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SOCI - Comité permanent

Affaires sociales, sciences et technologie

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Affaires sociales, des sciences et de la technologie

Fascicule 3 - Témoignages du 7 novembre 2002


OTTAWA, le jeudi 7 novembre 2002

Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie s'est réuni aujourd'hui à 11 h 08 pour examiner le projet de loi C-8, Loi visant à protéger la santé et la sécurité humaines et l'environnement en réglementant les produits utilisés pour la lutte antiparasitaire.

Le sénateur Marjory LeBreton (vice-présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La vice-présidente: Je vous souhaite la bienvenue. Nous allons entendre ce matin la Dre Claire Franklin et Mme Geraldine Graham de Santé Canada, ainsi que M. Basil Stapleton de Justice Canada.

Dre Claire Franklin, directrice exécutive, Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire, Santé Canada: Je vous remercie de m'avoir invitée aujourd'hui pour vous parler. J'ai tenu compte des points soulevés au cours du débat de la deuxième lecture et j'y répondrai au fur et à mesure de ma présentation.

[Français]

L'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire, ARLA de Santé Canada, administre la Loi sur les produits antiparasitaire, la LPA, au nom du ministre de la Santé. L'ARLA est responsable de la réglementation des pesticides au palier fédéral pour l'ensemble du Canada. Le projet de loi C-8 rehausserait de multiples façons notre capacité de remplir ce mandat.

[Traduction]

Contrairement à la législation actuelle, le projet de loi C8 décrit clairement le mandat du ministre relatif à l'administration de la loi qui met au premier plan la protection de la santé et de l'environnement. Le projet de loi contient également un préambule qui donne le ton aux dispositions de fond de cette législation en reconnaissant une grande variété de facteurs qui touchent la réglementation des pesticides au Canada. Ces facteurs incluent l'importance de la gestion de la lutte antiparasitaire pour l'économie du Canada, les compétences complémentaires des paliers fédéral et provinciaux ou territoriaux dans ce domaine et l'importance de la participation du public et des intervenants dans le système de réglementation.

Un élément important du système de réglementation de la lutte antiparasitaire est l'examen des risques éventuels pour la santé et pour l'environnement, ainsi que la valeur des pesticides proposés pour utilisation au Canada, avant leur commercialisation. Le projet de loi C-8 renforcerait le fondement législatif susceptible d'assurer que l'emploi d'un pesticide au Canada ne soit homologué avant que l'ARLA ait déterminé que le produit présente des risques sanitaires et environnementaux et une valeur acceptables.

Qu'est-ce qu'un risque «acceptable»? En matière de risques sanitaires et environnementaux, le projet de loi C-8 stipule que les risques d'un pesticide sont acceptables lorsqu'il existe une certitude raisonnable qu'aucun dommage à la santé humaine, aux générations futures ou à l'environnement ne résultera de son utilisation. Cette norme est très rigoureuse et elle a déjà été mise en pratique depuis un certain temps. Pour la première fois, cependant, cette définition sera enchâssée dans la loi.

La «valeur» d'un pesticide est définie dans le projet de loi C-8 comme étant l'apport du produit dans la lutte antiparasitaire en fonction, notamment, de son efficacité, de la tolérance de l'hôte, de ses avantages pour la santé, la sécurité et l'environnement et des conséquences de son utilisation sur l'économie et la société. Nous insistons que la valeur d'un pesticide, ainsi que ses risques, doivent être jugés acceptables avant l'homologation pour faire en sorte que le public ne puisse être exposé à un risque quelconque, aussi petit soit-il, si le produit n'est tout simplement pas utile.

L'ARLA exige que les entreprises de produits antiparasitaires mènent des essais en profondeur selon les normes internationales et fournissent les données de ces études de façon à pouvoir évaluer les risques sanitaires et environnementaux d'un pesticide. Ensuite, les évaluateurs de l'ARLA examinent attentivement ces résultats afin de déterminer quels seront les risques du produit lors d'une utilisation conforme à l'emploi proposé par l'entreprise.

Contrairement à la loi actuelle, le projet de loi C-8 indique des facteurs importants dont il importe de tenir compte lors de ces évaluations. Ce projet de loi précise que l'on doit notamment prendre en considération: la variabilité de la sensibilité des groupes principaux identifiables, y compris les nourrissons et les enfants; l'application d'une marge de sécurité additionnelle afin de protéger les nourrissons et les enfants des risques présentés par les résidus de pesticides dans les aliments et lors de l'utilisation des pesticides à l'intérieur et à l'extérieur des maisons et des écoles; les effets cumulatifs des pesticides ayant un mécanisme commun de toxicité et l'exposition globale venant des aliments, de l'eau potable et des usages domestiques des pesticides; et les politiques gouvernementales, telles que la Politique de gestion des substances toxiques.

Ces concepts ont déjà été adoptés dans les pratiques actuelles de l'ARLA mais ils n'ont pas été précisés dans la loi jusqu'à maintenant.

Une question en ce qui concerne la marge de sécurité additionnelle relative à la protection des enfants a été soulevée lors du débat de la deuxième lecture. Le projet de loi exige l'application d'une marge de sécurité additionnelle 10 fois plus grande à moins que le ministre ne détermine qu'une marge de sécurité différente serait appropriée d'après des données scientifiques fiables. Ce pouvoir discrétionnaire est nécessaire afin que la marge la plus appropriée puisse être choisie d'après les éléments de preuves scientifiques en main comme, par exemple, le degré de complétude de la base de données et la présence ou non d'un quelconque effet prénatal ou postnatal potentiel. La marge appropriée pourrait être moins que ou plus grande que 10. La marge choisie et sa justification seraient documentées dans les rapports détaillés d'évaluation de l'ARLA qui seraient mis à la disposition du public.

Selon moi, la contribution la plus importante du projet de loi C-8 pourrait être l'ouverture du système de réglementation à une participation significative des intervenants et du public. Les dispositions suivantes sont particulièrement importantes à cet égard:

Première décision d'homologation: Il est obligatoire de consulter le public avant de rendre une importante décision finale d'homologation. Les décisions d'homologation importantes incluent toute décision d'accepter ou de rejeter une demande d'homologation complète d'un nouveau principe actif ou d'une nouvelle utilisation importante. L'ARLA a consulté le public sur des décisions importantes d'homologation depuis un certain temps mais doit à présent obtenir la permission de l'entreprise de pesticide pour pouvoir publier la documentation.

Examen spécial et réévaluation: Les membres du public pourraient demander qu'un examen spécial de l'homologation d'un pesticide soit réalisé. Le public serait consulté au sujet de toute décision d'homologation à la suite de la réévaluation ou de l'examen spécial avant que la décision finale ne soit prise.

Examen d'une décision d'homologation: Les membres du public pourraient déposer un avis d'opposition à une décision importante d'homologation. Le ministre déciderait alors s'il établit ou non une Commission d'examen chargée d'étudier la décision. Le processus de la Commission d'examen serait ouvert à la participation du public. En vertu de la loi actuelle, les seules personnes qui peuvent demander l'examen d'une décision d'homologation sont les demandeurs dont l'homologation a été refusée et les titulaires dont l'homologation a été annulée ou suspendue.

Registre public: Le registre public pourrait inclure les renseignements concernant les homologations, les demandes d'homologation, les réévaluations et les examens spéciaux, y compris les évaluations détaillées des risques et de la valeur des pesticides réalisées par l'ARLA. Les seuls renseignements non inclus concernaient les renseignements commerciaux confidentiels (RCC) et les données d'essai. La définition des RCC et l'enjeu quant à savoir si le public reçoit tous les renseignements qu'il devrait recevoir au sujet des risques présentés par les pesticides constituent les éléments d'une autre question soulevée lors du débat de la deuxième lecture. La définition des RCC serait très étroitement limitée afin d'inclure uniquement les renseignements de nature financière, les procédés de fabrication, et les ingrédients des produits de formulation qui ne soulèvent pas de question particulière en matière de santé ou d'environnement. L'identité et la concentration des produits de formulation qui soulèvent des questions particulières en matière de santé ou d'environnement ne seraient pas tenues confidentielles; elles pourraient donc être disponibles au public par le biais des étiquettes, des fiches signalétiques ou des mentions au registre public. Nous croyons que ce projet de loi reflète un équilibre approprié entre le besoin de fournir les renseignements au sujet des produits et le besoin de protéger les intérêts légitimes des gens d'affaires.

Les données d'essai: Les données d'essai résultent des études scientifiques soumises à l'appui de l'homologation des pesticides et représentent le fondement de l'évaluation des risques et de la valeur. Ces données demeureraient confidentielles mais le public pourrait y avoir accès dans une salle de lecture.

De plus, le projet de loi C-8 améliore de plusieurs façons le contrôle des pesticides après leur homologation. En tout premier lieu, il importe de se rappeler que l'homologation ne confère pas de droits illimités en ce qui a trait à la mise en marché, à la vente et à l'utilisation des pesticides. Au contraire, l'homologation comprend des directives détaillées quant au mode d'emploi du pesticide dans le respect de la loi — connues sous le nom de «conditions d'homologation». Le projet de loi C-8 indique deux nouvelles conditions d'homologation pour tous les produits antiparasitaires: premièrement, que les renseignements sur la sécurité du produit, ce qui inclut les fiches signalétiques, soient fournis aux lieux de travail où les produits sont utilisés ou fabriqués; et, deuxièmement, que les renseignements sur les ventes du produit soient fournis au ministre.

Il y a aussi une responsabilité continue qui consiste à s'assurer que les risques et la valeur d'un pesticide homologué sont encore considérés acceptables. Elle est réalisée par la réévaluation et l'examen spécial, et le projet de loi C-8 renforcerait les dispositions existantes de ces programmes. Une autre caractéristique importante du projet de loi C-8 consiste à prévoir des dispositions sur la déclaration obligatoire de tout effet nocif, c'est-à-dire de nouveaux renseignements qui indiqueraient que les risques sanitaires et environnementaux ou la valeur d'un pesticide homologué pourraient ne plus être acceptables. Ces renseignements pourraient déterminer le besoin de recourir à un examen spécial.

Le projet de loi C-8 donnerait le pouvoir de retirer des produits du marché ou de modifier leurs conditions d'utilisation, pendant ou à la fin du processus de réévaluation ou d'examen spécial. Ce projet de loi stipule qu'il importe de tenir compte du principe de prudence lors de l'identification des mesures appropriées pendant la réévaluation et l'examen spécial. En d'autres mots, s'il y a une raison de croire que le pesticide homologué présente des risques de dommages graves ou irréversibles, l'absence de certitude scientifique absolue ne doit pas servir de prétexte pour remettre à plus tard la prise de mesures rentables visant à prévenir toute conséquence néfaste pour la santé ou la dégradation de l'environnement.

La question de l'absence du principe de prudence dans d'autres articles de la loi a aussi été soulevée au cours du débat de la seconde lecture. Ce principe a son importance lors de la réévaluation d'un pesticide déjà homologué puisqu'il permettrait la prise de mesures plus rapides afin d'empêcher l'exposition continue au pesticide avant qu'un examen plus détaillé des risques ne soit entrepris. Lorsqu'il s'agit de l'examen préalable à la commercialisation des pesticides non encore homologués, le principe de prudence ne s'applique pas puisqu'il est impossible qu'un pesticide non utilisé au Canada présente des risques de dommages graves ou irréversibles. Comme je l'ai dit plus tôt, ces pesticides non utilisés ne seront pas autorisés sur le marché à moins qu'il y ait une certitude raisonnable qu'aucun dommage ne résultera de leur utilisation. Cette mesure garantit une norme de protection plus stricte que ne le ferait un principe de prudence.

Le mandat du ministre et de l'ARLA relatif à la réglementation des pesticides va au-delà de la garantie d'acceptabilité des risques et de la valeur. Il garantit les risques les plus faibles possibles Le projet de loi C-8 donnerait un fondement législatif plus solide à cette fin en incluant clairement dans la disposition afférente la mission de «tenter de réduire au minimum les risques sanitaires et environnementaux que présentent les produits antiparasitaires et d'encourager le développement et la mise en œuvre de stratégies de lutte antiparasitaire durables et innovatrices, en facilitant l'accès à des produits antiparasitaires à risque réduit, et d'autres mesures indiquées».

L'ARLA chapeaute déjà plusieurs initiatives en cours afin d'encourager l'homologation des pesticides à risque réduit. J'aimerais souligner, par exemple, le programme d'examen conjoint avec l'Environmental Protection Agency des États-Unis, ainsi que le nouveau programme, récemment annoncé, relatif aux pesticides à risque réduit lorsque la demande d'homologation n'est présentée qu'au Canada. En vertu de ces programmes, les exigences en matière de données sont adaptées de façon précise au type de produit impliqué et la demande d'homologation est examinée plus rapidement. Le projet de loi C-8 appuierait ces initiatives en exigeant du ministre qu'il procède «à l'exécution rapide des évaluations qui concernent un produit antiparasitaire dont il peut raisonnablement prévoir des risques sanitaires ou environnementaux réduits».

Le projet de loi appuie aussi l'application du «principe de substitution», en donnant au ministre le pouvoir de réaliser des évaluations comparatives de risques et le pouvoir de refuser ou d'annuler les homologations si des produits de rechange plus sécuritaires sont disponibles.

La question des pesticides à usage limité a aussi été soulevée au cours du débat de la deuxième lecture. Depuis quelques années, l'ARLA avait des programmes en place afin de faciliter l'homologation de ces produits par l'entremise de mesures sous son contrôle. À titre d'exemples, mentionnons les exigences en matière de données, les délais d'examen et les processus d'homologation. Ces efforts ont été largement accrus depuis quelques mois. Dans des communiqués de presse du 23 mai et du 24 juin 2002, les ministres de la Santé et de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire ont annoncé des initiatives afin de donner aux producteurs canadiens davantage accès aux pesticides à risque réduit, y compris ceux utilisés sur des cultures à surface restreinte. En plus de l'augmentation des ressources qui permettront à Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC) de produire des données essentielles à l'appui de ces usages limités, l'ARLA va recevoir des ressources afin d'accélérer ses examens. Un conseiller en matière de pesticides à usage limité a été nommé à temps complet afin de travailler à l'ARLA et d'assurer la liaison avec les organisations de producteurs, les provinces, les titulaires d'homologation et AAC. La réponse du gouvernement au rapport du Comité permanent de la Chambre des communes sur l'agriculture et l'agroalimentaire, intitulée «L'homologation des produits antiparasitaires et la compétitivité des agriculteurs canadien», décrit en détail ces initiatives.

Le projet de loi C-8 inclut le pouvoir d'élaborer des règlements à l'égard des usages limités de pesticides, ce qui se fera en consultation avec les intervenants, les provinces et les territoires.

En conclusion, je crois que la nouvelle loi sur les pesticides renforcerait les mesures de protection strictes du Canada contre les risques présentés aux personnes et à l'environnement à la suite de l'utilisation de pesticides. La population canadienne aura accès à davantage de renseignements et à de nouvelles opportunités de participation aux décisions importantes concernant l'homologation des pesticides. Une loi modernisée, renforcée et clarifiée sur la réglementation des pesticides fournirait le fondement législatif solide nécessaire pour réduire les risques présentés par les pesticides et pour faciliter l'accès à des produits nouveaux et plus sûrs.

Le sénateur Morin: J'aimerais tout d'abord souhaiter la bienvenue à mon amie, la Dre Franklin, qui est toxicologue. Les pesticides sont nécessaires à l'agriculture canadienne mais, par définition, ce sont des substances toxiques qui représentent un danger potentiel pour l'environnement et la santé.

Je suis en faveur du projet de loi C-8. La loi en vigueur date de trente ans, et le moment est venu de la moderniser. Les changements proposés ne font pas l'unanimité, mais ils représentent un compromis acceptable — dans les grandes lignes, on peut dire qu'ils visent à protéger la santé humaine et l'environnement.

L'homologation des pesticides repose sur l'application d'une méthode scientifique. Plutôt que d'appliquer le principe de prudence, qui s'apparente davantage à une expression juridique, le projet de loi introduit le concept voulant qu'un nouveau produit ne soit accepté que dans la mesure où l'on a une certitude raisonnable qu'il ne causera aucun dommage à la santé humaine, à l'environnement et même aux générations futures. D'un point de vue scientifique, il est difficile d'aller plus loin dans les efforts visant à protéger l'environnement et la santé. J'aimerais poser trois questions à la Dre Franklin. La première porte sur les frais imposés aux usagers. Tous les pays imposent des droits relativement à la gestion des produits antiparasitaires. Je pense que le Canada est le pays qui impose les frais les moins élevés. Dans un rapport publié en 1998, on mentionnait qu'au Canada, les frais imposés aux usagers étaient les moins élevés de tous les pays de l'OCDE. L'Agence a-t-elle la possibilité de gérer les produits du recouvrement des coûts? Autrement dit, ces recettes sont-elles ajoutées à son budget ou sont-elles versées aux recettes consolidées?

Mme Franklin: Les droits perçus sont versés dans les recettes consolidées et correspondent à un poste budgétaire de l'agence. Le gouvernement nous alloue des ressources et, en outre, les droits exigibles, mais ces recettes ne nous sont pas versées directement.

Le sénateur Morin: S'il y avait une augmentation de ces droits exigibles l'année prochaine, est-ce que cela entraînerait une augmentation de votre budget du même ordre?

Mme Franklin: Tout à fait. Les droits sont fixés en fonction des coûts, et les recettes qu'ils génèrent sont ensuite remises à l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire, elles sont donc contrôlées.

Le sénateur Morin: Donc, vous conservez ces droits.

Mme Franklin: Oui, en effet.

Le sénateur Morin: C'est important.

Ma deuxième question porte sur les délais d'examen. L'un des objectifs du projet de loi devrait être d'obtenir l'approbation d'une demande d'homologation en temps opportun. Selon le projet de loi, un nouveau pesticide ne serait homologué que s'il est plus sûr et plus efficace que son prédécesseur déjà sur le marché.

Pour les Canadiens, et pour l'environnement, il est important que ce produit soit mis sur le marché dès que possible, dans la mesure où il est sans danger et efficace. Je sais que l'on avait constaté des retards dans le rapport externe que nous avions publié en 1998 sur l'ARLA, et que l'on imputait ces longs délais à un manque de ressources. Je ne veux pas me montrer critique, mais au Canada on semble éprouver des difficultés à évaluer les pesticides dans des délais raisonnables. Je suis surpris que la rapidité d'exécution ne fasse pas partie des objectifs ou ne soit pas mentionnée dans le mandat de l'agence. Je me trompe peut-être, mais la sécurité, l'efficacité et l'évaluation en temps opportun sont des facteurs d'égale importance. Si un pesticide est supérieur et s'il traîne sur une tablette durant six ou sept mois avant d'être soumis à un examen, cette situation risque de nuire aux Canadiens en général. Je ne propose pas d'amendement au projet de loi, mais il me semble que l'on aurait dû préciser que l'évaluation d'un pesticide devrait se faire dans le cadre d'un calendrier donné. Je sais qu'il y a des exceptions, mais il faudrait préciser des délais d'examen pour tous les nouveaux pesticides pour lesquels on présente une demande d'homologation.

Mme Franklin: En réalité, le projet de loi insiste d'une certaine manière en exigeant l'exécution rapide des examens qui concernent les pesticides à risque réduit.

Le sénateur Morin: Je l'admets.

Mme Franklin: Nous disposons également, à l'intérieur des directives d'homologation, qui comprennent un processus non réglementaire, trois possibilités de réglementer les pesticides: la loi, qui nous confère l'autorité suprême, le règlement, qui nous donne des précisions détaillées et les directives d'homologation, qui sont encore plus précises.

Ces directives fixent des délais d'examen. Et ces délais sont plus courts pour les produits les plus sûrs. En 1996, nous avons commencé à effectuer des examens conjoints avec les Américains. Les pesticides à risque réduit figuraient dans la première catégorie de produits faisant partie du programme d'examen conjoint. L'année dernière, nous avons publié une ligne directrice ou une directive mentionnant que les produits à risque réduit seront examinés plus rapidement si les demandes d'homologation sont présentées au Canada seulement.

Le sénateur Morin: Je suppose que, par définition — je suis sûr que vous ne voudriez pas introduire un pesticide qui comporte plus de risques qu'un produit existant — un nouveau pesticide, peu importe dans quelle catégorie il se trouve, est soumis à un examen en vue d'obtenir une homologation soit parce qu'il comporte un risque réduit, soit parce qu'il est plus efficace. Parce qu'autrement, il ne devrait pas être approuvé. Je n'insisterai pas sur ce point, mais je pense que cette mesure ne devrait pas seulement s'appliquer à certaines catégories, mais à toutes les catégories. Toutefois, je comprends bien ce que vous voulez dire.

Ma dernière question porte sur le rapport que le Commissaire à l'environnement a publié la semaine dernière et qui visait votre agence. Je suppose que ça ne vous fait pas tellement plaisir d'apprendre que votre agence fera l'objet d'une vérification approfondie en 2003.

Mme Franklin: La tendance se maintient. Vous savez, depuis que l'agence existe, chaque année nous devons affronter un examen du comité permanent ou encore une vérification. Nous avons fini par nous y habituer, et je suppose que cela nous manquerait s'il n'y avait pas d'examen.

Le sénateur Morin: Je suis sûr que vous allez bien vous débrouiller. Mais vous avez été la cible de trois critiques, et je me demande si le projet de loi corrige la situation. L'une de ces critiques vise la réduction des risques posés par les pesticides, la deuxième porte sur la réévaluation des pesticides déjà homologués et la troisième relève le fait qu'il n'existe pas de base de données donnant des renseignements sur les ventes de pesticides. Pouvez-vous nous dire si le projet de loi répond aux critiques faites par le Commissaire?

Mme Franklin: En ce qui concerne la politique sur la réduction des risques, il est exact que nous n'avons pas rédigé de politique précise. Nous menons bon nombre d'activités qui tournent autour de ce projet. Nous voulions d'abord essayer de déterminer comment nous allions aborder toute la question de la réduction des risques. Il s'agit d'un nouveau domaine pour la réglementation des pesticides à l'échelle fédérale. Nous avons bien une politique qui est actuellement à l'étude dans d'autres ministères, et un document qui regroupe diverses activités que nous menons déjà sera publié sous peu.

En ce qui concerne le deuxième point, la réévaluation, l'agence a pris l'engagement, et nous y tenons vraiment, de mener son programme de réévaluation de concert avec l'Environmental Protection Agency. C'est le moyen le moins coûteux et le plus intelligent de procéder. Nous nous sommes engagés à ce que d'ici 2006, tous les ingrédients actifs homologués avant 1994 aient été réévalués. Le vérificateur a critiqué le fait que nous avions relativement peu de réévaluations terminées jusqu'à maintenant, et il exprime des doutes sur notre capacité de respecter notre objectif de 2006. Je tiens seulement à mentionner que nous avons commencé par les cas les plus difficiles, et c'est la raison pour laquelle nous avons pris tellement de temps. Nous avons dû également nous pencher sur la question de l'exposition globale et des effets cumulatifs. Les composés organophosphorés ont un mécanisme d'action similaire, et nous avons tenu des discussions scientifiques très soutenues afin de déterminer comment un individu accumule l'exposition à un groupe de produits qui sont utilisés sur un éventail de produits à divers moments, et cetera. La complexité de la tâche a prolongé la réévaluation dans le cas de ce groupe de produits. Je pense que nous avons vraiment fait le tour de la question, et le processus devrait s'accélérer pour les autres produits. Je suis toujours optimiste en ce qui concerne le respect de l'objectif que nous nous sommes fixé.

Concernant le troisième point, c'est-à-dire la base de données sur les ventes de pesticides, nous avons absolument besoin du projet de loi pour l'obtenir. Le plus tôt la loi sera adoptée, et le plus tôt nous pourrons obtenir la base de données. Cette base de données nous fournira des indications ou quelque chose de similaire sur l'utilisation qui est faite des produits. Il s'agit donc d'un moyen extrêmement intéressant pour déterminer si nous avons modifié nos habitudes d'utilisation des pesticides.

Le sénateur Keon: Vous avez mentionné les examens conjoints réalisés avec les États-Unis et, soit dit en passant, voilà une façon très intelligente de procéder. Je me demandais simplement quel usage vous faites de l'information qui est diffusée ailleurs dans le monde, et plus particulièrement dans les pays développés. Comment procédez-vous pour verser toute cette information dans votre base de données et quel usage en faites-vous ensuite? Disposez-vous des moyens techniques nécessaires pour recueillir ces données auprès des autres pays développés?

Mme Franklin: Lorsqu'il s'agit d'un tout nouvel ingrédient actif, dans bien des cas, très peu de données sont disponibles ailleurs. Il y a de nouvelles homologations au Canada, et dans bien des cas, il n'y a pas tellement de renseignements nouveaux. La source d'information sur laquelle nous basons nos décisions est habituellement la documentation très complète qui est fournie par le titulaire de l'homologation.

Il en va tout autrement de la réévaluation qui est autrement complexe, parce que les produits ont été utilisés dans de nombreux pays durant de longues années. Nous recueillons cette information. Et de fait, nous collaborons étroitement avec l'OCDE et d'autres pays de l'UE. Nous pouvons compter sur un certain nombre de sources auxquelles nous pouvons nous adresser pour procéder aux réévaluations. Nous demandons également aux chercheurs du Canada qui travaillent dans d'autres ministères de nous fournir tout ce qu'ils ont en main, et nous sollicitons aussi les provinces afin qu'elles nous transmettent les renseignements qu'elles pourraient avoir recueillis éventuellement dans le cadre de leurs activités de surveillance. Nous avons publié un avis mentionnant que nous procédions à une réévaluation et demandant aux personnes visées de nous fournir l'information pertinente. Nous nous efforçons de faire bénéficier le reste du monde de nos efforts en obtenant de l'information, et nous demandons s'il y a eu des réévaluations; à cet égard, nous avons intensifié nos relations avec les Européens, en plus des activités que nous menons avec les Américains, parce qu'ils ont eux aussi entrepris la tâche gigantesque de réévaluer tous les ingrédients actifs qui existent. Nous tentons vraiment de communiquer autant d'information que possible. Cette collaboration que nous menons depuis quelques années avec les autres agences de réglementation s'est révélée une tâche extrêmement passionnante, exigeante et intéressante.

Le sénateur Keon: Toutefois, il n'existe pas de filet protecteur à l'échelle mondiale, n'est-ce pas? Je pense aux répercussions sur l'environnement, en adoptant une perspective mondiale, quand on sait que les poissons circulent dans tous les océans.

Mme Franklin: Vous avez tout à fait raison, mais nous avons commencé à aborder ce problème. Par exemple, les Américains ont mis en place depuis de nombreuses années un système de rapports sur les effets nocifs. Je vous rappelle que la nouvelle loi nous donnera l'autorisation d'exiger la production de rapports sur les effets nocifs. Nous adopterons à bien des égards la philosophie et l'intention avec lesquelles les programmes de déclaration des effets nocifs des médicaments ont été appliqués. On a déjà accumulé pas mal d'expérience dans ce domaine, dans les rapports publiés à l'échelle mondiale. Du point de vue de l'environnement, nous devons garder à l'esprit que les conditions climatiques et géographiques sont différentes, et que des événements qui se sont produits dans un pays ne s'appliquent pas nécessairement au Canada. Toutefois, lorsque c'est le cas, nous tentons de recueillir et d'utiliser cette information.

Le sénateur Morin: Je croyais que le sénateur Keon voulait poser la question suivante. Un pesticide utilisé dans un autre pays pourra avoir une incidence sur le Canada, et tout particulièrement dans le Nord. À cause des alizés et ainsi de suite, des organochlorés utilisés même en Afrique pourraient s'accumuler au Canada et avoir des effets indésirables sur nos Autochtones. Existe-t-il des mesures de protection à cet égard? Avons-nous des moyens de nous défendre de quelque manière contre cette situation? Ou alors, est-ce que ces pays pourront continuer à utiliser des produits toxiques en grande quantité et, étant donné notre situation sous le vent, devrons-nous continuer à en subir les effets indésirables? Je ne sais pas si c'est ce qu'il voulait savoir, mais c'est ainsi que j'ai interprété sa question.

Mme Franklin: Certains groupes travaillent sur ces questions. Les polluants organiques persistants ou POP sont l'un des produits à l'étude. Voilà un sujet intéressant, parce que si nous jetons un coup d'œil sur l'axe nord-sud, nous constatons qu'un processus très actif a été mis en œuvre. Dans le cadre de ce processus, le Canada et les États-Unis ont collaboré avec le Mexique afin de l'inciter à cesser d'utiliser le DDT, mais bien entendu il faut tenir compte du fait qu'il y a une forte incidence de la malaria dans certaines régions du Yucatan. Nous avons essayé de trouver d'autres pesticides susceptibles de remplacer le DDT, mais comme ce produit est résiduel, persistant et qu'il n'a pas d'effets aigus, il est plus sûr dans un pays en voie de développement. Dans le cadre du projet sur les POP et du plan nord- américain, nous avons véritablement travaillé à la réduction de l'utilisation du DDT au Mexique, et nous entrevoyons de grands succès à cet égard.

Au Canada, une grande partie de la masse d'air circule du sud au nord, et c'est la raison pour laquelle il est probablement très important pour nous de déterminer l'influence que nous pouvons avoir sur le Mexique et même sur les pays de l'Amérique du Sud. On sait qu'il y a des mouvements circumpolaires de polluants atmosphériques en provenance de la Russie, et c'est un domaine où nous essayons d'exercer notre influence à l'échelle internationale. Cependant, la loi ne nous confère aucune autorité à l'extérieur de nos frontières. Lorsqu'il s'agit d'évaluer ce que nous pouvons faire ici pour exercer une influence sur l'utilisation de ces produits dans d'autres pays, nous nous heurtons à des problèmes de droit international. Nous faisons beaucoup d'efforts afin de nous attaquer à ces problèmes.

Le sénateur Keon: Je pense que lorsque vous vous êtes présentés devant le comité, à la Chambre des communes, on vous a demandé pourquoi le principe de prudence n'était pas plus en évidence, et aussi pourquoi il ne figurait pas dans le préambule et dans les autres parties de la loi, à part l'article où il est mentionné. Pouvez-vous expliquer cela? Pourquoi était-on si préoccupé, et pourquoi n'avez-vous pas inclus le principe de prudence dans la loi?

Mme Franklin: Je vais demander à M. Stapleton de vous fournir une explication plus complète sur les aspects juridiques. Mais comme je l'ai déjà mentionné brièvement, le principe figure dans la partie du projet de loi portant sur la réévaluation parce que ces produits sont déjà sur le marché. Si nous avons quelque raison de croire que ces produits posent un problème, nous voulons être en mesure d'intervenir rapidement plutôt que d'être forcés d'attendre de disposer de toutes les preuves scientifiques.

Dans l'autre partie du projet de loi, il est stipulé que les nouveaux produits ne sont pas mis sur le marché tant que nous n'avons pas une certitude raisonnable qu'ils ne comportent pas de danger. En réalité, il s'agit d'une contrainte beaucoup plus sévère que celle qui découle du principe de prudence. Naturellement, je vous donne le point de vue d'une toxicologue, c'est-à-dire pourquoi nous le mentionnons lors de la réévaluation des produits existants, et n'en avons pas besoin pour l'introduction des nouveaux produits.

La discussion a porté en partie sur l'utilisation qui est faite de cette expression dans d'autres mesures législatives. Il ne faut pas oublier que les pesticides sont des produits entièrement réglementés. Ils ne peuvent être utilisés ou vendus à moins d'avoir obtenu une homologation. Nous disposons à cet égard d'une autorité plus claire. Nous interdisons leur mise en marché si nous pensons qu'il pourrait y avoir un problème. Nous disposons ainsi de moyens rigoureux pour empêcher leur utilisation si nous pensons qu'ils peuvent présenter un danger.

M. Basil Stapleton, conseiller juridique, Justice Canada: D'entrée de jeu, j'aimerais ajouter, même si la Dre Franklin a déjà passablement bien couvert le sujet, que l'expression «principe de prudence» porte à confusion. En réalité, on se sert de cette expression habituellement pour faire allusion au principe tel qu'il était expliqué dans la Déclaration de Rio. La Déclaration de Rio ne le mentionnait pas directement ou n'y faisait pas directement allusion comme s'il s'agissait d'un principe. Elle se contentait de dire que, dans certaines circonstances, il convient d'adopter une approche prudente, et ensuite elle décrivait les circonstances en question. Toutefois, au moins 14 autres instruments juridiques internationaux décrivent aussi divers types de mesures de précaution qui s'appliquent à des circonstances particulières. Pour une raison quelconque, l'expression «principe de prudence» a été rattachée à la Déclaration de Rio et est à l'origine d'une certaine mystique qui incite à penser qu'il s'agit d'un principe universel applicable à toutes sortes de circonstances, alors qu'en réalité, il n'en est rien. À mon sens, il serait tout à fait erroné, dans le cas de la réglementation des pesticides à l'intérieur d'un système qui vise à les approuver avant leur commercialisation, d'abaisser le niveau de protection au point que l'on refuserait d'homologuer un pesticide seulement en présence de risques de dommages graves ou irréversibles. Les normes sur lesquelles nous nous appuyons pour refuser l'homologation sont beaucoup plus rigoureuses que cela. Nous refuserons d'homologuer un produit à moins qu'il y ait une certitude raisonnable qu'aucun dommage ne résultera de son utilisation. D'une certaine manière, nous commettons une malheureuse erreur de sémantique lorsque nous nous réclamons de ce principe et que nous tentons de l'assimiler à la description qui est faite dans la Déclaration de Rio des mesures de précaution qui devaient être prises dans certaines circonstances qui n'ont rien à voir. À mon avis, l'adoption de ce principe serait plus dommageable que bénéfique.

Le sénateur Keon: J'aimerais revenir aux utilisateurs. Vous avez bien décrit le processus de consultation en général et la réglementation et ainsi de suite, mais en ce qui concerne les relations directes avec vos utilisateurs, comment les choses vont-elles se passer? Ces consultations auront-elles lieu sur une base ponctuelle, y aura-t-il des vérifications ponctuelles? Ou alors, a-t-on prévu un processus permettant de vérifier de manière régulière la façon dont ces produits sont utilisés dans une région donnée?

Mme Franklin: Lorsque le produit est homologué, il est évident que le potentiel d'exposition et les risques qu'il comporte pour les utilisateurs font partie de l'évaluation. Nous essayons de quantifier l'exposition d'une personne pendant l'application du produit. Nous tentons aussi de mesurer l'exposition des tiers — autrement dit, si une personne est en train d'appliquer le produit et qu'une autre vient à passer à proximité, quelle est l'exposition? Nous faisons toutes ces évaluations initialement afin de déterminer dans quelle mesure ce produit peut être utilisé sans danger.

L'étape suivante consiste à déterminer s'il est correctement utilisé. En effet, une fois que le produit a été homologué, il faut déterminer si les agriculteurs par exemple l'utilisent correctement, et définir les mesures de contrôle que nous pouvons mettre en place afin de le vérifier.

Comme je l'ai mentionné dans mes commentaires, divers paliers du gouvernement participent à l'homologation des pesticides, et les provinces y prennent une part active. Nous collaborons avec elles à l'établissement de normes pour les travailleurs, et dans de nombreuses provinces on exige que ces utilisateurs soient titulaires d'un permis. Les provinces prennent des mesures additionnelles pour s'assurer que non seulement le produit est sans danger s'il est utilisé suivant le mode d'emploi, mais aussi que les personnes qui l'utilisent sont autorisées à le faire.

L'agence a le pouvoir de s'assurer de la conformité. S'il survient des incidents parce qu'un produit n'a pas été utilisé correctement, nous avons des recours qui sont adaptés à la gravité de la faute, et qui vont d'un simple avertissement jusqu'à l'imposition d'une amende et à des poursuites au criminel en vertu de la Loi sur les produits antiparasitaires.

La vice-présidente: J'aimerais poser une question concernant l'utilisation. Considérons que 90 p. 100 de la population vit à 100 milles de la frontière américaine, que nous partageons les berges de rivières et de nombreux cours d'eau, et considérons une situation où un produit a été homologué aux États-Unis en vue d'être utilisé dans le sud en raison du climat. Par la suite, ce produit se retrouve dans le nord. Est-ce que l'on pourrait envisager une situation où les Américains utiliseraient un produit que nous jugeons dangereux? Et dans l'affirmative, comment régler un conflit de cet ordre?

Mme Franklin: Ce projet de loi ne nous donne aucune autorité pour prendre des mesures. Dans l'éventualité où les Américains utiliseraient un produit qui, par voie aérienne ou aquatique, entrerait dans l'espace canadien, cette loi ne nous permet pas de prendre des mesures. Nous collaborons très étroitement avec eux, et notamment dans le cadre de comités de l'ALENA et d'autres comités sur l'environnement, on pourrait peut-être avoir recours à la persuasion ou conclure des ententes afin d'essayer de corriger la situation, mais nous ne disposons d'aucun moyen juridique pour les empêcher d'utiliser un produit de ce genre. Mais ces situations sont rares. Les problèmes les plus criants depuis quelques années tournent plutôt autour des produits chimiques organiques, c'est-à-dire les composés organochlorés. Mais dans le monde entier, ils ne sont pas si utilisés que cela, et on constate qu'ils sont en perte de vitesse. Les États- Unis ont suivi sensiblement le même calendrier que nous visant la réduction ou l'élimination de ces produits. C'est un domaine intéressant, parce qu'il se prête probablement plus facilement à la négociation qu'à l'application d'une quelconque autorité donnée par la loi. Au sein de la Commission mixte internationale à laquelle j'ai participé il y a de nombreuses années, de nombreuses interactions visaient à régler certains de ces problèmes de frontières.

La vice-présidente: J'ai écouté avec beaucoup d'intérêt vos commentaires au sujet du DDT. J'ai été élevée sur une ferme et je connais bien ce produit. Je sais que nous le pulvérisions autour des étables pour nous débarrasser des mouches. Nous étions producteurs de lait. Plus tard, le Canada a interdit l'utilisation du DDT. Au Mexique, on l'utilise toujours sur une grande échelle. Est-ce que nous continuons à fabriquer des produits comme le DDT, que nous n'utiliserions pas nous-mêmes, mais dont nous tolérons la vente par les fabricants? Est-ce que l'on tente d'écouler des produits excédentaires ou bien en fabrique-t-on toujours?

Mme Franklin: Au Canada, sur le plan de la santé publique et de l'environnement, nous pouvons être satisfaits de la situation, mais elle n'est peut-être pas aussi reluisante si l'on regarde l'industrie. Toutefois, nous n'avons pas vraiment beaucoup d'usines de fabrication primaire d'ingrédients actifs. Les activités de l'industrie au Canada se concentrent dans une large mesure sur la formulation des produits. Il ne s'agit donc pas vraiment d'un problème de grande envergure.

Il est vrai que, dans le cadre de la convention PIC qui est en voie d'être ratifiée dans bien des pays, nous disposons de la capacité d'obtenir le consentement préalable donné en connaissance de cause. À l'heure actuelle, il s'agit seulement d'un processus informel, mais il deviendra juridiquement contraignant, de sorte qu'un pays importateur aura le droit d'obtenir de l'information afin de déterminer s'il se prépare à importer un produit sans danger ou toxique. Les importateurs seraient informés, aussi ils ne prendraient pas la décision d'accepter un produit sans en connaître les risques potentiels.

Le sénateur Morin: Est-ce que ce projet de loi ne vise pas les exportations? N'y a-t-il pas un article sur les exportations?

Mme Geraldine Graham, chef, Affaires réglementaires, Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire, Santé Canada: Oui, il y en a un. Le projet de loi confère l'autorité d'établir la liste des marchandises d'exportation contrôlée, mais la convention PIC prend les devants. Les règlements ont été publiés dans la Gazette du Canada en septembre, en vertu de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, et les pesticides sont assujettis à ces règlements. Cependant, plutôt que d'attendre d'obtenir ces pouvoirs, nous avons pris de l'avance et conclu les arrangements juridiques nécessaires afin que les pesticides tombent sous le coup de cette convention PIC et que le Canada puisse la ratifier. Tout pesticide frappé d'interdiction ou de restrictions sévères, au Canada ou dans un autre pays, et qui se retrouve sur la liste de la convention PIC peut être contrôlé spécifiquement, et nous pouvons le faire au moyen d'un système de permis. Il faudra présenter une demande de permis bien précise, et nous ferons en sorte que le pays importateur ait donné son consentement et qu'il ait obtenu toute l'information nécessaire afin qu'il puisse prendre sa décision en toute connaissance de cause.

La vice-présidente: Article 33, contrôles à l'exportation.

Mme Graham: Tout à fait.

Le sénateur Léger: Je trouve très encourageant d'entendre que les spécialistes du domaine discutent d'un projet de loi. Est-ce que les créateurs des produits exercent beaucoup de pression sur vous ou est-ce que la concurrence est très forte? Les fabricants veulent continuer à vendre leurs produits, et ils doivent passer par votre intermédiaire, je suppose, mais est-ce que la pression est forte? Je pense aux grandes sociétés pharmaceutiques qui détiennent beaucoup de pouvoir. Sentez-vous la même concurrence?

Mme Franklin: Vous voulez savoir si l'industrie exerce des pressions pour que l'on homologue ses produits? La réponse est oui. Ces gens sont tous assis derrière moi, et vous pourrez leur poser la question lorsqu'ils se présenteront pour témoigner à leur tour. Oui, de toute évidence, il y a de la pression.

Le sénateur Léger: Ai-je bien compris lorsque vous avez dit qu'il manquait deux ou trois choses dans le projet de loi C-8?

Mme Franklin: Non. Le projet de loi C-8 fait deux choses. Nous voulions nous assurer que la population soit sensibilisée à un certain nombre de problèmes liés à l'évaluation des risques, mais il n'est pas nécessaire que ces aspects soient inclus dans la loi. Le nouveau projet de loi stipule clairement que nous devons faire certaines choses, aussi du point de vue du grand public, il y a des preuves tangibles et visibles que nous les faisons bien. À mon avis, la nouvelle loi nous donne la possibilité de faire de l'excellent travail en ce qui concerne la protection de la santé et de l'environnement des Canadiens. Le projet de loi nous donne les moyens d'être aussi modernes, exhaustifs et à jour sur le plan scientifique que les autres pays développés comme les États-Unis et les plus importants pays de l'Europe. Je pense qu'il s'agit d'un excellent projet de loi.

La vice-présidente: Comme il n'y a plus de questions, je remercie la Dre Franklin, Mme Graham ainsi que M. Stapleton d'être venus témoigner.

Nous entendrons maintenant Mme Coombs, M. Hepworth et M. MacLeod.

Mme Shannon Coombs, directrice, Relations gouvernementales, Association canadienne de produits de consommation spécialisés: L'Association canadienne de produits de consommation spécialisés est ravie d'avoir l'occasion aujourd'hui de vous présenter ses principales préoccupations en ce qui concerne le projet de loi C-8 que vous êtes en train d'examiner.

L'ACPCS est heureuse que la ministre McLellan ait déposé le projet de loi et que ce dernier ait été amendé ce printemps par le Comité permanent de la santé. L'ACPCS est en faveur du dépôt de ce projet de loi depuis que l'équipe de l'Examen du processus d'homologation des pesticides a présenté ses recommandations dans le Livre Bleu de 1990.

L'ACPCS participe à tous les forums de discussions et aux consultations sur de nombreuses questions qui relèvent de l'ARLA. Nous sommes membres du Conseil consultatif de la réglementation de la lutte antiparasitaire ou CCRLA, qui sera bientôt enchâssé dans la loi, ainsi que du Comité consultatif de gestion économique ou CCGE. Ces deux forums donnent la possibilité aux intervenants de participer à l'amélioration de la politique publique générale et de la gestion au sein de l'agence.

Tout d'abord, j'aimerais vous présenter notre association. L'ACPCS est une association d'envergure nationale regroupant 40 entreprises membres qui se recrutent chez les fabricants de petite, moyenne et grande échelle, transformateurs, préparateurs et distributeurs de produits d'entretien institutionnels et domestiques comme les savons et détergents, assainissants et désinfectants, désodorisants, produits de lutte antiparasitaire destinés à l'usage domestique et produits chimiques pour les véhicules. Nous vous avons distribué un feuillet d'information bilingue qui nous décrit.

Comme une image vaut mille mots, ce feuillet montre les produits qui sont fabriqués par nos membres et que l'on retrouve pour ainsi dire dans chaque foyer.

La plupart des membres de l'ACPCS qui fabriquent des produits homologués par l'ARLA sont des entreprises de préparation de produits chimiques. Il s'agit d'un petit secteur qui est en train de se consolider parce que les coûts augmentent. Ces entreprises créent et fabriquent des produits à partir d'ingrédients actifs et de formules entièrement et complètement homologués. Les entreprises membres de l'ACPCS utilisent moins de 1 p. 100 de tous les ingrédients actifs vendus au Canada. Elles se concentrent sur la production et la livraison de produits prêts à l'emploi aux consommateurs.

Quels sont les avantages de nos produits? Les produits pour la lutte antiparasitaire grand public sont conçus pour contribuer à créer un paysage urbain sain. Leurs avantages sont la protection de la santé des Canadiens et de leurs foyers, à l'intérieur comme à l'extérieur, contre les maladies transmises par les insectes et les allergies, les insectes et les mauvaises herbes. Nos produits comportent également des avantages pour l'environnement, car des pelouses et des jardins bien entretenus entraînent une diminution de l'érosion et du ruissellement des eaux de surface.

En avril 2002, un sondage réalisé par la maison Ipsos-Reid a révélé que la majorité des Canadiens pensent que les produits utilisés dans la lutte contre les parasites, les insectes et les mauvaises herbes, dans la maison et à l'extérieur, sont sans danger s'ils sont utilisés suivant le mode d'emploi. Ce sont les produits pour la lutte antiparasitaire à usage domestique qui remportent le plus solide appui puisque 84 p. 100 des répondants se sont déclarés en faveur de cet énoncé et que 72 p. 100 des répondants ont exprimé un appui similaire à l'endroit des produits utilisés sur les arbres, les arbustes, les pelouses et les jardins.

Vous vous demandez sans doute la raison de notre présence ici aujourd'hui et de notre intérêt à l'égard de l'ARLA? Notre industrie doit pouvoir compter sur un système d'homologation prévisible, rigoureux et respectueux des délais pour être en mesure d'offrir tous ces avantages au public canadien. Au Canada, l'industrie doit présenter des demandes d'homologation de qualité et intègres sur le plan scientifique qui sont soumises à l'évaluation de l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire. Afin d'évaluer l'efficacité du produit et les risques qu'il ait une incidence négative sur la santé humaine et sur l'environnement, le système d'homologation doit pouvoir utiliser les données scientifiques les plus modernes. Un système doté de ces caractéristiques ne peut que susciter la confiance dans la sûreté et la valeur des produits qui continueront à assurer la protection des Canadiens et de leurs foyers.

Durant le processus d'amendement du projet de loi, l'ACPCS a présenté huit principaux sujets de préoccupation au Comité de la santé. Je n'en aborderai que trois aujourd'hui, et je soumettrai respectueusement au comité des approches qu'il pourrait envisager.

La première de nos préoccupations concerne l'absence de délais d'examen pour tous les types de demandes. Durant l'examen effectué par le Comité de la santé, en juin 2002, l'ACPCS a demandé que des amendements soient apportés aux articles 7 et 16. Si ces amendements étaient adoptés, le ministre de la Santé prendrait des règlements concernant les délais d'examen des demandes d'homologation et des réévaluations. L'ACPCS a collaboré avec de nombreux intervenants sur cette question, y compris des groupes d'utilisateurs, des environnementalistes et des membres de l'industrie. Par ailleurs, bon nombre de témoins présents lors des audiences de juin, dont le vérificateur général, avaient déclaré que c'était une bonne idée lorsqu'on leur avait demandé ce qu'ils pensaient de l'intégration de délais d'examen dans le projet de loi.

L'ACPCS a constaté avec regret que les amendements visant l'ajout de délais d'examen pour toutes les demandes d'homologation n'ont pas été retenus. Nous sommes d'avis qu'en excluant un concept aussi essentiel du projet de loi, on contribuera à perpétuer les aspects inefficaces du processus d'homologation antérieurs au renouveau législatif.

Même si l'ACPCS est en faveur des amendements au projet de loi visant à apporter des améliorations au rapport annuel au Parlement et à l'examen septennal, il reste que la reddition de comptes à l'égard de tous les intervenants est essentielle. L'ajout d'une exigence réglementaire relative à des délais d'examen améliorerait la crédibilité et la prévisibilité du processus d'homologation pour toutes les parties.

En outre, sans calendriers, on risque de connaître encore plus de retards dans l'introduction de nouveaux produits et de technologies nouvelles sur le marché canadien. Cette situation irait à l'encontre de l'orientation donnée par le gouvernement dans le discours du Trône:

Le gouvernement mettra en œuvre une stratégie de réglementation intelligente pour accélérer les réformes dans certains secteurs clés afin de promouvoir la santé et le développement durable, de contribuer à l'innovation et à la croissance économique et de réduire les tracasseries administratives pour les entreprises.

Il accélérera le processus réglementaire d'approbation des médicaments afin que les Canadiens puissent avoir accès plus rapidement aux médicaments sûrs dont ils ont besoin, créant un climat plus propice à la recherche dans ce domaine.

De toute évidence, la possibilité d'avoir accès en temps opportun à des technologies nouvelles et naissantes, additionnée à une stratégie de réglementation intelligente, sont des questions de premier ordre pour le gouvernement. L'ACPCS comprend l'importance de cette question dans le contexte des soins de santé, mais elle croit que les principes sous-jacents pourraient être appliqués aux produits antiparasitaires, ce qui permettrait d'offrir aux Canadiens une technologie nouvelle et plus sûre. Durant votre examen, il se peut que vous arriviez à la même conclusion.

L'ACPCS demande respectueusement au comité sénatorial de faire des recommandations au gouvernement pour qu'il examine nos préoccupations à l'égard des délais d'examen et de demander au ministre de la Santé de prendre des règlements concernant les délais d'examen dans le cadre du processus de réglementation fédéral.

Notre deuxième préoccupation vise la rédaction de règlements issus du nouveau projet de loi. L'ACPCS est en faveur d'un processus de réglementation entièrement transparent et plus rigoureux en ce qui concerne les nouveaux règlements de l'ARLA. Avec les nouveaux paramètres découlant du projet de loi et la quantité additionnelle de travail que l'agence devra exécuter, il sera nécessaire de créer de nouveaux règlements, et tous les intervenants visés par le processus de réglementation fédéral devraient être invités à participer à leur élaboration.

L'ACPCS espère que le discours du Trône servira aussi de ligne directrice aux fonctionnaires de Santé Canada. En voici un extrait:

Le gouvernement mettra en œuvre une stratégie de réglementation intelligente pour accélérer les réformes dans certains secteurs clés afin de promouvoir la santé et le développement durable, de contribuer à l'innovation et à la croissance économique et de réduire les tracasseries administratives pour les entreprises.

Nous prévoyons que la ministre et ses fonctionnaires entreprendront une consultation des intervenants par l'entremise du CCRLA, son comité consultatif, avant la publication des projets de règlements dans la Gazette du Canada, partie I.

Nous demandons aussi respectueusement au comité sénatorial de faire des recommandations au gouvernement afin que Santé Canada rédige les règlements les plus favorables découlant du projet de loi en adoptant une attitude transparente et inclusive avec tous les intervenants.

Notre troisième et dernière préoccupation concerne la communication. De toute évidence, le projet de loi C-8 est en accord avec les engagements pris par le gouvernement dans le Discours du Trône.

[Le gouvernement] se dotera de moyens pour renforcer la sécurité du système alimentaire canadien et présentera à nouveau la mesure législative sur les pesticides qui vise à protéger la santé des Canadiens, surtout celle des enfants.

Il reflète également les principales recommandations découlant de l'examen de 1990 sur les produits pour la lutte antiparasitaire, celles qui portaient sur l'amélioration de la reddition de comptes et de la transparence pour le public. Lorsque ce projet de loi aura obtenu la sanction royale, nous espérons qu'il n'ira pas dormir sur les tablettes.

Comme l'avait déclaré la gouverneure générale le 30 septembre, les Canadiens connaissent bien la valeur et l'importance du rôle du gouvernement. D'après le sondage que nous avons demandé à la maison Ipsos-Reid, les Canadiens ont confiance dans la capacité du gouvernement fédéral de réglementer ces produits. En nous fondant sur ces deux faits et sur le nouveau projet de loi qui, selon le gouvernement, contribue à améliorer la protection de la santé et de l'environnement, à donner plus de transparence au système d'homologation et à renforcer le contrôle sur les pesticides après leur homologation, voici l'occasion rêvée de souligner le rôle joué par Santé Canada et de concrétiser la déclaration de la ministre McLellan:

Les changements présentés aujourd'hui tiennent compte de l'opinion de toutes les parties, tout en reconnaissant que la protection de la santé humaine et de l'environnement continuent d'être la principale priorité de la réglementation des pesticides au Canada.

La ministre a fait cette déclaration le 21 mars 2002.

Le processus d'homologation canadien figure parmi les plus rigoureux du monde, et il faut que le grand public en soit informé. Avec le nouveau projet de loi, nous envoyons des messages positifs au grand public. Nous encourageons ce comité à recommander au gouvernement de faire de la diffusion de ce nouveau projet de loi une priorité.

M. Lorne Hepworth, CropLife Canada: Honorables sénateurs, en plus de représenter CropLife Canada, je m'exprime au nom du Conseil canadien pour la lutte antiparasitaire en milieu urbain. Je suis accompagné de M. MacLeod. J'aimerais moi aussi vous remercier de me donner l'occasion de comparaître devant vous concernant le projet de loi C-8.

Laissez-moi vous présenter CropLife Canada. Il s'agit d'une association manufacturière sans but lucratif représentant les fabricants et les entreprises assurant le développement et la distribution de solutions mises au point par l'industrie phytoscientifique pour l'agriculture, les forêts et la lutte antiparasitaire au Canada. Fondée en 1952, CropLife Canada est le porte-parole de l'industrie et une source d'information sur les produits utilisés pour la protection des végétaux, c'est-à-dire les pesticides, et la biotechnologie végétale. Le Conseil canadien pour la lutte antiparasitaire en milieu urbain représente l'industrie des pesticides utilisés dans les milieux urbains et le marché non agricole.

Le greffier vous a distribué une brochure intitulée, «Nous soutenons». J'aimerais prendre quelques minutes pour vous expliquer le contenu de cette brochure. J'insiste pour le faire parce que, trop souvent, à titre d'association de l'industrie, nous faisons des interventions dans des comités comme celui-ci et nous nous retrouvons en train de parler de ce que nous refusons, de ce que nous n'aimons pas, de décrire les dispositions du projet de loi ou de la politique qui, selon nous, comportent des faiblesses et vont à l'encontre des valeurs scientifiques. Trop souvent en effet, le grand public entend parler de ce que nous refusons plutôt que de ce que nous soutenons. J'aimerais donc faire valoir aux membres du comité ce point de vue.

En tant qu'industrie, nous sommes en faveur de la sûreté et de l'innovation. Nous prônons la protection de la santé humaine et de l'environnement, l'existence d'un système d'homologation rigoureux et fondé sur la science ainsi qu'un public bien informé. Nous sommes aussi en faveur de l'amélioration de la qualité de la vie grâce aux avantages qui découlent de notre technologie et de la réalisation d'un avantage concurrentiel pour les agriculteurs canadiens et autres utilisateurs de nos produits. Nous soutenons la lutte antiparasitaire intégrée — c'est-à-dire qui consiste à utiliser les bons produits au bon moment, au bon endroit et de la bonne manière. Cette approche repose sur une recherche continue et une gérance responsable. L'engagement de notre industrie à l'égard de la santé et de l'environnement est manifeste dans le programme Nous en prenons soin de CropLife. L'industrie canadienne est reconnue à l'échelle mondiale comme un chef de file à cet égard. Des millions de dollars sont dépensés chaque année pour assurer la production, l'entreposage, la distribution, l'utilisation et l'élimination responsables des pesticides — autrement dit, la gérance de nos produits — durant la totalité de leur cycle de vie.

La manière dont nous gérons les contenants vides de pesticides une fois que les agriculteurs en ont terminé avec eux illustre bien notre leadership en matière de gérance. En collaboration avec les agriculteurs, les marchands de détail, les municipalités rurales et autres intervenants, nous affichons le taux de retour et de recyclage le plus élevé du monde. Ce programme fonctionne sur une base volontaire. Près de 73 p. 100 de tous les contenants de pesticides vendus sur le marché sont retournés et recyclés en poteaux de clôture ou en glissières de sécurité sur les autoroutes, pour ne donner que quelques exemples. L'Allemagne est le deuxième pays du monde pour le recyclage, avec un taux de 50 p. 100, et le recyclage y est exigé par la loi.

Nous soutenons aussi l'innovation et la découverte de nouvelles technologies et solutions pour les agriculteurs canadiens. À notre avis, la réforme du système de réglementation fédéral — la soi-disant «réglementation intelligente» — pourrait favoriser les occasions d'affaires et la croissance économique tout en permettant de protéger l'intégrité et la durabilité de l'environnement.

CropLife Canada est d'avis que le projet de loi C-8 est une mesure législative bien articulée et moderne. Aussi, nous sommes en faveur de son adoption rapide par le Sénat.

CropLife Canada a participé à l'évolution du projet de loi par l'entremise du Comité de la santé de la Chambre des communes. Nous avons comparu devant le comité et avons présenté un mémoire détaillé. Nous vous remettrons avec plaisir des exemplaires de ce mémoire, si vous le désirez.

D'abord et avant tout, nous soutenons les mesures de protection de la santé humaine et de l'environnement que renferme ce projet de loi. À cet égard, le projet de loi incorpore bon nombre de politiques et de pratiques scientifiques mises de l'avant par l'industrie et le gouvernement. Je veux parler des politiques qui visent la protection des bébés et des enfants et qui tiennent compte de l'exposition globale aux pesticides, notamment l'exposition par les aliments et l'eau. Je veux parler aussi des politiques qui tiennent compte des effets cumulatifs des pesticides, pour n'en nommer que quelques-unes.

Nous sommes en faveur des dispositions qui exigent une plus grande ouverture et plus de transparence afin que le grand public soit mieux informé et qu'il puisse prendre connaissance des résumés des rapports d'évaluation, des projets de décisions, et ce qui est encore plus important, des commentaires.

Les mesures prévues dans ce projet de loi ont pour effet de faire reculer les limites de la divulgation au public et de la reddition de comptes au Canada. Nos membres, malgré un certain degré d'appréhension, sont néanmoins en faveur de cette nouvelle approche.

Comme vous le voyez, les valeurs que nous défendons en tant qu'industrie sont passablement en phase avec les dispositions du projet de loi C-8 dans ces domaines clés qui sont si fondamentalement importants pour les Canadiens.

Nous entrevoyons deux étapes importantes dans les mesures de suivi une fois que le projet de loi aura été adopté. CropLife Canada est impatiente de collaborer avec Santé Canada à l'élaboration des règlements, des détails qui prennent toute leur importance. Nous insistons sur la nécessité de tenir une vaste opération de communication à l'intention du grand public concernant les nouvelles dispositions du projet de loi.

Les membres de CropLife Canada et du Conseil canadien pour la lutte antiparasitaire en milieu urbain représentent un pourcentage significatif des demandeurs d'homologation à l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire. En 2001, les membres de CropLife ont affiché un chiffre d'affaires de 1,27 milliard de dollars. Pour mettre les choses en perspective, le Canada représente environ 3,5 p. 100 du chiffre des ventes mondiales. Naturellement, nous sommes très intéressés à participer à l'élaboration des nouveaux règlements et de la nouvelle politique et à tout le processus. Aussi, nous offrons la coopération pleine et entière de tous les membres de notre association ainsi que l'expertise de notre industrie.

En ce qui concerne le deuxième point, il est important que le public soit mis au courant qu'avec cette nouvelle loi le gouvernement place la barre plus haut en ce qui concerne les mesures de protection de la santé humaine et de l'environnement. La nécessité de diffuser l'information est particulièrement évidente actuellement alors que de nombreuses municipalités des quatre coins du pays se penchent sur la question de l'utilisation des pesticides dans leur collectivité. Une communication sur une grande échelle et qui va au fond des choses permettra à Santé Canada de continuer de jouir de la confiance du public en tant qu'organisme de réglementation rigoureux et fiable.

Le grand public sera convaincu que le gouvernement prend les mesures nécessaires pour garantir sa santé et sa sécurité, de même que celles de l'environnement. La communication devra également viser les agriculteurs, les utilisateurs et les demandeurs d'homologation parce que ceux-ci doivent être mis au courant des dispositions du nouveau projet de loi, y compris les stipulations entourant l'exécution — tout simplement, le devoir de diligence raisonnable dont doit faire preuve le gouvernement.

En terminant, j'aimerais rappeler que CropLife Canada est d'avis que le projet de loi C-8 est une mesure législative bien articulée et qui vient à point nommé. Ce projet de loi reflète bien les intérêts de la société et il se pose comme un moyen de faire en sorte que la santé et la sécurité des Canadiens soient protégés, de même que la viabilité et la compétitivité de l'agriculture et des secteurs non agricoles.

CropLife Canada et le Conseil canadien pour la lutte antiparasitaire en milieu urbain sont en faveur d'un système de réglementation des pesticides efficient, efficace et transparent et d'un système qui favorise la santé et la sécurité humaines et la protection de l'environnement. Nous soutenons également la politique du gouvernement visant à stimuler les avantages économiques découlant de la technologie de la lutte antiparasitaire.

CropLife Canada est impatiente de voir le Sénat adopter le projet de loi C-8 afin que notre industrie puisse commencer à travailler avec le gouvernement à l'élaboration et à la promulgation des règlements accessoires.

Madame la présidente, nous sommes prêts à répondre aux questions.

La vice-présidente: Avant de passer à la période des questions, j'aimerais tout d'abord en adresser une à Mme Coombs. À la page 4 de votre mémoire, vous mentionnez les amendements ayant trait aux délais d'examen que vous aviez réclamés. Quelles raisons vous a-t-on données pour ne pas les accepter?

Mme Coombs: Faites-vous allusion au Comité de la santé de la Chambre des communes?

La vice-présidente: Oui.

Mme Coombs: On ne nous a donné aucune raison.

La vice-présidente: Il serait intéressant de connaître ces raisons.

Le sénateur Morin: Votre témoignage a été des plus intéressants. J'aimerais vous poser la même question que celle que j'avais adressée à la Dre Franklin concernant les délais d'examen et les frais d'utilisation.

Madame Coombs, il y a une recommandation visant à obtenir des règlements concernant les délais d'examen. Je ne vois pas comment un règlement pourrait imposer quoi que ce soit en rapport avec les délais d'examen si rien n'est prévu à cet égard dans la loi. Je constate que des calendriers sont prévus pour certains produits particuliers. En règle générale, toutefois, il n'y a aucune indication comme quoi cette question est abordée dans le projet de loi. Il ne s'agit pas de l'un des objectifs de la loi, et ce n'est pas non plus un mandat du ministre. Je ne vois pas comment nous pourrions réglementer cet aspect, à moins que vous n'ayez une suggestion à nous faire.

Ma prochaine question porte sur les droits d'utilisation. Dans d'autres pays, une augmentation des droits d'utilisation entraîne une amélioration de l'efficacité de la part de l'organisme de réglementation. Dans certains pays, comme l'Australie, l'agence ou la direction responsable de l'homologation des pesticides tire 100 p. 100 de son budget des droits d'utilisation. Apparemment, l'industrie est satisfaite de ce mode de fonctionnement et obtient satisfaction en temps opportun.

Dans l'éventualité où l'ARLA pourrait conserver les droits perçus, seriez-vous en faveur d'une augmentation de ces droits si elle était assortie de la garantie d'obtenir une approbation plus rapide de vos produits? Il semble qu'au Canada, les droits d'utilisation soient moins élevés qu'ailleurs.

J'aimerais éclaircir un point de détail avec M. MacLeod. Qui sont les membres de votre association, les fabricants surtout? Est-ce que la liste des membres est longue? Le cas échéant, vous pourriez nous la transmettre plus tard. Le commentaire de la Dre Franklin comme quoi nous n'avons pas beaucoup de fabricants au pays, et qu'il s'agit principalement de sociétés multinationales, et aussi que nous ne fabriquons qu'une petite partie de ce que nous utilisons ici même au Canada m'a vivement intéressé. Un chiffre de près de 3 p. 100 n'est pas si mauvais pour des pesticides, parce qu'il dépasse largement notre population. Nous consommons moins de 2 p. 100 des médicaments qui sont produits dans le monde Mais nous utilisons davantage de pesticides en tant que pays industrialisé. Je suis surpris que nous n'en fabriquions aucun ici, et il doit y avoir une raison à cela.

Je m'étonne de voir que l'industrie est en faveur d'une plus grande ouverture et de plus de transparence dans d'autres domaines. L'objection à l'égard de la transparence vient habituellement de l'industrie parce qu'elle s'inquiète au sujet des secrets commerciaux, et cetera. Toutefois, je vous félicite à ce sujet. Au bout du compte, si le public est bien informé du processus, il sera davantage prêt à accepter la situation.

Mme Coombs: Il est important que le Canada se dote d'un processus de réglementation réceptif, non seulement pour la sécurité des Canadiens, mais aussi pour favoriser l'innovation et la croissance économique. Il arrive souvent que les fabricants de pesticides veuillent introduire une nouvelle technologie, mais que les entreprises membres de notre association soient frustrées par la longueur et le côté imprévisible des délais d'examen pour obtenir l'homologation.

En 1999, et plus récemment en 2002, le Commissaire à l'environnement et au développement durable a présenté un rapport à la Chambre faisant état des mêmes frustrations en ce qui concerne les délais d'examen, non seulement pour l'homologation des nouveaux produits, mais aussi à l'égard du processus de réévaluation.

Vous avez fait des commentaires tout à l'heure au sujet d'un rapport. En 1998, le ministre Rock avait commandé à une tierce organisation une analyse comparative qui a révélé que l'ARLA prenait 40 p. 100 plus de temps à examiner nos produits. Des renseignements que nous avons obtenus grâce à la Loi d'accès à l'information, et que nous avons transmis au Comité de la santé ce printemps, montraient que lorsque nos entreprises membres présentaient des demandes d'homologation pour des ingrédients actifs déjà homologués, les délais d'homologation pour ces produits étaient encore plus longs, et oscillaient entre 72 et 119 p. 100.

À notre point de vue, si l'agence se contentait, au mieux, de respecter les lignes directrices relatives aux calendriers associés à la gestion des demandes d'homologation, ce serait déjà un point de départ. Mais les renseignements que nous avons obtenus grâce à l'accès à l'information ne vont pas dans ce sens. Nous sommes favorables à l'élaboration de règlements à cet égard.

Vous avez parlé de l'augmentation des droits d'utilisation. L'agence mène actuellement un examen quinquennal du recouvrement des coûts auquel l'ACPCS participe. Nous espérons que la question des délais d'examen pourra être abordée dans ce cadre; toutefois, nous pensons que l'adoption d'un règlement à cet égard serait une bonne chose.

D'autres intervenants ayant été entendus par le Comité de la santé sont en faveur de cette approche. Les amendements qui ont été proposés ce printemps aux articles 7 et 16 avaient été formulés par l'ACPCS et le Fonds mondial pour la nature. Il n'y a pas que l'industrie qui soit préoccupée par la situation.

Est-ce que ça répond à votre question?

Le sénateur Morin: Oui, merci.

M. Hepworth: Avant de demander à M. MacLeod de réagir à certains des points que vous avez soulevés, j'aimerais faire quelques commentaires généraux.

Premièrement, en ce qui concerne les délais d'examen, il est important pour nos membres que les demandes d'homologation soient examinées en temps opportun parce que, en fin de compte, les agriculteurs canadiens veulent avoir accès aux mêmes produits nouveaux, et souvent améliorés, que leurs concurrents aux États-Unis ou en Australie, par exemple. C'est une question primordiale pour eux et pour nous.

En ce qui a trait aux droits d'utilisation, permettez-moi de vous situer dans le contexte plus large, pour les agriculteurs par exemple, on se demande qui va absorber tous les coûts? Ils vont tout simplement se refléter dans le produit final. Même si les droits d'utilisation ne représentent qu'une très petite part du coût du produit final, j'entends parfois des agriculteurs faire valoir que tous ces coûts en apparence minimes finissent par s'additionner et par les faire mourir à petits feux. Nous devons faire preuve de jugement et nous montrer équitables. M. MacLeod voudra peut-être vous en dire plus à ce sujet.

La liste de nos membres n'est pas très longue. Elle est affichée sur notre site Web. Pour vous donner un aperçu, je dirais que dans le secteur agricole et des ventes au Canada, l'association a la chance de compter pratiquement toutes les entreprises du domaine. Voici quelques noms que vous connaissez sans doute: DuPont Canada Inc., Monsanto Canada Inc., Dow AgroSciences Canada Inc., Bayer CropScience Canada, BASF Canada, Syngenta Crop Protection Canada Inc. Des sociétés qui exercent leurs activités dans le domaine de la biotechnologie végétale et des semences se sont jointes à nous, comme Pioneer Hi-Bred Limited et Syngenta Seeds Canada. Du côté des distributeurs, nous comptons des entreprises comme Agricore United, James Richards International et Cargill Limited. Voilà qui devrait vous donner une idée du genre d'entreprises que nous représentons.

En ce qui concerne le point sur lequel vous demandiez des éclaircissements lors de votre échange avec la Dre Franklin, comme elle l'a souligné, ici au Canada, nous ne faisons pas la synthèse de molécules d'ingrédients actifs. Habituellement, nous effectuons la préparation du produit final et son conditionnement dans un format qui est ensuite utilisé sur les marchés agricoles et non agricoles.

Quant au chiffre des usagers par rapport à la population, il est évident que 3,5 p. 100 n'est pas un résultat négligeable, puisqu'il correspond à près de 1,3 milliard de dollars, mais au bout du compte, ce chiffre est en proportion de notre base de production en agriculture.

En terminant, sur la question de la transparence — je vous remercie de vos commentaires à ce sujet — il est entendu que nous y sommes favorables. Nous sommes à l'origine d'une bonne partie du contenu du projet de loi. Nous sommes en faveur du concept de la salle de lecture qui permettrait à quiconque veut prendre connaissance de données confidentielles de se rendre dans une salle à accès réservé — un peu sur le même principe que l'interdiction de sortir le budget de la salle de presse — et les personnes intéressées pourraient consulter des documents décrivant le nombre de rats tués, ce qu'on leur avait donné à manger, et des renseignements de ce genre.

Comme je l'ai mentionné dans mes remarques, nous avons abordé cette question avec une certaine appréhension. C'est un peu comme un saut dans l'inconnu pour nous. Je vous confie nos inquiétudes. Nous nous préoccupons du piratage des droits de propriété intellectuelle. Si cela devait se produire, et si le système échouait à nous protéger, alors il est clair que l'innovation serait compromise au Canada. Voici un bref résumé de ce qui nous préoccupe.

M. Peter MacLeod, CropLife Canada: Avant que je ne me lance dans une grande discussion, est-ce que nous avons bien répondu à vos questions?

Le sénateur Morin: Tout à fait.

M. MacLeod: Je voulais apporter des précisions, mais je pense que c'est inutile.

Le sénateur Morin: Je pense qu'un marché de 1 milliard de dollars est un bon marché. Je ne dis pas que nous devrions tout fabriquer au Canada. Mais l'innovation et l'industrie pharmaceutique sont des secteurs vigoureux chez nous. En plus, nous consommons moins de 2 p. 100 du marché mondial des médicaments. Si nous adoptions cette perspective — c'est-à-dire que nous ne consommons que 2 p. 100 de tout — il n'y aurait aucune entreprise manufacturière au Canada. Je sais bien que vous n'êtes pas personnellement en cause, mais je ne peux laisser passer l'occasion de dire que j'espère qu'un jour ou l'autre, nous nous engagerons dans le secteur de l'innovation et de la fabrication ici au Canada — pas que nous ambitionnions de produire la totalité des pesticides, mais nous devrions pouvoir en fabriquer une partie pour la consommation canadienne et exporter le reste. Je suis très favorable à cette idée.

Le sénateur Callbeck: J'ai passé en revue le mémoire des témoins et je n'arrive pas à trouver l'endroit où ils expliquent au comité de la Chambre que ce projet de loi s'éloigne des lois de même nature aux États-Unis. J'aimerais que vous élaboriez un peu sur le sujet. Si le projet de loi ne suit pas les mêmes lignes de pensée, quelles sont les répercussions envisagées?

M. Hepworth: Dans le mémoire que nous avons présenté à la Chambre des communes, nous tenions fermement à deux ou trois choses. L'une de ces choses était l'amélioration ou l'accélération du processus en ce qui concerne la technologie des produits qui présentent des risques réduits, et l'autre visait la disponibilité et l'homologation des produits à usage limité ici au Canada alors que nous nous préparons à entrer dans l'ère de la bio-économie du futur — les cultures à surface restreinte et à fort rapport économique qui auparavant étaient des problèmes du domaine horticole. Ces cultures comprennent les fruits et légumes, et aujourd'hui les pois et les lentilles, de même que tous les types de cultures que l'on retrouve dans l'Ouest. L'ensemble de ce segment à usage limité est en passe de devenir un élément plus important du succès de l'agriculture du futur. Nous avons recommandé que l'on adopte pratiquement mot pour mot la formulation utilisée dans la loi américaine sur la protection de la qualité des aliments, mais cet amendement n'a pas été accepté par le comité, et par conséquent, par le Parlement non plus.

Ceci étant dit, nous avons constaté avec plaisir que quelques changements mineurs avaient été apportés aux termes utilisés ainsi qu'à la formulation et que ces changements traduisent certaines de nos intentions. Je veux parler des allusions que nous avons déjà faites au sujet des mesures susceptibles de favoriser l'innovation et les découvertes ici au Canada. Donc, on a apporté quelques changements dans deux ou trois articles qui portaient sur les produits à risque réduit.

En ce qui concerne les produits à usage limité, je ne peux que vous répéter encore une fois que nous aurions préféré que l'on utilise un langage clair et précis, comme celui dont on a fait usage dans la loi américaine. Il y a eu un amendement ayant trait aux règlements relatifs aux produits à usage limité, aussi bien entendu, nous aurions préféré que l'on mentionne avec plus de précision ces deux ou trois questions. Nous sommes satisfaits de l'intention exprimée par certains des amendements proposés, toutefois ils ne vont pas aussi loin que nous l'aurions espéré.

Nous sommes également rassurés par le fait que cela ne signifie pas pour autant que le gouvernement nie l'importance de ces questions. En effet, le gouvernement a fait deux annonces importantes relativement à la politique, notamment sur l'ajout de ressources financières qui seront consacrées à la recherche sur les produits à usage limité et sur une nouvelle collaboration avec Agriculture et Agroalimentaire Canada.

Le sénateur Keon: Pourriez-vous élaborer un peu sur ce sujet? Si l'on adoptait une loi permettant l'approbation rapide des produits qui sont fabriqués, approuvés et utilisés en Amérique, en quoi cela pourrait-il stimuler l'industrie au Canada? Il me semble que l'on verrait tout simplement le produit traverser la frontière.

M. Hepworth: Dans certains cas, il peut s'agir de mettre à la disposition des utilisateurs des produits qui sont fabriqués chez nos voisins du sud ou dans d'autres pays de l'OCDE. Le canola est à peu près la seule culture pour laquelle le Canada est un chef de file mondial. Si nous considérons seulement l'augmentation énorme de la superficie de culture des lentilles et des légumineuses à graines, par exemple, qui ne sont pas aussi prédominantes aux États-Unis en raison de conditions climatiques moins favorables, nous pourrions susciter le même intérêt ici, au Canada. Il ne s'agit pas seulement de découvertes, mais aussi de recherches sur les formules, afin de préparer des produits qui conviennent à notre environnement et à nos conditions climatiques, et cetera.

L'autre point d'une importance primordiale est qu'en ne se dotant pas de moyens pour accomplir ce genre de choses, qu'il s'agisse tout simplement d'homologuer les produits finals ici ou encore de faire de la recherche sur la formulation, alors le Canada risque d'être le grand perdant. Parce que nous ne pourrons pas appliquer une partie de ce que je considère comme la nouvelle stratégie d'Agriculture et Agroalimentaire Canada qui rejoint passablement les intérêts de nos membres. Cette stratégie repose sur l'économie des sciences de la vie ou de la biotechnologie.

Le sénateur Callbeck: Madame Coombs, vous avez mentionné dans votre mémoire à la Chambre des communes que vous entreteniez des inquiétudes au sujet de la présentation d'un rapport pertinent au Parlement, mais au paragraphe 80(1) le ministre de la Santé est invité à produire un rapport annuel. Pouvez-vous nous expliquer votre sujet d'inquiétude?

Mme Coombs: Lorsque le projet de loi a été présenté au Comité permanent de la santé, il était question du dépôt d'un rapport annuel à la Chambre des communes, mais sans donner des précisions concernant le processus d'homologation ou, encore mieux, le nombre d'homologations exécutées durant l'exercice. Voilà les renseignements que nous voulions obtenir, et nous espérons qu'ils seront inclus dans le rapport annuel dorénavant, étant donné les amendements qui ont été présentés devant votre comité aujourd'hui.

Le sénateur Callbeck: Êtes-vous satisfaite maintenant?

Mme Coombs: C'est un début.

Le sénateur Keon: Madame Coombs, votre deuxième point était que des règlements devaient découler de la nouvelle loi, et vous poursuiviez en disant qu'il serait nécessaire de créer de nouveaux règlements avec la participation de tous les intervenants assujettis au processus de réglementation fédéral.

Avez-vous en tête un ensemble complet de nouveaux règlements ou seulement le peaufinage de ceux qui existent déjà?

Mme Coombs: Nous visons ceux qui doivent être changés, parce qu'il y en a toute une pile, mais il faudra aussi en rédiger de nouveaux, notamment sur des questions comme la déclaration des effets indésirables, et cette question devra être prise en considération. Le Conseil consultatif de la lutte antiparasitaire a promis que cette consultation aurait lieu avant que l'on ne publie quoi que ce soit dans la Gazette du Canada, et nous espérons que c'est ainsi que les choses vont se passer.

Le sénateur Keon: Que voulez-vous dire par un «système de réglementation plus transparent»?

Mme Coombs: Voulez-vous dire en fonction du nouveau projet de loi?

Le sénateur Keon: Oui.

Mme Coombs: Le projet de loi dit clairement que la santé des enfants doit être prise en compte, et cela est primordial. Auparavant, le public devait consulter une directive d'homologation pour trouver une telle affirmation.

Par ailleurs, si les Canadiens le désirent, on mettra à leur disposition une salle de lecture où ils pourront consulter les données fournies à l'ARLA et s'assurer de la rigueur scientifique des résultats des études qui sont effectuées en vue de l'évaluation de ces produits. Ce sont des éléments clés du projet de loi qui feront avancer les choses.

Le sénateur Keon: Pour élaborer sur le sujet, vous avez également mentionné l'importance de faire l'éducation du public en ce qui concerne le contenu du projet de loi. Pensez-vous que le projet de loi devrait comporter des dispositions prévoyant l'information des consommateurs ou est-ce que cela peut se faire au moyen d'un autre processus?

Mme Coombs: Les défis que les entreprises membres de l'ACPCS doivent affronter proviennent du fait que les consommateurs utilisent nos produits. À l'échelle municipale, de même qu'à l'échelle provinciale, on est de plus en plus sensibilisé au sujet de ces produits. Nous nous sommes aperçus qu'il y a des lacunes en ce qui concerne la communication de la rigueur du système de réglementation actuellement en vigueur. À notre avis, ce système est très rigoureux, et nous aimerions que cela soit bien articulé. Le nouveau projet de loi donne au gouvernement canadien l'occasion de le faire, et nous espérons qu'il la saisira.

Le sénateur Keon: Qu'y aurait-il de mal à ce que votre organisation s'occupe de cette éducation et de cette communication?

Mme Coombs: Il est certain que nous pouvons diffuser de l'information sur ce projet de loi, cependant cela risquerait de créer une situation déplorable où l'industrie se retrouverait en train de faire la promotion de ce que fait le gouvernement; il serait préférable que le gouvernement articule lui-même ce message.

Le sénateur Keon: Il s'agit d'un problème de crédibilité, n'est-ce pas?

La vice-présidente: Il y aurait probablement des accusations de conflit d'intérêts. J'avais l'intention de poursuivre avec une question semblable, parce que vous dites que l'ACPCS voudrait voir la mise en place d'un processus juste et transparent concernant la Stratégie pour les pelouses saines de Santé Canada. Avant que nous ne débutions aujourd'hui, je vous avais confié que j'avais moi-même succombé à l'hystérie et à la désinformation concernant la Stratégie pour les pelouses saines. Avez-vous l'impression que cette question est abordée dans le projet de loi? Que fait votre industrie à cet égard?

S'agit-il d'hystérie ou de désinformation? Se pourrait-il que des personnes prennent des décisions qui ne reposent pas sur de solides bases scientifiques?

Mme Coombs: Premièrement, j'aimerais vous remercier au nom des entreprises membres de mon association d'acheter nos produits.

Nous sentons qu'il y a beaucoup d'hystérie. Le processus d'homologation est un exercice rigoureux, fondé sur les résultats d'études scientifiques sérieuses et sur des preuves. Des quantités de données sont fournies à l'ARLA en vue d'obtenir l'homologation des produits.

Nous sommes convaincus que nos produits sont sûrs lorsqu'ils sont utilisés selon le mode d'emploi. Ces deux dernières années ont été particulièrement houleuses, diverses municipalités ayant résolu de se montrer proactives et de prendre des initiatives visant à réduire l'utilisation des pesticides au moyen de règlements municipaux.

Je vous répète que je pense que le système d'homologation se passe fort bien de commentaires. Nous espérons que le nouveau projet de loi contribuera à calmer les appréhensions que la désinformation véhiculée par des individus isolés a pu susciter chez les Canadiens parce que nos données montrent que la population accorde toujours une grande confiance aux produits ayant été homologués et qu'elle les considère sans danger.

La présidente: Je profite de l'occasion pour vous remercier d'être venus témoigner sur cette importante mesure législative.

La séance est levée.


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