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Délibérations du comité sénatorial permanent de
l'Agriculture et des forêts

Fascicule 6 - Témoignages du 8 février 2005


OTTAWA, le mardi 8 février 2005

Le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts se réunit aujourd'hui, à 18 h 5, pour se pencher sur l'état actuel et les perspectives d'avenir de l'agriculture et des forêts au Canada.

Le sénateur Joyce Fairbairn (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente : Honorables sénateurs, je constate que nous avons le quorum. Nous pouvons commencer les audiences de ce soir. Je veux souhaiter la bienvenue à nos témoins qui vont nous donner des explications sur un sujet très intéressant relié à notre étude de l'agriculture. Voici M. Yvon Martel, scientifique en chef, Affaires internationales, à la Direction générale de la recherche d'Agriculture Canada. Il est accompagné de M. Bruce Archibald, sous-ministre adjoint, Direction générale de la recherche à Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC).

Comme certaines personnes de l'assistance le savent, au cours des dernières semaines et des derniers mois, nous avons accordé beaucoup d'attention aux questions concernant l'encéphalopathie spongiforme bovine (ESB) au pays et nous avons tout dernièrement déposé un rapport sur la valeur ajoutée dans l'agriculture au Canada.

Un peu partout, nous entendons parler de la recherche, de son importance et de son abondance. Nous avons pensé vous pourriez nous aider dans nos discussions en nous expliquant exactement comment le gouvernement canadien aborde cette question et quelle est l'étendue et l'efficacité de notre politique de recherche.

[Français]

M. Bruce A. Archibald, sous-ministre adjoint, Direction générale de la recherche, Agriculture et Agroalimentaire Canada : Honorables sénateurs, bonjour et merci de m'offrir l'occasion de présenter le travail effectué par Agriculture et Agroalimentaire Canada au cours des dernières années.

[Traduction]

J'ai rarement l'occasion d'être invité à parler de la recherche. L'agriculture fait face à de nombreux problèmes. Nous vivons des moments cruciaux. Plusieurs articles ont été publiés concernant l'orientation de notre stratégie sur les sciences et l'innovation et des inquiétudes ont été soulevées. J'aimerais saisir cette occasion pour vous décrire le projet du ministère relativement à un cadre stratégique global de gestion des sciences et de l'innovation qui aidera le secteur agroalimentaire à relever les défis auxquels il fait face et à exploiter les nouveaux débouchés.

En tant que sous-ministre adjoint à la recherche au sein du ministère, j'ai discuté avec mes collègues fédéraux des autres ministères, avec des organismes subventionnaires, avec les doyens des facultés des sciences de l'agriculture et de médecine vétérinaire, avec des collègues provinciaux et des organismes agricoles sur les façons d'établir les priorités et les orientations de recherche afin d'aider le secteur. J'ai lu avec intérêt votre rapport sur la valeur ajoutée dans l'agriculture au Canada. C'est avec plaisir que je souligne que le cadre stratégique que le ministère st présentement en train d'élaborer rejoint l'information et les recommandations contenues dans votre rapport. Je vais débuter par une courte présentation et je répondrai ensuite à vos questions.

Comme vous le savez, notre gouvernement national est fermement engagé envers la recherche et le développement. Le gouvernement du Canada s'est fixé l'objectif ambitieux de faire du Canada l'une des cinq premières nations en matière de recherche et de développement d'ici 2010. Dernièrement, le premier ministre a nommé un conseiller national en sciences et un secrétaire parlementaire chargé des sciences et des petites entreprises. Le discours du Trône de 2004 a réaffirmé l'engagement du gouvernement envers la recherche et le développement. Le discours reconnaissait également l'importance d'investir dans les sciences et la technologie pour stimuler une agriculture technologiquement avancée grâce à laquelle la compétitivité des agriculteurs canadiens ainsi que la salubrité et la sécurité de nos aliments demeurent toujours en tête.

Le gouvernement fédéral fait preuve d'une lancée, d'un enthousiasme et d'un engagement considérable dans sa volonté réaliser les changements structurels et les investissements requis pour s'assurer que le Canada soit à la fine pointe du XXIe siècle.

Si l'on veut s'assurer que le Canada soit à la fine pointe, nous devons poursuivre les changements et continuer à relever les défis. À l'échelle mondiale, l'économie du Canada est relativement petite et elle ne peut rivaliser avec les investissements faits en sciences et en technologie par des nations plus importantes. Les questions relevant des sciences et de la technologie deviennent de plus en plus complexes, exigeant des approches multidisciplinaires ainsi que de l'équipement, des installations et des compétences de pointe. Tout comme les autres secteurs de l'économie, l'agronomie et la technologie agricole font face à de nombreux défis qui découleront de l'augmentation des retraites au cours des dix prochaines années, qui sera accompagnée d'une grande compétition pour obtenir les services de nouveaux scientifiques possédant ces compétences de pointe.

De plus, si on veut recruter et s'assurer les services des meilleurs et des plus talentueux, il faut disposer d'installations et d'équipement les plus avancés, et cela coûte cher. Ces changements et ces défis montrent clairement le besoin grandissant d'efforts concertés dans la gestion des ressources et des activités associées aux sciences et à la technologie.

Pour être compétitif, le Canada doit trouver de nouvelles façons d'intégrer et de gérer les activités et les ressources en sciences et technologie et de s'assurer que ses investissements stratégiques sont bien ciblés et fructueux. Nous devons développer une capacité d'innovation nationale scientifique pour le secteur de l'agriculture et de l'agroalimentaire. Nous devons trouver des moyens originaux pour créer et poursuivre des partenariats productifs avec tous les fournisseurs de science et de technologie qui travaillent dans le secteur agroalimentaire.

Dans le dernier discours du Trône, le gouvernement a demandé au conseiller national en sciences, M. Arthur Carty, de s'assurer que les investissements du gouvernement en science et en technologie sont stratégiques, ciblés et fructueux, et de réaliser l'intégration complète des activités internes en science et en technologie.

Vous savez déjà que l'agriculture est une compétence partagée. Agriculture et Agroalimentaire Canada s'est engagé, par son Cadre stratégique pour l'agriculture, à travailler avec les autres intervenants à développer une expertise scientifique nationale dans le domaine de l'agriculture et de l'agroalimentaire. Pour réaliser cet engagement, nous avons travaillé à l'élaboration d'un cadre stratégique.

Pour se guider, le ministère a défini trois priorités stratégiques qui sont conformes à la politique nationale énoncée dans le Cadre stratégique pour l'agriculture. Ces trois priorités sont la salubrité et la qualité des aliments, le respect de l'environnement et la croissance par l'innovation. Dans les deux dernières années, Agriculture et Agroalimentaire Canada a repositionné la recherche conformément à ces priorités nationales, qui respectent également votre recommandation de mettre l'accent sur les domaines d'intérêt public, comme la salubrité des aliments et le respect de l'environnement.

Au printemps 2003, nous avons créé un groupe consultatif scientifique pour examiner l'orientation stratégique de la science au ministère. Ce groupe a confirmé que la science est entièrement intégrée au ministère et il encourage le rôle essentiel du gouvernement dans la réalisation de projets en science et en technologie. Par contre, le groupe a identifié des points à améliorer et il a fait 11 recommandations.

Nous avons utilisé le rapport de ce groupe consultatif scientifique pour entreprendre l'élaboration d'un cadre global de gestion de la science. Nos objectifs sont de renforcer les ressources scientifiques du Canada dans les domaines de l'agriculture et de l'alimentation, de s'assurer que le gouvernement et le ministère ont la capacité continue requise pour remplir leurs rôles et responsabilités et de préserver et améliorer l'avantage compétitif actuel et futur du Canada dans le marché global.

J'aimerais partager avec vous quelques éléments clés de cette stratégie. Le premier est de s'assurer que nous sommes sur la bonne voie. Pour ce faire, nous avons mis en œuvre plusieurs processus. Nous avons créé un conseil consultatif externe des sciences formé d'experts qui examinent l'orientation de la recherche et de la science au ministère; nous avons mis sur pied des tables rondes sur les produits pour réunir des représentants du gouvernement et de l'industrie sur toute la chaîne de valeur afin qu'ils nous indiquent comment la recherche peut aider envers les priorités du secteur; et nous avons adopté une culture d'évaluation par les pairs, aux niveaux interne et externe, dans les domaines de recherche. Huit de ces évaluations seront exécutées pendant le présent exercice, y compris une évaluation de notre programme d'hybridation des céréales, qui aura lieu en mars 2005.

Pour respecter nos priorités, nous avons besoin de trois éléments essentiels : des employés, une infrastructure et des mécanismes de financement. Notre stratégie à long terme en matière de ressources humaines repose sur l'identification des principaux domaines d'expertise scientifique dont nous aurons besoin pour soutenir une agriculture rentable dans le futur.

Nous nous engagerons dans des partenariats avec d'autres ressources scientifiques, aux niveaux national et international, pour nous assurer d'avoir ces compétences. Bien sûr, une stratégie en ressources humaines ne peut être réalisée sans tenir compte des investissements, de l'équipement et de l'infrastructure dont nos chercheurs auront besoin pour effectuer leur travail. Nous travaillons avec nos partenaires à l'élaboration d'un plan national intégré en science qui s'alignera avec notre stratégie nationale en ressources humaines.

Nous savons tous que la réalisation de ces ambitieux objectifs dépend de notre capacité à former des partenariats stratégiques, et au cours des derniers mois, nous avons étudié de nouvelles approches de partenariats afin d'augmenter et d'optimiser l'investissement en recherche pour en faire bénéficier les agriculteurs canadiens et le secteur agroalimentaire.

La nécessité d'accélérer la commercialisation des produits de la science et de la technologie est incontestable. Tout aussi important, l'environnement politique associé à notre façon de considérer la propriété intellectuelle est essentiel pour promouvoir la recherche et l'innovation et encourager et protéger nos investissements. Nous travaillons à concevoir une politique et des programmes dans ce domaine en collaboration avec les intervenants de la chaîne de valeur afin de générer les conditions nécessaires à une croissance durable à long terme.

Un élément important pour susciter de meilleures opportunités pour le Canada est d'associer une stratégie de partenariat de recherche international à notre stratégie commerciale. Nous sommes actifs dans plus de 50 partenariats scientifiques internationaux avec des marchés clés, y compris la Chine, le Japon et l'Union européenne. Nous sommes reconnus à l'échelle mondiale pour notre expertise dans plusieurs domaines, notamment les produits laitiers, la gestion de l'eau, la lutte biologique, la génomique et les produits biologiques, pour n'en nommer que quelques-uns.

Qu'est-ce tout cela signifie pour les agriculteurs canadiens? Cela signifie une compétence de pointe pour aborder des questions de plus en plus complexes qui exigent une approche multidisciplinaire. Cela signifie que la recherche peut apporter des changements transformationnels, de nouveaux marchés et de nouveaux débouchés pour les produits à valeur ajoutée. Cela signifie le maintien de la rentabilité et de la croissance des agriculteurs canadiens et l'amélioration de leur avantage compétitif dans l'économie mondiale.

A titre d'exemple, citons le projet Soya 20/20 dans lequel on retrouve des partenariats entre les deux niveaux de gouvernements, les universités et des producteurs afin d'étudier de nouveaux débouchés à valeur ajoutée pour ce produit en particulier.

Un autre exemple de partenariat est l'unique exercice que nous avons présentement entrepris avec le Conseil national de la recherche et l'Université de l'Île-du-Prince-Édouard en vue de former un partenariat dans le domaine des aliments nutraceutiques et fonctionnels. Nous cherchons comment identifier de nouvelles matières dans les produits agricoles pourraient être utilisées comme ingrédients bioactifs et aliments fonctionnels pour améliorer la santé humaine et animale et qui pourraient offrir un nouveau marché pour le secteur agroalimentaire.

Dans le domaine de la coordination de la recherche, notre ministère, en collaboration avec l'Agence canadienne d'inspection des aliments, Santé Canada et l'Agence de santé publique du Canada, a été très actif dans la création du nouveau Réseau de centres d'excellence pour l'ESB et les EST. Alors que l'objectif du RCE est de développer les ressources dans les universités et les hôpitaux universitaires, nous travaillons à s'assurer que nos ressources, tout comme celles du RCE, serviront à attirer des chercheurs de calibre mondial, à l'élaboration d'une approche multidisciplinaire et à accélérer les résultats qui apporteront des avantages à nos clients.

En résumé, les efforts que nous avons déployés dans les dernières années à l'élaboration d'un cadre stratégique global et intégré pour la gestion de la recherche scientifique représentent une base solide pour aider à renforcer les ressources scientifiques du Canada dans le secteur agricole et agroalimentaire. Bien que ce cadre puisse être utilisé pour développer des ressources nationales afin d'aider le secteur à relever les défis et à profiter des nouveaux débouchés, son succès repose sur notre capacité à attirer divers intervenants à travailler à l'élaboration d'un programme national d'innovation en science et à apporter les changements qui s'imposent.

Le sénateur Gustafson : Je tiens à vous remercier d'être venu témoigner devant nous. Un des problèmes auxquels les agriculteurs canadiens font face est que nous vendons principalement aux marchés du tiers monde qui ne sont pas en mesure de payer le prix fort.

Par exemple, je suis certain que vous êtes au courant de la question du blé Roundup Ready.

Nous avons présentement une surabondance de céréales parce que nous avons été capables de produire plus que ce nous pouvons vendre. Le problème est que les prix sont à la baisse. Je suis tout à fait pour la recherche, mais tant que nous n'aurons pas trouvé de marché pour ces céréales et remis de l'argent aux producteurs, nous aurons de gros problèmes. Je viens juste de recevoir un coup de fil d'un producteur de maïs de l'Ontario qui m'a précisé qu'il ne pouvait pas recouvrer le coût des intrants.

Spécifiquement du point de vue de la recherche, où en êtes-vous sur la question du blé Roundup Ready?

M. Archibald : En fait, la société Monsanto, qui fabrique ce type de blé, a décidé de cesser ses démarches en vue de faire homologuer le produit. Nous avons mis un terme à nos recherches sur le blé Roundup Ready. Pour l'instant, aucune activité n'est prévue dans ce domaine.

Le sénateur Gustafson : Autrement dit, vous ne ferez rien tant que cela ne sera pas politiquement acceptable.

M. Archibald : De mon point de vue, il y a une leçon intéressante à tirer de toute la question du blé Roundup Ready, soit comprendre la technologie pouvant servir à améliorer certains aspects des différents produits et s'assurer de ne pas oublier les considérations socio-économiques et les répercussions de la technologie sur les marchés. Lorsqu'il est devenu évident que l'utilisation de cette technologie dans le marché des céréales soulevait toutes sortes d'inquiétudes, la société a réalisé qu'elle préférait ne pas poursuivre son projet et elle l'a abandonné. Il s'agit d'une bonne leçon pour nous à l'effet qu'il faut s'assurer de considérer tous ces aspects lorsque nous développons de nouvelles technologies.

Le sénateur Gustafson : Quelle est votre opinion sur les crédits énergétiques en matière d'environnement? Qui devrait recevoir ces crédits, les agriculteurs?

M. Archibald : Nous avons effectué un travail considérable dans notre programme environnemental afin de mieux comprendre comment l'agriculture contribue aux émissions de gaz à effet de serre et les moyens dont nous disposons actuellement pour atténuer ces effets par la séquestration du dioxyde de carbone et autres techniques de ce genre. J'aimerais mentionner, sénateur, que même si l'agriculture est souvent décrite comme une industrie en crise, elle peut offrir plusieurs solutions aux défis en matière de nutrition, de salubrité et de qualité des aliments et d'environnement. Pour ce faire, nous devons comprendre comment mieux retenir les émissions de gaz à effet de serre à l'aide des produits agricoles et élaborer des programmes qui apporteraient des avantages économiques aux producteurs. D'un point de vue scientifique, nous sommes intéressés à identifier et à quantifier ces occasions.

La semaine dernière, nous avons rencontré des représentants de l'Agence spatiale canadienne à Saint-Hubert, au Québec, pour en apprendre davantage sur leurs diverses technologies, notamment celle utilisant le radar, grâce à laquelle il est possible d'observer des champs depuis l'espace et d'en faire un suivi. Si un producteur indique qu'il fera une culture en particulier, cette technologie nous permettrait d'en faire la vérification à peu de frais. Il pourrait aussi y avoir des avantages pour les producteurs. Du point de vue scientifique, nous sommes vivement intéressés à comprendre le rôle de l'agriculture dans les émissions de gaz à effet de serre et à aider le Canada à se conformer à ses engagements en vertu du Protocole de Kyoto. Du point de vue ministériel, il est très important d'identifier des moyens qui permettraient aux producteurs de retirer des avantages de la situation.

Le sénateur Gustafson : Les Américains et les Européens ont adopté un programme qui encourage le regroupement du développement rural, de l'environnement et de l'agriculture. Pensez-vous que le Canada devrait adopter une approche semblable?

M. Archibald : C'est ce que nous devrions faire et c'est ce que nous faisons. Le Cadre stratégique pour l'agriculture comporte cinq piliers dont l'un des aspects clés est l'aménagement rural et l'environnement, ainsi que la salubrité et qualité des aliments, science et innovation et gestion des risques de l'entreprise. Ces cinq piliers sont une façon délibérée d'exprimer que ces domaines sont interreliés et que nous ne devons pas en tenir compte séparément.

Le sénateur Mercer : Merci, messieurs, de vous être déplacés ce soir. Votre présentation m'a impressionné. Je veux poursuivre avec la crise de l'ESB, que je situe par rapport avec ce que vous nous avez appris ce soir. Nous espérions que cette crise était derrière nous, mais je crois que ce n'est pas encore le cas.

Nous avons pris connaissance des nouvelles et prometteuses mesures de protection que vous avez prévues dans vos travaux et des actions entreprises par le ministère pour protéger les consommateurs, les agriculteurs et la réputation du Canada en tant que producteur mondial de produits alimentaires de qualité.

J'aimerais avoir vos commentaires à ce sujet et je ferai ensuite un suivi.

M. Archibald : En ce qui concerne l'ESB, le ministère et le gouvernement travaillent présentement dans plusieurs domaines de recherche. Un centre d'excellence national sera mis sur pied pour essayer de mieux comprendre cette maladie et les aspects scientifiques associés aux protéines pliées et leur transmission. La compréhension du fonctionnement de ces protéines est un domaine de recherche vital pour la science. Une fois cet objectif atteint, nous pourrons élaborer des méthodes d'élevage, une réglementation et des stratégies de mise en marché qui aideront à assurer la sécurité des Canadiens et la compétence pour faire face à ces situations lorsqu'elles se produisent.

Tous les aspects de la génétique sont très intéressants pour le ministère. Nous travaillons avec nos partenaires de l'université de l'Alberta afin de déterminer la meilleure façon de regrouper nos ressources pour s'attaquer à ce problème.

Dans le domaine de la salubrité et la qualité des aliments, le ministère a déployé beaucoup d'efforts à élaborer des systèmes de dépistage et de suivi qui nous permettrons, si un incident survient, d'identifier plus facilement la source de l'incident et de mieux comprendre comment où il s'est produit. De cette façon, nous pouvons prendre les mesures appropriées pour atténuer les répercussions négatives. Bien sûr, l'Agence canadienne d'inspection des aliments a consacré beaucoup d'efforts à ce problème parce qu'il s'agit d'un problème important qui suscite beaucoup d'intérêt. Le Canada compte d'importantes ressources capables d'étudier ce problème. J'envisage l'avenir avec optimisme, car avec la création du nouveau centre d'excellence, nous pourrons regrouper notre expertise, qu'elle soit de l'université de Toronto, de l'université de la Colombie-Britannique, de Santé Canada ou d'Agriculture et Agroalimentaire Canada, pour aborder ce problème d'une manière concertée et faire du Canada un vrai chef de file dans la compréhension de cette maladie.

Le sénateur Mercer : Vous avez mentionné trois universités dans vos commentaires. J'ai des questions à propos des 19 centres de recherche régionaux du pays et le statut de leurs installations. Y a-t-il eu suffisamment d'argent consacré au maintien de ces centres de recherche? Notre comité a entendu des témoignages selon lesquels les centres étaient classés selon leur bon, passable ou mauvais état, en fonction de la condition des infrastructures et d'autres considérations. Ce classement existe-t-il vraiment? Si oui, qu'arrive-t-il aux centres jugés en mauvais état? En tant que sénateur de la Nouvelle-Écosse, je me demande si nous pouvons conserver nos petits, mais importants, centres de recherche du Canada Atlantique qui sont spécialisés dans des produits uniques à la région. Ils sont essentiels à notre avenir.

M. Archibald : Bien sûr, l'infrastructure est un secteur sur lequel nous avons consacré beaucoup de temps et sur lequel nous continuons de travailler. Vous avez raison, sénateur, nous avons 19 centres importants. Nous avons également un certain nombre d'installations et d'emplacements plus petits. En fait, nous comptons 56 emplacements dans l'ensemble du Canada. Nous sommes propriétaires de plus de 30 000 hectares de terres et de plus de mille édifices. Une importante infrastructure a été aménagée pendant des années au Canada afin de répondre aux besoins des producteurs et de la recherche.

Un des aspects sur lequel nous nous sommes penchés est de comprendre comment la science et les produits de la science ont changé. Dans le but de déterminer si nous avions suffisamment d'installations pour répondre à ce que nous croyons être les grandes priorités d'orientation de la recherche, nous avons évalué ces installations; et vous avez entièrement raison, elles ont été classées selon ces trois catégories. En moyenne, un laboratoire neuf a une durée de vie de 25 ans avant d'exiger des investissements importants pour répondre de nouveau aux normes. Près d'un tiers de nos installations sont en excellent état, un tiers sont en bon état et un tiers sont en mauvais état.

Par contre, ce critère n'est pas nécessairement celui qui détermine si nous conservons une installation ou non. Nous examinons les priorités scientifiques et les emplacements qui sont les plus appropriés pour réaliser ce type de recherche, parce que, comme vous le savez, le Canada est très grand, qu'il comporte différentes zones climatiques et différents types de sol. Il est important de tenir compte de cet aspect et des importantes différentes régionales, et que nous examinions les coûts associés au maintien des 56 emplacements — ou des 19 centres que vous avez mentionnés — par rapport à l'avantage financier de réduire le nombre d'emplacements, non pas en réduisant le budget total alloué à la science, mais en réinvestissant cet argent pour mieux avantager les producteurs.

La réalité est telle qu'une fois qu'un édifice a atteint un certain âge, les coûts de son entretien normal augmentent dramatiquement année après année. Par conséquent, l'argent disponible pour la recherche diminue avec le temps. Dans le cas de certains édifices, nous sommes arrivés au point où cet examen s'impose.

Maintenant que je vous ai donné un peu d'information sur nos installations, je dois souligner que nous effectuons ce travail en partenariat avec nos autres collaborateurs en recherche au pays — agriculture, universités, collèges de médecine vétérinaire et installations gouvernementales provinciales — afin de déterminer quelles sont les possibilités de synergie et de regroupement qui permettraient une meilleure utilisation de nos ressources collectives.

Cette question est primordiale pour nous maintenant. Nous devons d'abord bien comprendre la nature des recherches que nous devons poursuivre et déterminer les emplacements dont nous avons vraiment besoin pour réaliser ce genre de travail. De cette façon, au moment où nous évaluerons nos installations, nous pourrons élaborer un plan d'immobilisations critique qui précisera les investissements nécessaires pour amener nos installations au niveau requis.

Dès que nous abordons ce sujet et que nous procédons à ces évaluations, vous pouvez imaginer, sénateur, que nous créons beaucoup d'inquiétudes car les gens s'imaginent automatiquement que le fait d'être sur une liste ou sur une autre décide de leur sort. Je peux vous dire que nous travaillons sur cette question d'une façon pragmatique et que la porte est ouverte aux discussions.

Le sénateur Mercer : Je suis déjà un peu inquiet. Prévoyez-vous qu'un jour la majeure partie des dépenses faites pour la recherche d'intérêt public prendra la forme de subventions aux universités et aux entreprises privées plutôt que d'être des dépenses ministérielles directes?

M. Archibald : Non. J'espère vraiment que nous commencerons à trouver un meilleur équilibre entre les investissements dans les ressources aux hôpitaux universitaires et les ressources scientifiques des ministères fédéraux. L'investissement d'Agriculture et Agroalimentaire Canada représentent environ 47 p. 100 de l'investissement total en recherche agricole au Canada. Je pense qu'il est important que nous continuions d'assurer ce rôle important. Si on ajoute les autres investissements faits par le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux, la recherche financée par le secteur public atteint près de 83 p. 100. Par conséquent, l'agriculture se distingue un peu des autres produits de base. Il y a un besoin énorme en termes de bien collectif. Notre présence constante est essentielle et je crois que nous devons continuer d'être une ressource majeure parmi les ministères à vocation scientifique et auprès de nos partenaires universitaires. Il n'est pas nécessaire d'opter pour l'un ou l'autre. Le partenariat solide ne date pas d'aujourd'hui et je veux le voir se développer.

Le sénateur Callbeck : Je vous remercie pour votre présentation de ce soir. J'ai apprécié vous entendre mentionner que l'Île-du-Prince-Édouard aurait un nouvel institut. Je veux vous poser une question à ce sujet car au moment où le projet a été annoncé, on a beaucoup parlé du fait qu'il y aurait une grande collaboration entre le centre de recherche, le collège de médecine vétérinaire, l'université, le centre des techniques alimentaires et le nouvel institut. Y a-t-il eu d'autres discussions à ce sujet ou est-on passé à une autre étape?

M. Archibald : Je vous remercie d'avoir apporté ce point, car je considère qu'il s'agit d'une excellente opportunité sur laquelle nous allons continuer de travailler vigoureusement. En fait, j'étais à Charlottetown il y a environ une semaine et demie pour rencontrer des représentants du Conseil national de la recherche et j'ai aussi rencontré le président et le vice-président de la recherche de l'Université de l'Île-du-Prince-Édouard. Nous sommes très contents d'avoir l'occasion d'associer quelques-uns de nos projets de recherche en agronomie avec certains objectifs du Conseil national de la recherche, et d'établir des liens avec la santé humaine et la faculté de médecine vétérinaire de l'Université de l'Île-du- Prince-Édouard, qui rénove présentement ses installations dédiées à certains aspects de la santé des animaux.

Il n'y a aucun doute que dans les six derniers mois, le ministère a fait face à de nombreux problèmes ayant monopolisés le temps de nombreux employés, et que nous n'avons peut-être pas accordé autant d'attention que nous l'aurions voulu à ce projet, mais notre engagement demeure le même. En fait, celui qui est assis derrière moi, monsieur Ted Van Lunen, vient de Charlottetown. Il travaille présentement avec moi en vertu d'une affectation intérimaire, mais le 1er mars il retournera à l'Île-du-Prince-Édouard pour travailler à temps plein sur ce projet. Nous voulons lui accorder une grande priorité. Nous considérons une approche par étapes, selon laquelle nous affecterions d'abord un petit nombre de chercheurs à la nouvelle installation. Dans la deuxième phase, nous voulons assigner un plus grand nombre de chercheurs à cet endroit. Grâce aux trois participants, et à l'Agence canadienne d'inspection des aliments qui est aussi présente à cet endroit, nous pensons que la province et les Maritimes pourront compter sur un puissant cadre de recherche.

Le sénateur Callbeck : C'est formidable d'entendre cela.

Je suis originaire d'une province agricole et je sais que certains producteurs pensent que les recherches réalisées par Agriculture Canada de s'adressent pas vraiment à leurs besoins. Comment consultez-vous les producteurs? Comment participent-ils?

M. Archibald : Leur participation se fait de plusieurs façons, sénateur. Je pense que ce que nous entendons présentement découle du fait qu'il faut s'habituer à travailler différemment. Auparavant, chaque centre de recherche avant son propre groupe consultatif. Les producteurs de l'Île-du-Prince-Édouard pouvaient ainsi s'adresser à ce groupe et ils avaient l'impression de contribuer directement au travail effectué dans ce centre. C'était important et constructif.

Nous sommes passé à une approche nationale et nous avons mis en œuvre des stratégies nationales qui augmentent en fait les ressources qui se penchent sur les problèmes auxquels les producteurs de l'Île-du-Prince-Édouard et d'ailleurs font face. Nous sommes en train de remettre en place des liens de ce genre avec la communauté afin de s'assurer que les producteurs ont la possibilité d'apporter des suggestions. À un niveau plus élevé, nous avons un Conseil consultatif des sciences. À un niveau plus spécifique, il existe des tables rondes sur la chaîne de valeur des produits de base. Nous sommes en train de mettre sur pied des conseils consultatifs qui seront associés aux quatre principaux programmes nationaux auxquels les producteurs pourront expliquer leurs problèmes et leurs défis et qui s'assureront que toutes les ressources ministérielles sont utilisées s'occuper de leurs besoins.

Bien que le système soit différent de celui qui était utilisé auparavant, je pense qu'il sera plus utile aux producteurs de toutes les régions. Il est important que nous fassions mieux connaître le nouveau système et notre volonté — et notre détermination — d'obtenir leurs commentaires à mesure que nous allons de l'avant.

Le sénateur Callbeck : Je suis content d'apprendre ça. Qu'en est-il du calendrier d'exécution?

M. Archibald : Trois des mesures mentionnées sont déjà en place. Les groupes consultatifs associés aux quatre programmes nationaux seront mis sur pied au cours des six prochains mois. La première réunion du Conseil consultatif des sciences a eu lieu en décembre.

Ils nous ont parlé du fait qu'ils aimeraient voir plus de communications et de consultations dans le processus. Nous travaillons avec les gouvernements provinciaux et les représentants des universités à un organisme connu sous le nom de Conseil de recherches agroalimentaires du Canada, qui existe depuis plusieurs années. Nous voulons actualiser et réorganiser cet organisme. Nous espérons qu'il sera prêt en juin. Le calendrier de réalisation prévoit une période de trois à six mois.

Le sénateur Tkachuk : Combien d'argent dépensons-nous? Le Service d'information et de recherche parlementaires nous a fourni quelques documents sur les dépenses effectuées par le Canada et les États-Unis dans la recherche publique entre 1990 et 2001. Par rapport au PIB, le pourcentage investi par le Canada a diminué tandis que celui des États-Unis a augmenté. Avec tout ça, avons-nous vraiment augmenté les sommes investies dans la recherche?

M. Archibald : Le budget est demeuré relativement stable au cours des cinq dernières années. Il y a eu une petite augmentation l'année dernière, mais en général il n'y a pas eu de changement dans les cinq dernières années.

Le sénateur Tkachuk : Vous voulez dire entre 1999 et 2004?

M. Archibald : Oui.

Le sénateur Tkachuk : Le niveau est le même qu'en 2001?

M. Archibald : Oui, approximativement.

Le sénateur Tkachuk : Ce qui veut dire que nous sommes au même niveau qu'en 1990?

M. Archibald : Je ne suis pas certain du niveau de 1990.

Le sénateur Tkachuk : C'est probablement exact. Lorsque le gouvernement parle de faire les choses différemment, à mon avis, cela signifie toujours centraliser au même endroit. D'après votre réponse à la question du sénateur Callbeck, c'est ce que vous semblez faire.

L'avantage des centres de recherche était qu'ils offraient aux producteurs locaux la possibilité de discuter avec les chercheurs et les responsables des études effectuées dans leur domaine. Je ne peux pas concevoir comment vous pourrez faire cela à une échelle nationale. Avez-vous la ventilation des sommes consacrées à la recherche sur les céréales, les légumes, le bétail, les œufs et la volaille? Auriez-vous, par hasard, ces chiffres avec vous, pour que nous puissions les comparer avec ceux des dix dernières années?

M. Archibald : Je n'ai pas les chiffres des dix dernières années, mais je peux les obtenir et vous les transmettre, sénateur. J'ai la ventilation des dépenses selon les produits de base. Par exemple, la recherche sur les céréales reçoit environ 15 p. 100 du budget actuel. Le budget d'exploitation est d'environ 28 millions de dollars. Je ne sais pas si vous avez mentionné le porc, mais ce domaine reçoit 4,3 millions de dollars, soit près de 2,4 p. 100 du budget d'exploitation global. Nous avons les ventilations par produit de base, par province et par installation.

Je ne veux pas sous-estimer l'importance de la contribution locale au niveau des centres de recherche, mais l'avantage du système que nous avons mis en œuvre est que nous pouvons maintenant nous assurer que, si nous travaillons sur un problème relié à l'industrie laitière, nous allons aider l'industrie en utilisant toutes les ressources à notre disposition dans tout le pays d'une manière coordonnée. Auparavant, nous n'avions pas ce degré de coordination. Le travail accompli à Lennoxville, au Québec, n'était pas aussi étroitement lié qu'il aurait dû l'être au travail fait en Colombie-Britannique, même si les mêmes aspects étaient étudiés, comme par exemple, les questions touchant la protection des animaux.

Nous avons agi pour assurer l'utilisation la plus fructueuse des ressources dont nous disposons à l'échelle nationale. Lorsque les producteurs laitiers du Canada nous informent qu'ils ont besoin de recherche dans un aspect précis de la nutrition, des soins aux animaux ou dans un autre domaine, nous disposons de ressources plus intégrées et cohérentes pour étudier leurs problèmes.

Nous essayons d'utiliser nos ressources de la façon la plus efficace possible afin de mieux répondre aux besoins du groupe avec lequel nous travaillons.

Le sénateur Tkachuk : Les scientifiques ont-ils beaucoup de liberté dans le choix des recherches qu'ils veulent faire en agriculture?

M. Archibald : En tant que ministère à vocation scientifique, nous sommes plus centrés sur notre mission qu'une université. En d'autres mots, nos priorités de recherche sont d'une importance vitale pour nous. Prenez l'exemple du fusarium, une maladie des céréales comme le blé et l'orge qui est responsable d'importantes pertes économiques et qui peut causer des problèmes de santé humaine et animale. Le ministère considère qu'il s'agit d'une question importante sur laquelle nous devons travailler, et dans les cinq prochaines années, nos phytogénéticiens et nos pathologistes feront un effort concerté pour trouver des façons d'incorporer une résistance dans les variétés de blé ou des techniques pour gérer ce problème.

C'est une priorité et nous demanderons à nos chercheurs de travailler dans ce sens. Ce qui ne veut pas dire que s'ils font une découverte par serendipité tout en travaillant sur ce problème, que cette découverte ne sera pas exploitée. Si une découverte peut apporter des avantages économiques aux agriculteurs, nous envisagerons bien sûr de l'examiner plus en profondeur, mais nous sommes plus centrés qu'un programme universitaire où les chercheurs ont plus de liberté dans le choix des programmes qui les intéressent. C'est la différence entre un ministère à vocation scientifique et l'univers académique.

Le sénateur Tkachuk : N'êtes-vous pas préoccupé du fait qu'il y aura beaucoup de pression politique maintenant que tout a été si bien centralisé? Lorsque l'on éparpille l'argent, la marmite est moins grosse. Vous comprenez ce que je veux dire. Il y a beaucoup plus de circonscriptions en Ontario qu'en Saskatchewan. Nous pourrions effectuer d'importantes recherches sur le maïs et l'industrie laitière et pas suffisamment sur les céréales ou la vallée de l'Okanagan. Là-bas, les gens votent pour les conservateurs. Les libéraux n'ont pratiquement aucune chance de gagner à cet endroit, alors peut- être que cela ne vaut pas la peine de s'en occuper. Cette question vous préoccupe-t-elle? Moi, elle me préoccupe.

M. Archibald : Je ne veux pas donner l'impression que tout l'argent de la recherche est centralisé.

Le sénateur Tkachuk : C'est ce que vous me dites. Je veux seulement m'en assurer.

M. Archibald : Je ne veux pas vous laisser cette impression. Les fonds pour la recherche sont alloués à nos diverses installations. Nous avons quatre principaux programmes nationaux. Les quatre chefs de direction générale responsables de ces programmes se trouvent à quatre endroits différents au pays. Il y en a un à Summerland, un autre à Lethbridge, un à Ottawa et le dernier à Kentville. Nous avons 10 directeurs des sciences, qui travaillent également à différents endroits au Canada, qui doivent s'assurer que nous produisons des résultats scientifiques dans leur domaine particulier, qu'il s'agisse de l'amélioration des plantes ou de zootechnie. La gestion, l'argent et les endroits où se fait le travail sont en fait répartis dans l'ensemble du pays.

La différence, sénateur, est que dans le passé, chaque centre avait une certaine autonomie pour travailler sur ses besoins particuliers et qu'il n'y avait pas de concertation. Nous avions 19 différents emplacements et cela ne constituait pas la meilleure façon possible d'utiliser nos ressources. Maintenant, le directeur responsable des programmes d'élevage doit s'assurer que ces programmes, qu'ils soient réalisés à l'Île-du-Prince-Édouard, en Ontario, en Saskatchewan ou en Alberta, sont coordonnés afin de mieux répondre aux besoins de ce secteur, parce qu'il y a plusieurs similitudes dans l'ensemble de compétences dont nous avons besoin.

Je ne veux pas donner l'impression que tout est sous contrôle central, parce que cela n'est pas le cas.

Le sénateur Tkachuk : Existe-t-il une politique intentionnelle de ne pas financer la recherche par l'entremise des universités ou d'autres institutions privées mais plutôt d'engager les scientifiques nous-mêmes? Le gouvernement n'aurait-il pas plus de souplesse s'il n'employait pas ces chercheurs, ou s'il en employait moins, et s'il laissait les universités, les entreprises, et cetera, assurer une plus grande partie de la recherche?

M. Archibald : Présentement, nous ne disposons d'aucune méthode pour encourager les chercheurs scientifiques dans les universités en soi. Nous ne sommes pas un organisme subventionnaire; nous n'avons pas cette capacité.

Nous avons un programme, le Programme de partage des frais pour l'investissement, dont le budget annuel dépasse un peu 20 millions de dollars. Ce programme nous permet d'investir l'équivalent des sommes versées par l'industrie pour réaliser des projets d'intérêt commun. Par contre, nous n'avons pas de programme similaire avec les universités ou les hôpitaux d'enseignement universitaire du pays.

C'est un domaine dans lequel nous voudrions nous améliorer, afin que lorsque nous nous engagerons dans un partenariat, par exemple avec l'Université de l'Île-du-Prince-Édouard ou l'Université de l'Alberta, nous soyons en mesure de mieux gérer cette relation. Le fait de demeurer des entités séparées crée de nombreux défis.

Le sénateur Oliver : Le sénateur Tkachuk et moi avons beaucoup en commun. Il me semble qu'il a posé plusieurs questions que je voulais vous poser. Je vais juste apporter un dernier point de vue sur les principales questions qu'il vous a posées.

Étant donné la quantité de recherches que vous effectuez partout au Canada, avec plusieurs chercheurs, plusieurs laboratoires établis sur 30 000 différents hectares dans différents centres de recherche, quelle méthode utilisez-vous pour éviter la redondance et les chevauchements? Plus particulièrement, lorsque vous avez répondu au sénateur Tkachuk, vous avez dit des phrases comme « nous essayons d'utiliser nos ressources de la façon la plus efficace possible et d'adopter une nouvelle approche intégrée ». Aucune de ces expressions n'est assez précise pour m'aider à comprendre comment vous allez éviter le chevauchement des recherches effectuées en Nouvelle-Écosse ou en Colombie-Britannique, ou dans l'un de vos nouveaux centres de l'Île-du-Prince-Édouard.

Parlez-moi plus concrètement. Vous dites que vous utilisez les ressources d'une façon plus rationnelle et que vous adoptez une approche intégrée. Mais que faites-vous précisément pour empêcher les chevauchements et que six scientifiques ne travaillent pas chacun de leur côté sur le même problème en gaspillant l'argent des contribuables canadiens?

M. Archibald : Un des moyens que nous avons mis en œuvre au ministère pour aborder ce problème est ce que nous appelons les « projets à bénéfices ». Nous avons un projet à bénéfices particulier sur le développement de cultivars du blé d'automne. Le ministère s'engage à allouer, dans ce cas, 1,9 million de dollars à ce projet particulier. Nous identifions l'ensemble des compétences dont nous avons besoin dans tout le pays. Pour réaliser ce genre de projets, nous devons pouvoir compter sur des phytogénéticiens à deux ou trois emplacements, des pathologistes et des entomologistes. Les résultats, le soutien et la supervision sont concentrés vers ce projet à bénéfices.

Il y a 87 projets à bénéfices en cours au ministère. Nous identifions les emplacements, les ressources humaines, le budget d'exploitation et le budget d'équipement associés à la réalisation de ces projets. Peu importe que les projets touchent le bien-être des animaux, l'agriculture biologique ou l'horticulture, à titre d'exemples, c'est la procédure que nous avons adopté pour résoudre cette question. Ce fut l'une des meilleures occasions qui s'est présentée au ministère pour mieux associer différents intervenants dans divers emplacements et installations au pays.

L'établissement des priorités et des budgets, ainsi que la gestion de ces budgets pour les installations, afin qu'ils sachent que l'argent est disponible pour la réalisation des activités, est une façon d'empêcher le chevauchement et, encore plus important, d'éliminer les lacunes qui auraient pu survenir.

Le sénateur Oliver : J'espérais que vous nous diriez que vous utilisez déjà des programmes informatiques assez avancés pour permettre d'effectuer un suivi des recherches en cours, et même le niveau et la portée d'un projet particulier. N'utilisez-vous pas l'informatique pour effectuer la gestion des projets et éviter les chevauchements?

M. Archibald : Absolument, sénateur. Je vous remercie d'avoir soulevé ce point. Nous travaillons présentement à l'élaboration d'un « système d'aide à la décision » qui fondamentalement rassemblera les éléments essentiels à la gestion des projets. Il regroupera, évidemment, le budget, les ressources humaines, les mesures du rendement ainsi que les étapes prévues, afin que d'un point de vue de gestion, nous puissions examiner les ressources mises en œuvre et, après six mois, s'attendre à ce genre de résultats. Il devrait y avoir des procédures de production de rapports afin que le SMA à la recherche ou ses collègues au sein du ministère puissent déterminer si nous sommes sur la bonne voie. Y a-t-il des problèmes? Existe-t-il des circonstances atténuantes qui demanderaient une réaffectation des ressources et des ajustements quant aux résultats. C'est ce genre de système que nous voulons obtenir afin rassembler le logiciel de gestion de projets avec les ressources humaines et financières ainsi que les autres actifs pour vraiment assurer l'utilisation la plus efficacement possible des ressources publiques.

[Français]

Le sénateur Gill : Je ne sais pas si la question a déjà été posée, mais j'aimerais savoir le genre de relations que vous avez avec le Québec, en particulier — s'il y en a.

Deuxièmement, j'aimerais approfondir une question posée par le sénateur Tkachuk, concernant les universités. Quel genre de collaboration avez-vous avec les universités, pour les projets de recherche en agriculture?

[Traduction]

M. Archibald : Nous avons établi des liens solides avec de nombreux groupes actifs au Québec. Du travail a été réalisé avec le gouvernement provincial et les organismes de recherche qu'il a créés pour s'assurer que nous nous penchons sur les besoins des producteurs de cette province.

Il s'agit d'un domaine très important pour nous. Nous avons un rôle très important en matière de recherche dans cette province. Nous avons une collaboration de longue date avec les universités. Nous commençons à chercher des moyens pour renforcer notre collaboration à plusieurs emplacements. Dans la province de Québec, par exemple, il y a à l'Université Laval un solide programme sur l'industrie laitière, qui se penche plus spécialement sur les produits laitiers et les questions de salubrité des aliments. Nous travaillons en étroite collaboration avec celle-ci.

L'Université compte aussi un nouveau centre de recherche sur les nutraceutiques et les aliments fonctionnels. Nous examinons comment nous pourrions associer nos recherches dans ce domaine aux travaux entrepris par l'Université Laval.

Nous tentons d'éviter les chevauchements avec nos partenaires. Comme je l'ai mentionné, l'Université Laval est clairement reconnue comme un chef de file mondial en recherche sur l'industrie laitière et les produits laitiers. Je crois qu'il est important que ce programme soit encouragé et non pas reproduit. Nous devons collaborer avec ces chercheurs pour s'assurer que ce type de travail soit financé et encouragé; il existe d'autres domaines, comme l'environnement, dans lesquels nous pourrions peut-être jouer un rôle plus important dans la province de Québec.

[Français]

Le sénateur Gill : J'ai vu, dans votre documentation, que le Canada est très dépendant des exportations à l'étranger. Sachant que le marché fluctue toujours, j'aimerais connaître les problèmes que nous pouvons rencontrer à cause de la dépendance que nous avons vis-à-vis les autres pays. Est-ce qu'on peut prévoir ce genre de chose, sur le plan international? On a un problème actuellement avec l'exportation du bœuf. Est-ce qu'on peut prévoir, éventuellement, dans quel domaine on peut avoir des problèmes? Parce qu'il faut que les gens d'ici s'orientent un peu en fonction des besoins éventuels futurs. Avez-vous fait des recherches à ce sujet?

[Traduction]

M. Archibald : Certainement, dans les secteurs de l'économie et des politiques du ministère, des recherches appréciables sont réalisées sur les questions comme les débouchés, les impacts et les tendances des marchés.

Du point de vue de la recherche, nous examinons constamment la science émergente que nous devrions voir venir ou être prêt à s'occuper de manière proactive. Une fois par an, je rencontre mes homologues dans le cadre d'une réunion « trétrapartite » avec les États-Unis, la France et l'Angleterre pendant laquelle nous étudions les tendances émergentes de la science. Nous discutons des aspects qui présentent des occasions de collaboration future.

M. Martel a beaucoup travaillé avec nous dans ce domaine pour élaborer une stratégie pour notre recherche internationale, pour travailler en collaboration, mais aussi pour examiner les problèmes qui pourraient survenir et s'assurer que nous avons l'information appropriée avant qu'ils n'apparaissent.

Du point de vue de la mise en marché et de l'économie, le ministère effectue un travail substantiel dans ce domaine, et du point de vue scientifique, il essaie d'identifier les problèmes ou les tendances futurs, comme l'arrivée d'espèces envahissantes et de nouvelles maladies sur lesquelles nous pouvons tenter de prendre les devants afin d'assurer le meilleur développement économique possible à nos producteurs.

La présidente : Vous avez mentionné Lethbridge, ce qui a suscité mon intérêt puisqu'il s'agit de ma ville natale. C'est dans cette ville que se trouve l'un de nos plus vieux centres de recherche, qui est maintenant le plus important au Canada. C'est un centre d'excellence, fait assez surprenant, spécialisé dans le bœuf.

Il y a plusieurs années, alors que le Canada vivait une situation financière plutôt difficile, il y avait beaucoup d'inquiétude à l'effet que le nombre de centres de recherche et d'installations qui existaient depuis longtemps puisse être réduit. Je crois qu'à ce moment, le ministre actuel des Finances, Ralph Goodale, était le ministre d'Agriculture et Agroalimentaire Canada. C'est à cette période que pour tenter de protéger la richesse du système partout au pays, que les centres d'excellence ont été créés. Cela a retenu mon attention parce que l'un d'eux est situé dans la région de Lethbridge.

Pouvez-vous nous parler de l'ensemble du pays et nous expliquer comment cette situation a évolué pendant presque une décennie? Comment cette décision a-t-elle amélioré notre situation, pas seulement à l'interne, mais aussi au niveau international, avec ces intérêts spéciaux envers une variété de domaines? Peut-être pourriez-vous nous parler de d'autres endroits qui sont devenus des centres d'excellence.

M. Yvon Martel, scientifique en chef, Affaires internationales, Agriculture et Agroalimentaire Canada : Honorables sénateurs, il y a 10 ans, nous avons étudié la possibilité de réorganiser les 19 centres de recherche en vue d'assigner à chacun un mandat national spécifique. Lethbridge se concentrerait sur le bœuf, Lennoxville, au Québec, sur la production laitière, Saint-Hyacinthe sur les aliments et Lacombe recevrait un mandat différent.

Ces mandats tenaient compte de la situation nationale. Simultanément, nous cherchions des moyens de travailler plus étroitement avec l'industrie. C'est à ce moment que fut lancé le Programme de partage des frais pour l'investissement qui visait à associer l'industrie aux centres de recherche. Le programme fonctionne bien depuis sa mise en œuvre. Maintenant, nous voulons faire passer ce concept à une autre étape en faisant de la gestion des scientifiques spécialisés dans le bœuf partout au pays un programme national.

Vous assistez maintenant à une évolution de la stratégie des centres d'excellence nationaux qui vise à regrouper les scientifiques du pays afin qu'ils puissent réaliser des recherches de niveau plus élevé et être plus efficace. Cela permet aussi de mieux utiliser l'infrastructure et d'éviter les chevauchements entre différents centres. Nous sommes un groupement national et notre stratégie est d'implanter des programmes nationaux dans ces centres.

La présidente : En même temps, rien n'empêche ces centres de poursuivre leur excellent travail dans certains domaines. Je pense encore à ma région, où une grande partie de la recherche portait sur les cultures, mais aussi sur un domaine qui sera un grand défi pour notre pays, et certainement pour l'Ouest canadien dans quelques années seulement, c'est-à-dire l'eau.

Les centres d'excellence ne sont pas spécialisés au point d'être incapables de poursuivre d'autres types de recherche qui, sans être particulièrement proche de leurs domaines d'expertise, ont tout de même un intérêt national.

M. Archibald : Absolument. Lethbridge est très bon exemple. Lethbridge est reconnu pour sa vaste expertise et ses ressources de recherche dans le domaine du bœuf. Par contre, ce centre est en train de développer une bonne expertise en environnement et nous examinons présentement des façons d'associer certaines de nos recherches avec celles effectuées par l'Université de Lethbridge, qui a créé un centre de recherche sur l'eau dont l'objectif est de cerner les problèmes et les considérations socioéconomiques associées à l'eau et de comprendre l'influence de l'accès à l'eau sur le développement du sud de l'Alberta et des autres régions.

Vous avez absolument raison. Le fait d'être associé à un domaine d'expertise particulier n'exclut pas la possibilité d'effectuer des recherches dans d'autres domaines ou dans d'autres secteurs ministériels.

La présidente : Il est rassurant de savoir cela. Dans la région de Lethbridge, si vous regardez le matin vers l'horizon et les montagnes, vous pouvez déjà constater que les glaciers diminuent rapidement. Les chercheurs universitaires m'ont dit que certains disparaîtront pendant ma vie. Il est intéressant de voir que le centre de recherche se penche sur ces questions.

D'autres personnes ont parlé des associations avec les institutions d'enseignement, les universités et autres. Nous avons en Alberta, une excellente institution, le Olds Agricultural College, près de Calgary. Cette institution réalise, je le sais pour y avoir travaillé sur un ensemble de sujets, des recherches de haute technologie exceptionnelles sur la fibre naturelle d'alpagas et d'autres questions du même genre.

Quelle proportion de votre réseau de collaboration s'adresse aux études réalisées par des institutions comme le Olds Agricultural College?

M. Archibald : Vous avez tout à fait raison. Certainement, le Olds Agricultural College est très avancé quant à son approche et à sa capacité d'aller au-delà de l'enseignement des techniques agricoles et de réaliser des programmes de recherche appliquée et des initiatives semblables. Lorsqu'une occasion d'association avec une institution comme le Olds Agricultural College se présente, nous la saisissons, comme par exemple, dans le cadre de nos projets sur les produits biologiques et les bioprocédés, qui portent sur des points comme celui que vous venez de mentionner : comment trouver de nouvelles applications pour les produits et les fibres? Nous essayons d'établir et d'encourager ces réseaux à se développer.

Je ne suis pas absolument certain, mais je crois que des représentants du Olds ont participé aux discussions associées à un de nos projets sur les nouvelles applications du lin. Je connais le collège. Je sais qu'il offre un programme progressif. Lorsque des occasions de ce genre se présentent, nous sommes intéressés à collaborer avec les personnes responsables.

Le sénateur Gustafson : Avez-vous des échanges avec des sociétés comme Monsanto?

M. Archibald : Voulez-vous dire des échanges d'employés?

Le sénateur Gustafson : Je veux dire des échanges au niveau de la recherche.

M. Archibald : Nous avions une entente en vertu du Programme de partage des frais pour l'investissement sur le blé Roundup Ready avec Monsanto. Cette entente a été interrompue. D'après moi, nous n'avons actuellement aucun programme avec Monsanto.

Le sénateur Gustafson : Avez-vous réalisé une étude économique sur la situation de l'industrie des céréales?

Cette année, je dirais que les producteurs ont une faible possibilité de récupérer leurs coûts de production. Une grande partie de cet argent ira à des sociétés comme Monsanto. Je parle ici d'environ 25 $ par acre pour l'achat des semences. Avez-vous étudié une situation de ce genre? Où s'en va l'industrie céréalière canadienne? Où s'en va l'argent?

M. Archibald : La direction de la recherche per se ne fait aucune recherche dans ce domaine. Par contre, nos responsables des politiques et des programmes font de nombreuses études sur les tendances, les coûts de production, le suivi, la modélisation des revenus futurs et des seuils de rentabilité dans ces domaines. Le ministère a aussi aidé à la mise sur pied d'un organisme appelé « Institut canadien de recherches stratégiques en agriculture » qui a été créé pour étudier les questions comme celles-ci, notamment sur les défis socio-économiques et la meilleure façon d'y réagir en tant que secteur.

Il est évident que l'agriculture a vécu plusieurs années de grands défis. Comment positionner cette industrie? Comment fournir les programmes de recherche scientifique? Comment aider les producteurs en utilisant des moyens justifiables et qui assurent les résultats voulus? Ce travail ne relève pas de la direction de la recherche, mais les responsables des politiques et des programmes effectuent assurément une quantité appréciable d'études sur ce sujet.

Le sénateur Gustafson : Le mandat de notre comité est de se pencher sur l'état actuel et les perspectives d'avenir de l'agriculture. Nous avons entendu les témoignages d'associations agricoles du Québec. D'après ce que j'ai entendu, cette province a le meilleur système agricole du Canada, sans exception. Cependant, ceci commence par le fait que les producteurs possèdent 49 p. 100 des quotas de lait, alors que ceux de la Saskatchewan n'en ont que 3 p. 100. Les producteurs ont une garantie, je n'essaie pas d'enlever ça au Québec. Lorsque les producteurs ont témoigné devant notre comité, ils nous ont dit que nous devrions nous organiser. Le gouvernement du Québec a investi beaucoup d'argent dans l'agriculture. Il est important d'examiner l'état de l'agriculture dans les différentes régions du pays.

La Saskatchewan éprouve de graves problèmes, tout comme certaines régions du nord de l'Alberta et de l'ouest du Manitoba, plus particulièrement lorsqu'il y a des périodes de gel. Examinez-vous toutes les régions du pays avant de déterminer où sont les problèmes importants qui demandent notre attention?

Tout dépend de l'économie, je suppose. Monsieur Martel, à titre de scientifique de niveau international vous devez connaître la situation mondiale et voir quelle direction le Canada devrait prendre.

Avec mes observations, je ne vois pas le bout du tunnel en ce qui concerne l'exportation des céréales. À moins d'un changement, comme un pays ayant une récolte déficitaire, nous avons d'énormes problèmes.

M. Archibald : Certainement, l'un des avantages d'avoir adopté une approche nationale en ce qui à trait au fonctionnement du ministère et de sa recherche est que nous sommes beaucoup plus étroitement liés à l'information venant de nos employés en commercialisation, en commerce et en politiques que nous l'étions auparavant. Vous avez raison, le secteur des céréales et des graines oléagineuses de notre pays est confronté à des défis de taille. Quelques possibilités de recherche peuvent offrir un peu d'espoir. Par exemple, toute l'industrie des légumineuses à grain connaît une croissance phénoménale dans l'Ouest canadien. Nos spécialistes en commerce nous informent qu'il existe des débouchés concrets pour l'exportation de pois chiche vers des pays comme l'Inde et certaines régions du Moyen- Orient. Les variétés que nous cultivons présentement ne conviennent pas parce qu'elles ne répondent pas aux besoins culinaires ou aux goûts. Nous transmettons cette information aux responsables de nos programmes de recherche et à nos phytogénéticiens pour voir s'il est possible de développer des variétés qui répondraient aux besoins de ce marché. Avec de la chance, de nouveaux débouchés seront créés et quelques agriculteurs de la Saskatchewan pourront faire ces cultures. Ces cultures pourraient avoir un rendement économique supérieur à celui des cultures actuelles.

Le sénateur Gustafson : Nous cultivions le pois sur notre ferme, comme quelques-uns de nos voisins, mais la plupart d'entre-nous abandonnons cette culture parce que les Américains ont doublé les subventions accordées à la culture du pois il y a deux mois. Il est impossible qu'un producteur de pois canadien puisse être compétitif avec les États-Unis. sur cette base.

M. Archibald : Sénateur, nous voulons déterminer quels sont les domaines où nous pourrions devancer la compétition. S'il y a un marché en Inde avec une demander réelle et que nous pouvons développer une variété qui réponde à la demande avant nos compétiteurs — avant les Américains ou les autres producteurs de pois chiche — nous aurons au moins la possibilité de conquérir un marché et d'augmenter le rendement.

Le sénateur Gustafson : C'est ce que nous avons fait pour le pendant 20 ans, mais cette époque est finie. Le prix de notre canola a chuté de 8,50 $ le boisseau à 5,35 $ le boisseau. Je viens d'entendre l'opinion de quelqu'un sur ce que nous devrions ensemencer et les agriculteurs sont présentement en train d'examiner cette proposition. Apparemment, nous devrions ensemencer du lin. Toute la récolte de lin de la Saskatchewan, de certaines régions du Manitoba et de l'Alberta a été perdue en raison du gel. Le boisseau de lin se vend 13 $. Par contre, il y a un avertissement : si la quantité de lin semé est telle que prévue, nous n'obtiendrions que 6 $ le boisseau en raison d'une surabondance. Il est facile de dire qu'il faut se diversifier; et c'est ce que nous avons fait.

Le sénateur Oliver : N'y a-t-il pas d'autres légumineuses que vous pourriez étudier?

Le sénateur Gustafson : Nous les avons toutes examinées.

Le sénateur Oliver : Nommez-en une que nous n'avons pas essayé de cultiver.

Le sénateur Tkachuk : Vous pourriez vendre des contrats à terme et prier.

Le sénateur Gustafson : Merci pour le bon conseil.

Le sénateur Kelleher : Je ne peux pas identifier un autre domaine commercial qui soit plus fortement politisé que l'agriculture. Malheureusement, j'ai appris que les aspects économiques sont souvent poussés du revers de la main. Nous n'appliquons pas nécessairement une saine économie dans le commerce des produits agricoles Par conséquent, il est important de comprendre ce qui ce passe du côté de l'économie. Est-ce que votre direction est en contact avec ce que l'on appelle le secteur du commerce de l'agriculture pour vous assurer que vous ne fonctionnez pas avec des objectifs croisés?

M. Archibald : Absolument. Le ministère a créé une série de conseils. Ces conseils ont pour objectif de rassembler les dirigeants des directions et ceux qui travaillent dans ces domaines afin de discuter des questions d'intérêt commun. Il y a un conseil de la commercialisation et du commerce, un conseil de la salubrité et la qualité des aliments, dont je fais partie, avec le SMA aux politiques, le SMA au commerce international et à la commercialisation et les chefs d'équipe des groupes responsables de la salubrité des aliments dans le commerce et de d'autres domaines. Nous réunissons toutes les ressources du ministère au même endroit pour parler des problèmes auxquels nous sommes confrontés. Évidemment, ma direction cherche à identifier les domaines où il y a des lacunes dans la recherche afin que nous puissions aider, mais sans être isolés ou dissociés des réalités commerciales qui existent. Il y a clairement dans ces discussions une compréhension de l'importance et du niveau de subventions allouées à la recherche par les différents ministères, de la direction stratégique adoptée et des domaines où le Canada a un avantage compétitif.

Un des grands avantages de la méthode de gestion que nous avons mise en œuvre est de rassembler tous ces aspects au lieu de s'attaquer aux problèmes de manière isolée. C'est là que toute la force de la nouvelle méthode se fait sentir. Nous parlons avec des gens qui travaillent dans le commerce, non seulement au sein du ministère, mais aussi dans d'autres ministères, notamment Commerce international Canada, et des gens qui travaillent dans le domaine scientifique pour s'assurer que les efforts sont aussi coordonnés que possible.

La présidente : Nous avons des séances assez intéressantes dans le cadre de notre examen des produits à valeur ajoutée. Ces discussions ont commencé avec le sénateur Oliver et le sénateur Gustafson, qui était le président du comité avant moi. Nous avons entendu parler de toutes sortes de domaines dont on ne parle pas nécessairement beaucoup d'habitude.

Un groupe était extrêmement enthousiasme et motivé de poursuivre sa croissance, mais peu importe à quelle porte ils ont frappé, ils n'ont jamais obtenu de bons conseils sur les moyens d'assurer la croissance de leur type d'agriculture au Canada : les agriculteurs biologiques. À une époque où le consommateur canadien, et certainement celui des États- Unis, s'intéresse aux produits biologiques, ces agriculteurs sentent qu'il y a une barrière devant eux, qu'ils ne peuvent pas avoir accès aux outils qui les aideraient à progresser, ce qu'ils veulent faire, sachant que le marché est présentement approvisionné par des produits importés des États-Unis.

Par vos systèmes de recherche et de politiques, avez-vous quelque chose à nous offrir et à leur offrir en termes de possibilités pour ces produits au Canada à un moment où nos communautés agricoles éprouvent toutes sortes de problèmes?

M. Archibald : Je suis content que vous ayez soulevé cette question. C'est un domaine où je vois de réelles possibilités à exploiter, et le ministère y travaille sur différents fronts.

Nous devons d'abord tenter d'aider l'industrie travailler à des définitions et à des homologations normalisées et ensuite faire reconnaître ces homologations aux États-Unis et en Europe afin d'apporter un peu de cohérence à cette méthode. Nos spécialistes en commercialisation et commerce travaillent très fort dans ce domaine.

Le personnel de la section des politiques et de l'économie a aussi réalisé quelques études qui démontrent clairement qu'il y a une grande occasion pour le remplacement des importations dans le domaine des produits biologiques. Nous voyons tous la visibilité grandissante des produits biologiques dans les épiceries, et une réelle possibilité s'offre aux agriculteurs canadiens d'approvisionner plusieurs de ces marchés.

Du point de vue de la recherche, nous commençons à étudier cette question beaucoup plus que nous le faisions auparavant, particulièrement pour les cultures horticoles, qui semblent susciter beaucoup d'intérêt, mais aussi les aspects qui relèvent plus des céréales comme produit de base et le bétail. Comme vous l'avez souligné, l'occasion est bien réelle. C'est aussi un domaine dans lequel je crois que nous pourrions associer notre travail avec des projets en cours dans d'autres ministères. Le Nova Scotia Agricultural College, à Truro, est en train de développer une expertise solide dans le domaine des produits biologiques, et nous voulons travailler avec eux dans ce domaine.

Nous voulons travailler à l'élaboration des homologations, aider l'industrie à mieux s'organiser afin de poursuivre son évolution, essayer de comprendre les nouveaux débouchés, et la production qui leur est propre afin d'informer les producteurs sur les meilleures méthodes de production de laitue biologique dans une zone climatique, de bœuf organique, etc. Il s'agit vraiment d'une grande occasion pour le remplacement des importations, ainsi qu'un atout économique pour les agriculteurs canadiens.

La présidente : Nous pourrions demander à nos attachés de recherche de vous faire parvenir les noms des personnes qui ont témoigné ici et qui aimeraient peut-être participer à votre travail.

Le sénateur Tkachuk : Monsieur Martel, après avoir écouté vos explications, je ne suis pas certain de comprendre comment les décisions en matière de recherche sont prises et comment elles seront prises dans le futur.

Je veux aussi ajouter une question sur l'ESB et la grippe aviaire. Est-ce que les sommes prévues dans le budget pour les travaux de recherche du ministère de l'Agriculture incluent la recherche sur l'ESB et la grippe aviaire? Faisons-nous ce genre de recherche ou cela relève-il du ministère de la Santé? Comment s'en occupe-t-on?

M. Martel : Comme l'a indiqué M. Archibald, un réseau de centres d'excellence pour la recherche sur l'ESB, pour lequel une somme de 5 millions de dollars a été prévue, est présentement en formation. Notre contribution se fera sous la forme de participation. Pour l'instant, Agriculture et Agroalimentaire Canada ne réalise pas beaucoup de recherche sur l'ESB. Présentement, cette recherche est surtout effectuée par les collèges de médecine vétérinaire et les intervenants en santé animale.

Le sénateur Tkachuk : Et la grippe aviaire?

M. Martel : C'est la même chose.

Le sénateur Tkachuk : Aurons-nous un centre d'excellence sur cette maladie? La somme de 5 millions vient-elle du budget normal ou est-ce une somme supplémentaire?

M. Martel : Le montant de 5 millions de dollars a été annoncé dans le budget de l'année dernière pour la création d'un nouveau centre d'excellence national, je crois qu'il y en a maintenant 21 ou 22. Il y en aura un de plus, spécialisé dans la recherche sur l'ESB.

Le sénateur Tkachuk : Vous avez parlé plus tôt de ces centres d'excellence. Notre présidente a parlé de Lethbridge, et vous avez dit que même si ce centre effectuait ces recherches, cela ne voulait pas dire qu'il devait cesser les autres recherches qu'il fait habituellement.

Laissez-moi éclaircir la question. Si nous disposons le même montant d'argent qu'il y a cinq ou dix ans, comme vous l'avez dit auparavant, ou peut-être moins d'argent, comment cela fonctionne-t-il? Comment ce centre peut-il faire ce qu'il faisait avant et s'occuper aussi des nouvelles recherches, ou est-ce que vous ne faites que mélanger le tout et les mêmes recherches se font à différents endroits? Il n'y a rien de neuf ici, vraiment. Ce n'est qu'un cadre de gestion pour faire ce qui se faisait auparavant, mais en utilisant l'appellation « centres d'excellence ».

M. Archibald : Je sais que ce n'est pas clair parce que nous utilisons le terme « centre d'excellence national » au ministère, mais le programme dont nous parlons à propos de l'ESB a été financé par des nouveaux dollars gérés par Industrie Canada. Il s'agit d'un montant de 5 millions de dollars par année pendant les sept prochaines années alloué à la recherche sur l'ESB et les EST.

Le sénateur Tkachuk : C'est 5 millions de dollars par année?

M. Archibald : Oui, une somme 5 millions par année pendant sept ans consacrée au développement d'expertise dans les universités et hôpitaux d'enseignement universitaire.

Comme M. Martel le disait, nous voulons assigner ce que nous avons pour essayer d'encourager ce projet, pour y être associé. Nous ne pouvons pas attirer cet argent au ministère, mais nous pouvons certainement de s'assurer que le travail que nous faisons soit complémentaire en termes des objectifs que nous essayons d'atteindre.

La présidente : Je vous remercie beaucoup. Ce fut une excellente soirée. Je pense que nous avons appris beaucoup. J'espère que vous serez disposé à revenir à un autre moment si nous en avons besoin.

M. Archibald : Ce sera avec plaisir.

La présidente : Honorables sénateurs, ceci termine cette partie de notre réunion.

Le comité poursuit ses travaux à huis clos.


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