Aller au contenu
 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Affaires juridiques et constitutionnelles

Fascicule 13 - Témoignages du 17 juin 2003


OTTAWA, le mardi 17 juin 2003

Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, auquel ont été renvoyés le projet de loi C-39, Loi modifiant la Loi sur les allocations de retraite des parlementaires et la Loi sur le Parlement du Canada, et le projet de loi C-24, Loi modifiant la Loi électorale du Canada et la Loi de l'impôt sur le revenu (financement politique), se réunit aujourd'hui à 15 h 30 pour en étudier la teneur.

Le sénateur George J. Furey (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Honorables sénateurs, aujourd'hui nous étudierons deux projets de loi — le projet de loi C-39, Loi modifiant la Loi sur les allocations de retraite des parlementaires et la Loi sur le Parlement du Canada, et le projet de loi C-24, Loi modifiant la Loi électorale du Canada et la Loi de l'impôt sur le revenu (financement politique). L'honorable Don Boudria, ministre responsable d'Élections Canada, va nous en parler.

Nous commencerons par le projet de loi C-39. Nous souhaitons la bienvenue au ministre et à ses fonctionnaires du Secrétariat du Conseil du Trésor. M.Aaron Allen est gestionnaire des autres régimes statutaires. Vous verrez sur l'ordre du jour que M. Joan Arnold devait comparaître, mais il se trouve dans l'impossibilité de le faire. Du Bureau du Conseil privé, nous accueillons M. Matthew Lynch, agent de relations parlementaires.

On me dit, monsieur le ministre, que vous avez une autre obligation dans un peu plus d'une heure. Nous vous demandons de commencer par un bref exposé. Je prie les sénateurs d'être aussi brefs que possible dans leurs questions.

[Français]

M. Don Boudria, leader du gouvernement à la Chambre des communes: Je suis heureux d'être parmi vous cet après- midi pour vous présenter le projet de loi C-39, Loi corrective des indemnités des parlementaires. Vous avez mentionné la présence de MM. Allen, du conseil du Trésor et Lynch du Conseil privé.

Tout d'abord, je ferai un survol très bref de ce projet de loi C-39 qui apporte certaines corrections techniques et ne touche en aucune façon les politiques existantes. Le projet de loi comporte quatre changements principaux. Premièrement, les articles 1 à 9 clarifient les dispositions liées au taux d'accumulation des années de service après 2001, dans le régime des pensions parlementaires, afin de donner suite aux commentaires de l'actuaire en chef du Canada: ce doit être fait pour mieux garantir une application; aucun changement stratégique n'est apporté au régime des pensions.

Monsieur Allen peut répondre aux questions techniques et aux commentaires apportés par l'actuaire en chef. Il ne s'agit pas de changements. C'est ce qui a trait à l'accumulation des crédits et aux différentes interprétations que l'on pourrait y apporter.

L'article 10 corrige un oubli dans les changements apportés en 2001 aux indemnités des parlementaires des deux Chambres qui disaient que les présidents et les vice- présidents des comités permanents toucheraient une indemnité supplémentaire mais non ceux des comités spéciaux. L'objectif était bien sûr d'offrir une rémunération supplémentaire à un président de comité, que le comité soit permanent ou seulement en exercice pour quelque mois. Cela ne devrait faire aucune différence, sauf que la rémunération est proportionnée au nombre de jours dans le cas de comités temporaires.

L'article 11 rétablirait les dispositions d'arrondissement d'avant 2001 pour le traitement des ministres, comme c'est le cas pour tous les autres traitements des indemnités des parlementaire, ce qui était le cas pour les ministres avant 2001.

Bien sûr, après avoir ajouté le taux de croissance du salaire tel que basé sur les salaire des juges, selon la formule bien connue, on en arrivera à un salaire pour un ministre qui fera 312.25 $. Ce n'était pas l'objectif visé. Nous visions une formule d'arrondissement au plus près de 100 $. C'est déjà le cas pour la partie salariale parlementaire, député ou sénateur, mais ce n'est pas le cas pour les indemnités supplémentaires ministérielles. L'arrondissement est là pour tous les autres.

C'est un oubli. Cela n'offre aucune augmentation. C'est tout simplement pour rendre le calcul plus facile à ceux et celles qui s'occupent de la comptabilité de ces choses.

[Traduction]

Quatrièmement, l'article 12 précise comment calculer l'allocation d'invalidité en spécifiant les traitements et les indemnités qui entrent dans le calcul de cette dernière. Cela dissipe la crainte, d'ordre technique, que seule l'indemnité de session serve de base à l'allocation d'invalidité. Bien entendu, ce n'est pas ce qui était prévu. L'allocation d'invalidité devrait être basée sur la totalité du traitement. Si, au moment de l'invalidité, le traitement est moindre, elle est basée sur ce montant, s'il est plus élevé, elle est basée sur ce montant. C'était une erreur.

L'allocation d'invalidité n'a été réclamée qu'une seule fois au cours des dernières années du côté de la Chambre, mais, si cela devait se reproduire, il est important pour les deux chambres que la loi reflète clairement notre intention.

Les modifications proposées feraient en sorte que l'ensemble du traitement touché par un parlementaire avant de démissionner pour raison d'invalidité entrerait dans le calcul de l'allocation d'indemnité comme je viens de le dire. En gros, c'est ça.

Ce sont quatre modifications techniques. Honorables sénateurs, le projet de loi C-39 propose de procéder à ces quatre modifications techniques qui sont réclamées depuis que la rémunération des parlementaires a été mise à jour en 2001. Je répète ce que j'ai dit au début: le projet de loi ne propose aucun changement d'orientation politique. Certains voulaient y ajouter d'autres dispositions dont on pouvait prétendre qu'elles étaient de nature politique. Toutefois, il n'y a pas eu de consensus à leur égard. Cette mesure apporte seulement des corrections techniques.

Le président: Je vous remercie infiniment, monsieur le ministre.

Sénateurs, y a-t-il des questions?

[Français]

Le sénateur Robichaud: J'aimerais clarifier certaines choses à propos de la règle de la rétroactivité. Dans le cas des présidents de comités spéciaux, il y a rétroactivité lorsqu'il s'agit de l'allocation d'invalidité. Est-ce que je comprends bien?

M. Boudria: Sur la première partie, il n'y a pas de rétroactivité.

Le sénateur Robichaud: Dans le calcul pour la pension d'invalidité, est-ce que cela pourrait s'appliquer?

M. Boudria: Il n'y a pas application de la rétroactivité dans l'autre cas. Il pourrait peut-être y avoir rétroactivité dans le cas d'une personne qui aurait un traitement supplémentaire et qui devrait quitter pour raison d'invalidité.

Je ne crois pas qu'il y en ait dans aucune des deux Chambres. En ce qui concerne la Chambre des communes, un seul cas existe, celui du général Richardson, qui a démissionné pour raison d'invalidité. Il n'y a pas eu d'autres cas, ni avant ni après la dernière loi, où on a rectifié les salaires des parlementaires. La question ne s'est pas posée.

D'ailleurs, les notes qui me sont transmises me disent qu'il n'y en a pas eu au Sénat non plus. L'élément de rétroactivité ne s'applique donc pas.

Le sénateur Joyal: Ma question concerne l'article 10 du projet de loi. Lorsque vous avez considéré étendre la rémunération additionnelle aux présidents de comités spéciaux, avez-vous considéré la possibilité de la retirer tout simplement à tous les présidents et vice-présidents, puisque le Parlement a fonctionné plusieurs années sans cela?

Un bénéfice est offert à un député ou à un sénateur qui occupe le poste de président ou de vice-président, poste qui, en pratique, n'impose pas tellement plus de responsabilités ou de travail que le poste d'un député ou d'un sénateur qui fait le travail de préparation d'un projet de loi, assiste à toutes les réunions du comité, prépare les questions, et, à l'occasion, prépare les amendements. Sauf tout le respect que je dois à notre président, il n'en demeure pas moins qu'en pratique, la charge de travail demeure la même.

Pourquoi donner un bénéfice additionnel à une personne qui est souvent choisie d'une manière particulière? Dans la mesure du possible, on doit garder une certaine forme d'équilibre dans le système et éviter l'introduction d'éléments qui visent à différencier le travail des députés et des sénateurs.

M. Boudria: Le projet de loi n'aborde aucun dossier d'orientation politique. Il n'apporte que des correctifs techniques. L'orientation, au départ, venait du rapport Lumley. Ce dernier préconisait des augmentations pour certains postes, mesures que nous avons adoptées, on s'en souviendra.

Si le Parlement veut soustraire ce qu'il y a dans le rapport Lumley, c'est possible, mais cela devrait se faire suite à une élection. On reverrait l'ensemble des bénéfices des parlementaires plutôt que de prendre un cas isolé qui, après tout, irait à l'encontre du rapport déjà adopté par l'ensemble des parlementaires.

Le sénateur Joyal: On ajoute énormément à la liste des personnes qui, dans le Parlement, reçoivent des montants supplémentaires.

À la liste des 40 ministres et à celle des 30 secrétaires parlementaires, on a ajouté la liste des présidents et des vice- présidents de comités. On a ensuite ajouté les comités spéciaux, puis les whips et les assistants whips.

Qui ne reçoit pas quelque chose de plus dans le système aujourd'hui? Il reste les soldats, les sans-grade, les poilus, les grognards et les dragons.

Tout le système est conçu comme étant un système de récompense qui semble avoir un effet sur le comportement des parlementaires. On ne fait que rajouter à une politique déjà adoptée.

Cependant, lorsqu'on fait des ajouts à une politique, on peut se demander quel impact ils auront dans le système. À l'heure actuelle, ces ajouts ne sont peut-être pas ce qu'il y a de mieux pour améliorer le fonctionnement du système.

M. Boudria: Je vais vous citer la référence de Lumley. La façon dont elle a été rédigée, dans ce que nous avons adopté, ne reflète pas ce qu'il dit.

Le rapport Lumley disait — et je cite en anglais:

[Traduction]

La commission recommande que les présidents des comités de la Chambre et du Sénat [...]

[Français]

On n'avait pas dit «standing committees».

[Traduction]

[...] reçoivent un salaire de 9 480 $ en reconnaissance de leurs responsabilités supplémentaires. Les vice-présidents devraient recevoir 5 000 $.

[Français]

Voilà ce qui avait été proposé. On avait soustrait à cela le Comité de liaison et le Comité de la Bibliothèque parce qu'ils n'étaient pas, selon Lumley, assez important pour recevoir ce traitement supplémentaire.

À l'époque, nous avons adopté la recommandation Lumley, mais nous avons fait une erreur en écrivant «comité permanent» au lieu de «comité» tout simplement, selon la recommandation de Lumley.

Quand est arrivé le cas d'un comité spécial pour l'usage non médical des drogues, un parlementaire m'a dit qu'on refusait le traitement supplémentaire. Je ne comprenais pas pourquoi. Et après vérification, on a constaté que l'administration avait décidé que le projet de loi excluait les membres du Comité spécial, bien que la recommandation qui avait été adoptée ne les excluait pas.

Le projet de loi d'aujourd'hui vise simplement à rectifier le tir et n'a pas pour but de créer quelque chose de nouveau. Il y a eu un débat à savoir ce qu'on ne devrait pas créer de nouveau lorsqu'on a adopté la Loi sur le traitement des parlementaires il y a quelques années.

Je veux bien qu'on puisse revoir la réglementation à l'avenir pour ajouter ou soustraire des bénéfices, si c'est ce qu'on veut collectivement, mais je pense qu'on devrait le faire avec une vue d'ensemble. Aujourd'hui, je ne propose pas d'ajouter des bénéfices. Je propose simplement des corrections techniques qui reflètent ce qui avait été prévu au début et qui, par inadvertance ou par malchance — ou les deux — n'a pas été fait de la façon voulue.

J'espère, honorables sénateurs, que la réponse est satisfaisante.

[Traduction]

Le sénateur Grafstein: Ma question fait suite à celle du sénateur Joyal. Le sénateur Smith et moi-même avons essayé de calculer le nombre de parlementaires. Il y a au Parlement 301 députés et 105 sénateurs, ce qui donne un total de 406 parlementaires, n'est-ce pas?

M. Boudria: Je pense que oui.

Le sénateur Grafstein: Sur ces 406, combien de députés — que ce soit des membres du Cabinet, des secrétaires parlementaires, des présidents ou des vice-présidents de comités permanents ou mixtes — recevaient, en vertu de la mesure législative précédente, une rémunération supplémentaire? Selon mes calculs, 96. Toutefois, je ne suis pas certain que ce chiffre soit exact.

M. Boudria: Honorables sénateurs, je n'ai pas le chiffre exact avec moi, mais il me semble que ce serait en gros de cet ordre. Il y a un peu plus de deux douzaines de ministres, environ une douzaine de secrétaires d'État et deux douzaines de secrétaires parlementaires. Il y a 18 présidents de comité et deux fois plus de vice-présidents du côté de la Chambre. Bien entendu, je ne connais pas aussi bien les chiffres pour le Sénat, mais je suppose que la proportion serait quelque peu inférieure du côté du Sénat car, bien entendu, il n'y a ni secrétaire parlementaire ni ministre. Il suffit de prendre le nombre de sénateurs et de faire le calcul. Je suppose que le chiffre pourrait s'établir entre 80 et 100 — et 96 semblent entièrement plausible.

Le sénateur Grafstein: Je dis ça parce que j'avais essayé de le calculer à l'occasion du projet de loi précédent et j'avais eu de la difficulté à établir un chiffre exact. On l'avait évalué à 96.

Le sénateur Joyal a de nouveau soulevé la question que nous avons soulevée au Sénat au sujet de la raison d'être d'une différence, essentiellement, pour les sénateurs. Je pense que nous devrions nous préoccuper plus directement de notre propre Chambre plutôt que de la vôtre.

Cela dit, permettez-moi de vous poser une question d'ordre budgétaire. Avez-vous évalué le coût pour les contribuables des propositions contenues dans ce projet de loi?

M. Boudria: Honorables sénateurs, il est presque totalement nul. Depuis les dernières élections, nous n'avons eu qu'un seul comité spécial du côté de la Chambre. Il était constitué de trois personnes et a duré quelques mois. Le projet de loi n'est pas rétroactif. Il s'agit de modifications techniques. La partie qui est liée à l'actuaire en chef ne fait que préciser les choses. Dans son rapport, il a relevé un manque de clarté et demandé une plus grande précision. Je dirais que le projet de loi n'a aucune incidence sur les recettes.

Quant à la proposition d'arrondir à la centaine de dollars inférieure, elle a probablement une incidence marginalement positive sur les recettes étant donné la simplification des calculs, ce qui est effectivement la seule chose visée.

En ce qui concerne la disposition relative à l'indemnité d'invalidité — et c'est le seul autre cas — elle n'a été demandée qu'une seule fois depuis que le régime de rémunération actuel est en place. En l'occurrence, elle ne se serait pas appliquée. Dieu nous garde d'avoir un autre cas d'invalidité à la Chambre ou au Sénat.

Pour calculer si une personne a droit à des prestations supplémentaires, il faudrait qu'elle ait eu droit à un traitement supplémentaire à l'époque où elle a démissionné. Il est difficile de prévoir la prochaine fois que ça arrivera. Quoi qu'il en soit, ça serait davantage que maintenant car, même s'il n'y avait qu'un cas en dix ans, ce serait sans aucun doute une augmentation des coûts. Toutefois, ce n'est certainement pas une augmentation par rapport à ce à quoi on s'attendait car il n'avait jamais prévu que quelqu'un soit privé de prestations à cause du manque de précision du texte.

Le sénateur Grafstein: Finalement, pourriez-vous me rappeler pourquoi on a choisi l'âge de 69 ans dans la loi?

M. Boudria: Si vous le permettez, l'expert qui vient du Conseil du Trésor va répondre à cette question.

M. Aaron Allen, gestionnaire des autres régimes statutaires, Secteur des pensions et avantages sociaux, Bureau de la gestion des ressources humaines, Secrétariat du Conseil du Trésor: On a retenu l'âge de 69 ans pour que la convention de retraite soit conforme aux exigences de la Loi de l'impôt sur le revenu en ce qui concerne l'accumulation des droits à pension dans le cadre d'un régime de retraite agréé. La portion des prestations — qui relève de ce qu'on appelle la «convention de retraite»-ne correspond pas à un instrument normal d'épargne en vue de la retraite admissible à une aide fiscale. Par conséquent, la loi exige que les cotisations à ce régime de retraite agréé cessent le 1er janvier suivant les 69 ans du cotisant et que les droits à pension cessent de s'accumuler à partir de cette date.

La date limite de 69 ans permet le transfert des droits à pension de la portion du régime de retraite prévue à la partie 1 de la loi, soit le régime de retraite agréé, à la partie 2 de la loi, la convention de retraite.

Le sénateur Grafstein: Quand je suis arrivé au Sénat, je pensais que 69 ans était un âge tout à fait approprié. Je ne le crois plus. Le gouvernement pourrait peut-être envisager de repousser cette limite.

Le président: S'il n'y a plus d'autres questions, j'aimerais vous remercier, monsieur le ministre, monsieur Allen et monsieur Lynch.

Nous allons maintenant entendre à nouveau le ministre, mais cette fois au sujet du projet de loi C-24. Il est accompagné de fonctionnaires du Bureau du Conseil privé, Mme Kathy O'Hara, sous-secrétaire du Cabinet (Appareil gouvernemental), et Michèle René de Cotret, agent principal du Conseil privé.

[Français]

M. Boudria: Honorables sénateurs, je suis heureux d'être ici pour vous parler du projet de loi C-24, La loi modifiant la Loi électorale du Canada et la Loi de l'impôt sur le revenu — financement politique. Principalement, ce projet de loi vise à accroître la transparence et l'équité du système électoral canadien.

J'aimerais revoir avec vous les principaux éléments du projet de loi, notamment les dispositions élargies en matière de divulgation, les interdictions concernant les contributions des personnes morales et des syndicats, les limites fixées aux particuliers et le financement public.

Ainsi, je compte démontrer que le projet de loi a été élaboré à partir d'une démarche éclairée qui repose sur les pratiques canadiennes en matière de financement politique, qui se fondent sur des procédures utilisées dans d'autres juridictions — notamment dans les provinces — et qui répond parfaitement aux diverses préoccupations.

Avant d'être étudié en troisième lecture à la Chambre des communes, le projet de loi a fait l'objet d'un examen approfondi du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. Celui-ci a examiné plus de 200 amendements. De ce nombre, il en a retenu 80. Les amendements apportés par le Comité et ceux faits à l'étape du rapport ont beaucoup amélioré le projet de loi tout en respectant ses principes clés. J'y reviendrai tantôt.

En ce qui a trait aux dispositions élargies en matière de divulgation, aux termes de la Loi électorale du Canada actuelle, seuls les partis enregistrés et les candidats sont tenus de divulguer au directeur général des élections les contributions reçues et les dépenses engagées.

Le directeur général des élections a qualifié, dans le passé et dans plus d'un rapport, du terme de trou noir du financement politique le fait que les autres participants politiques importants, à savoir par exemple, les associations de comtés ainsi que les candidats à la direction ou à l'investiture d'un parti dans une circonscription, n'étaient pas tenus de fournir ces informations. En d'autres termes, on avait des renseignements mais seulement dans un sorte de silo parce qu'à côté, il y avait d'autres contributions politiques qui n'étaient pas enregistrées du tout.

En vertu du projet de loi C-24, ces entités que je viens de nommer, devront dorénavant divulguer elles aussi les contributions reçues et les dépenses engagées au directeur général des élections qui devra ensuite publier le nom et l'adresse de celles qui ont donné plus de 200 $. Les associations de circonscription devraient faire rapport annuellement des contributions et des dépenses. Lors des courses à la chefferie, les candidats à la direction devraient rendre compte des contributions reçues lorsqu'il ou elle s'enregistre à titre de candidats, au cours des quatre semaines qui précèdent la date de la course à la direction du parti. Il ou elle ferait également un rapport de toutes les contributions reçues et des dépenses engagées dans les six mois après la fin de la campagne.

Les candidats à l'investiture locale d'une association de comté devraient rendre compte des contributions reçues et des dépenses engagées au cours des quatre mois qui suivent la course à l'investiture. Si des élections interviennent pendant cette période, on retarde le tout à quatre mois après la tenue des élections. Si on est en campagne électorale après un congrès à l'investiture, ceux d'entre vous qui ont été députés savez que les gens ont d'autres choses à faire, notamment se faire élire.

De plus, à compter du premier janvier 2005, les partis politiques admissibles à l'allocation trimestrielle dont je parlerai plus tard devraient rendre compte trimestriellement des contributions reçues. Bien que certains membres du comité aient indiqué que ces changements pourraient constituer un fardeau administratif important selon certains, la majorité s'est dite en faveur d'un élargissement des mesures en matière de divulgation. Des dispositions semblables à celles contenues dans le projet de loi sont largement appliquées dans sept provinces. Celles-ci obligent les associations locales à s'enregistrer et à rendre des comptes.

En Ontario, dans ma province, par exemple, ces mesures sont en place depuis 1975 avec des délimitations des circonscriptions électorales identiques à celles du gouvernement fédéral. Le système est établi avec des circonscriptions identiques et parfois avec les mêmes employés au gouvernement fédéral et provincial.

Même si les associations de circonscription ainsi que les candidats à la direction et à l'investiture d'un parti étaient assujettis à plus de contrôle suite à l'adoption de ces mesures, je crois que celles-ci sont raisonnables et qu'elles sont essentielles à l'atteinte des objectifs du projet de loi. Cela dit, le gouvernement a tenu compte des préoccupations à ce sujet et en ce sens, un certain nombre d'amendements ont été retenus par le Comité permanent.

Par exemple, l'une des principales préoccupations concernaient l'effet de la redistribution prévue l'an prochain en vertu de la Loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales. Le projet de loi a été amendé pour permettre aux associations de circonscriptions enregistrées déjà existantes — donc celles qui se seront enregistrées après le premier janvier mais qui devront être dessinées à nouveau suite au remaniement de la carte électorale — de continuer d'exister dans une nouvelle circonscription si l'ancienne est dissoute.

De plus, une procédure permettra à d'autres associations de s'enregistrer au préalable de façon à pouvoir agir dès la prise en effet du décret de représentation. Donc on peut faire les préparations en mars, avril ou mai, et cetera. Quand viendra le remaniement de la carte, le 19 juillet 2004, on pourra mettre les nouvelles structures en place, ayant pris les mesures d'avance.

D'autres amendements importants retenus par le Comité réduiraient le fardeau administratif. Je vous décrirai quelques exemples. Lorsque les partis organisent des collectes de fonds, ils ne sont pas tenus d'émettre des reçus pour les dons de moins de 25 $. Le projet de loi initial parlait de 10 dollars. On reconnaît que dans certaines soirées de prélèvement de fonds, on passe le chapeau pour défrayer le coût de la salle et que 10 $, tel que l'on pouvait le concevoir il y a une dizaine d'années, c'était un peu bas. On a modifié la somme jusqu'à concurrence de 25 $ à la demande des députés.

Dans un deuxième temps, le seuil au-delà duquel les candidats à l'investiture locale devront faire rapport des contributions reçues et des dépenses engagées est passé de 500 à 1000 $.

En d'autres termes, la nécessité de faire un rapport élaboré de tout cela n'est pas réellement nécessaire à un candidat d'un petit parti ou d'une investiture incontestée, par exemple, pour celui qui dépense 600 $ pour acheter des beignes aux délégués. On l'élimine jusqu'à 1000 $. À partir de 1000 $, on fait un rapport sommaire jusqu'à concurrence de 5 000 $. À partir de 10 000 $, il y a un rapport plus complet pour les endroits où il y a des campagnes d'investiture chaudement contestées. Là il y a aura un vérificateur et cetera, à partir de 10 000 $. Il y a trois niveaux pour ne pas encombrer tout le système avec de la paperasse.

Dans son évaluation concernant les mesures de divulgation, le directeur général a indiqué, à ma grande satisfaction d'ailleurs, que ces nouvelles mesures combleront ce qu'il a qualifié de trou noir. Il pourra vous en parler tantôt.

[Traduction]

En ce qui concerne l'interdiction des dons des sociétés et des syndicats et la limite imposée aux contributions des particuliers, des sondages récents indiquent que les Canadiens s'inquiètent de l'influence des syndicats et des sociétés sur le processus politique. Selon les recherches faites par Environics, 81 p. 100 des Canadiens appuient l'imposition de limites aux contributions. Cette information a été transmise aux responsables des élections. Les groupes types auxquels nous avons soumis le projet de loi se sont également prononcés sur la question.

Le projet de loi C-24 limiterait à 5 000 $ par an le montant des contributions qu'un particulier peut faire à un parti inscrit, à toutes ses associations locales, à ses candidats et aux candidats à l'investiture. Autrement dit, à l'ensemble du parti et des entités associées à ce dernier. Par exemple, si une personne fait un don de 3 000 $ à un parti politique, elle ne peut donner que 2 000 $ à une association locale affiliée à ce dernier ou à un candidat pour un total général de 5 000 $ par an. En passant, la limite était à l'origine de 10 000 $, mais le comité de la Chambre des communes a jugé bon de la réduire à 5 000 $, ce que j'ai appuyé.

Un particulier serait également autorisé à donner jusqu'à 5 000 $ aux candidats à la direction d'un parti inscrit. Les candidats pourraient contribuer à leur propre campagne, à titre de candidat, à hauteur de 5 000 $. Comme le savent les honorables sénateurs, la limite des dons des particuliers, qui était à l'origine de 10 000 $, a été réduite à la suggestion des témoins qui ont comparu devant le comité des communes, comme je l'ai dit.

Cette limite de 5 000 $ devrait établir un juste équilibre entre notre objectif, qui est d'éliminer la perception d'influence indue sur les intervenants politiques, et la nécessité d'assurer que les contributions, réelles ou potentielles, sont suffisantes pour que notre système électoral démocratique demeure sain.

Je note que plusieurs provinces ont déjà imposé des limites aux contributions, notamment le Québec, l'Ontario, le Manitoba, le Nouveau-Brunswick et l'Alberta. Tant le Québec que le Manitoba ont totalement interdit les dons des sociétés et des syndicats.

La limite des contributions va de 3 000 $ au Québec et au Manitoba jusqu'à 15 000 $ en Alberta. Dans ma propre province, l'Ontario, je pense qu'elle est de 7 500 $. Le projet de loi C-24 interdirait les contributions en provenance de sociétés, de syndicats et d'associations, mais permettrait à ces entités de faire dons d'une somme maximum de 1 000 $ par an à toutes les associations locales et les candidats à l'investiture d'un parti inscrit, mais pas au parti central. Autrement dit, cela permet à la quincaillerie locale d'acheter un billet pour le tournoi de golf au profit d'un candidat, mais c'est une exception mineure.

Les sociétés, les syndicats et les associations pourraient également faire une deuxième contribution de 1 000 $ lorsqu'une deuxième élection aurait lieu dans la même circonscription, la même année. Par exemple, hier, il y a eu deux élections partielles. Si, dans l'année suivant l'entrée en vigueur du projet de loi, il y avait des élections générales, le montant des dons de ceux qui auraient contribué à l'élection partielle serait effacé pour qu'ils puissent contribuer de nouveau. De toute évidence, deux élections la même année constituent une situation différente et nous devons le reconnaître.

Il y a une autre exception mineure à la limite de 1 000 $, qui concerne les candidats à l'investiture. Si quelqu'un contribue à la campagne d'un candidat qui ne gagne pas, autrement dit du candidat perdant, de toute évidence, la personne qui aura contribué à la campagne du candidat perdant n'aura aucune influence sur le candidat gagnant et personne ne pourrait prétendre qu'il aura été influencé, du moins pas de façon positive. Cela ouvrirait la porte à une contribution supplémentaire.

Toutes ces limites seraient automatiquement indexées en fonction de l'inflation et comme ça nous n'aurons pas à vous embêter à nouveau à l'avenir. Certains prétendent qu'on ne devrait pas interdire les dons des sociétés et des syndicats, ou que la limite devrait être plus élevée. À cela je réponds très clairement que ça serait aller à l'encontre du principe fondamental du projet de loi.

Par ailleurs, sept provinces sur dix se sont prononcées là-dessus. Au niveau provincial, les limites, oublions un instant leur montant, existent depuis longtemps. Quant à l'interdiction totale, elle existe dans deux provinces, dans l'une depuis longtemps et dans l'autre plus récemment, comme je l'ai dit il y a un instant.

Je vais parler maintenant des candidats à l'investiture. Au cours des consultations que j'ai tenues sur le projet de loi C-24, à cette même époque l'an dernier, les messages les plus puissants que j'ai reçus venaient des femmes députées et concernaient la nécessité d'égaliser davantage les chances au niveau de l'investiture.

C'est pourquoi le projet de loi limite les dépenses des candidats à l'investiture à 20 p. 100 de la somme que les candidats pouvaient dépenser durant les élections précédentes, en reconnaissance du fait que ces campagnes sont bien sûr d'une ampleur moindre. Après tout, on ne s'adresse pas à 100 000 électeurs quand on est candidat à l'investiture.

Je crois que cette limite de 20 p. 100 répond à la demande d'une plus grande équité au niveau de l'investiture, tout en assurant que les candidats puissent dépenser des sommes suffisantes pour que leur campagne soit efficace. N'oubliez pas que les dépenses personnelles des candidats ne sont pas comprises dans cette limite. Prenons, par exemple, un candidat qui doit couvrir une vaste région rurale et qui est obligé de louer un avion pour se rendre d'un village à l'autre, ou d'une localité autochtone à l'autre; ses dépenses personnelles n'entrent pas dans le calcul.

C'est déjà le cas pour les candidats à une élection et le même système s'appliquera aux candidats à l'investiture: les dépenses personnelles des candidats ne seront pas incluses pas dans le calcul.

J'avais initialement fixé la limite à 50 p. 100 du montant des dépenses des élections précédentes et je pensais que c'était beaucoup plus restrictif que ce que nous avions. Les critiques ont été presque unanimes. Tout le monde a dit que la limite était trop élevée et elle a été ramenée à 20 p. 100 à la demande de nombreux intervenants y compris, bien entendu, les députés.

[Français]

En terminant, j'aimerais parler des mesures de financement public contenues dans le projet de loi. Ces mesures visent essentiellement à compenser pour le manque à gagner des partis et des candidats qui auront des interdictions imposées aux personnes morales et aux syndicats et des limites fixées aux contributions des particuliers.

Ces mesures s'inscrivent dans la tradition de financement public du système électoral du Canada, mis en place en 1974, en même temps que la Loi sur les dépenses électorales. En d'autres termes, ce n'est pas d'hier qu'il y du financement public au Canada, contrairement à ce qu'on a dit récemment. Le financement existe depuis 1974, mais sous une forme différente.

La définition des dépenses électorales admissibles à un remboursement serait modernisée et élargie pour inclure le coût des sondages et le plafond du remboursement serait relevé en conséquence. En 1974, les sondages n'étaient pas fréquents, mais aujourd'hui ils font partie des dépenses ordinaires d'une élection. Je ne vois donc pas pourquoi ils ne feraient pas partie du total des dépenses admissibles.

Le taux de remboursement des dépenses électorales des partis passerait de 22 et demi p. 100, ce qu'il est actuellement, à 50 p. 100 dans le projet de loi. De plus, ce taux serait majoré à 60 p. 100 pour la prochaine élection, seulement afin de permettre la transition à ce nouveau système. Les candidats n'auraient à recueillir que 10 p. 100 des votes valides, contrairement à 15 p. 100 dans le passé, pour atteindre le seuil de remboursement des dépenses électorales. Ce sont les plus petits partis qui nous ont sensibilisés à ce dossier, car jadis, il n'y avait que 2 ou 3 partis importants à la Chambre des communes. Aujourd'hui, dans notre deuxième mandat, il y a cinq partis.

Le 15 p. 100 des votes qu'on avait dans le passé devient très élevé dans ce système pour avoir un remboursement. Donc 10 p. 100 a été perçu comme un montant très raisonnable. Preuve à l'appui, si vous vérifiez le résultat des élections partielles d'hier, vous verrez qu'il n'y a pas beaucoup de candidats, même avec cette limite, qui recevraient des fonds publics au lendemain d'élections.

Le taux de remboursement des dépenses électorales des candidats passerait de 50 p. 100 à 60 p. 100 afin de réduire l'impact que pourraient produire les limites de contributions sur la capacité des candidats à recueillir des fonds. De plus, les partis enregistrés auraient droit à une allocation de 1,75 $ par vote reçu à la dernière élection générale. Cette allocation serait versée à tous les trois mois.

C'est un système semblable à celui qui existe présentement au Québec, au Nouveau-Brunswick et à l'Île-du-Prince- Édouard. À titre de mesure transitoire destinée à aider les partis, le montant forfaitaire correspondant à l'allocation de 2004 serait versé dès le début de l'année. Pour les autres années, il le serait à tous les trois mois, toujours pour faire face à cette transition. Bien sûr, si quelqu'un reçoit des fonds supplémentaires à ceux auxquels il a droit lorsqu'il y a des élections une année, il va devoir les remettre. Lorsque le directeur général des élections du Québec s'est adressé au Comité permanent de la Chambre, il a indiqué que pour les Québécois, cette mesure faisait partie intégrante de leur système de financement politique au Québec.

En fin de compte, l'allocation correspondant à 1,75 $ par vote permettrait d'assurer que les restrictions ne nuiront pas aux partis et que les partis disposeraient des fonds nécessaires pour bien fonctionner en dehors d'une période électorale. Les partis ont un rôle très important dans notre système démocratique. Cette mesure renforcerait le lien entre les électeurs et leur parti également.

Des amendements importants ont été proposés par le Comité de la Chambre concernant les allocations et les associations provinciales et territoriales. Je vous donne l'exemple de mon parti.

Certains de mes collègues du caucus libéral ont indiqué que les besoins de ces associations devraient être pris en considération, ce qui, à mon avis, est tout à fait justifié. Ainsi donc, le Comité permanent de la Chambre a retenu un amendement qui autoriserait le Receveur général du Canada à verser une partie de ses allocations aux divisions provinciales et territoriales du parti, si le chef l'autorise.

En outre, les associations provinciales et territoriales reconnues par le chef pourraient elles-mêmes nommer des agents responsables de la délivrance des reçus d'impôt qu'il y aurait à Québec, Toronto ou Fredericton, si c'est là qu'est le bureau chef du parti au Nouveau-Brunswick, et la capacité d'émettre les reçus locaux bien sûr, pourvu que le chef du parti l'autorise.

Nous vivons dans une fédération et certains partis politiques sont fédérés. C'est le cas du nôtre; on me dit que le Parti conservateur est structuré de façon à peu près semblable aussi. Dans le cas de certains autres partis, cet élément ne s'applique pas parce que les partis sont plus centralisés.

Le projet de loi propose des modifications à la Loi sur l'impôt sur le revenu. Il est important de le souligner. Le montant d'une contribution à un parti politique enregistré donnant un droit à un crédit d'impôt de 75 p. 100 passerait de 200 dollars à 400 dollars. Je pense qu'en Ontario, on a 75 p. 100 du premier 350 $ ou à peu près. Cela passerait à 400 dollars au gouvernement fédéral. Chaque fourchette du crédit serait haussée en conséquence, c'est-à-dire de 200 dollars pour la partie de 50 p. 100 et de 200 dollars pour la partie de 33,3 p. 100. Le crédit d'impôt maximal pour toute contribution passerait de 1 075 dollars à 1 275 dollars.

En conclusion, le projet de loi C-24 représente un grand pas vers une véritable modernisation du système canadien de financement en public. Ces mesures s'inscrivent dans nos traditions nationales ou provinciales en matière de financement public et, à mon avis, garantiront davantage la transparence et l'équité d'un système auquel les Canadiens font confiance. C'est avec grand plaisir que je vous présente respectueusement ce projet de loi et que je répondrai à vos questions.

[Traduction]

Le président: En quoi est-ce que le projet de loi touche les associations de circonscription nouvelles? Aura-t-il un effet sur la formation de nouveaux partis, et si oui lequel?

M. Boudria: On ne crée une nouvelle association de circonscription que lorsqu'il y a redécoupage. Cela dit, dans certaines régions du pays, il n'y a pas d'associations de circonscription. Traditionnellement, certaines régions n'élisent généralement pas le candidat d'un parti donné. Après un certain temps, le nombre de volontaires tend à diminuer, particulièrement s'il n'y a personne localement pour attiser la ferveur des partisans. Cela arrive et dans ce cas, le parti central conserve le pouvoir d'émettre des reçus au nom de l'association de circonscription. Si, plus tard, une association de circonscription est créée, le chef du parti demande, par écrit, que le carnet de reçus et autres documents nécessaires soient remis au nouveau président de l'association.

En ce qui concerne le redécoupage, j'ai expliqué que l'on pourrait préenregistrer les nouvelles frontières de la circonscription une fois que les associations commencent à tenir ce que nous appelons «des assemblées de fondation» en fonction du redécoupage à venir. Elles peuvent alors devenir officielles le jour où elles entrent en vigueur.

Votre seconde question concernait les effets du projet de loi sur la formation de nouveaux partis, je crois. Le projet de loi n'aborde pas la question et les règles existantes continueraient à s'appliquer. Il ne crée aucun empêchement à cet égard. On peut dire qu'il y a très peu de différences avec le système actuel. Une personne pourrait, bien entendu, faire des levées de fonds, recueillir des signatures, et se livrer à toutes les autres activités associées avec la formation d'un nouveau parti. Après les prochaines élections, cette personne serait admissible à la subvention publique de 1,75 $ par voix, en fonction du nombre de voix qu'elle aurait recueillies.

Je le répète, selon le modèle québécois, le Parti libéral du Québec était admissible à recevoir des centaines de milliers de dollars, voire plus. M. Mario Dumont s'est souvent plaint qu'il n'avait reçu que 3 000 $ par an car il pensait que sa popularité — d'après les sondages — était plus grande et qu'il devrait donc recevoir davantage d'argent pour son parti. Toutefois, ce n'est pas une mesure tangible. Le seul élément tangible est l'acte physique que commet l'électeur, à savoir le vote par lequel il indique concrètement son appui dans le cadre d'une élection. Le montant est basé sur ce système, qui est en place dans deux provinces. Nous l'avons imité, il n'y a pas de différence.

[Français]

Le sénateur Nolin: Je voudrais vous remercier d'avoir accepté les amendements que j'avais tenté de présenter au Sénat il y a quelques années. Lorsque nous avons examiné la loi électorale, j'avais tenté de convaincre mes collègues d'étendre aux associations de circonscription les mesures de contrôle similaires à celles que vous proposez aujourd'hui. Premièrement, votre gouvernement va-t-il accepter d'examiner des amendements si le Sénat en vient à la conclusion que le projet de loi mérite d'être amendé?

M. Boudria: Il m'est difficile de commenter, n'ayant pas vu des amendements spécifiques. Vous reconnaîtrez toutefois que nous voudrions bien avoir cette loi en vigueur dès le 1er janvier 2004, afin que le tout puisse être en place lors des prochaines élections en 2004 ou 2005. Je ne sais pas qui sera notre chef de parti à ce moment et il ou elle prendra ses décisions le moment venu, comme un premier ministre a le droit de le faire. Mais le projet de loi deviendrait difficile à mettre en vigueur s'il devait faire l'objet d'une autre étude à la Chambre. Plus on retarde vers la date du 1er janvier, plus cela devient difficile à faire et je vous soumets cette situation respectueusement parce que j'ai témoigné à plusieurs reprises devant des comités sénatoriaux, et ce n'est certainement pas moi qui ai fait du langage désordonné auprès des honorables sénateurs.

Le sénateur Nolin: J'attire votre attention aux pages 33 et 34 du projet de loi, plus particulièrement aux articles 405.2(1), 405.2(2), 405.2(3) et 405.2(4). Ces quatre articles comportent des erreurs de renvoi. Si nous décidions d'amender ces articles, quelle procédure nous suggéreriez-vous pour que la loi soit adoptée avec les clarifications qui s'imposent. Parce qu'à la lecture des quatre articles que je viens de vous énumérer, il y a définitivement des erreurs de renvoi.

M. Boudria: Le sénateur Nolin a raison puisqu'il y a quatre erreurs, si je ne m'abuse. Ces quatre erreurs se retrouvent dans le texte en français. Lorsqu'on a fait la rédaction, on a fait la numérisation suite à des amendements et il semble qu'on l'ait corrigé dans l'un et pas dans l'autre. À tel point que, dans le cas du texte français, cela réfère à un article qui n'existe même pas.

On a porté ce dossier à l'attention du greffier de la Chambre des communes et du légiste parlementaire qui devaient établir des contacts avec leurs collègues du Sénat. À la Chambre des communes, nous sommes d'avis que ce n'est pas un amendement législatif en fait qui est nécessaire. Une correction administrative qui s'est faite dans des cas semblables dans le passé, à ce que l'on me dit, pourrait avec l'appui de tous se faire encore cette fois. Ce n'est pas un amendement comme tel.

Le sénateur Nolin: Lorsque vous avez déposé le projet de loi, le chiffre de 80 millions de dollars a été utilisé pour les coûts du remboursement des dépenses d'élection. Ce chiffre de 80 millions de dollars, de toute évidence, ne tenait pas compte des amendements qui seraient adoptés après l'étude au comité. Avez-vous le nouveau montant qui sert de base de calcul pour le remboursement des dépenses d'élection?

M. Boudria: Il y a deux dossiers, le remboursement des dépenses d'élection, c'est-à-dire le 50 p. 100 qui devient 60 p. 100.

Le sénateur Nolin: Et le 15 p. 100 qui devient 10 p. 100 dans les comtés.

M. Boudria: Non le 15 p. 100 qui devient 10 p. 100 n'est pas un amendement. C'était dans le projet de loi dès le début. En fait, il y a deux amendements; le 50 p. 100 qui devient le 60 p. 100 et le 50 p. 100 qui devient 60 p. 100 une seule fois.

Le sénateur Nolin: Vous avez aussi la question du remboursement des dépenses d'élection aux partis nationaux.

M. Boudria: C'est ce que je veux dire. Il y a le 50 p. 100 qui devient le 60 p. 100 pour les associations de comté dorénavant et le 50 p. 100 qui devient le 60 p. 100 pour les partis, une fois seulement. Ce sont les deux remboursements, un permanent et l'autre transitoire.

Vous allez me dire qu'il y en aura un troisième: dans la première année du nouveau système, les gens auraient droit au 1,75 $. Ils recevraient les 4/4 d'un coup sec. En fait ce n'est pas une dépense supplémentaire sauf si on tient compte du coût d'emprunt. On pourrait dire qu'il y a une légère dépense. Si les gens récoltent des fonds auxquels ils n'ont pas droit, ils seront enlevés du remboursement de cette année. Il n'y a pratiquement pas de différence.

Madame Michèle René de Cotret, agent principal, Bureau du Conseil privé, conseillère: Le remboursement au candidat qui passe à 60 p. 100 représente un impact financier net de 3,4 millions de dollars. Le remboursement au parti qui passe de 50 à 60 p. 100 seulement à la prochaine élection représente également 3,4 millions de dollars.

Le sénateur Nolin: C'est la valeur totale du coût?

M. Boudria: C'est la valeur ajoutée pour changer de 50 à 60 p. 100.

Le sénateur Nolin: Dans le prochain cycle de quatre ans, incluant les remboursements de dépenses d'élection et les subsides annuels, à quel montant arrivez- vous au total?

M. Boudria: Je vous donne l'exemple d'une année non électorale. Je vous énumère les articles: remboursement des coûts de vérification des associations, allocation annuelle du 1,75 $ et augmentation du crédit d'impôt. Nous avons une évaluation du ministère des Finances: on s'interroge à savoir combien de plus cela encouragerait les gens à donner quand le crédit d'impôt sera de 200 $ à 400 $. C'est une spéculation plus qu'autre chose. On évalue ce montant à 3 millions.

Le sénateur Nolin: Juste pour l'impôt.

M. Boudria: Le manque à gagner sur l'impôt.

Le sénateur Nolin: La mesure générerait un manque à gagner additionnel de 3 millions?

M. Boudria: C'est ce qu'on prétend. Ensuite l'allocation annuelle de 1,75 $ par vote, 22 millions $; un remboursement des coûts des vérificateurs pour les associations de comté, 1 millions $. Encore une fois c'est difficile de dire précisément parce que certaines associations pourront choisir de ne pas s'enregistrer et la vérification se fera au parti central.

Les coûts administratifs pour couvrir le lancement du programme à Élection Canada sont estimés à 3 millions de dollars, au total, 29. Dans une année d'élection, il y a seulement un ou deux de ces chiffres qui change. Il faudrait prendre à peu près les mêmes chiffres mais vous devriez ajouter le taux de remboursement des dépenses électorales qui jadis étaient de 22.5 p. 100. Elles s'élèveront à 50 p. 100. Cela fait 9 millions de dollars de dépenses de plus mais c'est seulement dans une année d'élection parce que ce sont des remboursements de dépenses électorales. S'il n'y a pas d'élection, il n'y a pas de dépenses.

L'élargissement des dépenses admissibles, les sondages et autres choses semblables donnent un million de dollars de plus. On verra également l'abaissement à dix p. 100 du vote valide afin que les candidats puissent recevoir le remboursement; on estime le coût de cette mesure à 1 million de dollars. C'est difficile à évaluer. On estime qu'il y aura un certain nombre de candidats entre 10 p. 100 et 14.999 p. 100. C'est seulement là que des coûts sont prévus parce que s'ils avaient déjà 15 p. 100 du vote et plus, ils bénéficiaient déjà de cette mesure.

L'augmentation à 60 p. 100 du taux de remboursement des dépenses aux candidats qui avaient jadis 50 p. 100, 3 millions de dollars; cela veut dire 47 millions de dollars. Une année électorale veut dire grosso modo 47millions de dollars et 29 millions de dollars pour une année non électorale.

Le sénateur Nolin: Sur un cycle de quatre ans, présumant qu'une élection générale a lieu aux quatre ans aux fins du cas de figure, le coût total de la mesure est d'environ 165 millions de dollars.

M. Boudria: On me dit 137 millions de dollars.

Le sénateur Nolin: Je prends vos chiffres de tout à l'heure, je multiplie par quatre, j'additionne une année électorale et j'arrive à 163 millions de dollars.

M. Boudria: C'est trois fois 30 millions de dollars et une fois 47 millions de dollars.

Le sénateur Nolin: Dans votre 47 millions de dollars, vous ajoutez les coûts annuels.

M. Boudria: C'est 137 millions de dollars à ce que l'on me dit. J'aimerais ajouter qu'il y a des dépenses actuelles toutefois qui disparaîtront pour les payeurs de taxes. On sait tous que des entreprises jadis faisaient une contribution électorale et la réclamaient comme une dépense d'affaires.

Ils n'auraient peut-être pas dû mais on sait bien que cela s'est fait. Ces taxes non payées dans le passé deviendront recouvrables parce ces contributions faites par des commerces n'existeront plus. La déduction d'impôt connexe n'existera plus.

Le sénateur Nolin: Avez-vous évalué ce manque à gagner?

M. Boudria: Non.

[Traduction]

Le sénateur Joyal: Pouvez-vous nous expliquer la logique derrière le paragraphe 435.01(1), qui porte sur le seuil que doivent atteindre les partis inscrits — je répète les partis inscrits — à savoir 2 p. 100 du nombre des votes validement exprimés lors de l'élection précédente ou 5 p. 100 du nombre des votes validement exprimés dans les circonscriptions.

Cela semble soulever une importante question liée à la Charte. Vous avez comparu devant notre comité au sujet de l'affaire Figueroa. En 2000, vous réclamiez des modifications. La Cour suprême du Canada, dans plusieurs décisions — Libman, Harvey, et le Renvoi concernant les circonscriptions électorales provinciales (Saskatchewan) (1991) — a clairement établi les normes de l'équité et de l'égalité politique.

Nous avons ici une situation où un parti est inscrit conformément à la loi. Autrement dit, le parti a satisfait aux obligations prévues par la loi. Conformément à l'objectif du projet de loi, le parti ne pourrait recevoir plus de 1 000 $ d'une société par circonscription. Il lui serait interdit de recevoir plus de 5 000 $ par électeur. Le parti ne recevrait aucune allocation trimestrielle, contrairement aux autres partis, pour la seule raison qu'il n'a pas atteint le seuil requis lors de l'élection précédente.

Vous avez cité l'exemple du Québec à nombreuses reprises. Toutefois, si je regarde l'article 82 de la loi du Québec, qui précise clairement comment calculer le montant d'argent versé à un parti sous forme de versements trimestriels ou de paiement annuel, il n'est pas fait mention du fait qu'un parti doit obtenir un certain nombre de voix s'il est toujours inscrit. Ce n'est pas un nouveau parti. C'est un parti qui a présenté des candidats et qui a satisfait aux obligations de la loi. Il se conforme à toutes les autres obligations qui lui sont imposées. Toutefois, pour la simple raison que c'est un petit parti, il est exclu.

Les décisions de la Cour suprême vous obligent à satisfaire à un critère très important parce que vous défavoriser les petits partis. Si vous défavorisez les petits partis, vous devez avoir de bonnes raisons pour ce faire. La Cour suprême a établi qu'elles étaient ces raisons.

En fonction des dernières élections générales, six partis seraient exclus. Le nombre total de voix qu'ils ont recueillies est de 235 184. Le Trésor devrait dépenser 411 572 $ si ces partis étaient admissibles à la même allocation que les autres.

Pourquoi avez-vous décidé de ne pas octroyer de fonds public à ces partis alors que vous maintenez leur statut de partis inscrits? Comment défendrez-vous cette disposition si elle est contestée devant les tribunaux?

M. Boudria: L'une des difficultés que nous avons est que cette question est actuellement devant les tribunaux. La commenter serait quelque peu délicat. Je vais l'aborder superficiellement puisqu'elle est actuellement devant les tribunaux.

[Français]

Dans l'arrêt Barrette, en 1994, la Cour d'appel du Québec avait convenu d'une exigence de 15 p. 100 des votes pour recevoir un remboursement. C'est toujours une exigence de pourcentage en vertu duquel on se qualifiait pour recevoir des fonds provenant des contribuables. Vous me direz qu'il n'est pas identique, mais c'est quand même un principe. À ce moment, on avait déclaré que cette exigence n'était pas contraire à la Charte.

Dans le cas de Figueroa, on a eu des décisions d'autres tribunaux dans lesquelles des distinctions claires avaient été faites en ce qui a trait au seuil requis pour mettre le nom d'une formation politique reconnue sur le bulletin de vote comme n'étant pas forcément le même pour se qualifier à d'autres bénéfices. La loi actuelle dit qu'il y a un certain niveau pour avoir son nom sur le bulletin de vote et un autre pour se qualifier à recevoir un financement public. Cette qualification est basée sur l'affirmation qu'il doit y avoir une certaine masse critique d'appuis pour se qualifier. On voit qu'elle existe déjà dans les arrêts Barrette et Figueroa. Cette qualification existe aussi à la Cour d'appel.

[Traduction]

Le sénateur Joyal: Oui, mais comme vous le savez l'affaire est actuellement en appel à la Cour suprême. Elle n'a pas encore été jugée. À l'heure actuelle, les petits partis ont accès à la même base de financement que les autres. Votre proposition limite établit essentiellement les fonds qu'un parti pourrait recevoir d'une source privée — que ce soit une société, un syndicat, un particulier ou autres.

Le problème, c'est que vous les privez d'une liberté dont ils disposent dans le système actuel. Par ailleurs, vous ne leur accorderez pas les mêmes avantages qu'aux autres partis bien qu'ils demeurent inscrits. Je le répète, cet article dit toujours «un parti enregistré», c'est à dire inscrit. C'est donc un parti qui a franchi le seuil que vous avez vous-même reconnu comme étant le seuil applicable en termes du nombre de candidats.

M. Boudria: Honorables sénateurs, la formule de 2 et 5 p. 100 existe déjà. Après une élection, afin d'être admissible à un remboursement à même l'argent des contribuables dans un autre contexte — celui des dépenses électorales — on utilise un seuil identique. Si on débourse l'argent des contribuables pour accorder un remboursement après une élection en fonction d'un critère de 2 et 5 p. 100, il est raisonnable que ce même critère s'applique au déboursement de fonds publics pour le versement d'une allocation annuelle de 1,75 $.

Si le seuil était différent, je soupçonne que les membres des deux Chambres m'auraient demandé pourquoi le seuil pour obtenir des fonds publics pendant une année électorale était différent de celui d'une année sans élections. De cette façon, il est identique dans les deux cas. Que ce soit un remboursement de dépenses électorales ou une allocation annuelle, dans les deux cas les fonds fédéraux sont octroyés selon la même formule.

Le sénateur Joyal: Comme je l'ai dit plus tôt, vous les privez de l'accès au même système de financement que les autres partis. Vous donnez aux grands partis un avantage que vous n'accordez pas aux petits partis. C'est essentiellement la distinction entre le remboursement et les voix. C'est pourquoi je pense que le projet de loi est vulnérable du fait de cette disposition. La dernière chose que nous voulons est une contestation devant les tribunaux en vertu de la Charte.

Vous dites que l'élimination du système a des avantages. Comparer cela aux avantages qui découlent du fait de leur donner le montant qu'ils recevraient pour continuer à promouvoir leur idéologie, à essayer d'accroître leur base, à éduquer les gens et pour avoir de meilleurs candidats aux prochaines élections. C'est ce que tous les partis feront avec l'argent qu'ils recevront du Trésor. Je ne vois aucune raison convaincante pour laquelle cela devrait leur être interdit. Je pense que cette mesure rend le projet de loi vulnérable à une contestation judiciaire fondée sur le fait que vous les privez d'un avantage actuel et que vous donnez aux autres partis une nouvelle compensation qu'eux ne recevront pas. De ce fait, à mon avis, vous vous exposez à une contestation judiciaire.

M. Boudria: Les deux se défendent, je suppose, honorables sénateurs. On pourrait avancer que si ce seuil n'existait pas, ce ne serait pas conforme aux autres parties de la loi. Pourquoi est-ce que ça ne l'est pas de cette façon?

On me soumet l'argument qu'il n'est pas logique que les autres soient admissibles à un remboursement pour remplacer les dons du secteur privé alors que ce groupe est privé du même avantage. C'est un débat intéressant.

Il fallait bien établir une limite quelque part. Nous avons arrêter notre choix en fonction de l'affaire qui est actuellement devant la Cour suprême et des décisions des cours inférieures. Le seuil de 2 et 5 p. 100 est raisonnable et convenable pour ce qui est d'obtenir un remboursement après une élection. Il est donc également raisonnable et convenable d'obtenir un financement pendant les années non électorales à raison de 1,75 $ par voix afin de continuer à alimenter les partis politiques. C'est la logique qui nous a guidés.

J'espère qu'il n'y aura pas de contestation judiciaire. On verra bien. Quant à la validité de la disposition, je suis sûr que Figueroa nous donnera raison. Les cours inférieures se sont déjà prononcées sur la question et dans la négative nous avons agi en conséquence. De notre point de vue, ce sera résolu dans l'affirmative.

Le sénateur Grafstein: Je vous félicite d'avoir piloté ce projet de loi très controversé à la Chambre. Nous sommes au courant des difficultés que vous avez rencontrées et je ne suis pas ici pour vous rendre la vie plus difficile — mais plus intéressante.

La Charte me préoccupe, mais d'un point de vue quelque peu différent de celui de mon collègue le sénateur Joyal. En effet, je me demande si vous avez reçu l'avis que ce projet de loi, sous tous ses aspects, est constitutionnel et qu'il n'est pas contraire à la Constitution et, en particulier, à la Charte.

M. Boudria: C'est bien le cas. Le projet de loi a été approuvé par le ministre de la Justice quant à sa constitutionnalité, ce que nous devons faire depuis 1982 pour toutes les mesures législatives. Des fonctionnaires de la Justice ont participé à la rédaction du projet de loi. Ils ont été à mes côtés depuis le début. Le fonctionnaire du Bureau du Conseil privé qui est à ma gauche a travaillé pour et avec le ministère de la Justice pendant tout le processus. Le projet de loi tout entier répond par l'affirmative à la question qui a été posée.

Le sénateur Grafstein: Est-ce que vos conseillers ont envisagé la question de l'article 15, les dispositions concernant l'égalité, et je crois que c'est l'article 3, le droit d'association tel qu'il s'applique aux particuliers et aux sociétés?

M. Boudria: Oui, effectivement. D'ailleurs, il y a dans le projet de loi une mesure qui reflète ce fait. Par exemple, la loi québécoise interdit les contributions des sociétés et des syndicats et une association ne peut pas non plus faire de dons. En vertu de notre mesure, une association peut contribuer au niveau local puisqu'une société ou un syndicat peuvent faire une contribution locale de 1 000 $. Vous aurez remarqué que le projet de loi est libellé de telle façon qu'il est question de sociétés, de syndicats et d'associations, pour respecter les principes de la liberté d'association dont vous vous enquérez.

Le sénateur Grafstein: Je vous remercie, mais ma question préliminaire est est-ce qu'il y a ou non une discrimination inhérente entre particuliers, associations, sociétés et syndicats du fait que certains sont assujettis à une limite et d'autres à une limite différente? La limite est de 5 000 $ pour un particulier et de 1 000 $ pour une société ou une association. N'est-ce pas de prime abord discriminatoire? N'est-ce pas discriminatoire en fonction du principe de l'égalité?

M. Boudria: Je vais demander à Mme René de Cotret de répondre à cette question ainsi qu'à celle que vous avez posée concernant l'article 15.

Le sénateur Grafstein: Je fais référence aux articles 404 et 405 qui imposent une limite différente pour les particuliers et les sociétés.

Mme René de Cotret: Le droit à l'égalité protégé par l'article 15 de la Charte s'applique uniquement aux particuliers. Il ne s'applique pas aux sociétés, aux associations ou aux syndicats. Il ne s'applique qu'aux particuliers.

Le sénateur Grafstein: N'est-il pas vrai qu'en vertu de la liberté d'expression et du droit d'association la question de l'égalité de traitement se pose ici? N'y a-t-il pas une jurisprudence ou au moins ne peut-on pas prétendre que les droits d'une société ou d'une association sont violés si on limite leur capacité de s'exprimer grâce aux dons publics qui sont faits aux partis inscrits?

Mme René de Cotret; Je conviens avec vous, sénateur, que la liberté d'association ou d'expression d'une société ou d'un syndicat pourrait être invoquée. Le gouvernement a pris pour position qu'un tribunal jugerait que, dans l'ensemble, leurs droits n'ont pas été violés, ou au moins que la violation constitue une limite raisonnable.

Le sénateur Nolin: Est-ce qu'on pourrait développer ce point? Excusez-moi, est-ce que vous faites référence à l'article 1 de la Charte?

Mme René de Cotret: Oui.

Le sénateur Nolin: Pourriez-vous nous faire part de votre raisonnement à cet égard, s'il vous plaît?

[Français]

Mme René de Cotret: Je ne peux pas vous parler en tant qu'avocat du comité, mais la position du gouvernement mentionne qu'une cour en viendrait à la conclusion qu'il s'agit d'une limite raisonnable dans une société démocratique, si on peut prétendre que le droit d'association ou d'expression d'un syndicat ou d'une société est possiblement compromis par la limite de 1 000 $.

[Traduction]

Le sénateur Nolin: C'est exactement ce que je voulais dire. C'est l'article 1.

Le sénateur Grafstein: C'est très utile à mon argumentation. Je vous remercie, sénateur Nolin.

Appliquons le critère de ce qui est raisonnable au député d'une petite localité rurale. Dans cette dernière, par exemple, il y a plusieurs individus aisés. Il pourrait y avoir une ou deux institutions financières qui y auraient une succursale. Si le critère est raisonnable dans cette localité et si l'institution financière — qui est une institution d'envergure nationale — a 1 000 $ à dépenser dans 301 circonscriptions et si un membre de cette petite localité, qui dépend de toutes les ressources de cette dernière — qui sont maigres — pour financer ses activités politiques, doit répartir très parcimonieusement les fonds qui lui viennent des sociétés, il se retrouve entre les mains de plusieurs particuliers qui peuvent être raisonnablement riches, ce qui, en fait, leur donne une plus grande possibilité qu'aux sociétés d'exercer une influence indue. Dans de telles circonstances, est-ce que la limite serait raisonnable?

Je m'adresse réellement à Mme René de Cotret plutôt qu'au ministre car je pense que nous essayons de voir ce qui est raisonnable en l'occurrence. Quelle est la limite raisonnable en vertu de la Charte?

M. Boudria: Monsieur le président, honorables sénateurs, il faut se souvenir de plusieurs choses. Le Québec et le Manitoba ont totalement interdit les contributions des sociétés. Si la limite des contributions des sociétés au niveau local est un critère de quelque chose peut-être plus fort que de ne pas avoir de limite du tout, on peut soutenir qu'imposer une interdiction complète est encore plus fort que ça. Certaines de ces mesures existent depuis des décennies — au moins au Québec. Au Manitoba, l'interdiction existe seulement depuis trois ou quatre ans. J'ignore si la constitutionnalité de ces dispositions a été contestée, mais elles sont toujours valides.

On prétend que, dans les circonscriptions rurales, il est plus facile d'obtenir des fonds du monde des affaires et que les particuliers comblent le manque à gagner si les contributions de ce dernier diminuent. Ce n'est certainement pas mon expérience en tant que député d'une région rurale. Les députés des zones urbaines ont présenté cet argument pendant tout le débat. Traditionnellement, un plus grand nombre de sociétés ont leur siège dans les circonscriptions urbaines, et ces députés ont pris l'habitude de recevoir des contributions importantes de ces dernières. Ce n'est pas le cas dans les régions rurales.

Enfin, les dispositions plus généreuses qui ont été prises à l'égard des contributions individuelles et des contributions moindres des sociétés au niveau local sont conçues pour favoriser les contributions des particuliers, particulièrement jusqu'à 400 $. Un don de 400 $ ne coûte que 100 $ à un particulier. C'est une combinaison de plusieurs facteurs qui fait ça — pas seulement la diminution des contributions des sociétés.

Je n'ai même pas mentionné que les dépenses électorales seraient remboursées plus généreusement qu'elles ne l'étaient par le passé et que des dépenses électorales qui n'étaient pas admissibles au remboursement par le passé le seront à l'avenir. Il faut tenir compte de toutes ces choses.

Le sénateur Grafstein: Monsieur le ministre, je ne conteste pas votre argument. Je m'intéresse réellement à la question constitutionnelle très précise de savoir si on peut justifier l'application du critère de la limite raisonnable en l'occurrence.

Nous parlons d'une base de faits qui est différente de ces deux lois provinciales. Nous ne les avons pas étudiées. Peut-être que si nous l'avions fait, nous parviendrions à une conclusion différente pour le Québec. Comme vous le savez, de temps à autre nous nous sommes démarqués du gouvernement quant à ses conclusions en matière constitutionnelle. Parfois, comme tous les gouvernements, il se trompe. Nous sommes ici pour nous assurer que ce projet de loi est à l'épreuve de toute contestation en vertu de la Constitution. S'il ne l'est pas, alors c'est quelque chose que nous, au Sénat, nous allons devoir étudier de très près.

J'aimerais réellement savoir ce que l'avocat a à dire. Je comprends fort bien les arguments politiques, et je ne les conteste pas. Pour le moment ce n'est pas l'application stricte de la Charte qui m'intéresse. Franchement, je pense que nous sommes au croisement entre la Charte et la démocratie.

Le président: Madame de Cotret, avant de répondre, si votre assistant peut vous être d'une aide quelconque, demandez-lui donc d'approcher son fauteuil de la table. Pourrions-nous avoir votre nom pour le compte rendu?

[Français]

M. Stéphane Perrault, agent principal du Bureau du Conseil privé/conseiller, Bureau du Conseil privé: Je travaille au Bureau du Conseil privé. La question posée soulève la justification de l'article premier de la Charte. Sans rentrer dans tous les détails, l'important est de reconnaître que la loi poursuit des objectifs très sérieux, qu'on pourrait qualifier d'importants et d'urgents, dans une société libre et démocratique. Ce langage consacré en matière constitutionnelle maintient la confiance de l'électorat dans le processus politique et cet objectif important a été reconnu par la Cour suprême dans l'arrêt Liebman. Comme nous le savons, les Canadiens considèrent que les corporations exercent une influence indue.

Le deuxième élément de cet objectif pourrait être qualifié d'égalitaire. Un président de compagnie qui donne déjà, à titre individuel, et qui contrôle, dans les faits, une corporation, lorsque sa compagnie donne de l'argent corporatif, se trouve à voter deux fois, c'est-à-dire à exercer de l'influence en portant deux chapeaux.

Il y a donc un élément égalitaire et un élément de protection de la confiance de l'électorat dans le système démocratique. Ce sont deux objectifs qui sont fondamentaux dans notre tradition constitutionnelle et qui sont reconnus par la jurisprudence.

Je signalerais également que la Cour suprême des États-Unis — une cour assez libertaire dans sa tradition, beaucoup plus que notre Cour suprême — a reconnu dans l'affaire Buckley, en 1976, la validité, pour les mêmes raisons essentiellement, d'une interdiction complète faite aux corporations et aux syndicats de fournir des fonds aux caisses des partis.

[Traduction]

Le sénateur Grafstein: C'est un début. Je vous remercie de votre réponse. Nous aurons d'autres questions.

Le sénateur Beaudoin: Ce que vous dites m'intéresse beaucoup. L'article 1 parle de limites raisonnables. Toutefois, ce qui nous préoccupe ici, ce sont les droits des particuliers, qui sont le sujet de la Charte. Comme vous l'avez dit, il peut s'appliquer aux sociétés. Il est vrai que l'article 2 mentionne la liberté d'association. Elles jouissent également de la liberté d'expression, bien entendu.

Dans quelle mesure pensez-vous qu'il doit y avoir égalité entre une société et un particulier? À prime abord, j'ai tendance à penser qu'il y a une relation. Il devrait y avoir une certaine égalité, sauf dans la mesure des limites prévues par l'article 1 de la Charte.

Dans notre société, il est sans doute raisonnable d'accepter, sinon nécessairement la parité entre individus, mais au moins l'intérêt collectif. Quelle est votre opinion là-dessus?

M. Perrault: Je ferai une ou deux remarques. Je ne veux pas entrer trop dans le détail des questions juridiques simplement par respect pour le secret professionnel. C'est une considération importante dont il faut tenir compte quand nous venons témoigner ici.

La Cour suprême, dans un certain nombre d'affaires assez récentes, et très fermement dans l'affaire Delisle — la requête d'un agent de la GRC concernant le droit des membres de la GRC de se constituer en syndicat aux termes de la loi — a indiqué que nous ne devrions pas trop rapidement appliquer l'article 2 à des questions d'égalité qui relèvent davantage de l'article 15.

Le sénateur Beaudoin: Je suis d'accord.

M. Perrault: Elle insiste là-dessus depuis un certain temps. Nous savons que la protection des droits garantis par l'article 15 ne s'applique pas aux sociétés. Toutefois, comme vous l'avez si justement fait remarquer, elles jouissent de la liberté d'expression. Cela leur est amplement reconnu.

Cela nous ramène à la question des limites raisonnables prévues à l'article 1. Convient-il de traiter différemment les sociétés et les particuliers dans un système démocratique? Je répondrai que, dans notre système électoral — qui est l'objet de nos discussions — les particuliers ont le droit de voter, de constituer un parti, de se présenter comme candidats. Pas les sociétés. Le président d'une société n'a qu'une voix, celle qu'il a à titre de simple citoyen.

Le principe de l'égalité entre les gens qui ont de l'influence dans le monde des affaires et ceux qui n'en ont pas se retrouve dans le projet de loi.

Le sénateur Beaudoin: Nous devons toutefois faire la différence entre deux droits: le droit d'expression garanti à l'article 2 et le droit à l'égalité garanti à l'article 15. Nous ne nous préoccupons pas ici du droit d'expression puisque, de toute évidence, il existe. Il n'est pas compromis.

Le sénateur Nolin: Non, je pense qu'il fait partie de la discussion. Bien sûr qu'on empiète sur le droit d'expression des sociétés.

Le sénateur Beaudoin: Nous discutons de deux droits en même temps. L'un est le droit à l'égalité en vertu de la loi, garanti par l'article 15. Bien sûr que l'article 1 s'applique à l'article 15, sauf peut-être pour les hommes et les femmes puisque l'article 28 dit que, indépendamment des autres dispositions de la Charte, la loi s'applique également aux personnes des deux sexes. Certains juristes en sont venus à la conclusion que l'égalité entre les hommes et les femmes était absolue. Ça se pourrait très bien.

M. Perrault: Ça l'est certainement dans le cadre de la présente mesure législative.

Le sénateur Beaudoin: Je veux en être tout à fait certain. Notre Constitution, en ce sens, est certainement la meilleure que j'aie jamais vue en ce qui concerne l'égalité entre les hommes et les femmes, parce qu'elle affirme que, indépendamment des autres dispositions de la Charte, la loi s'applique également aux deux sexes. On ne peut pas mieux faire. Par conséquent, ça s'applique aux hommes et aux femmes.

En ce qui concerne les sociétés et les particuliers, la Charte traite avant tout des droits individuels. Nous sommes tous d'accord là-dessus. Toutefois, quand une société peut faire la même chose en vertu de la loi, alors je pense que nous avons plus de latitude. Nous avons davantage de latitude en vertu de l'article 1 en ce qui concerne les droits individuels et les droits collectifs que nous n'en aurions généralement dans le cas de deux particuliers, parce que l'un est une société et l'autre un particulier. Je ne connais aucun cas où la Cour suprême a établi une distinction entre une société et un particulier en vertu de l'article 15, mais il doit y en avoir.

M. Perrault: Certes, dans la décision Figueroa mentionnée plus tôt, la cour d'appel a indiqué que seules les personnes physiques et les particuliers, plus précisément, bénéficient de la protection de l'article 15.

Le sénateur Beaudoin: Pas les sociétés?

M. Perrault: Non. Plus précisément, dans cette affaire, il a été décidé que les partis politiques ne bénéficiaient pas de la protection de l'article 15. La question est devant la cour et il va falloir tout rediscuter.

Le sénateur Beaudoin: Est-elle devant la Cour d'appel?

M. Perrault: Oui, devant la Cour d'appel de l'Ontario.

Le sénateur Beaudoin: Elle n'est pas devant la Cour suprême du Canada.

M. Perrault: Non.

Le sénateur Beaudoin: Tant que la Cour suprême du Canada ne se sera pas prononcée, le débat restera ouvert.

M. Perrault: Je n'ai pas toute la jurisprudence en tête, mais je suis certain qu'en l'occurrence, les sociétés ne bénéficient pas de la protection de l'article 15.

Le sénateur Beaudoin: Cela m'intéresse beaucoup.

Le président: Sénateur Beaudoin, sénateurs, il nous reste très peu de temps avec le ministre. Nous ne disposons que d'environ dix minutes. Je vais essayer de conclure.

M. Boudria: J'aimerais indiquer, si je le peux, que les fonctionnaires seront à votre disposition pour une réunion demain, je crois. Je ne sais pas si cela ferait une différence pour les sénateurs, mais ils pourraient préparer des questions supplémentaires à leur poser sur cette question ou sur toute autre question.

Le président: Vous avez tout à fait raison, monsieur le ministre. Je vous remercie.

[Français]

Le sénateur Nolin: Monsieur le président, j'aimerais une confirmation de la part du ministre mentionnant que la loi s'applique ou ne s'applique pas aux fiducies, plus spécifiquement aux fiducies créées pour les chefs des différents partis politiques.

À l'occasion, un chef de parti peut engager des dépenses que le Parlement reconnaît lorsque ce chef du parti est un député. Lorsqu'il est le premier ministre, ces dépenses sont supportées par le gouvernement. C'est à ce moment que l'on crée ce genre de fiducie pour couvrir les dépenses spécifiques du chef du parti. J'aimerais savoir si la loi va s'appliquer à ce genre de fiducie.

M. Boudria: En ce qui a trait aux élections, différentes choses sont perçues comme étant des fiducies. Selon ce qu'on lit dans les journaux, des individus auraient une fiducie dans laquelle le député est fiduciaire pour lui-même. À mon avis, il est évident qu'il ne s'agit pas d'une fiducie. On ne peut pas être fiduciaire pour soi-même.

Il existe trois catégories de fiducie; premièrement, celles qui sont créées par des groupes de personnes qui incluent des parlementaires. Par exemple, ce peut être un groupe de personnes qui organise une campagne de financement pour venir en aide aux agriculteurs de l'Ouest canadien ayant subi une sécheresse l'an dernier. Il peut y avoir dans ce groupe quatorze individus dont deux parlementaires qui amassent des fonds sous forme de fiducie. Cela n'a rien à voir avec la politique et, bien sûr, le projet de loi ne s'adresse pas à ce genre de groupes. Il est possible que l'autre projet de loi qu'on étudiera à l'automne, la Loi concernant le Code d'éthique, s'applique dans certains cas.

Le type de fiducie qui accorde un bénéfice personnel à un parlementaire va peut-être davantage dans la définition du sénateur Nolin. Encore une fois, il ne s'agit pas d'un dossier qui relève de la Loi sur les élections ou d'Élections Canada. Ce dossier doit être résolu au Sénat ou à l'autre endroit. La situation d'une personne titulaire d'une charge publique doit être résolue par le Code du Premier ministre. Mais à toute éventualité, ce dossier pourra être résolu par l'un des trois codes qui existera. Bien sûr il y a d'autres éléments à prendre en considération, notamment à savoir si c'est un bénéfice personnel pour lequel la Loi sur l'impôt s'applique. C'est la deuxième catégorie de fiducie.

La troisième catégorie correspond au cas où des fonds sont accumulés et utilisés dans le cadre d'une campagne électorale. À ce moment, toutes les règles s'appliquent et on ne peut pas prétendre que ces fonds n'ont pas de nom. On va les utiliser dans une campagne électorale parce que ce sont des fonds provenant de telle ou telle fiducie. Ce n'est pas logique.

Je rajoute une quatrième catégorie. Les formations politiques ont souvent des comptes de banque séparés. Ce ne sont pas réellement des fiducies mais on les appelle quand même des fiducies. Le Parti libéral a créé le fonds Judy LaMarsh qui encourage les femmes à se porter candidates. À chacune des campagnes électorales, on répartit ce fonds parmi les femmes candidates. Ces sommes d'argent ont fait l'objet de reçus au préalable. Ce ne sont donc pas de fonds cachés.

Il serait dorénavant interdit de créer un fonds semblable et de l'utiliser dans des campagnes électorales avec des fonds cachés. Les fonds devront faire l'objet de reçus afin que chaque sou qui est dépensé en campagne électorale fasse l'objet d'un reçu en bonne et due forme.

Ce n'est pas le cas à l'heure actuelle. Même les associations de comté sont en quelque sorte des fiducies. Il peut y avoir 50 000 $ contenus dans un fonds d'association de comté, on peut prendre 10 000 $ et le transférer à la campagne du candidat. C'est tout à fait correct. Mais dans le passé, ces fonds pouvaient ne pas faire l'objet d'un reçu. Les fonds étaient pêle-mêle, de telle sorte qu'on ne savait pas quels fonds avaient fait l'objet d'un reçu.

L'objectif est que les fonds qui proviennent d'une association de comté ou d'un compte séparé doivent dorénavant faire l'objet d'un reçu. Il est interdit de prélever des fonds sans donner de reçu. Si un parti politique a un compte séparé et s'il reçoit des fonds, il fera l'objet d'un reçu d'avance. Il ne restera que les fonds qui étaient dans la caisse avant l'entrée en vigueur du projet de loi, bien sûr.

Le sénateur Nolin: Une corporation ne pourrait pas contribuer à un fonds dont le bénéficiaire serait, par exemple, le chef du parti, si celui-ci s'en servait pour défrayer des dépenses partisanes?

M. Boudria: Une corporation ne pourrait pas contribuer à un fonds à des fins électorales. Si ces fonds servaient à augmenter son salaire, par exemple, ce serait un problème différent qui aurait à voir avec le code de déontologique.

Le sénateur Nolin: Lorsque vous parlez du processus électoral, vous l'entendez dans son sens très large. Il ne s'agit pas uniquement de la période électorale, mais de tout le processus démocratique canadien. Ce n'est donc pas une période à tous les quatre ans, mais bien 365 jours par année, qu'il y ait une activité partisane ou pas?

M. Boudria: Bien sûr.

Le sénateur Nolin: Si nous avons encore le temps, M. le président, j'aimerais poser une autre question spécifique à propos du Québec.

[Traduction]

Le président: Est-ce que votre question pourrait attendre d'être posée aux fonctionnaires?

Le sénateur Nolin: Je voudrais savoir si le comité des communes a entendu M. Côté, l'ex-directeur général des élections du Québec?

M. Boudria: Il n'a pas témoigné devant le comité des communes, par contre, le directeur général des élections actuel a comparu.

Le sénateur Nolin: Êtes-vous au courant de ce qu'il a dit en public — après avoir quitté son poste de directeur général des élections du Québec — il a dit que le processus au Québec qui interdit entièrement les dons des sociétés était presque une farce. Tout le monde au Québec sait qu'une société qui veut faire un don à un parti politique peut le faire, et le fait. Êtes-vous au courant de cette déclaration de M. Côté? N'aurait-il pas été important de lui demander de s'expliquer?

[Français]

M. Boudria: Je n'étais pas au courant que la déclaration avait été faite par M. Côté, mais j'étais au courant que l'allégation avait été faite. Quand on a préparé le projet de loi avec les conseils d'Élections Canada, on a inclus une clause échappatoire afin de s'assurer qu'il n'y ait pas collusion ou autre pour contourner la loi afin de détourner des contributions corporatives en contributions individuelles. Ces contributions seraient aussi illégales. Autrement dit, un président de compagnie ne pourrait décider d'augmenter ses employés de 1000 $ et leur demander le lendemain de faire une contribution de 200 dollars au candidat du parti x de leur circonscription. Ce serait illégal, selon le projet de loi. L'article 405.2 du Code y fait clairement référence.

[Traduction]

Le sénateur Grafstein: J'ai une question supplémentaire pour M. Perrault. J'ai écouté avec grand intérêt sa réponse à ma question précédente. Je me demande s'il ne serait pas d'accord pour dire qu'une société, un syndicat ou une association ont des droits reconnus par la Constitution qui incluent le droit d'exprimer et de promouvoir leurs intérêts librement et ouvertement?

M. Perrault: Je pense que c'est effectivement le cas. C'était l'essence de ma réponse précédente, sous réserve bien entendu de l'article 1, à savoir qu'est-ce qu'une limite raisonnable?

Comme je l'ai fait remarquer, la Cour suprême des États-Unis a approuvé l'interdiction des dons des sociétés. Nous ne parlons pas ici — et le ministre l'a dit très clairement —d'interdire mais de limiter. Même l'interdiction totale avait ses partisans. Nous avons ici une mesure plus permissive — plus permissive que celle des autres administrations, y compris le Québec et le Manitoba.

Le sénateur Grafstein: Je comprends ce que vous dites. J'essaie de revenir au contexte restreint de notre Charte et à la «sainte trilogie», soit l'égalité, la liberté d'expression et la liberté d'association. Il semble que ces trois droits, ou privilèges ou principes, entrent en jeu dans la question très précise de savoir si une association, un syndicat, un partenariat ou une société peut exprimer et promouvoir ses intérêts en exerçant la fonction la plus importante dans une démocratie, soit choisir des candidats qui expriment ou promeuvent leurs points de vue, ce qui est parfaitement permis et désirable dans une société démocratique.

Je reviens à la charge avec ma question. Je comprends qu'il faille des limites. Je ne suggère pas un système à l'américaine permettant des contributions illimitées de la part des sociétés et des particuliers. Je le comprends et je félicite le ministre d'avoir imposé une limite raisonnable aux dépenses venant d'une source donnée.

Toutefois, cela dit, les limites étant ce qu'elles sont, il semble que l'on marginalise et que l'on rende quasiment inopérantes la liberté d'expression, l'égalité et la liberté d'association des sociétés, des syndicats et des associations. En passant, il existe toute une série d'associations qui ne sont ni des syndicats ni des sociétés — les coopératives par exemple.

M. Perrault: Ces associations reçoivent une certaine reconnaissance dans le projet de loi. Pour ce qui est des limites, vous dites que vous êtes d'accord sur l'idée des limites mais que le niveau de ces limites vous préoccupe.

Le sénateur Grafstein: Non, c'est la parité entre les deux limites. Il y a une différence de cinq à un.

M. Perrault: Je ne peux que répéter la position que j'ai déjà énoncée. Une société se trouve dans une situation différente de celle d'un particulier. Elle ne jouit pas de droits démocratiques, bien qu'elle ait le droit de s'exprimer. Des personnes réelles dirigent les sociétés et ces personnes réelles ont le droit de faire une contribution. Leur permettre également de contribuer par l'intermédiaire des sociétés qu'elles dirigent les mettrait dans une situation privilégiée au sein de la société.

Aux États-Unis, la jurisprudence est très abondante sur la question des limites et de l'interdiction des contributions. L'un des points essentiels qui a été établi est que le niveau de la limite n'est pas du tout important. Je vais expliquer pourquoi.

La notion qu'une contribution est un moyen d'expression, un discours comme on dirait aux États-Unis — est considérée comme largement symbolique. On reconnaît que peu importe si un particulier donne 3 000 $, 4 000 $ ou 1 000 $, l'expression symbolique de son appui est là, quel que soit le montant. Il peut y avoir des variations, en effet, en donnant davantage, on exprime un appui plus grand. Toutefois, dans la jurisprudence des États-Unis, ce n'est pas un élément critique; à partir du moment où on fait un geste par lequel on symbolise son appui, l'élément de communication est là. Cet élément se retrouve dans le projet de loi.

Le président: Je vais demander au sénateur Joyal de poser une dernière question. Les autres devront attendre que les fonctionnaires reviennent.

Le sénateur Joyal: Monsieur Perrault, je cite le paragraphe 62 de la décision du juge Molloy de la Cour de justice de l'Ontario dans l'affaire Figueroa que nous connaissons tous:

[...] Dans le contexte de l'article 15 de la Charte et de la législation antidiscrimination, la Cour suprême du Canada a décidé que, même s'il n'y a pas obligation d'offrir un avantage à des employés, une fois qu'il a été accordé, les principes de l'égalité exigent qu'il le soit à tous les employés sans aucune discrimination: Brooks c. Canada Safeway Ltd., [1989]

Le principe invoqué par le sénateur Grafstein est que, si on impose une limite et qu'on reconnaît aux sociétés le droit de participer au financement, les limites doivent être les mêmes. C'est essentiellement ce que propose le sénateur Grafstein comme étant une interprétation juste des droits à l'égalité qui sous-tendent l'approche prise par le gouvernement.

Il ne s'agit pas de contester les limites. Je pense que les gens en acceptent le principe. Vous n'avez pas exclu les sociétés, vous leur conservez un rôle, le principe de l'égalité appuie donc l'argument qu'il doit y avoir parité entre les limites, étant donné les précédents établis par la Cour suprême.

M. Perrault: La réponse que je donnerais personnellement serait double. Je vois que le ministre aimerait intervenir.

L'idée d'accorder le même traitement à tous a été spécifiquement rejetée par la Cour d'appel de l'Ontario; le jugement Molloy a été rejeté en première instance. En supposant qu'il soit obligatoire d'accorder l'égalité à tous, si on ne le fait pas, il faut le justifier.

À notre avis, il y a une raison cohérente pour ne pas prévoir exactement le même montant pour tous. Elle serait validée par une analyse de la Charte à la lueur de l'article 1.

M. Boudria: Dans la décision Libman, vous vous souviendrez qu'elle concerne le référendum au Québec et le droit d'association... Nous nous sommes inspirés de l'obiter dictum de Libman pour rédiger un projet de loi entièrement différent en ce qui concerne les restrictions imposées aux tiers. Je me souviens raisonnablement bien de cette décision car elle contient un passage que j'ai trouvé très intéressant. La Cour suprême y dit que ce sont les candidats qui briguent une charge publique et non pas ce que la cour a appelé «des associations». Dans ce contexte, les associations désignent les tiers.

Clairement, Libman établit une distinction entre les associations et les particuliers, à savoir les candidats. Il n'y a pas de parallèle, mais une asymétrie dans cette affaire. On n'a pas jugé que l'un était égal à l'autre en ce qui a trait à un droit démocratique donné. Il serait peut-être utile, quand les fonctionnaires reviendront demain, qu'ils apportent cette documentation.

Le sénateur Grafstein a parlé des limites de 1 000 $ et de 5 000 $. Ce ne sont pas du tout les mêmes. La restriction de 1 000 $ s'applique uniquement au niveau local. La restriction de 5 000 $ pour les particuliers s'applique à la fois au niveau local, au congrès d'investiture et au niveau national. Au niveau local, les limites ne sont sans doute pas loin d'être identiques puisqu'on oppose trois niveaux à un seul et que la masse critique n'est donc pas la même dans les deux cas. Ce ne sont pas du tout les mêmes. Ce sont deux choses différentes. L'une s'applique de façon plus générale que l'autre. La distinction, si cela peut vous aider, n'est sans doute pas aussi importante que ce que nous croyions au début car elle s'applique à un forum différent.

Le président: Je vous remercie, monsieur le ministre, d'être venu aujourd'hui. Nous vous avons gardé beaucoup plus longtemps que ce que nous avions promis.

Je vous remercie, madame René de Cotret, madame O'Hara et monsieur Perrault.

Notre ordre du jour indique que M. Kingsley et Élections Canada devaient être nos prochains témoins. Toutefois, M. Kingsley a gracieusement accepté de laisser Mme Alexa McDonough le précéder. Je l'ai assuré qu'elle m'avait signalé qu'elle ne ferait qu'une brève déclaration et nous espérons que les questions ou les interactions des sénateurs ne dureront pas plus d'une demi-heure.

Sénateurs, le comité directeur a pris la décision d'inviter des représentants des partis inscrits représentés et reconnus à la Chambre des communes. Malheureusement, un seul parti a pu accéder à notre demande de se joindre à nous ce soir et de faire un exposé. Nous accueillons donc Mme Alexa McDonough. Elle n'a pas besoin d'autre introduction.

L'honorable Alexa McDonough, député: Je dois avouer d'entrée de jeu que je me sens légèrement désavantagée, même en étant brève, sachant que vous êtes assis ici depuis longtemps déjà. Quelqu'un a dit un jour que plus longtemps on reste assis plus c'est difficile de se concentrer. J'espère que ça ne sera pas le cas. Je sais également que M. Kingsley fera un exposé après moi. Je lui sais gré de m'avoir permis de passer avant lui.

Je ne suis pas constitutionnaliste et j'ai remarqué qu'un certain nombre de questions posées aujourd'hui étaient de nature juridique et constitutionnelle. Je ne suis même pas juriste et je n'ai aucun de mes conseillers avec moi. J'espère que ça ne rendra pas nos échanges inintéressants.

Je pourrais dire beaucoup de choses au sujet de la mesure législative au nom du Nouveau Parti démocratique et du groupe parlementaire du NPD, mais je dirai d'entrée de jeu que nous sommes tout à fait en faveur du principe du projet de loi et que, dans l'ensemble, nous en appuyons la teneur. Nous sommes heureux que certains amendements aient été acceptés.

Je dirais également qu'un certain nombre d'amendements qui avaient été proposés par nous-mêmes ainsi que, dans certains cas, par d'autres, n'ont pas été retenus. Nous en sommes déçus. Je ne veux pas m'éterniser sur ces mesures. Il y a dans le projet de loi une disposition — c'est un amendement — prévoyant que la loi sera entièrement réexaminée après les prochaines élections à la lueur de ce qui se sera passé. Nous aurons donc probablement l'occasion de revenir à la charge.

J'aimerais mentionner brièvement deux choses dont nous estimons qu'elles méritent plus d'attention et c'est d'ailleurs pour ça que j'ai choisi de comparaître devant le Sénat ce soir. Il y a deux autres questions plus conséquentes, plus graves, qui nous causent d'énormes préoccupations. Nous estimons que, dans une certaine mesure, ces deux autres questions dont je parlerai dans un moment compromettent réellement le principe du projet de loi que, par ailleurs, nous appuyons sans réserve. En fait, je dirai même qu'elles réduisent à néant, dans une certaine mesure, l'essence même du projet de loi.

J'ai été heureuse d'entendre dans la discussion qui a suivi l'exposé de M. Boudria qu'on s'intéressait beaucoup aux questions relatives à l'égalité de traitement. Je ne veux pas détourner votre attention de l'intérêt que vous portez à la question du traitement des particuliers et des sociétés. Toutefois, le but déclaré du projet de loi est d'éliminer l'influence, ou l'influence perçue, des gros bailleurs de fonds sur notre système politique démocratique. Cet objectif est réduit à néant de plusieurs manières.

Je vous demanderais d'accorder au moins une considération égale à la question de l'équité du traitement accordé aux sociétés par rapport à celui qui est accordé aux syndicats. Toute étude juste du projet de loi, sous sa forme actuelle, révélerait que le traitement n'est tout simplement pas équitable et c'est la raison pour laquelle je suis ici aujourd'hui pour vous demander d'envisager des amendements. Je pense qu'il faut régler le problème.

Je dirais pour commencer que la position du Nouveau Parti démocratique est, et ce depuis un certain nombre d'années, que la loi la plus démocratique que nous pourrions mettre en place interdirait tout don de la part des sociétés et des syndicats. Je n'en expliquerai pas toutes les raisons, mais je me ferai un plaisir d'en discuter si vous avez des questions à ce sujet. Nous estimons que la façon dont les dons des sociétés et des syndicats sont traités crée une situation très inéquitable. Étant donné que l'objectif, comme on l'a répété à maintes reprises, est d'égaliser les chances, c'est regrettable.

Avant de revenir là-dessus, je dirai qu'il y a une question qui n'a pas été abordée au début de la séance — mis à part une remarque cavalière de la part de M. Boudria — à savoir celle des fiducies. Vous aurez sans doute remarqué que je me suis brièvement entretenue avec le sénateur Buchanan avant qu'il n'ait été obligé de partir pour se rendre à une réunion du Comité de l'énergie. J'ai trouvé cette petite discussion sur les fiducies très intéressante.

Cela me ramène à l'époque où j'étais à l'Assemblée législative de la Nouvelle-Écosse et où le gouvernement conservateur avait pris des mesures importantes pour réformer le financement des partis politiques et des élections. Nous avions insisté sur la question des fiducies, mais le gouvernement du jour a décidé de ne rien faire à cet égard. Le résultat de cette décision est que — et il y a sans doute des gens dans cette salle qui savent que c'est vrai et d'autres qui seront choqués de l'apprendre, mais je pense que je ne me trompe pas — le Parti libéral de la Nouvelle-Écosse jouit d'une fiducie de 3,5 millions de dollars, somme accumulée en majorité par des moyens illégaux. Cette affaire a fait l'objet de condamnations devant un tribunal pour trafic d'influence, transactions frauduleuses et une troisième infraction qui me reviendra dans un instant.

Le sénateur Nolin: Corruption, par hasard?

Mme McDonough: Oui, mais c'était quelque chose de plus précis. J'y reviendrai. Le fait est que, comme ces fonds obtenus frauduleusement échappent à la loi, le Parti libéral de Nouvelle-Écosse finance toutes ses campagnes électorales grâce à cette fiducie sans avoir à faire la moindre activité de financement. Il n'est pas nécessaire de déclarer la source et le montant des sommes versées à la fiducie. C'est stupéfiant.

J'ignore combien de fiducies similaires ont été établies. Je ne dis pas ça parce que j'ai des raisons de croire qu'il existe tout un tas de fiducies illégales. Toutefois, il est de notoriété publique que plusieurs députés ont reconnu avoir des fiducies établies dans le but d'appuyer leur parti et leurs activités électorales. Ces fiducies échappent à la loi. M. Boudria a rejeté la question du revers de la main en disant que, en quelque sorte, c'était des fiducies privées qui ne comptaient pas réellement. On doit toutefois se poser de sérieuses questions au sujet du projet de loi s'il ne devient pas obligatoire de rendre compte des fiducies constituées avant la date d'entrée en vigueur du projet de loi .

J'aimerais bien savoir si la question préoccupe quelqu'un. Il me semble qu'elle devrait susciter quelques préoccupations si on recherche la transparence, la divulgation, l'égalisation des chances et la démocratisation du financement de partis politiques.

La deuxième question est celle du traitement des dons des sociétés et des syndicats. En termes populaires, le public pense que nous présentons une mesure législative qui ferait du financement des élections et des partis politiques l'affaire des particuliers. Si on parle d'égalité, le but de l'exercice est assurément de donner à tous les citoyens la même possibilité de choisir démocratiquement qui les représentera. Pour cette raison, nous continuerons à maintenir que la chose la plus équitable, la plus satisfaisante, la plus démocratique serait d'interdire entièrement les dons des sociétés et des syndicats. Toutefois, ce n'est pas le cas. Nous avons plutôt une situation où on permet des exceptions qui rendent le traitement des syndicats et des sociétés tout à fait inéquitable.

Il y a, je pense, 1,2 million de sociétés enregistrées dans notre pays. Il y a quelque 886 syndicats, qui ont 16 601 sections locales. J'ignore si on a fait une étude exhaustive pour répondre clairement à la question. Je pense que, sur les 1,2 million d'entreprises ou de sociétés, beaucoup tomberaient dans la catégorie soit des franchises soit des concessions.

La mesure législative dont le Sénat est saisi, et qui a été adoptée par la Chambre des communes la semaine dernière, prévoit dans un cas que les franchises et les concessions peuvent faire un don de 1 000 $ à chaque candidat, mais que les sections locales des candidats ne le peuvent pas. Cela n'est tout simplement pas juste ou équitable. Permettez-moi d'imaginer un exemple.

J'ignore combien il y a de franchises de Tim Horton dans ma circonscription, à Halifax, mais il y en a certainement des douzaines. Il y en a sept dans la petite ville de Charlottetown; je suppose donc qu'il y en a beaucoup plus que cela à Halifax. Je devrais les compter; je suis d'ailleurs une bonne cliente de Tim Horton; ce n'est donc pas que je veuille les singulariser. Si chacun de ces magasins est une franchise différente, chaque Tim Horton peut contribuer à la campagne des candidats qui se présentent dans ma circonscription. Les sections locales des syndicats ne peuvent pas le faire; ce sont pourtant des organisations de travailleurs démocratiquement constituées.

Quand on fait ce genre de comparaison, on en vient à la conclusion qu'il serait logique d'interdire les deux. C'est notre position. Nous avons essayé de présenter des amendements en ce sens. Toutefois, s'il est prévu que les franchises et les concessions peuvent faire des contributions individuelles de 1 000 $, cela défie tout simplement toute notion de traitement juste et équitable car il n'est pas prévu que les syndicats puissent faire des dons similaires J'aimerais soumettre cette position à votre considération.

Je soulève ma troisième objection car nous ne pensons pas avoir entendu une explication satisfaisante de la modification de la subvention publique de 1,50 $ par voix qui a été portée à 1,75 $. Quand le projet de loi a été présenté, le gouvernement a clairement dit que ce montant de 1,50 $ avait été choisi pour créer une situation sans incidence sur les recettes en ce qui a trait aux partis politiques. Je ne peux que conclure que l'augmentation de 1,50 $ à 1,75 $ a été décidée soit pour satisfaire le président du Parti libéral — qui s'affolait à l'idée de l'effet que pourrait avoir la réduction des dons des sociétés — soit pour satisfaire d'autres personnes qui pensent qu'il est impossible d'organiser une campagne électorale si on n'a pas énormément d'argent.

Le but de l'exercice est d'essayer de parvenir à un juste équilibre entre les contributions individuelles aux campagnes électorales et l'imposition de limites raisonnables aux sommes qui peuvent être dépensées de manière à ce que certains candidats ne soient pas gravement désavantagés.

Cette question touche particulièrement les femmes. Nous savons que les femmes ont toujours été désavantagées financièrement que ce soit en tant que candidates à l'investiture ou aux élections. Toutefois, nous ne comprenons pas la raison qui a conduit à la décision d'abandonner la position selon laquelle 1,50 $ était raisonnable et sans incidence sur les recettes en faveur d'une situation où cette subvention donnerait dix millions de dollars au Parti libéral et considérablement moins, bien sûr aux autres partis.

Le sénateur Grafstein: Merci d'être venue nous présenter votre point de vue. Nous avons toujours eu pour position que nous voulons que la Chambre ait terminé ses délibérations avant que nous ne commencions à réfléchir à ce à quoi nous devons réfléchir. Je vous remercie d'être venue après la pause nous faire part de votre point de vue, que je trouve très intéressant et qui fait écho à certaines de nos préoccupations.

Je commencerai par un aperçu de votre parti. Sous le régime actuel, avant la mise en place des nouvelles mesures, combien d'argent le NPD a-t-il recueilli l'an dernier auprès de ses différentes sources de financement? Nous parlons de transparence ici. J'aimerais connaître la situation du NPD avant et après.

Mme McDonough: Toutes ces données sont publiques puisque le NPD, du temps du gouvernement minoritaire qui a duré de 1972 à 1974, s'est assuré que la loi exige la divulgation de la source et du montant des dons que reçoivent les partis politiques. J'aurais aimé avoir avec moi un employé du parti pour confirmer mes propos. Je crois que ces chiffres sont tous de notoriété publique, mais je dirai — et j'espère ne pas me tromper, que nous parlons en gros de 3,7 millions de dollars pour l'an dernier.

Le sénateur Grafstein: En 2004, si le projet de loi était mis en oeuvre sous sa forme actuelle, combien le NPD recevrait-il?

Mme McDonough: Je suis désolée de ne pas pouvoir vous donner un chiffre exact. Je dirai que je crois comprendre que le parti serait légèrement en meilleure posture du fait de cette mesure législative, mais pas par rapport aux autres partis, et ce, pour les raisons que j'ai déjà mentionnées.

Je dirai toutefois que, dans l'ensemble, nous ne contestons pas la proposition qui nous est faite. Nous pensons seulement qu'elle contient des inégalités dont on ne peut pas calculer l'incidence. Par exemple, nous savons que considérablement moins d'un tiers de notre financement vient des syndicats. La contribution que les syndicats pourront maintenant faire sera infinitésimale. Par contre, je pense que seulement 3 p. 100 de notre financement vient de sociétés. Je suppose que l'on pourrait imaginer que nous recueillerons davantage d'argent des sociétés du fait de cette disposition concernant les franchises et les concessions, mais je crois que c'est très peu probable.

Nous savons cependant que les syndicats auront les mains liées et ne pourront contribuer mais qu'on en donne la possibilité aux sociétés. Comme entre 62 et 70 p. 100 du financement du Parti libéral vient des sociétés — le pourcentage est très similaire pour l'Alliance — ils seront sans aucun doute les bénéficiaires de cette disposition inéquitable sur le financement par les sociétés.

Le sénateur Grafstein: Comme vous l'avez probablement entendu, la question de l'égalité de traitement me préoccupe. Je serais disposé à en entendre davantage sur l'équité envers les syndicats. Je pense que vous avez dit qu'il y avait 886 syndicats et 1 600 sections locales et je suppose qu'ils représentent environ trois millions de travailleurs. Est- ce exact?

Mme McDonough: Oui, un peu moins de trois millions.

Le sénateur Grafstein: Le chiffre de 1,2 million de sociétés, mis à part les 500 plus grandes, se traduit par combien d'actionnaires au Canada, les gros et les petits? Environ 10 millions, 12 millions?

Selon moi, il est important de chercher à savoir qui bénéficie des dispositions de la Charte concernant l'égalité, la liberté d'expression et le droit à exprimer son point de vue dans le cadre du processus politique. J'espère que vous y réfléchirez car il est important que le projet de loi soit perçu comme étant juste et équitable envers tous les intérêts: les particuliers, les actionnaires, les intervenants, les membres de coopératives et d'organisations non affiliées.

Chacun d'entre nous à son rôle à jouer pour qu'il en soit ainsi et pour que ce soit perçu comme tel. Cela me préoccupe et j'espère que nous pourrons, si ce n'est maintenant sinon à l'avenir, travailler ensemble pour que ce projet de loi soit équitable à tous les égards.

Je crains — non pas en tant que membre de ce comité mais à titre de sénateur — que ce projet de loi soit de prime abord injuste et j'aimerais voir ce que vous et les autres témoins ont à dire à ce sujet.

Mme McDonough: Au risque de me répéter, je dirai qu'essayer de déterminer combien de travailleurs sont représentés ou combien d'actionnaires sont représentés est un exercice inutile. J'ignore ce que cela a à voir avec la démocratie directe. J'ignore ce que cela a à voir avec le fait d'accorder un poids égal aux citoyens et aux candidats à titre individuel.

Ce sont les citoyens qui votent et c'est aux citoyens qui ont une tête, un coeur et une âme d'influencer les décisions qui façonnent le monde dans lequel nous vivons. Donner un poids différent aux travailleurs et aux contribuables est, par définition, donner une deuxième chance, dans certains cas, et, dans d'autres, une quatrième et cinquième chances d'influencer les décisions politiques. On pourrait avoir des travailleurs dans un ou deux lieux de travail différents et il faudrait pondérer les contributions venant de ces lieux de travail; par ailleurs, dans l'ensemble, les actionnaires détiennent des actions dans plusieurs sociétés. La démocratie directe devrait être fondée sur l'influence des citoyens, mais ça c'est une différence importante de points de vue. Je ne monopoliserai pas davantage le temps du comité pour réitérer cette position.

Le sénateur Smith: Madame McDonough, je vous sais gré d'être venue. Je ne suis pas sûr — je suppose que je devrais le savoir — au sujet de ce que vous avez dit des sections locales. Est-ce que le NPD a proposé des amendements au comité?

Mme McDonough: Oui.

Le sénateur Smith: Ils n'ont pas été acceptés, de toute évidence.

Mme McDonough: C'est exact.

Le sénateur Smith: Je vois. Je suis au courant, et je ne veux pas faire du mauvais esprit — de l'opinion du NPD concernant le Sénat et c'est bien. Si nous décidions de proposer certains de ces amendements, pensez-vous que cette entité — comme vous le savez son existence a été remise en question — devrait contrecarrer la volonté de la Chambre des communes dans un dossier qui ne nous touche pas directement, contrairement aux députés? Nous ne sommes pas élus.

Pensez-vous qu'il conviendrait qu'un schéma s'établisse selon lequel le Sénat dirait à la Chambre des communes: «Vous avez parlé de cela. Vous avez étudié des amendements et tout ça. Certains ont été adoptés et d'autres pas»? J'ai les chiffres ici. Je pense que 80 amendements ont été adoptés. Le projet de loi a été adopté par les Communes par, je crois 172 voix contre 62. C'est presque trois voix contre une avec trois partis sur cinq.

Compte tenu de ces faits, nous demandez-vous d'amender une mesure qui a été adoptée à l'assemblée élue par une majorité de près de trois voix contre une?

Mme McDonough: Je croyais que l'objet de cette séance était la réforme électorale, la réforme du financement des élections, et non pas la réforme parlementaire. Je serai heureuse de revenir débattre de la réforme parlementaire.

Je le dis sans vouloir vous manquer de respect. On n'a sans doute pas aimé beaucoup m'entendre dire que c'était la dernière fois que je comparaissais devant le Sénat. Je suis d'avis que le second examen objectif est chose fréquente au Sénat, mais je crois que cet exercice devrait être fait par des sénateurs élus.

En attendant, et je le dis sans vouloir vous manquer de respect, si vous travaillez pour les Canadiens et que vous êtes rémunérés pour le faire, vous devrez justifier votre traitement comme tout le monde. C'est la raison pour laquelle je comparais devant ce comité.

Le sénateur Smith: C'est une bonne réponse.

Le sénateur Nolin: J'aimerais que vous nous en disiez davantage au sujet des fonds de fiducie et que vous nous expliquiez comment ils fonctionneraient. Vous avez donné l'exemple de la Nouvelle-Écosse, un cas que vous connaissez bien. Pouvez-vous nous expliquer comment les choses fonctionnent? D'où provient l'argent?

Dois-je comprendre que vous disiez, dans votre déposition, que ce projet de loi ne ferait que blanchir ces fonds de fiducie? Ces fonds profiteraient à leurs bénéficiaires. Comment les choses fonctionnent-elles, et comment percevez-vous cette disposition?

Mme McDonough: L'extorsion est la troisième source de financement en importance en Nouvelle-Écosse. Je ne sais pas tout au sujet des 3,5 millions de dollars, mais il s'agissait de la majeure partie de l'argent. Cette affaire a donné lieu à des poursuites criminelles qui ont conduit à l'emprisonnement de certains dirigeants du parti.

Je n'ai aucun moyen de savoir, et je ne crois pas que les honorables sénateurs soient en mesure de savoir combien de fonds de fiducie existent et quels députés en ont la possession. Par ailleurs, nous n'avons aucun moyen de savoir comment ces fonds se retrouveront dans le processus politique, car ce projet de loi ne régit leur utilisation d'aucune façon.

Le projet de loi prévoit qu'aucun des fonds accumulés avant l'entrée en vigueur de la loi ne lui sera assujetti. À moins que j'aie mal compris, rien n'empêche des députés de placer encore plus d'argent dans des fonds de fiducie. Lorsque la loi entrera en vigueur, ils ne pourront plus le faire, mais d'ici là ils peuvent continuer d'amasser des fonds et dépenser l'argent de diverses façons.

C'est un problème de taille. Il est inquiétant de penser que cet argent pourra être utilisé à diverses fins et permettre ainsi à des candidats et à des partis politiques d'être mieux outillés que d'autres pour défendre leurs intérêts dans l'arène politique.

Le sénateur Nolin: Êtes-vous en train de nous dire qu'il n'y a rien dans le projet de loi qui empêche un particulier ou un groupe qui aurait amassé de l'argent de diverses sources, auprès de sociétés, de particuliers et de syndicats, d'utiliser légalement cet argent à des fins électorales?

Mme McDonough: D'après ce que j'ai compris, c'est le cas.

Le sénateur Nolin: Nous avons donc un problème. Ce projet de loi est assurément douteux. Le directeur général des élections nous expliquera exactement ce qu'il en est.

Le sénateur Joyal: J'ai aimé votre réponse au sénateur Smith et à mes collègues assis autour de cette table. Je suis entièrement d'accord avec vous. Tant et aussi longtemps que l'une des deux Chambres du Parlement a pour rôle d'exercer un second examen objectif, elle doit l'exercer à la grandeur du système législatif. Ce comité, en particulier, a souvent modifié la Loi électorale afin de la rendre conforme à de nombreux objectifs, que l'autre endroit a approuvés.

Je me félicite de votre présence ici ce soir, et j'ai aimé votre exposé. Ce comité a bénéficié de la présence de représentants du NPD lors de l'étude de nombreux projets de loi importants, dont celui sur les droits de la personne. Je vous en félicite.

Je voudrais maintenant passer à la question soulevée par le sénateur Nolin. M. Kingsley vous écoute. Il aura l'occasion de nous éclairer plus tard sur ce point. D'après ce que disait M. Boudria dans sa déposition, cet après-midi, une association de circonscription disposant d'une somme importante dans des banques ne pourrait pas faire un chèque de, disons, 50 000 $ à un candidat aux prochaines élections, et se contenter de dire que l'argent provient de l'association de circonscription, sans indiquer la provenance de cet argent.

Un fonds de fiducie échappe au processus politique d'une association de circonscription. Un conseil d'administration, dont les membres sont élus, tient des réunions annuelles. L'association de circonscription est ouverte au public, elle choisit les candidats et les délégués en prévision des congrès à la direction, et ainsi de suite; nous savons tous comment cela fonctionne.

Vous soutenez qu'un fonds de fiducie sur lequel personne n'exercerait de contrôle pourrait, en vertu d'une clause de «droit acquis», transférer une somme importante à un candidat en prévision des prochaines élections, soit par l'intermédiaire de l'association ou autrement, et que cela pourrait contrecarrer les objectifs de transparence et d'égalité du projet de loi. Est-ce ainsi que vous voyez les choses?

Mme McDonough: Non. Je vous remercie d'avoir posé une question aussi précise. Il est important qu'on comprenne bien ce que je veux dire.

M. Boudria a bien expliqué le processus en vertu duquel les contributions faites aux partis politiques doivent donner lieu à l'émission de reçus et être comptabilisées. Une campagne électorale dure 36 jours, et les élections ont lieu tous les cinq ans. Supposons que Joe Smith, dans la circonscription voisine de la mienne, ait amassé des centaines de milliers de dollars dans un fonds de fiducie, et qu'il ait utilisé cet argent pour installer de grands panneaux d'affichage six mois avant le début de la campagne électorale. Supposons qu'il utilise l'argent pour faire beaucoup de publicité pour son parti politique et se livrer à toutes sortes d'autres activités pendant le cycle électoral, sans avoir à rendre de comptes.

Je pense que cela pose un problème. Ce député ne serait pas obligé, si j'ai bien compris, de rendre compte de ses dépenses dans le cadre du financement électoral de son parti. À l'extérieur du financement des partis politiques, il existe deux types de financement. Il y a les fonds qui servent à assurer le fonctionnement des partis politiques, et les fonds qui financent la campagne électorale des candidats des partis. La possibilité d'utiliser l'argent du fonds de fiducie à toutes sortes de fins rend une bonne partie de la loi très peu efficace.

Le sénateur Joyal: J'ai tenté de comprendre clairement que votre préoccupation portait sur ce qui se passe en dehors du cycle électoral. À moins qu'il n'y ait une disposition de droits acquis dans le projet de loi pour protéger le contenu des fonds de fiducie, leurs détenteurs seraient obligés de déclarer l'argent comme profits et en rendre compte. Ce qui vous préoccupe, c'est ce qui se passerait en dehors du cycle électoral; vous craignez qu'une partie de l'argent qui ne pourrait être utilisée pendant la campagne électorale de 36 jours, le soit au cours des mois ou des années qui précéderaient une campagne électorale. Un gouvernement élu pour quatre ans pourrait engager une bonne partie de l'argent dans des campagnes de publicité et dans de nombreuses autres activités au cours d'une année précédant des élections. Un candidat ou un parti pourrait ainsi bénéficier d'un avantage, sans avoir à rendre compte de l'utilisation de l'argent.

Mme McDonough: Les contributions à des partis politiques doivent faire l'objet de reçus en bonne et due forme et être divulguées. Je crois comprendre que les fonds de fiducie échapperaient complètement à ce genre d'exigence.

Deuxièmement, je serais intéressée à lire la déposition de M. Boudria. Si j'ai bien compris, il a dit qu'il ne serait pas possible de rendre compte de l'utilisation de l'argent, parce qu'une telle exigence ne pourrait s'appliquer à des fonds de fiducie constitués par des députés ou des candidats à des élections.

Je ne vois pas ce qui justifie cette conclusion. Il me semble que ces activités doivent nécessairement tomber sous le régime de la loi. On peut toujours soutenir qu'une loi ne peut régir de façon rétroactive l'utilisation d'un fonds de fiducie. Toutefois, si les lois servent à corriger des injustices ou à mettre fin à des pratiques inacceptables, à des abus, il y a certainement une façon de régler la question.

Je me souviens que le même débat a eu lieu en Nouvelle-Écosse. Nous avions fait valoir que parce que les fonds de fiducie fausseraient complètement l'objectif de la loi, le contenu de ces fonds devrait être versé dans le Trésor ou être donné à des oeuvres caritatives. Toutefois, on ne doit pas permettre que les fonds de fiducie puissent continuer d'influer sur le processus politique, sans que leur utilisation ne soit assujettie à une obligation redditionnelle.

Le sénateur Beaudoin: Madame McDonough, vous étiez ici lorsque nous avons discuté de la question des particuliers et des sociétés. Vous êtes du Nouveau Parti démocratique et j'aimerais savoir ce que vous pensez de la question de l'égalité des droits, si toutefois elle existe.

La Charte des droits et libertés s'applique évidemment aux lois électorales, et l'article 1 de la Charte nous assure une certaine latitude en ce qui a trait à l'imposition de restrictions raisonnables. Je sais que c'est différent au Québec. Qu'en est-il de votre province? Quelle est votre opinion au sujet de la question de l'égalité des particuliers et des sociétés?

Mme McDonough: Je ne pense pas que cette question juridique soit pertinente en ce qui concerne le droit des citoyens de participer au processus démocratique. Je crois savoir que, selon de nombreuses décisions qui ont été rendues, il est raisonnable de limiter de diverses façons la participation des sociétés au processus démocratique. Comme je le disais, la position de mon parti est claire: il faudrait interdire carrément les contributions des syndicats et celles des sociétés.

Personne n'a posé la question, mais je crois qu'il est significatif que le mouvement syndical demande, depuis déjà de nombreuses années, qu'on interdise les contributions des syndicats et celles des sociétés.

L'un de ces partis soutient fermement qu'il faudrait interdire les contributions. Le fait que des entités autres que des citoyens puissent participer au processus électoral crée une situation où des citoyens pourraient avoir deux, trois ou même quatre occasions d'exercer leur influence par des contributions financières. Il pourrait s'agir non seulement de citoyens agissant pour leur propre compte mais aussi de personnes agissant pour le compte de sociétés dont elles seraient propriétaires ou actionnaires. Ce serait la même chose pour les syndicats.

Si on veut vraiment rendre les règles du jeu équitables, et je pense qu'il s'agit ici de donner aux citoyens le contrôle du processus démocratique, je pense que cela représenterait une limite raisonnable. Bon nombre d'opinions juridiques iraient en ce sens.

Il faut savoir que ce projet de loi a été présenté pour remédier au scepticisme, au cynisme et au mécontentement grandissant de la population, qui a l'impression qu'elle ne peut pas vraiment changer les choses. Les gens ont l'impression qu'ils ne peuvent pas se faire entendre et que leur vote ne compte pas. C'est pourquoi il faut redonner le contrôle aux citoyens, au lieu de laisser des entités influencer, parfois de façon indue, les décideurs politiques.

Le président: Merci, madame McDonough. Nous avons passé un moment très agréable en votre compagnie et nous vous remercions d'avoir pris le temps de venir. Vous avez beaucoup apporté à nos délibérations.

Mme McDonough: Je vous souhaite bon succès dans votre travail.

Le président: Les témoins suivants viennent d'Élections Canada. Je souhaite la bienvenue à M. Kingsley, Mme Davidson, Mme Vézina et M. Sprague. Monsieur Kingsley, vous avez la parole.

M. Jean-Pierre Kingsley, directeur général des élections, Élections Canada: Honorables sénateurs, je vous remercie de nous recevoir. C'est pour nous un plaisir de comparaître devant le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. Je suis toujours ravi de prendre la parole au sujet des projets de loi portant sur des questions électorales.

Si vous me le permettez, lorsque nous serons à l'étape des questions et réponses, je laisserai intervenir mes collègues, qui vous donneront une vue d'ensemble aussi complète que possible du projet de loi C-24.

Comme je l'ai dit au comité de la Chambre des communes, le 8 avril 2003, le projet de loi C-24 propose les changements les plus importants à la réglementation du financement des partis politiques fédéraux depuis l'adoption, en 1974, de la Loi sur les dépenses d'élection. Le projet de loi s'inspire de diverses sources, notamment les recommandations de la Commission royale sur la réforme électorale et le financement des partis, et l'expérience des provinces. Le projet de loi propose également d'ajouter un certain nombre d'éléments nouveaux importants à la Loi électorale du Canada.

Lorsque j'ai comparu devant le comité de la Chambre des communes, j'ai fait un survol des dispositions du projet de loi C-24 concernant les limites en matière de contributions, le financement public des partis politiques et des candidats, les exigences relatives à l'enregistrement et à l'obligation redditionnelle, les limites de dépenses et l'application de la loi. J'ai expliqué comment Élections Canada appliquerait ces exigences. Je dépose, pour votre information, une copie de ces observations. Je crois qu'elles sont disponibles immédiatement.

Je parlerai surtout aujourd'hui des principaux amendements, du moins ceux que je considère comme les principaux amendements au projet de loi C-24, que la Chambre des communes a adoptés après l'étape de l'étude en comité.

L'un des éléments les plus importants du projet de loi C-24 est l'imposition de restrictions en matière de contributions à des entités politiques fédérales. Initialement, le projet de loi C-24 proposait de limiter à 10 000 $ par année les contributions des particuliers aux diverses entités de chaque parti politique enregistré, c'est-à-dire à l'un ou l'autre des associations locales, candidats, candidats à l'investiture et parti national. Le projet de loi proposait l'imposition d'une limite supplémentaire de 10 000 $ par élection aux contributions particulières faites à des candidats indépendants, ainsi qu'une contribution maximale distincte de 10 000 $, par course à la direction, aux candidats à la direction de chaque parti enregistré.

Le projet de loi C-24 amendé, celui dont vous êtes aujourd'hui saisi, propose de ramener à 5 000 $ la limite de chacune de ces contributions politiques individuelles, à l'exception des contributions des candidats, des candidats à l'investiture et des candidats à la direction à leur propre campagne; dans ce cas, leur contribution ne pourrait dépasser 10 000 $.

En ce qui concerne les contributions des personnes morales, des syndicats et des associations non constituées en personne morale, la limite de 1 000 $ par année civile applicable à un groupe donné d'associations locales, de candidats et de candidats à l'investiture pour chaque parti politique enregistré a été modifiée, de façon à permettre une seconde contribution dans une circonscription électorale où ont lieu deux élections au cours d'une même année civile, ou si le candidat à l'investiture à qui une contribution a été faite n'est pas désigné candidat pour cette circonscription. Dans ce cas, une contribution additionnelle d'au plus 1 000 $ peut être faite au candidat officiel du parti dans cette circonscription.

En ce qui concerne le second grand volet du projet de loi C-24, qui regroupe les dispositions relatives au financement public des partis politiques et des candidats, un certain nombre d'amendements y ont été apportés. Je vous ai entendu en discuter.

Premièrement, l'allocation trimestrielle proposée pour les partis enregistrés admissibles passe de 37,5c. à 43,5c. par vote valide obtenu par un parti aux élections générales précédentes. Sur une base annuelle, l'allocation passe de 1,50 $ à 1,75 $ par vote valide obtenu. De plus, le montant de l'allocation sera ajusté chaque année en fonction du taux d'inflation. Selon les résultats des élections générales de 2000, l'allocation devrait coûter 21,9 millions de dollars par année, à raison de 1,75 $ par vote valide.

Pour être admissible à l'allocation trimestrielle, un parti politique enregistré doit avoir obtenu 2 p. 100 des votes valides à l'échelle nationale au cours des élections générales précédentes, ou 5 p. 100, en moyenne, des votes valides exprimés dans les circonscriptions où ce parti présentait des candidats. Ce sont les mêmes seuils que ceux qui s'appliquent actuellement au remboursement des dépenses d'élections des partis politiques enregistrés. Les seuils n'ont pas été modifiés et sont en vigueur depuis déjà un certain temps.

D'autres partis enregistrés ne seront pas admissibles à l'allocation trimestrielle, mais ils continueront néanmoins d'avoir accès à certains avantages, comme le droit d'émettre des reçus pour fins d'impôt et le droit à du temps d'antenne gratis.

Par ailleurs, tant qu'un parti n'est pas enregistré, et je tenais à le souligner parce qu'on ne l'a pas encore fait, il n'est assujetti à aucune limite en matière de contributions. Il pourrait recevoir trois millions de dollars d'une personne morale ou d'un particulier.

De plus, à titre transitoire pour l'année au cours de laquelle le projet de loi entrera en vigueur, les partis admissibles recevront, en un seul paiement, le plein montant de l'allocation annuelle. Le projet de loi contient une disposition prévoyant des ajustements aux paiements dans l'éventualité où, par exemple, des élections auraient lieu en 2004. Par la suite, l'allocation sera versée en paiements trimestriels.

De plus, un parti enregistré peut permettre qu'une partie ou la totalité de son allocation soit directement attribuée à une division provinciale ou territoriale, section ou entité de ce parti, à condition que le chef du parti fédéral ait enregistré la division, section ou entité auprès de mon bureau.

Dans sa forme initiale, le projet de loi C-24 proposait de porter de 22,5 p. 100 à 50 p. 100 le taux de remboursement des dépenses électorales aux partis enregistrés. Par suite d'un amendement, le taux de remboursement a été porté à 60 p. 100 pour les premières élections générales suivant l'entrée en vigueur du projet de loi. Par la suite, le taux sera de 50 p. 100. Cette mesure s'appliquera une seule fois.

Si la règle des 60 p. 100 avait été en vigueur au moment des élections générales de 2000, les partis auraient reçu 21,9 millions, comparativement au montant d'environ 7,7 millions qui leur a été remboursé. Ce serait moins sous la règle des 50 p. 100. Un autre amendement augmente de façon permanente à 60 p. 100 le taux de remboursement des dépenses des candidats, qui est actuellement 50 p. 100. La réduction de 15 p. 100 à 10 p. 100 du nombre de votes valides ouvrant doit au remboursement des dépenses électorales des candidats, proposée dans la version précédente du projet de loi, demeure inchangée. Si ces dispositions avaient été en vigueur aux élections générales de 2000, 166 candidats de plus auraient été admissibles à un remboursement, d'un montant d'environ 20,2 millions de dollars.

En ce qui concerne les crédits d'impôt au titre des contributions politiques, les modifications proposées dans la première version du projet de loi sont demeurées inchangées. Par conséquent, le montant maximum donnant droit à un crédit de 75 p. 100 passe de 200 $ à 400 $, et le crédit d'impôt maximum passera à 650 $, comparativement à 500 $ à l'heure actuelle, pour une contribution d'au plus 1 275 $.

Une modification a cependant été apportée aux règles applicables à l'émission de reçus pour fins de crédit d'impôt. Le projet de loi C-24 permet aux associations de circonscription enregistrées d'émettre des reçus pour fins d'impôt, mais elles devront, pour le faire, obtenir l'autorisation écrite du chef du parti. Ce qu'il y a de changé, c'est que les associations de circonscription locales pourront émettre des reçus pour crédit d'impôt.

Comme je l'ai dit lors de ma comparution du 8 avril devant le comité de la Chambre, le projet de loi C-24 étend l'obligation redditionnelle aux associations de circonscription enregistrées, aux candidats à l'investiture et aux candidats à la direction, ce qui a pour effet d'accroître considérablement la transparence du financement des partis politiques fédéraux.

Un certain nombre d'amendements ultérieurs au projet de loi rendent le système encore plus transparent. Le plus important de ces amendements oblige les partis politiques enregistrés admissibles à l'allocation trimestrielle à présenter un rapport trimestriel de toutes les contributions reçues et de tous les transferts de fonds provenant de leurs associations de circonscription enregistrées, des candidats, des candidats à l'investiture et des candidats à la direction.

Ces rapports trimestriels devront être présentés dans les 30 jours suivant chaque trimestre. L'obligation de faire une vérification intégrale des rapports sur les contributions et dépenses, post-électorales et annuelles, demeure inchangée.

D'autre part, plusieurs amendements apportés au projet de loi C-24 semblent alléger les exigences administratives visant les candidats à l'investiture et les associations de circonscription. L'un de ces amendements relève de 500 à 1 000 $ le montant minimum des contributions ou dépenses que les candidats à l'investiture doivent déclarer.

Pour plus de simplicité, les associations de circonscription ne seront plus tenues de faire vérifier leur premier rapport financier à compter de l'entrée en vigueur du projet de loi. Afin d'assurer l'exactitude de ces rapports initiaux, le projet de loi dispose que les agents financiers ne pourront faire une déclaration qu'ils savent — ou devraient savoir — être incomplète ou inexacte. Toutefois, une déclaration du vérificateur n'est pas exigée à l'égard du premier rapport.

Enfin, en cas de redécoupage des circonscriptions électorales, les associations de circonscription enregistrées ne seront plus tenues de se faire radier automatiquement. Sur simple avis envoyé à mon bureau, avec l'approbation du chef du parti, l'association pourra continuer d'exister dans une nouvelle circonscription électorale. Cela représente un changement.

[Français]

Le projet de loi C-24 propose de plafonner les dépenses des candidats à l'investiture. Lors de son dépôt initial, le projet de loi fixait le plafond à 50 p. 100 des dépenses électorales du candidat dans la circonscription à la dernière élection générale. On a ensuite réduit ce plafond à 20 p. 100.

La réussite de la réglementation du financement politique dépend de son application. D'après mon expérience à l'échelle nationale et internationale, la force du régime d'application de la Loi électorale du Canada réside dans le rôle joué par le commissaire aux élections fédérales. Plus particulièrement, sa capacité de mener des enquêtes indépendantes et d'entamer des poursuites relativement aux infractions dans le système judiciaire ordinaire est le pilier de notre loi fédérale. Le système canadien est d'ailleurs un modèle mondial dans le domaine. De plus, le projet de loi C-24 fournit les outils qui permettent de veiller au respect de la loi.

Par conséquent, lorsque j'ai comparu au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, j'ai recommandé au comité de redonner au commissaire le droit de nommer des agents autorisés à demander au tribunal un mandat de perquisition aux fins des enquêtes portant sur les infractions à la Loi électorale du Canada, comme il en avait le pouvoir jusqu'en 1999. Le comité a donné son accord et la disposition a été intégrée au projet de loi que vous avez devant vous. C'est une excellente nouvelle.

Au cours des délibérations sur le projet de loi C-24, les médias ont soulevé la question de la méthode communément appelée en anglais «in and out». Selon des rapports, certains partis et candidats avaient adopté l'usage de payer des biens et des services, normalement gratuits, à la condition que le paiement soit remboursé sous forme d'une contribution. Ainsi, le donateur obtenait un reçu aux fins de l'impôt et le parti ou le candidat recevait un remboursement additionnel.

Afin d'empêcher cette pratique, le projet de loi modifié comporte maintenant une disposition selon laquelle nul ne peut conclure d'accord prévoyant le paiement de biens ou de services fournis à un parti enregistré ou à un candidat, à la condition qu'une personne apporte une contribution directement ou indirectement à un parti enregistré, à une association enregistrée, à un candidat, à un candidat à la direction ou à un candidat à l'investiture. On aura donc compris que c'est la gamme totale des occasions qui sont bloquées par cette nouvelle disposition incluse dans le projet de loi C-24.

Le projet de loi, advenant qu'il soit adopté, entrerait en vigueur le 1er janvier 2004, à l'exception de la disposition concernant les rapports trimestriels des partis politiques qui prendrait effet un an plus tard, afin de permettre aux partis de monter la machine qu'il leur faut.

Pendant la mise en œuvre des mesures proposées dans le projet de loi C-24, Élections Canada aurait comme principale priorité la préparation à l'enregistrement et à la reddition de comptes des nouvelles entités régies par la loi, à savoir les associations de circonscription, les candidats à l'investiture et les candidats à la direction. Nous élaborons une série de nouveaux outils dont la majorité utilisent des technologies de l'information, dont le calcul auto-vérifié pour faciliter la nouvelle reddition de comptes.

Au gouvernement fédéral, principalement grâce au soutien de bénévoles, les candidats locaux, c'est-à-dire plus de 1 800 à l'élection générale de l'an 2000, réussissent actuellement à soumettre leur rapport de campagne électorale et à envoyer leurs reçus aux fins de l'impôt avec très peu de problèmes. Je fais référence ici à l’idée selon laquelle le projet de loi C-24 apportera un fardeau additionnel pour les bénévoles.

Il y a 1 800 bénévoles qui réussissent à rencontrer les exigences de la loi concernant la reddition des comptes, tel qu'exigé selon la loi actuelle. D'après cette expérience, je suis convaincu que les nouveaux outils simplifieront la reddition de comptes requise par cette loi.

Dans le cadre de nos préparations, nous consulterons le comité consultatif des partis politiques. Nous avons déjà entamé les discussions à nos réunions ordinaires du 7 mars et du 6 juin dernier. Nous tiendrons en outre une séance d'information, advenant que le projet de loi reçoive la sanction royale, dans les plus brefs délais suivant cette date, et ceci avec tous les partis politiques.

Une disposition du projet de loi C-24 exige que l'on étudie son incidence sur le financement politique à la suite de la première élection générale survenant après son entrée en vigueur. L'examen sera effectué par le comité de la Chambre des communes qui reçoit le rapport du directeur général des élections, tel qu'exigé par la loi. Il permettra aux députés de procéder à une première évaluation des répercussions de la loi et j'aiderai ces derniers en leur fournissant un rapport de l'expérience qui sera acquise lors de cette élection générale. Il va de soi, qu'il me fera plaisir de comparaître à ce comité ou à tout autre comité sénatorial qui voudra bien se charger de la chose.

Comme je l'ai mentionné au début, tout en apportant des modifications considérables, le projet de loi C-24 prend appui sur les valeurs qui étaient à la base de la Loi sur les dépenses d'élection de 1974, c'est-à-dire l'équité et l'égalité, grâce auxquelles tous les joueurs sont soumis aux mêmes règles: la transparence et la participation.

Le projet de loi consolide la transparence de plusieurs façons, notamment en étendant les exigences concernant l'enregistrement et les rapports aux associations de circonscription, aux candidats à l'investiture et aux candidats à la direction, ainsi qu'en exigeant la reddition de compte plus fréquente des partis politiques enregistrés dans les délais prescrits.

Il renforce l'équité et la justice par des mesures telles que le plafonnement des contributions politiques. Les dispositions à ce sujet apporteraient une réponse au problème de l'influence, réelle ou apparente, potentiellement rattachée aux dons importants.

Par ailleurs, le plafond des dépenses des candidats à l'investiture devrait favoriser une participation accrue, notamment des femmes, au processus électoral. Il me fait plaisir de prendre part à l'examen parlementaire des réformes à la Loi électorale du Canada. Comme toujours, mon bureau vous fournira toute l'assistance dont vous pourriez avoir besoin lors de vos délibérations, en sus de celle que vous avez ce soir. Nous sommes prêts à répondre à vos questions.

[Traduction]

Le président: Merci, monsieur Kingsley.

J'ai interrogé le ministre, lors de sa comparution, sur les effets de cette mesure à l'égard des nouvelles formations politiques. Dois-je comprendre, dans ce que vous disiez au début, qu'un nouveau parti politique peut, avant d'être enregistré, recevoir n'importe quelle somme d'un particulier ou d'une personne morale?

M. Kingsley: C'est exact. Je m'explique.

Avant qu'un parti ne puisse être enregistré, il peut être un parti admissible. En vertu de la loi actuelle, un parti ne peut être enregistré que s'il a présenté au moins 50 candidats aux élections générales. Il peut avoir existé en tant que parti admissible pendant trois ans, ou pendant un nombre donné d'années. Pendant cette période, les contributions ne sont assujetties à aucune limite en vertu de la Loi électorale du Canada. Le projet de loi C-24 ne modifie pas cette règle.

Le président: Les obligations redditionnelles demeurent les mêmes une fois que le parti est enregistré, n'est-ce pas?

M. Kingsley: Une fois enregistrés, les partis politiques tombent sous le régime de la loi et doivent produire les rapports exigés de chaque parti.

Le président: Cette règle s'applique-t-elle à compter de la date d'enregistrement, ou vise-t-elle toutes les sommes recueillies jusque-là?

M. Kingsley: À compter de la date d'enregistrement.

Le président: C'est intéressant.

[Français]

Le sénateur Beaudoin: J'ai deux questions. Premièrement, vos pouvoirs ont-ils été élargis sous la nouvelle loi, notamment sur le plan juridique car c'est celui qui m'intéresse?

Deuxièmement, comment définissez-vous une fiducie? Je crois que plusieurs sénateurs de l'autre côté vous poseront une question analogue. Pour moi une fiducie, c'est une fiducie — sur le plan juridique. Pour la première question, j'ai l'impression que vos pouvoirs ont été élargis.

M. Kingsley: Les pouvoirs de base du directeur général des élections sont demeurés les mêmes. Le champ d'application de ces autorités légales a été élargi puisqu'on parle des concours à la mise en candidature ou à la chefferie où on devra faire rapport au directeur général des élections.

Il y a aussi le pouvoir accru de remettre aux partis les sommes annuellement, mais j'ai déjà le pouvoir de le faire sur une base de dépenses de campagne électorale. Les pouvoirs demeurent les mêmes, mais le champ d'application a été élargi.

Le sénateur Beaudoin: Cette extension est une bonne chose. Les pouvoirs sont donc demeurés les mêmes, mais le champ d'application est plus grand. Est-ce exact?

M. Kingsley: C'est exact.

Le sénateur Beaudoin: On a eu une discussion sur la question des fiducies. Les fiducies sont importantes sur le plan électoral. On ne définit pas toujours de la même façon une fiducie. Quelle est la définition exacte de la fiducie dans votre loi?

M. Kingsley: Selon la Loi électorale du Canada, il n'y a absolument aucune définition du terme «fiducie». Dans ce projet de loi C-24, il n'y en a pas non plus.

À toutes fins pratiques, je considère qu'il n'est pas pertinent de définir une fiducie sous la Loi électorale du Canada. Je me dois de répondre à une question qui sous-tend une question reliée à ce que Mme McDonough a mentionné. Il est important de lire les passages que j'ai cités, lors de ma comparution au comité.

La Loi électorale du Canada n'empêchera pas nécessairement l'établissement de fiducies par un député ou la cueillette de fonds, même s'il n'y a pas de fiducie, par un député à des fins non électorales.

Le projet de loi tel qu'il est conçu empêchera une nouvelle fiducie ou que de nouvelles sommes à l'extérieur du processus entrent dans le processus au-delà des 1000 $ autorisés. C'est le plafond.

Cependant, pour réussir à contrôler ce qu'on appelle communément les fiducies — on a vu que des députés en avaient d'immenses à 250 000 $ et plus — le projet de loi C-34 devrait et doit, à mon avis, en venir à bout. Selon le projet de loi C-34, le code de conflit d'intérêts qui s'appliquerait aux députés ferait en sorte que toute contribution financière à un député — qu'il y ait une fiducie ou non — ferait l'objet d'un rapport au commissaire. Le commissaire devra se pencher sur la légitimité de la contribution ainsi que de son utilisation.

Un bon commissaire ferait en sorte que ce soit chose connue si des fonds allaient vers un député à des fins non électorales qu'il considérerait légitimes. Sinon, il devra dire au député que les sommes ne peuvent pas être versées. Je vous parle d'une personne qui a administré le code pour M. Mulroney pendant trois ans, et qui a 13 ans d'expérience électorale.

Le sénateur Beaudoin: Le mot fiducie n'a pas été défini. Y a-t-il une raison? Est-ce qu'on s'en remet aux dispositions du Code civil du Québec et aux principes applicables aux sociétés de fiducie dans les provinces autres que le Québec?

Mme Diane R. Davidson, sous-directrice générale des élections et première conseillère juridique, Élections Canada: Vous avez raison: une fiducie peut être une personne, une corporation, un groupe de personnes qui détiennent une propriété en leur nom et qui ne peut être utilisée qu'aux fins prévues par la fiducie.

Le sénateur Beaudoin: Est-ce le cas dans les dix provinces?

Mme Davidson: La définition serait à peu près uniforme dans toutes les provinces.

Le sénateur Beaudoin: Cela répond à mes questions.

[Traduction]

Le sénateur Smith: Toutes vos explications concernant les amendements étaient claires, et vous nous avez fait un bon survol général. Je n'ai aucune question à vous poser à ce sujet, mais la question que vous a posée le sénateur Furey à ce sujet m'intéresse aussi.

Vous disiez que tant qu'un parti n'est pas enregistré, il n'y a pas de limite aux contributions financières qu'il peut recevoir. J'ai entendu beaucoup de commentaires au sujet des désavantages subis par les nouveaux partis. Vous parliez d'un don de trois millions de dollars. L'avez-vous fait délibérément pour bien montrer que tant qu'il n'est pas enregistré, un parti n'est effectivement soumis à aucune limite, ou faisiez-vous référence à une curiosité ou coup de chance? Dans quelle mesure était-ce un geste délibéré?

M. Kingsley: Je l'ai fait pour que les gens comprennent bien. On a dit que les nouveaux partis seraient désavantagés si le projet de loi est adopté. Je voulais bien montrer les restrictions auxquelles un parti enregistré est soumis, et les choses qu'un parti peut faire tant qu'il n'est pas enregistré.

J'ai eu connaissance d'un cas où un parti a été fondé et a reçu une contribution de quatre millions de dollars d'une personne avant son enregistrement. Cela s'est produit au Canada, récemment, alors que j'étais directeur général des élections. La chose demeure possible. Je pense que c'est le Parti national qui a reçu ce montant.

Ce que je m'efforce de faire comprendre, c'est qu'il y a des contreparties dont les gens doivent être au courant. Il ne faut pas rester dans le vague. Je voulais bien vous faire comprendre l'ensemble de la situation; c'était là ma seule intention.

Le sénateur Smith: C'est une chose que d'avoir de l'argent en banque, mais combien peut-on dépenser? Le nom d'un parti qui n'est pas enregistré peut-il figurer sur le bulletin de vote à côté du nom de ses candidats?

M. Kingsley: À l'heure actuelle, oui, si le parti a présenté 12 candidats aux élections générales précédentes. Le parti n'en a peut-être pas présenté 50, mais il suffit qu'il en ait présenté 12. Je dis «à l'heure actuelle», car la Cour suprême du Canada est actuellement saisie d'une affaire qui porte sur un certain nombre de questions de ce genre. Pour l'instant, cependant, la loi le permet.

Le sénateur Smith: Dans la mesure où vous pouvez saisir l'état d'esprit des auteurs de cette disposition, estimez-vous qu'elle vise à prévenir les désavantages auxquels pourraient se heurter les nouvelles formations politiques, plutôt qu'à prévoir un seuil fantaisiste?

M. Kingsley: L'enregistrement comporte des avantages, comme il y a aussi des avantages à ne pas être pleinement enregistré à un moment donné. Selon moi, il est un peu plus avantageux d'être un parti enregistré, et c'est la raison pour laquelle les gens cherchent à obtenir l'enregistrement de leur parti; ils peuvent ainsi émettre des reçus pour crédit d'impôt et obtenir du temps d'antenne gratis pendant les campagnes électorales.

Le sénateur Baker: Ayant siégé pendant 28 ans et demi à la Chambre des communes, je dois dire que votre bureau a très bien fait les choses. C'est le sentiment général qui prévaut chez les députés, au sujet de la façon dont votre bureau procède, et je suppose qu'en tant que directeur de ce bureau, vous pouvez vous en attribuer une part du mérite.

Cela dit, vous disiez, en réponse à la question du sénateur Beaudoin, que le projet de loi ne vous confère pas de nouveaux pouvoirs. Je me demande, dans ce cas, ce qui explique les modifications apportées à la partie de la loi concernant les poursuites, plus précisément le délai. Pourriez-vous expliquer brièvement les changements qui figurent à la page 99 du projet de loi, soit l'article 511 et les paragraphes 514(1) et (3)? Ces dispositions créent de nouveaux pouvoirs concernant les mandats de perquisition et les poursuites. Pourquoi vous faut-il sept ans pour décider s'il y a lieu d'intenter des poursuites? Ne vous paraît-il pas étrange qu'une personne puisse en avoir fini de la politique et des contributions à des partis politiques et faire tout de même l'objet, sept ans plus tard, de poursuites? Quelle est la raison d'être de ces dispositions?

M. Kingsley: Si je puis me permettre, je demanderai à M. Sprague de répondre en partie à votre question. Je tiens cependant à préciser que, dans mon esprit, la question du sénateur Beaudoin visait le directeur général des élections. J'ai expliqué les pouvoirs supplémentaires conférés au commissaire. J'ai dit que ces pouvoirs avaient existé jusqu'en 1999 et que, supprimés à la faveur d'une modification de la loi, ils étaient aujourd'hui rétablis. Le commissaire récupère les pouvoirs qu'il possédait en matière de mandat de perquisition.

En ce qui concerne les délais supplémentaires, M. Sprague vous répondra.

M. James Sprague, juriste-expert et conseiller juridique, Élections Canada: La prolongation de délai répond à des exigences pratiques. En vertu de la loi actuelle, une poursuite doit être intentée dans les 18 mois suivant la perpétration d'une infraction. Toutefois, la nouvelle loi prévoit que certains cas n'offrent pas de possibilités raisonnables d'intenter des poursuites dans ce délai.

Le sénateur Baker: Faites-vous référence aux cas de procédure sommaire ou de mise en accusation?

M. Sprague: Cela s'applique à toutes les infractions, qu'il s'agisse d'infractions donnant lieu à une déclaration de culpabilité par procédure sommaire ou à une mise en accusation. En vertu du projet de loi, les limites applicables aux dons sont établies sur une base annuelle. Une personne ne peut pas donner plus qu'un certain montant par année à un candidat. Les déclarations constituent le principal moyen, pour le commissaire, de découvrir les infractions à la règle du plafond annuel. Un candidat ne produira pas de déclaration après la tenue d'élections. Si le délai pour intenter une poursuite avait été maintenu à 18 mois après la perpétration de l'infraction, une personne pourrait donner trois millions de dollars à un candidat en puissance au cours d'une année, tout en espérant que les élections suivantes ne soient pas déclenchées avant quatre ans.

Une fois les élections passées, le candidat pourrait déclarer: «J'ai reçu une contribution de trois millions de dollars de quelqu'un il y a quatre ans. Merci beaucoup, monsieur le commissaire. Bonne chance si vous décidez d'intenter une poursuite à ce sujet.» Le délai a été modifié pour permettre que les plafonds annuels soient inclus dans les rapports d'élection.

La seconde question corollaire que vous avez posée concernait le délai de sept ans. C'est le résultat d'un calcul mathématique approximatif. Une personne peut faire une contribution au cours de la première année, mais il y aura des élections quatre ou cinq ans après. Suivent un délai de six mois pour présenter le rapport et un autre délai de six mois pour faire enquête et porter des accusations. En tout, cela représente environ six ans et demi, d'où le chiffre rond de sept ans.

Le sénateur Baker: Il y a aussi un article concernant un certificat du commissaire. Je l'ai constaté en faisant la lecture du projet de loi. Le libellé concernant le délai et le certificat du commissaire est le même, mot pour mot, que le libellé de la version de 1991 de la Loi sur la protection de l'environnement. Le même libellé figure dans la Loi sur les pêches, relativement aux poursuites concernant les rejets de substances nocives dans les cours d'eau.

Ce libellé dans une loi du Parlement a soulevé d'énormes problèmes en droit jurisprudentiel. Comme vous le savez, l'article 34 de la Loi d'interprétation stipule que la Loi d'interprétation s'applique à tous les textes. Les «textes» sont définis comme des lois ou des règlements du Parlement concernant les infractions donnant lieu à une mise en accusation ou à une procédure sommaire. En vertu de cet article, le Code criminel s'applique, à moins d'indication contraire du texte. Le projet de loi prévoit autre chose, soit un délai de sept ans, et un certificat.

Il y a eu deux affaires classiques portant sur les problèmes de libellé. La première, l'affaire West Fraser Mills Limited, a été portée devant la Cour d'appel de la Colombie-Britannique, en 1994. Les tribunaux inférieurs de la Colombie-Britannique avaient statué que le commissaire devait établir sa connaissance de l'événement pour pouvoir intenter une poursuite. Dans cet article, vous dites que le commissaire doit avoir connaissance de l'événement pour qu'une action puisse être intentée en vertu de la loi. C'est ce qu'a dit le tribunal inférieur. En 1994, la Cour d'appel de la Colombie-Britannique a invalidé cette décision, en se fondant sur le contenu de l'ancienne loi, qui ne prévoyait aucun certificat.

Puis il y a eu au Manitoba, en 2001, l'affaire R. c. Gateway Industries Ltd. La Cour du Banc de la Reine a rendu une décision qui a prévalu pendant trois ans. La décision rendue dans cette affaire a prévalu jusqu'à il y a trois mois. La cour avait statué qu'il devait être démontré, dans chaque cas, que le commissaire était au courant.

Les tribunaux se sont tous tournés vers les audiences de comité, vers la Chambre des communes et vers le ministre pour connaître leur intention, la raison de leur action. Bien entendu, ils n'ont rien trouvé. Personne n'a rien dit.

Si je pose cette question, c'est pour que l'objet du projet de loi soit bien clair, car vous pouvez être certain qu'on invoquera la réponse en cas de poursuites.

Je m'interroge au sujet du libellé. En vertu du projet de loi, le commissaire institue une «poursuite». Les autres lois parlent de «procédure». Je m'interroge sur la raison de l'emploi du mot «poursuite».

Le paragraphe 514.(1) n'a aucun sens; quoi qu'il en soit, permettez-moi de poser la simple question suivante: d'après ce que vous avez compris, le projet de loi exige-t-il que, pour chaque cas de poursuite en vertu de la loi, un certificat du commissaire soit établi avant que la poursuite puisse être engagée?

M. Sprague: Permettez-moi de revenir un peu en arrière. Le principal sujet de débat entre les cours de la Colombie- Britannique et les cours du Manitoba concerne la nécessité d'avoir un certificat pour intenter une poursuite à en l'absence de prolongation du délai minimum.

Le sénateur Baker: La loi prévoit deux ans.

M. Sprague: La cour de la Colombie-Britannique a jugé que, fondamentalement, s'il y a un délai minimum de deux ans, le certificat a pour but de prolonger ce délai parce que le commissaire n'aurait pas pris connaissance de l'incident plus tôt. Par conséquent, le délai ne commence pas à courir tant que le commissaire n'est pas informé de la situation. Si, toutefois, il avait été informé de la situation dès le départ et que seulement deux ans s'étaient écoulés, la poursuite serait automatiquement intentée à l'intérieur du délai de deux ans. Aussi, tant que la poursuite est intentée à l'intérieur de ce délai, il n'est pas nécessaire d'avoir de certificat car, logiquement, si le commissaire était au courant de l'infraction à partir du moment où elle a été perpétrée, la poursuite serait de toute façon intentée à l'intérieur de la période. C'est pourquoi, logiquement, le certificat n'est pas nécessaire.

Les tribunaux du Manitoba ont adopté une approche plus légaliste. Pour eux, peu importe qu'on déduise logiquement l'impossibilité, pour le commissaire, de ne pas agir à l'intérieur du délai, le certificat demeure nécessaire. C'est, essentiellement, la position adoptée par ces tribunaux.

Quelle est l'utilité du certificat? C'est un document qui fait preuve, car une disposition prévoit que le délai commence à courir à partir du moment où le commissaire prend connaissance de l'infraction. Comment peut-on savoir à partir de quel moment le commissaire a eu connaissance de l'infraction, sans avoir à le convoquer comme témoin au cours de la procédure pour lui demander quand il a pris connaissance pour la première fois de l'infraction dans les journaux ou quand il en a soupçonné l'existence?

Selon la Loi électorale du Canada, il n'y a qu'un seul commissaire. Il peut y avoir de nombreuses poursuites, et il peut devenir fastidieux, pour le commissaire, d'aller d'un tribunal à l'autre pour faire savoir quand il a pris connaissance de la situation. Cette disposition vise donc à permettre au commissaire d'établir, sur la base d'allégations, un document indiquant qu'à une date donnée il a pris connaissance d'une infraction dans un journal.

Ce document peut être produit en cours, en lieu et place de la comparution du commissaire. Le document peut être montré à la cour, et, à défaut de toute preuve contraire, la cour peut se fonder sur ce document, parce qu'il n'est pas déterminant. Le commissaire ne dispose pas pour autant d'une méthode lui permettant de créer automatiquement ses propres délais. Ce document est utilisé seulement en l'absence de preuve permettant d'établir que le commissaire a pris connaissance de la situation à un autre moment; le certificat s'impose de lui-même, et les tribunaux peuvent l'accepter, même s'il repose sur des allégations. En fait, le document n'est qu'un élément de preuve. Il vise à permettre aux tribunaux d'établir à partir de quel moment le commissaire a pris connaissance de l'affaire dont ils sont saisis, sans que ce dernier n'ait à venir en témoigner personnellement.

En cas de poursuites en vertu du projet de loi, la méthode classique consisterait probablement à toujours déposer un certificat relatif au problème soulevé.

Le sénateur Baker: Monsieur Sprague, votre réponse m'a beaucoup impressionné. Vous connaissez très bien le sujet, cela ne fait aucun doute. Toutefois, vous n'avez pas répondu à ma question. Monsieur le président, il n'a pas répondu à ma question et nous ne pouvons évidemment pas le forcer à nous dire si la preuve que le commissaire a pris connaissance des faits est nécessaire pour qu'il ait compétence. J'emploie seulement le mot «compétence.»

M. Sprague: À défaut d'autre chose, le certificat fait foi.

Le sénateur Baker: Oui, mais ce que vous dites, dans ce cas, c'est que la preuve, sous forme de certificat, de lettre ou de témoignage, que le commissaire a pris connaissance de la situation, est nécessaire pour qu'une poursuite puisse être intentée?

M. Sprague: Voulez-vous dire s'il n'y avait pas de certificat? Le certificat a valeur de preuve.

Le sénateur Baker: Bien sûr. Toutefois, le projet de loi stipule: «suivant la date à laquelle le commissaire a connaissance des faits qui [...] donnent lieu» (à la poursuite). Une poursuite pour infraction à la loi doit être instituée dans les 18 mois suivant la date à laquelle le commissaire «a connaissance des faits qui lui donnent lieu [...]». Il doit donc y avoir, en droit, une preuve que le commissaire a eu connaissance des faits.

Ai-je raison ou tort, monsieur Sprague? Doit-il exister une preuve que le commissaire a pris connaissance des faits pour qu'une poursuite puisse être intentée?

M. Sprague: Cela nous ramène à l'énigme logique. Selon l'approche classique, on se fondera sur une preuve quelconque pour établir à partir de quel moment le délai commence à courir. C'est l'approche classique. Puisque la loi fournit les moyens d'établir aisément cette preuve par certificat, c'est la méthode qu'il convient d'utiliser.

Si, pour une raison inusitée, il n'y avait aucun certificat ou que le commissaire déclarait être dans l'impossibilité de se souvenir quand il a pris connaissance de la situation, on pourrait alors s'en remettre à l'approche de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique et se demander: «Quand l'acte a-t-il été commis? Il a été commis le 1er mars. Combien de temps s'est-il écoulé depuis? Un an.» Il faudrait donc soustraire cette période, mais ce serait aux tribunaux de décider.

Le sénateur Baker: Exactement, monsieur Sprague. C'était en 1994. Croyez-vous que le jugement rendu par la Cour du Banc de la Reine du Manitoba en 2001 et 2002 prévaudrait sur le jugement rendu par la Cour d'appel de la Colombie-Britannique en 1994?

M. Sprague: Dans une optique purement hypothétique, la décision de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique me semble plus logique. Mais il y a bien longtemps qu'un tribunal a fait exactement ce qui me semblait logique.

Le sénateur Baker: Normalement, cela ne pose pas de problème car, bien sûr, si les autres lois n'exigent pas la prise de connaissances par le commissaire, il est alors possible de procéder par voie de mise en accusation si cela n'est pas préjudiciable à l'accusé. Autrement dit, avant le plaidoyer, vous pourriez procéder à un changement. C'est ainsi que les choses se font. Dans ce cas, cependant, la prise de connaissances est exigée pour toute poursuite.

La question soulevée ici est très intéressante. Je regrette de vous imposer un examen aussi fouillé du libellé, mais c'est le genre de problèmes dont le comité est constamment saisi.

M. Sprague: Les rédacteurs doivent aussi assurer l'équilibre des intérêts. La prise de connaissances des faits par le commissaire permet également d'écourter le délai. Les rédacteurs auraient pu se demander quel est le délai maximal, et on calcule habituellement un délai de sept ans. C'est le temps qui s'écoule entre la première perpétration d'une infraction et le moment logique où une poursuite peut être intentée. Nous pourrions nous en tenir à un délai de sept ans, auquel tout le monde serait assujetti.

Toutefois, la période de 18 mois sert à réduire le délai, de sorte que le commissaire soit tenu de lancer une enquête dès qu'il prend connaissance des faits, au lieu de ne rien faire et de laisser le temps effacer les preuves. La période de 18 mois oblige le commissaire, dès qu'il prend connaissance des faits, à lancer une enquête, pour éviter que le passage du temps n'érode la preuve.

Le délai maximum de sept ans vise à assurer une certaine protection aux personnes, pour qui il pourrait être difficile, après un certain temps, de prouver leur innocence.

Le sénateur Baker: C'est le problème que pose la Charte. C'est pourquoi il existe des exigences.

Le sénateur Beaudoin: Vous pouvez toujours résoudre un problème en vertu de la Charte.

Le sénateur Baker: Quiconque lit le projet de loi se rend compte que le sujet se prête très bien à l'invocation de l'article 7 de la Charte, qui concerne les abus, dans les cas où il est impossible d'établir que le commissaire a pris connaissance des faits. La cour n'aura même pas compétence pour entendre l'affaire.

Le président: Sénateur Baker, avez-vous terminé?

Le sénateur Baker: Je n'ai pas encore dit la moitié de ce que j'avais à dire, mais ça va. Ça suffira. Les deux autres articles sont intéressants. Nous pourrions peut-être proposer des amendements au libellé lorsque le projet de loi nous reviendra plus tard.

Le président: Si vous le voulez, nous pourrons en parler aux fonctionnaires lorsqu'ils reviendront demain.

Le sénateur Baker: Monsieur Sprague est peut-être mieux placé.

Le sénateur Grafstein: Je m'intéresse à l'avant et à l'après. Vous avez entendu ma question à Mme McDonough au sujet de l'argent. Revenons-y. Dites-nous d'abord, pour que nous en ayons une idée, ce qui arrive aux divers partis avant et après? Autrement dit, en ce qui concerne les rentrées de fonds de chaque parti, quelle sera la différence entre l'année qui précède l'entrée en vigueur du projet de loi et la première année qui la suivra?

Quel sera le montant maintenant et après? Passons les partis politiques en revue: les libéraux, l'Alliance canadienne, les progressistes-conservateurs, le Bloc et le NPD.

M. Kingsley: Monsieur le président, nous pouvons vous donner l'information concernant la dernière année pour laquelle nous avons les chiffres, et ce n'est pas 2003, car nous n'avons pas encore reçu les rapports. Nous n'avons même pas reçu les rapports de 2002, si je me souviens bien.

Le sénateur Grafstein: Vérifiez à compter de la première année.

M. Kingsley: Je vais laisser Mme Vézina, qui est directrice du financement des élections, répondre à votre question.

Le sénateur Grafstein: Je veux simplement un chiffre approximatif. Je ne demande pas de chiffre précis, mais je veux simplement savoir ce qu'il en est avant et après pour chaque parti.

Mme Janice Vézina, directrice principale, Financement des élections, Élections Canada: Honorables sénateurs, nous avons examiné les chiffres soumis à Élections Canada dans les rapports financiers des partis. Nous avons créé ce qu'on appelle un cycle électoral de quatre ans. En fait, entre 1997 et 2000, soit sur une période de trois ans, il y a eu deux années sans élections et une année d'élections. Nous avons donc créé une quatrième année en nous fondant sur la moyenne de 1998-1999. Nous avons donc un cycle électoral hypothétique de quatre ans.

Lorsque nous appliquons la limite de 5 000 $ applicable aux contributions des particuliers à des partis politiques, nous tenons compte des prévisions d'augmentation des contributions attribuables à l'augmentation du crédit d'impôt. Les estimations proviennent du ministère des Finances. Nous avons également retenu un taux de remboursement des dépenses électorales de 60 p. 100 plutôt que de 22,5 p. 100. De plus, nous avons calculé la subvention sur la base d'un montant de 1,75 $ par vote valide obtenu aux élections générales de 2000. Nous avons établi nos calculs en fonction des contributions et des dépenses électorales qui auraient été enregistrées au cours des quatre années hypothétiques, sous la loi actuelle.

Le résultat obtenu, mais il ne s'agit que d'estimations, est un gain de 41 millions de dollars sur quatre ans. Autrement dit, il y a davantage de rentrées de fonds que de contributions perdues. Je répète qu'il s'agit d'un modèle, et non pas de la réalité.

M. Kingsley: En ce qui concerne les partis au sujet desquels vous demandiez...

Le sénateur Grafstein: Il s'agit des libéraux, de l'Alliance, du Bloc québécois, du NPD et des conservateurs, pas nécessairement dans cet ordre, mais dans l'ordre des montants respectifs.

Mme Vézina: Premièrement, nous avons constaté qu'aucun parti ne serait perdant en vertu de cette hypothèse.

Le sénateur Grafstein: Pourrions-nous connaître les montants avant et après?

Mme Vézina: Nous avons calculé que le Bloc enregistrerait un gain de 10 millions, l'Alliance, 17,7 millions, les libéraux, 6,5 millions, le NPD, 4 millions et les conservateurs, 3 millions, sur un cycle de quatre ans incluant l'année des élections.

Le sénateur Grafstein: L'Alliance canadienne serait le parti qui s'en tirerait le mieux, avec un gain de 17,7 millions de dollars. Le Bloc viendrait en deuxième place, avec 10 millions. Les libéraux en troisième, avec 6,5 millions. Le NPD quatrième avec 4 millions et les progressistes-conservateurs en cinquième place avec 3 millions. Est-ce exact?

Mme Vézina: C'est exact.

Le sénateur Grafstein: Je veux que ces chiffres figurent au compte-rendu pour que le public comprenne ce dont nous parlons. Cela aidera également les membres du comité à voir où sont les gains nets. Ce pourra être utile.

Je reviens à mes questions concernant la constitutionnalité des dispositions relatives aux contributions de 5 000 $ faites par des particuliers et à la limite de 1 000 $ imposée aux contributions des personnes morales, syndicats et associations.

Premièrement, le ministre a semblé dire, mais je n'ai pas encore lu le compte-rendu, que les choses s'égaliseraient d'une certaine façon, en raison des diverses dispositions qui concernent les personnes morales et les syndicats. En examinant le texte du projet de loi, après la comparution du ministre aujourd'hui, je me suis dit que c'était l'inverse, les particuliers pouvant donner à un parti jusqu'à 15 000 $ au cours d'une année. Les sociétés verraient leurs contributions nationales limitées à 1 000 $ par année. Les dispositions relatives aux contributions à un parti et à un candidat, notamment, permettraient à un particulier de donner jusqu'à 15 000 $ par année dans les trois catégories. Est-ce exact?

M. Kingsley: Avant de demander à M. Sprague de vous répondre, je veux m'assurer, puisque cela figure au compte- rendu, qu'il est bien clair que les chiffres que nous vous communiquons sont hypothétiques et par ordre d'importance.

Je voudrais également répéter ce que j'ai déjà dit au Comité de la procédure et des affaires de la Chambre des communes. Il est évident que nous n'avons pas toutes les données concernant le financement des partis politiques au pays. Je parle en ma qualité de directeur général des élections. Nous ne pouvons avoir une idée précise sur la base des exigences redditionnelles applicables aux candidats, les associations locales n'étant assujetties à aucune règle, et aux partis. Nous parlons du trou noir du financement des élections qui existe depuis des années.

Nous ne pouvons pas mettre notre réputation en jeu sur la base de ces chiffres sans que les gens sachent bien qu'ils n'ont qu'un caractère hypothétique, de même que les renseignements qui s'y rattachent.

Le sénateur Grafstein: Monsieur Kingsley, je prends bonne note de tout ce que vous dites. Je suis d'accord qu'il est risqué de tirer des conclusions sur les chiffres. Mais, d'autre part, il est important que les sénateurs puissent avoir des chiffres approximatifs, étant entendu que ces chiffres peuvent varier en importance, et compte tenu des réserves que vous avez formulées.

Je ne cherche pas à gonfler les chiffres. Je veux simplement que le comité ait une idée de ce dont il est question, puisque cela concerne le public et les deniers publics.

M. Kingsley: Je suis d'accord, sénateur. J'ai apporté cette précision parce que les chiffres vont paraître au compte- rendu. Vous avez certainement droit à une réponse. C'est pourquoi nous avons répondu à la question de notre mieux. Je tenais à le dire à tous les honorables sénateurs.

M. Sprague pourrait peut-être répondre à votre question, puisqu'il s'agit des limites prévues en vertu du projet de loi.

M. Sprague: Si j'ai bien compris la question, la chose est simple. Supposons que je veuille faire la contribution maximale autorisée au cours d'une année; combien puis-je donner? J'appuie un parti, et non pas plusieurs.

Si j'ai bien compris le projet de loi, la contribution maximale que je peux faire au cours d'une année est de 5 000 $. Je peux répartir ma contribution entre un parti enregistré, quiconque se présente comme candidat de ce parti, l'une ou l'autre de ses associations de circonscription enregistrées et n'importe lequel de ses candidats l'investiture. Ces 5 000 $ sont miens.

Le sénateur Grafstein: Je me contenterai de résumer, sans lire les articles en détail. Si je suis un membre du Parti libéral, je peux choisir, au cours d'une année donnée, de donner 5 000 $ en vertu de l'alinéa 405(1)a), un autre 5 000 $ en vertu de l'alinéa 405(1)b) et encore 5 000 $ en vertu de l'alinéa c).

M. Sprague: C'est la différence. Si vous ne parlez que d'appuyer les libéraux...

Le sénateur Grafstein: ... oui.

M. Sprague: Alors vous ne mélangez pas les alinéas a) et b). L'alinéa proposé 405(1)b) vise les candidats qui ne sont pas rattachés à des partis enregistrés. L'alinéa 405(1)a) dit que votre contribution de 5 000 $ va être répartie entre toutes les entités du Parti libéral. Si, par contre, vous n'êtes pas un partisan du Parti libéral et vous soutenez plutôt des candidats indépendants, vous pouvez donner 5 000 $ non pas par année, mais par élection à chaque candidat indépendant de votre choix.

Disons qu'il y a trois candidats indépendants.

Le sénateur Grafstein: Est-il question de l'alinéa b)?

M. Sprague: En effet. Rappelez-vous que les alinéas b) et a) ne se mélangent jamais. Si je n'appuie que les libéraux l'alinéa c) peut s'appliquer, mais seulement pour les courses à la direction et il n'y aura pas une course de ce genre tous les ans.

Le sénateur Grafstein: Est-il juste de dire qu'une personne morale, un syndicat ou une association serait limité à 1 000 $ aux termes de ces deux catégories — a) et c)?

M. Sprague: La même chose s'applique aux personnes morales, si ce n'est que leur contribution de 1 000 $ doit être divisée entre les niveaux locaux d'un parti enregistré durant une année civile. Elles ne peuvent donner de l'argent au parti enregistré lui-même. Plutôt que 5 000 $, si la personne morale appuie un parti enregistré, elle peut donner au maximum en une année 1 000 $ qui seront divisés entre les entités locales de ce parti enregistré — les associations de circonscription, les candidats et les candidats à l'investiture.

Le sénateur Grafstein: Je comprends. Est-ce que cela englobe les candidats à la direction?

M. Sprague: Les personnes morales ne peuvent donner aux candidats à la direction.

Le sénateur Grafstein: C'est vrai. En fait, si je compare une contribution au parti durant une année donnée, un particulier pourrait donner 10 000 $ ou 1 000 $. J'essaie de comparer les deux catégories, soit d'une part, un particulier et d'autre part, une personne morale, un syndicat ou une association.

M. Sprague: À titre personnel, je pourrais verser 5 000 $ et ensuite, en tant que personne morale, je pourrais verser 1 000 $. En tant que particulier, je pourrais ajouter 5 000 $ de plus, mais seulement pour une course à la direction donnée. En tant que personne morale, je ne peux pas verser de contribution dans ce cas-là. En même temps, je peux, en tant que particulier, verser 5 000 $. Je peux ensuite verser 1 000 $ de plus au nom de mon entreprise, la personne morale. Je me constitue en personne morale et je donne à nouveau à titre de personne morale.

Le sénateur Robichaud: Dans le cas où une personne morale fait un don au niveau local à une personne candidate à l'investiture qui n'obtient pas l'investiture, cette personne morale a-t-elle le droit de faire une autre contribution à celui ou celle qui obtiendra l'investiture dans ce cas-là?

M. Sprague: Oui, une personne morale peut parier sur deux candidats. Si elle verse 1 000 $ durant une année civile à un candidat à l'investiture qui perd au niveau local et ne devient pas le candidat, elle peut ensuite donner 1 000 $ de plus au candidat choisi durant cette année civile. La personne morale ne peut mettre cet argent de côté et le verser l'année suivante. Ce doit être durant la même année.

Le sénateur Robichaud: Le sénateur Grafstein disait que le particulier peut faire deux contributions, mais il en va de même de la personne morale, n'est-ce pas?

M. Sprague: Oui, dans certaines circonstances.

Le sénateur Robichaud: Les deux.

Le sénateur Grafstein: C'est du 1 pour 5.

Le sénateur Robichaud: Oui, mais il est possible de faire deux contributions de 5 000 $ et deux de 1 000 $.

M. Kingsley: Pour répondre à la question plus directement, il y a une différence entre ce que les particuliers peuvent faire et ce que les personnes morales et les syndicats peuvent faire. Il y a une différence claire en vertu de cette loi. Les dispositions ne sont pas les mêmes.

Le sénateur Grafstein: Pour en revenir à mes questions de départ, aux termes de l'article 3 de la Charte canadienne des droits et libertés, la liberté d'association, la liberté de religion et la liberté d'expression sont, en fait, les droits les plus importants parmi les droits conférés aux citoyens, car ils ne sont pas assujettis à la disposition d'exemption. L'affaire Oakes nous apprend qu'ils doivent être interprétés de façon stricte lorsqu'on y touche. Vous avez entendu mes arguments au sujet de l'intérêt constitutionnel des personnes morales, des syndicats et des associations — toutes les différentes catégories.

Êtes-vous persuadé, d'un point de vue constitutionnel, que l'objectif répond au critère énoncé dans l'arrêt Oakes, que la disposition prévoyant une contribution de 1 000 $ pour une personne morale contre 5 000 $ pour un particulier respecte le critère en question tel qu'exprimé dans l'affaire Figueroa? Je voudrais élaborer, mais je pense que vous comprenez ce dont je parle. Je le fais pour la gouverne du président pour que cela figure au compte rendu.

M. Sprague: Malheureusement, je vais devoir essayer d'éviter cette question, sénateur.

Je vais éviter la question constitutionnelle parce que le Bureau du Directeur général des élections n'est pas un organisme qui a été créé pour donner des avis juridiques sur le plan constitutionnel. Nous préférerions que les questions de cette nature soient adressées au ministère de la Justice plutôt qu'à nous.

Le sénateur Grafstein: Je comprends.

Le président: Je voudrais adresser tous nos remerciements à M. Kingsley et à son groupe.

Des voix: Bravo!

Le président: Votre participation nous a beaucoup éclairés et nous a été utile dans nos délibérations. Merci beaucoup d'être venus.

M. Kingsley; Merci de nous avoir invités.

La séance est levée.


Haut de page