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VETE

Sous-comité des anciens combattants


Délibérations du sous-comité des 
anciens combattants

Fascicule 1 - Témoignages


OTTAWA, le mercredi 5 mai 2004

Le Sous-comité des anciens combattants du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense se réunit en ce jour à 12 h 10 afin de poursuivre son étude sur les prestations et services offerts aux anciens combattants, les activités commémoratives et la charte des anciens combattants.

[Traduction]

Le sénateur Michael A. Meighen (président) occupe le fauteuil.

Le président: Nous allons commencer par quelques motions qui sont nécessaires pour que le comité puisse entamer ses travaux.

Je demande la motion suivante: Que le comité fasse imprimer ses délibérations; et que la présidence soit autorisée à fixer la quantité en fonction des besoins.

Le sénateur Atkins: Je propose cette motion.

Le président: D'accord?

Des voix: D'accord.

Le président: Adoptée.

Je demande ensuite la motion suivante: Que, conformément à l'article 89 du Règlement, la présidence soit autorisée à tenir des réunions pour entendre des témoignages et à en permettre la publication en l'absence de quorum, pourvu qu'un membre du comité représentant le gouvernement et un autre représentant de l'opposition soient présents.

Le sénateur Banks: Je propose la motion.

Le président: D'accord?

Des voix: D'accord.

Le président: Adoptée.

Je demande ensuite la motion suivante: Que le comité demande à la Bibliothèque du Parlement d'affecter du personnel de recherche auprès du comité; que la présidence soit autorisée à demander au Sénat la permission de retenir les services de conseillers juridiques, de personnel technique, d'employés de bureau et d'autres personnes au besoin, pour aider le comité à examiner les projets de loi, la teneur de ces derniers et les prévisions budgétaires qui lui sont déférées; que le Sous-comité du programme et de la procédure soit autorisé à faire appel aux services d'experts-conseils dont le comité peut avoir besoin dans le cadre de ses travaux; et que la présidence, au nom du comité, dirige le personnel de recherche dans la préparation d'études, d'analyses, de résumés et de projets de rapport.

Le sénateur Atkins: Je propose cette motion.

Le président: D'accord?

Des voix: D'accord.

Le président: Adoptée.

Je demande maintenant la motion suivante: Que le comité autorise le Sous-comité du programme et de la procédure à désigner, au besoin, un ou plusieurs membres du comité, de même que le personnel nécessaire, qui se déplaceront au nom du comité.

Le sénateur Banks: Je propose cette motion.

Le président: D'accord?

Des voix: D'accord.

Le président: Adoptée.

Maintenant, je demande la motion suivante: Que le Sous-comité du programme et de la procédure soit autorisé à:

1) déterminer si un membre du comité accomplit un «engagement officiel» aux fins de l'alinéa 8(3)a) de la politique relative à la présence des sénateurs, publiée dans les Journaux du Sénat du mercredi 3 juin 1998; et

2) considérer qu'un membre du comité accomplit un «engagement officiel» si ce membre: a) exerce une fonction ou assiste à une activité ou à une réunion se rapportant aux travaux du comité; ou b) fait un exposé ayant trait aux travaux du comité.

Le sénateur Atkins: Je propose cette motion.

Le président: D'accord?

Des voix: D'accord.

Le président: Adoptée.

Je demande aussi la motion suivante: Que, conformément aux lignes directrices du Sénat gouvernant les frais de déplacement des témoins, le comité peut rembourser des dépenses raisonnables de voyage et d'hébergement à un témoin d'un même organisme, après qu'une demande de remboursement a été présentée, mais que la présidence soit autorisée à permettre le remboursement de dépenses pour un deuxième témoin s'il y a circonstances exceptionnelles.

Le sénateur Banks: Je propose cette motion.

Le président: D'accord?

Des voix: D'accord.

Le président: Adoptée.

Le président: Honorables sénateurs, je vais commencer cette réunion de notre Sous-comité des anciens combattants en me présentant: je suis Michael Meighen, de l'Ontario. Je suis accompagné du sénateur Norm Atkins, de l'Ontario, et du sénateur Tommy Banks, de l'Alberta.

Nous poursuivons nos travaux sur l'étude des prestations et services offerts aux anciens combattants, des activités commémoratives et de la charte des anciens combattants.

Je suis très heureux d'accueillir Peter Neary, président du Conseil consultatif sur les Forces canadiennes d'Anciens Combattants Canada.

M. Neary est l'auteur d'un rapport, dont un exemplaire vous a été remis, qui traite de la reconnaissance d'une charte des anciens combattants et du traitement des anciens combattants, surtout ceux de l'ère d'après la guerre de Corée.

Je veux aussi souligner la présence du sénateur Michael Forrestall, qui a représenté et représente toujours la région de Dartmouth-Halifax, et ce, depuis de nombreuses années, à la Chambre des communes et au Sénat. Le sénateur Forrestall est vice-président du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense.

Monsieur Neary, nous sommes prêts à entendre votre exposé.

M. Peter Neary, président, Conseil consultatif sur les Forces canadiennes d'Anciens Combattants Canada: Merci beaucoup, sénateur Meighen.

Honorables sénateurs, c'est un privilège de comparaître devant vous aujourd'hui pour discuter du besoin d'une charte actualisée des anciens combattants canadiens, un point inscrit à votre ordre de renvoi actuel et qui a suscité l'an dernier l'étroite attention du Conseil consultatif sur les Forces canadiennes d'Anciens Combattants Canada. Nous avons rendu publics en mars trois documents qui portent directement sur ce point important.

Avant d'aborder nos conclusions cependant, il serait peut-être utile que je vous fournisse quelques renseignements généraux sur le conseil que je préside et sur la création de nos documents.

Le Conseil consultatif sur les Forces canadiennes d'Anciens Combattants Canada a été mis sur pied par Anciens Combattants Canada (ACC) en juillet 2000 pour fournir des avis spécialisés, indépendants et conformes au mandat de ce ministère sur la façon de s'attaquer aux défis auxquels sont confrontés les membres et les anciens combattants des Forces canadiennes (communément appelées les FC) et leurs familles. Le Conseil consultatif se réunit deux fois l'an pour poursuivre cet objectif.

Lors de sa réunion d'octobre 2002, le conseil a conclu que, malgré de nombreuses améliorations apportées à la gamme de services et d'avantages aujourd'hui mis à la disposition de ces Canadiens très méritants, le temps était venu d'en effectuer une réforme détaillée. Afin d'inscrire carrément la question du renouvellement de cette gamme de services et d'avantages à l'ordre du jour du gouvernement, le conseil a consacré les 18 derniers mois à préparer trois documents: Respecter l'engagement du Canada: Offrir «possibilités et sécurité» aux anciens combattants des Forces canadiennes et à leurs familles au XXIe siècle, un sommaire de ce document de travail et un document de référence à l'appui, intitulé Les origines et l'évolution des avantages offerts aux anciens combattants au Canada, 1914-2004. Des copies des trois documents ont été mises à la disposition de votre comité, et j'en ai quelques exemplaires.

Notre intention était à l'origine de sensibiliser la population aux besoins actuels et ultérieurs des anciens combattants des FC et de leurs familles, et d'encadrer le débat sur les politiques d'intérêt public qui les concernent au Canada. Je crois que les documents qui en découlent justifient une nouvelle version de la Charte des anciens combattants pour les anciens combattants canadiens d'après-guerre et leurs familles, une version inspirée par celle couronnée d'énormément de succès qui a assuré la réinsertion dans la vie civile de nos anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale et de la guerre de Corée et leurs familles, mais adaptée aux réalités du monde moderne.

Comme l'indiquent nos rapports, ces six dernières années, nous avons accumulé de plus en plus d'éléments probants qui appuient l'adoption d'une nouvelle approche vis-à-vis des programmes destinés aux anciens combattants, éléments qui incluent des contributions qu'a récemment adoptées votre sous-comité: le rapport de 2002 intitulé Pour rectifier la position des Forces canadiennes concernant la mort ou la mutilation et le rapport de l'an dernier sur Les traumatismes liés au stress: Le besoin de compréhension. Qu'est-ce que montrent, par conséquent, les résultats que nous avons accumulés à la suite de nos recherches? Laissez-moi vous faire part de certains de leurs points saillants.

Le nombre d'anciens combattants des FC est important. On comptait en 2003 environ 411 000 anciens combattants au Canada, c'est-à-dire 411 000 personnes qui ont été libérées des forces régulières et de réserve des FC depuis la démobilisation ayant suivi la guerre de Corée il y a 50 ans, nombre qui s'accroît d'à peu près 5 000 chaque année. Vous serez peut-être surpris d'apprendre que notre population d'anciens combattants des Forces canadiennes dépasse en nombre celle de nos anciens combattants de l'époque des grands conflits armés, qui était d'environ 309 000 en 2003.

D'après les recherches d'ACC, de 20 à 30 p. 100 des anciens combattants des FC font face à de multiples défis sur le plan physique ou psychologique qui font obstacle au succès de leur réinsertion dans la vie civile. Quatre-vingt-trois pour cent des membres des FC clients d'ACC font état de maux qui affectent leur existence quotidienne, comparativement à environ 7 p. 100 des citoyens en général. Vingt-huit pour cent souffrent d'une dépression majeure, comparativement à 5 p. 100 de l'ensemble de la population. Quinze pour cent présentent des symptômes du syndrome de stress post-traumatique, et bien des familles de ces militaires déclarent qu'elles ont besoin d'aide pour faire face à ses conséquences pour la vie au foyer.

Les gens qui quittent les FC ont de la difficulté à trouver un emploi. D'après les statistiques du ministère de la Défense nationale, 49 p. 100 des gens démobilisés pour des raisons de santé et 37 p. 100 de tous ceux qui ont été libérés des forces armées ces cinq dernières années ont moins qu'un diplôme d'études secondaires. Selon Statistique Canada, le taux d'emploi chez ces anciens militaires est inférieur à 53 p. 100, ce qui est inquiétant, parce que plus de la moitié des gens qui quittent les FC chaque année ont moins de 39 ans et 80 p. 100 ont moins de 44 ans. Ces personnes veulent un emploi et en ont besoin.

Les familles des anciens combattants des FC souffrent actuellement. Huit pour cent des anciens combattants des FC clients d'ACC déclarent un revenu annuel inférieur à 20 000 $. Au moins 25 p. 100 des clients d'ACC membres des FC déclarent des revenus annuels variant de 20 000 à 30 000 $. Il ne faut pas beaucoup d'imagination pour se faire une idée de ce que ces chiffres laissent supposer.

Beaucoup de conjointes et de conjoints de militaires renoncent à un emploi parce qu'ils ou elles doivent s'occuper des enfants pendant que leur partenaire est déployé à l'étranger ou passent d'un emploi à un autre au moment où le militaire est muté. Ces conjointes et ces conjoints n'acquièrent ni l'ancienneté au travail ni le fonds de pension dont jouissent beaucoup d'autres Canadiens. Lorsque la carrière militaire de leur partenaire prend fin soudainement en raison d'une invalidité, ils ou elles peuvent être mal préparés à jouer le rôle de pourvoyeur, surtout dans un monde où les familles à deux revenus constituent la norme. C'est toute la famille qui en souffre par conséquent.

Cette détresse n'a en partie rien à voir avec l'économie. Lorsqu'un ancien combattant souffre d'un problème de santé mentale, ce problème peut avoir de graves effets sur sa famille également. Une étude a révélé un taux de divorce de 70 p. 100 et un taux égal de difficulté sur le plan des relations sexuelles chez les anciens combattants canadiens souffrant du syndrome de stress post-traumatique. Au moins la moitié des familles en question signalent aussi des problèmes parentaux ou d'éducation familiale.

Ces anciens combattants et leurs familles ont des besoins complexes et parfois urgents, auxquels ACC ne peut, dans bien des cas, répondre à l'aide des outils qui existent. Aujourd'hui, l'ensemble d'avantages offerts par le ministère ne compte que deux grands volets: les pensions d'invalidité pour les anciens combattants souffrant de blessures ou de traumatismes liés à leurs états de service et les avantages pour soins de santé si ces avantages peuvent être reliés à une invalidité ouvrant droit à pension. La gamme autrefois étendue d'autres programmes de réinsertion dans la vie civile et, d'avantages administrés par ACC n'existe plus.

Nombre de gens, par conséquent, qui ont servi le Canada avec courage et distinction dans le cadre de dangereuses missions de l'ONU et de l'OTAN, notamment, sont aujourd'hui en péril parce que notre pays n'a plus de programme de réinsertion dans la vie civile pour les aider. Beaucoup de ces anciens combattants ont été blessés physiquement et moralement par ce que nous leur avons demandé de faire sur les scènes de conflits armés où régnait le chaos, de génocides sanglants, de catastrophes naturelles et de guerres civiles. Nous les avons ramenés au sein de familles que nous devrions aider davantage, pendant qu'ils refont leur vie, recommencent à poursuivre des rêves dont la réalisation a été retardée ou sont confrontés à l'anéantissement de ces derniers. En sommes, nous devons faire davantage pour nous acquitter de notre responsabilité nationale consistant à prendre soin de ceux qui ont servi leur pays et se sont sacrifiés en notre nom.

Je ne peux pas, en ma qualité de professeur d'histoire, m'empêcher de faire référence à des précédents. Je sais que ceux qui, en qualité de législateurs judicieux, servent le Canada ici également accordent de la valeur aux précédents. Lorsque nos anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale et de la guerre de Corée ont été démobilisés, le Canada leur a offert le programme d'avantages destinés aux anciens combattants sans doute le plus généreux au monde. On a baptisé ce programme la Charte des anciens combattants, programme qui a été bâti autour de l'idée des possibilités et de la sécurité.

Le Canada a offert des pensions d'invalidité et des soins de santé aux blessés et des pensions de survivant aux familles des militaires qui ont fait le sacrifice ultime. L'objectif central était cependant de réintégrer les anciens combattants dans la population active. Il y avait donc des programmes de réadaptation professionnels, de rattrapage scolaire et de prêts pour le démarrage d'entreprises, ainsi qu'un programme pour les anciens combattants qui voulaient devenir pêcheurs ou producteurs agricoles. Il y avait un programme qui visait à aider les anciens combattants à acheter un terrain et à se faire construire. On aidait les anciens combattants pendant qu'ils suivaient des cours de formation afin d'exercer un nouvel emploi ou attendaient que leur nouvelle entreprise prospère. On offrait en plus des prestations de soutien du revenu ou des soins de longue durée aux anciens combattants qui étaient trop handicapés ou trop sérieusement affectés par les horreurs de la guerre pour gagner leur vie ou pour voler de leurs propres ailes. Lorsque la guerre de Corée a pris fin, le Canada a offert une aide similaire à un nouveau noyau d'anciens combattants, parce que ces gens avaient des besoins identiques et avaient droit au même titre à la gratitude de leur pays.

Aujourd'hui, la plupart des programmes qui ont aidé nos anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale et de la guerre de Corée à réintégrer avec succès la vie civile ont pris fin, mais le mandat du gouvernement consistant à les aider à s'y réinsérer n'est pas expiré. La Loi sur le ministère des Affaires des anciens combattants confie à cette organisation le mandat de fournir «les soins, le traitement, la formation ou la réinsertion dans la vie civile aux personnes ayant servi dans la marine, l'armée de terre ou l'aviation... et... les soins aux personnes à leur charge». C'est clair.

Un rapport publié en 1998, et qui a fait date, du Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants a mené à l'importante initiative baptisée Qualité de vie, qui a apporté des améliorations cruciales aux conditions d'exercice de leurs fonctions des membres des FC. Le gouvernement doit maintenant aller jusqu'au bout en remplissant, d'une façon qui reflète les conditions propres au XXIe siècle, son mandat consistant à s'occuper des anciens combattants contemporains. C'est la prochaine étape logique sur le plan des programmes et des politiques, étape qui exige de la part du gouvernement des mesures énergiques.

À ce propos, j'ai été ravi d'assister hier à une conférence de presse lors de laquelle l'honorable John McCallum, ministre des Anciens combattants, et l'honorable David Pratt, ministre de la Défense nationale, ont annoncé que le gouvernement entreprendra la réforme la plus fondamentale de programmes destinés aux anciens combattants jamais entreprise depuis l'adoption de la Charte des anciens combattants des grands conflits armés. Cette vision d'une charte moderne des anciens combattants annonce un retour au respect du mandat intégral d'ACC, une mesure des mieux accueillies. Ce sont là d'excellentes nouvelles pour les anciens combattants canadiens et leurs familles. Pour ceux et celles qui servent actuellement, ou qui aimeraient servir dans les FC, ce sont des nouvelles qui sont tout aussi bien accueillies. On devrait considérer cela en plus comme de bonnes nouvelles pour la société canadienne, qui bénéficiera également de la réintégration avec succès des familles des anciens combattants dans le tissu économique et social du pays.

Notre conseil consultatif a formulé un certain nombre de recommandations au sujet de la forme que devrait revêtir cette Charte moderne des anciens combattants. Lorsqu'un avant-projet de loi et une nouvelle réglementation seront préparées pour concrétiser les mesures que les ministres des Anciens combattants et de la Défense nationale ont annoncées hier, nous consacrerons nos compétences et nos connaissances professionnelles spécialisées à leur formuler des avis réfléchis. J'exhorte le Sénat à utiliser également nos recommandations comme outils pour évaluer ces propositions lorsqu'elles seront soumises à la Chambre de second examen objectif de notre pays.

Vous avez sous les yeux nos recommandations. Je n'en soulignerai que quelques-unes.

Nous devons, tout d'abord, simplifier l'accès aux programmes actuels et fournir des services de gestion de cas adéquats, surtout à ceux qui sont libérés des FC pour des raisons de santé et qui sont souvent les militaires ayant le plus besoin d'aide pour se réinsérer dans la vie civile.

Il n'est pas facile d'assurer le maintien de la paix et de contribuer à garantir la sécurité nationale. Ces deux causes ont entraîné la perte de 119 Casques bleus membres de nos forces armées. Plus de 500 membres des FC sont morts en Europe dans le cadre de missions de l'OTAN, la preuve qui laisse à réfléchir du prix qu'ont payé les Canadiens pour servir ces causes durant la guerre froide. Les blessures ou les traumatismes liés aux fonctions exercées dans les FC ont tragiquement mis fin à beaucoup d'autres carrières et changé la vie de bien d'autres gens.

Les risques de blessures physiques et psychologiques sont élevés aujourd'hui dans les forces armées. Lorsqu'ils quittent les Forces, les blessés doivent zigzaguer à travers un labyrinthe de services pour trouver l'aide dont ils ont besoin: le ministère des Anciens combattants, le ministère de la Défense nationale, le Régime d'assurance-revenu militaire, le ministère du Développement social, le programme de pensions d'invalidité du Régime de pensions du Canada, le système provincial de soins de santé et les services sociaux locaux. La liste des fournisseurs éventuels de services est longue, les relations entre les différents programmes sont complexes et les choix à faire ne sont pas toujours évidents. Le fait d'obtenir des avantages offerts à partir d'un programme entraîne quelquefois la récupération de ceux qu'offre un autre programme. Tout cela est lourd sur le plan administratif et fait entrave à la fourniture des meilleurs services qui soient.

Les anciens combattants dont il est question ici ont subitement perdu un revenu et un emploi et sont souvent en train d'apprendre à vivre avec un handicap physique ou psychologique, et leurs familles doivent également apprendre à composer avec ces défis. Ils ne sont peut-être pas préparés à trouver leur chemin à travers un dédale de programmes et à prendre en même temps des décisions qui modifient le cours de leur vie ou sont peut-être incapables de le faire. Nous devons simplifier le système et offrir à ces anciens combattants les services d'un gestionnaire de cas pour les aider à affronter l'avenir.

Cet avenir devrait être pour eux synonyme d'indépendance et de mieux-être. La forme principale d'assistance qu'offre actuellement notre pays à un membre des FC blessé ou traumatisé dans l'exercice de ses fonctions — une pension d'invalidité d'ACC — peut aller à l'encontre de la saine indépendance que valorisent les Canadiens.

Un ancien combattant dans le besoin doit habituellement remplir des conditions pour obtenir une pension d'invalidité afin d'avoir accès à d'autres programmes offerts aux anciens combattants comme des programmes de soins de santé, à domicile ou de longue durée, ce qui prend du temps et, pendant qu'il ou qu'elle attend qu'on rende une décision au sujet de sa pension, il rate des occasions de bénéficier d'une assistance ou d'une intervention précoce, ce qui va à l'encontre des connaissances actuelles au sujet des meilleures pratiques en matière de réadaptation et de soutien aux familles en crise. La meilleure pratique est l'intervention précoce.

Nos anciens combattants contemporains ont besoin d'une gamme de programmes de réinsertion: d'aide à la transition, d'aide pour trouver un emploi, de réadaptation, de recyclage, de soutien du revenu, de soins de santé, d'aide familiale, et cetera. Nous devrions offrir l'accès à ces programmes en nous fondant sur une évaluation professionnelle des besoins, dans le cadre d'un plan de réinsertion bien conçu. Cette nouvelle approche doit favoriser le mieux-être et aider les anciens combattants à recouvrer l'indépendance et la dignité des citoyens fonctionnels.

Notre document de travail fournit un aperçu de 17 principes et processus qu'il faudrait respecter en concevant un nouveau programme à l'intention des anciens combattants. Je n'en mentionnerais que cinq, qui sont déterminants:

Premièrement, le nouveau programme doit encore une fois respecter le mandat du ministère des Anciens combattants en matière de réinsertion et son mandat connexe relatif au souvenir en ce qui concerne les anciens combattants des Forces canadiennes.

Deuxièmement, le programme doit favoriser la capacité du ministère de la Défense nationale de recruter, de retenir et de déployer des forces armées modernes, aptes au combat.

Troisièmement, dans le cadre du programme, on doit reconnaître la contribution des conjoints et des familles à la mission d'Anciens combattants Canada et du ministère de la Défense nationale.

Quatrièmement, le programme doit tenir compte des pratiques exemplaires de la gestion de cas moderne, y compris la continuité des soins, la participation du client et l'autodétermination du client, comme on le recommande dans le plan d'action du gouvernement fédéral concernant les personnes handicapées.

Cinquièmement, le programme doit s'appliquer de manière prospective. Les services et avantages déjà accordés devraient être maintenus en vertu des droits acquis, s'il y a lieu. Le nouveau programme ne doit ni entraîner de baisse dans la qualité et la nature des avantages et des services fournis aux anciens combattants de la Première Guerre mondiale, de la Seconde Guerre mondiale et de la guerre de Corée ni empêcher d'actualiser ce soutien à mesure que les besoins le justifient. Ce n'est que de cette façon que le Canada honorera tous ses anciens combattants. Ce point est fondamental.

Enfin, le Conseil consultatif recommande de s'attaquer aux six priorités suivantes:

Premièrement, nous devons de toute urgence remanier complètement les modalités d'indemnisation des membres et des anciens combattants des Forces canadiennes en cas de blessure.

Deuxièmement, nous devons élaborer un solide programme de services et d'avantages liés à la transition; ce programme devra être facile d'accès, souple et adapté aux besoins des clients; il devra aussi leur être offert au moment opportun.

Troisièmement, il nous faut élaborer des politiques qui amélioreront le soutien offert aux conjoints et aux enfants, en particulier en ce qui concerne les soins de santé et les inégalités économiques structurelles.

Quatrièmement, il nous incombe d'élargir la gamme actuelle d'aides médicales pour qu'elles correspondent à une stratégie plus globale en matière de santé mentale ainsi qu'aux nouvelles approches en matière de réadaptation, de recyclage professionnel et de mieux-être.

Cinquièmement, nous devons reconnaître l'obligation du gouvernement de prendre des mesures d'adaptation à l'égard des membres des Forces canadiennes handicapés, à l'aide d'un meilleur système de priorité d'embauche dans la fonction publique.

Sixièmement, il faut assurer un accès équitable aux subventions de funérailles et d'inhumation aux familles des anciens combattants décédés des Forces canadiennes.

L'histoire montre que les meilleurs changements et les changements les plus importants apportés aux avantages destinés aux anciens combattants ont été réalisés lorsque tous les principaux organismes les représentants ont exprimé leur appui en faveur des réformes proposées. Les organismes d'anciens combattants se sont jusqu'ici traditionnellement associés au gouvernement pour formuler des politiques à l'intention de ces derniers. Il est indispensable de maintenir cette tradition.

Il me fait plaisir, dans ce contexte, de déclarer que les Anciens combattants de l'armée, de la marine et des forces aériennes au Canada, la Légion royale canadienne, l'Association canadienne des vétérans des forces des Nations Unies chargées du maintien de la paix, l'Association canadienne des vétérans pour le maintien de la paix et l'Association canadienne des vétérans de la guerre du Golfe appuient les principes et les priorités dont les documents du Conseil fournissent un aperçu. Les cinq associations et le Conseil national des associations d'anciens combattants ont participé à la conférence de presse d'hier lors de laquelle on a annoncé une «Vision d'une charte moderne des anciens combattants». Cet appui est important et montre que le temps est en effet venu de procéder à un changement.

J'exhorte le Sénat à faire tout en son pouvoir pour que ce point pressant inscrit à notre ordre du jour national progresse. La Chambre haute ajouterait ainsi à ses états de service aussi longs qu'enviables consacrés à aider les anciens combattants canadiens et leurs familles.

Le président: Merci. Je ne voudrais pas parler au nom des autres, mais je ne pense pas me tromper en disant que nous voulons tous soutenir la réputation de nos prédécesseurs en faisant de notre mieux pour soutenir les anciens combattants.

Avant de passer aux questions, je voudrais vous montrer quelque chose que m'a donné M. Neary avant de commencer. Il s'agit d'un petit ouvrage qui fut distribué aux anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale qui s'intitule «Back to Civil Life: Prepared to Inform Members of the Armed Forces and Canadians Generally of Steps Taken for Civilian Rehabilitation of Those Who Served» (Réadaptation à la vie civile: Document d'information sur les mesures prises pour assurer la réinsertion sociale des soldats démobilisés à l'intention des militaires et de tous les autres Canadiens). Ce livret a vu le jour à l'époque du premier ministre des Anciens combattants, l'honorable Ian Mackenzie.

M. Neary m'a fait remarquer deux ou trois lignes. Juste au-dessus de la signature du ministre, on trouve ceci: «En matière de réadaptation, on estime, au Canada, que c'est l'emploi qui assure la réinsertion et que c'est la formation adéquate qui permet d'accéder à l'emploi.» (traduction).

À la rubrique «Objet du programme», on peut lire «le plan canadien de réadaptation des militaires a pour objet de permettre à toute femme et tout homme démobilisé de gagner sa vie». Je ne pense pas que les choses aient véritablement changé depuis, à part le fait qu'on ait peut-être perdu de vue ces objectifs fondamentaux.

Je vais faire circuler ce petit ouvrage pour que les sénateurs puissent y jeter un coup d'oeil. Passons maintenant aux questions.

Le sénateur Banks: Je vais profiter du fait que le sénateur Atkins regarde le livret. C'est incroyable, mais je me souviens de ce petit livre qu'avait rapporté de la guerre certains de mes oncles. Bien évidemment, d'autres ouvrages ont été écrits depuis.

Monsieur Neary, vous êtes historien. Comment le processus a-t-il pu dérailler? Quel cheminement a pu nous mener à croire qu'on pouvait éliminer certains de ces programmes?

M. Neary: C'est une question pertinente. Le programme de réadaptation des anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale n'avait pas été conçu pour durer éternellement. Au Canada, on a décidé qu'un programme de réadaptation et de réinsertion serait mis en place pendant environ dix ans. On estimait qu'après dix ans, ceux qui pouvaient être réadaptés se seraient trouvé du travail.

C'est ce qui s'est passé, dans une large mesure. Le plan a connu un succès franc. Le programme était fondé sur le concept d'occasion jumelée avec la sécurité. Le gouvernement du Canada assurerait une certaine sécurité pendant que les soldats démobilisés se trouvaient du travail et se réinséraient dans le marché du travail.

Le sénateur Banks: Des centaines de milliers de personnes ont profité de ce programme à l'époque.

M. Neary: Plus de un million de Canadiens ont combattu pendant la Seconde Guerre mondiale. Le programme, ambitieux, avait été conçu pour aider les soldats démobilisés à se trouver du travail et il a été couronné de succès. Mais il a disparu et le ministère des Anciens combattants est devenu plus petit. Il ne s'occupait alors que des soldats démobilisés qui ne pouvaient être réinsérés et des familles des soldats ayant trouvé la mort pendant la Seconde Guerre mondiale. Le ministère perdait de son importance.

Le programme a été maintenu pour les anciens combattants de la guerre de Corée parce que, peu de temps après la Seconde Guerre mondiale, nous avons combattu dans la guerre de Corée. Plus de 27 000 Canadiens ont été envoyés en Corée, dont un grand nombre ont trouvé la mort. Le programme a donc été maintenu pendant quelque temps encore.

À l'époque de la Seconde Guerre mondiale, les artisans du programme n'auraient pu prévoir la guerre froide. Ils ne pouvaient pas savoir que les besoins se feraient toujours sentir. Et c'est exactement ce qui s'est passé surtout dans les années 90, époque à laquelle le nombre de déploiements des Forces canadiennes s'est multiplié. En plus, les Forces canadiennes étaient plus petites. Il est évident qu'un tel programme est à nouveau nécessaire.

On ne devrait pas reprendre ce qui existait dans les années 40, mais les besoins sont les mêmes et il faut mettre en place des programmes de réinsertion qui répondent à ces besoins.

Le ministère des Anciens combattants a suivi la génération de la Seconde Guerre mondiale presque systématiquement après les efforts de réinsertion, et c'est ce qu'il convenait de faire. Ce suivi a été bien fait. De merveilleux programmes ont été conçus pour les anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale. C'est en 1980 que le programme principal, à savoir le Programme pour l'autonomie des anciens combattants a vu le jour.

Ce ministère a retrouvé une clientèle plus jeune. Elle n'est pas aussi nombreuse que celle que nous avons connue à la fin de la Seconde Guerre mondiale — et vous avez eu raison de citer ces chiffres — mais elle demeure considérable. Le ministère continuera de jouer un rôle auprès de ces gens. Nous avons besoin de programmes comme ceux que nous avions à la fin de la Seconde Guerre mondiale mais qui sont adoptés au XXIe siècle.

Le ministère a créé un groupe de travail sur la modernisation des services et des programmes qui met en oeuvre les principes que j'ai énoncés ici aujourd'hui, et il s'emploie, comme on l'a annoncé hier, à définir une nouvelle charte des anciens combattants qui va faciliter le retour à vie civile selon les besoins de notre époque.

Le sénateur Banks: Je suis heureux de vous l'entendre dire parce que les membres de notre comité attendent cela depuis fort longtemps.

Auriez-vous maintenant l'obligeance de nous dire si les cinq recommandations relatives au processus et les six recommandations précises que vous avez faites seront incorporées dans ce programme lorsqu'il verra enfin le jour. Avez-vous le sentiment d'avoir été écoutés? Êtes-vous convaincus que ce programme sera à la hauteur?

M. Neary: Ce qui s'est fait au Canada récemment à cet égard me donne lieu d'être optimiste, personnellement. Le gouvernement a injecté beaucoup d'argent dans ce qu'on appelle l'Initiative sur la qualité de la vie dans les Forces canadiennes. C'est une initiative importante qui a modifié les conditions du service dans les Forces canadiennes. C'est à mon avis un investissement admirable.

Le sénateur Banks: Est-ce que l'intendance suit?

M. Neary: Je crois que oui. Je crois qu'on fait un beau travail. Nous en sommes à la prochaine étape logique de cette initiative. Elle doit maintenant être mise en oeuvre au sein d'Anciens Combattants Canada. De nombreux signes positifs pointent dans cette direction. Anciens Combattants Canada et le ministère de la Défense nationale ont échangé des agents de liaison. Il existe maintenant depuis plusieurs années un comité de direction mixte. Ce comité travaille bien, et j'en ai vu la preuve. C'est une bonne nouvelle pour notre pays qui mérite d'être propagée.

Les initiatives qui ont été annoncées hier ne sont pour le moment que des idées, bien sûr, mais on fait beaucoup de travail en ce sens, et j'espère que les principes que nous avons définis ici aujourd'hui vous seront communiqués en bonne et due forme et que vous pourrez en prendre connaissance lorsque ces plans seront mis de l'avant. Vous pourrez voir de vous-mêmes si les plans concrétisent les objectifs que j'ai mentionnés. Nous allons faire cela aussi et il est essentiel que ce programme soit mis en oeuvre en collaboration avec les partenaires traditionnels du gouvernement du Canada dans l'articulation de la politique relative aux anciens combattants, et je parle bien sûr de nos associations d'anciens combattants.

Le sénateur Banks: Au sujet du syndrome de stress post-traumatique, le SSPT, selon les chiffres que vous avez, ce sont 83 p. 100 des anciens militaires qui en souffrent, mais je ne me rappelle pas avoir vu de tels chiffres dans les années 40 et au début des années 50. J'ignore si on diagnostique mieux ou si l'on reconnaît mieux les symptômes de ce syndrome aujourd'hui, mais des gens sont venus nous dire, des officiers supérieurs, qu'ils ne croient pas que le SSPT et ce genre de malaise ont atteint l'ampleur que leur prêtent aujourd'hui les milieux autorisés. S'agit-il ici de vieux grognards qui ont la nostalgie de la belle époque? Est-ce que quelque chose a changé? Ou sommes-nous alors simplement plus aptes à reconnaître ce problème aujourd'hui?

M. Neary: Bien sûr, 50 ou 60 ans se sont écoulés depuis la Seconde Guerre mondiale, et la connaissance a évolué. Je crois que nous sommes très progressistes au Canada dans nos attitudes face à ce phénomène.

Nous avons pris des initiatives importantes dans le cadre de nos politiques et programmes. Je crois que ces initiatives feront qu'on se souviendra de cette époque dans l'histoire canadienne. Je suis entièrement acquis à ce que les Forces canadiennes ont fait à cet égard, et je suis également favorable à ce que compte faire le ministère des Anciens Combattants dans ce domaine en collaboration avec les Forces canadiennes.

Je n'ai pas mentionné, bien sûr, ce centre merveilleux que ces deux ministères gèrent à Ottawa pour les membres des Forces qui sont handicapés ou retraités. C'est une initiative merveilleuse, et c'est le genre d'initiative que nous sommes maintenant en mesure de mettre en oeuvre au Canada et qui nous donnera un programme dont nous serons fiers, tout comme nous étions fiers autrefois, dans les années 40, de la charte originale des anciens combattants. Nous tenons là une occasion formidable. Je crois que c'est une réalité à laquelle tous les Canadiens devraient applaudir; et tous les partis devraient s'en féliciter aussi. Je crois que ce sera le cas.

Le sénateur Banks: Vous allez constater que la partisanerie n'existe pas au sein de notre comité.

Le président: Seulement des expressions diverses de soutien.

Monsieur Neary, je vous ai entendu dire que le conseil consultatif que vous présidez va suivre avec intérêt l'évolution du projet de loi qui devrait être déposé à l'automne en vue de donner forme à l'annonce qui a été faite hier. Le conseil consultatif a-t-il un mandat précis, ou une autre tâche qu'il vient d'entreprendre?

M. Neary: Non, nous conseillons Anciens combattants Canada en fonction de notre connaissance professionnelle des programmes s'adressant aux anciens combattants des Forces canadiennes et à leurs familles. Je souligne «leurs familles» étant donné que la situation de la famille dans notre pays a tellement évolué, et le programme qui a été conçu en 2004 doit nécessairement être très différent de celui que nous avions à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Certains membres de notre conseil sont des spécialistes de la famille; et nous avons aussi des membres qui sont des experts du SSPT et autres questions liées aux déficiences. C'est une aide professionnelle que nous offrons.

Les associations d'anciens combattants, bien sûr, comme je l'ai dit dans mon allocution d'ouverture, sont des partenaires essentiels du gouvernement du Canada dans l'articulation de la politique.

Le sénateur Atkins: Je crois que le conseil mérite des félicitations pour le travail qu'il fait.

Mais pourquoi se croit-on toujours obligé de redécouvrir la roue? Ce livre en est la preuve.

Je m'intéresse particulièrement à l'éducation. Je cite souvent le programme de réadaptation des anciens combattants qui a vu le jour après la Seconde Guerre mondiale. C'était un programme formidable qui visait à scolariser les militaires libérés. Étant mieux scolarisés, ils étaient plus aptes à réintégrer l'économie.

M. Neary: Bien sûr.

Le sénateur Atkins: Étant donné le fait que, d'après les statistiques, bon nombre de militaires sont libérés vers la fin de la trentaine ou au début de la quarantaine, est-il possible de restaurer ce genre de programme?

M. Neary: De nombreuses possibilités s'offrent aux militaires libérés. Le ministère des Anciens Combattants fait intervenir ici sa compétence particulière, à savoir, la gestion de cas. Il sera bientôt en mesure d'aider les anciens combattants des Forces canadiennes à tirer parti de tous les programmes qui existent au sein du gouvernement du Canada, et il créera de nouveaux programmes à leur intention.

Walter Wood, le premier sous-ministre des Anciens Combattants, fut le principal auteur et le premier gestionnaire du programme né après la Seconde Guerre mondiale. Son expérience lui a inspiré un livre intitulé Rehabilitation (a Combined Operation). Ce qu'il voulait dire par là, c'est que le ministère des Anciens Combattants n'a pas été fondé pour gérer tous les programmes s'adressant aux anciens combattants. Ce ministère n'a pas été conçu pour cela. Il doit offrir certains programmes mais il est surtout un agent de coordination pour les anciens combattants au sein du gouvernement du Canada, et il doit combiner les services des gouvernements fédéral et provinciaux ainsi que les services d'autres instances du pays, pour le compte des anciens combattants. Ce rôle de coordination demeure. C'est un rôle très important, et il consiste en partie à aider les anciens combattants à améliorer leur scolarité.

Il existe déjà des programmes de retour à la vie civile au sein des Forces canadiennes. Celles-ci ont été très dynamiques à cet égard et présentent d'excellents états de service. La contribution du ministère des Anciens Combattants résidera à mon avis, en collaboration avec le ministère de la Défense nationale, dans le système de gestion de cas qui fait défaut en ce moment. Il devra rendre compte de ses résultats. Il devra voir aux intérêts à long terme de l'ancien combattant.

Le gouvernement n'a pas créé un seul ministère pour le faire, il en a créé deux: le ministère de la Défense nationale et le ministère des Anciens combattants. À propos, ce dernier fête cette année son soixantième anniversaire. Il a apporté d'énormes avantages à des milliers de Canadiens au fil des ans et il est remarquablement placé pour continuer à le faire. Notre pays a l'occasion de répondre aux besoins urgents de ces anciens combattants, et l'éducation sera certainement un aspect de cette équation.

Le sénateur Atkins: J'aimerais savoir combien des militaires libérés à la fin de la trentaine ou au début de la quarantaine deviennent membres des réserves. Vous avez des statistiques là-dessus?

M. Neary: Je n'ai pas la réponse ici, mais je peux certainement la trouver.

Le sénateur Atkins: J'imagine que c'est un débouché pour les anciens combattants, à moins que vous ayez des informations montrant que la majorité des anciens combattants ne veulent plus participer à la vie militaire.

M. Neary: Il est important de comprendre que de nos jours, comme vous le savez, les réservistes jouent un rôle très important dans les opérations militaires. Il faut bien comprendre qu'au Canada les membres de la réserve jouent un rôle essentiel dans le cadre de nos missions à l'étranger. Nous avons besoin de cette charte des anciens combattants moderne et renouvelée pour apporter des avantages aux réservistes.

Le sénateur Atkins: C'était ma question suivante: sont-ils traités correctement?

M. Neary: Encore une fois, depuis le rapport du Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants et l'initiative sur la qualité de vie, nous sommes dans une période d'évolution positive au Canada. Les changements ne sont pas encore complètement réalisés. Les réservistes y ont participé. Comme je l'ai dit dans mon exposé, nous n'avons pas terminé. La prochaine étape stratégique logique sera de transposer au domaine des anciens combattants la philosophie et la réflexion qui sous-tendent l'initiative sur la qualité de la vie. Si nous le faisons, nous ferons honneur à tous les anciens combattants, y compris les réservistes.

Le sénateur Atkins: Vous pensez qu'ils devraient être traités de la même façon?

M. Neary: C'est un service qui devrait être traité correctement, tout à fait. Notre pays a pris en 2001 une initiative qui aurait mérité beaucoup plus d'attention qu'elle n'en a reçue. Nous avons étendu le statut d'«ancien combattant» à tous les anciens membres des Forces canadiennes qui avaient eu un entraînement. Nous ne le faisions pas auparavant. L'octroi de ce statut à ce groupe a été un progrès très important pour notre pays. Il est stupéfiant que nous ne l'ayons pas fait avant. C'est étonnant que nous ne l'ayons pas fait, tout simplement.

Enfin, c'est fait maintenant et il faut expliquer ce que signifie ce statut. C'est à cela que sert notre conseil, le projet de charte moderne des anciens combattants.

Le sénateur Atkins: Il y a environ six ans, le Comité des affaires des anciens combattants, présidé à l'époque par le sénateur Phillips, a publié un rapport intitulé: «Relever la barre: De nouvelles normes de soins dans santé pour les anciens combattants». Où en est-on de la mise en oeuvre de vos recommandations dans la foulée de ce rapport?

M. Neary: Nous avons accompli beaucoup de choses au Canada, surtout depuis le rapport du CPDNAC. Anciens combattants Canada a fait une étude très poussée sur les besoins des anciens combattants en matière de soins. Cet examen comportait trois phases. Dans les deux premières, on s'est penché sur la situation des anciens combattants qui vivaient dans des logements communautaires et des établissements de soins de longue durée. La troisième phase, qui a été terminée en 2000, était axée sur les besoins des anciens combattants des Forces canadiennes. Cette enquête très poussée a débouché sur de nombreux changements productifs. La déclaration d'hier est le point culminant de ce processus.

Nous avons beaucoup avancé récemment au Canada. Nous pouvons nous en féliciter, mais il ne faut pas nous reposer sur nos lauriers. Il reste encore beaucoup à faire. En particulier, il faut faire progresser cette philosophie au niveau des affaires des anciens combattants et mettre sur pied cette charte moderne des anciens combattants.

Le sénateur Atkins: L'annonce d'hier est très encourageante, mais ce n'est qu'une annonce. Comment être sûr que le gouvernement va la concrétiser?

M. Neary: À l'appui de cette annonce, il y a le travail accompli depuis septembre par le Groupe de travail sur la modernisation des services et des programmes. C'est un groupe très actif et créatif. C'est sur son travail que s'appuieront les modifications apportées à la réglementation et à la loi. Tout cela vous sera soumis ainsi qu'à la Chambre des communes. Ces travaux seront aussi à la disposition des organisations d'anciens combattants. Il y aura énormément de suggestions.

Je crois qu'il est très important d'accomplir le premier pas. Le premier pas est toujours très important. Les Canadiens sont conscients de la nécessité de cette entreprise. À cet égard, l'étape d'hier est très importante.

La concrétisation de tout cela se fera de façon évolutive. Je suis ici en partie pour vous suggérer quelques notions et principes qui pourront vous être utiles lorsque vous examinerez cette réglementation.

Le sénateur Atkins: Pour l'instant, nous avons les yeux fixés sur les cérémonies du 60e anniversaire en Normandie. C'est bon pour l'image des anciens combattants et des légions.

Quelles sont vos suggestions pour la stratégie de communication à l'avenir, après ces cérémonies?

M. Neary: C'est un anniversaire important pour notre pays. Il va y avoir des cérémonies. Les héros de cette guerre, qui ont fait campagne en Normandie et en Italie, sont revenus au Canada et ont bénéficié des programmes décrits dans l'ouvrage que le sénateur Meighen a fait circuler. Ils ont produit une génération fantastique de Canadiens.

Tom Brokaw, présentateur à NBC, a récemment écrit un ouvrage intitulé The Greatest Generation. Quelqu'un d'autre aux États-Unis a écrit un livre intitulé When Dreams Came True, à propos de la déclaration des droits des GI.

Dans les années 40 au Canada, nous pensions avoir quelque chose de meilleur. Nous pensions, à juste titre je crois, que nous étions des leaders mondiaux, que nous avions le meilleur programme. Nous avons maintenant l'occasion et le devoir de renouveler tout cela. Le message à retirer de ces cérémonies commémoratives aujourd'hui, c'est que ces anciens combattants sont revenus construire, avec le gouvernement du Canada, et à travers leurs propres organisations d'anciens combattants, un Canada meilleur — le Canada dans lequel nous avons vécu et dont nous avons profité. Voilà ce que nous avons sous les yeux.

C'est un élément important du programme national de notre pays. C'est quelque chose que nous devons faire. L'échelle n'est pas la même que dans les années 40, où plus d'un million de nos compatriotes portaient l'uniforme. Toutefois, d'ici à 2013, le nombre d'anciens combattants des Forces canadiennes qui seront des clients d'Anciens combattants Canada passera à 58 000 environ. C'est beaucoup de Canadiens, et ce sont des Canadiens qui ont rendu un service spécial à notre pays.

Le sénateur Atkins: Quand des soldats ont été libérés lors de la Seconde Guerre mondiale et de la guerre de Corée, leurs dossiers médicaux étaient incomplets. Bien souvent, c'était parce que ces anciens combattants voulaient simplement partir.

Estimez-vous qu'aujourd'hui les dossiers médicaux des soldats qui sont libérés sont plus complets?

M. Neary: Je ne suis pas un expert en dossiers, mais j'espère qu'en cette ère de l'informatique, la tenue des dossiers s'est améliorée. Je peux vous dire ceci. L'une des initiatives prises par le MDN et ACC a été un programme de transition mis sur pied par les autorités d'Anciens combattants dans les bases de tout le pays. Ces autorités travaillent en collaboration avec celles de la Défense nationale. La première étape a été un programme pilote de transition. C'est maintenant un programme à part entière. L'objectif est d'avoir une entrevue de transition avec toutes les personnes qui quittent les Forces canadiennes.

Ce sera un outil important dans l'administration de la charte contemporaine des anciens combattants dont nous parlons aujourd'hui. Encore une fois, il y a toujours du travail à faire et nous n'en sommes pas encore là, mais je constate des progrès très positifs au Canada, aussi bien du côté de la Défense nationale que des Affaires des anciens combattants, que je connais un peu plus.

Le sénateur Atkins: C'est encourageant. Toutefois, ces dernières années, notre comité a entendu parler de soldats qui, au moment de leur libération, se sentaient en bonne forme, mais qui ont eu par la suite des problèmes de handicap pour lesquels ils ont eu de la difficulté à présenter des demandes.

M. Neary: C'est une remarque fort pertinente. Dans le cas du programme pour la Seconde Guerre mondiale, dont nous parlons dans la brochure, nous avons fait quelque chose de très raisonnable au Canada. Nous n'avons pas dit aux gens qui quittaient l'armée qu'ils devaient se décider tout de suite sur ce qu'ils allaient faire. En période de grande transition, beaucoup de gens ne sont pas nécessairement en mesure de prendre des décisions définitives.

Il y avait des délais très généreux dans la charte initiale des anciens combattants. Dans le cas du crédit de réinstallation qui était l'une des principales formes d'aide offertes aux anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale, ils avaient jusqu'à 10 ans après leur départ de l'armée pour présenter la demande. Nous devons être généreux de nouveau à cet égard.

Il faut exploiter les compétences d'Anciens combattants Canada en matière de gestion des cas dans ce dossier très important. Je suis entièrement d'accord avec vous là-dessus. Dans le cas des personnes qui sont en difficulté, des personnes libérées pour raisons médicales qui ont des problèmes familiaux, qui ont des décisions importantes à prendre et qui sont un peu perdues dans tout un réseau complexe de programmes, le temps est très important. J'ai l'intention personnellement de veiller à ce que le programme soit généreux à cet égard.

Le sénateur Forrestall: J'ai une question d'ordre très général et une autre question sur un créneau bien précis — et c'est peut-être quelque chose que vous avez déjà couvert dans vos travaux préparatoires. Je ne l'ai pas vu par écrit, mais j'en ai beaucoup parlé avec des gens du bureau à Charlottetown, à l'époque où je siégeais à la Commission d'appel des pensions.

Je connais très bien personnellement une des personnalités éminentes de l'armée canadienne. C'est quelqu'un que j'ai vu prendre de la stature en acceptant des responsabilités croissantes dans l'armée pour arriver jusqu'au sommet. Après plus de 30 ans de service, cet homme est maintenant à l'hôpital avec la maladie d'Alzheimer. Au cours de sa carrière, il a fait pratiquement tout. Il a été présent sur les théâtres de guerre avant et après les conflits, et il a servi ailleurs durant les intervalles. Durant toute sa carrière, il n'a jamais été en activité dans une zone de guerre. La seule chose qu'il aurait voulu, avant de perdre la capacité de communiquer, c'était d'être avec ses amis militaires dans un hôpital militaire, et on le lui refuse. Nous avons la chance d'avoir conservé une excellente aile à Halifax, mais il n'a pas le droit d'y être admis.

C'est un homme qui a emmené des navires en Corée, qui a participé au blocus de Cuba à une période critique. Ce n'était pas une zone de guerre, mais il est quand même un ancien combattant dans tous les sens du mot.

Pourquoi cet homme et sa famille ne pourraient-ils pas avoir accès à un hôpital militaire? Je ne cite que cet exemple, mais il y en a bien d'autres dans la même situation.

M. Neary: J'approuve ce que vous dites et j'adresse mes meilleurs souhaits de succès à cet ancien combattant et à sa famille. Toutefois, je ne peux pas me prononcer sur ce cas car j'ignore les détails et notre organisme ne s'occupe pas de cas particuliers.

Anciens combattants Canada a aussi créé un autre conseil qui pourrait intéresser les sénateurs, le Conseil consultatif de gérontologie. L'examen des besoins de soins des anciens combattants comporte trois phases. Deux ont été consacrées aux anciens combattants de la Première et de la Seconde guerre mondiale ainsi que de la Corée, c'est-à-dire des populations vieillissantes, et la troisième a été consacrée aux Forces canadiennes. À partir des constats des deux premières phases de cet examen, Anciens combattants Canada a créé le Conseil consultatif de gérontologie, et il a créé notre conseil à la suite de la phase trois.

Je pense que c'est une question qui relèverait plutôt de nos collègues de l'autre conseil.

Le sénateur Forrestall: Je comprends bien ce problème que vous avez avec cette exigence d'avoir servi dans une zone de guerre pour être admissible. J'espère que nous pourrons régler ce problème.

Sur un plan plus général, est-il question d'examiner les problèmes de logement et d'hygiène dans l'examen qui va être entrepris, pour améliorer la situation?

M. Neary: Tout à fait. J'espère que l'examen et le programme seront très vastes car les personnes libérées — et je ne me limite pas aux personnes libérées pour raisons médicales — doivent bénéficier d'une excellente gestion des cas, ce qui sera possible par le biais du ministère des Anciens combattants. Il faut qu'ils puissent s'y retrouver dans toutes les possibilités que leur offrent les programmes du gouvernement du Canada. Anciens combattants Canada pourra mobiliser plus de ressources dans tout le pays au profit des anciens membres des Forces canadiennes.

J'espère que nous aurons des programmes qui couvriront de nombreux besoins et qui, surtout, pour revenir à ce que le sénateur Meighen faisait remarquer dans la brochure au début de notre entretien, aideront les anciens combattants des Forces canadiennes à vivre pleinement leur existence de Canadiens. Il est difficile d'imaginer mieux qu'un emploi pour mener une vie épanouie.

Le sénateur Forrestall: C'est vrai, mais il y a quand même cet obstacle pour un homme qui aurait voulu passer le restant de ses jours parmi ses amis.

Ma dernière question découle directement de cela. A-t-on envisagé de redéfinir l'expression «ancien combattant»?

M. Neary: Oui, sénateur. Nous avons fait ce changement en 2001. Le titre d'ancien combattant est décerné à quiconque quitte les Forces canadiennes en ayant reçu une instruction. Nous avons une nouvelle génération d'anciens combattants. Ces gens-là étaient vraiment déjà des anciens combattants, mais en 2001 le gouvernement du Canada leur a reconnu ce statut. C'est un progrès merveilleux.

Comme vous pouvez le voir dans notre rapport, l'un des documents rédigés à Anciens combattants Canada pour l'examen des besoins en soins des anciens combattants avait un titre merveilleusement inventif. Il s'intitulait: «Monsieur, suis-je un ancien combattant?» Quelle question! Finalement, en 2001, nous avons fait ce qu'il fallait faire. Nous avons dit: oui, vous êtes des anciens combattants. Vous avez servi votre pays et vous êtes des anciens combattants. Nous veillons maintenant à établir ce que cela va signifier concrètement pour notre pays. Nous avons l'occasion de faire quelque chose de créatif et de positif. Tout indique que nous sommes sur la bonne voie.

Le sénateur Forrestall: Mon créneau, c'est l'armée de l'air. Je suis bien au courant de ce que vous dites, et c'est pour cela que je voulais vous faire dire que nous devons nous pencher sur ce domaine maintenant que nous avons universalisé la définition. Nous avons la souplesse et les qualifications maintenant.

Par exemple, combien de fois me suis-je levé depuis 10 ans? En franchissant le groupe d'Headland, l'Athabascan est passé en zone de guerre. Le statut de l'équipage a-t-il changé? Sont-ils protégés? Et surtout, leurs familles savent-elles si l'équipage est protégé?

Nous avons eu énormément de courriels et tout un éventail de trousses; j'espère que tout cela est sur la table.

Le sénateur Atkins: Dans votre exposé, monsieur Neary, vous dites qu'il faut simplifier le système. Pourriez-vous développer cette idée?

M. Neary: Oui. Je pense que tous les Canadiens comprennent cela parce que nous vivons dans un monde complexe. Nous sommes entourés d'un ensemble complexe de programmes gouvernementaux et nous savons tous ce que c'est que de chercher son chemin parmi tous ces programmes et toutes ces ouvertures. Dans le cas des anciens combattants des Forces canadiennes, on parle de gens qui sont souvent amenés à le faire à des moments difficiles de leur existence. Simplifier, cela veut dire coordonner, faire de la gestion de cas, fournir de l'aide et offrir généreusement son temps. Voilà ce que j'entends par «simplifier».

Je constate un progrès dans cette direction, mais il reste encore du chemin à faire. J'espère que cette idée sera claire dans le règlement et dans le projet de loi qui vont être proposés.

Le sénateur Atkins: Dans un de nos rapports, nous avons suggéré la même chose que vous, c'est-à-dire d'avoir un gestionnaire de cas.

M. Neary: Oui.

Le sénateur Atkins: Vous savez que notre comité est favorable à cela.

M. Neary: Oui. C'est essentiel pour réussir dans ce domaine.

Le sénateur Banks: Nous n'avons pas rencontré directement les anciens combattants démobilisés à la fin de la Seconde Guerre mondiale ou de la guerre de Corée mais j'ai l'impression que de nos jours, les anciens combattants sont en moyenne mieux formés que ceux de la Seconde Guerre mondiale ou même de la guerre de Corée. J'allais dire: à l'exception de l'infanterie, mais même les fantassins ont une formation technologique beaucoup plus poussée aujourd'hui qu'à l'époque de la Seconde Guerre mondiale. En tout cas, le personnel des autres services est mieux formé. C'est compliqué; on apprend maintenant de véritables métiers. Je me trompe peut-être, mais je crois qu'on apprend beaucoup plus de métiers qu'à l'époque de la Seconde Guerre mondiale ou de la guerre de Corée.

Est-ce que cela a un effet positif sur l'emploi? Je suis d'accord avec le sénateur Atkins quand il dit que tout est écrit dans la première phrase de ce livre. Quand les anciens combattants quittent l'armée, ils doivent pouvoir trouver un travail. C'est la réponse à tout.

M. Neary: Le niveau de formation requis est très élevé. Les Forces canadiennes ont des programmes d'éducation et de formation qui aident les membres des Forces à se recycler dans la vie civile. C'est quelque chose qui existe déjà mais il faut en faire plus. Certains militaires quittent les Forces canadiennes sans être suffisamment scolarisés et nous savons que beaucoup d'entre eux ont du mal à trouver un travail. Souvent, c'est lié aux circonstances dans lesquelles ils quittent les Forces canadiennes.

Les Forces canadiennes ont des programmes très positifs qu'il faut développer pour toutes ces personnes par le biais du ministère des Anciens combattants. Pour revenir à ce que je disais précédemment, nous avons bien progressé au Canada. Je parle aujourd'hui de la prochaine étape logique et nécessaire. Quand nous la franchirons, nous aurons reconstruit le programme des anciens combattants de notre pays.

Le sénateur Banks: Sans remettre en question la justesse de ce que vous dites, monsieur Neary, il y a une dichotomie. On nous a signalé un problème dans les services canadiens, à savoir qu'un technicien en électronique ou un soudeur peut être formé dans les Forces canadiennes et s'apercevoir ensuite qu'il peut gagner 20 000 $ de plus par an dans le secteur privé s'il ne se rengage pas. Cela marche dans les deux sens.

M. Neary: Bien sûr.

Le président: Peut-être pourrais-je vous poser une question, monsieur Neary, car vous avez manifestement à coeur les intérêts des Forces canadiennes. Il y avait un programme, qui a disparu depuis pas mal d'années maintenant, qui encourageait les étudiants à se joindre aux forces armées, soit dans la réserve ou dans la force régulière — la Division universitaire d'instruction navale ou le Corps école d'officiers canadiens. Que pensez-vous de ces programmes en ce qui a trait à la santé de nos forces armées?

M. Neary: À l'époque, ces deux programmes existaient, et j'ai des amis qui faisaient partie de ces organisations. Ces programmes permettaient aux étudiants de se trouver un emploi d'été et de rencontrer des étudiants canadiens partout au pays. Certains participants allaient aussi en Europe. Ces programmes constituaient un lien important entre les Forces canadiennes et les universités du Canada et ouvraient de nombreuses portes aux étudiants. Ils nous aidaient à construire notre nation grâce aux contacts personnels extraordinaires qui se nouaient grâce à ces programmes.

Je regrette leur disparition. J'enseigne à l'université et je trouve merveilleux de voir l'excellente prestation des Forces canadiennes sur les campus des universités du Canada. Il est dommage que nous n'ayons plus ces programmes.

Le président: Votre conseil consultatif relève du ministère des Anciens combattants.

M. Neary: C'est exact.

Le président: Vous avez souligné, et nous avons pu le constater, qu'il existait une relation de travail étroite entre le ministère de la Défense nationale et le ministère des Anciens combattants. Quelle note donneriez-vous à cette relation? Un A, un B, un C ou un F?

M. Neary: Vous me renvoyez à mon rôle de professeur. Je lui donnerais une note très élevée. Personnellement, je trouve que l'interaction entre les responsables d'ACC et ceux du MDN est digne d'éloges. Ils ont échangé des officiers de liaison et surtout ils ont créé un comité directeur qui est actif et fait beaucoup de choses. Le programme dont nous parlons ne peut fonctionner que si ces deux ministères coopèrent. Il y a longtemps, nous avons dit que nous voulions avoir deux entités gouvernementales: un ministère de la Défense nationale et un ministère des Anciens combattants. Ils ont collaboré étroitement, comme ils l'ont fait lors de la rédaction de la première charte des anciens combattants. Ils collaborent étroitement aujourd'hui à la réalisation de cette charte des anciens combattants. Nous n'en sommes pas là encore, mais je suis encouragé et optimiste.

Le président: Merci. Cela nous met du baume au coeur.

Je remercie notre témoin, M. Peter Neary, d'être venu nous rencontrer aujourd'hui. Nous lui sommes reconnaissants d'avoir pris le temps de nous aider à comprendre les services que nous rendent nos anciens combattants.

Les téléspectateurs qui auraient des questions ou des commentaires sont invités à consulter notre site Web à l'adresse www.sen-sec.ca, où nous publions les témoignages et les horaires de nos audiences. Vous pouvez aussi contacter le greffier du comité en téléphonant au 1-800-267-7362 pour obtenir plus de renseignements ou de l'aide pour contacter les membres du comité.

La séance est levée.


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