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VETE

Sous-comité des anciens combattants

 

Délibérations du Sous-comité des Anciens combattants

Fascicule 2 - Témoignages du 12 février 2003


OTTAWA, le mercredi 12 février 2003

Le Sous-comité des anciens combattants du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense se réunit aujourd'hui à 12 h 20 pour examiner les soins de santé offerts aux anciens combattants qui ont servi au cours de guerres ou dans le cadre d'opérations de maintien de la paix; les suites données aux recommandations faites dans ses rapports précédents sur ces questions; et les conditions afférentes aux services, prestations et soins de santé offerts, après leur libération, aux membres de l'armée permanente ou de la réserve, ainsi qu'aux membres de la GRC et aux civils ayant servi auprès de casques bleus en uniforme dans des fonctions d'appui rapproché, et pour faire un rapport sur ces questions et toutes les autres questions connexes.

Le sénateur Michael A. Meighen (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Honorables sénateurs, cet après-midi, nous poursuivons notre étude des services offerts aux anciens combattants, plus particulièrement des services garantis par le Régime d'assurance-revenu militaire que l'on appelle habituellement le RARM.

La semaine dernière, nous avons entendu le témoignage du major Bruce Henwood, qui a perdu les deux jambes lors de son service en Croatie, blessure pour laquelle il n'a reçu aucune indemnisation du RARM parce que son revenu tiré d'autres programmes gouvernementaux s'ajoutait au maximum de 75 p. 100 de son salaire avant l'accident, tel que prévu par le RARM.

Le comité a appris que les colonels et les généraux des Forces canadiennes, de même que les parlementaires et les hauts dirigeants de la fonction publique et de la GRC profitent d'une garantie en cas de décès et de mutilation par accident qui est assurée par le gouvernement. Ce dernier verserait une indemnisation sous forme de somme forfaitaire de quelque 250 000 dollars dans le cas de la perte des deux jambes.

Un groupe de témoins a renseigné le comité sur les garanties en cas de décès ou de mutilation par accident offertes aux parlementaires, aux membres des Forces canadiennes et aux travailleurs du secteur privé. Nous avons appris que cette couverture d'assurance est relativement peu coûteuse et est souvent incluse dans l'ensemble des garanties offertes dans le secteur privé.

Les témoins d'aujourd'hui nous donneront des renseignements sur les détails du fonctionnement du RARM et comment il comptabilise les contributions des membres des Forces canadiennes et du gouvernement. Un représentant de La Maritime, la compagnie d'assurance, est également avec nous.

Le vice-président de ce sous-comité est M. Joseph Day, le distingué sénateur du Nouveau-Brunswick. Il est diplômé en génie électrique du Collège militaire royal du Canada, et en droit de l'Université Queen's; il a ensuite obtenu une maîtrise en droit au Osgoode Hall. Avant sa nomination au Sénat en 2001, le sénateur Day avait une pratique florissante dans le domaine du droit des brevets et des marques de commerce et du droit de la propriété intellectuelle, avant de devenir conseiller juridique de J.D. Irving Ltd. en 1992.

Vice-président du Sous-comité des anciens combattants, le sénateur Day occupe la même fonction au Comité sénatorial permanent des finances nationales. Actuellement, ce comité se penche sur le cadre financier des fondations autonomes financées à même les fonds fédéraux. Il est également membre du Comité sénatorial permanent des transports et des communications qui vient tout juste d'entreprendre une étude sur l'état actuel des médias.

J'aimerais également vous présenter le sénateur Michael Forrestall, de la Nouvelle-Écosse. Il a représenté les électeurs de Dartmouth à la Chambre des communes pendant 25 ans, et depuis 12 ans, il est leur sénateur. Durant toute sa distinguée carrière de parlementaire, le sénateur Forrestall s'est intéressé aux questions de défense, il a siégé à divers comités parlementaires, notamment au Comité mixte spécial de 1993 sur l'avenir des Forces canadiennes. En outre, il a représenté le Canada aux assemblées parlementaires de l'OTAN. Il est vice-président de notre comité principal, le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense.

Le président de notre comité principal est le sénateur Colin Kenny, qui a travaillé au cabinet du premier ministre de 1970 à 1979, puis s'est joint au secteur privé à titre de cadre dans le domaine de l'énergie. Durant sa carrière parlementaire, le sénateur Kenny a présidé le Comité sénatorial permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, de même que le Comité des vérifications et le Sous-comité des budgets. Il a siégé à de nombreux comités, notamment au Comité mixte spécial sur la politique de défense du Canada, au Comité spécial sur le terrorisme et la sécurité et au Comité spécial sur les drogues illicites. Le projet de loi d'initiative parlementaire qu'il a présenté sur les énergies de remplacement a été adopté, ce qui constitue un honneur rarissime pour un projet de loi n'émanant pas du gouvernement. Les autres projets de loi qu'il a parrainés visaient à réglementer l'industrie du tabac et à décourager les jeunes de fumer. En outre, il est actuellement membre du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles et participe à l'assemblée parlementaire de l'OTAN.

Nous n'avons pas beaucoup de temps aujourd'hui, mais avant de céder la parole à nos distingués invités, je crois que le sénateur Kenny veut poser une question.

Le sénateur Kenny: Étant donné que nous n'avons pas beaucoup de temps, nous pourrions peut-être songer à laisser tomber les déclarations pour passer directement aux questions.

Le président: Je me suis entretenu avec notre invité principal, le lieutenant-général Christian Couture, qui nous a remis une déclaration que nous avons tous reçue ce matin. Au lieu de la lire, il fera de brèves observations, après quoi les sénateurs pourront poser leurs questions. D'abord, le lieutenant-général Couture pourrait peut-être nous présenter les personnes qui l'accompagnent.

Le lieutenant-général Christian Couture, sous-ministre adjoint, Ressources humaines — Militaires, ministère de la Défense nationale: Je vous remercie de nous donner l'occasion de nous adresser au comité aujourd'hui.

Je suis accompagné de M. Pierre Lemay, président du Régime d'assurance-revenu militaire (RARM) ainsi que de M. John Geci, président de l'Agence de soutien du personnel des Forces canadiennes (ASPFC). Au cas où vous auriez des questions très précises, je me suis fait accompagner du capitaine (Marine) Andrea Siew, qui est directrice de la Direction de la qualité de la vie, du colonel Scott Cameron, chirurgien général des Forces canadiennes et du lieutenant- colonel David Wrather, directeur, Soutien aux blessés et administration.

Mme Kathleen Martin, directrice du Régime d'assurance-revenu militaire à La Maritime, est également à la table. C'est la première fois que je la rencontre.

Comme vous l'avez précisé, monsieur le président, nous vous avons déjà remis plusieurs brochures ainsi qu'un exemplaire de toute ma présentation. Je serai donc bref.

L'Agence de soutien du personnel des Forces canadiennes a été créée en 1996 pour contribuer à la préparation opérationnelle et à l'efficacité des Forces canadiennes, ainsi qu'au moral des troupes et de leurs familles. J'espère, monsieur le président, que vous n'avez pas d'objection à ce que j'utilise les acronymes ASPFC et RARM durant ma présentation.

Le RARM comporte deux composantes majeures. La première, que nous appelons les «produits propres au RARM», est une composante non publique qui offre des services comme l'éducation financière, la panification, le counselling ainsi que de l'aide financière grâce à des prêts consentis par la Caisse d'assistance au personnel des Forces canadiennes. La Caisse offre également un régime optionnel d'assurance-vie et invalidité partielle. Le RARM comme tel est ouvert aux membres de tous les grades et est payé entièrement par les membres.

L'autre composante — c'est-à-dire le régime financé par le Conseil du Trésor — est essentiellement l'application aux Forces canadiennes du programme parrainé par le gouvernement fédéral, offrant différentes formules applicables à des groupes comparables dans la fonction publique et dans la GRC. Ces programmes incluent une garantie d'invalidité à long terme pour tous les employés et un programme supplémentaire pour la catégorie des cadres. Dans les Forces, ce dernier programme s'applique aux colonels et aux généraux.

Ces régimes d'assurance font partie du programme d'indemnisations et de garanties des Forces canadiennes. Le Conseil du Trésor est entièrement responsable de ce programme; le chef d'état-major est le propriétaire de la police et La Maritime en est l'assureur.

Le RARM a été créé en 1969 pour offrir un régime facultatif de remplacement de revenu en cas de blessures, de mutilation ou de décès non liés au service militaire, lesquels ne sont pas visés par la Loi sur les pensions. La Loi sur les pensions est et demeure aujourd'hui le programme d'assurance du gouvernement pour les membres des Forces canadiennes blessés ou tués en service militaire.

À l'instar de tout autre programme, le RARM doit faire parfois l'objet de modifications pour s'assurer qu'il répond aux besoins actuels des membres des Forces canadiennes. Par exemple, le régime d'invalidité longue durée offert dans le cadre du RARM a été largement révisé en 1999, ce qui s'est soldé par des améliorations importantes tant aux critères d'admissibilité qu'au programme de réadaptation professionnelle. Les questions soulevées par les membres des Forces canadiennes sont prises très au sérieux et nous travaillons d'arrache-pied pour y trouver des solutions.

Comme vous le savez sans doute, le ministre a annoncé hier des améliorations à la protection offerte en cas de mutilation accidentelle pour les membres des Forces canadiennes qui entrera en vigueur très bientôt. La nouvelle protection prévoit une échelle mobile et une somme forfaitaire maximale de 250 000 dollars en cas de mutilation accidentelle dans le cadre de ses fonctions pour tous les membres des Forces canadiennes régulières et de la réserve qui occupent un rang supérieur à celui de colonel. Les colonels et les officiers généraux demeurent couverts pour le même montant dans le cadre du régime d'assurance des officiers généraux.

Il faut se rappeler que le RARM n'est qu'un des nombreux programmes et services que nous avons mis en place à l'intention des membres des Forces canadiennes blessés ou décédés et de leurs familles. Tant le ministre que le chef d'état-major ont déclaré que la santé et le bien-être de nos soldats et de leurs familles sont de la plus haute importance, et que nous continuerons de mettre en oeuvre des programmes pour assurer leur bien-être. Nous sommes déterminés à faire en sorte que les membres blessés de la Force régulière et de la Réserve et leurs familles reçoivent les meilleurs traitements, soins et services de soutien possible. Nous sommes toujours heureux de recevoir des rapports et des recommandations pour nous aider à atteindre notre objectif, c'est-à-dire nous occuper de nos gens.

Je vais m'arrêter ici et je vous invite à nous poser des questions.

Le président: Merci beaucoup, lieutenant-général Couture. Est-ce que d'autres membres du panel veulent faire une déclaration d'ouverture? Sinon, je vais céder la parole à notre vice-président.

Le sénateur Day: Vous avez eu l'occasion d'examiner la transcription du témoignage du major Henwood.

Lgén. Couture: Oui.

Le président: Est-ce que le major Henwood, dans son témoignage, a dit des choses au sujet desquelles vous n'êtes pas d'accord?

Lgén. Couture: Le major Henwood a parlé de son propre cas. Je pense qu'il ne serait pas approprié que je cite des cas spécifiques, ce qui compromettrait la protection des renseignements personnels. Je suis certain que les honorables sénateurs le comprennent.

Quelque chose en particulier? Pas nécessairement, mais j'aimerais préciser une chose. Certaines personnes croient que le régime a été créé pour les généraux et les colonels ou créé pour eux à leur demande. Ce n'est pas vrai. Il s'agit d'un programme qui leur a été offert dans le cadre de leur indemnisation parce que leur indemnisation, justement, est établie en regard de celle des hauts fonctionnaires de la fonction publique à qui ce genre de garantie est offert. Lorsque le niveau a été établi au début des années 70, c'est devenu leur indemnisation. Cela n'a pas de sens. On nous a demandé de nous pencher sur cette question et le ministre a fait une annonce à ce sujet hier.

Le sénateur Day: Le major Henwood a bien dit que son grief était en suspens, c'est-à-dire qu'il avait été remis au chef d'état-major depuis pas mal longtemps. Est-ce que vous pouvez expliquer cela?

Lgén. Couture: Le grief, comme vous l'avez dit, est entre les mains du chef d'état-major pour décision finale, ce dernier étant l'autorité suprême. Il n'y a pas de limite de temps, selon nos règlements, pour l'examen d'un grief. A-t-on mis beaucoup de temps à l'examiner? Oui, c'est le cas. Je ne peux pas me substituer au chef d'état-major pour dire quand il rendra son jugement, parce que je ne le sais pas. Je sais cependant que c'est lui qui a le grief entre les mains.

Le sénateur Day: Actuellement, aucune limite de temps n'est prévue. Nous pourrions peut-être formuler une recommandation au ministère de la Défense nationale à ce sujet. Je suis certain que les soldats tiennent à avoir une réponse positive ou négative, afin qu'ils puissent organiser leur vie ou, comme le major Henwood l'a dit, fermer le dossier.

Lgén. Couture: Je suis d'accord. Nous avons examiné le système de griefs et mis en place une nouvelle procédure en l'an 2000. Bien qu'il n'y ait pas encore de limite de temps imposée au niveau du chef d'état-major, nous avons mis en place des normes de mesure du rendement et augmenté le personnel qui s'occupe de l'administration des griefs, pour améliorer les choses. Notre objectif est de réduire sensiblement le délai d'examen des griefs. Pour ma part, je souhaite qu'une personne ait une réponse dans un délai d'un an. Nous n'en sommes pas encore là, mais nous y travaillons.

Le sénateur Day: Le major Henwood a dit que, parce que tout le programme du RARM concernant la stabilité des revenus auquel il avait droit était basé sur le revenu qu'il avait reçu d'autres sources, il n'avait droit à aucun paiement du RARM à cause de ces autres sources de revenus, y compris les pensions de retraite auxquelles il a cotisé. Ainsi, à cause du niveau de revenus qu'il tirait de ses pensions, il n'a pu obtenir de prestations du RARM; par conséquent, il en a été jugé inadmissible et n'a pas eu droit au soutien qu'il estimait nécessaire.

Il s'est donné en exemple, mais il parlait au nom de tous les membres des forces armées qui pourraient être blessés dans l'exercice de leurs fonctions. Je crois qu'il est important pour notre auditoire de comprendre cela. Nous nous sommes concentrés sur son cas parce que nous pouvions analyser un cas concret. Mais il parlait au nom d'autres personnes également, tant dans le passé que pour l'avenir.

Lgén. Couture: Là encore, sans s'intéresser aux détails spécifiques du cas du major Henwood, en ce qui concerne les militaires blessés dans l'exercice de leurs fonctions, c'est la Loi sur les pensions qui leur accorde les indemnisations. Pour des raisons d'intégration, le programme fixe l'indemnisation à 75 p. 100 du revenu à la date où la personne cesse son emploi. Si des personnes sont blessées dans l'exercice de leurs fonctions, cela devient un minimum. La Loi sur les pensions prévoit une échelle pour déterminer le niveau d'invalidité qu'a subie une personne.

Quant aux autres avantages que prévoit la Loi sur les pensions, les membres ont accès à tout ce qui touche un état de santé ouvrant droit à pension. Il pourrait s'agir du Programme pour l'autonomie des anciens combattants, de soins médicaux liés à leur état de santé ouvrant droit à pension, de soins à domicile, de services infirmiers, et j'en passe.

Le sénateur Day: Excusez-moi de vous interrompre, lieutenant-général, mais le major Henwood nous a dit qu'au cours de la période qui a précédé le moment où il a été déterminé s'il était admissible ou non — c'est-à-dire quelques années avant que l'on établisse l'ampleur des blessures et la guérison — il a dû assumer beaucoup de dépenses. C'est durant cette période, a-t-il dit, qu'il a subi ses torts et ses difficultés. Par exemple, il s'agissait des frais de gardiennage pour permettre à sa femme de venir le voir à l'hôpital, des courses en taxi, ce genre de dépenses. Est-ce qu'il y a quelque chose dans les forces armées, ou dans le RARM, qui aurait pu l'aider?

Lgén. Couture: À l'époque, je ne crois pas. C'est la raison pour laquelle nous avons écouté les doléances des membres des Forces canadiennes et nous avons songé à améliorer le programme. Depuis 1999, nous avons créé la Direction du soutien aux blessés et de l'administration. La Direction a obtenu des fonds d'urgence pour remédier à ce genre de situation. Malheureusement, avant 1998, la Direction n'existait pas. Aujourd'hui, oui.

Le sénateur Day: Monsieur Lemay, du point de vue du RARM, chaque personne dans les forces armées doit contribuer à la garantie de stabilité du revenu du RARM. Est-ce exact?

M. Lemay: C'est obligatoire pour les membres des forces armées embauchés à compter du 1er avril 1982.

Le sénateur Day: Avez-vous des chiffres sur les sommes qui ont été intégrées à ce régime, et combien le RARM a déboursé aux membres des forces armées admissibles à de telles indemnisations à partir de 1982?

M. Lemay: Je n'ai pas ces chiffres précis avec moi. Il est toutefois possible de les trouver. Nous vous avons remis les états financiers de 2002, et vous y voyez combien a été perçu en primes et combien a été versé en indemnisations.

Le sénateur Kenny: Il faudrait le consigner au compte rendu. Donnez-lui les états financiers et demandez-lui de nous indiquer ces éléments.

Le président: Ce serait bien.

Le sénateur Kenny: Donnons-lui un exemplaire des états financiers et voyons ce qu'il a à dire.

Le président: Peut-être pourrait-il le faire lorsqu'il ne répondra pas à des questions.

Le sénateur Day: Je pourrai revenir à la question.

M. Lemay: Si vous me le permettez, j'aimerais vous parler de la création et de l'objectif du RARM. Cela pourrait peut-être aider les honorables sénateurs dans leurs délibérations au sujet du RARM parce que, à mon avis, il y a peut- être eu confusion lors de votre première journée de délibérations.

Le président: Pourriez-vous le faire rapidement, et nous indiquer la confusion que vous nous prêtez?

M. Lemay: Le RARM a été créé pour assurer une protection au personnel militaire ayant subi des blessures non liées à leurs fonctions. Le régime d'assurance principal du gouvernement pour les blessures reliées à des fonctions est la pension. On a réalisé alors que la plupart des blessures et des décès n'étaient pas de nature militaire. Le programme voulait pallier cette lacune. Le programme n'a jamais eu pour but de compléter des prestations de pension. En fait, de 1969 à 1976, les personnes admissibles à des pensions n'étaient pas admissibles aux indemnisations du RARM. C'est seulement dans les années 70 que l'on s'est rendu compte que l'on pouvait recevoir seulement une prestation équivalant à 10 ou 20 p. 100 du salaire, ce qui ne constituait pas un revenu suffisant pour faire vivre une famille.

À ce moment-là, le RARM a été élargi pour compléter les prestations accordées en vertu de la Loi sur les pensions jusqu'à concurrence de 75 p. 100 du salaire. Le programme n'a jamais eu pour but d'accorder une indemnisation supplémentaire aux prestations versées en vertu de la Loi sur les pensions, mais bien plutôt d'assurer une garantie pour des blessures non liées aux fonctions militaires, garantie que n'avaient pas les gens. De 1969 à aujourd'hui, même s'il y a eu des changements, les primes ont été versées pour la protection contre des blessures subies dans le cadre de fonctions non militaires — invalidité à long terme et mutilation — et aujourd'hui, pour venir compléter les prestations versées en vertu de la Loi sur les pensions jusqu'à concurrence de 75 p. 100 du salaire.

Vous savez peut-être que les prestations versées en vertu de la Loi sur les pensions ne sont pas imposables. On n'en tient pas compte dans le calcul de la prestation. Le programme n'a jamais eu pour but d'offrir une prestation supérieure à 75 p. 100 du salaire. Les gens n'ont jamais payé de primes pour une telle indemnisation. En fait, aujourd'hui, le revenu après impôt découlant de l'ensemble des prestations versées en vertu de la Loi sur les pensions, selon le nombre d'enfants et les années de service — parce qu'il y a aussi la Loi sur la pension de retraite des Forces canadiennes, la LPRFC — en fait, le revenu après impôt dépasse probablement leur revenu après impôt pendant que ces gens-là étaient dans l'armée.

Le sénateur Day: Est-ce que vous gardez tout l'argent recueilli par le paiement exigé du personnel des forces armées dans le RARM, l'argent qui n'est pas affecté à des fins de gestion, pour l'assureur ou pour ceux qui ont droit aux prestations? Est-ce que le solde est gardé à part et investi comme étant de l'argent du RARM?

M. Lemay: S'agit-il ici du programme d'invalidité longue durée offert dans le cadre du RARM financé par le Conseil du Trésor? Comme vous le savez, il y a les produits propres au RARM et le RARM financé par le Conseil du Trésor.

Le sénateur Day: Oui, je sais.

M. Lemay: Ces primes sont personnalisées. Toutes les primes perçues sont versées au régime. Les réclamations sont versées à même ce fonds; les réserves sont ajustées pour pourvoir aux engagements éventuels; les frais d'administration sont payés à La Maritime ou au RARM, et en bout de ligne, ce qui reste, soit un excédent ou un déficit, appartient au propriétaire du régime ou, dans le cas du Conseil du Trésor, au Conseil du Trésor.

En pratique, s'il y a excédent, l'argent reste dans le régime pour les années suivantes. S'il y a déficit, le Secrétariat du Conseil du Trésor doit alors l'absorber ou augmenter les primes.

Le sénateur Day: Expliquez-nous le lien entre les forces armées et le Conseil du Trésor pour ce qui est de l'administration. Est-ce que les forces armées demandent au Conseil du Trésor d'administrer ce régime?

M. Lemay: Lorsque le RARM a été créé en 1969, c'était strictement un programme ministériel. Il a été créé en vertu de la Loi sur la défense nationale comme étant un fonds non public. Au début des années 70, le Conseil du Trésor a présenté un programme de pensions d'employeur financé par le Conseil du Trésor pour les employés. On a offert ce programme également à tous les fonctionnaires. Au début, 50 p. 100 des primes servaient à indemniser l'invalidité longue durée, ce qui est devenu un programme obligatoire dans la fonction publique. On a créé le même programme à la GRC. C'est au cours de cette période que l'on a créé le programme d'assurance pour les cadres.

À l'époque, le MDN a demandé au Conseil du Trésor si le RARM pouvait être un programme financé par le gouvernement pour les Forces canadiennes. Aujourd'hui, ces programmes financés par le Conseil du Trésor — qu'il s'agisse de l'invalidité longue durée ou du programme des officiers généraux — sont les mêmes que les programmes financés par le gouvernement pour les fonctionnaires et pour la GRC. Les programmes n'ont rien à voir avec la Loi sur les pensions ou son application, bien que l'on fasse aujourd'hui le relais avec le programme d'invalidité longue durée.

Le sénateur Day: Qui a choisi La Maritime à titre d'assureur? Est-ce le ministère de la Défense ou le Conseil du Trésor qui prend la décision?

M. Lemay: La décision a été prise en 1969, à la suite d'un appel d'offres lancé par le MDN. À l'époque, le Conseil du Trésor n'était pas un partenaire. La Maritime a été choisie comme assureur du programme. Il n'y avait aucune limite de temps au contrat et les choses ont évolué au cours des années grâce à une série d'ententes.

De toute évidence, aujourd'hui, nous n'avons pas le même contrat d'assurance que nous avions en 1969. Le Conseil du Trésor a assumé le paiement des primes pour certains programmes. De fait, en 1982, le Conseil du Trésor a pris la direction de son programme actuel. Ni le RARM ni le chef d'état-major ne peuvent changer quoi que ce soit au contrat d'assurance sans l'approbation du Conseil du Trésor après 1982.

En ce qui a trait à la compétitivité, le régime du Conseil du Trésor est examiné et étudié par le Secrétariat du Conseil du Trésor chaque année, par le Bureau du surintendant des institutions financières. On compare le programme à ceux de la fonction publique et de la GRC. À ce jour, les liens et les services ont été jugés excellents, de sorte qu'il n'est pas nécessaire de lancer un autre appel d'offres pour le contrat.

Le sénateur Day: Depuis 34 ans, il n'y a jamais eu de nouvel appel d'offres pour le contrat?

M. Lemay: C'est exact, sénateur.

Le sénateur Kenny: Je remarque, dans le document que nous avons, qu'on donne un aperçu des soins accordés au programme pour les blessures. On dit: «Nous avons entrepris des réformes sérieuses de notre système de soins de santé et de nos programmes de soutien social. Nous sommes déterminés à ce que le personnel blessé et leurs familles reçoivent les meilleurs soins, traitements et services de soutien possible.»

Y a-t-il des catégories différentes de protection au sein des Forces armées canadiennes en fonction du rang des personnes qui subissent des blessures? Si un simple soldat subit la même blessure qu'un colonel, par exemple la perte d'une jambe, est-ce que les niveaux d'indemnisation ou de protection offerts seraient différents?

Lgén. Couture: Il existe aujourd'hui deux programmes de base financés par le gouvernement. L'un est destiné aux personnes ayant un rang inférieur à celui de lieutenant-colonel, alors que l'autre est pour les colonels et les officiers généraux. Ce dernier programme renferme une composante décès et mutilation par accident. Comme vous le savez, le programme offre une somme forfaitaire maximale de 250 000 dollars calculée à l'aide d'une échelle mobile.

Le régime destiné aux lieutenants-colonels et aux officiers de rang inférieur comporte une clause différente sur la mutilation qui permet une couverture maximale de trois ans pour invalidité. Comme vous le savez également, cela est compensé par d'autres sources de revenu dont l'indemnisation offerte en vertu de la Loi sur les pensions, si la blessure est survenue dans l'exercice des fonctions, ou du Fonds de retraite des Forces canadiennes.

La somme forfaitaire pour les officiers supérieurs n'était assortie d'aucune disposition d'indemnisation. C'était là une situation inacceptable à laquelle nous avons apporté certains changements et le ministre a annoncé hier que très bientôt, tout le monde dans les Forces canadiennes aura accès aux indemnisations pour mutilation selon l'échelle mobile et jusqu'à concurrence de 250 000 dollars, ce qui n'aura aucun impact sur les autres programmes. Il s'agira d'une somme forfaitaire qui ne se substituera à aucun autre aspect de la protection que nous avons.

Le sénateur Kenny: Serait-il donc juste de dire que vous, en tant que commandant et chef éminent, vous sentez plus à l'aise de regarder vos hommes et vos femmes dans les yeux lorsque vous les envoyez dans des situations difficiles?

Lgén. Couture: Je suis dans l'armée depuis 32 ans. J'ai eu le privilège de commander des troupes à tous les rangs d'officier. J'ai eu le privilège de commander des troupes dans les opérations et je n'ai jamais eu de difficulté à regarder mes gens dans les yeux.

Le sénateur Kenny: À votre avis, l'ancien système était approprié alors?

Lgén. Couture: Le régime a été conçu en fonction d'un système d'indemnisation. Cela n'en fait pas un système parfait, mais il a été conçu comme tel. Par conséquent, je pense que les gens se disaient que des gens de mon rang méritent l'indemnisation à laquelle ils ont droit. Je ne crois pas que j'avais la liberté de la refuser. Je n'ai jamais dit et je ne dirai jamais non plus que cela en fait un système parfait. C'est la raison pour laquelle nous avons travaillé pour apporter certains changements.

Le sénateur Kenny: Ma question était la suivante: Vous sentez-vous plus à l'aise à propos des changements?

Lgén. Couture: Bien sûr que oui.

Le sénateur Kenny: Cela sera-t-il rétroactif? Est-ce un régime tourné vers l'avenir ou s'il sera applicable à des personnes qui auraient eu droit aux garanties antérieurement?

Lgén. Couture: Non, sénateur, le régime n'est assorti d'aucune disposition de rétroactivité. Conformément à la politique du Conseil du Trésor, dans un programme d'indemnisation comme celui-ci, les prestations sont versées à partir de la date d'approbation du régime.

Le sénateur Kenny: S'il y avait rétroactivité, à combien de personnes s'appliquerait-il?

Lgén. Couture: D'après ce que je sais, depuis 10 ou 12 ans, pas plus d'une douzaine de personnes.

Le sénateur: Une douzaine?

Lgén. Couture: M. Lemay a peut-être des chiffres plus précis. Je crois que c'est probablement le nombre.

Le sénateur Kenny: Sur quoi vous êtes-vous basés pour exclure cette douzaine de personnes du régime?

Lgén. Couture: C'est le programme qui était en place à l'époque.

Le sénateur Kenny: Je le comprends, mais ces personnes ont perdu une jambe, et nous semblons tous d'accord pour dire que le nouveau régime est une façon équitable de traiter les gens. Ces gens n'ont toujours pas retrouvé leur jambe, et n'ont pas obtenu l'indemnisation que tout le monde ici estime appropriée. Pourquoi exclut-on ces 12 personnes? Qu'est-ce qu'il en coûterait pour les indemniser? Douze fois le maximum de 250 000 dollars?

Lgén. Couture: Si le maximum est accordé, on peut dire ça, oui.

Le sénateur Kenny: S'il ne s'agit que de 12 personnes, pourquoi exclure la rétroactivité? Pourquoi ne l'envisagez-vous pas?

Lgén. Couture: Ce n'est pas moi qui ai élaboré cette politique. Je n'ai absolument aucun contrôle sur les décisions politiques qui limitent à l'avenir des indemnisations comme celles-là. Je suis d'accord avec vous, sénateur, que ces gens- là ont souffert. Je sympathise beaucoup avec eux. S'il y avait quoi que ce soit que je puisse faire moi-même, je le ferais, mais je ne crois pas que je puisse pouvoir personnellement offrir ce genre d'indemnisations.

Le président: De quoi auriez-vous alors besoin, lieutenant-général Couture? Supposons que je sois le ministre et que je dise: «Je voudrais que cela se fasse, s'il vous plaît», et que je précise que 250 000 dollars, c'est la somme forfaitaire maximale pour les mutilations, et que ces 12 personnes dont nous parlons n'ont pas droit au maximum. La somme en jeu serait d'environ moins de 3 millions de dollars. Si j'étais le ministre et que je disais: «Lieutenant-général Couture, je voudrais que ces gens soient indemnisés rétroactivement d'un montant auquel ils ont droit», que devriez-vous faire? Quelqu'un peut-il répondre à cette question?

Lgén. Couture: Je devrais consulter les règlements sur la façon dont on peut donner de l'argent aux gens, les raisons, les justifications, et ensuite trouver une politique ou une exception à la politique.

Le président: Je suppose que cela n'est pas autorisé.

Le sénateur Kenny: Un simple décret ne suffirait-il pas?

Le président: C'est ce que je pensais.

Lgén. Couture: Peut-être, mais je ne sais pas, sénateur. Un paiement ex gratia, peut-être? Je n'en sais rien. Si cela peut se faire par décret, je pense que vous êtes mieux en mesure que moi pour répondre à ce genre de question.

Le président: Je crois que nous sommes d'accord pour dire que le cadre juridique actuel ne prévoit pas de paiements rétroactifs.

Lgén. Couture: C'est ce que je crois comprendre.

Le président: Nous parlons ici d'un paiement ex gratia ou d'un décret. Si quelqu'un pense à une autre façon, je suis sûr que le ministre serait heureux de l'entendre.

M. Lemay: Je veux simplement dire, sénateur, que le nombre de 12 qui a été mentionné est assez près du nombre d'indemnisations qui ont été accordées au cours des 10 dernières années, mais la situation de la personne qui fait la réclamation et le paiement de ces réclamations sont différents de ce qui est autorisé dans le nouveau programme. Je dirais donc que le chiffre est probablement plus élevé que 12, mais je ne pense pas que l'on puisse vous donner un chiffre exact.

Le sénateur Kenny: Est-ce 40 ou 50?

M. Lemay: Nous ne le savons pas, sénateur. Probablement pas. Cependant, le nombre de 12 qui a été mentionné semble être conforme au nombre d'indemnisations que La Maritime a versées pour mutilation au cours des 12 dernières années.

Le président: Par conséquent, ce serait seulement les personnes qui ont le droit de recevoir une somme forfaitaire pour mutilation, les gens qui ont le rang de colonel ou un rang supérieur, n'est-ce pas?

M. Lemay: C'est en partie exact. La clause actuelle renferme une règle précisant que vous devez avoir été libéré de l'armée dans les trois ans de l'accident pour pouvoir faire une réclamation alors que la nouvelle règle n'aura pas cette exception. Vous recevrez votre argent peu de temps après la mutilation. Je dis que nous n'avons probablement pas déterminé le nombre de personnes qui ont subi des mutilations au cours des 10 dernières années et qui sont encore dans les Forces. On les a peut-être gardées dans les Forces canadiennes, et l'invalidité est peut-être la perte malheureuse d'un oeil ou quelque chose de ce genre. Tout ce que je veux dire, c'est que le nombre est probablement plus élevé que 12, probablement pas 100, mais je ne veux pas vous laisser avec l'impression que c'est 12.

Le président: Serait-il juste de dire que ceux qui ont été libérés de l'armée dans les trois ans seraient, en général, les plus handicapés, ceux qui ont subi les blessures les plus graves?

M. Lemay: À mon avis, c'est assez juste.

Lgén. Couture: Oui, sénateur, parce que si la situation médicale des personnes blessées ne correspond pas au minimum requis pour servir dans les Forces canadiennes, malheureusement alors, nous devons libérer ces personnes. Tous ceux qui satisfont aux paramètres, même s'ils ont souffert d'une incapacité restreinte, peuvent rester en poste et servir. Nous avons effectivement quelques personnes qui sont dans cette situation.

Le président: Serait-il alors possible d'obtenir l'information quant au nombre de personnes qui ont subi une mutilation et qui ont quitté les forces armées dans les trois ans et qui n'ont pas reçu, parce qu'elles n'occupaient pas le rang de colonel ou un rang supérieur, une somme forfaitaire pour cette mutilation?

M. Lemay: Personne occupant un rang inférieur à celui de colonel n'a reçu de somme forfaitaire jusqu'à aujourd'hui. Ces personnes-là doivent être admissibles à ce revenu de remplacement mensuel jusqu'à concurrence de trois ans, selon la gravité de la mutilation.

Le président: Je le comprends, mais vos dossiers indiquent-ils des gens qui ont été libérés de l'armée à cause de leur mutilation, comme vous dites, et qui n'auraient reçu aucun argent?

M. Lemay: Ces gens ont droit au revenu de remplacement mensuel pour une certaine période. Nous pourrions retourner consulter les dossiers.

Le président: Mais ce n'est pas une somme forfaitaire, n'est-ce pas?

M. Lemay: Non, c'est un revenu mensuel.

Le président: Ce qui m'intéresse, ce sont les sommes forfaitaires.

Lgén. Couture: La somme forfaitaire n'existait pas avant l'annonce de ce nouveau programme pour les personnes occupant un rang inférieur à celui de lieutenant-colonel. La somme forfaitaire n'avait jamais existé.

Le président: Nous le savons.

Lgén. Couture: Si je comprends bien votre question, vous voulez savoir le nombre de personnes qui ont subi une mutilation et qui ont été libérées des forces armées dans les trois ans de cet incident malheureux, mais qui ne reçoivent pas d'indemnisations?

Le président: Qui ne reçoivent pas de somme forfaitaire.

Lgén. Couture: Personne ne touche actuellement de somme forfaitaire.

Le sénateur Kenny: Combien ne reçoivent rien?

Le président: Je vais reformuler ma phrase: combien de personnes, selon les nouvelles lignes directrices, auraient touché cette indemnisation?

Lgén. Couture: Je comprends maintenant.

Le sénateur Day: J'espère que vous avez finalement compris que nous cherchons à savoir combien cela coûterait si l'annonce du ministre était rétroactive au moment où le RARM a été créé en 1969, au lieu d'être un régime tourné vers l'avenir.

Le président: C'était limité aux blessures non militaires en 1969.

M. Lemay: Oui.

Lgén. Couture: C'est devenu obligatoire en 1982.

Le président: Qu'y avait-il en 1982?

[Français]

Lgén. Couture: J'ai très bien compris votre question.

Le sénateur Day: C'était compliqué d'expliquer ce que nous cherchions.

Le président: J'aurais dû vous poser la question en français.

Lgén. Couture: Je n'en demandais pas autant.

Le président: C'est moi qui s'est mal exprimé.

Lgén. Couture: J'étais confus sur le point d'information que vous cherchiez et votre clarification m'a donné la réponse.

Le président: J'avais posé ma question à la négative.

[Traduction]

Le sénateur Forrestall: Je vais revenir à la même chose mais de façon différente: est-ce que le fonds est solide sur le plan actuariel?

Lgén. Couture: Pour les connaissances de base que j'en ai, oui, mais Mme Martin est mieux placée que moi pour répondre à cette question.

Mme Kathleen Martin, gestionnaire, Régime d'assurance-revenu militaire (RARM), La Maritime: Je ne suis pas actuaire, honorables sénateurs. Je m'occupe des détails de l'administration. Je pourrais demander à un actuaire de La Maritime de répondre à votre question.

Le sénateur Forrestall: Vous n'avez ici aucun pouvoir?

Mme Martin: Je m'occupe de l'administration quotidienne du RARM.

Le sénateur Forrestall: Vous n'avez pas le pouvoir de changer quoi que ce soit.

Mme Martin: Non.

Le sénateur Forrestall: Si je regarde les grandes lignes du fonctionnement, j'espère que je fais partie de ce régime. On ne peut jamais connaître les intentions du vérificateur général; vous créez certainement de la confusion dans le public.

S'agit-il d'un état financier annuel normal?

M. Lemay: Je pense que ce sont les grandes lignes.

Le sénateur Forrestall: C'est normal? Si je prenais un état financier d'il y a trois ans, serait-il relativement semblable?

M. Lemay: Est-ce que nous parlons du régime d'invalidité longue durée financé par le Conseil du Trésor?

Le sénateur Forrestall: Prenons les deux. Prenons le premier d'abord, ensuite celui du Conseil du Trésor. Est-ce que cela reflète les opérations?

M. Lemay: Le régime financé par le Conseil du Trésor refléterait seulement les trois dernières années. Cela s'explique par le fait qu'il y a eu un changement majeur et des améliorations importantes apportés au programme en 1999, ce qui a presque fait doubler les primes. Je peux vous donner plus de détails, si vous voulez. Le programme est beaucoup plus important aujourd'hui qu'il ne l'était avant 2000.

Le sénateur Forrestall: Vous avez un excédent relativement important de recettes sur les dépenses.

M. Lemay: C'est exact.

Le sénateur Forrestall: Y a-t-il un modèle qui s'est développé dans les deux comptes au cours des cinq ou 10 dernières années?

M. Lemay: Si on veut. Il y a eu des déficits certaines années, cela dépend des projections actuarielles.

Le sénateur Forrestall: Cela nuirait-il gravement à la stabilité actuarielle du programme si, comme cela a été suggéré, vous deviez adopter une mesure rétroactive et faire des ajustements?

M. Lemay: Le ministère étudie toujours de quelle façon mettre ce nouveau programme en oeuvre.

Le sénateur Forrestall: Est-ce l'une d'elles?

M. Lemay: Ce serait l'une d'elles, mais un programme de mutilation accidentelle dans l'exercice de ses fonctions seulement, assorti d'une somme forfaitaire, ne serait pas considéré comme un programme très coûteux. Comparativement aux programmes que vous avez ici, ce serait un programme mineur.

Le sénateur Forrestall: Ce que je veux dire, c'est que les sommes en cause ici ne sont pas énormes et nous avons un excédent. Y a-t-il une raison pour le garder, lieutenant-général?

Lgén. Couture: L'excédent du côté des produits propres au RARM comme tel est de l'argent provenant de fonds qui ne sont pas publics, cela appartient aux soldats.

Le sénateur Forrestall: Vous paierez à même les recettes générales, peu importe les chiffres.

Lgén. Couture: Ce ne sont pas des fonds publics. C'est une activité source de revenus, qui provient des ventes de CANEX (Économat des Forces canadiennes) et d'autres secteurs.

Le sénateur Forrestall: Je sais très bien d'où vient l'argent.

Lgén. Couture: Pour ce qui est de l'invalidité longue durée, du régime financé par le Conseil du Trésor, le fonds appartient au Conseil du Trésor, pas à nous.

Le sénateur Forrestall: Qui est le Conseil du Trésor? Les Canadiens?

Lgén. Couture: Bien sûr, mais je n'ai pas de contrôle sur cet argent.

Le sénateur Forrestall: Donnez-moi un oui ou un non. Pouvons-nous aider ces gens ou pas? Est-ce que le fonds est suffisamment riche pour envisager ce que de toute évidence vous estimez être la position du comité?

M. Lemay: Sénateur, le nouveau programme sera parrainé par le gouvernement du Canada.

Le sénateur Forrestall: Il sera parrainé par la population.

M. Lemay: Oui, par la population canadienne.

Le sénateur Forrestall: Pas par des fonds privés.

M. Lemay: C'est exact, sénateur. Les excédents du RARM financé par le Conseil du Trésor appartiennent à la population canadienne, mais la gestion de ces fonds appartient au Secrétariat du Conseil du Trésor, non pas au RARM ou au ministère de la Défense nationale. Par conséquent, nous ne pouvons pas décider d'utiliser ces fonds, qui appartiennent à la population du Canada, pour payer un programme rétroactif assorti d'une nouvelle somme forfaitaire, parce que ces fonds sont gérés par le Secrétariat du Conseil du Trésor.

Le sénateur Banks: J'aimerais poser quelques questions rapides. Dans combien de temps prévoyez-vous mettre en oeuvre ce nouveau plan dont vous parlez, qui sera mis en place et qui offrira certaines indemnisations supérieures à ce qui existe déjà? Est-ce que ce sera en mai ou en 2005?

Lgén. Couture: Le plan sera mis en oeuvre dès que les documents seront signés.

Le sénateur Banks: La paperasserie, c'est de la paperasserie que vous autres avez générée, pas le Conseil du Trésor. Le contrôle qu'exerce le Conseil du Trésor sur ces fonds est à tout le moins en partie une réaction à vos suggestions. Le Conseil du Trésor réagit à ce que vous lui soumettez, le Conseil du Trésor ne produira pas de plan pour proposer que l'on indemnise ces gens rétroactivement.

Lgén. Couture: Nous travaillons là-dessus depuis plusieurs mois. Nous avons eu une longue discussion avec les collègues du Conseil du Trésor. Les ministres ont fait l'annonce hier.

Les documents que nous avons générés seront examinés rapidement par le ministère. Si nous avons les signatures demain, le régime sera en vigueur dès demain.

Le sénateur Banks: Si vous deviez formuler une proposition exprimant qu'il serait prudent, sage et équitable d'indemniser ces gens rétroactivement — c'est-à-dire si vous y croyez. Si vous produisez un régime précisant que les conditions en vertu desquelles vous indemniseriez les gens rétroactivement — pour mutilation, par exemple — alors on pourrait supposer que ce régime recevrait le même traitement que le nouveau programme dont vous parlez. C'est-à-dire que ce plan-là sera sérieusement étudié et considéré.

Lgén. Couture: J'ose le croire.

Le sénateur Banks: Vous avez mentionné quatre mois.

Lgén. Couture: Nous avons travaillé de trois à quatre mois pour en arriver là où nous sommes. S'il y a une façon de s'occuper de ce que vous avez suggéré, nous la trouverons. S'il n'y en a pas, nous retournerons à la suggestion du président pour un décret ou un paiement ex gratia.

Le sénateur Banks: Est-ce que la rétroactivité a déjà été prise en compte? Est-ce qu'elle faisait partie des éléments examinés pour le programme qui est sur le point d'être signé dès que la paperasserie sera réglée, et que ça a été rejeté par la suite? Ou encore, la question n'a peut-être pas été discutée du tout?

Lgén. Couture: D'après mon expérience sur les indemnisations et les avantages, il n'y a pas de disposition rétroactive. C'est toujours proactif.

Le sénateur Banks: L'idée de la rétroactivité n'a pas été envisagée sérieusement.

Lgén. Couture: Elle a été envisagée, mais mise de côté lorsque nous nous sommes frappés à un «mur de brique». Il était plus facile de le contourner pour en arriver là où nous en sommes aujourd'hui.

Le sénateur Banks: De quel mur de brique s'agissait-il? Le Conseil du Trésor a-t-il dit non à l'idée?

Lgén. Couture: Normalement, le Conseil du Trésor n'envisage pas la rétroactivité. Je ne peux parler en son nom parce que je n'en suis pas membre. Cependant, d'après mon expérience dans ce domaine, l'indemnisation et les avantages sont toujours envisagés à partir de la date d'approbation du régime. Nous déterminons la date de la réclamation et nous comptons à partir de là. Malheureusement, parfois une personne est admissible la veille mais pas le lendemain. Je pourrais vous donner des exemples de ce genre de situation, lorsque nous avons apporté les changements en 1999 au régime d'invalidité longue durée. Le régime est entré en vigueur le 1er décembre 1999, mais si la date d'approbation de la réclamation était la veille, la personne n'y était pas admissible.

Le sénateur Banks: Il y a toujours des dates butoirs.

Lgén. Couture: Oui, mais c'est malheureux. Il y a d'autres façons de contourner les problèmes et je suis ouvert aux suggestions. Je n'abandonne pas aussi facilement.

Le sénateur Banks: Monsieur Lemay, vous avez fait une distinction tout à l'heure entre les officiers généraux d'une part, et les autres rangs d'autre part, en ce qui concerne l'exclusivité mutuelle des paiements pour mutilation et autres considérations. Est-ce que cette exclusivité mutuelle s'applique aux officiers ayant le rang de général? Vous avez dit qu'il y a une distinction entre les accidents qui surviennent dans l'exercice de ses fonctions et, je présume, les autres. Cette distinction s'applique-t-elle en ce qui a trait à la couverture d'assurance pour les officiers généraux? Est-ce qu'ils reçoivent un paiement pour mutilation, peu importe la façon, la date ou la raison de leur blessure?

M. Lemay: La réponse brève est que la couverture est offerte 24 heures sur 24, sept jours sur sept.

Le sénateur Banks: Mais pas pour les autres rangs?

M. Lemay: Il faut que ce soit lié à une fonction militaire. Je crois que nous avons mentionné que le programme destiné aux officiers généraux existe depuis 1972. C'était l'application aux Forces canadiennes du programme offert dans la fonction publique et la GRC. L'indemnisation des colonels et des généraux correspondait à la catégorie des cadres dans la fonction publique. Lorsque le gouvernement a lancé le programme dans la fonction publique, comme il l'a fait pour les parlementaires, il a permis aux Forces canadiennes de l'appliquer aux généraux.

L'armée présente des cas qui peuvent être différents de la fonction publique. Plus récemment, on peut dire que le programme répond aux préoccupations qui ont été exprimées. En fait, les problèmes reposaient sur des injustices pour fonction militaire.

Le sénateur Banks: Dans le nouveau régime, y aura-t-il une égalité approximative et des ententes parallèles à ce qu'il y a entre les paiements pour mutilation offerts aux officiers généraux et aux autres rangs?

M. Lemay: Pour les fonctions militaires, oui, ce sera la même chose.

Le sénateur Banks: La distinction demeurera pour les autres rangs qui n'auront pas droit à l'indemnisation si la blessure n'est pas liée à des fonctions militaires.

M. Lemay: C'est exact.

Lgén. Couture: La clause actuelle sur les mutilations, qui prévoit un versement jusqu'à un maximum de trois ans et 75 p. 100 du salaire, continuera de s'appliquer pour les fonctions non militaires pour les personnes qui ont un rang inférieur à celui de colonel.

Le président: En quoi consisterait une «fonction non militaire»? Prendre sa voiture pour aller chercher du lait au magasin le soir?

Lgén. Couture: Oui, monsieur. Une fonction militaire est tout ce qui implique l'exécution de votre tâche. Lorsqu'il y a incident ou accident, il y a habituellement enquête sommaire pour déterminer s'il s'agit d'une fonction militaire. Cela fait partie de la documentation qu'il faut remettre au service des réclamations, puis l'affaire suit son cours.

Le sénateur Banks: Si je suis en Croatie et que j'ai une journée de congé, est-ce que je suis en fonction militaire?

Lgén. Couture: Dans ce cas — en Croatie — vous êtes en fonction spéciale et vous êtes couvert 24 heures sur 24, sept jours sur sept par le régime d'assurance et non par la Loi sur les pensions.

Le sénateur Atkins: Compte tenu de l'annonce qu'a faite le ministre hier, le personnel militaire qui est envoyé à l'étranger ou affecté à des fonctions spéciales est-il couvert?

Lgén. Couture: À la date de la signature des papiers — ce devrait être aujourd'hui ou demain — ce personnel sera couvert. J'ajoute qu'actuellement, aucun membre du personnel ne correspondrait à votre description.

Le sénateur Atkins: Est-ce que j'ai bien compris que ce nouveau programme n'est pas facultatif pour quelqu'un de quelque rang que ce soit? Tout le monde est couvert?

Lgén. Couture: Oui, monsieur.

Le sénateur Atkins: Il ne s'agit pas d'un régime exigeant une prime pour chaque tranche de 10 000 dollars?

Lgén. Couture: Non, monsieur. Il y a une échelle mobile. Je n'aime pas ce terme, mais selon la mutilation, cela va de 60 000 à 250 000 dollars et la somme est payée par le gouvernement.

Le sénateur Atkins: Ça s'applique aux militaires de tout rang.

Lgén. Couture: Ça s'applique à ceux qui n'avaient pas de couverture comme celle-là avant — des simples soldats aux lieutenants-colonels y compris. Les colonels et les généraux continueront d'être couverts par le régime d'assurance des officiers généraux. Tout le monde sera protégé, d'une façon ou d'une autre, pour les mutilations.

Le sénateur Day: Lieutenant-général, y a-t-il quelqu'un au ministère de la Défense nationale qui pourrait nous prévenir une fois que les papiers auront été signés?

Lgén. Couture: Je vous appellerai personnellement.

Le sénateur Day: Je me ferai un plaisir de vous entendre.

Il est important que vous compreniez tous que nous ne considérons pas les sommes forfaitaires comme une loterie, du fait d'avoir perdu deux jambes ou un oeil, mais bien plutôt comme une somme compensatoire que l'on peut offrir à la personne qui a donné ses bras ou sa jambe ou son oeil. C'est une indemnisation en compensation de son incapacité à autrement gagner un revenu comparable. C'est la raison pour laquelle nous nous sommes dits qu'il était peut-être un peu injuste que l'indemnisation soit basée sur un revenu à 75 p. 100 du salaire au moment où la blessure s'est produite. La personne risque alors de n'avoir aucune promotion avec augmentation proportionnelle de salaire. Le salaire de cette personne n'augmentera pas.

Si le major Henwood avait été blessé la semaine dernière au lieu d'il y a trois ans, ses 75 p. 100 de salaire auraient été considérablement plus élevés que c'est le cas maintenant. La somme forfaitaire vise à indemniser la perte de gains potentiels. Ainsi, nous croyons que cela est important.

Connaissez-vous le régime d'assurance des observateurs militaires de l'ONU qui couvre le personnel des Forces canadiennes en service pour les Nations Unies?

Lgén. Couture: Je ne le connais pas très bien, je sais seulement qu'il existe. Lorsque j'ai déployé des troupes sur le champ des opérations, j'étais dans une unité différente qui relevait du gouvernement canadien. Je n'ai pas servi à titre d'observateur moi-même. Peut-être que mes collègues le savent, mais je n'ai pas de détails. Je ne voudrais pas vous induire en erreur.

Le sénateur Day: Si une personne des forces armées qui a été blessée recevait une indemnisation dans le cadre de ce nouveau régime, est-ce qu'on en tiendrait compte dans son revenu d'après vos régimes actuels?

M. Lemay: Non, pas dans le cadre du RARM.

Le président: Pour les fins du compte rendu, je dois vous lire ceci parce que j'ai demandé à notre greffier de contacter notre témoin précédent, le major Henwood, pour lui demander s'il avait reçu une indemnisation des Nations Unies puisque nous croyions savoir qu'il travaillait pour les Nations Unies au moment où il était en Croatie. Le major Henwood a répondu qu'effectivement, il avait reçu une indemnisation de 70 000 dollars du régime d'assurance des observateurs militaires de l'ONU. Le sénateur Day a demandé quelles en étaient les répercussions. Dans le cadre du RARM, aucune, c'est donc là où la question doit en rester.

Je tiens maintenant à vous remercier au nom de notre sous-comité d'avoir été là aujourd'hui. Nous sommes désolés d'avoir commencé en retard et de vous avoir gardés si longtemps. Nous sommes particulièrement désolés de ne pas avoir eu la chance de faire appel aux compétences de M. Geci, mais peut-être le ferons-nous lors d'une autre séance. Cependant, nous apprécions beaucoup ce que vous avez fait pour nous aider à mieux comprendre ces questions un peu compliquées.

Lieutenant-général Couture, si vous pouviez obtenir cette information que vous vous êtes engagé à nous donner avant mercredi prochain, nous l'apprécierions beaucoup, parce que le ministre la recevra certainement avant nous et nous aimerions l'avoir lorsqu'il comparaîtra devant nous mercredi prochain.

Lgén. Couture: Je vais faire de mon mieux. Je vais téléphoner au sénateur Day dès que je le pourrai.

Le président: C'est très bien parce que de toute évidence, cela nous permettrait de discuter de la question avec le ministre.

La séance est levée.


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