Délibérations du comité sénatorial permanent des
Banques et du commerce
Fascicule 10 - Témoignages du 14 avril 2005
OTTAWA, le jeudi 14 avril 2005
Le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce se réunit aujourd'hui à 10 h 50 pour examiner les questions touchant les consommateurs dans le secteur des services financiers et en faire rapport.
Le sénateur Jerahmiel S. Grafstein (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président: Bonjour, mesdames et messieurs. Bienvenue à notre audience. Nous passons sur CPAC et le Web et sommes très heureux de poursuivre cette étude du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce sur les questions concernant les consommateurs dans le secteur des services financiers.
C'est avec grand plaisir que nous recevons des témoins de marque de l'Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières, de l'Association canadienne des courtiers de fonds mutuels et de l'Institut des fonds d'investissement du Canada.
Je signale en particulier la présence d'un ancien collègue parlementaire, M. Tom Hockin. Il fut non seulement un député éminent, mais aussi ministre.
Le sénateur Angus: De quel parti était-il?
Le président: Il était du Parti progressiste-conservateur, mais cela n'est pas important parce que lui et moi venons de London en Ontario et sommes allés à l'Université Western; les petits gars de petites villes vont loin. Je suis ravi que vous soyez ici, monsieur Hockin.
M. Joseph J. Oliver, président et chef de la direction, Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières: Je suis président et chef de la direction de l'Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières qui réglemente les 212 sociétés de courtage qui exercent des activités au Canada ainsi que leurs 25 000 employés inscrits.
[Français]
J'apprécie l'occasion qui m'est offerte de m'adresser aux membres de ce comité et d'aborder des questions qui sont au cœur du mandat de l'ACCOVAM, la protection des investisseurs et les recours des consommateurs.
[Traduction]
Les clients des sociétés membres de l'ACCOVAM disposent d'un éventail de recours aussi complets et robustes que ce qui existe ailleurs dans le monde. L'investisseur qui estime avoir été l'objet de pratiques commerciales déloyales ou abusives est encouragé à soumettre une plainte écrite à l'association.
Nous nous efforçons de rendre notre processus de traitement des plaintes aussi accessible que possible, notamment en le faisant connaître au public. Une brochure de l'ACCOVAM contient de l'information sur la façon de déposer une plainte à l'ACCOVAM; sur les services d'arbitrage indépendants; sur l'ombudsman des services bancaires et d'investissement; et sur le service de médiation offert par l'Autorité des marchés financiers.
[Français]
Les investisseurs peuvent composer le numéro sans frais de notre ligne info-plainte qui offre un service dans les deux langues afin d'obtenir de l'aide pour faire une plainte ou pour se procurer un formulaire de plainte. L'an dernier, nos responsables du traitement des plaintes ont répondu aux demandes de renseignement et d'assistance de quelque 1 900 investisseurs. Au moins 22 000 investisseurs ont utilisé notre service d'information sur les sociétés membres, les personnes inscrites en ligne qui les renseignent sur le type d'inscription d'une personne, les produits qu'elle est autorisée à vendre et les restrictions qui s'appliquent à son inscription, le cas échéant, comme celle de travailler sous supervision. Le public peut aussi savoir si une société ou un conseiller a des antécédents disciplinaires auprès de l'ACCOVAM.
[Traduction]
M. Oliver: Les sociétés membres et les personnes inscrites doivent offrir leur pleine collaboration en temps opportun; si une personne refuse de collaborer, elle est bannie à vie. Les sociétés membres sont tenues de déclarer par le biais de ComSet, base de données en ligne, toutes les plaintes des clients et tous les dossiers disciplinaires, incluant les enquêtes internes, les mesures disciplinaires, les règlements et les poursuites civiles, criminelles ou réglementaires intentées contre la société ou ses personnes inscrites. L'an dernier, les sociétés ont déclaré près de 1 900 événements par le biais du système ComSet. Le personnel de l'ACCOVAM surveille l'information dans ComSet sur une base quotidienne.
Au cours des trois dernières années, nous avons tenu 173 audiences disciplinaires. Nous avons imposé des amendes totales de 46 millions de dollars aux sociétés et de 11,4 millions aux particuliers, en incluant les restitutions de commissions et les frais. Nous avons suspendu 19 personnes et en avons banni 32 à vie. Nous avons également résilié le permis de trois sociétés. J'ai déposé à cet effet un mémoire écrit qui contient d'autres détails et renseignements.
Passons maintenant de la réglementation à la réparation ou au dédommagement financier. Le programme d'arbitrage de l'ACCOVAM est un processus rapide, peu coûteux et indépendant pour les litiges jusqu'à 100 000 $. Essentiellement, ce programme a été créé pour traiter les petites réclamations pour lesquelles un recours devant les tribunaux ne serait pas avantageux d'un point de vue économique. L'arbitrage est un processus moins officiel, moins accusatoire et moins coûteux et plus rapide que les tribunaux. D'autre part, beaucoup d'investisseurs en apprécient la confidentialité.
[Français]
Si un client opte pour l'arbitrage, la société est obligée de participer. Nos statuts imposent aux sociétés de distribuer une brochure approuvée par l'ACCOVAM à tous leurs nouveaux clients et surtout, chaque fois qu'elle reçoit une plainte écrite. Au cours des cinq dernières années, les trois agences indépendantes ont jugé un total de 279 causes.
[Traduction]
M. Oliver: La participation au programme d'arbitrage a considérablement diminué depuis la création de l'OSBI, ce qui s'explique par le fait que les services de l'OSBI sont gratuits et non exécutoires, ce qui est manifestement le choix privilégié par l'investisseur lésé.
En conclusion, le processus réglementaire et quasi judiciaire de l'ACCOVAM améliore la protection des investisseurs en imposant des sanctions sévères mais justes lorsque des infractions sont commises. Le processus de recours permet un dédommagement au moyen d'une série d'options simples. Dans l'ensemble, nous offrons un système juste et robuste qui protège les investisseurs et affermit la confiance du public dans les marchés de capitaux.
Merci. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
M. Larry M. Waite, président et chef de la direction, Association canadienne des courtiers de fonds mutuels: Bonjour, je suis président et chef de la direction de l'Association canadienne des courtiers de fonds mutuels (ACCFM) qui est l'organisme d'autoréglementation national du secteur canadien des courtiers en épargne collective. Avant d'entrer à l'ACCFM en 1998, j'ai été pendant vingt ans à la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario. Je tiens à remercier le comité d'avoir invité l'ACCFM ce matin.
Notre association est un organisme d'autoréglementation relativement récent puisqu'elle n'a été officiellement reconnue par les diverses commissions qu'en 2001. Elle a été créée après la constatation, parmi les autorités de réglementation des valeurs mobilières, que le secteur des organismes de placement collectif et des investisseurs bénéficierait d'une réglementation plus énergique. Les problèmes constatés figuraient au rapport de Mme Stromberg en 1995 qui déclarait qu'après la croissance spectaculaire des organismes de placement collectif au Canada, la réglementation était loin d'avoir suivi.
L'Association canadienne des courtiers de fonds mutuels a maintenant un personnel de 100 personnes réparties entre Toronto, Calgary et Vancouver. Notre caisse d'indemnisation des investisseurs attend l'approbation officielle des autorités de réglementation et devrait offrir une assurance en juillet.
L'ACCFM compte 181 membres qui ensemble représentent environ 70 000 personnes autorisées. Ses membres ont la responsabilité de 250 milliards de dollars d'avoirs de clients. Elle a un seul mandat qui est de réglementer les activités des courtiers de fonds mutuels et des personnes qu'ils ont autorisées. La protection des investisseurs et l'intérêt public sont primordiaux pour l'association. Cette orientation se retrouve très clairement dans la structure de gouvernance de l'ACCFM.
Le conseil d'administration de l'ACCFM compte 13 membres dont six administrateurs représentants du public et six administrateurs représentants du secteur et le président. Le président du conseil est actuellement un administrateur représentant du public et ce sont de tels administrateurs qui président tous les comités du conseil d'administration de l'ACCFM. Les responsabilités de réglementation englobent la conformité, la mise en application et les principes directeurs.
Je vais maintenant vous expliquer en quoi ces activités de réglementation visent la protection des investisseurs et l'intérêt public.
L'une des premières activités de réglementation de l'ACCFM a consisté à combler des lacunes concernant les courtiers en épargne collective. Le manuel des règlements qui a été rédigé contient de nombreuses nouvelles exigences très strictes pour les membres et personnes autorisées qui sont nouvelles pour ce secteur.
Les activités de conformité de l'ACCFM visent la protection des investisseurs et l'intérêt public. Le personnel de conformité effectue des vérifications sur place des membres, tant au siège social que dans les succursales. Jusqu'ici, on a effectué 140 de ces vérifications. Nous prévoyons que tous les membres auront fait l'objet d'une vérification complète d'ici à la fin de 2005. Cela est très important car la majorité des courtiers n'ont jamais fait l'objet de vérifications par un organisme de réglementation avant la création de l'ACCFM. Le service de la mise en application de l'ACCFM fonctionne depuis le début de 2004. Il a adopté une démarche proactive pour examiner les circonstances de non- conformité. Par exemple, si l'ACCFM constate un cas de conduite répréhensible, elle poursuit son examen pour découvrir les causes du problème, qu'il s'agisse d'un manque de règles suffisantes et/ou de supervision.
La mise en application et la conformité vont de pair lorsque les examens de conformité font ressortir des infractions importantes de la part des membres ou personnes autorisées. Dans le secteur des plaintes des clients, le manuel des règlements de l'ACCFM exige que ses membres répondent à ces plaintes de façon rapide et juste. Il exige d'autre part qu'ils signalent à l'ACCFM les plaintes graves. Les services de conformité et de mise en application sont vigilants et surveillent le respect de ces exigences.
L'ACCFM exige que tous ses membres participent au mécanisme de règlement des différends avec les consommateurs administré par l'ombudsman des services bancaires et d'investissement (OSBI). L'ACCFM exige que tous les clients reçoivent des renseignements sur l'OSBI lorsqu'ils ouvrent un compte et chaque fois qu'ils soumettent une plainte à l'attention des membres. Il y a deux occasions de recevoir ces renseignements. Si un membre ne coopère pas avec un OSBI, il fait l'objet de mesures disciplinaires.
L'ACCFM est un organisme ouvert et transparent. Nous avons un site Internet qui contient des informations sur nos exigences de réglementation, sur la façon de présenter une plainte, sur l'OSBI et toutes les activités d'audience ainsi que des liens aux sites qui offrent des informations sur la protection des investisseurs.
Nous sommes en train de réviser et d'accroître le contenu de notre site.
En conclusion, l'ACCFM est un organisme de réglementation relativement jeune, mais elle a déjà eu un effet important dans le secteur, du point de vue de la protection des investisseurs. Les membres sont mieux informés de leurs obligations et de leurs responsabilités à l'endroit des investisseurs et les respectent plus facilement. Les membres qui ne se conforment pas à ses exigences s'exposent à des mesures de conformité. Ils peuvent se voir retirer leur qualité de membre et perdre leur droit d'exercer.
Le fait que nos membres et le public soient mieux informés de notre rôle est essentiel et, bien que nous ayons encore beaucoup à faire dans ce domaine, nous pouvons nous féliciter du chemin déjà parcouru. Mon document écrit contient d'autres détails.
M. Tom Hockin, président, Institut des fonds d'investissement du Canada: Je suis heureux de me retrouver dans la capitale du pays avec d'anciens collègues parlementaires.
Vous avez entendu les deux organisations d'autoréglementation du secteur des valeurs mobilières. Nous ne sommes pas pour notre part une organisation d'autoréglementation. Nous sommes une association commerciale, même si je suis membre du conseil de l'ACCFM.
L'IFIC représente environ 99 p. 100 de tous les actifs gérés par le secteur des fonds mutuels. C'est-à-dire les banques, les compagnies d'assurance et les manufacturiers et distributeurs indépendants qui sont membres de l'Institut des fonds d'investissement du Canada.
Je me suis dit que vous apprécieriez que je vous parle un peu de ce secteur et en particulier de ce qui s'est fait récemment dans le contexte de la protection du consommateur.
La première série d'initiatives importantes est celle qui a été entreprise par les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM) à propos du projet de réforme du système d'inscription. Elles ont préparé un document d'orientation qu'elles ont demandé aux deux OAR d'adopter comme règlement. C'est un document très important pour les clients. Un groupe de travail sur l'ouverture de compte propose un nouveau formulaire que chaque représentant de commerce doit avoir quand il ouvre un compte avec un client et nous devons nous assurer que ce document ne soit ni long ni obscur.
Il y a également un groupe de travail sur les rapports de rendement personnel. Je ne sais pas s'il y en a parmi vous qui détiennent des fonds mutuels, mais votre rendement personnel n'est pas le même que celui des fonds parce que vous achetez à des moments de l'année différents et dans des proportions différentes.
L'Institut des fonds d'investissement du Canada a proposé d'utiliser la méthode de rendement Dietz modifiée; c'est une formule compliquée mais c'est la meilleure. Nous recommandons cette méthode pour calculer le rendement personnel dans tout le secteur et en faire rapport.
Il y a en outre un groupe de travail sur une plus grande divulgation. Quels conflits éventuels peut avoir votre courtier?
Que touche le représentant et que touche le courtier?
Un groupe de travail a présenté un rapport et donné des directives aux deux OAR à cet égard. Nous favorisons une divulgation claire et efficace, non seulement pour les fonds mutuels mais également pour les autres produits. Les fonds mutuels sont les plus évidents, mais tous les produits devraient être assujettis aux mêmes règles de divulgation, qu'il s'agisse d'un produit d'assurance, d'un produit d'assurance d'investissement collectif, d'un compte intégré ou même d'une obligation. Nous y sommes favorables, mais nous voudrions que cela s'applique à tout l'éventail de possibilités d'investissement.
Pour ce qui est des plaintes des consommateurs, l'OSBI et le CRCSF, les autres groupes d'ombudsman, disent qu'il n'y a pas beaucoup de plaintes, de 3 à 4 p. 100 au total, dans le secteur des fonds mutuels.
Quant aux problèmes de synchronisation du marché dont vous avez peut-être pris connaissance dans les journaux, en particulier aux États-Unis où de sérieuses erreurs ont été commises par des gestionnaires de fonds mutuels, vous serez heureux d'apprendre que l'IFIC est l'association qui a mis au point une trousse à outils pour régler ces problèmes avant que les organismes de réglementation ne rendent leur décision. La U.S. Securities and Exchange Commission, la British Financial Services Authority et les derniers commentaires de David Brown, président de la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario, vont dans ce sens. Il n'y a pas eu de cas de synchronisation du marché depuis le milieu de l'année 2003.
Quant à la protection des intérêts des consommateurs au niveau de la gestion des fonds mutuels, nous pensons que les ACVM vont rapidement exiger que les fonds mutuels aient des administrateurs indépendants par le biais de comités d'examen indépendants. La plupart des grands complexes de fonds ont maintenant des administrateurs indépendants et nous avons donc toujours été favorables à une telle réforme. Enfin, vous vous intéressez tous au cadre de réglementation général. La bonne nouvelle est que lorsqu'on en arrive aux fonds mutuels, nous avons grâce aux deux OAR qui sont à ma droite et qui travaillent avec les autorités concernées au Québec, des règles qui sont les mêmes partout au pays.
Quant à la réglementation de la gestion des fonds mutuels, nous n'avons pas de système unique de réglementation pour l'interprétation des textes nationaux.
Il s'agit maintenant d'un secteur de 513 milliards de dollars. Toutes les entreprises de gestion n'ont pas de ventes nettes. En mars, seules trois des grosses entreprises avaient des rachats nets. Les fonds appartenant aux banques représentent maintenant 44 p. 100 des ventes nettes dans le secteur. Il y a d'autres produits d'investissement collectif en dehors de l'IFIC qui, au total, représentent environ 70 milliards de dollars. Tout cela est très important pour le Canadien moyen qui essaie d'économiser pour sa retraite.
Enfin, les sénateurs voudront certainement savoir que l'association commerciale du Canada, l'Institut des fonds d'investissement du Canada, a réussi à obtenir le secrétariat pour la coordination de l'Association internationale des fonds d'investissement, groupe qui coordonne toutes les organisations semblables à l'IFIC au monde. Environ 40 pays ont ce genre de fonds d'investissement. Ce secrétariat se trouve maintenant à Montréal et est dirigé par du personnel canadien. Le Canada est donc très bien placé pour savoir ce qui se passe dans ce secteur sur la scène internationale.
Le président: Nous avons une longue liste de sénateurs. J'espère que chacun sera aussi bref et précis que possible.
Le sénateur Angus: Messieurs, merci beaucoup. Il apparaît très clairement que vous suivez cet examen du rôle du consommateur dans notre système financier au Canada. C'est important pour nous parce que dans notre rôle de sénateurs, et en particulier de membres du Comité des banques, lorsqu'on ne parle pas de fusionnement et de banques, on entend davantage parler des consommateurs, des épargnants et des clients des membres de l'ACCOVAM.
Ces questions vous paraîtront peut-être faciles mais elles reflètent le genre de demandes de renseignements, de lettres et de plaintes que je reçois.
Monsieur Oliver, je comprends qu'avec M. Waite, vous êtes les PDG de deux organisations d'autoréglementation, qu'évidemment les particuliers moins bien nantis trouvent assez suspectes. On nous dit: nous ne pouvons pas nous permettre de traiter avec ces gens-là. Ils profitent de nous. Leurs membres sont ceux contre qui nous émettons des plaintes et nous ne pouvons pas être traités équitablement.
Si j'ai lu attentivement vos mémoires, vous répondez à ces plaintes.
Monsieur Oliver, comment un épargnant peut-il perdre ses économies?
Qu'est-ce qui s'est produit quand un investisseur traite avec l'un de vos jeunes représentants, rémunérés et indemnisés largement en fonction du volume de transactions et par des commissions, et se retrouve tout d'un coup propriétaire de titres qu'il ne connaît pas et recevant des contrats environ trois fois par semaine.
Je sais que vous avez intenté toutes ces poursuites, mais la situation est-elle meilleure aujourd'hui pour ce genre de personne, et quelles bonnes nouvelles avez-vous à donner à ces gens qui nous appellent?
Je suis certain que d'autres sénateurs reçoivent de tels appels.
M. Oliver: Il y a moins de plaintes, il y en a eu quelque 1 300 l'année dernière. Or le marché des capitaux, 50 p. 100 de la population canadienne y participe directement. Il s'agit de quelque 35 à 40 millions de transactions. Cela ne justifie pas les malversations. Au contraire, nous poursuivons cela rigoureusement mais cela nous donne un ordre de grandeur. Il y a eu jusqu'à 1 800 plaignants et ce chiffre résulte directement, me semble-t-il, de la « bulle tech » et du déclin des marchés qui a occasionné les pertes qu'ont connues les particuliers.
La protection des investisseurs est un élément essentiel de notre mandat. Notre objectif est de protéger les investisseurs et d'améliorer l'efficacité, la compétitivité et l'intégrité des marchés. Nous le faisons par la voie de la réglementation et le système de recours offerts aux consommateurs.
Pour ce qui est de la réglementation, nous avons des examens de conformité très approfondis de nos 212 membres et nous avons pris des mesures très rigoureuses de mise en application. Nous avons imposé des amendes représentant au total 58 millions de dollars payables par des entreprises et des particuliers et nous avons suspendu ou expulsé de façon permanente 51 personnes au cours des trois dernières années. Notre objectif est de protéger les investisseurs et en particulier les petits investisseurs et les personnes âgées. Les résultats sont là.
Nous avons également un système d'accès à l'information très convivial. Nous exigeons que les entreprises distribuent de l'information au sujet du système d'arbitrage, de l'ombudsman ou du système de médiation au Québec chaque fois qu'elles reçoivent une plainte et chaque fois qu'elles ouvrent un nouveau compte. Au cours des quatre dernières années, plus de cinq millions de ces brochures ont été commandées. Nous communiquons également au moyen de discours et d'articles. Nous faisons aussi de la diffusion auprès de la Small Investors Protection Association et de l'Association canadienne des individus retraités, qui représente des personnes âgées.
La lourde réglementation et la vaste gamme de recours à l'intention des consommateurs permettent de résoudre ce problème. Aucun pays au monde ne possède un système de recours aussi complet et aussi solide que le Canada pour les consommateurs. Ce système est bien meilleur que la plupart des autres, si ce n'est le meilleur de tous.
Le sénateur Angus: Lorsqu'un petit investisseur un peu néophyte appelle l'un de vos membres, enregistrez-vous son appel?
M. Oliver: Nous n'enregistrons pas les appels téléphoniques; nous enregistrons l'information.
Le sénateur Angus: Les appels que reçoivent vos vendeurs ne sont donc pas enregistrés?
M. Oliver: Il n'y a pas d'enregistrement. Nous prenons note de l'information. Nous orientons les gens vers le service qui correspond à leurs besoins, et ce service prendra note des plaintes et traitera celles-ci par l'entreprise de notre service d'enquêtes et de poursuites sur les plaintes. S'il vaut mieux les orienter vers l'ombudsman, nous le faisons. Nous prenons tout le temps nécessaire pour recueillir l'information et pour orienter la personne vers le service qui correspond à ses besoins.
En fin de compte, la plupart des gens qui estiment avoir été mal traités veulent récupérer leur argent, et c'est pourquoi il existe un recours à l'intention des consommateurs, puisque à titre d'organisme d'autoréglementation, nous ne pouvons pas exiger le remboursement des plaignants. Nous pouvons imposer des amendes maximales d'un million de dollars par personne par infraction et de cinq millions de dollars par entreprise, et nous pouvons aussi imposer la restitution du triple des profits, au maximum. Ces mesures visent à rétablir la justice et à empêcher que des personnes mal intentionnées exploitent la population. Le système de recours à l'intention des consommateurs aide les gens à récupérer leur argent.
Le sénateur Angus: Le but de notre étude est de voir à ce que la protection des consommateurs soit principalement axée sur notre secteur des marchés et des services financiers; nous voulons également nous assurer que les divers mécanismes de protection mis en place après l'adoption du projet de loi, le projet de loi C-8, donnent les résultats escomptés.
Par exemple, dans le domaine des transactions de courtage au détail, les consommateurs se plaignent de l'application accrue de la règle relative à l'information sur les clients. Les consommateurs doivent remplir des formulaires que même un titulaire de doctorat en littérature n'arriverait pas à comprendre. À vrai dire, la situation semble avoir empiré.
Est-ce un cas isolé?
M. Oliver: Je n'ai pas entendu de nombreuses plaintes au sujet de la complexité des formulaires. J'ai entendu des plaintes sur le fait que les gens avaient mal lu les formulaires. J'ai entendu dire qu'on avait donné de mauvais conseils, souvent à partir de renseignements mal enregistrés. J'ai également entendu des plaintes sur le fait que les formulaires n'avaient pas été signés.
Ces motifs justifient que l'on prenne des mesures de réglementation et des mesures pour que les gens récupèrent leur argent. Nos formulaires de plainte sont très simples. Nous vous avons remis toute une gamme de documents, y compris ce formulaire.
L'an dernier, notre ligne Info-plainte a reçu 1 900 appels. Vingt-trois mille investisseurs ont eu recours aux services de sociétés membres et d'inscription, et nous avons distribué des millions de brochures. Notre site Web possède une section à l'intention des investisseurs. Nous avons également un glossaire des termes courants. Nous avons une section de questions et réponses. Notre brochure intitulée Empowering Investors est très facile à se procurer et à comprendre.
Comme je l'ai dit, nous avons reçu 1 300 plaintes, et un certain pourcentage de ces plaintes nécessite une enquête complète. Et nous faisons les enquêtes nécessaires. Nous avons des critères en matière de plaintes et d'enquêtes.
Le président: Il serait utile que vous nous donniez des exemplaires de ces formulaires.
M. Oliver: C'est déjà fait.
Le sénateur Massicotte: Certaines personnes très bien informées laissent entendre que nous ne faisons pas suffisamment de surveillance ou de gouvernance en ce qui concerne toutes les institutions qui influent sur les instruments financiers. Est-ce dû au fait qu'il n'y a pas d'infractions aux règles au Canada ou est-ce parce que les organismes de réglementation ne font pas leur travail?
Qu'en pensez-vous?
On entend de plus en plus souvent dire que nous avons adopté une mauvaise solution; l'autoréglementation, qui permet aux gens de se gouverner eux-mêmes, crée un conflit d'intérêts.
Qu'en pensez-vous, monsieur Oliver ou monsieur Waite?
M. Oliver: Pour commencer, il existe des différences structurelles et juridiques entre le Canada et les États-Unis. Aux États-Unis, la Martin Act donne au procureur général de New York, M. Spitzer, des pouvoirs qui n'existent pas au Canada. Il existe des différences claires dans ce domaine en ce qui a trait aux poursuites.
Le président: Avez-vous fait une analyse de la comparaison entre les deux régimes de réglementation relativement à la Martin Act et, dans l'affirmative, pouvons-nous en avoir un exemplaire?
M. Oliver: Je n'ai pas fait cette analyse parce qu'elle n'a pas de lien avec l'autoréglementation, mais je pourrais examiner cette question.
Le président: Tout ce que vous ferez nous sera utile. Le sénateur Massicotte a soulevé une question qui est importante pour nous et sur laquelle nous allons bien sûr nous pencher.
M. Oliver: J'essaie de répondre à la question d'une façon générale, en dépassant le cadre de notre champ de compétence. Mais en ce qui concerne nos compétences, puisque nous parlons des pouvoirs, nous avons demandé des pouvoirs accrus en matière de mise en application car nous estimons qu'ils nous sont nécessaires pour que nous puissions bien faire notre travail.
Il existe une bonne reddition de comptes en matière d'application des lois. L'application est l'élément clé. Il ne peut pas y avoir de réglementation efficace sans application rigoureuse. Une bonne application est également essentielle pour conserver la confiance des investisseurs. S'il y a des fraudes, les têtes doivent rouler. Il y a des questions d'ordre pénal et d'autres d'ordre réglementaire.
Du côté de l'autoréglementation, nous devons pouvoir assigner à comparaître des témoins qui ne sont pas des employés, exiger la production de documents, avoir la possibilité de poursuivre des employés qui ont quitté le secteur, puisque 20 p. 100 seulement de nos amendes peuvent être perçues.
Nous devons avoir le pouvoir de nommer un surveillant lorsqu'une société est au bord de la faillite, à titre de mesure de protection. Certains problèmes devraient être réglés. Personne ne s'y est opposé en principe, mais nous n'avons pas réussi à obtenir de solutions des organismes de réglementation provinciaux.
Pour ce qui est de votre question plus générale au sujet de l'autoréglementation, la justification de l'autoréglementation est qu'elle permet de bénéficier, dans l'élaboration des politiques, des compétences des intervenants du secteur qui connaissent bien les marchés et leur fonctionnement, qui peuvent proposer des solutions pratiques et atteindre l'objectif de la réglementation sans qu'on ait à imposer des coûts excessifs et sans provoquer de dégâts secondaires. L'autoréglementation permet de réglementer sans réduire l'efficacité et la compétitivité du marché.
Le secteur peut jouer un rôle très important dans l'élaboration des politiques, et les organismes d'autoréglementation en sont les intermédiaires. Nous croyons que nous avons obtenu d'excellents résultats en ce qui a trait à l'élaboration de politiques. En fait, ce travail a été essentiel. Il en existe de nombreux exemples qui ne sont jamais signalés dans les journaux, mais l'existence des organismes d'autoréglementation est justifiée par la façon dont les politiques sont modelées et par le résultat ultime de ces politiques.
À titre de législateurs, vous savez comment les comités, le vôtre et les autres, peuvent influer de façon positive sur l'élaboration des politiques; mais la population n'est pas toujours informée de ces résultats. Nous participons très activement à ce travail tout comme bien sûr à l'élaboration de nos propres règles qui régissent directement nos sociétés membres, la façon dont elles conduisent leurs affaires et leur viabilité financière. Il s'agit d'une réglementation sur la prudence et sur la bonne conduite des affaires.
Le problème, c'est que par sa nature, l'autoréglementation crée des conflits d'intérêts. C'est évident. Il faut donc se demander quels sont les freins et contrepoids qui garantissent que l'intérêt public a toujours préséance sur l'intérêt des membres.
Nous avons démontré qu'il existe toute une gamme de freins et contrepoids. Notre conseil et nos divers comités de gouvernance, y compris notre comité de surveillance de la réglementation des membres, comptent des administrateurs représentant le public. Toutes nos politiques sont examinées par la population et chacune d'elles doit être approuvée par les organismes de réglementation. Nous faisons l'objet d'un examen complet et intense par quatre des 13 commissions du pays, à tous les trois ans, et quelquefois cet examen dure trois ans. Il existe un processus permanent de surveillance et d'examen. C'est grâce à cet ensemble de freins et contrepoids que nous pouvons garantir à la population que l'intérêt public est toujours notre priorité absolue.
Le sénateur Fitzpatrick: Pouvez-vous nous donner une idée du coût de votre processus d'autoréglementation, comparativement à une réglementation imposée?
Les consommateurs ou les contribuables en paient probablement les coûts, de toute façon. Quelle est votre évaluation des coûts de l'autoréglementation comparativement à ceux de la gouvernance réglementaire?
M. Oliver: On a récemment approuvé notre budget de 45 millions, qui paie les coûts de 300 personnes, dans cinq bureaux, aux quatre coins du pays.
Le président: Ce budget est-il réservé à la réglementation?
M. Oliver: De 85 à 90 p. 100 de ce budget sert directement à la réglementation. Ce chiffre est demeuré constant depuis que je travaille à notre association, soit depuis 1995.
Le président: Pourriez-vous nous fournir une ventilation de ce budget et indiquer comment l'argent est alloué? Nous serions intéressés à examiner ces chiffres. Je suppose qu'il s'agit d'un budget public.
M. Oliver: Ce n'est pas un budget public, mais je me ferai un plaisir de vous en fournir une copie.
Le président: Le sénateur Fitzpatrick a soulevé une question importante, c'est-à-dire le coût de la réglementation.
Le sénateur Fitzpatrick: Si je comprends bien, vous n'êtes pas prêt à faire une estimation des coûts de la réglementation ou des services fournis par le gouvernement, n'est-ce pas?
M. Oliver: Je ne pourrais pas le faire, mais la question a deux aspects. Il y a d'abord les coûts financiers des commissions et les droits qu'elles perçoivent. Il y a aussi le coût immatériel mais bien plus important des effets que pourrait avoir un régime de réglementation différent, et ce coût est impossible à évaluer.
Le sénateur Massicotte: M. Hockin a fait une observation au sujet de la gestion indépendante des fonds dans des sociétés mutuelles. Monsieur Waite, j'aimerais que vous me confirmiez si c'est bien le cas.
Est-ce une pratique que vos membres accepteraient?
M. Waite: Nos membres ne travaillent que du côté de la distribution; ce sont donc des courtiers. M. Hockin parlait des sociétés de financement ainsi que des règles et directives qui sont produites. Ces sociétés sont réglementées directement par les commissions des valeurs mobilières.
M. Hockin: Ce sont les organismes de réglementation qui s'occupent de ce domaine.
Le sénateur Massicotte: Il y a un bon argument voulant que les organismes qui gèrent l'argent devraient être distincts des conseils d'administration, qui ont des intérêts dans l'entreprise.
Cette solution sera-t-elle adoptée bientôt?
M. Hockin: Oui, il semble bien. Le secteur et les organismes de réglementation en discutent depuis deux ou trois ans. Nous avons manifesté un fort appui pour cette mesure et dans quelques semaines, on publiera une règle qui exige que les conseils d'administration des fonds se dotent de comités d'examen indépendants. La plupart de nos grandes sociétés membres ont déjà des comités de ce genre, mais la règle énoncera plus de détails à ce sujet. De cette façon, des administrateurs indépendants, des gens qui ne sont pas affiliés avec la Banque de Montréal, avec les gestionnaires des fonds ou d'autres, pourront poser des questions au nom des détenteurs d'unité. Ces administrateurs indépendants ont une responsabilité fiduciaire, mais il ne faut pas oublier que les gestionnaires ont également cette responsabilité. Dans ce modèle, il existe deux fiduciaires qui doivent travailler de concert.
Le sénateur Massicotte: Je sais que vos deux sociétés ont des codes qui garantissent la protection des consommateurs. Pourrions-nous en avoir des exemplaires?
M. Waite: Notre code de déontologie est en fait notre manuel des règlements.
Le sénateur Massicotte: Nous aimerions en avoir un exemplaire car il nous permettrait de comprendre ce que vous attendez de vos membres et ce que doivent avoir les consommateurs avant d'exécuter une ordonnance ou de prendre des engagements, et cetera.
M. Waite: L'OICV, c'est-à-dire l'Organisation internationale des commissions de valeurs, vient d'ajouter à son site Web une section sur les méthodes exemplaires en ce qui a trait à la régie des fonds, au type de conseils d'administration et à la surveillance dont vous avez parlé. Le public peut les commenter. Je vais essayer de me procurer un exemplaire de ce document et je le ferai également parvenir à votre comité.
[Français]
Le sénateur Hervieux-Payette: Au Québec aussi nous sommes très intéressés. En fait, j'aimerais beaucoup que vous nous fournissiez un genre de tableau pour le consommateur. On a changé le nom de votre association au Québec. Cela s'appelait la Commission des valeurs mobilières. Le nom a été changé et le mandat a été élargi, mais on parle bien du même organisme. On a également la bourse et les corps policiers.
Où le pauvre consommateur qui pense s'être fait avoir doit-il déposer sa première plainte? Qui fera l'enquête? Où aboutira le résultat de l'enquête? Quelle est la meilleure façon de procéder pour le consommateur? On parle de coûts, on parle d'un organisme. La bourse qui se rend compte qu'un membre agit contrairement à ses pratiques devrait intervenir, de même que la commission si elle est au courant que quelqu'un ment au consommateur. C'est difficile pour le consommateur de savoir à qui il doit s'adresser.
Je prends l'exemple de ma coiffeuse qui avait investi la moitié de ses économies chez Nortel et qui aujourd'hui travaillera cinq ans de plus parce qu'on lui a fait acheter 50 p.100 de son portefeuille. Évidemment, elle a suivi le développement de Nortel, les états financiers qui ont été repris 22 fois. Puis-je lui dire, en tant que législateur, qu'elle est protégée quelque part? Ce dont elle est certaine, c'est qu'elle devra travailler cinq ans de plus dans sa vie pour ramasser la somme perdue suite à des investissements.
Si on avait ce tableau, les gens seraient au courant des étapes: qui procédera à l'enquête, où cela ira et comment récupérer quand on est mal avisé? Dans le cas présent, c'est beau de dire que vous injectez 45 millions de dollars pour faire la police, mais il semble qu'il y ait beaucoup de joueurs. Comment le consommateur obtiendra-t-il un correctif? Vous dites que vous allez charger une amende, mais la personne ne recevra pas l'argent. Cela ne lui donnera pas grand- chose. Le fautif arrêtera de faire des dommages, mais il faudrait également que l'investisseur trompé puisse obtenir correction.
Combien de maisons de courtage indépendantes des grandes banques ou des grandes institutions financières existe-il au Canada? C'est-à-dire des gens qui n'ont pas de liens avec une institution financière et qui sont complètement indépendants lors des émissions. Combien y a-t-il de membres chez vous et qu'est-ce qu'ils représentent dans le marché? Il peut y avoir 50 membres qui représentent 3 p.100 du marché. Il y a des firmes comme Canaccord par exemple. Il est important de savoir qui sont les principaux joueurs du marché qui vendent ces produits.
[Traduction]
Que peut-on faire pour que les consommateurs obtiennent un correctif?
[Français]
M. Oliver: Je vais d'abord répondre à la seconde question. Nous avons sept firmes qui représentent environ 65 p. 100 du marché. Les autres sont des firmes indépendantes. Il y a les firmes qui appartiennent aux banques, les grandes boutiques étrangères, quelques firmes qui se spécialisent dans le détail, quelques boutiques institutionnelles et les autres sont des firmes qui vendent aux individus. Cela veut dire qu'environ 30 p. 100 du marché est représenté par les boutiques plus petites ou de taille moyenne.
Votre première question est très importante. Les investisseurs doivent avoir un moyen simple et clair afin de connaître leurs recours. Évidemment, ils peuvent téléphoner à l'ACCOVAM et si nous pouvons faire quelque chose, nous allons procéder. Sinon, nous allons leur dire de téléphoner à l'ombudsman. Nous leur donnerons la brochure qui présente les options, soit les cours, l'ombudsman, l'arbitrage — une médiation au Québec —, mais toujours en commençant avec une plainte déposée auprès de la firme. Ce n'est pas aussi compliqué que cela le paraît. S'ils téléphonent à l'ombudsman, nous allons les aiguiller vers la personne qui est spécialisée.
[Traduction]
Un coup de fil à l'ombudsman ne donnera pas lieu à trois autres appels; il permettra d'acheminer l'appel vers la personne qui convient. L'essentiel est qu'un seul coup de fil permette de répondre au besoin. Il n'est pas nécessaire que les consommateurs connaissent tout le système très complexe de la réglementation et des recours en matière de valeurs mobilières au Canada, car cela peut-être très compliqué. Il suffira d'un seul appel pour que nous nous occupions de la question ou pour que nous les orientions vers le service en mesure de les aider. Il ne devrait pas falloir plus de deux appels pour cela, et il n'en faut généralement qu'un.
Cela dit, les consommateurs ont à leur disposition toute une gamme de recours, ce qui est très bien. Ils peuvent d'abord commencer par s'adresser à leur société pour essayer de régler le problème. Cela peut se faire très rapidement. S'ils ne sont pas satisfaits, je leur conseille de s'adresser à l'ombudsman, puisqu'il s'agit d'un service gratuit. Sa décision n'est pas exécutoire, mais aucune société n'a jamais refusé ses recommandations. Ce serait possible, mais cela ne s'est pas produit, puisque l'ombudsman a l'obligation de publier ses décisions. Les consommateurs peuvent s'adresser à l'ombudsman, mais s'ils ne sont toujours pas satisfaits, ils peuvent avoir recours aux tribunaux ou aller en arbitrage. Toutes ces solutions sont expliquées dans la brochure.
[Français]
Le sénateur Plamondon: Si la personne n'est pas satisfaite à la fin du processus, peut-elle se faire remettre le rapport d'enquête afin d'intenter une poursuite?
M. Oliver: Si la personne n'est pas satisfaite avec quoi précisément?
Le sénateur Plamondon: D'abord, il y a deux processus. Il y en a un pour mettre à l'amende le courtier qui aura été délinquant, mais qui ne donne rien au consommateur et qui ne fait qu'épurer le marché. Le deuxième, c'est celui où le consommateur porte plainte via l'ombudsman.
Dans les deux cas, il y a des rapports qui sont produits. Est-ce que le consommateur peut se faire remettre ces rapports afin de les utiliser pour intenter une poursuite? Ou bien il n'y a pas de transparence?
M. Oliver: Je ne crois pas qu'il y ait de transparence. S'il y a un résultat, comme une amende ou une suspension, c'est complètement transparent.
[Traduction]
Quand nous tenons des audiences, nous publions un avis d'audience qui comprend tous les détails. Lorsqu'il y a un règlement, tous les détails s'y trouvent également. Si des amendes sont imposées, c'est indiqué dans notre dossier et sur notre site Web, et tout le monde peut en prendre connaissance.
[Français]
Le sénateur Plamondon: Est-ce que le consommateur peut avoir ce rapport en détails?
M. Oliver: Le consommateur ne peut pas avoir plus que le jugement.
Le sénateur Plamondon: Pourquoi?
M. Oliver: Parce que c'est le processus ordinaire pour les causes criminelles, et c'est la même chose pour les causes administratives.
Le sénateur Plamondon: Cela n'avance en rien le consommateur. Cela avance l'industrie en général, mais pas le consommateur. S'il veut entreprendre une action en justice contre la personne fautive, pourquoi n'aurait-il pas accès à ce dossier?
M. Oliver: Le consommateur est avantagé par un jugement disciplinaire, c'est évident.
Le sénateur Plamondon: Mais à part du jugement, en ce qui concerne tout le dossier qui sous-tend le jugement?
M. Oliver: Dans les causes administratives ou criminelles, je ne crois pas qu'il y ait d'exception. Je ne crois pas que les détails soient publiés ou divulgués.
[Traduction]
Le président: Nous ne sommes manifestement pas du même avis. Vous avez de nouveau la parole, sénateur Hervieux-Payette.
[Français]
Le sénateur Hervieux-Payette: Initiez-vous des enquêtes vous-même, c'est-à-dire sur des points qui ne font pas l'objet de plaintes mais sur lesquels vos employés notent des gestes inquiétants sur le marché? Si oui, combien en initiez- vous par année?
Ma deuxième question en est une concrète que je me suis fait poser. Un ami qui est administrateur de compagnie s'aperçoit qu'on fait la promotion d'un stock d'actions avec de la fausse information. De plus, le stock d'actions se vend très bien; il est effectivement passé de 3 $ à 45 $ l'action, sauf qu'évidemment tout le monde a perdu son argent. Il y a quand même plusieurs millions de dollars qui ont été investis suite à cette fausse information.
J'avais recommandé à la personne de porter plainte à son courtier, à la Commission des valeurs mobilières et à la bourse, concernant cette fausse information. Tout le monde, ultérieurement, a perdu l'argent investi dans ce stock. Selon moi, à ce moment, c'était il y a quelques années, on pouvait conclure que la personne, en fin de compte, flouait toutes les personnes qui achetaient ce stock.
[Traduction]
M. Oliver: Avons-nous entrepris des enquêtes autrement que sur les plaintes que nous recevons? Oui. Je ne connais pas le pourcentage, mais je puis vous parler de l'exemple le plus récent, dans lequel des infractions relatives à une synchronisation du marché ont donné lieu à des amendes de 42 millions de dollars.
Nous avons fait une enquête du marché pendant deux ans et d'après les renseignements que nous avons recueillis, nous avons conclu que trois sociétés commettaient ces infractions. Nous avons ouvert une enquête et nous avons ensuite entamé des poursuites.
Nous suivons de près l'évolution des marchés. Nous suivons également ce qui est publié dans les journaux. Nous entendons ce que disent d'autres organismes de réglementation ou d'autoréglementation au Canada ou aux États-Unis. Nous effectuons des examens de conformité complets auprès des sociétés et ces examens nous permettent de découvrir toutes sortes d'infractions. Nous ouvrons constamment des enquêtes. Je ne sais pas quel en est le pourcentage, mais nous le faisons constamment. Si une société ne dispose pas de capitaux suffisants, son exploitation sera suspendue ou elle sera expulsée. Si l'examen de conformité dans le domaine des ventes révèle que des actes fautifs ont été commis, qu'il y a eu un manque de surveillance ou qu'il n'existe pas de culture de surveillance, nous prenons alors les mesures qui s'imposent, et nous l'avons fait chaque année dans des dizaines de cas.
Votre deuxième question porte sur diverses infractions possibles, dont certaines relèvent des commissions de valeurs mobilières. Si les organismes de réglementation du marché sont manipulés par ce marché, la question relève de la bourse. Nous nous occupons des questions relatives au distributeur, au courtier en investissement et à la conduite des ventes. Nous effectuons des examens pour savoir si la conduite des ventes est convenable, si elle peut causer des torts ou si elle contrevient à nos règles.
Le sénateur Hervieux-Payette: Communiquez-vous les uns avec les autres?
M. Oliver: Oh oui.
Le sénateur Hervieux-Payette: Y a-t-il également des échanges d'information entre vous, la commission des valeurs mobilières et la bourse?
M. Oliver: Excusez-moi, je n'ai pas bien compris. Oui, c'est exact. Nous faisons partie d'un comité auquel siègent également des représentants des services policiers et des organismes de réglementation, et nous tenons des réunions régulières avec les commissions des valeurs mobilières. Nous leur téléphonons tous les jours. Nous sommes tenus de leur signaler le sujet de nos enquêtes. De cette façon, ils ne sont pas étonnés lorsque nous prenons des mesures. Ils sont au courant, ils nous signalent des dossiers. Nous collaborons également avec d'autres organismes d'autoréglementation au Canada et aux États-Unis, mais surtout au Canada. Il y a un échange constant d'information dans ce domaine.
[Français]
Le sénateur Plamondon: Il me reste deux questions à poser. Quand un courtier vend des investissements, est-ce d'après sa propre expertise ou s'il fait appel à un analyste? Et est-ce que l'analyste est de la même compagnie? Si le consommateur se sent floué, contre qui a-t-il des recours? Contre l'analyste qui a renseigné le courtier? Contre la compagnie ou contre le courtier?
En second lieu, croyez-vous que ces fonds doivent être vendus à une catégorie de personnes particulièrement initiées ou si les prospectus sont assez clairs pour que le consommateur puisse suivre l'évolution de ses placements et prendre une décision éclairée?
M. Oliver: Si je comprends bien la première question, le consommateur ou l'investisseur a un recours contre la compagnie parce que la compagnie a de l'argent et elle est responsable. Dans ce cas, le courtier et l'analyste sont à l'emploi de la compagnie. Cependant, habituellement, le recours est contre la compagnie.
Le sénateur Plamondon: L'analyste fait donc partie de la même boîte que le courtier? Ce n'est pas un analyste indépendant?
[Traduction]
M. Oliver: Si la société se fonde sur les analyses d'un tiers, c'est sa responsabilité. Il lui incombe de modifier les recommandations au besoin. Si elle est mal conseillée, c'est son problème. Ce n'est pas à l'investisseur de chercher pour savoir où travaillait l'analyste.
Dans la plupart des cas, le problème ne vient pas de recherche effectuée par des tiers, mais c'est possible. Le problème se situe au niveau du courtier; si le courtier donne de mauvais conseils, l'investisseur peut poursuivre l'employeur du courtier et le courtier aussi. L'investisseur n'a pas à poursuivre un tiers qui a peut-être travaillé à son insu. Il peut poursuivre la personne qui a donné le conseil et la société pour qui cette personne travaille.
[Français]
Le sénateur Plamondon: Après le rapport MacKay, on a vu beaucoup de choses sur les contrats clairs. Croyez-vous que les prospectus sont assez clairs pour être compris par la majorité des Canadiens?
M. Oliver: Non.
Le sénateur Plamondon: Merci de votre honnêteté.
[Traduction]
M. Oliver: C'est une question importante. J'ai occupé le poste de directeur général à la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario pendant deux ans. Ce qui était frustrant, entre autres, c'est qu'en raison des règles et de la mentalité, il suffisait de coucher de l'information sur papier pour respecter ses obligations en matière de divulgation. Ce qu'on ne sait pas, cependant, c'est que la plupart des gens ne lisent pas les prospectus et que, parmi ceux qui les lisent, très peu les comprennent.
Le président: Bienvenue dans le club.
M. Oliver: Il faut examiner la question des documents et voir au-delà du mythe des communications pour voir ce qui est de la communication théorique par opposition à de la communication efficace. Je suis convaincu qu'on pourrait résumer en deux pages, un document de 150 pages et que 98 p. 100 des gens trouveraient l'information dont ils ont besoin. Peu importe qu'il s'agisse d'un prospectus pour un fonds mutuel ou même pour une transaction de M & A. Un analyste aura probablement besoin de lire le document de 150 pages, mais un particulier n'a pas besoin de la version longue, à moins qu'il en fasse la demande, et le résumé de deux pages et demie lui suffira. Un fonds mutuel peut se résumer en une page. Ce que les gens ont besoin de savoir, c'est le nom, l'objectif de l'investissement, les frais et le rendement par rapport à un indice pertinent.
M. Hockin: M. Oliver a raison, mais à cause des principes de réglementation que les avocats vous obligent à inscrire dans le document, on se retrouve avec un document de 200 pages. Nous avons tous ce problème.
Le sénateur Plamondon: Si vous deviez l'expliquer dans un article du Reader's Digest, vous trouveriez les mots nécessaires. Faites-le donc.
M. Oliver: Il est très important qu'il y ait un projet de rédaction en langage clair et simple. Ce n'est pas une priorité, mais il faudrait envisager un tel projet. Il y a eu le cas de Spruce Falls. Les employés ont renoncé à certains droits de salaire et d'emploi pour acheter des actions de l'entreprise qui n'aurait pas pu survivre sans cette mesure. C'est à mon avis un exemple parfait de vulnérabilité. Les gens devraient comprendre ce qu'ils font. Nous avons présenté un document abrégé et une version plus longue à ce sujet. La version abrégée contenait 95 p. 100 de toute l'information nécessaire. J'ai dû préparer ces deux documents au cas où quelqu'un voudrait les lire.
Le président: C'est une question d'obligations contractuelles.
Le sénateur Moore: Monsieur Oliver, à la page 3 de votre document, vous avez parlé des audiences disciplinaires et de divers autres mécanismes, entre autres la suspension et le renvoi.
Ces décisions sont-elles publiées ou circulent-elles simplement au sein de votre organisation?
La population peut-elle connaître les détails de vos décisions et les mesures qui sont prises contre ceux qui enfreignent vos règles?
M. Oliver: Tout à fait. Nous publions des communiqués de presse et des avis d'audience. Les décisions que nous prenons sont rendues publiques. Nous les affichons sur notre site Web, et nous publions des communiqués de presse. Tout cela est public. L'information est conservée au dossier de la personne et de la société.
Le sénateur Moore: Le public peut-il assister aux audiences?
M. Oliver: Oui.
Le sénateur Moore: Hier, nous avons entendu les témoignages d'Equifax Canada et de TransUnion. Nous avons appris que ces sociétés conservent de l'information sur les consommateurs et les emprunteurs et qu'elles utilisent le système de notation de Fair Isaac pour élaborer des modèles de risque relativement à ces emprunteurs. Elles ont déclaré qu'elles pouvaient communiquer électroniquement des rapports de crédit en quelques secondes.
Du point de vue des consommateurs, est-il possible de mettre en place un système comparable qui permettrait aux consommateurs et aux investisseurs de faire une recherche dans votre banque de données au sujet d'une société pour obtenir la cote d'une société d'investissement ou d'une société de courtage en fonds mutuels, connaître son historique, ses antécédents, voir si cette société a commis des infractions, et cetera?
M. Oliver: Oui, et voici ce que nous faisons. Nous n'avons pas de système de cotes, mais nous avons des dossiers. Les dossiers révèlent si la personne ou la société a fait l'objet d'audiences disciplinaires.
Le sénateur Moore: Un consommateur peut-il consulter le site de votre association et trouver la liste de tous vos membres, voir depuis combien de temps ils adhèrent à votre association, quel a été le rendement et s'ils ont fait l'objet de sanctions?
M. Oliver: Oui, dans le dernier cas. Notre site contient tous les renseignements pertinents au sujet de nos membres et sur les mesures disciplinaires qui ont été prises contre eux, mais il ne contient pas leur dossier de rendement.
Le sénateur Moore: N'importe qui peut obtenir les renseignements qu'il veut au sujet des consommateurs, mais les consommateurs qui font confiance à de grandes sociétés ne peuvent pas obtenir des renseignements semblables au sujet de ces sociétés. Je ne suis pas d'accord avec cela. Je pense que votre association devrait envisager une mesure semblable.
M. Oliver: Il est très difficile d'évaluer une société et d'examiner le rendement de ses investissements. C'est une question extraordinairement complexe qui pourrait soulever toutes sortes de questions de responsabilité juridique, et ce n'est pas une des fonctions de la réglementation. Une société commerciale indépendante pourrait s'acquitter de cette tâche, et elle serait libre de le faire.
Le président: Vous devez convenir avec le sénateur Moore que le marché n'est pas équitable lorsqu'il s'agit de la communication de renseignements selon qu'il s'agit d'une part de la sécurité du consommateur ou d'autre part de ces manquements.
M. Oliver: Il n'existe pas de cote pour la vente de vêtements au détail. Les clients examinent la marchandise et décident s'ils veulent acheter ou non. Ils veulent savoir si le marchand est honnête et s'il y a eu des poursuites pénales contre la société ou ses employés.
Le sénateur Moore: Non, ce n'est pas la même chose. Dans ce cas-ci, il s'agit d'argent. Les rapports sur les consommateurs décrivent leur capacité de gérer leur argent et indiquent s'ils paient ou non leurs factures. Je soumets respectueusement qu'il y a là un dénominateur commun. Ce n'est pas la même chose qu'un système de cote pour des magasins de vêtements.
M. Oliver: Nous disposons de certains pouvoirs et il nous en faut davantage, entre autres pour l'application des règles, mais nous devons être prudents dans ce que nous demandons.
Le sénateur Moore: Je comprends qu'il y a des choses plus délicates, mais je pense que le consommateur moyen devrait avoir davantage d'information pour pouvoir évaluer s'il devrait entreprendre des transactions avec une société ou continuer de faire affaires avec elle et pour savoir si cette société travaille dans l'intérêt de ses clients.
Le sénateur Kelleher: Combien de plaintes ont été déposées contre vos membres au cours des dernières années et quel est le pourcentage de ces plaintes qui ont permis de constater des irrégularités?
M. Oliver: L'année dernière il y en a eu 1 254, l'année précédente 1 500, l'année d'avant 1 073 et l'année qui a précédé 1 100.
Le sénateur Kelleher: Dans quel pourcentage a-t-on constaté qu'il y avait irrégularité?
M. Oliver: Si vous suivez le processus depuis le dépôt de la plainte jusqu'à l'enquête et jusqu'à la poursuite, on a constaté des irrégularités dans 6 p. 100 des cas.
Le sénateur Kelleher: Avez-vous une idée des constatations? Autrement dit, s'agissait-il d'une réprimande, d'une amende, d'une suspension ou d'un renvoi?
M. Oliver: J'ai cette information; elle fait partie du mémoire.
Le président: S'agit-il d'une information exhaustive en fonction des questions posées par le sénateur?
M. Oliver: Il renferme cette information et j'ai aussi de l'information par région. En ce qui concerne les firmes, j'ai des renseignements à propos des amendes, des coûts, de la restitution, des décisions totales, des amendes et des coûts moyens. Permettez-moi de vous donner un chiffre. Quatre-vingt-deux personnes ont été suspendues ou ont fait l'objet de suspensions permanentes au cours des quatre dernières années.
L'année dernière, des amendes d'une valeur de 5,5 millions de dollars ont été imposées, représentant 64 décisions individuelles. Nous avons envoyé 19 lettres d'avertissement et sept suspensions. Nous avons imposé 37 conditions et 17 suspensions permanentes. Cette information se trouve à la page 13 de notre brochure.
M. Waite: Cette information se trouve à la page 9 de notre mémoire. Comme nous n'avons accepté de plaintes qu'en 2004, il n'existait pas de données historiques.
Le président: Vous ne nous avez pas indiqué le montant d'argent que votre association dépense. Nous avons un montant de 45 millions en ce qui concerne l'organisation de M. Oliver, mais qu'en est-il de la vôtre, monsieur Waite?
M. Waite: L'année dernière notre budget était de 18 millions de dollars.
Le sénateur Angus: Monsieur Waite, vous avez mentionné les membres indépendants de votre conseil. Vous avez indiqué que le président est indépendant. Qui est le président?
M. Waite: Le président est Bob Wright, l'ancien président de la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario. Nous avons procédé à un examen détaillé de la régie des entreprises. Notre conseil au départ se composait de 21 membres dont un tiers représentait le public. Maintenant la moitié des membres représente le public et les comités sont présidés par des administrateurs publics.
Le sénateur Angus: Nous sommes heureux de le constater. Nous sommes tous obligés de lire les journaux de temps à autre. Pendant une période de cinq ou six mois, tout ce que nous lisions concernait le Fonds Putnam et d'autres fonds mutuels qui avaient fait l'objet de transactions à court terme et d'opérations hors délai. Les médias ont mis l'accent sur le petit investisseur, des simples citoyens qui ont perdu toutes leurs économies. Cela a terriblement terni l'image de votre industrie.
M. Waite: C'est exact.
Le sénateur Angus: J'avais constaté à l'époque que tout cela s'était passé après le projet de loi C-8 et la mise en œuvre de mesures de protection du consommateur. Nous sommes ici pour déterminer si ces mesures fonctionnent. Je suis heureux que nous fassions cette étude parce que je veux savoir comment une telle chose a pu se produire.
M. Waite: La réglementation directe des sociétés de fonds mutuels et de la détermination des transactions à court terme relève des diverses commissions de valeurs mobilières. L'ACCOVAM, l'ACCFM et la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario travaillent ensemble, mais il faut déterminer qu'il y a eu transaction à court terme à la société de fonds mutuels. En creusant, on constate que des courtiers étaient impliqués. Nous nous sommes occupés d'un cas de transaction à court terme et nous leur avons imposé une amende de 5,5 millions de dollars. Cela commence vraiment à la société de fonds mutuels. C'était notre premier cas en janvier de cette année contre Groupe Investors.
Le président: Je veux que le public sache que nous avons instauré un régime réglementaire il y a quelques années. Il a fallu la première vague de scandales américains pour que cela se fasse et il a fallu attendre jusqu'à janvier de cette année pour que ce régime protège les consommateurs canadiens.
Le sénateur Angus: Dans la période qui a suivi le scandale d'Enron, nous avons réussi à nous rendre aux États-Unis et à rencontrer Elliot Spitzer et le nouveau président de la Commission des valeurs mobilières des États-Unis et d'autres membres du système de réglementation qui tiennent tous à rétablir la confiance des investisseurs et qui sont mandatés pour le faire. C'est ce dont il s'agit. Nous avons appris à l'époque par le biais de la Martin Act dont M. Oliver a parlé qu'ils n'ont pas et qu'ils n'avaient pas les outils législatifs nécessaires et qu'il existe une grande pénurie de ressources à la Commission des valeurs mobilières des États-Unis.
Je ne suis pas en train de témoigner, mais je rapporte ce que nous avons entendu. M. Spitzer a pu intensifier sa campagne politique parce qu'avec ses collaborateurs il a trouvé cette ancienne loi de 1929 appelée la Martin Act qui lui a permis d'outrepasser la compétence de la Commission des valeurs mobilières des États-Unis et de remettre au pas Wall Street à New York où tous ces actes répréhensibles ont eu lieu.
Le Canada a observé la situation, et notre comité constate les leçons qu'il est possible de tirer de cette expérience afin de contribuer à rétablir la réputation des fonds mutuels dans le sillage de WorldCom et des scandales que M. Spitzer a rendus publics, les plus récents étant les scandales impliquant une compagnie d'assurance.
M. Hockin: Je tiens à préciser qu'en ce qui concerne les pouvoirs que le procureur général Spitzer a cherché à obtenir, au Canada, il n'existe pas d'opération hors délai ni de transaction intéressée à court terme, ce qui existait aux États-Unis. Deux de ces scandales ne se sont pas produits ici et c'est en raison de la structure de notre industrie, que je peux vous expliquer.
La synchronisation du marché et les transactions à court terme ne sont pas illégales aux États-Unis. Des instances de réglementation devaient déterminer à quel moment les transactions à court terme sont illégales, et faire de leur mieux pour s'assurer de ne pas nuire aux investisseurs à long terme, et c'est ce qui a donné lieu aux règlements qui ont été conclus. Seulement une des trois plaintes importantes déposées par M. Spitzer concernait un cas qui s'est produit ici.
Le sénateur Angus: Il est très encourageant de vous entendre faire cette simple exposition de faits. Ne serait-il pas plus juste de dire qu'il n'y avait eu aucune accusation et aucune poursuite pour une activité illégale de cette nature au Canada?
Les transactions à court terme sont légales aux États-Unis. Le fait de ne pas communiquer ces renseignements aux détenteurs d'unités de fonds est une pratique odieuse.
Je suis heureux d'entendre ce que vous êtes en train de dire et j'espère que c'est vrai. Je considère également, et jusqu'à preuve du contraire, que nous n'en sommes pas certains.
M. Hockin: Je cite les instances de réglementations qui ont indiqué qu'au Canada les opérations hors délai et les transactions intéressées à court terme n'existent pas.
En ce qui concerne les transactions à court terme, les sociétés de fonds mutuels qui ont réglé à l'amiable ont admis avec le recul qu'elles avaient pris des mesures pour assurer la protection des détenteurs d'unités à long terme, mais que ces mesures n'étaient pas suffisantes. C'est la façon dont ces règlements fonctionnent.
Le président: Je crois que le sénateur Angus a soulevé la question des compétences partagées et la façon dont nous pouvons être convaincus au niveau fédéral de l'efficacité d'un mécanisme professionnel de réglementation qui est fragmenté, comme vous en avez convenu.
N'y a-t-il pas loin de la coupe aux lèvres?
[Français]
Le sénateur Massicotte: La Commission des valeurs mobilières est une commission nationale. Est-ce que c'est dans l'intérêt du consommateur? Est-ce que cela va augmenter la supervision et les besoins des consommateurs? Est-ce favorable et si oui, pourquoi?
M. Oliver: La position de l'ACCOVAM sur une commission nationale est que, pour nous, il y a deux moyens d'améliorer la réglementation au Canada, soit le système actuel — mais beaucoup plus harmonisé — ou un systeme national avec la reconnaissance des marchés régionaux. Il faut que chaque marché soit représenté dans une commission nationale. Ainsi, on encourage les deux côtés à faire quelque chose pour améliorer la réglementation au Canada.
[Traduction]
Nous avons parlé à plusieurs reprises de la nécessité d'améliorer l'efficacité de la réglementation au Canada et d'accroître l'harmonisation d'un bout à l'autre du pays parce que nous faisons l'objet d'un désavantage concurrentiel. Nous sommes dans une situation unique en ce sens que nous sommes le seul marché financier développé au monde sans instance nationale de réglementation. Il est possible d'y remédier en faisant en sorte que le système actuel soit solidement harmonisé. On a fait beaucoup de progrès, mais il y a encore beaucoup à faire et il faut agir rapidement, sinon il faut avoir recours à une commission nationale qui est sensible aux questions régionales.
Notre position traduit ces deux points de vue parce que nous sommes une organisation nationale. Ce qui est inacceptable, c'est de s'opposer à une commission nationale et de ne pas être disposé à améliorer la situation actuelle.
[Français]
Le sénateur Massicotte: Si je comprends bien les rapports et les efforts à ce jour, on parle d'efficacité et de la nécessité d'avoir une convergence entre les différentes commissions provinciales. C'est l'efficacité des membres et de ceux qui font une émission de capitaux. Au point de vue des consommateurs, de la supervision et de la gouvernance, est-ce mieux d'avoir une commission nationale ou non?
M. Oliver: Le système actuel peut être adéquat pour les consommateurs s'il y a plus de coopération et plus d'harmonisation des règles.
Le sénateur Massicotte: J'ai une dernière question. Dans votre association, vous êtes aussi le porte-parole de vos membres dans plusieurs instances. On le voit dans les journaux ou autres, et c'est un de vos rôles officiels d'être porte- parole. En même temps, vous êtes responsable de protéger tous les intérêts, tous les « stakeholders » qui transigent dans l'industrie. Est-ce qu'il n'y a pas un conflit de rôles? D'un côté, on voit que vous épaulez les opinions de vos membres et d'un autre, vous êtes là aussi pour protéger ceux qui font confiance à vos membres.
[Traduction]
M. Oliver: Tout d'abord, nous devons être jugés en fonction de nos actions passées. Avons-nous toujours accordé la priorité à l'intérêt du client, à l'intérêt public? Tout le reste est secondaire.
À notre avis, le fait de jouer ces deux rôles comporte un avantage parce qu'il incite l'industrie à participer de plus près à la politique publique et à l'élaboration de la politique de réglementation.
Cependant, nous ne croyons pas que le rôle supplémentaire exacerbe de façon réelle le conflit qui existe déjà et dont j'ai parlé plus tôt, c'est-à-dire le conflit inhérent à l'autoréglementation. Quatre-vingt-cinq pour cent de nos activités se rapportent uniquement à la réglementation.
Par conséquent, la majeure partie de nos activités de lobbying n'a rien à voir avec la réglementation. Nous parlerons à la Banque du Canada de la politique monétaire. Nous commenterons le budget fédéral et la politique financière. Nous parlerons aux gouvernements de leur rendement économique dans l'ensemble du pays. Il n'existe pas de conflit parce qu'il ne s'agit pas de réglementation.
Dans la mesure où nos membres participent à la politique de réglementation, ils le feraient de toute façon strictement à titre d'organisme d'autoréglementation parce que c'est ce que vous voulez. Un organisme de réglementation doit avoir son mot à dire. Il doit obtenir les conseils de ses membres. Nous ne considérons pas que cela exacerbe le conflit. C'est une question de perception plutôt qu'une question de fond.
Le président: J'ai laissé cette discussion durer plus longtemps qu'elle ne l'aurait dû. J'ai un certain nombre de questions et elles seront brèves.
Tout d'abord, est-ce que tous les sites Web de vos membres sont rattachés à votre site Web central lorsqu'il s'agit de la question de la protection du consommateur?
Autrement dit, le courtier de ma localité est-il rattaché à votre site Web afin de faciliter les choses pour le consommateur?
M. Oliver: Je ne suis pas certain de ne pas avoir répondu à cette question. Notre site Web est raccordé aux leurs et à l'ensemble des consommateurs. Je sais ce que vous êtes en train de me demander.
Le président: C'est l'inverse. Si vous voulez bien nous fournir cette information par écrit.
Deuxièmement, en ce qui concerne l'absence de transparence des audiences, y a-t-il une raison pour laquelle vos audiences ne peuvent pas être diffusées sur le Web? Aujourd'hui, c'est une procédure très simple et très peu coûteuse. Pour reprendre le point soulevé par le sénateur Plamondon, il est important, si le public peut assister à une audience, que rien n'empêche cette audience d'être diffusée sur le Web afin que la population dans l'ensemble du pays sache ce qui se passe.
M. Oliver: J'examinerai la question.
Le président: Vous avez présenté des recommandations concernant l'accroissement des pouvoirs et nous aimerions connaître le coût et l'efficacité de ces recommandations. Cette question s'adresse à M. Oliver et à M. Waite et si M. Hockin veut donner son opinion, je n'y vois pas d'inconvénient.
En ce qui concerne un point fondamental, on nous présente un système de réglementation asymétrique et fragmentée lorsqu'il s'agit de protéger les fonds publics, et les fonds privés qui sont essentiels pour le consommateur. Nous sommes tous en train d'esquiver ce problème. C'est un débat qui se poursuit à Ottawa depuis mon arrivée ici en 1965. J'ai pris l'initiative de l'une des premières études sur un mécanisme de réglementation unique et depuis nous n'avons fait aucun progrès, même si nous avons harmonisé nos systèmes.
Existe-t-il une façon de surmonter ce problème, parce que je ne crois pas que cela se produira de mon vivant?
Existe-t-il un moyen de s'inspirer du modèle américain et d'adopter une loi fédérale comparable à la Martin Act qui conférerait à une instance fédérale de réglementation un pouvoir central?
A-t-on des objections à l'existence d'une solide instance fédérale de réglementation qui disposerait de pouvoirs en matière criminelle semblables à ceux prévus par la Martin Act?
Le sénateur Angus: Il s'agit d'une déclaration.
Le président: Je comprends. Notre comité est le Comité des banques et du commerce. Je suis en train de parler du fondement constitutionnel du commerce interprovincial.
Si vous ne pouvez pas répondre à cette question brièvement, pourriez-vous y réfléchir et nous fournir une réponse par la suite, parce que ce pourrait être un moyen d'imposer l'harmonisation, par un questionnement plus poussé tout en protégeant le consommateur.
M. Hockin: Mme Glorianne Stromberg et M. Robert Leckey, un ancien greffier de renom de la Cour suprême, ont écrit des articles distincts dans lesquels ils soutiennent qu'il pourrait exister une loi fédérale en vertu des dispositions sur le commerce permettant de légiférer en matière de fonds mutuels. Je ne suis pas en train de parler des autres aspects du secteur des valeurs mobilières.
Le président: J'ai lu l'article en question et d'autres articles qui disent la même chose. Il serait peut-être bon que chacun d'entre vous y jette un coup d'œil. Cela pourrait être un pas en avant et obligerait par la suite les provinces à unir leurs efforts et si cela ne se fait pas par voie réglementaire, cela se ferait au moins par voie de sanctions et en vertu des pouvoirs fédéraux en matière criminelle. Même si aux État-Unis il s'agit d'une loi d'État, les pouvoirs en matière criminelle s'exercent au niveau de l'État et, au gouvernement fédéral, il n'a jamais fait aucun doute où que ce soit au pays qu'il s'agirait de l'utilisation d'un pouvoir en matière criminelle.
Nous sommes préoccupés par l'existence de graves problèmes au sein de l'industrie. Nous vous félicitons de vos efforts et nous vous remercions de vos représentations. Nous savons qu'il s'agit d'un travail en cours et que nous visons le même objectif, à savoir veiller au bien-être des consommateurs de ce pays, ce qui, à notre avis, n'est pas le cas pour l'instant.
Je vous remercie.
Nos prochains témoins cet après-midi sont M. Claude Gingras, M. Stan Buell et M. Bill Gleberzon. J'espère que vos présentations seront brèves.
Comme vous l'avez constaté plus tôt, les sénateurs s'intéressent aux questions de protection du consommateur, donc nous aimerions passer autant de temps que possible à vous poser des questions plutôt qu'à écouter vos mémoires que nous avons devant nous.
M. Claude Gingras, avocat à la retraite, à titre personnel:
Je tiens à vous remercier, monsieur le président, de m'avoir offert l'occasion de prendre la parole devant votre comité. En fait, je répondais à une requête que vous avez faite lorsque le représentant des finances a comparu devant vous le 28 novembre. À la fin de son témoignage, vous avez demandé s'il existait des dispositions qui pourraient être améliorées dans le régime de réglementation afin de protéger les consommateurs financiers. Vous avez indiqué que cela était au cœur du mandat de votre comité.
Je n'ai pas pu résister à cette requête et je vous ai écrit pour vous faire part d'un sujet qui me tient à cœur, à titre de retraité et de membre de longue date de l'industrie de l'assurance. Il s'agit de la protection des droits et des intérêts de détenteurs de police d'assurance-vie.
Le président: C'est un sujet qui nous intéresse énormément parce qu'il fait partie du cadre de notre étude.
M. Gingras: J'aimerais d'abord traiter de la question de la compétence. Je suis sûr que vous savez que la protection des détenteurs de police est en majeure partie une question qui concerne les pratiques de l'industrie et qui, par conséquent, relève de la compétence provinciale.
Cela ne représente qu'une toute petite partie de la vérité. Si vous examinez les polices d'assurance-vie, il faut environ deux semaines pour vendre la police, pour recueillir les renseignements médicaux et émettre la police. À l'autre extrémité du processus, pour payer une réclamation en raison d'un décès, disons qu'il faut compter trois mois.
Dans l'intervalle, il peut y avoir 20 ans, 40 ans ou toute une vie durant lesquels la police est administrée par la compagnie et les détenteurs de police ont besoin de protection. Cela relève strictement de la compétence fédérale lorsque la société est constituée en société au niveau fédéral, ce qui correspond à la situation dans la plupart des cas.
Malheureusement, il n'existe pas d'organisme à Ottawa qui protège les intérêts des détenteurs de police d'assurance- vie qui sont en fait de petits investisseurs. Ils n'ont pas l'argent en cas de décès prématuré pour subvenir aux besoins de leur famille et c'est la raison pour laquelle ils investissent dans une police d'assurance.
L'Agence de la consommation en matière financière du Canada n'est responsable que d'un aspect concernant l'assurance-vie. Il s'agit de la divulgation de l'intérêt de l'avance sur police. Au cours des 40 années que j'ai passées dans ce secteur, je n'ai jamais entendu parler d'un problème concernant l'intérêt de l'avance sur police, parce que techniquement il ne s'agit pas d'avances, puisqu'on n'a pas à les rembourser. Cela n'a jamais représenté un réel problème.
Pendant plus de 100 ans, le BSIF a défendu les droits et les intérêts des détenteurs de police. Au cours des dernières dizaines d'années, il semble avoir complètement abandonné ce rôle. En fait, lorsque le surintendant des institutions financières a comparu devant vous le 8 février, il n'a pas parlé des droits des détenteurs de police. Il a parlé de solvabilité, mais il n'a pas parlé de la protection des droits et des intérêts des détenteurs de police.
La Loi sur le BSIF énonce clairement que:
Le Bureau s'efforce, dans la poursuite de ses objectifs, de protéger les droits des souscripteurs.
Ce n'est pas ce qu'il fait. Il met l'accent sur la solvabilité, tout comme le font la SADC et même la Banque du Canada.
Si vous présentez au BSIF une proposition pour protéger les détenteurs de police, le Bureau vous répondra que cela ne l'intéresse pas. Par ailleurs, je ne suis pas sûr que le BSIF insiste beaucoup sur le respect de la loi lorsqu'il s'agit des droits et des intérêts des détenteurs de police.
J'aimerais vous donner à titre d'exemple le gâchis des primes prélevées sur la valeur de rachat. Vous vous rappellerez tous que lorsque ces polices ont été vendues au début des années 80 elles prévoyaient très généreusement que dans 10 ans la police serait remboursée automatiquement. Il s'agissait en fait d'une question de fausse représentation qui relève de la compétence provinciale.
Cependant, pendant 10 années au cours desquelles ces politiques ont été administrées, on ne les a jamais examinées et les détenteurs de police n'ont jamais été informés. Soudainement, un beau matin, ils se réveillent et constatent qu'ils devront verser des primes le reste de leur vie. Que pouvaient-ils faire? Ils ont dû les payer. De toute évidence, si la divulgation avait été meilleure, il n'y aurait pas eu de problèmes. Les détenteurs de police ont donc dû faire appel aux tribunaux et payer d'énormes honoraires à des avocats pour intenter des poursuites en recours collectif dont la plupart ont été réglées à l'amiable. Comble de l'ironie, je crois comprendre que les détenteurs de police ont dû payer les frais juridiques.
Voici un autre exemple d'un cas qui est toujours devant les tribunaux. Dans l'achat de cette compagnie, une bonne partie du financement du prix d'achat provenait du compte de participation grâce à un moyen très ingénieux de vendre la valeur actuelle des épargnes de dépenses futures au compte de participation. Cela de toute évidence va à l'encontre de l'article 462 de la loi qui limite le montant qui peut être remis aux actionnaires à même le compte de participation.
L'absence de surveillance est une chose, mais il existe d'autres raisons pour lesquelles vous devez améliorer la protection des droits et des intérêts des détenteurs de police. Il y a cinq ans, on a procédé à une importante démutualisation au Canada. Auparavant, quatre compagnies d'assurance mutuelle contrôlaient 55 p. 100 du marché au détail de l'assurance-vie. Maintenant cette concurrence a disparu. Ces compagnies d'assurance mutuelle n'avaient pas d'actionnaires dont elles devaient se soucier. Elles ne se souciaient que des détenteurs de police. C'est pourquoi elles ont obligé les sociétés par actions à responsabilité limitée à traiter leurs détenteurs de police d'une façon concurrentielle. Maintenant cette concurrence a disparu. Les sociétés par actions à responsabilité limitée vendent plus de 85 p. 100 du marché au détail de l'assurance-vie.
La troisième raison, c'est que les compagnies fonctionnent de façon secrète. Les détenteurs de police ne savent même pas comment est gérée leur police au cours des 20 années, 40 années ou pendant toute la période pendant laquelle ils détiennent cette police. En 1992 on avait exigé des compagnies qu'elles publient une politique sur les dividendes à l'intention des détenteurs de police. Si vous examinez ces politiques de dividendes, elles sont dénuées de sens. Elles étaient censées fournir des renseignements sur la façon dont la compagnie avait administré le compte de participation et la proportion du profit qu'elle distribue aux détenteurs de police. À l'heure actuelle, ces politiques de dividendes n'indiquent rien et le BSIF ne fait rien pour remédier à la situation.
D'énormes excédents sont accumulés dans les comptes de participation. L'État de New York limite l'excédent à 10 p. 100 du passif. Bien sûr, les politiques ajustables donnent un grand pouvoir discrétionnaire aux compagnies. Elles peuvent modifier les primes, elles peuvent en modifier la valeur nominale. Elles peuvent modifier la valeur de la police. Il s'agit plus ou moins de contrats de « confiance ». Il est avantageux pour les compagnies de vendre des polices ajustables parce qu'elles ne sont pas obligées de tenir un compte de participation. Elles n'ont pas à garder l'argent dans un compte séparé. Tous les profits sont distribués aux actionnaires et elles ont l'entière discrétion de faire ce qu'elles veulent, y compris modifier les primes.
Il existe des administrateurs des porteurs de police dans les compagnies qui vendent des polices de participation. Ces administrateurs, selon la loi, ne peuvent détenir des actions dans la compagnie parce que leurs intérêts doivent correspondre à ceux des détenteurs de police et non à ceux des actionnaires. Cette loi existe depuis l'époque où les compagnies ont été constituées en société il y a environ 130 ans. Ils se trouvent ainsi à contourner la loi; les administrateurs de porteurs de police détiennent des actions dans la société de portefeuille. Autrement dit, ils font indirectement ce qu'ils ne peuvent faire directement, et le BSIF ne fait rien pour remédier à la situation.
Enfin, il existe une quatrième raison pour laquelle vous devriez intervenir. La loi ne renferme aucune disposition qui oblige les administrateurs et les agents à traiter les détenteurs de police de façon juste et équitable. D'autres pays n'ont pas tardé à prendre des mesures à cet égard et ont imposé des normes aux administrateurs et aux agents pour qu'ils traitent les détenteurs de police de façon équitable. Notre loi est à la traîne comparativement aux lois qui existent dans d'autres pays à l'heure actuelle. L'Angleterre, par exemple, a tenu une longue enquête sur les produits avec participation aux bénéfices, l'équivalent des produits de participation. Elle a préparé sept documents de consultation qui renferment des principes énonçant qu'il faut traiter les détenteurs de police de façon juste et équitable. On a également ajouté des exigences en matière de divulgation.
Les réformes Tiner sous l'égide de la SFA se poursuivent. Chaque compagnie doit publier un énoncé de ses pratiques et de ses politiques concernant sa gestion financière du fonds d'assurance. Il s'agit d'un document très détaillé qui est mis à la disposition des détenteurs de police. Il n'existe rien de semblable ici.
L'Australie a procédé à une démutualisation massive avant 1995. Trois grandes compagnies d'assurance mutuelle dominaient le marché. En 1995, l'Australie a modifié la Life Insurance Act pour exiger que la direction et les administrateurs accordent la priorité aux intérêts des détenteurs de police lorsqu'il existe un conflit entre les intérêts des détenteurs de police et ceux des actionnaires. C'est une mesure qui va beaucoup plus loin que tout ce qui a été proposé ici au Canada.
Il y a 15 ans dans l'état de New York, en prévision de l'adoption de ces polices ajustables, on a exigé qu'il y ait divulgation. Les administrateurs doivent approuver les critères selon lesquels ces modifications seront apportées. Il faut qu'il y ait divulgation et on exige que ces modifications soient justes, équitables et raisonnables.
Le fait est que dans les pays auxquels nous nous comparons, lorsqu'un changement important est intervenu sur leur marché de l'assurance-vie, ces pays ont agi. Ici au Canada, nous sommes encore en train d'attendre une loi. Pour être convaincu que nous avons l'un des meilleurs régimes financiers au monde, je crois qu'il faudrait prendre au moins trois mesures.
La première consisterait à imposer une norme d'équité aux agents et aux administrateurs lorsqu'ils s'occupent des questions intéressant les détenteurs de politique à l'intérieur de la compagnie, c'est-à-dire la gestion des comptes de participation, la déclaration des dividendes, les dividendes des détenteurs des politiques et les modifications apportées aux polices. Ils doivent être tenus d'agir de façon juste et équitable.
La deuxième mesure consisterait à prévoir des mécanismes de divulgation afin que les détenteurs de police sachent comment leur argent est administré. À l'heure actuelle, il n'existe rien de la sorte. Comme je l'ai dit, la politique sur les dividendes ne fournit aucun renseignement en ce sens.
Enfin, les conseils d'administration devraient être tenus de constituer un comité chargé des affaires des détenteurs de police. Nos administrateurs des porteurs de police pourraient constituer la majorité au sein de ce comité. Nous avons besoin d'un comité qui aide le conseil d'administration à s'acquitter de ses obligations à l'égard des détenteurs de police. Il faudrait avoir recours aux administrateurs des détenteurs de police. Il existe des questions complexes comme l'équité entre les générations, par exemple. Si nous voulons protéger les détenteurs de police d'assurance-vie, il est important que le conseil d'administration de ces compagnies acquière certaines connaissances.
La dernière mesure consiste à préciser que ces compagnies ont l'obligation de protéger les droits et les intérêts des détenteurs de police. Cela me semble clair et c'est une obligation qui est prévue dans la Loi sur le BSIF, mais cela ne semble pas être clair pour tout le monde.
M. Stan I. Buell, fondateur et président, Small Investor Protection Association: J'ai fourni mes déclarations liminaires à la sténographe, pour que vous puissiez les lire à tête reposée.
Il y a un certain nombre d'années, j'ai appris la situation vécue par la veuve Shirley. Au cours d'une période de trois ans, on a diagnostiqué que son mari avait le cancer, ils ont vendu l'entreprise familiale qu'ils exploitaient depuis 25 ans et ils ont vendu la maison familiale. Au moment du décès de son mari, elle a confié les économies qui lui restait, soit 160 000 $, à son courtier. Ils avaient investi près d'un million de dollars en actifs auprès de ce courtier. Trois ans plus tard à son retour de vacances elle était invitée dans le bureau du courtier et les avocats lui disent qu'elle a perdu toutes ses économies. Ce montant de un million de dollars lui aurait permis de prendre une retraite confortable. Au lieu de cela, elle a dû livrer une longue bataille juridique pour obtenir restitution.
Les problèmes que j'entends aujourd'hui ne sont pas différents. Comme vous l'avez dit plus tôt, vous vous battez pour cela depuis très longtemps et rien n'a changé.
Nous suggérons de créer un organisme fédéral responsable de la protection des consommateurs, un organisme qui mènerait à un système de réglementation amélioré. Ce pourrait être un organisme national ou harmonisé. D'après nous, il existe un besoin urgent qu'une autorité fédérale protège l'investisseur particulier.
M. Bill Gleberzon, directeur associé, Relations gouvernementales et les médias, Association canadienne des individus retraités: Merci de me donner l'occasion de parler au nom de l'Association canadienne des individus retraités (CARP). Notre association comprend plus de 400 000 membres au Canada et nous nous considérons comme une association canadienne axée sur les personnes de 50 ans et plus. Nous sommes une organisation nationale, à but non lucratif, non partisane, dont le mandat est de promouvoir et de protéger les droits et la qualité de vie des Canadiens plus âgés. Notre mission est d'élaborer des recommandations pratiques pour les questions que nous soulevons.
Le président: Donc, vous nous représentez également?
M. Gleberzon: Il semblerait.
Nous sommes d'accord avec M. Buell et avec le SIPA, il devrait y avoir un changement structurel fondamental et exhaustif et l'on devrait créer un seul organisme national pancanadien de réglementation des valeurs mobilières, tout particulièrement pour les fonds communs de placement, parce que la majorité des REER et des RER des Canadiens de 50 ans et plus sont de ce type.
Selon leur âge et leur situation professionnelle, les investisseurs de 50 ans et plus contribuent dans leurs dernières années professionnelles à leur revenu de retraite ou ils sont déjà retraités, auquel cas leur niveau de vie et leur qualité de vie peuvent dépendre des revenus qu'ils tirent de leurs investissements. Dans un cas comme dans l'autre, si les décisions d'investissement se sont fondées sur des informations erronées ou trompeuses, ces investisseurs auront un recours limité, s'ils ont un recours, pour récupérer leurs pertes. En vérité, les fraudes touchant les fonds communs de placement doivent être reconnues comme une forme d'abus des personnes âgées, à cause des répercussions financières, psychologiques et émotionnelles qui touchent leurs victimes.
C'est une situation qui touche l'ensemble du pays, peu importe la province ou le territoire, et qui nécessite donc une solution nationale dans un cadre national.
L'Institut des fonds d'investissement du Canada estime que les investisseurs ont placé 451,6 milliards de dollars dans le secteur des fonds communs de placement. Ces chiffres valent pour l'année 2004.
Je voudrais attirer votre attention sur l'étude menée au début de l'année par le CARP et le SIPA qui s'intitule en anglais Giving Small Investors a Fair Chance: Reforming the Mutual Fund Industry, ce qui se rend par « Donner une chance équitable aux petits investisseurs: La réforme du secteur du fonds commun de placement ». Vous avez tous un exemplaire de cette étude. Nous en avons également envoyé à tous les ministres provinciaux et territoriaux responsables de la réglementation des valeurs mobilières, ainsi qu'à plusieurs ministres fédéraux. En fait, nous allons soumettre ce rapport officiellement au ministre responsable de la réglementation des valeurs mobilières. Nous sommes en pourparlers avec de nombreux ministres de cette proposition d'un organisme national de réglementation unique.
Nous soutenons que les Canadiens effectuent des investissements dans les marchés financiers dans l'ensemble du Canada, peu importe la province dans laquelle ils vivent et la province dans laquelle ce marché est situé. Il devrait y avoir une même réglementation sur les investissements à l'échelle du pays et un seul organisme national de réglementation des valeurs mobilières qui fournirait une protection dans l'ensemble du pays. Nous avons fait la liste des avantages importants d'un tel organisme national, mais je voudrais ajouter que le Canada est le seul pays du G7 qui ne possède pas un tel organisme.
Nous croyons que le conseil des ministres provinciaux et territoriaux responsables de la réglementation des valeurs mobilières, des représentants politiques provinciaux désignés, des ministres de l'Industrie ou de la Justice, et cetera, pourraient se former le conseil d'administration de cet organisme de réglementation unique national. Nous ne parlons pas d'un organisme de réglementation fédéral situé à Ottawa. Nous parlons d'un organisme de réglementation national, par rapport à la façon dont le système fragmenté et diffus existe aujourd'hui.
Les individus travaillant actuellement dans les divers organismes de réglementation provinciaux pourraient travailler à l'organisme fédéral. Le CARP reconnaît que la réglementation des valeurs mobilières est de compétence provinciale et territoriale. Cependant, nous exhortons votre comité à endosser la création d'un organisme de réglementation unique et national des fonds communs de placement. L'étape suivante du processus serait d'organiser une conférence du conseil provincial-territorial des ministres responsables de la réglementation des valeurs mobilières avec un ou plusieurs ministres fédéraux désignés de façon pertinente afin d'amorcer les discussions concernant la création d'un tel organisme.
L'idée du sénateur Grafstein, qui a proposé de réfléchir à une autorité du gouvernement fédéral autour du commerce interprovincial, est une autre idée qui vaut le coup d'être explorée. L'idée de base qui sous-tend tout cela est que la protection des investisseurs doit constituer la base de l'industrie des fonds communs de placement.
En réalité, cela fait partie d'une question beaucoup plus large qui, comme nous le constatons, n'est pas couverte par les travaux du comité, mais je vais tout de même en parler. Nous devons trouver un moyen d'offrir une protection et de réformer les revenus de retraite en général parce que cela constitue une pièce du puzzle. Deuxièmement, il faudrait que le Sénat forme un comité qui s'intéresserait au vieillissement, comme il en existe un aux États-Unis.
[Français]
Le sénateur Angus: Monsieur, vous plaidez ou êtes déjà convaincu, je pense.
[Traduction]
Pour une bonne part, vous prêchez devant des convertis, mais je vous félicite de la façon dont vous l'avez exprimé.
J'ai été un peu surpris, monsieur Gingras, de vous entendre dire que les titulaires de police n'avaient pas de protection. Ma première expérience à ce comité a eu lieu à l'époque de l'échec de la Confédération, Compagnie d'Assurance-Vie. Nous avions fait une enquête sur cet échec et avons entendu les gens du Bureau du surintendant des institutions financières.
Vous dites qu'ils se préoccupent surtout de la solvabilité. Selon moi, c'est la protection suprême des titulaires de police. Commençons avec cela et explorons le sujet.
M. Gingras: Vous avez raison, sénateur Angus, le BSIF se concentre sur la solvabilité. L'échec de Confédération, Compagnie d'Assurance-Vie a été un événement traumatisant pour le BSIF. J'ai aussi participé à la tentative de sauvetage de cette société, lorsque j'étais chef du contentieux d'une autre société.
L'article 4 de la Loi sur le BSIF stipule qu'il doit surveiller la solvabilité des régimes de pension et des institutions financières afin de s'assurer qu'ils sont conformes à la loi. Le paragraphe 4(3) précise que, outre la solvabilité elle- même, il doit s'efforcer de protéger les intérêts et les droits des titulaires de police. C'est la partie qu'il a abandonnée.
Le sénateur Angus: Si je comprends bien, non seulement vous êtes un avocat spécialisé à la fois en droit civil et en common law, mais en plus vous avez travaillé pendant 30 ans à la Mutuelle du Canada, vous avez travaillé assez étroitement avec Revenu Canada et le ministère des Finances et vous avez été consultant pour le projet de loi C-8.
Je serais curieux de savoir le genre de dialogue que vous avez eu avec des gens comme M. Nicholas LePan et, avant lui, M. Palmer, et avec la personne qui le précédait. N'avez-vous pas soulevé ces problèmes? Aviez-vous l'impression de parler à un mur?
M. Gingras: Certainement, j'ai soulevé ces problèmes. Vous vous rappellerez qu'en janvier 2003, le ministère des Finances a publié un article contenant des dispositions afin de protéger les droits des détenteurs de police d'assurance- vie, ce qui comprenait la divulgation des informations, un comité du conseil d'administration formé de détenteurs de police, et cetera.
Le BSIF ne s'intéressait pas aux droits et aux intérêts des détenteurs de police, parce que cela ne faisait pas intervenir la solvabilité. Le BSIF a changé. M. K.R. MacGregor était un bon ami à moi. À une époque, le surintendant des assurances se portait à la défense des détenteurs de police.
Le BSIF a complètement changé depuis sa fusion avec le Bureau de l'inspecteur général des banques en 1987. L'attention du BSIF s'est portée sur la solvabilité. La solvabilité est une chose, mais si vous ne vous préoccupez pas des droits des titulaires de police mais que vous insistez sur la solvabilité, ces titulaires ne recevront pas les dividendes qu'ils devraient recevoir, car plus la compagnie fait des excédents plus elle est solvable. Je crois que le BSIF travaille pour les actionnaires, pour s'assurer que ce sont des institutions solvables, et les seuls à y perdre en insolvabilité sont les actionnaires. Il devrait y avoir un équilibre entre les deux.
Le sénateur Angus: J'ai lu votre lettre adressée à M. LePan ainsi que celle adressée au sénateur Grafstein. Je ne sais pas si M. LePan a répondu à votre lettre du 18 mai 2003. S'il l'a fait, j'aimerais savoir ce qu'il avait à dire.
M. Gingras: Cette réponse était annexée à ma lettre, mais je peux vous en envoyer un autre exemplaire. En fait, elle m'a été livrée chez moi à Orléans, le matin même de la réunion annuelle. Je n'avais pas le temps d'aller à Toronto et la lettre disait: « Nous avons consulté la société et ils n'ont rien fait de mal ».
Le président: Je suis désolé, monsieur Gingras, nous l'avons. Elle nous a été envoyée par courrier électronique. Nous allons nous assurer de la distribuer à tous les membres du comité.
Le sénateur Angus: Selon moi, une police d'assurances est un contrat contenant des conditions. Qu'il s'agisse d'une société mutuelle d'assurances ou d'une société à capital-actions démutualisée, la société d'assurances vend des contrats et doit s'assurer que ces contrats sont honorés selon la lettre. Elle doit respecter les conditions, qu'il s'agisse de liquidation, de rente viagère jusqu'à 65 ans ou de l'une ou l'autre des milliers de façons d'utiliser des polices d'assurance-vie.
Par quels autres droits des détenteurs de police êtes-vous préoccupés, outre le respect des conditions du contrat? Il y a quelque chose de très important que je ne comprends pas, et cela est important pour nous tous.
M. Gingras: C'est une bonne question. Il existe deux types de détenteurs de police. Les souscripteurs avec participation, qui sont très importants. En 2003, une somme de 12,5 milliards de dollars a été payée aux souscripteurs avec participation au Canada. Ils disposent d'un contrat comme tout actionnaire. Ils ont signé un contrat avec la compagnie d'assurances et ont un certificat d'actions. C'est pourquoi ce sont des souscripteurs avec participation. Ils élisent des administrateurs. Ils ont le droit de partager les profits de la compagnie d'assurances, à la discrétion du conseil d'administration. Il n'existe aucune garantie, mais les souscripteurs avec participation ont ce droit. C'est cela que je voulais dire par « droits ». Ils doivent avoir également le droit de recevoir des informations sur la façon dont leur police se comporte parce que la compagnie dispose d'une discrétion importante pour modifier les investissements du fonds de participation, pour répartir les actifs comme ils le désirent, dans certains cas, afin de ne pas produire de revenus. Ces souscripteurs doivent avoir des informations à ce sujet.
L'Angleterre, l'Australie ainsi que tous les pays auxquels nous nous comparons ont reconnu ce fait, et nous avons des systèmes semblables. L'information envoyée aux souscripteurs est très importante. Si vous avez une police avec participation, regardez les dividendes qu'ils vous envoient. C'est sans intérêt.
Le sénateur Angus: Dès mon premier emploi, j'ai acheté une police en 1951 auprès de la Standard Life. La Standard Life m'envoyait des tonnes de documentation chaque année. C'est toujours une mutuelle, mais elle est en cours de démutualisation. Maintenant que je participe à ce comité, je suis fasciné par tout cela et je lis la documentation, qui est très vaste. Si le BSIF a un mandat et ne le remplit pas, il faut que nous le sachions.
Le président: J'ai quelques difficultés à comprendre la substance de ce que vous dites. Est-ce que vous nous dites qu'une compagnie d'assurances qui a une police avec participation ne distingue pas ses intérêts entre elle et les actionnaires, et que le conseil d'administration est plus sensible aux besoins des actionnaires qu'aux besoins des souscripteurs et que, par conséquent, il existe un conflit inhérent entre l'affectation et l'appropriation des fonds? Est-ce que c'est ce que vous nous dites?
M. Gingras: Oui, monsieur le président. La compagnie doit établir un compte de participation. Il s'agit d'un compte distinct. Le surintendant, au titre de l'article 458 de la Loi sur les sociétés d'assurances, doit en déterminer la forme. Le surintendant ne détermine pas le fonds. Il laisse le soin à la compagnie d'assurances de faire ce qu'elle veut. La compagnie peut avoir des actifs distincts ou séparés, ou un compte distinct, et non un fonds, sur lequel s'applique une formule pour l'allocation des revenus et une formule pour l'allocation des dépenses.
Le président: Lorsque vous avez une police avec participation, contrairement à un contrat d'assurance-vie, lorsque vous participez aux mouvements de trésorerie de la société, est-ce une forme de fiducie?
M. Gingras: C'est une question que je me pose. Je passe tant de temps sur l'aspect juridique des compagnies d'assurance-vie.
Le président: C'est pour cela que je vous pose la question. Le sénateur Angus a soulevé une question importante.
M. Gingras: Je crois que le conseil d'administration a un devoir fiducial envers ses actionnaires, et doit agir dans le meilleur intérêt de la compagnie, tel que requis par la loi. Si les souscripteurs ont le droit de recevoir des profits de la compagnie, il doit exister un devoir fiducial quelconque. Le problème, c'est qu'il n'y a pas de contentieux dans le secteur de l'assurance-vie. Personne ne peut s'attaquer aux compagnies d'assurance-vie. Cela coûte cher et les souscripteurs ne communiquent pas entre eux. Ils n'ont même pas accès à la liste des souscripteurs. Il est difficile d'intenter un procès. Cependant, récemment, quelques procès ont été intentés.
Le sénateur Angus: Vous avez mentionné qu'ils s'étaient regroupés.
M. Gingras: Oui, les souscripteurs se sont regroupés pour exercer un recours collectif. Il existe quelques recours, mais ils sont à la discrétion du conseil d'administration. Les administrateurs n'ont pas à déclarer les profits aux souscripteurs. Cependant, ils allouent les dépenses aux souscripteurs de police avec participation. Qui surveille l'allocation des dépenses? Ils peuvent allouer toutes leurs dépenses commerciales, toutes les commissions des agents payeurs, aux souscripteurs de polices d'assurance.
Le président: Quel est le rôle des vérificateurs dans tout cela?
M. Gingras: Les vérificateurs se basent très fortement sur l'actuaire de la compagnie lorsque vient le temps de vérifier si les réserves sont suffisantes par rapport au passif.
Le président: Le vérificateur se pose toujours des questions lorsqu'il examine des comptes spéciaux qui ont des responsabilités spéciales. S'il existe un conflit inhérent entre l'actionnaire et ceux qui imputent les coûts à la compagnie en général et ceux qui imputent les coûts aux actionnaires, les vérificateurs doivent attirer l'attention du public là- dessus. Ils doivent s'assurer que cette pratique est appropriée.
M. Gingras: L'imputation se fait en fonction d'une formule qui a été déterminée par le conseil d'administration. Elle est déposée auprès du BSIF qui donne sa sanction en acceptant la formule.
Les enquêteurs du BSIF vérifient si la formule a été respectée. Ils vérifient si les actifs, les dépenses, ont été correctement imputés au compte. Il est difficile d'obtenir des informations du BSIF. Ce que j'en sais, c'est que les inspecteurs ne passent pas trop de temps à ce genre de choses.
[Français]
Le sénateur Massicotte: Vous êtes tous d'accord avec le fait que nous avons besoin d'une commission nationale. Un des témoins précédents nous a dit qu'il n'était pas nécessaire d'avoir une commission nationale pour protéger le consommateur, mais qu'il était plus important de faire une nouvelle coordination de nos règlements et de nos moyens de supervision.
Également, on a appris que les fonds mutuels se dirigent vers la formation d'un conseil de supervision indépendant du conseil d'administration de la corporation. Ces deux moyens peuvent-ils vous aider à satisfaire la demande de la commission nationale ou voulez-vous plus de réglementation? Vous dites que les industries d'autoréglementation ne fonctionnent pas, mais dans cette perspective, arrive-t-on à trouver une solution?
[Traduction]
M. Buell: Nous avons l'impression que les organisations d'autoréglementation ont un conflit d'intérêts inhérent. Si vous consultez le site Web de l'ACCOVAM, ils l'admettent. Nous avons l'impression que l'autoréglementation fonctionne pour une industrie, mais que celle-ci ne devrait pas avoir le mandat principal de protéger les investisseurs. Nous recevons énormément d'observations de la part de Canadiens et de petits investisseurs qui ont perdu toutes leurs économies. Ce n'est pas quelque chose qui provient de statistiques.
Je sais que le Sénat s'intéresse aux statistiques, mais nous avons approché quatre des plus importants centres de l'ACVM l'année dernière. Ils nous ont donné combien il y avait eu de plaintes, mais ils n'ont pas relevé l'âge des plaignants et le montant des pertes. Nous avons nous-mêmes procédé à un sondage il y a quelques années. Nous n'avons pas eu beaucoup de réponses, mais ces réponses indiquaient que l'âge moyen de l'investisseur qui a perdu de l'argent était la soixantaine, et que le montant perdu était de 80 000 $ environ. Ces sondages n'ont pas porté sur les membres de notre association qui, je le sais, ont perdu plus d'un million de dollars. Je dirais que la perte moyenne estimée est plus de 100 000 $. Nous avons estimé qu'elle était de plus de un milliard de dollars chaque année.
Lorsque vous nous demandez ce qu'il en coûterait de fournir une sorte d'agence de protection des investisseurs, si cela coûte moins d'un milliard de dollars par année, nous pensons que ce serait rentable.
M. Gleberzon: Je crois qu'un aspect de votre question est en fait une question philosophique fondamentale: une industrie peut-elle s'autoréglementer et en même temps protéger tous les éléments qui participent à la réglementation de cette industrie?
Je pense qu'un organisme national de réglementation appuyé par le gouvernement et ancré dans le gouvernement protégera les consommateurs et les petits investisseurs. Nous avons un système de ce genre au Canada, mais le problème c'est qu'il est fragmenté en 12 ou 13 organisations différentes. Le gouvernement fédéral ne s'en mêle pas vraiment.
En créant un organisme de réglementation ancré au sein du gouvernement, on protégera mieux les consommateurs et on encouragera les investissements en provenance de l'étranger, parce que nous sommes pour l'instant la risée des autres pays du fait que nous n'avons pas d'organisme de ce genre.
Nous savons bien que même avec ce type d'organisme, comme M. Spitzer l'a montré aux États-Unis, il reste encore des problèmes importants. Néanmoins, quelqu'un comme M. Spitzer a peut-être son propre agenda personnel; c'est là façon de faire à l'américaine.
Le président: C'est aussi la façon de faire canadienne, sauf ici au Sénat.
M. Gleberzon: Soit, mais à part cette exception, il reste que quelles que soient les motivations, si le gouvernement s'en mêle, le système fonctionne de façon plus efficace que quand c'est le secteur qui s'autoréglemente.
[Français]
Le sénateur Plamondon: Ma première question concerne les consommateurs puisque, avant d'être nommée au Sénat, je dirigeais un service d'aide aux consommateurs qui a examiné de près les polices d'assurance à primes prélevées sur la valeur de rachat. Je sais que l'on avait recommandé d'indiquer clairement dans les tableaux que c'était des scénarios et non pas des probabilités ni des promesses.
Ma question porte sur la transparence en matière de solvabilité. Souvent, les consommateurs demandent si telle compagnie d'assurance en est une avec laquelle je devrais faire affaires. Quand on pose des questions à ce sujet, autant au plan provincial qu'ailleurs, on nous dit qu'on ne peut pas nous donner une idée de la solvabilité ou nous dire si c'est sous surveillance à tous les six mois ou si on a accru la surveillance d'une compagnie. Dévoiler cette information équivaut à la mettre à terre, puisque c'est avouer qu'elle est en difficulté.
Certaines personnes, des investisseurs, des initiés, le savent, mais le consommateur ne le sait pas jusqu'à ce que la compagnie tombe. Ne devrait-on pas avoir une idée de la solvabilité ou de la fragilité d'une compagnie d'assurance avant d'y investir?
Ma deuxième question, c'est qu'ayant fait plusieurs études au service d'aide au consommateur sur les compagnies d'assurance, j'avais rencontré Mme Gloria Stromberg qui est une autorité en la matière, et qui m'avait dit de regarder la prochaine fois l'assurance-vie universelle.
Vous avez parlé de protéger les intérêts des détenteurs de police, mais la plupart des gens qui prennent une assurance-vie universelle ne connaissent rien de la partie investissement de l'assurance-vie universelle. Dites-moi comment vous voyez la protection de cette partie des compagnies d'assurance-vie? A-t-on besoin d'un M. Spitzer au Canada?
M. Gingras: Je vais d'abord répondre à la question de la solvabilité des compagnies d'assurance et de la publicité de la force financière des compagnies d'assurance. Autrefois, il y avait beaucoup d'informations disponibles. Il y avait ce qu'on appelait le « Blue Book » publié par le surintendant des assurances. C'était pour une année deux ou trois gros volumes. On savait à peu près tout d'une compagnie. On connaissait son surplus, ses profits, ses pertes. On connaissait ses affaires.
Il n'y a plus de publications maintenant, et c'est pratiquement impossible d'obtenir une information. Je connais mieux les compagnies fédérales parce que je n'ai pas travaillé pour des compagnies québécoises. On plaide la confidentialité. Votre police peut être transférée à une autre compagnie. Vous avez choisi une compagnie parce que vous pensez qu'elle est solvable. La compagnie peut vendre un bloc d'affaires à une autre compagnie et vous ne pouvez rien dire. Très peu de protection se fait à ce moment-là. C'est un problème.
Encore là, est-ce que les rapports financiers des compagnies devraient être plus complets? Je comprends le Bureau du surintendant des institutions financières de ne pas déclarer qu'une compagnie est en difficulté financière et que son coussin a baissé à moins de 120 p. 100 du requis, que le minimum de capital requis est trop bas. S'il publie cela, c'est une réaction en chaîne. Cependant, si on avait de l'information sur les compagnies en général, d'accord, mais la solvabilité n'est pas la seule chose. Les compagnies ont arrêté de vendre de l'assurance participante à toute fin pratique, elles préfèrent vendre des contrats discrétionnaires, des assurances-vie universelles.
Le sénateur Plamondon: On a eu hier des compagnies de dossiers de crédits comme Equifax et TransUnion et elles savent tout sur nous, sur notre solvabilité. Pourquoi nous, on ne pourrait pas avoir une idée de la solvabilité des compagnies avec lesquelles on fait affaires?
M. Gingras: Je crois que les compagnies publient généralement leur minimum de capital requis. Elles vont publier cela et dire que la loi recommande qu'il y ait un capital de 100 p. 100 pour rencontrer leurs obligations. Elles vont publier et dire qu'elles ont 225 p. 100 de ce capital. Alors c'est une source d'information qui peut être très valable.
Cependant, pour en venir aux polices universelles, c'est justement ce que j'appelle des polices ajustables. En ce sens, la compagnie a une discrétion. Une police universelle est un compte de banque avec des frais journaliers pour l'assurance. Le compte de banque monte ou baisse et vous ne savez pas combien la compagnie crédite d'intérêt et combien elle facture pour les cinq premières années. Avec de la chance, on va vous dire combien on vous facturera pour l'assurance, mais après, c'est à la discrétion de la compagnie d'augmenter les frais d'assurance.
Un ancien chef de direction de compagnie me disait qu'avec ces genres de produits, on a plus de sécurité qu'on en a besoin, non pas pour que la compagnie tombe en faillite, mais parce qu'on peut baisser les taux d'intérêt sur le compte de banque et augmenter les frais d'assurance. Ils ont énormément de discrétion. C'est l'autre côté des polices participantes. Il n'y a pas d'encadrement. Il n'y a rien qui force la compagnie à être raisonnable, il n'y a pas de statut qui dit que vous devez agir de façon juste et équitable quand vous faites des ajustements.
Les Américains, à New York au moins, ont passé une législation à ce sujet. D'autres pays ont mis des critères pour agir de façon juste et équitable. Mais cela ne se fait pas présentement.
Le sénateur Plamondon: Est-ce qu'on a besoin au Canada de Spitzer?
M. Gingras: Cela dépasse ma compétence. Je ne suis pas sûr de pouvoir vous répondre.
[Traduction]
Le président: Le sénateur Plamondon parle d'une recommandation formulée par nos autres témoins. Vous vous préoccupez plus d'assurance, mais ce qui les intéresse, eux, c'est d'avoir une autorité nationale de réglementation.
Le sénateur Plamondon vous demande ce que vous en pensez et comment on pourrait mettre sur pied cette autorité nationale de réglementation.
M. Gleberzon: En écoutant la question du Sénateur Plamondon, je me suis rendu compte qu'elle était valable aussi en partie pour la réponse à la question du sénateur Massicotte, car ce sont les mêmes principes qui sous-tendent la transparence. Par exemple, si un conseiller financier fait l'objet d'une enquête parce qu'il est soupçonné de malversations, il poursuit ses activités comme avant. Durant toute la durée de l'enquête, les malversations dont il est question ne sont pas rendues public. C'est la même chose pour les sociétés sous surveillance.
La Commission des valeurs mobilières de l'Ontario avait commencé à publier le nom des sociétés sur lesquelles elle enquêtait, mais elle a arrêté de le faire parce qu'il y avait d'autres sociétés sur sa liste.
Les questions que vous avez posées sont des questions fondamentales parce qu'elles expliquent justement pourquoi nous avons besoin d'une autorité nationale de réglementation.
On parle de fonds communs de placement, mais il n'y a aucune raison de penser qu'une telle autorité ne pourrait pas s'occuper de tous les services financiers. Il faut voir cela à plus grande échelle. Je suis titulaire de police et j'ai aussi des fonds communs de placement, si je suis dans une situation risquée, peu importe que ce soit d'un côté ou de l'autre. C'est comme cela qu'il faut voir les choses.
Je ne sais pas si nous avons besoin d'un Eliot Spitzer, mais ce qu'il nous faut, c'est une autorité unique de réglementation capable de décider si nous avons effectivement besoin de quelqu'un comme Eliot Spitzer pour faire un grand ménage. Quand il a commencé, tout le monde a dit qu'il n'était pas nécessaire de faire les choses en grand comme cela, mais il donné la preuve éclatante que c'était pourtant bien nécessaire.
M. Buell: Je suis très impressionné par les exposés qui ont précédé et par les questions qui ont été posées. Je constate que le comité est bien conscient des problèmes que connaissent les petits investisseurs. Il ne s'agit pas simplement d'un produit, il s'agit de toute l'industrie des services financiers. Il y a apparemment une volonté d'étouffer à grande échelle la question des malversations, que l'on parle de sociétés de fonds communs de placements, de compagnies d'assurance, de courtiers bancaires ou de courtiers en valeur mobilière.
Nous n'avons cessé d'entendre les mêmes plaintes. Les Canadiens ne savent pas vers qui se tourner et comme l'a dit M. Oliver, nous avons une structure de réglementation tordue et nébuleuse. Nous sommes parfaitement d'accord.
Le petit investisseur ne sait pas vers qui se tourner et quand il pose la question, les autorités de réglementation lui disent: « Nous faisons de la protection préventive des investisseurs, pas de la correction ». Le seul recours des petits investisseurs, se sont les tribunaux civils. La plupart des gens n'ont pas les moyens de se payer ces procès. Un homme de 70 ou 80 ans n'a ni le temps ni l'argent nécessaire pour intenter un procès civil. C'est pour cela que nous disons qu'il faut créer une autorité fédérale ou nationale responsable de protéger les petits investisseurs.
Le sénateur Angus: Les gros investisseurs avertis sont tous retombés sur leurs pieds et sont rentrés dans leur argent et les petits, les veuves, les orphelins et les personnes âgées ont encaissé les pertes. C'est épouvantable.
Je crois que vous êtes sur la bonne voie. Nous avons prêté une oreille très attentive aujourd'hui.
Le président: Monsieur Buell, en toute justice, on n'a pas entendu parler seulement de protection des consommateurs aujourd'hui, mais aussi de mesures correctives. On nous a dit qu'il y avait des mesures correctives, et nous avons aussi entendu dire qu'il y avait des plaintes et que les consommateurs se faisaient rembourser un peu d'argent. Il s'agit de savoir si les mesures correctives étaient suffisantes, satisfaisantes, opportunes et équitables. Toutes ces questions sont justes et appropriées. Pour être équitable, il faut dire qu'il y avait équilibre entre les deux.
Le sénateur Angus: Je crois qu'il voulait dire les autorités, le grand public. Il n'y a pas de mesures correctives.
Le président: C'est vrai que tout cela, c'est de l'autoréglementation.
En toute justice, il s'agit d'un problème, mais nous devons aussi nous assurer que l'information qui se rend à notre auditoire est bien équilibrée. Je ne sous-estime ni ne surestime vos propos.
Nous avons entendu parler de segmentation. En comparant les régimes de réglementation entre eux, nous constatons que certains sont meilleurs que d'autres et que certains fonctionnent mieux.
Avez-vous décidé quelles provinces sont les plus sensibles vis-à-vis les besoins du consommateur?
M. Buell: Nous croyons que le modèle québécois est probablement le plus avancé sur le plan social. Nous croyons que le modèle de la Colombie-Britannique se situe probablement en deuxième position. Par exemple, M. Oliver nous dit qu'en vérifiant leur site web, vous trouverez toutes les disciplines; cependant, si vous consultez le site web de la BCSC, il y a là une liste alphabétique de tous ceux qui ont fait l'objet d'une sanction disciplinaire.
À moins que vous ne connaissiez à fond les ordinateurs, il est plus difficile d'obtenir l'information sur le site de l'Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières.
Le président: Pour que l'expression caveat emptor prenne tout son sens, c'est-à-dire « que l'acheteur se méfie », alors l'acheteur doit avoir une information adéquate, juste et opportune. Il est difficile pour l'acheteur de se méfier si tous n'ont pas la même information.
M. Buell: Absolument.
M. Gleberzon: Du côté des mesures correctives, le Manitoba a mis sur pied un système d'arbitrage géré par le gouvernement. Je n'ai pas le nombre précis de cas réglés grâce à cette méthode, mais je sais que la possibilité existe. Nous en avons parlé au ministre responsable et il n'avait que des éloges pour le système. Nous croyons que c'est une autre piste de solutions parce que s'il y avait une autorité de réglementation nationale, elle pourrait mettre sur pied un système d'arbitrage ou un autre système qui ne coûterait pas très cher au petit investisseur.
Le président: Je représente l'Ontario. Le sénateur Angus représente le Québec; la sénateur Plamondon, le Québec et le sénateur Moore, la Nouvelle-Écosse. Le Sénat assure une représentation régionale et nous représentons nos régions. Vous me dites que l'Ontario, là où s'effectuent le plus de transactions au niveau du commerce des valeurs mobilières au pays, est la province la moins sensible aux besoins du consommateur; c'est la première fois que j'entends dire cela.
M. Buell: Je crois que les responsables de nos autorités de réglementation essaient de bien faire. Ils essaient d'assurer une certaine protection à l'investisseur, mais elle est de nature préventive plutôt que correctrice. Nous ne croyons pas que les responsables des autorités de réglementation savent ce qui se passe au bas de l'échelle, au niveau des clients.
En toute justice, la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario organise une assemblée publique à Toronto pour le 31 mai. Messieurs Oliver et Waite feront partie du panel. David Brown de la commission en fera aussi partie. On m'a invité à en faire partie comme porte-parole des petits investisseurs.
Cette assemblée est ouverte au public. Beaucoup de nos membres envoient déjà leurs histoires et leurs questions. Les responsables des autorités de réglementation de l'Ontario se mettent ainsi à l'écoute du public. Nous avons bien hâte d'y participer.
Le président: Nous avons demandé à ceux qui participent à un système d'autoréglementation de nous recommander des améliorations possibles. Chacun des témoins nous a appris qu'il y a des problèmes, qu'il serait bien de régler certains de ces problèmes, que ce soit par voie législative ou autrement.
Si vous avez des recommandations précises quant aux améliorations qui pourraient être apportées au système actuel d'autoréglementation, veuillez nous en part, je vous prie. Nous nous intéressons aussi à l'autre option qui est de savoir comment nous pourrions diligenter un mandat de réglementation plus centralisé. Si vous avez des recommandations à faire, qu'elles soient le plus précis possible, s'il vous plaît.
Le sénateur Angus: Revenons aux droits des titulaires de police; je crois que nous devons entendre ce qu'ont à dire les gens comme Dominic D'Alessandro ou son homologue chez votre ancienne compagnie, la Sun Life. Il me semble que vous avez fait vos déclarations assez fermement. Vous avez envoyé une lettre à laquelle vous n'avez pas obtenu réponse satisfaisante. Monsieur LePan a comparu devant nous et nous ne savions pas quelles questions lui poser à ce sujet.
Donnerions-nous des coups d'épée dans l'eau, si nous faisions cela?
Il est probablement injuste de vous demander ce que dirait, à votre avis, M. D'Allessandro si on lui demandait ce que fait ManuLife pour ses titulaires de police par opposition aux actionnaires.
Le président: L'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes se trouve déjà sur notre liste de témoins à venir. Je crois que vous soulevez une question fondamentale. C'est bien beau d'entendre ce qu'a à dire l'association.
Le sénateur Angus: C'est le plus petit dénominateur commun.
Le président: C'est peut-être le plus gros dénominateur commun. Peut-être devrions-nous entendre certaines des plus grosses associations de consommateurs, après quoi nous pourrions vous entendre. Notre étude se poursuit et votre avis nous intéresse.
Le sénateur Moore: Qui organise ce symposium à la fin de mai? Publiera-t-on un document faisant état des délibérations, quelque chose qu'on pourrait faire parvenir à notre comité?
M. Buell: Je crois que David Brown a été le premier moteur de cette réunion, probablement suite à ma rencontre avec lui au mois de février. J'ai présenté un rapport que nous avons ensuite fait parvenir à 25 des dirigeants du Canada, y compris le premier ministre du Canada et les premiers ministres des provinces. Nous avons essayé d'y montrer que les petits investisseurs souffrent et que nos dirigeants ne savent pas vraiment ce qui se passe.
Le président: Je viens de consulter ma montre. Si vous pouviez conclure en 30 secondes, après quoi M. Gleberzon disposera de 30 secondes aussi. Il nous reste une minute.
M. Buell: C'était la CVMO. C'était David Brown. Nous ferons parvenir un rapport au comité suite à la réunion.
M. Gleberzon: Nous travaillons de concert avec la CVMO afin d'assurer que nos membres sachent qu'ils ont accès à notre site web. Les deux organismes se concerteront et nous vous ferons parvenir un document.
Le président: Merci beaucoup. Je suis désolé. Le temps est notre ennemi. Nous vous remercions d'avoir pris le temps de comparaître à titre personnel. Ce fut riche en renseignements et profitable.
La séance est levée.