Délibérations du comité sénatorial permanent de
l'Agriculture et des forêts
Fascicule 14 - Témoignages
OTTAWA, le mardi 17 mai 2005
Le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts, auquel est renvoyé le projet de loi C-40, Loi modifiant le Loi sur les grains du Canada et la Loi sur les transports au Canada, se réunit aujourd'hui à 16 h 5 pour examiner le projet de loi.
Le sénateur Joyce Fairbairn (présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La présidente : Honorables sénateurs, nous avons le quorum. Nous étudions le projet de loi C-40, Loi modifiant la Loi sur les grains du Canada et la Loi sur les transports au Canada.
Nous recevons ce soir comme témoin M. Wayne Easter, secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire. Le ministre regrette de ne pas pouvoir être ici. En ce moment même, il est en train de comparaître devant un comité de la Chambre sur le Budget principal de son ministère.
Nous recevons également M. Howard Migie, directeur général de la Direction générale des politiques stratégiques du ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire; M. Régis Gosselin, directeur du Service à l'organisme de la Commission canadienne des grains et M. John Dobson, coordonnateur principal de la politique de surveillance de grains à Transports Canada.
Monsieur Easter, la parole est à vous.
L'honorable Wayne Easter, C.P., député, secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire : Merci beaucoup. Je vous présente les excuses de M. Mitchell, qui comparaît devant un comité de la Chambre des communes sur le Budget principal des dépenses.
Le projet de loi C-40 modifie la Loi sur les grains du Canada et la Loi sur les transports au Canada. Depuis la décision rendue par un organe de l'Organisation mondiale du commerce le 27 septembre 2004, il est devenu nécessaire d'apporter ces modifications.
Le groupe spécial de l'Organisation mondiale du commerce a jugé que deux lois violaient les obligations de traitement national du Canada en vertu de l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce dans trois domaines. Deux d'entre eux relèvent de la Loi sur les grains du Canada. La première règle serait que nous avons besoin de la permission de la Commission canadienne des grains pour laisser entrer des grains étrangers dans des silos à grains agréés. La deuxième, c'est qu'il faut obtenir l'autorisation de la Commission canadienne des grains pour mélanger différents grades de grains dans les installations terminales ou de transbordement. Le troisième problème soulevé par le groupe spécial de l'OMC concerne la Loi sur les transports au Canada et nous oblige à étendre nos dispositions sur le traitement national aux grains étrangers. Nous devons englober les grains étrangers importés au Canada dans nos dispositions sur le plafond des recettes.
Le projet de loi C-40 est bref et précis. Il règle ces trois questions d'une façon que nous considérons efficace. Il y a eu des consultations avec l'industrie avant le mois de décembre. J'ai mené des rencontres de consultation sur le revenu agricole dans l'Ouest en janvier, et nous en avons profité pour discuter de ce projet de loi avec les producteurs, les gens de l'industrie et des représentants des compagnies de chemin de fer de la Colombie-Britannique, de l'Alberta, de la Saskatchewan et du Manitoba, donc il y a eu de vastes consultations sur le sujet.
Une bonne modification a été apportée au projet de loi qui vous est présenté. Diverses inquiétudes ont été exprimées sur la Commission canadienne des grains pendant nos audiences dans l'Ouest du Canada. Les gens aimeraient que nous discutions davantage de la Commission. Plusieurs témoins qui ont comparu devant le comité de la Chambre des communes l'ont dit aussi. Par conséquent, le projet de loi a été modifié pour favoriser des discussions plus en profondeur sur la Commission canadienne des grains au cours de la prochaine année.
Il est primordial que ce projet de loi soit adopté assez rapidement. Si nous ne conformons pas nos lois au jugement de l'OMC d'ici le 1er août, les États-Unis pourraient légalement user de rétorsion contre divers produits. Nous ne voulons pas leur en donner l'occasion. Il est donc primordial que ce projet de loi acquière force de loi le plus rapidement possible, pour que nous respections pleinement la décision de l'OMC.
Madame la présidente, nous sommes prêts à répondre à vos questions.
La présidente : Merci beaucoup, monsieur le ministre.
Le sénateur Callbeck : Je vous souhaite la bienvenue. Il est agréable de recevoir un prince-édouardien parmi nous.
En ce qui concerne les chemins de fer, je crois comprendre que les représentants du CP ont exprimé des préoccupations au sujet des répercussions potentielles de ce projet de loi sur leurs recettes tirées d'activités aux États- Unis, alors que le CN ne s'est plaint de rien de tel. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi?
M. Easter : Je vais demander à M. Migie de vous en parler plus en détail, mais le réseau de transport de grains qui sera le plus touché est celui du Canadien Pacifique, parce qu'il se trouve tout près de la frontière américaine. Dans nos discussions au Manitoba, de même que devant le comité de la Chambre des communes, Canadien Pacifique a proposé une modification qui rétrécirait encore davantage la portée des dispositions sur le traitement national des grains étrangers qui entrent au Canada.
Le gouvernement pense que s'il ouvre la porte à un resserrement de la Loi sur les transports au Canada, il s'expose à d'autres poursuites des États-Unis. Par conséquent, nous avons décidé de garder sa portée aussi large dans ce projet de loi.
En toute équité pour Canadien Pacifique, je dois mentionner que l'entreprise craint que cela influence sa capacité de respecter les engagements canadiens en matière de wagons-trémies. Cependant, il se dégage de nos discussions avec les gens du commerce de grains et de l'industrie que la plupart croient que ce ne sera pas le cas.
M. Howard Migie, directeur général, Direction générale des politiques stratégiques, Agriculture et Agroalimentaire Canada : Il est possible que les États-Unis exportent du grain au Canada en raison de la modification du plafond des recettes, et le transport se ferait probablement sur le réseau de CP, avec les ressources de CP.
Il y a une différence de point de vue entre les entreprises céréalières et le CP. Les entreprises céréalières croient que le changement sera négligeable, parce que les coûts supplémentaires à assumer pour la ségrégation des grains américains dans notre système contrebalanceraient toute différence dans les tarifs marchandises.
Il est possible que du grain américain arrive au Canada dans le contexte de ces changements, probablement par le CP, mais nous ne considérons pas la chose comme un problème. Nous ne pensons pas qu'il va y avoir une énorme quantité de grains et nous sommes convaincus que le marché peut l'absorber par les tarifs marchandises et les frais de silo.
Le sénateur Hubley : Bienvenue, monsieur Easter. C'est un plaisir de vous recevoir.
Les nouvelles exigences de rapport et d'identification permettront à la Commission canadienne des grains de faire un suivi des grains étrangers et de veiller à ce que les grains étrangers isolés ou mélangés à des grains canadiens ne soient pas identifiés comme des grains canadiens. Le règlement découlant du paragraphe 116(1) de la Loi sur les grains du Canada sera mis en oeuvre pour veiller à ce que l'origine des grains ne soit pas mal indiquée dans le système de manutention des grains du Canada.
Envisageons-nous un étiquetage de pays d'origine dans le système de manutention des grains?
M. Easter : La réputation du Canada dans le monde n'a pas son pareil, et cela est attribuable en bonne partie à la Commission canadienne des grains et à l'intégrité du système d'approvisionnement en grains canadien. Lorsque nous affirmons qu'un grain est d'un certain grade, c'est le grade qu'il a sur le marché international. Nous devons veiller à ce que ces modifications ne compromettent d'aucune façon l'intégrité du système d'approvisionnement en grains canadien, et nous pensons qu'elles ne la compromettent pas.
En ce moment, il faut demander une autorisation pour importer des grains étrangers et pour en mélanger à des grains canadiens. Une fois ces modifications adoptées, les entreprises devront en faire rapport. Donc même si le système est un peu différent, les mêmes obligations s'appliqueront dans les deux cas. Nous croyons ainsi protéger l'intégrité de notre système.
Pendant les rencontres que nous avons eues avec les producteurs, ils nous ont dit qu'ils voudraient bientôt un système de notification à la frontière. En ce moment, l'Agence canadienne d'inspection des aliments, la Commission canadienne des grains, l'Agence des services frontaliers du Canada, ainsi que d'autres organismes sont présents à la frontière, et la Commission canadienne du blé revendique haut et fort leur concertation. Nous devons mettre en place un système de notification à la frontière pour que tout le monde sache ce qui se passe et que tout soit conforme au jugement du groupe spécial de l'OMC.
M. Régis Gosselin, directeur, Services à l'organisme, Commission canadienne des grains : Nous n'avons pas l'intention de créer un système de pays d'étiquetage. Nous allons sommer les exploitants de silos de nous déclarer l'origine des grains, qu'ils soient canadiens ou étrangers. Nous voulons suivre les mouvements de grain dans le système en fonction des rapports qu'ils vont nous donner. Ils devront nous indiquer l'origine du grain pour que nous leur octroyions un certificat d'inspection officiel. Nous allons également analyser le blé et l'orge au moment du chargement des véhicules afin de veiller à ce qu'il n'y ait pas de variétés non enregistrées dans les conteneurs.
Nous pensons que les mesures que nous mettons en place seront adéquates pour que les grains étrangers ne soient pas mélangés aux grains canadiens.
Le sénateur Mercer : C'est un plaisir de vous recevoir ici.
Le sénateur Hubley a parlé de « pays d'origine » et vous avez répondu par l'expression « pays d'étiquetage ». J'ai très peur que l'étiquetage sur le pays d'origine nous pousse sur une pente glissante. Je sais que dans ce cas-ci, nous imposerions la chose aux produits importés ici plutôt qu'à ceux que nous exportons. Je crains qu'on nous impose ensuite un étiquetage lorsque nous exportons du bœuf, du poisson et d'autres produits.
Si l'on pense au bœuf en particulier, si l'étiquetage par pays d'origine devient la norme, je crains que le consommateur du New Jersey, de New York ou de Boston choisisse le steak étiqueté « élevé aux États-Unis » plutôt que le steak de qualité de l'Alberta qui se trouve dans le comptoir juste à côté du bœuf du Montana. Jusqu'ici, nous avons évité l'étiquetage du pays d'origine parce que c'est à notre désavantage, compte tenu que nous exportons beaucoup.
Je comprends qu'il faut que nous puissions savoir quand d'autres grains ont été mélangés à nos grains, mais nous sommes-nous demandé si ce n'était pas là une pente très glissante?
M. Easter : Vous abordez là un sujet beaucoup plus vaste que l'objet de ce projet de loi. Par ce projet de loi, nous essayons de veiller à ce que le même traitement s'applique aux grains étrangers importés au Canada, qu'ils soient mélangés ou non à des grains canadiens. Nous voulons être en mesure de garantir à nos consommateurs de blé de force roux du printemps canadien no 1 qu'il s'agit effectivement de blé de force roux du printemps canadien no 1. Vous abordez un sujet beaucoup plus vaste, sur lequel le projet de loi C-40 n'aura aucune incidence à mon avis. Cependant, je pense que les Américains choisiraient d'acheter du porc canadien plutôt que du porc américain.
Le sénateur Mercer : Peut-être bien, mais je ne pense pas que nous pourrons limiter l'étiquetage à un seul produit, même si nous avons la réputation d'élever le meilleur porc au monde. Nous devons tenir compte de toute l'industrie agricole. Nous entendons parler de la promotion que fait R-CALF au Montana pour vendre son bœuf dans les grandes villes des États-unis, en concurrence avec nous. C'est un grand problème. Je conviens que l'étiquetage du porc pourrait être à notre avantage, mais l'étiquetage de tous les produits pourrait être à notre désavantage.
Je comprends bien que ce n'est pas l'objet de ce projet de loi, mais ce peut être une pente glissante et nous devons y réfléchir avant de nous engager dans cette voie.
M. Easter : Il ne fait aucun doute que nous devons y réfléchir. M. Migie a participé à des discussions à ce sujet.
M. Migie : Le projet de loi C-40 n'est pas un prolongement de ce que nous avons eu dans le passé. De certaines façons, nous appliquons la même politique qu'avant. La décision de l'OMC a rendu bien clair que nous avons le droit de faire ce type de distinction lorsque nous exportons nos produits canadiens, pour que les gens sachent quelles sont les qualités de notre grain à la cuisson. Nous avons le droit d'isoler nos grains.
Ce projet de loi contient les mêmes dispositions qu'auparavant. Il ne s'applique pas aux produits envoyés directement des États-Unis vers une meunerie du Canada ou un utilisateur. Cependant, si le grain aboutit dans le système de silos et qu'il est susceptible d'être exporté, c'est un moyen de faire en sorte que le consommateur sache que les caractéristiques à la cuisson seront celles que nous indiquons. Il n'aurait aucun moyen de le savoir si nous mélangions nos produits sans faire attention.
Cela n'a rien à voir avec l'étiquetage de produits destinés au consommateur canadien ou américain. Il s'agit essentiellement de l'intégrité de nos grains pour les exportations.
M. Gosselin : Il y a déjà une bonne quantité de grains américains dans le système. Par exemple, il y a des grains américains qui passent par nos ports ou qui sont acheminés vers le Saint-Laurent par des silos situés le long du Saint- Laurent. Ce produit est actuellement identifié comme américain et le produit canadien est identifié comme canadien. Nous maintenons seulement des règles équitables en ce qui concerne les déplacements. Rien dans ce projet de loi ne va changer ce que nous faisions par le passé.
La présidente : Je pense que la Western Grain Elevator Association s'est exprimée avec verve sur le sujet aux séances du comité de la Chambre des communes.
[Français]
Le sénateur Gill : Je comprends qu'on veuille améliorer la situation, ici, au pays concernant le traitement des grains et des céréales. Les Américains font-ils quelque chose de semblable? Font-ils l'équivalent de ce qui se fait ici ou s'ils font mieux?
M. Migie : Du point de vue du transport des grains, nous utilisons maintenant le système américain. La Commission canadienne du blé, par exemple, utilise le système américain pour transporter le blé aux Caraïbes ou à des destinations en Amérique du Sud. Les Américains peuvent aussi utiliser notre système.
Pour la Commission canadienne des grains, il n'y a pas de contrepartie.
M. Gosselin : Il y a des grains canadiens qui sont régulièrement transportés par les États-Unis. Je pense en particulier au canola provenant de l'Ouest Canadien. La denrée est transportée via le système ferroviaire et est acheminée au Mexique ou aux États-Unis. C'est les États-Unis qui transige les denrées.
[Traduction]
M. Easter : Ces trois questions (l'autorisation d'importer des grains, l'autorisation de mélanger des grains et les limites du plafond des recettes dans le traitement national) font partie des choses que les États-Unis ont contestées devant le groupe spécial de l'OMC. Le grand point de litige concernait la Commission canadienne du blé, que les Américains ont contesté à diverses reprises et au sujet duquel nous avons toujours gagné. Les pertes étaient considérées mineures pour nous.
Dorénavant, nous sommes tenus d'apporter ces changements pour que nos lois soient conformes à la décision du groupe spécial de l'OMC. Il ne s'agit pas d'améliorer ou d'empirer le système; il s'agit de le rendre conforme à la décision du groupe spécial de l'OMC. Nous pensons le faire d'une façon qui protège encore l'intégrité de notre système de grains de qualité supérieure et de notre système d'approvisionnement en grains.
[Français]
Le sénateur Gill : Il y a quelques années ou quelque mois, le Canadien national a essayé de faire des arrangements avec des compagnies de chemin de fer. Est-ce que cela a abouti? Quels ont été les résultats? Ces arrangements favorisent-ils le transport entre les États-Unis et le Canada?
[Traduction]
M. John Dobson, coordonnateur principal, Politique de surveillance du grain, Transports Canada : En 1999, on a proposé une fusion du CN avec Burlington Northern, Burlington Northern étant l'une des plus grandes compagnies de chemin de fer des États-Unis. C'est le Surface Transportation Board des États-Unis qui a empêché cette fusion principalement en raison de problèmes liés à des fusions précédentes de grands chemins de fer aux États-Unis. Je dois toutefois mentionner que le CN et le CP ont tous deux des activités aux États-Unis et qu'à toutes fins pratiques, le système ferroviaire d'Amérique du Nord est intégré.
Le sénateur Tkachuk : Y a-t-il des dispositions du projet de loi qui n'ont aucune incidence sur l'OMC?
M. Easter : Nous avons modifié le projet de loi au comité de la Chambre des communes. La seule partie qui ne porte pas directement sur la décision du groupe spécial de l'OMC est la disposition qui prescrit un examen général pour que la loi demeure actuelle. Il s'agit d'un examen des aspects généraux de la Commission canadienne des grains, sur l'autorisation de blé demi-nain et tout le reste. Cette modification a été apportée à la demande des représentants de l'industrie et d'autres témoins. Nous l'avons incluse au projet de loi pour que l'examen ait lieu dans une période précise.
Le sénateur Tkachuk : L'article 1 du projet de loi se lit comme suit :
L'alinéa 57c) de la Loi sur les grains du Canada est abrogé.
À quoi s'applique-t-il?
M. Gosselin : L'alinéa 57c) dicte que les exploitants de silos doivent obtenir la permission de recevoir des grains étrangers dans leur établissement. La commission a pour règle que si l'on veut recevoir du grain étranger dans son établissement, il faut demander la permission à la CCG. Cela a été considéré au-delà du traitement national. Autrement dit, on estimait cet alinéa non conforme à nos obligations de commerce et c'est pourquoi il est supprimé.
Le sénateur Tkachuk : Auparavant, lorsque le port de Vancouver recevait des grains de l'Australie, ne devait-il pas le signaler?
M. Gosselin : Il demandait la permission de le recevoir à la CCG, et la CCG la lui accordait automatiquement. Il y a périodiquement de petites quantités de grains qui sont débarqués à Vancouver et qui arrivent par voie ferroviaire des États-Unis. Il faudrait demander la permission de les recevoir. Nous recevons beaucoup de demandes pour que du canola soit envoyé dans des établissements de transformation de l'Ouest du Canada. Depuis bien des années, la commission approuve toutes ces demandes.
Le sénateur Tkachuk : Le paragraphe 2(1) dicte que l'alinéa 72(1)a) de la même loi est abrogé. À quelle partie de la décision de l'OMC cela s'applique-t-il?
M. Gosselin : Le tribunal a décidé que lorsque nous recevons un produit canadien, les exploitants de silos peuvent le mélanger à d'autres produits canadiens. Par exemple, si nous recevons du 3CWRS, nous pouvons le mélanger avec un grade de céréale fourragère. C'est chose fréquente dans les silos. L'interdiction de mélanger ces grains empêchait les exploitants de silos de mélanger des grains américains, et le tribunal a statué qu'il s'agissait d'un traitement inéquitable.
Les modifications contenues dans ce projet de loi permettent aux gens de les mélanger, s'ils le souhaitent, mais ils doivent signaler qu'il s'agit d'un produit mélangé, d'origine canadienne ou étrangère.
M. Easter : Il fallait obtenir une autorisation pour importer ou mélanger des grains. En vertu de ce projet de loi, l'obligation sera d'en faire rapport.
Le sénateur Tkachuk : Ce projet de loi abroge les paragraphes 72(2) et (3) de la loi.
M. Gosselin : Il s'agit d'autres dispositions sur le mélange, et elles n'étaient pas jugées conformes à nos obligations en matière de commerce international. Ces dispositions s'accompagnaient d'un règlement. En supprimant la disposition règlementaire, nous modifions aussi les dispositions contenues dans la loi. Dans les faits, nous supprimons toutes les dispositions concernant le mélange, qu'elles se trouvent dans la loi ou dans le règlement. Nous allons les remplacer par un autre règlement, qui rendra l'identification de l'origine obligatoire lorsque le grain est manutentionné.
Le sénateur Tkachuk : La grande question en litige devant le groupe spécial de l'OMC concernait la Commission canadienne du blé, et le tribunal s'est prononcé en faveur du Canada.
M. Migie : Les Américains ne s'attendent pas à pouvoir soudainement exporter de grandes quantités de blé au Canada grâce à ce type de changement. Cela contreviendrait clairement aux dispositions sur le traitement national et n'aura aucune incidence pratique sur la situation. En effet, les gens ne décident pas s'ils vont importer du grain ou acheter des produits nationaux en fonction d'une approbation préalable qui a toujours été accordée systématiquement. Le fait que les entreprises céréalières vont maintenant devoir déclarer si leurs produits sont d'origine canadienne, américaine ou mélangée n'aura pas d'influence sur leur choix. C'est la Commission canadienne du blé qui était visée. Les autres enjeux étaient des cas de non-conformité dans notre loi, qui avaient très peu d'incidences pratiques.
Le sénateur Tkachuk : Nous sommes-nous mis d'accord avec les Américains pour apporter tous ces changements? Comment avons-nous géré la chose après que le jugement a été prononcé? Nous sommes-nous mis d'accord séparément avec les Américains sur certaines parties ou avons-nous seulement accepté d'appliquer les recommandations de la décision de l'OMC?
M. Migie : Nous n'avons pas interjeté appel du jugement de l'OMC concernant la Loi sur les grains du Canada ou la Loi sur les transports au Canada. Nous avons déterminé quelle serait la meilleure façon de la mettre en œuvre tout en continuant d'assurer un traitement national. Nous avons conçu le régime qui vous est présenté dans ce projet de loi. Nous pensons qu'il nous permet de nous conformer totalement, mais sans plus, aux obligations de l'OMC.
M. Easter : Les États-Unis ont souvent essayé de viser la Commission canadienne du blé sous prétexte qu'elle serait un organisme de vente à guichet unique, mais ils ont toujours perdu. Nous estimons les changements imposés par l'OMC assez mineurs, et c'est pourquoi nous n'avons pas interjeté appel. En apportant les petites modifications contenues dans ce projet de loi, nous continuons de protéger l'intégrité du système d'approvisionnement en grains canadien. Nous respectons les exigences de l'OMC sans compromettre la capacité du Canada d'exploiter son propre système de manutention de grains.
Le sénateur Tkachuk : Vous avez dit vouloir que ce projet de loi soit adopté avant le 1er août afin que les États-Unis n'aient pas d'excuse pour présenter de nouvelles requêtes à l'OMC. Cependant, cela ne les en empêche pas vraiment. Les Américains ne sont pas les enfants de chœur de l'OMC. Ils ont la réputation d'agir dans leurs propres intérêts et de se balancer de l'OMC. Que ce projet de loi soit adopté ou non, cela ne changera rien en ce sens.
M. Easter : C'est peut-être vrai dans quelques autres domaines, mais il est urgent d'adopter ce projet de loi, parce que si nous ne rendons pas notre système conforme à la décision du groupe spécial de l'OMC, les Américains seront en position légale, en vertu de l'OMC, d'user de rétorsion contre une liste de produits, qui pourrait comprendre l'orge de brasserie et le blé dur. La liste des produits contre lesquels ils pourraient user de rétorsion est assez courte, mais ils pourraient tout de même le faire en toute légalité en vertu des règles de l'OMC.
Dans bon nombre des poursuites des Américains contre nous devant l'OMC, nous finissons par gagner. La Commission canadienne du blé en est un bel exemple. Nous ne voulons pas qu'ils puissent user de rétorsion contre une liste de produits simplement parce que nous n'avons pas adopté ce petit projet de loi pour mettre en œuvre des changements nécessaires qui ne minent en rien l'intégrité de notre système.
Le sénateur Mitchell : Ce projet de loi prévoit un processus d'examen au bout d'un an; c'est une modification qui a été apportée à la Chambre des communes à l'étape des comités. Avez-vous réfléchi à la structure de ce processus d'examen? Allez-vous demander à notre comité d'effectuer cet examen?
M. Easter : Il y a quelques années, un examen a été effectué par un comité créé par le ministre Vanclief, si je ne me trompe pas. Ce comité a fait des recommandations et on peut consulter son rapport.
Dans la modification, on dit que le ministre « veille à ce que », et c'est certainement l'intention du ministre de se conformer à la loi. Je sais qu'il n'a pas encore eu beaucoup de temps pour réfléchir à la façon dont tout cela va prendre forme, mais ce pourrait être un processus semblable à celui qui a mené à l'ancien rapport. Conformément à cette modification, ce serait un examen indépendant et détaillé.
Le sénateur Mitchell : En matière d'agriculture, et je pense beaucoup à la crise de l'ESB, certains sont d'avis que la frontière américaine a été fermée au bœuf canadien parce qu'il y a quelque chose qui cloche dans la façon dont nous entretenons notre relation avec les États-Unis. Je ne suis pas de cet avis. Je pense plutôt que c'est intimement lié à la politique américaine. Les États où l'on élève des bovins votent républicain, alors que les États qui n'ont pas de bœuf, comme l'État de New York, votent de l'autre côté, donc c'est très politique.
Nous faisons une concession aux États-Unis et nous réagissons de façon responsable et rapide à une situation qui les désavantageait. Pensez-vous que cela va les rendre plus conciliants à notre endroit sur les questions qui influencent notre capacité d'exportation chez eux? Ils imposent des tarifs sur bon nombre de nos produits agricoles.
M. Easter : Non, mais j'espère que les États-Unis verront que nous nous conformons à la décision rendue par le groupe spécial de l'OMC dans les domaines où nous n'étions pas conformes.
Concernant l'ESB, je conviens qu'à l'origine, c'était une question politique. Cependant, il importe de souligner que le département de l'agriculture des États-Unis ainsi que le président Bush et son administration sont tout à fait d'accord avec la règle que nos bovins de moins de 30 mois soient autorisés aux États-Unis. Nous sommes tout à fait d'accord. La frontière demeure fermée en raison de la décision d'un juge du Montana. L'USDA et l'administration conviennent tout à fait que nous avons les justifications scientifiques nécessaires et les normes de sécurité qu'il faut pour notre cheptel et que la frontière ne devrait pas rester fermée.
Le sénateur Tkachuk : Lors d'une vote au Sénat américain sur l'ESB, les Démocrates ont manifesté un fort appui à ce que la frontière demeure fermée, pas les Républicains. Je tiens à le préciser.
M. Easter : J'ai dit à la présidente du comité sénatorial pas plus tard qu'hier qu'on ne voyait pas souvent de politique au Comité sénatorial de l'agriculture. Lorsque j'étais président du Syndicat national des cultivateurs, j'ai comparu à plusieurs reprises devant des comités de la Chambre des communes et du Sénat. Les comités du Sénat vont toujours au cœur de la question sans politique partisane. Les comités du Sénat font toujours un très bon travail.
La présidente : Je vous remercie de votre confiance.
Chers collègues, s'il n'y a pas d'autres questions, nous allons procéder à l'étude article par article du projet de loi.
L'étude du titre est-elle reportée?
Des voix : D'accord.
La présidente : L'étude de l'article 1 est-elle reportée?
Des voix : D'accord.
La présidente : L'article 2 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
La présidente : L'article 2.1 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
La présidente : L'article 3 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
La présidente : L'article 4 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
La présidente : Le titre est-il adopté?
Des voix : D'accord.
La présidente : L'article 1 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
La présidente : Êtes-vous d'accord pour que le projet de loi C-40 soit adopté sans amendement?
Des voix : D'accord.
La présidente : Êtes-vous d'accord pour que je fasse rapport du projet de loi C-40 à la prochaine séance du Sénat?
Des voix : D'accord.
La présidente : Adopté.
Le comité poursuit ses travaux à huis clos.