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DES PROMESSES À TENIR :

 LE RESPECT DES OBLIGATIONS DU CANADA EN MATIÈRE DE DROITS DE LA PERSONNE

 Rapport du Comité sénatorial permanent des droits de la personne

 Présidente: L’honorable Raynell Andreychuk
Vice-présidente: L’honorable Sheila Finestone, C.P. 

Décembre 2001


MEMBRES 

L’honorable Raynell Andreychuk, Présidente
L’honorable Sheila Finestone, C.P., Vice-présidente 

et 

Les honorable sénateurs : 

Gérald-A. Beaudoin
* Sharon Carstairs, C.P. (ou Fernand Robichaud, C.P.)
Ethel Cochrane
Marisa Ferretti Barth
Noël Kinsella
* John Lynch-Staunton (ou Noël Kinsella)
Vivienne Poy
Nicholas Taylor
La très révérende Lois Wilson 

* Membres d’office  

En plus des sénateurs indiqués ci-dessus, les honorables sénateurs Isobel Finnerty, Mobina Jaffer, Serge Joyal, C.P., Colin Kenny, Jean Lapointe, Rose-Marie Losier-Cool, Lorna Milne, Donald Oliver, Gerard Phalen, Marcel Prud’homme, C.P., James Tunney et Charlie Watt étaient membres du Comité à différents moments au cours de cette étude ou ont participé à ses travaux. 

Personnel de la Direction de la recherche parlementaire de la Bibliothèque du Parlement :
David Goetz, attaché de recherche 

Till Heyde
Le greffier du Comité


ORDRE DE RENVOI 

Extrait des Journaux du Sénat du jeudi 10 mai 2001 : 

L'honorable sénateur Andreychuk propose, appuyée par l'honorable sénateur Bolduc, 

Que le Comité sénatorial permanent des droits de la personne soit autorisé à étudier diverses questions ayant trait aux droits de la personne et à examiner, entre autres choses, les mécanismes du gouvernement pour que le Canada respecte ses obligations nationales et internationales en matière de droits de la personne; et 

Que le Comité fasse rapport au Sénat au plus tard le mercredi 31 octobre 2001.  

La motion mise aux voix, est adoptée. 

 

Extrait des Journaux du Sénat du jeudi 18 octobre, 2001 : 

L'honorable sénateur Andreychuk propose, appuyée par l'honorable sénateur Stratton, 

Que la date de présentation du rapport final du Comité sénatorial permanent des droits de la personne au sujet de son étude de diverses questions ayant trait aux droits de la personne et, entre autres choses, les mécanismes du gouvernement pour que le Canada respecte ses obligations nationales et internationales en matière de droits de la personne, autorisée par le Sénat le 10 mai 2001, soit rapportée au vendredi 21 décembre 2001; et 

Que le Comité soit autorisé, par dérogation aux règles usuelles, à déposer son rapport auprès du greffier du Sénat, si le Sénat ne siège pas à ce moment-là, et que le rapport soit réputé avoir été déposé à la chambre du Sénat.

 La motion, mise aux voix, est adoptée. 

Paul C. Bélisle
Le greffier du Sénat


TABLE DES MATIÈRES

Avant-propos de la présidente 

Sommaire des recommandations 

    I) Les rouages du gouvernement et les droits de la personne au Canada 

         A.  Introduction : Les droits de la personne au Canada et au-delà
         B.   Les mécanismes touchant les droits de la personne à l’échelle nationale au Canada
         C.  Les droits internationaux de la personne au Canada 

1. Acceptation par le Canada des obligations en matière de droits internationaux de la personne
2. Respect par le Canada des obligations relatives aux droits internationaux de la personne

a. Mécanismes internationaux pour le respect par les États
b. Respect par le Canada, sur son territoire, de ses obligations en matière de droits internationaux de la personne

i) Incidence des lois sur les droits internationaux de la personne sur les lois canadiennes 
ii) Mise en œuvre par le Canada des mesures législatives 
iii) Application des droits internationaux de la personne et fédéralisme canadien 

    II)     Nécessité d’un comité parlementaire des droits de la personne

    III)    Questions à examiner plus à fond

A. Le Canada et les organismes chargés de traités sur les droits de la personne
B. Le Parlement et le processus de conclusion de traités
C. Mise en œuvre législative des instruments internationaux en matière de droits de la personne
D. Vérifier la conformité des lois proposées aux principes des droits de la personne
E. Les droits internationaux de la personne et le fédéralisme canadien
F. Traités sur les droits de la personne qui n’ont pas encore été signés ou ratifiés par le Canada
G. Participation du Canada à la Convention américaine relative aux droits de l’homme
H. Le droit à la vie privée   

    IV)    Recommandations immédiates

A. Représentation du Canada à la Commission des droits de l’homme de l’ONU
B. Rapports sur les droits de la personne en souffrance au Canada 
C. Équilibre entre droits de la personne et sécurité
D. Discrimination fondée sur la condition sociale
E. Les Commissions des droits de la personne au Canada
F. Site Web sur les droits internationaux de la personne
G. Appui au travail de l’Association canadienne des Commissions et Conseils des droits de la personne
H. Conférence des ministres fédéral, provinciaux et territoriaux chargés des droits de la personne

    V)     Conclusion

Annexe A : Témoins 

Annexe B : Sélection de documents préparés pour le Comité ou reçus au cours de cette étude


AVANT-PROPOS DE LA PRÉSIDENTE 

Nous, Canadiens et Canadiennes, tirons une grande fierté de l’importance que nous accordons aux droits de la personne et du rôle important que nous avons joué dans la promotion de ces droits sur la scène internationale. Issus de milieux divers et enrichis d’une multitude d’expériences, nous cherchons à bâtir une société fondée sur la tolérance, l’égalité, la dignité et le respect pour tous. Même si nous n’y parvenons pas toujours parfaitement, notre pays reste un modèle pour le reste du monde. 

En créant, en mars de cette année, son premier comité permanent traitant exclusivement des droits de la personne, le Sénat donne un exemple concret de notre volonté de favoriser et de protéger les droits pour lesquels les Canadiens ont tant travaillé et auxquels nous accordons tant d’importance. L’existence du Comité témoigne de façon tangible du devoir moral et juridique ressenti profondément par tous les sénateurs – en fait par toute la population canadienne – de veiller à ce que notre pays fasse tout son possible pour protéger et encourager le respect des droits de la personne. Le Comité agira comme canal privilégié entre le gouvernement et les intervenants non gouvernementaux dans le domaine et il œuvrera pour approfondir chez les parlementaires la connaissance des questions touchant les droits de la personne. Il aidera ainsi à attirer sur ces derniers toute l’attention qu’ils méritent et à rendre tous les parlementaires plus aptes à assumer leur responsabilité de protéger et de promouvoir ces droits. 

Étant donné le large éventail de questions touchant les droits de la personne, l’ordre de renvoi préliminaire du Comité autorise ce dernier à entamer une première étude intensive de l’ensemble des questions, y compris les mécanismes du gouvernement pour que le Canada respecte ses obligations nationales et internationales dans le domaine. Notre objectif, à cette étape préliminaire, était de cerner les points à étudier plus tard et, si possible, de formuler des recommandations immédiates. Or, nous nous sommes vite aperçus qu’une des principales questions à aborder concerne l’écart qui s’est creusé entre notre volonté de participer aux instruments internationaux touchant les droits de la personne et notre engagement à bien faire respecter au Canada les obligations contenues dans ces instruments. Comme l’indique le présent rapport, la divergence croissante entre les obligations du Canada à l’échelle internationale et les mesures réellement prises pour les observer risque de nuire à notre réputation et de nier aux Canadiens des droits qui leur reviennent. 

Le Comité a recueilli les avis d’un éventail d’éminents spécialistes qui ont consacré beaucoup de temps à ces questions. Le présent rapport formule donc certaines recommandations immédiates en fonction de ces avis et de nos propres réflexions et analyses. Mais un domaine aussi complexe, qui met à contribution des systèmes nationaux et internationaux ainsi que les multiples rouages d’appareils gouvernementaux, nécessite une étude plus approfondie. Nous avons donc relevé une série de questions qui devront être abordées plus tard. Nous avons l’intention de demander l’autorisation du Sénat d’examiner une partie ou la totalité de ces questions avec toute la minutie nécessaire. Il convient aussi de souligner que d’autres sujets, qui ne sont pas mentionnés dans le présent rapport, pourraient être identifiés à l’avenir, auquel cas, le Comité demandera au Sénat l’autorisation voulue pour effectuer les études nécessaires. 

Les membres du Comité et les autres sénateurs qui ont participé aux délibérations ont évidemment fait le gros du travail d’absorption et d’analyse de la gamme de questions parfois très complexes. Je tiens à leur exprimer mes plus chaleureux remerciements pour leur coopération et j’espère avoir l’occasion de travailler de nouveau avec eux. 

J’aimerais remercier tout particulièrement le sénateur Sheila Finestone, vice-présidente du Comité. Tout au long de sa carrière parlementaire, le sénateur Finestone a manifesté un vif intérêt et un profond dévouement pour la cause des droits de la personne. Son départ imminent du Sénat nous laissera tous, tant au Sénat que dans le reste du pays, appauvris. Nous ne pouvons qu’espérer qu’elle continuera de consacrer son énergie débordante aux droits de la personne et de suivre de près les travaux du Comité. 

J’ai déjà souligné la contribution des témoins. Ils nous ont offert des analyses précieuses et nous ont permis de tirer profit des vastes travaux qu’ils ont réalisés dans le domaine des droits de la personne. Je les en remercie de tout cœur et j’espère avoir l’occasion de puiser de nouveau à la source de leurs connaissances. 

En dernier lieu, j’aimerais remercier les employés du Sénat et de la Bibliothèque du Parlement qui ont participé à l’étude. Il n’est pas facile de conseiller et de soutenir un nouveau comité. À cet égard, j’aimerais souligner tout particulièrement la contribution de M. Till Heyde, greffier du Comité, et de M. David Goetz, attaché de recherche, qui ont su guider le Comité de façon si professionnelle dans la planification de son travail et dans la réalisation de ce rapport exhaustif dans les délais prévus. 

Le rapport est dédicacé aux défenseurs des droits de la personne où qu’ils soient dans ce monde fragile.

Raynell Andreychuk
Présidente


SOMMAIRE DES RECOMMANDATIONS 

1.         Le Comité recommande que, compte tenu de l’importance particulière du rôle du Canada à la prochaine séance de 2002 de la Commission des droits de l’homme de l’ONU, le gouvernement du Canada :

a)      nomme une personne du rang d’ambassadeur pour le représenter à la Commission; et

b)      veille à ce que la délégation canadienne compte des parlementaires actifs et informés de tous les partis (y compris les indépendants) et des deux Chambres, ayant une expérience et des connaissances du domaine des droits de la personne. 

2.                  Le Comité recommande que, dans le cadre actuel des processus de rapport, le gouvernement du Canada, en collaboration avec les gouvernements provinciaux et les territoires, prenne les mesures nécessaires pour remettre, d’ici le 31 mars 2002 aux divers organismes chargés des traités internationaux sur les droits de la personne, tous les rapports en souffrance du Canada. 

3.                  Le Comité recommande que le gouvernement du Canada donne à la Commission canadienne des droits de la personne, avec les ressources suffisantes, la tâche de mener une analyse de l’impact sur les droits de la personne des nouvelles mesures de sécurité et de lutte antiterroriste afin de vérifier si l’équilibre est atteint entre les mesures nationales de sécurité et de lutte antiterroriste, d’une part, et les droits de la personne, d’autre part. 

4.                  Le Comité recommande que le gouvernement du Canada rédige et dépose au Parlement des modifications à la Loi canadienne sur les droits de la personne de façon à ajouter la condition sociale comme motif de discrimination prohibé. 

5.                  Le Comité recommande que le gouvernement du Canada réponde au rapport de 2000 du Comité de révision de la Loi canadienne sur les droits de la personne au cours de la présente Session parlementaire.  Dans sa réponse, le gouvernement devrait traiter de ce qui suit :

a)      L’ajout de références précises aux grands instruments internationaux sur les droits de la personne dans la Loi canadienne sur les droits de la personne.

b)      La nécessité de consacrer plus de ressources aux mandats de la Commission canadienne des droits de la personne concernant la promotion et l’éducation, ainsi que l’examen des lois et des politiques proposées. 

Le Comité recommande en outre que le gouvernement du Canada, peut-être par l’intermédiaire de la Commission du droit du Canada en consultation avec l’ACCCDP, prenne des mesures pour élaborer un code modèle en matière de droits de la personne à soumettre à l’étude de toutes les administrations canadiennes. 

6.                  Le Comité recommande que le gouvernement du Canada voie à ce que les instruments internationaux relatifs aux droits de la personne auxquels le Canada est partie, ainsi que tout mécanisme de plainte, soient réunis et mis à la portée de tous les Canadiens grâce à Internet, et que des mesures soient prises pour informer les Canadiens de ces renseignements. 

7.                  Le Comité recommande que le gouvernement du Canada entreprenne des consultations auprès des représentants compétents des gouvernements provinciaux et territoriaux en vue de mieux utiliser et appuyer le travail de l’ACCCDP.   

8.                  Le Comité recommande que le gouvernement du Canada prenne les mesures nécessaires pour rétablir la coutume de réunions régulières entre les ministres fédéral, provinciaux et territoriaux chargés des droits de la personne. Ces réunions devraient avoir lieu au moins une fois tous les trois ans.


I) LES ROUAGES DU GOUVERNEMENT ET LES DROITS DE LA PERSONNE AU CANADA 

            A. Introduction : Les droits de la personne au Canada et au-delà 

Les personnes formant le Comité ont mis à contribution leur expérience et leur engagement à l’égard de la cause des droits de la personne afin d’« étudier diverses questions ayant trait aux droits de la personne et [d’]examiner, entre autres choses, les mécanismes du gouvernement pour que le Canada respecte ses obligations nationales et internationales en matière de droits de la personne », ainsi qu’autorisé par le Sénat.[1] Il s’agit certes d’un mandat vaste et important. 

Ce nouveau comité permanent consacré exclusivement aux droits de la personne constitue une première pour le Sénat. Conscients de l’importance historique de la création de cette entité et de notre domaine d’étude particulier, nous nous sommes astreints à tenir toutes les séances du Comité en public et à ne pas recourir à huis clos, même pour les réunions administratives. 

La création du Comité par le Sénat du Canada à cette époque de notre histoire exprime clairement aussi toute l’importance que le Sénat accorde aux droits de la personne dans la vie politique du pays. Maintenant plus que jamais, l’engagement des nations à l’égard des droits de la personne est mis à l’épreuve, alors que les États se rapprochent, mus tant par les menaces que les ouvertures à l’échelle mondiale. 

Les possibilités et les défis que présentent la mondialisation et l’intégration régionale, ainsi que les nouvelles ou éventuelles menaces découlant du terrorisme et d’autres crimes transnationaux, arrivent à un moment critique dans l’évolution des droits de la personne. Nous pourrions même dire que nous abordons la troisième phase de cette évolution. 

La première phase a été la reconnaissance de la notion même de droits de la personne et leur protection juridique au sein de sociétés nationales. La deuxième phase a vu l’élaboration et l’entrée en vigueur d’instruments internationaux conçus pour assurer que tous les citoyens de la planète jouissent des bienfaits des droits de la personne. 

Ces deux premières phases reposaient et ont pu compter sur l’engagement, le dévouement, la passion et l’abnégation d’innombrables individus assumant divers rôles et fonctions : activistes non gouvernementaux en matière de droits de la personne, politiques, fonctionnaires, syndicalistes et particuliers courageux et persistants qui ont cherché, à titre individuel, la justice pour eux-mêmes et pour les autres. 

La troisième phase des droits de la personne maintenant amorcée exige que nous concrétisions nos engagements. Elle concerne la mise en œuvre de ces droits, mais plus encore, leur mise en œuvre de longue durée. Malheureusement, une bonne partie de la passion et de la ferveur générées au cours des deux premières phases lors des luttes menées pour créer les droits de la personne semble s’être dissipée. 

Pour beaucoup, la bataille est gagnée, puisque les droits de la personne figurent maintenant dans des lois canadiennes et internationales. Mais il y a loin de coupe aux lèvres. La réussite des deux premières phases ne garantit en rien le succès de la troisième. Il reste possible de perdre la bataille. La passion et l’engagement qui ont accompagné les deux premières phases restent aussi importants que jamais. 

Fait plutôt ironique, le succès qu’a connu l’adoption de lois sur les droits de la personne a donné lieu à une certaine nonchalance à l’égard de ces droits. Au Canada, leur enchâssement dans la Charte canadienne des droits et libertés a considérablement accru la sensibilisation partout au pays. Par contre, cela a aussi permis à de nombreux citoyens et décideurs de s’en remettre tout simplement aux tribunaux pour faire respecter ces droits. Aux yeux de beaucoup, les droits de la personne sont maintenant une question qui relève des avocats et des juges.  

Si, à certains égards, la Charte va plus loin que le droit international, elle ne garantit pas par ailleurs que nous avons satisfait à nos obligations internationales. Ce vide dans la protection des droits de la personne n’a pas été compensé ailleurs dans le système, même si les tribunaux ont récemment manifesté la volonté de faire davantage intervenir les obligations internationales du Canada, dans leurs interprétations des lois.  

Les engagements découlant des traités internationaux doivent, pour être appliqués au Canada, faire l’objet de lois canadiennes qui les rendent exécutoires, car les traités sur les droits de la personne n’ont pas force obligatoire au Canada. Mais toutes les mesures législatives nécessaires n’ont pas toujours été prises. Aux disparités qui existent entre la protection des droits de la personne au Canada et les instruments internationaux que celui-ci a ratifiés, correspond un manque de législation de mise en œuvre qui signifie que le Canada ne respecte pas entièrement ses obligations internationales et, par conséquent, risque de nier à ses citoyens l’accès à certains droits. En outre, des organismes canadiens et internationaux de droits de la personne commencent à remarquer ce décalage.  

C’est manifestement une situation gênante pour le Canada, pays qui jouit pourtant d’une réputation bien méritée comme chef de file dans le domaine des droits de la personne. À titre de Canadiens, nous jouissons d'un large éventail de protections des droits de la personne par l'entremise de notre système judiciaire national et, en particulier, comme résultat des lois fédérales et provinciales sur les droits de la personne et des garanties constitutionnelles qui sont enchâssées dans la Charte canadienne des droits et libertés. Au-delà de ces réalisations nationales, le Canada a été à l'avant-scène du mouvement des droits de la personne sur la scène internationale. Le pays participe à plus de 30 mécanismes internationaux pour la défense des droits de la personne (d’après certains, ce nombre est plus élevé) touchant une vaste gamme de secteurs, y compris : les libertés civiles et les droits politiques de base; les droits sociaux, économiques et culturels; les normes du travail; la protection des réfugiés et le droit humanitaire international. De plus, le Canada joue un rôle de premier plan dans l’élaboration et la promotion de nouvelles initiatives internationales en matière de droits de la personne, comme il l'a fait récemment relativement à l'interdiction internationale des mines terrestres anti-personnel et aux mesures visant l'établissement d'une cour criminelle internationale permanente.  

Il n’est peut-être pas étonnant que le Canada soit devenu un chef de file mondial en droits de la personne. Depuis ses débuts, il a dû faire face à différentes cultures, langues et religions et les concilier. La seule façon pour le Canada d’aller de l’avant était de favoriser la tolérance et le respect mutuel. Bien entendu, le parcours ne s’est pas fait sans heurts, et il y a même eu des reculs. Malgré sa culture de respect pour les droits de la personne, le Canada a connu et, malheureusement, continue de connaître des violations de ces droits. Son dossier présente de nombreuses bavures. Mais un pays comme le nôtre ne saurait survivre sans développer une certaine volonté de respecter les principes de l’égalité et de l’acceptation de la diversité. Nous avons donc trouvé une façon d’aller de l'avant et de partager avec le monde nos expériences et notre compétence afin d’aiguillonner et d’aider la communauté internationale à faire des progrès en matière de droits de la personne.  

Nous devons donc relever ces nouveaux défis comme nous l’avons fait dans le passé et trouver une façon de faire marche avant dans la troisième phase, celle de l’exécution des droits de la personne. Nous devons le faire pour nous-mêmes et pour ceux dont les droits sont en jeu, ainsi que pour ceux dans le monde qui ont besoin de notre exemple et de nos encouragements.  

Comment aller de l’avant et respecter les obligations du Canada en matière de droits de la personne?  

Une partie de la solution consiste à changer d’attitude et de perspective.  

Accepter et adopter des garanties en matière de droits de la personne constituent la première étape, et non la dernière. Les cours et tribunaux et les organismes internationaux sont des outils utiles et importants pour appliquer et protéger les droits de la personne. Mais l’existence de ces mécanismes ne doit pas provoquer la nonchalance. Le respect des droits de la personne est une obligation qui nous incombe à tous et que nous ne saurions déléguer à des institutions pour ensuite les oublier. Manifestement, certains membres de la société, comme les fonctionnaires et les parlementaires, ont une responsabilité supplémentaire dans ce domaine. Les droits de la personne ne sont pas de simples droits juridiques servant à obtenir des recours judiciaires en cas de violation. Ils doivent être pris en considération à toutes les étapes de l’établissement de politiques et de textes législatifs et par tous les intervenants dans le processus, avant qu’il y ait violation.  

Les obligations internationales dans le domaine des droits de la personne sont aussi astreignantes que nos garanties nationales. De toute évidence, il est impossible d’assumer pleinement nos obligations internationales sans les convertir en dispositions législatives nationales. C’est là que se situe le problème. La signature et la ratification de traités concernant les droits internationaux de la personne comportent une obligation de se soumettre à un examen international. Mais nous sommes aussi tenus d’appliquer ces droits au Canada, en allant au-delà de ce que prévoit la Charte. Les droits internationaux de la personne ne sont pas que des promesses que nous faisons à d’autres pays ou à l’ensemble de la communauté internationale. Il s’agit de droits qui reviennent à tous et que nous avons promis de respecter et d’appliquer chez nous. Ces droits appartiennent aux individus, et non aux États qui ratifient les traités. Une des difficultés au Canada est la dichotomie nationale/internationale, qui est si profondément enracinée dans notre appareil judiciaire qu’elle teinte notre façon de penser même loin des tribunaux.  

Une autre façon d’aller de l’avant est de reconnaître que nous avons tous des responsabilités à assumer en matière de droits de la personne et de créer de nouveaux partenariats institutionnels afin de mieux respecter nos obligations, particulièrement au niveau international. Le gouvernement exécutif n’y arrivera pas seul. Il ne s’agit pas de dérober le pouvoir au Cabinet ou aux ministères; il s’agit plutôt pour le Parlement de jouer le rôle qui est le sien dans une démocratie. Il ne peut se contenter d’adopter les mesures législatives jugées nécessaires par l’exécutif pour honorer les engagements d’un traité. Le Parlement doit participer à l’examen de ces obligations et aider à déterminer ce qu’il faut faire pour les mettre en application. Il doit aussi veiller à ce que les droits de la personne soient respectés, tant au Canada qu’à l’échelle internationale, dans les mesures législatives subséquentes. D’autres intervenants, comme les organismes non gouvernementaux, les tribunaux et les commissions des droits de la personne, ont aussi un rôle à jouer. Mais seul le Parlement peut offrir la tribune nécessaire à l’information et à la discussion publiques sur ces questions, ainsi que demander des comptes au gouvernement.  

Nous estimons que le Comité lui-même peut être un élément important de cette marche en avant s’il aide l’ensemble du Parlement à façonner un rôle approprié en matière de droits de la personne, s’il offre une tribune publique spécifique et s’il privilégie ces questions d’intérêt public. Il est aussi à espérer que l’existence et les travaux du Comité et certaines des réformes que nous recommandons, et celles que nous recommanderons plus tard, donneront un souffle nouveau à la passion et à l’énergie qui ont caractérisé les efforts du Canada dans les premières phases de notre parcours des droits de la personne. Cela suffirait pour justifier nos efforts.

 

B. Les mécanismes touchant les droits de la personne à l’échelle nationale au Canada 

Bien avant qu’ils soient constitutionnalisés au Canada, les droits de la personne ont été réclamés par un éventail de groupes et d’intervenants non gouvernementaux. Des mouvements syndicaux et des droits de la femme, d’autres groupements prônant les droits de la personne, des activistes politiques, des groupes confessionnels et d’autres ont joué et continuent de jouer un rôle. Les pressions qu’ils ont exercées inlassablement sur le gouvernement ont fini par provoquer des changements législatifs. Les recours ont d’abord ciblé des groupes ou des griefs particuliers. Mais des liens ont finalement été établis entre les objectifs de tous ces groupes, et la notion suprême de droits de la personne a été reconnue et de vastes recours plus systématiques ont été élaborés.  

Avant que ces divers intérêts et demandes ne se fondent pour devenir la notion actuelle plus générale de droits de la personne, les protections juridiques étaient accordées au petit bonheur. Au Canada, la common law a assuré une certaine protection des libertés civiles et la présence de recours sous forme de présomptions interprétatives judiciaires contre l’intervention législative. De plus, des dispositions de la Constitution de 1867 contiennent des mesures de protection sélectives pour au moins quelques communautés minoritaires.  

Ce n’est réellement qu’avec l’adoption de déclarations des droits, dont la Déclaration canadienne des droits de 1960, et de codes des droits de la personne par les provinces et par le Parlement du milieu à la fin du XXe siècle, qui ont abouti à l’ajout à la Constitution en 1982 de la Charte canadienne des droits et des libertés, que des démarches efficaces ont été entamées pour enchâsser systématiquement les droits de la personne dans le droit canadien. 

L’on peut diviser les mesures de protection des droits de la personne à l’échelle nationale au Canada en deux catégories :  

1)                  les libertés civiles traditionnelles et les droits à un recours, les libertés fondamentales et les droits politiques, qui sont essentiellement des limites imposées à l’action gouvernementale et législative;

2)                  les lois antidiscrimination qui interdisent la discrimination basée sur divers motifs dans la société en général et qui s’appliquent aussi bien aux acteurs publics que privés.  

L’application de la première catégorie de mesures de protection des droits de la personne à l’échelle nationale est en grande partie confiée aux tribunaux. Par contre, la deuxième catégorie des droits est, au moins en première instance, mise en application par des organismes administratifs – c.-à-d. les diverses commissions des droits de la personne.  

Aussi bien les tribunaux de droit commun que les commissions des droits de la personne offrent un arbitrage relativement aux plaintes individuelles en ce qui concerne les violations des droits de la personne, ainsi que diverses mesures correctives dont on peut obtenir l’exécution en recourant aux cours lorsque des violations ont été constatées. Toutefois, en théorie du moins, le modèle des commissions des droits de la personne offre plusieurs avantages par rapport aux tribunaux traditionnels. En général, les commissions des droits de la personne :  

·                    sont composées de personnes spécialisées en droits de la personne;

·                    ont un mandat institutionnel plus large qui inclut la promotion des droits de la personne et l’éducation du public à cet égard;

·                    sont plus accessibles aux plaignants (leurs procédures sont moins formelles et, surtout, si elles acceptent les plaintes les commissions font habituellement enquête et y donnent suite au nom du plaignant);

·                    peuvent entreprendre de leur propre chef l’examen des politiques et des pratiques, même lorsque aucune plainte n’a été déposée, et peuvent publier des rapports à ce sujet;

·                    sont tenues de faire rapport périodiquement au Parlement ou aux assemblées législatives provinciales ou territoriales, selon le cas, non seulement sur leurs propres activités, mais également sur la situation des droits de la personne dans leurs secteurs de compétence respectifs.  

Il est certain que les droits de la personne à l’échelle nationale s’appliquent également aux lois et à la politique gouvernementale à l’extérieur des cours, des tribunaux et des commissions. Les politiques et les lois à tous paliers du gouvernement sont parfois modifiées volontairement, particulièrement aux stades d’élaboration, à la suite de préoccupations relatives aux droits de la personne à l’échelle nationale, spécialement en ce qui a trait à la Charte des droits.   

En ce qui concerne la législation fédérale, un tel examen est une exigence légale formelle. Le ministre fédéral de la Justice est tenu par la loi de revoir les lois parrainées par le gouvernement et de certifier qu’elles sont conformes aux droits garantis dans la Déclaration canadienne des droits de 1960, ainsi que dans la Charte canadienne des droits et libertés.[2]  

Le Parlement joue également un rôle formel dans ce domaine. Le Comité mixte permanent d’examen de la réglementation, auquel la plupart des règlements du gouvernement sont déférés,[3] compte parmi ses critères officiels d’examen la conformité du règlement à la Charte canadienne des droits et libertés et à la Déclaration canadienne des droits.[4] Dans le cas des projets de loi d’initiative parlementaire, la conformité à la Charte fait partie des critères qu’applique le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre pour sélectionner ces projets de loi à titre « d’affaire votable », qui peuvent alors passer à l’examen en deuxième lecture.[5]  

Toutefois, mis à part ces organismes, il n’y a pas de règle juridique ou procédurale qui prévoit la vérification systématique des projets de loi par le Parlement de la perspective des droits de la personne, même si la conformité avec les droits de la personne est en réalité souvent évoquée par des parlementaires dans le cadre d’un débat ou d’un examen relativement à un projet de loi.  

Bien sûr, au Canada comme ailleurs, les droits de la personne ne sont pas une valeur absolue – ils sont assujettis au principe de la proportionnalité. Dans la Charte canadienne des droits et libertés, ce principe trouve son expression dans la clause limitative générale, l’article 1. Tout en garantissant les droits énoncés dans la Charte, cet article les assujettit aux « limites qui soient raisonnables et dont la justification puisse se démontrer dans le cadre d’une société libre et démocratique. » De plus, la plupart des droits de la personne garantis au niveau national, y compris plusieurs droits contenus dans la Charte, sont assujettis à une dérogation législative explicite.[6] Toutefois, une telle dérogation est extrêmement rare et elle est controversée, autant dans le principe que dans la pratique. En outre, dans le cas de la Charte, l’affirmation législative de la dérogation doit être renouvelée tous les cinq ans. Par conséquent, la dérogation législative n’est pas une option facile du point de vue politique pour les gouvernements au Canada. 

Bien qu’ils ne soient pas parfaits, les rouages du gouvernement canadien tiennent compte de ses obligations nationales en matière de droits de la personne. De tels droits sont effectivement enchâssés dans le droit constitutionnel et législatif national et ils peuvent être invoqués devant des organismes judiciaires ou administratifs nationaux. Ces derniers peuvent limiter les actions contraires du gouvernement et, dans certains cas, d’acteurs du secteur privé.  

De plus, le Parlement joue un rôle clé dans l’actualisation des droits de la personne à l’échelle nationale. Le Parlement et les assemblées législatives et territoriales correspondantes participent directement à la création des instruments nationaux relatifs aux droits de la personne. Les parlementaires canadiens ont également un rôle central à jouer pour équilibrer les droits de la personne avec d’autres objectifs sociétaux. Dans une certaine mesure, le Parlement a un devoir ainsi que des occasions d’examiner attentivement les lois du point de vue des droits de la personne. De plus, comme il est indiqué ci-avant, toutes les limites gouvernementales et les dérogations aux droits de la personne garantis par la Charte des droits doivent être approuvées par le Parlement ou par les assemblées législatives provinciales, selon le cas. 

Bien qu’il soit encore possible d’apporter des améliorations au système canadien de protection des droits de la personne nationaux, possibilités que le Comité pourra examiner dans l’avenir, ce système est bien supérieur à ce qui existe relativement aux obligations internationales du Canada en matière de droits de la personne.

 

C. Les droits internationaux de la personne au Canada  

1.      Acceptation par le Canada des obligations en matière de droits internationaux de la personne

Ainsi que nous l’avons dit plus tôt, le Canada a énormément contribué à la promotion des droits de la personne. Il a été partie et acteur important dans la rédaction de la Déclaration universelle des droits de l’homme, adoptée à l’unanimité à l’Assemblée générale des Nations Unies en 1948. En dépit du fait que les droits de la personne n’ont pas toujours été respectés au Canada, ou peut-être en raison de cela, nous avons pu apporter avec nous sur la scène internationale notre expérience et notre perspective de pays hétérogène et relativement jeune.  

La fin de la Seconde Guerre mondiale a marqué un tournant dans les droits internationaux de la personne. C’est à ce moment que l’on s’est mis à reconnaître, comme en témoigne le préambule de la Charte des Nations Unies, que les vrais sujets du droit international sont les êtres humains à titre individuel, et pas uniquement les nations. Des cours pénales internationales ont traduit en justice des représentants de l’État, militaires et civils, non seulement pour les habituels crimes de guerre, mais aussi pour les crimes contre l’humanité souvent commis contre leurs propres concitoyens sous la protection des lois nationales. L’idée a émergé progressivement que tous les citoyens du monde ont, ou devraient avoir, la garantie de certains droits et que les États et les gouvernements sont tenus de rendre compte du respect de ces droits de la personne, en vertu du droit international.  

La Déclaration universelle a reconnu explicitement cet idéal, sans toutefois constituer un instrument juridique exécutoire. C’est alors qu’a commencé le travail de création des traités obligeant les États à accepter et à respecter les droits de la personne chez eux. Les deux pactes internationaux adoptés par les Nations Unies en 1966 – un relatif aux droits civils et politiques, et l’autre relatif aux droits économiques, sociaux et culturels – sont les principaux résultats de ces efforts. D’autres instruments internationaux visant des domaines particuliers des droits de la personne ont suivi. Le Canada a souvent joué un rôle clé dans la promotion et la progression des efforts déployés à cette fin.  

Bien entendu, le Canada est signataire des six grandes conventions internationales sur les droits de la personne, notamment : le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale, la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et la Convention relative aux droits de l'enfant. Ces conventions ont toutes créé des organismes qui sont des comités d'experts dans divers secteurs des droits de la personne, choisis parmi les États parties des diverses conventions. Ces organismes, qui rendent des décisions non exécutoires, sont chargés de surveiller le respect des droits énoncés dans les conventions.  

Le Canada est devenu signataire de ces instruments internationaux à la suite de mesures prises entièrement au niveau exécutif : signature par des représentants diplomatiques et ratification par le gouverneur en conseil (c.-à-d. le cabinet fédéral). Le gouvernement fédéral a habituellement obtenu le consentement préalable des provinces avant de signer et de ratifier les conventions. Par contre, à ce niveau également, le consentement n'a été donné que par le pouvoir exécutif de la province ou son représentant. Avant la ratification d'un traité par le Canada, des fonctionnaires procèdent à l'examen et à l'analyse des lois existantes afin de déterminer si elles doivent être modifiées ou si le pays doit en adopter de nouvelles pour se conformer aux dispositions du traité, ou encore si le Canada doit stipuler une réserve ou annexer un protocole d'entente au moment de la ratification.  

Contrairement à la situation qui prévaut dans la plupart des démocraties occidentales, par exemple aux États-Unis, il n'existe au Canada aucune disposition exigeant l'approbation ou l'implication du Parlement ou des assemblées législatives provinciales, selon le cas, en vue de l'acceptation par le Canada de nouvelles obligations légales internationales qui découlent de l'adhésion à un traité. Cela ne signifie pas que l'adhésion à un instrument international ne peut pas être discutée ou même débattue sur une base informelle. Toutefois, aucune disposition n'exige l'approbation ou une étude par le Parlement.

 

2. Respect par le Canada des obligations relatives aux droits internationaux de la personne  

    a. Mécanismes internationaux pour le respect par les États  

Au niveau international, il existe deux grands mécanismes permettant de surveiller le respect par un État des conventions sur les droits de la personne : l'examen et l'évaluation des rapports périodiques de conformité préparés par chaque État signataire; et l'audition de plaintes de particuliers qui allèguent que leur pays ne respecte pas ses obligations ainsi que les décisions rendues à la suite de ces auditions. Les six grandes conventions sur les droits de la personne exigent le dépôt de rapports périodiques de conformité. Par contre, seules quatre des six conventions renferment des mécanismes prévoyant le dépôt de plaintes par des particuliers, et la mise en place de ces mécanismes par les États signataires est facultative.  

Le Canada participe aux procédures de plaintes individuelles en vertu du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et de la Convention contre la torture. Jusqu'à maintenant, il n'a pas choisi de participer aux procédures mises en place en vertu de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale et de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes.  

Toutefois, les opinions et décisions des ces organismes de surveillance ne lient le Canada ni en vertu du droit international, ni du droit canadien. De plus, leur effet politique est amoindri par le fait qu'il n'existe au Canada aucune procédure officielle ou publique visant à faire le suivi des observations, conclusions et recommandations de ces organismes en ce qui a trait aux dossiers canadiens en matière de droits de la personne.  

 

b. Respect par le Canada, sur son territoire, de ses obligations en matière de droits internationaux de la personne

i) Incidence des lois sur les droits internationaux de la personne sur les lois canadiennes 

Le Canada est un État « dualiste », ce qui signifie que les traités internationaux dont il est signataire n'ont pas, de leur seul fait, une incidence sur les lois canadiennes. Le droit international conventionnel doit être intégré aux lois canadiennes par mesures législatives afin d'avoir une incidence juridique directe. Par conséquent, le fait de signer et de ratifier un pacte international donne l’illusion que le Canada s’y conforme mais en réalité, cela n’a aucun effet juridique sur ses lois nationales. La population canadienne, et même les avocats et les juges, ne connaissent pas beaucoup les lois sur les droits internationaux de la personne, bien que la situation soit en train de changer tranquillement.  

Le dualisme, qui a cours dans la plupart des pays du Commonwealth, est différent du monisme qui domine aux États-Unis et dans les pays de droit civil. Dans un régime moniste, les dispositions dûment ratifiées d'un traité ayant force obligatoire (c.-à-d. les dispositions susceptibles d'application judiciaire sans autre acte législatif) sont d'office intégrées aux lois du pays et peuvent avoir préséance sur des dispositions législatives contradictoires existantes.  

Par ailleurs, les États monistes peuvent se répartir en divers sous-groupes : 1) les États où un instrument conventionnel a un statut équivalent à celui des lois du pays, comme c'est le cas pour les États-Unis,[7] l'Italie et l'Allemagne; 2) les États où ces traités sont supérieurs aux lois du pays, par exemple la France, les Pays-Bas, le Costa Rica, la Belgique et la Suisse (les Pays-Bas sont l'État qui va le plus loin puisqu'ils subordonnent leur constitution à leurs obligations en vertu des traités internationaux); et 3) les autres États qui ont aligné leurs statuts constitutionnels sur certains traités sur les droits de la personne, ou sur tous les traités dont ils sont signataires, par exemple l'Espagne et divers pays d'Amérique latine.[8]  

La différence entre les États dualistes et les États monistes, en ce qui a trait à l'incidence des traités sur le droit du pays, ne s'étend pas au droit international coutumier, lequel, même dans les États dualistes du Commonwealth, fait partie du droit commun du pays – quoique à ce titre, il cède le pas aux lois du pays valides qui couvrent le même sujet.[9] Toutefois, dans le cas du Canada, le professeur Toope a indiqué que les tribunaux ont laissé la situation plutôt confuse sur ce point.[10]  

Il faut souligner qu'il existe une solide justification démocratique pour expliquer la différence entre les effets des traités dans les pays dualistes et dans les pays monistes. Dans un État moniste, la législature nationale doit approuver les traités dans le cadre de la procédure de ratification du pays alors que dans un État dualiste, comme le Canada, la ratification des traités est la prérogative exclusive du pouvoir exécutif ou de la Couronne. Quoique le modèle d'État dualiste puisse sembler peu progressiste du point de vue de l'intégration efficiente des normes de droit international, il a pour objectif de préserver le processus législatif démocratique en assurant que les lois et les droits des citoyens ne soient pas modifiés sans le consentement de leurs représentants élus et nommés.

 

ii) Mise en œuvre par le Canada des mesures législatives  

Même si l'intégration aux lois est nécessaire pour mettre pleinement en œuvre les droits et obligations issus de traités, la vaste majorité des obligations internationales du Canada en matière de droits de la personne n'ont pas fait l'objet de mesures législatives. Cela signifie que les Canadiens ne peuvent pas, en faisant appel aux tribunaux, obliger le gouvernement à respecter leurs droits internationaux de la personne en tant que tel. Cela semble être contraire à l'esprit, sinon à la lettre des instruments internationaux sur les droits de la personne.  

Par exemple, l'article 2(3) du Pacte international relatif aux droits civils et politiques stipule : « Les États parties au présent Pacte s'engagent à :  

a) Garantir que toute personne dont les droits et libertés reconnus dans le présent Pacte auront été violés disposera d'un recours utile[...];

b) Garantir que l'autorité compétente, judiciaire, administrative ou législative, ou toute autre autorité compétente selon la législation de l'État, statuera sur les droits de la personne qui forme le recours et développer les possibilités de recours juridictionnel;

c) Garantir la bonne suite donnée par les autorités compétentes à tout recours qui aura été reconnu justifié. (caractères italiques ajoutés)  

L'exigence explicite imposée aux États par cette disposition, de garantir que toutes les personnes ont un droit inaliénable à des recours efficaces et exécutoires – de préférence constatés par décision judiciaire – pour les violations des droits énoncés dans le Pacte suggère fortement que l'intention qui a présidé à son adoption est l'intégration de ces droits dans les lois des pays signataires. D'ailleurs, tout doute à cet égard est effacé par l'article 2(2) du Pacte :  

Les États parties au présent Pacte s'engagent à prendre, en accord avec leurs procédures constitutionnelles et avec les dispositions du présent Pacte, les arrangements devant permettre l'adoption de telles mesures d'ordre législatif ou autre, propres à donner effet aux droits reconnus dans le présent Pacte qui ne seraient pas déjà en vigueur.  

Le Canada allègue souvent que la Charte canadienne des droits et libertés et les diverses lois fédérales et provinciales sur les droits de la personne sont la preuve qu'il remplit ses obligations relatives à la mise en œuvre sur son territoire du Pacte et d'autres instruments en matière de droits internationaux de la personne. Toutefois, ces mesures législatives et autres ne permettent pas au Canada de s'acquitter pleinement de ses obligations internationales en matière de droits de la personne. Bien que les droits reconnus dans la Charte canadienne des droits et libertés et d'autres mesures législatives nationales sur les droits de la personne soient similaires et, à certains égards, supérieurs aux droits reconnus dans les traités internationaux dont le Canada est signataire, la Charte et les autres lois ne couvrent pas toutes les obligations canadiennes en matière de droits internationaux de la personne. Cela a été souligné par le Comité des droits de l'homme des Nations Unies, organisme chargé de surveiller le respect par les États du Pacte international relatif aux droits civils et politiques :  

Le Comité est préoccupé par la discordance qui persiste entre la protection offerte par la Charte canadienne et d'autres lois fédérales ou provinciales, et celle qui est requise par le Pacte et recommande que les mesures voulues soient prises pour assurer le plein exercice des droits prévus par le Pacte. Il recommande à cet égard la création d'un organisme public chargé de suivre l'application du Pacte et de signaler les manquements éventuels.[11]  

Il est évidemment vrai que, même si les traités non intégrés n'ont pas nécessairement une incidence sur les lois canadiennes, ils peuvent tout de même influer sur leur interprétation, ce qui est d'ailleurs le cas. Une doctrine de la common law, qui s'applique au Canada, veut que dans leur interprétation des lois, les tribunaux présument que le Parlement avait l'intention d'adopter des mesures législatives compatibles avec ses obligations en vertu de traités internationaux. Mais la mise en œuvre présumée est en situation précaire en ce qui a trait à la place qu’occupent les traités internationaux ratifiés dans les lois nationales. Le professeur Toope a déclaré au Comité : « La question de savoir si ce type de mise en œuvre présumée constitue une mise en œuvre réelle est difficile, et soulève des problèmes d'interprétation dans les tribunaux ».[12] Néanmoins, il est évident que les tribunaux peuvent s’inspirer des lois sur les droits internationaux de la personne dans leur interprétation. Comme le mentionnait l'ancien juge en chef Dickson de la Cour suprême du Canada, puisque les instruments internationaux sur les droits de la personne faisaient partie du contexte dans lequel la Charte a été rédigée et adoptée, ils doivent être considérés « comme un facteur pertinent et persuasif quand il s'agit d'interpréter la Charte » et, en outre, « il faut présumer, en général, que la Charte accorde une protection à tout le moins aussi grande que celle qu'offrent les dispositions similaires des instruments internationaux que le Canada a ratifiés en matière de droits de la personne. »[13]  

De plus, les tribunaux ont manifesté une tendance à utiliser le droit international sur les droits de la personne dans leur interprétation des lois canadiennes. Dans l'arrêt Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration),[14] la Cour suprême du Canada a statué à la majorité que, même si le Canada n'a pas incorporé au droit canadien la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant, le principe de considérer « l'intérêt supérieur de l'enfant » comme étant primordial dans la prise de décisions concernant les enfants doit être considéré lorsque le ministère exerce son pouvoir discrétionnaire humanitaire dans les cas d'expulsion.[15]  

Même si, à l'instar de nombre de nos témoins, nous nous réjouissons de l'importance croissante que les tribunaux semblent donner dans leurs décisions au droit international en matière de droits de la personne, nous sommes convaincus que le Canada ne peut pas s'en remettre au pouvoir judiciaire pour résoudre le problème soulevé par la mise en œuvre inadéquate de ses obligations en vertu de traités. Le respect inadéquat des engagements pris en matière de droits internationaux de la personne n'est pas, fondamentalement, un problème juridique ou constitutionnel. C'est un problème de volonté politique.

Il ne faut pas laisser subsister la dichotomie entre les engagements internationaux du Canada en matière de droits de la personne et le droit canadien. En outre, il n'est ni juste ni correct d'adopter une attitude de laisser-faire et d'espérer que les tribunaux corrigeront la façon incohérente dont le Canada applique les droits internationaux de la personne. Il faut trouver une nouvelle façon de faire. Sinon, le défaut constant des divers gouvernements canadiens de se pencher systématiquement sur les implications juridiques, au pays, des traités internationaux sur les droits de la personne que le Canada a ratifiés de son plein gré fera courir au pays le risque d'être accusé d'hypocrisie et pourra potentiellement saper son autorité morale comme grand défenseur des droits de la personne sur la scène internationale.[16]  

    iii) Application des droits internationaux de la personne et fédéralisme canadien  

Puisque le respect des normes internationales en matière de droits de la personne a principalement trait à la conduite des affaires internes des États plutôt qu'à leurs affaires extérieures, les États fédéraux comme le Canada doivent tenir compte des limites constitutionnelles de la compétence du gouvernement national dans la mise en œuvre de ces engagements. En vertu de la Constitution du Canada, les droits de la personne relèvent de la compétence de différents niveaux de gouvernement.  

Les gouvernements nationaux de certains États fédéraux, dont les États-Unis et l'Australie, possèdent l'autorité constitutionnelle de légiférer pour mettre en œuvre leurs obligations issues de traités, même lorsque l'objet de la loi serait normalement du ressort des gouvernements des États constitutifs. Toutefois, au Canada le gouvernement fédéral ne possède pas ce pouvoir.[17]  

Le gouverneur en conseil (en réalité, le cabinet fédéral) a le pouvoir légal de lier unilatéralement le Canada sur la scène internationale en signant et en ratifiant des accords internationaux. Par contre, le gouvernement fédéral ne peut pas mettre ces obligations en œuvre de façon unilatérale si les lois et politiques provinciales sont touchées.[18]  

Mais en droit international l’absence de compétence législative et les autres obstacles inhérents au droit national d’un État (notamment à sa constitution) ne peuvent pas être invoqués comme motive valable pour son défaut de respecter ses obligations en vertu d’un traité international.[19]  

Par conséquent, pour éviter de faire face au problème d’être responsable sur la scène internationale des obligations qu’il ne peut pas respecter, le gouvernement fédéral a adopté la pratique de consulter les provinces et territoires et d’obtenir leur consentement avant de signer et de ratifier des traités qui, en tout ou en partie, touchent aux compétences de ces derniers.  

En ce qui concerne les traités dans le domaine des droits de la personne, cette pratique a été officialisée en 1975 dans un accord conclu au cours d'une rencontre des ministres fédéraux et provinciaux responsables des droits de la personne. Les deux ordres de gouvernement se sont, en outre, entendus sur la participation des provinces à la préparation de rapports périodiques et de réponses aux observations des organismes de protection des droits de la personne créés par les traités quand il s’agit d’éléments de ces rapports qui visent les provinces. En plus, les provinces participent à la préparation de réponses aux plaintes ayant trait aux lois et programmes provinciaux. Afin de disposer d'un organisme de communication et de consultation entre les divers gouvernements en ce qui a trait aux obligations du Canada en matière de droits internationaux de la personne, les ministres présents à la conférence de 1975 ont également créé le Comité permanent de hauts fonctionnaires chargés des droits de la personne, composé de fonctionnaires représentant les ministères fédéraux concernés ainsi que chacun des gouvernements provinciaux et territoriaux.[20]  

La procédure établie en vertu de l'accord fédéral-provincial de 1975 souffre de certaines limitations importantes. Le Comité permanent de hauts fonctionnaires se rencontre à huis clos et n'a aucun pouvoir politique ni décisionnel. Depuis quelques treize ans les ministres responsables ne se sont pas rencontrés. Aucun des gouvernements n'est tenu de rendre compte de ses agissements en matière de droits de la personne et il n'y a ni examen ni observations publics. Comme la situation relative à la décision Waldman rendue récemment contre le Canada par le Comité des droits de l'homme des Nations Unies l'a amplement démontré, il n'existe certainement aucun mécanisme de pression pour forcer l'un ou l'autre des ordres de gouvernement à respecter ses engagements.[21] Même si, au cours des dernières années, des organisations non gouvernementales ont été consultées dans le cadre de la préparation des rapports déposés par le Canada devant les organismes de surveillance créés par les traités, il ne s'agit pas d'un processus transparent auquel le grand public a accès. Le Comité permanent n'offre aucune possibilité de débat public ni de suivi des observations, conclusions et recommandations de ces organismes. Il n'a d'ailleurs jamais été prévu que le Comité joue un tel rôle.  

Le vrai problème, toutefois, n'est pas que le Comité permanent de hauts fonctionnaires chargés des droits de la personne n'offre pas de tribune publique, au niveau national, où la mise en œuvre des engagements du Canada en matière de droits internationaux de la personne peut être examinée et évaluée. Ce n'est pas sa tâche. Le vrai problème pour le Canada est qu'aucune autre organisation ou institution du gouvernement ne remplit cette fonction.  


II) NÉCESSITÉ D’UN COMITÉ PARLEMENTAIRE DES DROITS DE LA PERSONNE  

Il semble exister au Canada un grave déficit démocratique en ce qui concerne les droits de la personne, en particulier eu égard à l’acceptation et à la mise en œuvre des engagements internationaux du Canada en matière de droits de la personne. Le Parlement a été considérablement écarté du circuit des droits de la personne. Et pourtant, ironiquement, le Parlement est justement l’institution qui pourrait jouer un rôle primordial en abordant les problèmes du système actuel et en faisant en sorte que cette partie de la machine gouvernementale soit mieux connue du public et assujettie à un examen plus approfondi.  

Le Parlement est le lieu où se tient le débat public et où le gouvernement rend des comptes; les représentants officiels canadiens y sont les acteurs. Les parlementaires émanent de tous les milieux et de toutes les tendances. Ensemble, ils sont des généralistes mais, individuellement, ils apportent leurs compétences particulières. Collectivement, ils souhaitent servir leur collectivité et leur pays avant toute cause ou tout intérêt particulier. Grâce à ces qualités, les parlementaires et le Parlement ont un rôle particulier qui leur permet de comparer et d’équilibrer des objectifs publics divergents et parfois même contradictoires.  

Toutefois, pour évaluer le rôle approprié du Parlement il ne suffit pas de se reporter aux talents et aux capacités institutionnels. Notre système de gouvernement parlementaire donne au Parlement le mandat de débattre et d’examiner les politiques gouvernementales et d’évaluer les objectifs stratégiques concurrents. Malheureusement, il arrive trop souvent que ce mandat ne soit pas accompli entièrement.  

De toute évidence, ni le Comité ni le Parlement dans son ensemble ne sauraient être tenus intégralement responsables du droit et de la politique du Canada en matière de droits de la personne. D’autres entités ont manifestement un rôle à jouer et des responsabilités à assumer en cette matière. Nous ne voulons pas prendre à notre charge les responsabilités d’autres institutions ou organismes existants. Cependant, nous souhaitons que le Parlement joue le rôle qui lui revient dans le domaine des droits de la personne au Canada.  

Le gouvernement et, en particulier, les ministères fédéraux de la Justice et des Affaires étrangères doivent continuer à jouer un rôle clé dans l’élaboration des politiques et des lois canadiennes en matière de droits de la personne. Ils ont la responsabilité, les moyens et l’organisation voulus pour accomplir ce travail. Cependant, le pouvoir exécutif ne peut accomplir le travail seul. Il ne s’agit pas d’une question de compétence ou d’engagement politique à l’égard des droits de la personne. Il s’agit plutôt d’atteindre un équilibre institutionnel et une division appropriée des tâches dans une démocratie parlementaire représentative.  

Les tribunaux ont également un rôle à jouer en ce qui concerne l’interprétation et l’élaboration des droits de la personne au Canada, notamment pour l’application de la Charte canadienne des droits et libertés. Récemment, dans des jugements comme l’arrêt Baker de la Cour suprême du Canada, les tribunaux ont manifesté une volonté accrue d’interpréter les lois canadiennes à la lumière des obligations internationales du Canada en matière de droits de la personne. L’on nous a indiqué qu’il s’agit d’une tendance qui se continuera.[22] Nous estimons qu’il s’agit d’un heureux développement.  

Il reste que cette démarche positive adoptée par les tribunaux ne peut pas, et en fait ne doit pas, soulager le Parlement de l’obligation qui lui incombe de participer davantage à l’examen des questions reliées aux droits de la personne au Canada. Au contraire, le simple fait que les tribunaux consultent de plus en plus les traités internationaux sur les droits de la personne qui n’ont pas encore été mis en œuvre (et à la signature desquels le Parlement, selon la formule en vigueur, n’a pas participé) pour interpréter le droit canadien met en évidence la nécessité d’un rôle accru du Parlement dans ce domaine.

Il est certes important d’avoir des balises judiciaires, mais il est toujours préférable que les droits de la personne soient pris en compte au début du processus, dès l’élaboration et l’adoption des lois et des politiques. Il est préférable que les lois et politiques publiques respectent les droits de la personne d’emblée, sans devoir attendre que le titulaire d’un droit prenne la peine de chercher réparation ou, pis encore, renonce à affirmer son droit, pour une question de commodité ou par ignorance de ce droit.  

De plus, un certain nombre de droits internationaux de la personne (en particulier dans les domaines économique, social et culturel) comportent une importante part de contenu politique que les parlementaires sont mieux placés que les juges à apprécier et à mettre en pratique.[23]  

Enfin, les groupes de la société civile jouent un rôle extrêmement utile en faisant pression sur les gouvernements et en critiquant les lois et les politiques, en plus d’attirer l’attention du public sur des problèmes liés aux droits de la personne, au Canada et ailleurs dans le monde. Au cours de notre étude nous avons entendu dire que les organisations non gouvernementales qui travaillent dans le domaine des droits de la personne jouent souvent un rôle inestimable en fournissant de l’information et des points de vue différents quant à des situations nationales aux organismes chargés des traités sur les droits de la personne, auxquels les gouvernements nationaux comme celui du Canada font rapport. L’on nous a dit que les ministères fédéraux intéressés cherchent de plus en plus à obtenir l’avis de groupes de la société civile en vue d’élaborer des positions stratégiques et en préparation d’une participation à des réunions internationales. À notre avis il s’agit d’un pas dans la bonne direction. Nous avons hâte de fournir à ces groupes, par l’entremise de ce Comité, une autre tribune pour ces activités. Toutefois, il faut se dire que ces groupes ne sauraient remplacer le Parlement ni jouer son rôle.  

Les groupes de la société civile n’ont pas le mandat constitutionnel du Parlement de représenter la population. Ils n’ont pas non plus la responsabilité du Parlement, qui découle de sa fonction législative, de prendre des décisions difficiles qui nécessitent de concilier différents objectifs publics stratégiques. Par comparaison, le Parlement cherche continuellement à concilier différentes préoccupations et divers objectifs politiques et sociaux, en fonction d’une conception large de l’intérêt public.  

Cela étant, c’est justement parce que le Parlement est un organisme généraliste, qui doit répondre à une multitude d’impératifs stratégiques, que tout accroissement de son rôle dans le domaine des droits de la personne doit être structuré de manière à garantir que les droits de la personne ne soient pas noyés dans la masse de considérations mais fassent l’objet d’une attention soutenue. C’est pour cette raison que le Comité sénatorial a été constitué et que d’autres pays ont également souscrit au principe d’un comité parlementaire voué aux droits de la personne. Le premier rapport déposé lors du symposium de l’Union interparlementaire de 1993 sur le rôle des parlements dans le domaine des droits de la personne mentionnait que « [l]es parlements devraient être dotés d’un mécanisme spécifique permettant de centraliser la promotion des droits de l’homme, y compris ceux des minorités. »[24] Un certain nombre d’autres pays, dont l’Australie et plus récemment le Royaume-Uni, se sont déjà dotés de comités parlementaires chargés exclusivement des questions touchant aux droits de la personne.  

La constitution d’un comité parlementaire des droits de la personne peut conférer un sentiment d’urgence aux dossiers et encourager de façon tangible les intervenants publics et privés qui essaient de donner à la question plus de visibilité dans les politiques gouvernementales.  

De plus, il convient tout particulièrement que ce comité parlementaire des droits de la personne soit un comité sénatorial. Le Sénat est également un organisme qui est davantage chargé de représenter les régions et les minorités que la Chambre des communes, comme l’ont fait remarquer un certain nombre de témoins. Le Sénat présente, en outre, une composition plus stable et, en raison du fait qu’ils sont nommés, les sénateurs sont plus isolés des pressions de l’aile exécutive du gouvernement, des médias et des opinions publiques changeantes. Tous ces facteurs font du Sénat une institution particulièrement propice à l’examen et à la prise en compte des droits de la personne.  

Au cours de notre étude initiale, nous avons eu le plaisir de constater l’intérêt, voire même l’enthousiasme, engendré par la création de ce comité. Pour ce qui est des droits de la personne, les témoins ont pratiquement parlé d’une seule voix en disant qu’il manquait un terme du côté parlementaire de l’équation canadienne.  

Comme en attestent les dernières parties du présent rapport, les témoins qui ont comparu devant le Comité ne manquaient pas d’idées pour des recommandations, des domaines à étudier et des rôles que le Comité pourrait jouer. À ce propos, voici quelques fonctions dont, de l’avis de certains témoins, le Comité pourrait s’acquitter :  

·                    examiner et analyser les rapports du Canada aux organismes chargés des traités ainsi que les observations faites et les décisions prises par ces organismes dans le cas de plaintes à l’endroit du Canada;

·                    servir de vecteur pour la contribution du Parlement et de la société civile à l’élaboration des politiques étrangères du Canada en matière de droits de la personne, surtout en ce qui concerne les organismes chargés de traités comme la Commission des droits de l’homme des Nations Unies;

·                    examiner les traités sur les droits de la personne auxquels le Canada n’a pas encore donné suite et tenter d’identifier les préoccupation et d’aplanir les obstacles et, au besoin, essayer de faire avancer le processus;

·                    analyser les projets de lois pour assurer leur conformité aux instruments canadiens et internationaux en matière de droits de la personne;

·                    offrir une tribune pour la discussion des questions fédérales/provinciales/territoriales touchant à la tenue des engagements internationaux du Canada en matière de droits de la personne.  

Toutes ces fonctions ne sont pas actuellement accomplies de manière consistante, du moins pas dans le contexte d’une tribune parlementaire publique. Le Comité serait très occupé, même si le Sénat ne le chargeait que d’une partie de ces fonctions. Apparemment, nous venons de découvrir une importante demande refoulée de l’élargissement du rôle du Parlement dans cet important secteur de la politique publique. Quoi qu’il en soit, de toute évidence le Comité est idéalement placé pour contribuer très utilement aux mécanismes gouvernementaux touchant aux droits de la personne.  

III) QUESTIONS À EXAMINER PLUS À FOND 

Nous avons entendu de grands spécialistes des droits de la personne et de l’appareil gouvernemental, et un certain nombre de questions ont constamment refait surface dans leurs témoignages. Nous avons ciblé des points qui nous semblent mériter l’attention du Comité et nous avons l’intention de demander l’autorisation du Sénat de les approfondir.

 

A. Question à approfondir : Le Canada et les organismes chargés de traités sur les droits de la personne  

En vertu des six principaux instruments internationaux sur les droits de la personne, le Canada est tenu de produire des rapports périodiques faisant état de son rendement et de ses progrès en ce qui concerne les droits énoncés dans les conventions. Actuellement, ces rapports sont préparés entièrement par des cadres supérieurs des ministères fédéraux, provinciaux et territoriaux compétents. À l’échelon fédéral, à tout le moins, on a bien fait quelques efforts afin de recevoir les commentaires d’organisations non gouvernementales intéressées. Il reste que ces rapports ne sont pas examinés en public avant d’être transmis à l’organisme international compétent.  

Un certain nombre de témoins ont estimé qu’il faudrait rendre plus transparent le processus canadien de production de rapports aux organismes chargés de traités internationaux en matière de droits de la personne. Certains ont même pensé qu’un comité parlementaire comme le nôtre fournirait un cadre qui permettrait aux parlementaires et aux citoyens ordinaires d’exprimer leurs idées. En plus, un tel comité favoriserait l’éducation, en ce qui concerne les rapports du Canada sur son comportement en matière de droits de la personne.[25]  

Le Comité pourrait analyser les projets de rapports canadiens avant qu’ils soient transmis aux organismes chargés des traités. Il pourrait également examiner les observations de ces organismes au sujet des rapports canadiens ainsi que leurs décisions relatives à d’éventuelles plaintes à l’endroit du Canada et les réactions et mesures de suivi gouvernementales. Dans le cadre de tels examens, le Comité pourrait entendre les opinions de groupes intéressés de la société civile et d’experts indépendants ainsi que de représentants des ministères fédéraux, provinciaux et territoriaux compétents.

 

            B. Question à approfondir : Le Parlement et le processus de conclusion de traités 

Des premiers temps de l’indépendance du Canada sur la scène internationale dans les années 1920, jusqu’à la fin des années 1950 environ, la pratique générale était que le Parlement débattait des projets de traités internationaux et les approuvait, le cas échéant, avant que le gouvernement ne les ratifie. Depuis cette époque le rôle du Parlement dans le processus des traités a considérablement amenuisé. Non seulement s’est-il passé des décennies depuis qu’un projet de traité a été soumis à l’approbation du Parlement avant la ratification, mais même la simple pratique de déposer les traités au Parlement après la ratification a été abandonnée ces dernières années.[26] Comme le doyen Peter Leuprecht l’a fait remarquer au Comité, il est frappant de constater que la quantité d’instruments internationaux augmente et que, parallèlement, le Parlement participe de moins en moins à la conclusion de traités.[27]  

De plus, dans la plupart des autres démocraties occidentales, les parlements nationaux jouent un rôle beaucoup plus important, non seulement dans l’approbation mais aussi dans l’analyse des accords internationaux. Plusieurs témoins ont cité en exemple le Comité mixte des traités de l’Australie, établi en 1996, et qui mériterait, selon eux, d’être examiné. En vertu du système australien, les traités ne doivent pas être approuvés par le Parlement, mais ils doivent préalablement être analysés par un comité mixte parlementaire, avant que le gouvernement ne s’engage dans des obligations. De plus, le pouvoir exécutif est tenu de préparer et de déposer une analyse de l’intérêt national qui expose les conséquences des obligations que contractera le pays en signant le traité, notamment la nécessité d’adopter des mesures législatives.  

Plusieurs des experts qui ont comparu devant le Comité ont réclamé instamment que le Parlement participe davantage à l’analyse et à l’approbation des engagements pris par le Canada dans le cadre de traités. [28]  

Ce renforcement du rôle parlementaire dans le processus n’aurait pas pour but d’amoindrir le pouvoir et la prérogative de l’exécutif pour ce qui est de signer et de ratifier des traités. Ce serait plutôt une façon de garantir que les parlementaires puissent, en temps opportun, exprimer leurs opinions sur la teneur des traités. Les parlementaires seraient également en mesure de remettre en question, avant ratification, la pertinence des plans gouvernementaux concernant la mise en œuvre législative.  

Un tel mécanisme pourrait être particulièrement utile pour les instruments internationaux relatifs aux droits de la personne. Il pourrait fournir l’occasion et le cadre voulus pour évaluer la pertinence des projets du gouvernement visant la mise en pratique intérieure du traité, avant que le Canada ne le ratifie.  

En outre, la tendance apparente du pouvoir judiciaire à utiliser de plus en plus des traités qui ne sont pas mis en œuvre pour interpréter la loi, et dont un exemple nous est donné par la décision récente de la Cour suprême dans l’arrêt Baker, milite fortement en faveur d’un retour du Parlement dans le dossier des traités.

 

C. Question à approfondir : Mise en œuvre législative des instruments internationaux en matière de droits de la personne  

Un certain nombre de témoins nous ont clairement indiqué que le gouvernement du Canada devait mieux traduire dans ses lois nationales ses engagements internationaux à l’égard des droits de la personne. Dans bien des cas, le gouvernement n’a pas effectué cette transposition avec suffisamment de rigueur et des lacunes sont apparues, soit dans la portée ou la substance des droits protégés ou encore dans les recours mis en place. Il s’ensuit que les Canadiens sont parfois privés de certains de leurs droits et que la réputation internationale du pays sur le plan des droits de la personne risque d’en souffrir inutilement.  

Il est possible, comme certains l’ont indiqué, que l’intégration législative en bloc des instruments internationaux en matière de droits de la personne causerait des problèmes, en partie à cause de l’existence de normes internationales contradictoires.[29] Les compétences provinciales constitueraient un autre obstacle. Néanmoins, il semble évident que nous pouvons en faire davantage. Comme l’a dit un témoin, le Canada doit trouver un meilleur mécanisme pour intégrer ses obligations internationales à ses lois.[30]  

Même si l’on utilisait davantage l’incorporation des traités dans les mesures législatives, il demeurerait quand même primordial d’examiner les lois existantes et subséquentes afin de vérifier leur conformité aux obligations contractées par traité, un travail auquel le Parlement pourrait et devrait participer.

 

D. Question à approfondir : Vérifier la conformité des lois proposées aux principes des droits de la personne 

Lorsque le Canada projette de ratifier un traité, qu’il porte sur les droits de la personne ou sur un autre sujet, on procède à l’examen des lois existantes afin d’établir la présence, le cas échéant, d’incompatibilités entre la loi canadienne et les obligations qui découleront du traité. Si l’examen révèle des éléments incompatibles, le gouvernement doit faire un choix, s’il souhaite encore ratifier le traité : soit qu’il modifie les dispositions incompatibles, soit qu’il annexe des clauses de réserve ou un protocole d’entente à sa ratification. Cependant, après la ratification, le Canada n’a pas de système de vérification continue des mesures législatives proposées pour assurer leur compatibilité avec les obligations découlant de traités.  

Bien qu’il existe certains processus visant à examiner les projets de loi canadiens en vue de vérifier leur conformité aux droits de la personne, il ne s’agit pas de processus exhaustifs ni systématiques. En premier lieu, ces examens ne tiennent habituellement pas compte des obligations internationales du Canada en matière de droits de la personne.[31] De plus, outre l’examen des règlements par le Comité mixte permanent d’examen de la réglementation et l’examen des projets de loi privés de la Chambre des communes par le Comité des procédures et des affaires de la Chambre, il n’est explicitement prévu nulle part que le Parlement participe au processus d’examen.  

Il arrive que la Commission canadienne des droits de la personne, dans le cadre de son mandat, examine certains projets de loi. Et nous avons appris que, ce faisant, elle avait récemment commencé à incorporer dans ses analyses le droit international en matière de droits de la personne.[32] Toutefois, en raison de la priorité que la Commission doit donner au traitement des plaintes, elle est obligée d’être quelque peu sélective dans ses interventions à ce niveau. En outre, sa façon de procéder en ce moment est de renvoyer au ministre de la Justice tout problème de droits de la personne présent dans la législation. Si la Commission n’est pas satisfaite de la réponse du ministre et que la question lui tient suffisamment à cœur, elle demandera à comparaître devant les comités parlementaires qui examinent le projet législatif en cause. Il lui arrivera aussi de rendre ses inquiétudes publiques au moyen de communiqués et d’un message sur son site Web.  

Il pourrait être souhaitable que le ministère de la Justice, peut-être avec l’appui du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, étende sa certification de la conformité des avant-projets de loi et des projets de règlement avec la Charte canadienne des droits et libertés et la Déclaration canadienne des droits, à tout le moins pour contrôler leur compatibilité avec les instruments internationaux sur les droits de la personne que le Canada a déjà ratifiés.  

Le Parlement, peut-être par l’entremise du Comité, devrait également être impliqué de façon plus formelle dans la vérification systématique des mesures législatives proposées pour assurer leur comptabilité avec les mesures nationales et internationales dans le domaine des droits de la personne. D’autres démocraties parlementaires, dont l’Australie et le Royaume-Uni, ont établi des comités parlementaires à cet effet. Un certain nombre des témoins ont appuyé l’adoption d’un tel système par le Canada.[33]  

En assumant ce rôle, le Parlement devrait établir une solide relation avec la Commission canadienne des droits de la personne, laquelle, moyennant les ressources nécessaires à l’exécution de ce volet de son mandat, pourrait représenter le principal intervenant du Parlement lorsqu’il s’agit de revoir la législation dans l’optique des droits de la personne. Et le Comité devrait jouer un rôle de premier plan dans l’établissement et la coordination de cette relation.

 

E. Question à approfondir : Les droits internationaux de la personne et le fédéralisme canadien  

Par l’intermédiaire du gouvernement fédéral, le Canada parle d’une seule voix, sur la scène internationale. Toutefois, en vertu de la Constitution, il incombe aux gouvernements des provinces de mettre en œuvre les obligations découlant de traités internationaux qui touchent à leurs champs de compétence. Par conséquent, le gouvernement fédéral se trouve en difficulté lorsque des lois ou des politiques provinciales menacent de placer le Canada en dérogation de ses engagements découlant de traités. Sur la scène internationale, de telles questions de compétence ne soustraient pas un pays à ses obligations.  

La décision prise récemment par le Comité des droits de l’homme des Nations Unies dans l’affaire de la plainte Waldman illustre bien le problème. Les lois et politiques de l’Ontario qui prévoient le financement public des écoles catholiques romaines mais pas le financement d’écoles d’autres confessions ont été contestées avec succès en vertu du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Il a été conclu que le Canada, en tant qu’État partie responsable, enfreignait le Pacte. Mais le gouvernement fédéral n’a pu qu’exhorter le gouvernement provincial à se conformer. Le gouvernement de l’Ontario a refusé. Tel qu’indiqué au Comité, une telle situation est inadmissible et nuit à la réputation internationale du Canada en matière de droits de la personne.[34] Comme l’a fait remarquer la professeure Bayefsky, « si une province peut prétendre qu’elle n’est pas tenue à ces obligations internationales et que le gouvernement fédéral peut dire qu’il n’est pas tenu de faire autre chose que de l’encourager à s’y plier, quel sens a la ratification? »[35]  

Il devrait y avoir une façon de surmonter avec transparence les obstacles constitutionnels au respect des obligations internationales du Canada en matière de droits de la personne.  

Soulignant le mandat spécial du Sénat de représenter les points de vue et les intérêts des régions, l’on a aussi suggéré qu’un comité sénatorial comme le nôtre puisse faire œuvre utile en fournissant une tribune pour la discussion des inquiétudes régionales découlant des obligations du Canada en matière de droits de la personne.[36] Le Comité pourrait déterminer dans quelle mesure notre forme de fédéralisme aide ou nuit au respect de ces obligations internationales. Le Comité pourrait aussi, au moyen de cette étude, formuler des propositions et donner des avis sur les procédures susceptibles d’améliorer la conformité.

F. Question à approfondir : Traités sur les droits de la personne qui n’ont pas encore été signés ou ratifiés par le Canada 

Nous avons déjà discuté de l’importance d’accroître le rôle joué par le Parlement dans l’analyse des engagements que contracterait le Canada en signant de nouveaux traités, et notamment des instruments internationaux dans le domaine des droits de la personne. Comme un certain nombre de témoins nous l’ont fait remarquer, des comités parlementaires comme celui-ci pourrait certainement jouer un rôle connexe à l’égard des instruments internationaux que le Canada n’a pas encore signés ou ratifiés. Le professeur William Schabas a dit ceci : « Le Parlement n’a pas besoin de rester les bras croisés en attendant que le ministère des Affaires étrangères ou d’autres ministères décident qu’il convient ou pas de ratifier un traité. Le Parlement pourrait effectivement faire avancer le dossier. »[37]  

Le Comité pourrait analyser la situation des traités auxquels le Canada n’a pas encore adhéré et encourager les progrès en contribuant à leur donner plus de visibilité. Il pourrait aussi servir de tribune officielle et publique pour l’expression des préoccupations. La population doit avoir un endroit où débattre des avantages et des coûts politiques de tels accords. 

Au cours de son étude, le Comité a reçu une publication de l’UNESCO intitulée Droits de l’homme : Les principaux instruments internationaux, État au 31 mai 2001, qui énumère les instruments non encore signés ou ratifiés par le Canada. Des témoins ont, de leur côté, porté à l’attention du Comité les traités auxquels la signature du Canada manquait toujours.  

En plus de la Convention américaine des droits de l’homme (qui est examinée séparément ci-dessous), le Protocole facultatif de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes est un autre instrument international sur les droits de la personne que le Canada n’a pas signé. Le Canada est partie prenante à la Convention mais n’a pas encore ratifié le Protocole facultatif, qui permettrait à l’organisme chargé de surveiller la Convention de recevoir et d’instruire des plaintes portées contre le Canada. L’on a encouragé le Comité à faire en sorte que la signature et la ratification du Protocole facultatif soient placées plus haut sur l’échelle des priorités.[38] 

Un témoin a aussi fait remarquer que le Canada n’a pas souscrit à un autre mécanisme international de traitement des plaintes en matière de droits de la personne; il s’agit de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, que le Canada a ratifiée en 1970.[39]

 

G.    Question à approfondir : Participation du Canada à la Convention américaine relative aux droits de l’homme  

La Convention américaine relative aux droits de l’homme est un excellent exemple d’un instrument international sur les droits de la personne qui n’a pas été signé par le Canada et à l’égard duquel le Comité pourrait faire œuvre utile, notamment en facilitant l’amorce d’un dialogue public ouvert sur les enjeux relatifs à l’adhésion possible du Canada à la Convention.  

Cette Convention est le principal instrument de l’Organisation des États américains en matière de droits de la personne. Le Canada est membre de l’OEA depuis maintenant une décennie, mais il n’a toujours pas signé la Convention. Les témoins ont exhorté le Comité à encourager le gouvernement à ratifier ce traité important. Ils ont fait valoir que l’un des principaux arguments militant en faveur de la ratification n’est pas tant que la Convention offre des garanties particulières en matière de droits de la personne, mais qu’elle permettra au Canada de participer plus intimement au réseau des droits de la personne de l’OEA.[40]  

Toutefois, des inquiétudes ont été soulevées au Canada au sujet de l’article 4 de la Convention. Certains avancent qu’une clause de réserve ou un protocole d’entente soigneusement libellé pourrait apaiser les objections.[41] Toutefois, d’autres semblent réticents à donner l’impression de contribuer à la prolifération des clauses de réserve dans les traités sur les droits de la personne. Quoi qu’il en soit, le dossier n’a pas avancé et les préoccupations officielles ne sont pas discutées en public. Il n’y a pas eu, non plus de surveillance ou d’enquête de la part des parlementaires.  

Il faudra examiner ces questions et d’autres en public, afin d’engager la population, d’entendre les opinions de différents groupes et de faciliter la prise de décisions à l’échelon politique.

 

H. Question à approfondir : Le droit à la vie privée  

Le respect de la vie privée, dans le contexte des droits de la personne, a été soumis ces dernières années à des pressions grandissantes, étant donné le recours sans cesse accru à la technologie de l’information. Maintenant, vu l’importance accordée dans le monde entier à la sécurité et à la lutte antiterroriste, le droit à la vie privée sera remis en question peut-être plus qu’il ne l’a jamais été.  

Le problème se posera d’autant plus ici, au Canada, du fait que, de l’opinion de certains, le droit à la vie privée est déjà quelque peu laissé sans protection dans nos lois sur les droits de la personne. Le respect de la vie privée n’est pas garanti comme tel dans la Charte canadienne des droits et libertés et, ainsi que l’ont dit des témoins, la vie privée ne relève généralement pas de nos commissions des droits de la personne.[42] S’il existe des régimes législatifs visant à protéger la vie privée, ils se limitent habituellement à la protection des renseignements personnels fournis aux gouvernements. Le professeur Schabas a fait remarquer que le droit au respect de la vie privée est un domaine où les garanties offertes par le Canada accusent un certain retard par rapport aux normes internationales.[43]  

L’article 17 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques stipule que « [n]ul ne sera l'objet d'immixtions arbitraires ou illégales dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d'atteintes illégales à son honneur et à sa réputation ». Aucune protection explicite de la sorte ne paraît dans les lois canadiennes sur les droits de la personne.  

Les valeurs étayant le droit à la vie privée transcendent les questions de protection des données personnelles aux mains du gouvernement ou de conformité avec les procédures établies en vue du rassemblement d’éléments de preuve pour des enquêtes criminelles ou le renseignement de sécurité, malgré toute l’importance de ces aspects. La façon dont on pourra réformer les lois et les politiques canadiennes pour rehausser le statut et la protection de la vie privée en tant que droit de la personne constituera un élément d’étude opportun et primordial pour le Comité.


IV) RECOMMANDATIONS IMMÉDIATES  

A. Représentation du Canada à la Commission des droits de l’homme de l’ONU  

La Commission des droits de l’homme de l’ONU, qui est située à Genève, est le principal mécanisme de défense des droits de la personne de l’ONU. Comme Philippe LeBlanc l’a fait remarquer au Comité, cette Commission est la plus importante tribune internationale pour lutter contre les violations des droits de la personne par les États.[44]   

La Commission est composée de 53 États membres, qui sont élus par région. Aux fins de représentation à la Commission, le Canada est dans le Groupe des pays d’Europe occidentale et autres États. L’Europe occidentale, le Canada, les États-Unis, le Japon, l’Australie et la Nouvelle-Zélande font partie de ce groupe. Dans le passé, c’est ce groupe de pays qui a initié et a promu les actions de la Commission dans le domaine des droits de la personne.  

Cette année, pour la première fois depuis la création de la Commission, les États-Unis ne comptent pas de membre élu au sein de la Commission. Pendant la prochaine session de 2002, le Canada sera le seul membre non européen à la Commission faisant partie du Groupe des pays d’Europe occidentale et autres États. Par conséquent, il semble probable que le Canada aura un rôle clé au sein de la Commission au cours de l’année qui s’en vient. À la suite des événements du 11 septembre et de ce qui s’en est suivi, le rôle du Canada à la Commission est devenu encore plus crucial, en raison de l’absence des États-Unis et de l’examen probable par la Commission de la question des droits de la personne dans le contexte des mesures nationales et internationales prises pour lutter contre le terrorisme.[45]  

Depuis quelques années, même si le ministre des Affaires étrangères a été le représentant officiel du Canada, les chefs de délégation ont été des fonctionnaires sans le rang d’ambassadeur. Comme Philippe LeBlanc l’a vivement souligné,[46] il sera particulièrement important, à la lumière des facteurs énoncés plus haut, que la délégation du Canada à la prochaine session de la Commission soit dirigée par un représentant du rang d’ambassadeur.  

Recommandation

Le Comité recommande que, compte tenu de l’importance particulière du rôle du Canada à la prochaine séance de 2002 de la Commission des droits de l’homme de l’ONU, le gouvernement du Canada :

1.                  nomme une personne du rang d’ambassadeur pour le représenter à la Commission; et

2.                  veille à ce que la délégation canadienne compte des parlementaires actifs et informés de tous les partis (y compris les indépendants) et des deux Chambres, ayant une expérience et des connaissances du domaine des droits de la personne.

 

B. Rapports sur les droits de la personne en souffrance au Canada 

Ainsi que l’ont reconnu les hauts fonctionnaires compétents dans leurs témoignages, le Canada est en retard dans la présentation de rapports périodiques aux divers organismes de suivi des traités internationaux sur les droits de la personne.[47] La raison invoquée tient à l’inévitable lourdeur de la coordination des rapports venant des diverses administrations fédérale, provinciales et territoriales. Nous avons appris que les différents ordres gouvernementaux canadiens avaient l’intention, par l’intermédiaire de leurs représentants au sein du Comité permanent de hauts fonctionnaires chargés des droits de la personne, de présenter aux organismes chargés des traités tous les rapports en souffrance d’ici la fin de l’exercice. Nous tenons à souligner l’importance de réaliser cet objectif pour que le Canada soit le plus vite possible à jour dans le respect de ses obligations de compte rendu.

 

Recommandation

Le Comité recommande que, dans le cadre actuel des processus de rapport, le gouvernement du Canada, en collaboration avec les gouvernements provinciaux et les territoires, prenne les mesures nécessaires pour remettre, d’ici le 31 mars 2002 aux divers organismes chargés des traités internationaux sur les droits de la personne, tous les rapports en souffrance du Canada.

 

C. Équilibre entre droits de la personne et sécurité 

Dans la foulée des événements qui ont suivi le 11 septembre, davantage de ressources financières et juridiques sont consacrées à la lutte mondiale contre le terrorisme. C’est précisément dans de tels moments que les défenseurs des droits de la personne doivent être les plus vigilants. Mais qui évalue l’impact global et cumulatif de ces nouvelles mesures relatives à la sécurité et à l’antiterrorisme sur les droits de la personne? Lorsqu’il y a augmentation des investissements en matière de sécurité, il faut un degré égal d’engagement à l’égard de la sauvegarde des droits de la personne. Il ne s’agit toutefois pas de choisir entre la sécurité et les droits de la personne, mais de trouver le bon équilibre entre les deux. L’expertise et l’indépendance de la Commission canadienne des droits de la personne en font, moyennant les ressources appropriées, un organisme apte à entreprendre une étude sérieuse pour savoir si l’équilibre est atteint entre les mesures nationales de sécurité et de lutte antiterroriste, d’une part, et les droits de la personne, d’autre part. Le Canada a l’occasion, en menant une telle analyse, de montrer la voie à suivre aux autres pays.

 

Recommandation

Le Comité recommande que le gouvernement du Canada donne à la Commission canadienne des droits de la personne, avec les ressources suffisantes, la tâche de mener une analyse de l’impact sur les droits de la personne des nouvelles mesures de sécurité et de lutte antiterroriste afin de vérifier si l’équilibre est atteint entre les mesures nationales de sécurité et de lutte antiterroriste, d’une part, et les droits de la personne, d’autre part.

 

D. Discrimination fondée sur la condition sociale 

Lorsqu’il a témoigné devant le Comité, M. Harinder Mahil, président intérimaire de la Commission des droits de la personne de la Colombie-Britannique, a repris la recommandation de sa commission et de l’Association canadienne des Commissions et Conseils des droits de la personne (ACCCDP), soit que les codes canadiens sur les droits de la personne aux paliers fédéral, provincial et territorial soient modifiés de façon à inclure la condition sociale comme motif de discrimination prohibé.[48] Pareil changement a également été recommandé par le Comité de révision de la Loi canadienne sur les droits de la personne dans son rapport de juin 2000, ainsi que par le Comité des droits économiques, sociaux et culturels dans ses observations finales de décembre 1998 sur le troisième rapport du Canada dans le cadre du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. On admet depuis longtemps la pauvreté comme facteur contributif de la discrimination dont sont victimes divers groupes sociaux défavorisés.[49]  

Le Canada pourrait être un précurseur en examinant la pauvreté du point de vue des droits de la personne. Au cours de la précédente législature, le Sénat du Canada a adopté un projet de loi d’intérêt public émanent d’un sénateur, le projet de loi S‑11, qui aurait amendé la Loi canadienne sur les droits de la personne pour interdire la discrimination fondée sur la condition sociale. Malheureusement, la mesure a été rejetée à la Chambre des communes. Nous sommes d’avis que le gouvernement devrait revoir cette importante question et la remettre à l’ordre du jour de l’actuelle législature en vue d’une intervention législative.

 

Recommandation

Le Comité recommande que le gouvernement du Canada rédige et dépose au Parlement des modifications à la Loi canadienne sur les droits de la personne de façon à ajouter la condition sociale comme motif de discrimination prohibé.

 

E.  Les Commissions des droits de la personne au Canada 

Le Comité a entendu les témoignages des hauts dirigeants des commissions canadienne et provinciales des droits de la personne[50] et en a tiré quelques idées d’amélioration pour les lois canadiennes sur les droits de la personne. Nous avons déjà parlé de la discrimination fondée sur la condition sociale.  

Parmi les autres aspects mis au jour par les témoignages, notons :  

·                    Invoquer expressément les grands instruments internationaux dans la Loi canadienne sur les droits de la personne, ainsi que dans les codes provinciaux et territoriaux en la matière. Il faut clarifier le statut et la pertinence du droit international à l’intention de nos commissions et de nos tribunaux chargés d’appliquer les dispositions législatives sur les droits de la personne. La relation historique est évidente et la loi devrait refléter cette réalité. Qui plus est, ce genre de références législatives au droit international en matière de droits de la personne contribuerait à assurer que nos commissions respectent les normes internationales minimales applicables à de tels organismes selon les Principes de Paris (ONU 1991). Entre autres rôles, les Principes de Paris chargent les commissions internes des droits de la personne de « [p]romouvoir et assurer l’harmonisation de la législation, des règlements et des pratiques nationaux [c’est‑à‑dire fédéraux, provinciaux et territoriaux] avec les instruments internationaux relatifs aux Droits de l’homme, auxquels l’État est partie ».

·                    Voir à ce que les mandats d’éducation et de promotion confiés aux commissions des droits de la personne au Canada reçoive l’attention et les ressources voulues. Les rôles de promotion et d’éducation des commissions des droits de la personne ne bénéficient pas de ressources financières suffisantes. Les activités de promotion et d’éducation peuvent faire beaucoup pour contrer la discrimination et le non‑respect des droits de la personne, mais les commissions sont obligées de donner priorité au traitement de plaintes précises, ce qui absorbe presque toutes leurs ressources.

·                    Affecter suffisamment de ressources au rôle des commissions des droits de la personne concernant l’examen des lois et des politiques proposées. Au Canada, les commissions des droits de la personne ont le mandat d’effectuer de tels examens. Lorsqu’elles réussissent à mener ce genre d’études et à publier leurs conclusions, cet aspect de leur travail peut devenir inestimable pour les parlementaires. Mais, encore une fois, étant donné l’importance accordée à leur fonction de règlement des plaintes, les commissions doivent, en l’absence d’un renvoi de la part du gouvernement, être sélectives dans leurs interventions concernant les lois et les politiques proposées.

·                    Rendre les commissions des droits de la personne plus directement comptables au Parlement ou à une assemblée législative, plutôt que de passer par un ministre. C’est actuellement la façon de procéder du vérificateur général et du directeur général des élections fédéraux. Des mesures semblables pour les commissions des droits de la personne contribueraient à souligner leur indépendance par rapport à l’organe exécutif.

·                    Promouvoir l’uniformisation de la législation sur les droits de la personne dans les administrations fédérale, provinciales et territoriales.

 

Ces questions ayant été soulevées dans le rapport rédigé en 2000 par le Comité de révision de la Loi canadienne sur les droits de la personne, le gouvernement pourrait en traiter dans le cadre de sa réponse audit rapport.

 

Recommandation

Le Comité recommande que le gouvernement du Canada réponde au rapport de 2000 du Comité de révision de la Loi canadienne sur les droits de la personne au cours de la présente Session parlementaire.  Dans sa réponse, le gouvernement devrait traiter de ce qui suit :

 

1.                  L’ajout de références précises aux grands instruments internationaux sur les droits de la personne dans la Loi canadienne sur les droits de la personne.

2.                  La nécessité de consacrer plus de ressources aux mandats de la Commission canadienne des droits de la personne concernant la promotion et l’éducation, ainsi que l’examen des lois et des politiques proposées.

 

Le Comité recommande en outre que le gouvernement du Canada, peut-être par l’intermédiaire de la Commission du droit du Canada en consultation avec l’ACCCDP, prenne des mesures pour élaborer un code modèle en matière de droits de la personne à soumettre à l’étude de toutes les administrations canadiennes.

 

F.  Site Web sur les droits internationaux de la personne  

La professeure Anne Bayefsky a fait remarquer au Comité que l’ensemble de la démarche des rapports périodiques que présente le Canada aux organismes créés par traité pour la défense des droits internationaux de la personne ne retient pas suffisamment l’attention des médias. Le ministère du Patrimoine canadien, qui participe à l’établissement des rapports périodiques du Canada, publie dans son site Web les rapports du Canada et les observations des organismes chargés des traités. Toutefois, à l'exception de cette démarche et d’autres initiatives sélectives, l’éducation et l’information destinées au public sur les obligations et les mécanismes d’application en ce qui concerne les droits internationaux de la personne sont en général très limitées. Par conséquent, les Canadiens qui jouissent de ces droits, y compris le droit de porter plainte auprès de certains des organismes chargés des traités, pourraient ne pas savoir comment y accéder. Comme le Canada est assujetti aux instruments juridiques par lesquels ont été reconnus les droits du peuple canadien, ces instruments devraient être publicisés et mis à la disposition du public comme les différentes lois.

 

Recommandation

Le Comité recommande que le gouvernement du Canada voie à ce que les instruments internationaux relatifs aux droits de la personne auxquels le Canada est partie, ainsi que tout mécanisme de plainte, soient réunis et mis à la portée de tous les Canadiens grâce à Internet, et que des mesures soient prises pour informer les Canadiens de ces renseignements.

 

G. Appui au travail de l’Association canadienne des Commissions et Conseils des droits de la personne  

Le Comité a entendu Keith Norton, président de la Commission ontarienne des droits de la personne.[51] M. Norton a notamment mis en lumière le travail important effectué par l’ACCCDP. L’Association offre une tribune valable pour les relations entre les commissions des droits de la personne fédérale, provinciales et territoriales. Cet organisme facilite la coordination et l’établissement de politiques auprès des organismes des droits de la personne et exprime sa sagesse collective sur les questions de droits de la personne sous forme de résolutions stratégiques que ses membres rapportent à leurs gouvernements respectifs. De temps en temps, l’ACCCDP intervient dans des causes judiciaires importantes où il est question de droits de la personne.  

Les activités de l’ACCCDP sont financées au moyen des droits perçus auprès de chaque commission participante, en général en proportion de la population qu’elle sert et représente. Toutefois, ce mécanisme de financement semble inadéquat. M. Norton a indiqué que les ressources financières de l’ACCCDP sont très limitées – au point où elle compte, dans ses interventions dans les litiges sur les droits de la personne, sur des conseillers juridiques qui travaillent bénévolement.[52] L’actuel président de l’ACCCDP, M. Harinder Mahil de la Commission des droits de la personne de la Colombie-Britannique, a fortement recommandé que l’organisation obtiennent des divers gouvernements des ressources et des rôles précis.[53] Précisons que, au moins pour ce qui est de la Commission canadienne des droits de la personne, cette dernière est obligée par la loi de se tenir « en liaison étroite avec les organismes ou les autorités provinciales de même nature pour favoriser l'adoption de lignes de conduite communes ».[54]

 

Recommandation

Le Comité recommande que le gouvernement du Canada entreprenne des consultations auprès des représentants compétents des gouvernements provinciaux et territoriaux en vue de mieux utiliser et appuyer le travail de l’ACCCDP. 

 

H. Conférence des ministres fédéral, provinciaux et territoriaux chargés des droits de la personne  

Le Comité permanent de hauts fonctionnaires sur les droits de la personne se réunit tous les six mois pour échanger de l’information sur les obligations internationales du Canada en matière de droits de la personne, mais il est composé de fonctionnaires et ne prend aucune décision et n’élabore aucune politique. De plus, il se réunit à huis clos et ses membres et activités ne sont pas accessibles au public canadien, auquel il n’est tenu de rendre aucun compte.  

Nous avons appris qu’il n’y a pas eu de réunion intergouvernementale sur les droits de la personne au niveau ministériel depuis environ 13 ans.[55] Cette pause est beaucoup trop longue. Comme notre étude l’a révélé, le Canada doit répondre à de nombreuses questions importantes au chapitre de l’application des droits de la personne et les processus existants doivent être réévalués et remodelés. Sans une participation directe des ministres, les défis auxquels le Canada fait face en matière de droits de la personne perdront de l’importance ou seront oubliés.

 

Recommandation

Le Comité recommande que le gouvernement du Canada prenne les mesures nécessaires pour rétablir la coutume de réunions régulières entre les ministres fédéral, provinciaux et territoriaux chargés des droits de la personne. Ces réunions devraient avoir lieu au moins une fois tous les trois ans.


V) CONCLUSION  

Dans le présent rapport, nous avons décrit les trois phases de l’évolution des droits de la personne. Nous en sommes actuellement à la troisième phase, laquelle exige que nous exécutions nos obligations. Au cours de cette troisième phase, le Canada occupe une place unique qui lui permet d’être à l’avant-garde d’une maturation nécessaire de l’appareil gouvernemental chargé des droits de la personne. C’est pourquoi, de l’avis du Comité, il est opportun et essentiel que le Parlement élargisse son rôle dans le traitement des questions relatives aux droits de la personne. Le Parlement et les parlementaires doivent prendre une part plus active à ce traitement et à la mise au point de l’appareil gouvernemental pour le munir des outils nécessaires au règlement approprié de ces questions. Nous devons en fait affirmer et renforcer le rôle légitime du Parlement sur ce plan.  

Le besoin d’une participation parlementaire accrue, notamment pour ce qui est d’assurer le respect des droits découlant d’ententes internationales, revêt une importance particulière à une époque où les questions de sécurité mondiale attirent naturellement une attention croissante. Dans cette conjoncture, le Parlement doit intervenir pour trouver un juste équilibre entre les droits de la personne et les problèmes de sécurité.  

Les droits de la personne ne s’épanouiront que dans un environnement de saine gestion publique, respectueuse de la règle de droit. Mais même ces conditions ne sont pas, à elles seules, suffisantes. Comme le présent rapport le démontre, malgré son dossier généralement positif, le Canada ne peut relâcher sa vigilance lorsqu’il s’agit des droits de la personne. Le Comité peut contribuer à relever les défis. Nous pouvons aider à traduire en des mesures concrètes le soutien des droits de la personne, et nous sommes plus que prêts à entreprendre l’étude des questions énumérées dans le présent rapport.


ANNEXE A : 

TÉMOINS  

Fascicule

Date

Témoins

 

 

 

2

Le lundi 4 juin 2001

À titre personnel :

 

 

            Anne F. Bayefsky, professeure, Département des sciences politiques, Université York.

 

 

 

 

 

D’Amnistie internationale – Canada

 

 

            Alex Neve, secrétaire général.

 

 

 

 

Le lundi 11 juin 2001

Du ministère du Patrimoine canadien :

 

 

            Norman Moyer, sous-ministre adjoint, Identité canadienne, et président du Comité permanent de fonctionnaires chargés des droits de la personne.

 

 

 

 

 

Du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international :

 

 

            Adèle Dion, directrice, Direction des droits de la personne, des affaires humanitaires et de la promotion internationale de la femme;

 

 

            John T. Holmes, directeur, Direction du droit onusien, criminel et des traités.

 

 

 

 

 

Du ministère de la Justice :

 

 

            Irit Weiser, directrice, Section des droits de la personne;

 

 

            Paul Rishworth, Université d’Auckland.

 

 

 

 

 

À titre personnel :

 

 

            Ken Norman, professeur, Université de la Saskatchewan.

 

 

 

3

Le lundi 24 septembre 2001

De Droits et démocratie :

 

 

            L’honorable Warren Allmand, C.P., président.

 

 

 

 

 

 

 

À titre personnel :

 

 

            Stephen J. Toope, professeur, Faculté de droit, Université McGill.

 

 

 

 

Le lundi 1er octobre 2001

À titre personnel :

 

 

            Marilou McPhedran, directrice, International Women’s Rights Project, Université York;

 

 

            Peter Leuprecht, doyen, Faculté de droit, Université McGill.

 

 

 

4

Le lundi 29 octobre 2001

À titre personnel :

 

 

            William A. Schabas, directeur, Irish Centre for Human Rights, Université nationale d’Irlande, Galway.

 

 

 

 

 

De la Fondation canadienne des droits de la personne :

 

 

            Ruth Selwyn, directrice générale;

 

 

            François Crépeau, Faculté de droit, Université de Montréal

 

 

            El Obaid Ahmed El Obaid, Faculté de droit, Université McGill.

 

 

 

 

 

De la Commission ontarienne des droits de la personne :

 

 

            Keith Norton, président.

 

 

 

 

Le lundi 5 novembre 2001

À titre personnel :

 

 

            Errol P. Mendes, professeur, Faculté de droit, Université d’Ottawa;

 

 

            Philippe LeBlanc, délégué permanent de l’Ordre des Dominicains à la Commission des droits de l’homme de l’ONU, à Genève.

 

 

 

5

Le lundi 26 novembre 2001

De la Commission des droits de la personne de la Colombie-Britannique :

 

 

            Harinder Mahil, président intérimaire.

 

 

 

 

 

 

De la Commission des droits de la personne du Nouveau-Brunswick :

 

 

            Charles Ferris, conseiller juridique.

 

 

 

 

 

De la Commission des droits de la personne de la Nouvelle-Écosse :

 

 

            James E. Dewar, c.r., président;

 

 

            Mayann E. Francis, directrice exécutive.

 

 

 

 

 

De la Commission canadienne des droits de la personne :

 

 

            Michelle Falardeau-Ramsay, c.r., présidente;

 

 

            John Hucker, secrétaire général;

 

 

            Richard Tardif, avocat général.

 

 

 

 

Le lundi 10 décembre 2001

De la Commission des droits de la personne du Manitoba :

 

 

            Janet Baldwin, présidente.

 

 

 

 

 

De la Commission des droits de la personne de la Saskatchewan :

 

 

            Donna Scott, directrice.


ANNEXE B :

SÉLECTION DE DOCUMENTS PRÉPARÉS POUR LE COMITÉ OU REÇUS AU COURS DE CETTE ÉTUDE  

Documents préparés par le personnel de recherche du Comité

1.                  Droits de la personne, processus législatif et processus de conclusion de traités : études comparatives du rôle des parlements et des parlementaires, le 17 août 2001.

2.                  Les droits internationaux de la personne dans deux régions du monde : le Conseil de l’Europe et l’Organisation des États américains – Documents choisis, le 12 juin 2001.

3.                  Les droits nationaux de la personne au Canada – Documents choisis, le 12 juin 2001.

4.                  Notes d’informations au sujet des obligations en matière de droits de la personne et la machine gouvernementale fédérale, le 18 septembre 2001.

5.                  Les obligations internationales du Canada en matière de droits de la personne, le 12 juin 2001.

6.                  Systèmes nationaux et internationaux de droits de la personne : choix de texte, le 17 août 2001.

 

 

Pièces justificatives

1.                  Amnistie internationale – Canada, Amnesty Report 2001.

2.                  Droits et démocratie, Rapport annuel, 1999-2000, Montréal.

3.                  Droits et démocratie, « Appeal to Governments », 2001.

4.                  Droits et démocratie, « Board of Directors – 10 June 2001 : The Centre’s Involvement in Canadian Human Rights Issues ».

5.                  Droits et démocratie, Is Free Trade a Fair Game?  Stand Up for Human Rights, 2001.

6.                  Droits et démocratie, lettre au très honorable Jean Chrétien, C.P., député, en date du 20 septembre 2001.

7.                  Robert Howse et Makau Mutua, Protection des droits humains et mondialisation de l’économie : Un défi pour l’OMC, Montréal : Droits et démocratie, 2000.

8.                  L’honorable Noël Kinsella, Quelques notes historiques sur la création du Comité permanent des hauts fonctionnaires chargés des droits de la personne, sans date.

9.                  Adeena Niazi et autres, lettre en date du 25 septembre 2001.

 

 

Mémoires et autres documents reçus des témoins et d’autres personnes

1.                  Anne Bayefsky, Report The UN Human Rights Treaty System : Universality at the Crossroads, avril 2001.

2.                  L’Association canadienne des Commissions et Conseils des droits de la personne, Note au sujet d’une proposition d’avant-projet de résolutions, le 27 mars 2001.

3.                  Commission des droits de la personne de la Colombie-Britannique, soumission au Comité avec annexes, le 8 novembre 2001.

4.                  Commission ontarienne des droits de la personne, Les commissions des droits de la personne et les droits économiques et sociaux, sans date.

5.                  Commission des droits de la personne de l’Île-du-Prince-Édouard, mémoire soumis au Comité, octobre 2001. 

6.                  Commission des droits de la personne du Manitoba, mémoire soumis au Comité avec divers documents connexes, le 10 décembre 2001.

7.                  Commission des droits de la personne de la Saskatchewan, mémoire soumis au Comité avec divers documents connexes, le 10 décembre 2001.

8.                  James E. Dewar et Mayann Francis, présentation de la Commission des droits de la personne de la Nouvelle-Écosse, le 26 novembre 2001. 

9.                  Droits et démocratie, Rapport du groupe de réflexion sur le renforcement des mécanismes de protection et de promotion des droits humains des Nations Unies, le 2 août 2001. 

10.              Charles Ferris, présentation de la Commission des droits de la personne du Nouveau-Brunswick, le 26 novembre 2001. 

11.              Fondation canadienne des droits de la personne, présentation au Comité, le 29 octobre 2001.

12.              International Women’s Rights Project, Centre for Feminist Research, Université York, affiche intitulée « The First CEDAW Impact Study Overview, » juin 2000.

13.              Marilou McPhedran, Susan Bazili, Moana Erickson et Andrew Byrnes, The First CEDAW Impact Study: Final Report, Toronto, 2000.

14.              Errol Mendes, « Le rôle du gouvernement dans l’évaluation de la mise en œuvre des obligations nationales et internationales du Canada en matière de droits de la personne : nécessité d’adopter une nouvelle approche après le 11 septembre 2001 », le 5 novembre 2001.   

15.              Joan Myles, lettre à l’honorable Raynell Andreychuk au sujet de la Commission des droits de la personne de Terre-Neuve et du Labrador en date du 5 octobre 2001.

16.              Ken Norman, « Taking Human Rights Lightly: The Canadian Approach », (Février 2001), 12 National Journal of Constitutional Law, pages 291-308.

17.              Paul Okalik, premier ministre du Nunavut, lettre à l’honorable Raynell Andreychuk en date du 18 octobre 2001.

18.              Tina Piper et Wayne MacKay, « The Domestic Implementation of International Law : A Canadian Case-Study », texte d’un discours prononcé à Beijing au nom du professeur MacKay, 2001.

19.              Patrimoine canadien, Document d’information sur l’origine et l’historique du Comité permanent des fonctionnaires chargés des droits de la personne, le 1er octobre 1999. 

20.              Patrimoine canadien, présentation au sujet des programmes des droits de la personne, juin 2001.

21.              Programme de contestation judiciaire du Canada, mémoire soumis au Comité, novembre 2001. 

22.              William A. Schabas, « Twenty-Five Years of Public International Law at the Supreme Court of Canada », (Juillet 2001), 79 Revue du Barreau canadien, pages 174-195.

23.              David Schneiderman, « Mise en œuvre des engagements relatifs aux droits de la personne : les difficultés d’une compétence partagée », sans date.

24.              Stephen J. Toope, « Inside and Out : The Stories of International Law and Domestic Law », (2001), 50 UNB Law Journal, pages 11-24.

25.              Stephen J. Toope, « The Uses of Metaphor : International Law and the Supreme Court of Canada, » (Mars/Juin 2001), 12 Revue du Barreau canadien, pages 534-541.

 

 

Autres documents

1.                  Australie, Comité sénatorial des références légales et constitutionnelles, Trick or Treaty : Commonwealth Power to Make and Implement Treaties, novembre 1995.

2.                  Organisation des États américains, Déclaration de Lima : Charte démocratique interaméricaine, le 11 septembre 2001. 

3.                  Vladimir Volodin, Droits de l’homme : Les principaux instruments internationaux, État au 31 mai 2001, UNESCO.

4.                  L’honorable la très révérende Lois Wilson, Human Rights Linkages Initiative : Fall 1999, National Consultations, November 26-27, 1999, Ottawa, Canada.


[1]               Le Comité n’a pas encore eu l’occasion d’examiner la situation complexe des peuples autochtones au Canada, bien que cette question puisse être approfondie plus tard. Par conséquent, notre analyse des rouages du gouvernement du Canada en ce qui a trait aux droits de la personne ne traite pas des ententes touchant l’autonomie gouvernementale des Autochtones.

[2]                 Déclaration canadienne des droits, L.C. 1960, c. 44, art. 3; Loi sur le ministère de la Justice, L.R.C. 1985, c. J-2, art. 4.1; et Loi sur les textes réglementaires, L.R.C. 1985, c. S-22, art. 3.

[3]               Loi sur les textes réglementaires, art. 19.

[4]                 Parlement du Canada, Comité mixte permanent d’examen de la réglementation, Premier rapport, 1ère session, 37e législature, le 14 mars 2001.

[5]               Chambre des communes, Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, Soixante-dixième rapport, 1ère session, 36ème législature, le 20 avril 1999.

[6]               Selon l’article 33(1) de la Chartre canadienne des droits et libertés, « le Parlement ou la législature d’une province peut adopter une loi où il est expressément déclaré que celle-ci ou une de ses dispositions a effet indépendamment d’une disposition donnée de l’article 2 ou des articles 7 à 15 de la présente charte. »

[7]               Bien que les États-Unis soient, en théorie, un État moniste, lorsqu'il est question de conventions sur les droits internationaux de la personne, ils sont en réalité un État dualiste, étant donné les déclarations faites au moment de la ratification. Dans les résolutions ratifiant les traités sur les droits internationaux de la personne, le Sénat américain a adopté la pratique de stipuler que ces conventions n'ont pas force obligatoire. Par conséquent, les tribunaux américains ne peuvent appliquer directement les traités sur les droits de la personne dans leurs décisions. Voir : Louis Henkin, « U.S. Ratification of Human Rights Conventions: The Ghost of Senator Bricker, » (1995) 89 American Journal of International Law 341; et Thomas Buergenthal, « Modern Constitutions and Human Rights Treaties, » (1997) 36 Columbia Journal of Transnational Law 211, aux p. 211-212 et 220 à 223.

[8]               Thomas Buergenthal, « Modern Constitutions and Human Rights Treaties, » (1997) 36 Columbia Journal of Transnational Law 211, aux p. 213 et 215 à 19; et témoignages au Comité, le 1er octobre 2001 (Peter Leuprecht).

[9]               Voir, p. ex. : William A. Schabas, « Twenty-Five Years of Public International Law at the Supreme Court of Canada, » (juillet 2000) 79 Canadian Bar Review p. 174, à la p. 182. La principale affirmation judiciaire de ce principe se trouve dans la décision de la Chambre des lords britannique Trendtex Trading Corporation v. Central Bank of Nigeria, [1977] 1 All E.R. 881, par Lord Denning M.R.

[10]                 Témoignages au Comité, le 24 septembre 2001.

[11]             Comité des droits de l'homme 65e session, CCPR/C/79/Ajouter.105, le 7 avril 1999, au paragraphe 10.

[12]                 Témoignages au Comité, le 24 septembre 2001.

[13]             Renvoi relatif à la Public Service Employee Relations Act (Alb.), [1987] 1 R.C.S. 313, aux pages 348 à 350. C’est le juge en chef Dickson, qui écrivait aussi pour le juge Wilson, qui a soulevé ces points. Il était dissident quant au résultant final de la décision pour d’autres raisons.

[14]             [1999] 2 R.C.S. 817.

[15]             [1999] 2 R.C.S. 817, aux par. 69 à 73.

[16]             Voir, p. ex. : Ken Norman, « Taking Human Rights Lightly: The Canadian Approach,  » (Février 2001), 12 National Journal of Constitutional Law, p. 291; et témoignages au Comité, le 24 septembre 2001 (Stephen Toope).

[17]             Voir : Attorney General of Canada v. Attorney General of Ontario (Labour Conventions Case), [1937] A.C. 326 (P.C.).

[18]                 L’honorable Gérald-A. Beaudoin, avec la collaboration de Pierre Thibeault, Le fédéralisme au Canada, Montréal, Wilson & Lafleur, 2000, pages 883-888.

[19]                 Convention de Vienne sur le droit des traités, art. 27.

[20]             À ce sujet, voir, par exemple, l’honorable Noël Kinsella, Quelques notes historiques sur la création du Comité permanent des hauts fonctionnaires charges des droits de la personne. L’on peut également se référer à l’honorable Gérald-A. Beaudoin, Le fédéralisme au Canada, à la page 882.

[21]             Cette décision est traitée en plus de détail à la section III-E du présent rapport.

[22]                 Témoignages au Comité, le 29 octobre 2001 (William Schabas).

[23]                 Témoignages au Comité, les 11 juin 2001 (Ken Norman) et 5 novembre 2001 (Errol Mendes).

[24]             Le Parlement : Gardien des droits de l’homme, Symposium interparlementaire, Budapest, du 19 au 22 mai 1993, p. 23, par. 12.

[25]                 Témoignages au Comité : les 4 juin 2001 (Anne Bayefsky), 11 juin 2001 (Ken Norman), 24 septembre 2001 (Stephen Toope), 29 octobre 2001 (William Schabas) et 5 novembre (Errol Mendes).

[26]             Rapport du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères intitulé: La nouvelle OTAN et l'évolution du maintien de la paix: conséquences pour le Canada, avril 2000, pp. 73-74.

[27]                 Témoignages au Comité, le 1er octobre 2001.

[28]                 Témoignages au Comité, les 4 juin 2001 (Anne Bayefsky), 11 juin 2001 (Ken Norman), 24 septembre 2001 (Stephen Toope), 1 octobre 2001 (Peter Leuprecht), 26 novembre 2001 (Charles Ferris).

[29]                 Témoignages au Comité, le 11 juin 2001 (Irit Weiser).

[30]                 Témoignages au Comité, le 26 novembre 2001 (Hanrinder Mahil).

[31]                 Témoignages au Comité, le 11 juin 2001 (Irit Weiser et John Holmes).

[32]                 Témoignages au Comité, le 26 novembre 2001 (Michelle Falardeau-Ramsay).

[33]                 Témoignages au Comité, les 24 septembre 2001 (Stephen Toope), 1er octobre 2001 (Peter Leuprecht) et 5 novembre 2001 (Errol Mendes).

[34]                 Témoignages au Comité, les 4 juin 2001 (Anne Bayefsky) et 11 juin 2001 (Ken Norman).

[35]                 Témoignages au Comité, le 4 juin 2001 [traduction].

[36]                 Témoignages au Comité, le 4 juin 2001 (Anne Bayefsky).

[37]                 Témoignages au Comité, le 29 octobre 2001 [traduction]. Voir aussi les témoignages au Comité du 26 novembre 2001 (Charles Ferris).

[38]                 Témoignages au Comité, les 4 juin 2001 (Alex Neve) et 1er octobre 2001 (Marilou McPhedran).

[39]                 Témoignages au Comité, le 4 juin 2001 (Alex Neve).

[40]                 Témoignages au Comité, les 4 juin 2001 (Alex Neve), 24 septembre (Warren Allmand) et 29 octobre (William Schabas).

[41]                 Témoignages au Comité, le 29 octobre 2001 (William Schabas).

[42]                 Témoignages au Comité, le 26 novembre 2001 (Harinder Mahil et Charles Ferris).

[43]                 Témoignages au Comité, le 29 octobre 2001.

[44]                 Témoignages au Comité, le 5 novembre 2001.

[45]                 Témoignages au Comité, le 5 novembre 2001 (Philippe LeBlanc).

[46]                 Témoignages au Comité, le 5 novembre 2001.

[47]                 Témoignages au Comité, le 11 juin 2001 (Norman Moyer et Adèle Dion).

[48]                 Témoignages au Comité, le 26 novembre 2001.

[49]                 Témoignages au Comité, le 26 novembre 2001 (Harinder Mahil).

[50]                 Témoignages au Comité, les 29 octobre 2001, 26 novembre 2001 et 10 décembre 2001.

[51]                 Témoignages au Comité, le 29 octobre 2001.

[52]                 Témoignages au Comité, le 29 octobre 2001.

[53]                 Témoignages au Comité, le 26 novembre 2001.

[54]             Loi canadienne sur les droits de la personne, alinéa 27(1)c).

[55]                 Témoignages au Comité, le 11 juin 2001 (Norman Moyer).


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