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Délibérations du comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles

Fascicule 9, Témoignages du 25 février 2003


OTTAWA, le mardi 25 février 2002

Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles se réunit à 17 h 15 pour étudier de nouvelles questions liées à son mandat et faire rapport à leur sujet (mise en oeuvre du Protocole de Kyoto).

Le sénateur Tommy Banks (président) occupe le la réunion.

[Traduction]

Le président: Au cours de cette réunion du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles, nous étudierons les questions ayant trait aux énergies de remplacement, à la mise en oeuvre du protocole de Kyoto et à nos autres obligations internationales.

Nous accueillons aujourd'hui différents témoins dont M. David Oulton, chef du Secrétariat du changement climatique, M. Paul Fauteux, directeur général, Bureau des changements climatiques d'Environnement Canada, et M. Neil MacLeod, directeur général, Office de l'efficacité énergétique de Ressources naturelles Canada.

Messieurs, vous avez la parole. Je suppose que M. Oulton voudra faire une déclaration préliminaire.

M. David Oulton, chef, Secrétariat du changement climatique: Monsieur le président, j'inviterais mes deux collègues à prendre la parole au fur et à mesure que nous passerons en revue le jeu des diapositives. La greffière vous a remis des copies papier des diapositives que je vous présenterai et qui forment la structure de mon exposé. Tout le monde devrait en avoir un exemplaire. La première page porte le titre «Plan du Canada sur les changements climatiques» ainsi que la date du 25 février. Je vais donc passer en revue ces diapositives avec vous. J'aimerais vous signaler avant de commencer que je vais parler français et anglais en alternance pendant mon exposé.

[Français]

Cette présentation donne un aperçu du contexte national et international des engagements du Canada face aux changements climatiques. Je m'adresserai à vous en premier pour présenter le processus national et M. Paul Fauteux, d'Environnement Canada, traitera du contexte international et des mesures à prendre pour aller de l'avant. Enfin, M. Neil MacLeod de Ressources naturelles Canada donnera un aperçu du plan du Canada sur les changements climatiques et du Budget de 2003.

Nous sommes conscients que le comité cherchera à entendre des présentations plus détaillées et plus techniques au sujet de divers éléments du plan au cours des prochaines semaines et c'est pourquoi aucun spécialiste ne nous accompagne ce soir. Nous espérons que notre présentation vous aidera à mieux comprendre la portée de la question afin que vous puissiez mieux cerner vos discussions approfondies sur les programmes et les initiatives.

[Traduction]

Je vous demanderais de regarder la page 4 du document que vous avez en main.

Même s'il subsiste toujours des opinions divergentes quant aux données scientifiques relatives aux changements climatiques, la plupart des spécialistes mondiaux de ce domaine s'entendent pour dire que le climat de la terre se modifie et que ce changement climatique entraîne des risques non négligeables pour l'avenir.

La diapositive que vous avez sous les yeux est tirée du troisième rapport d'évaluation du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, organisation relevant des Nations Unies. Il s'agit d'un graphique résumant les températures mondiales des 1 000 dernières années. Ces températures ont été enregistrées à l'aide d'instruments modernes depuis 1860. Au-delà de cette date, on a pu déterminer les températures d'après les cercles des arbres et les carottes de glace. Le graphique indique que la température moyenne à la surface du globe a augmenté d'environ 0,6 degré Centigrade au cours du XXe siècle. Cela représente une augmentation marquée par rapport aux changements climatiques antérieurs.

Le graphique illustre également l'augmentation prévue de la température mondiale d'ici l'an 2100, selon différents scénarios fondés sur les émissions de gaz à effet de serre. L'écart va de 1,5 à 5,8 degrés Centigrade. Beaucoup de résultats se recoupent et tournent autour de 3 degrés. C'est là une augmentation cinq fois plus importante que celle à laquelle nous avons assisté au cours des 100 dernières années et elle est vraisemblablement plus importante que l'augmentation observée depuis 10 000 ans.

Dans la conclusion de son rapport, le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat a signalé que, d'après des données récentes et plus convaincantes, la plus grande partie du réchauffement observé au cours des 50 dernières années serait attribuable à l'activité humaine. Les experts sont persuadés que les changements régionaux récents de température ont eu des répercussions perceptibles sur beaucoup de systèmes physiques et biologiques.

Le Canada pourrait être gravement touché par les effets du changement climatique, particulièrement dans le nord du pays, vers le milieu du continent dans la région des prairies et dans les régions côtières.

La diapositive 5 illustre l'engagement du Canada de réduire ses émissions en vertu du Protocole de Kyoto. À l'extrême gauche du graphique, la courbe représente le niveau des émissions en 1990, qui équivalait à 607 mégatonnes de CO2. Au bas du graphique, on voit notre objectif pour 2010, toujours selon le protocole de Kyoto, qui correspond à une réduction de 6 p. 100 par rapport aux niveaux de 1990, soit 571 mégatonnes. Voilà le niveau moyen que nous devons atteindre au cours de la période allant de 2008 à 2012, la première période d'engagement prévue par le protocole de Kyoto.

Vous aurez remarqué qu'en l'an 2000, nos émissions mesurées, c'est-à-dire notre inventaire pour cette année-là, équivalaient à 726 mégatonnes de CO2. Cela représente un accroissement d'un peu plus de 19 p. 100 par rapport à notre niveau de 1990. Si on suit la courbe jusqu'en 2010, on voit que notre niveau d'émissions serait de l'ordre de 809 mégatonnes de CO2 si on maintenait le statu quo.

Si vous comparez les estimations pour le scénario du maintien du statu quo avec notre cible de Kyoto, vous avez ce que nous avons appelé l'écart du maintien du statu quo qui s'élève à 240 mégatonnes, soit l'écart qui devra être comblé grâce aux mesures du gouvernement du Canada et de nos autres partenaires. À l'extrême droite, vous voyez que les mesures prises à ce jour ont permis, ou plutôt permettront, de réduire cet écart de 80 mégatonnes, que la deuxième étape du plan canadien viserait une réduction additionnelle de 100 mégatonnes et l'étape trois, telle que décrite dans le plan, vise à éliminer les 60 tonnes métriques qui resteront.

M. MacLeod et M. Fauteux vous présenteront ces éléments du plan de façon beaucoup plus détaillée plus loin dans l'exposé.

[Français]

M. Paul Fauteux, directeur général, Bureau des changements climatiques, Environnement Canada: Le Protocole de Kyoto est le résultat d'une dizaine d'années de négociations internationales qui ont commencées peu après une conférence tenue à Toronto en 1988. Ces négociations ont abouti tout d'abord en 1992 au Sommet de la Terre de Rio à la Convention cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, finalement au Protocole de Kyoto, qui a été adopté au Japon en 1997, cinq ans après la conférence de Rio. Dans les années qui avaient suivi l'adoption de la convention à Rio, les États s'étaient rendus compte qu'il fallait mettre en place des mesures plus exigeantes et plus fiables pour réduire les émissions de gaz à effet de serre.

Ce protocole est unique en son genre sous plusieurs rapports. Tout d'abord au niveau de la portée David Oulton et Neil MacLeod, qui sont des fonctionnaires d'expérience, seront d'accord avec moi pour dire que les changements climatiques sont un des sujets les plus horizontaux dont traite le gouvernement fédéral. Cette horizontalité se reflète dans le Protocole de Kyoto qui touche à presque tous les secteurs de l'économie.

C'est un instrument juridique international particulièrement robuste dans la mesure où il impose des conséquences importantes pour le non-respect des obligations. Il fait appel à des vérifications rigoureuses pour s'assurer que tout le monde suit les règles et se conforme à ses engagements.

Le protocole est également unique dans la mesure où il fait appel à des mécanismes de marché qui visent à utiliser les forces du marché et du secteur privé pour mobiliser son énergie, sa créativité et ses ressources financières. Il le fait principalement par l'entremise de trois mécanismes, dit «mécanismes de Kyoto». Tout d'abord, le mécanisme pour un développement propre qui permet à des pays qui, comme le Canada, ont assumé des cibles de réduction d'émissione, d'investir dans des projets de réduction d'émission dans des pays en développement. Ce mécanisme contribue au développement durable dans ces pays hôtes des projets et permet également au pays investisseur d'atteindre sa cible à moindre coup puisque qu'il y a une seule atmosphère pour cette planète qui est la nôtre. Qu'il y ait une tonne de réduction d'émission à Montréal, à Moscou ou à Manille, c'est strictement équivalent du point de vue de l'environnement, de l'atmosphère. Ce mécanisme de Kyoto vise à favoriser le développement durable dans les pays en voie de développement et à l'atteindre par les pays industrialisés de leurs cibles de réduction d'émission au meilleur coût.

Un mécanisme semblable qui s'applique entre pays industrialisés ayant assumé des obligations de réduction d'émissions, c'est ce que l'on appelle l'application conjointe. Ce mécanisme permet par exemple, au Canada ou à une entreprise canadienne d'investir dans un projet de réduction d'émissions en Pologne. La Pologne a également une cible de réduction d'émission. Comme les autres économies en transition vers une économie de marché, c'est un pays qui souffre de manque de capitaux, de technologies désuètes. Le Canada peut contribuer au développement durable dans les pays en transition vers une économie de marché et réaliser des économies importantes dans l'atteinte de sa cible.

Le troisième mécanisme du Protocole de Kyoto est l'échange international de droits d'émission, puisque chaque pays qui assume une obligation de réduire ses émissions obtient en échange la permission d'émettre une certaine quantité de gaz à effet de serre. Prenons l'exemple du Canada. Notre cible est de réduire nos émissions de gaz à effet de serre de 6 p. 100 sous leur niveau de 1990. Alors, on prend le niveau de nos émissions de 1990 et on multiplie par 94 p. 100, cela nous donne nos émissions permises. Pour celles-ci, nous recevons des permis internationaux. Les pays qui reçoivent ces permis peuvent les échanger entre eux pour réduire le coût du respect de leurs obligations.

Le Canada a ratifié le protocole le 17 décembre dernier. Nous sommes le centième pays à ratifier le protocole. Il y a deux conditions pour son entrée en vigueur. La première est déjà remplie, puisque qu'il ne fallait que 55 ratifications par les États parties à la convention pour que le protocole entre en vigueur. La deuxième condition n'est pas encore remplie: il faut que les États parties à la convention qui ratifient le protocole soient responsables ensemble d'au moins 55 p. 100 des émissions de CO2 de l'ensemble des pays industrialisés en 1990.

Le Canada a contribué pour 3,3 p. 100 de ces émissions. Comme les États-Unis ont décidé de ne pas ratifier le protocole et qu'ils étaient eux-mêmes responsables de plus de 36 p. 100 des émissions en 1990, la ratification par la Russie est essentielle. La Russie est responsable de 17 p. 100 des émissions nécessaires pour atteindre cette barre de 55 p. 100. On s'attend à ce que la Russie ratifie cette année et que le protocole entre en vigueur suite à cette ratification russe.

J'ai mentionné le rejet du protocole par les États-Unis. L'Australie a dit qu'elle ne le ratifierait pas le protocole pour le moment. Le Canada a adhéré à un large consensus international puisque à l'exception de ces deux pays, les États- Unis et l'Australie, tous les autres pays industrialisés qui ont souscrit des engagements à Kyoto, ont ratifié ou sont en train de le faire.

L'application du protocole n'engendrera qu'un faible ralentissement de la croissance des émissions mondiales de gaz à effet de serre. D'une part parce qu'il ne sera pas ratifié par les États-Unis, d'autre part parce qu'il n'impose pas de cible aux pays en développement. Les pays en développement qui s'industrialisent rapidement comme l'Inde, la Chine et le Brésil ne seront pas obligés de réduire leur émission en vertu du protocole dans la première période d'engagement, soit de 2008 à 2012; ceci en reconnaissance du fait que les changements climatiques sont un problème qui a été créé par les pays industrialisés comme le Canada, les États-Unis et l'Europe, puisque l'origine de ce problème remonte à la révolution industrielle: on brûle du charbon et d'autres combustibles fossiles depuis le milieu du XIXe siècle et les émissions de gaz à effet de serre se sont accumulées dans l'atmosphère et ont créé ce problème des changements climatiques. Le principe qui a été adopté à Rio en 1992, et confirmé à Kyoto en 1997, est celui de la responsabilité commune mais distincte. Tous les pays ont en commun la responsabilité de combattre les changements climatiques mais d'une façon qui distingue leur niveau de responsabilités dans ce problème.

Le Protocole de Kyoto, un premier pas modeste mais un premier pas essentiel dans une entreprise qui va nous occuper au moins pour les cinquante prochaines années sinon plus.

La décision des États-Unis de ne pas le ratifier crée des problèmes particuliers pour le Canada, principal partenaire commercial des États-Unis. Les États-Unis sont les destinataires de 87 p. 100 des exportations canadiennes. Il y avait donc au sein de la communauté d'affaires canadienne une préoccupation légitime en ce qui a trait à la compétitivité: comment pouvons nous accepter de réduire nos émissions et d'assumer le coût de ces réductions d'émissions si nos concurrents aux États-Unis ne le font pas?

Il y a évidemment un revers de la médaille. Le fait que les États-Unis ne ratifient pas, donne au Canada l'occasion de prendre une longueur d'avance dans le développement de technologies de lutte contre les changements climatiques, notamment au niveau des énergies propres et ainsi de créer des nouveaux produits, des nouvelles technologies, des nouveaux services et des nouvelles exportations. Le Plan du Canada pour les changements climatiques va de l'avant pour régler ces problèmes de compétitivité. Le plan a été conçu pour atténuer l'effet négatif que j'ai mentionné et accentuer l'effet positif. Le gouvernement s'est également engagé à protéger l'industrie contre le risque d'une hausse du prix international du carbone sur ce marché international que je décrivais tout à l'heure. Des permis d'émission se transigeront à la grandeur de la planète. Le gouvernement fédéral a dit qu'il assumerait la responsabilité de ces achats de permis au-delà de 15 $ canadien la tonne de CO2, en 2010.

On a donné à l'industrie une certitude au niveau du prix. On a limité sa responsabilité sur le prix et on a donné à l'industrie une certitude sur la quantité puisque le plan prévoit que les grands émetteurs industriels ne seront responsables au total que pour 55 millions de tonnes de réduction d'émissions annuelles. Le gouvernement s'engage à ne pas exiger d'eux un effort supplémentaire obligatoire, mais il pourrait le faire par le biais d'incitatifs.

Même si les États-Unis n'ont pas ratifié le protocole, le Canada coopère étroitement avec eux. La création d'un groupe de travail en matière de coopération sur les changements climatiques entre le Canada et les États-Unis, a été décidée au mois de mars dernier. Le groupe s'est réuni à plusieurs reprises. Il est un véhicule pour nous permettre de coordonner nos actions avec les États-Unis autant que possible parce que même si les États-Unis ne ratifient pas le protocole, ils agissent néanmoins pour faire la lutte aux changements climatiques. Il est de notre intérêt de coordonner notre action pour la lutte contre les changements climatiques le plus tôt possible.

Finalement, pour la prochaine ronde de négociations, le protocole fixe des engagements valident de 2008 à 2012. Il précise également que de nouvelles négociations pour la période après 2012 doivent commencer au plus tard en 2005.

On doit dès maintenant commencer à se préparer pour cette prochaine ronde de négociations qui sera difficile puisque les intérêts sont très divergents. L'Union européenne parle déjà d'accepter des cibles de réduction d'émissions beaucoup plus ambitieuses. Le premier ministre Blair, de Grande-Bretagne, déclarait récemment que le Royaume-Uni visait une réduction de 60 p. 100 — non pas six p. 100 — des émissions de gaz à effet de serre sous le niveau de 1990, à l'horizon de 2050, et non pas de 2012. Les pays en développement dont j'ai parlé plus tôt hésitent à s'engager puisqu'ils accordent la priorité à la lutte contre la pauvreté et au développement économique et social.

L'administration Bush n'est pas encore très claire dans ses intentions. On ne sait pas s'ils vont participer ou non à ces négociations sur la prochaine période d'engagement dans le cadre de laquelle le Canada voudra à nouveau faire reconnaître la contribution que font à la lutte aux changements climatiques ses exportations d'énergie plus propres, notamment le gaz et l'hydroélectricité à destination des États-Unis.

[Traduction]

M. Oulton: Je demanderais aux membres du comité de regarder la page 13. J'aimerais consacrer les prochaines minutes au contexte fédéral provincial.

En guise de rappel, comme M. Fauteux le disait, le Protocole de Kyoto a été négocié en décembre 1997. Tout de suite après cette négociation, en décembre, il y a eu une réunion des premiers ministres où l'on a discuté, parmi d'autres sujets, du Protocole de Kyoto. À la fin de cette rencontre les premiers ministres ont adopté une résolution dans laquelle le gouvernement fédéral disait essentiellement, «Nous pensons qu'il est impératif que le Canada participe aux négociations internationales qui se poursuivront sur ce protocole afin de voir si elles aboutiront à un document que nous pourrons ratifier et, si le Canada le ratifie, lorsque viendra le moment de mettre en oeuvre le Protocole, il sera également impératif que les provinces et les territoires coopèrent avec le gouvernement fédéral». Pour leur part, les provinces et les territoires ont dit, «Eh bien, afin que nous puissions coopérer avec vous, il faut que nous puissions participer à l'analyse de nos options et aux répercussions de ces options au cas où le Canada irait de l'avant et, deuxièmement, il est également important pour nous, lorsque viendra le moment de mettre en oeuvre ces options, qu'il y ait un partage raisonnable des coûts et du fardeau de ces options et de leur mise en oeuvre entre les différentes régions du pays». Essentiellement, cela a été le point de départ et la base du processus fédéral provincial qui a été lancé au début de 1998 et qui s'est poursuivi sur une période de cinq ans jusqu'à l'automne et l'hiver derniers.

La page 14 vous donne une idée de ce que les discussions fédérales provinciales ont permis d'accomplir. Tout de suite après la première rencontre en 1997, les ministres de l'Énergie et de l'Environnement se sont rencontrés et ont dit, «Nous nous chargerons d'essayer d'élaborer le plan de travail dont nous aurons besoin pour comprendre le protocole et les options de mise en oeuvre qui s'offrent au Canada. Nous mettrons en place un processus national auquel participeront le gouvernement fédéral et les provinces afin de faire les analyses et d'élaborer les options dont nous aurons besoin afin d'être bien placés pour prendre une décision quant à la ratification du protocole si les négociations aboutissent».

Le processus a débuté en avril 1998. Un certain nombre de documents ont été produits et adoptés conjointement par le gouvernement fédéral et les provinces. Le premier que nous mentionnons est la Stratégie nationale de mise en oeuvre qui disait essentiellement, puisqu'à ce moment-là le protocole faisait encore l'objet de négociations, que les provinces les territoires et le gouvernement fédéral s'entendent pour dire que c'est une question importante pour le Canada et une question à laquelle il faut s'attaquer, que les négociations du protocole aboutissent ou non.

Au même moment, ils ont adopté un deuxième document que nous mentionnons et qui s'intitule Le premier plan national d'activités. Il s'agissait, en quelque sorte, d'une indication du genre de mesures que chaque province et territoire, ainsi que le gouvernement fédéral, étaient prêts à entreprendre. C'est à ce moment-là que le gouvernement fédéral a annoncé le plan d'activités 2000 et son financement de 500 millions de dollars sur cinq ans qui constituait sa contribution à ce premier plan d'activités. Lorsque les ministres se sont réunis en mai dernier — et ils se sont réunis au moins deux et parfois trois fois par année — ils ont approuvé un deuxième plan d'activités et ils ont fait une évaluation du premier. Ils ont dit, «Voici d'autres mesures que les provinces, les territoires ainsi que le secteur privé doivent prendre conjointement». Au cours des cinq dernières années, la coopération fédérale-provinciale a pris beaucoup d'ampleur.

En 1998, les ministres ont lancé un processus de consultation nationale. La première a été une vaste initiative qui s'est étendue de 1998 à 2000, et qu'on a appelée les tables de concertation auxquelles ont participé le secteur privé, des groupes environnementaux et d'autres groupes d'intérêt qui se sont divisés en quinze tables de concertation différentes regroupant de deux à trois dizaines de personnes et chargées d'élaborer les politiques et les programmes que les gouvernements canadiens ainsi que le secteur privé devraient appliquer afin de mettre en oeuvre le Protocole de Kyoto. Les mesures mises au point par ces tables de concertation à la fin de 1999 et au début de l'an 2000 ont servi de base pour un grand nombre d'actions que le gouvernement fédéral et les provinces ont mises en oeuvre depuis et nous continuons à nous en inspirer pour analyser notre travail.

Nous avons également créé le groupe d'analyse et de modélisation. Il y a eu beaucoup de discussions pendant l'automne au sujet des différents modèles économiques et macro-économiques et de l'incidence que pourraient avoir certaines mesures que nous pourrions prendre pour atteindre nos objectifs de Kyoto. Il s'agit d'une entreprise menée conjointement par le gouvernement fédéral et les provinces qui a débuté en 1998-1999 et qui a abouti à une série d'analyses effectuées l'an dernier. On a examiné les droits d'émissions échangeables qui ont été repris dans le cadre des ententes que nous négocions avec les grands pollueurs industriels, les principales industries. Nous avons également organisé de vastes activités dans tout le pays pour engager les parties intéressées, la première d'entre elles s'est déroulée en l'an 2000 et la deuxième a eu lieu en 2002, lorsque nous sommes allés dans toutes les capitales provinciales pour tenir des réunions ouvertes avec les parties intéressées afin de discuter du genre de mesures qui devaient être élaborées et intégrées au plan.

À la page 16, j'aimerais parler des principes qui ont fait l'objet de discussions l'automne dernier et il s'agit des principes qui ont été élaborés par les provinces et les territoires. Ils ont reçu une ébauche du plan de mise en oeuvre du gouvernement fédéral et ils ont voulu énoncer, «Voici les choses qui sont les plus importantes pour nous pour que nous puissions travailler avec vous à réaliser le plan de mise en œuvre». Ils ont énoncé un ensemble de douze principes lors de cette réunion. Essentiellement, nous avons répondu, par l'entremise du premier ministre, dans une lettre en date du 19 novembre leur disant que nous étions d'accord avec neuf des principes qu'ils avaient énoncés. Il était évident que ce qui allait importer, c'était la manière de les mettre en oeuvre, mais nous étions d'accord avec l'énoncé de ces principes. À notre avis, il y avait trois principes qui devaient faire l'objet d'autres discussions entre nous et les provinces et nous étions prêts à engager le dialogue. Lorsque nous avons rendu public notre plan à la fin de novembre, nous avons essayé de retenir autant de ces principes que possible.

La page 17 présente, sous forme abrégée, la liste des principes que les provinces nous ont fournis et l'indication de l'élément du plan où nous avons essayé de refléter ces principes ainsi que les mesures que nous voulions mettre en oeuvre au moyen de ce plan. Nous avons inclus dix principes, car même si nous étions essentiellement d'accord avec le deuxième principe, un de ces éléments nous posait un problème.

À la page suivante, la page 18, nous présentons les secteurs au sujet desquels nous avions des préoccupations et dont nous avons fait part aux provinces. Il y en avait trois. On peut lire à la page 18 que «le Plan comprend des mesures d'atténuation appropriées, financées par le gouvernement fédéral, pour contrer les incidences défavorables». Le deuxième se lit ainsi «Le Plan garantit qu'aucune province ou qu'aucun territoire n'assumera les risques financiers des engagements du gouvernement fédéral». Le gouvernement fédéral a indiqué qu'il comprenait pourquoi ils avaient proposé ces principes, mais qu'il croyait que ces principes devaient être formulés de façon plus générale.

À ce moment-là, nous avions préparé un plan qui indiquait qu'il y aurait effectivement des coûts, puisque les mesures qui s'imposaient constitueraient un investissement de la part du Canada. La mise en oeuvre de ces mesures comporte certains risques, mais en participant à la lutte contre le changement climatique, le Canada bénéficiera également d'avantages et de possibilités.

Nous croyons qu'il s'agit d'une entreprise conjointe. C'est pourquoi ces principes devraient être énoncés de manière à assurer un équilibre qui reconnaît que nous devons tous faire notre part. Il ne s'agit pas seulement que le gouvernement fédéral accepte la responsabilité, mais il s'agit plutôt que nous partagions ce dossier à la fois comme une responsabilité et comme une possibilité.

Le dernier principe qui nous rendait mal à l'aise est celui qui disait essentiellement que le plan reconnaît que les avantages découlant des actifs des puits — à savoir la capacité des terres agricoles et des forêts d'absorber le CO2 — et, en bout de ligne, les réductions d'émissions reviennent à la province ou au territoire à qui appartiennent ces actifs. Pour être réalisable, ce concept doit être élargi car certaines provinces ont de vastes forêts et terres agricoles et absorbent plus de CO2 qu'elles n'en émettent alors que pour d'autres provinces, ce serait le contraire. C'est pourquoi il fallait examiner la question du point de vue des provinces qui émettent et de celles qui absorbent.

Le protocole que M. Fauteux a décrit a été négocié de manière à ce que les avantages découlant de ces puits — qui est une disposition du protocole proposée par le Canada — soient partagés à l'échelle nationale. Ces avantages ne seraient pas divisés parmi les provinces. Ils seraient calculés comme des avantages nationaux pour réduire nos obligations globales. Nous n'étions pas d'accord avec l'énoncé de cet élément.

Ces discussions avec les provinces ont pris fin en décembre. Nous nous sommes entendus pour les interrompre quitte à les reprendre, au besoin, à la demande des provinces. Les provinces n'ont pas demandé que nous reprenions ces discussions. Je ne vais pas essayer de deviner quelle est leur position, mais il se peut que l'élément important de ces principes devienne évident lors de la mise en oeuvre. Il s'agira de la relation que le gouvernement fédéral établira avec les provinces pour ce qui est de la mise en oeuvre.

Pour le gouvernement fédéral, ces principes sont un repère auquel nous devons faire attention. Et c'est ce que nous ferons. Nous nous sommes engagés de bonne foi à faire des progrès importants, à mettre en oeuvre le plan en respectant les principes, bien qu'il soit évident que certains d'entre eux devront faire l'objet d'autres discussions lorsque viendra le temps de la mise en oeuvre.

M. Neil MacLeod, directeur général, Office de l'efficacité énergétique, Ressources naturelles Canada: Nous avons essayé de résumer en un tableau, à la page 20, l'ensemble des chiffres des trois étapes de la mise en oeuvre de Kyoto. La première colonne indique les interventions à ce jour. Ce sont des mesures annoncées soit dans le Plan d'action 2000, qui a été approuvé il y a plus de deux ans et qui a reçu l'aval des ministres du Conseil du Trésor il y a plus d'un an, soit dans le budget de 2001, qui prévoyait d'importantes mesures visant à encourager la production d'énergie éolienne. Les 13 mégatonnes sont attribuables au transport et aux immeubles. Les émetteurs industriels sont responsables de 25 mégatonnes. Une partie de cela découle du Plan d'action 2000, et une partie de la mesure d'encouragement de la production d'énergie éolienne. Il y a 38 mégatonnes provenant de l'agriculture, de la foresterie et des municipalités. De cette quantité, environ 30 mégatonnes sont attribuables aux puits pour lesquels le Canada a obtenu l'approbation internationale il y a un peu plus d'un an. Le reste, 8 mégatonnes, vient du Plan d'action 2000.

La deuxième étape présente les mesures proposées dans le Plan du Canada sur les changements climatiques qui a été rendu public en novembre 2002. Plusieurs éléments sont énumérés. Vous pouvez consulter ce document pour savoir quels éléments ont servi à calculer ces mégatonnes.

Encore une fois, on a indiqué les mégatonnes pour le transport et les immeubles. M. Oulton et M. Fauteux ont mentionné le plafond de 15 p. 100 applicable aux émetteurs industriels, ce qui donne 55 mégatonnes. Il y a environ 16 mégatonnes pour les énergies renouvelables et l'utilisation de combustibles fossiles. Il y a encore 20 à 28 mégatonnes pour les compensations que nous n'incluons pas dans le calcul. Ces compensations seront produites ailleurs et les émetteurs industriels pourront les acheter pour atteindre leur contribution de 55 mégatonnes. Si nous les incluons aux deux endroits, ils seraient comptabilisés deux fois. Ce sont des réductions faisables, mais nous ne pouvons pas les additionner.

En outre, il y a au moins 10 mégatonnes sur les marchés internationaux, ce qui donne au total environ 100 mégatonnes. Ainsi que M. Oulton le précisait, l'écart est vraiment de 240 mégatonnes. Les éléments additionnels ne donnent pas un total suffisant. On a des opinions pour aller chercher les 60 dernières mégatonnes, et ce ne sont pas les idées qui manquent sur la façon de le faire.

Le sénateur Spivak: Je ne comprends pas. Estimez-vous que nous avons maintenant atteint 180 mégatonnes?

M. MacLeod: Grâce au Plan d'action 2000, au budget de 2001 et à l'accord de la communauté internationale quant aux puits de carbone, nous avons atteint 80 mégatonnes. Les autres idées figurant ici et qu'il faudra bien finir par soutenir un jour, nous permettraient de trouver 100 mégatonnes de plus.

M. Fauteux: Grâce aux mesures que nous avons mises en place, pour la période de 2008 à 2012, nous estimons être en mesure de réduire les émissions, en moyenne, de 80 mégatonnes par année.

Le sénateur Spivak: C'est très différent.

M. Fauteux: Il faut attendre longtemps pour que de telles mesures commencent à faire effet.

Le sénateur Spivak: Ce n'est pas qu'en 2003 nous avons dissimulé 80 mégatonnes quelque part?

M. MacLeod: À la diapositive 21, on peut voir la liste des divers fonds constitués pour atteindre cet objectif, et qui totalisent 1,7 milliard de dollars. Ainsi, 300 millions de dollars ont été affectés au Fonds d'action pour le changement climatique, en deux versements. Il y a d'abord eu un fonds de trois ans créé en 1998 et renouvelé en 2001. Il y avait aussi un fonds de versements de 60 millions sur trois ans à compter de 1998.

J'aimerais maintenant passer au Plan d'action 2000. La Fédération canadienne des municipalités a reçu deux subventions de 125 millions de dollars. La Fondation canadienne pour les sciences du climat et de l'atmosphère et Technologies du développement durable Canada ont reçu des contributions au titre des sciences et de la technologie. J'ai déjà mentionné l'initiative récente liée à la production d'énergie éolienne. Il y a lieu d'évoquer aussi des initiatives à caractère plus international, comme le Fonds canadien de développement pour le changement climatique et le Fonds prototype pour le carbone de la Banque mondiale.

La diapositive 22 donne une idée de certaines de ces mesures. Je précise ici que je serai de retour devant votre comité jeudi matin à 8 h 30, pour une séance qu'on consacrera au fonctionnement de l'Office de l'efficacité énergétique afin de voir en quoi son action est liée au défi d'une tonne. Je vous fournirai donc tous les détails là-dessus jeudi.

Les consommateurs peuvent aussi faire leur part pour accroître l'efficacité énergétique. Ainsi, il nous semble possible de hausser les cibles d'utilisation du mélange éthanol-essence. Aussi, pour ce qui est du transport en général, la table de concertation qui a étudié ce secteur a proposé diverses mesures relatives au transport en commun et à la planification. De plus, ces dernières années, on a effectué des analyses rigoureuses qui pourraient mener à un transport plus efficace des marchandises, particulièrement au moyen du système intermodal rail-route.

Pour ce qui est des immeubles, nous avons fixé des cibles élevées. Ainsi, par exemple, la cible s'appliquant aux maisons est stricte. Nous aimerions que toutes les nouvelles unités de logement s'y conforment d'ici 2010. Nous aimerions aussi examiner le parc immobilier actuel afin d'y apporter des améliorations de 20 p. 100 d'ici 2010. Nous préconisons que d'ici cette même date, tous les nouveaux immeubles commerciaux dépassent de 25 p. 100 les exigences actuelles du Code modèle national de l'énergie pour les bâtiments.

Il faut enfin que l'on élabore un cadre dans lequel inscrire les puits de carbone des secteurs agricoles et forestiers, de manière à les vendre comme compensation pour les gros émetteurs industriels. Allons-nous réglementer les réductions émissions provenant des nouvelles activités de captage et de torchage des gaz, d'enfouissement, ou permettre leur vente à titre de compensations? Allons-nous intégrer les objectifs de lutte contre les changements climatiques dans la planification de la gestion agri-environnementale du Cadre stratégique pour l'agriculture?

À la diapositive 24, nous précisons où nous en sommes aujourd'hui. L'initiative ayant mené à des engagements avec les gros émetteurs industriels remonte à l'automne dernier. Elle constituera certainement la mesure fondamentale de notre succès en ce qui a trait aux réductions. Les trois principaux secteurs concernés sont l'électricité thermique, le pétrole et le gaz, ainsi que les mines et la fabrication. Ils doivent être appuyés par des mécanismes financiers ou réglementaires. D'ailleurs, les discussions se poursuivent là-dessus. Quoi qu'il en soit, il faut qu'il y ait accès aux échanges internationaux de droits d'émission et à l'achat de compensations et aux permis internationaux. Nous espérons avoir terminé la conception d'un modèle d'engagement au printemps. Notre objectif est de l'avoir d'ici la fin de la prochaine année civile, pour compléter le processus.

Ce n'est pas la seule de nos initiatives sur les émissions industrielles. Ainsi, par exemple, nous voulons cibler 100 p. 100 de la nouvelle capacité de production d'électricité à partir de sources vertes. Dans certains endroits, un tel objectif est d'ailleurs clairement établi, comme B.C. Hydro l'a fait en Colombie-Britannique. Nous voulons aussi participer à des projets de démonstration de charbon épuré. De nouvelles centrales au charbon fonctionnent déjà de cette manière ailleurs dans le monde, mais nous innoverions en recourant à cette technologie à des fins de modernisation des centrales déjà en exploitation.

Il s'agirait de s'allier au secteur privé afin de créer les infrastructures essentielles à un pipeline de gaz carbonique, le CO2. Dans un tel système, le gaz carbonique émis par diverses sources est capté et acheminé par pipeline jusqu'à un puits de pétrole, dans lequel on l'injecte afin de faire monter le pétrole à la surface. Cela comporte un double avantage, puisqu'on réussit à extraire davantage de pétrole tout en retournant le gaz carbonique sous terre.

[Français]

M. Fauteux: J'ai parlé plus tôt des références aux trois mécanismes de Kyoto et au marché international du carbone qu'ils vont constituer.

Le plan auquel Neil MacLeod faisait référence précise que le gouvernement du Canada envisage d'être actif dans ce marché et d'examiner la possibilité d'acheter un minimum de 10 mégatonnes par année de permis et de crédits internationaux d'émission pendant la première période d'engagement. Le plan précise également que les entreprises privées au Canada sont également très intéressées par ce nouveau marché international du carbone et certaines d'entre elles souhaiteraient l'aide du gouvernement canadien pour faire appel à ce marché.

Comme le mentionne la planche 26 du mémoire, nous allons analyser les possibilités de coopération entre le gouvernement et le secteur privé par la création d'un partenariat qui faciliterait l'accès au marché international aux entreprises canadiennes. Nous allons également examiner les façons de rendre plus écologique les permis excédentaires et cela exige des explications.

Je vous ai parlé du mécanisme de l'échange international de permis d'émissions et ces derniers porteront notamment sur des permis d'émissions excédentaires dans les économies en transition vers une économie de marché, notamment la Russie et les anciens pays communistes d'Europe de l'Est qui, suite à 1990, ont connu des difficultés économiques qui ont réduit leurs émissions.

Ils se sont donc retrouvés en 1997 dans une position avantageuse où ils ont négocié des cibles qui étaient soit facilement atteignables, soit déjà atteintes, dégageant ainsi un surplus de permis.

Le gouvernement du Canada, dans son plan sur les changements climatiques, a dit qu'il n'envisagerait d'acheter ces permis d'émissions excédentaires que dans la mesure où ils étaient «écologisés», c'est-à-dire rendus «verts» et favorables à la protection de l'environnement. La façon dont on envisage le faire, c'est de passer des accords avec des pays par lesquels on s'assure que les sommes d'argent qu'on leur donne pour acheter ces permis excédentaires sont réinvesties dans des activités ou des projets qui réduisent les émissions de gaz à effet de serre et qui produisent de véritables bénéfices pour la lutte aux changements climatiques.

Finalement, le gouvernement va analyser les options qui s'offrent à lui pour ses propres achats sur le marché international, qu'il s'agisse de permis excédentaires ou de crédits générés par des projets du mécanisme pour un développement propre ou de l'application conjointe.

Nous passons maintenant à la planche 27 du mémoire, qui énumère les instruments clés sur lesquels s'appuie le plan du Canada sur les changements climatiques. Il y a d'abord les investissements en matière d'innovation et de technologie, il y a le financement de partenariats avec les provinces, les territoires, le secteur privé, les collectivités autochtones, les municipalités et les organisations non gouvernementales.

Le gouvernement fédéral a plusieurs idées sur des mesures à prendre pour réduire les changements climatiques mais il n'a pas le monopole des bonnes idées dans ce domaine et veut montrer son ouverture à accueillir ces bonnes idées qui peuvent venir de la société civile pour bâtir des partenariats de façon à atteindre les objectifs.

Il y a évidemment l'approche à l'égard des gros émetteurs industriels, par l'entremise d'engagements contractuels et d'échanges intérieurs de permis d'émissions. On parle d'échange international de permis d'émissions et, comme Neil MacLeod l'a mentionné, on envisage la création d'un marché intérieur au Canada.

Il y a également les investissements en matière d'infrastructure. Le budget du ministre des Finances, M. Manley, prévoit des sommes additionnelles pour le programme d'infrastructure stratégique. Il est entendu que certains projets de réduction d'émissions pour faire la lutte aux changements climatiques seront financés par ce budget d'infrastructure stratégique et que la lutte aux changements climatiques deviendra un critère d'évaluation de tous les projets d'infrastructure qui pourraient être financés par le gouvernement.

Finalement, il y a toute une série de mesures ciblées et par là on entend des incitatifs, des règlements, des mesures fiscales et de l'information dans les domaines mentionné tout à l'heure par M. MacLeod.

[Traduction]

M. MacLeod: Si vous me permettez d'ajouter quelque chose ici, il est utile que M. Fauteux ait mentionné les activités qui feront l'objet de mesures cibles. Il importe justement de préciser que les cibles ne porteront pas seulement sur nos activités à venir, mais aussi sur ce qui existe déjà. Ainsi, par exemple, pour inciter les propriétaires d'immeubles actuels à les modifier pour accroître leur efficacité énergétique et réduire leurs émissions de gaz à effet de serre, nous leur accorderons des incitatifs financiers. Plus ils économiseront d'énergie, plus ils recevront d'incitatifs. Ces dégrèvements seront progressifs jusqu'à un maximum donné.

Je suis souvent très étonné qu'on n'ait pas davantage diffusé les renseignements sur nos règlements. Peu de gens le savent, mais le Canada a pris les règlements les plus stricts possible en ce qui a trait à la consommation d'énergie de divers appareils. On pense que certains pays d'Europe sont peut-être plus stricts, mais il n'en est rien: c'est au Canada qu'on trouve les règlements les plus rigoureux. En outre, ils s'appliquent aussi bien à domicile, où nous réglementons 80 p. 100 de la consommation, que dans l'entreprise privée, où nous en réglementons jusqu'à 50 p. 100. Dans certains cas, nous n'avons tout simplement pas permis l'entrée au pays de certains appareils, comme les appareils ménagers pour gourmets de Scandinavie, parce qu'ils étaient trop énergivores. Nous les avons renvoyés.

Nous accordons un crédit d'impôt pour l'utilisation de l'éthanol, ce dont vous avez peut-être déjà entendu parler. Nous renseignons aussi les gens au moyen de sources très diverses, et non seulement d'envois postaux ou de brochures. Nous collaborons étroitement avec les industries lorsqu'il s'agit de leur fixer des cibles de réduction d'émissions. Il est important que les sénateurs soient au courant de telles initiatives.

[Français]

M. Fauteux: J'en suis à la page 28, la deuxième étape que constitue le Plan du Canada sur les changements climatiques. On parle également de l'importance de mieux comprendre les changements climatiques pour mieux s'y préparer et pour bien s'y adapter. Il s'agit du volet scientifique et du volet d'analyse des impacts des changements climatiques.

Il faut comprendre scientifiquement ce qui produit les changements climatiques. Il faut en comprendre les impacts des changements climatiques pour s'y adapter. Un exemple d'adaptation serait la construction d'infrastructures qui doivent être en mesure de résister aux changements climatiques.

On a parlé brièvement du Budget 2003 du ministre des Finances déposé la semaine dernière. C'est la prochaine étape dans la mise en oeuvre du plan publié le 21 novembre dernier. Le Budget de la semaine dernière apporte des fonds additionnels pour la mise en œuvre du plan. C'est la plus récente étape mais ce n'est pas la fin puisqu'il faudra continuer à financer les mesures de lutte contre les changements climatiques jusqu'à la fin de cette première période d'engagement en 2012.

Le Budget prévoit deux milliards de dollars sur cinq ans, dont 250 millions qui seront alloués à la Fondation des technologies de Développement durable Canada, et 50 millions à la Fondation canadienne pour les sciences du climat et de l'atmosphère. Le 1,7 milliard de dollars qui reste sera alloué en partie pour des investissements additionnels dans des technologies à plus long terme, à hauteur d'au moins 200 millions de dollars. Le reste du Budget servira à adopter toute une série de mesures dont nous avons déjà parlé.

Le Budget prévoit de nouveaux traitements fiscaux pour l'éthanol ainsi que de nouveaux incitatifs fiscaux pour le biodiesel. On a également apporté une modification à la classe des énergies renouvelables et du matériel à haut rendement énergétique aux fins de la déduction pour amortissement accéléré, afin d'encourager l'utilisation des carburants renouvelables. Le Budget prévoit également un financement pour les infrastructures stratégiques et l'aide à la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Au-delà de cette somme de deux milliards de dollars sur cinq ans, une directive gouvernementale est donnée aux programmes gouvernementaux existants dont Partenariat technologique Canada, des organismes subventionnaires et les agences de développement régional qui toutes doivent maintenant présenter un compte rendu de leurs contributions aux objectifs en matière de changements climatiques. Il ne s'agit pas simplement de fonds additionnels; il s'agit d'un nouveau mandat à toute une série de programmes et d'agences gouvernementaux qui sont mis à contribution dans la lutte aux changements climatiques.

Au cours des mois qui suivent, mes collègues, moi-même et beaucoup d'autres seront occupés à préparer des soumissions au Cabinet et au Conseil du Trésor pour opérationaliser le plan et voir à la bonne utilisation des ressources prévues par le Budget.

Il nous faut élaborer et concevoir des mesures spécifiques et rentables en matière de coûts-bénéfices. On veut obtenir le maximum de réduction d'émissions pour chaque investissement de deniers publics. On veut obtenir la collaboration des provinces et des territoires. Une tournée des provinces et territoires est présentement en cours au niveau des sous- ministres de l'Environnement et de l'Énergie. Nous étions à Québec la semaine dernière, nous serons à Winnipeg vendredi et au cours des prochaines semaines, nous visiterons chacune des 13 capitales provinciales et territoriales pour faire le point avec nos collègues des gouvernements provinciaux et territoriaux sur quelles sont leurs priorités pour la mise en oeuvre du plan et comment nous pouvons travailler ensemble pour maximiser les complémentarités et les synergies dans le respect des compétences constitutionnelles mutuelles, bref, travailler ensemble pour atteindre nos objectifs de réduction d'émissions.

Il faudra également s'assurer l'engagement de toutes les parties intéressées qui ne sont pas que les gouvernements et l'industrie, mais qui sont aussi vous et moi, c'est-à-dire, tous les Canadiens puisque chaque Canadien contribue en moyenne cinq tonnes d'émissions de gaz à effet de serre par année. C'est pourquoi le Plan du Canada sur les changements climatiques lance un défi aux Canadiens de réduire de 20 p. 100 leur contribution individuelle à ce problème des changements climatiques. C'est ce qu'on appelle «le défi d'une tonne» dont vous entendrez parler à travers les médias et les programmes de sensibilisation du gouvernement au cours des prochains mois.

Ce plan est destiné à être repris d'année en année. En anglais on parle de «Evergreen Plan». Ce plan n'est pas coulé dans le béton pour l'éternité. Au contraire, il est appelé à évoluer au fil des mois et des années. On évaluera les réussites et les échecs puisqu'on n'est pas parfait. On ne peut pas garantir qu'on réussira à tous les coups. Il faut tirer des leçons des expériences accumulées au cours des étapes I et II du plan. Il faut apporter une rétroaction pour les mesures additionnelles à l'étape II et bien sûr, considérer comment on va remplir l'étape III, soit les 60 mégatonnes pour lesquelles les décisions sont à prendre au cours des prochaines années.

Finalement, on va assurer la reddition de compte et la transparence. Le plan précise à cette fin qu'il y aura des rapports à l'intention du public sur nos progrès vers l'atteinte de la cible de Kyoto à tous les deux ans.

[Traduction]

Le sénateur Spivak: Il y aurait des millions de questions à poser. Si l'on met en place un système d'échange de droits d'émission, qui le surveillera et comment s'appliqueront les maximums. Comment tout cela sera-t-il surveillé? Le seul plan de ce genre que j'ai vu en oeuvre se trouve en Californie, et il donne d'ailleurs de très bons résultats. Comment s'y prendra-t-on?

M. Fauteux: Ainsi que je l'ai expliqué, le Protocole de Kyoto est vraiment unique en son genre par sa fermeté et sa très vaste portée, sans oublier qu'il fera l'objet d'une surveillance internationale.

Le sénateur Spivak: Qui le surveillera? Les Nations Unies?

M. Fauteux: La surveillance en sera confiée au secrétariat de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, la Convention de Rio de 1992, à l'origine du Protocole de Kyoto. Le secrétariat est situé à Bonn et son personnel est international et très compétent. Quant au protocole lui-même, il crée un système de réexamen par une tierce partie, selon lequel le secrétariat aura le mandat de mettre sur pied des équipes d'experts chargés du réexamen, et les parties signataires du protocole collaboreront avec les experts lorsqu'il s'agira de vérifier les livres des autres parties. Ils auront ainsi la garantie que tout le monde respecte les règles du jeu et que personne ne triche.

Le sénateur Spivak: Existe-t-il déjà un système en place qui permette de réaliser cela?

M. Fauteux: Tout à fait. C'est un système de taille.

Le sénateur Spivak: Voici ma première question, qui porte sur les gros émetteurs industriels, qui seront tenus de réduire leurs émissions de seulement 15 p. 100 et n'auront pas à payer plus de 15 $ la tonne. Étant donné que le secteur des hydrocarbures représente à peu près le quart des émissions provenant des grandes industries, et la production d'électricité thermique le tiers, comment réussirez-vous à capter le reste, et en quoi consiste ce reste? S'agit-il de huit mégatonnes, comment fera-t-on?

M. Fauteux: Ainsi que je vous l'ai déjà dit, le plan exige que dans l'ensemble, les gros émetteurs industriels réduisent leurs émissions annuelles de 55 millions de tonnes. C'est un petit peu plus que la moitié des 100 mégatonnes de réductions totales figurant dans l'étape deux du plan.

Ainsi que vous l'avez souligné, le secteur des hydrocarbures a reçu certaines assurances qu'on n'exigerait pas de lui qu'il réduise ses émissions de plus de 15 p. 100 par rapport aux projections des émissions liées au statu quo pour 2010. Il y a deux autres sous-secteurs de gros émetteurs industriels: la production d'électricité thermique, principalement les centrales au charbon mais également celles qui fonctionnent au pétrole et au gaz, et l'exploitation minière et la fabrication, ce dernier étant le plus diversifié des trois. M. MacLeod a rappelé que bien qu'aucune de ces assurances n'ait été donnée au secteur de la production d'électricité thermique ni à celui des mines et de la fabrication, mais il n'en demeure pas moins qu'en soi une réduction totale de 55 mégatonnes est une amélioration de 15 p. 100 par rapport aux émissions liées au statu quo pour 2010.

Étant donné que l'industrie pétrolière et gazière a reçu l'assurance qu'on ne lui demandera pas d'en faire davantage, on pourrait envisager de donner les mêmes garanties au secteur des mines et de la fabrication ainsi qu'à celui de la production d'électricité thermique, afin que tous s'efforcent de réduire leurs émissions de 15 p. 100 par rapport à leurs émissions liées au statu quo.

Le sénateur Spivak: Je suis un peu perplexe. Est-ce qu'on n'était pas censé s'être fixé comme objectif 96 mégatonnes?

M. Fauteux: Non, c'était 55 mégatonnes.

Le sénateur Spivak: Il ne s'agissait que de 55 mégatonnes?

M. Fauteux: Oui, 55 mégatonnes. Le plan était très clair. Le gouvernement avait donné une garantie relativement à la quantité d'émissions.

Le sénateur Spivak: Estimez-vous que même avec cette réduction, les gros émetteurs vont réussir à atteindre leurs objectifs?

M. Fauteux: Tout à fait. La garantie de 15 p. 100 ne remet pas en question l'objectif d'une réduction totale des émissions de 55 mégatonnes.

Le président: Est-ce que l'industrie de l'automobile n'a pas reçu une autre assurance?

M. Fauteux: Non. Les médias ont beaucoup parlé de l'industrie automobile au début de janvier, mais je pense que c'est parce qu'on manquait de nouvelles ce jour-là, car le gouvernement n'a offert aucune garantie.

Lorsque nous avons défini ce que nous entendions par les gros émetteurs industriels, nous nous sommes fondés sur l'intensité des émissions. C'est la quantité des émissions associée à une unité de production qui permet d'établir les émissions autorisées. En général, on dira que pour 1 000 $ de production, on a droit à tant d'émissions. Or, l'industrie automobile n'a pas été retenue parce que la fabrication des automobiles ne produit justement pas une forte concentration d'émissions. Elle produit 60 fois moins d'émissions que la moyenne observée dans toutes les autres industries qui font partie du secteur des gros émetteurs industriels.

Le président: Plutôt que d'obtenir une espèce de dispense, l'industrie automobile s'est fait dire qu'elle ne contribuait pas vraiment au problème.

M. Fauteux: C'est exact.

M. MacLeod: J'aimerais ajouter quelque chose ici: M. Fauteux a mentionné le fait que l'intensité des émissions produites par l'industrie automobile était 60 fois moins que la moyenne. Toutefois, lorsqu'on se reporte aux plus faibles émetteurs, on remarque que l'intensité des émissions est 10 fois moins dans le secteur automobile. Il faudrait donc que les fabricants d'automobiles décuplent l'intensité de leurs émissions pour atteindre le seuil minimum.

Cela dit, même si les émissions du secteur automobile étaient insuffisantes pour qu'il fasse partie de cette catégorie, on a quand même demandé aux fabricants d'améliorer l'efficacité énergique des voitures produites. Ce sera un objectif assez difficile à atteindre, par conséquent on ne peut conclure qu'on ne leur demande pas de faire leur part. En fait, ils auront fort à faire.

Le sénateur Milne: Me permettez-vous de demander un éclaircissement ici? En tant qu'ancienne professeure de physique, j'admets avoir de la difficulté à comprendre lorsque les gens disent 50 fois moins ou 10 fois moins. Dix fois veut dire dix multiplié par dix. Est-ce que vous vouliez dire qu'il s'agissait d'un dixième des émissions ou d'un soixantième?

M. MacLeod: Oui, c'est ce que nous essayions de dire.

Le président: Ça ce n'était pas une remarque de professeur de physique mais de mathématiques.

Le sénateur Spivak: Pour ce qui est des véhicules automobiles, si je me souviens bien des diapositives, il y avait quelques problèmes. L'échéancier de réduction des émissions provenant de véhicules automobiles a été établi il y a quelque temps déjà. Est-ce que vous faisiez allusion à quelque chose qui s'ajouterait à cela? Aussi, est-ce que cela s'harmonisera avec les mesures prises par les Américains? Ont-ils accepté de réduire les émissions de leurs véhicules automobiles dans la même proportion?

Qu'en est-il des moteurs à deux temps, car dans son protocole d'entente intervenu avec les fabricants de motomarines, le ministre de l'Environnement disait qu'il y aurait réduction de ces émissions?

Le président: Sénateur, une telle question n'est pas vraiment acceptable.

Le sénateur Spivak: Oui, mais ça va. Est-ce que cela fait partie de votre plan, parce que le moteur à deux temps produit beaucoup d'émissions?

M. MacLeod: Je vais répondre en présentant la question sous un autre aspect. Lorsqu'on parle de ces émissions, on dit souvent qu'elles sont hors route, c'est-à-dire qu'elles proviennent d'appareils comme des tondeuses à gazon ou des moteurs hors-bord.

Le sénateur Spivak: Oui, c'est ce qu'on a fait en Californie.

M. MacLeod: Notre plan propose qu'on lance une initiative d'envergure auprès des consommateurs à ce sujet pour qu'on corrige le problème. Nous ignorons cependant si elle recevra l'appui financier dont elle a besoin. Quoi qu'il en soit, cela n'a pas encore été fait.

Le sénateur Spivak: Au sujet des voitures, il me semble que les nouvelles normes d'émissions des voitures doivent entrer en vigueur en 2003, n'est-ce pas?

M. MacLeod: Pour répondre à votre première question, le Plan d'action 2000 proposait déjà d'accroître l'efficacité des voitures en matière de consommation énergétique, mais aucune cible chiffrée n'a été établie. Nous avons maintenant décidé de viser une amélioration de 25 p. 100.

Cela m'amène à votre question suivante: que font les Américains? Nous avons tenu un certain nombre de rencontres avec les fabricants automobiles sur le sujet. À cet égard, il importe de préciser certaines choses. D'abord, il existe une norme au Canada relativement aux automobiles, la consommation moyenne de carburant de l'entreprise, et on trouve l'équivalent aux États-Unis. Ces deux normes sont donc identiques en ce moment. Là où elles diffèrent, c'est qu'au Canada elle est mise en oeuvre de façon tout à fait volontaire tandis qu'aux États-Unis, elle a force obligatoire. Ici il importe de garder à l'esprit que cette consommation moyenne est de 25 fois supérieure à la norme actuelle. Les voitures vendues en l'an 2000 la dépassaient d'ailleurs déjà de 8 p. 100.

Aux États-Unis, le gouvernement américain a décidé de faire preuve d'une grande prudence, et le terme technique à ce sujet m'échappe. Quoi qu'il en soit, il a demandé au département des Transports d'élaborer de nouveaux règlements. Ainsi, par exemple, bientôt on proposera une nouvelle norme d'un mille et demi le gallon américain, destinée aux petites fourgonnettes. Les États-Unis se contenteraient de faire seulement ça et l'appliqueraient aussi aux voitures que cela correspondrait à une diminution de 7 p. 100 d'émissions par rapport à la norme.

Ce qu'il faut retenir ici, c'est qu'au cours des six derniers mois, les grands constructeurs automobiles, y compris General Motors, ont annoncé que leurs nouvelles voitures comporteront de nouvelles technologies qui entraîneront des réductions d'émissions beaucoup plus importantes. Dans un communiqué daté d'octobre 2002, on parle d'une nouvelle technologie, appelée cylindré sur demande, qui est censée réduire la consommation de 10 à 20 p. 100. Cette nouvelle technologie embarquée se retrouvera dans 40 p. 100 des voitures d'ici deux ans.

Le sénateur Spivak: Cela correspond à la production de pétrole et de gaz. Je me souviens qu'il y avait un problème avec les additifs d'essence. Est-ce qu'il s'agit du MMT?

Le sénateur Buchanan: Le MMT donne d'excellents résultats.

M. MacLeod: C'est un problème tout à fait différent.

Le sénateur Spivak: Les constructeurs ont estimé ne pas être en mesure de diminuer davantage leurs émissions si le pétrole et le gaz utilisés à cette fin n'étaient pas appropriés. Comprenez-vous de quoi je veux parler? Je ne suis peut-être pas claire. Ce n'est plus un problème?

M. MacLeod: Je ne crois pas. Je crois qu'il s'agissait plutôt de la qualité du soufre. Le communiqué d'octobre était catégorique. On y annonçait l'imposition de ces normes en 2005.

Le sénateur Spivak: Et qu'en est-il de la norme californienne qui s'appliquerait en 2004?

M. MacLeod: Elle s'appliquera plus tard.

Le sénateur Spivak: Oui, en 2008. À une certaine époque, ce devait être en 2002. On voudrait réduire les émissions à zéro.

M. MacLeod: On veut contrôler les émissions de CO2, ce qui serait unique en Amérique du Nord.

Le sénateur Spivak: Le marché californien est-il suffisamment grand pour qu'on oblige les constructeurs automobiles à respecter ces normes et faire en sorte que le pays en fasse autant?

M. MacLeod: On ne s'en inquiète pas trop, parce qu'il y a eu des discussions avec certains États de l'est des États- Unis, dont l'État de New York, qui sont tout à fait pour l'approche californienne. Essentiellement, ces États préfèrent attendre, car on s'attend à ce que les trois grandes sociétés automobiles contestent cette décision devant les tribunaux sous prétexte que le gouvernement n'a pas le pouvoir d'agir ainsi. J'ai l'impression qu'il faudra attendre deux ans avant que les tribunaux ne tranchent.

La volonté d'agir est très forte. New York n'est pas le seul État intéressé. Bien d'autres États de l'est — le New Jersey, le Massachusetts et d'autres — sont très enthousiastes.

Le président: Mais pendant que le gouvernement fédéral américain et les constructeurs automobiles contestent cette décision de la Californie, les constructeurs se préparent-ils à se conformer à cette norme au cas où ils perdraient leur cause?

M. MacLeod: Oui. Les résultats que nous pouvons atteindre ne se fondent pas sur une analyse faite dans un bureau à Ottawa, mais bien sur l'analyse qui se fait dans les laboratoires des constructeurs automobiles.

Le président: En théorie, le succès de leur recherche pourrait rendre leur poursuite inutile?

M. MacLeod: En ce qui concerne les chiffres seulement. Ils ont peut-être d'autres raisons pour intenter cette poursuite.

Le président: J'aimerais avoir une autre précision. La norme imposée aux constructeurs automobiles permet le cautionnement réciproque entre les divers modèles de voitures, n'est-ce pas? C'est une moyenne pour tous les modèles de véhicules de l'entreprise? Autrement dit, les constructeurs automobiles peuvent fabriquer un véhicule qui rejette toutes sortes de polluants dans l'air, à condition qu'ils en fabriquent un autre beaucoup moins polluant, n'est-ce pas?

M. MacLeod: Les moyennes sont pondérées en fonction des ventes. On tient donc compte du fait qu'un fabricant vend davantage d'un type ou d'un modèle de véhicule.

Le président: Pourriez-vous nous décrire brièvement le mécanisme d'application de cette norme? Quelle est la sanction en cas de non-respect?

M. MacLeod: Il n'y a pas de sanctions au Canada, parce que c'est une norme facultative. Aux États-Unis, la norme a force de loi et la violation entraîne une amende. Je crois qu'il y a au moins un constructeur qui est régulièrement en violation de la norme et considère que les amendes font partie des frais d'exploitation.

Le sénateur Christensen: Plus ça change, plus c'est pareil.

Votre tableau, à la page 4, indique une légère baisse de l'écart de température entre les années 1900 et 2000. Est-ce que cela résulte des mesures de conservation du pétrole et de l'énergie qui ont été prises dans les années 80?

M. Oulton: Oui, vous avez raison. En ce qui a trait aux émissions mesurées autant au Canada qu'aux États-Unis, deux choses se sont produites à peu près en même temps, du milieu des années 70 jusqu'au milieu des années 80: Il y a d'abord eu la crise du pétrole au Moyen-Orient, qui a entraîné une augmentation considérable du prix du pétrole, du gaz naturel et de l'essence. Malgré les programmes de contrôle des prix qui ont été mis en place au Canada et aux États- Unis, le prix à la pompe a vite grimpé. Voilà un des facteurs. Il y a aussi eu une récession économique provoquée par ces changements; les économies ont ralenti et cela a certainement eu des conséquences. De plus, il y a eu à cette époque des changements de température, des changements climatiques moyens.

Le sénateur Christensen: Le gouvernement fédéral a lancé dans tout le pays, pendant les années 80, un vaste programme d'efficacité énergétique. Bon nombre des choses dont nous parlons aujourd'hui ont été entreprises alors. Bien des mesures adoptées à cette époque ont eu des effets à long terme, notamment en matière de normes du bâtiment. Ce n'est que plus tard qu'on a appelé ça le facteur R2000, mais le facteur R dans le bâtiment et toutes les autres stratégies liées aux sources d'énergie se sont poursuivies. Néanmoins, il y a eu une brusque augmentation.

Dans ce tableau, on parle de mégatonnes. C'est presque de la science fiction. Un jour nous pourrons dire que, en dernier, nous avons économisé cinq mégatonnes et que, l'an prochain, nous en économiserons cinq ou vingt de plus. Nous avons ici un tableau qui pourrait s'appliquer à tous les gouvernements. Tous pourraient publier ce tableau et dire que nous avons économisé 50 mégatonnes cette année. Qui fait ces calculs?

M. Oulton: Cela nous ramène à la réponse qu'a donnée un peu plus tôt M. Fauteux. Il existe un système très rigoureux s'appliquant à tous les pays qui sont partie à la Convention des Nations Unies, y compris le Canada et les États-Unis, tous les pays qui ont ratifié la Convention. Le protocole même prévoit des sanctions additionnelles. Dès que le protocole entrera en vigueur, ces sanctions s'appliqueront aussi. C'est aux Nations Unies, dans le cadre du système international de surveillance, qu'on vieille sur la situation; il y a aussi, comme l'a indiqué M. Fauteux, un examen par des tiers pour garantir l'intégrité. Nous présentons un rapport sur nos émissions, rapport qui est vérifié par des gens d'ailleurs qui viendront au Canada vérifier l'intégrité de nos systèmes de mesure.

Le président: Autrement dit, vous devez présenter un rapport complet, exhaustif et honnête. Les inspecteurs des Nations Unies viendront ensuite vérifier le tout. Cela vous rappelle-t-il quelque chose?

Le sénateur Christensen: Oui, et les poules ont des dents.

M. MacLeod: De plus, les responsables de la prestation des programmes doivent aussi faire une évaluation. Je vous renvoie à certains des programmes du Plan d'action 2000. Il y a l'ÉnerGuide pour les maisons, dans le cadre duquel nous aidons les propriétaire à rendre leur maison plus éco-énergétique. Quand nous le faisons, nous recueillons toutes les données relatives à chaque maison et nous savons ainsi combien de tonnes sont économisées, où elles sont économisées, quelles sont les améliorations qui ont été apportées et ce que ça a coûté?

J'ai parlé de notre programme de normes. Nous avons aussi un programme accéléré de normalisation. Essentiellement, au moment où nous établissons la norme, nous retirons du marché le pire équipement. Cet équipement devient illégal. Nous sommes informés des ventes de toutes ces pièces d'équipement, de ces moteurs et de ces appareils, et nous pouvons mesurer la différence de consommation d'électricité et la multiplier par le nombre d'unités. Nous pouvons ainsi mesurer toutes les tonnes économisées. Au niveau du programme, il y a des mécanismes de prestation qui nous permettent de contrôler et de mesurer les réductions à chaque niveau.

Le sénateur Spivak: Si vous remplacez une chaudière ordinaire par une chaudière à rendement élevé, cette information vous est-elle communiquée par le vendeur?

M. MacLeod: Nous avons des ententes avec le secteur, avec les fabricants et les importateurs.

Le sénateur Spivak: Ils vous transmettent ces informations?

M. MacLeod: En fait, c'est nous qui communiquerons avec eux. Nous travaillons en partenariat avec le secteur fréquemment.

Le président: Le consommateur sait-il qu'il achète un appareil à rendement élevé? Est-ce que les appareils portent le seau CSA, par exemple?

M. MacLeod: Oui, les consommateurs en sont informés. Nous avons récemment élargi notre programme visant les appareils de cuisine qui s'applique dorénavant à la plupart des électroménagers. Il y a aussi l'étiquette ÉnerGuide qui existe déjà depuis plusieurs années. Cette étiquette dit aux consommateurs où se situe l'appareil sur une échelle de zéro à 100, zéro étant le pire et 100 le mieux. On y trouve aussi la quantité d'énergie consommée par cet appareil. Dans le cadre du Plan d'action 2000, nous allons améliorer ce programme en y incorporant le Programme international de haute efficacité Energy Star, qui a été créé aux États-Unis. Les Européens, les Japonais et, maintenant, le Canada, l'ont adopté. Les consommateurs pourront alors voir au premier coup d'oeil quel appareil est le meilleur dans sa catégorie, sans avoir à lire un tas d'étiquettes. Avec l'étiquette Energy Star, ce sera clair au premier coup d'oeil. Ce sont là jusqu'à présent les deux approches que nous avons employées pour informer les consommateurs.

Le sénateur Christensen: Il y avait auparavant un programme dans le cadre duquel on versait de l'argent aux consommateurs qui remplaçaient leurs poêles à bois et les vieux brûleurs de leurs chaudières pour réduire la consommation de combustible, par exemple. On pouvait recevoir au moins la moitié des frais engagés pour ce faire.

M. MacLeod: Permettez-moi de vous décrire brièvement ce qui s'est passé depuis la création de ces programmes, le Programme canadien de remplacement du pétrole et le Programme d'isolation thermique des résidences canadiennes. Ces programmes étaient axés sur des activités bien précises. Nous voulons accroître l'efficacité énergétique et, du coup, réduire, les émissions de gaz à effet de serre de toutes les façons possibles. Nous voulons que la consommation totale d'énergie baisse. Si pour certains, il s'agit de mieux isoler sa maison et que pour d'autres, la solution, c'est d'acheter une nouvelle chaudière, c'est l'approche que nous allons privilégier plutôt que d'imposer aux consommateurs une mesure ou une autre.

Le sénateur Christensen: Ces programmes prévoient des mesures de vérification vous permettant d'aller sur place pour prendre des échantillons de l'air, et ainsi de suite. C'est ainsi que vous pouvez déterminer ce qui permettra le mieux à chacun de réduire sa consommation d'énergie, n'est-ce pas?

M. MacLeod: Nous payons environ la moitié du coût du programme d'évaluation; nous payons 150 $ et le propriétaire, 150 $ aussi. L'évaluation prend deux ou trois heures. À l'issue de cette évaluation, le propriétaire de la résidence reçoit la liste de toutes les améliorations qu'il pourrait apporter en fonction de ce qu'il aura pour ces frais. Puis, il choisit d'apporter les améliorations qui lui conviennent.

Le sénateur Christensen: Est-ce que ce programme existe encore?

M. MacLeod: Oui, il existe depuis quatre ans.

Le président: C'est peut-être le plus merveilleux programme au monde, mais s'il n'est appliqué que dans mon sous- sol, il ne donnera pas grand-chose. A-t-on publicisé ce programme? Les gens en sont-ils informés, savent-ils qu'ils peuvent en profiter et que cela coûte 150 $?

M. MacLeod: Oui, nous avons des programmes de publicité. Certains sont dispensés en partenariat avec des agents locaux de prestation de services. Ce n'est pas moi qui m'en occupe, j'ai de très bons employés qui le font. Tous ces programmes font l'objet de campagnes de publicité. Nous employons diverses méthodes; vous n'avez peut-être pas vu la publicité que nous avons faite sur certains programmes. Mais vous avez raison, si les gens connaissaient mieux ces programmes, ils en profiteraient davantage. D'ailleurs, le plan d'action comprend cette suggestion.

Le président: J'espère que vous y donnerez suite. C'est bien triste d'avoir un bon programme que les gens ne connaissent pas et à propos duquel ils ne savent pas où s'informer.

M. MacLeod: À notre réunion de jeudi matin, ce sera l'un de nos principaux sujets, ainsi que le défi d'une tonne.

Le sénateur Christensen: Pourriez-vous nous donner plus de détails sur l'exemption dont semble profiter le secteur automobile? J'ai reçu plusieurs lettres sur ce sujet. Or, je ne crois pas que les constructeurs automobiles aient fait l'objet d'une exemption? En fait, les constructeurs automobiles consomment de l'énergie pour fabriquer les véhicules dans leurs usines — et je ne parle pas de la fabrication de l'acier servant à la construction des automobiles ou à toute autre chose — mais cela ne les renvoie pas nécessairement dans la catégorie des grands pollueurs, n'est-ce pas?

M. MacLeod: C'est exact. Encore une fois, il s'agit de l'intensité des émissions à effet de serre, soit les rejets en comparaison avec la production; celle des constructeurs automobiles représente un dixième de l'intensité des émissions de ceux qui les suivent sur la liste.

Le sénateur Christensen: Toutefois, les constructeurs automobiles sont tenus de réduire les émissions moyennes de leurs véhicules d'un certain pourcentage?

M. MacLeod: L'objectif pour 2010, c'est que les émissions soient de 25 p. 100 inférieures à la norme actuelle.

Le sénateur Christensen: Vous savez comme moi que certains croient que le secteur automobile n'est pas assujetti à ces restrictions en raison du crédit qu'il a obtenu pour avoir fabriqué des véhicules à faibles émissions, ce qui n'est pas le cas.

Le président: Le fabricant du bloc moteur et le fabricant de l'acier en feuilles sont peut-être dans des catégories autres que le constructeur même.

Le sénateur Christensen: C'est différent, en effet.

Le sénateur Buchanan: Tout d'abord, j'aime toujours savoir à qui je parle et à qui je fais affaire. David Oulton, vous êtes un Oulton du comté de Cumberland ou de Sackville, au Nouveau-Brunswick?

M. Oulton: De Sackville, au Nouveau-Brunswick.

Le sénateur Buchanan: Je connais bien Sackville. Pendant quatre ans, j'ai fait partie de la belle équipe de l'Université de Mount Allison.

Monsieur MacLeod, vous êtes un MacLeod de l'Île-du-Prince-Édouard ou du Cap-Breton?

M. MacLeod: Malheureusement, sénateur, ce n'est ni l'un ni l'autre. Mes ancêtres se sont installés dans la vallée de l'Outaouais au milieu du XVIIIe siècle, et c'est depuis que John MacLeod y est arrivé en 1768, je crois, que les MacLeod vivent ici.

Le sénateur Buchanan: Il y a beaucoup de Neil MacLeod au Cap-Breton et à l'Île-du-Prince-Édouard.

M. MacLeod: Oui, j'y suis allé et je l'ai remarqué.

Le sénateur Buchanan: Je n'entrerai pas dans les détails comme le sénateur Spivak. Elle en sait beaucoup plus sur ce sujet que moi. Toutefois, il y a une chose qui m'intéresse. Nous avons ici un énoncé de principes qui dit qu'aucune région du pays ne devrait assumer un fardeau déraisonnable. L'un des problèmes que nous connaissons en Nouvelle- Écosse à l'heure actuelle, c'est que notre province dépend encore du charbon pour produire 80 p. 100 de son électricité. Je dois toutefois préciser que certaines de ces centrales au charbon sont les plus propres du pays, surtout celle qui a été construite à la fin des années 80 et qui a été la première centrale à lit fluidisé au Canada. On y a littéralement éliminé les émissions de SO2. Les autres, il est vrai, ne sont pas aussi peu polluantes que la centrale de Point Aconi.

Nous exportons actuellement environ 50 millions de pieds cubes de gaz naturel par jour, au Nouveau-Brunswick mais surtout dans les États de la Nouvelle-Angleterre.

L'automne dernier, EnCana a annoncé à Halifax que l'accord de Kyoto les obligeait — non pas «pourrait les forcer», mais bien les forçait — à limiter considérablement le développement extra-côtier en Nouvelle-Écosse. EnCana a récemment annoncé qu'elle mettait en veilleuse son dernier programme à l'île de Sable. On a encore une fois invoqué l'accord de Kyoto, lequel, semble-t-il, aura une telle incidence sur EnCana dans l'ouest du Canada qu'il lui faudra trouver ailleurs qu'en Nouvelle-Écosse des possibilités de développement. On ne l'a pas dit aussi franchement, mais le président a reconnu en novembre dernier que c'est ce qui pourrait se passer. Cela dit, nous devions exporter un milliard de pieds cubes de gaz naturel provenant des nouveaux champs de l'île de Sable d'ici trois ans. Tout cela est maintenant sur la glace.

Comment compensera-t-on ce ralentissement en Nouvelle-Écosse? Aurons-nous des crédits que nous pourrons appliquer à nos centrales au charbon qui nous permettent d'exporter 500 millions de pieds cubes de gaz naturel vers les États-Unis?

M. Oulton: Je ne veux pas m'avancer sur la politique énergétique, car cela n'est plus de mon ressort. Nous n'avons jamais eu pour approche de négocier avec chaque province ou avec chaque institution des crédits particuliers.

En revanche, M. Fauteux et M. MacLeod ont parlé des engagements que les gros émetteurs industriels prennent et qui pourraient avoir une incidence sur l'équation de la production d'électricité en Nouvelle-Écosse. Cette approche pourrait aussi s'appliquer aux émissions provenant des plates-formes de forage extra-côtières et des oléoducs. Nous tentons de déterminer comment nous assurer que ces engagements tiennent bien compte des répercussions sur la position concurrentielle des différents secteurs ainsi que des coûts. Cela ne signifie pas que nous ne nous inquiéterons de rien. Plutôt, nous voulons nous assurer de bien comprendre toutes les conséquences éventuelles. Nous voulons pouvoir négocier avec tous ces secteurs, tels que le secteur de l'électricité en Nouvelle-Écosse, pour en arriver à un engagement qui tiendra compte des perspectives qu'offrira la nouvelle technologie à l'avenir.

Dans le domaine de l'électricité, les nouvelles technologies arrivent par bourrées, et tout dépend où l'on se trouve dans le cycle d'investissement.

Le sénateur Buchanan: Vous parlez des nouvelles technologies de production de l'électricité? Il faut que ça soit à long terme.

M. Oulton: C'est à long terme mais il faut bien commencer quelque part. M. MacLeod a mentionné les possibilités qu'offre la production d'éthanol. Il y a une autre possibilité qui est la technologie au charbon propre, qui existe. On s'en sert dans d'autres pays aujourd'hui, et la question est de savoir si on peut l'adopter au charbon canadien. C'est surtout dans l'ouest du Canada qu'on s'y intéresse, et c'est là qu'on va peut-être en faire l'essai en premier, mais pas exclusivement là.

Je mentionne cela parce que la question de Kyoto ne se pose pas simplement pour la première période d'engagement — en moyenne, sur dix ans — mais plutôt pour le long terme. Lorsque nous allons négocier nos engagements, nous allons envisager des arrangements qui sont raisonnables pour la première période d'engagement ainsi qu'au-delà.

Comme l'a dit M. Fauteux, nous tenons des rencontres bilatérales avec les sous-ministres des provinces pour définir leurs possibilités et leurs préoccupations. Le gouvernement fédéral, dans la mise en oeuvre de ses plans et dans l'utilisation de ses ressources budgétaires, est mieux à même de travailler avec les provinces. La Nouvelle-Écosse, par exemple, présente des possibilités particulières pour l'énergie éolienne. Il y a deux projets qui sont déjà en cours, et il y a possibilité de les élargir si on trouve le bon régime. Cela ne remplacera pas sur dix ans l'électricité produite au charbon, mais il faut bien commencer quelque part pour exploiter les possibilités de chaque région.

On veut se servir des engagements pour arrêter des objectifs raisonnables pour la première période d'engagement pour les provinces émettrices. Cela formera la base des réductions futures. Le gouvernement fédéral, de concert avec les provinces, déterminera aussi les secteurs où les deux paliers de gouvernement peuvent investir dans l'avenir, par exemple, l'énergie éolienne et l'efficacité énergétique.

M. MacLeod: M. Olton a parfaitement bien défini le problème lorsqu'il a dit que cela répond essentiellement aux engagements au niveau de l'industrie. Il y a moyen de partager les coûts pour des activités communes avec certaines provinces. J'étais à Halifax la semaine dernière où j'ai discuté avec des collègues du gouvernement de la Nouvelle- Écosse du programme «ÉnerGuide pour les maisons». Nous allons partager le coût de ce programme et l'étendre à toute la province de la Nouvelle-Écosse parce qu'on s'y intéresse vivement là-bas. Il y a d'autres choses qu'on peut faire au cas par cas.

Le sénateur Buchanan: Croyez-vous que le ralentissement d'EnCana ou la suspension de l'exploration au large des côtes de l'île de Sable a quelque chose à voir avec l'accord de Kyoto? On a dit en novembre dernier que c'était le cas. J'ai tous les discours qu'ont prononcés les dirigeants de cette entreprise devant la Chambre de commerce de Halifax.

Le sénateur Spivak: Le gaz naturel, c'est bon pour Kyoto, ce n'est pas mauvais. Je crois que l'entreprise avait d'autres problèmes qui avaient trait aux coûts.

Le sénateur Buchanan: Kyoto est un prétexte, mais je pose la question à ces messieurs.

Le président: Le sénateur Buchanan s'adresse aux témoins.

M. Oulton: Je n'ai aucune information à ce sujet. Je ne crois pas que le gouvernement du Canada dispose d'information qui nous permettrait de deviner ce que veut faire EnCana. Nous savons ce que nous avons fait avec l'industrie depuis l'autonome, lorsque nous avons commencé à mettre au point le régime d'engagement. Le plafond des prix qu'on a mentionné plus tôt était de 15 $ et il y a aussi le plafond dans le secteur pétrolier et gazier en ce qui concerne le total des émissions. Ces deux plafonds ont créé un contexte où les entreprises, en particulier celles qui exploitent les sables bitumineux, pour employer un autre exemple, sont revenues et ont dit que cela semblait beaucoup plus gérable.

Je ne peux pas dire que nous avons entendu cela de la part d'EnCana. Selon les compagnies qui exploitent les sables bitumineux, il y a d'autres éléments qui influent sur les investissements: le prix du gaz, le coût des intrants, les coûts d'ingénierie qui ont explosé, les coûts de main-d'oeuvre et toute une série d'autres raisons.

Chose certaine, je n'essaierais pas de deviner ce qu'EnCana veut faire; c'est elle qui est la mieux placée pour décider. Il y a beaucoup de choses qui influent sur le rythme de l'activité côtière. Le gouvernement a pris des mesures pour définir la manière dont il fera respecter les engagements. Cela devrait donner plus d'assurance aux entreprises comme EnCana et aux exploitants des sables bitumineux.

Le sénateur Buchanan: Je ne dis pas que c'est la raison pour laquelle l'entreprise a donné un coup d'arrêt aux nouveaux projets de l'île de Sable. Je dis qu'en novembre et décembre dernier, dans les discours qu'il a prononcés à Halifax, le président d'EnCana a dit très clairement que s'il y avait ralentissement, on pourrait attribuer une partie du blâme à l'accord de Kyoto. Ce n'est pas à cause de ce qui se passe le long des côtes de la Nouvelle-Écosse mais à cause de ce qui se passe en Alberta, essentiellement. Des habitants de la Nouvelle-Écosse veulent savoir si le ralentissement est causé par Kyoto ou à cause des autres coûts? Ils s'inquiètent également du développement lui-même. Je ne sais pas.

M. Oulton: Soyons justes, il est très difficile de deviner ce que veut faire une entreprise qui a ses propres coûts et son propre profil, et dire que c'est pour telle ou telle raison. Chose certaine, les informations que nous avons reçues depuis le début de la nouvelle année de l'industrie pétrolière et gazière à Calgary nous donnent à croire que les inquiétudes ne sont pas toutes apaisées, mais que les choses prennent une tournure telle que la situation semble plus gérable. Les pétrolières et les gazières ne disent pas que toutes leurs inquiétudes se sont évanouies, mais nous font savoir que l'approche du gouvernement face aux engagements les rassure davantage. Certaines entreprises nous ont fait savoir qu'elles sont suffisamment rassurées pour aller de l'avant avec des projets au sujet desquels elles avaient des doutes auparavant.

Le président: À titre d'anecdote, plusieurs entreprises de l'Alberta qui avaient dit la même chose avant la ratification et qui avaient été encore plus claires avant la mise en oeuvre — qui disaient: «Il se peut que nous fichions le camp d'ici si on approuve Kyoto» — ont relancé tous leurs projets et vont de l'avant. Je ne peux pas parler d'EnCana en particulier, mais il y a d'autres mégaprojets qui vont de l'avant.

Le sénateur Buchanan: J'espère qu'on en fera autant au large des côtes.

Le sénateur Cochrane: J'aimerais passer à la diapositive 21, étape 1. Vous avez dit qu'on avait investi 1,7 milliard de dollars dans le Fonds d'action pour le changement climatique, le Plan d'action 2000, l'efficacité énergétique et les énergies renouvelables et la Fédération canadienne des municipalités. Cela a déjà été fait, n'est-ce pas?

M. MacLeod: C'est exact.

Le sénateur Cochrane: Qui s'est chargé de la reddition de comptes et de la transparence pour cet investissement?

M. Oulton: Je vais mentionner deux choses en guise de réponse. Cet argent a été promis mais il n'a pas été tout dépensé. Par conséquent, bon nombre de programmes — par exemple, les 500 millions de dollars du Plan d'action 2000 — n'en sont qu'à la deuxième année de la mise en oeuvre. On a dépensé probablement moins de 50 p. 100 de ces fonds et, dans certains cas, à peu près un tiers des ressources probablement. Bon nombre de ces programmes en sont encore à la phase de démarrage. Il y a des programmes avancés; ceux-là ont été ajoutés, et M. MacLeod peut vous en parler.

Au niveau de la reddition de comptes, le Conseil du Trésor a arrêté des exigences très claires pour ce qui est des rapports. Il faudra respecter ces exigences et faire nos rapports en conséquence. Ces rapports vont ultimement apparaître dans les comptes publics et l'on pourra dire: «Voici comment ces mesures ont été mises en oeuvre et voici les résultats que nous avons». Pour la plupart de ces projets, c'est encore trop tôt. Ce n'est pas avant la troisième et la quatrième année qu'on peut dire: «Ce projet-ci donne exactement les résultats qu'on attendait». Cependant, nous avons défini des attentes pour chaque programme que nous avons communiquées au Conseil du Trésor, et nous serons en mesure de voir si ces programmes produisent les résultats voulus une fois qu'ils seront bien lancés, vers la troisième année de la mise en oeuvre.

Nous avons également négocié une disposition avec le Conseil du Trésor qui nous permet, dans le cadre du Plan d'action 2000, si certains programmes ne semblent pas donner les résultats voulus et que d'autres dépassent nos attentes, de déplacer l'argent d'un programme qui n'est pas performant à un autre qui marche mieux. Nous devrions pouvoir faire cela vers la troisième année de la mise en oeuvre du programme.

À notre avis, le mécanisme de reddition de comptes est très clair, et nous pouvons nous en servir aussi pour obtenir des commentaires. Il ne s'agit pas seulement de faire des rapports; il s'agit aussi d'être en mesure d'agir et d'utiliser votre argent avec plus d'efficacité et d'efficience.

Le président: Ce qui ne veut pas dire que vous pouvez redistribuer tous ces crédits parce qu'une partie de cet argent a déjà été utilisée dans des projets.

M. Oulton: Non, bien sûr. Je parle du Plan d'action 2000 parce que c'est le plan qui est à la base de la plupart de ces projets. Lorsque M. MacLeod a mentionné la première étape pour les 830 mégatonnes et dit que 30 proviennent de nos puits et que 50 proviennent des mesures que nous avons prises, la part du lion de ces 50 tonnes provient du Plan d'action 2000. Une partie de ces fonds a été investie par le gouvernement dans des éléments comme la science des systèmes climatiques, la compréhension des effets et de l'adaptation et d'autres secteurs où le succès ne se mesure pas en tonnes. Le succès ici se mesure dans une meilleure compréhension du climat et de ses effets sur le Canada. C'est un secteur que nous suivons de près en prenant connaissance des études qui sont faites et en voyant comment nous pouvons mieux en tenir compte dans notre politique.

Le sénateur Cochrane: Voulez-vous nous expliquer comment ce nouveau fonds pour le partenariat est structuré?

M. Oulton: En fait, il n'existe pas pour le moment. Ce n'est qu'un concept. Voyez le budget, il y est dit que des 2 milliards de dollars réservés au changement climatique, 300 millions de dollars étaient destinés aux fondations extérieures, et les 1,7 milliard de dollars que mentionnait M. MacLeod étaient réservés aux programmes gouvernementaux. Si l'on prend les nouvelles possibilités qu'offrent les programmes gouvernementaux, l'une d'entre elles consiste à se servir de ces fonds pour créer des partenariats avec les provinces, les territoires et le secteur privé. Nous n'avons pas encore déterminé la meilleure manière de faire cela.

Notre objectif était de tenir compte des commentaires des provinces et des territoires et de certains intervenants — les industries et d'autres — en ce qui concerne le Plan d'action 2000. On dit que, souvent, ce qui se passe à Ottawa, c'est qu'on investit selon les meilleures possibilités qui s'offrent à nous, mais il y a des secteurs où les provinces croient qu'elles peuvent intervenir en partenariat avec nous. Les meilleures idées pour les réductions ne proviennent pas toutes de la colline du Parlement, pour employer une analogie avec Washington. Nous devons offrir des moyens pour tirer parti de certaines idées qui proviennent de l'extérieur.

Il y a un tas de choses que nous faisons au niveau de l'efficacité énergétique et des énergies renouvelables, et nous travaillons en partenariat avec les industries, les provinces et les territoires. Chose certaine, nous admettons tout à fait qu'il y a d'autres bonnes idées à l'extérieur d'Ottawa. En ce qui concerne ce concept du partenariat, nous essayons de trouver la meilleure façon de mettre en place des programmes qui activeront les idées provenant des provinces, des territoires, des industries ou d'autres groupes d'intérêt sur la manière d'obtenir des réductions. Nous pourrons ensuite choisir et dire: essayons ceci ou cela. Pouvons-nous combiner certaines de vos ressources — vos dollars ou votre contribution intellectuelle — avec les nôtres pour obtenir des réductions?. C'est le principe, mais il n'y a encore rien de concret.

Le sénateur Cochrane: Avez-vous eu des pourparlers avec le secteur du logement?

M. Oulton: Il y a de nombreuses discussions en cours avec les constructeurs domiciliaires et d'autres.

Le sénateur Cochrane: Vous avez mentionné les maisons R-2000, et cela remonte aux années 80. Je sais qu'il y en a quelques-unes dans ma province qui sont efficaces sur le plan énergétique parce que c'est ainsi qu'elles ont été construites. Cependant, il me semble que ce programme n'est pas allé assez loin. Est-ce qu'on réinvente encore la roue?

M. MacLeod: Je ne crois pas. Chose intéressante, il y a encore des maisons R-2000 qui sont en construction, mais pas en grand nombre. Cependant, ce programme a également eu un effet sur l'augmentation de l'efficacité énergétique de toutes les maisons. Les constructeurs s'y étant formés, ils ont adopté bon nombre de ces pratiques. Nous avons des statistiques année par année, qui remontent jusqu'à 1945, sur l'efficacité énergétique moyenne des nouvelles maisons. Quand on voit ce tableau, on note un progrès constant, comme nous l'espérions. Cependant, c'est vers la fin des années 80 que les choses ont explosé, soit tout de suite après l'avènement du programme R-2000 qui a donné une meilleure formation aux constructeurs pour la construction de ces maisons. L'Association canadienne des constructeurs d'habitations attribue ce progrès au programme R-2000.

Lorsque le fonds de partenariat sera constitué, toutes les bonnes idées ne seront pas nécessairement retenues. Nous voulons qu'on nous soumette ces bonnes idées, mais le gouvernement fédéral veut s'assurer du respect de certains critères. Quel est l'objectif en matière de réduction des émissions? Quel sera le coût et les avantages réels du projet? Ces critères seront transparents et les organismes comme l'Association canadienne des constructeurs d'habitations, par exemple, pourront s'ils le souhaitent présenter leurs idées au fonds de partenariat, lesquelles seront examinées au même moment que toutes les autres.

Le sénateur Cochrane: Quand pensez-vous que le système canadien sera en place?

M. Oulton: Je vais répondre à votre question de façon très générale, mais si vous vous souvenez du graphique qui figurait sur la deuxième ou la troisième diapositive sur laquelle vous avez vu le triangle plus tôt, ce qu'on appelle l'écart, nous nous rapprochons de la première période d'engagement. Voici ce que cela signifie: premièrement, nous allons vérifier soigneusement si nous atteignons bien l'objectif de réduction de 80 mégatonnes pendant cette première période d'engagement, mais nous devrons voir si nos programmes sont suffisamment efficaces pour nous permettre de le faire et, dans le cas contraire, nous devrons les modifier assez rapidement. Voilà pourquoi la troisième année qui vient sera tellement importante.

Deuxièmement, compte tenu des ressources qui ont été prévues dans le budget à cette fin, nous devrons aller de l'avant aussi rapidement que possible. Toutes ces ressources ne seront pas dépensées au cours d'une seule année ni même affectées. Elles seront affectées sur une période de cinq ans. Pour imprimer l'élan voulu, nous devrons au cours des mois qui viennent décider des programmes qui seront mis en oeuvre au moins au cours de la première année. Nous espérons pouvoir soumettre des propositions à cet égard aux ministres concernés qui pourront ensuite faire un choix quant aux programmes à mettre en oeuvre au cours de la première année. C'est la façon dont nous comptons démarrer le processus. Je vous rappelle cependant qu'il s'agit d'une proposition à long terme et comme nous voulons éviter tout gaspillage des ressources, nous procéderons étape par étape. Nous poursuivrons ensuite les programmes qui donnent de bons résultats et nous supprimerons les autres. Nous ne comptons certainement pas prendre de décisions d'ici quelques mois ou d'ici un an sur l'affectation de la somme globale de 1,7 milliard de dollars. Il nous faudra plus longtemps pour formuler des recommandations adéquates.

Le sénateur Cochrane: Vous faites la promotion des maisons R-2000 qui consomment peu d'énergie auprès des constructeurs d'habitations. Qu'en est-il des personnes qui construisent leur propre maison? Existe-t-il un fonds ou un partenariat auquel ces personnes peuvent s'adresser?

M. MacLeod: Le budget date d'à peine une semaine. Le plan paru en novembre prévoit diverses possibilités. Nous savions que ce premier budget ne nous permettrait pas de financer tous nos projets. Pour l'instant, aucun crédit n'est réservé dans le budget à une fin précise. Nous discuterons plutôt au cours des semaines et des mois qui viennent de la façon dont nous devons affecter la somme que le ministre des Finances a prévu dans le budget pour cette initiative. Les choix ne manquent pas. Nous devrons décider quels projets seront financés.

Il a été notamment proposé d'accorder des incitatifs financiers à ceux qui achètent une maison R-2000 ou qui en construisent eux-mêmes pour y vivre. Voilà donc un usage auquel pourraient servir ces fonds, mais les décisions à cet égard seront prises dans le mois qui viennent.

Le sénateur Milne: Pour revenir à votre tableau de la page 4 et à la réponse que vous avez donnée à la question que vous posait le sénateur Christensen, je regarde cette petite baisse en deçà du point zéro et, si je peux toujours tirer une ligne droite, je dirais que la baisse a commencé aux environs de 1940 et s'est terminée vers 1975. C'est donc avant la flambée des coûts de l'énergie que nous avons connue dans les années 80 à moins que le graphique soit mauvais. Je peux comprendre qu'il y a eu une baisse en 1940 parce que l'essence était rationnée pendant la guerre. La question que je me pose est de savoir qu'est-ce que nous avons fait pour que les émissions baissent entre 1950 et 1975?

M. Oulton: Je vous signale simplement que ce sont les températures qui figurent sur l'axe vertical et non pas le niveau d'émissions. Il s'agit donc de la moyenne des températures atmosphériques.

Le sénateur Milne: Si l'on tire une ligne droite à partir de l'axe du bas, on voit que cela correspond aux années 1900, 1950 et 2000. Qu'est-ce qui fonctionnait donc à ce moment?

M. Oulton: Ce qu'on a constaté au milieu du XXe siècle, c'est un changement des températures qui n'est pas nécessairement attribuable aux activités humaines. Comme je ne suis cependant pas climatologue, je ne peux pas vous expliquer de façon plus précise cette tendance, mais j'obtiendrai cette explication pour vous.

Divers facteurs doivent être pris en compte comme les volcans, par exemple. Les importantes émissions atmosphériques qui proviennent des volcans peuvent entraîner des changements de température qui se constatent parfois pendant toute une année et parfois même pendant plusieurs années. Je ne peux pas être complètement sûr de ce que j'avance, mais il existe de nombreux facteurs environnementaux et climatiques qui n'ont rien à voir avec l'activité humaine et tout à voir avec les cycles climatiques normaux. Voilà l'étendue de mes connaissances de non-spécialiste.

Le sénateur Milne: Vos projections ne semblent cependant pas tenir compte de la possibilité qu'il y ait d'autres variations naturelles du climat dans l'avenir.

M. Oulton: Ces projections sont faites par les scientifiques des Nations Unies et elles se fondent sur ce qu'ils estiment pouvoir être les variations par rapport aux cycles naturels. Ces scientifiques ont établi les changements climatiques minimaux que nous pouvons anticiper et qui seraient attribuables aux événements naturels et aux cycles climatiques naturels. Il s'agit ici de variations qui s'ajoutent si l'on peut dire à leurs projections. Je ne peux pas non plus être trop catégorique au sujet de projections qui ont été faites par des spécialistes des Nations Unies sur lesquelles nous nous fondons pour formuler des hypothèses. L'éventail de ces hypothèses est très large.

Le sénateur Milne: Je le sais, mais vous avez cependant dit au sénateur Christensen que cette augmentation subite était due à la flambée des prix de l'énergie dans les années 80. Ce n'est pas le cas.

M. Oulton: Je pensais que la partie du graphique dont il était question se rapportait aux années 80. Nous avons pour cette période non pas de très bonnes mesures de la température, mais de notre consommation d'énergie et nous savons que le niveau des émissions de CO2 est lié de très près à la consommation d'énergie. Les économistes peuvent établir un lien avec ces données et les données météorologiques.

Le sénateur Milne: Ces données ne se reflètent pas dans ce graphique.

M. Oulton: La difficulté est que le graphique n'est pas suffisamment détaillé. Nous nous intéressons vraiment aux projections sur de longues périodes.

Le président: Vous disiez il y a un instant que ces projections sont fondées sur des variations par rapport à ce qui se produirait normalement. Le graphique indique qu'il s'agit d'écarts par rapport aux températures enregistrées entre 1961 et 1990. Il s'agit de deux choses différentes. Qu'en est-il? Ces deux interprétations ne peuvent pas être bonnes.

M. Oulton: Il s'agit d'écarts par rapport à la moyenne enregistrée entre 1961 et 1990 sur lesquels les scientifiques se fondent pour établir quelles seraient les températures normales. Ils se reportent à cette moyenne pour établir ce à quoi on peut s'attendre.

Le président: Le zéro correspond à la moyenne entre 1961 et 1990?

M. Oulton: Oui. Les scientifiques se sont dit qu'il fallait mesurer les écarts pour s'en servir comme référence pour étudier les perturbations.

Le sénateur Milne: Revenons aux principes provinciaux et fédéraux, soit les principes PT qui se reflètent dans le plan. Je constate que le principe 10 auquel le gouvernement fédéral a donné son aval est celui-ci: «Reconnaissance des exportations d'énergie propre». Autrement dit, il s'agit de crédits pour les exportations d'énergie propre. Or, les États- Unis qui, d'après vous ont fait preuve d'une grande rigueur dans tout ce dossier, ont dit que ces crédits ne seraient pas permis. Il s'agit toujours de l'étape 3, celle qui semble la plus floue du plan. Vous comptez sur des crédits pour les exportations d'énergie propre. Pouvons-nous vraiment espérer que ces crédits soient accordés? Devraient-ils l'être?

M. Oulton: Nous pensons que de tels crédits devraient exister. C'est toujours la position du gouvernement canadien. En fait, il est fort peu probable que ces crédits soient accordés au cours de la première période d'engagement qui, comme vous l'avez fait remarquer, est largement un fait accompli. Nous avons donc proposé un menu d'options.

Vous me demandez peut-être de me prononcer sur ce qui est susceptible ou non de se produire pendant la première période d'engagement, soit pendant la période allant de 2008 à 2012. Une autre ronde de négociations va commencer au sujet de la période d'engagement suivante, soit celle qui commence dès 2006. Le Canada devrait donc demander que la question des crédits pour les exportations d'énergie propre fasse de nouveau l'objet de discussions lors de ces négociations.

Nous n'avons pas obtenu la reconnaissance de ces crédits pendant la première ronde de négociations. Il y a peu de chances pour que ces crédits soient reconnus lors de la première période d'engagement, mais l'occasion nous sera donnée de revenir sur cette question au cours des rondes de négociations subséquentes. Vous avez raison d'avoir des doutes à ce sujet pour ce qui est de la période allant de 2008 à 2012. Je dois dire que nous n'y comptons pas. Nous devrons recourir à d'autres options sur notre menu.

Le président: J'ai plusieurs questions à poser. J'essaierai d'être bref et je vous demanderai d'essayer de faire de même.

A-t-on fixé un délai à la Russie? Rien de tout ce que vous nous avez présenté ne se passera si la Russie ne ratifie pas le protocole. A-t-elle un délai pour le faire ou allons-nous attendre indéfiniment?

M. Oulton: Aucun délai n'a été fixé à la Russie. Nous nous attendons cependant à ce qu'elle prenne une décision dans un sens ou dans l'autre au cours de l'année. Certains s'attendent même à ce qu'elle le fasse d'ici l'été, mais rien ne l'y oblige.

Le président: Qui négocie les engagements avec les divers secteurs industriels?

M. Oulton: C'est un organisme qui a été constitué à cette fin au sein de Ressources naturelles Canada, le ministère auquel appartient M. MacLeod. C'est cet organisme qui est chargé d'entreprendre ces discussions. Howard Brown est sous-ministre adjoint de ce groupe.

Le président: Le sens que vous donnez au terme «engagement» n'est pas celui qu'il a normalement, n'est-ce pas? C'est en fait un engagement qui n'engage en rien. Il s'agit d'un engagement quasi volontaire, n'est-ce pas?

M. Oulton: C'est à peu près ça. Il est question dans le plan d'un engagement avec un filet de sécurité. À l'échelle internationale, les Néerlandais et d'autres ont adopté une approche semblable qui semble donner de bons résultats. «Secteur industriel, nous voulons conclure un accord volontaire avec vous. Si nous parvenons à nous entendre sur des conditions qui seraient acceptables à tous les intervenants, nous aurons alors recours...» et on propose divers outils. La réglementation est celui auquel on fait le plus souvent allusion, mais ce n'est pas le seul.

L'une des questions sur lesquelles il faut s'entendre est notamment quelle forme prendra ce filet de sécurité réglementaire. Pour pouvoir exercer un certain poids lors des négociations, il faut pouvoir dire: «Si vous n'êtes pas prêts à collaborer avec nous, voici le régime réglementaire ou fiscal auquel vous serez assujettis». Ce filet de sécurité reste encore à déterminer.

Le président: Nous savons exactement de quoi il s'agit. C'est la massue qu'on cache derrière son dos ou le filet de sécurité, autrement dit.

Je suis fier de dire que l'Alberta ouvre la voie pour ce qui est de la recherche de charbon propre. Le charbon propre existe-t-il vraiment?

M. Oulton: Il n'existe pas de charbon qui n'émette aucune émission, mais l'industrie houillère mène des recherches visant à mettre au point le charbon le moins polluant possible. Cette technologie ne sera cependant pas prête avant une génération ou deux. L'exposé de l'industrie est très impressionnant à cet égard. Il vaut sans doute mieux parler d'un charbon moins polluant qui émettrait beaucoup moins d'émissions en brûlant. Ces émissions ne seraient pas nulles, mais elles seraient beaucoup moins élevées. L'industrie houillère se fixe cependant comme objectif que le charbon soit le moins polluant possible.

Le sénateur Buchanan: Lorsque vous parlez d'émissions propres provenant des usines alimentées au charbon, parlez- vous de l'élimination du CO2, du NCO2, du NSO2 ou de tous ces gaz?

M. Oulton: C'est le CO2 qui compte pour ce qui est des changements climatiques. Lorsqu'il s'agit de discuter de ces questions avec l'industrie — et c'est ce que soutiennent les États-Unis et c'est ce que refléteront aussi les engagements canadiens — il faut traiter de toutes les émissions en même temps. Si le CO2 est le gaz à effet de serre qui nous intéresse le plus pour l'instant, l'industrie, pour sa part, pense que la politique doit traiter de tous les gaz à effet de serre dont le SO2 et le NOX.

Le président: Vous avez parlé de l'utilisation qui pouvait être faite du CO2 capturé dans les puits marginaux lorsque 25 p. 100 du pétrole a été extrait et qu'il faut aller ensuite extraire le reste des roches. Cette technologie est déjà en usage ailleurs dans le monde. Pourquoi ne l'adopte-t-on pas au Canada et pourquoi met-on tant de temps à le faire? Va-t-on offrir des stimulants à ceux qui exploitent ces puits marginaux? Je pose la question parce que certaines entreprises pétrolières canadiennes importent du CO2 parce qu'elles en ont besoin pour leurs activités.

M. Oulton: Tout à fait. Il y a une question de rentabilité qui se pose. Le facteur le plus important à cet égard au Canada — pas toujours aux États-Unis — est celui du transport. On produit beaucoup de CO2 excédentaire dans le Nord. C'est cependant dans le Sud qu'on en aurait besoin.

Le président: Voilà pourquoi vous parlez de la construction d'un pipeline de CO2.

M. Oulton: Tout à fait. Il ne s'agit pas du seul problème qui se pose, mais c'est un problème important dans le cas de ce produit, c'est qu'il faut mettre l'infrastructure voulue en place. C'est ce à quoi faisait allusion M.McLeod plus tôt lorsqu'il a parlé d'un pipeline de CO2.

Le président: Ce n'est cependant pas la seule façon de transporter ce produit.

M. Oulton: Ce n'est pas la seule, mais si la demande est suffisamment élevée, c'est la façon la plus économique de le faire.

Le président: Quels sont les stimulants qui existent actuellement? Si je suis un entrepreneur et que je veux construire un nouvel immeuble commercial, pourquoi devrais-je me préoccuper des nouveaux codes? Sont-ils appliqués ou s'agit- il simplement de codes volontaires?

M. MacLeod: Il existe déjà un programme dont je pourrai vous parler davantage jeudi matin qui s'appelle le programme d'encouragement pour les bâtiments commerciaux. Ce sont les milieux architecturaux que ce programme intéresse le plus. Nous versons un stimulant financier aux concepteurs de nouveaux immeubles s'ils conçoivent un immeuble qui consomme au moins 25 p. 100 de moins d'énergie que ce qui est prévu dans le Code modèle national de l'énergie pour les habitations. Nous avons un logiciel de simulation informatique qui nous permet d'établir si c'est le cas. Il s'agit d'un stimulant modeste d'environ 70 000 $. L'importance du stimulant est proportionnelle au nombre d'années pendant lesquelles les économies d'énergie peuvent être réalisées. Nous fixons évidemment un plafond pour pouvoir accorder ce stimulant au plus grand nombre de concepteurs possible. Des projets très intéressants nous ont été soumis. Certains des immeubles qui sont maintenant conçus consomment de 60 à 70 p. 100 de moins d'énergie que ce qui est prévu dans le Code modèle national de l'énergie pour les habitations. Nous tâcherons donc par ce programme de favoriser l'innovation.

Le président: Les architectes connaissent-ils ce programme?

M. MacLeod: Je ne peux pas vous l'assurer. Je sais que plus d'architectes le connaissent maintenant que par le passé parce que des sommes importantes sont consacrées à faire connaître ce programme aux milieux architecturaux.

Le sénateur Spivak: J'ai une question à poser au sujet du budget actuel. L'argent qui est versé par l'intermédiaire des fondations ne peut pas faire l'objet d'une vérification de la part de la vérificatrice générale. Ne pensez-vous pas que la transparence devrait être plus grande? Il s'agit d'un budget de 2 milliards de dollars et il faudrait savoir s'il a été utilisé à bon escient. On voudra savoir quels sont les résultats obtenus?

Le président: Sénateur, je comprends votre question, mais je ne pense pas qu'elle s'adresse au bon témoin. C'est une question qui devrait peut-être être posée au Comité des finances nationales. C'est une question qui ne relève absolument pas du ressort de ces témoins. N'est-ce pas?

M. MacLeod: Je ne suis pas un spécialiste de ces fonds indépendants, mais je sais que les critères en matière de reddition de comptes et de transparence sont plus rigoureux pour certains que pour d'autres. Prenons l'exemple de la Fédération canadienne des municipalités qui a reçu à deux reprises une subvention de 125 millions de dollars. Au moment de l'annonce de la première subvention de 125 millions de dollars il y a trois ans dans le budget 2000, je travaillais au ministère des Finances. J'ai participé à la création de ce programme. Bien qu'il s'agisse d'un programme indépendant du gouvernement fédéral, nous avons participé activement aux choix des critères en fonction desquels les projets seraient financés par les municipalités. Nous avons voulu exercer une influence à cet égard bien que nous ne soyons pas en position majoritaire, mais plutôt en position minoritaire au sein du conseil.

Je siège à ce conseil ainsi que quatre autres collègues du gouvernement fédéral et dix membres de la FCM, dont certains sont maires. Nous sommes conscients de cette préoccupation. Dans les secteurs qui se sont vu accorder de nouveaux crédits, nous resserrerons sans doute les exigences en matière de reddition de comptes.

Le président: J'accorde de nouveau la parole au sénateur Spivak. Votre question comportait deux parties.

Il s'agit de dépenses au titre des programmes. Certaines fondations reçoivent de l'argent du gouvernement fédéral bien que celui-ci n'y soit pas représenté. Ces fondations ne sont pas assujetties aux dispositions de la Loi sur la gestion des finances publiques auxquelles sont assujetties les sociétés d'État. Les activités de ces fondations font peut-être l'objet d'un examen minutieux, mais cet examen n'est pas effectué par la vérificatrice générale.

M. MacLeod: C'est juste.

Le sénateur Spivak: Ce problème s'est déjà posé. Je comprends qu'il est peut-être préférable de poser ce genre de questions au ministre lorsqu'il comparaîtra.

Le président: Y a-t-il d'autres questions pour nos témoins?

Comme il n'y en a pas, je tiens à vous remercier, messieurs.

La séance se poursuit à huis clos.


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