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Délibérations du comité sénatorial permanent de
l'Agriculture et des forêts

Fascicule 15 - Témoignages du 21 juin 2005


OTTAWA, le mardi 21 juin 2005

Le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts, auquel a été renvoyé le projet de loi S-38, Loi concernant la mise en œuvre d'engagements commerciaux internationaux pris par le Canada concernant les spiritueux provenant des pays étrangers, se réunit aujourd'hui à 18 h 5 pour examiner ledit projet de loi.

Le sénateur Joyce Fairbairn (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente : Honorables sénateurs, j'ouvre avec plaisir cette séance du Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts. Nous examinons ce soir le projet de loi S-38, Loi concernant la misse en œuvre d'engagements commerciaux internationaux pris par le Canada concernant les spiritueux provenant de pays étrangers.

Nous sommes ravis d'accueillir l'honorable Wayne Easter, secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire. M. Easter est accompagné de M. Gary Koestler, directeur adjoint, Division de l'hémisphère oriental, Direction des politiques du commerce international, et de M. David Liston, conseiller juridique du ministère.

Je vous remercie de votre présence, monsieur Easter. On m'informe que vous devrez participer à un vote dans environ une heure. Je vous accorderai donc tout de suite la parole pour que nous puissions ensuite vous poser des questions.

L'honorable Wayne Easter, C.P., député, secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire (Développement rural( : Je vous remercie, madame la présidente. Je suis heureux d'être parmi vous. J'aimerais remercier à l'avance le comité sénatorial pour son travail sur ce projet de loi. Le projet de loi S-38 constitue la dernière mesure qui permettra au Canada de se conformer à l'accord entre la communauté européenne et le Canada relatif au commerce des vins et des boissons spiritueuses qui a été signé en septembre 2003 à l'issu de deux ans de négociations.

Le projet de loi S-38 vise à protéger sur le marché canadien le nom de certains spiritueux comme l'ouzo provenant de Grèce et la grappa provenant de l'Italie. Il protège aussi certains noms de spiritueux nord-américains comme la tequila provenant du Mexique et le whisky Tennessee provenant des États-Unis, en conformité avec l'article 313 de l'Accord de libre-échange nord-américain.

L'adoption d'une nouvelle loi pour donner suite à ces engagements était nécessaire puisqu'il n'existe aucune loi qui protège actuellement les noms des spiritueux. Justice Canada nous a informés que la protection prévue dans le cadre de la Loi sur les marques de commerce ne suffirait pas puisqu'elle ne protège que certaines régions géographiques et non pas des États tout entiers.

Comme je viens de le dire, ce projet est le dernier élément nécessaire pour pleinement mettre en œuvre l'accord de 2000 que nous avons signé avec l'Europe et auquel le Canada doit se conformer d'ici le 1er juin 2006. Si le Canada ne se conformait pas d'ici là aux dispositions de l'accord, la Commission européenne serait habilitée à suspendre cet accord et pourrait invoquer également les dispositions du mécanisme de règlement des différends que prévoit l'accord. En nous conformant à ces dispositions de l'accord, nous indiquerons que nous sommes prêts à nous conformer à l'ensemble de l'accord. Étant donné que nous prenons nos engagements internationaux au sérieux, nous comptons respecter cet accord multilatéral.

Ce projet de loi est le produit de consultations étendues non seulement auprès de l'industrie du vin et des spiritueux, mais aussi auprès des provinces et de plusieurs ministères fédéraux dont Commerce international, Santé, Justice, l'Agence canadienne d'inspection des aliments et Industrie Canada.

L'industrie canadienne du vin et des spiritueux revêt une très grande importance pour l'économie canadienne. Quelque 170 vignobles génèrent plus de 400 millions de dollars en ventes annuelles et suscitent d'excellentes retombées économiques. Non seulement l'industrie vinicole fournit-elle des emplois aux Canadiens et des marchés pour nos viticulteurs, mais c'est un important catalyseur du développement rural, en particulier dans le secteur agro-touristique canadien qui connaît un tel essor dans nos régions viticoles. Quiconque a traversé en voiture ces régions a pu voir cet essor. Certains le goûtent peut-être également.

Il ne fait aucun doute que la production viticole canadienne s'est beaucoup améliorée au cours de la dernière décennie. Il n'est pas inhabituel aujourd'hui que les vins canadiens remportent les honneurs lors de compétitions internationales prestigieuses. Il importe que nous reconnaissions que cela est attribuable à l'innovation et à la vision de l'industrie. Les viticulteurs canadiens ont vraiment fait connaître notre production viticole à l'échelle internationale.

L'industrie des spiritueux est également importante pour l'économie canadienne. Nos exportations annuelles de spiritueux dépassent le demi-milliard de dollars et représentent près des trois quarts de toutes les exportations de boissons alcoolisées du Canada. Le whisky canadien est le whisky qui se vend le plus aux États-Unis.

Madame la présidente, l'industrie des spiritueux s'est beaucoup développée au Canada et l'objet de ce projet de loi est de soutenir et d'accélérer cet élan en protégeant les gains que nous avons négociés dans le cadre de l'accord de 2003 conclu avec l'Union européenne. Cet accord est bénéfique pour le secteur canadien des vins et des spiritueux, pour les consommateurs canadiens ainsi que pour l'industrie européenne.

Voilà qui explique que le projet de loi dont nous sommes saisis jouit du plein appui de l'industrie canadienne des vins et des spiritueux et notamment de la Canadian Vintners Association et de l'Association des distillateurs canadiens. Tous les intervenants sont d'accord pour dire que le projet de loi S-38 protège les gains découlant de l'accord de 2003, tout en ayant peu d'incidence pratique sur notre industrie intérieure.

Les membres de ce comité sauront certainement à quel point les exportations revêtent une importance capitale pour l'industrie agricole et agroalimentaire canadienne. La même chose vaut pour l'industrie des vins et des spiritueux. Le gouvernement est résolu à appuyer le succès de l'industrie agricole sur les marchés d'exportation. À notre avis, le projet de loi S-38 est une mesure en ce sens qui protège les gains réalisés dans le cadre de l'accord de 2003 et favorise la croissance des exportations de vin et de spiritueux.

Compte tenu des tendances commerciales protectionnistes qui se sont manifestées au cours des dernières années, les exportations de vin canadien à destination de l'Union européenne ont été bien inférieures à ce qu'elles pourraient être. L'an dernier, les ventes de vin canadien à l'Europe se sont élevées à 1,5 million de dollars, ce qui représente environ 10 p. 100 des exportations totales de vin canadien.

La Canadian Vintners Association estime qu'avec cet accord, les exportations de vin canadien pourraient atteindre cinq millions de dollars par année d'ici dix ans. Voilà pourquoi il importe que ce projet de loi soit adopté puisque la date limite prévue pour la mise en oeuvre complète de l'accord est le 1er juin 2006.

Quant à l'accord de 2003, il protège pleinement au sein de l'Union européenne les indications géographiques canadiennes notamment en ce qui touche les vins et les whiskys. L'accord améliore également l'accès au marché de l'Union européenne pour les vins, les spiritueux et les vins de glace canadiens, accès qui a été jusqu'à maintenant compromis en raison des nombreux règlements et tracasseries administratives.

Par cet accord, le marché européen reconnaît les pratiques de production viticole et d'étiquetage établies au Canada par la Vintners Quality Alliance ou VQA. L'accord assure aussi aux exportateurs de vin canadien un accès plus sûr au marché européen en simplifiant le système d'attestation de la qualité des vins d'exportation canadiens de qualité VQA.

L'accord comporte également des gains pour l'industrie intérieure. Il protège notamment les pratiques des régies des alcools provinciales qui visent à favoriser les ventes de vin canadien. La Colombie-Britannique et l'Ontario peuvent continuer d'exploiter des magasins de vin privés qui ne vendent que des vins produits au Canada et le Québec peut toujours exiger que tous les vins vendus dans les épiceries soient embouteillés dans cette province.

En terminant, honorables sénateurs, j'aimerais attirer votre attention sur trois amendements proposés par le gouvernement. Après le dépôt de ce projet de loi, des consultations plus poussées ont eu lieu avec l'industrie. Afin de préciser les dispositions dans un certain nombre de secteurs, le gouvernement propose trois amendements. Je vais déposer ces amendements auprès du comité et je crois comprendre que vous en avez aussi reçu un exemplaire électronique.

Je répondrai maintenant volontiers, madame la présidente, aux questions que le comité pourrait vouloir me poser.

La présidente : Je vous remercie beaucoup, monsieur Easter.

Le sénateur Mercer : Monsieur Easter, permettez-moi de vous souhaiter la bienvenue. Il est toujours agréable de voir un vieil ami comparaître devant le comité.

M. Easter : Un jeune ami.

Le sénateur Mercer : Un ami de longue date. Vous avez parlé des indications de régions géographiques pour le whisky canadien. J'aimerais que vous soyez un peu plus précis. Le whisky, c'est-à-dire le rye par opposition à d'autres types de whisky, et le vin sont protégés dans cet accord.

À titre de sénateur de la Nouvelle-Écosse, je m'intéresse à notre seul distillateur de whisky de single malt. Ce distillateur est de Nouvelle-Écosse. Chaque fois que nous signons un accord commercial avec un pays du monde, je fais observer à ce comité que les conditions fixées ne semblent pas être les mêmes pour tous. Je sais qu'il y a une question de marque commerciale qui se pose quant à l'utilisation du mot « Glen » dans « Glen Breton », qui est le nom du whisky de single malt qui est fabriqué en Nouvelle-Écosse, mais je m'inquiète du fait que le gouvernement ne semble pas avoir accordé beaucoup d'attention à ce fait ni même de l'avoir mentionné en passant. Si nous protégeons le nom des produits fabriqués dans certaines régions géographiques du monde, tant en Europe qu'ici, je crois dans ce cas-là que le distillateur de Nouvelle-Écosse a opté pour un nom générique en appelant son produit Glen Breton Single Malt Whisky au lieu de l'appeler par le nom scotch alors que c'est bien évidemment un scotch de qualité supérieure.

J'aimerais connaître votre avis sur cette question.

M. Easter : Vous avez en fait répondu à la question vous-même, sénateur. Il s'agit d'une question de marque de commerce. Je vais cependant demander aux gens qui m'accompagnent de vous donner des précisions.

M. Gary B. Koestler, directeur adjoint, Division de l'hémisphère oriental, Direction des politiques du commerce international, ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire Canada : C'est une question de marque de commerce qui touche des droits privés au Canada. Ce projet de loi ne vise pas l'utilisation du mot « Glen » dans le nom d'une marque de whisky. Cette question relève plutôt des tribunaux civils qui doivent faire appliquer la Loi sur les marques de commerce au Canada. Cette entreprise peut recourir à certains mécanismes pour obtenir l'enregistrement de cette marque, mais ces mécanismes sont en fait extérieurs à la loi elle-même car tout ce que prévoit la loi sur les marques de commerce c'est que des marques de commerce peuvent être créées au Canada.

Le sénateur Mercer : Je crois cependant, monsieur, qu'un autre pays ferait en sorte que cette question soit réglée dans l'accord. Le distillateur dont il est question est un très petit distillateur dans une petite province comme la Nouvelle-Écosse. Ses affaires vont bien, mais il doit lutter pour conserver sa part de marché. Il est confronté à un organisme pouvant compter sur des revenus de plusieurs millions de dollars qui conteste le fait qu'il utilise un nom qui est fréquemment utilisé dans ma province. Vous trouverez le nom « Glen » dans le nom de nombreux endroits dans ma province. À mon avis, un autre pays aurait traité de cette question dans le projet de loi. Un autre pays aurait cherché à protéger les petites entreprises. Je suis déçu de voir que le projet de loi ne le fait pas.

J'aimerais maintenant changer de sujet et parler du vin.

La présidente : Sénateur Mercer, je ne sais pas si vous étiez ici lorsque j'ai dit que M. Easter devait participer à un vote à 19 heures. Il ne peut pas rater ce vote. Plus nos interventions seront brèves, plus nous serons nombreux à pouvoir lui poser une question.

Le sénateur Mercer : Je comprends. Je sors d'un caucus et on comptait les présences. Vous n'y étiez pas.

J'aimerais savoir comment on pourrait rendre le vin canadien plus attrayant pour les consommateurs canadiens. Je sais qu'il n'en est pas question dans le projet de loi, mais j'espère que le ministère songe à des changements qui permettraient de faire en sorte que le prix des vins canadiens soit plus intéressant pour les consommateurs. Lorsque je vais acheter du vin, j'ai le choix d'acheter un vin canadien à 15 $ ou un vin français à 15 $. Le choix serait plus évident si le vin canadien coûtait 12,50 $. Cela inciterait le consommateur à acheter le vin canadien.

Le sénateur Oliver : J'ai deux brèves questions à poser. Nous avons reçu un courriel de l'organisme appelé la West Indies Rum and Spirits Producer's Association qui exprime des inquiétudes au sujet de la définition de « rhum » proposée dans l'annexe du projet de loi. Cette association voudrait qu'on lise ceci : « Il a été obtenu des produits de la canne à sucre distillée et fermentée dans un pays des Antilles du Commonwealth ». Vous a-t-on informés qu'on avait proposé cet amendement et s'agit-il de l'un des trois amendements que nous devions recevoir par voie électronique?

M. Easter : Oui, nous avons été informés de cet amendement. Je demanderais à M. Koestler de vous donner des précisions. Des discussions assez longues ont eu lieu sur cette question.

M. Koestler : Cette proposition nous a été soumise et nous l'avons examinée, mais ce projet de loi vise à mettre en œuvre des obligations commerciales internationales actuelles du Canada. Il est le résultat de négociations ou d'engagements directs avec d'autres pays.

Il se peut que la norme ait changé pour le rhum dans le pays des Antilles, mais il faudrait que des négociations aient lieu de pays à pays et non pas entre le gouvernement du Canada et une industrie particulière pour pouvoir changer un engagement commercial.

Il est possible qu'il soit nécessaire de mettre à jour notre entente commerciale avec les producteurs de rhum antillais. Si cette entente était mise à jour, il serait alors possible de proposer dans le projet de loi des amendements à l'annexe pour modifier la définition de rhum antillais.

Le sénateur Oliver : Le projet de loi n'a donc pas à être amendé maintenant en ce sens?

M. Kestler : S'il y a de nouveaux changements qui s'imposent à nos obligations commerciales internationales en ce qui touche la protection de noms de spiritueux prévue dans l'annexe, ces changements pourront être apportés.

M. Easter : Il faudrait que cela soit fait dans le cadre d'un accord commercial. Le comité mixte permanent a indiqué que si ce changement était fait par l'entremise de ce projet de loi il serait considéré invalide. Il faudrait donc proposer ce changement dans l'accord commercial parce qu'on ne peut pas le faire dans ce projet de loi. Le changement serait considéré comme invalide.

Le sénateur Oliver : Puisque c'est vous qui avez soulevé la question de l'invalidité, j'aimerais savoir si le Parlement est vraiment habilité à réglementer le commerce touchant une seule industrie comme celle des spiritueux. Dans l'affaire de la Brasserie Labatt contre le procureur général du Canada, la Cour suprême du Canada a jugé que le Parlement n'était pas habilité à réglementer une seule industrie ou activité commerciale. Étant donné que la Cour suprême s'est prononcée assez clairement là-dessus, sur quel texte juridique vous appuyez-vous pour essayer de réglementer une seule activité commerciale ou une seule industrie par ce projet de loi?

M. David Liston, conseiller juridique, Services juridiques, ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire Canada : Nous avons examiné à fond la question de la constitutionnalité de ce projet de loi. Mes collègues du ministère de la Justice estiment que c'est en vertu du fait que la Constitution confère au gouvernement fédéral des pouvoirs en matière de commerce que le Parlement est habilité à adopter ce projet de loi. L'affaire Labatt, que je n'ai pas devant moi, porte peut-être sur une question quelque peu différente puisqu'il s'agit de la réglementation d'une industrie donnée au Canada.

Le sénateur Oliver : Commerce ou industrie.

M. Liston : Je répondrais à votre question en disant que je ne pense pas qu'on puisse soutenir que nous cherchons à réglementer une industrie par les dispositions du projet de loi S-38. Nous protégeons plutôt l'utilisation de certains noms de produits importés au Canada. Je n'ai pas l'affaire Labatt devant les yeux, mais il se peut que le projet de loi visé ait été de portée beaucoup plus vaste que le projet de loi S-38.

M. Easter : J'ajouterai que le projet de loi vise à permettre la mise en œuvre des engagements pris dans le cadre de l'accord entre la Communauté européenne et le Canada relatif au commerce des vins et des boissons spiritueuses ainsi que de l'Accord de libre-échange nord-américain. Il y a donc trois accords commerciaux ainsi que le projet de loi.

Le sénateur Oliver : À titre de ministre, vous êtes donc d'avis que ce projet de loi n'est pas contraire à une décision importante rendue par la Cour suprême du Canada dans l'affaire des distilleries, n'est-ce pas?

M. Easter : C'est l'avis de notre conseiller juridique.

Le sénateur Ringuette : Je suis très heureuse que cet accord ait été conclu parce que depuis des décennies les viticulteurs canadiens cherchent à avoir accès au marché européen. La France, en particulier, voulait à tout prix protéger son marché intérieur. Le fait d'avoir désormais accès à ce marché représente un grand gain pour l'industrie viticole canadienne. Il s'agit d'un accord commercial sur les vins et les spiritueux. On ne peut jamais gagner sur toute la ligne avec un accord de ce genre. Étant donné que nous avons fait des gains en ce qui touche les vins, peut-on dire que nous avons perdu quelque chose pour ce qui est des spiritueux?

M. Easter : Nous ne le pensons certainement pas. Nous pensons que le projet de loi est bénéfique pour l'ensemble des intervenants. Il protège certainement des noms de spiritueux comme la grappa et l'ouzo. Il confirme des accords qui ont été conclus avec divers gouvernements d'Europe et d'Amérique du Nord.

M. Koestler : Nous avons consulté de très près l'industrie canadienne des spiritueux lors de la négociation de cet accord. Les engagements que le Canada a pris et qui se reflètent dans ce projet de loi ne comportaient pas de coûts économiques.

Le sénateur Ringuette : Vous dites donc que cet accord est bénéfique à l'ensemble des intervenants?

M. Easter : C'est ce que nous croyons et c'est ce qui ressort également des discussions que nous avons eues avec les divers intervenants de l'industrie. Comme ils comparaîtront devant le comité, vous pourrez certainement leur poser directement la question.

Le sénateur Ringuette : Pour ce qui est des exportations de vin canadien vers l'Europe, vous avez indiqué qu'elles ne s'élevaient qu'à 10 p. 100 l'an dernier. Exportons-nous des spiritueux vers l'Europe et cet accord va-t-il nous ouvrir de nouveaux marchés?

M. Easter : Pour ce qui est des spiritueux, nous protégeons divers noms de spiritueux comme la Grappa, l'ouzo et d'autres que je ne peux pas prononcer. Le projet de loi confirme les engagements commerciaux internationaux que le Canada a pris.

Le sénateur Ringuette : Faut-il en conclure que l'Union européenne va protéger également les noms de marque canadiens?

M. Koestler : Oui, l'Europe protégera les noms whisky canadien et rye canadien. Les exportations de rye canadien vers l'Union européenne en 2003 se sont élevées à 18 millions de dollars et en 2004, à 16 millions de dollars. Une partie importante de ces exportations était en vrac. Cet accord prévoit que le whisky canadien qui est exporté en vrac et embouteillé dans l'Union européenne doit se conformer aux normes canadiennes. Ce produit ne peut pas contenir 25 p. 100 d'alcool ou 10 p. 100 d'alcool et continuer de s'appeler du whisky canadien. Il doit être conforme aux normes canadiennes. À titre d'exemple, sa teneur en alcool doit être de 40 p. 100. Il ne peut pas être dilué davantage.

Il s'agit d'aspects importants du développement du marché du whisky canadien dans l'Union européenne étant donné que tout ce qui se vendra dans ce marché en tant que whisky canadien devra correspondre aux normes canadiennes.

Le sénateur Ringuette : La bouteille indiquera-t-elle « whisky canadien »?

M. Koestler : Oui.

Le sénateur Tkachuk : Vous dites que le rye canadien produit en Europe devra se conformer à certaines normes pour pouvoir être appelé rye canadien. Pour obtenir cela, avons-nous fait des concessions en ce qui touche le champagne?

M. Easter : M. Koestler pourrait expliquer comment le rye est exporté.

M. Koestler : Lorsque les spiritueux sont exportés en vrac, ils ont habituellement une teneur en alcool plus élevée qui peut atteindre jusqu'à 80 p. 100. C'est la façon dont on fait vieillir le whisky. Lorsque le produit est embouteillé, on y ajoute de l'eau pour que sa teneur en alcool soit de 40 p. 100. C'est tout ce qui est fait au whisky. C'est ce que permet la loi canadienne et c'est ce qui doit également être prévu dans la loi européenne dans le cas du whisky canadien qui est exporté en Europe pour y être embouteillé. Le whisky ne peut pas être produit en Europe. Il doit s'agir de whisky canadien qui a vieilli au Canada.

Le sénateur Tkachuk : Outre le rye canadien, quels autres spiritueux canadiens sont protégés aux termes de ce projet de loi? L'ouzo et d'autres spiritueux sont protégés, mais quels sont les autres spiritueux canadiens qui sont également protégés?

M. Koestler : Le whisky canadien et le rye canadien sont protégés.

Le sénateur Tkachuk : C'est tout pour les spiritueux?

M. Koestler : Oui.

Le sénateur Tkachuk : Pourquoi cela serait-il à notre avantage? Si nous ne souscrivions pas à cet accord, pourrions- nous fabriquer de l'ouzo ici et appeler ce produit de l'ouzo? Pourrions-nous fabriquer de la grappa et appeler le produit de la grappa?

M. Easter : Vous pourrez peut-être poser la question à l'industrie, mais d'après les consultations que nous avons eues avec ses représentants et compte tenu des divers accords commerciaux qui ont été négociés, cette mesure semble présenter des avantages importants pour l'industrie du vin. Nous protégeons le rye canadien. Des problèmes se posent à l'égard des noms des spiritueux depuis plusieurs années et ce projet de loi permet de les régler en protégeant ces noms.

D'après la rétroaction qui nous provient de l'industrie, ces accords sont avantageux pour le Canada.

Le sénateur Tkachuk : Une entreprise pourrait fabriquer un produit exactement semblable à l'ouzo, mais ne pourrait donc pas l'appeler de l'ouzo?

M. Easter : C'est juste. Le projet de loi ne prévoit qu'une seule exception.

M. Koestler : Oui. Il y a un produit appelé de la grappa de glace qui est fabriqué au Canada et le projet de loi prévoit qu'il pourra continuer de se vendre sous ce nom.

Le sénateur Tkachuk : Les entreprises font habituellement enregistrer leur marque de commerce sur tous les marchés où ils vendent des produits. À titre d'exemple, Volvo a obtenu une protection pour sa marque de commerce sur tous les marchés.

Que fait l'industrie des spiritueux? Pourquoi obtenons-nous cette protection pour elle? L'industrie fait-elle enregistrer ses marques de commerce dans tous les pays où elle vend des produits? Pourquoi le gouvernement doit-il intervenir?

M. Liston : L'industrie des spiritueux peut faire enregistrer ses marques de commerce en vertu de la Loi sur les marques de commerce au Canada. Je ne peux pas vraiment parler au nom de l'industrie, mais je crois comprendre que c'est ce qu'elle a fait dans le cas de diverses marques de commerce.

Le sénateur Tkachuk : « Coca-Cola » est une marque de commerce. Pourquoi « Grappa » n'est-elle pas une marque de commerce? Qu'est-ce que la grappa a à voir avec nous?

M. Koestler : Il existe deux niveaux de nomenclature dans l'industrie canadienne des spiritueux ou du whisky canadien. Il y a d'abord le nom qui est propre au pays. Tous les whiskies canadiens doivent se conformer à certaines normes en matière de qualité, de consistance et de reconnaissance du produit. Certains noms de commerce sont enregistrés. Il y a plusieurs noms de commerce de whisky canadien qui sont bien connus.

On peut comparer cela aux normes de qualité pour d'autres produits comme le bœuf ou les fruits et légumes. Il s'agit de faire en sorte que ces normes de qualité soient reconnues dans un autre pays et soient protégées comme étant propres au Canada. De cette façon, la qualité des produits canadiens est protégée et reconnue sur le marché.

M. Easter : Ce n'est pas seulement la question des noms qui est en cause. Comme je l'ai dit dans ma déclaration préliminaire, les régies des alcools provinciales pourront continuer à favoriser les producteurs de vin et de spiritueux canadiens et le projet de loi améliore également l'accès des vins et des spiritueux canadiens au marché de l'Union européenne.

Le sénateur Tkachuk : Est-ce pour protéger notre industrie des vins?

M. Easter : C'est pour améliorer l'accès au marché européen pour nos industries des vins et des spiritueux. L'accord permet aussi aux régies des alcools provinciales de continuer à favoriser les vins et les spiritueux canadiens.

Le sénateur Tkachuk : Ce serait une bonne chose si les régies des alcools canadiennes vendaient des vins de la Colombie-Britannique et du Niagara au lieu de simplement les inscrire sur leur liste et de protéger leur propre marché.

M. Easter : Je suis d'accord avec vous là-dessus. Nous parlons depuis des années de libéraliser les échanges commerciaux à l'intérieur même du Canada, mais nous ne sommes pas encore parvenus à le faire.

Le sénateur Tkachuk : C'est un grave problème. Je ne suis pas encore convaincu de la nécessité de ce projet de loi, mais peut-être que l'industrie saura comment me convaincre.

Le sénateur Mitchell : J'aimerais simplement dire publiquement pour la gouverne des personnes qui pourraient suivre nos délibérations que les noms « Newfoundland Screech », « Yukon Jack » et « Slivovich » ont été mentionnés au Sénat. Pourriez-vous nous indiquer comment ces noms vont être protégés? Ce projet de loi ne les mentionne pas. De quelle façon sont-ils protégés?

M. Easter : Les Terre-Neuviens sont solides.

M. Koestler : Le projet de loi vise à protéger le nom des spiritueux étrangers qui figurent à l'annexe et que le Canada a convenu de protéger dans le cadre d'accords commerciaux internationaux. Il ne protège pas en soi le « Newfoundland Screech » ou le « Yukon Jack ». Il s'agit dans les deux cas de marques de commerce enregistrées de spiritueux à base de rhum et de whisky. La Newfoundland and Labrador Liquor Corporation a enregistré la marque de commerce « Newfoundland Screech » en 1982 et Diageo North America a obtenu l'enregistrement de la marque de commerce « Yukon Jack » en 1977. Ces deux noms sont protégés en vertu de la Loi sur les marques de commerce.

La loi ne protège pas l'appellation « Slivovich ». Aucun de nos accords commerciaux avec l'étranger n'en fait mention.

Le sénateur Mercer : Je pense qu'il nous faudrait goûter des échantillons pour savoir de quoi l'on parle.

[Français]

Le sénateur Robichaud : Le secrétaire parlementaire a répondu à ma question en disant que les agences provinciales qui font la vente et le commerce des alcools ne seront affectées d'aucune façon par ce projet de loi.

[Traduction]

M. Easter : L'accord protège les pratiques des régies des alcools provinciales, qui accordent la préférence aux vins canadiens. La Colombie-Britannique et l'Ontario peuvent continuer d'avoir des magasins privés qui ne vendent que du vin canadien. Le Québec peut continuer d'exiger que tout le vin vendu en épicerie soit mis en bouteille dans la province. Cela ne change rien.

Le sénateur Robichaud : Vous avez parlé d'ouzo de glace.

M. Easter : Non, de grappa de glace.

Le sénateur Robichaud : Oui, pardon. Je me souviens d'avoir déjà goûté la grappa. La réunion ne durerait pas longtemps si nous devions faire une dégustation. Vous dites que nous produisons de la grappa de glace au Canada.

M. Koestler : Oui, et nous en vendons.

Le sénateur Robichaud : Faut-il se servir de grappa produite en Italie?

M. Koestler : Non. C'est la marque déposée d'un produit fabriqué au Canada.

Le sénateur Robichaud : C'est accepté?

M. Koestler : Oui.

Le sénateur Peterson : J'ai une courte question. En parcourant les chiffres, j'ai remarqué que nous exportons pour 500 millions de dollars de rye. Quelle est la valeur de l'achat de contrepartie? Quelle est la valeur des importations?

M. Easter : Je vais demander à M. Koestler quels chiffres il a pour les États-Unis.

Le sénateur Peterson : La valeur totale des exportations est d'environ 500 millions. La valeur des importations?

M. Easter : M. Koestler a les chiffres.

M. Koestler : Veuillez m'excuser, je n'ai pas le chiffre des importations de spiritueux.

Le sénateur Oliver : Pour les exportations, le chiffre était de 500 millions?

M. Easter : Nous pouvons vous obtenir les chiffres d'import-export, sénateur Peterson, et les faire parvenir à la greffière du comité.

Le sénateur Oliver : J'aimerais revenir à M. Liston au sujet d'une question que j'ai posée. Peut-être pourrait-il me communiquer l'information sur la décision de la Cour suprême concernant la constitutionalité du texte. Il n'a pas les renseignements sous la main et ne connaît pas aussi bien l'affaire qu'il le devrait. L'arrêt dans Labbat contre le vérificateur général du Canada a catégoriquement statué que le pouvoir du Parlement de réglementer le commerce ne permet pas la réglementation d'un secteur ou d'une activité en particulier. Si c'est le cas, si c'est la loi au pays, en vertu de quel pouvoir faites-vous ceci? Pourriez-vous me communiquer le renseignement, que je puisse en disposer pour mon intervention en troisième lecture au Sénat.

M. Liston : Volontiers, sénateur.

Le sénateur Mercer : Dans la question précédente du sénateur Oliver, il a parlé du message électronique que nous avons tous reçu à propos du rhum. Essentiellement, il était question de... « obtenu des produits de la canne à sucre d'un pays des Antilles du Commonwealth et fermenté et distillé sur place ». Comme vous le savez, depuis 35 ou 40 ans, le Canada s'enorgueillit de commercer librement et d'avoir des liens étroits avec Cuba. Cuba produit le rhum à partir de sa propre canne à sucre. Je n'ai rien contre le fait de changer la définition pour autoriser l'utilisation de canne à sucre venant d'ailleurs, mais j'ai des réserves à propos de la définition qui nous est présentée, y compris le passage : « d'un pays des Antilles du Commonwealth ». Je suis un chaud partisan du Commonwealth mais je le suis aussi de Cuba. Je ne voudrais pas que l'on fasse un faux pas.

Le sénateur Mercer : C'est un vrai problème parce que nous commerçons beaucoup avec Cuba.

M. Easter : Je ne pense pas pouvoir ajouter quoi que ce soit d'autre. Nous avons jugé que si nous avions inclus cela dans le texte, il aurait été jugé ultra vires et devrait faire partie d'un accord commercial.

M. Koestler : Lors de négociations commerciales, si quelqu'un suggère de faire un changement, on procède à une évaluation économique. Dans ce cas-ci, nous n'avons pas évalué quel effet un changement de définition aurait pour les producteurs canadiens. Nous ne pourrons pas nous prononcer sur ce qui vous inquiète, mais s'il devait en être question dans le cadre de la négociation d'un accord commercial, la chose serait examinée.

Le sénateur Tkachuk : Cela signifie-t-il qu'on ne pourrait pas vendre du rhum antillais au Canada?

M. Koestler : Non.

La présidente : Monsieur Easter, merci d'avoir comparu devant le comité en compagnie de vos collaborateurs. Monsieur Liston, je vous saurais gré de répondre aux préoccupations du sénateur Oliver dans les meilleurs délais; nous communiquerons votre réponse au reste du comité. Nous sommes impatients de vous lire.

M. Easter : Au nom du ministre, je tiens à vous remercier de vous être penchés sur le texte et de nous avoir entendu ce soir. Comme je l'ai dit, pour plus de clarté, il est important d'apporter trois amendements. Ils seront soumis à l'examen des sénateurs. Nous transmettrons l'information demandée à la greffière.

La présidente : Nous examinerons les amendements à la première heure lorsque nous procéderons à l'examen article par article jeudi matin.

Le sénateur Oliver : Ce sont des amendements du gouvernement. Les appuyez-vous?

M. Easter : Absolument. Quand le texte a été déposé, il a été décidé à la suite de consultations supplémentaires auprès du secteur d'apporter des changements mineurs au libellé pour que le texte soit plus clair. C'est l'effet de ces amendements.

Le sénateur Robichaud : Il s'agit de suggestions venant de l'industrie?

M. Koestler : Oui. Certaines viennent de l'industrie, d'autres du gouvernement à la suite des discussions qui ont eu lieu.

La présidente : Chers collègues, nous recevons maintenant des représentants de l'Association des distillateurs canadiens : Jan Westcott, président et chef de la direction, C.J. Hélie, vice-président exécutif ainsi que M. Milan Stolarik, de la Est Indies Rum and Spirits Producers' Association. Qui voudrait commencer?

M. Jan Westcott, président et chef de la direction, Association des distillateurs canadiens : Au nom de l'Association des distillateurs canadiens, je suis heureux de pouvoir comparaître devant vous pour vous parler du projet de loi S-38.

L'association est composée de Bacardi Canada, Black Velvet Distilling, Canadian Mist Distillers, les Distilleries Corby Ltée, Diageo Canada, Hiram Walker and Sons et Schenley Distilleries. Figurent parmi eux des entreprises et des raisons sociales canadiennes prééminentes et très anciennes. Ensemble, nos adhérents représentent près de 80 p. 100 de la production de spiritueux distillés au Canada. Nous possédons et représentons un grand nombre de marques importées ici également.

Nous tenons à féliciter sincèrement Agriculture et Agroalimentaire Canada et Commerce international Canada pour avoir réussi à négocier un accord bilatéral de commerce du vin et des spiritueux avec l'Union européenne. Nous sommes un des groupes d'industries qui a exhorté le gouvernement à tenir ces négociations, parfois difficiles, et à persévérer jusqu'à leur aboutissement.

Comme vous l'avez entendu, l'accord prévoit une plus grande sécurité et une meilleure protection des spiritueux de prestige que sont le whisky canadien et le rye canadien dans notre deuxième marché en importance après les États- Unis. L'accès libre et garanti aux marchés d'exportation revêt une importance déterminante pour les fabricants de spiritueux. C'est en effet 70 p. 100 de la production canadienne de spiritueux qui est exportée et 80 p. 100 du whisky canadien fabriqué ici fait office d'ambassadeur de talent dans le monde. Tout près d'un demi-milliard de dollars de spiritueux sont exportés. La valeur des exportations de spiritueux canadiens dépasse chaque année la valeur combinée de toutes les exportations de bière, de vin et de cidre. En ce qui concerne l'UE, les spiritueux représentent environ 90 p. 100 de toutes les exportations de boissons alcoolisées canadiennes dans la région.

La principale utilité de l'accord pour l'industrie canadienne est la reconnaissance et la protection accordée à nos produits de prestige, le whisky canadien et le rye canadien. En vertu de l'accord, les 25 pays-membres de l'UE doivent offrir un mécanisme juridique garantissant que seul le whisky canadien légitime, fabriqué ici, conformément aux normes et devis canadiens — que ce soit à Gimli au Manitoba, à Lethbridge ou à Calgary en Alberta ou à Amherstburg ou à Windsor en Ontario ou à Valleyfield au Québec — puisse être vendu dans ces pays sous le nom de whisky canadien. C'est un point important sur lequel je vais revenir.

La présidente : Je suis heureuse que vous ayez mentionné Lethbridge.

M. Westcott : La valeur de notre activité est liée à la valeur implicite de nos marques. La reconnaissance officielle par l'UE du whisky canadien et du rye canadien donne à l'industrie canadienne des spiritueux l'occasion d'investir et de faire progresser nos marques sachant que nos investissements ne seront pas compromis par des produits frelatés qui tirent profit injustement de l'image et de la réputation du whisky canadien. Il y a lieu de noter que cette protection du whisky canadien s'applique dans toute l'UE, y compris dans les 10 nouveaux pays admis ainsi qu'à tous les futurs États membres, qu'ils aient ou non un accord bilatéral avec le Canada.

En contrepartie, le Canada a accepté de reconnaître et de protéger certains spiritueux haut de gamme provenant de certains États membres de l'UE, à savoir : la Grappa, l'Ouzo, le Jagertee, le Pacharán et le Korn ou Kornbrand. Le projet de loi S-38 a pour but d'accorder cette protection comme convenu dans l'accord avec l'Union européenne.

Entre parenthèses, les membres du comité doivent savoir que les fabricants canadiens ne produisent aucun de ces cinq produits au pays, si bien que nous ne prévoyons pas que la décision de les reconnaître comme produits exclusifs à l'UE ait des conséquences financières négatives.

Beaucoup de consommateurs associent d'ailleurs ces produits à telle région ou tel pays en particulier de l'Union. Il est donc raisonnable de protéger ces appellations pour que le consommateur n'ait pas de doute sur leur nature véritable. La reconnaissance réciproque de chacun de nos produits phares, telle que le stipule l'accord, est dans les intérêts supérieurs du consommateur canadien, de l'industrie canadienne et bénéficie donc de notre appui vigoureux.

Spiritueux Canada appuie l'objet du projet de loi S-38 de mettre en oeuvre ces aspects de l'accord entre le Canada et l'UE sur les vins et spiritueux. En vertu de l'article 3 du projet de loi, nous signalons que la protection accordée aux produits énumérés à l'annexe porte sur l'utilisation du nom pour « vendre » un produit.

Il ne faut pas s'étonner que cette formulation ne soit pas identique à celle de l'accord entre le Canada et l'UE destinée à donner forme aux obligations du Canada de protéger certaines appellations; elle ne reprend pas non plus les termes employés à l'origine pour mettre en oeuvre les obligations du Canada de protéger les spiritueux en vertu de l'ALENA. Il n'est pas rare que la loi nationale de mise en oeuvre emploie une formulation différente de celle que l'on trouve dans l'accord commercial, même si cela donne pleinement effet aux obligations prescrites dans l'accord.

Cela dit, dans les cas où il y a des divergences quant à la manière dont une obligation est exprimée dans l'accord et celle à laquelle il y est donné effet dans la loi, la question pour l'industrie est de savoir si l'emploi de mots différents a une signification quelconque en droit ou dans les faits.

L'industrie a relevé plusieurs différences entre le projet de loi S-38, l'accord commercial qu'il met en oeuvre ainsi que les lois nationales actuelles relatives aux produits en question. Nous travaillons avec des fonctionnaires fédéraux pour nous assurer que ces différences ne diminuent pas la mise en oeuvre par le Canada de ses obligations.

Nous reconnaissons pleinement qu'il peut n'y avoir aucune application d'importance pour notre industrie à cause de la formulation actuelle du projet de loi S-38. Toutefois, il nous importe de poser la question car si le texte n'accorde pas le degré de protection décrit dans l'accord commercial, et auquel s'attendent nos principaux partenaires commerciaux, les conséquences pourraient être graves pour les exportations de whisky canadien. Si l'on avait l'impression que la protection par le Canada des produits de l'UE, des États-Unis et du Mexique visés par le projet de loi S-38 était réduite, celle des whiskys canadiens sur ces marchés pourrait l'être aussi.

L'annexe évoque expressément le maintien de l'importation en vrac et de la mise en bouteille au Canada de trois produits. En particulier, l'annexe énonce des règles strictes pour l'emploi des appellations whisky écossais, whisky irlandais et rhum antillais lorsqu'ils sont importés en vrac et embouteillées au Canada. Ce faisant, l'annexe reconnaît implicitement la pratique de l'importation de ces produits en vrac et de leur embouteillage au Canada. Toutefois, l'annexe ne donne pas de règle aussi stricte pour le bourbon, le Tennessee Whisky, la Tequila ou le Mescal pour les importations en vrac embouteillées au Canada comme en fait mention le Règlement sur les aliments et drogues. Cette dichotomie peut créer une certaine confusion concernant les activités auxquelles peuvent se livrer les importateurs en vrac canadiens.

La possibilité pour les fabricants canadiens de continuer à importer et à embouteiller tous ces produits au Canada, conformément aux exigences et aux critères de chaque produit, que l'on trouve dans le Règlement sur les aliments et drogues du Canada, est d'une importance primordiale pour l'industrie canadienne des spiritueux. Pour éviter toute confusion possible, l'industrie recommande l'adoption d'une démarche uniforme pour tous les produits énumérés à l'annexe, dans toute la mesure du possible. De plus, il pourrait également être utile de définir les liens juridiques entre la Loi sur le commerce des spiritueux et le Règlement pour éviter toute confusion.

Nous avons aussi été informés de l'intention du gouvernement du Canada d'éliminer certaines dispositions du Règlement sur les aliments et drogues qui feront double emploi avec celles du projet de loi S-38 lorsqu'il aura été adopté. Cela soulève deux questions : d'abord, il devra y avoir uniformité entre la Loi sur le commerce des spiritueux et le règlement. Par exemple, sans modification de la disposition B.02.033 du Règlement, la disposition du projet de loi S- 38 qui permet le mélange de 1 à 1.5 p. 100 de rhum canadien avec du rhum des Antilles pourrait être incompatible avec l'interdiction générale d'ajouter du rhum canadien à un rhum importé.

Deuxièmement, il faut absolument qu'aucune disposition ne soit supprimée du Règlement sur les aliments et drogues sans une évaluation complète de ces suppressions après des consultations avec l'industrie.

Nous observons également qu'en vertu du paragraphe 3(2), le projet de loi propose une exception pour une marque de commerce enregistrée ou qui a fait l'objet d'une demande d'enregistrement avant le 1er janvier 1996. On imagine que cette dérogation est censée faire écho avec l'accord avec l'UE prévu à l'article 34(3) de l'Accord sur les vins et les spiritueux. Toutefois, à notre avis, cet article ne vise que les noms de spiritueux désignés et non tous les noms qui figurent dans le projet de loi.

Nous savons que les fonctionnaires d'Agriculture et Agroalimentaire Canada ont entrepris un examen en profondeur des marques de commerce enregistrées ou qui ont fait l'objet d'une demande d'enregistrement pendant les négociations avec l'UE. Même si nous ignorons quel effet concret ce manque d'uniformité pourrait avoir, nous voulons nous assurer pour les raisons données plus haut que le S-38 n'a pas pour effet imprévu de réduire la protection accordée à nos principaux partenaires commerciaux. C'est pourquoi nous avons demandé confirmation que le texte ne limite pas la protection applicable aux spiritueux qui ne figurent pas à l'article 17 de l'accord entre le Canada et l'UE.

Comme je l'ai dit plus tôt, le texte a un rôle important à jouer dans la poursuite du succès des exportations de spiritueux canadiens. Il est inextricablement lié à la stratégie d'exportation de l'industrie et facilitera l'application de cette stratégie en ce qu'il réglera plusieurs questions de commerce international en suspens dans ce domaine. Pour cette raison, nous nous sommes demandé s'il y avait d'autres questions commerciales de ce genre qui pouvaient être réglées grâce à cette loi.

Certains sénateurs savent peut-être que les dispositions actuelles concernant le certificat d'âge et d'origine des spiritueux ont d'abord figuré dans le règlement ministériel sur les distilleries. Ces dispositions, entre autres, ne sont plus rattachées à une loi depuis le renouvellement de la Loi canadienne sur l'accise de 2001. Vu le lien direct entre ces dispositions et le commerce international de spiritueux, la question se pose de savoir s'il serait possible que le S-38 incorpore également les exigences en matière de certificats d'âge et d'origine.

Pour l'heure, nous ne proposons ni ne recommandons l'insertion de ces dispositions dans le texte. Nous nous contentons de signaler qu'il serait peut-être utile d'examiner le bien-fondé de l'idée. Nous espérons qu'Agriculture et Agroalimentaire Canada et d'autres envisageront la possibilité de faire de la Loi sur le commerce des spiritueux le point d'attache de ces dispositions. Nous attendons leur réaction et celles d'autres acteurs.

En résumé, Spirits Canada appuie l'adoption du projet de loi S-38 moyennant des clarifications concernant les questions soulevées ici. De plus, nous nous attendons à continuer de travailler étroitement avec les autorités canadiennes et à leur communiquer toute observation ou suggestion supplémentaire quand nous aurons eu l'occasion d'examiner plus à fond ces questions.

Je vous remercie de l'occasion qui m'a été donnée de comparaître et de présenter nos vues. Nous serons heureux de répondre à vos questions.

M. Milan Stolarik, conseiller, West Indies Rum and Spirits Producers' Association : Je serai très bref. La West Indies Rum and Spirits Producers' Association est très favorable à ce projet de loi. Elle souhaiterait néanmoins suggérer quelques amendements mineurs à l'annexe du projet de loi afin de la mettre à jour et d'y corriger une erreur.

Avant de passer aux détails, j'aimerais dire que, comme vous le savez, le Canada et les pays des Antilles du Commonwealth jouissent d'une relation spéciale depuis plus de 200 ans. Il y a aussi la Loi sur le commerce entre le Canada et le CARICOM, et le Canada a pris des engagements auprès des pays des Antilles du Commonwealth au moyen du Protocole sur le rhum, signé il y a une quinzaine d'années. Il y a aussi une loi commerciale, appelée CARIBCAN, qui est en fait un accord de libre-échange à sens unique d'importation de produits des Antilles du Commonwealth au Canada. Il s'agit là d'une longue histoire.

Spécifiquement, la WIRSPA aimerait recommander deux amendements, en page 7, à l'alinéa 14.(1)a) de l'annexe du projet de loi S-38. Le premier consiste à supprimer la mention « d'un pays des Antilles du Commonwealth » après « produits de la canne à sucre », et le second consiste à remplacer « distillé et fermenté » par « fermenté et distillé ».

L'alinéa 14.(1)a) se lirait désormais comme suit :

14.(1) Le rhum antillais peut être vendu à ce titre dans les cas suivants :

a) il a été obtenu des produits de la canne à sucre, et fermenté et distillé dans un pays des Antilles du Commonwealth »

Les raisons de ces amendements sont les suivantes. La norme de la communauté des Caraïbes (CARICOM) applicable au rhum est entrée en vigueur en 1992, à la suite du Règlement sur les aliments et sur les drogues qui, depuis 1989, régit sur ce domaine d'activité.

La norme de la CARICOM applicable au rhum, dont je crois que vous avez obtenu une copie, ne spécifie aucun critère particulier quant à l'origine de la matière première. De fait, l'origine de la matière première n'est spécifiée pour aucun autre des produits originaires des pays figurant à l'annexe du projet de loi. Il semble par conséquent raisonnable et logique de modifier l'énoncé de tout nouveau texte de loi afin qu'il reflète celui de la norme de la CARICOM applicable au rhum et de corriger certaines des erreurs faites il y a 16 ans.

La raison du second amendement est que la mélasse est d'abord fermentée, puis distillée, et non l'inverse. Il s'agit d'une simple erreur mais qui figure dans la loi. Elle a été corrigée dans le Règlement sur les aliments et drogues de 1989.

J'ignore quelle est la suite des événements, madame la présidente. J'espère que le comité recommandera ces changements à l'annexe du projet de loi S-38 pour qu'il comporte le moins d'erreurs et qu'il soit le plus à jour possible. Je serai heureux de répondre à vos questions. Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de m'adresser à vous.

La présidente : Sachez aussi que des représentants du ministère sont également ici pour entendre votre témoignage.

Le sénateur Tkachuk : Quelle est la différence entre ce que vous proposez et ce qui se trouve dans le projet de loi? Le but est-il d'être plus général pour que cela ne soit pas obligatoirement des produits de la canne à sucre, parce qu'ils ne la cultivent pas? Comment que cela fonctionne-t-il?

M. Stolarik : À l'heure actuelle, il n'y a pas de problème à notre connaissance dans les Antilles. Dans deux ou trois ans, certains pays des Antilles seront peut-être dans l'incapacité de continuer à cultiver la canne à sucre pour des raisons économiques. Ils devront peut-être importer du sucre. Ils peuvent le faire aujourd'hui, d'autres pays des Antilles du Commonwealth, mais il est plus économique de l'importer du Venezuela ou du Brésil où la canne se cultive à grande échelle.

Le sénateur Tkachuk : En ce qui concerne la matière première, qu'ils veulent conserver, ils prévoient un moment où ils devront l'importer; ce serait comme remplacer le malt et l'orge de la Saskatchewan par celui de l'Ohio. C'est ce que vous demandez?

M. Stolarik : Je pense que oui.

Le sénateur Tkachuk : Ne peut-on pas importer de la canne à sucre du Brésil et faire du rhum des Antilles ici?

M. Stolarik : Non, parce qu'il est précisé qu'il doit être distillé dans un pays des Antilles du Commonwealth.

Le sénateur Tkachuk : Craignent-ils que le Brésil fabrique le rhum?

M. Stolarik : Non, ce n'est pas ce qu'ils craignent. Ils redoutent de ne pas avoir la matière première venant de pays des Antilles du Commonwealth pour fabriquer un rhum qui respecte la norme.

Le sénateur Tkachuk : Je m'y perds. J'ai plusieurs questions à poser. Le projet de loi nous parle d'un accord avec l'Union européenne. Qu'en est-il des pays d'Amérique du Sud. Avons-nous un accord avec eux pour protéger les marques, comme le whisky canadien, ou au moyen de l'ALENA?

M. C.J. Hélie, vice-président exécutif, Association des distillateurs canadiens : Oui, le Chili au moyen de l'ALE.

M. Westcott : Pas forcément avec les autres pays. De toute évidence, nous aimerions explorer la possibilité d'avoir des accords de ce genre avec d'autres pays pour protéger l'appellation « whisky canadien ».

Il faut se donner des priorités. L'Europe est une grande priorité pour nous surtout qu'elle continue de s'agrandir.

Le sénateur Tkachuk : Aidez-moi. Vous m'avez peut-être entendu poser les questions tout à l'heure aux représentants du gouvernement sur ce point. Dans le cas du Coca-Cola, ce qui n'est pas protégé, c'est le cola; il existe en effet le Pepsi-Cola, fabriqué par une autre compagnie. Le Club du Président fabrique aussi le Cola du Président. Le mot whisky est l'équivalent du mot cola. Ce que vous protégez, c'est le whisky canadien parce qu'il y a le bourbon, le Jack Daniels, diverses sortes de whiskies. Est-ce que ce n'est pas une question de droit d'auteur? Pourquoi est-ce que l'industrie ne protège pas son droit d'auteur au Brésil ou en France? Pourquoi avons-nous attendu si longtemps? Est-ce la raison pour laquelle nous faisons ceci aujourd'hui?

M. Westcott : Je ne pense que nous avons attendu. Il y a des niveaux. Il est certain que pour ce qui est des marques de commerce, nos compagnies ont été très actives. Beaucoup de pays dans le monde fabriquent des produits qui, avec le temps, ont fini par être reconnus comme étant uniques à tel ou tel pays. Dans notre cas à nous, oui, il y a effectivement plusieurs whiskies qui sont produits dans le monde. Nous, nous produisons un produit distinctif appelé whisky canadien. C'est différent du scotch, qui est écossais, et du whisky irlandais; ce n'est pas du Tennessee whisky : c'est du whisky canadien. Les amateurs de whisky font la distinction entre le nôtre et celui des autres. Quand vous voulez investir dans l'exportation et investir au pays pour fabriquer des produits à exporter, il faut que sur les autres marchés vous puissiez vendre le whisky avec la garantie que l'acheteur sache bien que ce qui est dénommé whisky canadien provient bien du Canada.

Le sénateur Tkachuk : N'a-t-on pas cette assurance quand on achète du Coca-Cola en Saskatchewan, même s'il est originaire d'Atlanta? Nous avons une usine de Coca-Cola; à Prince Albert, on a la formule et on fabrique du Coca- Cola. Il a le même goût que dans le Dakota du Nord.

M. Westcott : Je ne peux pas parler pour les boissons gazeuses. Dans l'industrie de l'alcool de bouche, en particulier celle des spiritueux, le monde entier reconnaît depuis longtemps qu'il existe des produits distinctifs. Coca-Cola ou les États-Unis ont-ils fait une erreur ou été inattentifs il y a de nombreuses années et omis d'obtenir ce genre de traitement pour son produit, je l'ignore. Je ne peux pas vous répondre. Dans le cas des spiritueux, c'est une chose reconnue et acceptée depuis longtemps. Nous nous définissons en fonction de l'origine et de la méthode de fabrication de nos produits. Les pays producteurs ont établi des règles rigoureuses pour définir le produit et sa méthode de fabrication. Chacun sait donc bien quelle est la provenance, en particulier le consommateur au magasin.

Nous avons eu des problèmes dans notre industrie en particulier. L'industrie des spiritueux a été victime de « commercialisation trompeuse » et de fraude dans un certain nombre d'autres pays où les gens prétendaient produire ce qu'ils appelaient du « whisky canadien » et quelques autres variétés de whiskies, à partir d'autres ingrédients. Nous espérons que ce projet de loi permettra de protéger la reconnaissance de notre marque.

Si je ne peux pas garantir aux membres de mon association que l'investissement qu'ils font pour trouver des débouchés à l'exportation et que les investissements qu'ils font pour produire ces biens ici au Canada afin d'approvisionner ces marchés d'exportation sont sûrs, si je ne peux pas leur garantir que ces biens seront protégés et qu'ils ne seront pas exploités par quelqu'un qui commercialise des biens frauduleux en exploitant la reconnaissance de nos marques, ils cesseront de faire de tels investissements. Nous voulons protéger les investissements que nous faisons pour produire nos marchandises et protéger l'utilisation légitime de nos marques de commerce.

Le sénateur Tkachuk : J'essaie de comprendre. Quelqu'un en France a une petite distillerie. Il fabrique du whisky en utilisant la même recette que nous. Serait-il empêché d'utiliser la désignation « whisky canadien » même si son produit a exactement le même goût?

M. Westcott : Selon nous, le produit n'aurait pas le même goût et ne serait pas du « whisky canadien ».

Le sénateur Tkachuk : C'est vrai, mais vous pouvez lui intenter une poursuite, n'est-ce pas, alléguant qu'il prétend vendre un whisky canadien et qu'il utilise la marque « whisky canadien »?

M. Hélie : Non, parce que le droit des marques de commerce confère un droit privé. On peut enregistrer et protéger une marque commerciale, mettons « Canadian Club » mais « whisky canadien » est une marque qui appartient collectivement à l'industrie. Une entreprise ne peut pas enregistrer et protéger à elle seule la désignation « whisky canadien ».

Le sénateur Tkachuk : Ce serait comme tenter d'enregistrer « cola ». C'est ce que vous tentez de faire. Est-ce dans l'intérêt du consommateur?

M. Hélie : Il peut être assuré d'une qualité supérieure et que tout produit qui porte la désignation « whisky canadien » est effectivement du whisky fabriqué au Canada.

Le sénateur Mitchell : Je comprends que le sénateur ait du mal à saisir cette notion parce que ce n'est pas facile. Je pourrais peut-être explorer plus à fond cette question. Il me semble que la distinction à faire tient de la comparaison que l'on pourrait faire entre Pepsi-Cola canadien et Coca-Cola canadien. Vous pouvez protéger la marque de commerce Coca-Cola mais il faudrait que vous protégiez un cola canadien dans le cadre d'une entente commerciale pour les raisons que vous nous avez exposées, n'est-ce pas?

M. Westcott : Je ne crois pas que le Canada ait inventé les règles qui encadrent les transactions commerciales dans le monde entier. Il est important de ne pas l'oublier. Le fait est que depuis de nombreuses années, l'industrie du whisky écossais fabrique et exporte un produit appelé whisky écossais et que l'industrie a tout fait pour s'assurer que personne n'essaie de vendre un produit appelé whisky écossais qui n'aurait pas été fabriqué en Écosse selon ses spécifications.

Les distillateurs de bourbon font la même chose aux États-Unis et les distillateurs de cognac font la même chose en France. Nous voyons le même phénomène dans le secteur vinicole depuis des années. Personne ne semble avoir de difficulté à accepter qu'un vin de Bordeaux provienne de Bordeaux. Dans le passé, j'ai été président de l'Institut du vin et je peux vous dire que c'est ainsi que les choses se passent. Je ne suis pas certain de comprendre vos préoccupations.

Certains systèmes ont été mis en place sur une longue période de temps et nous tentons, à titre de pays relativement petit qui fabrique un produit unique que personne d'autre au monde ne fabrique et ne vend mais que nous exportons avec succès, de préserver notre capacité de fabriquer ce produit, d'assurer la reconnaissance de notre marque et d'attirer des investissements.

Nous utilisons des substrats canadiens, du savoir faire canadien et des entreprises de conditionnement canadiennes et nous voulons nous assurer que quand ces produits quittent le Canada, chacun sache que quand l'étiquette de la bouteille dit « whisky canadien » c'est effectivement du véritable whisky canadien qui se trouve dans la bouteille. C'est autre chose de savoir si cela vous plaît. Vous préférez peut-être une autre sorte de whisky ou un produit tout à fait différent, mais nous voulons pouvoir garantir que c'est notre whisky dans la bouteille et que c'est un produit authentique.

Le sénateur Mitchell : À la page 4 de votre mémoire, vous expliquez que le régime est différent si vous importez en vrac et que vous embouteillez au Canada. Il y a deux catégories de produits ou de sortes de produits différents. Vous dites que les normes pourraient ne pas être les mêmes et que cela risque de semer la confusion.

Il me semble qu'une série de règles est plus restrictive que l'autre. Il me semble aussi qu'une des séries de règles découle de l'entente avec l'Union européenne et que l'autre découle de l'ALENA et que nous ne sommes pas libres de décider quelles règles nous édicterons parce que nous négocions avec deux entités distinctes.

Ensuite, si nous devions fixer un objectif, préféreriez-vous que nous choisissions les règles les plus restrictives, ce qui serait peut-être le plus facile à obtenir dans les deux cas ou dans tous les cas ou, gêné dans un cas par des règles plus restrictives, préféreriez-vous que nous sacrifions la commodité d'une série de règles pour qu'au moins une partie des règles soit moins restrictive?

M. Westcott : Je vais demander à M. Hélie de vous répondre.

M. Hélie : Permettez-moi de préciser qu'aucun des deux types de produits mentionnés ici n'est visé par nos obligations en vertu de l'Accord sur les vins et les boissons spiritueuses que nous avons conclu avec l'Union européenne. Il s'agit plutôt de leur désignation en vertu du Règlement sur les aliments et drogues. Ces restrictions se trouvent dans le Règlement sur les aliments et drogues pour les deux séries de produits. Nous nous demandons tout simplement pourquoi certains produits seront dorénavant visés par le projet de loi S-38 tandis que d'autres produits continuent d'être énumérés dans le Règlement sur les aliments et drogues.

En l'absence de nouvelles informations, nous recommandons de laisser toutes les dispositions sur le coupage dans le Règlement sur les aliments et drogues et ne traiter dans le projet de loi S-38 que de la protection du nom des boissons spiritueuses, pour les deux catégories.,

Le sénateur Mitchell : Nous pourrions faire cela tout en respectant nos obligations aux termes des ententes?

M. Hélie : Nous le croyons.

Le sénateur Mitchell : Monsieur Stolarik, la question de la fermentation puis de la distillation par opposition à la distillation suivie de la fermentation est une question purement empirique qui ne tient qu'à la chronologie de la production de rhum, n'est-ce pas?

M. Stolarik : C'est exact.

Le sénateur Mitchell : J'aimerais entendre vos commentaires sur la réserve qu'a le gouvernement à l'idée de redéfinir le « rhum des Caraïbes » aux fins de ce projet de loi. Le gouvernement a répondu que c'est probablement une bonne idée mais que nous devrons le faire tout en respectant les engagements du Canada en vertu du Caribcan.

M. Stolarik : Je ne sais pas au juste quel est le raisonnement du gouvernement. J'ai participé aux négociations il y a de cela de nombreuses années mais je ne suis plus au fait de la situation. Je pense que le gouvernement tente de reprendre le libellé du Règlement d'application de la Loi sur les aliments et drogues et l'intégrer à ce projet de loi sans y apporter de modification. J'imagine que c'est ce qui convient le mieux au gouvernement.

Nous disons que si vous devez aller de l'avant avec ces changements, il faudrait changer quelques mots pour rendre le libellé plus acceptable aux producteurs.

Le sénateur Mitchell : Vous croyez que nous pourrions le faire unilatéralement plutôt que dans le cadre du processus de négociation des ententes?

M. Stolarik : Je ne suis pas certain qu'il y ait eu un véritable processus de négociation comme tel.

Le sénateur Mitchell : C'est intéressant. Merci.

Le sénateur Mercer : Monsieur Stolarik, j'ai posé plus tôt une question sur le rhum aux fonctionnaires du gouvernement. Je suis de la Nouvelle-Écosse où le rhum est la boisson spiritueuse préférée d'un grand nombre. Certains disent que nous en consommons depuis que nous sommes sevrés.

M. Stolarik : Du rhum des Caraïbes, si je peux me permettre de le dire, sénateur.

Le sénateur Mercer : Absolument.

Pourquoi nos discussions ne portent-elles que sur les pays des Antilles du Commonwealth? Sauf le respect que je dois à mon collègue qui se plaît à parler du genre de gouvernement qui existe à Cuba, nous avons depuis de nombreuses années d'excellentes relations commerciales avec Cuba. Les Cubains produisent du rhum. J'y ai goûté, comme d'autres aussi, et je le trouve très comparable au rhum provenant d'ailleurs aux Antilles.

Y a-t-il une raison qui explique l'exclusion du rhum cubain?

M. Stolarik : Le marché canadien n'est pas fermé au rhum cubain comme tel. Les Cubains peuvent vendre leur produit au Canada au même titre que n'importe qui d'autre par l'entremise des régies des alcools. Toutefois, ils ne peuvent pas faire ce que l'on permet aux pays des Antilles du Commonwealth, c'est-à-dire d'embouteiller leur rhum au Canada avec un coupage minime. Il existe une autre loi, dont j'hésite à parler, qui s'applique à ce cas-là. Les pays des Antilles du Commonwealth sont autorisés à exporter leur rhum au Canada en vrac et à l'embouteiller ici avec un coupage minime, comme le prévoit la loi. Je crois que le coupage est de 1 à 1,5 p. 100. Cela signifie qu'ils n'ont pas à expédier les bouteilles au Canada. Ils peuvent expédier le rhum en vrac, l'embouteiller ici et le vendre sous leurs marques de commerce respectives.

Je ne crois pas que Cuba ait le même droit. Les Cubains peuvent expédier ici leur rhum déjà embouteillé mais ils sont libres de le vendre ici comme n'importe qui d'autre.

Le sénateur Mercer : Vous objecteriez-vous à ce qu'ils soient ajoutés à la liste et qu'ils aient l'occasion d'expédier leur rhum en vrac au Canada et de l'embouteiller ici?

M. Stolarik : Je laisse aux fonctionnaires du gouvernement le soin de déterminer si le Canada a intérêt à autoriser cela.

Le sénateur Mercer : Je signale à mes collègues que Cuba est membre actif de l'Association d'amitié Canada-Antilles du Commonwealth. Je trouve bien curieux que Cuba soit inclus pour certaines choses et exclu pour d'autres.

Le sénateur Tkachuk : Aux termes de cette entente, les pays des Antilles sont autorisés à expédier leur produit ici et nous l'embouteillons. Ce sont les distillateurs qui ont les droits sur ce produit et qui l'expédient, n'est-ce pas?

M. Stolarik : C'est exact.

Le sénateur Tkachuk : Ils sont tous titulaires de permis ici de sorte que les distillateurs canadiens peuvent distiller les produits des Antilles. Ils ont un avantage concurrentiel sur Cuba et sur d'autres pays qui ne sont pas partie à l'entente. Cuba doit expédier du rhum en bouteille ici, ce qui est plus coûteux pour le consommateur dont nous nous préoccupons tous.

M. Stolarik : C'est exact. C'est là l'avantage qui a été accordé au pays des Antilles du Commonwealth par le gouvernement du Canada.

Le sénateur Tkachuk : Ce sont les seuls qui ont eu des ententes en matière de distillation?

M. Stolarik : Ils sont les seuls, à ma connaissance.

Le sénateur Oliver : Je vais être concis parce que le sénateur Mitchell a posé la question que je voulais poser. Il a expliqué de façon très claire un projet de loi complexe. Son exposé a été très utile.

À nos trois témoins, j'aimerais dire que les porte-parole du gouvernement ont fait avant vous un exposé sur ce projet de loi. Ils nous ont dit qu'ils proposeront trois amendements du gouvernement à ce projet de loi, dont certains proviennent du gouvernement et d'autres du secteur. Avez-vous vu les amendements? Êtes-vous au courant de leur existence? Savez-vous ce qu'est le but de ces amendements? Êtes-vous d'accord avec ces amendements?

M. Westcott : Nous visons tous le même objectif, à savoir d'adopter une mesure législative qui permettra au Canada de s'acquitter de ses obligations. Il en va de notre intérêt et de l'intérêt du Canada, croyons-nous, de donner suite à nos obligations de façon claire et nette. Nous avons discuté longuement avec le gouvernement de divers enjeux. Nous avons été encouragés de constater que le gouvernement nous a écoutés attentivement et qu'il s'est parfois montré sympathique à notre cause. Ce que nous voulons c'est de faire en sorte que les choses soient très claires. Je n'ai pas vu les amendements. J'ai hâte de les voir. J'espère qu'ils apporteront des précisions aux questions que nous avons soulevées et notamment celles dont nous avons discuté avec vous. J'estime que c'est positif.

Le sénateur Oliver : Peut-être que non.

M. Westcott : Peut-être que non mais pour l'instant j'ai plutôt tendance à leur accorder le bénéfice du doute parce qu'ils se sont montrés exceptionnellement ouverts lorsqu'ils nous ont expliqué ce qu'ils tentent de faire, leurs approches et leurs stratégies. Ils nous ont consultés. Dans certains cas, ils nous ont dit que certaines de nos propositions sont bonnes et qu'ils n'y avaient pas pensé eux-mêmes. On ne peut que juger aux actes et jusqu'à maintenant, ils ont eu un comportement exemplaire et nous sommes assez satisfaits.

Le sénateur Oliver : Le sénateur Mitchell a posé une question au sujet de Milan. Avant votre arrivée, j'ai posé aux fonctionnaires du gouvernement une question, que je ne vais pas répéter, au sujet de votre problème. Je leur ai dit que vous êtes mécontent de la définition du rhum, telle que présentée, et que vous souhaitiez un amendement. J'ai proposé l'amendement. Ils m'ont répondu qu'ils n'apporteraient pas l'amendement à ce projet de loi parce que cela serait jugé ultra vires, qui est une expression juridique et constitutionnelle. Ils m'ont répondu qu'il fallait que cela se fasse dans le cadre d'une entente commerciale et pas de cette façon. Voilà ce que vous a expliqué le sénateur Mitchell.

Savez-vous que la position officielle du gouvernement c'est qu'il ne proposera pas une loi qui contiendrait l'amendement que vous proposez?

M. Stolarik : Je ne savais pas que c'était la position officielle du gouvernement bien que je soupçonnais une certaine réticence.

Le sénateur Oliver : Ils nous l'ont dit ce soir avant votre arrivée. Ils nous ont dit que ce serait ultra vires.

M. Stolarik : Je ne sais pas si ce serait ultra vires ou non. Je laisserai aux avocats le soin de trancher mais je ne sais pas au juste ce que cela signifie dans le contexte du projet de loi.

Le sénateur Oliver : David Liston est leur avocat. M. Koestler l'a dit et l'avocat l'a confirmé.

M. Stolarik : Il faudrait que j'en discute plus longuement avec lui pour qu'il m'explique pourquoi il croit que ce serait ultra vires.

Le sénateur Oliver : D'après ce qu'ils ont dit, vous ne pourrez pas proposer votre amendement.

M. Stolarik : S'ils ont dit que ce serait ultra vires et qu'ils n'iront pas de l'avant avec cet amendement, je n'ai pas d'autre choix que d'accepter leur décision. Ils ont raison et il faudra un jour régler cette question dans le cadre d'une entente commerciale. Le texte de l'entente commerciale franchit lentement les étapes du processus législatif dans les deux chambres. Je crois qu'ils ont eu une réunion jusqu'à maintenant.

Le sénateur Peterson : La question est de savoir s'il serait possible d'inclure dans ce projet de loi des exigences relatives aux certificats d'âge et d'origine. Je crois savoir que l'âge a une incidence directe sur le prix de vente du produit. Qui s'occupe de cela actuellement? Quelle est la procédure? Quelles sont les étapes?

M. Wescott : Au Canada, la loi prévoit que le whisky doit être vieilli pendant trois ans. Si le whisky n'est pas conservé pendant trois ans dans de petits barils en bois, il ne peut pas être vendu sous l'appellation whisky canadien. Si le whisky ne contient pas 40 p. 100 d'alcool, il ne peut pas être vendu sous l'appellation whisky canadien. S'il n'est pas fabriqué au Canada, il ne peut pas être vendu sous l'appellation whisky canadien. La plupart des pays du monde qui produisent du whisky ont des normes pas identiques mais comparables aux nôtres, pour déterminer ce qui constitue un produit de leur pays.

Il convient de dire qu'en général, la valeur augmente effectivement en fonction de l'âge. Nous sommes une industrie unique en ce sens que nous fabriquons nos propres produits et nous les cachons ensuite. Cela nous coûte beaucoup d'argent de les cacher pendant une longue période de temps. Si vous buvez du whisky de 10 ans, de 15 ans ou de 20 ans, vous devez comprendre que cela coûte beaucoup d'argent de produire un tel whisky — d'abord de le produire puis d'acheter le baril et y faire vieillir le whisky pendant un certain temps. Votre hypothèse est exacte. Plus le whisky vieillit, plus il prend de la valeur, en règle générale.

Au Canada et dans la plupart des autres pays qui produisent du whisky, il existe des règles très strictes qui ont pour but de garantir le prélèvement de taxes dues. Les renseignements sont consignés strictement pour que l'on puisse vérifier quand le produit a été mis dans les barils, où il est stocké et pendant combien de temps. Le gouvernement du Canada participe à cela en attestant que le produit a été vieilli pendant un certain temps et qu'il a effectivement été produit au Canada. De nombreux autres pays qui produisent du whisky ont des lois semblables.

Si nous voulons pouvoir exporter notre whisky, nous devons satisfaire aux exigences des divers pays, y compris les États-Unis, qui exigent que nous leur fournissions un certificat d'âge et d'origine validé par le gouvernement avant de pouvoir exporter ce produit sous l'appellation de whisky canadien.

Tout ça pour dire, « Vous avez raison, et voici comment et pourquoi. »

Le sénateur Peterson : C'est donc une question de commercialisation, et il n'est pas nécessaire de mettre cela dans le projet de loi.

M. Wescott : Il n'est pas nécessaire de le mettre dans ce projet de loi-ci, mais si les pays dans lesquels nous essayons d'exporter disent : « Vous ne pouvez pas faire entrer ce produit dans notre pays à moins de pouvoir montrer un certificat d'âge et d'origine validé par le gouvernement », ce serait une question importante pour l'industrie, et non simplement une question de commercialisation.

M. Hélie : Historiquement, ces exigences faisaient partie du Règlement pris en vertu de la Loi sur l'accise. En 2001, lorsque la nouvelle Loi sur l'accise est entrée en vigueur, cet élément et plusieurs autres sont devenus orphelins. Ils sont dans les limbes et ont besoin d'un port d'attache législatif, et nous sommes à la recherche de moyens législatifs convenables qui nous permettent de trouver des ports d'attache permanents pour ces dispositions réglementaires en suspens qui faisaient partie antérieurement de la Loi sur l'accise.

M. Wescott : Nous ne disons pas : « Mettez-le dans le projet de loi S-38. » Nous disons plutôt : « Cela mérite réflexion. »

Le sénateur Peterson : Ce que vous dites, c'est qu'il faut le mettre quelque part.

M. Wescott : Oui.

Le sénateur Chaput : Monsieur Stolarik, vous avez parlé de l'alinéa 14(1)a). Pourriez-vous répéter les modifications qu'on devrait y apporter, selon vous?

M. Stolarik : Oui, à l'alinéa 14(1)a), après les mots « il a été obtenu des produits de la canne à sucre », supprimez simplement la mention « d'un pays des Antilles du Commonwealth », et ensuite faites en sorte que cela se lise comme suit : fermenté et distillé sur place ».

Le sénateur Chaput : Est-ce que cela veut dire que leurs produits pourraient provenir d'un autre pays? Est-ce qu'on pourrait l'acheter à Cuba, le faire entrer dans son pays et fabriquer le rhum, par exemple?

M. Stolarik : Vous voulez dire la mélasse?

Le sénateur Chaput : Oui.

M. Stolarik : On pourrait faire entrer la mélasse, oui.

Le sénateur Chaput : Si on le modifie tel que vous le souhaitez.

M. Stolarik : Oui.

Le sénateur Chaput : Si on le laisse tel quel, est-ce possible?

M. Stolarik : Tout est possible, oui.

Le sénateur Chaput : Même si on prévoit...

M. Stolarik : Il y a d'autres dispositions réglementaires qui suivent. L'alinéa (1)b) précise qu'il faut que le produit soit distillé dans un pays des Antilles du Commonwealth. Il y a d'autres mesures de protection là-dedans.

Le sénateur Chaput : La modification que vous souhaitez qu'on apporte, c'est en raison de la canne à sucre par opposition à la mélasse? Je m'excuse, je ne comprends pas.

M. Stolarik : Je m'excuse de ne pas m'être expliqué comme il faut. On obtient la mélasse de la canne à sucre. On commence par la canne à sucre. On la coupe et on en obtient la mélasse. On la fermente et on distille le produit final pour en arriver à une boisson alcoolisée comme le rhum.

M. Hélie : Je pourrais essayer de l'expliquer. Vous avez demandé si on pouvait aujourd'hui importer de la canne à sucre d'un pays des Antilles qui n'est pas membre du Commonwealth, comme Cuba, dans un pays des Antilles du Commonwealth, la fermenter, la distiller, et l'appeler rhum antillais. Non, on ne pourrait pas faire ça aujourd'hui. En vertu de la modification proposée, ce serait permis. C'est ce que j'en comprends.

M. Stolarik : Mais seulement dans un contexte canadien.

Le sénateur Chaput : Je comprends, oui.

Le sénateur Robichaud : Cela impliquerait de changer la façon dont les choses se font dans ces pays-là?

M. Stolarik : D'une certaine manière, oui, vous avez raison. La norme antillaise ne précise pas d'où vient l'intrant, en l'occurrence, la canne à sucre. Dans la loi canadienne, nous précisons l'intrant pour le rhum, c'est-à-dire, la canne à sucre cultivée dans les Antilles du Commonwealth.

Le sénateur Robichaud : Ce n'est pas vraiment notre rôle, n'est-ce pas?

M. Stolarik : Je penserais que non.

Le sénateur Robichaud : Il serait peut-être bon de l'omettre?

M. Stolarik : C'est ce que nous recommandons.

Le sénateur Tkachuk : Ainsi, on peut vendre le rhum antillais, sans être obligé de cultiver quoi que ce soit aux Antilles. On pourrait l'acheter moins cher au Venezuela et au Brésil.

M. Stolarik : On pourrait acheter la canne à sucre dans ces pays-là, mais il faut toujours la distiller dans un pays des Antilles du Commonwealth.

Le sénateur Ringuette : Les pays des Antilles du Commonwealth, en ce qui concerne les importations, jouissent du statut de nation la plus favorisée?

M. Stolarik : Mieux encore. C'est le meilleur statut qui soit. Autrement dit, il y a la nation la plus favorisée, et ensuite, il y a le tarif de préférence général. C'est le meilleur qui soit. Ces pays-là peuvent exporter au Canada en bénéficiant d'un taux de droit nul. Ils sont comme les PMA, les pays les moins avancés.

Le sénateur Ringuette : Quel serait le tarif d'importation sur le rhum cubain en bouteille puisque cela semble être le seul moyen de le faire entrer au Canada.

M. Stolarik : J'ignore la réponse. Il y a une taxe d'accise.

Le sénateur Ringuette : Il y aurait une taxe d'accise sur ce produit par rapport au produit des Antilles du Commonwealth?

M. Stolarik : Je crois que oui.

M. Hélie : Le droit d'importation sur le rhum équivaudrait à environ deux cents par bouteille de 750 millilitres.

M. Stolarik : Donc c'est minime.

La présidente : Merci beaucoup d'avoir été des nôtres ce soir. Ceci constitue une partie importante des séances concernant ce projet de loi. Comme vous, nous apprendrons quels seront les amendements jeudi, et nous avons hâte.

La séance est levée.


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