Délibérations du comité sénatorial permanent des
Banques et du commerce
Fascicule 7 - Témoignages du 17 février 2005
OTTAWA, le jeudi 17 février 2005
Le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce se réunit ce jour à 11 h 2 pour examiner les questions concernant les consommateurs dans le secteur des services financiers et en faire rapport.
Le sénateur Jerahmiel S. Grafstein (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce est heureux de reprendre ses audiences sur la supervision des mécanismes de protection des consommateurs dans le secteur financier. Nous nous réjouissons d'accueillir notre témoin suivant, représentant la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, qui est essentiellement un groupe de petites entreprises.
Madame Swift, veuillez vous présenter et nous présenter aussi votre collègue. J'espère, comme je l'ai déjà dit, que vous serez aussi brève que possible dans votre déclaration liminaire, car je sais que les sénateurs ont beaucoup de questions à poser; cela leur permettra d'examiner le sujet de manière plus approfondie.
Mme Catherine Swift, présidente et chef de la direction, Fédération canadienne de l'entreprise indépendante : Merci beaucoup, Monsieur le président. Nous sommes très heureux d'être ici. Je m'appelle Catherine Swift. Je suis la présidente de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, organisme qui regroupe des petites entreprises. Je suis accompagnée par mon collègue, André Piché, notre directeur des Affaires nationales, qui a son bureau ici à Ottawa.
J'essayerai d'être brève. Je crois que vous avez reçu notre documentation hier et j'espère qu'elle vous sera utile. Je souhaiterais souligner certaines de nos préoccupations majeures. Tout ce domaine est extrêmement important pour le secteur des petites entreprises, tant du point de vue des banques que de celui des compagnies d'assurances.
Pour commencer, je tiens à rappeler l'importance du secteur des petites entreprises au Canada. Actuellement, près de la moitié du produit intérieur brut de notre pays est représenté par ce secteur. Lorsque nous considérons la création d'emplois nette au cours de n'importe quelle période, nous constatons qu'environ trois quarts des nouveaux emplois sont créés dans ce secteur. Indiscutablement, il s'agit là d'une composante très dynamique et en pleine croissance de l'économie canadienne.
Une des pratiques qui fait l'originalité de la FCEI est que nous ne prenons jamais position sur une question, quelle qu'elle soit, avant d'avoir sondé nos membres à ce sujet. Nous avons inclus à la page 3, dans la figure 1, les résultats d'un des sondages que nous faisons en permanence, ce que nous appelons notre baromètre trimestriel des affaires. Il s'agit essentiellement d'une mesure destinée à essayer de prévoir ce qui va se passer dans l'économie et dans le domaine de l'emploi, etc.
C'est une enquête que nous faisons depuis 1987. Le graphique que vous avez ici ne vous fournit des indications que sur ces dernières années, mais il montre qu'il s'agit là d'un prédicateur étonnamment exact de l'économie canadienne, ce que nous sommes ravis de voir. C'est un outil intéressant qui est très largement utilisé par tout le monde, depuis la Banque du Canada jusqu'aux ministères des Finances de tout le pays.
En ce qui concerne la composante bancaire de l'équation, notre organisation a fait beaucoup de recherches. Nous allons fêter cette année le 35e anniversaire de la FCEI; au cours de cette période, nous avons effectué de nombreuses recherches sur diverses questions concernant le secteur bancaire. Nous ne tenons cependant pas à vous surcharger aujourd'hui de toutes ces questions, car nous voulons simplement souligner quelques-unes des principales conclusions auxquelles nous sommes parvenus dans un passé récent.
Nous avons constaté certaines tendances qui ne sont pas encourageantes dans le secteur bancaire. Comme vous le verrez dans la figure 2, nous avons demandé à nos membres, assez récemment — c'était en 2002, nos questions portent habituellement sur une période de trois ans — s'ils avaient constaté une amélioration sur le plan de la concurrence. Comme vous vous en souviendrez peut-être, le rapport Mackay a suscité un certain nombre de changements — auxquels nous étions très favorables — en faveur d'une compétitivité accrue dans le secteur bancaire au Canada. Par- delà les banques, j'étends ces observations aux coopératives d'épargne et de crédit et aux autres institutions financières de cette nature. Nous avons constaté que nos membres n'ont pas vraiment noté d'amélioration dans ce domaine; d'autres groupes l'ont peut-être fait, mais nos membres n'ont pas encore noté d'amélioration sur le plan de la concurrence; il s'agit là d'une question clé.
Nous avons également observé une tendance générale à une plus large utilisation de la technologie, ce qui n'a rien de surprenant — tout le monde l'a fait, dans tous les secteurs. Cependant, bien que nos membres soient tout à fait prêts à adopter la technologie, ils ne considèrent pas qu'elle remplace parfaitement la petite banque locale multiservices. Comme nous l'avons constaté, dans cette évolution vers une dépendance presque totale à l'égard de l'électronique, nous avons perdu, dans certains domaines, les contacts personnels qui sont très importants pour toutes nos petites entreprises.
Nous avons également constaté de nombreuses fusions de banques. Encore une fois, il n'y a là rien de surprenant étant donné ce qui se passe dans l'industrie, mais ce phénomène est particulièrement fréquent dans les zones non urbaines. Dans les zones rurales, nous constatons que cela a eu des répercussions très profondes et que la disponibilité des institutions octroyant des crédits s'en est trouvée réduite.
Dans l'ensemble, la situation dans le domaine des prêts aux petites entreprises est assez curieuse. C'est ce qu'illustre la figure 4 à la page 6 — Prêts des banques à charte aux entreprises. Comme vous pouvez le voir, nous les avons subdivisés — il s'agit des données provenant de la Revue de la Banque du Canada — entre les prêts de plus de 200 000 $ et ceux de moins de 200 000 $. Vous constaterez que dans la première catégorie, le nombre a augmenté et qu'il est demeuré stable, voire même a un peu diminué pour les prêts de moins de 200 000 $. Le crédit moyen recherché normalement par un de nos membres est d'environ 80 000 $, soit donc nettement moins de 200 000 $, mais c'est de cette façon que la Banque du Canada présente les données.
Si nous passons maintenant à la figure 5, nous constatons que, dans l'ensemble, nos membres comptent de moins en moins sur les institutions financières dites traditionnelles. Il y a de nombreuses raisons à cela et nous les examinerons si vous le désirez.
Ce qui nous paraît également intéressant, c'est que cette tendance ne semble pas avoir varié au cours des différents cycles de l'économie. Normalement, lorsque l'économie est forte, on peut s'attendre à ce qu'il y ait une augmentation de la demande de prêts, et que l'inverse se produit lorsque l'économie est plus léthargique. En fait, nous n'avons guère constaté de rapport avec ce qui se passe dans le cycle économique, ce qui soulève un certain nombre de points intéressants.
Pour revenir à la question des contacts personnels qui sont si importants pour la petite entreprise qui veut emprunter de l'argent à un établissement financier, nos recherches ont révélé une constante : plus le taux de rotation des directeurs des comptes est élevé dans l'établissement, plus le taux de rejet des demandes est lui-même élevé. La figure 6 montre qu'il s'agit d'un phénomène vraiment très frappant — alors que près d'un tiers des demandes étaient rejetées lorsque l'établissement avait eu quatre directeurs des comptes ou plus sur une période de trois ans, le pourcentage de rejet n'était que de 11 p. 100, soit pratiquement le tiers du précédent, lorsque les directeurs demeuraient les mêmes. Ce n'est pas surprenant; quelqu'un de nouveau qui ne connaît pas l'entreprise ou son propriétaire a tendance à voir plus de risques, même si ce n'est pas le cas. Nous l'avons constaté à maintes reprises.
Nous communiquons régulièrement cette information aux institutions financières, mais le problème demeure. Nous avons toujours dit qu'il s'agissait d'un facteur de risque créé par ces institutions. Cela n'a rien à voir avec le risque réel qui s'attache à l'entreprise particulière. Donc, nous demeurons convaincus qu'il reste beaucoup de progrès à faire dans le domaine des relations avec le directeur des comptes, et que cela serait extrêmement profitable aux petites entreprises emprunteuses. Par ailleurs, plus l'entreprise est petite, plus le taux de rejet est élevé. Habituellement, une nouvelle entreprise tend à être plus petite qu'une entreprise bien établie. Une des raisons de ce taux de rejet tient au fait que l'entreprise en question n'a pas encore établi de solides références. Cela dit, nous voulons que nos nouvelles petites entreprises prospèrent, croissent en importance et fournissent des possibilités d'emploi. L'adoption de mesures qui permettraient de réduire ce taux de rejet chez les petites entreprises serait une bonne politique économique.
Du point de vue de la réglementation, les banques ont établi, il y a un certain nombre d'années, leur propre code de conduite, document que nous avons remis aujourd'hui au greffier du comité. Nous pensions qu'il s'agissait là d'un geste positif des banques pour de nombreuses raisons. Cependant, certaines banques ne respectent pas leur code. Nos sondages ont permis de découvrir dans certains domaines que pour 27 p. 100 des propriétaires, l'établissement financier ne donnait pas de raison pour le rejet de leur demande de prêt. Nous savons que certaines institutions s'étaient penchées sur la question et cela peut être utile. Lorsqu'elles jugent que la demande ne leur convient pas, certaines institutions pourraient aider le demandeur à modifier la nature de sa demande afin de la rendre acceptable pour elles ou pour une autre institution. Nous n'avons rien trouvé à ce sujet et nous avons donc demandé à nos membres si les institutions avec lesquelles ils traitent leur fournissent des renseignements sur des sources de financement de remplacement. Plus de 83 p. 100 d'entre eux ont répondu par la négative. Nous considérons que les banques à charte du Canada jouissent de nombreux privilèges et d'une forte protection sur leurs marchés. Le quid pro quo joue dans ces domaines. Certaines institutions nous servent bien, et je crois que cela ne nuit pas à leurs résultats nets. On pourrait cependant encourager les banques à mieux respecter leurs propres codes de conduite.
Indiscutablement, ces dernières années, le secteur des assurances représente une question brûlante pour les PME et, je le soupçonne pour la plupart des Canadiens. On accorde toujours une place excessive au secteur de l'automobile qui représente près de la moitié de l'industrie des assurances. Nos politiciens en entendent beaucoup plus parler que des primes d'assurance des biens d'entreprises. Nous le savons très bien, et depuis plusieurs années, nous collaborons de toutes sortes de manière avec l'industrie des assurances, au départ pour essayer de comprendre ce qui se passait et pour décider s'il était possible d'adopter des politiques ou des pratiques qui contribueraient à améliorer la situation de quelle que façon que ce soit.
Nous savons que bon nombre des crises dans le domaine des assurances, au cours de ces dernières années, se sont produites pour diverses raisons. C'est un problème global, qui n'est pas du tout limité au Canada ou à l'Amérique du Nord. Bien des choses échappent à notre contrôle, et certainement au contrôle du gouvernement quel qu'il soit, étant donné des situations telles que les effets de la catastrophe du 11 septembre sur le marché des valeurs mobilières. Nous avons cependant essayé de déterminer si le problème est lié aux politiques ou aux pratiques de l'industrie. Notre organisation a fait un effort considérable pour mieux informer ses membres car dans de nombreux cas, la situation pourrait être quelque peu améliorée si le consommateur était bien informé. Comme je l'ai déjà dit, nous savons que sur le plan politique, les primes d'assurance automobile ont attiré l'attention qu'elles méritaient. Sur le plan des affaires, nos membres nous ont raconté des histoires d'horreur sur ce qui leur est arrivé dans le secteur de l'IARD. Pour certains, leurs primes triplaient ou quadruplaient, alors que pour d'autres les garanties étaient réduites et, le pire de tout, certaines entreprises ne pouvaient pas se faire assurer pour quel que montant que ce soit. Elles se trouvaient donc obligées de s'assurer elles-mêmes ou d'espérer que le hasard ferait bien les choses. Nous avons entendu parler de toutes sortes de situations regrettables.
Il y a un certain temps que nous réclamons que le gouvernement mène une enquête sur l'industrie, en particulier celle de l'assurance des entreprises. Il ne s'agit pas uniquement de l'IARD car il existe d'autres produits d'assurance des entreprises. Cependant, d'après ce que nous ont dit nos membres, c'est l'IARD qui semble être dans la plus mauvaise passe. Nous les interrogeons fréquemment sur ce point depuis un certain nombre d'années. La figure 7 du mémoire que vous avez sous les yeux présente un de nos sondages les plus récents. Elle a été effectuée au cours de la seconde moitié de 2004; les données demeurent donc valables. Nous continuons à être surpris par la situation, en dépit du fait que nous savions que celle-ci avait atteint un niveau de crise au milieu de 2002. Nous continuons à demander à nos membres lequel des coûts des intrants suivants a un effet marqué sur leurs activités, et ils nous répondent que ce sont toujours les assurances qui viennent au premier rang, avant les frais de carburant. Bien entendu, les coûts du carburant ont considérablement augmenté, eux aussi, ces deux dernières années. Nous avons été surpris de ces réponses. Bien sûr, tous les coûts des intrants ont augmenté, mais celui des assurances demeure toujours au premier rang. Le problème continue à exister. Même si nous avons pu constater un ralentissement de la progression du taux, nous n'avons guère noté de réduction des coûts pour les petites entreprises. Nous commençons à en constater dans le domaine de l'assurance automobile, mais le problème demeure. Ce que nous voulons que le comité comprenne bien, c'est que le problème n'a pas disparu, loin de là.
Étant donné que le comité étudie ces deux secteurs, nous avons fait une comparaison des coûts des intrants financiers pour l'ensemble du pays, que nous vous présentons dans la figure 8. Nous avons constaté que les coûts d'assurance sont supérieurs aux coûts de gestion des comptes bancaires, qui ont eux aussi sensiblement augmenté et demeurent une préoccupation constante pour les petites entreprises. Il reste que les coûts d'assurance sont nettement supérieurs aux coûts de gestion des comptes bancaires dans l'ensemble du pays.
Lorsque nous avons examiné les questions concernant l'industrie bancaire, nous avons constaté que, ces derniers temps, il y avait eu beaucoup de travail de recherche, de documentation, de collecte de données et d'analyses. Au milieu des années 1980, la FCEI avait encouragé la publication des résultats de l'enquête sur le financement des petites entreprises qui avait été effectuée par Statistique Canada. Le comité permanent de l'industrie de la Chambre des communes s'est employé à améliorer les données provenant de cette industrie. Je me souviens qu'à l'époque, les banques étaient opposées à ce que l'on diffuse plus d'information sur les prêts consentis aux petites entreprises. On avait demandé à un comité d'une institution quel était le nombre de ces prêts aux petites entreprises et sa réponse avait été : Nous n'en savons rien. Il était curieux que les renseignements dont disposait une telle institution ne lui aient pas permis d'analyser les données de cette manière.
Depuis lors, nous avons considérablement amélioré notre capacité de recherche de données. Sans l'information requise, toute analyse est impossible. Aujourd'hui, la situation est nettement meilleure dans le secteur bancaire. Nous trouvons étrange que les banques, qui étaient opposées au départ à ce que plus de données soient rendues publiques, trouvent maintenant qu'il s'agit là d'un merveilleux outil de marketing. Elles comprennent désormais mieux leurs clients de la petite entreprise qui constituent un marché très rentable pour les banques. Il est permis de penser qu'une meilleure compréhension de leurs clients contribuera à améliorer les résultats nets de ces institutions.
Dans le domaine des assurances, cependant, il y a des lacunes considérables, bien que l'on dispose de données de qualité sur les primes d'assurance-automobile. Pour une grande partie des produits d'assurance des entreprises, l'IARD en étant un bon exemple, les données sont incomplètes, sans uniformité et difficiles à répartir par secteurs. Certains secteurs n'ont pas de problème alors que d'autres sont considérés comme étant à haut risque. Dans ces derniers, il est impossible de se faire assurer. Notre principal objectif, ces dernières années, a été de faire une analyse de la situation et d'établir une base de données. Il nous est impossible de déterminer le genre de politiques avantageuses que nous pourrions appliquer tant que nous n'aurons pas une bien meilleure idée des données qui existent que celle que nous avons actuellement.
Toute la question des statistiques mérite qu'on s'y attaque de manière constructive. Nous avons étudié le marché américain qui dispose d'une très bonne source de données; ce sont les courtiers d'assurances qui la tiennent. Aux États- Unis, ils rassemblent et publient leurs données par secteur et les répartissent de manière à ce qu'on puisse voir ce qui se passe, quelles sont les tendances, et ils utilisent des polices de niveau moyen pour les divers types d'assurances. Ce n'est pas là une tâche impossible pour nous. D'autres administrations le font bien.
Nous avons cependant le sentiment qu'il nous est toujours impossible de trouver un moyen de mieux faire face au phénomène persistant des cycles dans le domaine des assurances. Nous sommes réalistes et recherchons toujours des solutions axées sur le marché, mais nous ne connaissons pas plus de réglementation car nous ne pensons pas que cela soit du tout nécessaire. Cela dit, si nous parvenons à maîtriser cette question, nous pensons que cela constituera une excellente première étape et permettra de produire le genre de politique acceptable pour tous les acteurs.
Nous pensons qu'il serait excellent que l'industrie des assurances adopte un code de conduite volontaire, comparable à celui que les banques ont elles-mêmes adopté. Nous en avons discuté avec des groupes tels que le Bureau d'assurances du Canada et d'autres. Une des choses que nous constatons régulièrement est que non seulement les primes payées par nos membres ont considérablement augmenté au cours de ces dernières années, et que d'autres changements ont été apportés à leurs comptes, sans qu'ils en soient avertis. Nous avons constaté que plus d'un quart de nos membres n'avaient jamais été prévenus. Une augmentation de vos primes d'assurance est une chose; vous pouvez alors dire, très bien, je vais me serrer la ceinture et voir ce qu'on peut faire, mais plus de 27 p. 100 de nos membres n'ont même pas reçu un coup de téléphone pour les avertir. La moitié environ ont reçu un préavis de 30 jours ou plus. Nous pensons que cela constitue un délai qui n'est pas déraisonnable, quelque chose que l'on peut discuter. Vingt-deux pour cent ont reçu un préavis de moins de 30 jours, mais au moins en ont-ils reçu un.
Il y a des questions auxquelles l'industrie des assurances peut réfléchir. Ses représentants ont reconnu, à l'occasion de rencontres avec nous, qu'un simple préavis peut rendre une situation beaucoup plus facile à gérer pour le consommateur.
En conclusion, je tiens à souligner que nous ne réclamons pas une réglementation plus lourde. Habituellement, les petites entreprises préfèrent qu'il y en ait moins, dans toute la mesure du possible. Nous reconnaissons que la réglementation a son rôle à jouer; je ne veux pas être mal interprétée, mais nous pensons que les solutions axées sur le marché, accompagnées de données de qualité, sont ce qu'il y a de préférable, car une information de qualité est indispensable pour un marché compétitif sain. Les consommateurs ont vraiment besoin d'être mieux informés des possibilités qui leurs sont offertes, de ce qu'ils peuvent faire. Il faut que les analystes parviennent à mieux maîtriser cette sorte de trou noir qui semble exister dans le domaine des assurances pour les petites entreprises dans le domaine de l'information.
Nous vous présentons trois recommandations pour le secteur bancaire et trois autres pour celui des assurances pour les petites entreprises. Je n'ai pas encore parlé des fusions de banques, mais j'ai fait allusion tout à l'heure à l'état de la concurrence. Il n'est pas surprenant que nos membres se soient toujours opposés aux fusions, pas simplement par réaction instinctive mais parce qu'ils croient que la concurrence est déjà insuffisante chez nous et qu'indiscutablement, des fusions l'affaibliraient encore. La dernière fois que l'on a envisagé des fusions, en 1998, elles ont été refusées parce que la concurrence était insuffisante, notamment dans le secteur des petites entreprises. Depuis lors, nous avons perdu Canada Trust qui a cessé d'être une institution indépendante. En fait, il y a encore moins de concurrence sur le marché aujourd'hui qu'en 1998. Comment justifier des fusions à moins de proposer de nouveaux critères? Je n'arrive pas à comprendre cela.
Notre seconde recommandation est la suivante : on devrait recueillir et rendre publiques des informations supplémentaires sur l'état de la compétitivité du secteur bancaire. Nous avons trouvé quelques données à Statistique Canada. Il existe un groupe d'Industrie Canada qui est chargé de rassembler et de conserver les données dans ce domaine. Nous voudrions en particulier que l'on rassemble des informations sur des questions telles que l'adresse des succursales bancaires parce que, lorsque l'on s'attaque aux questions de concurrence, il est indispensable de tenir compte des facteurs géographiques. La séparation entre les données concernant les zones rurales et les zones urbaines est toujours si marquée que cela nous paraît être un domaine au sujet duquel nous avons besoin de plus d'information. J'inclurais également les types de services fournis par les banques. C'est bien beau de dire qu'il y a une succursale quelque part mais lorsque vous constatez qu'elle se réduit à deux GAB, ce n'est vraiment pas quelque chose qui correspond à la définition de succursale. Voilà quelques exemples des domaines sur lesquels nous avons besoin d'une meilleure information.
Enfin, le code de conduite devrait toujours être appliqué. Nous pensons qu'il est excellent d'en avoir un, mais il est bien évident qu'il ne sert pas à grand-chose s'il n'est pas appliqué dans la pratique. Du côté des assurances, nous avons demandé au gouvernement fédéral d'effectuer un examen des questions relatives à l'IARD et à leur effet sur les petites entreprises. L'objet principal d'une telle étude est d'identifier le problème auquel le secteur est confronté et d'essayer de trouver des moyens d'améliorer la situation. Je sais grâce à mes rencontres régulières avec les représentants de l'industrie des assurances, que la dernière crise est terminée, mais il s'agit d'un secteur fortement cyclique, et une autre crise surviendra certainement. Pouvons-nous faire quelque chose, ne serait-ce que pour réduire la gravité de toute augmentation rapide des coûts à l'avenir?
J'ai parlé plus que suffisamment des questions de statistiques. Nous présentons une autre recommandation importante : il importe d'obtenir de meilleures données de manière à savoir à quoi nous avons affaire. Enfin, nous sommes convaincus que l'IARD devrait collaborer avec le gouvernement et avec nous-mêmes, ainsi qu'avec tous ceux qui peuvent avoir un enjeu dans ce domaine, afin d'établir son propre code de conduite volontaire afin d'offrir de meilleures conditions à leurs clients des petites entreprises et de mieux les traiter.
Voilà l'essentiel de notre présentation aujourd'hui, et nous serions très heureux d'entendre vos questions et commentaires éventuels.
Le président : Le sénateur Angus sera le premier à vous interroger. Pour commencer, voudriez-vous nous indiquer les statistiques qui, selon vous, sont disponibles aux États-Unis, mais pas ici? Nous pourrions charger notre personnel de les trouver.
Mme Swift : Pourrais-je les obtenir pour vous? Je ne les ai pas amenées aujourd'hui, mais je les ai à notre bureau et il me serait facile de vous les fournir.
Le président : Vous ne nous avez pas dit de quoi il s'agissait exactement, mais si vous pouviez nous les envoyer, cela nous serait utile car les analyses statistiques revêtent beaucoup d'intérêt pour nous.
Mme Swift : Pas de problème.
Le sénateur Angus : Bonjour, madame Swift et monsieur Piché. Vos témoignages sont toujours instructifs. Vous avez évoqué un certain nombre de points importants. Je m'attacherai à l'un d'entre eux, et bien que je sois tenté de parler des assurances, je laisserai le soin à quelqu'un d'autre de le faire. Il faudra que nous y revenions car c'est un domaine qui semble mériter une étude plus approfondie.
Quoi qu'il en soit, venons-en à la figure 5 et à vos commentaires sur la diminution très marquée des possibilités offertes aux petites et moyennes entreprises de financer leurs activités en ce début de siècle. Nous avons effectué une étude sur la disponibilité non seulement du financement de démarrage, mais aussi du financement secondaire, tertiaire et de quatrième niveau ou du capital-risque pour les petites et moyennes entreprises au Canada. Nous avons publié un rapport il y a deux ou trois ans. Nous avions été très surpris, à l'époque, du peu de fonds disponibles pour les petites entreprises au Canada. Il y a toujours une raison à ce genre de situation. Ce chiffre m'étonne beaucoup. Où ces entreprises trouvent-elles l'argent dont elles ont besoin? Dans la figure 5, vous illustrez la baisse qui s'est produite entre 1987 et 2003. Pourriez-vous nous fournir plus de détails là-dessus et nous dire à qui s'adressent ces entreprises lorsqu'elles ne font pas appel aux banques?
Mme Swift : C'est une bonne question, et il y a de nombreuses réponses possibles, mais aucune n'est simple. La formule du crédit-bail est devenue extrêmement répandue dans le secteur des petites entreprises. Au lieu de négocier un emprunt à terme, ces entreprises louent leur équipement ou toute autre chose dont elles ont besoin. Il est indiscutable que cette formule est devenue très populaire, ce qui est une bonne chose; c'est un facteur concurrentiel. Cependant, il y a aussi beaucoup plus d'entreprises qui recherchent des sources non traditionnelles de financement. La petite entreprise représente aujourd'hui près de la moitié de l'économie alors qu'en 1970, elle n'en représentait qu'environ le quart. C'est une croissance énorme et il est donc naturel que les gens voient dans ce secteur des opportunités qui n'existaient pas jusque-là. Aujourd'hui, nous avons un nombre beaucoup plus élevé de fournisseurs de capitaux informels sur le marché.
Le sénateur Angus : J'ai remarqué, il y a un an ou deux, que vous aviez 105 000 membres.
Mme Swift : Nous sommes 105 000 aujourd'hui. Nous étions 100 000 il y a trois ans environ. C'est un secteur en pleine croissance si l'on considère l'ensemble de l'économie — j'ai une formation d'économiste ce qui, je le reconnais, est parfois utile. C'est à ce secteur que l'économie canadienne doit sa stabilité depuis plusieurs années, en dépit des fluctuations erratiques du marché boursier et d'importantes mises à pied de personnel dans les grosses entreprises. Les efforts déployés pour favoriser cette stabilité ont bien servi la situation économique générale. Nous voyons aujourd'hui d'autres types de financement. Les entreprises ont recours à des méthodes un peu plus variées, notamment l'utilisation d'instruments de crédit. Certaines institutions financières ont créé une sorte de carte de crédit spéciale pour les entreprises indépendantes. Le problème est que cette formule est coûteuse en comparaison d'un prêt à terme. Un certain nombre d'idées nouvelles se font jour. Le capital informel a toujours existé. Il y a deux ou trois formules nouvelles dont celle de la carte de crédit où l'entreprise commence souvent en fait par plafonner deux ou trois cartes de crédit, ce que nous entendons dire trop souvent hélas. Les taux d'intérêt sont écrasants. Cela ne favorisera certainement pas la croissance autant que l'on pourrait le faire si l'on disposait d'un instrument de crédit à prix plus raisonnable.
Bien des choses se passent actuellement. Nous avons entendu mille et unes anecdotes après la forte récession qui s'est produite au Canada en 1990-1991. De nombreux banquiers ont eu une réaction excessive. La situation était grave, mais de nombreuses entreprises fiables se sont vu réduire leur ligne de crédit de moitié parce qu'elles se trouvaient dans un secteur ou une région qui ne plaisait pas aux banquiers, si bien que tout le monde a été pénalisé. Chose intéressante, les banquiers ont reconnu que c'est ce qui c'était produit. Cependant, dans la région centrale du Canada, en particulier, nous n'avons pas connu de récession aussi grave depuis un certain temps. C'était intéressant. Nos membres de l'Ouest s'en sont mieux sorti parce que leurs difficultés remontaient au début des années 1980, lors de la crise de l'énergie. L'Ontario, les banquiers de la région centrale du Canada, et la moitié de l'économie, ont réagi beaucoup plus radicalement et négativement. De nombreuses entreprises y ont laissé des plumes et se sont alors détournées des banques.
Il y a de nombreuses raisons pour cela, et à notre avis, l'absence de concurrence qui a toujours existé au Canada sur le marché de la petite entreprise en est une. Je sais que les banques se montrent extrêmement compétitives dans d'autres secteurs, mais pour les petites entreprises, nous ne pensons pas que la situation du marché soit aussi saine qu'elle pourrait l'être. Nous reconnaissons que c'est un marché difficile à servir. Il est bien plus facile de prêter quelques millions de dollars en une seule fois que de le faire de façon fractionnée, par lots de 100 000 $.
L'autre document que nous avons déposé auprès de votre comité est celui du modèle d'évaluation par points que de nombreuses banques ont adopté. Ce système réduit les coûts. Si vos ratios de base sont suffisants et si vos données correspondent aux attentes, oui, vous obtiendrez effectivement le prêt ou la ligne de crédit. Nous n'avons pas d'objection à cela, à ceci près que c'est un système un peu mécanique. Cependant, nous avons pu constater que lorsque le banquier sait que le propriétaire de l'entreprise est honnête, il dit parfois: « Le ratio n'est pas satisfaisant, mais j'ai confiance en cette personne et je vais donc lui accorder le prêt. » Le modèle d'évaluation par points élimine l'élément subjectif de l'équation. Il a cependant été mal expliqué, et nous estimons que les institutions financières rendent un mauvais service à leurs clients parce que, si une entreprise ne sait pas de quelle manière elle est évaluée, elle se retrouve dans une situation très difficile lorsqu'elle prépare son plan d'entreprise. Nous avons collaboré avec l'industrie afin de produire un document complet. C'est le modèle d'évaluation par points que nous vous avons soumis : lorsque vous êtes une petite entreprise, il est indispensable de savoir comment vous êtes évalué, sans quoi vous êtes désavantagé.
Le président : De nombreux sénateurs voudraient vous poser des questions. J'espère que vous pourrez abréger un peu vos réponses de manière à nous permettre d'aborder plus de sujets.
Le sénateur Angus : Lorsque vous avez répondu à cette question, vous avez dit des choses fort intéressantes. Vous avez notamment dit que la part de l'économie canadienne représentée par les petites et moyennes entreprises est passée de 25 à 50 p. 100. Vous avez probablement vu les rapports de ce comité dans lesquels nous déclarons que l'économie canadienne n'est pas bâtie sur les entreprises Fortune 500, mais bien plutôt sur les petites et moyennes entreprises. Lorsque vous dites que la part de ces dernières est passée de 25 à 50 p. 100, comment définissez-vous la petite entreprise?
Mme Swift : Selon la définition donnée par Statistique Canada, une petite entreprise a moins de 50 employés, et une entreprise moyenne en a de 50 à 500. La vaste majorité d'entre elles en ont moins que cela.
Le sénateur Angus : Vous incluez donc la moyenne entreprise?
Mme Swift : Oui, les petites et les moyennes. Cinq cent, mais lorsque vous considérez l'économie canadienne, vous constatez que 99 p. 100 des entreprises au Canada ont moins de 20 employés. C'est une définition de recherche.
Le sénateur Angus : Lorsque vous avez parlé de la disponibilité ou de l'utilisation du crédit bancaire par les petites et moyennes entreprises, vous avez évoqué la rotation des gestionnaires, et l'importance des contacts personnels. La question qui me vient immédiatement à l'esprit est que nous n'avons que cinq ou six banques à charte — et je suppose que c'est d'elles que vous parlez — je voudrais donc savoir si vous avez remarqué une collusion quelconque entre elles? Nous constatons qu'il existe aujourd'hui une nouvelle industrie, celle des prêts sur salaire, mais qu'aucune des grosses banques n'y participe. Vous me dites qu'elles agissent toutes de la même manière et qu'il n'est plus possible d'obtenir de crédit des banques. Y -a-t-il là un effort concerté pour exercer des pressions sur la clientèle?
Mme Swift : Je n'irais pas jusqu'à dire qu'il y a un effort concerté, car certaines banques se montrent mieux disposées à l'égard du marché de la petite entreprise que d'autres. À notre avis, cela prouve que c'est possible quand on veut. L'expérience montre que les banques, comme la plupart des entités, ont tendance à se montrer moutonnières. Il y a plusieurs décennies, il y a eu la crise immobilière du début des années 1980, au cours de laquelle le marché s'est effondré et tout le monde s'est retrouvé dans une situation précaire. Une des banques a même manqué de faire faillite. À la fin des années 1980, nous avons eu les obligations à haut risque. Nous avons ensuite eu la crise de la dette de l'Amérique latine. Vous voyez là leur mentalité moutonnière et, tout d'un coup, tout s'effondre sous elles parce qu'elles ont investi trop d'actifs. C'est une situation qui se répète constamment. C'est sur cette base que les banques s'appuient, et nous avons souvent l'impression que l'on fait bien peu de cas de nous car, lorsque les Reichmans, Dome ou bien d'autres encore font faillite, les coûts augmentent pour tout le monde et ce sont nos membres qui doivent éponger une grande partie des pertes.
Pour rester équitables, nous ne classons pas seulement les banques, mais aussi les coopératives d'épargne et de crédit et tous les autres acteurs. Les choses bougent avec le temps. Nous avons des données qui remontent à 30 ans et nous pouvons donc vous montrer que si, il y a quelques années, l'établissement X offrait un meilleur service au marché des petites entreprises que l'établissement Y, c'est peut-être ce dernier qui est le meilleur aujourd'hui.
Le président : Vous avez ces statistiques? Je crois que c'est très important de les avoir si les choses se passent comme l'a dit le sénateur Angus. Nous aimerions pouvoir les examiner.
Mme Swift : Nous avons une foule de données.
Le président : Tout ce que nous vous demandons ce sont des données pertinentes.
Mme Swift : Nous pouvons établir des comparaisons historiques dans ce domaine.
Le sénateur Fitzpatrick : En fait, il est très difficile de ne pas se laisser emporter par le sujet et, si vous me permettez le jeu de mots, votre témoignage a été aussi prompt que votre nom l'indique, mais il a également été très instructif.
Je tiens à vous féliciter du travail que vous faites dans le domaine des petite et moyennes entreprises car, comme nous venons de l'entendre dire, c'est un secteur très important de notre économie qui connaît une croissance extraordinaire, en dépit des obstacles que vous avez mentionnés. Je dois dire — et ce n'est pas une critique; vos commentaires sont très utiles pour cerner les problèmes — comme nous, vous êtes obligée de rechercher les solutions car c'est loin d'être aisé. Je crois que le sénateur Angus avait tout à fait raison de dire que cela ferait peut-être l'objet d'une autre étude, car je ne crois pas me tromper en disant qu'un peu d'aide ne vous serait pas inutile dans votre mission.
J'ai bien des questions à vous poser. J'essayerai d'être bref, mais je risque ainsi de ne pas rendre justice au sujet. Vous avez tout d'abord parlé de la diminution des contacts personnels dans les banques, vous avez dit que cela avait eu un effet sur les petites et moyennes entreprises. Je ne suis pas certain que le manque de contacts personnels soit le vrai problème pour ces entreprises. Je crois que c'est vrai pour le consommateur, et c'est peut-être à lui que vous pensiez lorsque vous disiez cela. Habituellement, les entreprises peuvent trouver des interlocuteurs dans les banques, ce qui ne veut pas dire qu'elles obtiennent nécessairement l'aide financière qu'elles recherchent. Je voudrais donc que vous me parliez un peu plus de cette question.
Le sénateur Angus a aussi parlé des autres formes de financement disponibles, et vous lui avez répondu qu'il y avait la formule du crédit-bail — je ne sais pas s'il existe d'autres possibilités. Y a-t-il une place pour les petites banques et les banques de taille moyenne, et comment peuvent-elles démarrer au Canada? Je sais que c'est une idée qui n'a pas eu beaucoup de succès au Canada, mais j'aimerais avoir votre avis à ce sujet. C'est un secteur qui est très important sur le plan du développement économique et de l'augmentation de l'emploi.
J'ai une remarque à faire sur les assurances et sur les coûts d'assurance. Dans ma collectivité qui se trouve dans la vallée de l'Okanagan, en Colombie-Britannique, je viens de vivre la tempête de feu qui a frappé la région. Je peux vous assurer que le coût des assurances y est monté en flèche. Je ne suis pas certain que les pertes réelles pour lesquelles les compagnies d'assurance ont dû payer le justifient, mais ces compagnies ont vraiment augmenté les primes d'assurance. Avez-vous analysé les raisons de ce phénomène? Il serait intéressant de les connaître. Il ne s'agit pas simplement d'une perte de biens, mais aussi, entre autres, des pertes que cela a entraîné pour les entreprises. Certaines ont dû fermer pendant un certain temps. Comment faire face à une telle situation à l'avenir?
Il y a un autre domaine que vous n'avez pas mentionné — peut-être n'est-il pas pertinent à cette discussion — c'est celui de l'assurance-responsabilité des directeurs et des agents. Pour les petites et moyennes entreprises, en particulier lorsqu'il s'agit d'une petite société ouverte en plein développement, il est pratiquement impossible d'obtenir ce genre d'assurance. Il devient donc plus difficile d'attirer les directeurs et les agents qualifiés dont ces sociétés pourraient avoir besoin pour leur développement.
Je m'en tiendrai là, monsieur le président, mais c'est un sujet qui est très important pour nous.
Le président : Pourrais-je vous demander de vous en tenir aux grandes lignes; après avoir lu les questions du sénateur Fitzpatrick, vous pourriez peut-être nous fournir plus tard des réponses plus complètes? Je tiens à ne léser aucun sénateur. Vous nous avez ouvert un large domaine de réflexion. Je ne veux pas faire preuve d'impolitesse mais nous voulons nous montrer justes à l'égard des autres sénateurs, et le temps passe. Si vous pouviez vous contenter de ramener vos réponses à l'essentiel, cela permettrait aux autres sénateurs d'exprimer leur point de vue; vous pourrez ensuite leur répondre par écrit.
Mme Swift : Vous avez tout d'abord mentionné les recommandations. Nous avons essayé de ne pas vous encombrer de trop d'information aujourd'hui. Nous avons une foule de recommandations à faire en faveur des mesures que l'on pourrait prendre dans ces domaines, aussi bien en ce qui concerne les banques que les assurances, et je me ferai un plaisir de vous les fournir quand vous le voudrez. Nous nous sommes contentés de souligner les points essentiels aujourd'hui, mais nous avons aussi une foule d'informations à votre disposition.
Lorsque vous dites que la petite entreprise est capable d'établir un dialogue avec la banque, c'est vrai en gros, mais le problème de la rotation des gestionnaires est très sérieux. Il est choquant que le risque de rejet d'une demande de prêt soit tout d'un coup triplé à cause du taux de rotation des directeurs de banque. Les banques font cela parce qu'elles veulent assurer la mobilité de leurs employés. C'est compréhensible, mais nous nous demandons s'il ne serait pas possible d'avoir une ou deux personnes qui connaissent bien le dossier de manière à ce que, lorsque quelqu'un quitte la succursale, le petit entrepreneur ne se retrouve pas à devoir payer les pots cassés? On pourrait faire quelque chose dans ce domaine, et nous avons fait des recommandations à ce sujet dans d'autres rapports.
Nous n'avons rien de spécifique à dire au sujet des questions régionales dans le secteur des assurances. Nous avons fait deux enquêtes sur ces questions jusqu'à présent, et nous pourrions effectuer une ventilation régionale des données. Vous pourriez peut-être trouver là une solution. Nous avons interrogé nos membres — nous leur avons demandé de combien leurs primes avaient augmenté, etc. — et nous vous avons montré certaines de ces données. La solution serait de pouvoir avoir accès à la base de données.
En ce qui concerne l'assurance-responsabilité des directeurs et des agents, nous avons inclus des observations sous la rubrique « Assurance-entreprise ». L'IARD est le plus gros morceau, mais vous avez absolument raison — il y a d'autres types d'assurance-entreprise, et l'assurance des directeurs et des agents pose également un sérieux problème. L'exercice de plus en plus rigoureux de la régie d'entreprise, à cause de toutes les crises que nous avons connues dans ce domaine, affecte aussi les petites entreprises. Celles-ci sont obligées de payer des honoraires plus élevés; elles doivent obtenir différents types d'assurances. Indiscutablement, cela pose aussi des problèmes. Aujourd'hui, nous avons cependant essayé de nous en tenir aux points les plus importants. Si nous pouvions obtenir une bonne base de données sur les assurances, ou au moins commencer à en créer une, cela nous aiderait à proposer des solutions.
Le sénateur Fitzpatrick : Il serait très utile pour nous que vous nous fournissiez certaines des informations dont vous avez parlé.
En dépit de tous ces obstacles, les petites et moyennes entreprises continuent à croître. J'aimerais avoir votre avis à ce sujet. Leur croissance serait-elle encore plus forte si elles ne se heurtaient pas à ces obstacles?
Mme Swift : En fait, ce sont là des questions que nous avons posées à nos membres. Si « X » se produisait, quelles seraient les conséquences pour votre entreprise? Ce que veulent surtout nos membres, c'est recruter plus d'employés, augmenter les avantages sociaux et la rémunération de leur personnel, assurer l'expansion de leur entreprise, etc. Il est difficile de mesurer le coût de renonciation — de ce à quoi on a dû renoncer — parce que c'est quelque chose dont on ne parle pas.
J'ai peut-être un préjugé, mais j'ai toujours dit que nous sous-estimions l'esprit d'entreprise de l'économie canadienne. Notre secteur est extrêmement dynamique. Notre mission est de nous assurer qu'il est traité le mieux possible — pas seulement en ce qui concerne les entreprises individuelles, ce qui est important, mais je suis aussi convaincu que les retombées de l'aide aux petites entreprises sont plus importantes que celles de l'aide à n'importe quel autre groupe de notre économie.
Le président : Veuillez lire la transcription; s'il y a d'autres questions posées par le sénateur Fitzpatrick qui sont restées sans réponse, il nous est loisible de le faire. Il a soulevé un certain nombre de questions qui sont toutes pertinentes et importantes.
[Français]
Le sénateur Massicotte : Les règlements sont toujours très importants, mais il n'y a pas de meilleure solution que la vraie compétition. C'est plus flexible et plus efficace et elle sert mieux les consommateurs et les utilisateurs. Pour mieux comprendre les secteurs qui s'impliquent, au tableau no 5, le sénateur Angus a demandé pourquoi la tendance était à la baisse. Vous avez expliqué les conséquences et les autres formes de financement dont les baux.
En conséquence, au tableau no 4, on a noté la stabilité du nombre de prêt de moins de 200 000 $. Mais l'effet des baux — quand vous pensez au financement plus global — va augmenter le financement peut-être en conséquence. Ce n'est peut-être pas stable. Cet indicateur est un peu maladroit. Ayant dit cela au point de vue des banques, j'ai l'impression qu'il y a beaucoup de financement dans les baux, vous donnez l'impression qu'il y a un manque de compétition, un manque de joueurs. Pouvez-vous donner plus de détails? J'assume que pour ce qui est des cartes de crédit, il n'y a pas un manque de compétition; certaines banques américaines nous donnent beaucoup de compétition. J'assume que les services financiers plus sophistiqués n'intéressent pas vraiment vos membres. Serait-ce plutôt dans le secteur des prêts simples et dans les services bancaires où la compétition est absente?
[Traduction]
Mme Swift : Encore une fois, la question de la situation régionale se pose avec acuité. Alors que dans un marché urbain, un grand nombre de ces acteurs sont présents, sur les marchés ruraux, ce n'est pas le cas. Une certaine compétitivité existe dans certaines zones mais moins dans d'autres. Je suis convaincue que nous devrions ouvrir totalement notre marché aux institutions américaines, ce qui n'est pas le cas actuellement. Leurs possibilités d'implantation au Canada sont limitées, ce qui a été une bonne chose. Je crois que c'est la banque Wells Fargo, un acteur secondaire, qui a poussé les autres banques à offrir un produit similaire. Avec un taux préférentiel de plus de 6 p. 100, c'est de l'argent qui coûte cher, mais cela convient à un certain créneau. Il est cependant intéressant de noter que l'intérêt pour une telle offre ne s'est pas limité à ce créneau. Je ne me souviens pas du montant des prêts consentis par Wells Fargo par rapport à l'ensemble, mais toutes les banques ont suivi son exemple en offrant un produit similaire. Tout d'un coup, cela a fait tache d'huile. Nous croyons donc qu'une concurrence aussi vigoureuse que possible est la vraie solution.
En dépit de leurs sempiternelles jérémiades au sujet des fusions et de leurs difficultés, nos institutions financières s'en sortent toujours très bien, à en juger par leurs états de rentabilité et leur rendement sur le marché boursier. J'ai tendance à penser que notre secteur financier est fortement protégé et il est certes important qu'il soit stable, mais je crois que nous pourrions avoir un environnement plus compétitif si nous faisons du marché canadien un marché plus ouvert qu'il ne l'est actuellement.
Le niveau des prêts est demeuré stable depuis 1988, mais nos petites entreprises sont aujourd'hui beaucoup plus nombreuses; pourtant, l'argent disponible est demeuré à peu près le même. Si nous tenons compte de ces influences, nous pouvons comprendre pourquoi les statistiques sont ce qu'elles sont.
[Français]
Le sénateur Massicotte : Ce sont plutôt les PME dans les régions rurales qui souffrent de problèmes de compétition, n'est-ce pas? C'est le dilemme?
[Traduction]
Mme Swift : C'est dans les zones rurales que la situation est la pire. À la suite des fusions des succursales dont nous avons été témoins, il est arrivé qu'une petite ville qui n'avait qu'une seule succursale se soit retrouvée sans une seule, alors que la localité qui en avait deux ou trois n'en ait gardé que deux.
[Français]
Le sénateur Massicotte : On suppose que l'on devrait permettre plus de compétition au Canada; il n'y en a pas assez. Je pensais que les règlements, depuis six ou sept ans, étaient très flexibles. On n'a pas vu beaucoup de banques américaines HSBC; il n'y en a que quelques-unes. Mais que faudrait-il changer? On a déterminé les besoins importants, on a rendu cela beaucoup plus souple. Pourquoi ne veulent-ils pas y adhérer? Y a-t-il des barrières qu'on ne connaît pas?
[Traduction]
Mme Swift : Le gros obstacle est créé par les exigences en matière de capitaux, et par le fait qu'au Canada, les institutions financières demeurent tenues d'accumuler un important capital de base. Une banque ne peut pas se contenter de dire qu'elle est une banque américaine ou une banque européenne. Elle ne peut pas offrir de services garantis par les réserves de sa société-mère, où que celle-ci se trouve. De nos jours, dans un monde de plus en plus ouvert et compte tenu de la technologie actuelle, il y a bien plus de possibilités d'ouvrir le marché à des fournisseurs de crédit étrangers. Cela ne signifie pas nécessairement qu'ils sont tenus de constituer une réserve exclusivement axée sur le marché canadien et de paraître solvables.
[Français]
Le sénateur Massicotte : Je me demandais dernièrement pourquoi les banques n'ont pas d'intérêt dans les compagnies d'assurances. On parle des fusions entre l'assurance-vie et les banques. Je crois que la raison est qu'en moyenne, depuis deux ans, le rendement sur l'équité est de 6 p. 100 sur l'assurance. C'est pour cette raison que ING a très peu de nouveaux concurrents. La conclusion, selon ce secteur, est que ce n'est pas rentable. Cela explique aussi le fait que, depuis quatre ou cinq ans, les primes d'assurance ont augmenté de façon assez importante. Elles étaient beaucoup plus basses avant. Avez-vous des commentaires sur ces conclusions si on les compare à votre analyse?
[Traduction]
Mme Swift : La question de ce que l'on appelle les fusions croisées devrait attendre. Je pense que c'est là une idée intéressante, car si dans le climat actuel, les fusions entre deux banques sont considérées comme problématiques, cela ouvre des perspectives intéressantes, mais c'est une question compliquée. Il demeure qu'elle est intéressante et qu'elle pourrait avoir des effets bénéfiques sur le secteur de l'assurance. La question peut demeurer en suspens pour le moment car je ne pense pas que ce soit encore une priorité. Le marché des petites entreprises est difficile à servir pour les assureurs, pour les banques ou pour qui que ce soit. Il est compréhensible que la décision d'une société privée et celle qui est fondée sur une politique gouvernementale diffèrent mais pour une banque, il y a indiscutablement des segments plus profitables à servir.
Il en va de même pour l'industrie des assurances. Nous avons toujours essayé de convaincre les banques, et certaines le font maintenant. Nous avons attiré l'attention du comité sur ce point à de nombreuses reprises. Si les banques ou les assureurs ne tiennent compte que de la ligne de crédit ou d'un aspect particulier des activités d'une entreprise, la « saveur du jour » leur paraîtra plus profitable au sens plus large du marché financier. Il leur suffit d'additionner tous les services qu'une petite entreprise utilise y compris les services personnels tels que les RÉER. Nos membres, qui sont des entrepreneurs indépendants, confondent leurs finances personnelles et professionnelles, et peuvent par exemple utiliser leur maison comme garantie. Tout est flou. Lorsque les banques examinent l'ensemble des services qu'elles offrent, elles se rendent compte qu'il s'agit là d'un marché beaucoup plus profitable que celui des prêts à terme. J'ai bien l'impression qu'il en va de même de l'industrie des assurances, bien que les facteurs économiques soient différents. Nous savons que certaines banques l'ont fait, qu'elles ont constaté que c'était un marché profitable et qu'elles recherchent maintenant des moyens différents de mieux le servir.
Globalement, le Canada est un petit marché. De nombreuses compagnies d'assurances internationales ou européennes considèrent que le Canada n'offre pas un taux de rendement particulièrement élevé et elles le désertent parce que c'est un petit marché. Ce sont là les grandes préoccupations économiques de ces industries et elles influent également sur ce secteur.
[Français]
Le sénateur Plamondon : J'ai une question sur les frais bancaires, une sur les assurances et une sur le crédit.
Je vais commencer par l'assurance, parce que votre exposé a démontré que ce sont à peu près les mêmes préoccupations que les consommateurs ont vis-à-vis l'assurance-habitation. J'ai déjà dirigé une étude à ce sujet.
On avait pu, par un sondage, isoler les raisons pour lesquelles les gens se faisaient refuser de l'assurance. Cela pouvait être parce qu'ils habitaient près d'un bar, ou dans un certain quartier, ou encore que le domicile de la personne était dans un autre quartier à risques. Cela pouvait même être à cause de la profession de l'individu. Si quelqu'un était dans le milieu artistique, il se faisait refuser de l'assurance. Il y avait des raisons.
Il y a une façon de loger des plaintes. J'ai été surprise d'apprendre que vous ne pouviez pas obtenir de réponse afin de connaître les motifs d'un refus de la compagnie d'assurances. Vous pouvez diriger vos membres vers le réseau de conciliation des secteurs financiers et exiger de connaître la raison pour laquelle ils se sont fait refuser de l'assurance.
J'ai entendu, avant d'arriver au Sénat, des agents d'assurances et des courtiers dire qu'il était difficile d'évaluer une petite entreprise. Croyez-vous qu'il devrait y avoir une meilleure formation pour les courtiers? Êtes-vous bien servi par les courtiers? On dit un courtier, mais dans le fond, les courtiers n'ont que deux ou trois compagnies d'assurances parce qu'ils ont des primes sur le volume et qu'ils vont diriger tous leurs clients vers le même assureur. Avez-vous assez de compétition dans ce domaine?
[Traduction]
Le président : Sénateur Plamondon, voilà une question très générale qui en soulève en fait plusieurs. Peut-être pourriez-vous nous dire quelle est la question qui vous paraît la plus importante et à laquelle vous souhaiteriez que Mme Swift réponde?
J'espère que vous répondrez à chacune de ces questions par écrit, mais vous pourriez peut-être choisir la question qui vous semble la plus cruciale; nous pourrons ensuite passer au sénateur Moore.
[Français]
Le sénateur Plamondon : Le secteur des petites entreprises et les chambres de commerces m'ont honorée une première fois lorsque j'ai mené la bataille des frais bancaires dans les années 80. Le fait d'être une activiste et de se faire honorer par les chambres de commerce est un exploit. Cet hommage m'a beaucoup surprise. Nous nous sommes rendus compte que les frais bancaires étaient une préoccupation commune. Les petites entreprises sont égorgées par les frais bancaires. Y a-t-il eu amélioration sur ce point? En ce qui a trait au crédit alternatif, vous n'avez pas répondu à la question à savoir jusqu'où va l'intérêt pour vos membres.
[Traduction]
Mme Swift : Les frais de gestion de compte, eux aussi, sont cycliques, et il est indiscutable que les pressions exercées par le public jouent un rôle dans ce domaine. En fait, je crois que les banques essaient, au maximum de tirer leur épingle du jeu. L'examen de leurs résultats financiers nous montre que les revenus provenant des services tarifés occupent une place beaucoup plus importante dans leur marge bénéficiaire. Ce revenu est fourni par le paiement de toutes sortes de frais, pas simplement les frais habituels payés par les PME, mais par toutes sortes de frais, si bien que le revenu provenant des services tarifés constitue une source réelle et croissante d'argent.
Le principe de ces paiements est parfaitement légitime et défendable, mais ce que nous avons dit aux banques c'est : soyez transparentes. Encore une fois, c'est le problème de la communication qui se pose. Je me souviens de cas où une entreprise, qui ne savait pas que des honoraires allaient lui être imposés, avait constaté qu'un prélèvement avait été effectué sur son compte sans qu'on la prévienne; et voilà que tout d'un coup elle se retrouvait avec des chèques sans provision. Ce genre de situation ne devrait pas se produire. Sur ce plan, il devrait y avoir au moins un effort d'information et aussi de négociation, ce que nous encourageons l'industrie bancaire à faire depuis des années. Il faudrait pouvoir offrir un ensemble de services, permettre aux clients de faire des opérations bancaires à la carte ou d'avoir accès à un programme de services, car chaque petite entreprise est différente; il n'y a pas de méthode valable pour toutes. Y a-t-il un système quelconque de regroupement des services qui permettent à une entreprise de venir négocier avec la banque?
Nous trouvons également des frais de gestion qui nous intriguent. C'est bien là une situation où l'acheteur doit prendre garde. Nous essayons d'encourager nos membres à négocier; à dire: « Que pouvez-vous faire pour moi? » Bien sûr, l'entreprise qui n'a pas vraiment besoin qu'on lui fasse de faveur, l'entreprise rentable et bien établie, est précisément celle à qui l'on accorde des faveurs alors que celle qui est plus nouvelle ou qui vient de démarrer, se trouve écrasée par les frais de gestion parce qu'elle n'a pas le même pouvoir de négociation. Tout cela est un peu inique.
Le président : Nous allons nous arrêter. J'espère que vous lirez les questions du sénateur et que vous y répondrez.
Le sénateur Moore : Vous avez dit, Madame Swift, que vous avez 105 000 membres et que les petites entreprises sont celles qui ont moins de 50 employés. Combien y en a-t-il? Combien y a-t-il de petites entreprises et combien, de moyennes entreprises?
Mme Swift : Ce sont là des définitions de recherche et une des raisons pour laquelle nous les utilisons c'est qu'elles sont employées dans le monde entier et que cela nous permet de faire des comparaisons.
Le sénateur Moore : Si vous avez 105 000 membres...
Mme Swift : La moitié ont moins de cinq employés et 80 p. 100 moins de 20, et il est probable qu'il y en a moins de un pour cent qui ont plus de 50 employés.
Le sénateur Moore : Moins de un pour cent.
Mme Swift : C'est assez comparable à la situation de l'économie canadienne. Nous essayons d'harmoniser les définitions. C'est la raison pour laquelle nous utilisons l'autre; cela nous permet de faire des comparaisons.
Le sénateur Moore : Comme certains de mes collègues, j'étais frappé par la figure 5, le graphique que nous avons ici. Pendant toute cette période, y compris la période de récession, moins de petites entreprises ont demandé une aide financière. Vous avez mentionné le fait qu'elles en obtiennent d'autres sources. Y a-t-il une raison pour cela? C'est une tendance très marquée.
Mme Swift : En effet, et à notre avis, inquiétante.
Le sénateur Moore : Les banques ont-elles cessé de fournir ce service?
Mme Swift : Certaines, plus ou moins; certaines ont quitté un secteur ou une région. Le comportement peut être fort différent d'une institution à l'autre. Si vous prenez l'ensemble de l'industrie, il est horriblement difficile aujourd'hui d'obtenir une hypothèque commerciale. Dans certaines régions du pays, c'est totalement impossible. Voilà la tendance.
Le sénateur Moore : Pourquoi?
Mme Swift : Les banques ont abandonné ce secteur. C'est le problème lorsque vous avez un groupe bien établi d'acteurs qui travaillent depuis toujours dans ce domaine et qui décident tout d'un coup de ne plus participer. Ces banques ont simplement dit: « Nous ne prêterons plus d'argent à ce secteur. Des possibilités plus intéressantes s'offrent à nous ailleurs. ». Je ne pense pas que ce soient là de bonnes décisions, mais ce n'est pas moi qui les prends.
Le sénateur Moore : Y a-t-il un secteur de l'économie dans lequel des groupes de petites entreprises pâtissent plus que les autres? Y en a-t-il qui ne reçoivent pas d'aide financière?
Mme Swift : L'industrie hôtelière a toujours des difficultés et comme elle connaît souvent des fluctuations, les banques sont peu disposées à leur prêter de l'argent. Les groupes tels que celui de la construction présentent également un problème à cause de l'instabilité et du caractère changeant de cette industrie. Nous avons aussi constaté que depuis très longtemps les jeunes entreprises spécialisées dans la technologie — la situation s'est un peu améliorée, mais à cause de leur croissance rapide, ces entreprises effrayaient les prêteurs. Ceux-ci se disaient: « Il y a quelque chose qui ne va pas. Voilà une entreprise qui pousse comme un champignon, donc, nous ne lui prêterons pas d'argent. » Une de nos études a révélé que les entreprises à forte croissance étaient aussi mal traitées que les entreprises à croissance lente, et plus mal que les entreprises à croissance normale.
Le président : Je remercie vivement votre organisation. Vous nous avez incités à examiner attentivement certains éléments de la question, et les documents fournis par vous serviront aussi aux autres témoins.
Pourriez-vous nous en dire plus long, par écrit, sur les taux de rendement? Il serait très intéressant pour nous de pouvoir examiner les taux de rendement dans l'industrie des assurances au cours de ces cinq dernières années, ainsi que ceux du secteur bancaire pour la même période; les taux de rendement du capital investi. Vous pouvez structurer le modèle à votre gré, mais je crois que les coûts et les rapports ont beaucoup affaire avec les taux de rendement. Il serait intéressant de voir s'il y a des taux de rendement anormaux ou infra-normaux, car cela détermine dans une large mesure les coûts et les barèmes tarifaires, aussi bien dans le secteur des assurances que celui des banques.
Vous pourriez également nous aider en nous fournissant le modèle des taux de rendement de 150 à 500 de vos entreprises, de manière à nous permettre d'étudier cet aspect de la question. Il ne s'agit pas uniquement de concurrence, mais aussi de taux de rendement. En fait, cela faciliterait notre analyse.
Mme Swift : Je dois avouer que ces données ne sont pas toujours disponibles. C'est précisément ce que nous réclamons.
Le président : Tout ce que je vous demande, c'est de faire de votre mieux, car vous avez évoqué l'existence d'un certain nombre de problèmes systémiques. Pour nous permettre d'examiner ces problèmes, il faut que nous puissions étudier ceux auxquels sont confrontés chacun des secteurs, y compris la structure du secteur des assurances et du secteur bancaire, et tout cela a un rapport étroit avec les taux de rendement.
Mme Swift : J'espère que vous le demanderez aussi au Bureau d'assurances du Canada, à l'Association des banquiers canadiens et aux personnes qui ont beaucoup plus facilement accès à ces chiffres que nous.
Le sénateur Fitzpatrick : Je ne sais pas si cette information existe, mais il serait intéressant de savoir quel est le taux d'échec des prêts pour la petite et moyenne entreprise par rapport à celui de la grande entreprise.
Le président : Là encore, si vous pouviez nous fournir des renseignements, non seulement en ce qui concerne l'importance de ces échecs mais aussi en fonction du secteur, cela me serait utile. Ce n'est pas une étude macro, c'est une analyse micro qui est nécessaire pour que l'on parvienne à une conclusion macro.
Notre témoin suivant est Gordon Dunning, président et chef de la direction de la Société canadienne d'indemnisation pour les assurances de personnes. Nous poursuivons notre examen de la supervision du secteur financier en ce qui concerne la protection des consommateurs. Monsieur Dunning, soyez le bienvenu. Cette fois-ci, n'oubliez pas de regarder l'horloge. Il ne nous reste littéralement que 40 minutes pour votre présentation et pour les questions, après quoi notre comité a quelques affaires à régler. Je vous prie de m'en excuser. Si vous ne pouvez pas répondre à certaines questions posées par les sénateurs, celles-ci seront reprises dans la transcription et vous pourrez y répondre de manière plus complète par écrit. Excusez-nous, mais comme vous pouvez le voir, c'est un sujet qui nous intéresse beaucoup.
M. Gordon M. Dunning, président et chef de la direction, Société canadienne d'indemnisation pour les assurances de personnes : Merci, monsieur le président, j'essayerai d'abréger mes déclarations préliminaires au maximum afin de répondre à plus de questions.
Je vous remercie de me donner l'occasion d'expliquer le rôle de la SIAP, en particulier dans le contexte de votre étude sur les questions relatives aux consommateurs et sur le secteur des services financiers. Nous protégeons les souscripteurs de polices d'assurance canadiens lorsque leur compagnie d'assurances-vie fait faillite. Nos sociétés membres versent des prestations d'assurance-vie, de santé et des rentes à plus de 23 millions de Canadiens, ce qui représente une somme supérieure à 140 milliards de dollars. Nous avons pour mandat de protéger les souscripteurs de polices d'assurance. Nous sommes responsables devant le gouvernement et l'industrie de leur fournir cette protection. Nous avons conclu des ententes de participation contractuelles avec le gouvernement fédéral ainsi qu'avec chaque gouvernement provincial et territorial. En vertu de ces ententes, nous nous engageons à protéger les assurés sur le territoire de l'administration. De son côté, chaque administration s'est engagée à veiller à ce que les sociétés qui vendent de l'assurance-vie sur leur territoire soient membres de la SIAP. Nous sommes également responsables devant nos membres d'assurer aux souscripteurs de police une protection conçue pour maintenir la confiance des consommateurs à l'égard de l'industrie.
Pratiquement toutes les prestations promises par nos membres sont garanties par la SIAP. Nous garantissons le versement des prestations de revenu, de santé et de décès pour un montant minimum de 85 p. 100 de leur valeur originale. Pour la majorité des assurés, ces prestations seront maintenues à 100 p. 100 de leur valeur originale. Les valeurs de rachat brutes et les valeurs accumulées sont garanties à 100 p. 100 jusqu'à concurrence de 60 000 $. La SIAP protège les assurés en continuant à verser les prestations conformément aux dispositions originales de leurs polices d'assurance au lieu d'annuler celles-ci et de les rémunérer en argent. Une telle continuité est particulièrement importante pour les assurés qui touchent des prestations d'invalidité ou de retraite, car cela leur évite de subir le préjudice causé par une interruption de leurs paiements de revenu. C'est également important pour le souscripteur d'une police d'assurance-vie ou d'assurance-invalidité car cela garantit à ceux qui ne sont plus assurables à cause de la détérioration de leur état de santé qu'ils continuent à toucher ces prestations.
Le régime de gestion de la SIAP reflète notre conception du partenariat entre le secteur public et le secteur privé. Notre conseil d'administration est élu par les membres mais il demeure totalement indépendant de ceux-ci. Cette indépendance permet au conseil d'administration de collaborer pleinement et d'échanger des renseignements confidentiels avec les organes de réglementation. Nos administrateurs ont une expérience riche et diversifiée, ce qui est indispensable pour superviser notre fonctionnement. Les ententes de participation avec les autorités fédérales- provinciales et territoriales exigent que nous obtenions leur accord pour apporter tout changement à nos règlements. Cela donne aux organes de réglementation le pouvoir d'approbation des changements que nous voudrions apporter à la protection de nos assurés et aux règles de cotisation inscrites dans ces règlements. Toutes les administrations sont membres du CCRA, le Conseil canadien des responsables de la réglementation d'assurance, organisme qui a élaboré un processus d'examen efficace des changements éventuels de nos règlements administratifs.
La SIAP est une organisation sans but lucratif constituée en personne morale en vertu de la Loi sur les corporations canadiennes. Toutes les compagnies d'assurances fonctionnant au Canada sont membres de la SIAP. Nous présentons un rapport à nos membres à notre assemblée générale annuelle et s'il est nécessaire de modifier nos règlements, ces changements doivent également être approuvés lors de ces assemblées. Le changement le plus récent a été l'adoption de la nouvelle garantie proportionnelle de 85 p. 100, qui a été approuvée par 99 p. 100 de nos membres. Nous sommes totalement financés par nos membres et nous ne sommes tributaires d'aucune ressource gouvernementale. Nous conservons un fonds de liquidité de plus de 100 millions de dollars pour pouvoir fournir immédiatement de l'argent à nos assurés. Notre capacité de cotisation annuelle actuelle est de 138 millions de dollars, et sa valeur actuelle est de 3,5 milliards de dollars qui sont immédiatement disponibles pour protéger nos assurés.
Nos activités sont surtout axées sur la détection de compagnies en difficulté et sur une intervention précoce afin de protéger les assurés. Les méthodes de détection de la SIAP sont conçues pour identifier les risques systémiques et les risques propres aux compagnies individuelles. Notre analyse est fondée sur l'information directement fournie par les compagnies membres mais elle repose aussi sur l'examen des états financiers, les dépôts de documents réglementaires et les contrôles de l'insuffisance de capital. À cause de cela, nous participons activement avec les professionnels et les réglementateurs à l'élaboration de normes de comptabilité et de normes actuarielles, en particulier celles qui ont un effet sur la solvabilité. Nous prônons sans hésitation la divulgation des informations lorsqu'elle est pertinente, ainsi que l'observation de normes de fonds propres. La majorité de nos membres sont réglementés par le BSIF, le Bureau du surintendant des institutions financières, mais une minorité importante de nos membres sont incorporés au Québec et réglementés par l'AMF, l'Autorité des marchés financiers.
Si la situation d'une compagnie membre se détériore au point où les prestations aux assurés sont gravement compromises, et si la SIAP et le réglementateur, travaillant de concert, ne parviennent pas à trouver une solution pour assurer la solvabilité de la compagnie, le réglementateur prend le contrôle de celle-ci en vertu des dispositions de la Loi sur les liquidations et les restructurations. La SIAP apporte alors un appui financier aux assurés par l'intermédiaire du liquidateur afin d'assurer le transfert rapide de leur police d'assurance à une compagnie solvable. Au moment d'une faillite, il est extrêmement important de communiquer avec les assurés, et nous complétons nos propres ressources avec celles du liquidateur et de l'industrie pour communiquer avec les assurés par l'intermédiaire des médias, ou directement par téléphone, par la poste et (ou) par courriel.
Pour réagir à la convergence dans le secteur des services financiers, nous avons récemment collaboré avec d'autres sociétés d'indemnisation et des organismes d'assurance-dépôts afin d'améliorer la communication avec les consommateurs. Le premier résultat de cette collaboration a été l'ouverture d'un portail commun en décembre. Dans les années 1990, trois compagnies d'assurances ont fait faillite; deux étaient fédérales et une était provinciale. Nous avons protégé près de trois millions de Canadiens dont les polices avaient une valeur de plus de 4,5 milliards de dollars. Dans les trois cas, les polices canadiennes ont été transférées à des compagnies d'assurance-vie solvables. Dans deux de ces cas, 100 p. 100 des prestations ont pu être maintenues et dans le troisième cas, 96 p. 100 des assurés ont conservé 100 p. 100 de leurs prestations, alors que les 4 p. 100 restants en ont conservé au moins 90 p. 100. La SIAP a démontré encore une fois qu'elle était capable de protéger discrètement les souscripteurs de police et qu'elle est prête à recommencer, si c'est nécessaire.
Je vous remercie de m'avoir offert la possibilité de vous expliquer brièvement notre rôle, notre régime de gestion et les raisons de nos succès. Je suis prêt à répondre à vos questions.
Le président : Merci, monsieur Dunning. Je ne pense pas que les consommateurs canadiens soient aussi bien informés que nous le sommes du travail important que votre organisation fait pour les protéger, et en ce sens votre témoignage va tout à fait dans le sens de notre étude.
Le sénateur Moore : Monsieur Dunning, je voudrais que vous nous en disiez plus au sujet de la protection garantie. Vous garantissez le paiement intégral jusqu'à concurrence de 60 000 $, quelles que soient les conditions. Cela inclut-il la valeur de rachat brute de la police? Par exemple, s'il s'agit d'une police de 200 000 $ avec une valeur de rachat brute de 10 000 $ et si la compagnie d'assurances faisait faillite, ces 60 000 $ incluent-ils les 10 000 $ ou s'agit-il de 60 000 $ plus les 10 000 $ de la valeur de rachat?
M. Dunning : Une partie de nos difficultés de communication avec le consommateur tient à la complexité du produit et, du même coup, à la complexité de la protection. Dans le cas des prestations de décès, nous garantissons 85 p. 100 du montant ou un maximum de 200 000 $. Si le montant est inférieur à 200 000 $, le bénéficiaire reçoit 100 p. 100 de la prestation de décès transférée à une autre compagnie. Si elle est supérieure à 200 000 $, le bénéficiaire reçoit 85 p. 100 du total transféré à une compagnie solvable. Ajoutons que nous garantissons à 100 p. 100 la valeur de rachat de cette police, jusqu'à concurrence de 60 000 $.
Le sénateur Moore : Les 60 000 $ représentent-ils la valeur de rachat?
M. Dunning : Oui.
Le sénateur Moore : Les témoins qui vous ont précédé, nous ont parlé des augmentations des primes imposées aux propriétaires et aux exploitants de petites entreprises. Quel est le taux des primes? Y a-t-il eu une forte augmentation, ou ce taux demeure-t-il assez stable? Je sais que cela dépend du proposant mais, en général, quelle est la situation dans votre industrie?
M. Dunning : Je préfère m'en remettre aux représentants de l'industrie lorsqu'il s'agit de questions d'ordre général concernant leur secteur. Ce dont nous nous occupons c'est de l'insolvabilité des institutions financières et de la protection des assurés lorsqu'une institution devient insolvable.
Le sénateur Moore : Pouvez-vous nous donner une réponse en ce qui concerne les taux pratiqués dans votre compagnie?
M. Dunning : Nous fonctionnons selon un système de post-financement, et nous disposons donc de plus de 100 millions de dollars, en fait aujourd'hui, d'environ 115 millions de dollars. Cependant, nous ne faisons pas d'appels de fonds réguliers auprès de l'industrie afin de couvrir nos frais internes; nous le faisons grâce au revenu de placement du fonds en question. En cas d'insolvabilité, nous pouvons réunir 138 millions de dollars dans les 60 jours et, en fait, près de dix fois plus dans le cas de l'évaluation des demandes de crédit. Ordinairement, nous n'imputons pas nos propres coûts à l'industrie.
Le sénateur Moore : Ces coûts sont couverts par le placement judicieux de la réserve dont vous disposez à tout moment?
M. Dunning : C'est exact.
[Français]
Le sénateur Massicotte : Votre témoignage est très intéressant. Comme notre président l'a indiqué, il semble que nous connaissions mal votre organisation. Voilà pourquoi nous avons plusieurs questions à vous poser.
Effectivement, vous avez un peu combiné les assurances et les services aux consommateurs. J'aimerais parler de l'aspect entreprise. Vos besoins financiers sont-ils satisfaits par les membres et les compagnies d'assurance? Vous dites que le conseil d'administration est constitué par les membres et les compagnies d'assurance. Toutefois, vous êtes là pour satisfaire les besoins des consommateurs. À qui devez-vous rendre des comptes? Comment fait-on en sorte que le consommateur soit bien servi par votre organisation?
[Traduction]
M. Dunning : Nous sommes essentiellement axés sur le consommateur et sommes redevables de sa protection envers les membres et les organes de réglementation. Nos membres considèrent notre rôle comme vital. Si une compagnie devient insolvable, il est important pour le secteur d'activité que les souscripteurs de police soient perçus comme étant bien traités dans de telles circonstances. La protection que nous offrons à l'industrie aide celle-ci à maintenir sa réputation d'organisme qui traite ses assurés équitablement et remplit ses promesses.
Pour ce qui est de notre reddition de comptes aux organes de réglementation, nous avons signé un accord de participation avec tous les gouvernements provinciaux et territoriaux et avec le gouvernement fédéral. En vertu de cet accord, nous promettons de protéger le consommateur. Nous avons un dialogue ouvert avec les membres et les organes de réglementation sur l'élaboration du plan. En particulier, nous nous réunissons au moins une fois l'an avec le Conseil canadien des responsables de la réglementation d'assurance, CCRRA, pour des échanges de vue sur des questions particulières ou philosophiques qui concernent l'élaboration du plan visant à protéger les souscripteurs.
[Français]
Le sénateur Massicotte : Dans les polices d'assurance, on retrouve parfois des zones grises. Je comprends que vous représentiez les consommateurs et que vos membres aient le souci de conserver leur image. Vos patrons sont tout de même ceux qui devront débourser les frais encourus par les pertes et dommages. Les assurés sont-ils bien la première priorité ou faut-il d'abord satisfaire les compagnies d'assurance? N'oublions pas que les compagnies d'assurances assument les conséquences d'un bénéfice trop élevé en faveur des consommateurs.
[Traduction]
M. Dunning : Je tire de mon expérience qu'au sein du secteur de l'assurance-vie, les avantages ont tendance à être beaucoup plus clairs pour les assurés. J'ai eu affaire aux assurés lors de l'évaluation de leurs revendications pendant le règlement des trois cas d'insolvabilité. La SIAP a déployé de grands efforts pour veiller à ce que les assurés dont les bénéfices se présentent sous forme de prestations ou de police échue ou qui devaient recevoir des prestations de décès, ont été rétribués de manière équitable. Nous avons, à titre de groupe de gestion, joué un rôle prépondérant auprès du liquidateur pour nous assurer que les souscripteurs en cause ont été rétribués de manière équitable et que les paiements se sont poursuivis sans interruption.
Nous sommes fiers du dossier des cas d'insolvabilités : très peu de consommateurs ont porté plainte. En cas d'insolvabilité, la SIAP organise un service d'assistance téléphonique à l'intention des consommateurs. En 1994, au point culminant de la crise où étaient plongées ces trois compagnies, nous avons reçu, annuellement, 15 000 appels téléphoniques de consommateurs. Ce nombre est tombé à 500 appels par an en raison de la diminution des préoccupations.
Nous avons mis sur pied un comité d'étude des préjudices subis auquel peut s'adresser tout consommateur qui croit qu'il n'a pas fait l'objet d'un traitement impartial de la part du liquidateur au cours du transfert de sa police à une compagnie solvable. Nous avons traité directement ces dossiers. Le nombre de plaintes des consommateurs enregistrées pendant ce processus est extrêmement réduit.
[Français]
Le sénateur Massicotte : Une compagnie doit-elle être membre de votre organisation pour avoir le droit de vendre de l'assurance-vie au Canada?
[Traduction]
M. Dunning : Oui. Les organes de réglementation sont responsables d'homologuer les compagnies qui peuvent vendre des produits d'assurance dans leur territoire d'intervention. Dans le cadre de ce processus, ces organismes demandent à une compagnie de devenir membre de la SIAP.
[Français]
Le sénateur Massicotte : Y a-t-il quelqu'un dans votre organisation qui peut refuser?
[Traduction]
M. Dunning : Non. En vertu de notre entente avec les organes de réglementation, chacun doit prouver qu'il est membre de la SIAP pour être autorisé à vendre son produit.
[Français]
Le sénateur Massicotte : Ma préoccupation se situe lorsque le montant d'assurance est trop élevé. Un Canadien qui désire acheter un produit financier va chercher la meilleure prime. Il ne sera pas intéressé à savoir si la compagnie est solvable, puisqu'il est protégé à 85 p. 100. Par conséquent, la seule compétition qui existe touche les fournisseurs de service. La rentabilité n'est pas le souci du consommateur. Alors ne sommes-nous pas devant un problème d'aléa de moralité?
[Traduction]
M. Dunning : Les questions de l'aléa de moralité et de la protection ultime des consommateurs font partie des sujets de réflexion de l'industrie, de la direction de la SIAP et des organes de réglementation lorsque ceux-ci établissent notre niveau de protection.
L'an dernier, nous avons procédé à un examen de notre protection, par suite de la croissance du nombre de polices d'assurance-vie. L'émergence de l'assurance-invalidité a fait augmenter le montant des retraits autorisés. Le régime est en vigueur depuis 15 ans. Par conséquent, nous avons examiné la possibilité d'augmenter, par exemple, notre revenu mensuel. Le niveau de base est de 2 000 $ par mois, montant que nous garantissons à 100 p. 100. Nous avons tenté d'établir s'il convenait d'augmenter ce niveau garanti à 100 p. 100, ou si nous devrions adopter un régime de garantie proportionnelle au-delà de ce montant. Il est ressorti des travaux de ce groupe de travail et des discussions subséquentes avec les agences de réglementation que l'avantage de la garantie proportionnelle pour les montants à haut pourcentage tient au fait qu'elle confère au consommateur une certaine responsabilité dans la sélection du produit; puisque les prestations ne sont pas garanties à 100 p. 100, il faut qu'ils s'en soucient. En même temps, en cas d'insolvabilité d'une institution financière, ils sont assurés de ne pas subir une perte totale et dévastatrice des prestations qui leur étaient promises.
Le sénateur Angus : J'ai examiné votre rapport annuel pour l'année 2003; vous y faisiez allusion aux pressions subies par un certain nombre de compagnies d'assurance-vie et autres organisations internationales pour l'adoption de normes comptables communes leur permettant d'entrer en concurrence pour l'acquisition des capitaux disponibles et autres activités. Je comprends qu'il y a une tendance marquée vers l'harmonisation des normes comptables. Le Canada a un système, les États-Unis un autre, et il existe en outre des normes internationales. Cette tendance, nous en entendons parler dans différents domaines, dans la ligne de nos travaux au sein de ce comité. Vous semblez avoir mis cela en lumière dans votre rapport et je crois que, dans la mesure où le Canada sera forcé de modifier ses exigences dans ce domaine, ces changements auront une incidence sur la détection des risques dans le cadre des méthodes d'évaluation de l'insolvabilité, ou plutôt, de l'efficacité.
Pourriez-vous nous livrer vos observations à cet égard et peut-être mettre le doigt, à notre intention, sur les principales modifications des normes que vous prévoyez au Canada?
M. Dunning : Comme vous l'avez signalé, il y a une tendance générale à adopter les normes comptables internationales au fur et à mesure que les marchés financiers se mondialisent. Il ressort du rapport annuel auquel vous faites référence, que le problème est particulièrement aigu dans le domaine de l'assurance-vie parce que les méthodes comptables dans ce domaine sont très différentes d'une entité administrative à l'autre. Elles sont certes beaucoup plus divergentes que dans tout autre secteur d'activité que je connais. Il y a dans cette sphère d'activités des pressions en faveur de l'harmonisation.
Dans le domaine de l'assurance-vie, le Canada a la chance d'avoir un système comptable qui est probablement le plus avant-gardiste au monde. Nous sommes en quelque sorte des chefs de file dans ce domaine. Au fur et à mesure que les normes internationales s'imposeront dans le secteur de l'assurance-vie, le défi pour nous consistera à trouver le moyen d'harmoniser les règles comptables.
Quand on se tourne vers les compagnies d'assurance-vie, on constate que le problème est double. Le volet de l'actif est influencé par l'évolution vers la juste valeur qui s'impose à toutes les institutions financières y compris aux banques. L'autre volet tient à la façon d'évaluer les polices, une opération particulièrement risquée — il s'agit du volet actuariel et de la façon d'en rendre compte. Nous devrons harmoniser nos normes d'évaluation actuarielles et nos normes de comptabilité avec les normes internationales. Comme dans une foule de cas semblables, nous nous tournons à la fois vers l'Europe et vers les États-Unis. Pour le Canada, il serait bien que l'Europe et les États-Unis accueillent des normes communes. Cela ne semble pas très probable en ce moment du côté de l'assurance-vie; comment donc le Canada réagira-t-il à cette situation?
Nous venons d'évoquer quelques-uns des changements qui concernent la comptabilité. Du point de vue de la SIAP, nous sommes intéressés par deux choses. Si nous modifions notre base de comptabilité, nous changeons la façon de divulguer l'information. Une grande partie de notre travail de base consiste à établir des ratios et à cerner les risques en analysant les états financiers. Si on modifie les règles de base de la comptabilité, cela modifie l'objet examiné et ce que les états financiers mettent en évidence. C'est un de nos domaines d'intérêt.
Un autre domaine d'intérêt, plus vital encore, tient à la façon de mesurer le niveau de capital dont doit disposer une compagnie d'assurance-vie. Pour nous, le capital est ce qui compte le plus. Nous ne nous faisons pas de souci pour un organisme à haut risque si celui-ci met en jeu son propre capital, mais quand un organisme expose l'argent des souscripteurs à un haut niveau de risque, nous sommes préoccupés et la réglementation du capital est une mesure de cette préoccupation.
En ce moment au Canada, la combinaison d'évaluations actuarielles complexes — les bonnes règles comptables — et de ce que l'on appelle le MMPRCE (montant minimum permanent requis pour le capital et l'excédent), les règles régissant le capital des compagnies d'assurance-vie, fait en sorte que nous sommes bien servis. Néanmoins, à mesure qu'évolueront les règles de comptabilité, nous devrons modifier les règles de capital.
Le président : M. Dunning, cela signifie quoi au juste — capital optimal?
M. Dunning : Non; du point de vue de la SIAP, nous aimerions voir s'imposer la notion de capital optimal. Lorsque nous analysons le niveau de risque d'une compagnie, nous aimons constater sa profitabilité, parce qu'une compagnie qui enregistre des profits n'aboutira pas devant notre tribunal. Comme vous le savez, plusieurs de nos membres les plus importants sont très actifs sur la scène internationale. Il est très important que ces compagnies restent compétitives à l'échelle mondiale. Si nous appliquons des normes canadiennes sur le capital trop sévères pour elles, nous muselons leur compétitivité internationale et, une fois de plus, nous voyons cela comme un risque. Du point de vue de la SIAP, nous sommes fortement en faveur d'un niveau de capital optimal et d'un niveau de capital clairement établi.
Du côté des banques, nous nous conformons à BASEL 2; et nous en avons connu les retombées dans le système canadien. Nous suivons cela de très près. Je voudrais souligner ici que la SIAP s'intéresse à ce processus. Cependant, nous ne contrôlons pas le processus pas plus que nous n'établissons les règles. Ce sont les organes de réglementation qui fixent les règles. Le principal organisme de réglementation fédéral avec qui nous faisons affaire est le BSIF (Bureau du surintendant des institutions financières) et nous avons une très bonne relation avec cet organisme. Pas plus tard que la semaine dernière, nous avons eu une réunion afin d'examiner, dans une perspective de long terme, ce que comptent faire les actuaires pour résoudre la question et afin de cerner les normes de capital qu'envisagent les organes de réglementation canadiens.
Le sénateur Angus : D'un point de vue pratique, il s'agit d'une affaire particulièrement complexe, de toute évidence, et nous avons assisté à la mainmise d'une de nos compagnies d'assurance vedette, la Manulife, sur une grande entreprise américaine, la compagnie John Hancock. Ça a fait la manchette des journaux. Nous savons que les normes américaines sont différentes des normes canadiennes. À partir de cet exemple pratique, pouvez-vous indiquer comment nous pourrions harmoniser et traiter une situation comme celle-ci, de façon à ce que les assurés de Manulife soient rassurés sur le fait que leur niveau de risque n'est pas plus grand maintenant que cette grosse compagnie américaine aux normes moins rigides a, pour ainsi dire, dilué le capital.
M. Dunning : Par principe, nous ne faisons aucun commentaire sur une compagnie membre protégée par les règles de confidentialité. Secundo, M. LePan est la première personne à interroger sur les normes de capital et les enjeux parce qu'il est vraiment le mieux placé. En règle générale, ces développements ne nous préoccupent pas. Ils ont leur importance mais, franchement, nous sommes heureux de voir un de nos principaux membres jouer un rôle de premier plan sur la scène mondiale. Tant que c'est profitable, cela ne nous préoccupe pas.
Nous avons grandement confiance en la capacité du Bureau du surintendant des institutions financières de régler ces questions. Notre conseil d'administration participe à des réunions trimestrielles avec les représentants du Bureau et M. LePan assiste à ces réunions une fois l'an. Des questions comme les grands changements d'orientation d'importants protagonistes et les mesures à prendre pour garantir que, du point de vue de la réglementation, les souscripteurs canadiens seront bien servis et bien protégés pourraient fort bien alimenter la discussion entre le surintendant et les membres de notre conseil d'administration. La protection du consommateur est notre principal centre d'intérêt et la question que nous posons au superintendant est la même question que vous avez posée : S'il y a un changement d'orientation majeur, comment pouvons-nous être certains que les souscripteurs canadiens n'en souffriront pas?
Le sénateur Angus : Cette évolution vers l'harmonisation permettra-t-elle de régler ce genre de question?
M. Dunning : Oui, si nous pouvons la réaliser.
Le sénateur Angus : Si vous pouvez la réaliser.
M. Dunning : C'est légitime, à notre avis, de veiller à ce que nous ayons le bon niveau de normes de capital pour l'atteinte de nos buts et notre position concurrentielle. Je serais tenté de partir de notre théorie sur ce thème, mais je crains que ce soit trop technique.
Le président : Nous ne limiterons pas votre réflexion ici. Le sénateur Angus soulève une importante question. Nous sommes soucieux de la protection du consommateur, mais sommes également préoccupés par la question de la compétitivité de nos institutions financières à l'échelle internationale. Le sénateur a posé une question pertinente à propos du capital et du bien-fondé de notre réglementation. Même si nous voulons protéger le consommateur, nous ne voulons pas mettre un frein à la croissance lorsque celle-ci n'offre que des avantages et ne présente aucun risque. C'est le fondement de sa question. Je vous prie donc de ne pas vous limiter. Si vous avez des idées qui, de votre point de vue, seraient utiles pour nos fins, nous aimerions que vous nous les communiquiez par écrit.
Le sénateur Angus : Si vous avez des pistes de solution dans cette ligne de pensée, nous aimerions en entendre parler. Cette problématique se pose pour nous dans des domaines autres que celui-ci. Par exemple à l'égard des questions prudentielles, qui me concernent personnellement.
Le président : C'est une question que nous examinerons sous l'angle de la productivité et de la compétitivité; elle est donc pertinente pour nos délibérations. Veuillez s'il vous plaît nous communiquer ce que vous en pensez.
[Français]
Le sénateur Plamondon : Suite au rapport McKay, des recommandations ont été faites aux compagnies d'assurance pour qu'elles rédigent des contrats clairs. Les contrats précédents utilisaient un langage hermétique, particulièrement difficile à comprendre. Si nous supposons qu'il y ait des recours collectifs intentés contre une compagnie d'assurance et que cela mette en péril la solvabilité ou la possibilité d'insolvabilité d'une compagnie d'assurance, le Bureau du surintendant des institutions financières vous aviserait-il que la compagnie est sous surveillance ou s'il ne ferait que demander des rapports plus fréquemment qu'à l'habitude? Êtes-vous avisé de cette situation ou au contraire, c'est une surprise, et vous l'apprenez comme tout le monde par les journaux?
[Traduction]
M. Dunning : Vous faites référence aux recours collectifs; ceux-ci font partie d'une catégorie de risques que nous désignerons par l'expression « risques facultatifs ». Ces risques sont des risques dont l'industrie des services financiers doit tenir compte à l'échelle mondiale. Nous avons pu constater des pertes dans ce domaine. Pour toute compagnie qui est exposée à ce genre de risque, nous avons nos propres procédés de détection et nous espérons que nous nous en rendrons compte. En fait, oui, en réponse à votre question, nous avons des rencontres régulières avec l'AMF au Québec et avec les représentants du BSIF, et nous mettons en commun, trimestriellement, l'information confidentielle sur les risques d'insolvabilité des diverses compagnies. En vue de protéger les consommateurs, il est vital d'intervenir très tôt. S'il y a une leçon à tirer des années 1990, c'est le fait que la meilleure façon de protéger les souscripteurs consiste à intervenir dès que le problème se pose, aussitôt que la compagnie ne peut plus garantir que les intérêts des assurés seront pris en compte. C'est le moment d'intervenir.
En 1996, le Bureau du surintendant des institutions financières a modifié sa façon de faire pour adopter une méthode d'intervention plus précoce. Nous avons signé un protocole avec eux, précisant nos rôles respectifs en cas de crise, à mesure que la situation de la compagnie en cause se détériore. En résumé, c'est le travail de l'organisme de réglementation de collaborer avec la compagnie pour corriger le problème et s'ils ne peuvent le régler c'est à nous de parer à toute éventualité et d'intervenir au bon moment pour protéger les assurés.
[Français]
Le sénateur Plamondon : En ce qui concerne les indemnisations, savez-vous si une partie des consommateurs qui étaient éligibles à une indemnisation n'en ont pas profité parce qu'ils ne connaissaient pas votre organisme?
[Traduction]
M. Dunning : Oui, lorsque les institutions font défaut, la première chose que les assurés se demandent c'est ce qui arrivera à leurs bénéfices? » Jusqu'à ce point, la plupart des souscripteurs ne sont généralement pas au courant de notre existence. Nous le savons, et nous intervenons très rapidement. Tout d'abord, dans les médias mais, chose plus importante, nous collaborons avec le liquidateur pour faire parvenir aux assurés une lettre précisant exactement ce que cette insolvabilité signifie pour eux. La lecture d'un article dans la presse sur la SIAP peut avoir son importance, mais ce qu'ils veulent vraiment savoir, c'est qu'est-ce que cela veut dire pour les prestations qui leur sont dues en vertu de la police. Nous travaillons très fort dans les premiers jours d'une liquidation pour nous acquitter de cette tâche.
[Français]
Le sénateur Plamondon : Y a-t-il eu des cas où les gens qui recevaient une lettre n'ont pas demandé d'indemnisation pour une raison ou une autre?
[Traduction]
M. Dunning : Je ne connais pas de cas semblables.
Le sénateur Kelleher : Si je peux revenir à un domaine exploré par le sénateur Massicotte, je me demande tout simplement comment je peux devenir membre de votre organisation?
M. Dunning : Tout d'abord, il faut être une compagnie d'assurances. Lorsque vous demandez un permis d'affaire au Canada, n'importe quelle province où vous voulez vendre un produit vous dira que vous devez devenir membre de la SIAP. Si vous avez une incorporation fédérale, l'organisme de réglementation fédéral vous dira également que vous devez devenir membre de la SIAP. Cet organisme nous écrit ensuite. C'est un peu comme l'histoire et la poule et de l'œuf au sens où nous disons à toute personne autorisée à faire des affaires qu'elle peut devenir membre, mais les provinces disent qu'il faut être membre pour vendre de l'assurance. Aussitôt qu'une société est autorisée à vendre de l'assurance, elle devient automatiquement membre de la SIAP. Elle est obligée de signer une entente contractuelle avec nous.
Le sénateur Kelleher : Supposons que je sois une compagnie d'assurances autorisée, est-il possible que je puisse, pour quelque motif que ce soi, être disqualifiée?
M. Dunning : Non, pas par la SIAP. Tout ce qu'il faut, pour une compagnie d'assurance-vie puisse devenir membre, c'est qu'un organisme de réglementation ait établi qu'elle a les compétences requises pour opérer. Chose toute aussi importante, nous ne pouvons révoquer la carte de membre d'une société membre. Seul un organisme de réglementation peut intervenir pour forcer une compagnie à fermer ses portes. Tant qu'une société vend de l'assurance, nous devons maintenir son statut de membre. C'est l'organisme de réglementation qui a la clé d'entrée ou de sortie, et pas nous.
Le sénateur Kelleher : Si je détiens personnellement une police d'une compagnie devenue insolvable et que vous avez organisé le transfert vers une nouvelle compagnie — cela entraîne-t-il un changement de prime?
M. Dunning : Non, la police est toujours en vigueur. Si elle est protégée par nous à 100 p. 100, les primes de la police et toutes les modalités et conditions resteront exactement les mêmes qu'avec l'ancienne compagnie. En cas de réduction, s'il s'agissait, par exemple, d'une police importante qui a été réduite au niveau de 85 p. 100, vos primes seraient réduites de 85 p. 100 parce que vous n'aurez plus droit qu'à 85 p. 100 des prestations.
Le président : De 15 p. 100.
Le sénateur Kelleher : De 15 p. 100.
Le président : Nous sommes attentifs, monsieur Dunning. Nous écoutons soigneusement vos chiffres. Le sénateur Plamondon a une dernière et brève question à vous poser.
[Français]
Le sénateur Plamondon : Quels sont les problèmes qui menacent les compagnies d'assurance actuellement?
[Traduction]
M. Dunning : Nous sommes en fait à un moment privilégié où la santé financière du secteur de l'assurance-vie est florissante. Nous surveillons les risques systémiques et il n'y a pas de risque particulier. Le risque opérationnel a pris de l'ampleur à l'échelle mondiale. En ce moment, les compagnies ne sont pas tenues de capitaliser pour couvrir partiellement le risque opérationnel, parce qu'il est difficile de mesurer ce risque. C'est une chose que nous examinons.
On peut se demander si l'heure viendra où l'économie déclinera et où les risques prendrons une nouvelle ampleur. Je suis certain que cela se produira et c'est à ce moment là que nous redeviendrons opérationnels.
[Français]
Le sénateur Plamondon : Seriez-vous d'accord que le consommateur soit avisé lorsqu'une compagnie d'assurance fait l'objet d'une surveillance? Votre organisme est un regroupement de compagnies d'assurance, par conséquent, vous êtes au courant de ce qui touche ce secteur. Toutefois, le consommateur n'est pas au courant si sa compagnie d'assurance tout à coup pose un risque.
[Traduction]
M. Dunning : C'est une situation très difficile parce que, même si bon nombre d'intervenants sont en faveur d'une divulgation complète de l'information au consommateur, on ne peut avouer qu'une compagnie est en difficulté avant qu'elle ne soit vraiment prête à fermer ses portes. Le simple fait de révéler qu'une compagnie est en péril peut suffire à précipiter sa fermeture.
Lorsque j'ai mentionné plus tôt qu'il y a, pour un certain nombre de compagnies, des enjeux qui nous préoccupent et qui préoccupent les organes de réglementation, l'organisme de réglementation doit d'abord régler les questions litigieuses avant qu'elles n'atteignent un niveau inquiétant pour les souscripteurs. La chose la plus difficile pour l'organisme de réglementation est de savoir quand il faut intervenir. Il faut intervenir lorsqu'il reste suffisamment d'argent pour les souscripteurs et, en réalité, l'intervention doit se faire lorsqu'il y a pénurie de capitaux mais qu'il reste suffisamment d'actifs pour couvrir la dette. C'est le moment idéal pour intervenir. L'intervention judicieuse est un art et non une science et nous avons beaucoup de respect pour les agents de l'AMF et du BSIF de qui cette tâche relève.
Le sénateur Plamondon : Les consommateurs sont les derniers informés.
Le président : Nos informations sur le système d'avertissement précoce nous viennent du BSIF et d'autres organismes, de sorte que les témoignages ont pour nous un grand intérêt.
J'ai une question. Elle se rapporte à votre dernière déclaration et à la discussion que nous avons eue avec la Société d'assurance-dépôts du Canada (SADC). Je pense que la fixation du montant de 60 000 $ est une question d'art autant que de sciences. Ai-je raison de dire que ce montant a été établi il y a quelque 14 ou 15 ans, lorsque votre société a été fondée? Ce même décalage dans le temps vaut pour la garantie de 60 000 $ offerte par la Société d'assurance-dépôts du Canada. Il s'agit pour nous, du point de vue de la protection du consommateur, de savoir si nous pourrions envisager ou non de faire passer cette garantie de 60 000 $ à 100 000 $. Cela fait partie des questions dont nous avons discuté avec la SADC et nous leur avons demandé de nous fournir une analyse coût-bénéfice à l'appui de la recommandation d'augmenter ce montant.
Pourriez-vous nous dire, en quelques mots, ce qui vous en pensez? Si vous voulez davantage de temps pour nous fournir une équation mathématique, nous pourrons également examiner celle-ci. Il s'agit du niveau de protection des consommateurs et vous avez réussi à protéger ceux-ci aux niveaux établis dans vos documents. Néanmoins, cela s'est passé il y a 14 ans et nous sommes un comité de surveillance. Est-ce le niveau de protection approprié compte tenu de l'impact inflationniste de ce niveau au cours des 14 dernières années?
M. Dunning : Je n'ai pas de commentaire officiel de notre organisation sur l'augmentation de la garantie de 60 000 $, mais l'année dernière, nous avons examiné la possibilité d'augmenter le niveau de tous nos bénéfices. Nous avons décidé de n'augmenter aucun de ces niveaux, mais plutôt d'adopter le principe d'une garantie à 85 p. 100 sur les sommes qui dépassent ce montant. L'industrie, dans le cadre d'un groupe de travail, a également étudié cette même stratégie à propos de ces 60 000 $ et des valeurs de rachat brutes et elle a envisagé d'offrir une garantie de 100 p. 100 jusqu'à concurrence de 60 000 $ et de 85 p. 100 sur les montants excédentaires. Je pense que c'est la position que les intervenants ont privilégiée.
Si nous estimions qu'une augmentation de la protection du consommateur était requise, cette stratégie serait adoptée par notre industrie. Deux motifs expliquent notre décision de ne pas choisir cette voie. L'un d'eux tient au fait que nous pensons qu'il est très important qu'un grand nombre des produits couverts par les 60 000 $ dans notre industrie soient semblables à ceux des institutions de dépôt. Du point de vue du consommateur, il est logique d'harmoniser les mesures prises et de ne pas avoir de garantie différente à des niveaux différents.
Le président : Si, en fait, la SADC est convaincue ou a été convaincue, à partir d'une analyse approfondie de la preuve, que nous devrions recommander une augmentation, ce serait une stratégie que vous devriez prendre en considération parce que le consommateur doit avoir une parfaite compréhension des fonds auxquels ils ont accès. Qu'il s'agisse d'une question bancaire ou d'une question d'assurance. En ce sens, c'est affaire d'art et non de science.
M. Dunning : Ce que nous souhaiterions, c'est que notre industrie participe avec les institutions de dépôt, la SIAP et la SADC, à des discussions conjointes à propos des solutions favorables au consommateur et des changements qu'il faut faire.
Le président : Je ne veux pas parler au nom de ce comité, mais je vous prie d'amorcer ces discussions. J'accueille votre témoignage, qui s'est avéré très utile. Il s'agit d'un volet de notre économie largement ignoré et vos travaux touchent à un précieux et important aspect de la protection du consommateur dans ce secteur. Nous vous remercions de votre travail et de votre diligence.
La séance se poursuit à huis clos.