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Délibérations du comité sénatorial permanent des
Pêches

Fascicule 4 - Témoignages du 1er mai 2001


OTTAWA, le mardi 1er mai 2001

Le Comité sénatorial permanent des pêches se réunit aujourd'hui à 19 heures pour l'étude des questions relatives à l'industrie des pêches.

Le sénateur Gerald J. Comeau (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Ce soir, nous allons entendre M. David Rideout, directeur exécutif de l'Alliance de l'industrie canadienne de l'aquaculture.

Pendant 26 ans, M. Rideout a été fonctionnaire au gouvernement du Canada, où il a travaillé dans les domaines de l'inspection du poisson, des relations internationales et de la conservation des ressources halieutiques. Il a occupé les postes suivants: directeur général, Conseil pour la conservation des ressources halieutiques, directeur général, Inspection du poisson, directeur général par intérim, Analyses politiques et économiques, et directeur général, Aquaculture, restructuration et adaptation. En janvier 2000, il a quitté le gouvernement pour devenir le directeur exécutif de l'Alliance de l'industrie canadienne de l'aquaculture, association industrielle nationale qui représente les intérêts des aquaculteurs, des fabricants d'aliments pour le poisson et des fournisseurs canadiens de même que les associations provinciales d'éleveurs de poissons et de coquillages. Le siège social de l'association est à Ottawa. Monsieur Rideout, soyez le bienvenu.

M. David Rideout, directeur exécutif, Alliance de l'industrie canadienne de l'aquaculture: Honorables sénateurs, je n'ai pas à proprement parlé préparé de déclaration d'ouverture. J'ai pensé qu'il serait utile de présenter des diapositives que j'ai réunies pour mettre en lumière certaines de nos réalisations au cours de la dernière année.

La production de l'industrie aquacole canadienne a une valeur à la ferme de plus de 600 millions de dollars par année, ce qui représente environ 25 p. 100 de la valeur au débarquement du poisson au Canada. Plus de 14 000 personnes y travaillent, y compris des professionnels comme des vétérinaires, des techni ciens en alimentation des poissons, des plongeurs et des spécialistes de l'élevage.

Dans le Canada littoral et rural, l'industrie assure une présence considérable, et nous apportons une importante contribution nette à l'économie canadienne. Il est intéressant de noter que le marché connaît une croissance de 10 à 20 p. 100 par année.

L'Alliance de l'industrie canadienne de l'aquaculture est une association industrielle nationale dont le siège social est à Ottawa. Elle représente les intérêts des aquaculteurs, des fabricants d'aliments pour le poisson et des fournisseurs canadiens de même que les associations provinciales d'éleveurs de poissons et de coquillages. Essentiellement, ces associations composent le conseil d'administration de l'Alliance de l'industrie canadienne de l'aquaculture (AICA).

L'AICA est une association d'associations dotée d'une structu re ascendante. Le conseil d'administration ne prend pas ses instructions de moi. En fait, c'est plutôt le contraire. Les administrateurs s'emploient à concevoir des approches particulières pertinentes pour leurs régions respectives, et ils tentent d'établir une approche nationale qui permette l'élaboration de normes nationales en collaboration avec les gouvernements et d'autres partenaires.

Il s'agit d'une approche axée sur le partenariat. Nous souhaitons établir des liens avec les décideurs. Ce que nous préconisons, c'est une forme d'harmonisation - un guichet unique - en vertu de laquelle notre industrie n'aurait affaire qu'à un ordre de gouvernement au niveau local et serait en mesure de régler la plupart des problèmes auxquels elle doit remédier avant d'aller de l'avant.

Au sein de l'alliance, nous faisons la promotion de programmes de ressources humaines. Nous étudions les possibilités de partenariat afin de rehausser le profil de l'aquaculture et de renforcer son image de marque auprès de la population.

Nous avons pour but de collaborer avec tous les intervenants au règlement des problèmes pouvant se poser.

À propos de notre mode de fonctionnement, l'approche ascendante que nous utilisons permet de tenir compte de la situation unique de chacune des régions. Dans nos rapports avec les intervenants et le gouvernement, nous tentons également d'adopter une approche ouverte et transparente - ce que j'appelle la «politique sans surprise». Nous préconisons une application uniforme des politiques et des règlements et souhai tons l'élimination des approches ponctuelles à cet égard. Dans l'ensemble, nous avons pour but de renforcer la confiance que le public et le gouvernement ont dans l'aquaculture.

L'un des constats que j'ai faits au cours de la dernière année, c'est qu'on comprend mal les cycles industriels et l'importance que revêt l'opportunité de la prise de décisions. Des demandes de nouveaux sites d'élevage du poisson ont été présentés sur les deux côtes, et il y a, au moment où nous nous parlons, des saumoneaux sont prêts pour les enclos. Nous nous sommes préparés en vertu de discussions et d'attentes générées il y a environ un an. Si elle n'est pas autorisée à aller de l'avant, l'industrie essuiera une perte d'environ 20 millions de dollars. Je pourrai peut-être revenir sur ces considérations au moment de la période de questions.

L'industrie n'est pas sur un pied d'égalité avec la pêche au saumon sauvage ni avec les exploitations agricoles conventionnel les: elle fait donc face à un désavantage concurrentiel.

D'entrée de jeu, j'ai affirmé mon intention de faire état de certaines réalisations. Je suis certain que les membres du comité seront d'accord avec moi pour dire que certains de ces éléments sont relativement importants pour le progrès de l'aquaculture.

De concert avec des gouvernements, des organisations non gouvernementales et des spécialistes, nous avons participé à la mise au point d'un programme de santé des animaux aquatiques. L'année dernière, j'ai indiqué qu'il s'agit d'un problème des plus critiques qui entraîne des coûts élevés pour l'industrie, et les spécialistes des gouvernements et de l'industrie ont mis les bouchées doubles pour mettre au point un programme national de santé des animaux aquatiques et le rendre fonctionnel.

Nous avons également collaboré avec les divers ordres de gouvernement, des ONG et des spécialistes à la mise au point du code national sur les implantations et les transferts d'espèces, qui revêt une très grande importance pour la protection des stocks de poissons sauvages.

En coopération avec le Conseil canadien des ministres des Pêches et de l'Aquaculture et son groupe de travail sur l'aquaculture, nous nous affairons à l'élaboration d'un code national sur l'aquaculture durable.

Nous nous efforçons également de conclure des accords de coopération avec des organismes de conservation, et nous espérons signer, d'ici quelques semaines, une entente de coopération avec la Fédération du saumon Atlantique.

De concert avec l'Organisation pour la conservation du saumon de l'Atlantique Nord et l'Industrie salmonicole de l'Atlantique du Nord, nous avons constitué un groupe de liaison, qui a mis au point des lignes directrices internationales relatives à un code de confinement. Nous avons effectué ce travail en février de cette année, ici même à Ottawa. À titre d'exemple, le nombre de pertes de poissons devra, aux termes des lignes directrices, se rapprocher le plus possible de zéro. Voilà le genre de lignes directrices rigoureuses que le comité a mis au point. L'Organisation pour la conservation du saumon de l'Atlantique Nord a été créée par les divers gouvernements des régions de l'Atlantique Nord qui ont des rivières à saumon.

De concert avec l'Agence canadienne d'inspection des aliments et Santé Canada, nous avons compilé des données industrielles qui favoriseront la procédure d'évaluation des risques existante relativement à certains polluants.

Nous avons recherché la coordination, ce qui, me semble-t-il, représente un enjeu important. Nous voyons dans la coordination de l'ensemble des projets de R-D dans le domaine de l'aquaculture un moyen d'assurer la mise en place d'approches efficientes, efficaces et rentables. Pour ce faire, nous avons participé à Aquanet, qui est centré sur la recherche relative à la production, aux environnements et aux enjeux sociaux, collaboré avec le comité de direction nationale du Programme national de recherche-développement en aquaculture du MPO et en collaborant avec le comité de direction du Programme de partenariat en aquaculture du Bureau du Commissaire au développement de l'aquaculture.

De concert avec l'industrie conchylicole, nous participons à un projet d'application de l'analyse des risques et de la maîtrise des points critiques à la ferme. Nous avons également siégé au Comité consultatif sur la politique d'inspection des produits de la mer, qui s'occupe des questions liées à l'innocuité des aliments.

Au Canada, nous misons sur une industrie forte, mais notre avantage est principalement imputable à la proximité des marchés. Nous comptons parmi les producteurs du monde dont les coûts sont les plus élevés. Cette situation est problématique, et nous avons besoin d'outils pour attirer des investissements. Parmi les outils possibles, mentionnons la biosécurité et des méthodes de gestion des maladies, l'assurance-récolte et une stratégie de gestion des océans pouvant assurer un meilleur accès aux sites. Nous devons pouvoir compter sur la confiance du public de même que sur les institutions publiques. Nous avons été témoins de l'émergence d'approches qui semblent porter atteinte au système d'assurance de la salubrité des aliments du pays, pourtant essentiel à la mise en marché générale de nos produits de même qu'à la confiance que suscitent nos produits et d'autres produits alimentaires. Nous devons pouvoir miser au Canada sur une communauté de chercheurs crédibles et spécialisés.

Pour réussir, on doit impérativement pouvoir compter sur la coordination du gouvernement, mais cette dernière doit être positive. Une industrie prospère a besoin d'une coordination et d'un leadership positifs de la part du gouvernement. Le Conseil canadien des ministres des Pêches et de l'Aquaculture est un mécanisme généralement admis qui bénéficie du soutien de l'industrie, et dont la présence n'a pas encore débouché sur un processus décisionnel solide concernant les cycles industriels. Il en a résulté de la frustration, des pertes financières et un effritement de la confiance des investisseurs.

La diapositive suivante porte sur le positionnement du Canada. Je crois que le Canada peut se positionner adéquatement. De cette façon, les industries canadiennes de l'aquaculture et de la pêche au poisson sauvage pourront tirer des avantages du positionnement du Canada à titre de pays venant au premier rang mondial dans les domaines de la gestion des océans, de l'innocuité des aliments, la qualité de l'environnement, de la santé des animaux aquatiques et des services industriels généraux. Cependant, on doit pour ce faire miser sur un mécanisme ouvert et transparent de même que sur la conclusion d'un partenariat entre les gouvernements, l'industrie, les groupes environnemen taux et les spécialistes.

La diapositive suivante porte sur les besoins du Canada dans le domaine de l'aquaculture. Nous devons d'abord mettre l'accent sur les domaines dans lesquels nous excellons. Les Canadiens sont de bons aquaculteurs et font du bon travail dans le domaine de la recherche à ce sujet. Nous excellons dans le domaine de la gérance de l'environnement, et nous misons de plus sur des mécanismes ouverts et transparents. Même s'ils font parfois naître une certaine frustration chez les particuliers, nous savons en réalité plutôt bien à quelle enseigne chacun se loge relativement aux enjeux.

Nous devons nous doter d'une stratégie de gestion des océans misant sur une gestion intégrée des zones littorales; nous devons associer tous les intervenants à la démarche; nous devons enfin obtenir du MPO qu'il bouge assez rapidement dans ce dossier.

De même, les gouvernements doivent coopérer. Nous devons établir des stratégies régionales et nationales, réduire la dépendance de l'industrie à l'égard du gouvernement et faire participer tous les intervenants à un dialogue ouvert.

Le président: Je vous remercie, monsieur Rideout.

Le sénateur Carney: Depuis votre dernière comparution devant nous, il y a un an, nous avons beaucoup appris au sujet de votre industrie. Nous avons beaucoup entendu parler des problèmes de compétences partagées - provinciales et fédérales. Nous avons entendu parler des nombreux problèmes qui se posent et de l'application laxiste de la réglementation existante. Je ne souhaite pas aborder les domaines à propos desquels il existe un certain consensus. Je tiens cependant à poser trois questions.

Premièrement, la question essentielle est de savoir si les industries comme la vôtre, qui, au départ, étaient de petites exploitations communautaires comme celle de Tofino, ne sont pas en voie de se transformer, dans certains secteurs de la côte, en gigantesques parcs d'engraissement industriel et de devenir trop grandes pour les ressources marines disponibles. Avez-vous des commentaires à ce sujet? Pensez-vous qu'il y a une limite à l'expansion de l'aquaculture, du moins en ce qui concerne les exploitations à enclos ou en mer, en Colombie-Britannique et sur la côte Est?

Si je mentionne la Colombie-Britannique, c'est parce que la côte, même si elle apparaît gigantesque, ne se prête pas toute à l'aquaculture ni à la pêche au poisson sauvage.

À vos yeux, l'avenir de votre industrie repose-t-il dans les grandes exploitations assimilables à des parcs d'engraissement? Avez-vous le sentiment qu'on surexploite les ressources marines disponibles pour leur faire une place? Le cas échéant, devrait-on plutôt déplacer les exploitations à l'intérieur des terres?

M. Rideout: Honnêtement, je ne les vois pas comme de grands parcs d'engraissement au sens où vous l'entendez. Il s'agit de fermes exploitées de façon professionnelle. Il est vrai que l'industrie compte d'importants joueurs industriels, mais il s'agit dans la plupart des cas de petits exploitants. J'hésite à utiliser cet exemple, mais, en Colombie-Britannique, bon nombre de personnes ont dit que toutes les exploitations combinées au même endroit ne couvriraient même pas le parc Stanley. S'il y a des limites à la croissance, je ne crois pas que nous les ayons encore atteintes.

Le sénateur Carney: Des témoins ont affirmé devant le comité qu'un tel phénomène est en train de se produire dans la région de l'Atlantique en particulier. Pensez-vous qu'il y a une limite spatiale aux ressources marines pouvant être mises à la disposition de l'industrie?

M. Rideout: Oui, il y a une limite spatiale aux ressources marines mises à la disposition de toutes les industries qui exploitent les océans.

Le sénateur Carney: Ma deuxième question a trait à la question de la pêche au poisson sauvage par rapport à l'aquaculture. Bien entendu, elle s'applique principalement à la côte Ouest, où les Premières nations et les collectivités littorales font valoir que les exploitations aquacoles et la pêche au poisson sauvage se partagent souvent les mêmes secteurs, ce qui pose des problèmes en raison des évasions.

Je n'ai pas eu le temps de faire circuler le document, qui se trouvait dans mes papiers à Victoria, mais John Volpe, que nous avons rencontré sur la côte, poursuit les travaux qu'il consacre à ce qui arrive aux saumons de l'Atlantique qui s'échappent des enclos et se retrouvent dans les rivières à saumon arc-en-ciel. Selon ses travaux initiaux, c'est le saumon de l'Atlantique qui l'emporte. Plutôt que d'empiéter sur le temps du comité, je fais circuler le document.

Essentiellement, vous faites face à un important problème d'évasion. On retrouve aujourd'hui du saumon de l'Atlantique dans 70 rivières de la Colombie-Britannique, principalement sur l'île de Vancouver. Il y a donc des saumons de l'Atlantique d'élevage dans un grand nombre de rivières. Selon l'étude en question, on en a recensé 7 000 dans ces régions.

Voilà qui soulève la question fondamentale de savoir si l'aquaculture et la pêche au saumon sauvage s'excluent mutuellement ou non, compte tenu de la façon dont les industries sont aujourd'hui administrées et réglementées. Pourrions-nous vous entendre à ce sujet? Sur la côte Ouest, il s'agit du principal enjeu.

M. Rideout: Si je comprends bien, c'est un problème que certains vous ont décrit, comme vous le dites, sénateur, comme un enjeu majeur. En réalité, cependant, on tente depuis plus de 100 ans d'établir des saumons de l'Atlantique anadromes.

Le sénateur Carney: La recherche porte sur cette question. Je ne vais certes pas mettre en doute les conclusions du chercheur. Il explique ce qui s'est passé au cours d'une période de 70 ans et la différence entre la situation d'alors et celle d'aujourd'hui. Nous sommes tous d'accord pour dire que nous ne disposons pas d'assez de données scientifiques à ce sujet. On nous l'a rappelé sans arrêt. Ce que je vous demande, c'est si, à votre avis, l'aquaculture et la pêche traditionnelle au poisson sauvage sur les trois côtes - celle de la Colombie-Britannique en particulier - s'excluent l'une l'autre.

M. Rideout: Je pense que l'industrie de la pêche au poisson sauvage et l'aquaculture peuvent très bien coexister.

Le sénateur Carney: Cependant, on devra peut-être modifier la façon dont l'aquaculture est administrée, localisée ou réglemen tée?

M. Rideout: Il ne fait aucun doute que le nouveau cadre stratégique défini par le gouvernement de la Colombie- Britannique porte sur ce genre de problèmes. Nous verrons le résultat des travaux du gouvernement.

Le sénateur Carney: Le gouvernement de la province n'a aucune compétence dans le domaine de la pêche au poisson sauvage. C'est le MPO qui s'occupe de la pêche au poisson sauvage, mais vous avez déclaré que les deux industries pouvaient coexister. Vous voudrez peut-être étoffer votre réponse un peu plus loin.

Ma troisième question a trait à l'identification du poisson d'élevage. Le ministre nous a dit qu'il était d'accord avec le principe de l'étiquetage du poisson d'élevage, mais la question ne relève pas de sa compétence. Chacun dit que la question ne relève pas de sa compétence. Certaines des préoccupations soulevées devant le comité tiennent au fait que les poissons d'élevage reçoivent des antibiotiques et que le confinement dans des enclos cause des problèmes de pollution. Dans certains cas, les poissons sont vaccinés.

Un résident de la Colombie-Britannique nous a déclaré qu'environ 25 p. 100 des carcasses d'animaux recueillies en Colombie-Britannique sont destinées à l'alimentation du poisson d'élevage. Il s'agit d'une grande industrie. On nous a dit que les granules destinés à l'alimentation du poisson d'élevage contiennent de la teinture. On peut teindre le poisson d'élevage selon les exigences du marché. Nous teignons en rouge le poisson destiné au marché japonais; dans d'autres cas, la teinture est plus pâle.

Étant donné les préoccupations du public relativement à ce qui est introduit dans la chaîne alimentaire, êtes-vous d'accord avec le ministre pour dire que ces produits devraient être étiquetés et qu'on devrait préciser les produits utilisés pour l'élevage du poisson? On devrait faire état des antibiotiques, des vaccins et des teintures. Êtes-vous d'accord, ou non?

M. Rideout: Je vais être franc avec vous, sénateur. Je ne suis pas d'accord avec ce que vous dites. Je ne crois pas au bien-fondé de cette affirmation générale concernant les antibiotiques, la pollution ou l'utilisation des carcasses d'animaux. Je sais que c'est ce que d'autres témoins ont laissé entendre.

Le sénateur Carney: Ne me dites pas que vous n'êtes pas d'accord avec ce que je dis. Je tente de résumer ce qu'on nous a déclaré au cours d'une année d'audience. Nous avons des transcriptions. M. Dhaliwal dit être favorable à l'idée de l'étiquetage. Vous aurez beau être d'accord ou en désaccord avec les autres témoins, la question n'est pas là. Êtes-vous favorable à l'étiquetage de ces produits? Les consommateurs ont-ils le droit de savoir ce qu'ils mangent?

M. Rideout: Si vous vous fiez aux témoignages selon lesquels ces produits contiennent des antibiotiques, causent de la pollution et sont nourris à partir de carcasses d'animaux, absolument pas. Je ne suis pas d'accord parce que ces animaux sont issus de pratiques agricoles raffinées. Dans ce type d'élevage, l'utilisation des antibiotiques est nettement moindre que dans d'autres. Je dirais que l'utilisation des antibiotiques aux fins de la mise en valeur du poisson sauvage est équivalente à celle qu'on en fait dans l'aquaculture avant que les animaux ne soient mis dans les enclos en mer.

Si la mesure visait à faire état des problèmes que, dites-vous, certaines personnes ont mentionnés, je répondrais que non.

Le sénateur Carney: Le contenu de la nourriture pour chat que j'achète figure sur l'étiquette. Au nom de quoi vous opposez-vous à l'étiquetage du poisson d'élevage?

M. Rideout: Je ne m'oppose à rien du tout. Je crois que nous en viendrons tôt ou tard à l'étiquetage du poisson d'élevage parce que nous serons alors en mesure de montrer qu'il s'agit d'un produit de grande qualité produit dans le respect de l'environnement. Un tel genre d'étiquetage sera probablement bénéfique pour l'industrie.

Le sénateur Robertson: Je suis d'accord avec le sénateur Carney en ce qui concerne l'étiquetage. Je pense que la question sera facile à résoudre, mais nous y reviendrons.

Monsieur Rideout, je vais vous poser une question très générale. Répondez-y comme bon vous semblera. Au cours des prochaines 24 à 48 heures, nous allons étudier le rapport du vérificateur général sur l'aquaculture de la côte Ouest.

Je vais vous demander d'utiliser votre imagination et de supposer que le vérificateur général s'est penché sur la salmoniculture dans la baie de Fundy. À votre avis, quelles seraient ses recommandations? Avant de répondre à ma question, vous voudrez peut-être aborder deux ou trois questions qui me semblent importantes. Premièrement, le MPO s'acquitte-t-il pleinement de ses responsabilités législatives? Deuxièmement, le MPO contrôle-t-il adéquatement les effets des salmonicultures sur l'habitat du poisson et l'environnement marin?

M. Rideout: Je ne peux pas présumer de ce que le vérificateur général constaterait au Nouveau-Brunswick.

Si j'ai bien lu son rapport, le vérificateur général affirme que le MPO doit faire davantage dans ce secteur. Depuis 12 à 18 mois, le MPO déploie de formidables efforts dans le secteur de l'aquaculture.

Dans ma déclaration d'ouverture, j'ai fait allusion au problème des cycles industriels. Nous tentons d'obtenir l'autorisation de nouveaux sites. Chacun des sites à propos desquels nous présentons une demande doit subir une évaluation aux termes de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale (LCEE). Pour le MPO, il s'agit d'un phénomène récent. Si je comprends bien, tout a débuté par une opinion juridique au sein du ministère selon laquelle une évaluation des installations aquacoles s'impose aux termes de la Loi sur la protection des eaux navigables. La mise en branle de ce mécanisme nous a obligés à déployer de formidables efforts pour faire approuver les sites proposés. Pour faire en sorte que la procédure prévue par la LCEE soit suivie à la lettre, l'industrie a dû engager des fonds considérables, et le MPO, des efforts remarquables.

S'il avait évalué la salmoniculture sur les deux côtes au 1er avril 2001, le vérificateur général, me semble-t-il, aurait constaté que le ministère a déployé des efforts considérables. Si certains problèmes demeurent en suspens, la plupart ont été résolus, et nous réalisons certains progrès importants.

Le sénateur Robertson: C'est intéressant. Peut-être reviendrai-je sur cette question au cours de la deuxième ronde.

Je veux maintenant m'intéresser à l'expansion de l'industrie dans la baie de Fundy. Le Conseil de conservation du Nouveau-Brunswick a demandé combien de poissons on pourrait élever sans porter atteinte à l'environnement marin. Quelle est la réponse de l'association industrielle à cette question?

M. Rideout: En ce qui concerne les limites à la croissance, je n'ai pas la réponse. Je sais qu'on a consacré un très grand nombre de recherches à divers aspects des impacts de l'industrie aquacole sur l'environnement marin. Je suis au courant des efforts considérables que l'industrie a dû déployer pour se conformer à la procédure d'approbation prévue par la LCEE. L'industrie connaît bien les problèmes associés aux exploitations. D'après les données que nous avons, les fonds marins reviendront à leur état initial après de six à huit mois de jachère et, dans certains cas, jusqu'à une année.

Nous sommes fortement en faveur des initiatives des gouvernements de la Colombie-Britannique et des provinces de l'Atlantique qui se traduiront par une meilleure planification de l'établissement des sites. Comme je l'ai affirmé dans mes remarques d'ouverture, l'adoption d'une stratégie de gestion des océans est l'une des clés de la réussite. Il y a une Loi sur les océans. Nous sommes l'un des rares pays à être doté d'un tel instrument législatif.

Nous devrions entreprendre des discussions sur la gestion intégrée des zones côtières, auxquelles tous les intervenants devraient participer. On devrait y aborder ce qui est faisable et ce qui ne l'est pas, dans le contexte non seulement de l'aquaculture, mais aussi d'autres industries, y compris l'écotourisme, la pêche l'exploitation pétrolière et gazière, sans oublier les secteurs d'activité susceptibles de devenir des industries océaniques. De concert avec les intervenants, les scientifiques et les professionnels des organismes gouvernementaux, nous serons alors en mesure de décider si des industries aquacoles devraient s'établir dans tel ou tel secteur.

Le sénateur Robertson: J'ai une ou deux autres questions à poser au sujet du Conseil de conservation du Nouveau-Bruns wick, qui a comparu devant nous il y a quelque temps. Que répondez-vous à l'argument selon lequel la salmoniculture dans la baie de Fundy a dépassé les capacités de l'écosystème? C'est l'une des préoccupations exprimées par l'organisme.

M. Rideout: Je ne suis pas d'accord avec une telle affirmation.

Le sénateur Robertson: Votre position s'appuie-t-elle sur des données scientifiques?

M. Rideout: Non. Cependant, la leur n'a pas non plus d'assises scientifiques, à mon avis. Nous avons besoin de données scientifiques, cela ne fait aucun doute. Nous devons travailler ensemble au règlement de ces problèmes. Cependant, la baie de Fundy est un vaste plan d'eau. S'il y a une chose que nous savons de façon certaine, c'est que, dès que l'écosystème est atteint, nos poissons dépérissent assez rapidement. Pour nous, ils sont de bons indicateurs de la situation. Nous devons en tenir compte.

C'est l'une des raisons qui font que, en Colombie-Britannique, par exemple, les aquaculteurs sont heureux du nouveau cadre stratégique. Ils renoncent aux sites qu'ils savent mal adaptés. Ils s'installent plutôt dans des sites plus sains pour les poissons.

Le sénateur Carney: Au détriment des poissons sauvages.

M. Rideout: C'est discutable, sénateur.

Le sénateur Robertson: J'ai d'autres questions, monsieur le président, mais je vais attendre la deuxième ronde.

Le sénateur Adams: Monsieur Rideout, je ne sais pas si vous connaissez bien la région où je vis. Entre le lac Ontario et le Manitoba, il y a quelques exploitations d'ombles chevaliers. Je me suis rendu à Whitehorse en mars, au moment du changement de gouvernement. Nous nous y sommes rendus pour étudier certaines des éoliennes installées à Whitehorse. À Whitehorse, il y a une exploitation d'ombles chevaliers.

Je pense que l'omble chevalier croît moins rapidement que les autres poissons parce qu'il vit dans l'eau froide. Je me suis demandé ce que ces pisciculteurs utilisent pour l'omble chevalier qu'ils envoient dans le sud. Où s'approvisionnent-ils?

Certains poissons sont expédiés aux pisciculteurs sous forme d'oeufs. Comment les exploitants les reçoivent-ils?

Les activités commerciales sont peu nombreuses. Certains des membres de la collectivité ont tenté l'expérience sans grand succès, les coûts d'expédition étant trop élevés. Il y a des poissons de meilleure qualité. J'ai moi-même fait l'essai de quelques ombles chevaliers d'élevage. C'est un poisson sans goût, du moins pour ce qui me concerne.

Dans certaines collectivités, on impose une limite à la pêche commerciale parce que le poisson, au contraire du saumon, croît lentement. L'omble chevalier est différent. Selon des scientifiques, le poisson ne grandit que d'un pouce par année. Un omble chevalier d'une longueur de un pied est déjà âgé de 30 ou de 40 ans.

Peut-être savez-vous comment des personnes s'y prennent pour élever des ombles chevaliers et les remettre en liberté, au lieu de les vendre. La croissance de ce poisson est peut-être plus rapide dans les rivières.

M. Rideout: Malheureusement, je ne peux pas vous dire grand-chose au sujet de l'omble chevalier. Il s'agit d'une industrie en pleine évolution. Certaines sociétés ont entrepris de constituer des stocks de géniteurs pour l'omble chevalier et ont très bien réussi. Je sais que, au Yukon, de nombreux exploitants utilisent ce qu'on appelle les «lacs de kettle» pour l'élevage de l'omble chevalier. Ils étudient les moyens d'assurer la mise en marché de leurs produits et les possibilités de collaboration avec l'Alliance de l'industrie canadienne de l'aquaculture relativement à certaines de ces questions.

Selon ce que je crois comprendre, il existe un créneau de marché pour l'omble chevalier. Les personnes qui achètent ce poisson et le servent dans leur restaurant l'apprécient. Ils estiment qu'il s'agit d'un excellent produit.

On retrouve des élevages d'omble chevalier de l'Est à l'Ouest ainsi que dans le Nord. Il y a certains problèmes associés aux souches génétiques distinctes ou différentes; certains poissons grandissent plus vite que d'autres. L'industrie s'occupe de ces questions.

Le sénateur Adams: On m'a dit qu'il était plus facile d'élever du saumon parce que certains ombles chevaliers, parce que, au contraire des saumons, ils mangent la nourriture qui se retrouve au fond des bassins. Est-ce exact?

M. Rideout: Je ne suis pas en mesure de répondre à cette question. Cependant, je crois que le fait que les ombles chevaliers mangent autre chose que ce qu'on leur destine pose certains problèmes.

En passant, je souligne que l'industrie salmonicole canadienne est des plus perfectionnée. Au sein de notre industrie, le dépôt de la nourriture au fond des bassins est inacceptable. Nous disposons donc de techniques qui empêchent un tel phénomène.

De même, nous avons beaucoup appris au sujet de l'élevage de ces poissons, et les techniques issues des percées réalisées dans l'ensemble de l'industrie aquacole sont transmises d'un groupe à l'autre.

Le sénateur Meighen: J'aimerais avoir des éclaircissements à propos d'une chose que vous avez dite - c'est-à-dire que, aujourd'hui, l'industrie en est au point où il n'y a pas ou presque plus de poissons qui s'évadent des enclos pour se retrouver au fond de l'océan?

M. Rideout: Oui, c'est bien ce que j'ai dit.

Le sénateur Meighen: Les exploitants forestiers de la région de la baie de Fundy accueilleront la nouvelle avec satisfaction. Comment le confinement s'effectue-t-il? Dans les sites de la baie de Fundy que je connais, il n'y a pas de filet de confinement.

M. Rideout: Je crois savoir que les membres du comité se sont rendus dans la baie de Fundy. Pendant votre séjour, avez-vous effectué des visites?

Le président: Oui.

M. Rideout: Vous vous êtes rendus dans des sites?

Le sénateur Meighen: Nous nous sommes rendus à l'île Minister's.

M. Rideout: Vous avez vu les méthodes de nourrissage et les caméras utilisées pour surveiller l'alimentation des poissons, et cetera.

Le sénateur Meighen: Oui. Cependant, je n'ai pas vu ce qu'on a proposé et ce qui, si je comprends bien, représente une dépense importante - un filet extérieur entourant le filet primaire, si je peux utiliser cette expression, qui permettrait de recueillir les excréments et la nourriture non consommée, et cetera, qui, autrement, se retrouverait au fond de l'océan.

M. Rideout: Nous sommes convaincus d'être en mesure de contenir la plus grande partie de la nourriture. Je ne suis pas en mesure d'affirmer qu'il n'y a aucune perte d'aliments, mais, un jour que je me trouvais dans une exploitation, le technicien a évalué à 35 le nombre de granules qui, ce jour-là, ont échappé au filet. On surveille la situation de très près. Mis à part les préoccupations environnementales, le coût des aliments eux-mêmes est l'un des facteurs importants.

Le sénateur Meighen: Êtes-vous en train de nous dire que, pour éviter les pertes de granules, on calcule la quantité de nourriture que les poissons peuvent manger avant que les granules ne s'échappent? Ou faut-il comprendre que, depuis que nous avons visité les sites en question, on a installé des filets de confinement?

M. Rideout: Non, il n'y a pas de filet de confinement. Les dispositifs utilisés pour surveiller l'alimentation sont suffisam ment perfectionnés pour que les techniciens soient en mesure de déterminer les pertes quotidiennes, et ces pertes sont minimes. La nourriture est mangée.

Le sénateur Meighen: Je vous remercie. À ce sujet, on entend deux points de vue contradictoires.

Le sénateur Carney: Ce sont des poissons bien entraînés.

Le sénateur Meighen: M. Rideout, vous avez affirmé que, aux termes des lignes directrices, le nombre de pertes de poissons, c'est-à-dire d'«évadés», doit se rapprocher le plus possible de zéro. L'information anecdotique dont je dispose à ce sujet est que le nombre d'évadés a augmenté considérablement au cours des deux ou trois dernières années - dans la baie de Fundy, du moins - que je connais un peu. Le sénateur Carney a affirmé qu'on observe le même phénomène en Colombie-Britannique.

Si l'industrie a souscrit à ces lignes directrices, quelles mesures prend-elle pour éviter les pertes de poissons imputables à des tempêtes ou à d'autres facteurs?

M. Rideout: Pour l'industrie, le problème des pertes de poissons est majeur, du point de vue des coûts réels. Il s'agit non pas seulement d'un problème environnemental, mais aussi d'un problème économique. De concert avec les gouvernements de l'Atlantique Nord réunis sous l'égide de l'Organisation pour la conservation du saumon de l'Atlantique Nord, qui a pour mandat de préserver les stocks de saumon de l'Atlantique sauvage, notre industrie a souscrit aux lignes directrices qui seront mises en oeuvre au cours des mois suivants. La question est de savoir comment nous allons nous y prendre. Des discussions sont aujourd'hui en cours au sein de l'industrie.

Même si les consultations ne sont pas terminées, il existe des codes de confinement, et la question est de savoir s'ils répondent adéquatement aux exigences des lignes directrices internationales. Ces dernières ont été arrêtées en février. Cependant, nous devons attendre de voir si l'Organisation pour la conservation du saumon de l'Atlantique Nord les acceptera, ce qui se fera en Espagne en juin. Puis, nous verrons comment les lignes directrices peuvent être mises en application.

Il y a eu une diminution du nombre de poissons perdus, et non une augmentation.

Le sénateur Meighen: Mes amis qui travaillent dans l'industrie m'ont confié, comme vous l'avez vous-même mentionné dans votre témoignage, que c'est le temps que les décideurs prennent pour se brancher relativement aux emplacements et aux subventions qui leur causent les frustrations les plus grandes. Pourriez-vous nous dire quel est, à votre avis, la cause de ce phénomène? S'explique-t-il par le dédoublement des compétences ou par des querelles de territoires entre administrations multiples? Peut-on l'expliquer par une mauvaise administration au niveau provincial ou fédéral? Je crois comprendre qu'il y a un problème.

M. Rideout: La raison la plus récente a été la décision prise par le ministère des Pêches et des Océans à la suite d'une opinion juridique selon laquelle, si je comprends bien, les dispositions de la Loi sur la protection des eaux navigables déclenche une évaluation aux termes de la LCEE. Au beau milieu de la procédure d'approbation de nouveaux sites, nous avons dû nous conformer à un régime entièrement nouveau. Mis à part les coûts associés à un tel régime, on doit aussi tenir compte du temps. Le problème, c'est que nous avons des saumoneaux qui sont prêts à être mis à l'eau, sans avoir de site approprié pour le faire.

À cet égard, il faut dire que les gouvernements fédéral et provinciaux ont consacré beaucoup d'efforts à la détermination des moyens d'accélérer le processus sans pour autant le compromettre.

Le sénateur Meighen: C'est ce qu'on appelle l'allocation par site, n'est-ce pas?

M. Rideout: Exactement.

Le sénateur Meighen: Qu'en est-il des subventions?

M. Rideout: De quelles subventions parlez-vous?

Le sénateur Meighen: De celles qui sont destinées au Nouveau-Brunswick.

M. Rideout: Vous voulez parler des permis?

Le sénateur Meighen: Non, je veux parler de l'argent destiné aux pisciculteurs. Selon ce que je crois comprendre, il y a des subventions qui sont versées aux pisciculteurs par l'entremise de l'APECA et de l'organisme provincial. Ce dont se plaignent les pisciculteurs, c'est qu'ils soumettent la demande et commencent à élever leurs poissons, qui grandissent. Ils doivent en faire quelque chose, mais ils n'arrivent pas à savoir des autorités si leur demande de subvention sera approuvée ou rejetée.

M. Rideout: Je ne suis pas en mesure de faire des commentaires à ce sujet. Je ne me suis pas préparé à répondre à de telles questions.

Le sénateur Watt: Je vais mettre principalement l'accent sur les régions arctique et subarctique. Je crois comprendre que votre organisme est une sorte d'organisme cadre réunissant tous les différents types d'associations existantes. Est-ce exact?

M. Rideout: Oui, mais uniquement pour les associations membres.

Le sénateur Watt: À titre d'organisme sans but lucratif, vous avez pour mandat de venir en aide à ces personnes, n'est-ce pas?

M. Rideout: Nous tentons d'améliorer la perception que les décideurs ont de l'aquaculture. Nous tentons de répondre aux questions qui se posent ici à Ottawa à propos de l'industrie aquacole.

Le sénateur Watt: J'imagine que vos membres jouent un rôle important en vous donnant une idée générale de ce que chacun fait dans le domaine de la pisciculture.

M. Rideout: Oui.

Le sénateur Watt: Dans les régions arctique et subarctique, nous avons dû vivre avec les conséquences de l'extraction d'oeufs de poissons vivants, lesquels sont ensuite transplantés dans le Sud. Le phénomène, qui a débuté il y a un certain temps, a pratiquement eu raison de la pêche au saumon sauvage, du point de vue des prix.

Si nous gardons silence et que nous demeurons en marge du portrait général, nous continuerons de subir l'influence de facteurs inconnus. Voilà pourquoi je me demandais si les responsables des programmes de mise en valeur dans la région subarctique ont communiqué avec vous?

M. Rideout: Non.

Le sénateur Watt: Il s'agit d'un petit nombre de personnes qui se sont donné pour tâche de s'attaquer au problème de la mise en valeur de deux façons. Pour la première fois cette année, elles ont décidé de placer les oeufs dans des contenants et de les élever sous leur propre toit plutôt que de les implanter dans une rivière ou dans un lac, ce qui se fait également. Pour la toute première fois, j'ai vu un bébé omble chevalier doté de deux têtes et d'un seul corps. La réussite est relativement probante.

Je vous recommande - et je pourrais vous aider dans votre démarche - de communiquer avec ces personnes qui, de toute évidence, ont besoin d'aide. Si elles ont l'intention de mettre un jour ces poissons en marché, il faudra à coup sûr que les autres intervenants les remarquent, de façon que leur marché puisse être protégé. Je songe en particulier aux personnes qui s'intéressent au stock de poisson sauvage. Elles auront besoin d'aide pour assumer les frais de transport et d'autres facteurs de cette nature.

En ce qui concerne les besoins en financement, elles doivent aussi pouvoir compter, à l'occasion, sur une certaine participation de la part du gouvernement. Je ne crois pas que le MPO soit au courant de ce projet particulier ni qu'il lui accorde une aide financière. Tôt ou tard, les intéressés agissent au niveau local avec un peu d'aide de la part du gouvernement provincial.

Il s'agit d'un concept intéressant dans la mesure où les promoteurs entendent extraire les oeufs des poissons vivants pour ensuite les implanter dans le réseau de lacs et de rivières. On devra attendre quelques années avant de se faire une idée de la réussite du projet. Nous y travaillons depuis cinq ans, et il faudra attendre deux ou trois ans de plus pour savoir si un nombre conséquent de poissons reviendront dans le réseau de rivières où, auparavant, il n'y avait jamais eu d'ombles chevaliers.

Nous faisons l'impossible pour augmenter le nombre d'individus parce que la croissance des ombles chevaliers est lente. Lorsque les stocks s'appauvrissent, ils s'appauvrissent pour de bon. En outre, ces poissons se déplacent. Dans ce réseau de lacs et de rivières, il n'y avait auparavant pas d'ombles chevaliers. Nous commençons à observer certains résultats encourageants, mais je pense qu'il serait utile que votre organisme obtienne certains renseignements à ce sujet, de façon que les éleveurs d'ombles chevaliers du Nord puissent faire appel à vous à l'occasion aux fins de la mise en marché.

Le gouvernement devrait accorder aux intéressés une aide technique ou médicale ou d'autres soutiens. Je pense qu'il serait utile que vous connaissiez ces gens.

M. Rideout: Je vous remercie. Je serai heureux d'obtenir de l'information sur ce groupe. Cependant, je tiens à préciser que nous ne sommes pas un organe de mise en marché de l'industrie aquacole. Nous nous intéressons plutôt à des enjeux comme l'élaboration de codes et d'outils qui seront utiles pour l'industrie du point de vue de la mise en marché de ses produits. Cependant, nous n'avons pas pour mandat de trouver des débouchés pour elle.

En outre, je ne suis pas du tout certain que le gouvernement investisse dans les activités de mise en marché de l'industrie de la pêche ou de l'aquaculture. Le cas échéant, il s'agit de sommes minuscules destinées à l'aménagement de stands dans des foires commerciales et à ce genre d'activités. Je sais que le ministère des Pêches et des Océans prépare un programme de R-D axé sur la collaboration. Je suis au courant parce que je fais partie du comité de direction. Il s'agit peut-être d'un secteur dans lequel les pisciculteurs du Nord pourront effectuer certaines recherches additionnelles.

Je crois savoir que le Commissaire au développement de l'aquaculture a parrainé un atelier pour les éleveurs d'ombles chevaliers. J'ignore si le groupe auquel vous faites référence y a participé, mais je pourrais certes en toucher un mot au Commissaire. Je crois que ce dernier a déjà comparu devant le comité.

Le président: Il reviendra le 29 mai 2001.

M. Rideout: À ce moment, vous voudrez peut-être lui en parler. Pour ma part, je ne manquerai pas de le faire parce que je sais que l'omble chevalier suscite de l'intérêt.

Le sénateur Watt: Cela serait utile. Les pisciculteurs existent déjà. Il n'y a rien que nous puissions y faire pour le moment. Savez-vous d'où viennent les ombles chevaliers en question? Je ne veux pas dire que nous ayons le droit de présenter une demande d'indemnisation à ce sujet.

Pour en revenir à la question de la mise en marché, ce n'est pas tant à ce propos que j'aimerais que vous entriez en communication avec ces personnes. Si nous ne sommes pas isolés des autres intervenants, on tiendra compte de nous le moment venu de s'intéresser aux aspects touchant la mise en marché. C'est essentiellement ce que je tentais de dire. Je ne veux pas que ces personnes soient exclues. J'aimerais qu'elles soient parties à l'ensemble du processus.

Le sénateur Mahovlich: On a fait allusion à la baie de Fundy. Si je me rappelle bien, les marées qu'on y retrouve comptent parmi les plus fortes du monde, n'est-ce pas?

M. Rideout: Oui.

Le sénateur Mahovlich: N'est-ce donc pas un endroit idéal pour la pisciculture?

M. Rideout: Oui, c'est ce que nous croyons.

Le sénateur Mahovlich: Avec la crue et la décrue des eaux, il n'y a pas de limites au nombre d'exploitations aquacoles qu'on peut établir dans la baie de Fundy. Si la baie se lessive chaque jour, il ne devrait pas y avoir de problème. L'endroit paraît idéal.

M. Rideout: Je vous remercie beaucoup, sénateur.

Le président: Vous-même n'auriez pas pu mieux dire les choses.

M. Rideout: C'est juste. Cependant, nous avons à coeur l'établissement d'une industrie aquacole responsable au Canada. Si les conditions observées dans la baie de Fundy et en Colombie-Britannique sont idéales pour l'élevage du saumon de l'Atlantique, nous devons tenir compte des autres utilisateurs. Nous devons tenir compte des problèmes associés à la gestion et à l'exploitation des océans.

Il est clair qu'il y a toujours place à une expansion relativement importante. Si le gouvernement en vient à la conclusion qu'il souhaite vraiment l'établissement d'une industrie aquacole solide et dynamique - une industrie capable de soutenir la concurrence mondiale -, nous pensons qu'il devrait agir en conséquence en approuvant un plus grand nombre de sites et d'exploitations.

Le sénateur Mahovlich: Sur la côte Ouest, j'ai visité les exploitations piscicoles réparties çà et là autour des bras de mer. Cependant, les marées n'y sont pas aussi fortes. Je me suis fait la réflexion que la pisciculture devait y causer des dommages considérables.

M. Rideout: Les études sur la production des exploitations et leurs effets sur les fonds marins ont montré que ces derniers se limitent généralement au secteur qui se trouve sous l'exploitation. Ils s'effacent après une période de six à neuf mois. Après, le fond revient essentiellement à son état originel.

Le sénateur Mahovlich: A-t-on réalisé des études à ce sujet?

M. Rideout: Oui. Selon ce que je crois comprendre, il y a des secteurs plus problématiques que d'autres. C'est précisément l'intérêt et le phénomène qu'on observe aujourd'hui en Colombie- Britannique, où nous nous retirons des secteurs qui se prêtent moins bien à l'aquaculture.

Il importe aussi de mentionner que nos exploitants utilisent le principe de la jachère - c'est-à-dire qu'ils abandonnent les exploitations pendant un certain temps pour permettre à l'écosystème de revenir à son état initial.

Le sénateur Mahovlich: À quand remonte l'industrie piscicole au Canada? On m'a dit qu'elle était vieille de 70 ans.

M. Rideout: Oui, elle existe depuis longtemps.

Le sénateur Mahovlich: Cependant, nous n'avons pas effectué des recherches pendant tout ce temps.

M. Rideout: On a fait beaucoup de recherches, mais elles ont évolué. Dans le domaine de la salmoniculture, nous avons effectué un travail de R-D colossal, et nous avons fait profiter le Chili des résultats. Aujourd'hui, ce pays nous dame le pion au sein du marché. La production y est de quatre à cinq fois supérieure à celle du Canada. Or, c'est la technologie canadienne qu'on utilise là-bas.

Le sénateur Mahovlich: Ils ont adopté notre technologie, n'est-ce pas?

M. Rideout: Oui. Notre industrie a essentiellement vu le jour dans les années 80. Depuis, elle a connu une expansion considérable.

Le sénateur Mahovlich: À cause du Chili et de la Norvège? C'est nous qui leur avons permis de se lancer en affaires.

M. Rideout: Non. Le phénomène s'explique par le fait que les Canadiens sont de bons aquaculteurs. Ils savent ce qu'ils font et s'appuient sur l'excellence des scientifiques et de la recherche. Il y a eu énormément de débat, et j'espère que nous pourrons nous écarter de la polarisation actuelle pour trouver une sorte de moyen terme favorable à de bonnes discussions et au règlement des problèmes.

Le Canada mise sur de bons aquaculteurs. Si on nous donne l'occasion de montrer ce dont nous sommes capables, Nous deviendrons un solide moteur économique dans le Canada rural et littoral, avec des effets sur l'environnement minimaux, voire inexistants.

Le sénateur Mahovlich: À l'époque où nous avons visité certains sites de la côte Ouest, nous avons eu le sentiment qu'on n'effectuait pas suffisamment de recherche dans certaines de ces exploitations.

M. Rideout: Après mon exposé, au début de la soirée, j'ai laissé percevoir certaines émotions en ce sens. En ce qui concerne les problèmes qui se posent, on fait face à deux points de vue très différents. Nous devons concilier ces points de vue de manière à établir la bonne solution. Nous espérons que les données scientifiques nous permettront d'y parvenir.

J'ai un point de vue. Si vous vous adressez aux cercles environnementalistes, on vous dira peut-être que je ne sais pas de quoi je parle - que le point de vue juste se trouve ailleurs. C'est pourquoi nous nous efforçons de conclure des accords de coopération avec des organismes de conservation. Nous venons tout juste d'avoir une première discussion avec la Fédération du saumon Atlantique relativement à l'accord de coopération. Nous sommes à l'affût d'autres possibilités dans ce domaine parce que nous voulons instaurer un dialogue à propos de ces questions. La situation des stocks de poisson sauvage n'est pas acceptable pour l'industrie aquacole. La situation que vit aujourd'hui l'industrie aquacole n'est pas non plus acceptable. Nous devons grandir et soutenir la concurrence du marché.

Le sénateur Mahovlich: A-t-on vendu ou cédé de nombreuses exploitations?

M. Rideout: Oui, on a assisté à une certaine forme d'intégration.

Le sénateur Mahovlich: Y a-t-il eu des ventes à de grandes sociétés?

M. Rideout: En ce qui concerne les sociétés internationales, il y a eu plus de mouvement sur la côte Ouest que sur la côte Est.

Le sénateur Hubley: Monsieur Rideout, auriez-vous l'amabilité de commenter vos diapositives? Vous dites que l'aquaculture doit être traitée sur un pied d'égalité avec la pêche au poisson sauvage et les exploitations agricoles conventionnelles. Pourriez-vous, je vous prie, nous donner certains détails?

M. Rideout: À ce propos, je n'ai pas entièrement raison. Dans la plupart des cas, il n'y aurait pas de pêche sans plan de gestion des pêches. Le MPO est au diapason de ce qui se passe dans le secteur de la pêche, et les plans de gestion des pêches sont rendus publics à certains moments de l'année.

Dans le domaine de l'aquaculture, on ne comprend pas les cycles de notre industrie, ce qui comprend l'obligation que nous avons d'engraisser les poissons pour pouvoir les mettre en marché. Par exemple, on doit faire grandir les coquillages et les huîtres et préparer les saumoneaux pour la mise à l'eau, ce qui exige environ neuf mois. Il faut résoudre le problème que représente l'ensemble du cycle.

Au Canada, les agriculteurs conventionnels ont droit à l'assurance-récolte, au Compte de stabilisation du revenu net (CSRN) de même qu'aux agents de développement industriel qui les aident à faire face aux problèmes éventuels. De ce point de vue, l'industrie aquacole ne bénéficie pas du même genre de traitement que l'industrie agricole.

Le sénateur Hubley: En ce qui concerne les maladies, dispose-t-on de données qui montrent que le poisson d'élevage est plus susceptible aux maladies que le poisson sauvage?

M. Rideout: Lorsque l'industrie en était à ses premiers balbutiements, il y a certes eu certains problèmes liés aux maladies. Avec l'aide de vétérinaires, de chercheurs et d'ichtyopathologistes, l'industrie a toutefois mis au point de nouvelles méthodes, par exemple, l'utilisation des vaccins et des antibiotiques. À ma connaissance, l'utilisation qu'on fait des antibiotiques dans cette industrie est la plus faible dans l'ensemble de l'industrie de l'alimentation d'origine animale. Nous avons beaucoup appris au cours des quinze dernières années.

Nos poissons comptent parmi les plus sains qu'on retrouve dans l'océan. Nous faisons beaucoup pour gérer et favoriser la croissance et le développement des animaux parce que, dans le cas contraire, ces derniers ne consomment plus leurs granules, et les pisciculteurs accusent des pertes importantes - du point de vue de la productivité, et cetera. Il est donc dans l'intérêt du pisciculteur de s'occuper de ces animaux et de les voir grandir rapidement aux fins de leur mise en marché.

Le sénateur Hubley: Vous avez dit qu'un environnement touché par les sous-produits met de six à neuf mois à se rétablir. Y a-t-il, sur le plancher océanique ou au fond de l'océan, une forme quelconque de vie marine?

M. Rideout: Oui. Malheureusement, je ne suis pas un spécialiste du domaine, mais je sais qu'il s'agit d'une question importante. Il est possible que la flore et la faune subissent certaines transformations sous l'effet des conditions aérobies et anaérobies. L'environnement se transforme, certes, mais il y a de la vie sous les piscicultures et autour d'elles.

Le sénateur Cook: Monsieur Rideout, je m'intéresse tout particulièrement à la santé des poissons. Étant donné que vous représentez les intérêts des aquaculteurs et des fabricants d'aliments pour poisson du Canada, j'ai deux inquiétudes, la première au sujet de la santé du saumon, et la deuxième, au sujet de la mienne, lorsque je consomme ce produit.

Les salmoniculteurs du Canada observent-ils tous un code de conduite? Le cas échéant, comment, de façon générale, ce code a-t-il été élaboré? Comment l'applique-t-on? Les salmoniculteurs sont-ils tenus de rendre compte au gouvernement - fédéral ou provincial - ou au grand public des maladies et de l'utilisation des médicaments?

Si je me sens personnellement interpellée, c'est que je suis issue d'une longue lignée de médecins. Dans le cadre de conversations à portée générale, certains d'entre eux avancent aujourd'hui la théorie selon laquelle les aliments que nous consommons sont peut-être en train de nous rendre insensibles aux médicaments. Il en est résulté de nouveaux virus auxquels, à l'avenir, nous ne pourrons résister à l'aide de médicaments. Il s'agit d'une déclaration à l'emporte-pièce, mais, sur un plan plus pratique, je vous saurais gré de bien vouloir répondre à mes deux premières questions.

M. Rideout: Il y a des codes de conduite. Ils ont été mis au point par l'industrie, dans certains cas en collaboration avec les gouvernements. Nous travaillons à une initiative majeure visant l'établissement d'un code pour l'aquaculture durable. Il s'agira d'un code national, et nous espérons que tous les codes locaux s'y enchâsseront et qu'il y aura des liens entre eux.

Nous tenons à ce que ce code soit de catégorie mondiale. Dans le code, nous cherchons à utiliser un langage rigoureux, de façon que tous les lecteurs comprennent que l'industrie aquacole assume la responsabilité de ses activités et en comprend la gravité. Au cours de l'été, nous allons tenter de mettre la dernière main au code national. Cependant, de nombreux codes locaux ont déjà été élaborés.

En ce qui concerne le registre des maladies et des antibiotiques utilisés, je dirais, sénateur - si je comprends bien votre question - que deux systèmes sont essentiellement en cause - du moins du point de vue de l'industrie salmonicole, si vous me permettez d'utiliser cet exemple. En Colombie-Britannique, certains règlements prescrivent la présentation de rapports. Le gouvernement participe à l'administration de cette question. Soit dit en passant, on n'administre aucun médicament qui n'a pas été au préalable prescrit par un vétérinaire. Dans le domaine de la pisciculture, il s'agit d'un élément qui fait l'objet d'un rigoureux contrôle.

Sur la côte Est, le gouvernement n'exerce aucun contrôle. C'est donc l'industrie qui a mis en oeuvre ce qu'on appelle le «programme pour des saumons en santé», particulièrement au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse. Essentiellement, le programme reproduit ce qui se fait dans le domaine en Colombie-Britannique, mais, dans ce cas-ci, sous l'égide de l'industrie. Les résultats sont relativement probants.

En ce qui concerne la présence de résidus de médicaments dans nos produits, nous avons, je crois, les plus longs délais d'attente de tous les secteurs de production d'aliments d'origine animale. Ce que je veux dire par là, c'est que le temps qui s'écoule entre l'administration du médicament et le moment où l'animal est tué est plus long pour les produits de l'aquaculture que pour tout autre produit animal. Je crois comprendre que ce délai d'attente est de l'ordre d'environ 45 jours.

Le sénateur Cook: À propos du code de conduite, j'ai remarqué que vous avez utilisé le mot «espérer». A-t-on prévu qui allait en assurer l'application? Le cas échéant, qui devrait s'en charger?

M. Rideout: C'est là qu'il y aura un débat et que, à notre avis, le véritable problème va se poser. La question de la conformité, de la reddition de comptes et de l'application fera l'objet d'un vif débat. Pour ma part, j'estime que l'industrie peut se charger de l'application du code, sous la supervision d'une tierce partie, qu'il s'agisse du gouvernement ou d'un autre organisme reconnu extérieur au gouvernement. L'industrie devra aborder cette question au cours des prochains mois, dans le cadre de l'élaboration du code.

Le sénateur Cook: Dans quelle mesure effectue-t-on des recherches à l'appui des hypothèses dont j'entends parler un peu partout? Effectuez-vous des recherches soutenues? Votre association ou le MPO effectuent-ils des recherches? Quel genre de recherche effectue-t-on pour s'assurer qu'il s'agit bel et bien d'une industrie saine?

M. Rideout: Il s'agit d'une question qui me tient à coeur. Il y a en fait quelques organismes qui effectuent des recherches et quelques secteurs de recherche financés par le gouvernement. Ce que j'espère, c'est que nous pourrons assurer une coordination de manière à éviter les dédoublements et que la recherche sera ciblée sur les enjeux de nature à assurer le respect de l'environnement, la confiance du public et l'innocuité des aliments. Nous voulons être une industrie des plus productives et améliorer notre position dans le monde à titre de producteurs dynamiques d'aliments de toute première qualité.

Le président: Certains de vos membres s'adonnent-ils à l'élevage dans des pacages marins? Certains participent-ils à la mise en valeur du plancher océanique, notamment au moyen de l'exploitation du pétoncle?

M. Rideout: Une partie de l'industrie s'adonne à de telles activités. On effectue beaucoup de travail dans ce domaine en Gaspésie. En Gaspésie toujours, on a créé une nouvelle association, en amont du golfe du Saint-Laurent. L'association ne fait pas encore partie de l'AICA, mais il est certain que nous tenons des discussions. L'été dernier, je me suis rendu en Gaspésie pour rencontrer le président.

Le président: Je ne savais pas que vous étiez sur le point de signer un accord avec la Fédération du saumon Atlantique. Pourriez-vous expliquer brièvement la nature de l'accord que vous avez signé avec la fédération?

M. Rideout: Il s'agit d'un accord de coopération, qui vise à la fois à restaurer l'intégrité du saumon sauvage et à favoriser la mise en place de conditions qui permettent à une aquaculture durable et à la pêche commerciale de collaborer. Nous devons déployer des efforts en ce sens. Nous devons coopérer dans certains sujets de recherche et dans d'autres domaines.

En ce qui concerne les initiatives, nous avons convenu d'établir un comité de gestion des secteurs dans lesquels nous pouvons travailler de concert.

Le président: Faut-il voir dans cette initiative la suite des visites que le comité a effectuées à St. Andrews il y a deux ou trois ans? Nous avions alors rencontré des aquaculteurs et des représentants de la fédération. Nous avions effectué certains travaux préliminaires pour éviter que tous les intervenants, une fois réunis, partent dans tous les sens. Nous nous étions donné pour but d'arrêter une série de positions communes. Faut-il voir là un suivi à la visite que le comité a effectuée dans la région?

M. Rideout: Le leadership dont le comité a fait preuve et les tentatives qu'il a faites de concilier des points de vue divergents dans une approche commune de la meilleure solution pour l'industrie et les stocks de poisson sauvage a été utile.

Le président: À l'époque, M. Anderson a déclaré que les deux groupes ne se seraient peut-être jamais réunis, n'eût été de la préparation de la rencontre proposée avec nous. Même si tous les enjeux n'ont pas fait l'objet d'un consensus absolu, les deux parties ont tout au moins convenu de s'entendre sur ce sur quoi elles sont d'accord.

M. Rideout: Même lorsque nous nous entendons, nous sommes conscients qu'il arrivera peut-être que nous soyons en désaccord. Néanmoins, nous avons un objectif commun, du point de vue du développement de l'aquaculture et du réétablissement des stocks de poisson sauvage.

Le président: J'aimerais aborder une dernière question. Je sais qu'il se fait tard et que d'autres sénateurs ont peut-être encore des questions à poser. Cependant, la question de la recherche revient assez fréquemment sur le tapis. Je suis certain que les membres de votre groupe aimeraient que l'industrie effectue des travaux de R-D dans les domaines de la mise en marché, des marchés, de l'élaboration de meilleurs produits, et cetera.

Bon nombre de personnes qui s'opposent à l'aquaculture sous toutes ses formes font état de préoccupations à propos desquelles, nous le savons, peu de recherches ont été effectuées. On songe en particulier à l'anémie infectieuse du saumon. La possibilité que le saumon de l'Atlantique s'établisse dans des rivières de la côte Ouest suscite également des inquiétudes.

Je sais qu'un jeune professeur du nom de Volpe effectue certains travaux à ce sujet. Le comité aura sous peu la possibilité de lui parler.

Il y a des indications selon lesquelles le saumon de l'Atlantique est en train de se reproduire dans certains cours d'eau de la Colombie-Britannique. Cependant, on ne peut en être certain parce qu'il n'y a pas de recherche à ce sujet. Il y a d'autres secteurs qui doivent faire l'objet d'analyses, mais à propos desquels on n'effectue aucun travail.

Plus tôt ce soir, on a soulevé les limites à la croissance de l'industrie dans la baie de Fundy à titre de sujet à propos duquel on devrait effectuer plus de recherche. La recherche est l'un des thèmes qui reviennent sans cesse devant le comité.

Les deux parties qui se font face sont d'accord pour dire qu'il faut effectuer plus de recherche.

Le MPO, organisme responsable et promoteur de l'industrie, perd en crédibilité auprès des Canadiens. Le fait qu'il soit à la fois le ministère responsable et l'organisme de réglementation de l'industrie soulève des problèmes de crédibilité qui nous préoccupent. S'il n'est pas crédible auprès de la collectivité, le MPO risque de devenir inefficace à titre de porte-parole, dans le dossier de la réglementation aussi bien que dans celui de la promotion. Auriez-vous l'obligeance de tenter de répondre, s'il vous plaît?

M. Rideout: Notre industrie est parvenue à établir le plan de gestion de l'anémie infectieuse du saumon le plus efficace du monde. Nous avons réagi plus rapidement que tout autre pays du monde pour maîtriser cette maladie.

Au sein de notre industrie, un des secteurs qui pose problème tient à l'accès à des sites que nous pourrons continuer à gérer selon le principe des catégories d'âge distinctes, facteur essentiel à l'élimination ou à la réduction marquée des cas d'anémie infectieuse du saumon. Au chapitre de la gestion des maladies, nous nous tirons bien d'affaire. Si nous pouvions compter sur un programme national de santé des animaux aquatiques dans le cadre duquel les gouvernements fédéral et provinciaux, l'indus trie, les collèges de vétérinaires, les laboratoires privés et les établissements de recherche pourraient tous collaborer, nous ferions figure de chef de file au sein de l'industrie.

C'est nous qui devrions être les chefs de file de l'industrie parce que nous possédons toutes les compétences nécessaires pour montrer aux gens ce qui peut être fait et bien fait. Ce n'est pas tant que les pratiques adoptées dans d'autres pays ne sont pas adéquates. Cependant, nous pouvons être fiers de nos méthodes et fiers de qui et de ce que nous sommes.

En ce qui concerne la présence de saumon de l'Atlantique dans les cours d'eau de la côte Ouest, il y a là-bas un programme de surveillance du saumon. D'après les chiffres que j'ai, le nombre de jeunes saumons de l'Atlantique décelés dans les cours d'eau de la Colombie-Britannique est passé d'un maximum de 101 en 1999 à tout juste 10 en 2000. Le problème se pose, et on doit y consacrer des recherches.

À mon avis, il ne suffit pas de montrer que le problème existe. On doit aussi indiquer qu'il n'est pas aussi grave que certains le laissent entendre. L'industrie a tout intérêt à corriger la situation.

Je ne crois pas que le MPO fasse la promotion de l'aquaculture. En fait, il s'agit essentiellement d'un ministère à vocation environnementale. Du point de vue de l'établissement des plans de gestion du poisson aux fins de la récolte dans les régions rurales, il ne fait pas la promotion de l'aquaculture, pas plus qu'il ne fait celle de la pêche au poisson sauvage. Le MPO a pour mandat principal d'assurer la conservation des espèces et la protection de l'habitat, et il s'acquitte efficacement de la tâche. La frustration que vous constatez au sein de l'industrie aquacole s'explique en partie par le fait que le MPO est un peu plus lent que nous le souhaiterions.

Néanmoins, il s'agit d'une institution valable caractérisée par une solide rigueur scientifique. En outre, le MPO s'améliore dans le domaine de l'aquaculture. Le fait que le ministère ait placé l'aquaculture à l'avant-plan et traite le secteur comme une industrie - et non comme un orphelin - constitue en soi une évolution positive pour l'industrie et les Canadiens.

Des problèmes se poseront, et c'est pourquoi j'ai affirmé sans ambiguïté que nous devons nous doter d'une stratégie de gestion des océans, grâce à laquelle nous pourrons cerner les problèmes et en débattre dans les collectivités. Ainsi, nous pourrons commen cer à gérer les océans dans le respect de l'environnement et aussi exploiter la richesse des océans de façon à rendre la prospérité économique aux collectivités littorales. Notre industrie représente une véritable occasion pour ces collectivités.

Le sénateur Meighen: Pouvez-vous nous dire un mot du financement de l'AICA? Est-elle financée par ses membres ou par ses membres et d'autres sources?

M. Rideout: Notre financement vient des membres, des parrains de l'industrie et du travail à contrat que nous effectuons. À titre d'exemple, j'ai fait allusion à la question des ressources humaines. Nous administrons un programme de perfectionnement des ressources humaines. Nous accueillons des diplômés des universités ou des collèges et leur offrons des postes d'apprentis au sein de l'industrie. Nous versons 30 p. 100 du salaire initial pour une période de six mois. Il s'agit d'un programme efficace en cours depuis environ cinq ans.

Il y a environ un an et demi, nous étions, aux fins du perfectionnement des ressources humaines, un conseil sectoriel. L'industrie en est venue à la conclusion qu'il était dans son intérêt d'aspirer à l'autonomie, et c'est en ce sens que nous avons travaillé. En fait, nous sommes autosuffisants depuis avril 2000.

Le sénateur Meighen: Recevez-vous des fonds de la part du MPO ou, pendant que nous y sommes, du Commissaire, à même le budget de recherche pour l'aquaculture? Recevez-vous des indemnisations?

Si, par exemple, une tempête détruit des exploitations, que des poissons sont détruits ou que vous souhaitez effectuer des recherches, pouvez-vous recevoir de l'argent d'autres sources?

M. Rideout: Lorsqu'une tempête détruit un site, le membre absorbe la perte, à moins qu'il n'ait souscrit une assurance privée. Les coûts d'une assurance privée sont très élevés.

Rien à voir avec ce qui arrive, par exemple, lorsqu'une tempête cause des dommages à une récolte conventionnelle.

Dans mes propos d'ouverture, j'ai fait allusion à deux programmes. Il y a le Programme comparatif de recherche- développement en aquaculture - qui fait partie de la somme de 75 millions de dollars à laquelle j'ai fait allusion - et un programme d'une valeur de 20 millions de dollars sur cinq ans auquel l'industrie a accès, à condition d'y collaborer et d'y investir, un peu comme dans le cas du Projet de coinvestissement en recherche et développement qui lie Agriculture Canada à l'industrie. L'industrie peut également présenter des demandes au Programme de partenariat en aquaculture.

J'ai fait allusion à l'adoption de l'analyse des risques et de la maîtrise des points critiques à la ferme, projet mené dans le cadre du Programme de partenariat en aquaculture. Cependant, nous devons apporter une contribution en nature. Nous devons établir à combien se chiffre notre contribution, qui passe par l'utilisation des exploitations, l'administration et d'autres questions faisant partie du développement.

Le sénateur Robertson: À la fin de l'automne dernier, environ 15 000 poissons de la société Nantucket Sea Farms, établie sur la côte est de l'île de Grand Manan, se sont enfuis dans la baie de Fundy. Je crois comprendre que l'un de vos membres s'emploie à la rédaction d'un code pour les producteurs locaux et à un plan d'urgence en cas d'évasion. Auriez-vous l'obligeance de faire le point sur la question des évasions de poisson puisqu'un de vos membres travaille à cette question?

M. Rideout: Il y a un code de confinement, et nous devons l'examiner dans le contexte des nouvelles exigences négociées à l'échelle internationale dans le cadre de l'entente conclue entre l'Organisation pour la conservation du saumon de l'Atlantique Nord et l'Industrie salmonicole de l'Atlantique du Nord. Le code sera révisé selon les nouvelles directives. Je n'ai pas entendu la deuxième partie de votre question.

Le sénateur Robertson: On nous a dit que l'un de vos membres s'employait à la rédaction d'un code destiné aux producteurs locaux, à la suite du désastre auquel j'ai fait allusion. Cette personne travaille non seulement à un code pour les producteurs locaux, mais aussi à un plan d'urgence en cas d'évasion. Êtes-vous en mesure de faire le point à ce sujet?

M. Rideout: Un comité de confinement a été créé au sein de l'Association des salmoniculteurs du Nouveau-Brunswick. La question est de savoir si, en cas d'évasion de poisson, nous pouvons les récupérer et les faire revenir dans l'exploitation. Dans de tels cas, nous devons nous assurer de ne pas récupérer de poissons sauvages. C'est un problème majeur auquel nous travaillons en collaboration avec le ministère des Pêches et des Océans.

Dans le cas de cette évasion en particulier, les poissons étaient là. On a voulu tenter de récupérer certains d'entre eux. Cependant, on n'a pu le faire, faute de permis. Le code de confinement contiendra notamment une section sur les interventions d'urgence, en cas d'incident.

Le président: Je vous remercie beaucoup.

Sénateurs, j'aimerais savoir si vous êtes d'accord pour que trois documents soient déposés en preuve auprès du comité. Le premier est le document qui a été présenté ce soir par l'Alliance de l'industrie canadienne de l'aquaculture. J'aimerais également verser au dossier le document présenté par Richard Moccia de l'Université de Guelph, un des amis du sénateur Mahovlich. M. Moccia n'a pas pu comparaître devant nous, mais il aimerait que le document qu'il a soumis soit versé dans nos dossiers. Enfin, j'aimerais aussi verser à nos dossiers le document présenté par le consortium du lac Winnipeg. D'accord?

Des voix: D'accord.

Le président: Je tiens à remercier M. Rideout d'avoir pris le temps d'être parmi nous ce soir. Monsieur Rideout, je constate que l'enthousiasme que vous éprouvez à l'endroit de l'association n'a en rien diminué. Nous vous sommes reconnaissants du temps que vous avez passé parmi nous. L'expérience a été pour nous agréable.

La séance est levée.


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