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SOCI - Comité permanent

Affaires sociales, sciences et technologie

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Affaires sociales, des sciences et de la technologie

Fascicule 7 - Témoignages


OTTAWA, le jeudi 5 avril 2001

Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie se réunit aujourd'hui à 11 h 05 pour examiner l'état du système de soins de santé au Canada.

Le sénateur Michael Kirby (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Sénateurs, nous poursuivons aujourd'hui notre étude sur le rôle du gouvernement fédéral dans les soins de santé et sur la façon dont ce rôle devrait évoluer au cours des années à venir. Certains d'entre vous se souviendront que, à la réunion que nous avons eue il y a trois semaines où il a été question de démographie et de vieillissement, nous avons entendu un certain nombre d'experts indépendants, mais Santé Canada n'était pas au nombre des témoins. Le ministère a toutefois des observations et des données qui seraient utiles au comité. Nous accueillons donc ce matin Mme Abby Hoffman, directrice générale, Direction des soins de santé; M. Cliff Halliwell, directeur général, Direction de la recherche appliquée et de l'analyse; et Mme Nancy Garrard, directrice, Division du vieillissement et des aînés. Merci de votre présence ici aujourd'hui.

Mme Abby Hoffman, directrice générale, Direction des soins de santé, Direction générale de la politique de la santé et des communications, Santé Canada: Je devrais vous signaler que nous sommes aussi accompagnés de deux autres personnes de Santé Canada: Mme Sue Morrison, de la Direction des soins de santé, et Mme Joan Lindsay, de la Direction générale de la santé de la population et de la santé publique.

Nous avons fait distribuer des documents, et je suis désolée qu'ils arrivent si tard. Vous vous êtes préoccupés d'un sujet ce matin et, sans vouloir juger d'avance de l'issue de vos discussions, nous sommes aussi préoccupés par le même sujet ces derniers temps.

Nous prévoyons passer en revue avec vous l'ensemble de la documentation, page par page et de façon très détaillée, dans le temps qui nous est imparti ce matin.

Le ministère se penche depuis un an environ sur le vieillissement de la population, en examinant son incidence sur le système des soins de santé et ces répercussions pour la santé.

Nous voulons donc aujourd'hui vous présenter certaines des conclusions auxquelles nous sommes arrivés. Nous savons que vous avez décortiqué les tenants et aboutissants de cette question avec les autres témoins. Nous avions des représentants à ces audiences, et nous avons aussi lu les transcriptions et les documents présentés par ces autres témoins.

Certains des point que nous allons soulever auront peut-être un air de déjà-vu, puisqu'ils ont été abordés par d'autres témoins. Nous avons néanmoins pensé qu'il pourrait vous être utile d'avoir le point de vue de Santé Canada.

D'après ce que nous savons du témoignage de ceux qui nous ont précédés, et aussi d'après les propos que nous allons tenir ici aujourd'hui, les pressions découlant du vieillissement de la population retiennent énormément l'attention. Je tiens à dire clairement dès le départ que, nous aussi, nous nous intéressons à la nature et à l'ampleur de ces pressions sur le système des soins de santé, mais que nous sommes tout aussi préoccupés, sinon plus, par le désir de comprendre les besoins en soins de santé de notre société vieillissante, de prévoir quels rajustements il faudra apporter aux soins de santé et de déterminer ce qu'il faudra faire pour répondre aux besoins en soins de santé.

Il ne faut pas conclure pour autant que nous banalisons les pressions que le vieillissement de la population exercent sur les dépenses en soins de santé, bien au contraire. Il ne faut pas conclure non plus que nous ne nous soucions pas des mesures à prendre pour nous assurer d'avoir un système aussi efficace et économique que possible et qui assure des services à tous les Canadiens, et plus particulièrement à ceux qui consomment surtout ces services, les cohortes plus âgées.

Vieillir en santé, voilà ce que nous souhaitons, et nous nous efforçons de faire tout notre possible pour aider les Canadiens à vivre toute leur vie en aussi bonne santé que possible.

Deux priorités très claires motivent notre travail et continueront de le motiver. Premièrement, il faut comprendre les pressions qui s'exercent sur les services et le financement. Deuxièmement, il faut trouver les meilleurs moyens possible de permettre à la population de vieillir en santé. On aurait tort de penser qu'une de ces priorités à préséance sur l'autre. Elles sont d'importance égale pour nous.

Notre document s'articule autour de trois grands thèmes. Le premier est le système des soins de santé et les effets du vieillissement de la population sur les coûts. Je ne sais pas dans quelle mesure les autres témoins se sont penchés sur cette question, mais nous avons tenté d'examiner ces effets sur les coûts en faisant la comparaison avec d'autres facteurs de coût. Car le problème qui se pose tient notamment au fait que les effets du vieillissement sont souvent examinés isolément. Il est très facile de trouver ainsi des arguments pour montrer que c'est le vieillissement qui exerce les pressions les plus considérables. Nous ne croyons toutefois pas qu'il en soit ainsi. Nous sommes d'avis qu'il faut examiner cette question à la lumière du contexte général.

Deuxièmement, dans la deuxième moitié du document, nous parlons des changements et des adaptations qu'il faudra peut-être apporter au système pour qu'il réponde aux besoins en soins de santé liés au vieillissement de la population. Nous décrivons brièvement ce que fait le gouvernement à l'heure actuelle pour répondre à ces besoins. Nous ne prétendons pas pour l'instant avoir déjà tout mis en oeuvre pour régler les problèmes qui se posent. Ce que nous vous présentons ici, c'est en partie notre plan de travail.

Troisièmement, même si c'est là un thème qui se retrouve en filigrane dans tout le document, nous parlons un peu de la façon dont les mesures de prévention et de promotion de la santé peuvent atténuer les pressions qui s'exercent sur les coûts. Nous soulignons à quel point il est difficile d'établir des prévisions parce que les questions sont complexes, les variables sont nombreuses et l'ampleur de certains facteurs demeure inconnue. Aussi nous ne pensons pas que les mesures de prévention et de promotion de la santé doivent simplement être considérées à la lumière des économies qu'elles permettraient de réaliser. Leur importance réside dans l'amélioration de la santé humaine, de la santé des Canadiens. En mesurer la valeur n'est pas à notre avis une affaire de calcul arithmétique pour déterminer dans quelle mesure elles permettraient de faire baisser les coûts.

Le sénateur Morin: Vous nous dites que c'est là votre position, mais je ne le vois nulle part par écrit. Cette affirmation est importante, mais je ne la retrouve nulle part dans votre document.

Mme Hoffman: Monsieur le président, nous avons fait distribuer les graphiques et les tableaux sur lesquels se fonde notre exposé. Nous pourrions vous faire parvenir d'autres documents à part ce que nous vous présentons ici aujourd'hui.

Le président: Je pense bien que c'est à cela qu'il faudra en venir.

Mme Hoffman: Nous pourrions rajuster le tir si vous le voulez, mais je propose que nous nous en tenions aux points qui se trouvent dans la documentation, étant donné les contraintes de temps. Nous pourrions ensuite apporter d'autres points au moment de la discussion.

Le président: Tous les principaux points seront ainsi abordés. Vous pourriez nous présenter les faits saillants, après quoi nous passerons aux questions.

Mme Hoffman: Les quelques premiers transparents portent sur la structure par groupe d'âge, qui n'a rien de nouveau pour vous. Nous examinons ici les effets de la longévité, et plus particulièrement la fertilité et l'évolution de la cohorte du baby-boom dans la structure par groupe d'âge. Vous connaissez bien ces tendances, même si elles vous ont peut-être été présentées sous une forme différente.

À la page suivante, vous voyez un tableau des dépenses en matière de santé réparties par groupe d'âge. Encore là, c'est quelque chose que vous avez déjà vu, mais nous vous le présentons ici de façon graphique. Nous vous montrons deux choses. L'âge a évidemment une incidence sur les dépenses, mais il faut notamment s'interroger sur le lien entre les dépenses en matière de santé et le taux de mortalité. Aussi, au lieu de montrer simplement que les dépenses augmentent avec l'âge, nous faisons ici le rapport avec l'approche de la mort.

Le président: Je veux être sûr de bien comprendre, car ce graphique où vous indiquez à la fois le taux de mortalité et les dépenses est utile. Dois-je comprendre qu'une personne en santé qui a 80 ans n'occasionne pas plus de dépenses pour le système de santé qu'une personne de 60 ans qui est elle aussi en santé?

Le phénomène du vieillissement intervient en raison de l'accroissement de la probabilité de la mort. C'est la dernière année avant la mort qui exerce des pressions sur le système, et il y a un plus fort pourcentage de personnes qui meurent à 80 ans qu'il y en a qui meurent à 60 ans. Nous avons tendance, autrement dit, à nous imaginer que les dépenses sont attribuables au vieillissement, mais ce n'est pas le cas. C'est plutôt la proximité de la mort qui est en cause. N'est-ce pas?

Mme Hoffman: C'est là une bonne façon de se représenter ce que sont les coûts en soins de santé à chaque extrémité de l'échelle des groupes d'âge. Nous savons tous, d'après ce que nous entendons dire ici et là et d'après les données, que plus on vieillit, plus on est susceptible de souffrir de certaines affections chroniques, qui nécessitent certains types de soins, avec les coûts qui en découlent au chapitre des soins de santé. L'écart entre les dépenses attribuables aux jeunes et celles attribuables aux vieux est toutefois davantage lié à la proximité de la mort qu'au simple vieillissement.

Le tableau de la page suivante présente le vieillissement par province. Nous montrons la proportion de la population qui est âgée de 65 ans ou plus pour chaque province à trois dates différentes. Vous trouverez peut-être intéressant de constater que, à l'heure actuelle, le profil démographique ne varie pas tellement entre les différentes provinces. Il ne sera pas non plus très différent en 2010, mais il variera énormément à partir de 2020.

Le président: Serait-il justifié d'interpréter ce graphique en fonction de la prospérité? Les deux provinces les plus prospères, l'Alberta et l'Ontario, conserveront un pourcentage plus grand de jeunes. Les moins prospères sont plus susceptibles d'être frappés par le vieillissement à mesure que les jeunes iront s'installer ailleurs. Est-ce bien cela qu'il faut retenir de ce graphique?

Sénateurs, je vous rappelle que vous devez allumer votre microphone pour que je puisse vous donner la parole, sinon les médias ne vous entendront pas.

Le sénateur Morin: Je voulais simplement avoir la confirmation que, non seulement elles ne les perdent pas, mais elles les attirent.

Le président: C'est les deux.

Le sénateur Graham: Monsieur le président, il y a un programme qui incite les personnes originaires du Cap-Breton à revenir y passer leurs vieux jours. Je ne sais pas si j'aurai la chance de vivre assez longtemps pour faire cela, mais l'Atlantique offre beaucoup d'avantages aux retraités. Peut-être que c'est ce qui explique en partie l'attrait.

M. Cliff Halliwell, directeur général, Direction de la recherche appliquée et de l'analyse, Direction générale de l'information, de l'analyse et de la connectivité, Santé Canada: Ces différences dans la structure par groupe d'âge reflètent deux phénomènes. Le premier est celui de la migration, non pas seulement interprovinciale mais aussi internationale, qui touche à peu près toutes les provinces de façon égale. Les provinces riches accueillent aussi la majeure partie des migrants internationaux, qui sont généralement plus jeunes que le reste de la population. Le phénomène qui touche le Canada atlantique en particulier est celui de la migration de retour des personnes âgées.

Je ne vous apprendrai rien en vous disant cela, mais ce qui a empêché la population du Canada atlantique de vieillir beaucoup plus que celle de l'ensemble du pays, c'est que le taux de natalité a mis plus de temps à commencer à baisser que dans les autres provinces. Nous sommes là en présence de deux phénomènes. Il y a d'abord la migration de sortie, mais il y a aussi le taux de natalité plus élevé qui alimente la migration de sortie.

Mme Hoffman: Vous avez ensuite les transparents qui montrent les facteurs de coût des soins de santé, puis les répercussions de ces facteurs de coût. Il faut analyser et comprendre une foule de facteurs qui entraînent des changements dans les dépenses en matière de santé, comme le vieillissement de la population, la technologie et l'innovation, l'état de santé de la population de même que les préférences et les valeurs qui influent sur la nécessité, la demande et l'accessibilité des services de santé. Il faut examiner les changements apportés aux composantes du réseau des services de santé. Certaines s'adaptent mieux et de façon plus efficiente et économique que d'autres. Il y a aussi, bien sûr, la question du coût relatif des services de santé comparativement aux autres facteurs de prix qui contribuent à l'inflation des prix dans le contexte général.

Les moyens financiers peuvent être un facteur de dépense plutôt qu'un facteur de coût. En période de récession ou d'austérité, ou encore quand la dette et le déficit sont considérables, l'incitation à dépenser est très forte, mais les gouvernements ont alors des moyens financiers réduits. Quand leur situation financière s'améliore, les gens s'imaginent qu'ils sont dans une époque de prospérité, et quand le déficit se résorbe, ils exercent des pressions pour que l'on dépense plus au chapitre de la santé parce qu'on a une plus grande marge de manoeuvre financière. Nous disons que tous ces autres facteurs sont importants, mais que la santé des finances publiques à un moment donné est aussi un facteur.

Le transparent suivant, qui s'intitule «Facteurs de coût des soins de santé», donne une idée estimative de la part du vieillissement dans la croissance des dépenses réelles par habitant dans le domaine de la santé. La partie en rouge des différentes barres du graphique reflète la croissance attribuable à tous ces autres facteurs dont j'ai parlé, tandis que la partie en bleu représente les coûts liés au vieillissement.

Nous pouvons faire des projections raisonnables quant à l'évolution de la population et de la structure par groupe d'âge de 2001 jusqu'à 2030, année représentée dans la barre de droite du graphique. Nos prévisions relatives à la taille de la population et à la structure par groupe d'âge en 2030 ne risquent guère de changer, malgré les avantages résultant de la migration ou de l'accroissement de la longévité. C'est là une constante, mais le tableau se fonde sur le système des soins de santé tel qu'il existe aujourd'hui.

Il s'agit là des dépenses globales en matière de santé. Nous n'avons pas cherché à faire une ventilation entre le secteur public et le secteur privé, nous contentant de présenter l'ensemble des services offerts aujourd'hui, qu'ils soient financés par le public ou le privé.

Nous pouvons constater que le vieillissement devient un facteur de croissance de plus en plus important. Si nous prolongions nos projections jusqu'en 2040 ou 2050, la contribution du vieillissement atteindrait un sommet qui exercerait des pressions sur le système.

Le président: Si vous me permettez de clarifier votre propos, ces données ne représentent pas que les dépenses publiques, mais bien l'ensemble des dépenses relatives aux soins de santé. Elles englobent les maisons de soins infirmiers, les médicaments et bien d'autres éléments qui ne sont pas nécessairement à la charge du secteur public.

Mme Hoffman: Tout à fait.

Permettez-moi de passer à la série suivante de transparents. Il s'agit de quatre transparents sur la morbidité liée aux AVC et le nombre total de décès liés aux AVC chez les hommes et les femmes. Nous avons inclus ces transparents pour illustrer ce que je vous disais au début de mon exposé au sujet de la difficulté de prévoir la demande de services en fonction de l'état de santé et les coûts qui pourraient y être liés.

Chacun des transparents se veut une représentation de ce que sera, d'après les épidémiologistes, l'évolution du nombre d'hom mes et de femmes qui auront un AVC et de la morbidité liée aux AVC, ainsi que du nombre de personnes qui auront un AVC et qui en mourront en 2010.

Au bas de chaque transparent, nous présentons l'évolution des modèles de croissance. Nous pouvons constater une baisse attribuable aux progrès réalisés au chapitre des soins et des traitements ainsi que de la prévention. Le nombre de cas continuera toutefois à augmenter en raison de l'évolution des effectifs de la population et des changements dans la répartition des groupes d'âge.

L'AVC n'est qu'une affection parmi d'autres. Nous avons des renseignements semblables sur les autres. Essayez de vous imaginer, si vous le voulez bien, toute la gamme des affections et des maladies chroniques liées au vieillissement dont nous sommes au courant et tentez de faire une synthèse de toutes ces données pour en arriver à une estimation de la demande de soins de santé et des coûts qui en découleraient. Il est extrêmement difficile de tenir compte de tous ces facteurs.

Que faut-il conclure de la constatation à laquelle nous mènent les deux graphiques sur le nombre de décès liés aux AVC, c'est-à-dire que ce nombre est en baisse? On peut en conclure que les gens ne mourront pas aussi vite après avoir eu un AVC qu'auparavant. Ils survivront et le niveau de soins de santé dont ils auront besoin variera.

Le président: Ces graphiques montrent que, de nos jours, on est moins susceptible de mourir des suites d'un AVC qu'on ne l'était autrefois. Par contre, quand on a un AVC - cela semble terrible à dire - et qu'on n'en meurt pas, les coûts pour le système de santé sont énormes parce qu'il faut beaucoup d'autres soins.

Le sénateur Morin: Le nombre de personnes qui souffrent d'AVC est en baisse. Ce n'est pas simplement que le nombre de décès diminue, c'est aussi la fréquence des AVC qui diminue.

Mme Hoffman: Ce n'est pas seulement le nombre de décès qui diminue.

Le sénateur Morin: Ce n'est pas ce que disait notre président. Ce n'est pas seulement que ceux qui ont un AVC survivent, mais c'est aussi qu'il y a moins de personnes qui font un AVC.

Mme Hoffman: Le nombre d'AVC par habitant diminue, mais la répartition des groupes d'âge est telle qu'il pourrait augmenter.

Le président: Le nombre absolu va augmenter parce que la population grossit, mais il y en aura moins par habitant.

Mme Hoffman: La question est encore plus compliquée du fait qu'il ne s'agit pas simplement de la morbidité ou du nombre de décès liés aux AVC, autrement dit, du nombre de ceux qui auront un AVC et qui en mourront ou qui y survivront et auront besoin de soins. Quand on survit à un AVC, à une crise cardiaque ou à une autre maladie qui autrefois était fatale mais qui ne l'est pas nécessairement aujourd'hui, on est susceptible d'être frappé par d'autres maladies. Je veux parler ici de ceux qui survivent à un AVC. Ils pourraient malheureusement contracter le diabète ou une autre maladie cardio-vasculaire chronique quelconque, et ils pourraient aussi être vulnérables au cancer ou à d'autres maladies.

Ce à quoi je veux en venir, c'est que, même si nous disposons de beaucoup de données, il est extrêmement difficile de déterminer exactement ce qu'il faut en conclure. Voilà ce que nous avons tenté de montrer avec cette série de transparents.

Les deux qui suivent présentent des comparaisons internationales. Encore là, ces comparaisons sont valables en dehors du cadre de notre discussion d'aujourd'hui. Si vous vous reportez au tableau plutôt qu'au graphique - c'est le deuxième transparent -, vous verrez que, si le Canada soutient assez bien la comparaison avec d'autres pays industrialisés pour ce qui est de la part du PIB que représentent ces dépenses en matière de santé, nous avons une population assez jeune par rapport à ces autres pays.

Il convient aussi de souligner le pourcentage de la population qui a plus de 65 ans. Malgré les risques que cela comporte, nous avons fixé l'âge repère à 65 ans pour faire nos comparaisons. Or, il n'y a pas nécessairement de lien entre le pourcentage de la population qui a plus de 65 ans et le pourcentage du PIB que représentent les dépenses. En règle générale, tout pays, peu importe son point de départ, commence à sentir l'effet des dépenses liées à l'âge au fur et à mesure que sa population vieillit. Comme vous pouvez le voir, la proportion est très élevée dans certains pays.

Le sénateur LeBreton: Comme en Finlande.

Mme Hoffman: Oui. En Finlande et au Japon, la proportion de la population qui a plus de 65 ans est très élevée, mais ces pays ont réussi à limiter, non pas seulement leurs dépenses actuelles au titre de la santé, mais aussi la croissance de ces dépenses.

Le président: Il s'agit ici des dépenses globales au titre de la santé, et pas seulement des dépenses publiques?

Mme Hoffman: Tout à fait.

Le président: Dites-moi si je me trompe, mais voici la conclusion que je tire de ce tableau: les systèmes canadiens et américains coûtent manifestement plus chers que ceux des autres pays du monde, en ce sens que les dépenses canadiennes ne sont que légèrement inférieures à celles de la France, par exemple, où la proportion de personnes âgées est bien plus élevée.

Autrement dit, en dépit du fait que notre population est plus jeune, seuls les États-Unis consacrent une part plus importante de leur PIB à la santé que nous. Est-il raisonnable de tirer cette conclusion?

Mme Hoffman: Oui.

Le sénateur Morin: Pourriez-vous m'expliquer ce graphique? Je ne comprends pas. Je suis peut-être un peu lent. Je ne comprends pas les chiffres ordinaux.

Prenons n'importe quel pays comme exemple et expliquez- nous ce que signifie les 5, 7, 9 et 11 qui se trouvent là.

M. Halliwell: Le graphique est plus difficile à comprendre que le tableau qui se trouve à la page suivante. Nous montrons pour chacun des pays la part du PIB que représentent les dépenses liées à la santé pour cinq années différentes. C'est l'axe de gauche. Quand les dépenses augmentent, elles augmentent en pourcentage du PIB. Il y a ensuite le pourcentage de la population âgée de plus de 65 ans. Chaque ligne, celle du Japon par exemple, représente les chiffres pour 1960, 1970, 1980, 1990 et 1997. Vous voyez comme les pourcentages évoluent avec les années. Il est plus facile de voir cette évolution dans le tableau, où les années sont représentées en clair.

Le président: Je suppose que le dernier chiffre qu'on donne pour la France en 1997 est erroné.

M. Halliwell: Je crois que oui.

Le président: Il est impossible que ce soit 11,5. Pour que nous ayons des données complètes, vous pourriez peut-être nous faire parvenir plus tard le bon chiffre.

Le sénateur Morin: Cela me surprend de constater que le Japon est assez semblable au Royaume-Uni et à l'Italie. J'aurais pensé qu'il aurait eu une proportion beaucoup plus élevée de personnes âgées. Le pourcentage semble toutefois être semblable à celui des pays européens, à moins que je ne me trompe.

Mme Hoffman: La croissance suit une trajectoire beaucoup plus abrupte. Si l'on faisait la projection, la population du Japon grossirait à un rythme beaucoup plus rapide, même si l'Italie n'est pas très loin derrière.

Le sénateur Morin: On voit donc que les États-Unis et le Canada dépensent plus au titre de la santé que les pays d'Europe et le Japon. Comme notre population est plus jeune, nos dépenses sont encore plus considérables. Si nous avions une population plus vieille ou aussi vieille que celle des autres pays, nous serions sans doute à 15 ou 16 p. 100. C'est la première fois que je me rends compte de cela. C'est très important.

Mme Hoffman: Nous pourrons peut-être revenir à cette question, mais continuons puisque le temps presse.

Les transparents suivants portent essentiellement sur une des questions qu'on nous a demandé d'aborder. Que font le gouvernement fédéral et Santé Canada pour ce qui est notamment d'atténuer les coûts liés au vieillissement et de s'assurer que les Canadiens vieillissent en santé?

Le transparent qui suit indique les progrès réalisés en vue d'un vieillissement en meilleure santé. Je sais que vous avez discuté de cela. Nous considérons que les mesures de prévention et de promotion de la santé sont utiles pour tous les groupes d'âge. Bien entendu, il est toujours possible de faire des choix, de décider de privilégier certains groupes d'âge, mais nous sommes d'avis qu'il n'est jamais trop tard pour améliorer l'état de santé.

Passons maintenant au transparent suivant, un graphique sur la mortalité. Vous avez peut-être déjà entendu des témoignages à ce sujet. Malheureusement, le type de données statistiques que nous aimerions avoir et qui permettrait de montrer, non pas seulement la mortalité, mais aussi la morbidité, est difficile à obtenir, mais je pense que les données que vous avez là sont quand même valables.

Le graphique montre les accidents de la route en bleu, les suicides et les homicides en rouge et en gris et la mortalité liée aux chutes en magenta en haut.

Nous avons voulu vous donner ces informations parce que, bien que toutes les causes de mortalité soient en principe évitables, les chutes sont parmi les plus évitables. Vous voyez la mortalité extrêmement élevée qui est liée aux chutes chez les plus de 75 ans, et il y a à notre avis une multitude de stratégies et de mesures préventives qui pourraient être mises en place pour réduire considérablement le nombre de ces décès. Il ne s'agit là que d'un exemple parmi d'autres.

Le même argument vaut pour les autres principaux facteurs de risque des diverses maladies chroniques les plus fréquentes qui sont liées à l'âge - l'usage du tabac, le manque d'activité physique et une mauvaise alimentation. Bien que nous ne soyons peut-être pas en mesure de vous présenter un graphique aussi spectaculaire que celui qui montre la fréquence des chutes, le même argument pourrait s'appliquer.

Je pourrai vous donner plus de détails à ce sujet quand nous passerons aux questions, mais j'estime que le graphique est très parlant.

Le transparent suivant porte sur la démence. La fréquence des cas de démence liée à l'âge ressort très clairement ici, d'où l'incidence des changements démographiques.

Malheureusement, nous sommes loin de savoir ce que nous voudrions savoir au sujet des causes de cette maladie. D'où les limites pour l'instant de notre effort de prévention. La pharmaco thérapie peut certainement atténuer les symptômes au stade initial de la maladie.

Nous savons qu'environ 50 p. 100 des personnes atteintes de démence vivent dans la collectivité. L'autre moitié vit en établissement. Il y a des répercussions pour le système des soins de santé d'un côté comme de l'autre. La pharmacothérapie peut prolonger le stade initial où la démence est assez légère, mais le fardeau qui en résulte pour les familles, la collectivité et les aidants naturels non rémunérés s'en trouve manifestement accru. Le progrès de la pharmacothérapie a donc une incidence sur les soins à domicile et ceux qui sont offerts dans la collectivité de même que sur les services de répit pour les aidants naturels.

Par ailleurs, si nous réussissons à réduire le nombre relatif de personnes atteintes de démence qui doivent être placées, il ne faut pas oublier que le fait qu'elles n'aient plus besoin d'être placées ou que leur placement soit retardé ne se traduit pas des économies nettes pour la société ou pour le système des soins de santé, en fait de coûts humains ou financiers. Comme je l'ai dit, le fardeau se trouve simplement déplacé vers les familles et les collectivités.

Le président: Qui paie la pharmacothérapie de quelqu'un qui ne reçoit pas le supplément de revenu garanti ou l'aide sociale, qui est au premier stade de la démence et qui est à la maison au lieu d'être dans un établissement?

Mme Hoffman: Les personnes âgées ont ordinairement droit au régime d'assurance-médicaments des provinces mais comme vous ne l'ignorez pas, ces régimes varient beaucoup d'un endroit à l'autre au pays et sont parfois assujettis de franchisses et de quotes-parts importantes, quel que soit l'âge de la personne. Il ne fait aucun doute qu'il y a un problème d'accès.

Le président: Avez-vous des chiffres sur le problème de l'accès? Je me demandais si l'on a des chiffres sur le nombre des plus de 65 ans qui ont besoin de médicaments mais ne les ont pas parce qu'ils n'ont pas les moyens de les acheter et qu'aucun programme ne les leur fournit?

Le sénateur Morin: Il y a eu une étude au Québec là-dessus.

Mme Nancy Garrard, directrice, Division du vieillissement et des aînés, Santé Canada: La meilleure étude sur l'inaccessibilité pour raison financière, produite par McGill et le Dr Robyn Tamblyn, a examiné les conséquences d'un changement au régime d'assurance-médicaments du Québec. Ils ont suivi la situation des personnes âgées et constaté qu'il en coûtait en fait plus cher au régime d'assurance-maladie à cause du nombre plus élevé de consultations à l'urgence. Quand ils ont examiné l'ensemble du régime d'assurance-maladie, les économies dans le budget de l'assurance-médicaments ont été plus que compensées ailleurs dans le système de santé. C'est une excellente étude et je vous la recommande.

Le président: Pourriez-vous vous assurer que notre attaché de recherche ait les détails de cette étude?

Mme Garrard: Oui, nous allons les lui fournir.

Mme Hoffman: La dernière série de transparents porte sur les mesures envisagées actuellement par les divers ministères de la Santé au pays. Nous avons commencé par l'entente sur la santé des premiers ministres parce que notre démarche générale, c'est que les conséquences du vieillissement de la population et les genres d'adaptations du système nécessaires ont des particularités. Le plus gros de ce que nous devons faire pour soulager les pressions reliées au vieillissement concerne les mesures que nous devons prendre pour réformer et renouveler le système en général.

L'information sur la première page explique la nature de l'accord conclu par les premiers ministres en septembre dernier. En deux mots, il y aura une augmentation des transferts pour la santé dans le TCSPS dans les années à venir, ainsi qu'un certain nombre de fonds ciblés et, au-delà, les premiers ministres ont convenu que leurs gouvernements respectifs allaient collaborer ensemble sur un certain nombre de priorités, allant des ressources humaines en matière de santé à la technologie de l'information dans le domaine de la santé.

Je précise qu'il semble y avoir un ennui technique dans le deuxième transparent. Il est censé illustrer les dépenses de santé pour certaines cohortes d'âge et, malheureusement, les données des 45 à 64 ans semblent manquer.

Le président: J'ai une question à poser à propos de ce graphique. Ce n'est peut-être qu'une conjecture de ma part et vous ne connaissez peut-être pas la réponse. Quand je regarde ceci, l'idée qui me vient à l'esprit c'est que l'hôpital est l'unique établissement qui est payé. Imaginons un instant que toutes les formes de soins étaient financées par un programme national. Dans quelle mesure cela enlèverait-il des gens dans les hôpitaux et les placerait-il dans des milieux moins coûteux?

Autrement dit, dans quelle mesure les gens vont-ils dans le milieu le plus coûteux, c'est-à-dire l'hôpital, parce que c'est tout ce qu'ils ont les moyens de s'offrir? Tout le reste, ils doivent le payer eux-mêmes et ils n'ont peut-être pas l'argent qu'il faut.

Mme Hoffman: Votre argument à du sens. Ce sont les cliniciens qui décideront des soins à fournir en fonction en partie de ce qu'ils estiment être les problèmes d'accès s'ils recommandent que quelqu'un quitte un établissement où les coûts sont couverts pour aller dans un autre où ils ne le sont pas. Comme je le disais plus tôt à propos des médicaments sous ordonnance, il y a divers modèles au pays de financement des soins de longue durée et des responsabilités de paiement, soit au moyen d'une assurance privée ou de frais à la charge des malades.

Le sénateur Morin: Je précise que ce n'est pas un tableau récent. Les médicaments ont aujourd'hui dépassé les médecins comme coût; cela date donc de quelques années.

Le président: Je pense que le sénateur Morin pense à un autre chiffre. Il s'agit ici des sommes par habitant. Nous avons fait le calcul du pourcentage de l'ensemble des dépenses de santé.

Le sénateur Morin: Même en chiffres absolus, les médicaments sont plus élevés. Pas forcément les médicaments sur ordonnance, mais l'ensemble des médicaments.

L'autre chose, c'est que les coûts hospitaliers ont baissé avec les années. D'année en année, les sommes par habitant pour les hôpitaux ont baissé. On constate effectivement ce dont vous parlez. Nos dépenses pour les hôpitaux sont en train de baisser et nos dépenses pour les médicaments sont en train d'augmenter.

Le président: Je connais des cas dans ma propre famille de gens qui occupent des lits pour malades de soins aigus parce que d'autres formes de soins, moins chères, ne sont pas disponibles. Au lieu d'affecter des sommes aux soins de santé en passant par les médecins, une province pourrait peut-être créer un budget global de sorte que l'argent pourrait être transféré d'un établissement à un autre pour offrir le service le moins coûteux. Par exemple, on pourrait transférer un malade qui occupe un lit d'hôpital à 1 000 $ par jour dans un lit de soins infirmiers à 350 $ par jour. Y a-t-il des travaux de recherche empirique sur la question?

Mme Hoffman: Nous avons vu des conseils régionaux de santé avec des budgets globaux. Il n'y a pas que la qualité des soins - les bons soins au bon endroit -, mais on croit qu'il y a des gains d'efficacité dans ce genre de système.

Malheureusement, au Canada, nous n'avons pas autant d'expé rience avec cela que l'on voudrait. Même là où il y a ce qu'on appelle des budgets globaux, en général les budgets de médecin ne relèvent pas des conseils régionaux de santé.

M. Halliwell: J'aimerais inciter à la prudence à propos de ce genre de comparaison de coûts. Si vous comparez le coût moyen par jour-malade à l'hôpital avec le coût moyen du jour-malade dans un établissement de soins de longue durée, vous aurez une impression trompeuse, parce que certains de ces malades hospitalisés sont très coûteux. Dans un certain sens, il faut connaître le coût du soin d'un malade qui n'a pas besoin de soins intensifs, ce que l'on appelle les services d'hébergement de l'hôpital. Il faut comparer cela au placement en établissement. Le coût moyen par personne à l'hôpital sera toujours très élevé mais cela ne vous dira pas si la personne que vous sortez de l'hôpital pour la placer ailleurs permettra de faire des économies ailleurs du même ordre.

Le sénateur Morin: L'assurance-médicaments est inégale au pays. Certaines provinces n'ont rien et d'autres sont assez généreuses. Il serait bon de voir ce qui se fait dans chacune des provinces. Vous êtes en train de décrire une situation qui vaut dans certaines provinces mais pas dans d'autres. Vous pourriez peut-être communiquer l'information au comité.

Le président: Mme Hoffman a parlé du budget global des meilleurs conseils régionaux. Peut-on en avoir un exemple? Moi, je pense instinctivement à celui de Calgary, mais c'est le seul que je connaisse, le Calgary Regional Health Authority. Y a-t-il des exemples resplendissants de bon plan global régional?

Mme Hoffman: La raison pour laquelle nous citons Calgary en exemple dans ces cas, c'est qu'un centre de Calgary est nettement supérieur aux autres. Moi aussi j'aurais choisi Calgary. D'autres parlent de la région de Victoria. La Capital Health Authority, qui englobe Edmonton et la région avoisinante, en est un autre.

Malgré le phénomène de la régionalisation, la plupart des conseils régionaux de santé n'ont pas d'emprise directe sur l'ensemble non seulement des moyens financiers, mais aussi des établissements et des fournisseurs, et, comme nous parlons de vieillissement, du lien avec les services sociaux. Dans bien des cas, la réduction des coûts et, honnêtement, des services carrément inappropriés dans le système de santé dépend d'un meilleur déploiement des services sociaux et des fournisseurs de services sociaux.

Le président: Les autorités régionales n'ont pas de contrôle sur les coûts des médecins parce qu'il y a un barème d'honoraires négocié à l'échelle provinciale.

Mme Hoffman: Sauf si les médecins sont salariés. Même dans ce cas-là, il est probable que le centre régional de santé n'aura pas le contrôle sur la rémunération du médecin.

L'autre série de transparents, sur le renouvellement du système de santé, est seulement une façon pour nous de dire quelque chose à propos de la façon dont le problème du vieillissement de la population se répercute dans divers secteurs. J'attire votre attention là-dessus parce que cela nous ramène à ce qui a été dit il y a quelques instants. Si vous consultez le tableau suivant, sur les hospitalisations, vous verrez que la durée moyenne du séjour, toutes causes confondues, a baissé pour tous les groupes d'âge ces dix dernières années. Toutefois, il y a beaucoup de raisons à cela, y compris la pratique clinique et la sévérité de la maladie en cause. De plus, une grande partie de ceci tient de la pratique hospitalière, où il y a des pressions pour transférer les malades dans des établissements de soins aigus, et de la nouvelle technologie.

Le sénateur Morin: La chirurgie en est un bon exemple.

Mme Hoffman: Pour le même état de santé, on peut faire un séjour plus court en hôpital aujourd'hui à cause de la technologie, de la pratique clinique, etc. Une certaine partie est aussi attribuable aux pressions sur les gestionnaires d'hôpitaux et au personnel médical de faire passer les gens plus rapidement. Toutefois, je dirai aussi que la majorité des études n'attribuent pas le nombre moindre de jours du séjour moyen simplement au fait que les administrateurs d'hôpitaux mettent les gens à la porte plus rapidement et les laissent dans un état de santé moindre au bout du compte.

Je vais parler des soins primaires parce qu'il n'y a pas beaucoup de détails dans les documents que vous avez. Quand on parle de soins primaires, on parle aussi du point d'accès au système; pas seulement au bout du compte les besoins en soins pour malades chroniques, mais aussi la place dans le système où beaucoup du service de prévention ou de promotion de la santé sera assuré. Nous parlons de diagnostic précoce de maladies chroniques, de sorte que les stratégies de gestion de la maladie, si besoin est, peuvent s'appliquer tôt, avant qu'il n'y ait un degré élevé d'acuité. Nous parlons de soins primaires s'ils sont bien gérés, et qui ont le genre de liens aux services sociaux dont j'ai parlé. Dans l'accord de l'automne dernier, le secteur des soins primaires a beaucoup d'importance pour nous.

Pour gagner du temps, je signalerai que tous ces autres secteurs - soins actifs, soins de soutien de longue durée, produits pharmaceutiques, soins palliatifs, ressources humaines en santé - ont un volet vieillissement. Nous essayons de nous en occuper. Nous pourrons en parler davantage, mais je constate que le temps file.

Voici les conclusions que nous voudrions vous présenter, que nous ayons été ici pour une heure ou plus. Oui, le vieillissement de la population sera un facteur de coût majeur au cours des 20 à 25 prochaines années mais il n'est pas et ne sera pas l'élément de pression le plus important; cela touchera d'autres questions: la technologie, les attentes de la population, etc. Lorsque le gros de la cohorte des baby-boomers aura 75 ans et plus (entre 2025 et 2040), le vieillissement de la population exercera une pression plus grande sur les dépenses de la santé. N'oubliez pas que cela est dans 24 ans et que l'on peut faire beaucoup dans l'intervalle.

Ce que nous dépensons pour la santé n'est pas uniquement le résultat d'une demande fondée sur un état de santé et un besoin objectif. D'autres facteurs influent sur la demande, notamment les attentes de la population. À notre avis, il n'y a pas que l'état de santé des baby-boomers dans leurs dernières années qui influera sur la demande, mais aussi les valeurs et les attentes de ce groupe. Ces attentes poseront une menace aussi grande à la viabilité et à la durabilité du système que les besoins de santé objectifs lui imposeront.

Le quatrième point, c'est que l'amélioration de la santé aidera à compenser certaines augmentations de coûts associées au vieillissement de la population, mais pas en totalité. Nous pensons que les efforts pour améliorer la santé sont inséparables de la gestion des coûts. Cela fait partie du mandat fondamental de notre activité, à savoir améliorer la santé de la population de tous âges.

Il faudra donc adapter les systèmes si nous voulons que les pressions reliées au vieillissement soient gérées à des coûts raisonnables, et cela prend du temps. Nous y travaillons actuellement et nous continuerons d'y travailler.

Comme je l'ai dit il y a un instant, les politiques visant à aider les gens à vieillir en santé peuvent améliorer les résultats en matière de soins de santé et de qualité de vie, et aider à gérer les pressions qui s'exercent sur le système de santé. Pour ces raisons, vieillir en santé devrait être une des priorités de l'action fédérale et de nos actions en matière de santé.

Le sénateur LeBreton: On pourrait soutenir que vous êtes en train de développer un point de départ. Vous auriez été intéressés par le témoignage du Dr David MacLean hier, lorsqu'il a parlé du coût du système de soins de santé et de la façon dont nous allons y faire face au fur et à mesure que la population vieillira. Il a dit que le problème est l'économie politique de ces questions de médicaments et de technologies. Il a évoqué une situation où les intérêts pharmaceutiques, les gens dans la technologie et les médecins travaillent dans leur propre domaine, mais personne ne soutient la prévention et personne n'en paie le prix. J'aimerais savoir ce que vous en pensez. De toute évidence, vous êtes du même avis.

Deuxièmement, nous avons examiné le pourcentage de la population vieillissante et le pourcentage du PIB et nous avons pris note des chiffres en Italie, en France et au Japon. Ces chiffres ne confortent-ils pas vos arguments à propos du vieillissement en santé et de la prévention? Nous avons tous entendu dire qu'ils n'ont pas les mêmes niveaux de maladies cardiaques au Japon. Nous entendons dire la même chose à propos de l'Italie, même s'ils semblent manger des aliments riches. Ils consomment beaucoup d'huile d'olive et d'autres aliments dont on sait aujourd'hui qu'ils peuvent prévenir les maladies cardiaques. Peut-être pas forcément d'un dessein délibéré de leur part, mais fortuitement, grâce au régime alimentaire et au mode de vie, ils ont une population vieillissante dont on peut s'occuper à moindre coût dans le système de soins de santé?

Mme Hoffman: Nous voyons les coûts moins élevés chez eux mais les populations plus âgées comme combinaison de facteurs de mode de vie et la façon dont les services sont organisés. Un certain nombre de ces pays ont une collaboration étroite entre les services de santé et les services sociaux. Ils ont plus de succès à maintenir les gens qui souffrent de maladies chroniques dans des cadres à proximité, où les services sont fournis à l'extérieur de leurs hôpitaux de soins aigus ou établissements de soins de longue durée. C'est ces deux choses. C'est le travail de promotion préventif de la santé sur toute une population, plus l'organisation des services.

Essayer d'accroître l'attention pour la prévention alors que personne ne paie pour est une source d'inquiétude. Nous allons nous occuper de cette question, tout comme les autres gouvernements du pays, lors de la réforme des soins primaires. Nous nous attendons à ce que les gens recevront la première et traditionnelle ligne de soins médicaux et de traitements dans les environnements de soins primaires, mais ils recevront aussi du counselling et des conseils individuellement, ou à l'échelle de la population, à propos des divers aspects de la promotion de la santé et des activités préventives.

Une grande partie de ceci n'apparaît pas dans les accords de rémunération à l'acte entre le médecin dans sa localité et les gouvernements provinciaux. C'est une raison pour laquelle la réforme des soins primaires concerne aussi la révision et la modification des mécanismes de financement. Ces genres de services pourraient être offerts aux gens sans entraîner des dépenses individuelles pour des choses qui n'apparaissent pas dans le régime de rémunération à l'acte, tout en offrant accès aux soins traditionnels et aux services de traitement qui y apparais sent.

C'est une partie de ce qui fait des soins primaires et du rassemblement des infirmières et des médecins et des autres genres de professionnels de la santé un véritable défi. C'est ce dont parlent vraiment ceux qui parlent de la réforme des soins primaires.

Le sénateur LeBreton: Le public serait plus sensibilisé à la question s'il y avait un lien direct entre la prévention en matière de soins de santé et les impôts payés. Je ne sais pas comment les politiques publiques pourraient le permettre, mais il faudrait pouvoir convaincre la population qu'en suivant un certain régime préventif en matière de santé, il pourrait y avoir des avantages fiscaux directs.

Hier, le Dr MacLean nous a dit que si nous voulons régler la question, nous ne nous y prenons pas bien. La prévention doit être une priorité, et non pas quelque chose qu'on fait en passant.

Mme Garrard: Sur le même sujet, il y a aux États-Unis des régimes par capita, pour toute une région. On paie pour les prestations de santé. Il est donc dans l'intérêt de tous d'encoura ger les diagnostics précoces, la promotion de la santé et la prévention des maladies.

Ici, nous payons pour du travail de «réparation». Nous n'encourageons pas beaucoup les efforts de promotion de la santé qui pourraient être entrepris. Si je peux ajouter à ce qu'a dit Mme Hoffman, ce n'est pas seulement dans le régime de soins de santé primaires qu'il n'y a pas suffisamment de mesures incitatives. C'est la même chose pour tous les autres secteurs de promotion de la santé.

J'étais là hier, quand on a parlé de l'éducation physique pour les enfants. Il ne s'agit donc pas seulement du secteur de la santé. C'est encore plus difficile quand on essaie de faire cette promotion dans tous les secteurs.

Le sénateur Graham: Je remercie les témoins. Je suis content de vous revoir tous. Vous dites qu'il faut être prudent quand on fixe la limite à 65 ans. C'est quelque chose qui me touche de près.

Le sénateur LeBreton: Et ça me touche de plus en plus près, chaque année.

Le sénateur Graham: Le sénateur LeBreton le prend en riant. En parlant d'elle, je pense à certains de mes petits-enfants, dont elle est parente, et qui ne peuvent comprendre pourquoi grand-papa ne peut pas patiner aussi vite ni aussi longtemps qu'eux.

Le sénateur Morin: Patinez-vous vraiment?

Le sénateur Graham: Oui, je patine. Je faisais une course avec l'un de vos jeunes cousins, sur le canal, l'hiver dernier. Bien entendu, je perdais chaque course, puis j'ai vu ces deux armoires à glace d'hommes qui marchaient le long du canal. J'ai demandé à mon petit-fils, George, de rencontrer ces deux messieurs. Je ne les connaissais pas. Je leur dis que je faisais des courses avec mon petit-fils et leur ai demandé de le tenir jusqu'à ce que j'aie fait la moitié du chemin, avant de le laisser partir.

Le sénateur LeBreton: Je doute que George ait été d'accord.

Le sénateur Graham: Ils l'ont retenu. Mais il m'a rattrapé à l'arrivée.

Doit-on continuer de fixer le début de la vieillesse à 65 ans?

Mme Hoffman: Bien franchement, je ne crois pas que ce soit particulièrement utile. On s'en sert parce que c'est l'âge fixé par la loi sur certaines questions se rapportant à la retraite, mais ce n'est pas utile autrement. Même si certains avantages liés à la retraite commencent à être versés normalement à l'âge de 65 ans, cela n'a rien à avoir avec le revenu, ni avec les contributions fiscales.

Ce n'est pas particulièrement utile. Dans nos données, vous verrez que nous nous servons de l'âge de 65 ans à cause de son utilité historique. Nous pouvons au moins évaluer des groupes d'âge par 10 ans, au-dessus de 65 ans. Pour de bonnes analyses, il faudrait probablement utiliser des groupes d'âge sur 5 ans.

Le sénateur Graham: Hier, nous avons beaucoup parlé des mesures de prévention en santé, des programmes d'amélioration de la santé et des programmes de promotion de la santé. Avez-vous des données précises sur la corrélation entre les effets positifs des programmes de promotion de la santé et l'améliora tion de la santé des Canadiens en général?

Mme Garrard: Je pense que nous avons ces chiffres pour tous les âges.

Je pense que nous avons suffisamment de données qui prouvent que la prévention des chutes et les améliorations à la qualité de vie, au sujet des trois facteurs de risque dont nous avons parlé, améliorent la santé des personnes âgées. Un investissement précoce sous forme de promotion de la santé pendant toute la vie est avantageux, pendant toute la vie.

Il y a une preuve intéressante qui démontre que les foyers de soins infirmiers qui consacrent du temps aux exercices de force et d'équilibre pour les résidents ont constaté une amélioration dans l'autonomie de leurs résidents et dans leur capacité d'agir indépendamment, ce qui facilite la tâche pour les employés. Même lors des périodes les plus faibles, on peut toujours améliorer la qualité de vie.

À notre avis, il n'est jamais trop tard. Évidemment, plus tôt on commence, plus longtemps on demeure en bonne santé, mais le vieillissement n'est pas synonyme de mauvaise santé.

Le sénateur Graham: Devrions-nous dépenser davantage dans des programmes de promotion de la santé?

M. Halliwell: Il est assez facile de démontrer que des comportements sains mènent à des résultats plus sains. Ce qu'il nous manque, c'est de l'information sur la capacité de certains de nos programmes et activités d'influer sur ces comportements.

Mme Garrard vient de citer un exemple du rapport entre une activité de promotion de la santé et un changement de comportement et de résultats.

Le sénateur Callbeck a soulevé la question de régime et de résultats éventuels. Nos connaissances sont beaucoup plus sommaires dans ce domaine et sur le rapport entre les instruments de politique disponibles et notre capacité de les changer. Il est vraiment important de trouver les instruments de politique qui peuvent mener à des comportements plus sains. À mon avis, nous ne connaissons pas très bien ce domaine et il faudrait améliorer la situation.

Le sénateur Graham: Un des médecins qui ont témoigné hier nous a dit qu'il pouvait démontrer une corrélation directe entre la santé et les programmes de promotion de la santé dans certains domaines. Est-ce que Santé Canada aurait des statistiques pour appuyer de telles déclarations?

Mme Garrard: Je crois que le Dr MacLean parlait de la façon de réduire le taux de maladies cardio-vasculaires. C'est une maladie pour laquelle il y a des facteurs de risque très clairs. Si on pouvait trouver des moyens de réduire ces facteurs de risque, notamment l'activité physique, un régime ou cesser de fumer, on verrait une diminution du nombre de maladies cardio-vasculaires.

Ce que M. Halliwell veut dire, c'est qu'en dépit du fait que nous savions depuis 40 ans que le tabagisme cause le cancer, 29 p. 100 des Canadiens continuent de fumer. Nous savons tous que ce n'est pas bon pour le santé. Le défi, c'est de trouver des moyens de changer les attitudes envers ce comportement. C'est une question très complexe.

Nous savons également qu'il y a un rapport direct entre l'éducation et les pratiques en matière de santé. Parmi nos plus grands défis, mentionnons les gens à faible revenu et peu instruits, pour lesquels il y a de multiples facteurs de risque.

Honorables sénateurs, il vaut la peine d'étudier davantage comment bien cibler un éventuel nouvel investissement.

Le sénateur Graham: Monsieur le président, à mon avis, nous devons nous pencher sur cette question.

Le sénateur Callbeck: J'aimerais revenir sur la diapositive sur les comparaisons internationales. Je sais que le sénateur LeBreton a posé une question sur des pays tels que le Japon et le Royaume-Uni, qui ont une plus grande population vieillissante que le Canada, mais qui consacrent une partie moins importante de leur PIB à la santé. Mme Hoffman a répondu que c'était le résultat des modes de vie et de l'organisation des services, et qu'on fait plus au niveau de la collectivité. Puis-je en déduire que les personnes âgées dans ces pays sont en meilleure santé que les personnes âgées au Canada?

Mme Hoffman: En général, oui. Les facteurs liés au mode de vie sembleraient indiquer que les gens sont en meilleure santé. L'organisation est tout simplement une façon de gérer les services pour répondre aux besoins en matière de santé. Cela ne veut pas forcément dire que les gens sont en meilleure santé.

Je ne veux pas préjuger, mais on pourrait dire que si les gens sont en meilleure santé, il est plus facile d'offrir la bonne proportion de services de santé et de services sociaux, car on a davantage besoin de services communautaires d'appui que de soins et de traitements.

Nous savons que certains pays mettent l'accent sur la notion de «vieillissement chez soi». L'idée, c'est d'entreprendre la bonne adaptation communautaire afin que, à mesure que l'état de santé des gens change, en particulier vers la fin de leur vie, les services puissent être offerts là où les gens habitent, dans leur environne ment habituel, près de leur famille et de leur communauté.

Nous avons tous entendu parler de longévité comparative. Nous savons que l'espérance de vie la plus grande est au Japon, puis en France.

Le sénateur Morin: Non, au Canada.

Mme Hoffman: L'espérance de vie est un peu plus grande au Japon. Mais il faut faire attention de ne pas dire que l'espérance de vie se traduit par un meilleur état de santé dans les cinq à huit dernières années de la vie, la période où les gens sont plus touchés par les handicaps et une perte d'autonomie.

Je ne suis pas certaine, à moins que mes collègues puissent m'éclairer là-dessus, que nous ayons une réponse claire sur cette question.

Mme Garrard: Les comparaisons internationales sont diffici les étant donné la manière dont nous suivons les données sur l'état de santé. Il semblerait y avoir assez de preuves pour indiquer que l'état de santé est meilleur au Japon, mais pour un bon nombre de pays européens, ce n'est pas aussi clair.

Nous nous distinguons de certains pays d'Europe et d'Asie en fait de taux de personnes placées en établissement, ou de soins de longue durée. Au Canada, à peu près 6 ou 7 p. 100 des personnes âgées habitent dans des établissements de soins de longue durée. Ce pourcentage est beaucoup plus bas dans d'autres pays. Ce chiffre reflète notre longévité, mais également notre façon de prendre soin des gens lorsqu'ils vieillissent. Ce n'est pas noir et blanc. À notre avis, nous tenons très bien la comparaison avec d'autres pays en fait d'état de santé.

Mme Hoffman: Une étude récente indique qu'il y a des baisses importantes de l'invalidité dans les pays de l'OCDE. Nos données indiquent également une baisse au Canada, mais pas aussi importante. Il se peut qu'il s'agisse d'une question de définition, ou bien le Canada accuse un recul. Je doute que ce soit le cas.

Ce qu'on vient de dire est essentiel, à mon avis. Avec des niveaux assez semblables d'invalidité, de perte de mobilité et de perte d'autonomie, pourquoi, relativement parlant, avons-nous une aussi grande proportion de personnes dans ces cohortes d'âge, que nous appelons les personnes âgées fragiles, qui sont placées dans des établissements? L'appui financier pour ce genre d'arrangement de vie en établissement n'est pas uniforme. Malgré le besoin, dans de nombreux cas, de compter sur des assurances privées et d'assumer soi-même les frais, pour une raison ou une autre nous semblons continuer à orienter les gens vers les soins en établissement beaucoup plus que dans d'autres pays.

Le sénateur Morin: C'est une question de culture.

Le président: Je crois qu'il y a une culture qui n'existe pas en Amérique du Nord, mais qui semble exister dans bon nombre d'autres endroits.

Le sénateur Morin: La fréquence est très faible dans les Maritimes. C'est la culture. Ils ont tendance à garder leurs personnes âgées chez eux plus que dans d'autres parties du pays.

Le président: Mon intuition me dit que c'est une question de culture.

Le sénateur Morin: J'aimerais féliciter Mme Hoffman et ses collègues. Je faisais partie du conseil consultatif des sciences de Santé Canada et je suis ravi et fier de ce que vous avez dit ce matin.

Corrigez-moi si j'ai tort. La prévention et la promotion de la santé sont extrêmement importantes en soi. Pour cette seule raison, il faudrait continuer dans ce sens. Il ne faudrait pas continuer seulement parce que cela permet de réduire les coûts, car il n'y a pas de preuves tangibles que ce sont des facteurs importants dans la réduction des coûts des soins de santé.

Vous avez fait une autre déclaration très claire. Vous avez dit que la prévention et la promotion de la santé étaient liées à la réforme des soins primaires. Hier, nous avons essayé de comprendre la question d'infrastructure et tout le reste. Je crois que vous l'avez très bien dit. L'aspect de la promotion de la santé et de la prévention fait partie de la réforme des soins de santé telle qu'elle est effectuée dans plusieurs provinces - l'Ontario, le Québec et ainsi de suite.

Nous nous rendons compte que nous devrions nous pencher sur les services de santé dans d'autres pays afin de voir ce qu'ils font, non seulement pour ce qui est des hôpitaux et des médecins, mais également pour les soins à domicile et le régime d'assurance-médicaments. Cela fait partie du programme de notre comité.

Mme Hoffman: Pour ce qui est de vos deux derniers commentaires, je ne crois pas qu'il y ait de différence entre ce que nous avons exprimé et ce que vous avez dit par rapport à l'importance de la réforme du système de soins de santé primaires comme étant la clé pour améliorer la prévention et la promotion. Il est essentiel que nous poursuivions dans cette direction.

Nous devrions examiner l'organisation des services dans d'autres pays. Il y a des travaux intéressants qui se font actuellement à cet égard et auxquels nous participons par l'entremise de l'OCDE.

Permettez-moi de revenir sur votre premier commentaire, à savoir qu'il ne faut pas poursuivre la prévention et la promotion seulement pour réaliser des économies. Je ne veux pas donner l'impression que nous ne savons rien du tout sur les économies qui pourraient se faire dans certains domaines à l'égard de facteurs de risque liés à certaines maladies ou conditions. Il y a une forte corrélation entre la réduction de certains facteurs de risque et la réduction de certaines maladies. Nous savons qu'il y a des économies à réaliser. La corrélation entre le tabagisme et les maladies cardio-vasculaires est claire; nous avons déjà les preuves. Nous savons que le fait de cesser de fumer est le facteur le plus important pour réduire la mortalité et la morbidité associées aux maladies cardio-vasculaires.

Si vous tenez compte de tous ces points, le rapport entre certains facteurs de risque et les maladies ou les conditions n'est pas toujours évident. Même lorsqu'il est évident, nous ne savons pas quelles autres maladies pourraient s'ensuivre.

Revenons sur un de mes commentaires concernant les facteurs qui contribuent aux dépenses en santé. La capacité financière et les valeurs du grand public sont des forces motrices tellement importantes que ce n'est pas seulement une question d'étudier l'état de santé d'une population, d'évaluer les coûts associés aux soins et au traitement de ces maladies, et d'établir un budget pour nos systèmes de soins de santé. Il faut également tenir compte de tous les problèmes de prévision que nous avons mentionnés.

Nous concluons qu'il y a des économies à réaliser en mettant en place de bonnes mesures de prévention et de promotion de la santé. Voilà une raison de continuer dans ce sens, mais la raison la plus importante c'est d'avoir une population en meilleure santé pendant toute la vie de ces personnes.

Le président: J'ai une dernière question. Étant donné l'importance de la réforme des soins primaires comme moyen de fournir beaucoup de programmes de promotion de la santé, est-ce que cela pose des questions constitutionnelles si certaines provinces demandent de l'argent et veulent décider quels programmes elles vont adopter?

J'essaie de comprendre comment, du point de vue du fédéral, nous pouvons composer avec le fait que la santé est une responsabilité provinciale. Y a-t-il des moyens de mettre en place un programme de prévention sans la participation des provinces, ou en évitant la pire situation, soit de leur donner l'argent en espérant qu'elles vont le dépenser pour les fins prévues, mais sans garantie?

Mme Hoffman: Il y a essentiellement deux grands domaines dans le monde de mesures de prévention et de promotion de la santé. Dans le premier cas, il y a la prestation de services de prévention et de promotion de la santé aux particuliers, soit ce qui devrait se produire, à mesure que la réforme des soins primaires progresse, dans les centres de soins de santé primaires dans les collectivités où les médecins et les infirmiers et infirmières et d'autres fournisseurs offrent certains services à une population moyennant un soutien. En général, ils fournissent ces services à des particuliers. Les particuliers se rendront au centre de santé et qui recevront les services.

Il est difficile pour nous d'intervenir directement ou d'influer sur les services offerts dans ce genre d'environnement. Cela dit, nous sommes en train de discuter avec les gouvernements provinciaux quant aux activités à fournir par l'entremise de ces centres de soins de santé primaires. Le Fonds de transition en soins de santé primaires dispose d'un budget de 800 millions de dollars et sert de levier important dans les discussions sur ces activités avec les provinces.

L'autre domaine est plutôt axé sur la population. Je ne parle pas des 30 millions de Canadiens et plus, mais de populations ciblées. On reconnaît depuis longtemps la participation, l'expertise et les contributions du gouvernement fédéral dans les activités de promotion de la santé et de santé de la population. Nous entreprenons généralement ces activités et ces campagnes axées sur la population avec les provinces et avec les organisations communautaires à l'intérieur des provinces. C'est un domaine où nous pouvons intervenir directement, quoiqu'en partenariat avec les ONG et les provinces.

Le président: Vous dites que vous n'avez pas entendu parler de la question constitutionnelle pour ce qui est de la promotion. Pour la prévention oui, par contre.

Mme Hoffman: C'est vrai dans une certaine mesure. Mais ce n'est pas comme si nous avions essayé d'offrir nous-mêmes des services aux particuliers.

Le président: Ce n'est pas ce que je dis. J'essaye de comprendre quelque chose. Si le gouvernement fédéral décidait, par suite d'une recommandation de notre comité ou pour toute autre raison, qu'il faut augmenter de manière significative les fonds destinés à la promotion de la santé et à la prévention, faudrait-il alors négocier un accord fédéral-provincial? Y serions- nous obligés? Ou est-ce que le gouvernement fédéral pourrait agir comme il l'aurait décidé?

Mme Hoffman: Peut-être que tout cela dépend de ce qu'on appelle un accord. L'accord des premiers ministres sur la santé a été signé l'automne dernier. Une fois que les premiers ministres se sont entendus sur la priorité à accorder aux soins primaires, le gouvernement fédéral a octroyé 800 millions de dollars au chapitre des coûts de transition de la réforme des soins primaires.

Sans juger de l'opportunité d'augmenter ou non cette somme, si quelqu'un disait qu'à l'avenir le gouvernement fédéral est prêt à investir davantage dans les soins de santé primaires, nous aurions les moyens - et nous en parlons actuellement avec les provinces - de mettre cet argent entre les mains des centres de soins de santé primaires par l'entremise des provinces.

Le président: Je comprends que vous puissiez investir l'argent comme vous voulez dans les soins primaires. Mais supposons qu'on veuille une cible plus précise que les soins primaires. Nous comprenons que les soins primaires doivent être assurés, mais nous voulons vraiment que l'argent soit destiné aux activités de prévention et de promotion de la santé, et les soins primaires ne sont qu'un mécanisme de prestation de services. Est-ce possible ou faut-il un nouvel accord fédéral-provincial?

Mme Hoffman: Il faut certainement un accord fédéral-provincial. Non pas pour insister sur les fonds et le programme actuels qui font l'objet de discussions avec les provinces, mais il faut simplement que les gouvernements s'entendent sur la nécessité de consacrer davantage des ressources affectées aux soins primaires à la prévention et à la promotion. C'est une chose dont on discute déjà avec les provinces et c'est l'une des priorités de l'accord des premiers ministres de l'automne dernier.

Le sénateur Morin: Le gouvernement fédéral a un rôle très important à jouer dans la promotion de la santé. Le meilleur exemple, c'est la question du tabac, qui relève entièrement du fédéral, et nous ne nous en occupons pas.

Mme Garrard: Dans d'autres modèles, la promotion de la santé se fait au niveau communautaire. Nos programmes destinés aux enfants, comme le Programme d'aide préscolaire aux Autochtones, le Programme d'action communautaire pour les enfants et le Programme canadien de nutrition prénatale sont des programmes de collaboration avec les provinces visant certains résultats. Il y a donc moyen d'agir ensemble. Le leadership fédéral est certainement incontesté et en demande dans les domaines de la recherche, de l'observation, des infrastructures, de la mise à l'épreuve de modèles innovateurs, dans le partage des pratiques exemplaires, en plus du marketing social et de la sensibilisation.

M. Halliwell: J'aimerais revenir à une question dont on a parlé précédemment. Il faut s'assurer de ne pas isoler l'argent destiné à ces activités, puisque le grand avantage de l'intégration des soins provient des économies liées aux coûts particuliers qui se trouvent dans le même secteur. Si quelqu'un d'autre doit en profiter, il n'y a plus le même avantage pour ceux qui font ces économies. Dans la description donnée par Mme Garrard de l'efficacité des programmes dans les foyers de soins infirmiers, les économies se font à l'interne et quand on fait le calcul, on voit leur avantage. Si l'argent est cloisonné dans diverses activités, l'effet ne sera plus le même.

Le président: Vous en assumerez les coûts et quelqu'un d'autre aura les économies; on ne vous encourage donc pas à faire des économies.

Merci à tous pour votre participation. Je vous remercie pour l'information. Elle était très utile.

La séance est levée.


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