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Délibérations du comité sénatorial permanent des
Affaires juridiques et constitutionnelles

Fascicule 12 - Témoignages du 12 juin 2003


OTTAWA, le jeudi 12 juin 2003

Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles se réunit aujourd'hui à 10 h 38 pour étudier la possibilité que le Sénat agrée l'amendement apporté par la Chambre des communes à son amendement 4 au projet de loi C-10B, Loi modifiant le Code criminel (cruauté envers les animaux), que le Sénat n'insiste pas sur ses amendements 2 et 3, auxquels les Communes n'ont pas acquiescé et que le message de la Chambre des communes au sujet du projet de loi C-10B, Loi modifiant le Code criminel (cruauté envers les animaux) soit maintenant renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.

Le sénateur George J. Furey (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Honorables sénateurs, l'ordre de renvoi que nous avons reçu hier nous oblige à examiner le message que la Chambre des communes a envoyé au Sénat a sujet du projet de loi C-10B.

L'ordre de renvoi que nous avons reçu mardi nous oblige à examiner les paramètres de la motion du sénateur Carstairs. Des copies des deux ordres de renvoi ont été distribuées à la réunion d'hier, où nous avons commencé à discuter de notre réaction à la réponse de la Chambre des communes aux amendements que nous avons proposés.

Le Règlement nous autorise à discuter à huis clos de la version provisoire de notre rapport, si telle est notre intention. Nous allons discuter de cette question à la fin des témoignages d'aujourd'hui.

Je reprends le cadre que j'ai défini hier. Nous allons nous intéresser aux trois amendements qui n'ont pas été acceptés par l'autre endroit, c'est-à-dire les amendements nos 2, 3 et 4. Le fait de causer la mort sans nécessité et les pratiques autochtones, respectivement, ont été rejetés. La Chambre des communes a amendé l'amendement 4, soit la disposition portant sur l'apparence de droit. À la demande du comité, le texte de l'amendement que nous avons proposé a été, pour fins de comparaison, placé sur une feuille à côté de celui proposé par l'autre endroit.

Au profit de ceux qui n'étaient pas présents hier, je vais rappeler les trois options qui s'offrent à nous selon la pratique et la procédure parlementaires.

Pour chacun des trois amendements, nous pouvons accepter la proposition de la Chambre, nous pouvons la rejeter en insistant sur notre amendement initial ou nous pouvons proposer une nouvelle formulation faisant droit à nos préoccupations au sujet d'un article donné. Si on opte pour cette dernière option, ce sera dans l'espoir d'en arriver à un compromis susceptible d'inciter la Chambre des communes à accepter l'amendement.

À l'occasion de notre réunion d'hier, nous avons convenu de notre volonté d'entendre le ministre pour mieux comprendre le point de vue de l'autre endroit. Si le ministre n'a pu se libérer, nous sommes heureux d'accueillir à sa place l'honorable Paul Macklin. M. Macklin est accompagné de Mme Joanne Klineberg, qui a comparu devant notre comité à quelques reprises et qui se passe de présentation. De même, nous allons entendre nos propres conseillers, M. Mark Audcent et M. Michel Patrice.

Je crois comprendre que M. Macklin va brièvement expliquer le point de vue de l'autre endroit à propos des amendements proposés par le Sénat. Nous allons ensuite passer à une période de questions et à une discussion complète avec M. Macklin. Nous sommes terriblement pressés par le temps, et j'invite donc M. Macklin à être aussi bref que possible. Un certain nombre de sénateurs souhaitent poser des questions précises concernant les amendements.

Monsieur Macklin, la parole est à vous.

L'honorable Paul Macklin, député, secrétaire parlementaire du ministre de la Justice: Honorables sénateurs, je vous remercie sincèrement de m'avoir invité à venir aujourd'hui vous entretenir du projet de loi C-10B et des amendements du Code criminel concernant la cruauté envers les animaux. La semaine dernière, comme vous le savez, mes collègues et moi avons étudié les amendements que vos collègues du Sénat et vous avez proposés. Je sais que vous avez consacré de nombreuses heures de travail difficiles et acharnées pour en arriver à ces amendements.

Dans le cadre de notre étude, nous avons également examiné vos amendements. Ceux que nous avons acceptés répondent parfaitement aux préoccupations de bon nombre d'entre nous, qui continuent d'avoir des inquiétudes à propos de l'impact négatif du projet de loi sur les utilisateurs légitimes des animaux, c'est-à-dire les chasseurs, les agriculteurs et les chercheurs.

L'ajout de moyens de défense au paragraphe 429(2) et la modification de la définition d'«animal» atténuent toutes les craintes qui ont été portées à notre attention par les personnes susceptibles d'être touchées par le projet de loi. Je tiens à vous assurer, honorables sénateurs, que le projet de loi, selon son libellé actuel, bénéficie du soutien de la Chambre. Nous vous sommes tout à fait reconnaissants du bon travail que vous avez fait et de la contribution que vous avez apportée pour convaincre les Canadiens que les amendements en question ne vont pas compromettre leur gagne- pain.

À mes côtés se trouvent aujourd'hui quelques-uns de mes collègues de la Chambre des communes qui sont favorables au projet de loi dans sa forme actuelle et aimeraient qu'il soit adopté.

Sans plus de détails, je pense que nous allons passer aux questions: nous pourrons ainsi apaiser vos inquiétudes.

Le sénateur Beaudoin: Nous allons devoir commencer par un des cinq amendements. Ma préoccupation concerne la question de l'apparence de droit. On note un certain désaccord, et j'aimerais savoir pourquoi la Chambre propose un amendement différent de celui qui a été envoyé.

M. Macklin: Que l'on prenne le paragraphe 8(3) ou le paragraphe 429(2), nous sommes d'avis que, dans les deux cas, la disposition est superflue. Ces moyens de défense s'appliquent de toute façon. C'est ce que nous avons compris à l'étude du témoignage de la Canadian Criminal Lawyers Association, si je ne m'abuse, à laquelle on a demandé si, pour être efficaces, les moyens de défense devaient figurer expressément dans le projet de loi C-10B.

On nous a répondu que la seule raison d'inclure de tels moyens de défense serait de rassurer davantage les particuliers qui examinent le projet de loi. En ce qui nous concerne, que l'on introduise ou non l'article 8(3) ou l'article 429(2), il s'agirait dans les deux cas d'un moyen de rassurer les personnes qui examinent le projet de loi.

Le sénateur Beaudoin: Nous tenions à ce qu'une telle disposition soit incluse. C'est ce que, en français, on appelle l'«apparence de droit», aspect qu'il nous paraît utile d'inclure, même si des fonctionnaires du ministère de la Justice nous ont répété que ce n'était pas nécessaire. Ces derniers ont soutenu que, une fois supprimée la question de la propriété, on peut se passer de la règle de l'apparence de droit. Est-ce là notre raisonnement?

Mme Joanne Klineberg, avocate, Section de la politique en matière de droit pénal, ministère de la Justice du Canada: Je ne sais pas de façon certaine que le ministère n'ait jamais affirmé que l'apparence de droit se limite, en droit, aux notions de propriété, même si c'est là qu'on en trouve l'origine. Comme les sénateurs réunis autour de la table l'ont bien montré, la jurisprudence montre qu'il peut s'agir d'une erreur d'autres types de droit et que la notion ne se limite pas qu'aux droits de propriété. En jurisprudence, la notion a évolué un peu et ne s'applique pas qu'à la seule propriété.

Je pense que cette conception particulière de l'apparence de droit continuera de s'appliquer puisque les infractions sortent de la partie du code portant sur la propriété. L'apparence de droit est une notion générique; il s'agit d'une défense en common law; elle s'applique à une diversité d'erreurs différentes pouvant se produire en rapport avec toutes sortes d'infractions; et elle continuera de s'appliquer à ces infractions à l'endroit où elle se trouve maintenant, c'est-à- dire la nouvelle partie 5.1

Le sénateur Beaudoin: C'est pour cette raison que vous dites «dans la mesure où ils sont pertinents».

Mme Klineberg: Oui, et aussi parce que les moyens de défense contenus au paragraphe 429(2), qui font partie de la disposition, s'appliquent aux articles 430 à 446 du Code criminel, qui est entièrement intégré à la partie 11 et comprend des infractions comme les méfaits, les incendies criminels et d'autres infractions de cette nature. Les moyens de défense contenus dans cette disposition ont une signification ou une application différente, selon le type d'infraction concerné. L'ajout des mots «dans la mesure où ils sont pertinents» indique que les moyens de défense en question demeureront pertinents tant et aussi longtemps qu'ils s'appliqueront aux infractions relatives à la cruauté envers les animaux. Ce sont les infractions auxquelles la nouvelle disposition s'appliquera désormais.

Le sénateur Andreychuk: Dans le code actuel, monsieur Macklin, on trouve une disposition sur la cruauté comprenant des dispositions relatives à la cruauté envers les animaux. Nous les en avons sorties, et les moyens de défense en common law s'appliquent déjà. Il m'apparaît plutôt curieux d'entendre le ministère ou le ministre dire que telle sera l'interprétation. Si vous me le permettez, j'ai été juge et j'ai pris mes responsabilités au sérieux. À l'époque, je me disais toujours: si rien n'a changé, je suis liée par la jurisprudence existante. Si vous avez déplacé une disposition, c'est forcément parce que vous aviez une intention différente. Lorsqu'on reformule légèrement un moyen de défense, c'est forcément parce qu'on a une intention différente. Même si le gouvernement expose en détail sa position au bénéfice des juges, ces derniers demeurent libres d'interpréter ce qu'ils jugent nécessaire d'interpréter compte tenu des limites du droit qu'ils sont tenus d'interpréter. Par conséquent, il ne s'agit pas d'assurance, et je ne pense pas que ce soit ce que cette association des criminalistes ait dit.

J'ai souvent dit qu'il est réconfortant de disposer d'une garantie parce que, à mon avis, la disposition signale, très profondément, que nous ne voulons pas que la jurisprudence soit interrompue et que nous tenons à ce que la notion d'apparence de droit soit présente. Lorsqu'on commence à déplacer des dispositions, les tribunaux auront naturellement tendance à en arriver à des interprétations différentes, quelles qu'aient été les intentions du gouvernement. Un rétrécissement des moyens de défense ou une interprétation différente de ces derniers constituerait l'une de ces interprétations naturelles.

Avec tout le respect que je vous dois, monsieur, voilà pourquoi nous tentions de faire en sorte que rien ne bouge, que personne ne voie sa situation changer au motif de l'intention générale et que le fait de causer la mort d'un animal sans nécessité devienne un crime.

Sachant que nous risquions de compromettre les moyens de défense, nous avons travaillé pendant des mois à l'établissement d'un libellé qui nous procurerait une certitude encore plus grande que celui de l'amendement de la Chambre des communes ou de celui du ministre précédent. Nous voulions nous assurer qu'il n'y aurait ni changement, ni expansion, ni dilution, ni rétrécissement du moyen de défense. Vous nous donnez l'assurance que telle n'est pas l'intention, ce qui est rassurant; cependant, ce n'est pas aussi complet que le moyen de défense proposé par le Sénat, qui enverrait un signal clair aux tribunaux.

M. Macklin: Le comité de l'autre endroit partageait votre point de vue parce qu'il a introduit le paragraphe 8(3), ce dernier en étant venu à la conclusion qu'il serait utile, pour plus de certitude, d'assortir le projet de loi lui-même de garanties.

L'»insécurité» que vous inspire cette question s'est indubitablement fait sentir à l'autre endroit. Je suppose que tout est de savoir comment y remédier. Vous avez fait une proposition. Franchement, nous l'avons examinée et nous en sommes venus à la conclusion que, sous réserve de certains changements, pour des motifs qui, je crois, sont connus — sinon, je serai heureux de les connaître — nous pouvions modifier le moyen de défense inscrit à l'article 429 et l'inclure. Je suis certain que vous êtes au courant du problème d'inversion du fardeau de la preuve qui se poserait. Nous sommes déjà d'avis qu'un problème d'inversion du fardeau de la preuve se pose déjà aux termes de notre Constitution. En fait, dans presque tous les cas où on a affaire à une inversion du fardeau de la preuve, la Cour invalide la procédure.

Ainsi, la façon dont votre amendement est libellé prêterait selon nous le flanc, tout de suite après son entrée en vigueur, à une contestation devant les tribunaux, étant donné la disposition d'inversion du fardeau de la preuve que vous introduisez. Nous avons tenté de remédier au problème tout en acceptant le fait que l'ajout de garantie vous semble une solution préférable.

Nous avons dû aborder la question sans perdre de vue que nous acceptions le principe selon lequel vous cherchiez une garantie plus grande; évitons simplement d'inviter une partie ou une autre à contester les dispositions devant la loi dans l'après-Charte. Acceptons les moyens de défense contenus au paragraphe 429(2) de préférence à ce que vous proposez: «Nul ne peut être déclaré coupable d'une infraction prévue par la présente partie s'il» — l'accusé, en l'occurrence — «prouve qu'il a agi avec une justification ou une excuse légale ou avec une apparence de droit».

Si nous avons examiné ce libellé, c'était pour tenter d'accepter le principe auquel vous tenez. Au lieu de nous placer en situation périlleuse, nous avons jugé sage de retirer les infractions de cette section pour les mettre dans la section modifiée par nos soins.

Le sénateur Andreychuk: Je ne veux pas monopoliser le débat. Si nous avons soulevé le problème de l'inversion du fardeau de la preuve, je pense toutefois que nous nous sommes persuadés — et je pense que c'est la position du ministère — qu'il ne s'agissait pas d'une inversion du fardeau de la preuve au sens où vous venez de le dire, parce que c'est à la Couronne qu'il incombe d'établir l'absence de justification et d'excuse légale ou d'apparence de droit.

Même si telle n'est pas notre position, il s'agit d'une question liée à la preuve. Voilà essentiellement le problème. Je n'ai pour ma part pas observé de tendance selon laquelle les tribunaux n'acceptent pas l'inversion du fardeau de la preuve. Dans le droit tel qu'on le pratique, il existe, je pense, un principe de base selon lequel l'accusé est innocent tant et aussi longtemps que sa culpabilité n'a pas été établie. Cependant, on a à bon droit eu recours à l'inversion du fardeau de la preuve, et de telles mesures ont été jugées conformes à la Charte. Même si nous nous sommes posé des questions au départ, je pense que nous en étions à la fin venus à la conclusion qu'il s'agissait d'un recours approprié à l'inversion du fardeau de la preuve. Je ne suis même pas convaincue que nous ayons fini avec une inversion du fardeau de la preuve.

M. Macklin: Je vais faire appel à Mme Klineberg.

Mme Klineberg: Il fait peu de doute que les mots «s'il prouve qu'il» constituent en réalité une inversion du fardeau de la preuve. «S'il prouve qu'il» oblige l'accusé à prouver, suivant le principe de la prépondérance des probabilités, qu'un moyen de défense s'applique. Puisque, au terme d'un certain nombre de causes liées à la Charte, ce type de formulation a été jugé inconstitutionnel, le gouvernement a pris l'habitude de ne pas y recourir. Si, à la lumière de nos témoignages antérieurs, vous avez eu l'impression que ces mots ne constituaient pas une inversion du fardeau de la preuve, il y a probablement eu un malentendu, ce dont je vous prie de nous excuser.

La question de savoir si une inversion du fardeau de la preuve est ou non inconstitutionnelle sera fonction des causes à propos desquelles la question est tranchée. L'inversion du fardeau de la preuve en question, soit celui du paragraphe 429(2) a été jugée inconstitutionnelle par une cour — il s'agit, si je ne m'abuse, de la «gaming court». Cependant, là où ces mots se retrouvent dans le code, on doit chaque fois les examiner au mérite. À première vue, les mots «s'il prouve qu'il» constitueraient une violation de la présomption d'innocence au regard de la Charte, et le gouvernement aurait la possibilité de justifier la violation de la présomption d'innocence aux termes de l'article premier. À ma connaissance, il n'a plus beaucoup l'habitude de le faire.

On a jugé que l'inversion du fardeau de la preuve était constitutionnelle aux termes de l'article 16 du Code criminel — les dispositions qui touchent les troubles mentaux —, mais il s'agit d'une question sensiblement différente des moyens de défense normaux, et généraux applicables en common law, par exemple l'apparence de droit et l'excuse légale. À titre d'exemple, l'inversion du fardeau de la preuve ne s'applique pas aux dispositions touchant l'autodéfense ni la défense de la propriété. Les désordres mentaux constituent une affaire légèrement différente, où le gouvernement s'est donné la peine de justifier un manquement à la Constitution.

Permettez-moi, sénateur Andreychuk, d'en revenir au premier point que vous avez soulevé. Vous êtes convaincante lorsque vous affirmez que c'est le fait de savoir si la jurisprudence existante continuera ou non de s'appliquer qui vous inquiète. Pour ma part, je soutiendrais que la formulation actuelle, en vertu de laquelle les moyens de défense énoncés au paragraphe 429(2) font l'objet de renvois, est plus favorable à votre objectif que le fait de recréer les moyens de défense dans un nouvel article 182.5. En effectuant un renvoi au paragraphe 429(2), on envoie aux tribunaux un message beaucoup plus clair, me semble-t-il, c'est-à-dire que la jurisprudence relative au paragraphe 429(2) continue de s'appliquer puisqu'on affirme que ce sont ces moyens de défense-là qui existent. Si, en revanche, vous récrivez la justification légale, l'excuse ou l'apparence de droit dans d'autres articles du projet de loi, la question de savoir si la jurisprudence relative au paragraphe 429(2) s'applique ou non chaque fois se pose bien davantage. À mon avis, il est ainsi plus clair que la disposition s'accompagne de toute l'ancienne jurisprudence.

Le sénateur Andreychuk: Je pense que les discussions que nous avons eues hier montrent clairement que l'utilisation des mots «dans la mesure où ils sont pertinents» ne sont pas aussi clairs que ce que nous avions établi.

Le sénateur Joyal: On pourrait le soutenir devant un tribunal. Quelqu'un aurait alors à décider de ce qui est pertinent et de ce qui ne l'est pas.

Le sénateur Andreychuk: Quelqu'un aurait à décider ce qui est pertinent compte tenu de quel critère, et ainsi de suite.

Le sénateur Beaudoin: C'est très fondamental.

Le président: Je tiens à souligner la présence de certains de nos collègues de la Chambre des communes: M. Janko Peric, M. John Efford. Je pense que nous comptons aussi parmi nous M. Paul Steckle, Mme Rose-Mary Ur et M. Andrew Telegdi.

Soyez les bienvenus.

Le sénateur Smith: En ce qui concerne la question de l'apparence de droit, je n'ai pas devant moi la transcription du témoignage de M. Mosley, mais je me souviens qu'il a dit croire, à l'occasion d'une discussion portant expressément sur l'apparence de droit, qu'il entrevoyait un problème. Comme il existe une jurisprudence abondante, certains, si on commence à la définir expressément dans une loi ou dans une disposition particulière, risquent de sauter à la conclusion que le principe ne s'applique pas dans d'autres situations où on n'y a pas expressément fait référence. J'aimerais, pour peu que mes souvenirs soient bons, savoir s'il s'agit ou non de préoccupations légitimes.

M. Macklin: Il s'agit à coup sûr d'une préoccupation parce que, chaque fois qu'on fait quelque chose, ainsi que le sénateur Andreychuk l'a laissé entendre, le juge se pose toujours la question suivante: quel message envoie-t-on dans ce cas particulier? Voilà pourquoi on préfère ne pas recourir à ces renvois dans ce cas-ci et s'en remettre plutôt à l'application du paragraphe 8(3) et à son application à tout le code. C'était l'idée et le projet initiaux.

Une fois de plus, on se retrouve face à un conflit, c'est-à-dire équilibrer les préoccupations des particuliers et l'effet. Deux questions différentes se posent: quel est l'effet des paragraphes 8(3) ou 429(2) et quelles sont, en réalité, les préoccupations que nous percevons chez ceux qui verront la disposition en question? Le projet de loi à l'étude et ses multiples incarnations ont été étudiés par deux Parlements. De toute évidence, le processus a fait l'objet d'un examen des plus poussés.

Tout au long du débat à propos de cet enjeu, les préoccupations des personnes soucieuses de prévoir des moyens de défense ont fait l'objet d'une très grande attention. Sur la foi de ce que vous avez recommandé et de ce que nous avons adopté, nous semblons en être arrivés — du moins aux yeux des groupes qui communiquent avec nous — à un niveau d'assurance acceptable pour ces personnes, en particulier celles du secteur agricole, de la pêche et de la recherche médicale. De toute évidence, il s'agissait là de préoccupations majeures.

Mme Klineberg: Je n'ai pas grand-chose à ajouter à ce que M. Macklin a dit, mais il est certain qu'on a tenu compte de ces préoccupations. Dès le départ, nous avons craint que l'existence même du paragraphe 429(2) soit à l'origine de l'inquiétude qu'avaient certaines personnes, c'est-à-dire que le fait de supprimer les mots faisait en sorte que les moyens de défense ne s'appliquaient plus. Tout au long du débat, le ministère a soutenu que les moyens de défense s'appliquaient toujours. Par conséquent, on trouve dans l'amendement de la Chambre des communes des renvois aux moyens de défense qui existent déjà, tout en évitant de créer une nouvelle série de moyens de défense. Nous espérons que cela aura pour effet d'atténuer le besoin de faire la même chose la fois suivante et la fois d'après, ce qui continuerait de faire naître les inquiétudes selon lesquelles l'absence des mots fait en sorte que la personne n'a pas de moyens de défense. Nous ne croyons pas que cela soit vrai.

Le président: Monsieur Macklin, je veux passer aux autres amendements. Peut-être pourrais-je commencer par poser une question; puis d'autres sénateurs souhaitant participer aux débats pourront intervenir. Sénateur Grafstein, vous vouliez d'abord ajouter quelque chose?

Le sénateur Grafstein: Ce n'est pas à ce sujet; je veux soulever une question générale. C'est la dernière réponse de M. Macklin qui me l'a inspirée. Je ne suis pas membre du comité, et je viens tout juste d'être mis au courant des enjeux. Il est possible que je ne sois pas au courant des ramifications techniques. Vous avez dit que les agriculteurs, les pêcheurs et les chercheurs du monde médical sont satisfaits. Les personnes qui se livrent à des abattages rituels, les clercs de la communauté musulmane et les rabbins de la communauté juive sont-ils satisfaits? Les Autochtones sont-ils satisfaits?

M. Macklin: Le ministre a pris la parole devant le Congrès juif canadien il y a un peu plus d'une semaine. Dans le cadre de ces discussions, il croit être parvenu à rassurer les membres de la communauté juive: aux termes de la loi, les procédures rituelles seront autorisées, et il n'y aura pas de problème. À ma connaissance, personne n'a affirmé le contraire. Je n'ai pas fait de sondages particuliers — j'ignore si le ministère l'a fait -, mais je ne connais personne de l'un ou l'autre de ces groupes qui dit craindre que le projet de loi, dans sa forme actuelle, posera les problèmes de cette nature.

Le président: Voilà qui me conduit peut-être à la question que j'allais poser au sujet de l'alinéa 182.2(1)c). Des représentants du ministère de la Justice nous ont dit, au début de notre étude, que le projet de loi n'entraînerait pas la création de nouvelles dispositions. En fait, il visait à rendre plus sévères les pénalités imposées aux personnes qui font preuve de cruauté envers les animaux, soit une politique et une philosophie que le comité approuverait et appuierait. À l'examen de l'alinéa 182.2(2)c), on constate cependant que le projet de loi crée une nouvelle disposition. En effet, il se lit comme suit: «Commet une infraction quiconque, volontairement ou sans se soucier des conséquences de son acte, tue un animal sans excuse légitime». Ce n'est pas dans l'ancien projet de loi.

Dans l'ancien projet de loi, on trouve deux dispositions concernant le fait de tuer des animaux — l'une concerne les animaux élevés à des fins commerciales, et l'autre, les animaux domestiques. La disposition que je viens de citer crée une nouvelle infraction en rapport avec le fait que de tuer un animal sauvage. Des représentants du ministère de la Justice nous ont dit que la personne qui se rend coupable d'une telle infraction peut ensuite invoquer la deuxième partie de la phrase qui dit qu'on peut le faire avec une excuse légitime.

Dans des circonstances ordinaires, nous aurions tendance à penser, par exemple, que le chasseur de Terre-Neuve qui tue un orignal — et qui, ce faisant, respecte la loi, c'est-à-dire qu'il possède un permis en bonne et due forme et qu'il se trouve dans une région où la chasse est permise à une époque de l'année où elle l'est — a une excuse légitime. Cependant, nous avons soulevé auprès des représentants du ministère de la Justice l'application possible de l'arrêt R. c. Jorgensen, dans lequel le juge Sopinka a affirmé qu'on ne peut invoquer l'utilisation d'un permis provincial à la suite d'une infraction aux termes d'une loi fédérale, comme le Code criminel.

Voilà pourquoi nous avons étudié en détail avec ces représentants la présence de la disposition dans le projet de loi. On nous a dit qu'elle avait pour but d'inclure le fait de tuer un animal sans nécessité, aspect qui, selon eux, n'était pas visé par l'alinéa 182.2(1)a), où on lit: «...causée une douleur, souffrance ou blessure, sans nécessité». Certains d'entre nous sont d'avis que la mort de l'animal constitue la blessure ultime et que cet aspect est touché ici. Cependant, pour rassurer les représentants du ministère de la Justice — sans pour autant créer une nouvelle disposition —, nous avons proposé un amendement ayant pour effet d'ajouter aussi les mots «mort sans nécessité», ce qui aurait pour effet d'importer tous les moyens de défense définis par le juge Lamer dans l'arrêt Menard.

Les Communes, sans vraiment de raison, ont catégoriquement et totalement rejeté ce raisonnement.

M. Macklin: Au meilleur de ma connaissance, deux moyens de défense étaient en cause. L'un concerne le fait de causer une douleur sans nécessité, et l'autre, celui de tuer sans excuse légitime. Je crois que les deux existent déjà et que, en fait, nous ne faisons que les codifier de cette façon. Quant à ce que le ministère a dit auparavant, je vais laisser à Mme Klineberg le soin de répondre à la question.

Le président: Pour que tout soit bien clair, monsieur Macklin, personne ne conteste le fait qu'il est interdit de tuer un animal de façon sauvage, méchante ou cruelle. Là n'est pas le problème. Le problème, c'est que des personnes qui, dans le cadre de leurs activités ordinaires normales, tuent les animaux par des moyens autorisés, par exemple la chasse, risquent d'avoir des ennuis si elles brandissent leur permis provincial à titre d'excuse légitime. Des représentants du ministère de la Justice nous ont dit de ne pas nous en faire à ce sujet parce que le droit de chasser est reconnu en common law.

Si, en revanche, nous codifions l'infraction et que nous en faisons une infraction pénale au Code criminel, je ne serais pas trop à l'aise à l'idée de me fier à une défense en common law pour une infraction désormais codifiée.

M. Macklin: Je vais laisser à Mme Klineberg le soin de répondre au nom du ministère.

Le sénateur Adams: Mme Klineberg a déjà comparu devant nous à cinq ou six reprises. À écouter les représentants du ministère, on a l'impression d'un disque qui saute. À titre d'avocate, elle nous a répété la même chose. Nous n'allons nulle part. Ce qu'on nous a dit figure au compte rendu. Je pense que la seule chose qu'il leur reste à faire, c'est de me dire pourquoi.

Le président: Monsieur Macklin, je me rends compte que vous allez devoir faire appel à des représentants pour certaines questions techniques. Cela ne me pose pas de problème, et je crois qu'il en va de même pour les autres sénateurs. Pour en revenir au problème du sénateur Adams, je vais vous poser une question précise sur la façon dont vous avez abordé la question à la Chambre des communes.

L'un des points que vous avez soulevés en rapport avec le présent amendement, c'est que l'utilisation de l'expression «causer la mort sans nécessité» était illogique et prêtait à confusion. Peut-être pourriez-vous faire quelques commentaires à ce propos?

M. Macklin: La plupart des groupes d'intérêts ont tenté de nous empêcher de faire des amendements qui, de leur point de vue, ont pour effet de modifier la situation dans laquelle ils se sentent à l'aise. Ils estiment que les expressions et mots divers ont fait l'objet d'interprétations judiciaires.

En ce qui concerne cette disposition en particulier et l'allusion à la notion de «sans nécessité», on a utilisé «sans nécessité» en relation avec la douleur. Compte tenu de l'objectif recherché, elle signifie «plus de douleur que nécessaire». C'est généralement ainsi qu'on a interprété les choses.

Une fois qu'on prend une expression et qu'on la recrée à titre descriptif, elle devient de toute évidence ouverte à de nouvelles interprétations ou à certains transferts de l'interprétation initiale concernant la douleur. Dans ce cas-ci, le transfert ne fonctionne simplement pas du point de vue du fait de causer de la douleur «sans nécessité» puisque la seule question pertinente est de savoir si on avait une bonne raison de tuer. Aux fins d'application de la plus grande partie possible de cette disposition, nous avons jugé que le transfert de la notion de «sans nécessité» ne faisait pas l'affaire. Ce n'est pas une notion qui surgirait nécessairement dans le cours naturel d'une interprétation.

Le président: Le problème, monsieur Macklin, c'est que les mots «sans nécessité» importent effectivement les moyens de défense auxquels on ferait normalement appel à la suite de l'arrêt Menard, selon le juge Lamer. Les mots «sans nécessité», n'ont pas été utilisés là au hasard; on les y a mis à cette fin précise.

Je voudrais aussi vous demander ce que vous pensiez de la l'arrêt Jorgensen. Il s'agit, je vous le concède, d'une affaire qui concerne la distribution de matériel pornographique, laquelle impliquait un détaillant autorisé à faire de la distribution par la province de l'Ontario. Il a fait l'objet de poursuites, et un juge de la Cour fédérale a statué qu'il ne pouvait invoquer un permis provincial puisqu'il avait enfreint un code fédéral.

M. Macklin: Dans ce cas, je préférerais m'en remettre à Mme Klineberg pour la réponse, étant donné qu'elle est de nature technique et qu'on a établi qu'il s'agit d'une question ministérielle.

Le président: Avez-vous réfléchi à la nécessité d'inclure un moyen de défense entièrement nouveau pour le fait de tuer un animal? Vous êtes-vous demandé pourquoi il était dans le projet de loi?

Notre problème avait trait à la nouvelle infraction attachée à la disposition: la personne qui tue un animal sauvage a commis un crime. Si on vous poursuit, vous pouvez passer à l'étape suivante et dire que vous aviez une excuse légitime. L'alinéa 182(1)a), où on dit qu'on ne peut causer une blessure sans nécessité, n'aurait-il pas suffi? La mort sans nécessité d'un animal ne constitue-t-elle pas la blessure ultime?

M. Macklin: Il s'agirait, bien entendu, de la blessure ultime. Dans ce cas particulier, quelqu'un pourrait tuer un animal sans lui causer de douleur allant au-delà de ce qui est nécessaire. Je pense qu'on crée ainsi une infraction séparée et distincte, sans qu'on doive nécessairement déterminer l'application de la douleur dans ce cas particulier — en d'autres termes, tenter d'établir des degrés de douleur. C'est plutôt clair: si vous tuez l'animal, faites-le de la façon la plus humaine possible et assurez-vous d'avoir une excuse légitime, et vous n'aurez pas à passer par la procédure d'établissement de la preuve prescrite à l'alinéa 182.2(1)b).

Le président: Avant de passer au sénateur Cools, peut-être Mme Klineberg pourrait-elle faire un commentaire au sujet de l'arrêt Jorgensen.

Mme Klineberg: Votre compréhension de l'arrêt Jorgensen est tout à fait exacte. Le fait de brandir un document provincial ne constitue pas en soi une excuse légitime. Le fait que le document en question délivré par la province ne constitue pas une excuse légitime ne veut toutefois pas dire qu'il n'y a pas d'excuse légitime. Tout ce que dit l'arrêt Jorgensen, c'est que le document ne constitue pas en soi l'échappatoire permettant d'éviter la prison.

Cependant, absolument rien n'empêche un accusé d'invoquer d'autres arguments pouvant servir d'excuse légitime. Le droit de chasser reconnu en common law remonte à des lustres.

Le président: Nous avons déjà fait le tour de cette question. Si l'infraction est codifiée, comment s'en remettre à une défense en common law?

Mme Klineberg: On ne pourrait codifier que la chasse ne constitue pas une activité légitime que si le Parlement affirmait clairement que telle est son intention.

Le président: Nous venons tout juste de dire ici: le fait de tuer un animal est une infraction.

Mme Klineberg: Le fait de tuer un animal sans excuse légitime.

Le président: L'excuse légitime ne fonctionne pas à cause de Jorgensen. Mais il faut alors s'en remettre au droit en common law, mais vous allez codifier l'infraction. Et voilà que vous voulez vous en remettre à une défense en common law?

Mme Klineberg: Dans le Code criminel, on précise que le fait de tuer «volontairement» des bestiaux constitue une infraction. Pourtant, on le fait tous les jours dans des centaines d'exploitations agricoles du pays. Il y a des façons d'invoquer des moyens de défense en common law, des interprétations permettant d'excuser des actes qui, en soi, ont l'apparence de crimes. Le fait de tuer volontairement des bestiaux ne constitue pas en soi la fin de l'histoire puisqu'on a une justification légale de le faire.

De la même façon, tuer un animal sauvage n'est pas la fin de l'histoire. Le Parlement a pris une précaution additionnelle en assortissant la disposition où est définie l'infraction des mots «sans excuse légitime». Cela a pour effet de nuancer l'infraction. Il ne s'agit pas d'une codification directe faisant une infraction du fait de tuer des animaux, un point c'est tout.

On assortit la disposition des mots «sans excuse légitime», et je suis d'avis que cela n'équivaut pas à codifier le fait de tuer des animaux sauvages, comme vous le laissez entendre. La disposition est nuancée et s'inspire de formulations qu'on trouve aujourd'hui dans le Code criminel. Tuer des animaux élevés à des fins légitimes sans excuse légitime. Le fait d'euthanasier des animaux ou de tuer des animaux utilisés à des fins de recherche est visé par la notion d'excuse légitime.

Le président: Madame Klineberg, je ne crois pas avoir entendu quoi que ce soit de nouveau par rapport à ce que vous avez déjà dit. Je suppose que nous allons devoir nous entendre pour ne pas nous entendre à ce sujet.

Le sénateur Andreychuk: Je continue d'entendre dire qu'il y a une nouvelle infraction et qu'il y a la notion d'excuse légitime, ce qui n'a rien de nouveau, parce que la notion d'excuse légitime fait partie de la définition. Une fois qu'on introduit une nouvelle infraction en ces termes, on ne peut induire naturellement que l'excuse légitime aura la même signification.

Voilà la question à laquelle on semble incapable de nous répondre. On semble laisser croire qu'on ne pourrait jamais y prêter une telle interprétation. Eh bien, soit dit en passant, en tout respect, c'est l'opinion du ministère. Je ne m'explique pas du tout comment la Chambre des communes en est arrivée à une telle opinion puisqu'il ne s'agit pas de la réponse définitive devant la Cour. On peut l'espérer, mais on ne peut pas y compter. Nous cherchions simplement à clarifier les choses.

Le sénateur Cools: Je tiens à souhaiter la bienvenue à M. Macklin. Pour moi, il est très inhabituel de l'accueillir devant un comité. Je lui souhaite la bienvenue et je lui dis que c'est toujours avec plaisir que je retrouve des concitoyens de l'Ontario au comité. De nombreux membres ne le savent peut-être pas, mais M. Macklin a remplacé Christine Stewart à titre de député une fois qu'elle s'est retirée de la politique avec un grand «P».

Je tiens aussi à dire que, au sein du comité, nous nous sentons un peu privés de débat parlementaire et ministériel. Le ministre n'a pas débattu en long et en large de cette question avec nous. Il y a un très grand nombre de questions auxquelles nous souhaitions obtenir réponse. J'estime qu'il est malheureux que le ministre ne soit pas venu auparavant. Vous risquez peut-être de faire les frais du gros des questions qui demeurent sans réponse. Dites-vous que nous attendons depuis longtemps l'occasion d'échanger avec un ministre.

Par ailleurs, et j'en reviens à ce que le sénateur Adams a dit il y a quelques instants, nous avons entendu les avocats du ministère s'exprimer abondamment à quelques reprises.

S'ajoute à cela le fait que la réunion d'aujourd'hui ne concerne pas la position du ministère. Si on vous a invité ici, monsieur Macklin, c'est moins à titre de ministre que de député de la Chambre des communes puisque c'est une décision, un message de la Chambre des communes, que nous avons devant nous. Dans les faits, monsieur le président, Mme Klineberg n'a aucune autorité constitutionnelle d'exprimer la volonté de la Chambre des communes. Elle est libre de fournir des conseils...

Le président: Avec votre permission, Cools, le comité a tous les droits, constitutionnels et autres, de convoquer tout témoin qu'il lui plaît d'entendre. Au début de la réunion, avant même qu'elle ne débute, M. Macklin m'a informé du fait qu'il avait demandé à Mme Klineberg de lui venir en aide en rapport avec certains détails plus techniques du projet de loi. Je ne crois pas que ce genre de raisonnement vous mène nulle part. Vous aviez une question?

Le sénateur Cools: Monsieur le président, vous m'avez interrompue au beau milieu d'une phrase. Ce que je voulais dire, c'est que la position constitutionnelle de la comparution d'aujourd'hui est différente de celle des comparutions précédentes en raison des éléments que nous cherchons à recueillir ici. Nous connaissons très bien la position du ministère et celle du ministre. Ce que nous cherchons à comprendre ici, c'est la nature du désaccord entre la Chambre des communes et nous. Voilà la question qui se pose au comité. Je me demandais simplement si nous pourrions orienter la conversation dans ce sens puisque tout renseignement que vous nous communiquerez est susceptible de nous rendre service.

Je suis certaine que M. Macklin est au courant du fait que le projet en question fait l'objet depuis longtemps de toutes sortes de difficultés. Je suis convaincue qu'il a à cœur de remédier à certaines de ces difficultés.

En ce qui concerne les questions que notre président a soulevées à propos de l'amendement no 2, nous avons eu à cet endroit-ci un débat considérable à ce sujet. Ce que nous cherchions à faire au moyen de cet amendement — que la Chambre des communes a rejeté, et c'est précisément ce que je cherche à comprendre - , c'était d'atténuer la portée de cette nouvelle disposition qui, essentiellement, crée une interdiction générale de tuer les animaux. C'est totalement nouveau. C'est ce que le président disait en parlant d'une nouvelle loi et d'une nouvelle disposition.

Si vous avez eu l'occasion d'examiner les témoignages, vous savez que nous avons eu un long échange avec M. Mosley sur ces questions. À l'époque, il a fait référence au rapport de la Commission de réforme du droit, dans lequel on recommandait une interdiction générale du fait de tuer des animaux. Il y a eu à ce propos un long débat au comité: en effet, nous craignions que la nouvelle disposition ne s'inscrive dans un nouveau cadre conceptuel, un nouveau cadre juridique et aussi une nouvelle structure du Code criminel. À mon avis, il n'est ni utile, ni suffisant de dire que, en dépit d'un tel changement majeur, l'ancien système de common law avec les droits historiques de chasse et de jouissance des largesses de la nature n'avait pas bougé. Il n'est pas possible que tout change à propos de telle ou telle situation et qu'un élément unique demeure stable.

Il s'agit d'un si petit amendement — tuer un animal sans excuse légitime. Dans mon esprit, il ne fait aucun doute que le mode de vie de nombreuses personnes sera touché par cette disposition. Comme le montre le cadre conceptuel du projet de loi, il s'agit du nouvel environnement juridique dans lequel on crée, dans une nouvelle section du Code criminel, une nouvelle espèce appelée «animaux». Sagement, nous nous sommes dit que le fait de supprimer cette ligne en particulier aurait pour effet de protéger les nombreuses personnes dont le sort nous préoccupait.

Je pense que nous sommes d'accord avec vous, monsieur Macklin, pour dire que nous en sommes arrivés à une ère différente et plus humaine en ce qui concerne le traitement des animaux. Cependant, on ne voudrait pas qu'un agriculteur qui se met à abattre des lapins qui prolifèrent dans des proportions épidémiques sur sa propriété fasse l'objet de poursuites pour ce motif.

Monsieur Macklin, vous devez savoir que nous avons voté sur de nombreuses lois. Je n'ai pour ma part aucun doute à propos de la nouvelle culture dont on cherche à doter le pays, où toutes les armes sont interdites et où la chasse n'est plus considérée comme une activité socialement acceptable, et ainsi de suite. On nous le répète souvent ici.

De même, monsieur Macklin, je me suis donné pour tâche de lire une bonne part de la propagande qui entoure la création du projet de loi et de ce qui a été dit...

Le président: Pardonnez-moi, sénateur Cools. Dans l'intérêt de gagner du temps — et nous y reviendrons si vous le voulez —, pourriez-vous en venir à la question?

Le sénateur Cools: Ma question est la suivante: dans quel état d'esprit les députés de la Chambre des communes étaient-ils lorsqu'ils ont choisi de rejeter l'amendement que nous avons fait en supprimant l'interdiction générale? Nous voulions protéger — à l'intention des Autochtones et des non-Autochtones ordinaires — d'anciens droits historiques de jouir des largesses de la nature, comme le juge Lamer l'a indiqué dans Menard. C'est dans cet état d'esprit que les membres du comité et le Sénat ont adopté notre proposition.

M. Macklin: Merci, sénateur. D'abord et avant tout, je ne crois pas que toutes les armes soient interdites ni que nous nous trouvions dans une telle situation. J'espère sincèrement que non.

Le sénateur Cools: Pas encore.

M. Macklin: Je me plais à croire qu'il n'en est rien. En ce qui concerne vos commentaires, il est certain que nous attendons avec impatience le jour où il n'y aura plus d'incidents comme celui qui s'est produit dans la circonscription. C'est l'un des incidents à l'origine de notre décision de revenir sur ce programme. Un jeune homme, dans un village appelé Bewdley, a décidé de tirer un chien derrière son camion et a littéralement usé les coussinets sous les pattes de l'animal. C'était un terrible incident.

Nous cherchons tous ici à en venir au fond du problème: que faire de ceux qui maltraitent des animaux? Je comprends que vous teniez — et je crois que nous sommes tous d'accord — à ce que les personnes qui utilisent les animaux de façon légitime puissent continuer de le faire. Dans le cadre de ces procédures, ces personnes doivent se préoccuper de la mort des animaux en question. Nous tenons à établir clairement comment les choses peuvent se passer. Bien entendu, nous essayons d'établir une façon humaine de faire face à cette situation. Si la méthode utilisée n'est pas humaine, on envisagera de toute évidence d'intenter des poursuites en application de l'alinéa 182.2(1)b).

Si on tente de saisir le sentiment de l'autre endroit et l'intention qui sous-tendait les mesures prises, vous devriez savoir que les députés sont d'avis que, au pays, il existe des façons de composer avec l'ensemble des pratiques professionnelles et industrielles reconnues. Ces pratiques constituent elles aussi une cible mouvante. En d'autres termes, les données scientifiques s'améliorent, au même titre que les méthodes. Je me souviens de l'époque où je vivais à la ferme. Avec l'avènement de nouveaux mécanismes, des anesthésiques, et ainsi de suite, les méthodes utilisées pour écorner le bétail et effectuer certaines autres tâches sur la ferme ont, à maints égards, changé au fil du temps.

En examinant la question, nous devons définir les limites qui seront imposées et les autres actes permis. On doit en somme définir les excuses légitimes. Les deux Chambres réussiront-elles un jour à établir de façon définitive des dispositions que les tribunaux n'interpréteront que dans un seul et même sens? Pour ma part, je suis d'avis que des personnes raisonnables divergeront d'opinion. Nous n'allons jamais trouver de réponse absolue qui donne satisfaction à tout le monde. À la Chambre, nous pensons que l'excuse légitime comprendra toutes les procédures normales qui, historiquement, auraient été protégées en vertu des moyens de défense en common law.

Nous pensons que l'excuse légitime est à la base de notre Code criminel, et il s'ensuit logiquement qu'elle devrait s'appliquer aux dispositions en question. Il n'est pas déraisonnable d'inclure dans le projet de loi une disposition qui rende compte de telles croyances. C'est pourquoi le comité de l'autre endroit et nous aussi avons jugé bon de trouver un moyen de faire passer cette idée.

Nous tentons toujours de parvenir à un équilibre. En allant de l'avant, nous tenons à préserver le passé le plus possible. Pourtant, nous tenons à ce que les choses soient le plus claires possible. Dans le cadre du processus, on a, jusqu'à un certain point, apprécié la clarté que l'amendement proposé par le Sénat apportait à la définition d'«animal». Là, vous avez clarifié les choses, cela ne fait aucun doute. À l'autre endroit, bien entendu, on a étudié la possibilité d'adopter une vision élargie qui s'appliquerait à des changements futurs des données scientifiques et de la compréhension qu'on a des animaux. Cependant, vous avez, dans l'intérêt de la clarté, soulevé un point concernant la définition d'«animal» qui m'apparaît à moi des plus importants. Des deux côtés, on cherche à faire en sorte que les moyens de défense historiques demeurent disponibles.

J'ai présenté du mieux que j'ai pu la position de la Chambre et les sentiments des députés. En d'autres termes, il existe une excuse légitime historique. Comment devrait-on exprimer cette excuse en droit? On l'exprime en incluant un moyen de défense, qu'il s'agisse du paragraphe 8(3) ou du paragraphe 429(2). La Chambre a jugé que l'article 8(3) était plus général, mais chacun est libre d'interpréter les choses à sa façon.

Tel est donc le sentiment général à la Chambre. Dans la mesure du possible, nous avons tenté de faire en sorte que les choses demeurent claires et simples. Comme nous le savons, il n'est pas toujours facile d'y parvenir lorsqu'on apporte des changements.

Le sénateur Joyal: Dans les discussions que vous avez eues avec vos collègues de la Chambre, avez-vous tenu compte du rapport de la Commission du droit du Canada sur les amendements précis du Code criminel? Cette commission affirme clairement que le code, par exemple, ne fait pas une infraction du fait de tuer des animaux parce qu'un tel message serait fortement dilué par toutes les exceptions applicables. On tiendrait de telles dispositions pour hypocrites en théorie et inéquitables en pratique. On met plutôt l'accent sur l'idée centrale de cruauté sans nécessité, et on cherche moins à protéger et à préserver la vie des animaux qu'à leur assurer un traitement humain.

La Commission du droit du Canada — qui nous a influencés — s'est dit qu'on pourrait protéger les animaux sans créer la nouvelle infraction qu'on retrouve maintenant dans la disposition amendée proposée. Pour des raisons évidentes, cette opinion a une influence sur notre réflexion, cela ne fait aucun doute. En ce qui concerne les questions touchant le Code criminel, la Commission du droit du Canada exerce une certaine autorité.

M. Macklin: Je ne connais aucun témoin ayant pris la parole à notre endroit — et je ne suis pas certain d'avoir épuisé toutes les possibilités au vôtre — qui ait laissé entendre que la disposition elle-même devrait être supprimée. Je n'ai aucun souvenir en ce sens. De toute évidence, nous avons le droit d'étudier et de débattre — c'est précisément ce à quoi sert l'endroit où nous nous trouvons. Cependant, la réalité est que, à ma connaissance, jamais les témoins n'ont soulevé une telle possibilité. Nos témoins nous en apprennent beaucoup. Nous comptons sur eux pour examiner les enjeux qui les préoccupent d'un œil critique.

La réponse réside peut-être dans la simplicité de ce que nous affirmons ici. La notion d'«excuse légitime» a peut-être pour effet de rassurer certaines personnes. Le moment venu d'établir la marche à suivre pour tuer des animaux, elles sauront ce qui est légitime au sens large. Elles auront une idée de ce que cela signifie. En d'autres termes, qu'essayons- nous de dire au moyen du projet de loi et des amendements? Nous tentons de clarifier les choses à l'intention des personnes qui sont visées. Le projet de loi ne devrait pas porter que sur les objets négatifs. D'un point de vue positif, la plupart des gens aimeraient voir un concept qui fait une place à leurs pratiques traditionnelles. C'est ce que fait l'alinéa c) pour eux.

Au moment où nous débattons de libellés juridiques extrêmement alambiqués que ceux d'entre nous qui connaissons le droit trouvent acceptables, de nombreuses personnes sont plongées dans la confusion. Je ne suis pas convaincu qu'il s'agisse de la seule solution possible lorsqu'on légifère. Les personnes confrontées à ces problèmes au jour le jour tiennent à avoir certaines garanties. La clarté et les garanties que donne l'article en question, dans sa forme actuelle, sont utiles.

Le président: L'un des problèmes qui se sont posés au comité vient de la décision rendue par le juge Dickson de la Cour suprême du Canada dans R c. Holmes. Il a dit que l'expression «sans excuse légitime» n'est, dans la plupart des cas, qu'une représentation des excuses ordinaires en common law que sont les faits erronés ou la contrainte. En fait, dans l'arrêt Holmes, la décision a été partagée sur la question de savoir si l'expression avait ou non une signification. Cette situation, lorsqu'il a été question d'invoquer un tel concept comme moyen de défense, a suscité une vive inquiétude chez des sénateurs.

Le sénateur Grafstein: Après avoir entendu M. Macklin à propos de la question des pratiques religieuses, je lui ai fait parvenir un mémoire — dont je vous ai remis copie, monsieur le président — où il est dit que le projet de loi suscite des inquiétudes au Congrès juif canadien.

J'ai lu le mémoire en question, et il m'a obligé à mettre les bouchées doubles parce que, depuis le début du débat sur ces amendements, nous n'avons pas eu le temps de réfléchir en profondeur. Je prends le train en marche, et je vous invite à me corriger si j'ai tort.

Voici ce qui me préoccupe en ce qui concerne l'excuse légitime par rapport aux pratiques religieuses. Un article de la Charte garantie la liberté de conscience et de religion. Dans le Martin's Annual Criminal Code, on trouve à ce propos un paragraphe fort éclairant sur l'article 2. Le paragraphe se lit comme suit:

Les effets des dispositions législatives sur les croyances ou les pratiques religieuses ne vont pas tous à l'encontre de la garantie offerte par l'alinéa 2a). La disposition en question n'empêche pas l'assemblée législative de restreindre la pratique de la religion.

Martin fait référence à l'arrêt R v. Jones, de 1986. Je n'ai pas encore eu l'occasion de voir si ce qui est dit s'applique à la situation présente. Cependant, je tiens à présenter les principes.

À propos du projet de loi antérieur, la ministre de la Justice de l'époque, l'honorable Anne McLellan, a déclaré que le projet de loi n'avait pas pour but de produire des conséquences ou des effets négatifs sur les pratiques religieuses au Canada. Je cite le mémoire que j'ai reçu hier du Congrès juif canadien. J'ai donc dû en revenir à la question de l'apparence de droit. De toute évidence, le Parlement a le pouvoir de restreindre l'exercice de la liberté de religion. La question est de savoir dans quelle mesure il est habilité à le faire.

Si on tient pour acquis qu'un clerc musulman ou un sacrificateur de bestiaux selon le rite juif suit la procédure normale, l'apparence de droit constitue-t-elle une défense absolue? Le Martin's Annual Criminal Code, à propos de la question de l'intention relativement à l'article 429 et à l'apparence de droit, dit: «Si la croyance n'a pas à être raisonnable, le caractère raisonnable de la croyance est un facteur dont on tient compte pour déterminer s'il y a une croyance honnête.» C'est le critère du caractère raisonnable. Puis on ajoute: «Cependant, il ne suffit pas que l'accusé ait une croyance morale dans une apparence de droit.» Ensuite, on définit l'apparence de droit. Au bout du compte, un rabbin qui procède à un abattage rituel a une croyance morale selon laquelle cette pratique est appropriée, comme elle l'est depuis des millénaires. En vertu de l'interprétation de l'apparence de droit, la moralité n'est pas suffisante, même pour la défense axée sur l'apparence de droit.

Je tiens donc pour acquis que les personnes qui vivent leur foi de cette façon particulière nourrissent certaines inquiétudes. Elles risquent fort que des militants pour les droits des animaux — dont les positions sont parfois extrêmes — les traînent devant les tribunaux. Ces personnes qui exercent leur foi de la même façon depuis des siècles, sinon des millénaires, pourraient faire l'objet de poursuites sans pouvoir invoquer l'apparence de droit comme défense.

Je suis préoccupé à la pensée que des citoyens qui se livrent à des pratiques dans le cadre de leur mode de vie et de leurs droits traditionnels, y compris les Autochtones, risquent soudain d'être aux prises avec des difficultés aux termes du Code criminel. Je n'aime pas utiliser les mots «droits des minorités». Cela fait partie des droits ancestraux. En effet, ces personnes peuvent faire l'objet de poursuites pénales et devoir comparaître devant la cour pour défendre leurs pratiques.

La Chambre a beaucoup réfléchi à cette question — et je le dis sans méchanceté. Comment pouvons-nous donner aux personnes de certaines confessions l'assurance que les tribunaux ne viendront pas s'ingérer dans leurs pratiques religieuses?

M. Macklin: D'abord, il y a une loi fédérale dans laquelle l'abattage rituel est défini. Je veux parler des Règlements sur l'abattage sans cruauté.

Le sénateur Grafstein: Il s'agit de règlements, n'est-ce pas?

M. Macklin: Oui. Il y a au pays une loi où sont définies les modalités de l'abattage rituel. En fait la pratique repose non seulement sur la moralité, mais aussi sur le droit. Lorsqu'on conjugue le droit aux garanties offertes par l'article 2 de la Charte, on aboutit à un large éventail de moyens de défense et de garanties à ce propos. Je crois que les personnes qui s'adonnent à ce genre d'activité donneront toujours l'impression d'avoir certaines inquiétudes parce que, dans le monde d'aujourd'hui, le recours aux tribunaux semble être l'une des principales préoccupations périodiques que nous ayons, cela dit de façon très générale.

En toute franchise, nous ne pouvons pas donner de garanties. Si on accepte le fait que nous avons des dispositions législatives — on ne s'appuie donc pas uniquement sur des pratiques religieuses historiques — qui le permettent, alors, oui, il y a des règlements. À mon avis, c'est la loi. Il y a aussi l'article 2 de la Charte. Je pense que les personnes qui s'adonnent à des pratiques rituelles bénéficient d'une protection raisonnable.

Le sénateur Grafstein: Dans le mémoire, on laisse entendre qu'il faudrait préciser, pour plus de certitude, que la loi ne fera pas l'objet d'abus. Je tiens votre déclaration pour valable. On n'a pas l'intention, ni en droit ni en pratique, d'intenter des poursuites contre les personnes, qu'elles soient de confession musulmane ou juive, qui, conformément à leurs croyances religieuses, procèdent à des abattages rituels. C'est l'intention que je crois déceler dans la déclaration claire de l'ex-ministre.

La suggestion faite par le congrès dans son mémoire pour éliminer ne serait-ce que la moindre trace d'inquiétude était que le ministre fasse à la Chambre une déclaration à ce sujet — ce que, je crois, il n'a pas fait. En outre, le ministre devrait préciser qu'il n'a pas l'intention d'autoriser de telles poursuites, que l'autorisation du procureur général serait requise pour que de telles poursuites soient entamées et que ce dernier refuserait de donner son accord. Par conséquent, une telle déclaration équivaudrait à une interdiction totale des procédures vexatoires.

Ne s'agirait-il pas d'un moyen salutaire de donner aux groupes confessionnels l'assurance que leurs pratiques historiques ne seront pas discréditées devant les cours pénales?

M. Macklin: Je crois comprendre que le ministre prend des dispositions pour faire une telle déclaration devant la Chambre. Il fera cette déclaration devant la Chambre. Le projet de loi a quitté la Chambre, et il doit trouver un moyen adéquat de faire la déclaration en question. On me dit qu'il va le faire. J'espère que cela vous rassure.

Le sénateur Watt: Dans le même ordre d'idées que les questions soulevées par le sénateur Grafstein, mais moins en rapport avec l'aspect religieux, ma question porte davantage sur les moyens de subsistance des gens. Par «moyens de subsistance des gens», je veux parler de la vie de tous les jours des chasseurs. Je m'inquiète pour eux non seulement parce qu'ils sont des chasseurs, mais aussi parce qu'ils n'ont pas d'autres moyens de nourrir leur famille. Je veux parler des Autochtones.

Ils ont recours à leur équipement traditionnel pour des fins et des raisons diverses. Bon nombre d'outils traditionnels utilisés par des Autochtones — en particulier les Inuits du Nord — sont utilisés à des fins de conservation: on évite de gaspiller du temps, de l'énergie et des espèces sauvages. Je crois que la loi ne reconnaît pas assez la façon dont nous menons nos activités traditionnelles, du point de vue de la reconnaissance des activités en question — au point même où les législateurs ne les comprennent peut-être pas bien.

Pour cette raison, nous avons essayé sincèrement de proposer un amendement qui fait qu'un Autochtone, dans la mesure où il est accusé dans le contexte, peut compter sur un moyen de défense raisonnable. Il n'existe pas, en droit, un grand nombre de dispositions qui sont conçues clairement pour que les Autochtones puissent se protéger, bien que nous ayons conclu une entente particulière avec le gouvernement du Canada et avec la province touchée.

Nous ne pouvons compter que sur cette entente et sur l'article 35 de la Constitution. Ce sont nos seules «bibles». Nous n'avons rien d'autre. Le projet de loi menace grandement les chasseurs autochtones qui essaient de gagner leur vie, pour nourrir leur famille. Le chasseur serait considéré d'emblée comme étant cruel envers l'animal, même si ce n'est pas là son intention. Le seul recours aux instruments traditionnels ferait que ses actes seraient interprétés de cette façon.

Si le projet de loi sous sa forme actuelle est adopté, il y aura des mesures d'exécution et une réglementation qui seront instaurées au sein des communautés. La loi pourrait également servir de tremplin aux groupes de défense des droits des animaux, dont les activités ont eu sur nous une incidence énorme, dans nos territoires — notre terre inuite. De fait, dans tout l'Arctique, il y a eu un incroyable génocide, et cela pourrait survenir à nouveau.

Le projet de loi que conçoit le gouvernement sera sans nul doute exploité à cette fin, car on ne comprend pas bien ou on s'en balance. Comment allons-nous nous protéger une fois que vous aurez éliminé l'amendement que nous avons essayé de faire adopter? Le ministère de la Justice a affirmé, sans aucune équivoque, qu'il ne souhaite pas que nous adoptions un système double. Cela ne serait pas possible; nous ne saurions établir une loi distincte qui soit adaptée au cas particulier du Nord. Le Nord diffère du Sud par la manière dont les gens y vivent et y travaillent. Voilà un projet de loi qui est de nature à inquiéter.

Qu'est-ce que vous pouvez me dire pour me rassurer aujourd'hui, maintenant que l'amendement a été éliminé? Est- ce qu'il y a une loi dont je ne suis pas au courant et qui pourrait nous protéger?

M. Macklin: Merci, sénateur. Je suis sensible à cette question. De même, je me soucie de l'amendement, et nous pourrions le prendre de deux façons. Une des idées que nous avons envisagées, c'était d'établir une norme différente pour les Autochtones tout au long de notre démarche, de sorte que le projet de loi pourrait être interprété de cette façon. Selon nous, il n'y avait pas lieu de croire que vous souhaitiez être traités différemment en ce qui concerne la cruauté envers les animaux, la chasse de subsistance et les cérémonies. Nous avons donc cru qu'il y avait là une façon de vous protéger du point de vue, comme vous le dites, des nécessités et des cérémonies. Sur d'autres aspects, comme je viens de le souligner au sénateur Grafstein, le règlement relatif à l'abattage sans cruauté, qui découle d'une loi fédérale, prévoit la possibilité que quelqu'un participe au processus en question et tient celui-ci pour légitime en droit.

Autrement, de manière générale, notre Chambre est d'avis que l'article 35 permettrait d'invoquer une bonne défense et que les motifs justifiant votre action seraient solides. Pour ce qui est des poursuites privées, la Chambre a reçu depuis un an des amendements relatifs à l'alinéa 15a) qui, si je ne m'abuse, oblige quiconque intente une poursuite privée à convaincre le procureur général ou son représentant que sa cause se justifie — qu'elle n'est ni futile ni vexatoire.

Nous sommes heureux de savoir que le projet de loi comporte maintenant cet aspect, car c'est une forme de protection qui n'existait pas auparavant. Nombre de gens se soucient de ce que des groupes privés intentent des actions que la plupart considéreraient comme obstinées et pas nécessairement dans l'intérêt du pays. C'est établi parce que nous avons pour objectif de protéger nos gens, généralement, des poursuites dites frivoles, vexatoires.

Quant à l'article 35, le fait que nous ayons une loi fédérale portant sur les rites et cérémonies, et le fait que nous ayons une forme de protection en cas de poursuites privées, laisse voir que vous auriez des raisons d'être rassuré.

Le sénateur Watt: Si je vous ai bien compris, vous êtes d'accord avec moi et avec l'amendement, mais vous ne voulez pas qu'on l'intègre à la loi. C'est bien ce que vous dites?

M. Macklin: Je ne dis pas que je suis d'accord avec l'amendement, car, à mon avis, du point de vue des gens de l'autre endroit, il tend à donner l'impression que vous, en tant que peuple, pourriez vous assujettir à une norme différente de celle qui est énoncée dans les amendements du projet de loi. Voilà ce qui inquiète.

Le sénateur Watt: Êtes-vous d'avis que, comme nous avons conclu une entente et que nous avons la Constitution, cela vaut mieux que ce que nous essayons de proposer? Estimez-vous qu'il s'agit d'une exemption totale dans ce cas?

M. Macklin: Une exemption totale dans quel cas?

Le sénateur Watt: Le fait de ne pas considérer l'amendement comme nous l'avons fait, mais plutôt de prendre en considération l'entente conclue et l'invocation de l'article 35, qui décrit les droits dont nous disposons en vertu de la Constitution. Êtes-vous en train de dire que nous sommes déjà exemptés, de sorte que nous devrions essayer de nous intégrer au processus?

M. Macklin: Je ne laisse aucunement entendre sais que vous êtes exempté.

Le sénateur Watt: J'essaie de comprendre.

M. Macklin: J'affirme que les protections existantes sont, justement, existantes. Si vous allez tuer un animal de façon cruelle ou volontaire, c'est le même critère qui s'appliquerait à vous; vous seriez tout aussi responsable que quelqu'un d'autre.

Par contre, si on songe à vos besoins fondamentaux, on sait que vous êtes protégé en vertu de l'article 35. Il y a un règlement qui prévoit une forme de protection pour les cérémonies et les rites, et il y a aussi l'entente. J'affirme que, pour ce qui est de la législation de vos pratiques quotidiennes en droit, je crois que le gouvernement a mis en place les mesures de protection les plus rigoureuses qu'il peut en ce moment, sous réserve de la conformité avec les principes énoncés dans ce projet de loi en particulier.

Je crois qu'il n'y a rien qui, d'une façon ou d'une autre, dispenserait les Autochtones de l'obligation de s'adonner sans cruauté à la chasse ou à la pêche. Cette loi — si jamais cela devient une loi — vous oblige clairement au même titre que d'autres personnes. Par contre, il existe pour vous des mesures de protection générale qui servent à légitimer — qui vous donne une excuse légitime, si vous voulez— toutes les autres pratiques auxquelles vous vous adonnez normalement, notamment pour assurer votre subsistance.

Le sénateur Nolin: J'ai une question à propos du paragraphe 429(2). La Chambre des communes admet en principe notre amendement concernant l'apparence de droit, mais vous n'êtes pas d'accord avec notre façon de procéder.

M. Macklin: C'est cela.

Le sénateur Nolin: Dites-moi pourquoi vous refusez que l'article 429 inclue les nouveaux articles du projet de loi? L'article 429 se lit actuellement comme suit: «nul ne peut être déclaré coupable d'une infraction visée aux articles 430 à 446 s'il prouve qu'il a agi avec une justification ou une excuse légale et avec l'apparence de droit.» Dans l'amendement que vous proposez, pourquoi ne pas intégrer au paragraphe 429(2) les nouveaux articles?

M. Macklin: Je suppose que c'est une option possible, mais, en fait, nous croyions que le simple fait d'importer tous les moyens de défense dans cet article, comme nous le proposons, permet de répondre à toutes les préoccupations ainsi soulevées.

Le sénateur Nolin: Êtes-vous en train de dire qu'il s'agit là d'un renvoi?

M. Macklin: Oui.

Le sénateur Nolin: Vous êtes en train de dire que nous ne ferons cela que d'un côté, que le renvoi est tacite — ce n'est pas nécessaire.

M. Macklin: C'est un renvoi à une série d'articles. Nous disons que nous allons importer tous les moyens de défense. Dans notre libellé, ce sont les défenses qui sont mentionnées — nous ne renvoyons pas à des articles. Les moyens de défense exposés à cet article s'appliqueraient dans la mesure où ils se révèlent pertinents — voilà la question de la pertinence — relativement aux poursuites intentées dans le cas d'une infraction visée par cette partie. La position actuelle dont nous avons parlé plus tôt s'appliquait si nous prenions le passage au pied de la lettre; c'était probablement anticonstitutionnel — autrement dit, la partie sur l'inversion du fardeau de la preuve.

Le sénateur Nolin: L'article 429 est donc anticonstitutionnel?

M. Macklin: Il y a un cas qui porte à le croire.

Le sénateur Nolin: Il y a un autre cas qui donne à penser l'inverse. À notre avis, il était plus clair d'inclure la défense d'apparence de droit dans le nouvel article que d'invoquer une défense qui fait uniquement l'objet d'un renvoi dans la partie 11 du code. Nous souhaitons en faire un moyen de défense nouveau, avec le même libellé, pour le nouvel article que nous étions en train de créer dans le projet de loi. Voilà exactement l'intention que nous avions.

Il existe deux écoles de pensée à propos des moyens de défense prévus par la common law: il faut les inclure dans l'infraction; il n'est pas nécessaire de les inclure. Il y a la Cour d'appel du Manitoba et il y a la Cour suprême du Canada. Nous avions le choix. Nous avons décidé d'être prudent et d'inclure la défense dans le nouvel article.

Je crois comprendre que vous acceptez le principe sous-tendant la réintroduction de la défense. Ma question est donc la suivante: pourquoi ne pas le faire impeccablement et inclure aussi un renvoi?

M. Macklin: Notre position, c'est que nous croyions agir de la meilleure façon possible en important tous les moyens de défense. Visiblement, il y a une divergence d'opinions là-dessus.

Le sénateur Nolin: Nous allons en discuter entre nous.

Le président: J'aimerais soulever une toute petite question, que la sénateur Andreychuk a soulevée plus tôt. L'affaire à laquelle vous faites allusion, M. Macklin, est celle dont est question dans l'arrêt R. c. Gamey, entendue autour de 1993, je crois, à la cour du Manitoba.

Le sénateur Nolin: Il y a eu aussi R. c. Jones à la Cour suprême.

Le président: D'aucuns ont fait valoir que l'obligation prévue — «he must» — pourrait être considérée comme allant à l'encontre de la constitution. Tout de même, le juge a refusé d'assigner une telle portée à cette version de l'affaire et a affirmé qu'il s'agissait uniquement d'un élément de la charge de présentation de l'accusé. La Couronne devait démontrer le bien-fondé de sa cause; la charge de présentation visait à montrer qu'on était autorisé à agir ainsi. Ce n'était pas vraiment contraire à la constitution.

M. Macklin: Ce sont là des nuances de gris assez subtiles.

Le sénateur Nolin: C'est pourquoi le travail que nous sommes en train de faire est plus qu'agréable; il est même important. Quand cette loi deviendra la loi du pays, le public sera libre d'agir en conséquence. Nous voulons que tous, notamment ceux qui se chargent de l'application de la loi, respectent et comprennent la loi, qu'ils la rendent respectable pour tous. C'est pourquoi nous visons ici la perfection.

M. Macklin: C'est pourquoi nous ne voulions pas importer un élément qui aurait eu même une teinte anticonstitutionnelle.

Le sénateur Joyal: J'aimerais revenir à l'amendement no 3 et au message que vous nous avez envoyé comme étant affirmé. D'abord, pourriez-vous quand même nous rappeler brièvement dans quel contexte la Chambre a débattu cet amendement? Quel point de vue les divers partis ont-ils exprimé en ce qui concerne l'amendement numéro 3?

M. Macklin: Je ne saurais faire cela en rendant justice aux partis qui se sont prononcés, mais, pour ce qui est de la décision finale, je peux vous dire que les appuis à la Chambre ont été importants — autrement dit, les partis ont manifesté leur appui général. Je ne sais pas si je pourrais rendre compte des points de vue de tel ou tel député.

Le sénateur Joyal: J'ai parcouru le hansard de la Chambre, et je crois que c'est le sénateur Jaffer qui a porté la question à mon attention hier. Ce que j'arrive à en tirer, c'est que les membres de l'Alliance se sont prononcés contre l'amendement numéro 3, le NPD ne l'a pas mentionné en particulier, il a simplement condamné carrément le Sénat et demandé que le tout soit aboli. Deux députés libéraux ont appuyé les amendements, deux représentants du Parti progressiste-conservateur ont appuyé les amendements, et le Bloc a appuyé les amendements.

J'essaie de comprendre les points de vue exprimés à la Chambre; pour le faire, nous devrons regarder ce qui a été dit. Y a-t-il quelque chose qui m'échappe dans les premiers débats sur le projet de loi? La Chambre a-t-elle sollicité des avis sur la question des Autochtones et de l'incidence sur eux du projet de loi?

M. Macklin: Si je ne m'abuse, cela peut avoir été débattu, mais pas à fond.

Le sénateur Joyal: Vous rappelez-vous s'il y avait des représentants des Autochtones qui ont été invités à témoigner?

M. Macklin: Malheureusement, il y a une partie de cela qui s'est faite avant que j'arrive. Par conséquent, je ne sais pas si je saurais parler à fond et convenablement de cela.

Le sénateur Joyal: On ne saurait vous reprocher cette réponse. J'essaie de comprendre quel intérêt a prévalu à l'autre endroit jusqu'à maintenant. Comme le sait sûrement l'honorable secrétaire parlementaire du ministre de la Justice, la Cour suprême du Canada s'est prononcée sans équivoque sur la question de l'accès du gouvernement du Canada — et du Parlement du Canada aussi, de manière générale — dans les cas où un projet de loi peut empiéter sur les droits constitutionnels des Autochtones.

J'essaie de comprendre si le principe de l'application régulière du droit, selon l'arrêt Sparrow, a été respecté à l'autre endroit. Si nous acceptons votre point de vue, soit qu'il faut mettre de côté cet amendement protégeant les Autochtones, nous voudrions certainement être convaincus du fait que, en rapport avec cette question, la Chambre a satisfait aux critères clairement établis dans l'arrêt Sparrow de 1990 et reconnu par le gouvernement lui-même dans une note interne de 1995.

Je dois vous dire que, pour réfuter notre approche et la manière dont nous avons abordé cette question, vous devez désigner le fardeau dans la loi en nous convainquant que vous avez respecté une démarche semblable et, en dernière analyse, vous êtes arrivé à une conclusion différente.

M. Macklin: Malheureusement, il y a une partie de la démarche qui s'est déroulée avant que je ne puisse participer; par conséquent, je ne possède peut-être pas toutes les connaissances voulues pour bien répondre à votre question.

Le sénateur Joyal: Je ne veux pas insister, je ne veux pas vous mettre dans l'embarras non plus. Par contre, nous avons interrogé M. Mosley à ce sujet. Nous voulions une comparaison qui fasse voir la démarche que le ministère a appliquée, la démarche que la Chambre a appliquée pour répondre à notre obligation constitutionnelle en rapport avec l'arrêt Sparrow.

En deuxième lieu, j'ai écouté attentivement la réponse que vous avez donnée à la question du sénateur Watt. Vous dites que les Autochtones ont le droit de pêcher et de chasser, que les poursuites en justice ne les menacent pas plus que les autres Canadiens et que, dans la mesure où ils traitent les animaux avec soin et sans cruauté, ils ne devraient pas faire l'objet de poursuites. Par conséquent, ils ne devraient pas craindre ce projet de loi. Puis, vous poursuivez en disant que, si jamais ils se sentent lésés, ils peuvent aller devant les tribunaux et invoquer l'article 35. Cela me pose des difficultés, car il y a un jugement récent de la Cour suprême du Canada — l'affaire tranchée en décembre dernier. Je ne vais pas citer l'arrêt en question, car celui-ci fait l'objet de discussions, pour des raisons que mes collègues autour de la table connaissent peut-être.

Tout de même, je vais revenir à une décision antérieure, à une décision unanime de la Cour d'appel de l'Ontario, le juge McMurtry, le juge Abella et le juge Sharpe, en février 2001. Le juge Sharpe a rendu la décision au nom de la majorité. J'aimerais citer les paragraphes 77 et 79 de l'arrêt en question, qui portaient sur l'interprétation de l'article 35 de la Constitution:

[Traduction] [77] Comme c'est le cas pour tous les droits constitutionnels, les droits des Autochtones exigent que nous fassions appel à une interprétation fondée sur l'objet visé. Or, l'objet visé en ce qui concerne la protection constitutionnelle des droits des Autochtones a été déterminé comme étant double. Premièrement, il s'agit de reconnaître et de respecter l'occupation antérieure des terres par les sociétés autochtones distinctives.

[79] Deuxième aspect fondamental de l'objet visé à l'article 35... la disposition prévoit le cadre constitutionnel qui permet de reconnaître et de concilier avec la souveraineté de la Couronne le fait que les Autochtones vivent en société distinctive avec leurs propres usages, traditions et culture.

Je crois que chacun des termes employés a un sens. Voilà l'objet double de l'article 35, comme on peut le voir dans le dernier arrêt applicable à l'interprétation de l'article en question.

Selon vous, tant et aussi longtemps que les Autochtones agissent comme la majorité des Canadiens, ils n'ont rien à craindre. Si jamais ils étaient accusés de cruauté envers les animaux pour avoir chassé ou pêché selon leurs coutumes, ils n'auraient qu'à invoquer l'article 35 dans le tribunal et faire confirmer leurs droits constitutionnels.

Mon analyse va-t-elle trop loin?

M. Macklin: Je crains de m'être mal exprimé. Je ne voulais pas laisser cette impression. J'ai cru comprendre qu'il s'agissait de savoir si les Autochtones pouvaient poursuivre, de manière générale, les activités qui font partie de leur mode de vie normal. Ce ne sera pas là un moyen de défense contre des allégations de cruauté envers les animaux. Plutôt, c'est un commentaire formulé à propos de la question: «où se trouve la raison légitime de s'adonner aux activités auxquelles vous vous adonnez en tant que peuple?» Dans ce cas particulier, vous pourriez faire valoir notamment que les Autochtones ont toujours pu chasser et pêcher, et que c'est là l'usage historique et légitime que vous continuez d'avoir. En tant que pays, nous avons reconnu cet usage.

Je dis simplement que, ayant une excuse légitime, vous pouvez plutôt au moins développer votre argument autour de l'idée qu'il s'agit là de notre loi. Nous avons toujours eu cet usage, depuis que nous sommes une nation à part entière. Nous avons toujours eu des rites et avons toujours chassé et pêché, mais nous avons exercé d'autres droits aussi. Je parlais de la notion de ce qui pourrait constituer une excuse légitime et un moyen de défense, mais en ne le ramenant pas au simple fait d'invoquer l'article 35 comme moyen de défense absolu. Ce ne serait pas le cas.

Le sénateur Joyal: Autrement dit, vous dites que, dans le cas où les Autochtones chassent et pêchent, ils ne sont pas assujettis à un critère différent de ceux qui s'appliquent aux autres Canadiens. C'est bien cela?

M. Macklin: En rapport avec cet amendement particulier, nous disons qu'ils auraient recours aux même moyens de défense que les autres. Je laisse simplement entendre que la panoplie des moyens de défense dans une affaire où il est question d'Autochtones pourrait être légèrement différente de celle d'autres personnes. Toutefois, ce serait lié aux usages historiquement établis des Autochtones.

Le traitement non cruel des animaux est un principe qui doit être respecté. Le critère appliqué n'est pas différent; il en va plutôt des moyens de défense. Il faut pouvoir constituer une défense appropriée. Nous utilisons cette expression — excuse légitime — pour asseoir cette défense. Voilà où la question serait mise de l'avant, et voilà sur quoi on fonderait une défense d'une activité quelconque. Il m'importe peu de savoir s'il s'agit d'un cultivateur blanc ou d'un chasseur autochtone. Le principe, c'est qu'il faut pouvoir donner une excuse légitime qui, sur le plan historique, est établi.

Le sénateur Joyal: Vous ne reconnaissez donc pas le fait que les pratiques de chasse et de pêche des Autochtones sont protégées en tant que telles dans la Constitution, et nous devons reconnaître cela. Comme vous le reconnaissez vous-mêmes, les nouveaux critères appliqués aux autres finiront par s'imposer aux Autochtones, car la situation de tous doit faire l'objet de la même interprétation, selon les infractions créées dans ce projet de loi.

M. Macklin: Je crois que c'est évidemment là une question qu'il nous faudra régler avec le temps, à savoir s'il faudra faire des rajustements et si nous sommes prêts à accepter ces rajustements.

Si on étudie les moyens de défense, il faut regarder la situation dans son ensemble. Je ne crois pas qu'on puisse établir simplement une défense qui s'appliquerait en ville, puis une autre qui vaudrait pour le Nord. Il faut regarder l'ensemble des éléments présentés comme défense. Dans le contexte, le même traitement de base devrait s'appliquer à tous en ce qui concerne la défense; par contre, les usages en ville ne seraient pas forcément les usages du Nord. D'un point de vue traditionnel, c'est évidemment une question que nous n'arriverons peut-être pas à régler tout de suite. En tant que nation, nous nous débattons avec cette question. Cela prendra du temps.

Le sénateur Andreychuk: Vous avez dit que les Autochtones seraient protégés en ce qui concerne les moyens de défense, l'excuse légitime et ainsi de suite. Vous ne croyez pas que l'article 35 défend leur mode d'exploitation des ressources, quels que soient les autres critères qui puissent être adoptés?

M. Macklin: Je dirais qu'il faudrait étudier, comme je l'ai laissé entendre, chaque cause en fonction de ses propres mérites, pour savoir si c'est protégé ou non. Je ne suis tout simplement pas placé pour vous donner une réponse définitive à cette question aujourd'hui.

Le sénateur Nolin: Avez-vous lu l'amendement que nous avons proposé?

M. Macklin: Oui.

Le sénateur Nolin: Entièrement?

M. Macklin: Oui.

Le sénateur Nolin: Les trois dernières lignes? Regardez-les encore, lisez-les encore. Je parle en particulier de cette partie de la phrase qui dit: «...la douleur, la souffrance ou la blessure se limite à ce qui est raisonnablement nécessaire à ces pratiques ancestrales.»

M. Macklin: Oui.

Le sénateur Nolin: Est-ce que ça ne vous rappelle pas un peu l'arrêt Menard?

M. Macklin: À notre avis, il s'agissait de savoir si on créerait vraiment un critère distinct pour les Autochtones.

Le sénateur Nolin: Je ne veux pas me disputer avec vous. Nous reconnaissons le fait que, en 1982, le Canada dans son ensemble a reconnu qu'ils sont distincts et différents. Nous devons reconnaître cela; c'est un fait.

Nous essayons de prendre cette considération — considération globale — et de l'inscrire dans notre projet de loi. C'est pourquoi nous avons ajouté ces trois lignes. Ces trois lignes servent à limiter les droits en question.

M. Macklin: J'aimerais croire que la loi proposée servirait, en fait, à préserver le même critère de base. Toutefois, chaque affaire individuelle sera étudiée, pour ce qui est des moyens de défense avancés. Il ne convient pas, pour l'heure, de limiter les moyens de défense et d'essayer de les faire entrer dans les petites cases.

Nous proposons une assez bonne panoplie de moyens de défense. Si vous êtes en mesure de les faire valoir et de convaincre le juge que, en fait, le moyen de défense en question s'applique à vous historiquement, le juge devrait envisager de l'admettre. L'idée derrière tout cela, c'est de faire cesser la cruauté envers les animaux et non pas forcément de modifier les rites des Autochtones.

Le sénateur Grafstein: Monsieur Macklin, je comprends le fait que vous vous débattiez avec cette question, comme le font d'ailleurs tous les membres du Sénat. Le ministre accepterait-il d'envisager, à part tout le reste de notre programme d'action — ce qui n'empêche pas le comité de choisir sa voie — une consigne: comme il s'agit de quelque chose de nouveau et qui aura peut-être des conséquences dépassant l'intention du législateur, examiner les causes pouvant être soutenues en rapport avec cette nouvelle infraction et aspirer à corriger le texte de loi dans les deux ans, c'est-à-dire s'engager, dans la mesure où les dispositions en question sont invoquées à mauvais escient, à proposer des mesures législatives en vue d'améliorer la situation?

Je ne vise pas la perfection; c'est l'art du possible qui m'intéresse. Nous avons déjà adopté des mesures de temporarisation et ainsi de suite. Il était trop tard pour choisir cette option. Le comité connaît très bien ce genre de disposition, qui s'est déjà révélée très utile. Cela dit, la situation est différente. Évidemment, vous ne pouvez vous engager au nom du ministre, mais vous pourriez nous donner votre point de vue à vous et, peut-être, faire part de ce point de vue au ministre.

M. Macklin: Je vais certainement lui faire le message. Le ministre a signalé clairement, à l'occasion de certaines tables rondes ayant eu lieu depuis un an, qu'il souhaite revoir le code intégralement. Je sais que c'est une entreprise monumentale. Cela prendra en considération les préoccupations soulevées et les intérêts manifestés. Ça ne se ferait pas du jour au lendemain; certes, votre délai de deux ans est peut-être indiqué.

Comme c'est toujours le cas au ministère de la Justice, nous sommes en train d'examiner nos lois pour voir si elles fonctionnent bien. En dernière analyse, nous voulons savoir à quel moment il faut décider d'agir en rapport avec les aspects que nous jugeons préoccupants? Je suis sûr que nous sommes sensibles à la question. Je suis sûr que vous en seriez informé rapidement si l'article en question ne répondait pas aux attentes, s'il ne donnait pas le résultat escompté.

Le sénateur Beaudoin: Les Autochtones constituent une catégorie différente. L'article 35 porte sur des droits collectifs, ce que la Cour suprême a affirmé. Quand il est question de droits collectifs et de droit criminel, il faut savoir qu'il s'agit d'une question très singulière.

Voilà une situation particulière. Quand nous étudions la disposition de non-dérogation, nous devons en tenir compte. Nous ne devrions pas oublier le fait qu'il s'agit de droits collectifs et non pas de droits individuels. Mes droits à moi sont individuels. Leurs droits à eux sont collectifs. Il faut prendre cela en considération.

Le président: Au nom du comité, M. Macklin, je veux vous remercier d'avoir accepté de vous mettre dans cette position difficile. Je manquerais à mon devoir si je ne vous remerciais pas d'avoir répondu à toutes les questions des sénateurs avec tant de franchise.

Nous apprécions cela. Cela a été très utile à nos délibérations, et, encore une fois, merci, madame Klineberg.

M. Macklin: Je vous remercie de m'en avoir donné l'occasion. Quand je suis arrivé au Parlement il y a deux ans et demi environ, je pensais un peu, comme bien des membres du public, que l'endroit n'était peut-être pas aussi efficace qu'il pouvait l'être. Mon point de vue a changé.

À propos de ce projet de loi particulier, je dois dire que j'ai beaucoup apprécié l'effort que vous y avez mis.

La séance se poursuit à huis clos.

La séance reprend en public.

Le président: Honorables sénateurs, nous ne siégerons plus à huis clos, nos travaux reprennent en public. La question, je la répète, est la suivante: «Que le Sénat agrée l'amendement apporté par la Chambre des communes à son amendement 4 au projet de loi C-10B, Loi modifiant le Code criminel (cruauté envers les animaux);» et «Que le Sénat n'insiste pas sur ses amendements 2 et 3, auxquels les Communes n'ont pas acquiescé.»

Qui est en faveur?

Je vois que quatre sénateurs sont en faveur de la proposition.

Qui est contre? J'en compte sept.

Voilà pour la première proposition.

Le sénateur Cools: Quelqu'un a dit qu'il souhaitait avoir un vote par appel nominal; il faudrait donc prendre les présences.

Le sénateur Smith: À ma connaissance, personne ne le demande.

Le président: Personne ne le demande.

Le sénateur Cools: Je croyais vous avoir entendu dire que vous vouliez un vote par appel nominal.

Le président: C'était au moment de la séance à huis clos.

Nous allons maintenant traiter du deuxième ordre de renvoi:

QUE le message de la Chambre des communes au sujet du projet de loi C-10B, Loi modifiant le Code criminel (cruauté envers les animaux) soit maintenant renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.

Il s'agit maintenant de déterminer comment nous souhaitons réagir au message. Il faut présumer que l'adoption de l'amendement numéro 1 ne poserait pas de problème.

Des voix: D'accord.

Le président: Il faut présumer que l'adoption de l'amendement 5 ne poserait pas de problème.

Des voix: D'accord.

Le président: L'amendement numéro 2 traite de l'élimination de la disposition relative au fait de «tuer» un animal. Que souhaitent faire les honorables sénateurs en rapport avec cet article particulier — poursuivre avec notre propre amendement ou y apporter des modifications?

Le sénateur Cools: Le garder.

Le sénateur Beaudoin: Le garder.

Le président: La majorité du comité souhaite garder l'amendement tel quel?

Des voix: D'accord.

Le président: L'amendement numéro 3 nous renvoie ce qui a été qualifié de «disposition de non-dérogation». Que souhaite faire le comité?

Des voix: Garder l'amendement.

Le président: Est-ce que quelqu'un n'est pas en faveur de cette proposition?

Le sénateur Andreychuk: Puis-je en parler?

Le président: Oui.

Le sénateur Andreychuk: J'ai eu de la difficulté parce que nous avons passé tellement de temps à étudier le libellé. J'ai passé beaucoup de temps à examiner l'article, et je me suis demandé si le comité accepterait une petite modification de notre amendement initial? Au départ, nous disions: «Nul ne peut être déclaré coupable de l'infraction visée à l'alinéa (1)a) si la douleur, la souffrance, la blessure ou la mort est causée pendant l'exercice, par une personne de l'un des peuples autochtones du Canada, de pratiques ancestrales de chasse, de piégeage ou de pêche...» et voici le passage qui me tracassait «... dans une zone où les peuples autochtones possèdent des droits de récolte...» Le dilemme: certains Autochtones ont des droits de récolte traditionnels ayant une base géographique.

J'ai entendu le sénateur Gill affirmer qu'il y avait là des droits qui se chevauchent et qu'on pouvait régler la question et que, si ce n'était pas le cas, bien entendu, il y aurait une contestation devant les tribunaux. À y réfléchir, il me semble que—à la place de «dans une zone où les peuples autochtones possèdent des droits de récolte»—le fait de dire «dans une zone où l'Autochtone...» nous permettrait de prévoir tout à fait la situation des Autochtones, notamment pour les cas de chevauchement, pour ceux dont les droits sont une affaire à régler et ceux dont les droits sont une affaire réglée. Nous commençons par dire «Nul ne peut être déclaré coupable», puis nous parlons des pratiques de «l'un des peuples autochtones du Canada», «dans une zone» où les peuples autochtones possèdent des droits. Ce serait une zone où l'Autochtone possède des droits de récolte. Il s'agit de préserver l'intégrité de l'article 35 — de préserver l'intégrité des droits.

Le sénateur Cools: Est-ce que la modification reviendrait au même si on disait: «dans les zones où les peuples autochtones ont des droits de récolte»?

Le sénateur Andreychuk: Non.

Le président: Le sénateur Andreychuk essaie de délimiter la question aux zones où les Autochtones ont des droits de chasse. Il ne s'agit pas de dire que les Autochtones ont le droit d'aller partout. C'est bien cela?

Le sénateur Watt: Puis-je expliquer la part des choses qu'elle couvre, en ce qui concerne le chevauchement des droits de chasse, le chevauchement des droits? Il existe une entente réciproque sur la question du chevauchement des droits.

Par exemple, les Cris et les Inuits évoluent, essentiellement, dans la même zone. La distance est très grande, mais l'entente décrit un chevauchement. Il y a aussi un régime d'aménagement qui est associé à cela. Personne ne peut aller dans cette zone sans y être autorisé. Il y a une responsabilité administrative très claire qui y est rattachée. Par conséquent, il n'est pas possible que quelqu'un arrive dans cette zone et fasse comme bon lui semble. Ce n'est pas le cas. Je suis d'accord avec elle. Pour que ce soit plus clair, j'appuie ce qu'elle dit.

Le président: Honorables sénateurs, voilà qui servirait à éliminer une des raisons les plus importantes pour lesquelles les Communes s'opposent à cette disposition particulière.

Le sénateur Watt: Si nous pouvions éliminer cela, j'en serais reconnaissant.

Le président: Si j'ai bien compris le sénateur Andreychuk, cela se lirait maintenant comme suit:

Nul ne peut être déclaré coupable de l'infraction visée à l'alinéa 1a) si la douleur, la souffrance, la blessure ou la mort est causée pendant l'exercice, par une personne de l'un des peuples autochtones du Canada de pratiques ancestrales de chasse, de piégeage ou de pêche dans une zone où l'Autochtone possède des droits de récolte.

Le sénateur Andreychuk: Cela préserve l'intégrité de la mesure, dans toutes les situations. Il y a une version correspondante dans l'autre langue officielle.

Le sénateur Watt: Est-ce que cela élimine tout à fait la préoccupation de la Chambre des communes?

Le président: Cette mesure en fait beaucoup pour atténuer ces préoccupations.

Le sénateur Cools: On m'a remis un bout de papier qui disait: «Dans une zone où les peuples autochtones». Ça ne dit pas: «Un Autochtone».

Le sénateur Andreychuk: Le premier cas, c'est ce que nous avons; le deuxième, c'est la modification proposée.

Le sénateur Cools: C'est bien, c'est donc limité.

Le président: Honorables sénateurs, nous devons passer à la question suivante.

Le sénateur Jaffer: Avec dissidence.

Le président: Nous passons à la question suivante. La proposition n'est pas adoptée à l'unanimité, elle est adoptée avec dissidence.

La dernière préoccupation concerne l'apparence de droit. Je vais essayer d'abréger la discussion, d'après ce qui a été dit hier soir. Les honorables sénateurs sont au fait de l'amendement initial que nous avons proposé. Les Communes l'ont renvoyé sous la forme suivante: «Il est entendu que les moyens de défense prévus au paragraphe 129(2) s'appliquent, dans la mesure où ils sont pertinents, aux procédures relatives à une infraction à la présente partie.»

Nous avons discuté de la possibilité d'éliminer «dans la mesure où ils sont pertinents», pour que l'amendement se lise comme suit: «Il est entendu que les moyens de défense prévus au paragraphe 429(2) s'appliquent aux procédures relatives à une infraction à la présente partie.»

Est-ce que les honorables sénateurs sont d'accord avec cela? Ce n'est pas l'amendement initial.

Le sénateur Beaudoin: C'est mieux.

Le sénateur Nolin: Nous parlerions du paragraphe 429(2), plutôt que d'en créer un nouveau?

Des voix: Oui.

Le sénateur Nolin: Nous avons ici un problème: l'article 429 fait partie d'un chapitre du Code qui ne traite que de la propriété.

Le président: Il s'agirait d'évoquer les moyens de défense prévus à l'article 429, plutôt que de les nommer. Les responsables étaient d'avis que le fait pour nous de les nommer n'était pas une bonne idée, mais, selon moi, d'après la discussion que nous avons eue hier soir, le fait de parler des «moyens de défense prévus au paragraphe 429(2)» ne posait pas beaucoup de difficulté. La nature de ces moyens de défense est assez claire, la référence à leur égard est claire, et si nous éliminons «dans la mesure où ils sont pertinents» et disons plutôt qu'ils «s'appliquent aux procédures relatives à une infraction à la présente partie», nous atteignons le but associé à notre propre amendement.

Le sénateur Grafstein: Je vais proposer une petite variante, qui soulèvera peut-être des objections. Plutôt que de dire «dans la mesure où ils sont pertinents», dites: «Il est entendu que les moyens de défense prévus au paragraphe 429(2) s'appliquent mutatis mutandis aux procédures relatives à une infraction à la présente partie.»

Le sénateur Nolin: Ce qui nous invite fortement à amender l'article 429.

Le président: Je crois que nous pourrions, tout simplement, songer à ceci: «Il est entendu que les moyens de défense prévus au paragraphe 429 s'appliquent aux procédures relatives à une infraction à la présente partie.» Nous importons ainsi dans cette partie toutes les défenses prévues à l'article 429.

Le sénateur Cools: Si nous voulons dire qu'il s'agit des termes énoncés à l'article 429, nous devrions simplement reprendre ces termes.

Le président: Ils étaient très heureux de cela. Ils ont inclus cela surtout pour le caucus rural.

Le sénateur Cools: Optons pour ce qui fait leur bonheur. La Chambre des communes nous a offert cela; prenons ce qu'elle nous offre. C'est cela, sinon nous gardons notre propre version.

Le sénateur Joyal: Nous ne voulons pas de «dans la mesure où ils sont pertinents» et nous voulons éliminer ceci.

Le sénateur Grafstein: Je crois que nous devrions demander au conseiller juridique ce qu'il pense de l'idée d'inclure l'expression mutatis mutandis. Je crois que ceci permet de répondre aux préoccupations de chacun.

Le président: Non, elle crée de la confusion, à mon avis. Par contre, nous allons poser la question à M. Audcent.

M. Audcent: Pour ce qui est de l'idée d'ajouter le terme mutatis mutandis, je crois savoir que les rédacteurs fédéraux essaient en ce moment d'éviter l'emploi du latin dans le texte. Par conséquent, nous ne devrions pas mettre ce terme dans une loi fédérale aujourd'hui.

Le président: Honorables sénateurs, est-ce que cela fait notre bonheur de laisser tomber simplement «dans la mesure où ils sont pertinents», soit le seul élément qui posait vraiment un problème quand nous avons discuté de la question hier soir, pour, essentiellement, renvoyer à la Chambre des communes l'amendement qu'elle a modifié?

Le sénateur Jaffer: Pourquoi ne pas choisir l'option de Le sénateur Cools: le laisser tel quel?

Le sénateur Beaudoin: Je crois qu'il ne convient pas d'éliminer ce qu'ils proposent — «dans la mesure où ils sont pertinents».

Le sénateur Smith: Ils n'ont jamais dit que c'est ce qu'ils allaient faire.

Le sénateur Andreychuk: L'élément fondamental.

Le président: L'expression «dans la mesure où ils sont pertinents» crée un problème, car nous l'empruntions aux dispositions relatives à la propriété. Si nous l'éliminons, il n'y a pas de zone grise.

Aux voix!

Le sénateur Jaffer: Avec dissidence.

Le sénateur Cordy: Je crois qu'il s'agit de l'une de ces affaires où nous pourrions, plutôt que de nous faire sémanticiens, leur proposer un compromis. Le libellé proposé par la Chambre des communes ne me pose aucune difficulté.

Le sénateur Andreychuk: Ce n'est pas d'un compromis qu'il est question. C'est d'un élément fondamental.

Le président: Aux voix! Tous sont en faveur? Je vais lire la question.

Le comité est-il favorable à l'amendement 4, qui se lit comme suit: «182.5 Il est entendu que les moyens de défense prévus au paragraphe 429(2) s'appliquent aux procédures relatives à une infraction à la présente partie.»

Qui est en faveur?

Nous avons supprimé l'expression «dans la mesure où ils sont pertinents».

Qui est en faveur? Sept voix.

Qui s'y oppose? Quatre.

Adopté.

J'ai besoin que le comité m'accorde la permission de rassembler au mieux les éléments que nous venons d'établir et de revenir avec des conclusions définitives, sans que chacun ait l'occasion de le voir à l'avance.

Le sénateur Jaffer: J'aimerais faire porter au compte rendu le fait que l'article sur la douleur a été adopté lui aussi avec dissidence — celui où il est dit, «sans nécessité».

Le président: Oui.

Le comité de direction peut rester, et nous pouvons essayer de rassembler tous ces éléments pour essayer d'en tirer du sens.

La séance est levée.


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