37-3
37e législature,
3e session
(2 février 2004 - 23 mai 2004)
Choisissez une session différente
Délibérations du Comité sénatorial permanent
des finances nationales
Fascicule 8 - Témoignages
OTTAWA, le mercredi 9 mai 2001 Le Comité sénatorial permanent des finances nationales, auquel a été renvoyé le projet de loi S-23, Loi modifiant la Loi sur les douanes et d'autres lois en conséquence, se réunit aujourd'hui à 17 h 53 afin d'examiner le projet de loi. Le sénateur Lowell Murray (président) occupe le fauteuil. [Traduction] Le président: Honorables sénateurs, c'est la seconde réunion de notre comité qui est consacrée à l'examen du projet de loi S-23, Loi modifiant la Loi sur les douanes et d'autres lois en conséquence. Hier, nous avons entendu le ministre, M. Cauchon, et des fonctionnaires de son ministère. Il reste un certain nombre de questions à examiner, en particulier en ce qui concerne les futurs règlements. Le sénateur Angus, entre autres, exprimait le souhait d'en poursuivre la discussion avec les fonctionnaires qui se trouvent ici ce soir. Monsieur Lefebvre, vous avez la parole. [Français] M. Denis Lefebvre, sous-commissaire, Agence des douanes et du revenu du Canada: Tout d'abord, je voudrais mentionner, contrairement à ce que j'ai dit hier en réponse à une question du sénateur Bolduc, le mot «mérite» n'apparaît pas dans la Loi sur l'Agence des douanes et du Revenu du Canada La dotation à l'Agence est régie par un programme de dotation et par les huit principes énoncés au résumé du plan d'entreprise de l'Agence que doit déposer annuellement le ministre devant le Parlement. Les principes de dotation sont les suivants: la neutralité politique, la représentativité, la compétence, l'équité, la transparence, l'efficacité, l'adaptabilité et la productivité. Ces principes sont compatibles avec ceux du reste de la fonction publique. Le processus de sélection par voie de concours est le principal mécanisme de promotion du personnel tant à l'interne qu'à l'externe. Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de faire cette mise au point. Le sénateur Angus: J'aimerais faire appel au règlement. Le sénateur Bolduc doit arriver dans quelques instants. Je voudrais savoir si M. Lefebvre a une copie écrite de son exposé afin que le sénateur Bolduc puisse le consulter s'il désire poser des questions ultérieurement. M. Lefebvre: J'ai une copie dans les deux langues officielles. [Traduction] Je tiens aussi à préciser qu'à l'examen article par article, nous aurons un certain nombre de modifications rédactionnelles mineures à suggérer, mais nous proposerons également deux autres modifications portant sur le fond. J'ai ici un document de trois pages, avec des copies en français et en anglais, qui explique l'objet des amendements ainsi que la raison pour laquelle c'est maintenant que nous les soumettons au comité. Le président: Je crois que vous devriez expliquer l'objet des modifications portant sur le fond. Nous obtiendrons une explication plus détaillée par écrit et lorsque nous passerons à l'examen article par article, le sénateur Setlakwe, qui est le parrain de ce projet de loi, présentera les amendements. Veuillez continuer. M. Lefebvre: Pour établir le contexte, je précise que l'autorité douanière s'applique essentiellement aujourd'hui à l'examen et à la fouille des voyageurs à l'arrivée. Notre autorité ne s'étend pas aux employés qui peuvent travailler dans les zones à accès restreint entourant les aéronefs ou dans les aérogares. Elle ne s'applique pas non plus aux voyageurs qui décident de retourner à leur point de départ - c'est-à-dire les personnes qui ont accès aux zones à accès restreint et qui décident ensuite d'en ressortir. Le sénateur Angus: Vous voulez dire au Canada? M. Lefebvre: Oui. Elles quittent la zone à accès restreint et reviennent au Canada. Le projet de loi S-22, une loi autorisant les États-Unis à effectuer au Canada le précontrôle à l'égard des voyageurs et des marchandises des États-Unis, a reçu la Sanction royale le 17 juin 1999, ce qui a permis la signature de l'Accord sur le précontrôle du transport aérien avec les États-Unis, le 18 janvier 2001. En réponse à la signature de l'Accord de précontrôle, l'Autorité aéroportuaire du Grand Toronto (AAGT) a récemment déposé un certain nombre de propositions de conception d'une installation d'autorisation préalable des voyageurs des États-Unis en transit dans le nouvel aéroport de Toronto. L'AAGT et d'autres aéroports ont indiqué qu'ils souhaiteraient mettre en oeuvre le processus de traitement en transit inverse. Le transit inverse est un processus selon lequel les voyageurs en provenance de l'étranger qui se sont rendus aux États-Unis via le Canada désirent procéder de la même façon en sens inverse pour rentrer chez eux. Cela oblige les voyageurs rentrant des États-Unis et se rendant à l'étranger de passer par des zones à accès restreint où des voyageurs canadiens se rendant à la même destination pourraient les rencontrer. Ce que nous craignons, c'est que les voyageurs qui sortent de ces zones pour rentrer au Canada aient accès à des voyageurs qui n'ont pas été soumis aux formalités douanières. C'est un risque qu'il importe de réduire. L'objet des modifications qui vous seront présentées est le suivant: premièrement, autoriser le ministre à désigner des zones à accès restreint, que l'on appelle également des zones stériles. Cela permettra également aux services douaniers d'examiner et de fouiller les voyageurs qui décident de retourner à leur point de départ, qui ont accès à ces zones et qui en sortent ensuite. Par ailleurs, les services douaniers seront ainsi autorisés, sous réserve des limites prescrites par la Charte, à examiner et à fouiller les employés qui pourraient sortir de ces zones après avoir été en contact avec les voyageurs à l'arrivée. Enfin, le ministre du Revenu national, qui est responsable des Douanes sera ainsi autorisé à désigner les employés qui auront accès aux zones à accès restreint. De cette manière, les discussions qui se dérouleront avec les aéroports désireux d'appliquer le processus de traitement en transit inverse ne pourront qu'être fructueuses, sous réserve des discussions avec tous les organismes qui s'intéressent à la question. Nous appelons aujourd'hui votre attention sur ces modifications afin que vous puissiez en connaître le contenu avant l'examen article par article. Nous sommes naturellement à votre entière disposition pour répondre aux questions que vous pourriez avoir à ce sujet. Le sénateur Angus: M. Lefebvre, cette première question est fort intéressante. Manifestement, il s'agit de l'aspect de votre mandat que vous avez décrit aujourd'hui, qui n'a rien à voir avec le commerce des marchandises, mais qui a trait à la sécurité et à la santé des citoyens canadiens. Vous venez de nous en donner une description assez technique, en termes choisis avec soin. Pourriez-vous nous donner un exemple théorique, en termes simples, d'une situation qui pourrait se produire à l'aéroport de Dorval et contre laquelle cette modification est destinée à nous protéger? M. Lefebvre: Actuellement, il y a des employés qui sont chargés de nettoyer les aéronefs arrivant de pays étrangers qui peuvent être des pays à risque élevé. Lorsque les employés quittent ces zones, nos services douaniers n'ont pas autorité pour leur poser des questions ni pour les fouiller ou les examiner. Le sénateur Angus: Vous parlez des employés, pas des voyageurs? M. Lefebvre: Oui, des employés. Nous disposons déjà de tous les pouvoirs nécessaires en ce qui concerne les voyageurs à l'arrivée. Actuellement, les machinations internes sont nombreuses. De 1995 à 1999, la moitié des saisies de drogue que nous avons faites dans les aéroports étaient liées à de telles machinations. Le président: Aux fins du compte rendu, expliquez-nous le terme «machination interne». M. Lefebvre: Il s'agit d'opérations de contrebande auxquelles participent des employés des aéroports dont la plupart ont accès aux zones restreintes. Voilà un exemple de ce genre de machination. Le sénateur Angus: J'ai été frappé par l'exemple que vous nous avez donné hier d'un voyageur qui avait pris l'avion à New York pour se rendre à Londres via un aéroport canadien. Il devait arriver à Dorval et passer dans la zone à accès restreint pour prendre le vol 866 d'Air Canada à destination de Londres. Un Canadien de Québec partant de Montréal devait entrer dans cette même zone pour le rencontrer, puis ressortir de la zone à accès restreint au lieu de prendre l'avion pour Londres. Ai-je bien compris? M. Lefebvre: C'est un parfait exemple de ce genre de situation. Une telle personne pourrait dire qu'elle avait l'intention de se rendre à Londres, mais qu'elle avait changé d'avis et avait donc quitté la zone à accès restreint. Le président: En vertu de la loi actuelle, il vous est absolument interdit de poser des questions ou de fouiller une telle personne? M. Lefebvre: Légalement, nous ne pouvons pas le faire. Le sénateur Angus: Cette personne avait une carte d'embarquement qui lui permettait d'entrer dans la zone à accès restreint, mais elle n'avait en fait jamais eu la moindre intention de se rendre à Londres. Comme elle ressort de la zone à accès restreint avec cette carte, vous ne pouvez rien lui demander. M. Lefebvre: C'est exact. Actuellement, les autorités, lorsqu'elles ont des raisons de penser que quelqu'un est en train de commettre un acte illégal, ne jouissent que des mêmes pouvoirs que ceux de la police à l'égard des autres Canadiens. Elles ne peuvent pas exercer les pouvoirs normaux d'examen et de fouille de la douane. Le sénateur Angus: Comme je l'ai fait remarquer hier, ces pouvoirs sont plus étendus que ceux de la police et les autorités douanières aiment les exercer pour faire leur travail. Cela confirme bien ce que j'essayais de montrer hier. C'est dangereux, mais en tant que personne respectueuse de l'ordre public, je trouve cela excellent. Le voyageur de New York qui a pénétré dans cette zone à accès restreint n'est pas non plus obligé de passer par vous, n'est-ce pas? M. Lefebvre: Notre responsabilité est de protéger le Canada. À l'heure actuelle, ces personnes sont obligées de passer par nous, mais si tous les organismes d'inspection se mettaient d'accord pour considérer que le risque est acceptable, un voyageur de New York se rendant à Londres passerait la douane mais ne passerait pas nécessairement par une agence d'inspection canadienne à moins qu'il n'y ait une bonne raison pour cela. Le président: Contrairement au voyageur canadien, le voyageur américain ne peut pas sortir de la zone à accès restreint. M. Lefebvre: Non. Le sénateur Angus: Je trouve intéressant que vous présentiez aujourd'hui cet amendement. Pourquoi n'avait-on pas déjà prévu cela dans le projet de loi? Je suis certain que ce n'est pas un simple oubli. M. Lefebvre: L'accord de précontrôle est nouveau. L'Autorité aéroportuaire du Grand Toronto construit actuellement un aéroport. Elle intègre actuellement à l'ensemble un système d'autorisation préalable des voyageurs dans un sens. Selon ses architectes, compte tenu de l'afflux des voyageurs, il serait avantageux d'avoir un système d'inspection en transit inverse. Des discussions se poursuivent actuellement à ce sujet. Ces demandes sont présentées aux organismes d'inspection. Cette loi permettrait d'entamer des discussions fructueuses si les conditions appropriées de stérilité et de contrôle étaient respectées. Le sénateur Angus: Je voudrais maintenant aborder un domaine plus général. Appelons-le le domaine du pouvoir discrétionnaire des agents de l'ADRC de divers niveaux. Nous avions convenu hier qu'il y a des niveaux différents. On m'a dit que le projet de loi ainsi que les règlements auxquels on est en train de donner une forme définitive, prévoient des pouvoirs divers, dont beaucoup sont fort étendus. Par exemple, le ministre, ou un agent désigné, aura la faculté de ne pas imposer de sanctions ou de les modifier. Vous avez dit à mes collaborateurs et à moi-même que vous êtes en train d'élaborer une politique d'équité qui permettra aux individus de faire non officiellement appel de toute décision auprès d'un agent de douanes avant qu'un appel officiel soit interjeté. À mon avis, il y a là un élément discrétionnaire qui permettrait d'atténuer les rigueurs excessives de la loi. Vous essayez d'instaurer une certaine normalisation dans l'application du Système de sanctions pécuniaires administratives (RSAP), et les autres sanctions. Ce pouvoir discrétionnaire serait-il si important qu'il y aurait lieu de s'en inquiéter dans le cas où il serait conféré à des agents de niveau subalterne qui n'auraient peut-être pas le jugement et l'expérience nécessaires pour l'exercer à bon escient? Qu'en pensez-vous? Cela me paraît être un pouvoir considérable. M. Lefebvre: Ce que nous recherchons, c'est la cohérence et l'uniformité. Nous devons prendre des décisions d'un océan à l'autre et nous avons littéralement des centaines de ports et des milliers d'agents. Nous essayons de nous montrer cohérents. Un certain pouvoir discrétionnaire existe donc bien, mais il est contrôlé par des lignes directrices qui peuvent être assez précises. Je parle là des critères élaborés pour l'exercice du pouvoir discrétionnaire. Lorsqu'il s'agit de domaines plus flous, au lieu de questions auxquelles s'appliquent clairement les lignes directrices données à ces agents, ces derniers peuvent aussi en référer à leurs supérieurs. Le sénateur Angus: Pour assurer la cohérence de l'exercice du pouvoir discrétionnaire, vous espérez pouvoir instituer une sorte de normalisation de l'ensemble de votre système. C'est bien votre intention, n'est-ce pas? Cependant, cela n'apparaîtra même pas dans un règlement mais simplement, dans une série de lignes directrices. Ce que vous dites en réalité, c'est, «nous savons que nous avons ce pouvoir. Faites-nous confiance, nous l'exercerons équitablement». Est-ce bien cela? M. Lefebvre: Aujourd'hui, nous proposons un ensemble exhaustif de sanctions administratives correspondant au niveau de l'infraction. La Loi sur les douanes nous permet d'utiliser une pléthore de sanctions et d'amendes, y compris les saisies et les confiscations. Nous les appliquons tous les jours, mais nous nous inspirons pour cela de la formation et des lignes directrices actuelles. Bien entendu, lorsque les clients estiment avoir été traités avec trop de sévérité, il leur est loisible d'interjeter appel devant une direction indépendante de l'Agence, dirigée par M. Beaulac. Il s'agit en fait d'un appel interjeté devant le ministre. Les clients peuvent d'ailleurs aussi faire appel devant les tribunaux s'ils ne sont pas satisfaits de la décision. Oui, nous augmentons en effet le nombre des sanctions. Nous les adaptons beaucoup mieux au niveau de l'infraction, mais fondamentalement, nous ne modifions pas la manière dont nous imposons ces sanctions ni la façon dont nous guidons et formons nos agents pour que le système soit appliqué de manière uniforme dans tout le pays. J'ajouterai qu'en ce moment, en particulier dans le domaine commercial, une grande partie des affaires que nous traitons avec les courtiers, qui représentent une multitude de clients d'un océan à l'autre, sont un facteur de contrôle et contribuent à l'uniformité de nos décisions. En effet, les courtiers discutent entre eux, d'un bout à l'autre du pays, des décisions prises par les agents de douane. Le sénateur Bolduc: Je crois comprendre, par exemple, qu'à cause de l'ALENA et de tous les autres accords, quelque 8 000 produits franchissent la frontière entre le Canada et les États-Unis, ce qui représente des échanges commerciaux de 1,5 milliard de dollars par jour. Cent millions de personnes franchissent les frontières. Le tarif est quelque chose d'énorme. J'y ai jeté un coup d'oeil et je l'ai trouvé très bizarre. J'ai bien l'impression que selon les types de produits venant des États-Unis ou de tout autre pays, les tarifs sont différents. Pour les personnes qui ne sont pas directement concernées par l'Accord de libre-échange, il existe un autre type de tarif. Cela ne me surprend pas trop. Je comprends très bien que vous ayez un gros manuel pour cela et que vous respectez le règlement. Cependant, lorsqu'on en vient aux sanctions, la situation est totalement différente car il y a toute une hiérarchie de fautes et de sanctions. Cela n'a rien à avoir avec les règlements. C'est une sorte de pratique répondant au droit commun, mais la réglementation n'est pas ce qu'elle devrait être. Votre agence utilise donc une sorte de processus administratif. C'est bien cela? M. Lefebvre: Non. Les sanctions seront réglementées. Les contraventions le sont déjà. Le sénateur Bolduc: J'essaie de cerner le pouvoir discrétionnaire en faisant une comparaison avec le domaine dans lequel tout le monde se comporte de la même manière parce que c'est la loi. M. Earle Warren, directeur général, Direction de la conception et de l'élaboration de projets importants, Direction générale des douanes, Agence des douanes et du revenu du Canada: Les infractions sont clairement énoncées dans le règlement et dans la loi. Seul le montant monétaire de la sanction n'y figurera pas, mais il sera publié. Le sénateur Bolduc: Cela se trouvera-t-il dans un manuel que l'agent a devant lui comme les autres guides administratifs qui énoncent diverses règles de procédure? M. Lefebvre: Je le répète, les clients seront également au courant. M. Warren: Toutes les sanctions seront publiées dans des documents accessibles à tous les clients. Ceux-ci le sauront. Le sénateur Angus: Ces sanctions sont-elles aussi sujettes à modification? M. Warren: Les montants en dollars, oui. Le sénateur Angus: Nous avons parlé de pouvoir discrétionnaire et de votre intention de mettre en place des lignes directrices et une série de pratiques administratives, comme l'a établi le sénateur Bolduc. Vous tenez à ce que toutes ces infractions soient traitées de manière équitable et cohérente. J'ai appris que certains intéressés craignent que ces lignes directrices n'aillent trop loin. J'ai, par exemple, compté 141 infractions dans le Régime de sanctions administratives pécuniaires, le RSAP, en vertu de cette loi. Cela me paraît assez raisonnable, mais certaines infractions me paraissent n'être que des peccadilles. Vous étiez tous ici, messieurs, lorsque j'ai interrogé le ministre à ce sujet. D'un côté, nous libéralisons le commerce. Nous essayons de faciliter la libre circulation des marchandises. Tout cela entre dans le cadre la mondialisation et du libre-échange, dont nous sommes tous si fermement partisans. Pourtant, nous avons des articles frivoles, tels que le 35.01, en vertu duquel la personne qui ne marque pas correctement des marchandises en indiquant leur pays d'origine peut être frappée d'une amende maximale de 400 $, ou de 20 p. 100 du montant du droit de douane, le chiffre le plus élevé étant retenu. Voilà un exemple des activités futiles dont j'ai parlé hier, de choses qui pourraient être faites par un courtier en douane ou par un commis d'entrepôt lorsque les marchandises sont regroupées. Comment expliquer cela à la personne qui a peur de voir détruire son entreprise parce qu'il est accusé d'avoir commis une de ces infractions mineures qui exigent des appels et une foule de formalités administratives? M. Lefebvre: La question est importante. Un phénomène important est apparu dans le monde douanier, en particulier depuis le début du libre-échange avec les États-Unis et de la réduction des droits de douane à zéro en 1998. Autrefois, l'imposition d'une sanction pour déclaration et classification incorrectes des marchandises, à quoi s'ajoutait le paiement d'intérêts, était un garant de discipline et d'intégrité dans le programme douanier. Nous avons élaboré un système de sanctions complet allant de simples avertissements à des amendes plus lourdes pour les récidivistes. Sans sanction, le programme perd son intégrité et ce qui est beaucoup plus important, les entreprises ne feront pas beaucoup d'efforts pour respecter toutes les exigences si elles constatent que leurs concurrents ne consacrent pas autant de temps et d'argent à leur observation. Les sanctions donnent un sens aux exigences négociées dans les accords commerciaux. Le marquage, par exemple, est une exigence qui est négociée pour une bonne raison. Il incombe à l'administration douanière de s'assurer que ces exigences ont un sens et sont appliquées à la frontière. Cela peut paraître futile, mais il faut à tout prix que le laisser-aller auquel conduit l'absence de conséquences pour les actes commis, ne devienne une manière de mener des affaires. Le sénateur Angus: Excellente réponse. Pourtant les personnes qui ont appelé mon attention sur cette question sont préoccupées par certaines statistiques qui n'ont vraiment rien à voir avec l'importation de marchandises en franchise de droits. Certaines amendes peuvent atteindre 25 000 $. Apparemment, Statistique Canada a besoin de l'information pour tenir des dossiers exacts. C'est une réponse qui me paraît cynique. Je ne suis pas convaincu de son bien-fondé, mais j'aimerais avoir vos commentaires à ce sujet. M. Warren: Je vais vous donner un bon exemple pour vous montrer pourquoi c'est important: à cause des volumes actuels, nous devons beaucoup compter sur un système de ciblage afin de décider des marchandises que nous allons contrôler. Certains articles sont placés sous le contrôle de nombreux autres organismes. Lorsque nous recevons un message de l'importateur ou du courtier, l'article doit être classifié correctement. Les données sont communiquées au système de ciblage ce qui permet à l'agent de déterminer s'il s'agit d'un produit à risque élevé. S'il y a une erreur de classification, le ciblage peut ne pas fonctionner et l'article peut échapper à une inspection sanitaire ou à une vérification du permis d'importation. Les informations statistiques sont donc importantes. Elles influent sur la balance des paiements et sur les négociations commerciales. Nous utilisons des données de marquage dans tous nos systèmes automatisés afin de cibler les envois que nous voulons contrôler. M. Lefebvre: L'amende de 25 000 $ ne s'appliquera qu'aux infractions très graves. Le sénateur Angus: Je l'espère. Par exemple? M. Lefebvre: Par exemple, un chargement de plus de 500 000 $ incorrectement marqué à tout point de vue. Si l'expéditeur l'a fait à trois reprises, c'est le genre d'amende qui peut être imposée. Le sénateur Angus: Quelqu'un nous a donné un exemple d'organisme sans but lucratif; en l'occurrence, il s'agissait d'une association de bénévoles s'occupant d'oeuvres de bienfaisance dans une église, en ce cas, qui avaient essayé d'importer des publications pour leur organisation. Après avoir étudié ces dispositions, le processus, l'amende, les modalités de recours, elles avaient conclu que cela pouvait entraîner la disparition de leur organisation. Pouvez-vous nous assurer que cela ne se produirait pas? M. Lefebvre: Cela ne se produira pas. Le sénateur Angus: Un autre informant cynique est passé à mon bureau et m'a dit que toutes les recettes perdues du fait du libre-échange et de la suppression des droits de douane, etc., sont en fait récupérées grâce à ces sanctions. Hier, mon ami le sénateur Bolduc a soulevé cette question devant le ministre et on lui a assuré que ce n'était pas du tout le cas. Donnez-moi plus de détails, quelle est notre position sur la question? M. Lefebvre: Merci de me donner l'occasion d'en parler. Dans le secteur douanier, la sanction n'a pas pour objet d'accroître les recettes. Les sanctions n'ont qu'un seul objectif, accroître l'observation des règlements. Le président: Satisfaisez ma curiosité. Lorsqu'une amende est imposée, l'argent va-t-il au Trésor? M. Lefebvre: Oui. Les agents de douane ne travaillent pas à la commission. Le sénateur Angus: Vous avez, je crois, étudié mon discours en seconde lecture, lorsque j'ai discuté le fait, comme nous l'avons fait ici, que certaines de ces amendes doivent être payées sur-le-champ. Les gens craignent, s'ils ont été pénalisés injustement, d'être obligés de payer d'abord puis de devoir suivre toutes les étapes du processus, d'abord de manière non officielle puis officielle, avec toute la perte de temps, les efforts et les coûts que cela implique. Ils peuvent obtenir gain de cause en fin de compte, s'ils ont été traités inéquitablement. Je veux simplement vous donner la possibilité de fournir plus de détails. Je crois que vous avez fait savoir à mon bureau, le 7 mai, qu'en fait, le RSAP ne sera plus appliqué d'avance, ou sur-le-champ, comme je l'avais suggéré et que je devrai donc peut-être faite une petite mise au point du même genre comme vous l'avez vous-même fait pour commencer ce soir. M. Lefebvre: Les sanctions imposées en vertu de la Loi sur les douanes s'appliquent au défaut de déclaration, entre autres. Ce n'est là qu'un exemple. Ce régime peut également s'appliquer à un voyageur, qu'il vienne du Pérou ou d'une autre partie du monde, au même titre qu'à une organisation commerciale avec laquelle nous sommes en compte. En droit, les amendes sont immédiatement payables et recouvrables. En fait, le voyageur doit payer à la frontière car il peut s'agir de quelqu'un qui importe un produit qui a été mal classifié, mal décrit, et pour lequel une amende doit être payée. La personne peut ne pas être un résident du Canada, ce qui nous oblige à prendre des mesures immédiates car nous ne voulons pas être obligés de poursuivre les gens dans d'autres pays. En revanche, lorsqu'il s'agit d'importateurs commerciaux qui sont implantés au Canada et avec lesquels nous sommes en compte, nous avons une pratique de longue date selon laquelle nous n'insistons pas pour percevoir l'amende tant que le processus d'appel n'est pas terminé. Le sénateur Angus: Cette disposition apparaîtra-t-elle dans les lignes directrices ou dans le règlement? M. Lefebvre: Ce sera la pratique à laquelle nous nous tiendrons. Nous continuerons comme de par le passé. Cela n'apparaît pas dans la loi parce que l'infraction concerne les importateurs commerciaux et les voyageurs pour qui la mesure de perception doit être prise immédiatement. Pour éviter les appels mal fondés, nous avons prévu dans le projet de loi que l'intérêt commencera à jouer à compter du moment de l'infraction. Le sénateur Angus: Pour en finir avec cette question, j'ai dit hier et également la semaine dernière, que les pénalités que l'on envisage d'infliger aux sociétés et aux particuliers, en vertu du RSAP prévu par cette loi paraissent être plus élevées et plus sévères que dans n'importe laquelle des 19 autres lois du Parlement qui prévoient un RSAP. Est-ce exact? Si oui, quelle en est la raison? M. Lefebvre: D'une façon générale, elles ne seront pas plus sévères. D'après les entretiens que nous avons eus avec le ministère de la Justice lors de la préparation de ce document, il semble que 25 000 $ soit une somme importante, mais dans le secteur douanier nous avons affaire à de gros importateurs. La valeur des marchandises dont nous parlons, en particulier lorsque l'on traite avec des personnes qui, à maintes reprises nous ont fourni des renseignements erronés sur les marchandises ou ont commis des erreurs de classification, et d'autres, est élevée. En vertu de la Loi sur les douanes actuelle, nous avons infligé des millions de dollars de pénalités car il peut arriver que l'infraction commise par de très gros importateurs atteigne très rapidement un montant considérable. En règle générale, les pénalités seront plus importantes que la rançon des affaires, mais elles ne seront pas d'une sévérité excessive. Le sénateur Angus: Elles seront nettement moins fortes qu'elles ne le sont aujourd'hui. M. Lefebvre: Elles seront mieux adaptées au niveau de l'infraction qu'elles ne le sont pour le moment. Le sénateur Angus: C'est bien là la question clé. C'est comme dans l'exemple que j'avais donné du navire pour lequel la garantie à verser était égale à la valeur du navire tout entier. C'est bien cela? Cela n'arrivera pas maintenant. M. Lefebvre: C'est exact. La saisie demeure possible, mais elle jouera plus en cas de contrebande que pour des infractions commerciales. Le sénateur Cools: Comment peut-on placer une garantie équivalente à la valeur d'un navire? Le sénateur Angus: J'ai décrit un cas de ce genre hier. Le sénateur Cools: Aux fins du compte rendu, cela me paraît être une énorme somme d'argent. Le sénateur Angus: En effet, et il s'agit là une des mesures draconiennes qui existent en vertu de la loi actuelle. J'ai donné cet exemple aux autres membres du comité qui étaient présents pendant toute notre séance de travail d'hier. Le sénateur Cools: Bien. Le sénateur Angus: Il y a trois ans, à Terre-Neuve, un navire est venu prendre un chargement de rouleaux de papier journal destiné à l'exportation dans le cadre d'un contrat d'affrètement à temps. Les barrots de sa charpente portaient des traces de drogue ou de matériaux illicites qui provenaient d'un autre port où le navire avait fait escale. Le bâtiment avait donc été saisi sans mandat - tout simplement parce que la loi actuelle nous autorise à le faire - et il n'avait pas été libéré et rendu à l'armateur. Pour établir la valeur de la pénalité, il avait fallu demander à des courtiers maritimes de l'évaluer. Les douaniers ont le pouvoir requis pour dire, «à notre avis, ce navire vaut 25 millions de dollars; vous devrez donc verser une caution équivalente à ce montant». Il y a eu quelques cas de ce genre qui, à mon avis, vont trop loin. C'est pourquoi j'y ai fait allusion. Excusez-moi si ce n'était pas clair. À propos d'aller trop loin, il y a un autre domaine dans lequel je crois que la question est réglée, mais je voudrais que cela figure au compte rendu. Les documents et les matériaux présentés par mon ami le sénateur Setlakwe, ainsi que son discours, indiquent tous qu'un des objectifs des dispositions en matière de perception est de les harmoniser en vertu des dispositions législatives actuelles sur la taxe d'accise. Cependant, de prime abord, il ne semble pas qu'il y ait d'harmonisation dans ce domaine et les mesures seraient beaucoup plus sévères et draconiennes en vertu de la nouvelle loi. Vous m'avez dit qu'en fait, le système est harmonisé et vous m'avez remis une table de concordance avec force démonstrations à l'appui. Voudriez-vous dire un mot à ce sujet? M. David Miller, sous-commissaire, Direction générale des cotisations et des recouvrements, Agence des douanes et du revenu du Canada: J'espérais justement avoir l'occasion d'apporter des éclaircissements. Je vous répondrai en posant les trois questions suivantes: premièrement, pourquoi voulons-nous harmoniser le système; deuxièmement, pourquoi est-il si compliqué de le faire et troisièmement, avec quoi l'harmoniserons-nous. Ces trois points couvrent toute une gamme de questions et une grande partie de la loi leur est consacrée. Manifestement, il est important que tous les Canadiens et entreprises canadiennes comprennent leurs obligations et leurs droits. Il est tout aussi important que tous les employés de l'Agence des douanes et du revenu du Canada sachent comment appliquer la loi que vous étudiez. La façon la plus facile d'y parvenir est d'appliquer les mêmes dispositions dans les mêmes circonstances quelle que soit la loi en cause. Je crois que le Québec a poussé la réflexion jusqu'au point où il a maintenant une loi sur le recouvrement des créances; l'avantage est le suivant: si le Québec veut modifier les dispositions en matière de perception, il lui suffit de le faire une seule fois dans la loi, si bien que toutes les dispositions législatives qui s'y réfèrent ne doivent pas être modifiées en même temps. Malheureusement, nous n'avons pas pu faire la même chose. Cela m'amène au second point: la raison pour laquelle tout cela est si compliqué. Nous aurions aimé avoir une clause unique disant que les dispositions en matière de perception sont les mêmes que celles de la Loi de l'impôt sur le revenu et de la Loi sur la taxe d'accise, qui couvrent la TPS, et nous en tenir là. Malheureusement, la loi actuelle sur les douanes est structurée de telle manière qu'une simple référence à une autre loi ne fonctionnerait pas à cause des interpénétrations et rapports mutuels existant déjà. Nous avons donc été obligés de reproduire le cadre tout entier de l'autorité en matière de perception dans la Loi sur les douanes. Nous pourrons remettre aux sénateurs, s'ils le désirent, une brochure qui décrit ces interprétations, mais il ne s'agit que d'une série de références entre les trois lois, le projet de loi sur les douanes, la Loi de l'impôt sur le revenu actuelle et la Loi actuelle sur la taxe d'accise. Le sénateur Angus: C'est la table de concordance que vous aviez fourni à mon bureau. M. Miller: C'est exact. Nous en avons des exemplaires à la disposition du comité, si celui-ci le désire. Le sénateur Angus: Cela devrait être versé au compte rendu, car c'est un document très instructif. Le président: Nous le remettrons au greffier. M. Miller: Je ne peux pas vous garantir personnellement que les dispositions sont identiques, car je ne suis ni avocat ni rédacteur de loi. Nous avons été obligés de modifier légèrement la terminologie afin de tout replacer dans le contexte approprié, mais c'était le but poursuivi. Je peux vous confirmer que c'est notre objectif et qu'en fait, c'est ainsi que nous administrerons la loi - avec les mêmes dispositions et les mêmes conséquences que celles de la Loi de l'impôt sur le revenu et de la Loi sur la taxe d'accise. Je voudrais également mentionner la question de l'harmonisation. Douanes et Accise, qui couvre les mesures législatives relatives à la TPS, n'était pas administrée par les mêmes ministères que l'impôt sur le revenu jusqu'à ces dernières années. Ils avaient leurs propres traditions et leurs lois ont été reconduites. Depuis que nous avons été regroupés, nous avons essayé d'harmoniser tous les aspects de la loi, non seulement en ce qui concerne les recouvrements mais aussi les autres dispositions. Nous avons donc affaire à un seul type de transaction. Dans bien des cas, il s'agit du même groupe de clients. Je rappellerai encore une fois qu'il est important que nos employés et nos clients reconnaissent leurs droits et leurs obligations. Dans le domaine fiscal, il y a d'importantes différences entre les mesures que nous pouvons prendre en certaines circonstances. Ces différences sont mal comprises par le Canadien moyen. Si vous me le permettez, je vais vous expliquer ce qu'est la différence fondamentale. Il y a deux niveaux d'obligations en vertu des diverses lois. Le niveau le plus élevé est celui de ce que nous appelons les «fonds en fiducie» c'est-à-dire l'argent des autres, normalement détenu par une société en fiducie pour le compte de l'État. Le meilleur exemple est celui des retenues sur le salaire des employés aux fins de l'impôt sur le revenu. Le sénateur Angus: C'est un impôt retenu à la source. M. Miller: Oui, et cela inclut également les cotisations au Régime de pensions du Canada et les cotisations d'assurance-emploi. La TPS réduit aussi beaucoup de ces caractéristiques. Lorsque quelqu'un paie la TPS, la société qui la perçoit le fait en fiducie pour le compte de l'État. Nous avons un autre niveau, celui des impôts générés par le revenu déclaré annuellement sur le formulaire TI, ou pour les sociétés, sur le T2. Il y a d'autres transactions, telles que l'accise, qui ont trait au tabac et à l'alcool et, espérons-le, grâce à l'adoption du projet de loi, qui pourraient également couvrir les douanes de manière à ce que les dispositions sur la perception des droits de douane soient harmonisées avec les impôts sur le revenu ou autres taxes ou impôts sans que le niveau soit aussi élevé que celui qui est utilisé pour les fonds en fiducie. On ne peut pas appliquer à l'impôt sur le revenu et aux autres taxes et impôts les pouvoirs additionnels liés au recouvrement concernant les fonds en fiducie. Les raisons sont évidentes. Lorsqu'il s'agit de déductions à la source, les employés reçoivent des crédits correspondant au montant déduit même si l'employeur ne remet pas l'argent à l'État. Sur le plan pratique, cela revient à voler le gouvernement fédéral. Les employés obtiennent le crédit et les provinces sont payées en fonction de l'évaluation du montant des impôts payables et non des montants effectivement perçus ou reçus. En voici un petit exemple. Supposons que je sois le propriétaire exploitant d'une petite entreprise comportant un employé principal et quelques autres employés qui ne sont pas particulièrement importants pour ma société. Je dis à mon employé principal: «Nous sommes en difficulté et la société sera en faillite d'ici un an. Je ne vois pas de solution et je vais donc vous payer 20 000 $ par mois. Mais en fait, je ne vous remettrai pas un chèque correspondant à ce montant, j'enverrai le total à l'ADRC, au titre de la retenue salariale». À la fin de l'année, ma société ne fait aucun versement pour cet employé, mais en réalité nous le créditons de 20 000 $ par mois, nous calculons les impôts qui auraient été payés sur ce montant annuel de 240 000 $ et nous remboursons la différence à l'employé. Tout remboursement fait à cet employé est techniquement payé sur les deniers du gouvernement fédéral. Nous avons des dispositions qui nous permettent d'intervenir au nom de ce que nous appelons la «responsabilité des administrateurs» dans ce genre de situation afin de nous assurer que les administrateurs d'une société font preuve de diligence raisonnable. Leurs biens mobiliers sont assujettis à cette disposition, ce qui les oblige à verser les retenues à la source ou les retenues salariales. Rien de cela ne s'applique aux dispositions de la loi avec laquelle nous cherchons à harmoniser les activités douanières. Dans ce cas, l'État a le statut d'un créancier ordinaire et guère plus, à moins que nous ne recourions au processus normal auprès des tribunaux pour obtenir que notre dette soit garantie, ou que nous fassions le nécessaire pour améliorer le statut de notre dette. Pour nous, il est toujours préférable d'essayer de trouver des modalités de paiement acceptables, en tenant notamment compte des préjudices qui peuvent être causés, ce qui se produit fort souvent. Nous en tenons compte et nous différons le paiement. Il est toujours préférable d'essayer de s'entendre plutôt que de prendre des mesures draconiennes, en poussant, par exemple, quelqu'un à la faillite. En cas de faillite, nous ne récupérerons jamais notre argent. S'il s'agit d'une société active, qui produit des revenus et emploie un certain nombre de personnes, il nous reste une chance de récupérer plus tard notre argent. Nous préférons toujours l'adoption de modalités de paiement à des mesures draconiennes qui peuvent priver quelqu'un de ses moyens de subsistance ou compromettre la poursuite des activités d'une entreprise. Dans le cas des douanes, nous retenons parfois les marchandises à la frontière à cause d'un différend, ce qui compromet le déroulement normal des activités commerciales. En vertu de la nouvelle loi, comme le disait monsieur Lefebvre, lorsque nous sommes en relations constantes avec une société, nous ne retenons plus les marchandises à la frontière et nous essayons de parvenir à un arrangement qui n'a pas d'effet préjudiciable sur la valeur des marchandises et, ce qui est plus important, n'aura pas d'effet majeur sur la poursuite des activités de cette société. L'harmonisation est un principe auquel nous attachons beaucoup d'importance. Le sénateur Angus: Votre explication était claire, concise et utile. M. Miller: J'ai eu le privilège de comparaître des dizaines de fois devant votre comité lorsque j'occupais mon poste précédent. Le sénateur Angus: Ma question n'inclut pas le sujet de la protection de la vie privée dont nous avons parlé hier. Je préférerais, si vous me le permettez, évoquer rapidement la question du Programme d'autocotisation des douanes (PAD). Vous étiez ici hier lorsque j'ai demandé au ministre pourquoi nous procédons d'une manière qui paraît fragmentée. Nous n'avons pas d'autres ministères qui contrôlent l'entrée et la sortie des marchandises au Canada qui sont régies par d'autres lois. Autrement dit, au mieux, 45 p. 100 seulement des marchandises entrant au Canada bénéficieront de cette mesure de facilitation ou des dispositions de cette loi. Peut-être pourrions-nous commencer par cela. Qu'avez-vous à dire à ce sujet? M. Lefebvre: Je n'ai pas grand-chose à ajouter à ce que le ministre a dit hier. La loi qu'on vous demande d'approuver prévoit l'application du PAD à tous les importateurs, en principe. C'est un des éléments cadres de la loi. Au départ, les douanes peuvent approuver les importations de petits accessoires ou d'articles qui ne doivent pas être approuvés par d'autres ministères. Voilà pour commencer. Si d'autres ministères, par exemple, l'Agence d'inspection des aliments, arrivent à bien connaître certains importateurs de marchandises appartenant à leur sphère de responsabilité et leur font confiance, et s'ils veulent les faire bénéficier du PAD au lieu d'établir des rapports de transactions à la frontière, nous sommes prêts à l'accepter. Le sénateur Angus: Si je comprends bien, il s'agit de vous mettre d'accord avec les secteurs du gouvernement qui réglementent les autres 55 p. 100 des marchandises. La question est-elle effectivement à l'étude? M. Lefebvre: À mon avis, les marchandises à risque le plus élevé ne bénéficieront probablement jamais du PAD. Chaque chargement devra toujours être inspecté à la frontière. Les autres ministères le savent parfaitement et certains d'entre eux étudient déjà la question mais nous n'en connaissons aucun qui serait prêt à accepter le programme d'ici octobre. Le sénateur Angus: Estimiez-vous qu'il était plus important de faire adopter le projet de loi? M. Warren: Permettez-moi d'ajouter deux remarques; la première est que le PAD comprend deux parties. En fait, bien qu'on lui fasse moins de publicité, la partie la plus importante du PAD est probablement l'avantage qu'il présente pour les entreprises sur le plan de la comptabilité. Le programme est ouvert dès le premier jour à toutes les marchandises importées. La seule différence est ce qui se passe à la frontière. Le deuxième point que nous ne devons pas perdre de vue, est qu'à cause des volumes traités, les postes frontaliers sont extrêmement encombrés. Chaque fois qu'une expédition est dédouanée plus rapidement, cela signifie que les autres, même si elles suivent le processus normal, ne sont pas retardées. Leur mouvement est également plus rapide si bien que cela présente un avantage indirect très important. Le sénateur Bolduc: Lorsque vous parlez «d'expéditions à risque plus élevé», parlez-vous surtout de produits alimentaires ou de produits pharmaceutiques? M. Lefebvre: Il peut s'agir tout aussi bien de déchets toxiques ou d'armes à feu. Le sénateur Angus: Cela replace bien les choses dans leur contexte. Pour en terminer avec une autre idée que j'avais évoquée hier, c'est la première grande étape de votre plan d'action des douanes et elle comprend beaucoup d'excellents éléments. Je sais que vous êtes très fiers du projet de loi - à juste titre. Quel sera le prochain élément de votre plan d'action? M. Warren: Il est probable que le plus important sera le système de traitement accéléré des passagers. Ce système modifiera le programme CANPASS qui existe aujourd'hui à la frontière; il sera largement appliqué dans tout le pays, dans les aéroports ainsi qu'aux postes frontaliers terrestres. Un projet pilote d'application limitée deviendra donc un programme dont un pourcentage élevé de Canadiens pourront profiter. Le sénateur Bolduc: Parlez-vous surtout des voyageurs d'affaires? M. Warren: Je parle des voyageurs réguliers et des frontaliers. Ces programmes ne sont pas très efficaces pour les touristes qui doivent se soumettre à une vérification préalable. Le programme visera surtout les voyageurs d'affaires, les riverains qui travaillent de l'autre côté de la frontière et qui franchissent celle-ci tous les jours, ainsi que les étudiants qui passent la frontière. Ils constituent un pourcentage relativement petit de la population mais représentent un pourcentage élevé de passages frontaliers. En utilisant un processus rationalisé spécial à leur intention, nous n'éviterons pas les encombrements qui nous menacent aujourd'hui, et même le voyageur qui ne participe pas au programme en profitera. Le sénateur Angus: Donc, le Système de traitement accéléré des passagers, le STAP, fonctionnera concurremment. Est-ce le seul élément qui exige l'adoption d'une loi pour la mise en oeuvre de l'ensemble du plan quinquennal, ou faut-il s'attendre à une autre loi dans le cadre de ce plan? M. Lefebvre: La loi que vous examinez fournit le cadre nécessaire à l'élaboration de toutes nos initiatives composant le plan. Le sénateur Angus: Très bien. En ce qui concerne la question de la protection de la vie privée, nous avons posé des questions au ministre et ses réponses nous ont paru excellentes, mais je crois que nous avons besoin de quelques éclaircissements supplémentaires aux fins du compte rendu. En vertu de la loi actuelle, vous êtes libre de faire des contrôles aléatoires de toute pièce de courrier pesant plus de 30 grammes. Comment déterminez-vous les motifs raisonnables de soupçonner qui, si je comprends bien, vous autorisent à ouvrir le courrier et à faire une fouille? En dépit des explications qu'on nous a données hier, je me demande si nous ne pourrions pas améliorer cette loi en établissant des critères. Je voudrais avoir votre avis d'expert à ce sujet. Il me semble raisonnable que le projet de loi prescrive des critères relatifs aux motifs de soupçonner et à l'ouverture du courrier. Comme cette question est en train de devenir un véritable ballon politique, j'estime que vous auriez intérêt à régler la question. M. Lefebvre: Actuellement, le courrier du Canada à destination de l'étranger ne passe pas normalement par nos centres de traitement. Il est expédié directement hors du Canada. Nous ne voulons pas changer ce régime et nous n'en avons d'ailleurs pas les moyens. Cependant, il peut arriver que des organismes d'application de la loi sachent que des marchandises stratégiques assujetties à des permis d'exportation soient sur le point d'être exportées du Canada par voie postale. Dans un tel cas, on ciblerait un ou plusieurs colis, ce qui nous permettrait de demander aux postes canadiennes de nous les remettre pour que nous les contrôlions. C'est tout ce que nous voulons. Pour répondre à votre question, il faudrait effectivement que nous ayons des raisons valables de croire que ces colis contiennent des produits dont l'exportation est interdite ou qui sont assujettis à la délivrance d'un permis. Le sénateur Banks: Cela ne vaut que pour les colis de 30 grammes? M. Lefebvre: Oui. Le sénateur Banks: Est-il vrai que si j'expédie une microplaquette dans une enveloppe ordinaire adressée à ma tante en Angleterre, il ne peut pas y avoir de fouille sans son autorisation ou la mienne? M. Lefebvre: Dans ce cas, l'organisme d'application de la loi devrait obtenir un mandat. Le sénateur Angus: Au lieu d'établir certains critères de motifs raisonnables de soupçonner, on pourrait considérer l'ouverture du courrier pour ce qu'elle est, une fouille, et donc, l'assujettir à l'émission d'un mandat de fouille de manière à ce que les dispositions de l'article 99 de la Loi sur les postes soient respectées tout en protégeant en même temps les droits des expéditeurs et des destinataires en vertu de la Charte. Je parle là des questions qui sont actuellement montées en épingle dans les médias. Est-il logique d'utiliser un mandat de perquisition? Je ne pense pas que ce soit votre avis. Le sénateur Bolduc: Vous n'oseriez pas mettre ce que vous avez dit dans le projet de loi. C'est très important. Pourquoi ne précisez-vous pas ce que vous dites? M. Lefebvre: Nous ne lisons pas le courrier, un point c'est tout. Le sénateur Angus: Vous l'inspectez. M. Lefebvre: Nous n'ouvrons pas le courrier qui pèse moins de 30 grammes. Nous avons un processus pour les grandes enveloppes et les paquets qui peuvent contenir des produits assujettis à un tarif douanier. Peut-être pourrais-je vous citer des statistiques pour vous montrer l'ampleur du problème. Environ 350 millions de pièces de courrier international entrent au Canada chaque année. Nous n'en regardons même pas quelque 320 millions d'entre elles. Il s'agit essentiellement d'enveloppes qui peuvent avoir un caractère confidentiel, qui contiennent des lettres écrites par des Canadiens, etc. Ce ne sont pas les lettres qu'on demande à nos inspecteurs d'examiner. Il y a des critères. Nous n'ouvrons pas les 30 millions de colis qui passent entre nos mains. Les critères selon lesquels les agents en douanes mettent des paquets de côté varient d'un mois à l'autre car le risque peut passer d'un pays à l'autre ou d'une province à l'autre d'un même pays pour lequel nous avons que le risque est plus élevé. Certains critères guident les agents de douanes lorsqu'ils ont affaires à des articles assujettis à un tarif. Les gens doivent payer la TPS. Comme cela soulève des questions de concurrence pour les entreprises canadiennes, nous devons nous montrer vigilants. Nous percevons la TPS et la TVP applicables aux produits importés au Canada, conformément à la loi et aux règlements appropriés. Nous devons également surveiller la circulation des produits interdits soumis à une réglementation. Compte tenu du nombre de colis qui entrent, nos agents ont fait un travail exceptionnel au cours des trois ou quatre derniers mois. Ils ont par exemple intercepté et ouvert des colis contenant de la viande en provenance d'Angleterre, ou des fromages interdits ou contrôlés. Mais il est bien sûr possible qu'à d'autres moments il s'agisse d'autres produits provenant d'autres pays. Nous écoutons tous les autres ministères. Nous établissons des indicateurs. Nos agents le font tous les jours et doivent utiliser leur bon sens. Avant d'ouvrir une enveloppe ou un colis, ils doivent avoir des motifs raisonnables de soupçonner qu'il (elle) contient des articles qui sont assujettis à un tarif douanier ou de produits réglementés interdits ou contrôlés. Ce sont les critères qui figurent dans la loi. Les agents ne lisent pas le courrier. Le sénateur Banks: Le caractère raisonnable des motifs est-il défini à peu près de la même manière que dans le Code criminel? M. Lefebvre: Non, les motifs raisonnables de soupçonner peuvent exister à un niveau très bas. Je pourrais vous donner un autre exemple. Sauf si le poids est inférieur à 30 grammes, la même règle joue pour quelqu'un qui passe la frontière avec un paquet dans un porte-document. Dans notre centre de traitement, nous employons la même procédure que celle que nous utilisons pour un individu. Autrement dit, aux termes de la loi, les règlements sont les mêmes, quel que soit le mode utilisé. Que vous envoyiez quelque chose par messager ou par la poste, que l'article soit apporté en personne ou expédié par des voies commerciales, la loi demeure essentiellement la même lorsqu'il s'agit d'un produit assujetti à un tarif douanier, qu'il soit interdit, contrôlé ou réglementé. Le président: J'apprends, et cela ne vous surprendra pas, sénateur Angus, que vos collègues du barreau canadien axeront leurs commentaires sur l'ensemble des questions que vous venez de soulever lorsqu'ils comparaîtront mardi prochain dans la matinée. Cela va être intéressant. Le sénateur Angus: Je voudrais dire à mes honorables collègues qu'il s'agit manifestement d'une question que nous devons parfaitement maîtriser car, comme ces fonctionnaires l'ont fait observer, on en a parlé de toutes sortes de façons, souvent à tort. Les médias en ont donné des descriptions erronées, mais il est indispensable que nous comprenions le processus. J'ai pris la liberté de rencontrer les avocats du barreau et j'ai insisté auprès d'eux pour qu'ils viennent nous parler. Ne pourrions-nous pas évoquer l'exemple des livres et des papillons? Lorsqu'on parle de critères et de motifs raisonnables, n'oublions pas qu'il y a aussi parfois des dénonciations. C'est un exemple intéressant car il montre ce à quoi les douaniers doivent parfois faire face. M. Mike Jordan, directeur général, Direction générale de la politique commerciale et de l'interprétation, Direction générale des douanes, Agence des douanes et du revenu du Canada: Je crois que l'exemple auquel vous faites allusion est celui de l'agent qui, trouvant un livre, l'a ouvert et a constaté qu'il avait été évidé. Il contenait en fait des papillons protégés, c'est-à-dire qui étaient considérés comme une espèce protégée. Voilà le genre de situation que l'on peut rencontrer lorsqu'on effectue des inspections. Le sénateur Angus: Une expédition de livres peut donner lieu à une dénonciation. [Français] Le sénateur Ferretti Barth: Ma question n'est pas aussi élaborée que celles posées par le sénateur Angus. Elle porte sur le programme CANPASS. Est-ce que ce programme va affaiblir la sécurité frontalière? Est-ce que les touristes, les passagers, les Canadiens, et cetera, vont passer plus facilement les douanes avec ce programme? Parmi cette affluence, y aura-t-il des gens qui vont profiter de cet avantage? La sécurité à la frontière sera-t-elle protégée ou affaiblie? M. Lefebvre: C'est une très bonne question. À première vue, il peut paraître que la sécurité à la frontière va être affaiblie. Au contraire, nous croyons que le programme CANPASS est à la fois un outil pour faciliter l'entrée des gens et pour protéger le Canada. Présentement, les agents de douanes doivent répartir leurs efforts également parmi tous les voyageurs qui entrent au pays. Si on ne connaît pas les voyageurs, on leur pose quelques questions, mais le programme CANPASS va nous permettre, à l'avance, de connaître les voyageurs, de reconnaître qu'ils représentent un très faible risque. Ainsi, nos agents vont moins s'occuper de ceux qui présentent un faible risque et cela va leur donner plus de temps pour s'occuper de ceux qui ont un plus grand risque ou des risques inconnus. C'est un meilleur système parce que l'évaluation que nous allons faire du risque de chaque personne, en consultant les banques de données des corps policiers et nos banques de données aux douanes et à l'immigration, va nous permettre de connaître à l'avance ces gens. Ils vont s'identifier au moyen d'une carte ou d'autres moyens qui vont nous permettre de savoir qui ils sont. Cependant, nous nous réservons le droit, pour assurer l'intégrité du système, à l'occasion, de fouiller ces gens pour s'assurer qu'ils respectent la loi. Le sénateur Bolduc: Je prends note de votre remarque selon laquelle contrairement à ce que j'ai dit hier, le mot «mérite» n'apparaît pas dans la Loi sur l'Agence des douanes et du Revenu du Canada. Quand j'ai parlé de cela, je faisais allusion à l'année passée ou il y a deux ans... [Traduction] Lorsque nous avons adopté le projet de loi, il m'a semblé qu'un groupe aussi important que le vôtre dans l'ensemble de la fonction publique - vous êtes 40 000, c'est considérable puisque vous représentez 20 p. 100 des 200 000 membres de la fonction publique. Si je comprends bien, vous n'êtes pas assujetti à tous les règlements de la Commission de la fonction publique et du Conseil du Trésor. C'est compréhensible. Vous voulez jouir de plus de latitude. Cependant, à mon avis, vous faites un travail extrêmement important. Vos agents perçoivent notre argent. C'est fort important. J'ai dit que le principe du mérite devrait être dans la loi, et je n'en démordrai pas car vous n'êtes pas une entreprise privée. Vous faites un travail très important. Les Canadiens ont le droit de savoir que vous appliquez les normes appropriées. Je sais que vos documents et votre plan d'activités sont fondés sur des principes appropriés, mais cela va plus loin. C'est un aspect fondamental de l'emploi au sein de votre Agence. Nous devons avoir la certitude que vos employés sont compétents. S'il y a un domaine dans lequel les gens doivent être compétents, c'est bien le vôtre. Je ne réclamerai pas d'amendement aujourd'hui, mais je suis tenté de le faire. J'ai essayé l'an dernier et j'ai été mis en minorité par mes collègues. Je sais que certains d'entre eux étaient hésitants. Ils n'étaient pas satisfaits de la situation. Je crois que la prochaine fois, en particulier avec un homme tel que M. Miller qui vient du Conseil du Trésor, le principal critère à inscrire dans la loi devrait être la compétence. Je sais aussi qu'il faut que vous fassiez preuve de neutralité sur le plan politique et que vous soyez représentatifs, mais le principe de base est la compétence et le mérite. À mon avis, cela devrait être inscrit dans votre loi. M. Lefebvre: Je crois qu'une combinaison des huit principes qui englobe la compétence, l'équité, la transparence... Le sénateur Bolduc: Je sais, mais nous voulons le voir dans la loi. M. Lefebvre: Au total, l'adoption de ces cinq principes signifie que ce sont les personnes les plus compétentes qui obtiennent les emplois. Dans notre Agence, les emplois et les promotions sont déterminés par concours, ce qui est normal. Le sénateur Bolduc: Je suis d'accord. Je sais que vos intentions sont bonnes. Le sénateur Angus: Celles de vos successeurs ne le seront peut-être pas autant. Le sénateur Bolduc: C'est une question de politique officielle. M. Lefebvre: Ces principes en font toujours partie. J'ajouterai que tout ce qui est accolé au mot «mérite» dans la loi et utilisé dans la jurisprudence nous empêcherait de faire le bon travail que nous effectuons aujourd'hui. Le sénateur Bolduc: Utilisez un autre mot, mais au moins précisez dans la loi que vos employés seront promus en fonction de leurs compétences. M. Miller: Je suis certain que vous connaissez, sénateur, l'initiative prise par le président du Conseil du Trésor, de procéder à un examen fondamental de la manière dont des fonctions similaires seront remplies dans le reste de la fonction publique. Au cours des 18 prochains mois de cet examen, je crois qu'il sera intéressant de régler certains des problèmes évidents dans ce domaine de façon plus rapide et efficace. Bien que cela ne soit pas vraiment précisé dans la loi, nous respectons les principes du mérite et de la promotion fondée sur la compétence, mais il sera intéressant de voir comment le reste de la fonction publique va évoluer. On dispose de relativement peu de temps pour trouver des solutions aux problèmes qui se sont accumulés à cause d'une tradition qui est devenue un sérieux problème pour le recrutement et le maintien du personnel de la fonction publique. Le président: Nous suivrons cela de très près. Le sénateur Banks: Je voudrais un éclaircissement. Peut-être me suis-je laissé un peu endormir par le fait que l'on ne parle que de personnes qui viennent de New York et de camions qui franchissent la frontière. Si j'étais un voyageur fréquent venant de Lituanie et bien connu de votre Agence, pourrais-je obtenir le permis CANPASS? Si j'importais au Canada des dattes d'Arabie Saoudite, pourrais-je utiliser le système d'autocotisation? M. Warren: Pour le moment, le programme CANPASS est réservé aux Canadiens et aux citoyens et résidents américains. Après évaluation du succès du programme, nous l'étendrons probablement. De même, en ce qui concerne le PAD, comme nous l'avons indiqué tout à l'heure, vous pourrez utiliser son système de comptabilité pour les marchandises venant de n'importe quel autre pays, mais pendant les deux premières années au moins, ce système ne s'appliquera qu'aux marchandises qui entrent par la route ou par la voie ferrée, c'est-à-dire essentiellement, les marchandises en provenance des États-Unis. Le sénateur Banks: Et les marchandises expédiées par avion des États-Unis? M. Warren: Elles seront également incluses. Le sénateur Banks: Mais pas les marchandises expédiées par avion de Grande-Bretagne. M. Warren: Nous avons déjà décidé que l'évaluation que nous ferons au cours des deux prochaines années nous permettra de déterminer dans quelle mesure il sera possible d'étendre le programme. Le sénateur Banks: Si je suis importateur, n'aurai-je pas de difficulté sur le plan technique à harmoniser mes importations de Grande-Bretagne ou d'Argentine avec mes importations des États-Unis? Cela ne perturbe-t-il pas complètement mon système? M. Warren: Sur le plan comptable, comme je viens de le dire, vous utilisez un système unique. Le sénateur Banks: Je parle du courtage. Lorsque j'importe des marchandises au Canada, si je fonctionne selon un programme d'autocotisation, si je réorganise mon propre système pour utiliser le programme d'autocotisation que vous avez décrit, tout se fait électroniquement. Je vous avertis de ce que j'ai fait et vous me faites confiance. Je ne peux cependant pas le faire avec le composant B de mon produit que je fais venir d'ailleurs. Cela m'oblige donc pour le moment à utiliser concurremment deux systèmes parallèles. M. Warren: C'est exact, et c'est ce qui se passe aujourd'hui avec ou sans le PAD. Par exemple, en ce moment, nous avons un dédouanement électronique qui s'applique à un grand nombre de marchandises importées au Canada. Vous pouvez transmettre électroniquement d'avance les renseignements nécessaires. Le dédouanement est décidé lorsque les marchandises arrivent à la frontière. Elles sont immédiatement envoyées pour contrôle ou dédouanées. Si vous avez besoin d'un permis d'un autre ministère, vous retombez dans la paperasse administrative et les marchandises ne peuvent plus être traitées électroniquement. En fait, nous aurons moins d'options qu'aujourd'hui lorsque nous commencerons à utiliser le PAD. Actuellement, selon la nature de l'article, son origine, etc., vous devez vous soumettre à diverses exigences qui varient d'un endroit à l'autre. L'industrie du courtage sait très bien faire les distinctions entre les diverses marchandises et régler ces questions. Vous avez raison, c'est ainsi que les choses continuent à se passer aujourd'hui. Le sénateur Banks: Vous avez dit, il y a quelques minutes, que la situation demeurerait la même pendant deux ou trois ans. S'agit-il d'une durée approximative? Avez-vous l'intention d'étendre l'utilisation du permis CANPASS et du programme d'autocotisation dans deux ou trois ans? M. Warren: En ce moment même, il se passe quelque chose d'extrêmement intéressant: il s'agit d'un projet pilote conjoint avec les États-Unis qui fonctionne à Sarnia, en Ontario et à Port Huron, au Michigan. Dans le cadre de ce projet appelé Nexus, vous faites une seule demande qui est approuvée par les deux pays, ce qui vous permet d'utiliser votre permis pour passer la frontière dans les deux sens. C'est un programme conjoint et nous l'évaluons de concert avec les États-Unis. Si les résultats sont concluants, nous espérons en faire un programme national. Les Canadiens et les Américains pourraient demander à y participer. Après approbation, ils pourraient franchir la frontière dans les deux sens sans devoir se présenter à l'Immigration ou aux Douanes, comme le processus d'interrogation l'exige aujourd'hui. Cette évaluation déterminera notre choix: ou bien nous nous en tiendrons au permis CANPASS qui facilite uniquement l'entrée au Canada, ou bien nous adopterons un programme qui permettra aux gens de franchir la frontière dans les deux sens. La date de mise en oeuvre des nouvelles dispositions sera influencée par ce choix. Dans le cas du programme d'autocotisation des douanes, nous voulons pouvoir évaluer le programme. Nous estimons qu'il faudra sans doute deux années pour pouvoir décider s'il est opportun d'étendre ce programme à d'autres pays que les États-Unis. Le sénateur Banks: Merci. J'espère que je figurerai sur votre liste. Le sénateur Cools: Je crois que c'est le moment propice pour exprimer notre reconnaissance au sénateur Angus pour l'importance et la qualité de son travail sur ces questions. Je dois vous dire, sénateur Angus, que je n'avais guère prêté attention à ce projet de loi, mais dorénavant, au cours des prochaines journées, je me montrerai très attentif. Le président: Imaginez ce que cela nous coûterait s'il continuait à exercer dans le privé. Le sénateur Cools: Je crois que nous devrions également remercier les témoins. Je sais que nous avons déjà vu M. Miller plusieurs fois, mais j'ai été profondément impressionné par ses connaissances, ainsi que par sa franchise et par son esprit d'ouverture. Il y a bien longtemps que je fréquente ces lieux et je ne me souviens pas d'avoir jamais rencontré, chez des témoins, autant de franchise et de bonne volonté à dialoguer avec des sénateurs et à fournir des informations. Avec eux, l'échange est constant. Il y a bien des ministères à Ottawa auxquels il est impossible d'arracher le moindre mot. Il faut plus d'un an pour obtenir une réponse. Je tenais simplement à le dire. Des voix: Bravo, bravo. Le sénateur Cools: Sachez, messieurs, que votre travail est apprécié. Je voudrais poser une question. Votre ministère est confronté à d'énormes problèmes de gestion de ce genre de questions. J'ai été frappé par l'exemple des papillons donné par le sénateur Angus. Il doit y avoir un volume considérable de marchandises illégales qui entrent et sortent de notre pays. Je me posais la question au sujet des pierres précieuses et des bijoux qui ont une très grande valeur mais prennent très peu de place. Le mouvement transfrontalier de pierres précieuses expédiées par la poste pose-t-il un problème? C'est une question qui m'intrigue beaucoup. M. Lefebvre: Si je me souviens bien, une taxe d'accise de 10 p. 100 s'applique aux bijoux. Cela encourage donc les gens à en faire la contrebande. Cette contrebande existe effectivement. Nous entendons parfois parler de fascinantes histoires de saisies à la frontière. Je n'ai pas de statistiques sous la main concernant les bijoux. Le sénateur Cools: Quand nous parlons de contrebande, nous pensons immédiatement aux drogues, mais il y a d'autres sujets de préoccupations. Le sénateur Angus: Peut-être pourrais-je placer vos questions en perspective, sénateur Cools. J'ai une coupure de presse d'un de nos journaux nationaux, qui remonte à une quinzaine de jours. Les scientifiques de Douanes Canada ont élaboré un test chimique... Ces agents appliquent non seulement la loi, mais l'Agence dispose aussi de laboratoires. ... pour repérer les faux cigares cubains. Le test [...] permet de rechercher une signature chimique propre aux feuilles de tabac cultivées et traitées à Cuba. Les scientifiques peuvent ainsi repérer les cigares qui ne sont pas des cigares cubains [...] Autrement dit, il y a un gros commerce de cigares de contrefaçon et cela préoccupe beaucoup les électeurs du ministre à Outremont, qui est la circonscription ayant la plus forte consommation de cigares du Canada. Le président: Messieurs les témoins, je n'ai rien à ajouter aux commentaires du sénateur Cools sinon pour dire qu'elle a su exprimer ce que nous pensions tous. Je vous remercie de votre aide et de votre franchise. La séance est levée.