Le sénateur Spivak: Avez-vous des objections à ce que nous posions des questions durant votre exposé?

Le président: Nous ne disposons que de 45 minutes pour ce témoin.

Le sénateur Spivak: Très bien.

Le président: Je suggère, sénateur, que vous preniez des notes sur la diapositive, et nous y reviendrons un peu plus tard.

M. Kukucha: La première diapositive montre le processus chimique, il s'agit d'un processus à la fois simple et élégant pour produire de l'électricité, parce qu'il suffit de cliver les électrons.

La deuxième diapositive vous montre les accessoires dont vous avez besoin autour de la pile à combustible dans une automobile ou dans une centrale pour la faire fonctionner. Parce que la pile à combustible elle-même crée un courant continu, ce n'est pas un courant que vous pouvez utiliser directement. Vous ne pouvez donc pas vous brancher directement dans une pile sans certains accessoires. Voici donc quelques-uns des éléments dont vous avez besoin pour produire de l'électricité utilisable à partir d'une pile à combustible.

La diapositive suivante décrit quelques-unes des raisons qui justifient l'utilisation des piles à combustible, et je suis sûr que certains des témoignages que vous avez entendus ici aujourd'hui y ont fait référence. De toute évidence, les préoccupations relatives à l'environnement visent la production de l'énergie. Un aspect qui est moins connu des piles à combustible est le fait que celles-ci sont deux fois, sinon davantage, plus efficaces qu'un moteur thermique. L'efficacité d'un moteur thermique est d'environ 20 p. 100, tandis que celle d'une pile à combustible est de près de 40 p. 100. Si vous utilisez la pile dans une centrale de cogénération, où il est possible également de récupérer le dégagement thermique, cette efficacité passe à près de 80 p. 100. Par conséquent, elles sont beaucoup plus efficaces, ce qui signifie qu'elles nécessitent moins de combustible.

D'autres facteurs justifient le développement des piles à combustible, comme nous pouvons le voir aujourd'hui en Californie, ce sont la déréglementation des compagnies d'électricité et le fait que l'on a davantage besoin d'énergie. L'un des aspects les plus intéressants des piles à combustible est que vous disposez d'une source régulière d'électricité de première qualité, tandis qu'avec le réseau de distribution d'électricité, vous connaissez des fluctuations et votre source d'alimentation n'est pas aussi constante. Avec les piles à combustible, vous disposez d'une source d'énergie constante et de première qualité.

Un autre aspect qui est assez évident en Californie, mais que nous n'avons pas encore vu au Canada, a trait aux contraintes liées à la transmission. Même si vous disposez de la capacité nécessaire pour produire de l'électricité, vous devez la distribuer jusque dans les maisons et les véhicules. Si vous utilisez de l'électricité pour alimenter les véhicules, ce qui est fait en Californie, il y a des contraintes imposées au réseau.

La société Ballard a trois lignes de produits. Nous sommes donc passablement diversifiés parce que nous ne produisons pas seulement des piles à combustible pour les véhicules et les autobus, mais également de petits blocs électrogènes portatifs et fixes. Je pense que c'est Gerry Scott ou Jim Fulton qui a fait référence à notre unité de 250 kilowatts, qui est une unité d'un quart de mégawatt. Nous travaillons actuellement à la production de 12 de ces unités à des fins de démonstration sur le terrain. Ces unités pourraient être utilisées pour alimenter un immeuble ou une maison ou encore une série de maisons. Ainsi, nous ne sommes pas spécialisés seulement dans l'industrie automobile et des autobus; nous oeuvrons également dans le marché des blocs électrogènes fixes et portatifs.

La diapositive suivante, celle qui a des flèches, montre comment nous constituons nos différents marchés. Il sera plus facile pour nous de percer le marché des blocs électrogènes à cause de la technologie. L'un des marchés les plus difficiles à pénétrer est celui de l'automobile. Par conséquent, toute l'expérience que nous pourrons acquérir d'ici 2005 en ce qui a trait au marché de l'automobile nous servira à réduire les coûts et également à améliorer légèrement l'efficacité de la technologie pour le marché de l'automobile.

Comme je l'ai déjà mentionné, dans la diapositive suivante, je fais référence à certaines applications, à des débouchés et à des solutions que nous possédons en rapport avec les blocs électrogènes portatifs. Pour ce qui est des blocs électrogènes disponibles aujourd'hui, prenons par exemple les génératrices de type Coleman ou de petits appareils que vous pouvez utiliser pour alimenter votre chalet d'été ou encore pour prendre la relève lorsqu'il y a une tempête de verglas, c'est ce genre d'appareil que vous pourriez utiliser pour alimenter votre installation. Le problème avec ce type d'appareil c'est qu'ils utilisent de l'essence ou du diesel et qu'ils ont des émissions et des fumées, par conséquent vous ne pouvez pas les utiliser à l'intérieur sinon il y a des risques d'asphyxie.

Avec les piles à combustible, par contre, il est possible de mettre l'accent sur les caractéristiques de «souplesse d'installation», parce que vous pouvez les installer pratiquement n'importe où. Ces appareils sont propres, silencieux, sans vibrations, et n'ont absolument aucune émission. Dans une situation comme celle d'une tempête de verglas, vous auriez votre génératrice à l'intérieur afin d'alimenter les appareils les plus essentiels et vous pourriez attendre que la tempête se termine, tant et aussi longtemps que vous disposeriez d'un réservoir d'hydrogène pour alimenter cette pile à combustible. Nous pensons qu'il existe un très bon marché pour ces premières applications, que ce soit pour les gens qui travaillent à la maison ou à des fins d'urgence, lorsque des génératrices sont déjà utilisées ou pourraient être utilisées.

Le président: Est-ce que les réservoirs d'hydrogène sont les mêmes que ceux qu'utilisent les soudeurs?

M. Kukucha: Il existe différents moyens de stocker l'hydrogène, que ce soit sous la forme d'hydrogène gazeux, comme dans le cas des soudeurs, ou encore il existe une substance appelée hydrure métallique qui permet d'emmagasiner une quantité assez importante d'hydrogène.

Nous projetons de mettre sur le marché notre premier produit cette année qui sera alimenté par une bouteille d'hydrogène et, encore une fois, nous n'avons pas fait de publicité sur ce produit.

Le sénateur Spivak: Pour les bateaux, ce serait fantastique.

M. Kukucha: Absolument. Nous envisageons un autre marché. Pour ce qui est du réseau de distribution de l'hydrogène, nous prévoyons quelque chose de très simple comme lorsque vous passez chercher une bouteille de gaz propane comme les gens le font pour leurs barbecues ou pour leurs petites génératrices, c'est très sécuritaire et très pratique.

Sur la page suivante, vous voyez une photographie de l'un de nos appareils de démonstration utilisé avec les piles à combustible portatives. C'est notre prototype. L'appareil de type commercial, que nous prévoyons mettre sur le marché cette année, ne sera pas beaucoup plus gros que celui-ci.

Nous travaillons avec des partenaires de grande renommée comme Coleman, Honda et Yamaha, et nous prévoyons faire cette année le lancement de notre première pile à combustible commerciale que nous voulons vendre dans le monde entier. Ce lancement devrait avoir un très grand retentissement commercial.

Le sénateur Spivak: Quand?

M. Kukucha: Encore une fois, étant donné que nous sommes une société commerciale, je ne peux vous révéler exactement à quel moment nous allons le faire, mais ce sera quelque part en 2001. Nous sommes très excités par cette possibilité.

Une autre application mentionnée sur la prochaine diapositive est celle du bloc électrique fixe, et il s'agit du plus gros appareil, celui que Gerry et Jim ont mentionné. Encore une fois, les mêmes caractéristiques s'appliquent à cet appareil que pour le modèle portatif: vous pouvez l'installer n'importe où, il est propre, il est silencieux et il n'a aucune émission. Toutefois, avec cet appareil, nous entrevoyons une solution réelle à la crise de l'énergie qui s'installe dans des endroits comme la Californie et qui pourrait bien voir le jour au Canada si nous ne faisons pas attention à la façon dont nous développons nos ressources énergétiques. Avec la déréglementation, attendez-vous à un accroissement de la demande à l'égard du réseau de distribution, et les piles à combustion fixes fourniront cette électricité distribuée. Par conséquent, plutôt que de se rabattre sur le réseau de distribution d'électricité classique, soit une centrale quelque part, alimentée soit au charbon, soit au gaz naturel pour produire de l'énergie et la distribuer par des câbles d'électricité, vous pourrez utiliser une pile à combustible, soit dans votre maison ou dans votre voisinage ou encore dans l'immeuble où vous travaillez, et ce système vous fournira l'électricité sur place. Dans les périodes de pointe, vous pourriez utiliser cet appareil pour alimenter vos immeubles, et dans les périodes où la demande est moins forte, lorsqu'il y a moins de demande pour votre propre réseau, vous pourriez revendre cette électricité au réseau électrique. Vous auriez ainsi une capacité de produire des revenus au sein de votre propre immeuble. Je pense qu'il y a un excellent marché pour ce produit aussi, dès maintenant et dans un avenir assez rapproché.

Sur la page suivante vous voyez des photographies de deux de nos appareils. Le gros appareil sur la gauche est une unité d'un quart de mégawatt ou de 250 kilowatts, et cet appareil pourrait alimenter un petit immeuble à bureaux ou encore un restaurant McDonald's - j'aime utiliser l'exemple d'un McDonald's parce qu'ils utilisent beaucoup d'électricité. Donc, cet appareil pourrait suffire aux besoins d'un restaurant McDonald's durant 24 heures. Et il resterait encore un peu d'électricité. En fait, cet appareil est actuellement à l'essai par une compagnie appelée Cinergy in Crane, en Ohio, sur une base militaire.

Le président: De toute évidence, on ne voit personne debout à côté de l'appareil. Est-ce qu'il mesure dix étages de haut ou seulement six pieds?

M. Kukucha: Vous pouvez l'installer à l'intérieur d'un immeuble. Il mesure environ huit pieds de haut, et il est probablement aussi long que votre table.

L'autre appareil que vous voyez ici à droite est une unité d'un kilowatt, c'est l'appareil que nous prévoyons commercialiser au Japon. Les Japonais ont tourné le problème dans tous les sens et ils se sont dits: «Équipons chaque maison d'une unité de un kilowatt pour les besoins de base en électricité, et le réseau électrique prendra la relève lorsqu'il y aura des pointes de demande». Voici donc le type d'appareil qui alimentera les maisons au Japon dans un avenir très rapproché. Ils ont pris une avenue différente en rapport avec la déréglementation.

Le président: Quelle tension de courant ces appareils sont-ils en mesure de produire? S'agit-il de la tension habituelle dans une application domestique ou alors devez-vous avoir recours à des transformateurs si nécessaire?

M. Kukucha: Ces appareils produisent un courant continu et les convertisseurs y sont intégrés...

Le sénateur Adams: Du courant continu, et non du courant alternatif?

M. Kukucha: Avec l'appareil portatif, vous pouvez tout simplement brancher votre ordinateur directement dans l'appareil. L'appareil portatif dispose également d'un capteur et si nous prévoyons une panne d'électricité à la maison, alors l'appareil portatif prend immédiatement la relève de sorte qu'il n'y a aucune interruption ou panne de courant.

Maintenant pour ce qui est des marchés du secteur du transport, sur la diapositive suivante, ils sont plus difficiles d'accès, et nous devons réduire les coûts par appareil de façon importante, parce que c'est un secteur très concurrentiel. Cependant, c'est vraiment le marché avec le plus grand potentiel pour nous dans le domaine des piles à combustible, ce marché représente plus de 182 milliards de dollars par année en chiffre d'affaires. C'est le marché que nous visons. Nous nous sommes fixé un objectif qui est d'entrer sur le marché de l'automobile d'ici 2007 ou 2008. Nous avons déjà des échanges commerciaux avec les principaux fabricants automobiles, y compris Ford, DaimlerChrysler, Honda, General Motors et d'autres. Ford et DaimlerChrysler sont les principaux actionnaires de Ballard, mais nous avons également un certain nombre d'autres clients, y compris Honda, Nissan et la plupart des grands fabricants d'automobiles.

Sur la diapositive suivante, nous expliquons qu'un certain nombre de caractéristiques des blocs électrogènes portatifs et fixes sont les mêmes que pour les automobiles. Ces appareils sont propres, ne produisent aucun polluant ou gaz à effet de serre, ils produisent une électricité de première qualité, ils ont en outre un rendement très élevé, ils n'ont aucune pièce mobile et, par conséquent, leur entretien est minimal. Ces véhicules à pile à combustible sont également très agréables à conduire et j'invite chacun d'entre vous à venir nous rendre visite chez Ballard un de ces jours et nous vous en ferons essayer un. Nous n'en avons pas un aujourd'hui, malheureusement, mais je vous invite tous à venir les voir une autre fois.

Deux des autres caractéristiques uniques des véhicules à pile à combustible sont la très grande liberté d'action sur le plan de la conception. Une pile à combustible n'est pas comme un moteur: elle n'a pas besoin d'être située à l'avant du véhicule et par conséquent on dispose d'une plus grande flexibilité. Vous pouvez l'installer n'importe où dans la voiture, ce qui est une caractéristique extrêmement intéressante pour les fabricants automobiles. Toutefois, nous pensons que l'une des caractéristiques les plus extraordinaires est celle d'avoir la capacité d'alimentation à bord du véhicule. La pile à combustible que nous utilisons pour alimenter une automobile a une capacité d'environ 830 kilowatts, et les voitures habituellement n'ont pas besoin de plus de 80 kilowatts. Vous pouvez prendre votre véhicule pour aller à la plage et le faire fonctionner et sans qu'il y ait aucune émission, vous avez toute une gamme de puissance disponible pour votre véhicule. Vous pouvez l'utiliser comme s'il s'agissait d'un bureau, pour alimenter un télécopieur par exemple. Certains modèles de voitures que j'ai vus sont équipés de lave-vaisselle et de machines à laver et...

Le sénateur Spivak: J'ai lu quelque part que vous pouviez vous rendre à votre travail avec votre voiture, en arrivant vous pouvez brancher l'alimentation et produire de l'électricité pour le bureau.

M. Kukucha: Oui, vous pouvez aussi faire ça et vous pouvez le faire à la maison aussi.

Le sénateur Spivak: Vous pouvez vendre l'électricité produite lorsque vous ne l'utilisez pas parce que vous êtes au bureau toute la journée, et cela pourrait représenter également un avantage.

M. Kukucha: Vous avez tout à fait raison. L'une des caractéristiques uniques des piles à combustible est que vous pouvez retourner chez vous et alimenter toute la maison à même cette pile. Le problème, bien entendu, est que si vous partez avec votre voiture, vous n'avez plus d'électricité pour la maison.

Toutefois, ce système offre une myriade de possibilités et c'est ce qui le rend si excitant. Un des aspects les plus importants, à notre avis, est que les piles à combustible sont véritablement écologiques et qu'elles représentent une solution au problème de qualité de l'air que nous éprouvons dans ce pays dans certains régions urbaines et également à certains problèmes que nous devons affronter du point de vue des gaz à effet de serre. Quelle que soit la position politique prise chez nos voisins du Sud, nous pensons qu'il s'agit d'une solution réelle à certains des engagements exigés par le Protocole de Kyoto et que notre pays doit respecter à ce moment-ci.

Seulement pour vous montrer certains développements illustrant les progrès que nous avons faits ces dernières années, la prochaine diapositive décrit la densité de l'alimentation. L'un des problèmes inhérents à la production commerciale des piles à combustible consiste à produire la densité de courant dont vous avez besoin, qui est celle de 80 kilowatts pour une automobile, mais également d'en réduire le coût de production et c'est la raison pour laquelle je vous ai montré ces plaques tout à l'heure. La plaque la plus lourde qui est à droite a été produite pour la première fois en 1991 et avec la dimension et le poids de cette pile à combustible, elle ne produisait que cinq kilowatts. Pendant, depuis les huit ou neuf dernières années, nous avons fait des progrès technologiques qui nous permettent aujourd'hui de produire 80 kilowatts avec une pile de la même dimension et le coût est de beaucoup inférieur à cause des matériaux que nous utilisons aujourd'hui. Autrement dit, nous avons fait des bonds énormes en matière de technologie chaque jour. Les critiques de la technologie nous diront que ce n'est pas encore au point et que c'est beaucoup trop cher. J'aimerais leur répondre que nous ne pouvons peut-être pas l'utiliser dès maintenant, mais que les défis et les débouchés...

Le sénateur Spivak: Est-ce que c'est la pile qui serait utilisée dans une automobile, celle de 80 kilowatts?

M. Kukucha: Oui, c'est cela.

Le sénateur Spivak: Quelle différence y a-t-il avec un moteur thermique? Est-ce plus petit?

M. Kukucha: Pour ce qui est de la dimension, la pile est plus petite et elle produit évidemment un dégagement thermique beaucoup moins important et aucune émission, et de plus vous pouvez l'installer n'importe où dans la voiture.

Les prochaines diapositives sont des illustrations de certains de nos produits. En 1999, Ford a dévoilé son P2000, c'est un projet auquel le gouvernement avait participé, et nous avions fait ce lancement sur la Colline parlementaire. Notre chef de la direction était présent, de même que Bobby Gaunt de Ford. DaimlerChrysler, notre autre actionnaire, a des R5 qui sont des Mercedes de catégorie A. J'aime bien citer la phrase de Bill Clayford dans le bas de cette diapositive parce qu'il dit finalement que les piles à combustible vont mettre fin au règne de 100 ans du moteur thermique; et que c'est cette technologie qui va prendre la relève. Il s'agit d'un commentaire assez audacieux de la part d'un fabricant d'automobiles, et nous sommes très enthousiastes à ce sujet.

La prochaine diapositive décrit ce que l'on appelle le partenariat de la pile à combustible de Californie, qui est une initiative de l'État de la Californie à laquelle tous les grands fabricants d'automobiles, les sociétés pétrolières, les fournisseurs de pétrole, les organismes gouvernementaux et les fournisseurs de technologie ont participé en vue de construire une installation qui démontrerait l'efficacité de cette technologie dans des véhicules et qui permettrait ensuite de raffiner cette technologie pour la rendre disponible sur le plan commercial au cours des quelques six prochaines années. Il s'agit d'une étape importante dans le processus visant à rendre les piles à combustible disponibles pour le marché de l'automobile.

Un des points auxquels je viendrai plus tard au cours de mon exposé touche la participation active de certains paliers de gouvernement, à la fois aux États-Unis et en Europe, et je pense que le Canada a là une occasion de tabler sur cette possibilité, et surtout de tirer profit du travail énorme que le pays a déjà consenti afin de favoriser le développement de cette industrie.

La prochaine diapositive décrit quelques-uns des autobus que nous avons. Nous avons fait une démonstration ici à Vancouver il y a un certain nombre d'années avec TransLink, c'est l'autobus que vous voyez à gauche. L'autobus que vous voyez à droite est celui que nous utilisons actuellement pour faire des tests, l'autobus de la nouvelle génération que nous avons à Palm Springs à l'heure actuelle.

Le sénateur Spivak: Combien coûtent-ils aujourd'hui?

M. Kukucha: Lorsqu'il s'agit d'un autobus alimenté par pile à combustible, vous pouvez répartir le coût de différentes manières. Il y a d'abord le coût de l'autobus proprement dit, et il y a une augmentation des frais d'exploitation parce que, pour le moment, il n'y a pas d'infrastructure d'hydrogène ainsi que pour les différentes exigences relatives à l'entretien.

Les deux propositions - je m'excuse pour les circonlocutions, sénateurs, mais il y a une réponse simple. Les deux programmes d'autobus que nous avons actuellement et qui incorporent tous ces éléments, utilisent environ 20 autobus qui sont en exploitation en Californie et le coût de ce programme est d'environ 43 millions de dollars canadiens. Nous avons 30 autobus qui sont utilisés en Europe et qui reviennent à 60 millions de dollars canadiens. Par conséquent si vous regroupez tous les coûts et cela comprend notamment le soutien technique et les personnes sur le terrain, ce programme revient à environ 2 millions de dollars par autobus. Notre objectif est de faire en sorte que les autobus alimentés par les piles à combustible reviennent sur le plan commercial au prix des trolleybus d'ici les cinq prochaines années.

Le sénateur Spivak: Et quel est ce prix?

M. Kukucha: Les trolleybus coûtent entre 800 000 et 900 000 dollars canadiens. Les autobus CNG coûtent entre 600 000 et 700 000 dollars canadiens. L'avantage, bien évidemment, des trolleybus, c'est qu'ils ne polluent pas.

L'une des nouvelles technologies sur lesquelles nous travaillons, et je veux parler des défis que nous devons affronter pour nous alimenter en combustible, c'est-à-dire pour alimenter les piles à combustible en hydrogène. Donc nous travaillons à une technologie qui permettrait d'alimenter les piles à combustible avec du méthanol directement. Sur cette diapositive, vous voyez le go-kart que nous avons fabriqué ici avec DaimlerChrysler.

Les diapositives suivantes décrivent vraiment ce dont je voulais vous entretenir aujourd'hui. Ballard existe depuis 1979 ici à Vancouver et nous avons commencé par fabriquer des piles au lithium. Par la suite, nous sommes passés aux piles à combustible à membrane échangeuse de protons en 1983. À l'heure actuelle, nous nous considérons comme les chefs de file dans cette technologie. Nous avons trois très grandes installations ici en Colombie-Britannique qui emploient plus de 800 personnes, pour le moment. Une installation de R-D, une installation de fabrication et également une installation pour nos blocs électrogènes fixes.

Cette année seulement, Ballard a généré plus de 175 millions de dollars en compensations directes et indirectes, 33 millions de dollars en impôts et taxes, et nous avons dépensé - et c'est le chiffre dont nous sommes le plus fiers - plus de 130 millions de dollars en R-D; ce chiffre atteint 500 millions de dollars et plus pour les cinq dernières années. Dans une grande mesure, c'est le soutien que nous avons reçu du gouvernement fédéral qui nous a permis toutes ces réalisations avec les années. Entre 1981 et 2001, le gouvernement fédéral a investi plus de 112 millions de dollars dans notre industrie. Ballard a reçu une grande partie de ces sommes, soit environ 50 millions de dollars. Nous sommes fiers de dire que la majorité de cet investissement est remboursable, et nous allons rembourser cet argent dès que nous pourrons commencer à commercialiser notre produit.

D'autres personnes de l'industrie ont également pu bénéficier du soutien du gouvernement fédéral et cette aide se chiffre aux alentours de 62 millions de dollars à la fois pour l'industrie et les universités. Divers ministères ont contribué à nous fournir ce soutien, y compris Industrie Canada, Ressources naturelles Canada, Environnement Canada et le MDN.

À l'heure actuelle, le gouvernement participe à un certain nombre de projets: la pile à combustible pour des applications dans les transports, qui a un rapport avec l'infrastructure d'alimentation en combustible et qui aidera à fournir le combustible dont vous aurez besoin pour alimenter les piles à combustible; certaines activités en matière de R-D et de développement de la technologie en collaboration avec le centre d'innovation sur les piles à combustible de même qu'une organisation appelée Fuel Cells Canada. Nous sommes très encouragés également par l'annonce qui a été faite du Fonds d'appui technologique au développement durable. Cependant, ces efforts ne s'adressent pas directement aux piles à combustible; elles visent un certain nombre de technologies différentes, mais nous pensons que les piles à combustible peuvent avoir accès à ce financement pour notre développement.

Pour mettre les choses en contexte, dans la prochaine diapositive, nous pouvons voir que le Canada a été très généreux au cours de la phase de R-D. Mais aujourd'hui l'industrie au Canada se rend compte que tout le monde est en train de nous rattraper. Aux États-Unis, dans l'Union européenne et au Japon, on commence à financer cette industrie de façon vraiment dynamique, à la fois durant la phase de fabrication et de commercialisation. Voici certains chiffres que j'ai donnés un peu plus tôt, notamment au sujet du projet des autobus en Californie, qui se chiffre à près de 43 millions de dollars et également une somme de 156 millions de dollars qui a été dépensée par les États-Unis seulement l'année dernière pour la mise au point de piles à combustible et un investissement prévu de 200 millions de dollars pour l'an prochain. On a également déposé devant le Congrès une proposition de crédit d'impôt pour un montant de plus de 750 millions de dollars canadiens au cours des cinq prochaines années.

Le président: Est-ce qu'il est possible d'obtenir un brevet pour les piles à combustible, ou alors est-ce qu'ils utilisent - vous dites que tout le monde est en train de vous rattraper. Est-ce que cela signifie que les piles à combustible ne sont pas brevetées? Autrement dit, n'importe qui peut se lancer dans ce domaine?

M. Kukucha: Oui, effectivement, cette technologie est brevetable, et nous disposons de plus de 500 brevets. Cependant, il y a différents types de piles à combustible. Nous avons des piles à combustible à membrane échangeuse de protons. Il existe également des piles à combustible oxyde solide et des piles à carbonates fondus. Même si nous utilisons des piles à membrane échangeuse de protons, certains des procédés que nous utilisons et des technologies que nous utilisons sont brevetés. L'un de nos plus importants concurrents est une société appelée United Technologies, laquelle fabrique du matériel pour la navette spatiale depuis des années et cette société utilise également des piles à membrane échangeuse de protons.

Nous pensons que nous sommes le chef de file mondial, et que nous continuerons de l'être, d'après les brevets dont nous disposons, mais il est clair que nous allons perdre de l'argent que normalement nous aurions consacré à la recherche si nous l'investissons dans la commercialisation de la technologie, ce qui serait une menace pour l'industrie d'ici, et plus particulièrement pour Ballard au cours des prochaines années.

Les chiffres parlent d'eux-mêmes. Je pense qu'ils donnent une idée des montants importants des investissements que les organismes gouvernementaux ont consentis sur toute la planète afin d'essayer de nous rattraper là où nous sommes aujourd'hui grâce aux efforts importants du gouvernement canadien.

J'aimerais demander aujourd'hui aux honorables sénateurs de maintenir le soutien accordé à l'industrie. Un soutien continu et des efforts par l'entremise de la R-D et de la technologie ainsi qu'un soutien continu sur la question de l'infrastructure de la pile à combustible. Les programmes déjà en place sont très efficaces.

Nous voyons deux grandes lacunes dans la stratégie éventuelle que le gouvernement fédéral a adoptée en ce qui concerne le secteur de la pile à combustible et ces lacunes tiennent au fait que, parfois, il y a un manque de coordination entre les ministères fédéraux mis en cause et nous pensons qu'il y a là une possibilité de mettre en place une stratégie de commercialisation à l'échelle nationale pour cette technologie. Je ne suis pas certain de la façon dont nous pourrions structurer tout cela, mais je vois véritablement une magnifique possibilité pour le gouvernement fédéral d'assumer un rôle de leadership alors que nous nous dirigeons vers la commercialisation.

La mise sur pied d'un programme de démonstration d'un autobus urbain ou d'un programme de commercialisation d'autobus urbains serait à mon avis très utile pour faire progresser la technologie et pour faire en sorte que nos investissements se rapprochent un peu de ceux qui se font dans les autres pays. Nous avons déjà fait passablement de travail dans le domaine des programmes de démonstration ici à Vancouver, mais en Europe et en Californie on est maintenant passé à l'étape suivante et j'aimerais bien que le Canada emboîte le pas de sorte que notre capacité de fabrication et certains autres avantages industriels puissent demeurer ici au Canada pour la phase suivante du développement de l'industrie.

Nous n'avons pas encore de proposition définitive. Nous mettons le point final à certains détails, et nous prévoyons que les chefs de la direction de notre société et de XCELLSIS, qui est l'entreprise responsable du moteur d'autobus à pile à combustible, se rendront à Ottawa avant les vacances parlementaires de l'été pour présenter une proposition aux ministres du gouvernement canadien afin de leur demander leur appui pour ce programme.

J'ai parlé de nos différentes lignes de produits: nous aimerions demander le soutien du gouvernement fédéral pour les moteurs d'autobus à pile à combustible. Nous allons commercialiser notre bloc électrogène cette année, et nous pensons qu'il aura du succès sur le marché. Quant au marché de l'automobile, où les plus grands avantages visent la qualité de l'air et la réduction des gaz à effet de serre, il ne sera pas disponible à court terme, et la voie pour y accéder serait une intégration réussie du marché avec les autobus urbains. Cela nous aiderait à mettre en place l'infrastructure pour l'alimentation en combustible. Ce projet permettrait également de sensibiliser les consommateurs à la technologie, de faire savoir aux gens que cette technologie fonctionne et de leur inspirer confiance dans le fait que, s'ils achètent un produit à base de piles à combustible dans le secteur des transports, eh bien ce produit fonctionnera efficacement. Voilà quelques-uns des aspects dont je voulais vous entretenir aujourd'hui.

Les deux dernières diapositives portent sur certains avantages sur le plan de l'environnement et de l'économie dont nous avons déjà parlé.

Je voulais laisser un peu de temps pour vous permettre de poser des questions. Nous voyons une véritable possibilité pour le gouvernement de participer à la prochaine étape du développement de notre industrie. Alors que nous nous dirigeons vers une phase de fabrication et de commercialisation, les avantages qui pourraient découler de la création d'emploi et d'autres avantages sur le plan industriel sont vraiment fantastiques, à la fois dans l'Ouest canadien et pour le reste du pays.

Je m'excuse, monsieur le président et madame la vice-présidente, d'avoir pris beaucoup de temps, mais j'ai beaucoup apprécié le fait que vous m'ayez donné la possibilité de m'exprimer.

Le sénateur Adams: Vous avez l'intention de mettre des blocs électrogènes dans les autobus et les automobiles. Quel est le calendrier pour ce projet? Vous savez qu'un moteur peut manquer d'huile et brûler. Alors quel serait l'équivalent pour un système écologique?

M. Kukucha: Pour les groupes électrogènes, ils dureront plus longtemps, sinon davantage, et nous avons prévu de fabriquer des blocs électrogènes un peu plus gros que les modèles standard. Pour les véhicules automobiles, nous prévoyons - et nous avons atteint nos objectifs pour un certain nombre de produits déjà - que nos groupes dureraient au moins aussi longtemps qu'un moteur thermique, c'est-à-dire 150 000 heures où plus de 5 000 heures. Pour que ce produit soit vraiment un succès, il faut qu'il soit aussi fonctionnel que les produits commerciaux qui sont déjà sur le marché. Grâce aux tests que nous avons effectués, nous avons remporté passablement de succès pour ce qui est de la durabilité et de la fiabilité avec cette technologie. Nous sommes fermement convaincus que notre produit est supérieur à toute autre technologie, et qu'à tout le moins il respectera toutes les normes courantes qui existent déjà à la fois pour les automobiles et les groupes électrogènes, lorsque nous en arriverons à la commercialisation.

Le sénateur Adams: Ils ont tendance à s'encrasser. Est-ce que vous avez un moyen quelconque, pour le moment, de les nettoyer ou devez-vous les démonter complètement? Comment ce système fonctionne-t-il?

M. Kukucha: Un des aspects les plus positifs au sujet des piles à combustible est qu'il n'y ait aucune pièce mobile. Les piles à combustible sont traversées par des flux de gaz, donc il y a moins de réparations et beaucoup moins d'entretien. Nous avons certains petits problèmes technologiques mineurs à régler, mais nous y travaillons.

Le président: Qu'est-ce qui peut s'user sur ce type de moteurs, s'ils doivent cesser de fonctionner après 250 000 milles?

M. Kukucha: Eh bien, c'est la membrane entre les deux qui pourrait se détériorer jusqu'à un certain point, et cela dépend également du type de combustible que vous utilisez. Plus il y a d'impuretés dans le combustible, et plus la dégradation sera importante.

Le président: J'ai une question au sujet du moteur. Tout le monde sait qu'un réservoir d'essence sur une voiture, est très dangereux. Par contre, dans ce cas-ci, c'est de l'hydrogène qui est produit. Et la façon dont il est produit fait en sorte qu'il pourrait y avoir une fuite d'hydrogène dans votre maison. Une personne qui n'aurait pas encore complètement cessé de fumer pourrait-elle faire exploser la maison?

M. Kukucha: Laissez-moi répondre à vos question séparément. Tout d'abord pour ce qui est du combustible à bord du véhicule, une société appelée Dynotek de Calgary est probablement actuellement le chef de file dans le domaine de la technologie de stockage de l'hydrogène et leurs réservoirs sont installés sur la plupart des véhicules alimentés par des piles à combustible à hydrogène qui circulent sur les routes aujourd'hui.

Le président: Est-il nécessaire d'avoir un réservoir? Si vous devez faire le plein avec de l'hydrogène, est-ce que le combustible doit entrer dans le réservoir d'hydrogène pour vous donner une certaine capacité de stockage pour ensuite faire passer l'hydrogène dans la machine ou est-ce que c'est un processus continu de sorte qu'il y a très peu d'hydrogène en circulation en tout temps?

M. Kukucha: Si vous stockez de l'hydrogène gazeux dans la voiture, vous avez besoin d'un flux régulier d'hydrogène dans la pile à combustible. C'est une façon d'alimenter les piles de sorte que vous avez besoin d'un réservoir de 5 000 psi pour y stocker votre hydrogène. Vous pourriez également avoir un réservoir de méthanol qui serait sous une forme liquide et ensuite il vous faudrait convertir ce méthanol en hydrogène, de sorte que vous auriez diverses possibilités et les problèmes qui s'y rattachent. Mais vous avez absolument besoin d'un réservoir de stockage de combustible à bord du véhicule pour le moment.

Pour ce qui est de la sécurité reliée à l'hydrogène, nous sommes tout à fait persuadés que l'hydrogène est un combustible très sûr. Nous pensons même qu'il est probablement beaucoup plus sécuritaire à certains égards que l'essence parce qu'il est tellement léger qu'il se disperse dans l'atmosphère s'il y a une fuite.

Le sénateur Spivak: Bon, si vous avez eu vos préférences, parce que je ne comprends pas très bien la question du combustible, est-ce qu'il ne serait pas préférable d'avoir un système électrique qui permette de se brancher? En ce cas vous n'auriez pas besoin de transporter un réservoir de combustible dans la voiture?

M. Kukucha: Avec une voiture à pile à combustible, il est absolument nécessaire d'avoir un réservoir de combustible dans la voiture.

Le sénateur Spivak: Ah bon, peu importe le type de moteur?

Le président: C'est ça ou alors une très longue rallonge.

M. Kukucha: C'est un véhicule qui fonctionne à piles. Laissez-moi vous expliquer brièvement la différence qu'il y a entre une pile et une pile à combustible: les véhicules à piles sont vraiment de ceux que vous branchez de sorte que la pile puisse emmagasiner de l'énergie. Lorsque cette énergie est épuisée, vous devez la brancher de nouveau dans une source d'alimentation. Tandis que les piles à combustible sont alimentées par leur propre combustible, et tant qu'il y a du combustible vous avez de l'électricité et de la puissance.

Le sénateur Spivak: Dans ce cas, que se passe-t-il lorsque vous branchez une pile à combustible? Que faites-vous?

M. Kukucha: Eh bien pour le moment, sur le plan technique, nous n'avons pas à brancher les véhicules à pile à combustible. C'est une vision de l'avenir que celle de véhicules à pile à combustible avec lesquels vous vous rendez à la maison, et qui vous donnent la possibilité de vous alimenter à même le véhicule à pile à combustible et même de remettre de l'énergie dans le réseau électrique ou même de remettre de l'énergie dans votre maison.

Le sénateur Spivak: Ah bon, je vois. Pour ce qui est de brancher le véhicule à pile à combustible, vous n'allez pas chercher de l'énergie pour la mettre dans la pile, mais plutôt vous y puisez de l'énergie, si j'ai bien compris!

M. Kukucha: Oui c'est exact.

Le sénateur Spivak: Donc, vous devez toujours disposer d'une source de combustible à bord de la voiture?

M. Kukucha: Oui, c'est nécessaire.

Le président: Est-ce que vous ne pourriez pas produire cette énergie à la maison, et vous brancher à une source d'hydrogène sur place?

M. Kukucha: Prenons l'exemple de l'appareil de Stuart Energy. Vous pourriez avoir un de ces appareils à la maison et le brancher dans une prise et ensuite dans un tuyau et cet appareil produirait de l'hydrogène. Mais vous auriez tout de même besoin de stocker l'hydrogène à bord de votre véhicule d'une manière ou d'une autre. Avec certaines technologies, vous pourriez stocker l'hydrogène sous une forme gazeuse ou encore sous forme d'hydrure. Il existe différents types d'hydrures. Des hydrures métalliques et des hydrures de sodium, ce dernier étant une hydrure chimique.

Le sénateur Spivak: Je pense que j'ai un peu de documentation de la société Ballard à la maison, la trousse que vous avez jointe à votre rapport annuel, mais est-ce que c'est un bon document pour expliquer la technologie ou pouvez-vous nous suggérer une autre source de documentation pour nous expliquer plus en détail la technologie elle-même ainsi que ses débouchés et les difficultés qu'elle comporte? Est-ce que vous comprenez ce que je veux dire?

M. Kukucha: Oui.

Le sénateur Spivak: Existe-t-il un document rédigé par une personne compétente sur ce type particulier de pile à combustible?

M. Kukucha: Notre rapport annuel est un excellent point de départ, et il existe également un certain nombre de très bons articles. J'aimerais vous envoyer une vidéo qui explique tout cela en détail, si vous le permettez, par l'entremise du greffier.

Le président: Je vous remercie, nous apprécions votre collaboration. J'aurais une dernière question. Si vous voulez transmettre cette information au comité, pourriez-vous le faire en 12 exemplaires?

M. Kukucha: Absolument.

Le sénateur Adams: Vous parliez de la Colombie-Britannique et de la Californie où les conditions météorologiques sont excellentes. Lorsque la température se situe à 60 ou 70 sous zéro, comment fonctionnent ces piles à combustible?

M. Kukucha: Le fonctionnement des piles à combustible produit de l'eau, de sorte qu'il y a un dégagement d'eau et de vapeur dans la pile. Aussi, lorsque la température descend en dessous d'un certain degré, cette eau peut effectivement geler. Mais en réalité, nous sommes sur le point de surmonter ce problème et cela fait partie des défis que nous avons à relever avec la technologie, de sorte que ce n'est plus un problème, selon nous.

Le sénateur Adams: Vous voulez dire qu'actuellement vous n'avez aucun problème avec les températures froides?

M. Kukucha: Non. Les autobus que nous exploitons à Chicago fonctionnent dans des conditions météorologiques assez rigoureuses, à des températures de 10 degrés sous zéro et sans problème. Par conséquent, si nous avons réussi à surmonter cet obstacle pour ce qui est des autobus urbains, nous pensons être en mesure de le faire à très court terme pour les véhicules automobiles.

Le sénateur Adams: Vous voulez dire que dans la mesure où les autobus sont démarrés à l'intérieur du garage et qu'ils fonctionnent à des températures de moins dix degrés, il n'y a pas de problème?

M. Kukucha: Lorsque viendra le moment de mettre sur le marché l'automobile à pile à combustible, nous devrions être en mesure de démarrer cette voiture aux mêmes températures moyennes que celles auxquelles vous le faites avec votre voiture équipée d'un moteur thermique.

Le sénateur Adams: Un bloc électrogène peut coûter 5 000 dollars. Disons que je voudrais acheter une pile à combustible de cinq kilowatts. Quelle est la différence de prix entre l'appareil au gaz et la pile à combustible?

M. Kukucha: Étant donné les différents types d'appareils que nous commercialisons, que ce soit le matériel portatif, pour automobile et pour autobus, nous ne voulons pas révéler le prix réel par kilowatt de chaque appareil. Il est plus élevé que pour un appareil moyen, mais il s'agit d'une proposition vraiment valable. La pile à combustible est à la fois écologique et elle fournit une source d'électricité ininterrompue et de première qualité, alors qu'on ne peut pas en dire autant du réseau de distribution électrique. Par conséquent, nous pensons qu'il y a une possibilité ici d'exiger un prix supérieur. Pour le moment notre appareil n'est pas concurrentiel pour ce qui est du prix, mais il le sera à court terme lorsque viendra le moment de le mettre sur le marché. Nous pensons que l'appareil portatif cependant est tout à fait concurrentiel.

Le président: Vous avez également mentionné un peu plus tôt qu'il y avait une possibilité de réaliser un certain revenu en revendant l'électricité produite par le système.

M. Kukucha: C'est exact.

Le sénateur Spivak: J'ai une autre question. Si j'ai bien compris, il n'y a plus d'obstacles technologiques au fonctionnement de cet appareil, il ne reste plus que des obstacles financiers? Est-ce qu'il y a d'autres aspects de la technologie que vous ignorez ou pour lesquels vous avez toujours certaines incertitudes et ainsi de suite?

M. Kukucha: À notre avis, il n'existe aucun obstacle fondamental à la mise en marché de ces technologies. Pour le moment, nous nous efforçons de réduire les coûts et de rendre les piles de plus en plus fiables. Il y a un ou deux secteurs dans lesquels la technologie nécessite certains perfectionnements pour être plus facilement applicable de façon commerciale aux véhicules automobiles, mais c'est dans le domaine du stockage de l'hydrogène à bord du véhicule. Dynatek et quelques autres sociétés obtiennent d'excellents résultats actuellement en utilisant les hydrures et ils sont presque arrivés à trouver la solution, mais ils ne peuvent offrir toute la gamme.

Le sénateur Spivak: Ce n'est pas comme la fusion, par exemple?

M. Kukucha: Non.

Le président: Monsieur Kukucha, nous vous remercions. Nous avons trouvé votre exposé tout à fait fascinant et nous attendons vos bandes vidéo avec impatience.

M. Kukucha: C'est moi qui vous remercie. Je vous enverrai ces vidéos. Malheureusement, je dois reprendre mes plaques de pile à combustible.

Le président: Nos prochains témoins sont Gary Hamer et Odette Brassard, du B.C. Energy Aware Committee. Je vous cède la parole.

Mme Odette Brassard, coordonnatrice, B.C. Aware Committee: Honorables sénateurs, la chemise bleue que vous avez devant vous est notre plus récent rapport annuel. L'autre dossier est un document que nous avons l'intention de transmettre aux administrations locales cette semaine. Vous trouverez à l'intérieur une pochette contenant des analyses de cas, et à la fin de l'examen annuel, à la toute fin, vous trouverez d'autres analyses de cas. Ces analyses de cas portent sur la planification des systèmes énergétiques dans les collectivités à différents niveaux de planification. J'espère que ces documents vous serviront de référence pour compléter ce que nous allons vous présenter dans quelques minutes.

J'ai des antécédents assez variés, mais plutôt dans le domaine des communications. J'ai été engagée il y a cinq ans pour m'occuper de ce comité et m'assurer que leur nouveau projet, qui consiste à collaborer avec les administrations locales de la Colombie-Britannique se poursuit sur une base quotidienne. Par conséquent, je suis la personne qui assure le lien entre les divers intervenants et qui travaille à la planification des systèmes énergétiques dans les collectivités de la Colombie-Britannique.

Le président: Monsieur Hamer, lorsque vous allez vous présenter pourriez-vous nous dire en quoi consiste le B.C. Energy Aware Committee. S'agit-il d'un groupe, d'une coalition d'entreprises, et s'il s'agit d'entreprises, dans quel domaine travaillent-elles ou sont-elles financées comme la TB society ou alors, quel est votre mode de fonctionnement?

M. Gary Hamer, gestionnaire de l'efficacité énergétiqe, B.C. Gas Utility Ltd.: Vous allez me forcer à révéler l'information que je voulais vous présenter sur ma deuxième ou ma troisième diapositive, donc je vais tout de suite passer à...

Le président: Si c'est le cas, oubliez ma question. Parlez-nous simplement de vous.

M. Hamer: Très bien. Je suis le président du B.C. Aware Committee pour cette année. Mon employeur est la B.C. Gas Utility, qui est la plus grande société distributrice de gaz naturel de la province et également un des membres fondateurs de l'Energy Aware Committee.

Ma formation et mes antécédents sont ceux d'un ingénieur chimiste. J'ai commencé dans les champs de pétrole albertains, puis je suis déménagé en Colombie-Britannique en 1986. Je travaille pour la B.C. Gas depuis maintenant 10 ou 11 ans.

Le président: C'est la migration dans le sens inverse, à ce qu'il me semble.

M. Hamer: Eh bien, je suppose que le climat a quelque chose à voir avec mon déménagement.

Le sénateur Banks: Donc vous êtes en affectation par votre société?

M. Hamer: Il ne s'agit pas d'un détachement. Je travaille pour la B.C. Gas à titre de gestionnaire de l'efficacité énergétique, par conséquent mon travail s'accorde bien avec celui de ce comité. Habituellement je passe de 5 à 10 p. 100 de mon temps à faire du travail de comité. La semaine dernière a été probablement un peu plus occupée que d'habitude. Cependant, mon premier vice-président reconnaît qu'il s'agit d'un projet auquel nous devons participer, afin de montrer que nous voulons faire partie des chefs de file de l'énergie dans cette province, aussi ce mandat cadre très bien avec celui de mon travail ainsi qu'avec mes intérêts personnels.

Je pense que nous devons mettre la main à la pâte si nous voulons vraiment que les choses changent pour ce qui est des habitudes de consommation de l'énergie.

Pour commencer, honorables sénateurs, j'aimerais d'abord vous remercier d'avoir invité Energy Aware Committee à vos audiences. Comme je l'ai déjà dit, je m'adresse à vous à titre de président de l'Energy Aware Committee. Nous sommes un groupe non partisan, de sorte qu'une partie de ce que je vais dire représente mon opinion personnelle, puisque je travaille dans le secteur de l'énergie depuis environ 15 ans, et les positions avec lesquelles je me sens à l'aise sont celles de mon employeur, B.C. Gas, et des efforts que nous faisons en matière d'efficacité énergétique.

La raison pour laquelle j'exprime ces réserves est que nous sommes un groupe tellement diversifié qu'il est nécessaire que je m'assure de ne pas dire des choses qui pourraient offenser l'une ou l'autre des organisations qui en font partie.

L'Energy Aware Committee a été créé en 1993 à titre de groupe consultatif auprès du B.C. Energy Council, et lorsque l'Energy Council a été démantelé, l'Energy Aware Committee a décidé de poursuivre son travail en adoptant un mandat qui inclurait des mesures concrètes visant à favoriser et à mettre en oeuvre la planification des systèmes énergétiques dans les collectivités de la Colombie-Britannique. Aussi, aujourd'hui, nous continuons à titre de groupe formé d'organismes du secteur public et privé bien décidé à faire la promotion de la planification des systèmes énergétiques dans les collectivités.

Comme je l'ai déjà mentionné, je travaille pour B.C. Gas. Nous avons également Central Gas, qui est le distributeur du gaz sur l'île, Pacific Northern Gas Ltd., qui s'occupe de la région de Prince George à Prince Rupert, de sorte que nous avons trois compagnies de gaz dans la province. Nous avons également comme membre la compagnie d'électricité B.C. Hydro. West Kootenay Power a décidé de ne pas se joindre à nous encore. Ils oeuvrent principalement dans les Kootenays. Nous avons également parmi nos membres la B.C. Transit Authority de même que TransLink.

Le sénateur Banks: Qu'est-ce que TransLink?

Mme Brassard: Il s'agit du réseau de transport du district régional de Vancouver. Il s'appelait auparavant B.C. Transit, mais étant donné l'histoire politique longue et compliquée de la Colombie-Britannique, l'organisme a été divisé et est devenu semi-indépendant parce qu'il est administré entièrement par la région.

Le sénateur Banks: Je suis désolé de vous interrompre, mais s'agit-il d'un réseau de divers systèmes de transport exploité par les municipalités?

Mme Brassard: Il s'agit d'un réseau de transport pour le district régional de Vancouver, donc celui qui chapeaute tous les transports dans la région et qui s'appelle TransLink.

Le sénateur Banks: Donc B.C. Transit serait inclus dans TransLink?

Mme Brassard: Non. B.C. Transit couvre tous les systèmes de transport à l'extérieur du district régional de Vancouver, donc il comprendrait Victoria, Prince George et toutes les municipalités de la province.

M. Hamer: Nous comptons également parmi nos membres le Planning Institute of B.C. et nous avons justement trois représentants de cet institut au sein du comité.

L'union des municipalités de la Colombie-Britannique nous soutient depuis que nous avons adopté notre forme actuelle de comité, et cet organisme nous fournit des bureaux ainsi qu'un soutien administratif et des locaux que nous pouvons obtenir dans les municipalités de toute la province. Le Ministry of Environment, Lands and Parks est également un membre important depuis les tout débuts, et il continue de nous offrir son appui.

Le mandat de l'Energy Aware Committee est de promouvoir et de favoriser la mise en oeuvre de la CEP, c'est-à-dire la planification des systèmes énergétiques dans les collectivités. Nous visons principalement les élus, les ingénieurs et les planificateurs des villes de même que les promoteurs qui travaillent dans ces municipalités et ces compagnies d'électricité afin de les aider à optimaliser les services publics qui sont offerts à ces collectivités. J'ai oublié un groupe qui est celui des Premières Nations. Nous commençons à être un peu plus actifs auprès des Premières Nations, ou alors ce sont elles qui ont montré un intérêt véritable en nous abordant pour nous demander de les aider à planifier leurs propres systèmes énergétiques dans leurs collectivités.

Vous vous demandez peut-être pourquoi nous concentrons nos efforts sur ces groupes.

Le président: Avant que vous n'abordiez ce point, quel est votre budget?

M. Hamer: Il est d'environ 100 000 dollars. Mme Brassard est notre seule employée à temps partiel, et elle travaille à mi-temps. Le reste du personnel nous est fourni par les compagnies et les organisations membres.

Une décision qui est prise aujourd'hui concernant les transports ou l'utilisation des terrains ou le choix d'un emplacement ou encore l'infrastructure a des conséquences pour nous et en aura également pour nos petits-enfants durant des années à venir.

Laissez-moi vous décrire comment nous voyons la planification des systèmes énergétiques dans les collectivités. Il s'agit d'intégrer toutes les considérations liées à l'énergie au sein des initiatives de planification régionale et municipale, et j'ai énuméré quelques-unes de ces initiatives dont vous voudrez peut-être prendre connaissance: les stratégies régionales sommaires, les plans officiels dans les collectivités, les plans de développement ainsi que les projets de construction écologiques. À l'heure actuelle, la Colombie-Britannique dispose d'initiatives en matière de construction de bâtiments écologiques, comme on les appelle, et toute l'infrastructure est en place. Il nous manque seulement quelques clients. Toutefois, c'est une façon d'envisager les considérations énergétiques pour l'infrastructure qui est construite au sein des collectivités.

Le but de la CEP est de maximiser la consommation de l'énergie et de réduire l'impact sur l'environnement. Trouver des solutions de rechange aux sources d'énergie traditionnelles permet de faire des choix plus écologiques et plus variés de sources énergétiques. Il est nécessaire que tous les paliers de gouvernement fassent preuve de leadership et que l'industrie, elle, démontre sa bonne volonté à investir dans la recherche et développement et qu'elle soit prête à prendre quelques risques. Il est également nécessaire de repenser comment les partenariats entre les secteurs public et privé pourraient s'organiser.

J'ai mentionné les différentes sources d'énergie. Une partie du plan énergétique d'une collectivité s'adresse aux sources d'énergie qui sont indigènes à cette communauté et ces plans essaient de déterminer s'il y a moyen de les utiliser pour le bien de cette collectivité de sorte que les revenus puissent y rester plutôt que de se disperser ailleurs, là où l'énergie à base d'hydrocarbures pourrait être produite.

J'aimerais citer un collègue au sein du comité, Stephen Reese de TransLink. Stephen est un planificateur professionnel qui est fermement convaincu que s'il est nécessaire de changer radicalement bien des choses, et bon nombre de ces choses font partie du mandat de la CEP.

J'espère que ce comité permanent pourra nous aider à obtenir certains changements dans la structure gouvernementale qui ont été mis en place à l'époque de la naissance de notre pays. Les structures de l'époque visaient à faciliter une exploitation rapide et facile des ressources naturelles qui existaient et qui étaient et qui sont toujours vendues à bas prix sur les marchés d'exportation, particulièrement les combustibles à base d'hydrocarbures et l'électricité.

Même si le gouvernement fédéral est souvent réticent à s'engager dans des projets qui sont du ressort des provinces, il est néanmoins important que notre gouvernement national contribue à éliminer certaines structures de compétences qui pourraient nuire. Est-ce que j'ai déjà mentionné que l'Energy Aware Committee est un organisme non partisan et qu'il essaie autant que possible d'éviter de prendre une position politique?

Un plan énergétique dans la collectivité tire profit des partenariats établis entre les municipalités, les compagnies d'électricité et autres organisations et dépend de l'engagement actif de toutes les parties. Toutes les parties ont en effet beaucoup à gagner en reconnaissant les besoins des autres de même que leurs compétences et leurs ressources, et ont tout intérêt à travailler en collaboration à l'atteinte d'un objectif commun.

Parmi les structures de compétence que j'ai mentionnées et qui selon nous constituent des obstacles, j'aimerais mentionner notamment le fait que la ville de Vancouver, étant une ville à charte, a adopté le Code national de l'énergie en matière d'efficacité énergétique. Les autres municipalités de la province, n'ayant pas de charte, ont adopté la position suivante, c'est-à-dire que la Loi sur les municipalités les empêche d'adopter la même norme ou une norme similaire. Que cela soit la réalité ou de la pure fiction, cette décision semble empêcher les choses qui se produisent à Vancouver de devenir accessibles aux autres municipalités. Je vous donne ce cas à titre d'exemple.

Les autres obstacles que j'ai identifiés comprennent notamment les oppositions est/ouest et ce type de problème qui oppose les régions et les municipalités et qui nous empêche d'utiliser simplement l'énergie de façon plus efficace.

La diapositive suivante qui s'intitule «why worry about carbon based energy?», c'est-à-dire «pourquoi s'inquiéter au sujet de l'énergie à base de carbone?», nous dit que la consommation de l'énergie à base de carbone est le plus important point de repère pour ce qui est de la durabilité des collectivités. Plus vous en utilisez, et moins vous avez de chance de devenir une collectivité écologiquement viable. C'est un peu comme les étiquetages énerguide pour les maisons, il en existe également qui disent que si vous obtenez un total de 100, vous avez une maison écologiquement viable. Cela signifie que vous n'avez pas besoin de source externe d'énergie. La même chose pourrait être dite d'une municipalité, c'est-à-dire que si elle obtenait un total de 100 sur une certaine échelle, cela pourrait signifier qu'il n'est pas nécessaire d'ajouter des sources d'énergie externes dans cette collectivité. Cela semble un objectif difficile à atteindre aujourd'hui, mais je pense que c'est possible.

Pour ce qui est des combustibles à base de carbone, les coûts sont imprévisibles, c'est le moins que l'on puisse dire. Bon nombre de nos clients nous demandent encore si les prix vont baisser. Je vous prédis que les prix ne baisseront pas, et que nous sommes probablement aussi bien d'utiliser les prix d'aujourd'hui pour faire nos prévisions. Il s'agit probablement d'une estimation conservatrice. Si nous continuons au rythme actuel, les réserves seront épuisées au cours de ce siècle.

Le sénateur Banks: Puis-je vous demander sur quoi vous basez cette opinion?

M. Hamer: Eh bien, pour ce qui est des réserves classiques, les chiffres que j'ai entendus varient entre 30 et 75 ans pour les réserves connues. À partir de là, si nous continuons à utiliser le gaz comme nous le faisons maintenant, ou si nous l'extrayons au même rythme ou encore plus rapidement, nous allons l'épuiser à plus ou moins brève échéance.

Le sénateur Lawson: Ma question est vraiment très courte. Ce sera de toute évidence en fonction du prix, et si nous vous disions qu'aujourd'hui le gaz sera le double du prix, vous nous donneriez une réponse différente, n'est-ce pas?

M. Hamer: Oui. J'ai déjà entendu le président de Highland Valley Copper s'exprimer sur cette question, il y a sept ou huit ans, et lorsqu'on lui a demandé si les hydrocarbures étaient ou non une ressource renouvelable, il a répondu: «c'est un sujet de discussion. Si nous décidons que d'ici 20 ou 30 ans nous allons passer à une autre source d'énergie, dans ce cas ces ressources ne seront jamais épuisées, n'est-ce pas?» Nous reconnaissons que le gaz naturel est certainement un combustible de transition. C'est sans doute le meilleur combustible à base d'hydrocarbures pour ce qui est des émissions à l'heure actuelle, mais il est vraisemblable que nous allons passer à autre chose, particulièrement si les prix continuent de monter en flèche comme ils le font.

Le sénateur Spivak: Cela dépend de ce que vous voulez dire. Si vous devez dynamiter des montagnes, comme on le fait je ne sais plus où, je crois que c'est pour des mines de cuivre en Amérique du Sud - des sociétés canadiennes s'en vont en Amérique du Sud et elles détruisent des montagnes complètes. Si vous pouviez éliminer les montagnes Rocheuses je suis sûre que vous pourriez trouver beaucoup de pétrole et de gaz.

Le sénateur Lawson: Elles ne vont pas s'en aller.

Le sénateur Spivak: C'est ce que je veux dire. Vous dites que nous n'en manquerons jamais.

M. Hamer: Je ne suis pas sûr de pouvoir répondre à cette question, mais il est certain que nous avons toujours pensé que nous avions suffisamment de ressources. Comme je l'ai déjà dit, j'ai commencé ma carrière dans les champs pétrolifères vers 1981 et à cette époque nous semblions penser que nous pouvions compter sur cette réserve et qu'elle pouvait durer entre 35 et 70 ans, et les choses n'ont pas changé. Mais vous avez tout à fait raison, nous pourrions étudier la question de façon plus approfondie.

Le sénateur Spivak: J'essaie de vous dire qu'ils n'ont pas calculé les coûts. Les coûts réels, c'est-à-dire les coûts de cycle de vie, dont ils ne veulent jamais parler, et on pourrait poursuivre indéfiniment.

Le président: Continuez, s'il vous plaît.

M. Hamer: Il est certain que la qualité de l'air dans les localités est directement touchée par notre consommation des combustibles à base d'hydrocarbures dans ces mêmes collectivités. Vancouver est un exemple de choix avec le smog qui recouvre la vallée au fur et à mesure que la journée avance.

Il y a des obstacles à la planification des systèmes énergétiques dans les collectivités, et l'un de ces obstacles est justement les cycles de planification courts. Même si nos actions risquent d'avoir des impacts sur des décennies, comme la construction d'un immeuble qui doit durer 50 ans, les décisions sont souvent fondées sur une période de temps beaucoup plus courte.

J'ai participé à un projet de construction d'un immeuble, et lorsqu'ils ont commencé à chercher le financement pour le budget du projet, ils ont envisagé un retour sur l'investissement de cinq ans, et s'ils ne pouvaient obtenir un remboursement dans les cinq ans, ils ne voulaient pas aller de l'avant avec ce projet. Et pourtant nous parlons d'un immeuble qui doit durer 50 ans.

Au début, pour faire les choses différemment, il faudra dépenser plus que ce nous sommes habitués de faire. L'exemple classique est celui des gens qui sont toujours les premiers à essayer des choses nouvelles, comme être le premier à acheter un lecteur de DVD. Une chose rare coûte toujours plus cher tant qu'elle n'est pas largement répandue. L'incidence de notre consommation d'énergie sur le climat est difficile à évaluer.

Le sénateur Banks: C'est vrai, bien entendu.

M. Hamer: Bon je pense que ce point est clair. Je ne suis pas sûr si nous comprendrons jamais complètement l'impact du changement climatique sur les humains. Je m'en tiendrai à ce que j'ai déjà dit.

Il faut que le Canada fasse preuve de leadership en ce qui concerne les questions économiques par rapport aux questions environnementales. Comme le disent Paul Hawkin et Emery et Hunter Levin dans leur livre intitulé Natural Capitalism, nous n'incluons pas le coût de l'air et de l'eau propres dans nos modèles économiques actuels. Paul Hawkin a fait une remarque intéressante en suggérant que si vous fabriquez quelque chose, vous et vos enfants en assumeront la responsabilité pour toujours parce que cette chose n'aura pas disparu. Ce pourrait être une perspective intéressante. Il me semble qu'il nous manque quelque chose, et c'est une charte des droits de l'environnement à l'échelle nationale.

J'ai entendu le sénateur Ted Kennedy parler des droits humains fondamentaux à de l'air et à de l'eau propres. Les États-Unis semblent adopter un point de vue légèrement différent du nôtre. Apparemment, nous n'avons aucune disposition dans notre charte qui garantisse que nous ayons droit à ces choses.

Le président: Nous n'avons pas décidé s'il s'agit d'une compétence fédérale ou provinciale, voilà pourquoi.

M. Hamer: Nous n'avons pas encore déterminé ce que nos collectivités sont, et ce qu'elles veulent devenir. Est-ce que nos collectivités sont seulement des endroits où l'on va dormir ou est-ce qu'elles doivent agir à titre de collectivités complètes où les gens peuvent travailler, vivre et se divertir?

Pour ce qui est de la diapositive suivante, le titre est «opportunities afforded by community energy planning», autrement dit les possibilités offertes par la planification des systèmes énergétiques dans les collectivités. Nous sommes en mesure de créer des entreprises écologiques et une économie plus propre. Au Danemark, l'économie qui croît le plus rapidement est celle de l'énergie éolienne. Cette industrie crée davantage d'emplois que toute autre dans ce pays. Pour nous en tant que Canadiens, il est important de réaliser que cette partie du pays jouit d'une position unique pour combiner la base technologique du nord-ouest du Pacifique avec notre besoin de diversifier notre économie au-delà de l'exploitation de nos ressources. Les préoccupations sur le plan économique, environnemental et social n'ont pas besoin de s'exclure mutuellement. La libre entreprise motive les sociétés plus anciennes à adopter les nouvelles exigences des consommateurs. Nous recommandons l'adoption d'un nouveau paradigme avec lequel les coûts de revient et les impacts environnementaux à long terme figureraient sur le même bilan, et j'ai déjà mentionné le scénario de la construction d'immeubles.

Notre façon de traiter les dépenses en capital en rapport aux frais d'exploitation permanents doit changer. Les analyses des coûts sur la durée de la vie utile doivent être entreprises comme le meilleur moyen d'évaluer à long terme l'impact des projets d'investissement, particulièrement en ce qui a trait aux immeubles publics. Si quelque chose est censé se rentabiliser en l'espace de dix ans alors que l'immeuble est censé durer 40 ans, pourquoi ne pas adopter cette approche?

Ma prochaine rubrique est la suivante, la collaboration entre les organismes des secteurs privé et public. Ce comité donne véritablement la possibilité à certaines de nos organisations de travailler en collaboration et d'échanger sur ce qui semble au départ des idées divergentes, mais nous arrivons à trouver beaucoup de points communs. Les entreprises du secteur privé pourraient devenir de plus grands partenaires des municipalités et acquérir davantage de participation dans l'infrastructure qui est nécessaire pour desservir les résidents. Les collectivités ont le pouvoir de définir leurs priorités en matière d'énergie, l'impact limité sur l'environnement ainsi que les sommes qu'elles sont prêtes à dépenser pour acquérir des ressources énergétiques à l'extérieur de cette collectivité. J'ai déjà mentionné ce point: l'exploitation des ressources énergétiques de la collectivité ne signifie pas seulement des emplois au sein de cette collectivité, mais également que l'on dépensera moins d'argent à l'extérieur de la collectivité sur des sources d'énergie traditionnelles. Comme exemple, on pourrait citer l'incinérateur de Burnaby qui pourra produire de l'électricité dans un avenir rapproché.

L'étude de cas que j'aimerais vous mentionner est celle de la ville de Kamloops. L'Energy Aware Committee de la Colombie-Britannique a collaboré avec la ville de Kamloops en 1997 à la création d'un plan des systèmes énergétiques dans la collectivité. Ce plan, s'il est mis en oeuvre tel qu'il a été prévu, a le potentiel de réduire de façon importante les investissements en capital de même que les coûts énergétiques non seulement pour la municipalité, mais pour la collectivité tout entière. Parmi les autres bénéfices inhérents à ce plan, on trouve un plus grand nombre d'emplois à l'échelle locale, une plus grande utilisation des ressources énergétiques locales et une réduction des émissions dans l'atmosphère.

L'étude de cas de la ville de Kamloops nous a permis d'apprendre un certain nombre de choses, qui sont toutes mentionnées sur notre site Web, et dont je vais vous parler dans une minute. Nous en avons tiré sept leçons: la première était qu'il faut s'engager personnellement. Il faut assumer la responsabilité de ce plan pour la collectivité à l'échelle de la municipalité et il faut également que tous les planificateurs et les ingénieurs ainsi que les élus l'adoptent. Une autre chose importante est qu'il faut favoriser les liens organisationnels. Le plan des systèmes énergétiques dans la collectivité décuple son efficacité lorsqu'il peut compter sur le partenariat actif entre la municipalité, les compagnies d'électricité et d'autres organisations. En réunissant les aptitudes et les ressources, il est plus facile d'atteindre les objectifs communs.

La diapositive suivante illustre quelque chose qui a fait l'objet d'une discussion et d'une exploration dans le plan des systèmes énergétiques de la collectivité pour Kamloops. Dans le haut, vous voyez la collectivité traditionnelle, qui se caractérise par des culs-de-sac. Elle sert à un seul usage et il n'y a pas de centre d'activité dans le voisinage. Il s'agit tout simplement d'un dortoir utilisé par des familles la nuit, et qui est vide durant le jour. C'est le quartier traditionnel. Il a été conçu pour l'automobile. L'autre est le modèle alternatif. Vous remarquerez que les rues ont été reliées. Il s'agit maintenant d'un réseau routier où il est beaucoup plus facile de circuler. Les grandes artères font partie du réseau, afin de créer un système de transport. Vous voyez qu'au beau milieu il y a une zone publique qui est réservée aux personnes, et non au transport.

Dans ce scénario, les artères se séparent au milieu afin de laisser place à des îlots d'activité qui concentrent les caractéristiques et la dimension de chaque quartier et qui s'y adaptent. L'objectif est de créer un fort axe piétons-transport en commun qui coexiste néanmoins avec la circulation automobile. Vous verrez également qu'il y aura une artère principale ou encore une voie principale pour le transport en commun qui s'achemine directement vers le centre de cette collectivité de sorte que les gens puissent se rendre à pied jusqu'aux arrêts d'autobus et ensuite circuler à l'extérieur de la collectivité. Le noeud, secondaire comme nous l'appelons, peut également devenir un point central pour les activités culturelles et civiques.

Il faut un minimum de densité résidentielle constituée de logements individuels et multi-familiaux pour assurer la viabilité des commerces dans ce voisinage. On y trouve également un mélange de commerces et de résidences.

Du point de vue de l'énergie, le fait de disposer d'un plus grand nombre de modes de transport contribue à améliorer ce secteur en général. On a créé des charges repères pour les systèmes énergétiques de petits districts qui peuvent améliorer l'efficacité thermique. Ce que je veux dire par cela, c'est qu'il y a une possibilité de produire de l'électricité et d'utiliser la portion qui, autrement, serait considérée comme un rejet thermique à titre d'énergie de moindre qualité et d'utiliser celle-ci par exemple pour chauffer de l'eau de sorte que l'on créerait de l'énergie au sein de la collectivité. Vous pouvez créer des sites pour la production d'énergie distribuée qui continuent à accroître les possibilités offertes au secteur de l'énergie.

Mme Brassard: J'aimerais ajouter quelque chose ici au deuxième exemple. Aujourd'hui, si vous avez envie d'aller marcher, je vous invite à vous rendre à Granville Island, qui est un quartier juste à l'extérieur du centre-ville de Vancouver. Il s'y déroule une expérience que nous avons pu pousser un peu plus loin que ce que les résidants de Kamloops ont voulu faire dans cet exemple. L'image du haut montre un noyau secondaire existant de Kamloops qui s'appelle Upper Sahilie. Lors d'un processus de consultation que nous avions entrepris avec l'ensemble de la collectivité et des intervenants de l'endroit, nous avons finalement arrêté un compromis avec les résidants de la localité sur l'ampleur de leur engagement à l'égard de l'économie d'énergie dans ce quartier.

Mais si vous allez à Granville Island, vous allez voir un exemple audacieux d'un plan appliqué à une collectivité. Vous y verrez des installations industrielles, commerciales, culturelles et résidentielles sous la forme de logements multi-familiaux, de copropriété et de logements en locations dans un quartier où il fait bon vivre. Si on vous disait «vous allez vivre dans le voisinage de la société Ciment Lafarge, par exemple, je suis sûr que vous diriez tous: «ah non, je ne veux pas vivre dans leur voisinage». Mais ce soir, si vous en avez l'occasion, allez marcher près de Ciment Lafarge sur Granville Island. Les voisins immédiats sont la Emily Carr School of the Arts et, de l'autre côté, vous avez le théâtre, un théâtre en plein-air. Ensuite, il y a un petit centre commercial. En fait, c'est un marché public où les agriculteurs vers trois heures du matin pour installer leurs étalages pour la journée. C'est un quartier où l'on peut circuler à pied, à vélo, en scooter à quatre roues pour les personnes handicapées; c'est également un quartier où les gens se connaissent et où ils partagent la responsabilité de leur sécurité.

Ce deuxième modèle vous permettra d'économiser de l'argent en soins de santé et en dispositifs de sécurité. Vous n'avez pas besoin de police à cet endroit. Il y a tellement de gens qui circulent la nuit que les policiers sont inutiles, nous assurons la sécurité les uns des autres. Il n'y a aucun problème pour le fournisseur d'électricité parce que les charges sont parfaitement équilibrées entre le jour et la nuit de sorte qu'il n'est pas nécessaire de fournir une surcharge en soirée parce qu'il y a un équilibre parfait avec la consommation durant la journée.

Donc je vous invite chaleureusement à vous rendre à Granville Island ce soir. C'est le meilleur exemple de ce modèle.

Le sénateur Spivak: La densité semble extraordinaire.

Mme Brassard: C'est un exemple parfait d'utilisation du terrain et de la densité, ça fonctionne et, en plus, c'est très amical.

M. Hamer: Sur la diapositive suivante, vous avez un aperçu de notre nouveau site Web qui comporte une masse d'informations, y compris la trousse que vous avez en main. Ce document est également le plan des systèmes énergétiques pour la collectivité de Kamloops et nous l'avons mis au point à la suite d'ateliers que nous avons tenus dans les municipalités du district de Vancouver.

M. Hamer: Il y a donc énormément d'information sur notre site Web à l'intention des groupes que nous ciblons: les élus, les planificateurs, les promoteurs et, bien entendu, le grand public. Je vous invite à nous y rendre visite.

La diapositive suivante vous montre comment nous procédons pour stimuler la planification des secteurs énergétiques dans les collectivités en Colombie-Britannique. Ce trophée contient quatre produits qui sont indigènes dans notre province: du bois, du verre, de l'aluminium et du béton et nous le faisons circuler un peu comme la coupe Stanley dans les municipalités ayant mis en place le meilleur plan des systèmes énergétiques durant l'année. La première fois que nous avons remis ce trophée, c'était en 1998 à la ville de Vancouver pour le nouveau développement de Lower Lonsdale. Dans le cadre de ce projet, la ville avait précisé que tout nouvel immeuble devait être adapté aux systèmes énergétiques du district. En 1999, c'est la ville de Surrey qui a remporté le trophée pour son projet de East Clayton qui se caractérisait par une subdivision à usage mixte dense. En 2000, la ville de Coquitlam a remporté le trophée pour son plan communautaire officiel pour le nord-est de Coquitlam. La ville espère attirer 25 000 personnes dans ce quartier, et on espère que la majorité s'y rendront pour y habiter, y travailler et s'y divertir.

Et voici la dernière diapositive. Nous y lisons qu'il faut vraiment que nous changions et que nous prenions des décisions de planification qui n'auront pas d'effet visible sur notre consommation énergétique et, par conséquent, sur les coûts. Les décisions que nous prenons lors de la planification de nos collectivités et de la construction de nos immeubles font en sorte que nous devons vivre avec elles durant toute la vie utile de ces collectivités et de ces immeubles. Par conséquent, il faut vraiment tenir compte de l'impact à long terme de ces facteurs de durabilité, comme la qualité de l'air, de l'eau et de l'environnement. Nous devons fournir aux municipalités les renseignements dont elles ont besoin pour qu'elles puissent prendre des décisions éclairées.

Il y a un point que je n'ai pas mentionné sur cette diapositive, et c'est le fait que nous devons apprendre à travailler tous ensemble. Les divers paliers de gouvernement, les gouvernements et les compagnies d'électricité, les compagnies d'électricité et les municipalités, les municipalités et les groupes de défense des droits des citoyens. J'ai presque terminé et je vais vous laisser poser vos questions, mais j'aimerais avant de finir inviter le gouvernement fédéral à envisager de se joindre à notre Energy Aware Committee et à nous aider dans notre travail en Colombie-Britannique. Je pense que vous pourriez déjà profiter de ce que nous avons déjà mis en place, c'est-à-dire un excellent produit canadien qui n'existe nulle part ailleurs au pays et essayer de le diffuser partout ailleurs au Canada. Nous avons réellement accompli de l'excellent travail ici. Je me suis joint à ce comité il y a seulement un an et demi, aussi je ne peux pas me glorifier des résultats obtenus, mais la façon dont nous envisageons l'énergie dans le cadre des plans de systèmes énergétiques dans les collectivités est des plus intéressantes. À mon sens, l'Energy Aware Committee est tout à fait unique au Canada et il peut servir de modèle de collaboration qui devrait déboucher sur une plus grande satisfaction chez les plus grands consommateurs d'énergie, c'est-à-dire les collectivités de la Colombie-Britannique.

Le président: Merci, monsieur Hamer.

Le sénateur Spivak: Je vous remercie pour un exposé vraiment excellent, parce qu'il aborde la question fondamentale, à savoir que tout est relié et que l'utilisation des terres est vraiment au c9ur de bien des choses. Vous avez dit que ce comité est unique au Canada, mais, évidemment, ce type d'association n'est pas exceptionnel pour les États-Unis, parce qu'il y a des collectivités aux États-Unis, et qu'il y a des gens, des professionnels qui ont fait une carrière avec de tels projets.

Je me demandais s'il y a un échange d'information avec les États-Unis. Il y a une collectivité en Floride qui a fait ce genre de chose, et il y en a aussi dans l'Est, et peut-être avez-vous aussi des renseignements sur ces collectivités que nous pourrions utiliser? Je me demandais simplement si vous aviez utilisé ces exemples.

Mme Brassard: En fait, un des principaux entrepreneurs auxquels nous avons fait appel pour travailler avec les municipalités vient de Portland, en Oregon, et il travaille un peu partout aux États-Unis. Par son entremise, nous obtenons beaucoup de renseignements sur ce qui se passe là-bas, mais je dois dire, avec un peu de suffisance, qu'il arrive ici en Colombie-Britannique et dit: «Vous les gars, vous n'avez peut-être pas de charte des droits pour votre environnement au Canada, mais vous faites quand même mieux les choses ici en Colombie-Britannique qu'à bien des endroits que je vois aux États-Unis». Ça nous console, mais ça ne nous empêche pas d'essayer de faire encore mieux.

Le sénateur Spivak: Avez-vous des renseignements sur ça? Je me demande comment nous pourrions avoir accès à la documentation. J'ai lu sur ce sujet par le passé, mais je n'ai pas de dossier, ni accès à la documentation qui a trait à diverses activités de planification communautaire qui ont lieu aux États-Unis et qui sont plus respectueuses des piétons, et tous les autres aspects dont vous parlez.

Mme Brassard: En fait, vous pourriez commencer par notre site Web, parce que dans la bibliothèque de notre site, les sources sont classées par sujets, et dans bien des cas, nous avons établi des renvois vers des sources américaines, comme des modèles, des gabarits, des idées, des livres blancs, et cetera.

Le sénateur Adams: Quels est votre budget annuel?

M. Hamer: Notre budget annuel est d'environ 100 000 dollars.

Mme Brassard: Ça, c'était l'année dernière. Cette année, c'est un chiffre plus élevé.

M. Hamer: Nous savons qu'environ 20 000 dollars proviennent de B.C. Gas, 20 000 autres dollars de B.C. Hydro, et environ 6 000 dollars de chacune des deux autres entreprises du gaz, et environ 1 000 dollars du Planning Institute of British Columbia, ces montants sont suffisants pour payer le salaire d'un poste à mi-temps. Les autres rentrées sont normalement rattachées à des projets. Certes, c'est un défi pour nous d'équilibrer les fonds et d'entreprendre toutes ces activités intéressantes dont nous connaissons l'existence, aussi, nous cherchons un financement de base, non auprès de vous en particulier, mais par l'entremise de la province, nous voudrions obtenir un rôle plus important qui nous permettrait d'obtenir un financement de base et de promouvoir ce que le gouvernement veux que nous fassions, c'est-à-dire la prise en considération de l'énergie dans une optique communautaire.

Le sénateur Adams: Êtes-vous satisfaits du projet de Kamloops?

Mme Brassard: Je voudrais préciser ici que notre participation est à court terme et sur une base contractuelle dans le cas de chaque municipalité. Kamloops est un peu une exception, parce que c'était un projet pilote. À l'époque où nous nous sommes occupés de Kamloops, aucune autre municipalité en Colombie-Britannique ne disposait d'un plan énergétique communautaire, de sorte que nous avons voulu fournir un modèle d'après lequel d'autres municipalités pourraient apprendre et dire: «Ces lignes de bases sont les meilleures; si nous procédons ainsi, nous pouvons réduire nos coûts énergétiques d'infrastructure de 10 à 15...» ou du pourcentage que nous sommes en mesure de leur montrer. Essentiellement, nous avions conclu une entente de partage des coûts en vertu de laquelle nous mettions à leur disposition le coordonnateur auquel nous avons recours, qui est ce coordonnateur de Portland (Oregon), et les services d'une entreprise d'ici en ville pour travailler avec eux à l'établissement d'un plan énergétique communautaire, pour eux, et avec eux, bien sûr. Eux, en contrepartie, nous ont alloué des ressources en personnel, des employés municipaux et des employés de B.C. Gas, B.C. Hydro, et de Weyerhaeuser, qui est une importante compagnie de pâte et papier ici. L'hôpital avait également mis une personne à notre disposition. Eh bien, tout cela se chiffrait à environ 100 000 dollars pour le travail qui est décrit dans ce rapport. Toutefois, nous avons mis 50 000 dollars, et eux ont mis le reste. C'est de cette façon que nous travaillons habituellement avec les municipalités. Nous essayons de trouver au moins une partie du financement sous forme de dons en nature, et eux trouvent l'autre partie, et après, nous travaillons ensemble.

Le sénateur Banks: J'ai un commentaire, simplement pour expliquer ma fâcheuse interruption de tout à l'heure, pour laquelle je m'excuse. Je viens de l'Alberta, et j'ai commencé à m'inquiéter vers 1950, je crois, lorsque les premiers alarmistes ont dit que nous allions manquer de combustibles fossiles. Mais j'ai cessé de m'inquiéter depuis. Ce serait tout aussi vrai, je pense, de dire que nous allons manquer de café ici, mais nous pouvons en faire d'autre. Je pense que les estimations dont vous parlez n'incluent pas les réserves non courantes, comme les sables bitumineux, qui deviennent rapidement courants, parce que le coût de production a diminué à 11 dollars maintenant; c'est donc tout à fait courant.

J'ai trois questions à vous poser. Plus tôt au cours de votre exposé, vous avez dit qu'un de vos objectifs était de maximiser l'utilisation de l'énergie, et étant donné que vos mots ont été consignés, je présume que ce n'est pas exactement ce que vous avez voulu dire?

M. Hamer: Je pense que la deuxième partie de l'énoncé disait tout en réduisant le plus possible l'incidence sur l'environnement.

Le sénateur Banks: Vous voulez dire maximiser l'efficacité de l'utilisation de l'énergie, parce que ce que vous avez dit était maximiser l'utilisation de l'énergie, et si j'étais la personne chargée de la commercialisation pour le compte de Pacific Gas, ce serait ma tâche. Ce n'est pas de cela que vous parlez?

M. Hamer: Non, il s'agit de tirer le plus possible de chaque gigajoule de gaz.

Le sénateur Banks: Peut-être pourriez-vous m'expliquer, parce que je n'ai pas compris. Vous avez dit que Vancouver est une ville à charte tandis que les autres municipalités de la Colombie-Britannique ne le sont pas. Je ne comprends pas ça.

M. Hamer: Ma compréhension...

Le sénateur Banks: Elles sont constituées en société, n'est-ce pas?

Mme Brassard: Oui, mais «à charte» ne signifie pas que les autres ne sont pas constituées en société. Cela signifie simplement que Vancouver, aux termes de la Loi sur les sociétés de la Colombie-Britannique, n'est pas assujettie à la Loi sur les municipalités. La Loi sur les municipalités a été rédigée pour d'autres municipalités.

La charte comporte quelques exceptions. En d'autres mots, les municipalités à charte peuvent essentiellement prendre leurs propres décisions sur la plupart des choses, et je ne suis pas avocat, mais je pense qu'elles ont plus de liberté, c'est du moins la perception qu'on a, que d'autres municipalités, et qu'elles essaient d'innover. Parfois, d'autres municipalités considèrent la Loi sur les municipalités comme un obstacle à l'innovation, comme, par exemple, les panneaux photovoltaïques et ce genre de chose. Les avocats ne s'entendent pas tous là-dessus, et il y a toutes sortes de débats en ce moment sur ce sujet, mais je pense qu'essentiellement, beaucoup de municipalités voudraient pouvoir faire ce qu'est en train de faire Vancouver, c'est-à-dire prendre leurs propres décisions.

Le sénateur Banks: La ville de Vancouver est donc différente des autres?

Mme Brassard: Oui. Elle a une Loi sur les sociétés spécialement pour elle.

Le sénateur Banks: Très intéressant. Merci.

M. Hamer: Je crois que la ville de Montréal est une ville à charte, et je pense qu'il y en a une autre au Canada.

Mme Brassard: Toronto.

Le sénateur Banks: C'est vrai? Merci. Je vais m'informer. Quel est l'avis de votre comité, s'il en a un, et si vous êtes en mesure de le formuler - et je pose cette question en raison de cette déréglementation qui a lieu actuellement, sur ce qui vient d'arriver à Pacific Gas & Electric, et ainsi de suite - concernant l'opportunité ou le bien-fondé de confier les services publics à des intérêts privés plutôt qu'au secteur public? Les membres de votre comité appartiennent aux deux catégories. Le comité a-t-il une opinion à ce sujet? Peut-il en avoir une? Et sinon, avez-vous une opinion personnelle?

M. Hamer: Je pense que nous sommes biens servis par le fait que B.C. Hydro soit une société d'État. Je crois que le gouvernement provincial est plutôt content de l'argent qui rentre dans ses coffres grâce aux marchés conclus avec les Américains. J'espère que nous serons payés pour une partie ou pour tous ces marchés. Concernant l'utilité d'avoir une société cotée en bourse, B.C. Gas étant une telle société, et une cotation à la Bourse de Toronto, je dois dire que j'aime travailler pour une société privée.

Le sénateur Banks: Une société cotée en bourse, par opposition à une entreprise publique, est-elle en mesure de tenir compte entièrement de l'intérêt public?

M. Hamer: Notre situation en tant que monopole dans un territoire de concession l'exige. Nous devons répondre à des exigences en matière de confiance et de sécurité du public. La commission des services publics à laquelle nous devons rendre des comptes exige que nous nous occupions de l'intérêt public; nous exploitons donc nos réseaux d'une manière sûre, et ainsi de suite. Je pense que c'est faisable, que les sociétés soient publiques ou privées.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Hamer et madame Brassard. Nous avons trouvé votre exposé très intéressant et vous remercions d'avoir pris le temps de préparer un exposé à notre intention et d'avoir répondu à nos questions. Je vous souhaite beaucoup de succès dans votre carrière.

Mme Brassard: Merci beaucoup.

Le président: Le prochain témoin est le dernier de la journée, mais vous avez toute notre attention. Monsieur Austin, de l'Independent Power Association of B.C.

Monsieur Austin, vous pourriez donner quelques explications. En Alberta, les producteurs d'électricité indépendants sont généralement dans le domaine de l'énergie éolienne et de la biomasse et de choses du genre. Les producteurs membres de votre association sont-ils dans l'hydroélectricité?

M. David Austin, directeur, Independent Power Association of B.C.: En Alberta, ils couvrent un large éventail de ressources, et c'est la même chose en Colombie-Britannique. Toutefois, le secteur a une taille beaucoup plus petite en Colombie-Britannique, et c'est essentiellement en raison de la politique du gouvernement; c'est-à-dire que ce gouvernement en particulier et B.C. Hydro ne sont pas particulièrement intéressés à ce que le secteur privé investisse dans ce secteur.

Le président: Je vais poser une autre question qui présente toujours de l'intérêt pour le comité. Vous pourriez peut-être prendre quelques minutes pour nous donner quelques faits saillants de votre carrière.

M. Austin: Très bien. J'ai commencé par exercer le droit dans le secteur du commerce de l'électricité, et j'ai beaucoup travaillé avec B.C. Hydro. J'ai travaillé à Londres, en Angleterre, dans un des plus importants cabinets d'avocats au monde, où je m'occupais de finance et d'opérations bancaires internationales. Je suis revenu au pays et mes suis retrouvé en Colombie-Britannique, où je travaille dans le domaine de la production indépendante d'électricité. Je pense qu'on peut dire que c'est mon très coûteux hobby, en raison de l'absence de développement dans cette province-ci. Peut-être qu'un changement de gouvernement serait favorable à plus d'activité dans ce domaine.

Le président: Très bien. Veuillez continuer.

M. Austin: Je n'ai pas d'exposé en bonne et due forme, mais en faisant des discours ou des apparitions en public, ou en essayant d'expliquer aux médias certaines questions liées à l'électricité, il y a une chose que je constate toujours: il existe un malentendu fondamental au sujet des deux composantes de l'électricité. Ce sont ces éléments qui semblent désorienter les gens et les envoyer dans la mauvaise direction pour se tromper terriblement dans des critiques ou des articles de presse. Si vous connaissez cet aspect, vous trouverez peut-être le temps long pendant une minute, et sinon, vous allez peut-être trouver cela intéressant.

L'électricité comporte deux composantes fondamentales: il y a la puissance et il y a l'énergie. Pour vous rendre dans cette salle de réunions, vous avez pris un ascenseur dans lequel on indique que sa capacité est de tant de personnes. C'est une façon d'exprimer une mesure quantitative de la puissance de l'ascenseur en question. Une autre mesure quantitative exprime le nombre de déplacements que peut effectuer l'ascenseur, en montée et en descente, au cours d'une journée donnée, ainsi que le nombre total de personnes qu'il peut transporter durant une période de vingt-quatre heures. C'est l'énergie.

Passons maintenant du côté de l'électricité. Lorsque les gens parlent de mégawatts, ils parlent de puissance. En Colombie-Britannique, on dispose d'une puissance électrique installée de 10 000 mégawatts. Or ce chiffre ne nous dit absolument rien sur la capacité de ces installations à répondre aux charges de pointe à huit heures du matin et à cinq heures du soir. La mesure plus importante, ou la mesure clé, est la capacité de ces installations de fonctionner vingt-quatre heures par jour, sept jours par semaine et 365 jours par année, n'est-ce pas? Dans le cas de la Colombie-Britannique, ces installations peuvent produire environ 50 000 gigabits-heures d'énergie.

Pour l'électricité, donc, nous avons la dimension de la puissance et la dimension de l'énergie. Si on revient à mon exemple de l'ascenseur, et si on parle, mettons, du pic du milieu de l'hiver, le réseau électrique peut-il répondre à cette période de pointe? Et ce qui encore plus important, le réseau électrique peut-il fournir suffisamment d'électricité vingt-quatre heures par jour, sept jours par semaine et 365 jours par année, afin de répondre à la demande de tout le monde?

Alors, quand on voit des articles dans la presse qui parlent de mégawatts, ça c'est la puissance, et si quelqu'un commence à jacasser au sujet de la puissance, eh bien, ce n'est qu'un aspect de la question. Vous devez également savoir ce qu'il en est de l'énergie, c'est-à-dire les gigawattheures ou mégawattheures ou kilowattheures. Il faut tenir compte d'un facteur de temps. Il est très important que vous compreniez la différence lorsque vous écoutez les gens aux quatre coins du pays expliquer certaines choses.

Le dernier groupe parlait d'énergie de distribution. L'énergie de distribution et l'énergie renouvelable sont de très jolies notions, comme, par exemple: «Nous avons 50 mégawatts de puissance installée dans des éoliennes». Mais les éoliennes ne fonctionnent pas vingt-quatre heures par jour, sept jours par semaine, 365 jours par année. Il faut composer avec les variations météorologiques, comme dans le cas d'une installation hydroélectrique. C'est donc souvent le potentiel énergétique des sources renouvelables dont on ne tient pas compte, en ce qui a trait à leur importance pour fournir l'énergie qui est nécessaire.

Pour ce qui est d'un exposé en bonne et due forme...

Le sénateur Banks: Je m'excuse, je veux seulement m'assurer que j'ai compris ce que vous venez de dire. Si j'ai une centrale électrique qui produit... lorsque vous parlez de «puissance», parlez-vous de la capacité de production?

M. Austin: C'est exact, comme pour un moteur; combien de chevaux.

Le sénateur Banks: Je vois. Le moteur a une puissance de 100 chevaux ou peu importe, mais le fait est qu'il ne peut fournir une puissance de 100 ou je ne sais quoi tout le temps, parce qu'il va y avoir des temps d'arrêt, ou qu'il va falloir remplacer le moteur, de sorte qu'il faut l'arrêter. Votre deuxième commentaire a trait à ce que le moteur peut effectivement fournir et non à sa puissance, est-ce que j'ai bien compris?

M. Austin: Tout à fait. L'autre aspect est ce dont vous venez de parler. Il faut des temps d'arrêt; mais il y a aussi la question de savoir quel carburant il utilise. Est-ce qu'il utilise le vent, ou de l'eau, ou du gaz naturel comme source d'énergie? Le type de combustible détermine combien d'énergie il peut produire. Si vous utilisez du charbon, vous pouvez être sûr que votre tas de charbon est là et que vous allez produire, disons, à 90 p. 100 de la capacité de production, tandis que si vous utilisez de l'eau, en Colombie-Britannique, vous êtes chanceux si vous pouvez atteindre 60 ou 65 p. 100 de la capacité de production sur une base annuelle. Par conséquent, lorsque les gens pensent en fonction des politiques énergétiques, ils oublient souvent de faire la distinction et proposent des choses qui ne sont pas très sensées.

Le sénateur Banks: Avoir la puissance ne veut pas dire qu'on peut l'utiliser.

M. Austin: Ce n'est que de la puissance. C'est la capacité de travailler et non le travail en soi. Du moins, c'est ce que me disent les ingénieurs électriciens.

Le président: Continuez.

M. Austin: Concernant la liste - et je vais la passer en revue rapidement - la déréglementation dans le secteur de l'électricité de la Colombie-Britannique est pratiquement inexistante. C'est un type d'approche en matière d'électricité où le gouvernement commande et contrôle tout. Au sujet d'un marché concurrentiel, le gouvernement n'a montré absolument aucun intérêt, et le monopole qui porte le nom de B.C. Hydro est bien content d'accepter cette situation.

Pour ce qui est de l'engagement en faveur de l'énergie verte, je pense que je suis dans le secteur depuis trop longtemps, parce que je suis passé par cette phase lorsque j'ai commencé, et j'avais remarqué à l'époque que lorsque les prix baissaient pour certains types d'énergie, l'engagement vis-à-vis de l'environnement diminuait lui aussi. Le seul engagement en faveur de l'énergie verte que je vois vraiment consiste à améliorer les codes du bâtiment et les normes sur les électroménagers, et cetera.

En ce qui a trait à l'incidence de la crise énergétique que connaît la Californie, eh bien, au début, on a présenté cette crise d'une manière totalement inexacte dans les médias. On l'a présentée comme une conséquence de la déréglementation. Or le problème de la Californie est aussi le problème des États de Washington et de l'Oregon, et dans une certaine mesure, celui de l'Alberta. Tout le long de la côte Ouest, il n'y a eu aucune construction d'une nouvelle installation de production d'électricité au cours des dix dernières années. Juste pour donner quelques chiffres, au cours des dix dernières années, l'économie de la Californie, avec un taux de croissance situé entre 4 et 5 p. 100, avait besoin d'une puissance de 10 000 mégawatts. Et qu'est-ce qu'on a construit? Une centrale d'environ 2000 mégawatts. Il en manque seulement 80 p. 100. Dans l'État de Washington, il manque environ 3000 mégawatts, et pour l'Oregon, c'est à peu près la même chose. En Colombie-Britannique, ce qui joue en notre faveur c'est que notre économie s'est portée si mal que nous ne sommes pas dans la même situation que tout le monde sur la côte Ouest. Si on remonte plus loin que dix ans, tout le monde construisait trop, et le mantra de l'époque parmi les planificateurs était: «En cas de pénurie, nous allons emprunter ou en acheter l'électricité chez nos voisins». C'est un peu comme si tout le monde dans le voisinage se disait: «Je peux emprunter une tasse de sucre à mon voisin si j'en manque». Si tout le monde pense de cette façon, il est inévitable qu'un beau jour tous vont se croiser dans la rue et heurter leurs tasses les unes contre les autres. C'est exactement ce qui est en train de se produire sur la côte Ouest. La déréglementation en Californie a aggravé le problème. Le problème a aussi été masqué pendant bon nombre d'années par les accumulations de neige importantes tout le long de la côte Ouest.

Le réseau électrique intégré nord-américain...

Le président: Avant de passer à autre chose, vous n'avez pas expliqué la raison. Vous voulez dire que tous ont surestimé la puissance dont ils disposaient?

M. Austin: Ils ne l'ont pas sous-estimée; ils ont simplement décidé, dans le cadre d'une politique, qu'ils allaient l'emprunter ou l'acheter à quelqu'un d'autre. Rien de plus compliqué que cela; ils essaient donc tous d'emprunter...

Le président: C'est ce que nous avons fait en Alberta. Nous allions emprunter la puissance à la Colombie-Britannique.

Le sénateur Lawson: Lorsqu'on parle de services publics réglementés, il est tout naturel pour eux d'essayer d'élargir l'assiette des tarifs. Pourquoi n'essayaient-ils pas de faire cela?

M. Austin: Ils avaient vu trop grand dans les années 80, et les organismes de réglementation ont dit alors: «Nous ne voulons pas refaire la même erreur».

Le sénateur Lawson: Est-ce que c'est cela?

M. Austin: C'était à la fois les organismes de réglementation et les dirigeants du secteur des services publics qui disaient: «Bon d'accord, nous n'allons pas construire, parce que nous avons trop construit par le passé». Donc, essentiellement, ils sont passés à une situation où l'on ne construisait pas assez. Je sais que ça peut paraître étonnant, mais tout cela était évident il y a six ou sept ans.

Le sénateur Banks: C'est ce qui se passe tout le temps dans le développement des ministères.

M. Austin: Concernant le réseau électrique intégré nord-américain, vous devriez jeter un coup d'9il sur le texte que j'ai apporté, intitulé «The Real Threat to America's Power»; c'est une photocopie d'un article tiré de Fortune Magazine.

Le prochain aspect qui fait problème dans le domaine du commerce de l'électricité a trait aux réseaux de transmission. Il n'y a pas eu d'investissement dans cela non plus. Vous êtes donc en train de planifier toutes ces centrales thermiques au gaz tout le long de la côte Ouest et ailleurs. Fort bien. Cependant, tout d'abord, on a du mal à acheminer le gaz jusqu'à ces centrales, mail il y a moins d'opposition au transport de gaz qu'au transport d'électricité. On construit ces centrales, mais après, comment allez-vous acheminer l'électricité jusqu'au marché, si les centrales n'ont pas été construites juste à côté des consommateurs?

Prenez la Con. Edison de New York comme exemple typique. L'entreprise dispose d'une capacité de production suffisante pour répondre à la charge de pointe au milieu de l'hiver. Mais que fait la Con. Ed. en ce moment même? Elle construit aussi vite qu'elle le peut six petites centrales alimentées au gaz, aussi près que possible des consommateurs. Ces centrales forment une sorte d'anneau autour de Manhattan, afin de contourner les problèmes liés au transport. C'est pourquoi ils disposent de la puissance nécessaire. Ce n'est pas un problème d'énergie dans le cas de la ville de New York, disons; c'est un problème qui a trait au transport de cette électricité jusqu'aux consommateurs à dix-sept heures, le jour le plus chaud de l'été. Mais si la centrale est située dans le nord de l'État de New York et qu'elle est alimentée au gaz, on peut bien continuer de la faire fonctionner, mais on ne peut faire parvenir l'électricité jusqu'à Manhattan, parce qu'on éprouve des difficultés de transport.

Partout en Amérique du Nord, une fois qu'on aura résolu le problème de la «production» - et on le résoudra - la prochaine difficulté aura trait au transport de l'électricité jusqu'au marché. C'est pourquoi, en ce qui a trait au concept de réseau électrique intégré nord-américain, le message est le suivant: «Minute, nous avons encore des étapes à franchir avant même de pouvoir commencer à nous pencher sur cette question». La côte Ouest n'a rien à envier au reste de l'Amérique du Nord en matière d'intégration, parce qu'on peut transporter de l'électricité depuis Hudson Hope, en Colombie-Britannique, jusqu'à San Diego sans aucune difficulté, sauf pour des contraintes liées à la capacité de production à certains moments. Cet article de Fortune Magazine est excellent pour savoir ce que représentent vraiment ces contraintes.

Le sénateur Spivak: Dites-nous pourquoi vous abordez uniquement la question de l'offre et pas celle de la demande. Pourquoi ne parlez-vous pas de l'économie d'énergie?

M. Austin: Parce que je pense que l'économie d'énergie est un aspect qu'il faut traiter par l'entremise des codes du bâtiment et des normes sur les électroménagers. La réalité est qu'une grande partie de la nouvelle demande provient du secteur de la technologie.

Le sénateur Lawson: Qu'en est-il des prix?

M. Austin: Les prix pour ces secteurs en particulier, il faut les considérer sous l'angle d'un pourcentage de la production totale. Par exemple, dans le cas des parcs de serveurs Web, qui sont essentiellement des entrepôts remplis d'ordinateurs et qui permettent de regrouper les ordinateurs en un point central au lieu de la garder sur place, le coût total d'exploitation de ces centres, pour ce qui est de l'électricité, est probablement de 20 p. 100 environ.

Le sénateur Spivak: Un chiffre que je vais vous soumettre a trait aux véhicules loisir-travail, par exemple, et à l'approvisionnement en essence. Si on améliorait l'efficacité énergétique de ces véhicules rien que de trois milles au gallon, ce serait comme donner libre accès à la Réserve faunique nationale de l'Arctique.

M. Austin: Je comprends ça, mais du côté de l'électricité, on ne voit pas ce genre de flexibilité. Les gens ont essayé de favoriser le plus possible le mode économie d'énergie pendant très longtemps: ils ont isolé les maisons; dans le cas de ceux qui utilisent l'électricité pour chauffage, ils ont installé des fenêtres à double et triple vitrage. Cette idée, donc, qu'il y a énormément d'électricité qui peut être récupérée du jour au lendemain par des mesures d'économie d'énergie est fausse.

Le sénateur Spivak: Pas du jour au lendemain.

M. Austin: Mais ils travaillent sur cet aspect depuis un bon bout de temps.

Le président: En tant que président, j'essaie de limiter le plus possible les interruptions à ce stade-ci, afin que vous puissiez au moins terminer votre exposé.

M. Austin: Vous pouvez m'interrompre; ça n'a pas vraiment d'importance. Le fait est que, encore une fois, lorsque j'ai commencé dans ce secteur, j'ai vu toutes ces choses dans les années 80. Puis, le prix du produit a chuté, et le produit a pratiquement été rayé de la carte avec le prix.

J'avais un parent qui était dans le domaine de la construction au début des années 80. Il était architecte et faisait le travail de pointe dans des maisons à haut rendement énergétique. Il découvrit rapidement qu'il devait modifier son approche de marketing à l'égard de ses clients concernant le confort et les jardins d'hiver et ce genre de choses, parce que personne ne s'intéressait plus aux maisons à haut rendement énergétique lorsque les prix ont chuté. Il a continué de faire son travail d'architecte en fonction de normes très rigoureuses, mais le marché n'était pas intéressé.

Le président: Continuez. Voulez-vous qu'on vous pose des questions maintenant?

M. Austin: Attendez. Concernant l'incidence de l'ALENA sur le secteur de l'énergie, et ajoutons également la politique continentale en matière d'énergie qui, je présume, est à l'horizon au niveau des relations entre les États-Unis et le Canada, les Américains ont ouvert leurs marchés aux Canadiens, mais les Canadiens, du moins dans cette partie du monde, non pas ouvert leurs propres marchés aux Américains. En ce moment, les Américains ont des pénuries d'électricité, mais une fois qu'ils auront résolu ces problèmes, ils s'attendront à ce que le Canada ouvre ses marchés.

Un projet de loi a été déposé devant le Congrès américain l'année dernière, sous le nom d'Electricity Competition and Reliability Act, au niveau de la Chambre des représentants, et on y fait référence dans cette article, intitulé «Canadian Access to U.S. Electricity Markets and Income Taxes». C'est là que le Congrès recherchait la réciprocité. On a laissé tomber cette disposition-là. Croyez-le ou non, le président de B.C. Hydro était là-bas - mais je peux me tromper sur ce point; je suis certain qu'il était là-bas parce l'article indique - ou l'entrevue tirée du Globe and Mail, indique qu'il faisait activement du lobbyisme contre la réciprocité. Je crois qu'Hydro Québec était aussi là-bas pour faire la même chose. Je pense que ce n'est pas la voie à suivre. Si on obtient l'accès à leurs marchés et qu'on dit: «Oui, nous sommes contents de pouvoir vendre de l'électricité à la Californie, malgré le fait qu'ils pourraient ne pas payer», alors je pense qu'on a intérêt à s'occuper de l'ouverture de nos propres marchés. Par exemple, en Colombie-Britannique, les Américains ne peuvent vendre de l'électricité qu'à un ou deux des clients de B.C. Hydro, qui sont au nombre de 1,5 million, alors que B.C. Hydro peut vendre son électricité tout le long de la côte.

Ce que j'ai oublié de mentionner précédemment est que tout le monde parle de la Californie et de ses difficultés en matière d'énergie causées par la déréglementation. Les États de Washington et de l'Oregon sont entièrement réglementés, mais eux aussi manquent de capacité de production. Il est question de pannes de courant localisées ou générales à répétition dans l'État de Washington cet été. On parle aussi d'arrêter, par mesure de précaution, les activités de toute l'industrie de l'aluminium dans les États de Washington et de l'Oregon pour les deux prochaines années.

Concernant la politique continentale en matière d'énergie, du moins en ce qui a trait à l'électricité, je ne pas sais pas avec certitude ce qui est en train de se passer. Je ne comprends pas ça du tout, parce que ce sont les États-Unis qui demandaient avec insistance d'ouvrir leurs marchés aux Canadiens, et non l'inverse; je ne suis donc pas sûr pourquoi les gens parlent de la politique continentale en matière d'énergie, sauf peut-être en ce qui a trait au commerce du pétrole et du gaz avec le Mexique.

Enfin, voici une belle question épineuse. Les Américains voulaient construire une centrale thermique nationale alimentée au gaz, tout juste au-delà de la frontière, à l'est de Vancouver. Elle se situait juste sur la frontière. Le gaz devait arriver du Canada et l'investissement devait aller à l'État de Washington. C'était une centrale de 600 ou 700 millions de dollars, et toute la pollution atmosphérique serait entrée au Canada.

Le hic dans cette histoire était que la centrale ne devait pas être reliée directement au réseau américain de transport d'électricité, mais plutôt à la centrale de B.C. Hydro située de l'autre côté de la frontière. De là l'électricité serait passée dans le réseau de B.C. Hydro pour ensuite retourner aux États-Unis. C'était un des plans. L'autre plan, dont ils ne voulaient pas vraiment parler, prévoyait B.C. Hydro comme acheteur, mais ça, c'est une tout autre histoire.

C'est le genre de chose dont a dû s'occuper l'Office national de l'énergie, parce que la ligne de transport traverse la frontière, et l'Office national de l'énergie n'a toujours pas encore déterminé jusqu'où nous devons aller dans l'analyse des effets de ce genre de projet sur l'environnement. Allons-nous considérer seulement la ligne de transport ou bien toute la centrale et les effets en matière de pollution sur la région métropolitaine de Vancouver?

À l'heure actuelle, dans l'État de Washington, le projet a été rejeté à deux reprises par l'Environmental Review Board, mais il pourrait rester d'actualité pendant un certain temps. Il s'agit là d'un exemple intéressant de la façon dont les choses pourraient fonctionner, du moins en ce qui a trait aux relations entre le Canada et les États-Unis, si l'on envisage davantage le commerce de l'électricité. N'oubliez pas, c'est une question bilatérale; ça ne va pas uniquement dans un sens.

La dernière question est celle de savoir si le gouvernement fédéral ne pourrait pas faire quelque chose afin de diffuser davantage de renseignements sur le marché au sujet de l'électricité. C'est un secteur qui cultive le secret. Il fait paraître le marché obligataire grand ouvert. Toutes ces sociétés d'État qui gardent ces informations partout au pays et qui disent: «Nous ne voulons pas vous le dire, c'est très secret». Ce n'est pas la voie à suivre. Si nous voulons avoir des marchés ouverts, et si nous voulons avoir davantage de libre-échange, nous devons divulguer les informations. Je peux en apprendre davantage sur ce que fait B.C. Hydro en assistant à un exposé devant la Federal Energy Regulatory Commission à Washington (D.C.) qu'ici au Canada. Par conséquent, il y a une chose que je voudrais dire, et c'est que cela est très important.

Le président: Juste avant que les autres ne posent leurs questions, je pourrais peut-être me prévaloir de la prérogative du président. Je ne suis pas sûr d'avoir compris vos commentaires au sujet des lignes de transport, ou peut-être ai-je compris; j'ai cru comprendre, étant aussi ingénieur, qu'il y a une limite à ce qu'on peut avoir. Lorsque nous parlons d'accroître la capacité de production, c'est compréhensible: vous pouvez construire une centrale, moi je peux en construire une, et ainsi de suite. Mais ce n'est pas très sensé de construire trois ou quatre lignes de transport. Comment allez-vous recommander la construction de ces lignes? Il me semble que c'est comme si les Américains arrivaient ici pour construire ces lignes électriques comme ils le feraient dans le cas d'une autoroute. Tout le monde ne peut pas construire ses propres routes; on a seulement une autoroute qui apporte l'électricité.

M. Austin: Cela n'a pas d'importance que ce soit l'État ou un monopole privé qui s'occupe de la question du transport. La réalité est qu'il faut investir davantage dans ces lignes de transport, sinon l'électricité n'ira nulle part. Voilà le problème.

Le président: Je suis d'accord là-dessus, mais j'essayais de contourner votre $ J'en conclus que vous êtes en faveur de la libre entreprise, et que vous imaginez que plus il y aura de centrales et mieux ce sera, mais ce que je veux dire est qu'on ne peut pas rendre une ligne principale, des lignes à haute tension libres et concurrentielles. Est-ce qu'on peut?

M. Austin: Oui, ils sont en train de le faire en ce moment même. C'est la même chose que pour les gazoducs.

Le président: Mais nous en avons fait des conduites communes.

M. Austin: C'est ce qu'ils ont fait aux États-Unis pour les lignes de transport d'électricité. Cela a déjà été fait.

Le président: Ils peuvent construire une ligne privée, mais après ils doivent accepter l'électricité de tous les autres?

M. Austin: Oui. Cela se fait déjà.

Le sénateur Banks: Juste une petite question. Je suis sûr que vous vous êtes penché là-dessus d'innombrables fois et que vous avez un avis à ce sujet. Si quelqu'un devait proposer à la province de la Colombie-Britannique, ce qui finira par arriver, 100 milliards de dollars pour B.C. Tel, quel serait votre conseil?

M. Austin: La province de la Colombie-Britannique n'est pas propriétaire de B.C. Tel, de sorte qu'ils voudront probablement offrir une centaine de milliards de dollars pour B.C. Hydro.

Le sénateur Banks: Excusez-moi, B.C. Hydro, oui.

M. Austin: Ma réponse spontanée à cette question, pour ce qui est des installations de production, est que les projets hydroélectriques d'envergure ne devraient pas être confiés à des intérêts privés. Comme le prouve le projet Kemano d'Alcan, le secteur privé n'a pas démontré qu'il savait exploiter de grandes installations hydroélectriques d'une meilleure façon que le secteur public.

Le sénateur Banks: Quel est alors votre avis au sujet de la privatisation des centrales nucléaires de l'Ontario?

M. Austin: Pour ce qui est des centrales nucléaires de l'Ontario, il s'agit d'installations tout à fait différentes des actifs uniques en leur genre comme ceux de Niagara Falls. Est-ce que je vous conseillerais de privatiser la centrale hydroélectrique de Niagara Falls? La réponse est non. Et les centrales nucléaires de l'Ontario? Si vous pouvez trouver quelqu'un qui veut les acheter, ce serait probablement une bonne chose, parce que le secteur privé est en mesure d'exploiter ce genre d'installations, et le fait d'ailleurs, et elles ne sont pas uniques en leur genre; elles peuvent être reproduites.

Le sénateur Banks: Très bien.

Le sénateur Adams: La demande d'électricité de la part du secteur commercial a-t-elle augmenté au cours des dix ou quinze dernières années?

M. Austin: Je pense que c'est le cas pour le secteur commercial. La demande a augmenté dans ce secteur. Je crois que presque n'importe quelle entreprise d'électricité vous le dira. Principalement en raison de l'accroissement du matériel électronique.

Le sénateur Adams: Qu'en est-il des données sur les ménages?

M. Austin: Ce qui fausse les données relatives aux ménages est le fait que le gens construisent des maisons plus grandes, de sorte qu'il faut considérer la question d'après le nombre de mètres carrés, et je n'ai pas tous ces chiffres dans ma tête.

Le sénateur Adams: En Californie, il est question d'une pénurie de gaz naturel dans l'avenir. Ils ont besoin de plus d'argent pour acheter davantage d'énergie. J'ai entendu dire qu'ils n'auront plus de gaz naturel dans dix ans. Maintenant, ils veulent le gaz naturel de l'Alberta. Est-ce que c'est vrai?

M. Austin: Revenons à votre question sur l'utilisation de l'électricité en Californie et sur le prix. Si le prix augmente, allons-nous voir une baisse de la demande? La réalité est que les tarifs de l'électricité sont plus élevés dans l'État de New York qu'en Californie, et je ne suis pas au courant de l'existence d'un quelconque écart important en matière de consommation entre l'État de New York et la Californie ou l'Oregon. Par conséquent, on peut augmenter les taux en Californie d'une manière assez importante avant d'atteindre des tarifs comme ceux pratiqués à New York, et je ne pense pas qu'on verra une énorme différence en ce qui a trait à la demande. Il y a un certain degré d'élasticité.

Si on revient à la question de savoir quel est le pourcentage total d'électricité dont a besoin un secteur en particulier, dans l'industrie de l'aluminium, il est élevé, tandis que dans d'autres secteurs, il n'est pas élevé; ils assument donc les coûts. Il faut aussi comparer les tarifs pratiqués aux États-Unis et au Canada avec ceux des concurrents du monde entier; l'Europe, par exemple. En Europe, les tarifs sont très élevés.

Le sénateur Adams: Supposons que vous construisez une centrale près de la frontière américaine et que vous revenez au Canada pour vous brancher sur la ligne de transport. Y a-t-il une entente entre la Colombie-Britannique et les États-Unis en ce qui a trait à la vente d'électricité et au coût par kilowatt?

M. Austin: Je ne comprends pas cette proposition de centrale électrique près de la frontière entre le Canada et les États-Unis. Pour moi, il s'agit d'une bonne technologie et d'un très mauvais emplacement, et je n'ai pas peur de le dire. Mais pourquoi ils veulent se raccorder au réseau canadien et non directement au réseau américain, je crois que c'est à cause des lois locales relatives au zonage des comtés; ils auraient eu à faire une bonne étude de la réglementation pour ce côté-là de la frontière, tandis qu'au Canada, ils ont trouvé une vieille emprise du chemin de fer et ont dit: «D'accord, faisons passer ça en Colombie-Britannique».

Dans le domaine du commerce de l'électricité, la réalité est que si vous voulez savoir où va l'électricité et qui va l'utiliser, vous n'avez qu'à suivre les lignes de transport. Mon opinion personnelle est que dans le cas qui nous intéresse, B.C. Hydro était, je pense, très intéressée à acheter de l'électricité produite par la centrale en question, mais en raison de l'opposition au projet, n'était pas prête à le dire publiquement. Qui plus est, dans la documentation utilisée par les organismes de réglementation américains, la SE-2, on mentionnait d'une certaine manière B.C. Hydro comme acheteur potentiel de cette électricité. Mais l'idée de la produire aux États-Unis, de payer à B.C. Hydro des droits de transport pour le bref trajet au Canada, des droits qui ne sont pas établis en fonction de la distance mais en fonction de timbres-poste, et de la renvoyer aux États-Unis, n'a absolument aucun sens pour moi.

Le sénateur Adams: Il y a quelques années, nous sommes descendus à San Francisco. Là-bas, ils voudraient que le Canada construise un pipeline jusqu'en Californie parce qu'ils bénéficient d'une servitude de passage. Ils ne peuvent passer sur le terrain de qui que ce soit d'autre.

Le président: J'ai une autre question. Je reviens encore au pipeline, aux lignes principales. Vous disiez qu'en ce moment, nous n'avons pas assez d'électricité, mais qu'un jour nous pourrions en avoir plus qu'il nous en faut. En Alberta, il y a bien des années - et beaucoup de gens l'ont oublié - nous avons utilisé le contraire du rationnement: la répartition proportionnelle. Est-ce que vous voyez cela comme une possibilité à long terme, si les lignes principales sont adéquates ou plus qu'adéquates, et si nous avons une surcapacité de production d'électricité, ou est-ce que vous prévoyez une concurrence sauvage?

M. Austin: Je prévois une concurrence sauvage. Je vois, du côté américain de la frontière, le recours au chapitre onzième, les vieilles centrales inefficaces faire faillite, et les gens qui ont été assez intelligents pour en construire près des lieux d'où vient la demande, et qui n'ont donc pas à payer des frais de transport aussi élevés et qui sont bien situés par rapport aux gazoducs, seront les gagnants. Les perdants seront les groupes qui n'ont pas analysé tous ces aspects, ou qui ont construit les centrales au mauvais endroit, ou qui vont devoir engager des frais plus élevés que leurs concurrents pour le transport du gaz et des frais plus élevés pour le transport de l'électricité.

Le président: Malgré les pénuries que nous avons, êtes-vous en train de dire qu'ils devraient concevoir les centrales, et les placer de telle manière à ce qu'il soit possible, plus tard, d'avoir des excédents, parce que lorsque le jour viendra, ils voudront être concurrentiels?

M. Austin: C'est ce que certains groupes devraient faire, mais n'oubliez pas, pour revenir à votre exemple sur la construction d'appartements ou d'immeubles à Edmonton, il y a la possibilité de trop construire et la possibilité de ne pas construire suffisamment, et on appelle cela le marché libre. Si on construit trop et que les gens commencent à subir des pertes du côté des immobilisations, eh bien, j'imagine qu'alors le prix de l'électricité diminue.

Le président: Pensez-vous que le marché libre peut être utilisé pour introduire des sources d'énergie de remplacement, comme l'énergie éolienne, et l'hydroélectricité au lieu de la biomasse?

M. Austin: Si j'étais un promoteur du domaine des énergies renouvelables, je commercialiserais ma production comme source de remplacement du gaz, et non comme une source qui est nécessairement plus verte ou meilleure pour l'environnement, mais comme une valeur de protection dans le portefeuille.

Le président: Je vois. Y a-t-il d'autres questions?

Le sénateur Spivak: Les grandes sociétés font cela. Je veux dire, Shell et toutes ces sociétés, elles essaient de se repositionner comme sociétés énergétiques et non seulement comme compagnies pétrolières, ou est-ce juste une façade?

M. Austin: Si on prend en considération l'investissement total effectué jusqu'à maintenant, la quantité totale d'énergie qu'elles produisent et la quantité totale d'énergie électrique qui est consommée par les marchés, le montant de l'investissement dans les ressources renouvelables qui est effectué par certaines grandes compagnies, qui vantent ces sources comme étant des sources de remplacement, est drôlement faible.

Le sénateur Spivak: Ici, mais pas en Europe.

M. Austin: Là-bas, ils voient ça dans une optique de prix, et n'oubliez pas, leurs prix grimpent encore plus que ceux de la Californie.

Le président: Appliqueriez-vous vos solutions de pré-vente même à l'énergie atomique?

Le sénateur Spivak: À l'énergie nucléaire.

M. Austin: Oui, parce que je suis pas mal sûr que le marché libre ne construira pas une centrale nucléaire. Mais je suis aussi conscient que le marché libre n'est pas parfait et qu'il y a des situations où les gouvernements doivent intervenir, mais la réalité est que, du moins lorsqu'on a affaire à un marché libre, le gouvernement peut faire quelque chose. Là où le gouvernement se casse vraiment la figure, c'est quand il essaie de réglementer ses propres sociétés d'État. Ça ne marche tout simplement pas.

Le président: Surtout lorsque le conseil d'administration est formé des personnes qu'il a lui-même nommées.

M. Austin: Exactement. Dans le cas de la Colombie-Britannique, vous avez B.C. Hydro qui appartient au gouvernement de la Colombie-Britannique; le gouvernement de la Colombie-Britannique contrôle la B.C. Utilities Commission et en nomme les membres, et cette commission est censée s'occuper des intérêts de B.C. Hydro. Que se passe-t-il alors si B.C. Hydro fait quelque chose qu'elle n'est pas censée faire? Comment la B.C. Utilities Commission est-elle censée la pénaliser? La seule façon que je vois consiste à imposer des pénalités financières, et est-ce qu'une branche du gouvernement va prélever de l'argent dans les poches d'une autre branche du gouvernement? La réponse est non.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Austin. Vous avez apporté une bouffée d'air frais pour terminer la journée. Malgré que tous les autres témoins aient été très bons, eux aussi, votre exposé a été un peu plus direct.

M. Austin: C'est l'expérience.

La séance est levée.


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