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SM36 - Comité spécial

Comité spécial sénatorial sur le projet de loi C-36

 

Délibérations du Comité sénatorial spécial sur la
Teneur du projet de loi C-36

Fascicule 2 - Témoignages pour la séance de l'avant-midi


OTTAWA, le mardi 23 octobre 2001

Le Comité sénatorial spécial sur la teneur du projet de loi C-36 s'est réuni aujourd'hui à 10 h 04 pour examiner la teneur du projet de loi C-36, loi modifiant le Code criminel, la Loi sur les secrets officiels, la Loi sur la preuve au Canada, la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité (le blanchiment d'argent) et d'autres lois, et édictant des mesures à l'égard de l'enregistrement des organismes de bienfaisance, en vue de combattre le terrorisme et la protection des droits de la personne et des libertés publiques dans l'application de la loi à l'étude.

Le sénateur Joyce Fairbairn (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente: Honorables sénateurs, aujourd'hui nous poursuivons nos audiences sur la teneur du projet de loi C-36, le projet de loi visant les actions terroristes qui ont secoué la planète le 11 septembre dernier aux États-Unis.

Le Sénat a choisi d'avoir recours à un processus rarement utilisé appelé étude préalable qui nous permet d'entendre des témoins au préalable pour ensuite soumettre des recommandations à la Chambre des communes avant que le projet de loi ne soit adopté par cette Chambre. Le projet de loi reviendra ensuite devant le Sénat, où il sera soumis au processus formel de débat et d'étude en comité. Nous voulons envoyer nos recommandations et points de vue le plus rapidement possible en espérant qu'il en soit tenu compte dans le projet de loi lorsqu'il reviendra officiellement à la Chambre du Sénat.

Hier, nous avons entendu le ministre de la Justice et le Solliciteur général. Nous avons aussi entendu des hauts fonctionnaires du ministère des Finances et de l'Agence canadienne des douanes et du revenu. Nous avons entendu le directeur du Service canadien du renseignement de sécurité. Nous avons aussi entendu le témoignage du commissaire du Centre de la sécurité des télécommunications.

Aujourd'hui, nous allons passer à la question de la protection du droit à la vie privée. Nous avons ce matin avec nous l'honorable John Reid, le commissaire à l'information du Canada.

Je sais que les membres de notre comité seront très intéressés par vos commentaires, monsieur Reid. Ces audiences ont, comme il se doit, soulevé plusieurs questions. J'aimerais demander à mes collègues d'être aussi concis que possible dans leurs questions. Pour nous aider dans notre démarche, monsieur Reid, vous pouvez être aussi bref et concis que vous le souhaitez. Nous sommes enchantés que vous soyez parmi nous aujourd'hui. Veuillez commencer.

L'honorable John Reid, c.p., Commissaire à l'information du Canada: Honorables sénateurs, je suis reconnaissant de l'occasion qui m'est donnée de comparaître devant vous. J'ai des préoccupations concernant un certain nombre de dispositions du projet de loi C-36. Je souhaite pouvoir répondre à toutes vos questions concernant les effets du projet de loi sur la Loi sur l'accès à l'information.

Aujourd'hui, je suis accompagné du sous-commissaire, M. Leadbeater, de mon conseiller juridique, M. Daniel Brunet, et du directeur général des Enquêtes et révisions, M. Dan Dupuis.

Madame la présidente, permettez-moi d'aller droit au but. Selon l'article 87 du projet de loi, la ministre pourrait «à tout moment, délivrer personnellement un certificat interdisant la divulgation de renseignements dans le but de protéger les relations internationales ou la défense ou la sécurité nationales». La même disposition prévoit que la Loi sur l'accès à l'information ne s'appliquerait pas à ces renseignements.

Par conséquent, la ministre aurait, en délivrant un certificat de ce genre, le droit absolu et incontrôlable de maintenir le secret sur des renseignements pendant une période indéterminée. Je dis «absolu» car l'article 87 est formulé dans des termes flous et trop généraux pour décrire les circonstances dans lesquelles le procureur général pourrait à juste titre délivrer ce genre de certificat.

Le commissaire à la protection de la vie privée a laissé entendre que les termes employés dans le projet de loi C-36 permettraient à la ministre de supprimer le droit d'accéder aux dossiers de ministères entiers. Je ne suis pas en désaccord avec lui: la formulation imprécise permet une application trop large. Et je dis «incontrôlable» car l'article 87, en désassujettissant l'information protégée par un certificat des dispositions de la Loi sur l'accès à l'information, supprime du même coup le pouvoir du commissaire à l'information et de la Cour fédérale du Canada d'exercer un contrôle indépendant pour déterminer si le secret est justifiable ou non.

Je renvoie ceux d'entre vous qui désireraient comprendre les mécanismes juridiques en jeu ici au paragraphe 36(2) et à l'article 46 de la Loi sur l'accès à l'information. Ces dispositions prévoient que le droit du commissaire et de la Cour d'examiner les documents l'emporte sur tous privilèges garantis par la loi de la preuve ou sur toutes restrictions prévues par toute autre loi, y compris la Loi sur la preuve au Canada.

Cependant, ce droit puissant ne s'applique qu'aux dossiers auxquels cette loi s'applique. C'est précisément pourquoi la modification proposée à l'article 87 du projet de loi C-36 précise que la Loi sur l'accès à l'information «ne s'applique pas» au renseignement couvert par le certificat.

Je suis absolument convaincu - et je me fonde sur 18 années d'expérience sous le régime de cette loi au cours desquelles il y a eu des périodes de guerre et de crise qui ont exigé l'échange de renseignements extrêmement confidentiels entre alliés - que notre Loi sur l'accès à l'information ne compromet en rien les relations internationales, la défense nationale ou la sécurité du Canada. Les articles 13, 15 et 16 de la loi prévoient des exemptions puissamment et largement formulées au droit d'accès à l'information, qui sont conçues pour veiller à ce qu'aucun renseignement ne soit divulgué qui pourrait être préjudiciable aux relations internationales, à la défense du Canada ou aux efforts du Canada pour dépister, prévenir ou réprimer les activités subversives ou hostiles. Je vous invite à lire ces dispositions, dont des copies vous ont été distribuées, et vous constaterez les protections détaillées et solides que le Parlement a eu la prévoyance d'insérer dans la loi.

Ce n'est pas pour rien, bien entendu, que la loi prévoyait cette importante possibilité de secret. Ce pays a connu le terrorisme - explosion de bombes, enlèvement, assassinat - et la mémoire en était encore vive dans l'esprit des législateurs et des responsables gouvernementaux à la fin des années 1970 et au début des années 1980, au moment où notre loi sur l'accès à l'information a été élaborée. À l'époque, comme aujourd'hui, nous importions beaucoup de renseignement, surtout des États-Unis. Nous comprenions qu'il fallait prévoir des garanties pour rassurer nos alliés.

Nous n'avons tout simplement pas besoin d'en faire plus pour réagir à la menace terroriste actuelle, pas plus que les Américains, qui n'ont pas modifié et ne se proposent pas de modifier leur loi sur l'accès à l'information à la suite des événements du 11 septembre 2001. Encore la semaine dernière, le ministère américain de la Justice confirmait qu'il n'était pas question de soustraire quelques documents que ce soit à la portée de la FOIA non plus que de limiter le droit des tribunaux d'examiner des documents et d'être saisis de refus de divulgation.

D'après toutes les explications publiques fournies par le ministre et ses fonctionnaires concernant la raison de cette proposition, il semblerait que le gouvernement lui-même ne doute pas une seconde que la Loi sur l'accès à l'information comporte toutes les garanties nécessaires concernant la divulgation de renseignement qui pourrait être préjudiciable aux relations internationales, à la défense ou à la sécurité. Leur justification est la suivante: comme notre système prévoit le droit de demander un contrôle indépendant, le gouvernement ne peut donner à ses alliés la garantie absolue que l'information fournie par eux au Canada restera secrète.

Cette explication me laisse perplexe et inquiet. Nos principaux alliés et fournisseurs de renseignement fonctionnent eux-mêmes sous le régime de lois sur la liberté de l'information. Ils comprennent que l'objet de ces lois est de ne pas laisser les décisions relatives au secret aux aléas de l'arbitraire et qu'il faut les assujettir à un système de définition et de contrôle législatifs et judiciaires. Personnellement, il m'est difficile de croire que le gouvernement de l'un ou l'autre de nos principaux alliés insisterait, comme condition du partage de l'information, pour que les décisions relatives au secret au Canada soient de nouveau abandonnées au royaume de l'arbitraire.

Dans les conversations que nous avons eues avec nos juridictions alliées, nous avons cru comprendre qu'elles veulent toutes la même chose: elles veulent la simple assurance que ce qui doit être protégé peut l'être, et aucune d'elles ne doute de la capacité du Canada à le faire sous le régime de l'actuelle Loi sur l'accès à l'information.

Une récente étude indépendante commandée par le ministre de la Justice et le président du Conseil du Trésor confirme sans équivoque la solidité des protections de l'information relative à la sécurité nationale contenue dans la Loi sur l'accès à l'information. Le professeur Wesley K. Wark, de l'Université de Toronto, explique ce qui suit dans une étude intitulée «La Loi sur l'accès à l'information et la collectivité canadienne de la sécurité et du renseignement»:

Les exigences de la population aux termes de la Loi sur l'accès à l'information peuvent être entravées par l'applica tion des principales dispositions prévoyant des exemptions, à la fois obligatoires et discrétionnaires, de la loi. Dans le domaine de la sécurité et du renseignement, les principales exemptions utiles sont l'article 13 (Renseignements obtenus à titre confidentiel), l'article 15 (Affaires internationales et défense), l'article 16 (Enquêtes et menaces à la sécurité du Canada), l'article 21 (Avis et recommandations). Dans leur ensemble, les exemptions sont un puissant mécanisme défensif permettant à la collectivité de protéger ses secrets. Le Service canadien du renseignement de sécurité et le Centre de la sécurité des télécommunications, qui sont les deux principaux organismes qui recueillent des données confidentielles, considèrent l'un et l'autre que la Loi sur l'accès à l'information offre des garanties suffisantes.

M. Wark dit plus loin dans son rapport:

Les organismes de sécurité et de renseignement doivent continuer à disposer du pouvoir d'appliquer les exemptions prévues par la Loi sur l'accès à l'information pour protéger les renseignements dont la divulgation serait préjudiciable à la sécurité nationale et à la conduite des affaires internationa les. Les exemptions actuelles sont des instruments puissants et suffisants pour garantir cette protection.

Depuis 1983, la Loi sur l'accès à l'information a été révisée en détail par un comité permanent du Parlement, un comité spécial de la Chambre des communes et deux commissaires à l'information - la dernière fois en 2000-2001 - outre au moins trois fois par des fonctionnaires, tout dernièrement, et encore actuellement, par le groupe de travail sur la réforme de la Loi sur l'accès à l'information. Jamais au grand jamais on n'a, dans ces examens, laissé entendre que les articles 13, 15 et/ou 16 de la Loi sur l'accès à l'information ne suffisent pas à donner au gouvernement le pouvoir de protéger l'information dont la divulgation serait préjudiciable aux relations internationales, à la défense du Canada ou à la sécurité. Jamais au grand jamais on n'a, dans ces études, laissé entendre que la surveillance indépendante exercée par le commissaire à l'information et par les tribunaux compromettrait d'une manière ou d'une autre des secrets vitaux.

Au cours des 18 années d'existence de la Loi sur l'accès à l'information, la divulgation impropre de renseignement de sécurité et de renseignement secret n'a jamais été imputable à la loi. Dans les rares occasions où cela s'est produit, la faute en est l'indiscrétion d'adjoints ministériels, les révélations d'anciens agents du renseignement devenus auteurs, des valises et ordinateurs perdus et, parfois, des révélations de ministres. Il y a là de quoi attirer l'attention sur la Loi sur les secrets officiels, mais non pas de quoi justifier les mesures imposées à l'article 87 du projet de loi C-36.

Même s'il y avait lieu de se demander si les exemptions protégeant les renseignements confidentiels sont suffisantes, la solution proposée par le gouvernement serait-elle valable? Maintiendrait-elle l'équilibre qui convient entre la protection des Canadiens contre les attaques terroristes et leur protection contre les abus du pouvoir de l'État? À mon avis, le gouvernement n'a pas besoin de supprimer les deux paliers de contrôle indépendant pour se permettre d'interdire la divulgation de certains documents.

Comme le commissaire à l'information est, de par la loi, tenu de procéder à ces enquêtes en privé, de protéger la confidentialité de tous les renseignements et de ne faire que des recommandations - et non pas de donner des ordres - en matière de divulgation, la ministre n'a pas besoin d'entraver ou de réduire le pouvoir d'examen du commissaire pour pouvoir prohiber la divulgation publique de documents. Seule la Cour fédérale a le pouvoir de procéder à des audiences publiques et d'ordonner la divulgation publique de documents refusés.

Si la ministre estime que les tribunaux pourraient interpréter la Loi sur l'accès à l'information dans un sens qui compromettrait des renseignements confidentiels concernant les relations internationales, la défense ou la sécurité - opinion sans fondement à mon avis - cela devrait être l'objet de son intervention législative. Le pouvoir d'examen du commissaire à l'information étant laissé intact, on aurait un mécanisme permettant à un corps indépendant d'évaluer la validité de l'emploi du certificat du procureur général et d'en informer le public, le tout sans risquer de divulguer les renseignements couverts par le certificat.

Je me hâte d'ajouter que même cette solution intermédiaire me paraît injustifiable. Nous pouvons et nous devrions faire confiance au pouvoir des exemptions prévues par la loi. Nous devrions faire confiance au bons sens et à l'intégrité des juges de la Cour fédérale et de la Cour suprême qui examinent les décisions du gouvernement lorsqu'ils invoquent ces exemptions.

Avant de conclure mes observations, je désire rappeler l'allégation de certains selon laquelle les dispositions de l'article 87 du projet de loi C-36 seraient une vengeance mesquine dirigée contre la Loi sur l'accès à l'information et le commissaire à l'information. Cette allégation s'enracine dans une controverse assez publique entre mon Bureau et l'État concernant mon droit d'examiner certains documents au cours d'une enquête. L'affaire est allée jusqu'à la Cour suprême du Canada, qui a rejeté la demande d'appel, et mon droit d'examiner les documents a été confirmé, cependant que l'État a continué de refuser certains documents en délivrant un certificat en vertu des articles 37 et 38 de la Loi sur la preuve au Canada et en allégeant qu'il serait préjudiciable aux relations internationales, à la défense du Canada et à la sécurité nationale que mon Bureau ait connaissance de ces documents. Tout cela s'est déroulé avant les événements du 11 septembre.

J'ai contesté la validité de ces certificats devant la Cour fédérale et je suis convaincu que, une fois que la cour aura vu ces documents - comme ce doit être le cas maintenant - et compris qu'ils seraient traités par moi selon les règles de confidentialité les plus strictes aux termes de la Loi sur l'accès à l'information, ce dernier obstacle à mon enquête sera levé. Mais, si le projet de loi C-36 prend force de loi sous sa forme actuelle, la ministre aura légalement le droit de délivrer un certificat concernant les documents actuellement en cause, et ni la Cour fédérale ni mon bureau ne verront jamais ces documents.

Malgré ce contexte, je ne suis pas de ceux qui croient que l'objet de l'article 87 du projet de loi C-36 est de dicter l'issue des causes actuellement entendues par les tribunaux. Je crois que la ministre et le gouvernement envisageront de modifier cette disposition s'ils croient honnêtement que son objectif, celui de protéger les Canadiens et leurs alliés contre le terrorisme, peut être réalisé par des moyens moins radicaux. Mon espoir le plus fervent est que mes commentaires contribueront à convaincre les honorables membres de ce comité et, à travers eux, la ministre du fait que l'article 87 du projet de loi C-36 ne crée pas l'équilibre qui convient et doit être annulé.

Si cette disposition n'est pas annulée, elle devrait renvoyer spécifiquement aux articles 13 et 15 de la Loi sur l'accès à l'information et ne devrait pas empêcher le commissaire à l'information d'examiner des documents au cours de ces enquêtes. De plus, toute disposition qui diminuerait les avenues de révision indépendantes existantes, devrait se limiter au délai le plus court.

Le sénateur Beaudoin: Nous avons eu, hier, une discussion au sujet d'une autre question où le même principe semble s'appliquer. L'interception des communications privées au Canada doit être autorisée par un juge. L'interception des communications à l'extérieur du Canada doit être autorisée par le ministre de la Défense nationale. Cela va à l'encontre des décisions qu'a rendues la Cour suprême sur la question des communications. Au moins quatre décisions ont été rendues à ce sujet.

Dans ce cas-ci, l'autorisation doit venir du procureur général du Canada, mais le principe semble être le même. Un certificat est requis si l'interception a lieu à l'extérieur du pays et qu'elle ne compromet pas les relations internationales. Une fois le certificat délivré, on n'en parle plus.

Existe-t-il, selon vous, un parallèle entre ces deux situations? On suit un certain raisonnement. Nous sommes tous d'accord pour dire que nous devons assurer notre sécurité dans l'intérêt de la défense nationale, et protéger aussi nos relations internationales. Or, je ne comprends pas pourquoi on établit maintenant une distinction entre les communications interceptées au Canada et les communications interceptées à l'étranger. Il doit y avoir une raison.

M. Reid: Sénateur, j'ai lu le projet de loi et si j'ai bien compris, le certificat qui est délivré s'applique aux renseignements que possède le gouvernement, qu'ils proviennent de sources extérieures ou intérieures. Il s'agit en fait d'un pouvoir absolu.

Le sénateur Beaudoin: Qui vaut pour les deux?

M. Reid: Oui.

Le sénateur Beaudoin: Ce pouvoir est absolu?

M. Reid: À mon avis, il devient absolu une fois qu'on l'exclut de la Loi sur l'accès à l'information, parce que ni le commissaire en information ni les tribunaux ne pourront exercer de contrôle. Il supprime le droit d'accéder aux renseignements de façon absolue.

Le sénateur Beaudoin: Hier, nous avons parlé des communications privées. Aujourd'hui, nous parlons de l'accès à l'information. Le mot est peut-être un peu fort, mais est-ce que cela n'équivaut pas à une ingérence dans votre domaine de compétence?

M. Reid: C'est une ingérence en ce sens qu'on empêche les citoyens d'avoir accès à des renseignements concernant les activités du gouvernement. Mon rôle à ce chapitre consiste à mener un examen indépendant des décisions prises par le gouvernement. Quand le droit d'accès à l'information ne fait plus partie de la Loi sur l'accès à l'information, dont un des objectifs est de déterminer la façon dont le gouvernement utilise l'information en sa possession, on ne peut plus avoir accès à ces renseignements, sauf si le gouvernement décide d'en autoriser la divulgation. Personne ne peut y avoir accès.

M. Alan Leadbeater, sous-commissaire à l'information du Canada: Sénateur, vous soulevez un point intéressant, parce que je n'avais jamais fait le lien jusqu'ici.

En ce qui a trait à l'article 87, on nous a dit qu'on voulait que le Canada puisse donner à ses alliés la garantie absolue que l'information fournie par eux resterait secrète. Il existe un parallèle entre cette situation et celle que vous avez mentionnée. Sauf pour ce qui est de l'examen indépendant, on s'entend pour dire que le projet de loi prévoit des garanties adéquates. L'article 13, qui figure à la page 53 du document qu'on vous a distribué, est une exception obligatoire. Il précise que le responsable d'une institution fédérale doit refuser la communication de renseignements obtenus des gouvernements des États étrangers. Il n'y a pas de doute que ces renseignements seraient protégés. Toutefois, on pourrait toujours, en principe, s'adresser à mon bureau et aux tribunaux, et c'est ce que le gouvernement cherche à interdire à ce moment-ci.

Le sénateur Beaudoin: Hier, quand il a été question des communications privées, nous avons constaté que le rôle du judiciaire se déplaçait vers l'organe exécutif de l'État. Cette fois-ci, le rôle se déplace vers le procureur général du Canada, sauf que les tribunaux ne sont plus du tout concernés. C'est plutôt le commissaire qui l'est.

M. Leadbeater: C'est parce que la loi qui nous régit prévoit un examen à deux volets. La plainte est examinée par le commissaire et ensuite par les tribunaux si le commissaire ou le plaignant n'est pas satisfait de la réponse du gouvernement.

Le sénateur Kenny: Monsieur Reid, vous relevez du Parlement.

M. Reid: Oui.

Le sénateur Kenny: Vous défendez les intérêts des Canadiens. L'objectif de la loi qui vous régit est d'élargir la portée des lois actuelles du Canada en vue d'autoriser l'accès aux dossiers qui relèvent d'une institution du gouvernement, conformément aux principes suivants: le public devrait avoir accès aux renseignements administratifs, les exceptions relatives au droit d'accès devraient être limitées et précises, et les décisions touchant la divulgation de renseignements administratifs devraient être examinées par un organisme indépendant.

M. Reid: C'est exact.

Le sénateur Kenny: Vous témoignez ici au nom du peuple canadien.

M. Reid: Oui.

Le sénateur Kenny: Qu'est-ce qui se passe? Est-ce que le gouvernement se sert de cette crise à des fins politiques, pour réduire vos moyens d'action?

M. Reid: À mon avis, quand le gouvernement a décidé d'aller de l'avant avec ce projet de loi, il a tout mis sur la table. Comme l'a mentionné M. Leadbeater, il voulait avant tout protéger les renseignements provenant de sources étrangères et accorder certaines garanties. En fait, nos alliés ne prévoient apporter aucune modification à leurs lois sur l'accès à l'information ou la liberté de l'information. Le Canada est le seul pays à le faire.

Le sénateur Kenny: Avez-vous l'impression, monsieur Reid, que ce projet de loi vise indirectement votre bureau?

M. Reid: C'est ce que dit le gouvernement ou ce projet de loi.

Le sénateur Kenny: Et vous l'acceptez?

M. Reid: Non.

Le sénateur Kenny: Avez-vous l'impression qu'il vise directement votre bureau? On ne peut pas dire que c'est le cas si vous jugez qu'il vous touche indirectement.

M. Reid: Il est clair qu'il vise les lois sur l'accès à l'information et la protection des renseignements personnels. Ces lois disposent que les décisions touchant la divulgation de renseignements administratifs doivent faire l'objet d'un examen indépendant. Le projet de loi vise également, par définition, les tribunaux parce qu'ils perdent le pouvoir de revoir ces décisions.

Le sénateur Kenny: Donc, selon vous, cette mesure n'est pas nécessaire.

M. Reid: C'est exact.

Le sénateur Kenny: Comment les fonctionnaires du gouvernement ont-ils réagi quand vous leur avez dit cela?

M. Reid: Nous n'avons pas été consultés au moment de l'élaboration du projet de loi. Nous avons eu droit, par après, à une rencontre avec le ministère de la Justice.

Le sénateur Kenny: Comment réagissent-ils quand vous leur dites que ce projet de loi n'est pas nécessaire, qu'il est inutile, que la loi existante vous offre déjà les garanties nécessaires? Que vous répondent-ils?

M. Reid: Ils nous disent qu'ils vont vérifier si c'est bien le cas.

Nous avons eu une bonne discussion avec le sous-ministre de la Justice. Nous lui avons expliqué notre situation et la façon dont le bureau fonctionne. Nous lui avons expliqué que le bureau est en quelque sorte une boîte hermétique - quand nous menons nos enquêtes, rien ne transpire. Nous devons nous conformer aux critères en matière de sécurité que nous imposent le SCRS et la GRC. Notre bureau est aussi sûr que n'importe quel autre bureau du gouvernement du Canada. Il est encore plus sûr que la plupart des bureaux qui traitent ces renseignements. Il n'y a aucun danger que l'information s'égare dans notre système.

Cette disposition nous enlève le pouvoir d'examiner les décisions prises par la ministre.

Le sénateur Kenny: Si cet article était modifié, est-ce que le projet de loi serait alors acceptable à vos yeux?

M. Reid: Cela permettrait d'éliminer bien des problèmes, dont ceux que je vous expose aujourd'hui.

Le sénateur Andreychuk: Monsieur Reid, vous avez dit que le projet de loi vise, entre autres, à permettre au gouvernement de donner à ses alliés et homologues les garanties absolues qu'ils recherchent. Vous semblez avoir examiné à fond le système américain. Est-ce qu'il peut nous donner des garanties absolues, ou est-ce qu'il est exposé, lui aussi, aux erreurs humaines et administratives?

M. Reid: Les dispositions relatives à la sécurité qui figurent dans notre loi et dans la loi américaine sur la liberté de l'information sont plus ou moins comparables. Toutefois, nos garanties sont beaucoup plus absolues que les leurs. Toutefois, ils sont, comme n'importe quelle institution, exposés à l'erreur humaine.

Le sénateur Andreychuk: Donc, ce que vous dites, c'est qu'ils ne peuvent pas nous donner de garanties absolues, et nous ne pouvons pas le faire non plus. Toutefois, les deux institutions peuvent donner des garanties raisonnables en vertu des lois existantes, n'est-ce pas?

M. Reid: Oui. Il ne faut pas oublier que les États-Unis ont décidé de ne pas modifier leur loi sur la liberté de l'information.

Le sénateur Andreychuk: Est-il nécessaire d'avoir ce droit d'accès à l'information, et vous en avez parlé avec le sénateur Kenny, pour vérifier que le gouvernement fait bien son travail? Les dispositions relatives à l'accès à l'information permettent à un groupe de citoyens ou à un particulier, dans un régime démocratique, de mettre le gouvernement à l'épreuve, d'exiger des comptes. Au Canada, la Loi sur l'accès à l'information prévoit le dépôt d'un rapport au Parlement. Je doute, si tous les pouvoirs se retrouvent entre les mains de l'exécutif, que l'État abuse de ceux-ci de façon agressive et dictatoriale. Ce que je crains plutôt, c'est qu'il commette des bavures et court-circuite le système dans des situations très graves. Croyez-vous que l'État, si tous les pouvoirs se retrouvaient entre ses mains, chercherait à trouver des réponses rapides et faciles à la question de savoir si des certificats doivent être délivrés, au lieu de fonder ses conclusions sur des décisions éclairées et motivées?

M. Reid: Quand nous examinons des documents dont la divulgation est contestée, nous voyons le sérieux des gens qui les ont préparés. Ils ont pris le soin de bien motiver leurs décisions. L'accès à l'information et le fait de savoir que des renseignements seront divulgués imposent une certaine discipline aux fonctionnaires et aux ministres. Le projet de loi propose de soustraire à l'application de la loi les renseignements liés à la sécurité, un terme qui n'est pas défini, les renseignements provenant de sources extérieures ou les secrets militaires. Ces renseignements auraient le même statut que les documents du cabinet, qui sont exclus de la loi. Il serait donc impossible de procéder à un examen indépendant de l'usage que fait le gouvernement de ces renseignements.

Le sénateur Andreychuk: À votre avis, est-ce que le processus que nous avons mis en place donne au gouvernement les pouvoirs dont il a besoin pour protéger les renseignements qui doivent l'être, et donne aussi aux Canadiens la garantie que le gouvernement agit de façon appropriée?

M. Reid: Oui.

Le sénateur Andreychuk: Vous avez fait allusion aux États-Unis. Les seuls gouvernements qui disposent de pouvoirs absolus comme celui-ci sont les régimes non démocratiques, c'est-à-dire les gouvernements qui prennent des décisions unilatérales qui ne font l'objet d'aucun examen. Ces gouvernements sont, dans l'ensemble, des dictatures totalitaires. Ce qui caractérise le régime démocratique, c'est l'existence d'un processus d'examen. Êtes-vous du même avis?

M. Reid: Oui. Les régimes démocratiques se prononcent en faveur du droit d'accès et de la liberté même quand ils sont soumis à des pressions.

Le sénateur Andreychuk: Le projet de loi C-36 a-t-il été rédigé la hâte, et devrait-on encourager le gouvernement à le revoir? Le gouvernement a indiqué qu'il ne veut pas porter atteinte aux droits de la personne, aux droits des parlementaires et aux droits démocratiques, sauf s'il est absolument nécessaire de le faire. Mis à part le fait qu'il faille donner des garanties à nos alliés, croyez-vous qu'on devrait encourager le gouvernement à revoir le projet de loi en raison de l'impact qu'il aura sur nos structures démocratiques fondamentales?

M. Reid: On considère cela comme un facteur déterminant. Ce droit, qui est reconnu par la loi, est l'un des droits les plus importants dont jouissent les Canadiens. Le mécanisme d'examen est l'un des seuls moyens que nous avons de vérifier ce que fait le gouvernement. Si ce mécanisme disparaît, les Canadiens n'auront alors aucune façon de savoir si le gouvernement agit de bonne foi.

Le sénateur Andreychuk: Vous avez parlé des conséquences qu'entraînerait la disparition d'un tel mécanisme.

La suppression de l'article 87 n'empêcherait aucunement le gouvernement canadien d'assurer notre sécurité, n'est-ce pas?

M. Reid: C'est exact. L'élimination de la disposition visant la Loi sur l'accès à l'information et, à mon avis, la Loi sur la protection des renseignements personnels ne l'empêcherait pas d'assurer notre sécurité.

Le sénateur Fraser: Monsieur Reid, vous prenez vos responsabilités au sérieux, mais je ne crois pas que la situation soit aussi grave que vous le laissez entendre. La ministre de la Justice a indiqué, quand elle a comparu devant le comité, que toutes les dispositions du projet de loi, tout acte ou omission en vertu de cette loi, feraient l'objet d'un contrôle judiciaire. Le citoyen qui veut contester une décision prise en vertu du projet de loi pourra s'adresser aux tribunaux.

M. Reid: Sénateur, quand la ministre délivre un certificat interdisant la divulgation de renseignements, cela veut dire que seules les personnes à l'interne peuvent avoir accès à ces renseignements. Le certificat délivré par la ministre ne peut faire l'objet d'aucune contestation judiciaire.

Le sénateur Fraser: Je pourrais demander à mon avocat d'intenter une poursuite au motif, par exemple, que les renseignements protégés par le certificat n'avaient pas besoin de l'être si l'objectif était de sauvegarder les relations internationales ou la défense ou la sécurité nationales. Si ma requête était rejetée, alors ces renseignements seraient protégés de toute façon en vertu de n'importe quel régime gouvernemental. Si l'information doit vraiment rester secrète dans le but de protéger les relations internationales ou la défense ou la sécurité nationales, elle le restera, et ce, dans toutes les grandes démocraties du monde, y compris celle-ci.

M. Reid: Il y a deux choses dont il faut tenir compte ici. D'abord, en désassujettissant les renseignements relatifs à la sécurité de la Loi sur l'accès à l'information et en leur accordant le même statut que les documents du cabinet, on interdit tout accès à ces renseignements, et ce, de façon permanente. On ne peut pas voir un document du cabinet.

Le sénateur Fraser: Vous partez du principe que tous les renseignements seront soustraits à l'application de la loi.

M. Reid: Le projet de loi précise que ces renseignements ne seront plus assujettis à la Loi sur l'accès à l'information. Ils auront le même statut que les documents du cabinet, qui sont exclus de la loi.

Le sénateur Fraser: Le procureur général peut - et non pas «doit» - délivrer un certificat interdisant la divulgation de renseignements. N'importe quel tribunal au Canada dirait sans doute que ces renseignements doivent être de nature bien précise, qu'ils ne doivent pas couvrir tout ce que contiennent les dossiers du ministère des Affaires étrangères. Ces renseignements doivent être de nature précise et leur non-divulgation doit être justifiée.

M. Leadbeater: Vous soulevez deux points, sénateur. Vous pouvez intenter une poursuite en vue de contester cette décision, mais quelle serait l'utilité d'un tel geste si le tribunal ne peut voir les renseignements? Comme il ne peut les voir, il est difficile pour lui de décider si la délivrance du certificat est justifiée ou non. Voilà le problème.

Les documents confidentiels du cabinet sont désassujettis des dispositions de la Loi sur l'accès à l'information pendant 20 ans seulement. Les renseignements visés par le certificat seraient désassujettis des dispositions de la loi pour toujours. Le projet de loi va beaucoup plus loin que la loi actuelle qui, elle, prévoit déjà des mesures pour protéger la sécurité nationale, les relations internationales, la défense du Canada, et les efforts visant à dépister et à réprimer les activités subversives ou hostiles. Si la ministre juge que certaines exceptions doivent être renforcées, c'est une chose. Toutefois, à mon avis, ce n'est pas ce qu'elle cherche à faire. À mon avis, elle cherche tout simplement à éliminer l'examen indépendant.

Le sénateur Fraser: Tout ce que je peux faire, c'est croire la ministre sur parole quand elle dit que chaque disposition du projet de loi pourrait être contestée devant les tribunaux. Elle s'attend à ce qu'il y ait des contestations, et je suis certaine qu'elle est sincère quand elle dit cela. Je m'attends également à ce qu'il y ait des contestations. N'importe quelle loi, en fait, peut faire l'objet de contestations. Toutefois, je comprends que vous soyez inquiet au sujet du caractère permanent d'une telle démarche. Sauf votre respect, le fait que cette décision ne soit pas prise par votre bureau n'a pas tellement d'importance pour moi. C'est quelqu'un d'autre qui prend la décision, à savoir un juge.

M. Reid: Nous ne prenons aucune décision. Nous n'avons pas le pouvoir de mettre en 9uvre des décisions.

Le sénateur Fraser: Vous décidez s'il y a lieu ou non de faire une recommandation.

M. Reid: Nous devons formuler une recommandation, ce que nous faisons, au ministère intéressé. Il revient ensuite au ministère concerné ou à l'auteur de la plainte de décider s'il doit s'adresser à un tribunal.

Le sénateur Fraser: Dans ce cas-ci, la personne qui s'adresse au tribunal ne peut compter sur votre aide.

M. Reid: Elle ne peut pas s'adresser à un tribunal parce que la divulgation des renseignements est interdite de façon permanente par le certificat. Le tribunal ne peut pas avoir accès aux renseignements.

Le sénateur Fraser: Mais il peut entendre la cause.

M. Reid: Le tribunal ne peut pas avoir accès aux renseignements. Il ne peut rendre une décision sur quelque chose qu'il ne peut voir.

Le sénateur Fraser: Si la validité de cet article est contestée par la Cour suprême, cela veut dire qu'il peut voir les renseignements. Je n'ai rien d'autre à dire à ce sujet.

Le sénateur Tkachuk: Je comprends parfaitement votre point de vue. Je fais de la politique depuis longtemps et il est de plus en plus difficile d'obtenir des renseignements des gouvernements. La période des questions n'est plus ce qu'elle était.

Je ne vois pas pourquoi les alliés nous demanderaient de leur donner des garanties que l'information fournie par eux resterait secrète. Comme vous l'avez mentionné, ils nous transmettent des renseignements depuis longtemps et ceux-ci n'ont jamais fait l'objet de fuites, ce qui n'a pas été le cas pour d'autres types de renseignements.

Qui sont les fonctionnaires du ministère de la Justice qui vous ont dit cela? Pouvez-vous les nommer ou est-ce que ces renseignements sont confidentiels?

M. Reid: Nous avons rencontré le sous-ministre pour qu'il puisse entendre notre point de vue. Nous ne sommes pas vraiment entrés dans un débat. Nous lui avons exposé nos préoccupations. Nous lui avons également indiqué qu'il existe d'autres façons de modifier le projet de loi pour renforcer les garanties données, si c'est ce qui intéresse le sous-ministre, et que cette approche est préférable au mécanisme assez arbitraire que prévoie le projet de loi.

Le sénateur Tkachuk: Nous avons parlé de cette question, hier. Le ministre de la Santé a manifestement créé une situation embarrassante avec cette histoire de Cipro. Est-ce que le gouvernement pourrait se prévaloir de la disposition relative à la sécurité pour empêcher la divulgation de renseignements reliés à ce dossier?

M. Reid: Comme l'expression n'est pas définie dans le projet de loi, nous ne savons pas vraiment ce qu'elle veut dire. Elle est toutefois définie dans la Loi sur l'accès à l'information, sauf que le projet de loi n'en fait aucune mention. Ils pourraient, s'ils le voulaient, invoquer n'importe quelle disposition.

Le sénateur Tkachuk: Les Américains sont toujours très inquiets quand on invoque la question des renseignements de source gouvernementale et le concept très vaste de «sécurité nationale».

Le gouvernement peut invoquer la sécurité nationale pour justifier n'importe quelle décision quand le pays est en état de guerre ou d'urgence. Même si dans ce cas-ci, alors qu'aucun état d'urgence n'a été décrété, le gouvernement pourrait invoquer la sécurité nationale pour justifier la non-divulgation de renseignements.

M. Reid: Sénateur, ces termes sont uniquement définis dans la Loi sur l'accès à l'information, qui précise l'utilisation qui peut être faite des renseignements administratifs. Les expressions «très secret» ou «strictement personnel» n'existent pas. Toutes les expressions sont définies dans la Loi sur l'accès à l'information.

Je précise, dans mon exposé, qu'il faudrait, pour définir ces expressions, se reporter à la Loi sur l'accès à l'information. On peut donner n'importe quel sens aux mots qui ne sont pas définis dans un projet de loi.

Le problème, en ce qui concerne les certificats qui sont délivrés par le ministre, c'est que ces expressions sont définies à l'interne. Il est très difficile pour un tribunal de rendre une décision quand il ne peut pas voir les documents.

Le sénateur Jaffer: J'ai souvent communiqué avec votre bureau dans le passé, et quand j'ai lu le projet de loi, je me suis demandé quel genre de renseignements seraient divulgués, surtout quand le ministre est appelé à intervenir dans des dossiers concernant des réfugiés.

Les fonctionnaires du ministère de la Justice ont fait des déclarations, hier, qui me laissent perplexe. Je vais vous lire ce qui a été dit et vous allez me dire ce que vous en pensez.

On a posé une question, et M. Piragoff a répondu:

M. Piragoff: Le certificat d'interdiction figure à l'arti cle 38.13 de la Loi sur la preuve au Canada. La disposition dont vous parlez en ce qui concerne le commissaire à l'information est essentiellement la même que pour le certificat qui serait délivré en vertu de la Loi sur la preuve au Canada.

Le sénateur Tkachuk: Dans ce cas, pourquoi avez-vous besoin de cette mesure?

M. Piragoff: La Loi sur la preuve au Canada s'applique aux instances pénales ou administratives qui ont été engagées. Pour ce qui est du commissaire à la protection de la vie privée ou du commissaire à l'information, l'instance n'est pas nécessairement engagée.

Le sénateur Tkachuk: Dites-moi les choses simplement. Je ne suis pas avocat et j'essaie de comprendre les choses comme n'importe quel citoyen les comprendrait. Je crois que le procureur général peut émettre un certificat en invoquant la sécurité nationale pour rejeter une demande de renseigne ments des médias ou de n'importe qui d'autre. Cela s'appliquerait-il de cette façon? Est-ce bien ce que le procureur général ferait en termes simples?

M. Piragoff: Le procureur général peut se servir de cette disposition, en dernier ressort, pour empêcher des renseigne ments d'une importance vitale pour la sécurité nationale d'être divulgués dans le cadre d'une instance judiciaire à laquelle la Loi sur la preuve au Canada s'applique ou dans le cadre de toute autre procédure gouvernementale.

C'est la partie qui suit qui me rend un peu perplexe. M. Piragoff ajoute:

Ce pouvoir existe chez nos alliés pour permettre à un ministre d'émettre un certificat empêchant la divulgation. Aux États-Unis, il y a différentes catégories de certificats. Certains émanent du président, et d'autres du procureur général des États-Unis. Le Royaume-Uni a également un système de certificats, de même, je crois, que la Nouvelle- Zélande et l'Australie.

Pouvez-vous me donner des éclaircissements là-dessus?

M. Reid: Ces certificats existent, mais ils sont tous examinés par des organismes de l'extérieur - des cours d'archives. Dans ce cas-ci, il est impossible d'examiner le certificat délivré. Il s'agit d'un pouvoir absolu. Vous pouvez uniquement examiner un certificat si vous pouvez avoir accès aux documents auxquels il renvoie. Si cela n'est pas possible, alors le tribunal ou l'organisme indépendant ne pourra procéder à un examen puisqu'il ne pourra voir la preuve.

Le sénateur Jaffer: Existe-t-il, au Royaume-Uni, des organismes indépendants?

M. Reid: Ils ont adopté une nouvelle loi au printemps et créé un poste de commissaire qui est responsable à la fois de la protection des renseignements personnels et de l'accès à l'information. La structure est essentiellement la même que celle que nous avons au Canada, où les fonctions du commissaire à la protection de la vie privée et du commissaire à l'information sont assumées par un seul bureau et une seule personne.

[Français]

Le sénateur Bacon: Il semble y avoir beaucoup de frustration qui se dégage de votre texte ce matin. Je le comprends puisque vous n'avez pas été consulté lors de la rédaction du projet de loi C-36. À la lueur des questions et des réponses qu'on vient d'entendre, on a l'impression que vous sentez partir certaines responsabilités de votre agence. Seriez-vous plus à l'aise si nous recommandions une révision annuelle de la loi ou vous maintenez que l'article 87 doit disparaître?

[Traduction]

M. Reid: Je serais d'accord avec l'idée de procéder à une révision annuelle de la loi. Toutefois, en ce qui a trait à la diffusion de renseignements administratifs, un tel examen ne servirait pas à grand-chose puisqu'il serait impossible d'avoir une idée du volume de renseignements qui ont été diffusés. Cet examen serait utile s'il existait un organisme qui était en mesure de nous indiquer le nombre de fois que cet article a été invoqué. Il n'existe aucune disposition de ce genre pour l'instant. La seule personne qui a le pouvoir de faire cela en vertu de la loi actuelle, c'est le commissaire à l'information. Or, il ne peut procéder à un tel examen en vertu du libellé actuel du projet de loi.

Il serait très difficile d'effectuer un examen que les députés et les sénateurs jugeraient satisfaisant.

Le sénateur Joyal: Monsieur Reid, je jette un coup d'oeil sur le paragraphe 69(1), dont il est question ce matin, et les articles 13, 14 et 15, que vous avez mentionnés, et je constate que la définition donnée au paragraphe 69(1) est d'ordre général, tandis que celle que l'on retrouve dans les articles 13, 14 et 15 est plus précise. Vous êtes d'accord avec moi?

M. Reid: Oui.

Le sénateur Joyal: C'est là la principale différence qui existe entre le pouvoir que possède actuellement le ministre de conserver certains renseignements, et le pouvoir que lui conférerait le paragraphe 69(1)?

M. Leadbeater: Sénateur, on remarque également une différence au niveau des renseignements qui ont trait aux relations internationales, à la défense nationale et aux efforts visant à dépister, prévenir ou réprimer les activités subversives. D'après la Loi sur l'accès à l'information, une exception peut être accordée s'il est prouvé que la divulgation de l'information causerait un préjudice. Ce critère ne figure pas à l'article 87 du projet de loi.

Le sénateur Joyal: On accorderait un pouvoir général au ministre. Le critère de préjudice serait supprimé, il ne serait pas nécessaire de démontrer que la divulgation des renseignements causerait du tort, et la divulgation des documents du cabinet, qui pour l'instant est limitée à 20 ans, serait interdite à tout jamais. Ce sont les trois grands points qui marqueraient la différence entre les articles 13, 14 et 15 de la Loi sur l'accès à l'information et l'article 69.1 qui est proposé dans le projet de loi.

M. Reid: On peut y ajouter un quatrième élément, soit l'absence d'examen indépendant.

Le sénateur Joyal: La ministre a dit qu'elle a besoin de ce pouvoir exorbitant en raison des circonstances actuelles. Pouvez-vous nous dire si certains de nos alliés à l'échelle internationale ou certains gouvernements provinciaux ont déjà refusé, dans le passé, d'autoriser la divulgation de renseignements au motif que cela nuirait à leurs intérêts?

M. Reid: M. Leadbeater est au bureau depuis longtemps. Je vais lui demander de répondre.

M. Leadbeater: D'après notre expérience, il n'y a jamais eu de cas où un gouvernement a indiqué que la divulgation de renseignements en vertu de la Loi sur l'accès à l'information compromettait les relations internationales, la défense nationale ou les efforts visant à dépister ou à réprimer les activités subversives.

Nous avons communiqué avec le ministère américain de la justice, et il nous a dits que les États-Unis ne croient pas que la Loi sur l'accès à l'information du Canada présente un risque pour les renseignements qu'il pourrait fournir au Canada dans ces domaines. Nous avons demandé au ministère de la Justice de nous fournir des exemples de cas où une telle chose s'est déjà produite. Il ne nous a fournis aucun exemple jusqu'à maintenant.

Le sénateur Joyal: Y a-t-il déjà eu, dans le passé, des fuites attribuables à votre bureau, qui auraient causé de l'embarras aux gouvernements, aux organismes ou aux pays étrangers?

M. Leadbeater: Il n'y en a jamais eu. En fait, dans le litige qui oppose notre bureau au cabinet du premier ministre, le gouvernement du Canada a laissé entendre qu'il s'agissait là d'une possibilité. La Cour d'appel fédérale a examiné nos dossiers. Elle a déterminé que le Bureau du commissaire à l'information n'avait jamais compromis l'existence de renseignements de nature délicate.

Le sénateur Joyal: Vous avez parlé du mécanisme d'examen qui est prévu dans la législation américaine et dans la nouvelle loi britannique. Avez-vous effectué une analyse comparative des systèmes en vigueur dans ces pays et au Canada, et pourriez-vous nous fournir une copie de cette analyse dans les jours à venir? Cela nous permettrait d'évaluer les arguments voulant que le paragraphe 69(1) et les autres dispositions du projet de loi qui autorisent l'examen de renseignements visant des pays étrangers, pourraient compromettre nos relations internationales. Comme vous le savez, la partie 6 du projet de loi contient une disposition qui prévoit la tenue d'un examen par un juge de la Cour fédérale. En fait, l'article 6, à la page 132, dispose, et je cite:

Dès que la Cour fédérale est saisie du certificat, le juge procède de la façon suivante...

Donc, le projet de loi prévoit déjà la tenue d'un examen d'un certificat par la Cour fédérale. Le certificat délivré par le ministre de la Défense nationale peut être examiné par la cour, et il pourrait viser des pays étrangers parce que des fonds auraient pu être transférés à des organismes gouvernementaux étrangers. À mon avis, il y a incompatibilité entre l'article 6 et l'article 69(1). Autrement dit, le certificat visé par cette disposition peut être examiné par le tribunal, puisque les renseignements concernés pourraient porter sur la sécurité nationale ou les relations internationales. Toutefois, d'après l'article qui s'applique à votre bureau, le certificat peut être utilisé à des fins beaucoup plus vastes, et en plus, il n'y a pas d'examen par le tribunal.

Il serait utile de comparer cette disposition du projet de loi, qui traite des certificats, aux mécanismes d'examen que prévoient les lois en vigueur au Royaume-Uni et aux États-Unis. Nous pourrions comparer la situation et ainsi avoir une meilleure idée du mécanisme d'examen qui devrait être inclus ou proposé au gouvernement.

M. Leadbeater: Nous acceptons volontiers de vous fournir ces renseignements, sénateur.

M. Reid: Je tiens à préciser que le Royaume-Uni vient tout juste d'adopter cette loi. Le volet touchant l'information n'a pas encore été mis en oeuvre.

Le sénateur Joyal: Je sais que la procédure d'examen et la portée de celle-ci sont des éléments clés. Une fois qu'un examen est autorisé, il faut décider de la portée de celui-ci.

Le sénateur Finestone: Monsieur Reid, vous avez dit que les certificats délivrés par le procureur général ne peuvent être déférés à un tribunal. Est-ce bien cela?

Le sénateur Beaudoin: Vous voulez dire examinés ou déférés?

Le sénateur Finestone: Déférés.

Le sénateur Beaudoin: Ils peuvent l'être.

Le sénateur Finestone: Est-ce que le tribunal peut avoir accès aux renseignements couverts par un certificat?

M. Reid: Non.

Le sénateur Finestone: Si le projet de loi utilise le mot «peut», qu'est-ce qui vous fait croire qu'il ne veut pas dire «doit»?

M. Reid: Le projet de loi dit qu'un certificat «peut être délivré». Une fois délivré, le certificat a pour effet d'empêcher le tribunal d'examiner les renseignements visés par celui-ci. Vous allez trouver cela à la page 88 du projet de loi.

Le sénateur Finestone: Aucun juge, y compris un juge de la Cour suprême du Canada, ne peut voir les renseignements visés par ce certificat si ceux-ci concernent les relations internationales, la défense ou la sécurité nationales. C'est bien cela?

M. Reid: Il faut faire très attention, sénateur. Le tribunal ne peut pas voir les renseignements qui sont visés le certificat. Il ne peut donc savoir de quel type de renseignements il s'agit.

Le sénateur Finestone: Le projet de loi vise également la Loi sur la protection des renseignements personnels. Est-ce que cette loi est visée au même titre que la Loi sur l'accès à l'information?

M. Reid: Il influe sur le droit qu'a un citoyen de voir les renseignements qui le concernent. Si les renseignements sont visés par un certificat, le même principe s'applique. Il ne peut y avoir accès, le tribunal ne peut les examiner et le commissaire à la vie privée non plus. Le principe est le même dans les deux cas, puisque les deux lois prévoient la tenue d'un examen indépendant des décisions prises par le gouvernement concernant les renseignements qui peuvent être communiqués.

La présidente: Sénateur Finestone, le commissaire à la vie privée va comparaître devant nous cet après-midi.

Le sénateur Beaudoin: Le sénateur Finestone soulève un point fascinant. Il est évident que le droit d'accès au tribunal est sauvegardé. La ministre a dit qu'on peut s'adresser à un tribunal. L'accès aux tribunaux fait partie de la primauté du droit. Toutefois, cela ne veut pas dire que le tribunal va examiner le certificat, et c'est ce qu'a dit M. Reid. «Déférer» et «examiner» ne veulent pas dire la même chose. On peut toujours avoir accès aux tribunaux. Un citoyen ou un gouvernement peut s'adresser à un tribunal, et il sera entendu.

À mon avis, les articles 87 et 69 annulent ce droit. Le tribunal va entendre votre requête, sauf qu'il va vous dire: «Le ministre détient ce pouvoir, point à la ligne.»

La différence dans ce cas-ci, c'est que ce pouvoir est reconnu par une loi. Je ne sais pas si on peut invoquer la Constitution, car il s'agit ici d'une loi. Si nous faisons abstraction de l'article 6 du Code criminel et que nous interceptons des conversations privées, nous allons à l'encontre des quatre décisions qu'a rendues la Cour suprême. Nous avons une loi constitutionnelle. Les choses ne sont pas claires ici. Il n'est pas question de la Constitution, mais d'une loi. Si aucun lien n'est établi entre ce projet de loi et la Constitution, alors nous devons nous en tenir à ce que dit la loi. Voilà ce que je pense. Autrement dit, oui, l'accès aux tribunaux est assuré en tout temps. Toutefois, le droit d'examen est quelque chose de différent. Ce droit, à mon avis, semble annulé.

Je me souviens des discussions que nous avons eues, hier, avec le sénateur Joyal, et je suis d'accord avec cet argument. Si nous passons outre à l'article 6 du Code criminel, que nous accordons le droit d'intervenir sans avoir à obtenir un mandat d'un tribunal, alors la loi constitutionnelle s'applique. Je ne sais pas si on peut invoquer le même argument dans ce cas-ci. Je ne le crois pas. Le problème se situe au niveau de l'autorité législative et de l'organe exécutif. Aucune protection constitutionnelle n'est prévue.

J'espère que ce que je dis est clair, monsieur Reid.

M. Reid: C'est très clair, sénateur, et je suis d'accord avec vous.

M. Leadbeater: Sénateur, pour ce qui est de la Loi sur l'accès à l'information, les tribunaux ont dit que le droit d'accès est un droit quasi constitutionnel en ce sens qu'il n'est assujetti à aucune autre loi du Parlement. Toutefois, il ne vient à l'idée de personne de soutenir que la Constitution prévoit un droit d'accès aux dossiers du gouvernement.

Cela dit, je ne crois pas qu'on puisse contester ce fait en se fondant sur la Charte ou la Constitution. Il faut plutôt se demander si la disposition répond adéquatement aux préoccupations concernant les préjudices qu'a évoqués la ministre.

Le sénateur Beaudoin: Cela fait 20 ans qu'on se demande ce qui est quasi-constitutionnel et ce qui est constitutionnel. En 1960, nous avions une déclaration des droits qui était quasi constitutionnelle, mais cela ne suffisait pas. C'est pour cette raison que M. Trudeau a prévu une Charte des droits et des libertés dans la Constitution. La Charte est constitutionnelle. La Loi sur l'accès à l'information est peut-être constitutionnelle. Toutefois, quasi constitutionnel ne veut pas dire constitutionnel.

[Français]

Le sénateur Prud'homme: Ma question pourrait s'adresser à un autre témoin ou au ministre responsable.

Certaines définitions dans cette loi demandent, à mon avis, beaucoup plus d'explication. Lors de ma lecture du projet de loi, j'ai cru voir que certains textes ne semblent pas se conformer exactement à la version originale. Avant la fin de l'examen du projet de loi C-36, j'aimerais que l'on révise la version française du texte de ce projet de loi.

À la page 13, ligne 35 de la version anglaise on lit ceci:

[Traduction]

83.01(1)b) an act or omission, in or outside Canada,

i) that is committed

(A) in whole or in part for a political, religious or ideological purpose, objective or cause...

Est-ce que ces termes sont définis en quelque part? Une personne peut juger qu'un acte est de nature idéologique ou religieuse, tandis qu'une autre personne peut penser le contraire. Je m'en remets à vous. Votre rôle est de protéger les Canadiens, de défendre les intérêts des Canadiens qui, sans le savoir, pourraient être touchés par cette loi.

Le paragraphe 83.01(2), à la page 15 de la version anglaise, se lit comme suit:

For the purposes of this Part, a terrorist activity is facilited whether or not

(a) the facilitator knows that a particular terrorist activity is facilitated...

[Français]

En français, on dit qu'il n'est pas nécessaire, pour faciliter une activité terroriste, que l'intéressé le sache. J'ai beau relire le texte, il y a peut-être quelque chose que je ne comprends pas. N'importe quel sénateur ou député peut s'adresser à un groupe sans savoir que ce groupe est visé par la loi. Cela m'intrigue beaucoup.

b) que cette activité ait été envisagée au moment où elle est facilitée;

[Traduction]

b) any particular terrorist activity was foreseen or planned at the time it was facilited...

En français, le libellé est assez fort.

[Français]

Il n'est pas nécessaire, pour faciliter une activité terroriste:

b) que cette activité ait été envisagée au moment où elle est facilitée;

c) que cette activité soit effectivement mise à exécution.

Quelqu'un peut faire un discours, sans commettre aucun acte, à des groupes dont des causes peuvent être interprétées par d'autres, en vertu des articles de la page 13, comme étant religieuses ou idéologiques.

Je suis très prudent, monsieur le ministre.

[Traduction]

On reste ministre toute la vie. Vous avez déjà occupé un poste de ministre, alors excusez-moi si parfois je vous appelle monsieur le ministre.

Il n'y a pas beaucoup de gens autour de cette table qui ont voté en faveur de la Loi sur les mesures de guerre. En fait, je pense être le seul à l'avoir fait. Vous savez que cette décision a été pour moi très déchirante. La pression était énorme. Toutefois, j'ai rempli mon devoir envers mon pays, le Canada, et j'ai voté en faveur de cette loi. Sachant ce que nous savons maintenant, j'aurais voté contre. Toutefois, compte tenu des renseignements qu'on m'avait fournis à l'époque, j'ai voté en faveur. Je me suis dit que, dorénavant, tant que je serai au Parlement, je ferai preuve d'une grande prudence quand des projets de loi de ce genre seront soumis.

Voilà pourquoi j'attache beaucoup d'importance au sens de ces dispositions, à la question de savoir qui prend les décisions et si cela sert les intérêts des Canadiens.

Si vous souhaitez faire un commentaire, monsieur Reid, je vous écouterai très attentivement.

M. Reid: Je regrette, mais je ne puis, en tant que commissaire à l'information, vous répondre. J'aimerais bien participer au débat, mais je ne peux pas le faire compte tenu de ma situation actuelle.

La présidente: Sénateur Prud'homme, vous pourriez peut-être aborder la question avec les fonctionnaires du ministère de la Justice quand ils vont revenir nous rencontrer.

Le sénateur Joyal: Monsieur Reid, vous dites, dans la dernière phrase de votre mémoire, que la disposition de temporarisation devrait se limiter au délai le plus court. Tout cela est bien relatif. Qu'est-ce que vous entendez par «délai le plus court»?

M. Reid: Quand la Loi sur l'accès à l'information a été adoptée, on a indiqué qu'elle ferait l'objet d'un examen dans les trois ans suivant son adoption. On pourrait s'inspirer de cette loi pour fixer un délai. Les États-Unis prévoient examiner, à la fin de février 2002, une des lois qui traitent de ce sujet. Ce serait peut-être trop tôt.

En tant qu'ancien ministre et député, je pense que le Parlement devrait soumettre ce genre de loi à un examen très approfondi.

Le sénateur Fraser: Je crois comprendre que, si l'on se fie au libellé actuel, le Parlement doit examiner le projet de loi dans trois ans.

La présidente: Oui, et cela comprend le Sénat.

Le sénateur Fraser: Et cela comprend également cette disposition-ci.

La présidente: Je tiens à remercier M. Reid et les autres témoins d'être venus nous rencontrer.

La séance est levée.


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