Délibérations du Comité sénatorial permanent de la
Sécurité nationale et de la défense
Fascicule 15 - Témoignages du 1er mars 2005 - Séance du matin
VANCOUVER, le mardi 1er mars 2005
Le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense se réunit aujourd'hui à 9 h 40 pour étudier, afin d'en faire rapport, la nécessité d'une politique nationale sur la sécurité pour le Canada.
Le sénateur Colin Kenny (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Je déclare la séance du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense ouverte. Bonjour, mesdames et messieurs. Mon nom est Colin Kenny et je préside le comité.
Je voudrais d'abord vous présenter les membres du comité. Tout de suite à ma droite, se trouve le distingué sénateur Michael Forrestall de la Nouvelle-Écosse. Le sénateur Forrestall est au service de la population de Dartmouth depuis 37 ans; il a d'abord été député avant de devenir sénateur. À la Chambre des communes, il a été porte-parole de l'opposition officielle en matière de défense de 1966 à 1976. Il est aussi membre de notre Sous-comité des anciens combattants.
À sa droite, c'est le sénateur Michael Meighen. Il est avocat de profession. Il est chancelier de l'Université King's College et ancien président du Festival de Stratford. Il s'est vu décerner des doctorats honorifiques en droit civil de l'Université Mount Allison et de l'Université du Nouveau-Brunswick. Il est président de notre Sous-comité des affaires des anciens combattants et membre du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce.
À ses côtés, se trouve le Peter Stollery de l'Ontario. Il a été élu une première fois à la Chambre des communes en 1972, avant d'être réélu en 1974, 1979 et 1980. Il a été nommé au Sénat en 1981. Le sénateur Stollery préside actuellement le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères, et il siège également au Comité sénatorial permanent des finances nationales.
À ses côtés, se trouve le sénateur Nolin du Québec.
[Français]
Il a présidé le Comité sénatorial spécial sur les drogues illicites qui a publié un rapport complet invitant à une législation et une réglementation du cannabis au Canada. Il est actuellementvice-président du Comité sénatorial de la régie interne, des budgets et de l'administration. Sur le plan international, le sénateur Nolin est actuellement président du Comité des sciences et de la technologie de l'Association parlementaire de l'OTAN.
[Traduction]
Tout de suite à ma gauche, c'est le sénateur Joseph Day du Nouveau-Brunswick. Il est vice-président du Comité sénatorial permanent des finances nationales et de notre Sous-comité des affaires des anciens combattants. Il est membre du Barreau du Nouveau-Brunswick, de l'Ontario et du Québec ainsi que fellow du Intellectual Property Institute of Canada. Il est également un ancien président et directeur général de la New Brunswick Forest Products Association.
Au bout de la table se trouve le sénateur Tommy Banks de l'Alberta. Il est président du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles qui a récemment publié un rapport intitulé Le défi d'une tonne. Il est bien connu au Canada pour ses multiples talents d'animateur et de musicien. Il a assuré la direction musicale des cérémonies des jeux Olympiques d'hiver de 1988, à Calgary. Il a été nommé officier de l'Ordre du Canada et il a remporté un prix Juno.
Notre comité est le premier comité sénatorial permanent qui a le mandat d'examiner les questions de sécurité et de défense. Le Sénat a chargé notre comité de se pencher sur la nécessité d'avoir une politique de sécurité nationale. Nous avons commencé notre examen en 2002 en rendant publics trois rapports : L'état de préparation du Canada sur le plan de la sécurité et de la défense, en février, La défense de l'Amérique du Nord : Une responsabilité canadienne, en septembre, et Mise à jour sur la crise financière des Forces canadiennes : Une vue de bas en haut, en novembre.
En 2003, le comité a publié deux autres rapports : Le mythe de la sécurité dans les aéroports canadiens, en janvier, et Les côtes du Canada : Les plus longues frontières mal défendues au monde, en octobre. En 2004, nous avons publié deux autres rapports : Les urgences nationales : Le Canada fragile en première ligne, en mars, et récemment Le manuel de sécurité du Canada, édition 2005.
Le comité examine la politique de défense du Canada, et au cours des prochains mois, il tiendra des audiences dans toutes les provinces pour demander aux Canadiens et aux Canadiennes ce qui est d'intérêt national pour eux, quelles sont les principales menaces qui, à leur avis, pèsent sur le Canada et comment ils voudraient que le gouvernement réponde à ces menaces. Le comité va tenter de susciter un débat sur la sécurité nationale du Canada et de dégager un consensus sur le type de forces militaires que les Canadiens veulent.
Nous sommes aujourd'hui à Vancouver et les témoignages de notre premier groupe de témoins vont porter sur la question de l'aide aux autorités civiles.Nous accueillons le maire Walter Gray, propriétaire et dirigeant à la retraite d'une station de radio. Il a été élu une première fois au conseil municipal de Kelowna en 1986 et a siégé comme conseiller pendant deux mandats. Il est maire de Kelowna depuis 1996.
Nous avons également avec nous M. Ron Mattiussi qui a été nommé directeur de la planification et du développement des services de la ville de Kelowna le 1er mars 1995 et qui occupe maintenant les fonctions de directeur de la planification et des services de gestion pour la municipalité. À l'époque des feux de forêt de 2003, M. Mattiussi était directeur du centre régional des opérations d'urgence. Son équipe a coordonné toutes les activités d'évacuation, de planification logistique et de services sociaux d'urgence, à l'exception de celles liées à l'extinction des feux.
Nous accueillons également le colonel Jim Ellis qui a joint les rangs des Forces armées canadiennes en 1983. Sa première affectation a été au sein du Lord Strathcona's Horse (Royal Canadians) à Calgary. Le colonel Ellis a servi comme commandant d'escadron avec le groupement tactique du Strathcona en Bosnie, dans le cadre de la Force de protection des Nations Unies. Il est retourné plus tard en Bosnie avec le groupement tactique du Strathcona lorsque celui-ci a étédéployé avec la Force de stabilisation en 1997. En 2000, le colonel Ellis est retourné à Edmonton pour sa cinquième mutation au Lord Strathcona's Horse à titre de commandant. En 2002, il a été muté au quartier général du Secteur de l'Ouest de la Force terrestre où il a servi comme G3 et chef d'état-major. Promu en 2004, le colonel Ellis a été nommé commandant de la Force opérationnelle à Kaboul, soit la contribution du Canada à la Force internationale d'assistance pour la sécurité. Il est revenu de Kaboul il y a quelques semaines à peine et il est actuellement en congé à Edmonton.
Nous vous remercions beaucoup d'avoir pris le temps de faire le voyage pour venir nous rencontrer aujourd'hui alors que vous êtes en congé. Merci beaucoup, colonel.
Messieurs, d'après ce qu'on m'a dit, chacun d'entre vous a préparé un bref exposé et le colonel sera le premier à prendre la parole.
Le colonel Jim Ellis, commandant adjoint de l'Opération Peregrine, ministère de la Défense nationale : Merci, monsieur le président. Bonjour. Je vous remercie de me donner l'occasion de comparaître aujourd'hui devant le comité. Je suis le colonel Jim Ellis. J'occupe actuellement les fonctions de chef d'état-major du Secteur de l'Ouest de la Force terrestre à Edmonton.
Je suis heureux de vous donner un bref aperçu de la plus récente opération nationale dans l'Ouest du pays, c'est-à- dire l'Opération Peregrine, qui a été déployée en août et en septembre 2003 pour aider à combattre les feux de forêt en Colombie-Britannique. Dans le cadre de cette opération, j'ai assumé les fonctions de chef des opérations au quartier général déployé à Vernon, en Colombie-Britannique, et j'ai travaillé directement avec le major-général Ivan Fenton, qui était à l'époque le commandant de la Force et le commandant de zone du SOFT.
Avant de décrire les étapes des préparatifs et de l'exécution de l'Opération Peregrine, il est important de rappeler l'état de la situation dans l'Ouest canadien à la fin du mois de juillet et au début du mois d'août 2003. Après un autre printemps relativement sec, les risques d'incendie étaient extrêmes. Un nombre considérable de feux de forêt non maîtrisés faisaient rage en Alberta et au Manitoba, mais c'est en Colombie-Britannique que la situation était, et de loin, la plus sérieuse.
Le 2 août 2003, au cours de la longue fin de semaine du mois d'août, les quartiers généraux du SOFT ont été avisés par nos officiers de liaison des opérations nationales permanentes à Victoria que le gouvernement de la Colombie- Britannique sollicitait l'aide des militaires pour combattre les feux qui faisaient rage dans la vallée de l'Okanagan. Au début, on a demandé que 85 pompiers ainsi que le module de commandement et le soutien logistique nécessaires soient dépêchés sur les lieux. En moins de trois heures, un autre officier de liaison a été envoyé de Penticton, au centre des incendies de Kamloops. Nous avons assuré la liaison avec le centre tout au long des opérations, d'abord en organisant la formation destinée à ceux qui allaient combattre les feux, puis en aidant à accueillir les troupes qui sont arrivées par la suite dans la région.
La décision a été prise d'envoyer la force opérationnelle d'avant-garde, la Compagnie B du 1er Bataillon du Princess Patricia's Canadian Light Infantry d'Edmonton. Le groupe de reconnaissance de la compagnie a pris la route six heures après la réception de la demande initiale et le reste de la compagnie a quitté pendant la nuit. En moins de 22 heures, tous les membres de la compagnie étaient rendus au centre des incendies de Kamloops et ils ont commencé à offrir la formation presque immédiatement après leur arrivée. On a reçu la première demande d'aide dans l'une des pires périodes de l'été. La plupart des unités du SOFT, à l'exception du bataillon de l'unité d'intervention immédiate, étaient en congé.
On a reçu la demande et on a déployé des forces pendant toute la longue fin de semaine du mois d'août. La circulation était très dense sur les routes de l'Alberta en raison de ce congé férié. Pour compliquer les choses, comme plusieurs feux de forêt faisaient rage en Alberta, on disposait d'un seul itinéraire pour le transport. Dans la région touchée par les incendies, la plupart des tours de transmission civile pour téléphones cellulaires avaient été détruites, rendant difficiles les premières communications avec les troupes déployées. Le SOFT a reçu plusieurs demandes d'aide au cours du mois d'août.
Le 22 août 2003, comme la ville de Kelowna était menacée et qu'un grand nombre d'hommes avaient été déployés, le commandant de la Force a ordonné au quartier général du SOFT d'envoyer des militaires à Vernon et d'y établir un quartier général avancé. C'était la première fois que le quartier général de zone effectuait un déploiement pour une opération nationale d'envergure.
À bien des égards, cette opération était unique. Elle a été ponctuée de multiples demandes de dernière minute et qui souvent précisaient le nombre exact de pompiers requis. La situation était extrêmement changeante et exigeait une réaction rapide et de multiples regroupements des forces. Des soldats de la Force régulière et de la Force de réserve étaient entièrement intégrés dans les divers groupes opérationnels. Enfin, a élaboré un concept de soutien sur mesure en fonction des camps fixes de lutte contre les incendies situés un peu partout dans la vallée. Au plus fort de l'opération, plus de 2 200 hommes étaient déployés dans la vallée à quatre endroits différents où les feux faisaient rage, à savoir Barriere, Kelowna, Chase et Vaseaux Lake.
Les forces se composaient de quatre groupes opérationnels distincts commandés chacun par le quartier général d'une unité de la Force régulière ou de la Force de réserve, y compris le 1er Bataillon du Princess Patricia's Canadian Light Infantry, le Lord Strathocona's Horse (Royal Canadians), le British Columbia Dragoons et le Loyal Edmonton Regiment. À chacun des quartiers généraux des groupes opérationnels étaient rattachées de deux à quatre compagnies venues pour aider à combattre les incendies. On comptait des compagnies des unités de la Force régulière et de la Force de réserve du SOFT ainsi que deux compagnies des Forces maritimes du Pacifique de Victoria et d'une compagnie de la force aérienne de Cold Lake. L'Opération Peregrine a bénéficié de beaucoup de soutien et a disposé de cinq hélicoptères Griffin, dont un pour la recherche et le sauvetage.
Au cours de l'opération, près de 870 réservistes ont été déployés dans la vallée. Ils provenaient notamment de sept compagnies de réservistes ayant des capacités de commandement et de contrôle, mais un appui intégral limité. Le personnel réserviste a offert du renfort à la police militaire et aux unités médicales de la vallée de même qu'aux divers officiers de liaison basés un peu partout dans le sud de la Colombie-Britannique.
La principale unité de réserve, la British Columbia Dragoons, a fourni des quartiers généraux pour le groupe opérationnel responsable des incendies de Kelowna et des parcs des montagnes. Les Dragoons sont établis à Kelowna. À ce groupe opérationnel étaient rattachées des compagnies interarmées et des soldats de la Force régulière et de la Force de réserve.
L'opération nous a enseigné plusieurs leçons précieuses et même si le quartier général de zone a mobilisé les ressources et coordonné l'ensemble des opérations avec succès, nous savons maintenant qu'il n'a pas les ressources humaines et l'équipement nécessaires pour mener à bien des opérations nationales prolongées. Lors de ces incendies de forêt, le quartier général a dû faire appel à un important renforcement pour exécuter ses tâches. Normalement, le Groupe des opérations interarmées des Forces canadiennes de Kingston et le premier groupebrigade-mécanisée du Canada fournissent des quartiers généraux pour des emplacements rudimentaires, comme dans le cas des inondations de 1997 à Winnipeg.
Toutefois, dans le cadre de l'Opération Peregrine, le quartier général du premier groupe brigade-mécanisée du Canada était gardé en réserve pour répondre aux besoins d'autres régions de l'Ouest canadien qui étaient menacées par les incendies de forêt. En outre, même si l'engagement des réservistes à l'égard de cette opération a été remarquable, le processus de sélection des réservistes en classe C a été relativement compliqué. Des mesures ont été élaborées tout au long de l'opération pour le simplifier. De plus, on ne dispose toujours pas d'une mesure législative pour le rappel des réservistes. Les employeurs et le personnel des écoles secondaires et des universités ont appuyé énergiquement les réservistes qui ont apporté du renfort pendant cette crise provinciale. Comme l'opération s'est poursuivie jusqu'à la mi- septembre, la plupart des écoles secondaires et des universités ont permis aux réservistes de s'inscrire plus tard, soit à la fin du déploiement. Même si cela a bien fonctionné cette fois-ci, il n'en demeure pas moins que la participation des réservistes était volontaire puisqu'il n'y avait pas de mesure législative en place pour assurer la protection de leurs emplois. Enfin, le bien-fondé du concept de soutien central et du recours aux groupes opérationnels formés de sous- unités indépendantes a été démontré pendant cette opération. Il constitue un modèle souple et viable d'emploi de la force.
Pour les unités de la Force régulière et de la Force de réserve du SOFT, cette opération a été couronnée de succès. Le SOFT et les Forces canadiennes vont s'inspirer des leçons apprises pour faire face aux situations d'urgence nationale qui vont survenir dans l'avenir.
Sénateurs, je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de m'adresser au comité. Après que le maire de Kelowna aura fait son exposé, je serai heureux de répondre à vos questions.
Le président : Merci.
M. Walter Gray, maire de Kelowna : Merci. Je suis heureux d'être ici aujourd'hui.
L'incendie du parc du mont Okanagan a été causé par la foudre qui s'est abattue vers 1 h 55 le matin du 16 août, à environ 200 mètres au-dessus du niveau du lac Okanagan, tout juste au nord du canyon Wild Horse, dans le parc provincial du mont Okanagan. L'incendie a débuté du côté est du lac Okanagan, en face de Peaceland, une section du parc inaccessible par la route.
Pour mieux vous situer géographiquement, puisque vous n'êtes peut-être pas tous familiers avec cet endroit, disons que le feu a débuté entre Penticton et Kelowna, plus près de cette dernière, du côté est du lac Okanagan. Le feu s'est propagé pendant de nombreux jours, et on s'est graduellement aperçu qu'il allait envahir la partie sud de la ville.
L'incendie du parc du mont Okanagan, comme on en est venu à l'appeler, est le plus grand feu d'interface irréprimé de l'histoire du Canada. Avant d'être maîtrisé, il avait dévasté 26 000 hectares de forêt jusqu'aux pentes de la ville de Kelowna, allant même jusqu'à pénétrer dans la ville, ravageant 239 maisons. Les dommages avaient été initialement estimés à 100 millions de dollars, mais plusieurs mois plus tard, nous constatons que ce serait plutôt de l'ordre des 200 millions de dollars en réclamations.
Le 2 août, deux semaines avant que le feu se déclare dans notre région, alors qu'il y avait des foyers d'incendie partout dans la province, le gouvernement de la Colombie-Britannique a déclaré l'état d'urgence. Le lendemain, le gouvernement provincial a demandé l'aide des Forces canadiennes, et l'Opération Peregrine était lancée. Au plus fort de la crise, environ 800 incendies faisaient rage en Colombie-Britannique. Plus de 2 200 membres des Forces canadiennes ont combattu les pires incendies à Barriere-McLure, au parc du mont Okanagan, à Vaseaux Lake, à McGillivray Lake et à Kuskanook Creek.
M. Mattiussi, qui était alors directeur du Centre des opérations d'urgence (COU), vous donnera d'autres détails; ensuite, je terminerai brièvement l'exposé, et nous pourrons ensuite répondre à vos questions.
M. Ron Mattiussi, directeur, Planification et service de gestion, Ville de Kelowna : Merci, monsieur le président. Chers sénateurs, les Forces armées canadiennes ont joué un rôle très important pendant cette catastrophe, en combattant les feux les plus ardents et en stabilisant ceux qui étaient moins actifs dans la région. Ce fut une tâche ardue en terrain difficile où une chaleur accablante sévissait sur une grande superficie. Si vous êtes déjà allés à Kelowna, dans le centre, vous savez que la température peut dépasser les 30 degrés. Il n'y pas de mots pour qualifier les conditions extrêmes dans lesquelles les membres des Forces armées ont dû travailler.
Les Forces canadiennes ont représenté pour le responsable des opérations une ressource importante à un moment où tous les pompiers forestiers et les pompiers de bâtiments disponibles étaient occupés à tenter de contenir le feu irréprimé, qui a parfois atteint une échelle de 5 à 6, 6 étant le feu le plus ardent.
Les Forces canadiennes se sont avérées un groupe autonome, autosuffisant et bien organisé pour nous aider dans notre situation de crise. Lors d'une situation d'urgence, la gestion d'un groupe de bénévoles est difficile. Le fait d'avoir eu un groupe organisé comme les Forces canadiennes à notre disponibilité nous a été d'un grand secours. Lors de catastrophes ou de désastres naturels, il est essentiel d'obtenir le secours immédiat d'un groupe d'intervention entraîné et bien équipé. Dans notre cas, la GRC avait également les mains pleines. Ces agents ont fait un travail colossal pour évacuer plus de 30 000 habitants pendant la nuit, et ce dans des conditions horribles. Toutefois, ces ressources étaient très en demande, pas seulement à Kelowna, mais partout dans la province. Ce qui nous a sauvés pendant cette crise, c'est la communauté extrêmement active de bénévoles de la GRC, de bénévoles des régions rurales, de membres associés et, dans le feu de l'action, d'agents chargés de faire appliquer les règlements, d'agents de conservation et d'équipes volontaires de recherche et de sauvetage. Tous ces groupes ont travaillé ensemble à protéger la zone touchée et à évacuer les résidents.
Le point que nous tentons de faire, c'est que ce vaste groupe de bénévoles ne peut pas être disponible dans toutes les situations. Dans notre cas, nous aurions eu besoin aussi de ce type de ressources. Nous estimons que ces ressources devraient être rapidement mises à la disposition des gens. Nous aurions aimé avoir eu l'aide des Forces canadiennes pour s'acquitter d'un rôle qui leur sied bien, peut-être pas pour l'évacuation des résidents, mais pour à tout le moins assurer leur sécurité. Pendant que le feu faisait rage, nous avons eu de la difficulté à assurer la sécurité des gens sur les nombreuses routes et chemins montagneux en région rurale. C'est certainement un élément qui doit être mis en lumière.
En fin de compte, pour ce qui est des opérations quotidiennes, et après avoir fait le point sur notre situation, nous avons recommandé que le plan régional des mesures d'urgence comprenne un membre des Forces canadiennes à titre de liaison car il nous est arrivé d'avoir besoin d'entrer directement et rapidement en communication avec les Forces canadiennes, mais nous n'avions pas le temps de remonter la chaîne de l'organisation du Programme d'urgence provincial (PUP) et ensuite celle des Forces armées.
M. Gray : Les citoyens de Kelowna sont à jamais reconnaissants envers les hommes et les femmes des Forces qui sont venus les aider pendant l'un des événements les plus horribles des 100 ans d'histoire de la ville. Par ailleurs, la ville de Kelowna célèbrera son premier centenaire, le 5 mai prochain. Comme l'a mentionné M. Mattiussi, les membres des Forces canadiennes ont travaillé d'arrache-pied en terrain abrupt, accablées par une chaleur estivale torride, dans les conditions dangereuses qui ont suivi un incendie de niveau 6 pour stabiliser la situation et assurer le retour en toute sécurité des habitants. Nous leur sommes extrêmement reconnaissants.
Nous avons particulièrement apprécié le fait que les Forces armées étaient indépendantes et autonomes. Au COU, M. Mattiussi et les gens du centre qui s'occupaient des personnes évacuées étaient très pris par d'autres soucis. Je vous rappelle que nous avons évacué 30 000 personnes sur une population de 100 000 et que certains d'entre eux ont dû être évacués deux fois. Lorsque vous devez vous fier à une base de volontaires pour effectuer une bonne partie des évacuations et que beaucoup de ces volontaires doivent être évacués eux-mêmes, ça pose un véritable problème; nous avons été chanceux que les gens n'aient pas paniqué.
Le président : Merci beaucoup. J'aimerais mentionner que le sénateur Ross Fitzpatrick tient à s'excuser de n'avoir pu être présent aujourd'hui.
Le sénateur Forrestall : Merci, monsieur le président. J'aimerais souhaiter la bienvenue à ces messieurs. Bienvenue, colonel. Je viens de la côte Est, mais je peux vous dire que nous avons suivi de très près le déroulement de la situation et avons prié pour vous.
Je vais commencer par dire que ce comité espère revenir sur l'étude intitulée Les urgences nationales : Le Canada, fragile en première ligne, qui a été publié en mars 2004. Nous aimerions mettre ce rapport à jour en tenant compte de vos commentaires et en nous appuyant sur les leçons apprises depuis ce temps. Nous aimerions examiner, peut-être par votre entremise colonel, et aussi le maire, les lignes de communication, l'assistance offerte, le concept d'aide aux autorités civiles et le fonctionnement de tout cela pour ce qui est de répondre à vos besoins pendant la crise.
Monsieur Mattiussi, les incendies faisaient déjà rage depuis un certain temps en Colombie-Britannique lorsque les Forces ont été appelées. Pourquoi ne l'a-t-on pas fait plus tôt?
Quand ont-elles été appelées, et que pensez-vous de la rapidité et de l'efficacité de la réponse que vous avez obtenue?
Avez-vous trouvé ça plus ou moins difficile de travailler avec des militaires que vous l'aviez prévu?
M. Mattiussi : Monsieur le président, je ne peux parler que de la crise dans la ville de Kelowna car le feu du mont Okanagan s'est déclaré le 16 août, mais, le 2 août, le gouvernement provincial avait déjà déclaré l'état d'urgence. Je crois qu'à cette époque il n'y avait aucun contact direct entre la ville de Kelowna ou le Centre des opérations d'urgence régional et les Forces armées; l'entente a été prise par le truchement du Programme d'urgence provincial, le PUP. Si les responsables des opérations d'urgence à Kelowna avaient fait une demande à un moment donné, cela aurait été par l'entremise du PUP.
Mon premier contact avec des représentants du ministère de la Défense a été, si je ne m'abuse, le jeudi soir, soit le 21 ou le 22 août. C'est un peu flou dans ma tête car ça faisait déjà plusieurs jours que je n'avais pas quitté le centre, mais c'était sûrement la nuit de la grande évacuation.
Le sénateur Forrestall : On pourrait donc dire environ trois semaines, plus ou moins?
M. Mattiussi : Oui. Des représentants sont venus pour évaluer la situation sur le terrain et déterminer dans quels domaines les Forces pourraient fournir de l'aide. Le deuxième contact a été pour déterminer où nous pourrions loger les membres des Forces canadiennes dans une zone sécurisée.
Le sénateur Forrestall : Pourquoi avez-vous attendu trois semaines avant d'appeler?
M. Mattiussi : C'est le gouvernement provincial qui a fait l'appel.
Le sénateur Forrestall : Monsieur Gray, auriez-vous fait l'appel vous-même si vous aviez pu communiquer directement avec les autorités fédérales?
M. Gray : Ça me donne l'occasion de signaler quelque chose. Vu que l'état d'urgence avait déjà été annoncé par le premier ministre de la province lorsque s'est déclaré notre feu, le maire n'aurait jamais eu l'occasion de faire une telle intervention pendant tout l'été 2003. Autrement dit, il n'aurait servi à rien de déclarer un état d'urgence local; par conséquent, ça ne m'est jamais venu à l'esprit. Toutefois, quand nous avons eu besoin des militaires, ils étaient là, mais ce n'est pas grâce à moi ou à quelque chose que j'ai pu faire.
Le sénateur Forrestall : Est-ce grâce à votre intervention, monsieur Mattiussi?
M. Mattiussi : Monsieur le président, c'est certainement attribuable au fait que nous avons signalé les difficultés que nous éprouvions à gérer ce vaste territoire. Le problème avec un incendie, c'est qu'il constitue un désastre qui se pointe relativement lentement, mais qui prend de telles proportions par la suite que soudain il est à votre porte. Il y a eu de longues heures d'attente, puis des moments de terreur pendant que le feu gagnait rapidement du terrain.
Au moment où l'incendie a pris d'immenses proportions, c'est certainement le responsable des opérations, conformément à notre chaîne de commandement, qui a fait l'appel. Dans ce cas-ci, le responsable des opérations était le ministère des Forêts. Le ministère a pris la décision d'appeler les Forces armées, et les militaires sont venus. Mes commentaires sur les mesures d'évacuation et de sécurité se rapportent davantage sur la sécurisation de la zone, une fois les gens évacués.
Le sénateur Forrestall : En général, la vue d'ensemble nous intéresse. Dans notre rapport, messieurs, nous avons recommandé que le gouvernement fédéral dresse une liste des infrastructures communautaires essentielles, des menaces et des difficultés à contrer ces dernières en vue de réunions avec d'autres ordres de gouvernement pour discuter des lacunes et mettre à profit les leçons tirées du passé.
Est-ce qu'Ottawa semble prêt à suivre cette suggestion,c'est-à-dire de se servir de cette base de connaissances comme point de départ?
Le colonel Ellis : Sénateur, je ne peux parler que de ce que fait actuellement la Défense nationale. Avant que je ne m'envole pour l'Afghanistan, il y a environ sept mois, nous avions prévu des agents de liaison en cas d'urgence. Nous avons huit postes permanents pour les opérations nationales dans l'Ouest du Canada. Un major et un capitaine sont affectés en permanence à Victoria et ils assurent la liaison avec le PUP et le BPIEPC.
Dans le cas qui nous intéresse, nous surveillions les feux de forêt depuis la deuxième semaine de juillet environ, pas dans l'attente d'une demande d'intervention, mais certainement pour suivre de près ce qui se passait en Colombie- Britannique. Ces officiers étaient en communication avec le PUP et nous ont avertis qu'une demande allait être faite. Du 2 août, moment auquel nous avons été déployés, jusqu'au 26 septembre, date à laquelle nous sommes partis, nous avons reçu nos ordres directement du service forestier pour ce qui est des mesures à prendre pour combattre les feux. Ils étaient en charge. Une fois que la demande initiale nous est parvenue, nous nous sommes placés sous les ordres des responsables des forêts de la Colombie-Britannique, et c'est par leur entremise que nous avons eu la demande d'intervention de la ville de Kelowna, vers le 22 août. À cette époque, nous étions à Barriere pour combattre les feux de forêt dans cette région. Les responsables ont donné l'ordre d'envoyer des militaires dans la région de Kelowna, et c'est alors que la compagnie B s'est détachée du bataillon 1 PPCLI.
Le sénateur Forrestall : Étiez-vous frustrés d'attendre? Je sais comment nous nous sentions ailleurs au Canada.
Est-ce que votre équipe et vous, en tant que dirigeant militaire, étiez frustrés de voir que vous pouviez apporter votre aide mais que personne ne la demandait?
Le col Ellis : Nous avons essayé de nous en tenir au principe du dernier entré, premier sorti. Je vous dirais, en tant que chef d'état major au quartier général, que, dès le début du mois de juillet, un bataillon était déjà prêt. Nous savions très bien qu'il était possible qu'une demande d'intervention nous parvienne vers le milieu de juillet; nous devions donc nous assurer que tout était prêt, comme nous sommes censés le faire, et nous avons vérifié deux fois plutôt qu'une que tout était prêt. Je ne peux pas dire que nous étions frustrés. Nous étions prêts à répondre à toute demande.
Le sénateur Forrestall : Des responsables provinciaux, nationaux, locaux et des Forces armées se sont-ils réunis par la suite pour discuter des leçons tirées de cette opération? À votre connaissance, y a-t-il eu de telles rencontres?
Le col Ellis : Sur le plan national, nous avons des relations très étroites avec la province de la Colombie-Britannique en raison de la menace d'un tremblement de terre catastrophique dans cette province. Le Plan de contingence Panorama est un plan national que nous, qui sommes dans l'Ouest, devons suivre mensuellement. Nous avions préparé un plan prévoyant la pire éventualité et nous l'avons utilisé pendant cette opération. Pendant que nous étions en route pour la Colombie-Britannique, nous nous sommes référés à ce plan pour déterminer comment procéder. Nous avons appris beaucoup de leçons dans le cadre de cette opération. Nous avons retiré beaucoup de choses du travail que nous avons accompli là-bas avec le PUP.
Nous avons tenu un exercice majeur en février 2004 lorsque nous sommes allés en Colombie-Britannique en compagnie de tous les dirigeants du Secteur de l'Ouest de la Force terrestre régulière et réserve , et avons procédé à une reconnaissance de toute la région. Nous avons rencontré des représentants de la GRC, du PUP et du BPIEPC, ce que nous faisons assez régulièrement d'ailleurs. Nous entretenons d'étroites relations avec la Colombie-Britannique, et nous travaillons d'assez près avec l'Alberta. Nous avons des officiers en Saskatchewan et au Manitoba, mais nous estimons que ces deux provinces ont moins de problèmes, mis à part les inondations qu'a connues Winnipeg en 1997, où nous sommes intervenus. Nous communiquons beaucoup avec eux, mais pas quotidiennement.
Le sénateur Forrestall : Les gens sont-ils moins indifférents maintenant?
M. Gray : Je ne crois pas qu'ils aient jamais été indifférents.
Le sénateur Forrestall : Peut-être vaut-il mieux mettre les pendules à l'heure car un représentant de Kelowna a donné la réponse suivante dans un questionnaire, et je cite :
Il semble y avoir beaucoup d'apathie au sein de notre population en ce qui a trait à la planification des mesures d'urgence en cas de catastrophe.
Nous avons trouvé ça étonnant puisque le questionnaire a été rempli en 2003.
M. Gray : Je devrais probablement en savoir plus au sujet de ce questionnaire, mais je serais déçu si c'était réellement d'indifférence dont il était question.
Le président : En toute justice, ça figure dans les dossiers publics. C'est le sous-chef du service des pompiers qui a fait ce commentaire, et nous ne croyons pas que ce commentaire soit déraisonnable.
M. Gray : Je comprends mieux maintenant que je sais qui a fait ces commentaires. Tant que les gens ne sont pas confrontés à une situation d'urgence, il est très difficile de les faire participer avec enthousiasme à des exercices d'évacuation en cas d'incendie dans les écoles ou ailleurs. Je crois que c'est à ça qu'il faisait allusion.
Le président : Je pense que ce que le sénateur Forrestall voulait savoir, c'est si la population a changé d'attitude.
M. Gray : En tant que collectivité, nous sommes extrêmement aux aguets. Il y a également eu beaucoup de retombées positives. Nous sommes de plus en plus sensibles à ce qui nous entoure.
M. Mattiussi : Pour répondre à votre question concernant les changements, la plupart du travail s'est fait par le truchement de l'enquête Filmon sur la question des interventions en cas d'incendie. Un des changements, que j'ai mentionné dans mon mémoire, est que nous avons demandé d'avoir au COU un agent de liaison avec les Forces canadiennes pour nous assurer un lien direct.
Le sénateur Forrestall : J'aime bien ce type de communication en personne.
Le président : Je vais vous mettre en contexte, parce que vous semblez surpris de l'angle sous lequel certaines de ces questions vous sont posées. Il y a un peu plus d'un an, nous avons entrepris de questionner des membres de toutes les localités du Canada qui comptent plus de 20 000 habitants, dont la vôtre, sur les urgences probables chez eux, sur ce qu'ils avaient pour intervenir, sur leurs lacunes et sur la nature de leur collaboration avec les différents ordres de gouvernement. Nous voulions avoir une idée de l'état de préparation des municipalités canadiennes et des intervenants de première ligne et déterminer s'ils étaient susceptibles de faire appel aux services du BPIEPC, des Forces canadiennes, du SCRS, ou d'autres organismes fédéraux canadiens, au besoin. C'est pourquoi nous vous posons ces questions. En toute franchise, nous voulons évaluer si notre théorie est la bonne, c'est-à-dire qu'il vaut la peine de dépenser une petite somme pour se préparer plutôt qu'une énorme somme plus tard lorsque les mauvaises nouvelles arrivent.
C'est dans ce contexte que nous vous posons ces questions et d'autres.
Le sénateur Day : Monsieur Mattiussi, pouvez-vous nous parler un peu du Centre des opérations d'urgence? Chaque province semble avoir une structure de protection civile différente.
M. Mattiussi : Le Centre des opérations d'urgence a été conçu sur le modèle de celui de la Colombie-Britannique, qu'on appelle le BCERMS, soit le B.C. Emergency Response Management System. Je remarque que M. Paul Bugslag fait partie de votre prochain groupe de témoins; il sera probablement en mesure de vous faire l'historique de ce centre. En gros, il nous aide à établir un plan régional et un groupe régional. Nous avons un plan régional et nous avons réagi à de nombreuses urgences au fil des années, donc nous avons certainement fait nos preuves.
Il y a un directeur des opérations, c'est moi. Le rôle du directeur consiste à prendre des décisions et à communiquer avec les décideurs politiques élus. En situation d'urgence, le directeur essaie de garder la politique en dehors des décisions quotidiennes à prendre.
Il y a ensuite un secteur des opérations et dans notre cas, il englobe le service d'incendie, la GRC, les services ambulanciers, l'hôpital et toutes les personnes qui risquent d'être en première ligne en situation d'urgence, c'est-à-dire tous les travaux publics de la ville.
Il y a aussi un groupe de logistique dont le travail consiste à fournir tout ce dont les intervenants ou la collectivité ont besoin. Si une localité est isolée en raison d'un tremblement de terre, ce groupe devra déterminer si la communauté a besoin de couvertures, d'eau, de nourriture et ainsi de suite. Le groupe de logistique répond à toutes ces questions pratiques.
Il y a une unité de planification qui évalue l'étendue des dommages et qui fait des prévisions pour essayer de déterminer ce qui se passe. Le groupe de planification a produit des cartes, a suivi l'évolution du feu, puis a essayé de planifier d'avance les évacuations. Nous avons procédé à des évacuations sur la recommandation de l'unité de planification.
Comme presque partout, il y a une unité financière qui s'occupe des coûts, parce que nous devons rendre des comptes au public. Il y a aussi la gestion du risque et les communications.
Le sénateur Day : Cela nous aide. S'agit-il d'un groupe de planification municipal? D'après ce que je comprends, les diverses composantes faisaient toutes partie de la municipalité, elles n'y étaient pas extérieures.
M. Mattiussi : C'est une combinaison des deux. Nous avons un groupe régional, parce que les urgences aboutissent rarement entre les mains de la direction municipale.
Le sénateur Day : En aviez-vous un à ce moment-là?
M. Mattiussi : Oui, nous avons toujours eu un groupe régional.
Le sénateur Day : Le Centre des opérations d'urgence était-il donc régional plutôt qu'axé précisément sur Kelowna?
M. Mattiussi : Exactement, et c'est important, parce que lorsqu'une crise se prolonge, on doit être en mesure de faire une rotation de personnel pour tous ces postes.
Le sénateur Day : Le représentant municipal était-il responsable de la planification des opérations régionales?
M. Mattiussi : Oui, dans ce cas-ci, parce que la ville de Kelowna était la ville menacée. Je suis devenu directeur du COU, et le personnel régional relevait de moi. Cela a assez bien fonctionné.
Le sénateur Day : Il y avait pas mal de feux qui faisaient rage, et certains étaient là avant le feu de forêt de l'Okanagan Mountain Park, mais en raison de la menace qu'il représentait pour la collectivité, le feu de l'Okanagan est devenu notre priorité.Avez-vous agi en tant qu'observateur des autres feux ou vous êtes-vous occupé de tous les feux de la région?
M. Mattiussi : Non, ils faisaient rage en dehors de notre région. Le feu de la montagne de l'Okanagan était le seul feu dans notre région. C'était une saison des feux très intense, et je crois que les coordonnateurs du PEP ont demandé à ce qu'une partie de notre personnel d'incendie et l'agent de communications du COU se rendent au feu de Barriere.
Le sénateur Day : Que faisait votre équipe avant que ne survienne le feu dans le parc de l'Okanagan?
M. Mattiussi : LE COU n'a pas ouvert avant que la ville de Kelowna soit menacée. Le feu a pris samedi soir, et dimanche matin, on m'a appelé pour me dire qu'il y avait dans le parc un feu susceptible de menacer Kelowna. À ce moment-là, il n'y avait que trois personnes là-bas; elles étaient en train de s'installer.
Le bureau de commandement a été établi à ce moment-là, et nous sommes allés évaluer le feu. Auparavant, le type de décision que nous devions prendre concernait la nature des demandes provenant du bureau de la commission des feux. Ce bureau nous a demandé de transporter du matériel et des ressources, dont des autopompes, vers Vernon, pour que les gens de Vernon puissent se rendre à Barriere, entre autres.
Le sénateur Day : Vous effectuiez une surveillance, et les forces armées ont indiqué un peu plus tôt qu'elles effectuaient elles aussi une surveillance.
À quel moment avez-vous appelé les forces armées pour vous aider après le début du feu?
M. Mattiussi : Encore une fois je ne suis pas absolument sûr, parce que je ne me suis pas occupé de la lutte contre l'incendie. Les gens de la foresterie ont peut-être appelé les forces armées assez rapidement. Elles sont arrivées au COU et ont demandé une réunion le jeudi soir, si je ne me trompe pas. Il y avait environ quatre jours que tout s'était enclenché, mais le feu ne faisait que commencer à menacer Kelowna. Jusqu'alors, il n'était qu'à l'horizon.
Le sénateur Day : Pouvez-vous me dire à quelle date il a pris dans le parc de l'Okanagan?
M. Mattiussi : Il a commencé le 16 août.
Le sénateur Day : Lorsque vous avez parlé de l'agent de liaison, j'ai eu l'impression que vous vous disiez que les choses n'étaient peut-être pas arrivées aussi vite qu'elles auraient dû arriver du point de vue des forces armées. Il me semble que vous avez dit que les forces armées devaient pouvoir être là rapidement et qu'au moins une partie de ses troupes devrait être sur les lieux dans les 24 à 48 heures suivant un événement d'envergure. C'est probablement une chose que vous avez apprise.
M. Mattiussi : Oui.
Le sénateur Day : Pour une raison ou une autre, la formulation de la demande et la réaction des forces armées à cette demande, sans l'agent de liaison, n'ont pas été aussi rapides qu'elles auraient dû l'être à votre avis.
M. Mattiussi : C'est certain, et en toute honnêteté pour tous ceux qui sont intervenus, le commandant de la foresterie qui s'occupait de l'incident a fait la demande, donc il est clair que la foresterie était en communication avec les forces.
Du point de vue du centre des opérations d'urgence régional, et sachant ce que je sais maintenant, un agent de liaison aurait pu m'informer des autres ressources disponibles. À ce moment-là, je n'ai pas pensé qu'en tant que directeur du COU, je pouvais appeler l'armée.
Le sénateur Day : Colonel Ellis, vous avez été un peu chanceux dans ce cas-là, parce que vous aviez un groupe de réservistes qui s'apprêtait à aller à Wainwright en août, donc il était en attente.Si cela n'avait pas été le cas, auriez-vous réussi à trouverde 500 à 880 réservistes?
Le col Ellis : Je pense que nous avions 870 réservistes là-bas à la fin, qui provenaient de partout dans l'Ouest du Canada. Vous avez raison. Si l'incident était survenu au beau milieu de l'année scolaire ou à n'importe lequel autre moment que juillet ou août, je suis certain que nous n'aurions pas eu autant de personnel. C'est un fait pur et simple, comme je l'ai dit. Comme ces emplois ne sont pas protégés, beaucoup de ces hommes et de ces femmes vont à l'université ou à l'école secondaire, et il est très difficile pour eux et elles de s'en absenter. En Colombie-Britannique, ce sont les premiers que nous pouvons envoyer sur les lieux. Comme je l'ai déjà dit, la tête d'avant-garde d'intervention rapide, une unité de la force régulière de l'Ouest du Canada, est arrivée sur les lieux très rapidement. Pour nous, le problème ne résidait pas tant dans l'envoi de troupes vers la région que dans la formation donnée par le ministère des Forêts. C'est-là où il y a eu engorgement.
Le sénateur Day : Voulez-vous parler de la formation donnée à votre personnel par les gens de la foresterie?
Le col Ellis : Exactement.
Le sénateur Day : Avez-vous fait de la planification depuis? Faites-vous de la formation pour être prêts à vous rendre sur les lieux et éteindre le feu plus rapidement sans avoir à passer par une période de formation offerte par les gens de la foresterie?
Le col Ellis : Bien honnêtement, cette période de formation n'a pas été très longue. C'était fait en 48 heures, ce qui est plus rapide que d' habitude. N'oubliez pas que nous ne formions pas notre personnel à la lutte contre les feux de niveau 5 et 6; nous le formions sur les feux de moyenne envergure et le nettoiement, de sorte que le feu ne revienne pas, qu'il ne se ranime pas derrière et cause des problèmes. Il n'y a pas de formation sur les feux de forêt dans notre formation ordinaire.
Le sénateur Day : Prévoyez-vous de le faire dans l'avenir?
Le col Ellis : Non, sénateur.
Le sénateur Day : Vous allez vous retrouver dans la même situation si vous n'offrez pas de formation sur la lutte contre les incendies.
Le col Ellis : Comme je l'ai dit, nous avons reçu la première demande de nous rendre à Kamloops le 2 août pour recevoir une formation sur la lutte contre les incendies, et nous sommes arrivés en temps voulu. Nous avons suivi la formation au moment où on nous l'a demandé. Après que notre personnel a reçu la formation, le ministère des Forêts a déterminé où nous allions aller. Je dois mentionner qu'au point culminant de la formation, nous avons transporté les experts forestiers à Cold Lake et sur la côte pour de la formation sur le terrain.
Nous avons aussi eu un autre grave problème lorsque nous avons manqué d'uniformes en Nomex, c'est-à-dire d'uniformes d'incendie jaunes à l'épreuve du feu que les pompiers portent. Nous avons dû en envoyer du Manitoba et de l'Ontario, alors que ces provinces avaient leurs propres problèmes d'incendies. Il s'agit d'un problème de logistique et non d'un problème militaire, mais nous n'avions pas accès à l'équipement de base pour la lutte contre les incendies. Nous avons aussi manqué de personnel qualifié pour former nos soldats. C'est en partie ce qui a causé le goulot d'étranglement dans la région de Kamloops.
Le sénateur Day : Vous nous éclairez. Au sujet du personnel que les forces armées ont envoyé, de la force régulière et des réserves, avez-vous envoyé des unités de soutien, de communications, de logistique ou d'approvisionnement ou est- ce que toutes ces personnes ont tout simplement pris une pelle ou un tuyau pour combattre le feu?
Le col Ellis : C'était un mélange, sénateur. Nous avions une très grande unité de soutien, et en fait, nous avons appris une chose que j'ai moi-même apprise lorsque j'étais commandant à Kaboul. Nous avons maintenant une force opérationnelle qui nous permet de laisser des choses au poste de commandement. Nous avons retenu la même chose de notre expérience là-bas. Les réserves ne sont pas arrivées avec beaucoup de soutien. C'étaient des pompiers de première ligne, donc nous avons envoyé environ 500 personnes de l'Ouest du Canada pour leur venir en aide et s'occuper des soins hospitaliers, de la logistique, de la maintenance, du transport de produits pétroliers, et cetera.
Le sénateur Day : Est-ce que ce personnel de soutien venait en aide seulement aux forces armées ou à tout le monde?
Le col Ellis : Il n'aidait que les forces armées.
Le sénateur Day : Vous avez un escadron de communications à Edmonton. A-t-il participé?
Le col Ellis : Oui, de même que les réservistes de la Colombie-Britannique. Ils nous ont fourni le réseau de communications de base. Nous avons utilisé des téléphones cellulaires, des radios à ondes décamétriques et des radios militaires. Nous étions en contact avec la foresterie là où nous utilisions leurs systèmes portatifs. Ça allait bien du côté des communications.
Nous avons beaucoup appris de notre première intervention concernant notre préparation sur le PC Panorama et l'intervention en cas de tremblement de terre. Nos premières troupes sur le terrain se sont rendues à Barriere, et le système de téléphonie cellulaire était en panne parce que les tours avaient brûlé.
Le sénateur Day : Aviez-vous le matériel nécessaire pour utiliser les satellites, les ondes décamétriques et tout le reste?
Le col Ellis : C'est ce que nous avons dû utiliser. Nous espérions utiliser des téléphones cellulaires, parce que c'est plus facile et plus rapide, mais nous avons utilisé les téléphones satellite et les radios à ondes décamétriques fournis par la réserve.
Le sénateur Day : Est-ce que cela s'appliquait à toutes les personnes qui luttaient contre l'incendie ou seulement aux militaires, encore une fois?
Le col Ellis : C'était seulement pour nous, sénateur.
Le sénateur Day : Ne vous semblait-il pas logique que les communications pourraient contribuer à l'effort global, surtout que les tours avaient brûlé?
Le col Ellis : D'après ce que nous avons vu, il n'y avait pas de problème de communications du côté civil. Le problème était de notre côté, parce que nous voulions installer notre réseau de base pour utiliser notre propre matériel militaire et nous assurer d'être en contact avec eux. De mon point de vue, en tant que chef des opérations, je peux vous dire que nous n'avons jamais reçu de demande de nos troupes sur le terrain, et elles étaient pourtant en lien étroit avec les pompiers civils pour assurer de bonnes communications, évidemment. Si la demande en avait été faite, nous aurions pu les aider.
Le sénateur Day : Votre système était-il compatible avec le système que le groupe que M. Mattiussi utilisait?
Le col Ellis : Comme il l'a dit, le plus simple aurait été d'affecter un agent de liaison au poste de commandement. C'est ce qui aurait dû être fait.
Le sénateur Day : Vous ne l'avez pas fait, cependant.
Le col Ellis : Non, nous ne l'avons pas fait. Nous sommes restés au poste de commandement supérieur, qui se trouvait à la caserne de pompiers de Kamloops. C'est là où était notre agent de liaison, et il y avait aussi le PEP à Victoria, où nous avions nos AL. Les commandants sur le terrain étaient en contact étroit avec les autorités locales. À Kelowna, par exemple, le commandant de l'unité de Kelowna, les British Columbia Dragoons, était en communication constante avec le maire et d'autres personnes sur le terrain.
Le sénateur Day : Vos systèmes étaient-ils interopérables? Pouviez-vous vous parler sur le terrain?
Le col Ellis : Avec les téléphones cellulaires et satellites, bien sûr. Par contre, ils ne pouvaient pas nous parler sur le poste radio tactique ni sur le système radio à ondes décamétriques parce que ce sont des réseaux sécurisés. À l'avenir, si une catastrophe survient sur la côte de la Colombie-Britannique, nous allons envoyer un agent de liaison muni d'outils de communications au centre des opérations civil, de sorte qu'il puisse utiliser nos systèmes radio pour leur parler.
Le sénateur Day : Vous communiquez donc avec eux?
Le col Ellis : Oui, sénateur.
Le président : Y a-t-il des représentants du gouvernement fédéral ou provincial qui sont venus vous parler des leçons à en tirer?
M. Mattiussi : Monsieur le président, le rapport Filmon fait état du seul examen qui a été fait, et nous avons certainement fait notre propre bilan, mais nous ne l'avons pas fait à plus grande échelle.
Le sénateur Banks : Monsieur Mattiussi, de quel rapport venez-vous de parler?
M. Mattiussi : Du rapport de l'enquête Filmon.
Le sénateur Banks : Colonel Ellis, nous sommes fiers de vous revoir à Edmonton et nous vous souhaitons un bon retour.
Votre Honneur, monsieur Mattiussi, ma famille et moi avons passé beaucoup de temps dans votre ville au cours des 40 dernières années et nous l'apprécions énormément. Je tiens à vous féliciter de la vie culturelle de votre ville, qui est admirable et qui surpasse de loin celle des autres villes du pays. Je suis ravi de le constater et j'en profite souvent.
Pour revenir à ce que vous venez de dire, qu'est-ce que le PEP de Victoria? Est-ce un organisme de planification des mesures d'urgence provincial? Que signifie l'abréviation?
M. Mattiussi : C'est une question difficile. Je pense qu'elle signifie « provincial emergency program ». C'est l'organisme provincial qui gère toutes les situations d'urgence et qui coordonne l'intervention provinciale, fédérale et locale.
Le sénateur Banks : Colonel Ellis, nous nous interrogeons sur l'intégration des forces de la réserve à la force régulière. Vous avez vous-même vécu à Kaboul et à Kelowna une quasi-intégration des forces de la réserve à la force régulière. Vous avez fait allusion à la piètre réglementation pour protéger l'emploi des réservistes.
Nous avons entendu diverses idées contradictoires de toutes sortes de personnes, y compris de membres de la réserve et de la milice, sur le bien-fondé d'une telle réglementation. Il semble qu'aux premiers stades d'emploi, on ne puisse pas obtenir de poste si on répond par l'affirmative à la question de savoir si l'on fait partie de la réserve.
Est-ce que vous pourriez nous en parler un peu? J'ai cru comprendre que vous aviez une opinion bien arrêtée à ce sujet.
Le col Ellis : Pendant mon séjour en Afghanistan, j'ai travaillé en étroite collaboration avec les forces américaines et j'ai pu comprendre leurs modes de fonctionnement. Les membres des forces de réserve des États-Unis qui combattent en Afghanistan et en Irak jouissent d'une certaine protection juridique qui leur permet d'être assurés d'avoir toujours leur emploi à leur retour au pays après leur mission. Je ne connais pas les modalités détaillées, mais je sais pertinemment que c'est très important pour le moral des troupes déployées sur ce théâtre d'opérations.
Dans le cas qui nous intéresse, comme je l'ai déjà mentionné, le fait que l'opération se déroulait en été a été un cadeau du ciel parce que cela nous a permis de compter sur ces soldats de la réserve. En fait, bon nombre d'entre eux étaient sous contrat avec nous et étaient rémunérés parce qu'ils étaient en attente pour aller à Wainright.
Dans une autre situation, s'il y avait un glissement de terrain ou un tremblement de terre en octobre ou en novembre, je ne pourrais pas vous affirmer que nous pourrions compter sur les membres des forces de réserve. Ceux-ci étaient disponibles durant l'été, mais il ne serait pas nécessairement aussi facile pour eux de se libérer pendant huit ou dix semaines à un autre moment de l'année.
Le sénateur Banks : Est-ce que la présence des forces de réserve est absolument indispensable pour accomplir ce genre de travail lorsque, par exemple, un glissement de terrain se produit en novembre?
Le col Ellis : Je ne vous apprends rien : les forces régulières sont à bout de ressources actuellement. Dans l'Ouest canadien, et je sais que c'est la même chose dans le reste du pays, nous comptons sur la réserve pour nous aider dans ce genre de circonstances. Tous les plans de mesures d'urgence dont nous disposons actuellement, Panorama et Paladin pour les tremblements de terre, font largement appel à la réserve. Nous travaillons en étroite collaboration avec celle-ci. Nous veillons à ce que les forces de réserve jouent un rôle actif dans notre planification et nos exercices ainsi que dans toutes nos autres activités, parce qu'elles formeront une partie importante des troupes qui seront déployées pour les opérations au pays.
Il en va de même lorsqu'il y a tempête de verglas ou inondation. Les membres de la réserve ont été présents lorsque nous avons eu besoin d'eux. Cependant, dans le cas des opérations importantes se déroulant sur une période prolongée, nous les considérons comme des suppléments à nos forces régulières parce qu'il est impossible de garantir leur présence pendant une période aussi longue.
Le sénateur Banks : Si je pose la question, c'est parce que vous avez commandé des troupes qui étaient entièrement intégrées. Nous avons entendu des témoins nous dire qu'il sera peut-être possible de confier des rôles différents aux réservistes lorsque les ressources des forces régulières seront accrues à un point tel que l'on pourra disposer d'une plus grande marge de manœuvre qu'actuellement. On pourrait alors renoncer à les entraîner pour le combat, mais plutôt les former pour des opérations nationales comme la lutte contre les incendies et les interventions en cas de tempête de verglas. Quel est votre point de vue à ce sujet?
Le col Ellis : J'ai participé avec des réservistes à deux missions périlleuses en Bosnie et à une autre plus récente en Afghanistan. Nous avons besoin des forces de réserve à nos côtés et elles doivent être d'abord et avant tout des troupes de combat. Il faut les former pour appuyer les opérations des forces régulières un peu partout dans le monde. Cela fait partie de leur mandat et elles doivent continuer de s'en acquitter.
Il est bien certain qu'on peut aussi songer à les former pour des opérations au pays, comme le travail de pompier forestier de niveau 3 ou la recherche et sauvetage en milieu urbain à l'aide d'équipement lourd pour un tremblement de terre à Vancouver, mais les membres des forces de réserve doivent avoir une formation militaire de base comme troupe de combat. C'est leur principale raison d'être. Je sais que cette formation militaire leur permet, comme pour les membres des forces régulières, d'intervenir dans toutes les situations pouvant se produire au pays. Il suffit de leur dispenser un peu de formation pour une activité et ils pourront faire le travail; il n'est pas nécessaire de confier la tâche à une unité des British Columbia Dragoons spécialement formée pour la lutte contre les incendies, par exemple. Ce ne sont alors plus des militaires; ce sont des pompiers forestiers.
Le sénateur Banks : À cet égard, vous avez indiqué que la capacité de commandement des Dragoons, le régiment local de la réserve, n'était pas tout à fait à la hauteur de la tâche qui lui a été confiée, sans mettre en doute pour autant la compétence des personnes en place. Est-ce exact?
Le col Ellis : Non, sénateur.
Le sénateur Banks : Alors, dites-moi donc ce qu'il est.
Le col Ellis : Le quartier général de cette unité à Kelowna a fait un travail extraordinaire. Le centre des opérations a été mis en place sur-le-champ et nous avons greffé des compagnies de la force régulière, des compagnies de la réserve ainsi que des groupes des forces aériennes et navales à cette organisation.
Le lieutenant-colonel Denis Cyr est le commandant local de la réserve à Kelowna. Son organisation s'est magnifiquement bien acquittée de son rôle. Comme je l'ai déjà indiqué, je faisais la navette à partir de Vernon pour le rencontrer tout en travaillant pour le général Fenton et je puis vous assurer que je n'ai eu aucun problème avec lui. Si ce groupe de la réserve nous avait causé quelque inquiétude que ce soit, nous l'aurions immédiatement remplacé par la force régulière parce que nous devions lutter contre un incendie d'une intensité jamais vue dans la région de Kelowna. En maintenant le lieutenant-colonel Cyr aux commandes, nous ne voulions surtout pas sonner l'alarme. C'était simplement la chose à faire de confier la mission à un commandant local à la tête de troupes locales. Au départ, j'ai eu de nombreuses discussions avec le général Fenton relativement à la performance de ce quartier général qui devait composer avec l'incendie le plus dévastateur à avoir frappé l'ensemble de la région et nous avons conclu qu'il faisait un travail exceptionnel. Le groupe était composé à 95 p. 100 de réservistes avec seulement quelques troupes d'appoint provenant de son personnel de soutien de la force régulière.
Le sénateur Banks : Je me réjouis d'apprendre que je ne vous avais pas bien compris.
Monsieur Mattiussi, j'en reviens à nouveau à la question des communications. Vous allez peut-être penser que nous avons une fixation sur les communications, mais c'est parce que nous avons visité la plupart des villes du pays, y compris la vôtre. Nous avons demandé aux gens de ces différentes villes de répondre à un questionnaire au sujet des premiers intervenants, et le degré d'interopérabilité et d'intercommunication entre les agences de première intervention varie d'un endroit à l'autre. Les communications militaires ont atteint un niveau qui les distingue de tous les autres intervenants, ce qui explique la pertinence de confier la mission à une personne en place. Cependant, lorsque vous vous trouvez dans votre centre des opérations d'urgence, pouvez-vous parler en même temps à vos techniciens d'urgence médicale, à la police, aux services des incendies et aux autres intervenants, ou vous faut-il vous adresser à quatre personnes différentes pour que votre message soit transmis?
M. Mattiussi : Nous n'avions pas de communications intégrées mais cela n'a jamais posé problème parce que le groupe responsable des opérations était formé de gens de la GRC, du service des incendies et des services ambulanciers. Chacun avait son propre système de communication et tous travaillaient littéralement les uns à côté des autres dans le centre de commandement. Bien qu'il n'existe pas nécessairement une fréquence unique pour les communications de tous les groupes que vous avez mentionnés, c'est un aspect qui n'a pas été problématique. Les communications étaient presque aussi compliquées à l'intérieur même du groupe de lutte contre les incendies. Ce groupe était formé de pompiers de bâtiment provenant de toutes les régions de la province. Il y avait aussi des pompiers forestiers et les forces de commandement devaient s'assurer que tous ces intervenants s'intégraient bien les uns aux autres. Cependant, il n'y a pas eu de problème comme tel au chapitre des communications.
Le sénateur Banks : On peut donc dire que tout a bien fonctionné. Je suis Albertain et j'en suis très fier, c'est d'ailleurs pour ça que je pose toujours cette question. M. Mattiussi a mentionné qu'il s'agissait d'un sinistre dont la progression était relativement lente, mais il arrive que les catastrophes se déclenchent plus rapidement. Dans de telles circonstances, il se peut que l'on doive aviser les résidents de quitter leur foyer ou de garder leurs portes fermées, par exemple.
En Alberta, nous avons un réseau d'alerte rapide en cas d'urgence. Les diffuseurs étaient libres d'y adhérer ou non et ils ont tous accepté, à deux exceptions près. Je ne pense pas qu'un tel réseau existe ailleurs au pays.
Notre comité envisage de recommander que la participation à un réseau de ce genre soit une condition obligatoire pour l'octroi d'une licence par le CRTC. Une fois que le système est en place, un responsable peut appuyer sur un bouton et interrompre l'émission en cours, tant à la radio qu'à la télévision, qu'il s'agisse de programmation commerciale ou non, gouvernementale ou autre, dans toute la province de telle sorte que le message soit transmis à toutes les personnes à l'écoute dans les 15 ou 30 secondes suivantes.
Si vous devez aviser les gens de Peachland de rester à la maison en raison de la présence d'un nuage toxique à la suite du renversement d'un camion-citerne, comment pouvez-vous faire passer le message?
Savez-vous si la Colombie-Britannique envisage la mise en place d'un système d'alerte permettant l'interruption des émissions?
M. Gray : Sénateur Banks, je ne suis au courant d'aucune proposition en ce sens, mais à la lumière de mes 43 années d'expérience dans l'industrie de la radiodiffusion et dans les médias, je dois vous dire que je suis d'accord avec l'approche que vous préconisez.
Le sénateur Banks : C'est justement pour cette raison que je vous ai posé la question.
M. Gray : J'ai pensé à cette possibilité pendant que l'incendie faisait rage. Je dois dire que pour la première fois de ma carrière, j'ai vu les médias de Kelowna faire front commun. Ils se sont tous entraidés, plutôt que de demeurer en position de concurrence.
J'accorde beaucoup de crédit à la femme nommée par M. Mattiussi pour gérer le travail des médias; c'est la première fois de ma carrière que je rencontrais quelqu'un capable de contrôler les médias.
Il était surtout difficile de contrôler les médias nationaux qui ont littéralement envahi Kelowna pour présenter leurs reportages. Les règles du jeu ont été établies très clairement dès le départ : les médias obtiendraient ce dont ils avaient besoin; ils pourraient prendre les images qu'il leur fallait; et il y aurait une séance d'information quotidienne. S'ils devaient rendre des comptes à une salle de nouvelles à Toronto ou ailleurs, ils savaient qu'aucun de leurs concurrents ne pouvait leur couper l'herbe sous le pied avec une exclusivité, ce qui les rassurait. Ils savaient aussi que lorsque des éléments nouveaux seraient connus, ils en seraient informés en toute franchise. Dès le départ, les médias ont pu travailler à leur aise en faisant preuve de beaucoup de discipline.
Pour le maire de notre ville, cela était très important parce que je n'ai pas joué un rôle direct dans l'ensemble des activités du centre des opérations d'urgence. En effet, lorsqu'il se produit une situation d'urgence, une politique est établie, un plan est élaboré et vous confiez le tout aux intervenants. Dans ce cas-ci, deux semaines avant l'incendie, le premier ministre avait délégué les responsabilités.
Mon rôle consistait alors à prendre le pouls de la population pour déterminer ce dont elle avait besoin; bien évidemment, on n'avait surtout pas besoin d'un climat de panique. La discipline dont ont fait montre les médias tout au long de la crise a aidé à garder les résidents calmes et bien informés.
Comme nous en sommes à l'ère de l'Internet, ce serait peut-être une bonne idée de pouvoir compter sur une directive ou une réglementation globale, édictée par le CRTC ou toute autre instance, peut-être même sur une base volontaire via VCAB, qui permettrait de fonctionner de cette façon en cas d'urgence.
Je pense qu'Internet est le média de l'avenir. Il existe à Kelowna une petite entreprise associée à Silk FM et à Nick Frost, que vous connaissez je crois, qui s'appelle « Castanet » et dont le site Internet accueillait plus d'un million de visiteurs par jour. On y trouve des informations sur tout ce qui se produit dans la région ce qui a permis de tenir les gens au fait de l'évolution de la situation, de telle sorte que nous n'avons jamais craint la montée de la panique.
Les médias ont cette capacité extraordinaire de mettre un frein à la panique, même lorsque les nouvelles sont peu réjouissantes. En effet, si les gens sentent qu'ils ont accès à toute l'information nécessaire, ils peuvent se discipliner lorsqu'il s'agit de procéder à une évacuation ou à des mesures de ce genre.
Je suis d'accord avec votre suggestion. Je propose que nous préconisions, par l'intermédiaire du programme d'urgence provincial, la création de centres de presse virtuels accessibles via Internet.
Le sénateur Meighen : J'aurais quelques questions pour le colonel Ellis pour m'assurer de bien comprendre l'aspect militaire.
Vous aviez 870 réservistes à votre disposition; était-ce le maximum que vous avez pu trouver ou était-ce tout simplement suffisant pour vos besoins?
Le col Ellis : Nous avons demandé sept compagnies et nous les avons obtenues : quatre compagnies de la Colombie- Britannique, deux de la Saskatchewan et du Manitoba et une de l'Alberta. En Alberta, on mettait l'accent sur l'entraînement à Wainwright parce que nous avions prévu essayer de procéder à l'exercice majeur à la fin août, et ce n'est pas avant le 18 ou le 19 de ce mois que le général nous a dit de concentrer nos efforts là-dessus.
Mais pour répondre à votre question, nous avons effectivement obtenu les troupes que nous avons demandées aux forces de réserve.
Le sénateur Meighen : Pour en revenir à la protection des emplois, je ne suis pas encore certain de l'approche à adopter. Supposons que je sois d'accord avec vous pour qu'on légifère à ce sujet. Par exemple, si je suis programmeur informatique et que je me rends en Afghanistan comme réserviste, mon emploi sera encore là à mon retour. C'est comme ça que l'on procède pour les congés de maternité et ce système semble bien fonctionner. Je ne vois absolument pas pourquoi nous n'offririons pas la même protection aux réservistes.
Que doit-on faire dans le cas des étudiants de l'université et du secondaire qui forment une assez forte proportion des forces de réserve? Non seulement faudrait-il obtenir le concours des employeurs pour l'application de la loi, mais il faudrait également s'adresser aux registraires des universités et aux directeurs des écoles secondaires.
Croyez-vous que cela soit réalisable?
Le col Ellis : Je ne suis pas un expert en la matière. Je peux seulement vous parler de mon expérience avec les membres de la réserve des États-Unis.
Le sénateur Meighen : Y avait-il des étudiants universitaires en Afghanistan?
Le col Ellis : Oui, mais leur système est différent. Ils prennent une année de congé pour les missions outre-mer. Dans le cas qui nous intéresse, je suppose que ces étudiants universitaires, s'ils n'obtenaient pas le soutien que les universités et les écoles de la Colombie-Britannique leur accordent, auraient dû rater leur premier semestre de cours pour servir leur pays.
Le sénateur Meighen : Que se passerait-il si les réservistes devaient s'absenter deux semaines pour un incendie de forêt ou une inondation?
Le revers de la médaille dans notre système, et je crois que c'est la même chose aux États-Unis, c'est qu'un réserviste peut toujours dire qu'il n'est pas disponible pendant ces deux semaines.
Le col Ellis : Bienvenue dans le monde merveilleux des réservistes, sénateur. Ils en ont tout à fait le droit. C'est la même chose avec leur emploi. S'ils ne peuvent pas obtenir deux semaines de congé, alors il leur est impossible de se joindre à nous au sein des équipes de réserve.
Le sénateur Meighen : Est-ce que vous me dites, à la lumière de vos contacts avec les Américains, qu'il leur est possible d'obtenir ces deux semaines de congé?
Le col Ellis : Je ne sais pas comment les Américains gèrent leurs affaires chez eux. Je sais toutefois que les étudiants prennent une année entière de congé.
Le sénateur Meighen : Ce serait la même chose pour les Forces canadiennes.
Le col Ellis : Il faudrait prendre congé.
Le sénateur Meighen : On parle beaucoup du fossé technologique entre les forces américaines et les forces d'à peu près tous les autres pays du monde.
D'après votre expérience outre-mer, existe t-il un tel fossé technologique entre la réserve et les forces régulières? Nous avons souvent entendu parler de réservistes qui n'avaient pas la possibilité de s'entraîner sur les équipements les plus récents et qui devaient ainsi recevoir une formation lorsqu'ils se présentaient sur le théâtre des opérations.
Avez-vous été confronté à ce problème?
Le col Ellis : Non, sénateur. Les réservistes qui travaillaient pour moi occupaient des postes d'infanterie; ils ne faisaient partie de l'infanterie mécanisée. Ils avaient des rôles très précis à remplir et s'acquittaient très bien de leurs tâches. Nous avons des équipements de très haute technologie. Je suis moi-même officier de blindé. Les nouveaux Coyotes sont des véhicules complexes, et c'est la raison pour laquelle on n'en retrouve pas dans les forces de réserve. La formation prendrait tout simplement trop de temps, de telle sorte que les réservistes ne pourraient plus accomplir pour nous bien d'autres tâches qui leur conviennent beaucoup mieux.
Le sénateur Meighen : Êtes-vous en train de dire qu'un réserviste de l'armée n'est pas formé pour faire partie d'une équipe Coyote?
Le col Ellis : Si des réservistes disposent du temps nécessaire, nous allons leur dispenser cette formation. En fait, nous avions des plans à cet effet pour la rotation 15 en Bosnie, celle qui vient tout juste de rentrer au pays. Nous examinions notamment la possibilité de former une compagnie de réservistes utilisant des véhicules blindés légers de haute technologie pour participer à ces opérations, parce que nous voulons y déployer uniquement des réservistes. Nous avions un plan en ce sens et je suis convaincu que cela aurait produit de bons résultats.
Le sénateur Meighen : J'aurais juste une dernière petite question à poser aux membres civils du groupe. Faut-il croire que vous êtes satisfaits de la manière dont fonctionne le système au pays et du fait que c'est au gouvernement provincial de demander l'aide des forces armées?
Dans l'affirmative, croyez-vous que le gouvernement provincial a intérêt à retarder cette décision, étant donné qu'une fois qu'il l'a prise, il doit ensuite en faire les frais, littéralement et au figuré?
M. Mattiussi : Sénateur, le système a fort bien fonctionné. J'estime que les ressources étaient là quand nous en avons eu besoin. Ce que j'ai dit au sujet de la possibilité de déployer les forces plus tôt pour faire des évacuations tenait davantage du scénario d'un « monde parfait ». Une situation d'urgence pourrait ne même pas vous en laisser la possibilité.
En réponse à votre question, j'estime que le système en place comporte les freins et contrepoids qui s'imposent, ce qui permet d'éviter au directeur du centre des opérations d'urgence de faire appel, en plein milieu d'une crise, au Secteur de l'Ouest, et j'estime que ces freins et contrepoids sont essentiels.
Le sénateur Meighen : Comme autre exemple, le maire d'une ville ne fait pas appel à l'armée pour déneiger les rues. Comme je suis originaire de Toronto, je peux me permettre de le dire.
M. Gray : Personnellement, je le fais durant les années électorales.
Le sénateur Meighen : Je suis convaincu que c'est la raison pour laquelle on continue de vous réélire.
Le sénateur Stollery : Je me rappelle quand le maire de Toronto a paniqué et a fait venir les forces armées. La plupart d'entre nous avaient trouvé cela pas mal ridicule. Aujourd'hui, Toronto est balayée par une tempête de neige qui, selon ma voisine qui a 90 ans environ, est la pire qu'elle ait vue en 20 ans.
Le colonel Ellis a parlé d'un éventuel séisme. Je suis de Toronto, et je sais que la côte Ouest est une zone de séismes. Pourriez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet? Quelqu'un suit-il la situation constamment? Vous m'avez donné l'impression que ce genre de problème éventuel est surveillé. Pouvez-vous nous en dire un peu plus?
Le col Ellis : Il existe au ministère un plan national appelé POC Panorama, c'est-à-dire le Plan opérationnel de contingence Panorama, qui traite plus particulièrement de l'éventualité d'un important séisme sur la côte Ouest. Il est mis à jour chaque année. Il est dirigé par l'État-major interarmées à partir de l'administration centrale, à Ottawa, et le Secteur de l'Ouest de la Force terrestre a un sous-plan appelé POC Paladin, qui représente son intervention en fonction de ce plan.
Comme je l'ai dit, nous avons mené en février dernier un exercice dans le cadre duquel nous avons fait intervenir la Marine et l'Aviation à nos côtés. Nous avons voyagé dans tout l'ouest de la Colombie-Britannique, de Chilliwack à Victoria en passant par Vancouver, pour y rencontrer les planificateurs des mesures d'urgence. Nous avons rencontré toutes sortes d'autres personnes, y compris des civils, et nous avons discuté de ce que pourrait être notre réaction à un tremblement terre catastrophique. Tout ce que nous pourrons faire, chez les militaires, pour nous préparer à offrir de l'aide sera utile. C'est pourquoi j'ai dit que, lorsque nous avons buté contre quelques obstacles durant les incendies de forêt en Colombie-Britannique, nous avons fait appel au plan de communication pour le POC Paladin. Nous nous sommes servis de toute l'information réunie dans le cadre de ces travaux pour surmonter le problème.
Le sénateur Stollery : Le centre prévu par le plan en cas de séisme se trouve-t-il à l'administration centrale, à Ottawa, alors que le centre régional est situé à Victoria?
Le col Ellis : Vous parlez des militaires?
Le sénateur Stollery : Oui, des militaires.
Le col Ellis : Tout se ferait à partir du quartier général d'Edmonton.
Le sénateur Stollery : Qu'arriverait-il s'il y avait un séisme cet après-midi? Quels services d'intervention d'urgence comportant un rôle pour les militaires seraient fournis?
Le col Ellis : La province en ferait habituellement la demande au solliciteur général, qui la transmettrait aux services compétents. Le BPIEPC prendrait l'initiative, transmettrait la demande aux militaires qui y donneraient suite. Nous avons à Victoria des agents de liaison permanente qui travaillent avec le Bureau de protection civile. Ils travaillent au jour le jour, selon les besoins. En fait, le processus est très analogue à ce qui s'est passé quand nous avons reçu une demande, durant les incendies de forêt. Nous examinons la situation, faisons la planification, fixons toutes les échéances, déterminons l'intervention qu'il convient de faire et agissons en conséquence.
Le président : Colonel, vous avez dit : « Bienvenue dans le monde des réservistes ». Je sais que c'était sous l'impulsion du moment.
Est-ce un problème avec lequel vous êtes constamment aux prises ou est-ce un problème que vous devez contourner?
Nous sommes ici pour apporter des changements. Aidez-nous, fort de votre expérience, à comprendre quels changements il faudrait apporter pour utiliser les réservistes autrement.
Le col Ellis : Ce n'est pas une question à laquelle il est facile de répondre, monsieur. J'ai eu des réservistes sous mes ordres dans le cadre d'opérations tant ici qu'à l'étranger. Pour moi, les forces de réserve représentent un énorme bassin de ressources à exploiter. Malheureusement, je n'ai jamais été réserviste. Je ne peux donc pas me mettre dans leur peau, mais je sais que beaucoup de ceux avec lesquels je travaille et auxquels je me fie ont deux maîtres : un maître civil et un maître militaire.
Le président : Nous en sommes conscients. Des suggestions de changement vous viennent-elles à l'esprit?
Le col Ellis : J'aimerais que les réservistes bénéficient d'une certaine forme de soutien de manière à pouvoir quitter leur emploi civil pour travailler dans les forces, au besoin. Je ne crois pas qu'un pareil système soit en place actuellement, et plusieurs réservistes ont des difficultés en raison de cette situation.
Comme je l'ai dit, je ne crois pas que nous aurions eu à notre disposition un si grand nombre de réservistes pour cette opération intérieure si ce n'avait pas été l'été. Je ne crois tout simplement pas qu'ils auraient pu retourner à leur emploi après s'être absentés pendant tant de temps pour lutter contre les incendies. Il était commode qu'ils soient disponibles durant l'été.
Le sénateur Day : Pourriez-vous nous expliquer le commentaire que vous avez fait tout à l'heure au sujet de difficultés causées par la sélection des réservistes de classe c?
Le col Ellis : Dans toutes les opérations intérieures, les réservistes travaillent sous un contrat de service de classe c, la même chose que ce que nous utilisons lors de déploiements internationaux. Ainsi, ils ont droit à une pension s'ils sont blessés, surtout ceux qui sont affectés à des opérations intérieures à risque élevé.
Au début, quand le SOFT a commencé à embaucher des réservistes, nous avons fait la sélection selon les critères habituels, comme vous le feriez pour un déploiement à l'étranger, qui incluent trois mois de formation et quelques semaines de paperasse. On procède à des examens médicaux complets et on fait des radiographies panoramiques des dents, ce qui prend du temps. Nous avons consulté les autorités nationales, ici à Ottawa, qui nous ont permis de laisser tomber un certain nombre des exigences appliquées au service de classe c que nous utiliserions pour le déploiement à l'étranger afin de pouvoir utiliser les réservistes plus vite dans des situations d'urgence au Canada. C'est là le problème initial que nous a posé cette classe.
Le sénateur Day : Ne faites-vous pas ce genre d'examens médicaux pour vos réservistes habituels de classe a qui ont une soirée d'instruction par semaine?
Le col Ellis : Ils y sont effectivement parfois soumis, monsieur, mais il faut suivre une liste de contrôle particulière pour les réservistes de service de la classe c avant de pouvoir les faire passer de la classe a à la classe c. Comme je l'ai dit, nous avons commencé à faire les examens médicaux qui prennent du temps, mais nous les avons réduits au minimum. L'examen confirme qu'ils sont médicalement aptes et prêts à être déployés. Par conséquent, ils sont dans la classe c. Je ne suis pas trop sûr de leur solde, j'ignore si des primes y sont ajoutées, mais les prestations de pension sont certes ce qu'il y a de plus important. S'ils sont blessés, ils auront droit aux prestations.
Le président : Monsieur le maire, nous avons l'impression que les habitants de Kelowna en ont beaucoup appris au sujet des situations d'urgence et de la façon d'y réagir avec efficacité.
Nous aimerions ce que ce savoir soit conservé et transmis à d'autres collectivités pour qu'elles n'aient pas à passer par le difficile apprentissage que vous avez vécu.
Nous avons l'impression qu'exception faite du rapport provincial, il n'existe pas de liste de vérification qu'on pourrait se procurer facilement s'il y avait un autre incendie de cette nature.
Quelqu'un vous a-t-il approché pour décrire votre expérience de manière à en faire profiter d'autres collectivités qui pourraient se retrouver dans la même situation?
M. Gray : Monsieur le président, je vais faire quelques observations brèves, après quoi M. Mattiussi en fera peut- être lui aussi. Tout d'abord, l'enquête Filmon a été utile en ce sens parce que tout a été passé au microscope, non seulement l'incendie que nous avons combattu, mais tous les incendies.
Il ne faut pas oublier que, même si nous estimons savoir comment réagir à une situation d'urgence, il pourrait bien ne pas s'agir d'un incendie. Comme l'a dit M. Mattiussi, nous avions un avantage dans ce cas particulier, du fait que, bien qu'il se soit alimenté lui-même pendant plus d'un mois, nous étions avertis plusieurs jours à l'avance de sorte que nous pouvions vraiment planifier. Ce n'aurait pas été le cas s'il s'était agi d'un séisme.
Le président : Sauf votre respect, ça l'aurait été. Après avoir vécu quelques séismes, les gens font aussi de la planification en fonction des leçons tirées. Notre façon d'envisager l'avenir est que le Canada devrait commencer à répertorier ces événements pour que nous puissions en tirer des leçons et être mieux préparés pour le prochain. La Colombie-Britannique n'est pas la seule à avoir des feux de forêt.
M. Gray : Le programme provincial d'intervention en cas d'urgence de la Colombie-Britannique est excellent. Il dit quoi faire en cas d'urgence. Il définit le cadre d'organisation d'un centre d'opérations d'urgence, montre comment le doter de personnel et où trouver les ressources disponibles pertinentes. Le programme énumère divers matériels et pièces d'équipement dont vous aurez besoin selon le type de situations d'urgence et montre comment procéder à des essais de manière à être bien préparé.
Nous organisons souvent des exercices concernant notre aéroport, qui est international. Même si nous sommes une petite localité, nous avons le onzième aéroport au Canada en termes d'achalandage, de sorte que nous tenons régulièrement des exercices pour être prêts à faire face à ce qu'on pourrait appeler des situations d'urgence génériques.
Quant au partage de l'information, monsieur Mattiussi, notre chef du service des incendies et d'autres ont donné des conférences un peu partout pour faire profiter d'autres localités de ce que nous avons appris. Elles sont maintenant beaucoup plus conscientes que, si une catastrophe peut se produire dans un endroit merveilleux comme Kelowna, elle peut frapper n'importe où.
Je vais laisser M. Mattiussi faire des observations parce qu'il était sur la ligne de front, et je suis sûr qu'il peut vous dire à quel point nous serons bien préparés pour la prochaine situation d'urgence.
M. Mattiussi : La formation et la liste de points à vérifier existe naturellement et elles sont fournies par le gouvernement provincial. Nous n'avons pas inventé tout ce qui s'est fait à Kelowna. Tout ce que nous avons, nous l'avons obtenu de programmes et d'information venus de la province. Pour ce qui est de préparer la collectivité, je reviendrais peut-être à la question posée tout à l'heure par le sénateur Forrestall au sujet de l'apathie. L'administration locale ressemble à tous les autres ordres de gouvernement, et la planification d'urgence est plutôt vue comme secondaire. Il est difficile d'organiser des pratiques quand il n'y a pas de catastrophe. Il est difficile de soulever l'enthousiasme, de se mettre en situation parce qu'en fin de compte, ce n'est qu'un exercice.
Par contre, nous avons trouvé particulièrement utile le fait que nous ayons eu des pratiques, que tous dans la salle aient su ce qu'ils avaient à faire et qu'en bout de ligne, ce qui primait en réalité, c'était que la communication se fasse. Ce fut une série d'événements de résolution de problèmes, la dimension même de la situation qui est la plus difficile à cerner.
Nous avons eu notre enquête Filmon, mais après avoir vécu une catastrophe majeure, une des choses qu'on apprend rapidement, c'est que toute la question de la responsabilité vous limite dans la capacité de partager chaque détail de chaque situation d'urgence. Malheureusement, nous vivons dans une société où tout est judiciarisé, une réalité avec laquelle il faut aussi composer.
Bien qu'il n'y ait pas de programme national visant à connaître par le menu détail ce que nous avons dû vivre, il existe des programmes au niveau provincial qui font en sorte que chaque localité peut au moins faire de la planification d'urgence.
Le sénateur Nolin : Colonel, les Canadiens vous remercient d'un travail bien fait à Kaboul. Je dois vous transmettre les nombreux remerciements et toute l'admiration de collègues d'autres pays membres de l'OTAN qui faisaient partie d'une délégation qui est allée à Kaboul pendant que vous y étiez. Ils ont été impressionnés par votre esprit d'ouverture et par le soutien que vous leur avez fourni tout au long. Je vous en remercie beaucoup.
Nous croyons savoir que les autorités canadiennes, britanniques et américaines participeront à un énorme exercice de protection civile appelé TOPOFF afin de tester la réaction internationale à une attaque terroriste.
Pouvez-vous nous en parler et dire au comité comment cela se passera?
Le col Ellis : Malheureusement, sénateur, j'étais à l'extérieur pendant sept mois et je l'ignore. J'étais ici en tant que chefd'état-major quand ils s'apprêtaient à faire l'exercice TOPOFF, mais qu'il a été annulé, il y a dix-huit mois presque. Si l'exercice prévu est le même que le premier, il sera dirigé par la section nationale du J3 Continental qui relèverait directement du SCEMD. Les forces se disperseront et s'exerceront régionalement à assurer des liens, mais je n'en sais pas plus.
Le sénateur Nolin : Il aura probablement lieu ce printemps-ci, en 2005, et nous aimerions en savoir plus à ce sujet.
Le col Ellis : Vous devez rencontrer le général Beare, commandant du Secteur de l'Ouest de la Force terrestre, la semaine prochaine. C'est mon patron. Comme je l'ai dit, j'échappe à son contrôle depuis sept mois. Il pourra répondre à cette question. Son personnel des opérations intérieures participera de près à cet exercice.
Le président : Au nom du comité, j'aimerais vous remercier vivement. Nous vous savons gré d'avoir pris la peine de venir ici et de nous avoir donné l'occasion d'en apprendre un peu sur ce que vous avez vous-même appris. Je suis sûr que ce n'est pas la même chose que de le vivre, mais cela nous sera utile pour recommander au gouvernement fédéral des mesures utiles et productives qu'il pourrait prendre dans ce contexte et sur quoi il devrait concentrer ses efforts pour faire en sorte que nous ayons une société plus sûre et que nous fassions une utilisation plus judicieuse des ressources fédérales, provinciales et municipales quand nous sommes confrontés à de pareilles situations d'urgence.
Au nom du comité, je vous remercie beaucoup d'être venu. Nous vous en sommes très reconnaissants et nous prévoyons vous revenir avec un autre questionnaire, cet hiver.
Nous poursuivons notre étude de la protection civile. Nous accueillons, au sein du nouveau groupe de témoins, M. Ronald Martin, coordonnateur de la Planification d'urgence de la Ville de Vancouver, M. Bob Bugslag, directeur général du Programme d'urgence provincial du gouvernement de la Colombie-Britannique, et M. Paul Crober, depuis août 2002 directeur régional pour la Colombie-Britannique et le Yukon, Secteur de la gestion des urgences et de la sécurité nationale du ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile du Canada.
Messieurs, je vous souhaite la bienvenue. Nous croyons savoir que vous avez chacun une brève déclaration à nous faire. Vous avez la parole.
M. Bob Bugslag, directeur général, Programme provincial des mesures d'urgence provincial, Gouvernement de la Colombie-Britannique : J'ai fourni de la documentation et un certain nombre de diapositives. Je vais vous parler de quelques-unes de ces diapositives.
Les principes de gestion des urgences sont tels que les administrations locales sont les premières responsables de la santé et de la sécurité de leurs habitants. S'il faut réagir à des situations d'urgence selon une approche tous risques, la province les aide. Si la province elle-même a besoin d'aide, elle s'adresse alors au gouvernement fédéral.
La Colombie-Britannique a une structure de gestion des situations d'urgence très bien établie. À la page 1, vous pouvez voir que les dirigeants du gouvernement et les hauts fonctionnaires, jusqu'au Cabinet du premier ministre, sont très coopératifs en ce qui concerne la gestion d'urgence. Ils participent intensément au processus provincial.
La Colombie-Britannique est formée de six régions, que vous trouverez au haut de la page 2. La province a une superficie de 950 000 kilomètres à peu près, soit l'équivalent des États réunis de la Californie, de l'Oregon, de Washington et de l'Idaho. Elle compte une population de 4,3 millions contre une population de 51 millions pour les États réunis. La façon dont nous assurons la prestation de services de gestion des urgences en Colombie-Britannique sera donc considérablement différente de celle de nos voisins.
En Colombie-Britannique, nous avons adopté une structure de gestion des mesures d'urgence fondée sur le SCI, semblable à ce que l'on retrouve dans tous les États des États-Unis et dans toutes les compétences frontalières, y compris le Yukon et l'Alberta. Nous sommes en mesure d'intervenir immédiatement dans toute la province. Notre système d'intervention TEAMS permet de déployer 120 employés provinciaux dans nos centres de mesures d'urgence.
Pour ce qui est de la gestion des mesures d'urgence, je dispose d'un personnel de 65 employés à plein temps, soit l'équivalent du nombre d'employés que l'on retrouve dans les six autres provinces et trois territoires combinés. Les dangers et les catastrophes sont nombreux en Colombie-Britannique si bien que nous disposons d'une structure de mesures d'urgence très solide dans notre province.
La page 3 décrit le modèle retenu en Colombie-Britannique. Nous utilisons ce qui s'appelle une structure de réaction intégrée, soit une structure intégrée au plan fonctionnel qui englobe les ressources du gouvernement local, du gouvernement provincial et du gouvernement fédéral. Elle fait aussi intervenir les grands services publics ainsi que les Premières nations, ce qui permet de coordonner et d'intégrer l'intervention en cas de dangers, d'urgences et de catastrophes.
Nous disposons également dans la province de 13 000 bénévoles qui appuient la gestion des mesures d'urgence et qui représentent une ressource exceptionnelle en cas de tempêtes et d'inondations d'importance, comme nous en avons connues en 2003.
Pour ce qui est de la plupart de nos initiatives, si vous regardez la partie supérieure de la page 4, vous pouvez voir que nous nous appuyons sur une étude faite par la FEMA au sujet de toutes les urgences et catastrophes survenues dans le monde entier. Urgences et catastrophes posent plusieurs problèmes en ce qui concerne les communications, l'ambiguïté quant aux pouvoirs, l'intervention imprévue des médias et l'appel à la participation de ces derniers. La plupart des initiatives que nous prévoyons en Colombie-Britannique depuis trois ou quatre ans visent à régler ces problèmes.
L'expérience ne fait pas de cadeau, elle vous met d'abord à l'épreuve et vous devez en tirer les leçons après coup. Malheureusement, en Colombie-Britannique, la structure de gestion de mesures d'urgence est très souvent mise à l'épreuve.
Comme vous pouvez le voir à la dernière diapositive de la page 4, mon centre a reçu près de 250 000 appels l'année dernière. Nous avons réagi à 6 600 incidents d'urgence, dont 1 000 opérations de recherche et sauvetage. Venez dans notre belle province, offrez-vous le luxe de vous perdre et nous vous retrouverons. Les occasions de pratiquer et d'établir une structure solide ont été nombreuses.
La page 5 dresse la liste des urgences prioritaires. Grâce aux leçons tirées de la tempête et des inondations de 2003, de la grippe aviaire et des événements d'importance survenus dans les provinces, nous bénéficions en Colombie- Britannique d'un appui très solide de la part de notre ministre et du bureau du premier ministre en ce qui concerne la gestion des mesures d'urgence.
La province a pris quelques initiatives clés. Notre structure est bien établie et nous avons ajouté du personnel. Comme je l'ai indiqué plus tôt, 65 employés à plein temps travaillent dans ce programme en Colombie-Britannique. Le centre est capable de réagir immédiatement; du personnel d'autres ministères est formé pour venir dans ces centres en cas d'urgence. Nous travaillons en collaboration étroite avec les représentants du gouvernement local. Nous avons reçu 500 000 $ pour former des représentants du Justice Institute of B.C. Nous faisons des exercices des plans prévus pour tous les dangers, urgences et catastrophes avec des représentants du gouvernement local et du gouvernement fédéral. Nous avons versé des subventions au gouvernement local, nous utilisons un programme qui vise tous les dangers et nous examinons des stratégies d'atténuation afin de prévenir d'autres catastrophes.
Nous nous intéressons en fait à ce que je décrirai comme une évolution de la gestion des mesures d'urgence; nous passons des urgences qui visent à protéger des biens et à sauver la vie à des urgences davantage économiques comme la grippe aviaire, le SRAS et le terrorisme dont les impacts se font ressentir à l'échelle nationale et internationale. Notre programme est conçu pour s'adapter à ces nouveaux genres de dangers auxquels nous sommes régulièrement confrontés.
Selon moi, la Colombie-Britannique dispose de l'OMU la plus forte du pays. J'ai été déçu de voir que nous n'avions pas été consultés lors de la première étape de votre étude et nous sommes heureux d'y participer maintenant.
Une stratégie nationale de mesures d'urgence pose un problème vu que les provinces et les territoires possèdent des capacités fort différentes. Il est très difficile de proposer un programme national et de s'attendre à ce que les provinces viennent l'appuyer en raison de différences au niveau des capacités, des dangers et des situations.
Pour ce qui est de la structure fédérale vue dans une perspective provinciale, j'aimerais qu'un responsable soit prévu pour être en mesure de régler le problème que pose l'ambiguïté des pouvoirs au sein du gouvernement fédéral.
Dans la structure provinciale, le programme provincial des mesures d'urgence assure la coordination au niveau provincial; on parle d'un guichet unique. Face à tous les dangers et à l'évolution des urgences, la présence d'un décisionnaire est essentielle et j'aimerais bien qu'on y arrive du côté fédéral.
Le ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile est bien placé pour traiter des urgences et des catastrophes, mais l'ambiguïté relative aux questions de pouvoirs — lorsqu'il faut traiter avec d'autres ministères fédéraux —- continuera de poser problème à moins que les ministères ne disposent de pouvoirs au sein de leur propre hiérarchie qui leur permettent de prendre des décisions. Nous avons été bien sûr témoins de ce problème en Colombie- Britannique lors de la grippe aviaire qui s'est déclarée l'année dernière dans la vallée du Fraser. L'approche adoptée était très compartimentée et c'est pourquoi j'aimerais que l'on adopte une telle solution au niveau fédéral.
Pour ce qui est des attentes générales de notre province et de ce qu'elle espère du gouvernement fédéral, je dirais que nous travaillons de très près avec Paul Crober, directeur pour la Colombie-Britannique et le Yukon, au niveau de la réaction et de la planification tous-risques.
Les responsables d'Ottawa, les responsables nationaux, et les bureaux régionaux, ont besoin de davantage de pouvoirs afin de faire participer d'autres intervenants fédéraux. L'approche compartimentée est très solide dans de nombreux secteurs du gouvernement fédéral et j'aimerais bien sûr une approche plus intégrée avec la province.
Les améliorations apportées au programme AAFC doivent refléter l'évolution des urgences et des catastrophes, comme l'ESB, la grippe aviaire et le SRAS. Tous ces facteurs doivent être pris en compte. La stratégie nationale d'atténuation qui vise à dépenser un dollar aujourd'hui pour en économiser éventuellement trois ou cinq me paraît tout à fait sensée. La province met en place une telle stratégie d'atténuation et j'aimerais qu'elle soit entièrement appuyée par le gouvernement fédéral également.
J'ai quelques mots à dire au sujet de notre structure provinciale. Nous sommes surtout tributaires de réalitésnord- sud. Il suffit d'examiner nos principaux services publics comme les gazoducs et le réseau électrique, pour savoir que cet aspect nord-sud compte plus pour nous que les réalités est-ouest. Les montagnes Rocheuses en sont essentiellement la cause, si bien que les partenariats que nous avons avec des compétences frontalières comme les États de Washington, de l'Idaho, du Montana et de l'Alaska sont essentiels quant à la façon dont nous assurons la gestion des mesures d'urgence dans la province.
Au moment de la tempête en 2003, 1,3 millions d'internautes par jour ont consulté notre site Web, www.pep.bc.ca. Tout de suite après les tsunamis, pendant tout un mois, nous avons eu en moyenne 100 000 visites par jour sur notre site Web.S'il se passe quelque chose dans notre province et que vous voulez en savoir davantage sur la gestion des mesures d'urgence en Colombie-Britannique, vous n'avez qu'à consulter notre site Web.
Ce qui est encore plus difficile que la planification desmesures en cas d'urgences et de catastrophes, c'est de pouvoir expliquer pourquoi on ne les a pas prévues. Je crois que la Colombie-Britannique est bien préparée pour faire face aux urgences et catastrophes.
M. Paul Crober, directeur régional pour la Colombie-Britannique et le Yukon, Secteur de la gestion des mesures d'urgence et de la sécurité nationale : Nous sommes responsables des bureaux de Victoria et de Vancouver et représentons le bureau régional le plus important. Mon exposé décrit les directions de l'organisation, les fonctions, les urgences récemment survenues, les relations avec les intervenants, les améliorations opérationnelles prévues et autres points.
J'en arrive à la troisième diapositive. Sous le SMAP, soit Paul Kennedy auquel vous avez, j'en suis sûr, parlé à plusieurs reprises, nous faisons partie des opérations DG. Si vous passez à la page 4, vous pouvez voir dans les opérations DG les directeurs et les bureaux régionaux. Vous pouvez voir également le centre des opérations du gouvernement, les plans d'analyse d'avertissement des incidents et la cyberanalyse. Une unité de coordination régionale nous aide à la DG pour toutes les fonctions administratives.
Nos propres organisations sont énumérées à la diapositive 5. Je crois que nous représentons la plus grande des régions SGMUSN; nous avons quatre employés à Victoria et deux à Vancouver. Nous avons un directeur régional, un directeur adjoint régional et un agent des opérations, un agent d'administration financière à Victoria, un agent de l'infrastructure essentielle à Vancouver et un agent des communications. Nous sommes l'un des cinq bureaux du pays à être doté d'un service de communications, c'est-à-dire, les affaires publiques, l'information du public, et non pas les télécommunications.
Si nous avons un bureau à Victoria et à Vancouver, c'est parce que le gouvernement provincial siège à Victoria, si bien que mon bureau principal doit s'y trouver. Tous les autres ministères du gouvernement, plus la marine et l'aviation, qui se trouvent sur l'île, tous les autres ministères gouvernementaux dont nous assurons la coordination se trouvent à Vancouver; en fait, au centre-ville de Vancouver pour la plupart et c'est la raison pour laquelle nous avons également un bureau là-bas.
Notre travail consiste essentiellement à offrir et coordonner des programmes comme PCPU, AAFC, CBRN, HUSAR, Recherche et sauvetage en milieu urbain à l'aide d'équipement lourd, à participer au développement des capacités et à réagir aux situations d'urgence, ce qui entraîne l'activation du centre fédéral des opérations. Nous participons à l'éducation et à la formation en matière de protection civile, à des forums publics et nous deux siégeons actuellement au sein du Emergency Preparedness for Industry and Commerce Council (EPICC). Nous allons bientôt y revenir. Nous représentons le gouvernement fédéral d'un point de vue de gestion générique des mesures d'urgence dans toutes les phases habituelles d'atténuation, de protection, d'intervention et de récupération.
Nous avons une diapositive sur le PCPU. La partie la plus importante, bien sûr, ce sont les 50 p. 100 de la contribution fédérale à ce programme. Pour cette année en particulier, 410 000 $ sont affectés à la Colombie- Britannique, ce qui représente une augmentation par rapport à l'année dernière, et 156 000 $ sont affectés au Yukon. Presque tous ces fonds reviennent aux municipalités.
Nous avons une diapositive sur FACTS, système de suivi financier, qui est mis au point en Colombie-Britannique grâce aux fonds fédéraux et qui devrait être appliqué à l'échelle du pays pour que AAFC et éventuellement PCPU puissent faire l'objet d'un suivi informatisé. Le programme provincial des mesures d'urgence met ce système au point grâce à notre financement.
Les incendies de forêt en Colombie-Britanniqueen 2003 représentent la situation d'urgence la plus importante à laquelle nous ayons participé. Le colonel Ellis vous a parlé de la participation militaire et comme vous le savez bien, les militaires peuvent travailler directement avec la province.
Mon bureau a assuré la coordination de tous les autres ministères. Le PUP n'a pas eu besoin d'aide, contrairement au service forestier de la Colombie-Britannique, comme nous avons pu nous en apercevoir au fur et à mesure. Nous avons assuré la coordination de la Garde côtière, d'Industrie Canada, d'Environnement Canada, de RHDC, tel que ce ministère existait auparavant, et de plusieurs autres dont je peux vous parler par la suite si vous le souhaitez.
L'Agence canadienne d'inspection des aliments a joué un rôle clé au moment de la grippe aviaire, mais notre bureau a indiqué qu'il s'agissait d'une situation d'urgence exigeant l'intervention à la fois de la province et des municipalités. Notre recommandation a été suivie grâce à l'influence de la province, comme vous le savez déjà.
La diapositive suivante explique nos rapports avec nos partenaires. Nous participons à toutes les grandes conférences qui portent sur la gestion des mesures d'urgence et la sécurité. Nous participons à plus de 25 comités relatifs aux mesures d'urgence ou à la sécurité ou de groupes équivalents en Colombie-Britannique, au Yukon et dans l'État de Washington.
Je préside le Security and Safety Advisory Committee for Pacific Council, SSAC, qui a plusieurs sous-comités : la gestion des mesures d'urgence, le PFCEMS, soit le Pacific Federal Council Emergency Management Subcommittee; la sécurité intérieure; les agents de sécurité désignés et l'IMOC-P, qui est le Comité interministériel des opérations maritimes pour le Pacifique, présidé actuellement par le chef d'état-major de la marine. Auparavant, il était présidé par Mme Bev Busson, qui est actuellement sous-commissaire de la GRC.
Nous avons des rapports avec le district régional de Vancouver et banlieue. J'y ai mon représentant qui est agent de l'infrastructure essentielle. Il est membre du REPC, soit le Regional Emergency Planning Committee, du JELC, soit le Joint Emergency Liaison Committee, et de plusieurs autres organisations.
Pour ce qui est de la coordination transfrontalière, nous sommes membres de PNWER, soit la Pacific Northwest Economic Region; de CREW, soit le Cascadia Region Earthquake Workgroup; et de WREMAC, soit le Western Region Emergency Management Advisory Committee. Il s'agit des quatre États qui entourent la Colombie- Britannique et le Yukon et qui comprennent des représentants provinciaux, d'État et fédéraux de la Colombie- Britannique du Yukon, y compris la FEMA, soit la Federal Emergency Management Agency, région 10.
À la page 12, vous pouvez voir le groupe des opérations fédérales, qui est censé être physiquement ou virtuellement situé dans la province, ce qui se passe en cas d'urgence. Cette structure s'appuie sur l'ICS, soit le système de commandement en cas d'incident.
Je ne sais pas vraiment jusqu'à quel point vous êtes informés à ce sujet, mais le gouvernement fédéral veut passer au système de commandement en cas d'incident par l'entremise de SPPCC. C'est relativement récent. Je ne sais pas combien de fois vous avez interrogé des représentants de SPPCC depuis octobre, mais c'est un objectif qui ne cesse de changer; la formation du personnel opérationnel, du personnel des communications et des directeurs régionaux de SPPCC se fera là-bas, au Justice Institute de la Colombie-Britannique, qui est le principal institut d'enseignement du système de commandement en cas d'incident, de la police, des services d'incendie et correctionnel de cette province. Il n'existe pas d'autre institution du genre au pays. Tout le monde vient ici pour suivre ce genre de formation.
Le sénateur Banks : Voulez-vous parler de l'ensemble du pays?
M. Crober : Oui, en raison d'un changement à ICS, que notre collège d'Ottawa n'est pas prêt à enseigner pour l'instant. Je vais parler un peu plus tard du lien qui existe entre ICS et SNIU, soit le système national d'intervention d'urgence. Il faut bien commencer quelque part et on commence ici.
À la page 14, vous voyez quelques-unes des responsabilités du groupe fédéral des opérations. Le point à noter, c'est que nous sommes divisés. Nous avons des gens qui sont au centre, soit le groupe de M. Bugslag à Victoria, au PECC, Provincial Emergency Coordination Centre, et j'aurais des gens qui coordonneront un groupe fédéral d'opérations à Vancouver qui coordonnera tous les autres ministères gouvernementaux. Cette division entre Victoria et Vancouver n'est pas la seule du genre au pays. On retrouve la même chose au Québec, entre Montréal et la Ville de Québec, et ils sont sur le point de faire la même chose que nous.
En ce qui concerne les améliorations opérationnelles prévues, nous allons obtenir plus d'employés. Je peux en donner les détails un peu plus tard. Nous obtenons plus de personnel EM et PIE, soit du personnel d'infrastructures essentielles. Nous allons avoir le centre générique des opérations à Vancouver. Par ailleurs, nous examinons diverses méthodologies qui permettront d'améliorer notre capacité d'appoint. Au bout du compte, les deux gouvernements envisagent d'unir notre bureau à Victoria au bureau du directeur de PUP, dans les nouveaux locaux de celui-ci, qui doivent le plus possible résister aux tremblements de terre.
De mon point de vue, il sera intéressant de voir comment seront abordées des questions comme la restructuration régionale, le SNIU étant adopté à l'échelle de la région —- et c'est ce qui se passe au siège social —- et comment cela va se produire au niveau de la région.
La question de l'infrastructure est essentielle ainsi que son importance au sein de la province. Tout l'aspect de la coordination fédérale avec l'infrastructure provinciale est important. La façon dont nous assurons cette coordination et du moment où nous l'assurons est essentielle. Il faut savoir ce que nous sommes autorisés à faire et à ne pas faire et ce que nous pouvons faire dans le cadre qui nous est conféré en vertu de la nouvelle loi SPPCC. La formation de base ICS se donnera éventuellement dans le cadre de toute la formation du gouvernement fédéral en matière de réponse nationale aux mesures d'urgence et c'est ce qui est en train de se faire. On ne peut pas assurer la formation SNIU à moins d'avoir terminé le travail doctrinal qui se fait au siège social.
Enfin, nous avons nos priorités d'urgence. Nous avons des situations pandémiques compte tenu des prévisions. Cette province va connaître une autre sécheresse comme celle que l'on connaît depuis deux ou trois ans. Nous savons tous que la sécheresse peut provoquer des incendies de forêts. Les inondations sont toujours un problème à cause du cours des rivières dans cette province. Bien sûr, il y a toujours la menace d'un tremblement de terre ou d'un tsunami. Nous nous préparons également pour les Jeux Olympiques de 2010 et les urgences qui peuvent en découler, que nous pouvons prévenir ou pour lesquelles il nous faut nous préparer.
M. Ronald Martin, coordonnateur de la planification des mesures d'urgence, Ville de Vancouver : La ville de Vancouver vous souhaite la bienvenue.
Nous avons à cœur la planification d'urgence parce que nous devons fournir les services de première ligne à nos citoyens. Nous en sommes actuellement à la cinquième année d'un programme décennal approuvé par notre conseil municipal. Ce programme comporte diverses initiatives, notamment l'amélioration des bâtiments et de l'infrastructure ainsi que la création d'un centre des opérations d'urgence de protection civile. Vous avez visité ce centre. Le programme entraînera l'installation d'un système radio reliant plusieurs agences, la constitution d'un service spécialisé de lutte contre l'incendie doté de toutes les ressources matérielles nécessaires ainsi que l'amélioration de nos ponts et de l'infrastructure essentielle comme les réservoirs d'eau. Nous apporterons les améliorations à notre dernier pont cette année. Il s'agit du pont Burrard. Nous avons également déménagé notre réseau informatique essentiel dans des installations protégées des secousses sismiques. Le tout est maintenant terminé.
Nous sommes dotés d'un programme très exhaustif de planification d'urgence de quartier. Il s'agit essentiellement de former les citoyens afin qu'ils soient en mesure d'être autonomes pendant cette période critique de 72 heures que nous avons établie dans le domaine de la gestion des urgences.
Pour aider nos employés, nous avons disposé le matériel d'urgence dans des armoires des édifices municipaux et nous avons montré aux gens comment s'en servir. Nous avons également mis en œuvre un projet exhaustif visant à améliorer les mesures de protection parasismiques et autres dans nos lieux de travail afin d'assurer la sécurité de notre personnel.
Nous avons également pris d'autres initiatives essentielles; nous avons notamment aménagé, dans différents endroits de la ville, des abris contenant des approvisionnements et du matériel d'urgence. Nous en comptons actuellement 18, qui se trouvent dans les centres communautaires municipaux, et nos premiers intervenants ont accès à deux d'entre eux lorsqu'ils sont de service 24 heures par jour, sept jours par semaine pendant une période prolongée. Ils ont ainsi à leur portée les outils et le matériel dont ils ont besoin pour eux-mêmes pendant qu'ils portent secours aux autres.
Le programme de planification d'urgence de quartier est une initiative de sensibilisation très exhaustive qui s'adresse à toutes les collectivités linguistiques. La formation se donne dans les différents centres communautaires de Vancouver et porte sur la planification d'urgence, les premiers soins, l'évaluation des dommages ainsi que la recherche et le sauvetage; nous enseignons également les rudiments pour assurer la sécurité des infrastructures et des installations qui pourront avoir subi des dommages, notamment les réseaux de distribution d'électricité et de gaz. Nous nous déplaçons également pour donner de la formation, nos employés se rendant dans les coopératives d'habitation, les immeubles résidentiels, les habitations pour personnes âgées, et cetera.
Nous venons de mettre la dernière main au programme d'amélioration des mesures de protection parasismiques, ce qui nous permettra, après une catastrophe, de maintenir les services municipaux offerts aux citoyens.
Voici quelques éléments clés de notre programme : nous comptons sur l'équipe des services sociaux d'urgence, qui fournit les secours aux gens en cas d'urgence de moindre importance, comme un incendie dans une maison. Elle vient en aide aux sinistrés.
Nous nous sommes dotés d'une importante équipe de recherche et sauvetage qui est formée afin de libérer les victimes prisonnières des décombres. Cette équipe a reçu la certification des Nations Unies, et nous considérons qu'il s'agit d'une ressource nationale.
Nous déployons beaucoup d'efforts en vue d'améliorer notre intervention en cas d'incident chimique, biologique, radiologique et nucléaire grâce à nos équipes de lutte contre les matières dangereuses. Ce projet a été financé généreusement par les gouvernements fédéral et provincial, et nous sommes très fiers pour l'instant.
L'un des éléments clés sur lequel nous pouvons compter, c'est notre club radioamateur qui assure les communications d'urgence dans l'éventualité où notre système principal de communications cesserait de fonctionner.
Je vous entretiendrai de certaines de nos mesures efficaces dont nous sommes très fiers cette année. Vous n'êtes pas sans savoir que les conditions météorologiques nous ont grandement éprouvés au début de l'année. Après une période de froid inopinée, nous avons reçu des pluies torrentielles, ce qui était inhabituel pour la saison. Ces pluies avaient pris naissance dans le Pacifique et s'accompagnaient de beaucoup d'humidité. Nous sommes très satisfaits de la façon dont nous avons pu collaborer avec nos collègues provinciaux et fédéraux lorsque les choses ont commencé à se corser.
Il s'est produit un glissement de terrain à North Vancouver, et d'autres ont eu lieu sur le territoire de la Ville de Vancouver. Le long des terres léguées à l'Université de la Colombie-Britannique, nous avons dû barrer les routes et aviser les propriétaires des risques pour leurs propriétés. Nous avons dû également interdire la circulation dans certaines parties le long du littoral, dans Stanley Park.
L'aide et la collaboration efficaces que nous ont apportées nos homologues provinciaux et fédéraux ont été indispensables et nous avons été très satisfaits du déroulement sans bavure des opérations. Nous avons pu noter une amélioration marquée dans les communications les uns avec les autres. La Ville s'est servie du système d'intercommunication dont nous avons parlé et qui nous permet de communiquer entre nous avec un langage et des paramètres communs, ce qui a grandement amélioré notre interopérabilité.
Le sénateur Banks : J'ignore vraiment par où commencer. Allons-y rétrospectivement.
Monsieur Martin, j'espère que vous aurez plus de succès avec vos abris de matériel d'urgence disséminés dans la ville que le gouvernement fédéral n'en a eu avec les siens. Selon les photos, le matériel d'urgence se trouve dans des conteneurs. Est-ce à la portée de tous? Ne craignez-vous pas qu'il puisse se commettre du vandalisme ou du vol?
M. Martin : La sécurité du matériel nous préoccupe, et nous avons pris des mesures pour vérifier l'intégrité de la sécurité de chaque conteneur à intervalles réguliers. C'est pourquoi nous avons posé un dispositif d'inviolabilité sur les conteneurs pour en rendre extrêmement difficile l'ouverture et nous avons apposé un indicateur d'effraction.
En outre, l'intérieur des conteneurs a été enduit d'un produit spécial pour prévenir l'humidité, la condensation, et cetera. Nous avons également cherché à y stocker les articles les plus robustes possibles. Nous avons donc choisi ceux dont nous savons que l'entretien à long terme ne posera aucun problème.
Le sénateur Banks : C'est une excellente idée, surtout dans votre ville. Je viens des Prairies, où toutes nos villes sont agréables et plates. Vous pouvez vous rendre partout où vous voulez. Cependant, Vancouver présente des obstacles qui ne facilitent pas les déplacements d'une partie de la ville à une autre, lorsqu'il s'agit de l'eau; c'est donc une excellente idée.
Ai-je raison de dire que vos responsabilités ne débordent pas les limites de la Ville de Vancouver?
M. Martin : C'est exact.
Le sénateur Banks : Peut-on intervenir à l'échelle régionale? Cela fonctionne-t-il dans le cadre du BPIEPC ou y a-t-il un mécanisme régional entre la Ville de Vancouver et le BPIEPC? Peut-on englober l'ensemble du Lower Mainland?
M. Martin : Nous avons effectivement le District régional de Vancouver ou DRV. Par conséquent, si nous devions intervenir lors d'une urgence, nous demanderions directement l'aide de la province.
Le sénateur Banks : Monsieur Crober, je devrais vous signaler qu'il se trouve que je suis la personne qui doit faire en sorte que vous soyez sur vos gardes. La mesure législative sur SPPCC à laquelle vous avez fait allusion n'a pas encore été adoptée. C'est moi qui ai présenté le projet de loi. Il m'appartient donc de faire en sorte que vous soyez sur vos gardes, mais vous êtes encore en règle grâce aux décrets. Par conséquent, SPPCC ne pose aucun problème.
Monsieur Bugslag, vous avez parlé de la nécessité d'un service centralisé. J'ignore si vous en êtes au courant, mais nous pensons sans fausse modestie que SPPCC et la concentration de toutes les fonctions fédérales dans les mains d'une ministre de premier plan découlent d'une de nos recommandations les proposant et faisant valoir qu'il y avait trop d'intervenants en vase clos. Telle est la situation actuelle.
Bon nombre des organismes fédéraux qui interviendraient lors d'un désastre vous touchant dans votre domaine relèvent d'une ministre de premier plan, en l'occurrence la vice-premier ministre, et le tout est en vigueur depuis un certain temps.
Avez-vous remarqué une différence? Vous avez fait allusion précisément au fait que vous pouvez difficilement savoir qui prend les décisions?
M. Bugslag : En fait, sénateur, je devrais vous dire : « Il est temps que vous joigniez le geste à la parole », car ce n'est pas ce que j'ai constaté pendant la crise de la grippe aviaire. J'ai vu des représentants de Sécurité publique et Protection civile Canada essayer de venir en aide à leurs collègues fédéraux de l'ACIA, qui les ont presque mal accueillis. C'est uniquement lorsque de hauts responsables provinciaux, au niveau du premier ministre provincial, ont contacté le CPM; la province est intervenue très énergiquement et, en deux jours, j'avais 130 personnes au Centre de gestion des urgences pour prêter main-forte à l'ACIA.
Je n'ai pas vu beaucoup de preuves concrètes. Je pense certes que nous souhaitons vivement établir le service centralisé auquel vous faites allusion, mais je n'ai pas encore vu de signes concrets à cet égard.
Le sénateur Banks : Je dois vous demander, monsieur Crober, ce qui se passe. Il y a peut-être absence de volonté. C'est peut-être là le problème. La structure est en place pour effectuer ce dont parle M. Bugslag. Pourquoi faut-il autant de temps?
M. Crober : Naturellement, le projet de loi n'a pas encore été adopté.
Le sénateur Banks : Cela ne devrait pas empêcher de faire ce qui doit être accompli.
M. Crober : Je vous donne l'exemple parfait. L'Agence canadienne d'inspection des aliments était l'organisme devant assurer la coordination lors de la crise de la grippe aviaire et elle était censée le faire à Ottawa. Nous avons agi ainsi en partie parce que Sécurité publique et Protection civile Canada était un tout nouveau ministère qui ne disposait encore même pas de directives définies, en février de l'année dernière. Il venait tout juste d'être créé.
Ce qui est encore plus important, nous suivions encore les procédures de l'organisme responsable de la coordination, et c'est ainsi que la province collaborait avec les ministres responsables. On est passé à une intervention intégrée; ce n'était pas tellement qu'il y avait un ministère ou un organisme responsable; c'était plutôt une intervention intégrée dans la province. D'autres avaient agi de la sorte également. C'était également l'intention de SPPCC.
Il y a cependant quelques étapes préalables obligatoires. Nous devons avoir les moyens pour agir ainsi. Ces moyens se trouvent à Ottawa, étant donné les améliorations qui y sont apportées, et celles-ci sont extraordinaires. Le potentiel est là; je peux affirmer sans me tromper que l'attitude est de beaucoup supérieure à celle dont j'ai été témoin à titre de directeur régional du BPIEPC. Cela est nécessaire également au niveau régional, et il faut prévoir les pouvoirs nécessaires pour intervenir et assurer la coordination.
Parfois, s'il y a encore un ministère ou un organisme responsable, nous nous retrouverons dans une situation où, si elle faisait face à une autre crise comme celle de la grippe aviaire, l'ACIA serait l'organisme assurant encore une fois la coordination de toutes les autres ressources fédérales. Si une telle situation se produisait dans deux ans, nous serions responsables, et l'ACIA nous prêterait main-forte. C'est ce qui est prévu.
Le sénateur Banks : Où est le problème? Pourquoi faut-il autant de temps?
M. Crober : C'est en partie à cause de la mesure législative, en partie à cause des ressources.
Le sénateur Banks : L'adoption de la mesure législative ne constitue pas un obstacle. Le ministère possède les pouvoirs nécessaires à cet égard à cause des décrets. On nous a tous rassurés que la mesure législative, qui est un mécanisme d'approbation a posteriori, ne constitue pas un obstacle à cet égard.
Dans la foulée de ce que vous venez de dire, êtes-vous frustré du fait que certains pouvoirs ne vous ont pas encore été confiés?
M. Crober : C'est en partie le cas, mais actuellement, c'est davantage une question de ressources. Le Secteur de la gestion des mesures d'urgence et de la sécurité nationale fait actuellement l'objet d'une restructuration régionale qui devrait être terminée d'ici l'automne. Cette restructuration permettra notamment au ministère de compter sur des ressources permanentes dont la qualité et la quantité seront supérieures à ce que nous avons actuellement; ce qui est plus important, nous serons en mesure d'intervenir en cas d'urgence. Sans ces deux aspects, nous ne pouvons pas orienter les mesures du gouvernement fédéral en cas d'urgence.
Le sénateur Banks : De quelles ressources parlez-vous?
M. Crober : Il s'agit de ressources permanentes qui sont supérieures à ce que nous possédons actuellement et qui sont prévues. Je disposerai de neuf employés dans mon bureau, entre Victoria et Vancouver. Mon bureau régional sera le plus important de tous ceux de SPPCC. J'aurai également les moyens d'intervenir en cas d'urgence, en recourant aux employés d'autres ministères fédéraux qui ont été formés en conséquence ou aux marchés de services comme nous le faisons avec succès lors des incendies de forêt. C'est pourquoi nous pouvons lutter efficacement contre ces incendies. Nous pouvions embaucher ce personnel d'appoint. Sans ces ressources supplémentaires, nous ne pourrions intervenir aussi rapidement.
En février de l'année dernière, l'attitude qu'a adoptée SPPCC pendant la crise de la grippe aviaire, compte tenu du fait qu'il s'agissait d'un ministère qui venait tout juste d'être créé, cette attitude, dis-je, était complètement différente de celle qu'elle pourrait prendre aujourd'hui. L'effectif a été complètement renouvelé. Les directeurs généraux sont presque tous des nouveaux. Le Centre des opérations du gouvernement a été créé. On passe maintenant au Service national d'intervention d'urgence. Le tout est plus opérationnel. Auparavant, la structure n'était pas le moins du monde en mesure de coordonner les efforts des ministères fédéraux dans ce domaine.
Je veux préciser très clairement ceci : lors d'un incendie de forêt, c'est nous qui assurions la coordination, lorsque la province intervenait. Il s'agissait de coordonner toute l'aide apportée par le gouvernement fédéral, à l'exception de celle fournie par les militaires.
Au sujet de la crise de la grippe aviaire, vous avez dit que le gouvernement fédéral assure la coordination. C'est une situation extraordinaire. En règle générale, la province, quelle qu'elle soit, assume la coordination de la plupart des urgences. Dans ce cas précis, c'est le gouvernement fédéral qui a pris en main la coordination, mais il n'a pas déterminé immédiatement le ministère ou l'organisme responsable de cette urgence. Il a fallu notre intervention et, très franchement, davantage celle des autorités provinciales; ce n'est pas uniquement le BPIEPC qui est intervenu; le premier ministre provincial a également appelé son homologue fédéral.
Le sénateur Banks : Où est le problème?
M. Crober : Chaque ministère fédéral sur place n'est pas nécessairement doté des ressources lui permettant d'assurer la gestion des urgences. Les ministères et organismes fédéraux possèdent les compétences scientifiques. L'ACIA pouvait compter sur des vétérinaires et elle a agi en les mettant à contribution.
Le sénateur Banks : Vous vous contentez de critiquer. Lorsque vous ne devez pas intervenir, il est facile d'observer ce qui se passe et de critiquer les mesures prises.
Le problème, est-ce le temps nécessaire qu'il faudra, et vous avez dit qu'il faudra encore un autre délai de six mois? Cela convient-il? Devrions-nous l'accepter et ne pas nous frustrer? Selon vous, les choses se déroulent-elles aussi rapidement qu'on est en droit de s'attendre?
M. Crober : Ma réponse m'attirera probablement des ennuis, mais je vous dirai qu'aucun directeur régional dans l'ensemble du pays ne croit que les choses vont aussi rapidement qu'elles le devraient.
Le sénateur Banks : Qu'est-ce qui fait obstacle? Vous le savez mieux que nous.
M. Crober : Le problème, c'est que nous créons de toutes pièces un nouveau ministère et amalgamons des organismes qui n'ont jamais collaboré auparavant; l'aspect le plus crucial, c'est que nous intégrons la sécurité et gestion des urgences.
Regrouper les activités du ministère du Solliciteur général avec celles du BPIEPC/PCC est difficile parce que ce sont deux milieux complètement différents qui ont une approche différente. Il faut du temps, mais ce ne sont pas les efforts qui manquent. Il y a énormément de travail qui s'est fait à l'administration centrale.
Je dois souligner que le travail accompli depuis l'an dernier est remarquable. S'il y avait une nouvelle crise de la grippe aviaire et que le gouvernement fédéral devait prendre les choses en main, il serait aujourd'hui en mesure de coordonner les activités de tous les partenaires compétents, au niveau municipal et au niveau provincial, ce qu'il n'aurait pas pu faire l'an dernier.
Le sénateur Banks : Cela vous donne-t-il une certaine assurance, monsieur Bugslag?
M. Bugslag : Dans le cas de changements de l'envergure de ceux que connaît le modèle de gestion des situations de crise, il y aura toujours des ministères qui vont opposer une résistance. Ils ont toujours connu le même modèle et l'ambiguïté entourant la question des pouvoirs accordés aux ministères fédéraux crée des problèmes. Il faudra un certain temps avant que SPPCC ait la stature voulue au sein de l'administration fédérale pour bien s'occuper des questions provinciales.
La province est dotée d'un programme de gestion des situations d'urgence très solide. Nous voulons certes nous associer au gouvernement fédéral, mais ce sont avec les administrations municipales que nous travaillons tous les jours. À mesure qu'elles vont renforcer leurs capacités, nous aurons moins besoin du gouvernement fédéral, et ce sont vers elles que nous nous tournerons quand il y aura des incidents très importants comme les feux de forêt de 2003.
Le sénateur Banks : Monsieur Crober, nous avons découvert que le ministère fédéral de la Santé avait des dépôts d'équipements médicaux qui ne se sont pas avérés très utiles quand on y a eu recours, et que les premiers intervenants ne savaient pas où ils se trouvaient et ne pouvaient pas y avoir accès. Avez-vous pu régler ce problème chez vous?
M. Crober : Cette question est du ressort de Santé Canada et de la nouvelle agence de santé, et pas du nôtre; ce n'est pas que nous ne sommes pas au courant, mais c'est leur responsabilité.
Le sénateur Banks : Savez-vous où ces dépôts se trouvent?
M. Crober : J'en connais quelques-uns.
Le sénateur Banks : Devriez-vous savoir où ils se trouvent tous?
M. Crober : Si nous en avons besoin, nous allons demander au ministère responsable de nous y donner accès. De même, vous pourriez croire que je devrais connaître toutes les ressources des forces militaires, au cas où j'en aurais besoin. Ce n'est pas mon travail. Mon travail consiste à m'adresser à l'amiral ou au général pour lui expliquer ce dont j'ai besoin et déterminer ce qu'il peut me fournir, ce qu'il va faire.
Le sénateur Banks : Avez-vous déjà vu les dépôts fédéraux dont je parle?
M. Crober : Oui.
Le sénateur Banks : Trouvez-vous qu'ils sont utiles?
M. Crober : Je ne suis pas un expert de la gestion des urgences médicales, mais j'ai entendu et lu les témoignages et je suis au courant des problèmes. Je sais, par exemple, que Santé Canada et la nouvelle agence de santé cherchent actuellement à corriger la situation.
Le président : Est-il possible que les collaborateurs de M. Martin créent des dédoublements avec ces dépôts?
M. Martin : Les dépôts fédéraux visent avant tout à fournir des services médicaux. Ce sont des postes d'évacuation de victimes. Nous n'avons pas le même genre de dépôts au niveau municipal. Les nôtres fournissent le matériel de premier secours de base, et permettent principalement de constituer des refuges d'urgence. Ils contiennent donc des denrées alimentaires, des équipements de cuisine et du matériel de sauvetage de base. On y trouve des lits de camp, des articles de literie, des choses du genre. Ils servent à venir en aide à la population et non à fournir des services médicaux, même si chacun de nos dépôts contient des trousses de premiers soins.
Le président : Avez-vous été conseillé par votre médecin hygiéniste?
M. Martin : Notre médecin hygiéniste en chef est au courant des dépôts qui sont gérés conjointement par les gouvernements provincial et fédéral. Nous savons exactement où ils se trouvent à Vancouver.
Le président : Me dites-vous que le médecin hygiéniste en chef de la ville est convaincu qu'il n'y a pas de recoupements et que le système fonctionne?
M. Martin : Il sait ce que contient les dépôts de fournitures médicales et ceux des refuges d'urgence et il est satisfait de la manière dont nous les avons conçus de façon à éviter les doubles emplois et à assurer que les uns et les autres soient suffisamment équipés.
Le président : C'est ce qu'il vous a dit?
M. Martin : Oui.
Le sénateur Forrestall : Qui a les clés de ces dépôts?
M. Crober : Ce qu'il faut comprendre à propos de ces dépôts, c'est que nous avons un réseau d'urgences médicales assez bien développé dans la province, qui comprend six régions. Les régions traitent directement avec Santé Canada et la nouvelle Agence de santé publique du Canada. Elles ne relèvent pas de la municipalité. Elles ont été créées par le gouvernement provincial qui est propriétaire de toutes les ressources en matière de santé sur le territoire, ce qui comprend les hôpitaux et les dépôts provinciaux. Les régions transigent avec leur homologue fédéral.
L'ancien directeur des services médicaux d'urgence pour le ministère de la Santé est maintenant le coordonnateur fédéral des soins de santé responsable de la gestion des situations d'urgence dans la province. Il sait exactement comment le système provincial fonctionne et il s'est occupé d'améliorer les capacités de Santé Canada dans la région en prévision de l'établissement de la nouvelle Agence de santé publique du Canada.
Les dépôts sont du domaine de la santé et ne font pas partie du matériel général de gestion des situations d'urgence. Ils sont connus des responsables de la santé qui doivent les connaître.
Le sénateur Forrestall : Je pense que tous les chauffeurs d'autobus devraient les connaître.
M. Crober : Ils n'y ont pas accès et ne devraient pas y avoir accès non plus.
Le sénateur Forrestall : Des informations assez épouvantables nous ont été fournies par les citoyens sur les soins.
Qui vérifie la validité, la durée de vie des médicaments conservés ou non dans ces dépôts? Est-ce que la province met en œuvre un programme en collaboration avec les organismes fédéraux pour vérifier ce genre de choses?
Qui décide si on a accès à un dépôt provincial ou à un dépôt fédéral?
Comment organisez-vous cela, monsieur Martin?
M. Martin : Il s'agit de deux genres de dépôt différents : les uns servent à répondre aux urgences médicales et sont dotés d'équipements pour dispenser des services médicaux, et les autres contiennent du matériel de survie pour permettre aux gens en situation d'urgence de rester au chaud et d'avoir de quoi boire et manger.
Nous savons où les dépôts de fournitures médicales sont entreposés et, si nous en avons besoin, nous savons ce qu'ils contiennent, mais nous n'irions pas les ouvrir sans l'autorisation de la province.
D'après le protocole, pour utiliser les dépôts, il faut s'adresser à la région de la santé, qui s'occupe d'assurer la liaison avec le ministère de la Santé provincial. Les dépôts qui contiennent du matériel de survie à l'intention des personnes déplacées en cas de catastrophe relèvent de la municipalité. Ils nous appartiennent et les clés se trouvent dans tous les postes de pompiers. L'agent principal de service de la police a la clé, tout comme chacun des membres de la gestion des situations d'urgence à Vancouver. En fait, j'en ai justement une ici. C'est la même clé pour tous les dépôts, donc je peux ouvrir n'importe quelle caisse.
Le sénateur Forrestall : C'est un progrès. Je suis heureux de l'entendre parce que j'avais l'impression qu'il n'y avait pas ce qu'on appellerait une étroite collaboration entre le ministère fédéral, la province de la Colombie-Britannique et la Ville de Vancouver en matière de contrôle et de gestion de ces caches appartenant à l'une ou l'autre de ces trois entités. Je partirai d'ici la conscience parfaitement tranquille.
Je voudrais poser d'autres questions à M. Martin. J'ignore pourquoi nous n'avons pas discuté avec le gouvernement provincial quand nous étions ici, avant les premières rencontres, mais il est vrai que c'est un immense pays et qu'il y a de nombreuses communautés concernées et très actives dans le dossier ainsi que de petites et de grandes villes essayant de tenir tête à la province. Peu importe la raison — et elle devait être bonne parce que nous aurions aimé vous parler —, nous n'avons pu nous entretenir avec vous. Nous avons cependant discuté avec des gens à Vancouver; en fait, nous avons rencontré M. Martin.
Pendant notre visite, en janvier 2003, nous vous avons posé des questions sur vos relations avec les organismes d'intervention d'urgence et les autres ordres de gouvernement, et nous voulions savoir si vous receviez le soutien nécessaire des deux autres ordres. Obtenez-vous ce dont vous avez besoin?
M. Martin : Comme je l'ai dit dans mon exposé ce matin, un des meilleurs exemples que je puis vous donner est l'événement survenu en janvier. Il a donné lieu à l'une des meilleures interventions que j'ai pu observer depuis six ans que je suis à la Ville de Vancouver. J'étais extrêmement satisfait du nombre de renseignements qui nous étaient envoyés. Nous recevions des avis météorologiques à mesure que la situation évoluait. Nous savions ce qui se passait ailleurs et, pour la première fois dans le Lower Mainland, nous avions une intervention régionale très bien organisée en ce qui concerne la gestion des ressources. Cela a très bien fonctionné et j'en étais très heureux.
Le sénateur Forrestall : Je suis content de l'apprendre parce que je voulais tirer une conclusion. Dans de nombreux cas, si je me souviens bien, les réactions étaient loin d'être aussi bonnes — même deux ou trois ans en arrière —, je suis donc ravi de savoir qu'il y a eu une amélioration.
M. Martin : Le fait que la province ait renforcé son organisation est l'une des raisons qui explique cette amélioration. Comme le directeur l'a souligné, c'est maintenant l'une des plus grandes OMU au pays. On a créé des centres permanents d'intervention d'urgence dont le mandat précis est de nous aider, au niveau municipal, lorsque nous sommes en difficulté; et cela fonctionne.
Le sénateur Forrestall : Quel est votre budget annuel, monsieur Bugslag?
M. Bugslag : Il tourne autour de 6,3 millions, mais nous avons dépensé 94 millions de dollars en 2003. C'était à cause des feux de forêt. C'était une année bien remplie; il y a eu les avalanches, le SRAS, les incendies, la sécheresse et les grandes inondations dans la région de Whistler.
Le sénateur Forrestall : L'incendie qui a ravagé Kamloops faisait-il partie de ces feux pour lesquels les autorités et les agences de lutte contre les incendies auraient décidé de ne rien faire au départ, pensant qu'il était inaccessible, et qu'il s'éteindrait de lui-même?
Les responsables fédéraux l'ont-ils laissé se propager avant d'aller chercher de l'aide extérieure?
M. Bugslag : L'année deux mille trois était la troisième d'un cycle de sécheresse. Nous faisions face à un comportement inédit des incendies en Colombie-Britannique. Les températures, au cœur des feux, pouvaient atteindre 2 200 degrés. C'était la première fois de l'histoire que l'on pouvait réellement voir les flammes de certains de ces brasiers sur des images satellites. Quand l'incendie du parc d'Okanagan a pris naissance, il y en avait environ 800 autres qui faisaient rage dans la province. Il y avait des centaines de nouveaux foyers chaque jour.
Les ressources sont très limitées. Quand on regarde la population et les infrastructures à risque — sachant que 98 p. 100 des incendies que combat le service des forêts de la province ne sont pas des incendies d'interface et que seulement 2 p. 100 le deviennent —, il est évident qu'il faut compter sur la chance lorsqu'on déploie des ressources.
Le sénateur Forrestall : Un tsunami comparable à celui de l'Indonésie peut-il frapper la côte ouest du Canada et desÉtats-Unis?
M. Bugslag : Les côtes de la Colombie-Britannique ont deux faiblesses. D'abord, nous sommes exposés à ce que nous pourrions appeler un événement extracôtier. Un tremblement de terre ou un glissement de terrain dans les îles Aléoutiennes ou au Japon pourrait provoquer un raz-de-marée chez nous.
Il y a aussi une menace locale : la zone de subduction sur la côte ouest de la Colombie-Britannique. La faille s'étend de la pointe sud de l'île de Vancouver jusqu'au détroit de Kotzebue. Il y a un risque de séisme dans la zone de subduction et de tsunami comparable à celui de l'Asie du Sud-Est, quoiqu'il faudrait moins de 30 minutes aux vagues pour déferler sur les côtes. Par conséquent, nous avons lancé, début janvier, un projet intégré de protection contre les tsunamis, en collaboration avec le gouvernement fédéral, afin de se préparer à cette éventualité.
Le sénateur Forrestall : Inclut-il des dispositifs d'alerte rapide?
M. Bugslag : Oui, ils sont inclus. Le projet comporte aussi une analyse des risques pour chacune des communautés, un plan d'évacuation, la planification des mesures d'urgence et des exercices pratiques. Je reçois environ un avertissement par semaine du système d'alerte aux tsunamis. Tout tremblement de terre dépassant 6,5 sur l'échelle de Richter sur le littoral du Pacifique est enregistré par notre centre de coordination des mesures d'urgence.
Le sénateur Forrestall : Je suppose que cela combine les séismes et les tsunamis, n'est-ce pas? Je crois que l'un déclenche l'autre, que ce soit un tremblement de terre ou une tempête.
M. Bugslag : Tout à fait. Il s'agit de séismes dans la zone de subduction, où il y a de nombreux déplacements verticaux du fond marin, ce qui provoque des vagues.
Nous examinerons de très près le modèle qui viendra d'Indonésie; nous devrons peut-être modifier les zones de sécurité dans certaines communautés côtières. Le travail est en cours.
Nous sommes en train de rédiger un manuel sur la protection contre les tremblements de terre et les tsunamis à l'intention des propriétaires pour toutes les communautés côtières deColombie-Britannique. Nous offrirons aussi une série d'ateliers dans ces collectivités à partir du mois de juin.
La province a octroyé 1 million de dollars pour financer l'amélioration des plans spécifiques aux tsunamis dans ces communautés côtières. L'AINC a donné 500 000 $ de plus pour les collectivités des Premières nations de la région.
Le sénateur Forrestall : Comment géreriez-vous une alerte à l'échelle provinciale? Feriez-vous comme certaines autres communautés qui comptent sur CBC et Peter Mansbridge?
M. Bugslag : Non, pas du tout. Certes, nous avons des problèmes de communications en Colombie-Britannique, surtout à cause de la géographie de notre région qui comprend des endroits inatteignables. Aussi, nous utilisons des téléphones mobiles GSM et nous avons prévu différents ensembles de mesures dans notre système. Mon directeur de la planification est présentement à Ottawa afin de discuter avec Industrie Canada à propos des dispositifs d'alerte. Évidemment, nous appuierions toute décision du CRTC qui nous permettrait de donner suite au projet des alertes rapides, et nous sommes tout à fait favorables à ce que cela se fasse d'un bout à l'autre du Canada.
Le président : Le CRTC ne dresse aucun obstacle à la création d'une sorte de système dont le comité a fait état. Nous avons ici une lettre du CRTC nous indiquant qu'il ne s'y oppose pas.Avez-vous quelque raison de croire qu'il y a un problème?
M. Bugslag : Non, je compte sur votre rapport pour accélérer un peu les choses.
Le président : Pour en revenir aux tsunamis, certaines communautés le long des côtes seraient beaucoup plus touchées que d'autres. Les avez-vous repérées?
M. Bugslag : L'Institut des sciences de la mer a effectué des simulations; il est l'un de nos partenaires dans le système d'alerte aux tsunamis. Le gouvernement fédéral, probablement par l'entremise de RNCan, demande que nous développions des modèles plus poussés pour les régions côtières de la Colombie-Britannique. Cependant, nous devons attendre et recueillir plus d'informations, à la lumière de ce qui s'est passé en Indonésie, et ainsi être capables d'appliquer ici une partie des données sur la course des vagues qui sont actuellement réunies là-bas, pour ensuite élaborer des modèles nous aidant à analyser les risques pour les régions côtières de notre province.
Le président : Il semble qu'il faudra attendre plusieurs mois.
M. Bugslag : Entre-temps, les communautés peuvent faire beaucoup de choses. Nous avons fait allusion plus tôt aux zones de sécurité, qui sont de 10 mètres. Ce que nous pourrions apprendre de l'Asie, c'est que ces zones devraient peut- être être élargies à 15 mètres.
C'est assez facile pour les membres des collectivités de se rendre sur le terrain, de déterminer quelles sont les populations à risque et de repérer les voies d'évacuation sûres ainsi que les secteurs en amont de la zone sécuritaire.
Le président : Croyez-vous être en mesure d'alerter ces collectivités assez longtemps à l'avance pour qu'elles aient le temps de réagir?
M. Bugslag : Oui, le système d'alerte aux tsunamis est fréquemment mis à l'essai. Nous utilisons un ensemble varié de moyens comme les radios, les téléphones mobiles GSN et les télécopieurs.
Le président : Estimez-vous que les collectivités ont la capacité d'alerter leurs résidents assez rapidement?
M. Bugslag : Oui, et les subventions reçues dernièrement de la province et du gouvernement fédéral nous permettront d'améliorer nos plans. Avec les exercices que nous faisons, nous raffinons nos méthodes et tirons toujours des leçons des différentes catastrophes, où qu'elles aient eu lieu. Grâce aux informations que nous avons reçues d'Asie, nous pourrons modifier nos plans et, ainsi, mieux protéger les citoyens.
Le président : Par exemple, sur les voies navigables intercôtières de Floride, il y a environ tous les 100 mètres un haut-parleur ou une sirène servant à alerter la population en cas d'ouragan.
Est-ce que ce type de système est envisageable pour les collectivités les plus susceptibles d'être touchées par les tsunamis?
M. Bugslag : Un des éléments les plus importants, lorsqu'il est question de gestion des urgences, est d'avoir des systèmes souples. Si vous examinez l'emplacement des collectivités côtières de Colombie-Britannique, vous verrez que certaines sont situées dans des estuaires et d'autres, dans des régions très escarpées. Ces collectivités doivent penser aux populations les plus vulnérables et déterminer s'il est nécessaire d'avoir un système d'alerte tel que celui dont vous avez parlé. Il y en a un à Port Alberni depuis le tremblement de terre qui a secoué l'Alaska en 1964. Celui-là est très utile parce que la population est très concentrée sur les terres basses, ce qui n'est pas le cas de toutes les collectivités.
Le président : Je comprends, monsieur. J'ai parlé des régions exposées aux tsunamis.
M. Bugslag : Ces collectivités sont tout de même à risque, même s'il s'agit d'un risque différent. Vous avez déjà un camion d'incendie muni d'une sirène; vous pourriez trouver un autre système d'alerte. Il y a d'autres solutions à envisager; on s'y penchera dans le cadre du projet intégré.
Le président : D'après ce que vous nous dites, monsieur, je crois comprendre qu'aucun système n'est en place actuellement.
M. Bugslag : Je ne crois pas que nous en ayons besoin. En plus d'être excessivement dispendieux, il n'est pas nécessairement efficace. Il suffit qu'un vent dominant souffle à 10 ou 15 milles à l'heure pour que vous n'entendiez plus la sirène.
Le président : Je n'ai pas parlé de sirène. Y a-t-il présentement un système en place pour alerter les gens sur la côte?
M. Bugslag : Chaque collectivité est responsable de son propre système d'alerte, cela peut être le porte-à-porte, dans certains cas. Elle est aussi responsable de l'élaboration des plans d'intervention en cas de tsunami. C'est la même chose pour les inondations et tout autre danger auquel nous sommes régulièrement exposés en Colombie-Britannique. C'est à elle de choisir le meilleur plan et le système d'alerte le plus efficace qui soit en fonction de ses besoins particuliers.
Le président : Êtes-vous satisfait de ces plans?
M. Bugslag : Il faut les rendre plus efficaces. Il y a toujours place à l'amélioration lorsqu'il est question de plans d'urgence, peu importe la nature du danger qui nous menace.
Le président : Avez-vous examiné tous ces plans?
M. Bugslag : Une des principales responsabilités de mon directeur régional est de se rendre sur place, de travailler avec les communautés et d'examiner les dangers potentiels auxquels la population pourrait être exposée ainsi que la façon de les contrer et de veiller à la santé et au bien-être des citoyens. La vérification de ces plans d'urgence fait partie de notre processus d'examen.
Le président : Les avez-vous tous examinés?
M. Bugslag : Les gestionnaires régionaux ont vu et examiné les plans d'urgence de toutes les provinces. Nous avons changé notre loi en mai dernier. En Colombie-Britannique, avant l'année dernière, seules les municipalités étaient tenues d'élaborer des plans d'urgence. Depuis mai 2004, nous avons décidé, par voie législative, que les districts régionaux et leurs secteurs électoraux devaient aussi prendre part à l'élaboration des plans d'urgence. Ils ont jusqu'au 1er janvier de l'année prochaine pour y participer pleinement et pour que leur personnel soit prêt à intervenir en cas d'alerte.
Si l'on tient compte de la superficie à couvrir dans la province, il y avait certainement une lacune. Gary Filman a effectivement décelé cette lacune au cours de son examen des plans d'urgence, et grâce à ce changement législatif, la protection civile dans la province s'en trouvera renforcée, tout comme la sensibilisation à l'égard de ces questions.
Le sénateur Meighen : Monsieur Bugslag, est-ce vous qui avez dit que vous recevez toutes les semaines un avertissement de séisme au large des côtes du Pacifique?
M. Bugslag : En Colombie-Britannique, on enregistre un tremblement de terre presque chaque jour. S'il y a un séisme dans le Pacifique de plus de 6,5 sur l'échelle de Richter, mon personnel doit, conformément à notre politique, émettre un avis de tsunami.
Le sénateur Meighen : Qu'arrive-t-il ensuite?
M. Bugslag : Les centres d'alerte des tsunamis sont situés à Palmer, en Alaska, et à Hilo, à Hawaï. Peu de temps après, une alerte est donnée. En observant les bouées d'avertissement des tsunamis, ils peuvent établir si un tsunami a été provoqué. Le cas échéant, on met en place un système d'avertissement pyramidal d'urgence pour prévenir les collectivités.
Le scénario le plus probable en Colombie-Britannique serait qu'un séisme secoue les îles Aléoutiennes; nous aurions alors trois heures et demie avant qu'un tsunami n'atteigne les côtes de la province. Par la suite, nous mettrions sur pied un système d'avertissement pyramidal d'urgence pour les 45 collectivités qui pourraient être touchées.
Le sénateur Meighen : Indiquez-moi ce qui arriverait dans l'hypothèse suivante : supposons qu'il y ait une catastrophe naturelle près de la frontière. Quelle serait la marche à suivre d'un côté ou de l'autre de celle-ci? Vous mettez l'accent sur les relations avec nos voisins américains dans votre région. Quelle politique régit l'envoi d'équipes d'urgence des États-Unis au Canada ou vice versa?
M. Bugslag : La Colombie-Britannique a signé un protocole d'entente avec tous les États américains limitrophes. Nous avons souvent à lancer des opérations de recherche et de sauvetage le long de la frontière. Nous apportons pleinement notre aide à leurs équipes lorsqu'elles sont en Colombie-Britannique et nous envoyons aussi nos équipes là- bas. Au cours de notre séance de briefing de l'an dernier, la Colombie-Britannique a participé à l'exercice Top-Off 2, et nous avons travaillé très étroitement avec nos homologues américains. De notre point de vue, l'exercice s'est avéré une grande réussite. Nous travaillons avec eux quotidiennement et, comme nous sommes tenus de le faire, nous partageons nos ressources.
Le sénateur Meighen : Est-ce que vous, comme représentant fédéral, et l'État de Washington avez l'autorité pour agir?
M. Bugslag : Nous avons conclu un protocole d'entente avec chacun de ces États.
Le sénateur Meighen : Est-ce adéquat?
M. Bugslag : Il me semble que oui. Nous avons d'excellents rapports professionnels.
Le président : Au nom du comité, j'aimerais vous remercier tous les trois pour votre aide. De toute évidence, cette situation est en évolution constante, comme vous l'avez indiqué, monsieur Crober. Nous appuyons les initiatives que vous avez prises pour le démontrer.
Le but de ce comité est de veiller à ce que les Canadiens aient la meilleure protection possible et que nous maximisions l'utilisation des biens dont nous disposons pour protéger nos citoyens. Nous vous sommes reconnaissants à tous les trois du travail que vous faites dans les différents ordres de gouvernement que vous représentez. Également, nous nous réjouissons de la collaboration qui existe dans cette province entre les différentes instances. Il s'agit d'une mesure très importante, et nous croyons qu'au bout du compte, elle rendra grandement service aux Canadiens.
Nous avons apprécié vos témoignages. Merci beaucoup d'être venus aujourd'hui.
Le comité poursuit ses travaux à huis clos.