Aller au contenu
 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Affaires juridiques et constitutionnelles

Fascicule 8 - Témoignages du 6 mai 2004


OTTAWA, le jeudi 6 mai 2004

Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles se réunit aujourd'hui à 10 h 55 pour étudier le projet de loi C-3, Loi modifiant la Loi électorale du Canada et la Loi de l'impôt sur le revenu.

Le sénateur George J. Furey (président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le président: Honorables sénateurs, il y a quorum. Ce matin, nous allons continuer notre étude sur le projet de loi C- 3, Loi modifiant la Loi électorale du Canada et la Loi de l'impôt sur le revenu.

[Traduction]

Par la suite, nous poursuivrons la séance à huis clos pour parler de l'ébauche de rapport sur le projet de loi C-20.

Nous sommes heureux d'accueillir à nouveau l'honorable M. Saada et ses hauts fonctionnaires. Nous leur avons demandé de revenir nous rencontrer à la suite de certaines questions qui avaient été soulevées vers la fin de nos audiences hier.

Ce que je propose, monsieur le ministre, à moins que vous ne souhaitiez faire une déclaration, c'est que nous passions directement aux questions qui ont été soulevées hier. Malheureusement, le ministre doit partir dans une vingtaine de minutes. Sénateur Andreychuk, si vous n'avez pas d'objection, je préférerais que nous passions directement aux questions qui ont été soulevées pour voir si le ministre et ses hauts fonctionnaires peuvent nous donner des réponses.

Le sénateur Andreychuk: Merci, monsieur le ministre, d'être revenu nous parler de ce projet de loi important. Hier, nous avions un certain nombre de témoins qui ont examiné le projet de loi d'un point de vue théorique, moins pratique. Ils nous ont aidés en nous expliquant comment à leur avis le projet de loi pouvait être appliqué et quelles en seraient les conséquences prévues et non prévues.

Ils estimaient que le tribunal avait vraiment changé la façon dont les partis politiques fonctionneront et quel sera leur rôle dans la société canadienne. Alors que les partis politiques étaient pour les citoyens une façon de s'organiser pour assurer une gouvernance efficace, le tribunal a maintenant adopté une approche différente — et je résume ici la conversation; vous avez sans aucun doute lu certains des témoignages. Les partis politiques pourront dorénavant jouer un rôle pour ce qui est d'apporter une diversité d'opinions au Parlement. Par conséquent, cela aura des conséquences considérables sur la façon dont les partis fonctionnent et sur la façon dont les partis seront acceptés dans la société canadienne. Cela aura davantage d'incidence sur tout notre système politique qu'on ne le croirait à la lecture du projet de loi. Les partis mineurs joueront dorénavant un rôle plus important.

On a mis l'accent sur le fait qu'auparavant, nous parlions de petits partis ou de partis périphériques et de grands partis ou de partis légitimes et de partis marginaux. Cependant, ce genre de définition ne s'applique plus. En fait, c'est la diversité d'opinion qui est nécessaire. Pourriez-vous nous faire part de vos observations à ce sujet?

Cela a mené à une discussion sur l'incidence future du parti communiste et d'autres partis, qui avaient présenté leur demande à la Cour suprême. Les six partis qui sont maintenant enregistrés et qui ne sont pas représentés au Parlement utiliseront l'arrêt du tribunal qui a donné lieu au projet de loi C-3 dans leur analyse du projet de loi C-24. Ils présenteront une demande au tribunal pour contester le projet de loi C-24 en invoquant le raisonnement qui a mené au projet de loi C-3 et à l'arrêt du tribunal. Pouvez-vous nous dire si cela a été pris en compte?

Il semble y avoir un changement fondamental dans notre régime parlementaire. Certains membres du comité — pas tous, mais certains — ont dit qu'ils préféreraient que vous, monsieur le ministre, présentiez une demande au tribunal en vue de reporter la date du 27 juin, ce qui est certainement une option. Par le passé, les ministères de la Justice l'ont certainement fait.

Si le tribunal vous donne un an et que pour de bonnes raisons vous n'êtes pas en mesure de vous conformer dans un délai de 12 mois, il serait alors raisonnable de demander au tribunal de reporter l'échéancier. Par conséquent, il ne serait plus urgent d'adopter immédiatement le projet de loi C-3 puisqu'il serait nécessaire d'examiner de façon plus délibérée l'incidence réelle du projet de loi C-3.

Par ailleurs, ces partis ont indiqué qu'ils n'avaient pas été consultés par le gouvernement avant que le projet de loi C- 3 soit adopté. Deux des partis représentés ont dit catégoriquement qu'ils étaient contre le projet de loi. Ils ont dit que pour eux et d'autres partis au Canada, il aurait été préférable qu'il y ait un processus de consultation. Si le tribunal accordait un délai, il serait alors possible de tenir de telles consultations.

Je vous ai posé trois ou quatre questions. Je vous saurais gré de bien vouloir y répondre.

L'honorable Jacques Saada, leader du gouvernement à la Chambre des communes et ministre responsable de la Réforme démocratique: Merci. J'essaie de prendre des notes en même temps.

La première chose que vous avez soulignée, c'est qu'il y aura davantage de partis pour mieux refléter la diversité d'opinions dans la population canadienne. Je crois que vous avez raison. À mon avis, cela assure une plus grande démocratie, non pas le contraire. C'est donc à mon avis un avantage plutôt qu'un désavantage.

Naturellement, nous ne devons pas oublier que pour n'importe quel parti politique, sa durabilité dépend toujours de sa performance. Le financement public, entre autres choses, est toujours en fonction de la performance d'un parti lors des élections générales.

Toutes ces choses sont liées. Ceux que nous appelons les partis marginaux auront toujours quelques obstacles à surmonter s'ils veulent devenir viables à plus long terme.

Veuillez me corriger, madame le sénateur, si je me trompe, mais je crois comprendre qu'il n'y a pas encore eu de telles poursuites judiciaires qui ont été entreprises. Il y a eu une manifestation d'intention.

Le sénateur Andreychuk: Non. Ils sont venus nous dire officiellement qu'il y a un consensus entre les six partis pour entreprendre une action en justice dès que le projet de loi sera adopté. Ils utiliseront ce projet de loi à titre de justification. Ils ont en quelque sorte signifié un avis à cet effet.

M. Saada: Le problème à mon avis comporte deux volets. Bien que je respecte entièrement la formalité d'une déclaration qui est faite devant votre comité, tout d'abord, la décision officielle n'est prise que lorsque le tribunal est réellement saisi de la question.

Il y a quelque chose de beaucoup plus important que cela. Si, effectivement, M. Figueroa ou un groupe de gens auquel il a fait allusion vont devant les tribunaux, le processus prendra des années. Je ne sais pas pendant combien de temps l'affaire Figueroa a été devant les tribunaux avant l'arrêt du 27 juin 2003, mais cela a pris littéralement des années. Y aura-t-il une échappatoire dans notre loi qui, nous le savons, est inconstitutionnelle, tant qu'il y aura un processus juridique éventuel? Je ne crois pas que nous devrions gouverner et légiférer à partir de contestations éventuelles ou de conclusions qui n'ont pas encore été initiées. Cela est très difficile à défendre.

L'extension du sursis est une question valable et c'est quelque chose que nous devons examiner de près. Comme vous le savez, la Cour suprême a déjà déclaré, du moins en théorie, qu'un sursis est de nature exceptionnelle. Sur le plan pratique, il y a eu un certain nombre de cas où un sursis a été accordé. La prolongation d'un sursis est encore plus exceptionnelle.

Nous avons eu une année pour régler le problème. Tout d'abord, il n'est pas justifié pour nous de demander un sursis à ce moment-ci. Supposons par exemple que nous demandons un sursis et qu'on nous accorde un sursis de six mois. Il y a dans le projet de loi une disposition de temporisation de deux ans. Personne ne s'y est opposé, car tout le monde estimait que c'était un délai raisonnable. Nous avons donc cette disposition de temporisation de deux ans afin de nous assurer que nous avons suffisamment de temps pour aller au fond des problèmes et revenir avec un projet de loi qui sera beaucoup plus complet et plus réfléchi.

Il ne sera jamais possible d'obtenir un sursis de deux ans de la Cour suprême sur cette question. Cela n'est tout simplement pas possible. Pour cette raison, tout concorde pour confirmer notre initiative visant à nous assurer de ne pas avoir d'échappatoire à court terme dans la loi pendant que nous en examinons toutes les incidences afin d'en arriver à quelque chose de beaucoup plus substantiel à plus long terme.

Pour ce qui est d'avoir été consulté par le gouvernement au sujet du projet de loi, comme vous le savez, M. Figueroa a lui-même comparu devant le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. Naturellement, le comité était libre de consulter tous ceux qui, à son avis, avaient quelque chose à dire qu'il voulait entendre. Si j'ai bonne mémoire, dans son témoignage devant le comité permanent de la Chambre, M. Figueroa n'a pas dit qu'il était contre le projet de loi. Il avait certains problèmes avec certains éléments du projet de loi, mais il n'était pas contre le principe du projet de loi. Vous comprenez qu'après hier soir je n'ai pas eu la chance de lire en détail son témoignage, de sorte qu'il est très difficile pour moi de faire valoir des arguments dans un sens ou dans un autre, mais je tente de me rappeler ce qui s'est passé lorsque nous avons comparu devant le comité permanent.

M. Stephen Zaluski, agent principal du Conseil privé, avocat-conseil, Législation et planification parlementaire, Bureau du Conseil privé: Pour ce qui est des consultations auprès des plus petits partis, par le passé, c'est Élections Canada qui le faisait, avec le comité d'Élections Canada qui réunit les chefs ou les représentants de différents partis. C'est toujours ce comité qui consultait par le passé. Si j'ai bonne mémoire, lorsqu'il a comparu devant le comité de la Chambre, M. Figueroa a dit que des consultations avaient eu lieu — ce n'était peut-être pas M. Figueroa qui a dit cela. Cependant, tout indique que les partis ont été consultés par l'intermédiaire d'Élections Canada.

Le sénateur Mercer: Je peux vous dire que ces consultations ont eu lieu. Avant d'être sénateur, j'ai assisté à ces consultations.

Le sénateur Andreychuk: Ces consultations étaient-elles publiques?

M. Zaluski: Dans le cas d'Élections Canada, je crois comprendre que ces consultations sont tout simplement faites par Élections Canada, qu'il ne s'agit pas d'un processus public, mais plutôt d'un processus qui réunit les représentants des partis.

M. Saada: Est-ce que cela répond à vos questions?

Le sénateur Andreychuk: Oui. On a souligné que le projet de loi aurait une incidence sur les radiodiffuseurs qui se sentiraient obligés d'accorder du temps d'antenne gratuit. Bon nombre de conséquences du projet de loi n'ont pas été examinées, sauf celles que j'ai déjà soulevées comme étant préoccupantes.

M. Saada: C'est quelque chose qu'à mon avis, le comité permanent de la Chambre devra examiner à la lumière des observations qu'ils ont demandé de faire à votre comité, lors de ma dernière comparution. C'est une question très importante. Le projet de loi C-3 n'aborde pas la question. J'ai parlé des conséquences plus générales de l'arrêt de la Cour suprême, et c'est là l'un des éléments importants qu'il faudra prendre le temps d'examiner en profondeur.

Le président: Notre temps avec le ministre est limité. Cependant, ses fonctionnaires peuvent rester. Je m'excuse auprès du sénateur Lynch-Staunton. Normalement, notre comité donne la parole aux représentants des partis lorsqu'ils sont présents aux audiences de comité. Plutôt que de suivre le processus normal qui consiste à alterner entre les deux côtés de la table, je vais donner la parole au sénateur Lynch-Staunton qui posera la deuxième question.

Le sénateur Lynch-Staunton: Merci, monsieur le président. Il était tout à fait approprié que vous donniez d'abord la parole au sénateur Andreychuk, puisque le ministre est ici surtout pour répondre aux questions qu'elle a soulevées.

Je profite de votre comparution, monsieur le ministre, pour vous poser une question que j'ai posée à M. Kingsley. Il m'a dit de la poser aux auteurs du projet de loi. Je constate, et j'espère que vous me contredirez à ce sujet, qu'il y a une contradiction à l'article 27 du projet de loi qui stipule, au paragraphe 27(1) ce qui suit: «la présente loi entre en vigueur le 27 juin 2004 [...]» La note explicative dit que c'est pour respecter l'échéancier établi par la Cour suprême.

Le paragraphe 27(2) prête à confusion et je cite:

La présente loi entre en vigueur à la date de sa sanction si celle-ci est postérieure au 27 juin 2004.

C'est très clair, mais cela me semble être contradictoire. Le tribunal a dit ce qui arriverait après le 27 juin si le Parlement n'adoptait pas le projet de loi. Cependant, on semble dire ici que nous ne pourrons respecter l'échéancier si nous imposons le paragraphe 27(2) parce que la sanction royale pourrait être donnée six mois ou un an ou encore deux jours après. Y a-t-il une contradiction ici? S'il n'y en a pas, pourquoi a-t-on ajouté le paragraphe 27(2)?

M. Saada: Imaginons par exemple que le Parlement ne puisse terminer son étude du projet de loi avant le 27 juin et finit par l'adopter seulement le 28. C'est tout simplement pour dire que dès que possible par la suite, le projet de loi devrait entrer en vigueur. C'est une question de prudence, ce n'est pas une contradiction. Il est clair que l'objectif consiste à adopter le projet de loi avant le 27 juin, naturellement, mais c'est tout simplement au cas où, à la dernière minute, nous aurions des difficultés à surmonter et au cas où le projet de loi ne serait pas adopté. C'est là une mesure de prudence afin d'en prévoir l'entrée en vigueur le plus rapidement possible.

Le sénateur Lynch-Staunton: Qu'arriverait-il si le projet de loi n'était pas adopté avant la dissolution?

M. Saada: Merci, monsieur le sénateur, de faire allusion à une observation que j'ai faite à cet égard. C'est très clair. Puisque nous avons cet arrêt de la Cour suprême, si nous n'avons pas un projet de loi provisoire, comme je l'ai souligné lors de ma dernière comparution, nous avons alors un échappatoire important dans la loi, et nous n'avons aucun règlement ni aucun instrument permettant soit d'enregistrer, soit, ce qui est encore plus important, de désenregistrer un parti politique. Cela pourrait être extrêmement coûteux pour les contribuables. Notre principale obligation à cet égard est de nous assurer de ne pas permettre que cela se produise pendant que nous sommes en train de réfléchir à une solution finale à ce problème. C'est la raison pour laquelle nous voulons que ce projet de loi soit adopté rapidement.

Le sénateur Lynch-Staunton: S'il y avait dissolution avant que le projet de loi soit adopté par le Sénat ou par le Parlement, vous auriez certainement la possibilité d'aller devant les tribunaux et de demander une prolongation. Ce ne serait pas aussi tragique que vous le laissez entendre.

M. Saada: Vous auriez tout à fait raison si l'on était certain que le tribunal nous l'accorderait.

Le sénateur Lynch-Staunton: Il y a eu des précédents. Le tribunal pourrait comprendre. C'est facile de blâmer le Sénat. Les tribunaux pourraient compatir au problème du gouvernement.

M. Saada: Me permettrez-vous, monsieur le sénateur, de ne pas blâmer le Sénat puisqu'il s'assurera que nous ne serons pas obligés de nous fier à une réponse hypothétique des tribunaux et que nous ferons ce que nous avons à faire?

[Français]

Le sénateur Joyal: Si vous vous présentiez devant les tribunaux pour demander un report de l'application du jugement, vous alléguez que vous n'auriez pas de motif raisonnable à faire valoir. D'après le jugement, le gouvernement devait agir, mais le gouvernement ne contrôle pas le Parlement. Il peut arriver, de façon tout à fait raisonnable, que le gouvernement dépose un projet de loi au Parlement et que ce dernier en dispose selon la procédure qu'il veut bien suivre. Le gouvernement, pour employer une expression juridique, a une obligation de moyen, mais il n'a pas une obligation de résultat. Il doit prendre les moyens requis pour préparer un projet de loi, le déposer et s'assurer qu'il est à l'ordre du jour du gouvernement à la Chambre ou au Sénat. Mais le gouvernement ne peut pas garantir le résultat. C'est le Parlement qui, dans sa souveraineté, en dispose. Il peut en disposer avec des amendements; par exemple, le Sénat pourrait faire des amendements, le retourner à la Chambre, et cetera. La cour comprend très bien cette réalité.

Il me semble que lorsque le gouvernement demande à la cour, dans quelque cause que ce soit, la remise de l'application d'un jugement, et qu'il démontre qu'il a pris les moyens raisonnables à sa disposition, la cour devrait comprendre que le gouvernement est de bonne foi. Il me semble que la bonne foi est un élément important dans la preuve à faire devant les tribunaux que l'on a pris des moyens, mais que l'on n'est pas arrivé à garantir la totalité du résultat. La cour regarderait le projet de loi et dirait qu'il y a bien un projet de loi, qu'il y a eu des témoins, qu'il reste des choses à faire et qu'il y a des imprécisions. La nature du projet de loi est elle-même temporaire.

Dans sa nature, le projet de loi contient le fait qu'il soit assujetti à une clause de temporisation de deux ans. Le fait que le projet de loi contienne sa propre extinction est un signal à la cour qu'il peut arriver un moment après deux ans, où il va y avoir un vide. Le jour où le projet de loi expire, il n'y aura pas nécessairement un projet de loi qui sera adopté immédiatement, qui entrera en vigueur le jour de l'expiration de ce projet de loi. On ne peut pas prévoir les circonstances de ce qui peut arriver.

Le projet de loi lui-même, dans sa nature, n'est pas la garantie qu'il a satisfait les dispositions du jugement.

Si le gouvernement prenait la décision de demander le report de l'application du jugement, je me demande s'il n'y aurait pas là des arguments que la cour prendrait sérieusement en considération.

M. Saada: De façon pratique et non pas technique, nous avons le choix entre deux options: prendre une décision comme parlementaires, qui est l'option que je vous propose ou bien nous en remettre à une décision hypothétique de la part de la Cour suprême quant à une prolongation supplémentaire.

Il est évident que j'ai tenté d'expliquer le plus clairement possible pourquoi il me semblait important que nous prenions nous-mêmes, comme parlementaires, cette décision plutôt que de nous en remettre à cette décision hypothétique de la Cour suprême.

Ce qui me préoccupe également, c'est l'ampleur des conséquences du jugement de la Cour suprême. Je crois que toute prolongation du sursis que nous pourrions obtenir serait une prolongation qui serait manifestement limitée dans le temps. Je ne pense pas que la Cour suprême, en ayant déclaré quelque chose d'anticonstitutionnel, accepterait que cette anticonstitutionnalité demeure en vigueur pendant un an. Elle ne serait pas tentée de la prolonger encore longtemps. Même si elle l'était, elle le ferait peut-être pendant six mois; je pense que cela ne sera pas suffisant, si l'on tient compte des contraintes parlementaires normales. Je ne parle même pas de considérations électorales. Nous sommes au mois de mai. Si nous obtenions cette prolongation hypothétique, nous serions arrêtés pour la période d'été comme d'habitude, nous revenons en septembre. Le processus d'examen de tout cela, le retour en Chambre — parce que si on parle d'amendement au projet de loi C-3, il faudrait qu'il soit réétudié en Chambre —, je ne vois pas comment le projet de loi C-3 serait amendable pour répondre à toutes les préoccupations beaucoup plus larges contenues dans le jugement de la Cour suprême. Le processus législatif nécessaire ne pourrait pas se faire en six mois. C'est impossible.

J'ai un peu peur qu'on ait, d'un côté, le choix d'une mesure temporaire, dont on sait qu'elle est temporaire, avec une obligation de traiter ce caractère temporaire par le Parlement, et qui dépend exclusivement du Parlement, et la possibilité de demander une prolongation à la Cour suprême, qui ne dépend plus du Parlement mais de la Cour suprême et qui est purement hypothétique, et dans le temps et dans l'obtention de cette prolongation.

[Traduction]

Le président: Le ministre doit partir. Le sénateur Rivest avait une question. Est-ce une question à laquelle les fonctionnaires peuvent répondre, ou préférez-vous la poser directement au ministre?

[Français]

Le sénateur Rivest: Une des raisons de la solidité de notre système de gestion des pratiques électorales, c'est le statut du président-directeur général des élections. Le professeur Massicotte, hier, rappelait qu'une des raisons pour laquelle cette personne est toujours en autorité, qu'elle a exercé une autorité pratique et morale, c'est qu'elle n'ait pas eu à faire des appréciations de nature subjective. Il serait difficile d'essayer de placer le président-directeur général des élections dans une position où il aurait à porter des jugements sur des questions de fait. Il faudrait simplement rappeler, lorsqu'on reverra la loi, que les critères de certification ou de reconnaissance du statut des partis, surtout pour la décertification, qu'on évite les critères subjectifs et qu'on s'en tienne, autant que faire se peut, à des critères numériques ou des critères de faits facilement vérifiables.

M. Saada: Vous soulevez un point très important qui mérite une réflexion approfondie. Il faudrait peut-être s'enrichir de l'expérience de certaines provinces. La Colombie-Britannique, la Saskatchewan, le Manitoba, la Nouvelle- Écosse, Terre-Neuve-et-Labrador ont toutes des dispositions relatives à la disposition d'un parti politique. On pourrait s'en inspirer.

Cela dit, les facteurs qui pourraient être considérés, c'est vraiment ouvert à débat. Je ne veux pas présumer de la conclusion qui sera tirée par les parlementaires dans le processus à plus long terme que je propose. Par exemple, comment les statuts et lettres patentes du parti sont rédigés, la nature de l'activité, les ressources de financement, les relations avec des entités autres que les partis politiques, est-ce qu'il s'agit d'une entité à but lucratif? Votre question est très pertinente et mérite un débat en profondeur qui ne peut pas se faire en quelques jours ou quelques heures.

[Traduction]

Le président: Merci beaucoup, monsieur le ministre. Je comprends que vous devez partir. Je veux vous remercier d'être venu nous rencontrer avec aussi peu de préavis.

M. Saada: C'est toujours un plaisir; je m'y habitue maintenant.

Le président: Sénateurs, est-il nécessaire que les fonctionnaires restent? Y a-t-il d'autres questions que vous aimeriez poser aux fonctionnaires, ou est-ce qu'ils peuvent partir avec le ministre?

Le sénateur Andreychuk: Ils peuvent partir avec le ministre.

Le président: Merci beaucoup d'être venus.

Le sénateur Lynch-Staunton: La disposition sur la sanction royale est toujours pour moi une source de confusion. Si les fonctionnaires ont quoi que ce soit à ajouter sur le plan technique, j'aimerais bien qu'ils restent. Si je suis le seul, je peux leur parler en privé.

M. Stéphane Perrault, agent principal du Conseil privé, Bureau du Conseil privé: Comme le ministre l'a expliqué, c'est tout simplement une mesure technique de prudence au cas où il serait nécessaire de faire un effort de dernière minute. Le 28 juin, le projet de loi peut en fait recevoir la sanction royale et entrer en vigueur, si le Parlement n'est pas en mesure d'adopter le projet de loi exactement en date du 27 juin. C'est uniquement une mesure de prudence, comme le ministre l'a expliqué.

Le sénateur Lynch-Staunton: L'échéancier n'est-il pas un échéancier?

M. Perrault: La mesure de prudence n'affecte d'aucune façon la décision ou l'urgence, mais permet, si, malheureusement, le projet de loi est adopté après cette date, il permet de limiter la durée du problème.

M. Zaluski: Permettez-moi de revenir en arrière. L'article dont vous parlez, comme vous l'avez mentionné, est le paragraphe (2). Le paragraphe (1) est là pour changer la règle normale. Normalement, la loi entre en vigueur six mois plus tard, à moins que le directeur général des élections ne certifie qu'elle entre en vigueur plus tôt. Dans ce cas-ci, étant donné l'échéancier du 27 juin, il a fallu ajouter le paragraphe (1) afin qu'il soit bien clair que la date limite était le 27 juin. Le paragraphe (2) a été ajouté au cas où le projet de loi n'était pas adopté avant le 27 juin. Il fallait ensuite préciser dans le projet de loi ce qui arriverait dans de telles circonstances. Le paragraphe ne fait que réitérer la règle normale, c'est-à-dire que la loi entre en vigueur à la date de sa sanction royale.

M. Perrault: La règle normale, mais pour les autres lois et pas celle-ci.

M. Zaluski: Correct. Manifestement, la loi ne peut entrer en vigueur avant la sanction royale. Vous dites ici en l'occurrence aussitôt que possible après le 27 juin. En d'autres termes, dès qu'il est adopté.

Le sénateur Lynch-Staunton: Que se passe-t-il entre le 27 juin, date à laquelle il n'y a pas de sanction royale, et le jour de la sanction royale? Est-ce que les éléments de la Loi électorale du Canada déclarés inconstitutionnels disparaissent?

M. Zaluski: C'est le cas qui a été décrit par le directeur général des élections. Tout est gelé.

M. Perrault: Sauf jusqu'au moment où quelqu'un la conteste. Le directeur général des élections a dit que d'après son interprétation, il ne pourrait enregistrer aucun parti. Un autre parti penserait peut-être pouvoir s'enregistrer sans présenter de candidat, sans aucun candidat, et il pourrait donc intenter des recours. Cela risquerait de provoquer la confusion et la controverse. Le paragraphe (2) limite ce risque au minimum.

M. Zaluski: Sénateur, vous avez je crois évoqué au Sénat la possibilité d'une rétroactivité.

Le sénateur Lynch-Staunton: En effet.

M. Zaluski: En réponse à cela, le problème c'est que même si la disposition était rétroactive, il n'en demeurerait pas moins que même avec l'adoption de la loi, il y aurait un hiatus.

Le sénateur Lynch-Staunton: Je comprends maintenant. Je vous remercie pour votre patience et merci à mes collègues pour la leur. Cela pourrait-il entrer en vigueur pour les élections que tout le monde pressent pour la fin de juin? Il y aura une loi, mais pourra-t-elle être appliquée?

M. Perrault: Je ne veux pas me prononcer à la place du directeur général des élections. Il s'est déjà exprimé à ce sujet, et je n'ajouterai donc rien à ce qu'il a déjà dit. Par contre, je peux vous dire que ce projet de loi n'affecte pas une règle qui existe déjà dans la loi électorale, en ce sens qu'un parti ne peut être enregistré que s'il en a fait la demande 60 jours avant l'émission du bref. Ce projet de loi ne change en rien cela, de sorte qu'il entrerait en vigueur comme le prévoit votre scénario, mais sans nécessairement permettre à de nouveaux partis de s'enregistrer en vertu des nouvelles règles.

Il y a également un délai de six mois qui permet aux partis existants de se conformer, de fournir les noms de 250 membres et une déclaration signée par leur chef — les nouvelles conditions qui feront partie de la procédure.

Le sénateur Lynch-Staunton: Les partis qui ont fait une demande en vertu de la règle des 50 mais qui n'ont pas présenté de candidats avant les 60 jours précédant l'émission du bref, une fois que ce projet de loi est adopté, peuvent- ils à ce moment-là soumettre le nom d'un seul candidat et devenir admissibles?

M. Perrault: Je crois, en effet. S'ils ont déjà fait une demande et s'ils sont devenus admissibles 60 jours avant l'émission des brefs, effectivement ils peuvent être enregistrés.

M. Zaluski: J'avais cru comprendre que le témoignage de M. Kingsley allait dans ce sens.

Le sénateur Lynch-Staunton: En effet, je voulais en être sûr. Merci encore.

Le sénateur Andreychuk: Jusqu'à ce que j'entende ces deux questions, je croyais avoir compris les deux paragraphes.

Le sénateur Lynch-Staunton: Je suis rassuré.

Le sénateur Andreychuk: Mais maintenant, pas moi.

Voulez-vous dire que le paragraphe 27(2) dit en substance que, s'il n'y a pas d'élections, et si nous nous contentons de poursuivre, le jour où nous adoptons le projet de loi et où il reçoit la sanction royale, il entrera alors en vigueur le jour en question si c'est après le 27 juin?

M. Zaluski: C'est cela.

Le sénateur Andreychuk: On peut donc imaginer que le créneau commencera deux ans plus tard à la même date étant donné que toute mesure législative deviendra caduque dans deux ans. Si nous adoptons ce projet de loi le 28 juin?

M. Perrault: Il entrerait en vigueur le 28 juin.

Le sénateur Andreychuk: S'il entrait en vigueur deux ans plus tard, ce serait à ce moment-là. Est-ce cela que nous disons?

M. Perrault: Oui.

Le sénateur Andreychuk: Ce n'est pas un retour aux règles normales. Il s'agit de changer la règle normale ainsi que le paragraphe (1).

M. Perrault: Vous avez raison, ce n'est pas un retour aux règles normales en ce qui concerne la loi électorale. Il y a retour aux règles normales pour les autres lois qui entrent en vigueur le jour de la sanction royale. Sinon, en vertu des règles normales qui régissent les élections, il faudrait six mois de plus.

Le sénateur Andreychuk: Pour répondre à la seconde question, si cette mesure est adoptée, le directeur général des élections est obligé de réexaminer le cas de tous les partis — les partis qui sont déjà enregistrés, ceux qui ont fait une demande et qui n'ont pas été enregistrés et certains dont la demande est encore à l'étude. Il y a donc trois catégories. Le directeur général des élections ne devrait-il pas immédiatement déterminer si tous les partis sont conformes à la nouvelle loi? Il a en effet l'obligation de déterminer s'il s'agit bien de partis politiques aux termes de la définition, si effectivement ces partis présentent des candidats et s'ils se conforment à tous les autres critères proposés dans le projet de loi, c'est ce que je dirais.

En d'autres termes, ne faudrait-il pas procéder à une analyse? Si un parti n'est pas conforme selon la nouvelle loi, il faudrait alors commencer les procédures en radiation.

M. Perrault: L'article 26 du projet de loi prévoit une transition de six mois pour les partis existants, les partis enregistrés et les partis admissibles.

M. Zaluski: Ils ont donc six mois pour se conformer aux nouvelles dispositions de la loi qui serait ainsi entrée en vigueur.

M. Perrault: Le jour de l'entrée en vigueur, ces partis ne disparaissent pas automatiquement du système.

Le sénateur Andreychuk: Ce serait bien étrange qu'il y ait des élections, qu'il y ait cette période de transition de six mois et puis qu'ensuite il y ait radiation. On aurait alors des partis, qui, techniquement parlant, auraient participé aux élections, qui seraient techniquement parfaitement conformes, mais aux termes de la nouvelle loi cela reviendrait à dire, si nous commençons les procédures en radiation, que ces partis n'étaient au départ pas légitimes.

M. Zaluski: Cela dépend des conditions que ces partis n'auraient pas pu respecter à l'entrée en vigueur des nouvelles règles.

Le sénateur Andreychuk: Je n'en ai aucune idée. C'est cela le problème. Tout dépendrait de la décision du directeur général des élections et de la façon dont il s'acquitterait de ses obligations en déterminant la conformité des partis en question, aux termes de la nouvelle définition de «parti politique», avec l'enregistrement, et cetera.

M. Zaluski: Par contre, comme ces partis ont effectivement été des partis, puisqu'ils ont présenté au moins un candidat aux élections, puisqu'ils ont probablement au moins 250 membres, trois dirigeants et ainsi de suite — on peut imaginer qu'il leur serait relativement facile de remplir ces conditions dans les six mois.

Le sénateur Andreychuk: C'est une hypothèse. Elle est peut-être raisonnable, mais ce n'est qu'une hypothèse.

M. Perrault: En effet. Il s'agit de savoir si elle est bien raisonnable.

Le sénateur Andreychuk: C'est un façon un peu étrange de concevoir la loi — le syndrome de la Floride.

Le sénateur Joyal: Encore une fois, au sujet du paragraphe 27(2), quelle distinction faites-vous entre la sanction et la proclamation? Pourquoi le projet de loi dit-il: «La présente loi entre en vigueur à la date de sa sanction si celle-ci est postérieure au 27 juin 2004»? Pourquoi ne mentionne-t-il pas la date de la proclamation?

M. Perrault: Techniquement parlant, un projet de loi entre en vigueur le jour où il reçoit la sanction royale. J'ai utilisé le mot proclamation à mauvais escient. Certaines lois peuvent prévoir une entrée en vigueur par proclamation à une date différente de celle de la sanction royale. Cela dit, la norme est que l'entrée en vigueur ait lieu le jour de la sanction royale.

Le sénateur Joyal: Vous supposez que le 27 juin, le directeur général des élections aura fait tous les préparatifs nécessaires pour que cette loi devienne opérante.

M. Perrault: Nous faisons en effet cette hypothèse parce que nous avons consulté le directeur général des élections avant de prévoir cette disposition.

Le sénateur Joyal: En d'autres termes, si la sanction royale est postérieure au 27 juin, il y aurait un hiatus du moins en ce qui concerne certaines parties de la loi électorale. Cet hiatus demeurerait jusqu'à ce que le projet de loi ait reçu la sanction royale.

M. Perrault: En effet. Dans ce cas-là, le gouvernement pourrait fort bien demander une suspension comme nous en avons déjà parlé. Cela nécessitera un peu de temps. Et nous ne l'obtiendrons pas nécessairement. Il se peut que le projet de loi soit adopté et reçoive la sanction royale, mais il se peut aussi qu'il y ait une piste parallèle. Par prudence, nous offrons toutes les options.

Le sénateur Joyal: Je pense que c'est cela qu'il faut faire.

Si le projet de loi n'est pas adopté pour le 27 juin, à ce moment-là, le gouvernement devrait à mon avis s'adresser au tribunal en lui expliquant pourquoi il faudrait qu'il prononce une suspension, de manière à éviter le vide juridique.

M. Perrault: À supposer que le gouvernement décide de le faire, il est néanmoins prudent de conserver cette disposition. Si le processus parlementaire se poursuit dans un cas comme celui-là, et si les deux Chambres y consentent, nous pourrions à ce moment-là avoir une entrée en vigueur ce qui serait préférable à une suspension. Nous pourrions donc jouer sur les deux tableaux.

M. Zaluski: Ce que vous avez fait valoir au sujet de l'argument que nous présenterions à la Cour suprême n'aurait pas pu être mieux dit. C'est cela en effet l'argument que nous devrions présenter.

Par contre, comme l'a dit le ministre, la cour a reconnu que le fait de suspendre une déclaration de nullité est une mesure extraordinaire étant donné qu'ainsi, la cour permettrait à un régime inconstitutionnel de demeurer en place. Elle a d'ailleurs dit que cela devrait durer le moins de temps possible. Demandez au tribunal de prolonger un état d'inconstitutionnalité avoué serait un énorme obstacle.

D'après les avis juridiques que nous avons reçus, il faudrait un argumentaire très convaincant pour obtenir gain de cause devant la cour. Bien sûr, nous en ferions la demande, mais sans aucune garantie.

M. Perrault: Tant que nous ne serons pas rendus au point où le temps manquera, c'est-à-dire le jour où le Parlement aura été dissous ou le 27 juin, la cour regardera ce qui se passe, elle verra que le Parlement siège toujours et elle dira qu'une telle requête est prématurée puisque le Parlement peut toujours légiférer.

Le président: Si vous me permettez d'intervenir, d'après ce que je vois, il y a trois scénarios possibles: Premièrement, si la loi reçoit la sanction royale après le 27 juin, elle entre en vigueur le jour même. Si elle reçoit la sanction royale avant le 27 juin, elle entre en vigueur le 27 juin, sauf si le directeur général des élections intervient en vertu de la disposition 27(1) et fait le nécessaire...

M. Perrault: Il publie un avis.

Le président: ... pour publier un avis dans la Gazette du Canada a l'effet que la loi entrera en vigueur à une autre date. Je pense que c'est ce que le sénateur Joyal a dit.

Le sénateur Joyal: J'avais en effet dit cela en pensant à ce qui s'était produit au Manitoba.

[Français]

Mon collègue, le sénateur Rivest, va se souvenir de cette décision, qui avait annulé la validité de toutes les lois de la législature du Manitoba. Le gouvernement du Manitoba n'avait pas pu traduire les lois dans le délai qui lui avait été imparti par la Cour, et il a fallu se représenter devant le tribunal pour obtenir un report de l'application du jugement pour éviter le vide juridique ou l'absence des lois qui n'avaient pas été traduites et qui n'étaient plus en vigueur au Manitoba.

Ce qui me préoccupe, — la question est peut être théorique mais elle est importante sur le plan constitutionnel — lorsque la Cour suprême déclare une loi inconstitutionnelle, à mon avis, le gouvernement canadien ne peut pas laisser le vide juridique, il est obligé de retourner devant le tribunal pour faire valider le système qui a été reconnu non valide pendant la période de temps pour laquelle on met en place les éléments pour rendre le système valide. S'il y avait une demande de report de l'application du jugement, à mon avis, elle s'ouvre à la date du 27.

M. Perrault: Il se pourrait que la demande soit faite à cette date. Je n'ai pas à parler au non du procureur général, qui a la responsabilité de prendre cette décision. Toutefois, dans l'hypothèse où le procureur général demanderait d'étendre la période de suspension, il se pourrait, en théorie, et c'est la raison que c'est rédigé ainsi, que le Parlement adopte la loi avant même que la cour ne prononce l'extension. Cela prendrait quelques semaines, il y aurait des avis aux parties et dans ce cas l'entrée en vigueur de la loi rendrait l'extension du sursis inutile, ce qui ne changerait pas le fait que toutes ces questions seraient remises sur la table avec la clause crépusculaire qui est dans le projet de loi.

[Traduction]

Le sénateur Andreychuk: La cour a déjà déclaré l'inconstitutionnalité de certaines dispositions. Elle a donné un an au gouvernement, un délai qu'elle jugeait raisonnable, pour rendre sa loi constitutionnelle, pour la rendre conforme si vous me permettez l'expression.

Ce délai d'un an est son hypothèse. Comme l'a mentionné le sénateur Joyal, il arrive que l'idée que la Cour suprême se soit faite du délai nécessaire ne tient pas vraiment compte de tous les facteurs en cause. Par conséquent, vous ne dites pas qu'il y a un vide constitutionnel. Nous avons actuellement un problème constitutionnel, mais cela fait un an qu'il existe. La cour l'a reconnu.

Que cette inconstitutionnalité dure un an, un an et demi ou deux ans, le facteur à l'origine ne change pas. Seul le délai accordé pour y remédier change.

Je pense qu'il est raisonnable d'aller devant la Cour suprême en lui disant que comme l'année en question est un peu particulière — en raison par exemple du fait qu'il y a eu un changement de premier ministre — et comme il y a d'autres raisons impérieuses, nous demandons une prolongation. Le projet de loi nous a été soumis tout récemment. Il serait donc raisonnable de demander une prolongation de délai.

J'imagine qu'un tribunal ne refuserait pas si le projet de loi faisait l'objet d'un examen sérieux. Il s'agit après tout d'un acte de conformité entrepris selon les paramètres de gouvernance appropriés.

M. Perrault: Mon rôle n'est pas ici de soutenir une thèse. Ce n'était pas là mon intention.

Je vous rappelle toutefois deux éléments. D'abord, il n'y a aucune certitude et, à notre avis, d'après les conseils juridiques qui nous ont été donnés — il est peu vraisemblable que nous ayons gain de cause cette fois-ci. Mais cela ne veut pas dire que nous ne pourrions pas l'avoir plus tard.

L'autre élément est ce qu'a dit le ministre. La Cour suprême a déjà accordé des prolongations, mais toujours dans des limites très rigoureuses. Nous ne pouvons guère espérer obtenir plus de six mois. Et il faudrait beaucoup plus longtemps que cela pour procéder à l'examen plus complet de toutes les implications qu'aurait l'adoption d'une telle loi.

Des témoins ont parlé hier de la radiodiffusion et de la règle des 2 et des 5 p. 100. Les témoins sont venus dire que les affaires internes des partis et les processus de sélection des candidats devraient être beaucoup plus réglementés. Comme le ministre l'a dit, ce n'est pas là quelque chose que nous pourrions espérer examiner à fond dans un délai très court pendant l'automne, avant le mois de décembre.

Par conséquent, pendant l'automne, nous nous trouverions contraints de devoir vous revenir avec un projet de loi similaire, voire parfaitement identique, comme mesure transitoire en attendant que nous puissions examiner d'autres questions, mais que pour l'instant, pendant le temps qui nous reste, il nous faut cette mesure transitoire.

Voilà donc le genre de considérations qui nous ont amenés à conclure, comme vous l'a dit le ministre, que la meilleure solution consisterait peut-être à agir immédiatement et à revoir ensuite.

Le président: Aviez-vous terminé, sénateur Joyal?

Le sénateur Joyal: Je ne veux pas prolonger inutilement la discussion, mais à mon sens, il y a un risque d'imposer au gouverneur général de devoir trancher pendant une période de vide constitutionnel, ce qui est essentiellement une question de légalité. Mais cela est une autre question et je ne veux pas en parler maintenant. Mais c'est assurément la réalité créée par le paragraphe 27(2).

Le président: Merci, messieurs Perreault et Zaluski d'être venus témoigner une nouvelle fois.

Le sénateur Mercer: Monsieur le président, je propose que nous passions maintenant à l'examen article par article.

Le président: Une motion a été présentée à l'effet que nous passions maintenant à l'examen article par article. Y a-t-il opposition?

Le sénateur Lynch-Staunton: Je ne vois rien sur l'avis de convocation de cette réunion qui prévoit un examen article par article. Selon nos conventions, après avoir entendu les témoins, et en particulier un ministre, il y a toujours une période destinée à nous permettre de réfléchir aux témoignages. L'examen article par article ne devrait pas commencer immédiatement après les dépositions des témoins sinon à quoi bon entendre le ministre?

Le président: Malheureusement, sénateur, vous n'étiez pas des nôtres hier soir. Lorsqu'on a évoqué la possibilité de poser deux ou trois questions très précises au ministre, nous avons également parlé de l'éventualité de ne pas procéder à l'examen article par article pendant la même séance. Et nous avons convenu, à cette occasion, que si la majorité des membres du comité jugeaient que les réponses du ministre et de ses fonctionnaires étaient satisfaisantes, nous dérogerions à l'usage dans ce cas-ci. Tous les partis y ont consenti.

Le sénateur Lynch-Staunton: Il n'est pas toujours possible de lire la transcription d'une séance de comité qui s'est terminée la veille à 9 ou 10 heures du soir.

J'entendais personnellement proposer un amendement à l'un des articles, mais je n'ai pas le texte avec moi parce que lorsque j'ai lu l'avis de convocation, il n'était pas question d'un examen article par article. J'ai donc imaginé que comme le ministre comparaîtrait, par égard au témoignage qu'il allait nous donner ainsi que ses fonctionnaires, nous procéderions à cet examen article par article à une séance ultérieure. J'imagine que j'aurais dû lire la transcription à 6 heures ce matin.

Le président: Je vous présente mes excuses.

Le sénateur Lynch-Staunton: Je ne veux pas d'excuses. Ce que je veux, c'est qu'on respecte l'usage et les conventions, même si j'accepte vos excuses.

Le sénateur Andreychuk: Si vous n'y voyez pas d'objection, je voudrais intervenir dans la discussion. Le sénateur Lynch-Staunton a fort bien dit les choses. Nous avons en effet discuté de la façon de procéder si le ministre revenait témoigner. Le sénateur Kinsella a déclaré que nous n'étions pas là pour retarder indûment l'adoption du projet de loi et que notre intention était de faire notre travail. Je paraphrase ce qu'il a dit. Il a également dit que nous pourrions fort bien procéder avec diligence la semaine prochaine.

Monsieur le président, vous avez dit que si la majorité des membres du comité souhaitait procéder à l'examen article par article — nous avions vidé la question sur ce genre d'intervention. Maintenant, vous voulez procéder à cet examen article par article, mais nous n'avons jamais dit ici si nous étions d'accord pour le faire.

Sommes-nous satisfaits des propos du ministre? Voulons-nous y réfléchir pendant un certain temps? J'aurais aimé qu'on procède au moins à un sondage auprès des personnes ici présentes pour savoir comment nous allons assimiler l'information que nous venons de recevoir.

Le président: D'accord. Sénateur Andreychuk, ce que vous dites est conforme aux questions posées hier soir par ceux qui se demandaient si la majorité du comité était satisfaite des témoignages du ministre et de ses fonctionnaires. J'accepte vos commentaires et je vais sonder l'opinion des membres du comité.

Le sénateur Mercer: Je suppose, monsieur le président, qu'un vote sur ma motion permettrait de déterminer si la majorité d'entre nous est satisfaite des témoignages et prête à passer à l'étude article par article.

Le sénateur Pearson: Il est légitime de faire un sondage d'opinion et je pense aussi que le sénateur Mercer a raison.

Cependant, je tiens à dire qu'après avoir écouté attentivement les témoignages, je suis satisfaite de la situation dans laquelle nous nous trouvons. Il est entendu que tout repose sur des hypothèses, mais il en va toujours ainsi de toute façon. Il ne faut pas chercher les ennuis quand rien ne nous y force. J'ai donc été convaincue par le ministre Saada qui, je crois, a pris nos questions au sérieux. Je lui suis reconnaissante d'être venu nous voir malgré un préavis très court. Maintenant, je suis convaincue que nous pouvons passer à l'étude article par article.

Pour autant que je me souvienne de la discussion d'hier soir, c'est bien là l'avis général du comité. Je ne sais plus si c'est le sénateur Kinsella ou le sénateur Andreychuk...

Le président: Le sénateur Nolin.

Le sénateur Pearson: Le sénateur Nolin lui a demandé de revenir. Il a été convenu qu'on procéderait ainsi et qu'ensuite, on nous demanderait si nous sommes prêts à passer à l'étude article par article.

Le sénateur Smith: Cela me convient et je suis prêt à aller de l'avant. Je dis que cela me convient, et non pas que je suis enthousiaste, car cette décision ne m'emballe pas. La définition du parti a été quelque peu édulcorée.

Cependant, la décision de la Cour suprême du Canada ne nous laisse pas le choix. Elle a répondu à la question d'une façon aussi pertinente que possible.

Le sénateur Joyal et moi-même étions déjà parlementaires lorsque la Charte a été adoptée. Qui pouvait envisager que 20 ans plus tard, on aurait affaire à des décisions de cette nature?

Mais je peux m'en accommoder. J'en comprends la logique et je suis prêt à aller de l'avant.

Le sénateur Andreychuk: Le gouvernement a présenté ce projet de loi en disant que le seuil de 50 candidats était trop élevé et il l'a réduit à un seul candidat en invoquant la Charte. Toute notre réflexion nous a amenés à nous demander si ce changement était raisonnable et à nous interroger sur ses conséquences pratiques. La formule est-elle applicable? Ne va-t-elle pas entraîner une prolifération de partis?

J'ai remarqué hier qu'aucun de nous n'a voulu entrer dans le débat amorcé par tous les témoins que nous avons entendus hier: d'une part, on réduit radicalement le nombre des candidats qui passe de 50 à un et d'autre part, on augmente le nombre des partis. C'est un changement de principe fondamental, qui a été parfaitement décrit par M. Gibson puis par le professeur Smith. Il va nous faire changer totalement d'attitude envers les partis politiques, il va modifier le fonctionnement de ces partis et il y aura des conséquences dans tous les domaines, y compris celui de la télédiffusion.

Par conséquent, c'est un changement tout à fait fondamental. Au Sénat, lorsque des sénateurs indépendants contestaient le fonctionnement normal et la gouvernance du Sénat, nous avons dit souvent que le Canada avait un système de partis. C'est toujours ce que nous avons dit à propos des partis politiques. C'est par eux que la population exprime son point de vue et ce sont eux qui assurent l'efficacité de la gouvernance. C'est la façon de parvenir à un consensus, mais aujourd'hui, la Cour suprême nous parle de diversité. Il va y avoir un changement radical de fonctionnement. Je ne pense pas que les Canadiens en soient conscients. Comme l'a bien dit le ministre, la question a été débattue avec le directeur général des élections, mais c'est une question d'affaire publique, une question fondamentale qui aurait dû faire l'objet d'un débat plus général et recevoir davantage de publicité. Le ministre a présenté l'autre aspect de l'argumentation, insistant sur les raisons pour lesquelles il fallait adopter cette mesure.

Dans ces circonstances exceptionnelles, je m'attendais au départ à ce que le gouvernement nous soumette ce projet de loi beaucoup plus tôt. Nous voilà à la fin de l'année et nous y sommes confrontés pour la première fois. Ensuite j'espérais que nous puissions réfléchir pendant une fin de semaine à tous les commentaires qu'a suscités l'arrêt de la Cour suprême chez les experts que nous avons consultés, pour savoir s'il s'agit d'un changement fondamental de nos institutions. Ne conviendrait-il pas de mettre tout cela en contrepoids des avantages pratiques d'une adoption rapide et de la renonciation à toute demande de délai à la Cour suprême?

J'ai un peu de mal à dire tout simplement: «Merci, monsieur le ministre. Merci, messieurs les experts. Allons-y et adoptons le projet de loi.» Je pense que ce projet de loi va plus loin que je ne le croyais initialement. Je ne pense pas que nous servions les intérêts des Canadiens en agissant à la hâte.

Le président: Y a-t-il d'autres commentaires?

Le sénateur Lynch-Staunton: J'aimerais dire, si vous me le permettez, que je regrette qu'un nombre croissant de comités — même si je n'assiste pas à toutes les séances — ait pour usage de négliger certaines conventions essentielles, en particulier l'étude article par article. Trop souvent, on entend dire: «Ne perdons pas notre temps à tout lire; dépêchons-nous d'adopter chaque article», il n'y a aucune objection, et c'est parti. Il fut un temps où on étudiait chaque article des projets de loi, certains sénateurs hésitaient sur une question ou une autre, et le comité en discutait. Il semble que cet usage ait été abandonné. Au moins, l'étude article par article apparaissait à l'ordre du jour. C'est une étape importante des travaux d'un comité. Je prétends même qu'après l'audition des témoins, c'est l'étape la plus importante. Une fois de plus, on nous dit que nous avons des délais à respecter, que nous avons intérêt à les respecter et qu'il suffit donc de proposer une motion et de passer à l'étude article par article. La majorité l'accepte et c'est parti. Ce n'est pas ainsi qu'il faut procéder; je m'y oppose.

Le président: Je rappelle, aux fins du compte rendu, que nous avons déjà discuté hier soir de cet usage qui veut que notre comité ne passe pas à l'étude article par article au cours d'une séance où il a recueilli des témoignages, et qu'à la dernière minute, le sénateur Nolin a soulevé quelques questions qui nous ont paru importantes, en disant qu'il souhaitait que le ministre revienne. Nous avons accepté de faire revenir le ministre, à condition que nous puissions déroger à l'usage habituel, à savoir que si nous étions satisfaits des réponses du ministre — on a dit «à la majorité», je crois — on passerait alors à l'étude article par article.

Y a-t-il d'autres interventions, sénateurs? Sinon, nous avons une motion.

Le sénateur Robichaud: Monsieur le président, est-ce que le sénateur Nolin a accepté que l'on convoque le ministre et que l'on passe à la suite?

Le président: J'ai demandé au sénateur Nolin: «Est-ce que vous acceptez ma proposition?» Il a répondu: «Je ne serai pas là demain. Faites donc comme vous l'entendez. Le sénateur Joyal pourra me remplacer.»

Le sénateur Lynch-Staunton: Je vais essayer une dernière fois de convaincre les sénateurs que cette procédure est inacceptable: on nous a envoyé hier un avis reçu à 15 h 24 pour la séance d'aujourd'hui, consacrée au projet de loi C-3, avec l'indication «Témoins à déterminer»; il n'y était pas fait référence à l'étude article par article. D'après les avis, il n'a jamais été officiellement question de passer aujourd'hui à l'étude article par article.

Le président: On ne pouvait pas l'envisager avant d'avoir entendu les témoignages d'hier et en fin de séance, l'un des sénateurs a souhaité que l'on fasse revenir le ministre. C'est ce qui était prévu au programme pour aujourd'hui, mais nous en avons discuté hier soir et nous avons estimé que cette façon de procéder était satisfaisante.

Le sénateur Lynch-Staunton; Encore une fois, ce n'est pas ainsi qu'il faut procéder. Il aurait fallu l'indiquer sur les avis. L'étude article par article n'est pas une simple réflexion après coup.

Le président: Vous avez tout à fait raison, sénateur Lynch-Staunton, et comme nous ne la traitons pas en tant que réflexion après coup, comme nous voulons nous en tenir à l'usage habituel du comité, nous en avons discuté en détail hier soir, et tout le monde était d'accord. Ma proposition n'a pas suscité d'objection; nous avons reconnu la nécessité de faire revenir le ministre et ses fonctionnaires et si, après avoir entendu leurs témoignages, une majorité de membres du comité était satisfaite des réponses entendues, on pourrait passer à l'étude article par article. Personne ne s'est opposé à cette proposition, ni de ce côté-ci ni du vôtre.

Le sénateur Andreychuk: En toute justice pour vous, monsieur le président, et pour moi-même, vous avez indiqué au cours de la discussion qu'à votre avis, nous devrions passer à l'étude article par article jeudi prochain. J'ai dit qu'il me semblait qu'il y avait encore des témoins à entendre et qu'il fallait les entendre tous. J'ai dit également qu'il me semblait dommage qu'on ait constitué des groupes de témoins aussi importants, et qu'ils n'auraient pas le temps de traiter des questions en profondeur. Comme d'habitude, on les a tous rassemblés dans la même journée et nous aurions peut-être pu en accueillir davantage si nous avions prévu une séance supplémentaire jeudi. Vous avez eu l'honnêteté de dire que vous vouliez passer à l'étude article par article, c'est indiscutable.

Il ne faut pas négliger le fait que l'avis a été publié après notre discussion et il ne portait pas l'indication de l'étude article par article. Vous et moi ne sommes pas les seuls en cause. C'est une question de privilège pour chacun des membres du comité. Voici l'avis qu'ils ont reçu, indépendamment de ce qu'a pu leur dire leur whip ou le vice-président. C'est ainsi que nous travaillons, par convention. Je sais qu'un sénateur a soulevé la question du fonctionnement des comités qui, d'après la Loi sur le Sénat, est régi par le Règlement et le Règlement prévoit que l'avis doit porter la mention «article par article». C'était avant que le sénateur Nolin ne soulève la question.

Je comprends que vous n'ayez pas indiqué cette mention sur le deuxième avis, puisque nous avions deux possibilités, mais je pense que nous devrions préciser l'usage.

Le président: Je suis d'accord avec vous sur ce point, sénateur Andreychuk. L'usage normal veut qu'après avoir entendu les témoignages, le comité décide de passer à l'étude article par article. Nous n'avons pas pu le faire hier, car compte tenu des circonstances extraordinaires, nous avons convenu d'accéder à la demande du sénateur Nolin, qui nous a paru raisonnable, mais sous réserve que nous nous écartions de l'usage normal qui veut que l'étude article par article ne commence pas au cours d'une séance où le comité recueille des témoignages. Il a été convenu que si la majorité des membres du comité était satisfaite des réponses du ministre — et tout le monde était d'accord — on pourrait alors proposer une motion pour passer à l'étude article par article. Je ne pense pas qu'on ait utilisé l'expression «présenter une motion», mais nous nous sommes engagés à passer à l'étude article par article, car si la majorité des membres du comité ne s'estimait pas satisfaite, nous ne devions pas passer à l'étude article par article.

Le sénateur Andreychuk: Mon argument ne concerne pas le dernier avis, l'avis révisé. Je veux dire qu'avant toutes ces discussions, avant l'intervention du sénateur Nolin à 15 h 24, c'est-à-dire avant le début de notre réunion d'hier, j'ai reçu un avis selon lequel nous devions entendre des témoins, «à déterminer», le jeudi 6 mai. Cet avis ne faisait pas référence à l'étude article par article. C'est pour cela que j'estime qu'en toute équité pour tous les sénateurs...

Le sénateur Mercer: N'aurait-il pas été présomptueux, de la part de la présidence, de dire qu'on allait passer à l'étude article par article, alors que le comité était d'accord pour qu'on passe à cette étude si tous ses membres en avaient accepté le principe ici même hier?

Le sénateur Andreychuk: Ce n'est pas la question. Je ne parle pas du dernier avis. On nous a annoncé les séances de mercredi et de jeudi, et il n'était pas question d'étude article par article pour la séance de jeudi. Par la suite, nous avons reçu un avis révisé après notre réunion et notre décision concernant l'accord à la majorité. En toute franchise, s'il avait été question de procéder à l'étude article par article mercredi et jeudi, nous n'aurions pas dû recevoir des avis indiquant autre chose.

Le président: Sénateur Andreychuk, en toute justice, nous n'envoyons jamais d'avis mentionnant l'étude article par article avant d'avoir tenu une réunion du comité directeur à ce sujet ou d'avoir obtenu le consentement du comité.

Hier soir, si nous en avions terminé avec les témoignages et si le sénateur Nolin n'avait pas soulevé une bonne question concernant la possibilité d'entendre une fois de plus le ministre pour tirer au clair un certain nombre de questions, nous aurions normalement soulevé la question de l'étude article par article en passant soit par le comité directeur, soit par un vote majoritaire des membres du comité. Normalement, nous ne le faisons pas avant la fin des témoignages. Hier soir, j'ai proposé de ne pas soumettre au comité la question de l'étude article par article; le sénateur Nolin a demandé qu'on entende de nouveau le ministre et ses fonctionnaires et j'ai dit que si la majorité des membres du comité était satisfaite des réponses reçues, on passerait ensuite à l'étude article par article. Cette proposition n'a pas soulevé d'objection.

Le sénateur Andreychuk: C'est sur ce point-là que j'ai certaines craintes.

Le sénateur Lynch-Staunton: La discussion ne porte pas vraiment sur cela. Ce que je veux dire, c'est que l'ordre du jour n'appartient pas exclusivement aux membres du comité. L'ordre du jour d'une séance publique appartient à tous les parlementaires, à tous ceux qui s'intéressent à la question traitée, et ces derniers n'ont pas été informés du fait qu'un élément essentiel des délibérations sur ce projet de loi, à savoir l'étude article par article, allait commencer dans les prochaines minutes. Voilà ce que je conteste.

Le comité a bien pu décider hier soir à l'unanimité de procéder à l'étude article par article, mais je demeure persuadé que ce n'est pas la bonne procédure. Il faut un avis public. Ceux qui voudraient présenter un amendement à la dernière minute — ça n'arrive pas très souvent, mais ça peut arriver — n'en ont plus la possibilité. Dès que l'étude article par article commence, l'affaire est terminée et, habituellement, on l'annonce à l'avance. En l'occurrence, il n'y a pas eu d'annonce. Il n'y a rien à ce sujet sur notre site Web. Nous avons encore vérifié ce matin. C'est exactement l'avis que nous avons reçu aujourd'hui.

Au début de votre intervention, monsieur le président, vous avez dit que nous allions entendre les témoins puis passer à l'étude du rapport. Je n'ai pas entendu parler d'étude article par article.

Le président: Le problème, sénateur Lynch-Staunton, c'est que nous ne pouvons pas donner avis de l'étude article par article si, après avoir convenu d'entendre d'autres témoins, le comité décide de ne pas procéder à l'étude article par article. Il est présomptueux de supposer que tout le monde sera satisfait des réponses du ministre alors qu'il a été convenu qu'après avoir entendu le ministre, on ne passerait à l'étude article par article que si la majorité des membres du comité était satisfaite des réponses. Toute autre action serait présomptueuse.

Le sénateur Lynch-Staunton: Même si le comité acceptait à l'unanimité de passer à l'étude article par article, ce ne serait pas la bonne façon de procéder puisque les autres parlementaires n'ont pas été informés de cette nouvelle étape de la procédure. Voilà ce que j'ai dit.

Le président: Les membres du comité savaient qu'on passerait peut-être à cette nouvelle étape aujourd'hui.

Le sénateur Lynch-Staunton: Oui, mais ils étaient les seuls à le savoir et ils sont encore les seuls aujourd'hui, à moins que quelqu'un n'écoute ce qui se passe ici.

Le sénateur Robichaud: Je suppose que tous ceux qui s'intéressent à ce projet de loi suivent avec attention les délibérations de ce comité et savent donc qu'hier soir, le comité a convenu de convoquer de nouveau le ministre et que si ce dernier répondait aux questions soulevées par le comité, on passerait à l'étude article par article. Je suis sûr qu'ils le savent. Je ne pense pas que quiconque puisse soumettre des amendements à la toute dernière minute ou se plaindre de ne pas avoir été invité. Je pense que les personnes intéressées ont suivi nos travaux avec attention.

Je ne vois pas où est le problème, car les comités sont maîtres de leurs activités et, généralement, ils fonctionnent très bien avec le consentement de tous leurs membres et je crois que ce consentement a été exprimé hier soir.

Je comprends ce que vous dites, sénateur Lynch-Staunton; il aurait fallu aviser le plus grand nombre de personnes. Mais encore une fois, ceux qui s'intéressent à ce projet de loi ont suivi avec attention les travaux de ce comité. Je ne vois aucune objection à ce que cette réunion passe à l'étape suivante.

Le sénateur Lynch-Staunton: J'émets une objection, et je fais partie de ceux qui ont suivi avec attention l'étude de ce projet de loi. Ce n'est que ce matin que j'ai appris que le ministre allait venir. Si je ne l'ai appris que ce matin, imaginez comment réagissent tous les autres, qui n'ont pas suivi nos travaux d'aussi près que moi, au fait qu'un ministre comparaît sans qu'ils en aient été informés. La décision n'a été prise que ce matin, à ma connaissance, parce que le sénateur Nolin, je crois, a demandé que le ministre de la Justice revienne.

Le président: En réalité, c'était un malentendu.

Le sénateur Lynch-Staunton: Il a rectifié ses propos.

Le président: Oui. Il voulait parler du ministre compétent.

Le sénateur Lynch-Staunton: Je n'ai pas encore vu la transcription.

Le président: Chers collègues, à moins qu'il y ait d'autres interventions, nous devons passer à la motion qui est en délibération.

La motion du sénateur Mercer propose que nous passions à l'étude article par article.

Le sénateur Smith: J'appuie la motion.

Le président: Que tous ceux qui appuient la motion sur l'étude article par article disent «oui».

Des voix: Oui.

Le sénateur Robichaud: Je suis membre du comité, n'est-ce pas?

Le président: Oui, vous en êtes membre.

Le sénateur Robichaud: Oui.

Le président: Qui est contre?

Le sénateur Andreychuk: Avec dissidence.

Des voix: Non.

Le président: Avec dissidence.

Merci beaucoup, chers collègues. Nous allons maintenant procéder à l'étude article par article.

Plaît-il aux honorables sénateurs que le comité passe à l'étude article par article du projet de loi C-3, modifiant la Loi électorale du Canada et la Loi de l'impôt sur le revenu?

Des voix: D'accord.

Des voix: Avec dissidence.

Le président: Le titre est-il réservé?

Des voix: D'accord.

Des voix: Avec dissidence.

Le président: Les articles 1 à 10 sont-ils adoptés?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Andreychuk: Le tout avec dissidence.

Le président: Le tout avec dissidence.

Les articles 11 à 20 sont-ils adoptés?

Des voix: D'accord.

Des voix: Avec dissidence.

Le président: Les articles 21 à 27 sont-ils adoptés?

Des voix: D'accord.

Des voix: Avec dissidence.

Le président: Le titre est-il adopté?

Des voix: D'accord.

Des voix: Avec dissidence.

Le président: Le projet de loi est-il adopté sans amendement?

Des voix: D'accord.

Des voix: Avec dissidence.

Le président: Puis-je faire rapport de ce projet de loi à la prochaine séance du Sénat?

Des voix: D'accord.

Des voix: Avec dissidence.

Le président: Pouvons-nous poursuivre brièvement la discussion à huis clos?

Le comité poursuit ses travaux à huis clos.


Haut de page