Délibérations du Sous-comité des Anciens combattants
Fascicule 10 - Témoignages
OTTAWA, le mercredi 29 octobre 2003
Le Sous-comité des anciens combattants du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense se réunit aujourd'hui à 12 h 20 pour étudier les prestations et services offerts aux anciens combattants, les activités commémoratives et la Charte des anciens combattants.
Le sénateur Michael A. Meighen (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président: La séance du Sous-comité des anciens combattants est ouverte.
Nous sommes particulièrement honorés d'accueillir aujourd'hui le ministre des Anciens combattants, M. Rey Pagtakhan. Je vous souhaite la bienvenue, monsieur le ministre.
Je vous invite à nous présenter tout d'abord les collaborateurs qui vous accompagnent. Je crois savoir que vous avez un exposé à faire.
Je vous en prie.
L'honorable Rey Pagtakhan, c.p., député, ministre des Anciens combattants: Avant toute chose, je tiens à vous dire à quel point je suis heureux de comparaître une fois de plus devant votre comité sénatorial, d'autant plus que vous discutez des activités de commémoration du Canada et d'autres questions de collaboration. Je vais traiter surtout de ces sujets, mais vous pouvez bien sûr poser des questions sur à peu près tout.
Cet après-midi, je suis accompagné par M. Jack Stagg, sous-ministre, à ma gauche, et, à ma droite, le directeur exécutif du Secteur des affaires publiques.
À la tribune se trouve le directeur général de la Planification ministérielle, M. Dan Fenety, et le sous-ministre adjoint des Services aux anciens combattants.
Notre rencontre d'aujourd'hui tombe à point nommé, puisque ce sera bientôt la Semaine des anciens combattants et le jour du Souvenir. Au cours de l'année à venir, le calendrier des activités commémoratives sera également bien rempli.
L'objectif de notre programme Le Canada se souvient est de perpétuer le souvenir des réalisations et des sacrifices de ceux qui ont servi et sont morts pour leur patrie, en temps de guerre, de conflit et de paix. Nous tenons particulièrement à sensibiliser les jeunes, qui n'ont jamais connu la guerre. Je reviendrai un peu plus loin dans mes propos sur la façon d'établir ce lien avec les jeunes.
Sur le plan de l'organisation, le programme Le Canada se souvient se compose de trois éléments principaux: monuments commémoratifs nationaux et internationaux; sensibilisation du public et recherche, et participation des collectivités.
L'élément Monuments commémoratifs nationaux et internationaux comprend le travail rattaché aux funérailles, aux inhumations, aux sépultures, aux cimetières, aux monuments et à la préservation des champs de bataille. Cela englobe, sous les auspices de la Commission des sépultures de guerre du Commonwealth, l'entretien des tombes de plus de 116 000 Canadiens morts au combat, situées dans 74 pays. Nous nous appliquons également à prendre soin de 350 000 tombes d'anciens combattants réparties dans environ 15 000 cimetières dans l'ensemble du Canada et nous préservons des cimetières du ministère à Esquimalt, en Colombie-Britannique, et à Halifax, en Nouvelle-Écosse.
Je signale aussi une initiative importante, le projet quinquennal de 30 millions de dollars qui consiste à restaurer des monuments commémoratifs des champs de bataille. Il prévoit la restauration des 13 monuments commémoratifs de la Première Guerre mondiale du Canada en Europe, dont le Monument commémoratif du Canada à Vimy. Les travaux de reconstruction devraient commencer au début de l'an prochain.
L'élément Sensibilisation du public et recherche comprend toutes les formes d'information et de matériel didactique concernant notre histoire militaire. Notre site Web est important à cet égard et sert, chaque année, à des milliers de Canadiens, y compris des jeunes. Nous préparons et diffusons des trousses pédagogiques multimédias portant sur la Première Guerre mondiale, la Seconde Guerre mondiale, la guerre de Corée et la contribution de la marine marchande du Canada.
Enfin, l'élément Participation des collectivités du programme Le Canada se souvient. Il englobe toutes les activités qui aident les Canadiens, et en particulier les jeunes, à reconnaître le rôle de leur pays dans les conflits depuis un siècle, notamment les cérémonies commémoratives locales, les manifestations qui ont lieu à l'étranger, les activités d'apprentissage ainsi que de nombreuses activités rattachées à la Semaine des anciens combattants, tant dans la capitale du Canada que dans l'ensemble du pays, grâce au travail accompli dans les bureaux régionaux et de district.
Depuis six ans, nous avons fait de la semaine précédant le jour du Souvenir la Semaine des anciens combattants. Chaque année, le thème est différent. Celui de cette année est la participation du Canada à la guerre de Corée. J'ai assisté cette année à un certain nombre de cérémonies de commémoration de cette guerre au Canada. En juillet, j'ai eu l'honneur de diriger un pèlerinage outre-mer auquel ont pris part une cinquantaine d'anciens combattants de la guerre de Corée qui retournaient sur les lieux où leurs camarades ont combattu et péri. Je suis persuadé qu'ils ont apprécié ce pèlerinage à cause de la profonde signification qu'il a eue pour nous tous.
Comme vous le savez, chaque année, au début de novembre, le Sénat organise une cérémonie unique commémorant certains aspects singuliers de l'histoire militaire canadienne. La semaine prochaine, le 4 novembre, nous présiderons la présentation des Croix du souvenir à un groupe représentatif de membres des familles d'anciens combattants morts dans un tragique accident de train de transport de troupes à Canoe River, en Colombie-Britannique. Ces soldats allaient s'embarquer pour la guerre de Corée. Cet événement de l'histoire militaire canadienne est peu connu et rarement relaté, et l'activité prévue pour le commémorer promet de sortir de l'ordinaire.
D'autres activités qui jalonneront la Semaine des anciens combattants porteront sur les occasions d'apprendre qui sont offertes aux jeunes. Comme le nombre d'anciens combattants du temps de guerre continue de diminuer, il est capital de conserver leurs récits et leurs expériences comme partie importante de l'histoire et du patrimoine du Canada. Il faut rejoindre nos jeunes, car c'est grâce à eux que ce legs peut se perpétuer à jamais.
Voilà pourquoi nous avons établi des partenariats avec Rencontres du Canada. Des jeunes en provenance des quatre coins du Canada se rendent à Ottawa et consacrent une semaine à une profusion d'activités d'apprentissage qui gravitent autour du jour du Souvenir. Je dois dire que j'ai bien aimé toutes les activités auxquelles mon programme de travail m'a permis de participer avec eux. Il y a eu des exposés, des discussions, des visites et des activités sociales destinées à accroître leur compréhension des sacrifices et des réalisations des anciens combattants canadiens. Nous visons plus particulièrement à établir des liens entre les jeunes Canadiens et les anciens combattants pour que ceux-ci leur fassent part de leur expérience.
Nous avons créé un partenariat avec l'Institut du Dominion. Son projet Memory aidera à atteindre l'objectif de «Passons le flambeau» , car il aide à préparer les anciens combattants, grâce à des ateliers et à des séances de formation, à rendre visite aux classes des écoles publiques, dans l'ensemble du Canada et à faire à la jeunesse canadienne leurs récits personnels.
J'ai eu la chance d'assister à un atelier à Winnipeg, et je dois dire que, même si le groupe était relativement peu nombreux, il y avait beaucoup d'enthousiasme dans la salle. Même le Winnipeg Free Press y a accordé un intérêt spécial. D'après l'interview de ce journal, «Why Remember», j'ai appris que nous avons beaucoup plus de raisons de nous souvenir, et nous continuons à les expliquer. Je reviendrai là-dessus tout à l'heure.
Nous continuons à élaborer et à peaufiner notre stratégie à l'égard de la jeunesse, avec la collaboration des anciens combattants et de leurs organisations.
L'année prochaine marque le 60e anniversaire des débarquements du jour J en Normandie. Nous le savons tous. Nous amènerons un groupe d'anciens combattants qui ont pris part au débarquement pour les célébrations qui auront lieu à Juno Beach. Nous soulignerons également l'an prochain le 60e anniversaire de la campagne d'Italie au moyen d'activités de commémoration au Canada et à l'étranger.
Puisqu'il est question de pèlerinages, je voudrais aborder quelques préoccupations dont on m'a fait part. La première concerne le choix des participants aux activités à l'étranger organisées par le ministère. Qui choisit-on et pourquoi?
Tout d'abord, je tiens à vous dire que ni mon ministère ni moi ne choisissons les délégués anciens combattants ou parlementaires. Pour les premiers, le ministère communique avec les associations régimentaires des principales unités qui ont participé à la campagne faisant l'objet de la commémoration ainsi qu'avec les associations nationales d'anciens combattants. Nous les invitons à proposer des délégués.
Quant au choix des parlementaires, le ministère écrit au leader du gouvernement et au leader de l'opposition, au Sénat et aux Communes, pour leur demander de proposer des délégués. Ce sont eux qui font le choix, Nous les invitons à proposer un représentant pour accompagner la délégation. Les jeunes qui font partie de la délégation — leur participation est absolument nécessaire —, sont choisis par des partenaires d'ACC, comme Cadets Canada et Rencontres du Canada.
Le ministère de la Défense nationale se charge du choix des représentants militaires et mon ministère préconise une représentation des médias, de façon qu'il soit fait état chez nous de ce qui se passe à l'étranger.
D'expérience, je peux vous dire que l'image qui fait le plus chaud au cœur, pendant ces pèlerinages est le lien grandissant qui s'établit entre les anciens combattants du temps de guerre et les élèves du secondaire ou les cadets. L'expérience touche très profondément autant les uns que les autres.
Il semble que certains d'entre vous ont exprimé des inquiétudes au sujet de la santé et de la sécurité des anciens combattants relativement âgés qui entreprennent ces pèlerinages, et vous avez raison. Des mois de préparation précèdent ces pèlerinages, et cette préoccupation est toujours présente. Les itinéraires et les programmes d'activités sont conçus de façon à minimiser les effets du temps et de l'environnement. Nous sommes très sensibles aux besoins particuliers des anciens combattants, surtout sur le plan des soins de santé, étant donné leur âge. Nous prévoyons des périodes de repos, nous tenons compte de leurs besoins particuliers en matière d'alimentation, et nous les protégeons des éléments, et des soins médicaux sont à leur disposition en tout temps.
Cela explique en partie le grand nombre de personnes du ministère qui accompagnent ces pèlerinages. J'estime qu'il faut continuer à soutenir fermement que le ministère a le devoir de participer aux pèlerinages pour aider les anciens combattants. L'enjeu ne devrait pas être le nombre d'employés qui participent, mais le bien-être et la sécurité des anciens combattants. Nous devons donc être là.
Pour les pèlerinages de Dieppe et de Corée, nous avons mené des enquêtes auprès des anciens combattants, et il est bien entendu que nous tiendrons compte de toutes les préoccupations et propositions qu'ils pourront formuler. Notre priorité est le bien-être des anciens combattants. Nous accueillerons avec plaisir toute opinion dont le comité pourrait nous faire part. Nous avons conscience que retourner sur les champs de bataille où ils ont combattu peut rouvrir des plaies et raviver de tristes souvenirs, et nous sommes déterminés à traiter les anciens combattants avec le respect et la dignité qu'ils méritent.
Pour finir, je voudrais dire un mot de la question de la distribution et du dépôt des couronnes de fleurs le jour du Souvenir. Par le passé, le ministère achetait des couronnes commémoratives pour les parlementaires et les transmettait à chaque filiale locale de la Légion royale canadienne dans tout le pays. Ceux qui désiraient participer aux cérémonies de commémoration pouvaient alors communiquer avec la filiale locale. On a estimé que cette méthode n'était ni très efficiente, ni très efficace.
Le ministère a donc modifié le mode de distribution des couronnes après avoir consulté et obtenu le soutien inconditionnel de la Légion royale canadienne.
Au lieu d'envoyer les couronnes aux filiales de la Légion, nous les ferons parvenir au bureau de circonscription de chaque député pour que les députés puissent les utiliser le jour du Souvenir. Pour ce qui est des sénateurs, mon ministère leur procurera des couronnes sur demande, s'ils souhaitent participer à des cérémonies du jour du Souvenir.
Monsieur le président et membres du comité, je vais conclure. Le Canada est aujourd'hui un pays meilleur grâce à ce que les anciens combattants ont fait pour servir leur pays et faire respecter la dignité humaine, et grâce à ce que nous, comme société, avons fait pour eux et pour sauvegarder leur souvenir.
Le jour du Souvenir et la Semaine des anciens combattants donne à notre pays l'occasion de réfléchir. Nous réfléchissons aux réalisations et aux sacrifices ce nos anciens combattants et de leurs camarades qui ont fait le sacrifice ultime, et nous pensons à la contribution de ceux qui sont restés au Canada. Dans notre réflexion, nous prenons également conscience que la nature des théâtres de guerre a changé avec le temps: des champs de bataille créés par une déclaration de guerre officielle à ceux qui sont créés par une décision concertée du monde de sauvegarder la paix ou de l'instaurer. Nous réfléchissons au rôle joué par ces moments, ces périodes de notre histoire, pour nous donner une cause commune, comme peuple déterminé à faire respecter la dignité humaine. Les anciens combattants me disent qu'ils ont considéré leur service comme un devoir, une façon de faire leur part. Pour d'autres, ce fut un moyen d'échapper à la pauvreté. Pour tous, cependant, ce fut un temps de guerre et de danger. Nous réfléchissons, et nous prenons conscience que nous renouvelons notre foi dans la liberté, la paix, la justice, la vérité et le savoir — les éléments essentiels de la dignité humaine. Nous réfléchissons à un grand principe: lorsque nous insistons pour faire entendre la voix du Canada dans les affaires du monde, nous nous acquittons d'un devoir envers l'humanité. Nous lançons également un message aux membres des Forces canadiennes, aussi bien dans l'active que dans la réserve: nous leur savons gré de ce qu'ils ont fait et de ce qu'ils sont déterminés à faire.
Nous disons donc que nous n'oublierons pas, que nous nous souviendrons toujours.
Je me ferai maintenant un plaisir de répondre aux questions du comité.
Le président: Merci, monsieur le ministre.
Le sénateur Day: Monsieur le ministre, vous avez anticipé un certain nombre de points dont nous avons discuté au comité, et je vous remercie de l'avoir fait. Il devient plus facile d'en venir aux questions précises.
Le travail accompli par Anciens combattants Canada depuis un certain temps est louable. Il arrive souvent que, dans ses rapports et ailleurs, notre comité vous félicite de votre travail.
Il y a un ou deux points qui n'ont pas fait bonne impression dans l'opinion. L'un d'eux est celui des couronnes, dont vous avez parlé et qui semble maintenant réglé. La semaine dernière, nous avons aussi entendu le point de vue du président national de la Légion royale canadienne; il s'est dit satisfait de la situation. Par conséquent, cette affaire semble réglée. Il s'agissait qu'une question de transition, et on veut toujours mettre des couronnes à la disposition des parlementaires, aussi bien du Sénat que de la Chambre des communes.
L'autre point, sur lequel il subsiste des questions, dans l'opinion publique, est le programme d'aide aux veuves d'anciens combattants pour les aider à continuer d'habiter chez elles. C'est un bon programme, et nous croyons qu'il y a toujours un programme de rétroactivité, entre les périodes où le programme a été annulé et celui où il a été rétabli. Il semblerait qu'environ 23 000 prestataires seraient en cause. Nous avons entendu différents chiffres sur les coûts que le ministère des Anciens combattants devrait assumer pour rétablir la rétroactivité et verser les prestations à toutes celles qui seraient fondées à les demander.
Pouvez-vous nous éclairer? Où en est ce dossier?
M. Pagtakhan: D'abord, je vous remercie de vos compliments sur le travail du ministère, mais je dois dire que ces résultats sont attribuables aux employés du ministère qui, je le crois sincèrement, tout comme vous, facilitent la vie de nos anciens combattants.
Je suis heureux que nous ayons réglé le problème des couronnes. S'il subsiste des difficultés, veuillez me le faire savoir.
Quant à la question des veuves et du Programme pour l'autonomie des anciens combattants dont les médias parlent beaucoup ces jours-ci. Ces chiffres ont effectivement été lancés dans les médias. Nous essayons d'établir le chiffre le plus précis possible. Il se pourrait fort bien qu'il soit du même ordre que l'estimation initiale du ministère, qui avait été faite uniquement d'après les taux de mortalité. Toutefois, il y a d'autres facteurs dont il faut tenir compte pour établir le chiffre exact, et nous avons demandé à nos services de recherche d'utiliser tous les outils concevables pour arriver aux données les plus précises. Nous nous sommes engagés, tout comme le premier ministre, à continuer d'étudier cette question, et le ministère est tout à fait déterminé.
À propos du chiffre, je vais m'abstenir de toute autre observation tant que nous n'aurons pas des données définitives.
Quoi qu'il en soit, le fond de la question est le suivant: faut-il verser les prestations de ce programme comme nous l'avons fait à compter de la modification du règlement, en juin, c'est-à-dire les accorder à celles qui touchaient des prestations et les maintenir la vie durant, en tenant compte bien sûr des critères d'admissibilité, ainsi qu'à celles qui les demandent pour la première fois — en d'autres termes, les conjointes, après la modification du règlement?
Il faut alors se demander ce que deviennent celles qui en étaient déjà là. Leurs prestations se sont terminées avant le prolongement d'une année, avant la modification du règlement. Comme je l'ai dit à maintes reprises aux Communes et en public, la question me tient à cœur, comme elle tient à cœur à tous les parlementaires des Communes et du Sénat. Nous sommes déterminés à nous attaquer de notre mieux à ce problème, étant entendu que, à ce moment-là, nous ne disposions pas des ressources financières voulues, car autrement, nous aurions tout de suite réglé le problème. Nous sommes toujours à la recherche des ressources financières, si je puis me permettre de le dire aussi crûment.
C'est un excellent programme et, compte tenu de mes principes et de mon optimisme, je garde espoir que nous trouverons la solution que nous souhaitons tous.
Le sénateur Day: Ma prochaine question porte sur les échanges que nous avons eus avec M. Duane Daly, secrétaire national de la Légion royale canadienne. Les parlementaires ont reçu beaucoup d'appels et de demandes des sections locales de la Légion et de groupes des quatre coins du Canada au sujet de l'entretien des cénotaphes. Quant aux nombreux monuments et cénotaphes de tout le pays que les régions et les localités n'ont pas le moyen d'entretenir, nous avons demandé si le commandement national de la Légion royale canadienne contribuait à les entretenir. M. Daly nous a dit la semaine dernière que la Légion avait fait une proposition à ACC et au gouvernement fédéral concernant un certain nombre de monuments qui seraient entretenus par les autorités fédérales. Je crois me souvenir que la Légion espérait que le gouvernement fédéral en entretienne 25 ou 30 et qu'elle-même, la Légion, essaierait d'entretenir les autres cénotaphes.
Que pouvez-vous nous dire à ce propos?
M. Pagtakhan: La question est tout à fait d'actualité pour les députés, car ils ont présenté un grand nombre de motions à ce sujet, qui ont fait l'objet d'un vote, et j'ai fait des déclarations à ce propos dans les médias.
Je rappelle aux honorables sénateurs que la situation des cénotaphes a évolué dans notre pays — on en compte aujourd'hui quelque 6 000 — grâce aux efforts des villes et localités. Il ne faut pas perdre de vue cet aspect très important de la participation canadienne. De leur propre initiative, elles ont pu construire ces cénotaphes qui sont une source de fierté et qui leur appartiennent.
Je comprends les difficultés que pose l'exposition aux éléments. Je me souviens — et MM. Stagg et Mercer pourront me rafraîchir la mémoire — que, il y a un certain temps, nous remettions une subvention à la Légion royale canadienne. Il y a trois ou quatre ans, nous avons reçu une lettre nous disant qu'elle refusait la subvention. Elle voulait être une organisation indépendante et pouvoir défendre ses intérêts sans avoir l'impression qu'il pouvait y avoir conflit d'intérêt à cause de cette subvention, fût-elle très modeste.
Cela dit, étant donné que la question est très importante, la difficulté pour nous consiste à trouver les ressources. Au ministère, nous essayons de trouver une solution innovatrice. Si je ne peux pas vous en parler — je le voudrais bien —, c'est que, dans mes relations avec mes collègues du Cabinet, je ne veux pas essayer de passer pour un héros parce que j'aurais eu une bonne idée, alors qu'ils ne l'ont pas encore approuvée. Je préfère agir discrètement. En fin de compte, nous essayons d'atteindre ce genre d'objectif.
Chose certaine, la question continue de nous préoccuper. C'est pourquoi le ministère a songé à une approche originale, innovatrice. Comme nous en sommes au début de notre réflexion, je dois m'en tenir là. Néanmoins, si j'estime avoir besoin de votre soutien, je n'hésiterai pas à faire appel à vous.
Le sénateur Wiebe: Le problème tient en partie au fait qu'un grand nombre de ces monuments et cénotaphes remontent à l'époque qui a suivi la Seconde Guerre mondiale et la guerre de Corée. Ils sont l'œuvre des légions et de localités qui étaient alors plus importantes. Il faut tenir compte du fait que même nos localités rurales se contractent de plus en plus, car la population s'urbanise. L'entretien devient donc de plus en plus difficile.
Selon moi, il incombe à ACC de s'occuper des anciens combattants. Ne vaudrait-il pas mieux que le ministère du Patrimoine se charge des monuments commémoratifs? Comme les cénotaphes font partie de notre patrimoine, les fonds nécessaires à leur entretien devraient peut-être venir du ministère du Patrimoine canadien plutôt que du ministère des Anciens combattants.
M. Pagtakhan: La difficulté serait donc celle du ministre du Patrimoine, mais le gouvernement fédéral constitue une seule entité.
Le sénateur Wiebe: Tout le monde fait appel au contribuable. L'argent vient toujours du même endroit.
M. Pagtakhan: Je me souviens que, à un moment donné, votre comité s'est intéressé au projet de monument Les Valeureux. Il a exigé une correspondance entre les deux ministres, un échange amical de part et d'autre, au point que j'ai dû rédiger un mémoire pour préciser qu'il s'agissait de la responsabilité de mon ministère. L'affaire s'est réglée à l'amiable. Un exposé a été présenté à votre comité précisément sur cette question.
Je vous sais gré de votre recommandation, sénateur Wiebe, mais le ministère des Anciens combattants est le premier responsable du programme Le Canada se souvient. C'est nous qui avons la charge de ce programme. Parfois, la question est très difficile, en tout cas pour moi, personnellement et non à titre de ministre. Lorsqu'on parle de monuments commémoratifs au sujet des anciens combattants, de la guerre, tout cela fait partie de notre patrimoine, mais on établit plus facilement le lien avec Anciens combattants Canada.
Nous essayons donc d'adopter l'approche la plus innovatrice possible — et des propositions comme celle-là sont très importantes —, mais l'idée est de savoir comment vraiment arriver au résultat que nous souhaitons tous, c'est-à-dire entretenir les cénotaphes pour qu'ils se conservent le mieux possible.
Pour répondre aux questions qui viennent des circonscriptions, puisque je dois répondre, j'essaie de rappeler que le gouvernement n'a pas oublié le problème, mais je suis très franc au sujet des ressources financières. Je dis que, à Ottawa, nous avons le Monument commémoratif de guerre du Canada.
Néanmoins, j'accepterai volontiers toutes les idées que vous auriez au sujet des moyens de s'attaquer à la question financière.
Le sénateur Wiebe: Ces dernières années, j'ai pu assister à bien des réunions d'hommes et de femmes qui ont servi dans différentes guerres. D'année en année, le nombre des participants diminue, naturellement. À cause des problèmes de santé et de déplacement, il est plus difficile d'y prendre part. Qu'arrivera-t-il lorsqu'il n'y aura plus de réunions?
J'ai eu l'occasion d'assister aux cérémonies de Juno Beach. Un certain nombre d'anciens combattants étaient présents. Certains étaient venus par leurs propres moyens et d'autres avec l'aide du ministère des Anciens combattants. J'ai constaté qu'il y avait beaucoup à faire pour répondre aux besoins des anciens combattants, au fur et à mesure qu'ils prennent de l'âge. Par exemple, il n'est pas possible que tout se déroule en même temps. Beaucoup de nos anciens combattants ont dû rester debout pendant de longues périodes, et il faisait une chaleur accablante. Beaucoup ont dû rester debout ou assis dans cette chaleur, ce qui les a épuisés. De plus, on n'avait pas prévu d'amples provisions d'eau, malgré cette chaleur. À certains endroits où nous sommes allés visiter des tombes, il n'y avait pas de toilettes. Avec l'âge, je m'aperçois qu'il est important de repérer les toilettes.
J'énumère ces problèmes parce que le ministère devrait en tenir compte dans la préparation d'autres manifestations. Au cours de la planification, on pourrait s'arranger par exemple pour que les anciens combattants ne soient pas exposés au grand soleil plus de 15 minutes. Toutefois, il suffit de problèmes de circulation ou d'autres contretemps pour que cette période soit plus longue. Il faudra tenir compte de ces facteurs dans la préparation des voyages auxquels nous ferons participer des anciens combattants.
M. Pagtakhan: Je suis parfaitement d'accord avec vous, sénateur Wiebe. Il faut certainement tenir compte de l'âge des anciens combattants. On apprend en médecine, ou autrement, que les contraintes de la nature se font sentir plus fréquemment, au fur et à mesure que nous vieillissons.
Je peux dire que nous avons tiré des leçons de toutes les expériences. C'est pourquoi, en Corée par exemple, nous avons davantage essayé d'aller au devant des besoins.
Mes collaborateurs auront peut-être autre chose à ajouter.
M. Jack Stagg, sous-ministre, ministèere des Anciens combattants du Canada: En ce moment même, nous préparons le 60e anniversaire, comme le ministre l'a signalé dans ses observations liminaires. Hier, j'ai eu une réunion avec le comité consultatif consulté par le général Rohmer.
Le président: Qui sont les personnes ou les groupes représentés dans ce comité consultatif?
M. Stagg: Nous avons un comité consultatif qui compte des représentants des trois grandes associations d'anciens combattants. Le MDN est également représenté comme groupe ressource. Nous assurons les services de secrétariat et le premier ministre a demandé au général Rohmer s'il aurait l'obligeance de présider ce comité et de nous conseiller, puisque nous sommes le ministère chargé de préparer les célébrations du 60e anniversaire du jour J.
Un certain nombre de personnes qui étaient là l'année dernière, notamment des anciens combattants, nous ont remis une liste semblable à la vôtre et ont fait quelques propositions. Cette année, nous prendrons des précautions particulières pour nous assurer d'avoir les approvisionnements voulus.
J'étais présent l'an dernier et je sais que, en partie parce qu'ils ont dû arriver plus tôt que d'autres et que c'était une journée chaude, nos anciens combattants ont passé sans doute trop de temps au soleil. L'un de nos commanditaires a fourni des parapluies pour faire de l'ombre. Nous avons fourni une grande quantité d'eau, mais il n'y en a peut-être pas eu assez pour tout le monde.
Cette année, nous prendrons de grandes précautions. Chacun de ces pèlerinages a des choses à nous apprendre. Nous avons des autocars avec toilettes. Le gouvernement français nous accordera une certaine aide, cette année. Les célébrations du 60e anniversaire seront bien plus considérables que celles de l'an dernier. Les Français ont mis sur pied une sorte de commission chargée de la coordination, et le général Rohmer rencontrera les représentants de cette commission d'ici deux ou trois semaines.
Nous avons une liste de mesures à prendre, et les Français peuvent nous aider sur le plan du transport, pour veiller au confort des participants et éviter qu'ils ne soient exposés aux éléments ou au soleil plus longtemps qu'il ne le faut pour les cérémonies de commémoration et les échanges entre camarades.
M. Pagtakhan: Je présume que, au besoin, nous ferons appel à ceux qui ont l'expérience de l'organisation de grandes manifestations, même dans le secteur privé, pour prévoir les besoins fondamentaux. Nous étudierons également cette possibilité. Merci de nous le rappeler.
Le sénateur Wiebe: Ma deuxième question, et la dernière je l'espère, porte sur l'hypothèse que j'ai d'abord énoncée. Qu'arrivera-t-il lorsqu'il n'y aura plus de réunions, quand les anciens combattants, pour des raisons de santé, ne pourront plus assister à ces manifestations?
J'espère que le gouvernement déploiera des efforts considérables pour que ces pèlerinages se poursuivent et pour faire participer des jeunes — et je veux parler des enfants d'âge scolaire — aux célébrations commémoratives. C'est grâce aux jeunes que ce legs pourra se maintenir.
Ce qui importe, et ce qui revêt la plus grande valeur, c'est que ces jeunes, en retournant dans leur école, parlent de leurs expériences avec leurs camarades. Les jeunes trouvent beaucoup plus intéressant d'entendre ces récits de la bouche de leurs camarades, plutôt que d'un ancien combattant ou de vous ou moi. Il est essentiel d'augmenter considérablement la participation des élèves à ces célébrations.
Je propose que nous envisagions, lorsque nous recommandons des jeunes participants, de choisir les arrière-nièces ou arrière-neveux de soldats inhumés à l'étranger. Nous donnerons probablement ainsi la première occasion à un membre de la famille de visiter la tombe de l'ancien combattant. À mon idée, une tombe outre-mer pour un soldat tombé pendant l'une de nos guerres semble bien lointaine. Qui sait, il y a peut-être des petits-enfants ou des arrière- petits-enfants, peut-être pas très nombreux, mais plutôt des arrière-nièces et des arrière-neveux. Cela aurait un effet considérable sur la famille et sur les enfants des écoles qui entendent les récits de leurs camarades.
M. Pagtakhan: Comme je l'ai déjà dit, nous avons fait participer des jeunes. Nous l'avons fait à Vimy et en Corée.
Vous proposez que nous augmentions encore leur nombre. Le temps venu, j'étudierai certainement la question et j'en discuterai avec le ministère et le sous-ministre, pour que nous puissions y voir. J'estime que vous avez soulevé une question très importante. Autrement dit, au rythme où vont les choses, serons-nous prêts pour le changement, lorsqu'il faudra le faire, lorsque les anciens combattants ne pourront plus participer?
Vous proposez également que nous fassions appel aux arrière-nièces et aux arrière-neveux. Nous devrions aussi étudier cette possibilité. La Charte des anciens combattants était un programme fédéral, après la guerre, pour assurer la sécurité des anciens combattants. Les Canadiens estiment que ce programme était très constructif, sans effort de sélectivité, en ce sens que nous ne nous adressions pas aux autres, mais que nous respections et apprécions le rôle, dans ce cas, des grands-parents et des mères et autres parents au service de leur pays. Nous étudierons cette question. Il s'agit d'un élément nouveau, et peut-être pourrons-nous nous y attarder au fur et à mesure qu'augmentera la participation des jeunes.
Je réfléchis à voix haute, en guide de réponse à votre question, mais je vous sais gré de cette proposition, et nous l'étudierons. Je suis persuadé que MM. Stagg et Mercer se pencheront immédiatement sur la question.
M. Stagg: Le premier pèlerinage auquel j'ai participé est celui de la Corée du Sud. Nous avons décidé d'amener 12 jeunes. Ils ont été choisis par Rencontres du Canada, programme de la Fondation Terry Fox. Pendant cette quinzaine, ils se sont intéressés aux anciens combattants et à leurs expériences au fil des ans.
Il a été merveilleux d'avoir ces 12 jeunes avec nous. À la fin des huit ou dix jours que nous avons passés en Corée du Sud, il y a eu une cérémonie de clôture au cours de laquelle chacun des jeunes a parlé de l'importance de cette expérience pour lui et de ce qu'il avait appris. Il a été profondément émouvant d'entendre leurs réactions. Le premier ou le deuxième soir suivant notre arrivée en Corée du Sud, j'ai demandé aux membres du groupe comment les choses se passaient. Ils ont dit qu'ils n'étaient pas très heureux. J'ai demandé ce qui n'allait pas. Ils m'ont répondu qu'ils n'avaient pas assez de contacts avec les anciens combattants. Ils se sentaient un peu mis à l'écart. Ils voulaient s'engager, aider, participer. Nous avons fait en sorte qu'ils puissent le faire dans les six ou sept jours qui ont suivi. L'expérience a été passionnante.
Au ministère, chaque fois que nous planifions quelque chose qui se rapporte aux commémorations, nous nous demandons s'il y a une participation suffisante de la jeunesse et si nous faisons participer les jeunes de façon valable.
Vous avez raison, sénateur. Lorsque ces jeunes retournent dans leur milieu et parlent de leur expérience, cela est beaucoup plus efficace qu'une trousse d'information ou une affiche, bien que ces éléments soient également utiles pour rappeler le sacrifice de nos soldats. Néanmoins, il est important d'entendre le récit de camarades. C'est un élément clé de notre stratégie.
Nous devons nous demander, chaque fois que nous organisons des choses semblables, si nous agissons de façon efficace pour amener les jeunes à s'intéresser, à s'engager, à participer. Cela me semble très important.
M. Robert Mercer, directeur exécutif, ministère des Anciens combattants: Sénateur, votre question me semble très opportune. Le ministère doit gérer un programme de commémoration qui subit une rapide évolution. Cette transition doit se faire, car il faut se demander ce qui se passera lorsque les anciens combattants ne pourront plus prendre part aux cérémonies ni aller parler aux élèves dans les écoles, par exemple.
Il y a trois ans, nous avons réalisé ce qui doit être la plus vaste étude jamais entreprise au Canada sur la commémoration. Les Canadiens nous ont dit toutes sortes de choses sur l'avenir. Les anciens combattants, notamment, nous ont parlé des pèlerinages. Ils ont dit que le jour venait où ils ne pourraient plus y participer, et qu'ils souhaitaient donc une transition progressive vers la participation des jeunes.
Nous avons commencé par le 85e anniversaire de la bataille de la crête de Vimy. Nous avons amené en France 13 élèves, un de chaque province et territoire, pour une période de dix jours. Nous avons dépensé 250 000 $ pour les relier électroniquement avec leur école, au Canada. C'est l'effort le plus considérable que le ministère a fait pour assurer la transition vers les jeunes.
L'autre aspect très important de cette initiative, qui s'est imposé avec une meilleure connaissance de la démographie de la population des anciens combattants, c'est que nous avons commencé à insister davantage sur les activités de commémoration au Canada. Voilà pourquoi nous tentons d'en arriver plus rapidement au dévoilement d'un programme qui fait appel aux citoyens et localités de tout le Canada.
Le sénateur Atkins: Je sais qu'une des grandes difficultés consiste à choisir les jeunes participants. Cela vous donnerait certainement beaucoup de travail, mais je me demande si une sorte de concours d'essais ne pourrait pas être organisé dans les écoles. Les participants devraient tenir compte de certains paramètres et parler par exemple de ce qu'ils ont reçu d'un ancien combattant, de ce qu'ils ressentent pour leur pays et des raisons pour lesquelles ils voudraient participer à un pèlerinage. Vous seriez peut-être surpris par le nombre de personnes intéressées par ce type de promotion chez les élèves du secondaire.
Je tiens à vous féliciter, monsieur le ministre, car, à votre dernière comparution ici, nous avons discuté du Forum pour jeunes Canadiens, programme de forums de quatre semaines qui ont lieu chaque année au printemps. Il y a quatre sessions. Ces programmes attirent des éléments qui sont parmi les meilleurs et qui veulent venir à Ottawa pour apprendre. Si on continue d'offrir cette possibilité, ces jeunes gens deviendront vos porte-parole dans les écoles secondaires. Ils viennent d'écoles secondaires de toutes les régions du pays.
Vous collaborez avec Rencontres au Canada, mais je vous recommanderais aussi le Forum pour jeunes Canadiens si vous pouvez vous intégrer à ce programme.
J'ai assisté au 55e anniversaire, à Juno Beach. Je présume que le 60e sera une cérémonie impressionnante. Nous avons signalé que nos anciens combattants avancent en âge et parlé de la participation des jeunes.
Je vous sais gré de ne pas faire le choix des parlementaires, mais vous décidez combien de personnes de chaque groupe parlementaire participent au voyage. Je voudrais qu'il y ait pour les groupes parlementaires plus de possibilités de participation à ces pèlerinages. Les parlementaires circulent dans les collectivités et ont l'occasion de prendre la parole à la Chambre et au Sénat au nom des anciens combattants. Il me semble que les membres des groupes parlementaires sont une composante importante des délégations.
Comment pouvez-vous transporter ces gens? Je présume qu'il devient plus difficile pour le ministère de retenir le type d'appareil et les autres éléments importants pour faciliter la vie à ceux qui participent aux pèlerinages. Quant à Juno Beach et aux célébrations du 60e anniversaire, allez-vous pouvoir obtenir un appareil pour ce voyage?
M. Pagtakhan: Merci de vos bons mots, sénateur, et de vos encouragements au sujet de l'accroissement des moyens de faire participer les jeunes, par exemple au moyen du Forum pour jeunes Canadiens. Dans mon exposé, j'ai parlé de Cadets Canada et de Rencontres au Canada.
Tout ce qui est susceptible de faire progresser cette forme d'engagement chez les jeunes est bienvenu.
À propos de ce que vous avez dit sur la participation d'un plus grand nombre de parlementaires, j'ai moi-même soulevé la question au sujet de pèlerinage d'il y a environ un an. Comme vous le dites, les parlementaires sont présents dans leur milieu.
Beaucoup d'organisations d'anciens combattants, lorsqu'elles nous voient si nombreux, demandent pourquoi il y a tant de parlementaires et si peu d'anciens combattants. Nous essayons donc de ménager un certain équilibre. Comme vous pouvez le constater, nous faisons tous l'objet de ce genre de perception dans les médias. Ce que nous pouvons faire, c'est revoir la question, mais avec prudence.
Malheureusement, il arrive que les médias, par omission parfois, oublient la valeur des parlementaires des Communes et du Sénat. Nous sommes des parlementaires. Je continue de croire en la noblesse de cette carrière. J'ai une décharge d'adrénaline chaque fois qu'on s'attaque à la noblesse de la politique. Je crois que nous devons continuer de réfléchir à la question, mais peut-être avec un certain souci de modération, pour ne pas nous exposer à des observations désagréables.
Pour ce qui est des moyens de transport, nous avons eu des difficultés la dernière fois que nous sommes allés en Corée. Nous avions des entretiens avec le ministère de la Défense nationale au sujet de notre voyage en Corée du Sud, mais il a fallu transporter des soldats en Afghanistan justement au mois de juillet. Dans les trois semaines précédant le voyage, le sous-ministre a dû apporter des changements, car le transport de nos troupes était prioritaire, naturellement.
J'invite le sous-ministre à donner son point de vue sur ce problème de transport ou sur toute autre question soulevée par le sénateur Atkins.
M. Stagg: À propos du transport, comme le ministre vient de le dire, nous avons demandé au MDN de s'en charger, lorsque nous sommes allés en Corée, mais il n'a pas pu répondre favorablement, en partie à cause d'autres priorités.
Mon opinion, c'est qu'il ne faudrait pas compter sur le ministère de la Défense. Il faut certes continuer de lui demander sa collaboration, et je suis persuadé qu'elle nous sera acquise chaque fois que cela sera possible, comme il nous l'a dit. Toutefois, nous ne devrions pas courir le risque d'être pris au dépourvu, sans avoir prévu d'autres plans.
Nous devrions donc probablement prendre des dispositions avec des transporteurs privés, de notre mieux et le plus à l'avance possible. Si le MDN peut assurer notre transport, nous accepterions probablement son offre et nous renoncerions aux services commerciaux.
Nous devons avoir un plan de rechange tout prêt. Nos avions militaires sont plus occupés à causes des activités plus considérables du MDN. Pour assurer la sécurité de nos anciens combattants et leur garantir un moyen de transport, nous devrions probablement avoir un plan B dès le départ. Je crois que nous nous y prendrons désormais de cette façon.
Le sénateur Atkins: Ma préoccupation tient à ce que le comité sénatorial permanent a constaté. Je ne crois pas que le pèlerinage soit au premier rang des priorités du MDN. Voilà ce qui m'inquiète. Je crois que cela influence la décision des anciens combattants qui prennent de l'âge lorsqu'il s'agit de savoir s'ils veulent y aller ou non. Cela deviendra une préoccupation plus importante avec le temps.
La seule autre chose que je veuille aborder concerne les parlementaires. J'ai participé à un certain nombre de ces pèlerinages. Je peux vous dire que les anciens combattants ont été étonnés par leurs contacts avec les parlementaires, car, dans bien des cas, ils ne les avaient jamais rencontrés. Ils ne savaient pas ce que nous faisons. Ils ne savaient pas qu'ils avaient des amis au Parlement. J'envoie toujours des cartes de Noël à ceux avec qui j'ai établi des contacts, et certains me donnent toujours des nouvelles à certaines occasions. Je ne crois pas qu'il faille minimiser ces relations.
Je sais que j'anticipe, mais de grands anniversaires approchent, comme celui du jour J et celui du jour de la Victoire en Europe. Vous avez choisi le général Rohmer pour présider le comité, et c'est un choix excellent. Toutefois, y a-t-il quelqu'un qui se soucie de ce qui se passera après ces célébrations, car elles seront passablement importantes pour mobiliser l'attention de la collectivité sur la participation du Canada aux guerres?
M. Pagtakhan: Le comité a obtenu la participation des grandes organisations d'anciens combattants. Il profite donc de leur point de vue. Le général, qui est un ancien combattant et a eu une carrière militaire, est l'homme idéal pour s'occuper de ces questions-là. Évidemment, il conseille le ministère.
Je demanderais au sous-ministre de décrire ce que nous faisons d'autre de concert avec le comité.
M. Stagg: À la réunion de notre comité consultatif, hier, il a été question du projet du général Rohmer de se rendre en France. Il passera en Grande-Bretagne pour demander aux Britanniques ce qu'ils prévoient pour juin prochain.
Le comité consultatif a demandé instamment au général de s'enquérir auprès des Français et des Britanniques de leur plan d'ensemble pour l'année à venir.
Je sais que nous avons également d'autres travaux en cours au ministère, et M. Mercer va les expliquer.
M. Mercer: En plus du 60e anniversaire de la campagne de Normandie, l'an prochain, il y a le 60e anniversaire de la campagne d'Italie. En 2005, nous avons le 60e anniversaire de la libération de la Hollande, en même temps que le 60e anniversaire de la Seconde Guerre mondiale. Je dirais que cette dernière manifestation mérite une attention très particulière, car c'est peut-être pour notre gouvernement l'une des dernières occasions d'exprimer notre gratitude aux anciens combattants. En dehors de tout cela, nous avons travaillé selon un cycle d'anniversaires qui ont lieu tous les cinq ans, en ce qui concerne les manifestations en Europe.
Selon moi, les derniers grands pèlerinages avec de forts contingents d'anciens combattants auront lieu en 2005. Après, nous mettrons l'accent sur des cérémonies tenues au Canada avec des jeunes, étant donné que beaucoup d'anciens combattants ne pourront y participer à cause de leur âge. En 2010 ou 2015, nous n'irons pas sur des lieux de bataille en Europe, à moins qu'un changement radical ne se produise.
Voilà la raison d'être de la question précédente au sujet de ce que nous ferons quand les anciens combattants ne pourront plus assister aux cérémonies, quand ils ne pourront plus participer aux pèlerinages. Ce que nous prévoyons, c'est nous tourner vers les écoliers pour qu'ils transmettent ce legs de notre pays.
Le sénateur Atkins: Je vais ajouter quelque chose à propos du jour de la Victoire en Europe. La majeure partie des célébrations auront lieu sur notre continent et non outre-mer.
Le président: Je voudrais insister sur ce que les sénateurs Wiebe et Atkins, plus particulièrement, ont souligné au sujet de la participation des jeunes. J'ai participé au pèlerinage en Italie, en 1999. Beaucoup de jeunes, notamment des cadets, nous ont accompagnés. Tout comme le sénateur Atkins, je suis encore touché de la participation de ces jeunes aux côtés des anciens combattants.
Si je me souviens bien, les cérémonies de Juno Beach ont été télédiffusées au Canada l'an dernier. Avez-vous jamais su quel genre d'audience vous aviez attiré? Est-ce une expérience que vous voudriez reprendre ou améliorer cette année?
M. Mercer: Je sais que cette manifestation a attiré un auditoire assez important au Canada, puisque la SRC a accordé un grand nombre d'heures de couverture.
L'ouverture du centre de Juno Beach a été l'aboutissement des efforts d'un petit groupe d'anciens combattants qui ont fait quelque chose d'incroyable pour la construction du centre, les cérémonies d'inauguration, et cetera. Ce n'est pas une manifestation qui a été parrainée par le gouvernement. Nous n'avons pas observé la réaction des médias. Le centre de Juno Beach a peut-être des renseignements utiles à cet égard. Il ne s'agit pas d'une manifestation orchestrée par le gouvernement du Canada, bien que nous ayons contribué plus de 3 millions de dollars à ce projet.
Le président: Je suis heureux que vous ayez parlé de cette question, car c'est celle que je voulais aborder ensuite. Il m'a semblé, ainsi qu'à d'autres sénateurs sans doute, que plus d'une personne ou plus d'un ministère était chargé de cette manifestation. Puis-je conclure que le ministère des Anciens combattants sera responsable des célébrations du 60e anniversaire?
M. Pagtakhan: Oui, avec le concours du conseil, le ministère sera responsable. J'ai fait la même observation. J'ajouterais simplement, monsieur le président, que ma bru et ma petite-fille ont vu grand-papa en arrière-plan.
Le président: Cela m'amène à une autre observation. Il n'est pas si déplorable que les manifestations aient lieu sur notre continent, puisque, à cause des politiques des gouvernements qui se sont succédé, nous avons réussi à occulter les militaires de notre pays. Nous n'avons pas d'eux l'image qu'on s'en fait dans d'autres pays. Malheureusement, loin des yeux, loin du cœur. Qu'il s'agisse de militaires en activité ou d'anciens combattants, mettre leur action en évidence d'une façon ou d'une autre est un objectif très louable, un objectif qu'il faut poursuivre.
C'est une idée qui se rattache à la précédente, mais je me demande si le ministère de la Défense nationale pourrait encourager les membres en activité des forces armées à faire plus de visites dans les écoles. Si uniquement des gens d'un certain âge vont dans les écoles, ils donnent l'image d'une autre époque aux écoliers, alors que si quelqu'un de plus jeune vient leur rendre visite, les relations sont plus faciles et les répercussions de la visite sont probablement encore plus grandes.
Deuxièmement, et cela a peut-être un lien avec le fait que deux organisations ont contribué à offrir ce magnifique spectacle à Juno Beach l'an dernier, avez-vous une politique sur les commandites? Vous vous en souviendrez, monsieur le ministre, il y avait un important fabriquant de parapluies, par exemple, qui était commanditaire à Juno Beach l'an dernier. Est-ce une chose que seule une organisation privée peut attendre? Y aura-t-il des commanditaires privés à Juno Beach cette année? L'an prochain?
M. Pagtakhan: Nous encourageons la participation du secteur privé. Nous n'en avons pas discuté. Selon moi, il y a parfois une limite à ce type de participation si cela risque d'ajouter à la complexité de l'organisation d'un événement. Le sous-ministre aurait-il quelque chose à ajouter à ce sujet?
En ce qui concerne votre observation sur les membres des Forces armées qui pourraient se rendre dans les écoles, je transmettrai certainement votre message au ministre de la Défense nationale.
M. Stagg: Quant à la question des partenariats, nous pourrions probablement en conclure un certain nombre qui nous seraient utiles. Ils ne doivent pas forcément être de nature commerciale. Nous pourrions encourager des groupes du secteur de l'éducation et d'autres à participer d'une façon ou d'une autre, qu'il s'agisse de nous aider à choisir les élèves participants ou de nous aider à élaborer du matériel pédagogique. Il y a diverses choses que nous pourrions faire sans nécessairement recourir à des partenariats commerciaux.
Le président: Je vous encourage à le faire.
Monsieur le ministre, j'ai trouvé réconfortant votre optimisme au sujet de l'élargissement du PAAC. Vous conviendrez sans doute qu'il est inacceptable d'avoir deux catégories de personnes, celles qui touchent les prestations du PAAC pendant le reste de leur vie et celles qui n'y ont pas droit à cause du choix d'une date arbitraire. Je suis rassuré d'apprendre que le premier ministre et vous vous soyez intéressés à cette question. Tous, nous espérons recevoir confirmation sous peu. Ne vous inquiétez pas de la rétroactivité. Vous avez surmonté le problème dans le cas du major Henwood, et vous n'en avez reçu que des félicitations. Bonne chance. Je ne peux que vous encourager.
Notre comité se rendra à l'hôpital Sunnybrook vendredi. Je crois savoir que vous avez pris un certain nombre de mesures pour y améliorer la situation, et il faut vous en féliciter. Y a-t-il des éléments auquel vous voudriez que nous nous attardions pendant notre visite?
M. Pagtakhan: Donnez-moi simplement un compte rendu de votre visite. Nous sommes très heureux de ce qui se passe dans cet établissement. Chose certaine, nous sommes disposés à écouter.
Je rappelle aussi aux honorables sénateurs le projet de loi C-50, sur les anciens combattants. Il répondra à des besoins urgents des anciens combattants, notamment la définition des membres des forces armées au sens de la Loi sur les allocations aux anciens combattants, les anciens prisonniers de guerre et le programme d'aide à l'éducation. Nous vous saurions gré de toute aide que votre comité peut donner pour faire adopter ce projet de loi.
Le président: Monsieur le ministre, je vais prendre la parole au sujet du projet de loi cet après-midi, et je vais demander son adoption rapide.
La séance est levée.