Délibérations du Comité sénatorial permanent de la
Sécurité nationale et de la défense
Fascicule 23 - Témoignages du 6 juin 2005
OTTAWA, le lundi 6 juin 2005
Le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense se réunit aujourd'hui, à 9 h 39, afin d'examiner, pour ensuite en faire rapport, la politique nationale sur la sécurité du Canada.
Le sénateur Colin Kenny (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Bonjour. Je tiens à vous souhaiter la bienvenue au Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense. Je m'appelle Colin Kenny. Je préside le comité. Aujourd'hui, nous tenons des audiences dans le cadre d'un examen de la politique de défense du Canada.
Immédiatement à ma droite se trouve le sénateur Michael Meighen. Le sénateur Meighen est avocat et membre des barreaux du Québec et de l'Ontario. Il est chancelier de l'Université de King's College et président sortant du Festival de Stratford. Il détient des doctorats honorifiques en droit civil de l'Université Mount Allison et de l'Université du Nouveau-Brunswick. À l'heure actuelle, il est président du Sous-comité des anciens combattants; il est également membre des Sous-comités sénatoriaux permanents des banques et du commerce et des pêches et des océans.
À sa droite se trouve le sénateur Norman Atkins de l'Ontario. À son arrivée au Sénat, le sénateur Atkins comptait 27 années d'expérience dans le domaine des communications. Il a été conseiller principal de l'ancien chef conservateur fédéral Robert Stanfield, du premier ministre de l'Ontario, William Davis, et du premier ministre Brian Mulroney. Il siège également au Sous-comité des anciens combattants.
[Français]
À sa droite, se trouve le sénateur Pierre Claude Nolin de la province du Québec. Il est avocat. Il a été nommé sénateur en 1993. Il a présidé le Comité sénatorial sur les drogues illicites et est le vice-président du Comité sénatorial permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration.
Sur la scène internationale, depuis 1994, il est un des délégués du Parlement du Canada auprès de l'Assemblée parlementaire de l'OTAN. Il est le vice-président de cette organisation et agit à titre de rapporteur général de la Commission de la science et de la technologie.
[Traduction]
À ma gauche, se trouve le sénateur Tommy Banks de l'Alberta. Le sénateur Banks préside le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles. Son comité a publié récemment un rapport intitulé Le défi d'une tonne : Passons à l'action. Les Canadiens le connaissent aussi très bien comme musicien et animateur aux multiples talents. Il a assuré la direction musicale des cérémonies entourant les Jeux olympiques d'hiver de 1988. Il est Officier de l'Ordre du Canada et a déjà remporté un prix Juno.
À ses côtés, à l'extrémité de la table, se trouve le sénateur Jim Munson de l'Ontario. Journaliste de renom, le sénateur Munson a aussi été directeur des Communications pour le premier ministre Chrétien avant d'être appelé au Sénat en 2003. Le sénateur Munson a été nommé deux fois pour le prix Gemini d'excellence en journalisme.
Chers collègues, notre comité a été chargé d'examiner la sécurité et la défense et la nécessité d'une politique en matière de sécurité nationale. Depuis 2002, nous avons rédigé les rapports suivants : L'état de préparation du Canada sur les plans de la sécurité et de la défense; La défense de l'Amérique du Nord : Une responsabilité canadienne; Mise à jour sur la crise financière des Forces canadiennes : Une vue de bas en haut; Le mythe de la sécurité dans les aéroports canadiens; Les côtes du Canada : Les plus longues frontières mal défendues au monde; Les urgences nationales : Le Canada, fragile en première ligne, et récemment, Le Manuel de sécurité du Canada, édition 2005.
Le comité est en train d'examiner de façon détaillée la politique de défense du Canada et a tenu des audiences dans chaque province pour demander aux Canadiens et aux Canadiennes de définir l'intérêt national, les principales menaces qui, à leur avis, pèsent sur le Canada et comment ils voudraient que le gouvernement réponde à ces menaces. Les Canadiens et les Canadiennes ont clairement exprimé leur opinion sur la sécurité nationale au Canada. Nous poursuivrons notre examen tout au long de l'été afin de pouvoir établir un consensus sur la vision des Canadiens concernant l'avenir de nos forces armées.
Aujourd'hui, le premier groupe porte sur les capacités, les missions, les tâches et les problèmes des réserves des Forces canadiennes.
Chers collègues, nous accueillons notre premier témoin, le major-général H.M. Petras, chef des réserves et des cadets des Forces canadiennes. Il a débuté sa carrière militaire à l'âge de 16 ans et a occupé divers postes de commandement et d'état-major dans le Secteur du Centre de la Force terrestre, et a été nommé par la suite commandant adjoint de secteur. Récemment, il a servi au sein de l'état-major de l'armée de terre à Ottawa à titre de directeur général des Réserves terrestres et de directeur général du Développement des techniques de combat de l'armée de terre, à Kingston en Ontario. Il a accédé au poste qu'il exerce à l'heure actuelle en décembre 2004.
Général, nous vous souhaitons la bienvenue au comité. Vous avez la parole.
Le major général H.M. Petras, chef, Réserves et cadets, Défense nationale : Honorables sénateurs, je suis officier de réserve et à ce titre, j'ai concilié des carrières militaire et civile pendant plus de 35 ans. Au civil, j'étais directeur d'une école secondaire catholique à Sudbury, en Ontario, et administrateur de conseil scolaire. Dans la réserve militaire, j'ai occupé divers postes de commandement et d'état-major. Juste avant d'être nommé chef des Réserves et cadets, j'ai assumé pendant 18 mois les fonctions de directeur général du Développement des méthodes de combat pour l'armée.
Je suis heureux d'être ici aujourd'hui pour parler de la réserve des Forces canadiennes, en particulier de la Première réserve. Je présenterai d'abord brièvement les quatre éléments constitutifs de la Force de réserve. J'aborderai ensuite le rôle et l'avenir de la Première réserve. Pour terminer, je décrirai la place qu'occupe la réserve au sein des Forces canadiennes dans leur ensemble.
La Force de réserve se compose de quatre éléments — la Première réserve, les Rangers canadiens, le Cadre des instructeurs de cadets et la Réserve supplémentaire. La Première réserve compte 25 000 membres. Elle a pour mission d'appuyer et de renforcer la force régulière. Elle se divise en six éléments — et j'ai arrondi les chiffres simplement pour vous en donner une idée. La Réserve navale, qui compte environ 3 900 membres; la Réserve de l'armée de terre, ou milice, qui compte un peu plus de 16 000 membres; la Réserve aérienne qui compte environ 2 000 membres; la Réserve des communications, qui compte moins de 2 000 membres; la Réserve des services de santé qui compte un peu plus de 1 500 membres, et enfin la Réserve des services juridiques qui se compose de 62 officiers. La Première réserve est l'élément de la réserve qui collabore le plus étroitement avec la Force régulière. Elle contribue à accroître la capacité des Forces canadiennes dans leur ensemble.
En plus, il y a 4 200 Rangers canadiens, dont près de 75 p. 100 sont des Autochtones et des Inuits. Ils sont présents dans 164 communautés réparties dans les régions septentrionales et côtières isolées du pays. Le rôle des Rangers canadiens est d'assurer une présence militaire et de soutenir les opérations des Forces canadiennes dans ces régions au besoin.
Le Cadre des instructeurs de cadets compte environ 6 500 membres. Il se compose d'officiers chargés principalement d'assurer la supervision, l'administration et la formation de jeunes Canadiens de 12 à 18 ans qui participent aux programmes jeunesse des Forces canadiennes.
La Réserve supplémentaire se compose de 45 000 anciens militaires et militaires du rang de la Force régulière et de la Force de réserve. Bien qu'elle ne soit tenue à aucune tâche ni entraînement, elle peut être appelée en renfort advenant une urgence ou une mobilisation nationale.
Au total, la Force de réserve rassemble environ 80 000 citoyens canadiens provenant de presque toutes les villes et villages du pays.
Pour le compte du vice-chef d'état-major de la Défense, je supervise le département des programmes jeunesse, c'est- à-dire le Programme des 55 000 cadets de la marine, de l'armée et de l'air et les 3 000 Rangers juniors canadiens.
À titre de chef des Réserves et cadets, j'assume aussi les fonctions de conseiller principal auprès du Chef d'état-major de la Défense sur les questions qui touchent la réserve. Je tiens à souligner que je ne commande aucun élément de la Force de réserve. Mon titre de conseiller principal en matière de réserve me confère un siège au Conseil des Forces armées; je représente donc la réserve auprès du principal organe décisionnel des Forces canadiennes. Je siège aussi au Comité des forces de réserve nationales de l'OTAN qui réunit des officiers supérieurs de chaque pays membre. À compter de l'an prochain et pour une durée de deux ans, le Canada assurera la présidence de ce comité. Je préside aussi le Conseil des chefs de réserve, groupe consultatif formé d'officiers de la Première réserve, qui se réunit tous les trimestres.
Dans les années 90, on parlait beaucoup de la « force totale ». Ce terme, pourtant bien intentionné, ne reflétait cependant pas la réalité. En effet, il ne reconnaissait pas les différences entre la Force régulière et la Force de réserve, qui contribuent toutes deux de façon unique au mandat des Forces canadiennes. De nos jours, on ne parle plus de « force totale », car l'intégration de la Force régulière et de la Force de réserve est devenue une réalité. Un respect mutuel s'est développé au fil des opérations menées au Canada et à l'étranger. Chaque fois que la Force régulière a besoin de renfort, la réserve lui a prêté main-forte : pensons notamment au débordement de la rivière Rouge en 1997, à la tempête de verglas de janvier 1998, au passage à l'an 2000 et aux feux de forêt de 2003 en Colombie-Britannique, pour ne citer que quelques exemples.
De plus, depuis 10 ans, les réservistes sont de presque toutes les missions internationales des Forces canadiennes. Les réservistes sont des citoyens canadiens prêts à consacrer soirées, fins de semaine et vacances à l'apprentissage d'un métier militaire. Beaucoup passent une grande partie de leur vie en mission, risquant parfois leur vie pour leur pays.
Comme je l'ai indiqué, au cours des 10 dernières années, on a recouru aux réservistes pour appuyer les opérations internationales, que ce soit à titre individuel ou dans le cadre de sous-unités constituées. Leurs capacités ont complété celles de la Force régulière et s'y sont ajoutées. Ce mois-ci, 1 552 militaires canadiens sont en mission internationale et sur ce nombre, environ 199, soit 13 p. 100, sont des réservistes. Par le passé, le taux de réservistes dans certaines opérations dépassait 20 p. 100.
L'énoncé de la politique de défense et la vision des chefs d'état-major de la Défense représentent à la fois des défis et de nouvelles possibilités pour la Force de réserve, dont il faudra préciser les rôles, les missions et les tâches. Certains des aspects à préciser concernent directement la sécurité nationale, en raison de l'emplacement des unités de réserve et de leurs rapports étroits avec la société civile. La réserve est souvent perçue comme une présence dans la communauté.
Les Forces canadiennes n'ont aucunement l'intention de réduire le rôle de la Première réserve; au contraire, on souhaite accroître leur contribution au sein des forces militaires. Le bilan de la Force de réserve au chapitre des missions est déjà très impressionnant. Néanmoins, je crois que si les attentes à leur égard sont bien gérées, les unités de réserve pourront accroître encore davantage leur contribution dans le nouveau contexte de sécurité au Canada et à l'étranger.
Le sénateur Meighen : Je vous souhaite la bienvenue, major général Petras. Je veux vous poser une question à propos de votre dernier paragraphe : « Les Forces canadiennes n'ont aucunement l'intention de réduire le rôle de la Première réserve; au contraire, on souhaite accroître leur contribution au sein des forces militaires ». Vous considérez que « si les attentes à leur égard sont bien gérées, les unités de réserve pourront accroître encore davantage leur contribution dans le nouveau contexte de sécurité ».
Simplement pour jeter un pavé dans la mare, je dirais que la plupart des membres du comité s'intéressent aux réserves et sont bien disposés à leur égard. Je m'avancerais également à dire que la plupart d'entre nous ont des questions à propos de l'efficacité des réserves, de leur capacité à s'acquitter des rôles que vous avez mentionnés ici, et à propos de la volonté du gouvernement et des hauts gradés de promouvoir leur contribution.
Par exemple, la nouvelle politique en matière de défense ne mentionne pas beaucoup les réserves. En fait, je n'ai constaté que trois mentions des réserves. La première, c'est que les réserves continueront à faire partie intégrante de la structure de nos forces militaires à l'échelle nationale, ce qui est une déclaration plus ou moins inattaquable. La deuxième mention prévoit l'ajout de 3 000 membres aux réserves — ce qui est encourageant pour ceux d'entre nous qui appuient les réserves. Cependant, lorsqu'on nous dit qu'il faudra cinq ans pour intégrer les 5 000 membres de la Force régulière à la force principale, on se demande combien d'années il faudra pour obtenir les 3 000 réservistes en question. La troisième mention indique qu'il faudra tirer parti des connaissances militaires et non militaires au sein des réserves. Cela semble en soi également une bonne chose.
On donne toujours une grande visibilité aux réserves dans les discussions sur le rôle des Forces canadiennes, mais font-elles vraiment partie intégrante du programme de transformation des Forces canadiennes? Dans l'affirmative, quels sont les exemples concrets que vous pouvez apporter à cet égard? La plupart d'entre nous comprennent bien que le chef d'état-major de la Défense veut transformer la Force régulière. Je suis moins convaincu, parce que j'en ai moins entendu parler, que cela s'applique également à la Force de réserve.
Dans le même ordre d'idées, il y a eu un certain nombre d'études, de commissions, d'enquêtes et de rapports portant sur la réorganisation et la restructuration des réserves. Je songe entre autres au rapport Fraser. À moins que je me trompe, je ne constate pas que ces initiatives aient eu beaucoup d'influence. Nous continuons d'entendre parler de la difficulté de passer des réserves à la Force régulière et vice versa, de ne pas pouvoir suivre l'entraînement à l'aide du même équipement et de la durée qu'il faut pour s'enrôler dans la réserve. J'ai un exemple particulier d'une personne à qui il a fallu un an pour entrer dans la réserve.
Où sont les résultats? Quels sont les changements qui ont été apportés?
Le mgén Petras : Votre question comporte plusieurs points. Si vous me permettez de mettre l'accent sur l'observation que vous avez faite à propos des divers rapports qui ont été préparés concernant les changements à apporter à la réserve, en répondant à cette question, je pourrai la situer dans le contexte de la situation actuelle et de l'orientation que nous voulons prendre.
Le rapport Fraser, le rapport de la Commission spéciale sur la restructuration des réserves, a été publié au milieu des années 90. La publication de ce rapport coïncidait avec toute une série de compressions budgétaires dont avaient fait l'objet les Forces canadiennes et les forces du monde entier. La Commission spéciale sur la restructuration des réserves avait fait de nombreuses propositions qui étaient excellentes. Si vous analysez ce qui s'est passé depuis, vous constaterez que la majorité de ses recommandations ont été mises en œuvre. La majorité des mesures recommandées dans le premier rapport Fraser ont été bel et bien mises en œuvre.
Le problème, c'est qu'entre 1995 et 2000, en pleine période de compressions budgétaires, dès qu'on parle de budgets et de leurs conséquences pour les réserves et la Force régulière, les fissures ont tendance à se manifester dans les secteurs qui font l'objet de compressions budgétaires et dans les secteurs auxquels sont affectées des ressources budgétaires particulières. L'atmosphère n'était pas très saine à la fin des années 90.
En 2000, lorsque le général Jeffrey est entré en fonctions, on lui a demandé de s'occuper de la restructuration de la réserve de la force terrestre, et il a réussi à rallier tous les intéressés. Nous considérons qu'au cours de cette première phase de la restructuration qui a touché la réserve terrestre au cours de la période de trois ans en question, on a fait de sérieux efforts pour rétablir la confiance parce que dans une grande mesure, les personnes qui s'occupaient de la restructuration avaient indiqué de façon ouverte et transparente le rôle qu'à leur avis devaient jouer les réservistes.
Le sénateur Meighen : Est-ce que vous parlez de rétablir la confiance entre la Force régulière et les réservistes?
Le mgén Petras : Oui. Le général Jeffrey a dit que la confiance, c'est comme un mariage — il faut y travailler chaque jour. C'est tout à fait l'attitude qui a été manifestée à l'époque.
Au cours de la phase deux de la restructuration de la réserve terrestre, nous avons tenu à nous assurer que des fonds appropriés étaient attribués en fonction du taux de croissance prévu.
Pour revenir à votre question, et indépendamment du rôle de l'armée et de notre rôle au sein des Forces canadiennes, les réserves dans l'ensemble étaient bien positionnées lorsque le nouvel énoncé en matière de politique de défense a été rendu public et lorsque la vision du chef d'état-major de la Défense a été communiquée dans le cadre de cet énoncé. J'aimerais faire quelques remarques.
Tout d'abord, comme je l'ai mentionné dans mes remarques liminaires, en tant que chef des réserves, je suis membre à part entière du Conseil des Forces armées, qui dirige l'orientation des Forces canadiennes. En tant que chef des réserves, j'ai également directement accès au chef d'état-major de la Défense. Les personnes qui me conseillent sur les questions concernant la réserve sont le Conseil des chefs de réserve. Il s'agit des généraux de haut rang des réserves au pays, en plus d'autres personnes. Je m'assure que les conseils que je fournis au Conseil des Forces armées sont crédibles, puisque nous entretenons des liens avec tous les membres de la réserve.
Le chef d'état-major de la Défense a entamé le processus de transformation à l'aide de quatre équipes. Nous avons pris soin à ce stade d'inclure, à la demande du chef d'état-major de la Défense, des réservistes en service à temps plein afin qu'ils participent à ces équipes de transformation. À la demande du chef d'état-major de la Défense, j'ai pleinement participé à ce processus depuis ses débuts. Nous avons l'intention de continuer à procéder ainsi tout au long de la transformation des Forces canadiennes.
Vous avez parlé de résultats concrets. Qu'ont fait les réserves?
Le sénateur Meighen : Où est l'argent?
Le mgén Petras : Je n'ai pas les chiffres exacts, parce qu'à l'heure actuelle ils sont établis surtout pour l'armée. Ils sont immobilisés dans le budget pour l'instant, mais on nous a assuré que l'on prévoira les ressources voulues pour l'ajout des 3 000 réservistes.
Vous avez dit que l'énoncé de politique de défense et les réserves n'étaient pas mentionnés fréquemment. Je crois que cela était délibéré. Cela montre jusqu'à quel point nous sommes maintenant intégrés. Les réserves continuent d'être une partie essentielle des Forces canadiennes. Lorsque le CEMD parle publiquement des 5 000 et des 3 000, il veut parler des 8 000 personnes qui font partie des Forces canadiennes. Nous nous sommes fermement engagés à l'égard de l'intégration, et nous participons pleinement au processus de transformation de demain.
Le sénateur Meighen : Pourriez-vous parler brièvement de l'allusion que j'ai faite au sujet de l'évidence anecdotique que nous avons eue pour ce qui est des transferts, sans mentionner l'intégration dans les réserves?
Le mgén Petras : L'un des problèmes avec l'évidence anecdotique, c'est qu'il s'agit simplement d'un côté de la médaille. Cependant, si l'on entend suffisamment d'évidence anecdotique, on sait qu'elle est fondée. Les politiques actuelles ont été mises en place à l'époque de la guerre froide. Elles étaient fondées sur un certain degré de risque.
Nous sommes conscients des deux questions que vous avez soulevées. Vous avez posé une question plus particulièrement au sujet du transfert dans la Force régulière. Il est tout aussi compliqué de transférer dans la Force de réserve. C'est surtout en raison des processus administratifs qui sont en place et du niveau de risque que les Forces canadiennes sont prêtes à prendre.
L'amiral Jarvis, le sous-ministre adjoint (Ressources humaines—Militaire), travaille avec nous pour mettre en place un processus de transfert davantage simplifié. Des 5 000 soldats qui se joindront à la Force régulière, nous prévoyons qu'un nombre important viendra de la réserve. Nous ne savons pas combien. Il y en a un nombre important qui se joint à la Force régulière chaque année, et nous voulons certainement faciliter le processus.
Pour ce qui est de l'évidence anecdotique dont vous avez parlé, je dois dire qu'il y a habituellement des problèmes des deux côtés. J'espère avoir répondu à votre question.
Le sénateur Meighen : Oui, vous y avez répondu. Plus d'une personne m'a parlé du temps qu'il fallait pour avoir une réponse. Les gens commencent à se demander si leur demande s'est perdue sous un bureau quelque part. Les choses se sont peut-être améliorées.
Le sénateur Nolin : J'ai une question supplémentaire. Je vais citer la phrase que vous venez d'utiliser, car cela m'a laissé perplexe. Vous parliez de M. Jarvis, et vous avez dit « il travaille avec nous ».
Qu'entendez-vous par là? Voulez-vous parler de l'avenir, de quelque chose qui n'a pas encore commencé? Que vouliez-vous vraiment dire?
Le mgén Petras : Je n'ai pas très bien articulé. Lorsque le CEMD a dit que 8 000 personnes allaient se joindre aux Forces canadiennes, à ce moment en particulier, nous tentions depuis assez longtemps d'améliorer le recrutement et la façon dont nous faisons les transferts. L'objectif est d'avoir une politique en juillet, et la composante de la réserve des Forces canadiennes a été pleinement engagée. En d'autres termes, à mesure qu'ils génèrent cette politique, cette dernière est administrée par nous et par les dirigeants principaux de la réserve, afin de fournir l'épreuve de vérité et de s'assurer que cette politique pourra en fait fonctionner pour la réserve.
Le sénateur Meighen : Il faut faire bien attention de ne pas trop généraliser. Je comprends qu'il y ait différents problèmes, selon que l'on parle de la milice, de la force aérienne ou de la marine.
Cependant, que fait-on pour régler certains des problèmes généraux? Que peut-on faire pour régler le problème lié au fait qu'un certain nombre de gens dans les réserves sont bien formés mais n'ont légalement aucune obligation de servir lorsqu'on leur demande de le faire? De votre côté, vous devez espérer qu'un nombre suffisant de réservistes se présenteront et pourront obtenir un congé. Il est peut-être plus facile d'obtenir un congé pour certaines professions que pour d'autres.
Le programme de la réserve semble viser les étudiants universitaires, en ce sens que la formation se fait surtout l'été. Pour quelqu'un qui n'étudie pas à l'université, il peut être difficile de trouver sept semaines pour suivre la formation nécessaire. On me dit que pour quelqu'un qui occupe un emploi régulier, en insistant suffisamment et assez longtemps, il est possible de faire sa formation à d'autres moments, mais cette option n'est pas offerte facilement. Il faut vraiment travailler très fort pour obtenir cette permission. Vous pourriez peut-être faire des commentaires à ce sujet.
Enfin qu'en est-il des réserves et des rapports qu'elles entretiennent avec la collectivité? Il y a, me semble-t-il, une grosse différence entre le rôle des réserves à Brockville et leur rôle au centre-ville de Vancouver. Il est certain que les réserves sont en partie là pour assurer le lien entre les Forces canadiennes et la collectivité. Je ne parlerai même pas de la question du port ou non de l'uniforme et de tout ce qui nous fâche lorsque nous entendons parler de ce genre de chose, mais peut-être cela est-il en train de changer.
Le mgén Petras : Pour répondre à votre première question, c'est-à-dire la disponibilité des réservistes, nous venons de boucler la semaine dernière une conférence internationale sur l'appui donné par les employeurs. Les alliés traditionnels — Grande-Bretagne, Australie, Nouvelle-Zélande, États-Unis et nous-mêmes — on fait beaucoup dans ce sens. Chacun de ces pays a légiféré pour permettre aux réservistes d'avoir le droit de réintégrer leur emploi après avoir été appelés en mission.
Pour l'instant, au Canada, le texte de loi qui est examiné dans le contexte du projet de loi C-7 permettra la réintégration, mais uniquement en période d'extrême urgence. Dans un certain sens, nous sommes les victimes de notre propre réussite parce que depuis 10 ans, pour toutes nos opérations, nous n'avons jamais eu aucun problème à avoir plus de réservistes qu'il ne nous en fallait qui se portaient volontaires pour aller outre-mer. Pour nos opérations en Bosnie, en Afghanistan et dans le Golfe, il y a toujours eu plus de volontaires qu'il ne nous en fallait.
Cela ne veut pas dire qu'il ne faille pas procéder à une planification prudente au cas où la situation s'aggraverait, mais c'est ce qu'il en est actuellement. Nous avons des volontaires, et nous les avons surtout grâce à l'excellent travail du Conseil de liaison des Forces canadiennes sous la direction de John Eaton. D'éminents Canadiens d'un peu partout au pays font partie de ces comités provinciaux qui assurent le lien nécessaire avec les employeurs pour faire en sorte que les contrats de travail soient assortis de dispositions accommodantes pour les membres des réserves. Pour l'instant, cela semble produire de bons résultats pour nous.
Effectivement, plus la collectivité est petite, plus il est facile d'établir un lien avec elle et devenir un de ses éléments majeurs. À Vancouver ou à Toronto, c'est un peu plus difficile. Il n'empêche que chacun des officiers qui commandent une unité de réserve, tout l'état-major des forces de réserves, a pour mandat d'établir ce lien avec la population. Une bonne partie de ce que nous faisons consiste précisément à faire partie de la collectivité. Chaque année, les unités organisent un très grand nombre de manifestations d'intérêt communautaire. Ces activités sont extrêmement visibles. Le plus gros problème que rencontrent les unités de réserve est invariablement un problème de temps. Lorsqu'on est membre à temps partiel, il est certain qu'on n'a qu'un nombre limité d'heures à consacrer. La mission consiste à faire en sorte que les troupes soient bien entraînées, que les opérations soient bien ciblées. En même temps, on a également pour mission d'établir ce lien avec la collectivité. Le temps qu'on peut consacrer à ce genre de chose dépend énormément du commandant de l'unité.
Le sénateur Meighen : Vous avez parlé des mesures législatives adoptées par les autres pays pour protéger l'emploi des réservistes, et cela m'intrigue. Que dit la loi au Canada?
Le mgén Petras : Le projet de loi C-7, si je ne me trompe pas.
Le sénateur Meighen : Mais il n'est pas encore adopté.
Le mgén Petras : En effet. C'est un projet de loi à l'étude, et il contient une définition d'une situation d'urgence telle qu'elle est définie par le gouvernement. Certains autres pays ont des définitions un peu plus larges que ce que nous envisageons pour le Canada. Nous nous penchons actuellement sur cette question pour voir si cette définition correspond bien à nos besoins mais au bout du compte, comme vous le savez, la mobilisation de la Force de réserve est une décision politique.
Le sénateur Meighen : Les membres du comité et les témoins que nous avons entendus ont déjà discuté des avantages et inconvénients d'une loi qui protégerait le réserviste en lui permettant de servir son pays sans craindre pour son emploi — ce qui est le cas, je crois, aux États-Unis comme d'ailleurs dans beaucoup d'autres pays; dans notre cas à nous, il n'y a encore aucune loi. D'aucuns disent que si on met cela dans la loi, un employeur que la chose préoccupe demandera à un employé potentiel s'il fait ou non partie de la réserve, s'il a l'intention d'en faire partie, ce qui pourrait à ce moment-là influencer sa décision de l'engager ou non. Avez-vous une idée de la solution à adopter?
Le mgén Petras : Tout à fait, oui. D'autres vous auront sans doute dit que les lois sur l'emploi sont une arme à deux tranchants. Nos alliés commencent à constater, surtout ceux qui participent à de longues opérations, que dans notre situation les réservistes doivent se porter volontaires et que les employeurs doivent appuyer ce que nous faisons. En démocratie, ce ne sont pas tous les employeurs qui appuient le genre d'opérations que nous menons. Le plus gros problème, ce ne sont pas les grosses entreprises.
Par exemple, samedi soir, c'était la soirée des Récompenses aux employeurs pour leur appui aux réservistes et Home Depot a été le gagnant national. Une entreprise de la taille de Home Depot ne rechigne pas à donner des congés à ses réservistes. Pour une petite boîte, où le premier maître est contremaître d'un petit atelier et peut être appelé à intervalles réguliers, les conséquences sont énormes. Nous estimons pour l'instant qu'il faut continuer de procéder comme nous le faisons moyennant peut-être une loi mineure pour les véritables urgences tout en continuant de fonctionner avec le conseil de liaison et les volontaires.
Le sénateur Meighen : Vous avez parlé de Home Depot et, effectivement, pour être allé plusieurs fois à Juno Beach, je peux vous dire que le soutien de Home Depot était très visible. On se demande pourquoi ce n'est pas le cas d'autres grandes entreprises.
Qu'en est-il du gouvernement fédéral? Appuie-t-il ses employés? On s'imaginerait qu'il ferait partie des récipiendaires.
Le mgén Petras : Au début, on a constaté que le gouvernement n'avait pas vraiment de politique d'appui aux réservistes. Il y a deux ans, il s'est engagé à les appuyer et à encourager tous les ministères à en faire autant. Par l'intermédiaire du conseil de liaison, mon organisation tente de faire signer à chaque ministère un texte d'appui. Nous sommes sur la bonne voie.
Le président : Major général Petras, nous sommes curieux. Sur l'ensemble des ministères, combien ont signé?
Le mgén Petras : Je n'ai pas le chiffre sous la main. Je dirais environ le tiers.
Le président : Est-ce la même chose pour les organisations, les sociétés d'État ou des entités comme la GRC?
Le mgén Petras : Oui. De fait, le commissaire de la GRC et le CEMD en discutaient tout dernièrement. Une de mes fonctions, par l'intermédiaire du conseil de liaison, est d'exercer le plus de pression possible. Nous avons une campagne qui vise expressément les sociétés d'État et d'autres ministères.
Le président : Général, vous avez décrit un paradigme selon lequel nos réservistes se retrouvent dans des environnements assez peu dangereux. Nous observons une situation aux États-Unis avec les réservistes et avec la Garde nationale où ils ne se retrouvent pas vraiment dans un cadre inoffensif. Il y a des gens qui sont beaucoup moins chauds à l'idée de se présenter. Ils le font parce que la loi les y oblige, mais on imagine que sans cette loi, ils ne se présenteraient pas et les Américains auraient beaucoup de mal à atteindre les objectifs que leur pays s'est fixés. Avez- vous une réaction à cela?
Le mgén Petras : Il est vrai que nous avons plus tendance à envoyer nos réservistes dans des endroits moins dangereux. La position maintenant, au moment où nous entreprenons la transformation des Forces canadiennes et après avoir été en activité deux ou trois ans, c'est qu'il y aura certaines capacités au sein de la réserve qui font qu'à cause de l'ensemble des compétences qu'elle a, elle pourra maintenir un degré plus élevé de préparation dans la réserve. Cela va exiger un engagement de la part des gens. Je vais donner la coopération civilo-militaire en exemple.
Le groupe de coopération civilo-militaire ira dans un théâtre comme celui de l'Afghanistan avec la première équipe sur place. Tous les réservistes ne partiront pas forcément avec la rotation zéro, la première incursion dans le pays. Toutefois, il ne fait pas de doute que si le risque est élevé, et même si les réservistes ont reçu un entraînement complet et sont capables de se protéger et d'apporter une contribution — il est certain qu'il faut s'assurer que les forces que vous envoyez, après une évaluation du risque, peuvent faire face aux problèmes de sécurité initiaux que vous allez rencontrer une fois dans le pays.
Le président : Je pense au déménagement de Kaboul à Kandahar au moment de la prochaine rotation; ce cadre-là sera différent. Nous pourrions bien avoir des pertes. Dans cette éventualité, pensez-vous toujours que les politiques actuelles sont efficaces?
Le mgén Petras : Je pense que oui. De fait, nous allons voir quels réservistes devraient faire partie de l'opération à Kandahar; nous sommes en train de faire les plans. On me demandera de faire des recommandations et certains réservistes sont mieux à même de travailler dans ce genre de cadre.
Le président : Je ne parle pas de leur capacité; je parle de la disponibilité en général des réservistes. Si les pertes sont lourdes, en auriez-vous moins à votre disposition?
Le mgén Petras : Ce n'est pas encore arrivé.
Le président : C'est précisément ce que je dis.
Le mgén Petras : Exactement. Je pense que c'est un pont qu'il faudra traverser. Je veux vous donner un exemple : le cas de la poche de Medak en 1994. Plus de la moitié de l'unité était composée de réservistes quand les tirs ont commencé. Cela n'a pas nui du tout à notre effort de recrutement après coup.
Le président : Bien dit. Bonne réponse.
Le sénateur Meighen : Personne n'était au courant de la poche de Medak à l'époque — mais c'est une autre histoire.
Pensez-vous qu'il est possible de soutenir qu'une bonne raison d'encourager la Force de réserve c'est qu'un réserviste coûte moins cher aux contribuables canadiens qu'un membre de la Force régulière? Est-ce que c'est vrai? Peut-on le prouver selon vous?
Le mgén Petras : Certainement pas si les Forces canadiennes étaient entièrement composées de réservistes, si c'est la question que vous posez.
Le sénateur Meighen : Non.
Le mgén Petras : Je comprends ce que vous voulez dire. Il est moins cher de déployer un réserviste qu'un soldat de la Régulière.
Le sénateur Meighen : Oui.
Le mgén Petras : Dans ma déclaration, j'ai parlé de la force totale. J'ai dit que dans les années 90 les autorités avaient essayé de faire en sorte que les réservistes soient comme des soldats réguliers — et ce n'est pas le cas. Les réservistes, pour emprunter une image au base-ball, sont analogues à l'équipe école triple A par rapport à l'équipe professionnelle. La principale différence entre les réguliers et les réservistes, comme je l'ai dit, c'est le temps qu'ils peuvent donner. Même si je passe un an à me préparer à partir pour une opération, je vais être pas mal prêt à la fin de l'année, mais pas autant que celui qui y consacre toutes ses journées.
En un certain sens, pour répondre à votre question, nous pensons que les réservistes remplissent deux fonctions. Ils font office de réserve stratégique pour le pays. Tous ceux qui font du temps partiel — et environ les deux tiers d'entre eux devraient faire partie de la réserve stratégique. Cela s'apparente à la valeur de l'assurance que vous achetez pour protéger votre maison.
Dans les années 90, on s'est aperçu que les réservistes peuvent aussi fournir un appui au côté opérationnel. Nous avons constaté aussi que certaines capacités sont meilleures dans les réserves. La conclusion, c'est que certaines choses vont demander plus de temps et un engagement plus lourd de la part des réservistes qui y seront. Oui, ils coûtent mois cher à long terme, si vous les laissez mijoter à un niveau légèrement inférieur à celui de l'étape de préparation et si vous prenez quelques mois pour les mettre à niveau quand vous en avez besoin pour les opérations.
Le sénateur Meighen : Les réservistes sont-ils donc par définition exclus de certaines occupations chez les militaires tout simplement parce qu'il serait trop compliqué et trop long de les former? A-t-on tendance à leur donner le travail du bidasse, qui demande peu ou pas de formation de pointe ou à long terme?
Le mgén Petras : Je ne suis pas sûr si je suis d'accord à propos du travail de bidasse, quoiqu'il s'agisse d'une expression de l'infanterie qui est plutôt un compliment. Je comprends quand même ce que vous dites, sénateur. Le temps est un gros facteur. Il arrive que des gens puissent pendant leur carrière s'engager pour une plus longue période. Quand ils le font, ils peuvent faire du travail plus complexe. Votre question renvoie à un problème du passé, les réservistes défaillants. Ce problème n'existe plus aujourd'hui. Il y a du travail très complexe que peuvent faire les réservistes, souvent grâce aux compétences qu'ils amènent de la vie civile et qu'ils peuvent utiliser dans cet environnement.
Comme réserviste, c'est vous qui choisissez de vous enrôler. Je ne tiendrais pas particulièrement à piloter un CF-18 si j'étais pilote privé incapable de rester à niveau. Si j'étais un pilote d'Air Canada chevronné, je pourrais peut-être le faire, si nous voulions affecter les ressources en temps.
Le sénateur Meighen : Je veux corriger ce que j'ai dit. J'ai parlé de Juno Beach. Home Depot y était très bien représenté. J'aurais dû aussi mentionner Wal-Mart parce que les deux entreprises ont beaucoup soutenu nos forces armées et je les salue.
Le sénateur Munson : J'ai une question au sujet des corps étrangers de réservistes d'une façon plus générale. J'ai parfois le sentiment que les réservistes sont comme Rodney Dangerfield — autrement dit, ils ne reçoivent pas assez de respect. On les voit combattre les feux de forêt et empiler des sacs de sable pendant des tempêtes de verglas et ce genre de choses, mais au bout du compte, ils disparaissent dans un autre cadre.
Pour l'avenir, pour la transformation, envisagez-vous des efforts en vue de déployer des corps ou des réservistes étrangers dans des opérations dans d'autres pays?
Le mgén Petras : Oui. Serions-nous restés plus longtemps en Bosnie? C'était l'intention et je m'occupais moi-même des plans. Il n'y avait pas de doute que, dans les années 90, les réservistes étaient utilisés pour renforcer et compléter la Force régulière.
Prenez la réserve de la marine; elle a sa propre mission. C'est elle qui s'occupe des navires de défense côtière. C'est un groupe formé, en quelque sorte. Tout l'équipage de navire est composé de réservistes de la marine.
À l'étranger, quand le théâtre a commencé à prendre un peu de maturité en Bosnie, ils ont commencé à envoyer des compagnies de carabiniers de 130 hommes qui étaient tous réservistes et commandés par des réservistes, avec l'injection d'un soldat régulier ici ou là, au besoin. Si nous étions restés plus longtemps en Bosnie, d'ici à 2008 nous aurions atteint le stade où nous aurions eu un groupement tactique lourd de la réserve en Bosnie — et en aurions fait une opération de la réserve. L'esprit ou l'intention était là; les dirigeants étaient prêts à prendre le risque. C'est certainement quelque chose que, quand l'évaluation du risque est faite et que nous examinons les capacités que les réservistes peuvent contribuer, nous avons l'intention de faire dans l'avenir.
Le sénateur Munson : Vous avez le sentiment que les dirigeants continueront de prendre ce risque dans l'avenir?
Le mgén Petras : Absolument.
Le sénateur Munson : Pensez-vous que la réserve de la force aérienne va grandir et s'acheminer vers des unités constituées?
Le mgén Petras : Dans le schéma actuel, dans le cadre de la stratégie, cela va être refaçonné dans le cadre de la transformation des Forces canadiennes. Il n'y a pas d'indication qu'on va le faire. Pour ce qui est de la restructuration des unités, je n'en ai pas entendu parler. Cela n'interdit toutefois pas que cela se fasse dans l'avenir.
Le sénateur Munson : Je n'ai pas beaucoup baigné dans l'environnement des militaires, quoique j'aie beaucoup appris ici au comité. Qu'est-ce qui attire aux programmes des cadets? Comment attirez-vous les jeunes hommes et femmes à s'enrôler comme réservistes? Dépensez-vous assez d'argent pour la promotion du programme? Je suis enclin à penser que beaucoup de jeunes diront que le dernier endroit où ils voudraient être, c'est dans la réserve.
Le mgén Petras : La réponse est dans les résultats que l'on obtient. Il faut travailler dur à la publicité, oui. Il faut travailler dur pour indiquer que servir dans la réserve est un défi, que c'est intéressant et l'occasion pour les citoyens de servir leur pays. La concentration sur le patriotisme, c'est quelque chose que les gens voient. Il semble y avoir un désir de faire quelque chose pour son pays. Si vous pouvez le faire d'une façon palpitante et intéressante, tant mieux.
Nous avons eu très peu de mal à atteindre nos objectifs de recrutement. Quand les fonds ont été fournis et qu'il y a eu une campagne, les recrues se sont présentées sans difficulté.
Le sénateur Munson : Qu'en est-il du port de l'uniforme? L'uniforme est pour l'étranger et dans toutes ces missions. Dans les rues d'Ottawa, on voit l'uniforme de temps à autre. Que s'est-il passé au cours des 10 dernières années, quand les Canadiens étaient fiers des réservistes, que ce soit au pays ou ailleurs, pourtant parfois on a tendance à détourner le regard quand on voit quelqu'un en uniforme dans la rue? Devrait-il y avoir une campagne vigoureuse pour encourager le port de l'uniforme? Cela ne signifie pas forcément que nous sommes un pays belliqueux. Être fier de l'uniforme et le montrer serait une bonne chose. Après tout, nous portons tous nos costumes, aujourd'hui, nos uniformes.
Le mgén Petras : Je ne suis pas en désaccord avec vous, sénateur. Je porte mon uniforme quand je peux et quand cela convient. Dans une certaine mesure, les politiques en vigueur maintenant s'inscrivaient dans le cadre des préoccupations sécuritaires au lendemain des attentats du 11 septembre. Si vous demandiez à un militaire s'il préférerait porter son uniforme tout le temps et avec fierté, la réponse serait affirmative. Il s'agit d'examiner cette politique pour voir si le fait de ne pas porter l'uniforme tous les jours en public a d'autres implications. Rien ne nous empêche de le faire. En effet, on voit des militaires en uniforme dans les villes et partout ailleurs. Les militaires vont au travail le matin en uniforme. Ici, les autobus sont pleins de militaires en uniforme.
Le président : Avant le 11 septembre, le MDN avait une politique en vertu de laquelle on portait l'uniforme certains jours de la semaine. Cela remonte à un certain temps déjà.
Le mgén Petras : Bien compris! Je ne m'attarde pas là-dessus. J'ai utilisé cet exemple parmi tant d'autres qui expliquerait pourquoi le port d'uniforme ne se fait pas.
Le sénateur Munson : Vous avez évoqué le base-ball triple A. Les Lynx d'Ottawa sont une très bonne équipe. Pourquoi se contenter d'un simple triple A? Quand j'ai parlé tout à l'heure de déployer des unités formées à l'étranger, ce serait comme le base-ball majeur dans le contexte militaire. Pourquoi se contenter de viser le triple A? Pourquoi nos unités ne joueraient-elles pas pour la ligue majeure, pour reprendre l'analogie?
Le mgén Petras : Je n'avais pas terminé mon analogie. Comme au base-ball, les joueurs triple A finissent par devenir des professionnels. Certains d'entre eux jouent pour des équipes professionnelles et terminent leur carrière avec elles. D'autres, en revanche, deviennent des professionnels pendant un certain temps, après quoi, ils sont appelés à faire autre chose.
Le principal problème des réserves a trait au temps dont on dispose pour produire l'expertise voulue dans un domaine donné. Même si nous avons des réservistes qui possèdent un niveau élevé de capacité, et la coopération civilo- militaire en est un bon exemple, durant la période où ces éléments occupent un poste en particulier, au moment de leur vie où ils sont en mesure de s'engager, ils se dirigent vers des équipes professionnelles et deviennent des professionnels, comme tous les autres.
Le sénateur Munson : Quelle est la solde des réservistes? Leur solde est-elle calculée en fonction du grade?
Le mgén Petras : Oui. À ce stade-ci, un réserviste à temps partiel perçoit 85 p. 100 de la solde d'un soldat régulier.
Le sénateur Munson : C'est beaucoup mieux que le salaire minimum, n'est-ce pas?
Le mgén Petras : Absolument. Ils sont très bien payés.
Le sénateur Banks : Les 85 p. 100 que vous venez d'évoquer à l'instant représentent la solde d'un réserviste permanent ou à temps plein, n'est-ce pas? D'autre part, quelle est la solde d'un simple soldat réserviste dans la milice qui prend son service le mercredi soir?
Le mgén Petras : Il reçoit 85 p. 100 de la solde régulière d'un soldat, sénateur. Les réservistes à temps partiel et à temps plein qui ne sont pas déployés dans le cadre d'opérations à l'étranger, ni affectés à des vaisseaux de la défense côtière non opérationnels, reçoivent 85 p. 100.
Le sénateur Banks : Pourriez-vous faire une ventilation? Pour un simple soldat à la Princess Patricia's Canadian Light Infantry, vos calculs sont-ils uniquement arithmétiques, c'est-à-dire que vous vous dites que ma nouvelle solde sur 365 jours représente 85 p. 100 de ce qu'un membre de la Seaforth Highlanders reçoit, puis vous divisez cela en 8 heures, 12 heures et 24 heures?
Le mgén Petras : C'est calculé selon un taux quotidien, puis divisé de cette façon.
Le sénateur Banks : Est-ce simplement une question d'arithmétique?
Le mgén Petras : Oui, c'est exact.
L'emploi que j'occupais avant de devenir militaire à temps plein au cours des 18 derniers mois était ce qu'on appelle un poste de catégorie A. Dans ce poste, ma solde était de 85 p. 100 inférieure à celle d'un officier général régulier. Quand j'ai pris mon service à temps plein, nous avons simplement pris 365 et nous l'avons multiplié par le taux quotidien. C'est ainsi qu'on obtient mon salaire annuel.
Le sénateur Banks : Voilà qui rend les choses plus faciles à suivre.
Je vais poursuivre avec l'analogie du triple A, sachant très bien que ce n'est pas une analogie parfaite. Cela dit, puisque c'est vous qui l'avez faite, je vais m'en servir.
Je voudrais vous interroger sur l'avenir, sur les plans futurs et la transformation. Il existe une différence énorme entre la façon dont la réserve aérienne fonctionne et la manière dont la réserve terrestre fonctionne. Vous avez utilisé le mot « intégré » dans votre intervention de tout à l'heure.
Est-il vrai que la milice s'alignera davantage sur le modèle des forces aériennes? Suivra-t-on un autre modèle en vertu duquel on déploierait des unités constituées? Comme vous l'avez dit, certaines compagnies d'infanterie ont été déployées à l'étranger.
Le facteur fierté est important. Je sais que la compagnie d'infanterie de la réserve qui avait été déployée en Bosnie tirera une fierté de sa participation pendant très longtemps. C'est le cas, parce que l'unité est allée là-bas, arborant son insigne, et le régiment a fait le travail requis. C'est très important dans la tradition militaire.
Pour ce qui est de la transformation dont vous parlez, dans quel sens l'armée sera-t-elle orientée?
Le mgén Petras : Dans l'armée, en définitive, ce sera le Chef d'état-major de l'Armée de terre et les éléments de celle- ci qui prendront la décision. Cela dit, comme j'en reviens tout juste, je sais qu'on n'a pas l'intention d'adopter le modèle des forces aériennes. Chaque environnement a fait les choses à sa propre façon et en fonction des impératifs qui ont été établis.
Bon nombre de ceux qui travaillent au sein d'une organisation hautement technique comme les forces aériennes sont des soldats réguliers qui ont demandé une mutation à la réserve aérienne. Ils assureront une formation de trois ou quatre jours par semaine pour fournir du soutien aux postes qu'ils occupaient antérieurement. Je ne dis pas que l'armée n'est pas hautement technique. Je dis simplement que dans une organisation qui est essentiellement technique et axée sur les plates-formes, c'est ce qui arrive.
De plus, dans le contexte où les exigences techniques ne sont pas très élevées, un certain nombre des effectifs occupent des postes traditionnels de catégorie A.
En revanche, les réserves de l'armée sont plus importantes. Là encore, on n'a pas l'intention de changer ce qu'on avait fait avec le déploiement d'unités à l'étranger, comme je l'ai indiqué au sénateur Munson tout à l'heure.
Quand nous parlons de transformation des Forces canadiennes, nous parlons de deux choses. Le commandement et le contrôle sous la perspective de l'intégration. Le CEMD a indiqué qu'un des principes du commandement et du contrôle est que les réserves doivent prendre part activement à tous les niveaux au sein des Forces canadiennes.
Le deuxième volet concerne les capacités. Les Forces canadiennes généreront un certain nombre de capacités. Celles- ci proviendront soit des soldats réguliers, soit des réservistes, selon la partie qui est le mieux équipée pour fournir ces capacités. C'est ce à quoi nous réfléchissons actuellement.
Avons-nous constaté un changement par rapport à ce que vous avez vu en Bosnie avec les unités constituées? C'est possible, mais pas probable, et je pense notamment à la fierté de porter un insigne.
Le sénateur Banks : Pour revenir au modèle, vous recevez actuellement 1,1 milliard de dollars pour couvrir tout ce que vous avez évoqué. Cette somme est-elle suffisante pour amener les cinq forces de réserve au point où elles pourront assurer l'intégration à laquelle vous avez fait allusion et où elles seront pleinement interopérables? Avez-vous suffisamment de ressources financières?
Le mgén Petras : À l'heure actuelle, elles sont suffisantes.
Je vous signalerai que le 1,1 milliard de dollars n'est pas sous forme de fonds. C'est de l'argent qui s'applique à la réserve.
Actuellement, selon le nombre des effectifs et des missions auxquelles ils ont été déployés, je dirais que nous avons suffisamment d'argent pour être fonctionnels.
Comme l'a dit le CEMD ou en réponse à une question semblable concernant le budget en général, il ne fait aucun doute que, au fur et à mesure que nous progresserons dans ce processus de transformation et de mise en œuvre de l'énoncé de la politique de la défense, si nous voulons faire davantage appel aux réserves et si nous pensons que celles-ci devraient posséder de nouvelles capacités, il faudra alors prévoir des ressources en conséquence.
Le sénateur Banks : En ce qui concerne leur fonction, les forces de réserve devraient-elles donc se contenter d'être une image triple A des forces régulières? Voici pourquoi je vous pose la question : si l'instruction est offerte au sein d'une brigade d'infanterie mécanisée, vous devez disposer de l'élément mécanisé. Si cet élément vous manque, c'est que vous ne faites pas vraiment partie de la brigade d'infanterie mécanisée. Cela coûte de l'argent, parce qu'il faut avoir des véhicules. Il ne s'agit pas d'avoir quelques véhicules sur place quand on suit l'instruction pendant sept semaines l'été. Comme vous l'avez signalé, on doit avoir le temps à y consacrer pour atteindre le point où l'intégration devient possible. Cela est-il pris en compte dans la transformation?
Le mgén Petras : À ce stade-ci, tout est envisageable. Comme je l'ai indiqué dans le passé, une mise en garde s'impose : si nous demandons aux réservistes de faire partie d'une infanterie mécanisée, pour reprendre votre exemple, il faut qu'ils puissent y consacrer le temps nécessaire pour faire en sorte que leurs compétences soient à jour. Il arrive parfois que même les soldats réguliers aient à mettre les bouchées doubles en tant que professionnels à temps plein pour faire en sorte qu'ils puissent optimiser l'utilisation de ces véhicules mécanisés.
Le sénateur Banks : C'est vrai dans les deux sens. Une des choses qui pourrait attirer quelqu'un pour ce genre d'instruction serait que le régiment puisse dire : « Nous voulons vous apprendre à utiliser un système canon à percuteur ou à conduire un VBL, mais nous n'en avons pas un seul. » Ce n'est pas ainsi qu'on réussira à attirer des candidats à l'unité, n'est-ce pas? Ne doit-on pas d'abord disposer de véhicules mécanisés?
Le mgén Petras : Absolument. Si on vous donne une mission à remplir, vous devez avoir l'équipement nécessaire pour vous en acquitter. C'est aussi simple que cela. L'idée n'est pas de créer de fausses attentes chez les gens. Se faire appeler une chose, puis faire autre chose, n'est certainement pas une façon de faire.
Le sénateur Banks : Je voudrais revenir à quelque chose que le sénateur Meighen a soulevé. C'est aussi quelque chose que notre ancien collègue, le sénateur Wiebe, avait l'habitude d'évoquer. C'est une question qui nous frustre depuis des années. Elle doit vous frustrer encore davantage. C'est la question du mouvement entre les forces.
Je reviens à votre analogie du triple A. Si on envoie un lanceur qui évolue dans la ligue majeure dans une équipe triple A pour travailler son lancer, il quittera alors la ligue majeure le mercredi pour jouer le lendemain, le jeudi, à Ottawa. Nous savons depuis longtemps maintenant à quel point il est difficile de passer de la ligue majeure à une équipe triple A au sein des Forces canadiennes. Apparemment, le passage inverse ne pose pas problème, à moins que ce ne soit peut-être difficile dans les deux sens.
Notre frustration tient au fait que, depuis trois ans maintenant, nous entendons des gens, y compris le général qui est directement responsable de la question, nous dire « nous y travaillons ». Cela fait maintenant trois ans que nous posons la question, et rien n'a encore été réglé. Cela ne vous distrait-il pas?
Le mgén Petras : Oui, et j'ai moi-même analysé la question exhaustivement.
Le sénateur Banks : Quel est le problème alors?
Le mgén Petras : C'est plus compliqué que tenter d'élaborer une politique. Peut-être puis-je vous donner un exemple simple. Votre analogie du triple A, si vous voulez pousser les choses...
Le sénateur Banks : En fait, c'était la votre.
Le mgén Petras : C'est vrai.
Si nous voulons pousser les choses un peu plus loin, les lanceurs triple A sont formés au même niveau que les professionnels. La seule différence : sont-ils capables d'évoluer dans une équipe de la ligue majeure, pour reprendre votre terme?
Il y a bien des années, les réservistes n'étaient pas forcément formés au même niveau que les forces régulières. Ils suivaient une formation semblable mais pas la même. Ce n'est qu'il y a environ cinq ans — depuis un peu plus longtemps dans la marine et les forces aériennes — que la réserve terrestre a commencé à mettre l'accent sur une formation identique. Cela étant, le temps ayant toujours été un facteur critique, la formation visait ce qu'on appelait un niveau de capacité essentiel.
Avec la technologie que nous avons aujourd'hui, on peut connaître le delta de chacun, soit la différence au niveau de l'entraînement qu'il y a entre un réserviste et un professionnel. Il est facile de nos jours de s'entraîner pour combler ce delta ou cette différence.
Si je veux entrer dans la Force régulière, les autorités doivent évaluer l'emploi qu'elles offrent, elles doivent évaluer ma formation et mes antécédents, et elles doivent s'assurer qu'il y a concordance entre les deux. Je ne peux pas entrer dans la Force régulière et acquérir tout de suite la formation voulue. Il faut être fait pour l'emploi. C'est là que le problème se posait.
Le sénateur Banks : Je dois vous dire que cette réponse ne me satisfait pas. C'est comme dire à un réserviste que les Forces ne voudront pas de lui tant que la Force de réserve ne l'aura pas formé au niveau voulu. Cela ne me semble pas correct. Mais je ne vous cherche pas querelle. Je vais vous donner un exemple précis dont j'ai entendu parler, et nous en avons entendu plusieurs comme celui-là.
Un pilote des Forces quitte la régulière pour entrer dans la réserve parce qu'il a aujourd'hui un emploi dans une ligne aérienne ou ailleurs. Puis il décide pour une raison quelconque, peut-être pace qu'il a perdu son poste de pilote dans le privé, qu'il veut réintégrer la régulière d'ici quelques mois. Ce n'est pas la formation qui peut l'empêcher de réintégrer la régulière. Mais après un an ou 18 mois, il attend toujours. Or, les Forces canadiennes disent qu'elles ont besoin de pilotes.
On dirait, et d'autres personnes nous l'ont dit, que cela ressemble simplement — sans manquer de respect à quiconque — à la fonction publique de l'Inde où tout est écrit au crayon, il n'y a pas d'automatisation et son système est désuet. Est-ce que cela fait partie du problème?
Le mgén Petras : Absolument. Je tiens à clarifier ce que j'ai dit plus tôt. On ne dit jamais dans la régulière qu'on ne veut pas de vous tant que vous ne serez pas formé à un certain niveau. Il y a des années de cela, la régulière ne savait tout simplement pas qui elle recrutait. Elle en est maintenant au point où elle a une meilleure idée du personnel qu'elle recrute.
Ce que vous dites à propos de ce pilote est tout à fait exact. On a admis qu'il existe des règlements qui ne répondent pas à nos attentes. Si nous voulons muter les gens plus rapidement et dans des postes qui leur conviennent mieux, il faudra se défaire de certains de ces règlements, et c'est ce qu'on veut faire. L'amiral Jarvis me dit qu'il a pour but de faire cela d'ici juillet. Nous avons élaboré ce règlement pour nous assurer qu'il marche pour nous. On peut changer un règlement, mais si on ne change pas la façon dont on le met en œuvre, ça ne donnera rien. Il faudra voir à l'usure si ça marche.
Le sénateur Banks : Nous allons étudier cela de près parce qu'il y a trois ans que nous attendons.
Le mgén Petras : Nous sommes vraiment décidés à améliorer les choses étant donné que nous allons passer aux 8 000 dans les Forces canadiennes.
Le sénateur Banks : Major général Petras, plusieurs articles ont paru ces derniers jours à propos des forces armées américaines qui se trouvent contraintes d'abaisser certaines exigences, car elles ont du mal à retenir leur monde, elles ont des difficultés de rotation et ne peuvent maintenir leurs effectifs au niveau voulu. Par conséquent, elles commencent à fermer les yeux et ne voient pas des choses qui, auparavant, auraient constitué des motifs de renvoi.
Comme nous le savons fort bien, nos forces sont au bout de leur rouleau. Est-ce qu'on commence à baisser les exigences afin d'attirer et de retenir des membres?
Le mgén Petras : Encore là, il s'agit ici du secteur de l'amiral Jarvis, mais rien ne prouve que c'est le cas. Nous avons eu très peu de mal à atteindre nos objectifs de recrutement. Nous n'allons pas abaisser nos normes. Nous savons mieux comment attirer et retenir les gens, et nous assurer que le travail demeure intéressant et stimulant. Tout le travail qui a été fait au niveau de la qualité de la vie a fait que nos forces se portent très bien, en dépit des contraintes que nous impose le rythme opérationnel.
Le président : Major général Petras, l'une des questions du sénateur Meighen à laquelle vous n'avez pas répondu traitait des étudiants universitaires. On constate que certaines unités de la réserve, particulièrement de la milice, ont un contingent élevé d'étudiants du niveau universitaire. Ils sont là pour quatre ans, puis on nous dit qu'ils vivent les changements habituels, lorsqu'ils obtiennent leur diplôme, ils trouvent un emploi, ils se marient, et tout à coup, la réserve ne leur convient plus. Certains d'entre nous au comité trouvent que nous investissons beaucoup et que nous perdons ensuite ces capacités.
Quels plans avez-vous en place pour vous assurer que ces personnes qui entrent dans la réserve à l'université restent plus longtemps, ou avez-vous un programme pour attirer dans la réserve ceux qui ont achevé l'université et qui se sont établis?
Le mgén Petras : Pardonnez-moi si je n'ai pas répondu parce que c'était une bonne question que vous aviez posée, sénateur.
On entend beaucoup de choses, qui sont confirmées dans certains cas par la réalité. Dans ma ville natale, les étudiants obtiennent leur diplôme, puis ils passent souvent à autre chose, quoique nombreux soient ceux qui restent. On oublie que ces gens obtiennent leur diplôme universitaire et se dirigent vers d'autres centres, où ils entrent dans la réserve et y restent. Le commandant de la réserve locale voit beaucoup de monde quitter son unité.
C'est la réalité. À certains moments de leur vie, les gens ont autre chose à faire et n'ont pas toujours du temps pour la réserve. Dans un sens, nous ne considérons pas ces pertes pour les Forces canadiennes comme étant une mauvaise chose. Je crois que, dans une démocratie, tout citoyen doit s'intéresser à la défense et à la sécurité du pays. Si une personne dispose de ce genre de formation et nous quitte pour devenir un citoyen actif, nous avons accompli quelque chose. Mais cependant, ce n'est pas là notre raison d'être. Nous voulons garder ces gens, cela ne fait aucun doute.
Pour ce qui est de ramener ces gens, le sénateur avait parfaitement raison d'en parler. On parle de gens qui doivent se battre pour avoir accès à ces blocs de formation raccourcis. Dans l'armé et les autres armes, toute la formation sera modularisée. Si vous avez sept semaines à vous pendant l'été, vous prenez les sept semaines. Si vous avez deux ou quatre semaines, vous prenez les deux ou quatre semaines parce que la formation est morcelée ainsi.
Mais chose certaine, il est fort possible que ces personnes puissent suivre ces cours pendant l'hiver aussi. Par exemple, le caporal qui me conduisait à Terre-Neuve travaille au Wal-Mart local. Il veut passer sergent mais il n'a jamais eu la possibilité de s'absenter pour suivre un long module de formation. La Réserve terrestre a mis en œuvre la modularisation de la formation, qui lui permettra de suivre des cours à distance et de parfaire sa formation par petits blocs, et il va ainsi passer sergent comme il le désire.
Ce programme est axé sur les universités, c'est vrai, mais cela fait simplement partie de la réalité des forces aujourd'hui.
Le président : Pouvez-vous étayer ce que vous avez dit plus tôt, à savoir que les étudiants universitaires qui quittent la réserve au terme de leurs études vont s'installer ailleurs et s'engagent dans les unités de la réserve? Pouvez-vous nous donner des chiffres, s'il vous plaît?
Le mgén Petras : Non.
Le président : Au pied levé, non.
Le mgén Petras : C'est exact. Je n'ai pas recueilli de données, mais tout comme vous entendez dire que tout le monde s'en va, j'entends dire de mon côté que les gens regagnent la réserve lorsqu'ils s'installent ailleurs.
Le président : Je vous prie de nous fournir cette information, s'il vous plaît.
Le mgén Petras : Je pourrai le faire, sûrement.
[Français]
Le sénateur Nolin : Je vous avoue immédiatement mon conflit d'intérêts car, étant montréalais, je suis membre honoraire du Régiment de Maisonneuve. Par conséquent, vous comprendrez que j'ai un penchant pour la réserve. Plus spécifiquement, l'état de la réserve et celui du Régiment de Maisonneuve me préoccupe.
Revenons sur cette expansion de 3 000 nouveaux réservistes. J'aimerais comprendre comment cette augmentation s'organise. À l'intérieur de quel délai s'effectuera-t-elle? À quels éléments des forces de la réserve seront affectés ces 3 000 nouveaux arrivants?
[Traduction]
Le mgén Petras : Votre question porte sur les 3 000 et leur distribution. Comme vous l'ont dit d'autres témoins, les 3 000 iront essentiellement à l'armé de terre. Ils iront aussi dans la Réserve des communications et la Réserve des services de santé.
Ce qu'on veut faire avec ces 3 000, c'est en prendre une partie pour les affecter dans les unités que nous jugeons un peu dégarnies. Par exemple, si, dans un régiment, vous avez une compagnie d'infanterie dont l'effectif devrait être de 130 personnes mais qui n'en compte que 60, 70 ou 80, nous voulons nous assurer qu'on y assigne suffisamment de monde, et il appartient à l'armée de terre de hausser ces effectifs.
Cela étant dit, un certain nombre de postes seront réservés aux nouvelles capacités de la réserve. Nous sommes d'avis qu'il y a certaines capacités qui pourraient être générées dans la réserve et qui ne seraient pas potentiellement meilleures que celles de la régulière, si on les emploie à plein temps, mais qui pourraient rester à un niveau moindre de préparation, être haussées à un niveau de préparation plus élevé ou être utilisées du fait des compétences particulières qu'elles offrent.
J'ai mentionné la coopération civilo-militaire à titre d'exemple, mais il y en a beaucoup d'autres, dans les opérations psychologiques, le renseignement humain et ainsi de suite. Cela se fait dans toutes les forces, pas seulement dans la Réserve terrestre.
[Français]
Le sénateur Nolin : Vous confirmez donc ce que le comité a entendu depuis plusieurs séances. L'objectif d'augmenter la milice aux environs de 18 500 serait exact. Toutefois, est-il réaliste de s'attendre à ce que cet objectif soit atteint avant la fin du présent exercice? Est-ce vraiment l'objectif visé?
[Traduction]
Le mgén Petras : Je n'ai pas entendu dire que l'armée de terre pourra atteindre cet objectif à court terme. Je dois dire que tous les 18 500 qui sont prévus iront dans la Réserve terrestre, dont la Réserve des services de santé. La Réserve terrestre s'est efforcée sérieusement d'atteindre ses buts, et elle a dépassé depuis longtemps les 16 000 et se dirige vers son objectif final. Je ne connais pas l'échéancier. Cela a été prévu à l'origine pour 2006. Tant qu'on aura l'argent et les ressources voulus — et on me dit que ce sera le cas — même si on n'atteint pas l'objectif en 2006, on l'atteindra peu après. Mais chose certaine, l'effort n'a pas manqué.
Cela étant dit, la seule chose qui pourrait faire obstacle, lorsque nous allons commencer à incorporer les 5 000, c'est que la réserve risque de perdre plus de monde à la régulière. Si cela se produit, il faudra que la réserve recrute davantage.
[Français]
Le sénateur Nolin : Plusieurs de mes collègues sont préoccupés par les problèmes de transfert entre les forces de la réserve et celles de l'armée régulière. Combien de réservistes font cette transition, disons sur une période d'un an? Quelle proportion de réservistes décide de passer du service militaire à temps partiel au service à temps plein? Pouvez- vous exprimer cette proportion en pourcentage?
[Traduction]
Le mgén Petras : Je n'ai pas les chiffres annuels exacts, mais c'est une question qui m'intéresse. Nous sommes passés de 300 à 700 ou 800 par année, tout dépend des événements. Parfois, l'évolution de l'économie a un certain impact. C'était à peu près la moyenne.
[Français]
Le sénateur Nolin : Le ministère a restructuré la rémunération des militaires. Croyez-vous que cela engendrera une tentation de la part des réservistes actuels de quitter la réserve? Le ministère a annoncé publiquement qu'il comptait augmenter de 5 000 membres les effectifs de la force régulière. Croyez-vous que cela entraînera une augmentation du transfert des réservistes vers la force régulière pour combler cet objectif de 5 000 membres? Est-ce que cette question fait partie des plans ou des réflexions sur lesquels vous vous penchez avec vos collègues?
[Traduction]
La restructuration de la solde fera en sorte qu'il sera intéressant pour certains réservistes de passer à la régulière étant donné qu'il y a maintenant 5 000 postes. Est-ce que vous y songez?
Le mgén Petras : Si l'on me permet de revenir à mon analogie avec le baseball, c'est une bonne chose que les réservistes passent à la régulière. Nous sommes conscients qu'un certain nombre d'entre eux le feront. Cependant, nous ne sommes sûrs de rien en ce moment. Nous avons vécu la même chose lorsqu'ils ont incorporé 7 000 personnes dans les forces à peu près au même moment où l'on procédait à la restructuration de la Réserve terrestre. Cela joue, mais pas énormément. Nous sommes prêts à attendre et voir comment ça va se passer. Si un nombre beaucoup plus élevé de réservistes passe à la régulière, il faudra diriger aussi vers la réserve les ressources qu'on emploiera pour recruter les 3 000.
Nous n'avons pas de chiffres précis pour le moment. C'est difficile à deviner. Le CEMD a dit qu'il faudrait entre deux et cinq ans pour recruter les 5 000. Je ne crois pas que cela aura un grand effet sur l'ensemble de la situation.
[Français]
Le sénateur Nolin : Plusieurs membres des forces déployées en théâtre d'opération nous ont fait part de leur frustration selon laquelle il est très difficile d'accorder cette mutation de la réserve vers l'armée régulière. Cette allégation n'est pas purement anecdotique, elle est très réelle. D'ailleurs, vous avez accès aux mêmes informations que nous.
Est-il plus facile pour un citoyen ordinaire d'entrer dans la force régulière que pour un réserviste? Pour qui est-ce plus facile d'accéder à la force régulière?
[Traduction]
Le mgén Petras : Nous avions l'habitude de plaisanter avec mes amis de la régulière lorsqu'ils essayaient de passer à la réserve, et on leur demandait pourquoi ça avait pris tant de temps.
Le sénateur Nolin : De la régulière à la réserve?
Le mgén Petras : Oui.
Le sénateur Nolin : Et dans l'autre sens?
Le mgén Petras : Je leur disais en plaisantant que la réserve était plus exigeante. Mais c'était strictement pour plaisanter.
Comme je l'ai dit plus tôt, il est très compliqué de passer à la réserve, et nous avons finalement réussi à comprendre pourquoi c'était si complexe, à part le fait que certains règlements étaient inspirés par l'attitude qui avait cours pendant la guerre froide, et ce qui était difficile, c'était de savoir clairement à quoi s'attendre quand un réserviste prenait un poste dans la régulière.
[Français]
Le sénateur Nolin : Vous évoquez la période de la guerre froide. Toutefois, cette époque est révolue depuis 15 ans. Quel est le problème aujourd'hui? S'agit-il d'un problème de sécurité nationale ou d'information qui risquerait de mettre en danger la sécurité du pays?
[Traduction]
Le mgén Petras : C'est tout cela et davantage. Je peux réitérer ce que j'ai dit plus tôt, à savoir que nous avons l'intention d'énoncer une politique qui facilitera les choses à ce stade-ci. Nous reconnaissons le problème.
Le sénateur Atkins : Major général Petras, je suis surpris de vous entendre dire que vous n'avez aucune difficulté à recruter.
Comme vous le savez, notre comité parcourt le pays, et nous avons rencontré de nombreux commandants d'unité de réserve. Il est vrai que certains d'entre eux disent que ça va très bien, et d'autres disent que non.
J'imagine que lorsque vous dites que les choses vont bien, c'est de manière générale.
Le mgén Petras : Absolument.
Le sénateur Atkins : Quand vous parlez des 3 000, quel est votre facteur d'attrition moyen par année? Vous devez ajouter cela aux 3 000 au cours des cinq prochaines années.
Le mgén Petras : Oui, c'est exact, sénateur. Vous avez raison. Quand je dis que nous n'avons pas de difficulté à recruter, c'est parce que nous atteignons nos objectifs nationaux. Certaines unités ont énormément de succès dans certains domaines et d'autres ont beaucoup de mal à rester à flot.
Les données sur l'attrition sont toujours intéressantes lorsqu'il s'agit de calculer. Nous tâchons de faire des estimations approximatives. Pendant des années, on disait qu'on avait un taux d'attrition de 30 p. 100 dans la réserve. Pour ce qui est de savoir qui est dans l'organisation et qui est parti, notre technologie s'est améliorée. Notre taux d'attrition comprenait autrefois les mutations à la régulière. Nous ne les comptons plus. Nous sommes dans la même organisation. Une fois que vous êtes recruté, vous y êtes.
Le taux oscille dans les différentes unités, mais il se situe globalement entre 15 et 18 p. 100 en ce moment. Ce sont les chiffres les plus exacts qu'on m'a donnés.
Le sénateur Atkins : J'imagine que ces mutations font partie du facteur d'attrition étant donné les conflits auxquels notre pays a pris part?
Le mgén Petras : Absolument. Elles sont prises en compte dans le taux d'attrition. L'objectif que nous avons dans le cadre de la restructuration de la Réserve terrestre est de 18 500, et le taux d'attrition annuel est pris en compte ici. Les ressources qu'on nous alloue compensent pour cela.
Le sénateur Atkins : Ce qu'on nous a dit aussi lors de nos voyages dans les diverses régions du pays, c'est que bon nombre de ces commandants sont contents quand ils n'obtiennent pas un effectif complet régulièrement étant donné qu'ils n'ont pas les budgets voulus pour accueillir un effectif complet. S'ils en obtiennent les deux tiers, ils peuvent boucler leur budget annuellement.
Si on vous accordait plus d'argent, où l'investiriez-vous dans la réserve?
Le mgén Petras : Si je reviens à ce que vous avez dit à propos de ces commandants qui sont contents de voir qu'ils ont moins de monde...
Le sénateur Atkins : Je ne dis pas qu'ils sont contents.
Le mgén Petras : Je comprends ce que vous dites. Cela revient à gérer les attentes. Nous avons des fonds suffisants en ce moment pour faire ce que nous avons à faire dans les missions et les tâches qui nous sont imparties. Cela revient à gérer les attentes au niveau du commandant local. Ils veulent faire toutes sortes de choses formidables. Tout commandant reçoit sa mission de base qu'il doit réviser, et chacun veut en faire un peu plus. Si vous avez moins de monde et un peu plus d'argent, vous pouvez élargir l'ampleur de la formation et faire plus de manœuvres. C'est la nature humaine qui vous porte à faire cela.
Je ne peux pas vous dire pour le moment où j'utiliserais cet argent si l'on m'accordait des fonds supplémentaires. Nous sommes bien placés dans la transformation des Forces canadiennes, et nous voulons voir où nous allons. Cette transformation nous permettra de déterminer quelles capacités sont les mieux générées par la réserve. Si nous pensons qu'il faut faire certaines choses dans certains domaines, nous aurons besoin d'argent pour cela.
On a bien réparti les ressources pour les 3 000. On s'est engagé à hausser les effectifs des unités et à trouver de nouvelles capacités.
Le sénateur Atkins : Vous dites dans votre déclaration que vous êtes convaincu « que si les attentes à leur égard sont bien gérées, les unités de réserve pourront accroître davantage leur contribution dans le nouveau contexte de sécurité ».
Pourriez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet?
Le mgén Petras : Nous avons retenu des leçons de ce que nous avons essayé de faire dans les années 90. Dans les années 80, la réserve était purement à caractère stratégique. Dans les années 90, la réserve est devenue stratégique et opérationnelle, et presque toute l'attention était portée sur les opérations. Nous avons essayé de convertir les unités de réserve en unités régulières, ce que nous ne sommes pas. En ce moment, nous nous efforçons de maintenir dans la réserve un équilibre entre le stratégique et l'opérationnel afin de mieux faire ce que nous faisons dans les Forces canadiennes.
L'énoncé de politique dit que la réserve doit jouer un plus grand rôle dans les opérations intérieures. Nous sommes parfaitement d'accord. Du fait de notre présence partout au pays, la réserve peut apporter beaucoup. Quand je parle de « bien gérer les attentes », il faut être réaliste lorsqu'il s'agit de déterminer la contribution des réservistes dans cette dimension.
Les réservistes font partie des capacités des Forces canadiennes qui soutiennent les secours d'urgence dans les opérations intérieures.
Le sénateur Atkins : Est-ce qu'il existe des programmes structurés qui visent à mieux intégrer les forces locales aux services d'urgence municipaux dans les régions peuplées? Quel est le mécanisme officiel et réglementaire qui unit les autorités aux commandants de ces unités?
Le mgén Petras : Un commandant local a toujours tendance à vouloir intervenir dès qu'il y a urgence. Quand il y a une inondation ou un incendie, la première chose qu'on veut faire, c'est aider.
Le sénateur Atkins : Quel est le mécanisme?
Le mgén Petras : Si les autorités locales veulent faire appel aux Forces canadiennes, la demande doit être adressée par le solliciteur général au ministère de la Défense nationale, puis la demande est dirigée aux autorités dont relèvent les ressources des Forces canadiennes dans ce secteur, et elles peuvent alors faire droit à la demande.
Le sénateur Atkins : On s'adresse au solliciteur général de la province?
Le mgén Petras : La chaîne de commandement provinciale mène à la chaîne de commandement fédérale, puis on redescend pour donner l'approbation. En cas d'urgence, cela peut se faire assez rapidement.
Vous vouliez savoir ce que nous faisons pour nous rapprocher. Dans le cadre du travail que nous faisons pour faire en sorte que la réserve devienne un actif plus précieux pour les opérations intérieures, le projet de restructuration de la Réserve terrestre a prévu d'assigner des officiers responsables de la planification d'urgence communautaire. Chaque centre dans la municipalité aura un officier assigné à l'organisation locale de planification d'urgence afin que celle-ci sache mieux quelles sont les capacités dont pourraient disposer les Forces canadiennes au besoin. Cela constituera la base des autres choses que nous serions en mesure de faire. Je répète que cela est lié à la transformation des Forces canadiennes qui est en cours en ce moment.
Le sénateur Atkins : Dans certaines unités que nous avons rencontrées, la liaison était excellente. Dans d'autres, ce n'était pas le cas.
Le mgén Petras : Le programme n'est pas encore officiellement en place. Il y a des endroits qui ont ces officiers de liaison, mais la pratique ne s'est pas encore généralisée. Cette notion est née du projet de restructuration de la Réserve terrestre, et on commence à la mettre en oeuvre. Dans certains cas, les commandants locaux ont pris l'initiative et collaborent déjà avec les unités. Nous voulons officialiser ce processus.
Le sénateur Atkins : Il n'y a pas de directive qui dit : « Faites cela. »?
Le mgén Petras : Pas encore, mais il y en aura une bientôt. Une partie du problème tient au fait que cela relevait d'une initiative qui précédait l'énoncé de politique de défense. Nous sommes bien équipés pour la réaliser, mais nous devons nous demander quel rôle les réserves vont jouer dans tout ce processus.
Le sénateur Atkins : Nous avons beaucoup parlé des étudiants universitaires. Vous êtes militaire depuis assez longtemps pour vous souvenir du Corps-école d'officiers canadiens, le COTC. N'y a-t-il pas moyen d'intégrer les réservistes dans les campus universitaires? Est-ce qu'il y a quelque chose que nous ne faisons pas? Est-ce qu'il y a une possibilité de ce côté?
Le mgén Petras : Vous avez raison. Nous n'en tirons pas parti autant qu'on pourrait. Le programme COTC, dans son temps et dans le milieu où nous vivions, était une chose formidable.
Ce qu'on essaie de faire en ce moment, et cela nous ramène à la restructuration de la Réserve terrestre, c'est une initiative qu'on appelle le programme de liaison avec les universités. Il y a divers projets pilotes en cours un peu partout au pays. On a alloué une partie du budget pour recruter expressément à l'université.
L'Université Laval en est un excellent exemple. On a fait de sérieux efforts pour établir des liens avec cette université. À un moment donné, il y avait un bureau de recrutement qui était situé en plein sur le campus. Nous menons divers projets pilotes pour voir s'il y a un intérêt dans les universités du pays. Il y a beaucoup d'autres choses qu'on peut faire de ce côté.
Le sénateur Banks : Si je prends la réponse que vous avez donnée au sénateur Atkins à propos de l'attrition, mes calculs me disent qu'il vous faudrait recruter environ 13 000 nouvelles personnes au cours des cinq prochaines années. Est-ce à peu près cela? Pouvez-vous faire cela?
Le mgén Petras : Je n'en suis pas sûr. Je n'ai pas fait les calculs.
Le sénateur Banks : Si votre taux d'attrition est d'environ 15 p. 100 et que vous avez environ 15 000 personnes en ce moment, c'est donc 2 250 personnes par année sur cinq ans, soit environ 10 000, autrement dit, plus ces 3 000, ça fait 15 000, mais c'est un objectif modeste. Est-ce faisable?
Le mgén Petras : J'imagine que c'est exact, monsieur le sénateur. Comme je l'ai dit, nous avons eu peu de mal à contrer le facteur d'attrition. Cela est déjà pris en compte dans notre façon de faire les choses. Les 3 000 supplémentaires confirment l'engagement qu'a pris le gouvernement d'atteindre les 18 500. Nous avions déjà affecté 1 500 réservistes, et nous savons déjà dans quelles unités nous allons mettre les 750 autres. On s'occupe de placer les 750 qui restent.
Je parle de la Réserve terrestre. Si vous parlez de 3 000 personnes réparties dans 10 brigades, ça fait 300 personnes par brigade. Au bout du compte, ça ne fait pas beaucoup de monde.
Le sénateur Banks : Voici ma dernière question, et elle concerne la Réserve navale. Des gens de la Réserve navale nous ont dit que les navires de défense côtière, les NDC, faisaient obstacle à leur avancement en grade. Comme vous dites, ces navires sont fait pour eux et ils en sont responsables. Mais ils ne peuvent pas aller suivre des cours et ainsi monter en grade. Est-ce un facteur que l'on prend en compte quelque part?
Le mgén Petras : C'est la première fois que j'en entends parler.
Le sénateur Banks : On nous l'a dit souvent.
Le mgén Petras : Je ne doute pas que ce puisse être le cas pour certaines personnes. Cependant, cela revient à un choix personnel. De manière générale, la personne qui prend part à des opérations devrait recevoir la reconnaissance voulue au niveau de l'avancement. Si une personne s'est engagée à temps plein, ce fait devrait être reconnu. Si une personne ne peut pas être libérée pour suivre tous les cours, le fait d'être sur un NDC devient un choix personnel pour cette personne.
Comme je l'ai dit dans mon allocation d'ouverture, j'ai concilié des carrières militaire et civil pour me rendre où je suis. C'est consciemment que j'ai décidé de m'engager pendant 18 mois à temps plein. Cela ne m'a pas fait obstacle, il a fallu le faire pour concilier les deux, et c'est ce qu'on veut aussi.
Le président : Général, quel calendrier avez-vous prévu pour le recrutement des 3 000 réservistes supplémentaires? En quelles années prévoyez-vous les accueillir et combien seront-ils chaque année?
Le mgén Petras : Tout cela se fait dans le cadre du projet de restructuration de l'armée de terre. J'ai signalé, dans mes remarques tout à l'heure, qu'il ne s'agit pas de 3 000 nouveaux réservistes. Ils sont déjà dans le rouage pour l'heure. Si j'ai bien compris, le gouvernement confirme dans l'énoncé de politique le financement nécessaire du recrutement de ces 3 000 réservistes pour porter la réserve à 18 500. Il y a déjà un bon moment que la Réserve terrestre peut compter sur ces effectifs. Certains ont déjà été recrutés et il y en aura d'autres.
Cette responsabilité incombe davantage au chef d'état-major de l'armée de terre mais on me dit que l'objectif est l'année 2006, et il faudra attendre et voir s'il est atteint à ce moment-là. Nous faisons assurément de sérieux efforts pour y parvenir.
Le président : Je vais vous poser la question autrement. On nous a donné l'impression que le recrutement et l'entraînement allaient être sérieusement mis à contribution — ce qui explique pourquoi les 5 000 supplémentaires seront retardés. Avez-vous raison de croire que les 3 000 réservistes en question ne seront opérationnels que dans les deux dernières ou trois dernières années du cycle plutôt que dans la première et la deuxième?
Le mgén Petras : Comme je l'ai dit, certains d'entre eux sont déjà recrutés. Je vais vous donner un exemple. Il y a déjà un bon moment que l'armée recrute. La phase deux de la restructuration est en cours depuis un certain temps, depuis 2003. La phase un s'est terminée en 2003. C'est alors que la phase deux a commencé, à savoir l'engagement de recruter 3 000 personnes supplémentaires. Ce n'est que maintenant que nous pouvons compter sur le financement nécessaire à cette fin. Je ne pense pas qu'il y ait de grosses difficultés pour l'atteinte de cet objectif dans les délais. C'est l'armée qui pourra confirmer si ce sera en 2006.
Le président : Je ne vous demandais pas s'il y avait des difficultés. Je voulais savoir si la capacité sera atteinte.
Le mgén Petras : Nous avons déjà la capacité.
Le président : Vous voulez dire pour recruter et entraîner?
Le mgén Petras : Oui, dans certaines limites. Auparavant, j'étais directeur général de la Réserve de l'armée de terre et de cette expérience je tire l'exemple que j'ai utilisé. Je me suis occupé de la mise en œuvre de la première phase de restructuration de la Réserve de l'armée de terre et nous avons pu porter le nombre de réservistes à 15 500 pendant que l'armée régulière recrutait 7 000 personnes. C'était limite. Nous avons dû composer. Je ne prétends pas qu'il n'y a pas de difficultés. Nous faisons de sérieux efforts et nous pensons que les objectifs seront atteints dans les délais.
Le président : Comment arrivez-vous à suivre la situation de chaque unité de réserve d'un bout à l'autre du pays? Dans quelle mesure pouvez-vous évaluer si chaque unité est productive? Évidemment, vous savez combien vous dépensez pour chaque unité. Avez-vous des repères qui vous permettent de déterminer si vous optimiser l'argent dépensé?
Le mgén Petras : C'est l'une des tâches que j'accomplis. Je me fie à ce qui ce passe dans chaque environnement. Chaque environnement a une mission, avec des indicateurs de rendement dans chaque unité pour déterminer si les objectifs sont atteints. Nous avons des mécanismes pour vérifier si l'entraînement exigé pour une unité de l'armée a atteint un niveau donné au cours de l'année.
Maintenant, pouvons-nous raffiner nos mesures à tel point que nous savons de façon détaillée ce qui se passe? Non, ce n'est pas le cas.
Le président : Point n'est besoin de raffinement. Tout simplement, si un régiment de miliciens n'arrive pas dans une collectivité à attirer des recrues ou s'il ne réussit pas à entraîner les réservistes, il faudrait que la gestion soit au courant grâce à des mesures et qu'elle intervienne. On pourrait dire voilà le minimum exigé et s'il n'est pas atteint, nous retirerons notre appui et le régiment cessera d'exister.
Le mgén Petras : En bout de ligne, cela fait partie de la mission à long terme de restructuration de la Réserve terrestre.
Le président : Est-ce votre tâche?
Le mgén Petras : Oui. Quand je travaille au niveau stratégique des Forces canadiennes, je suis responsable de la surveillance de toutes les réserves, mais je ne m'occupe pas des menus détails. Cela ne signifie pas que je ne peux pas donner des conseils quand on m'en demande, mettant à profit mon expérience.
Le président : Qui élabore les orientations qui vont encourager les bonnes unités et améliorer les mauvaises?
Le mgén Petras : C'est une très bonne question car cela touche directement la restructuration de la Réserve terrestre, en vertu du projet prévu dans la politique gouvernementale. Le projet, une fois mené à bien, sera intégré aux opérations courantes de l'armée. Nous sommes en train d'élaborer un plan de transition qui va nous faire passer de la restructuration des réserves à la transformation des Forces canadiennes. Nous tâchons de voir comment nous allons agir en 2006 quand ce projet sera complété.
Le président : Terminons cette partie de notre séance avec vous en parlant d'une de vos responsabilités les plus importantes, à savoir les cadets. Pouvez-vous dire aux membres du comité combien nous dépensons pour les cadets, combien il y en a, pourquoi le programme des cadets est si important pour le Canada?
Le mgén Petras : Volontiers. En fait, vendredi dernier, j'étais ici à Ottawa à un déjeuner du Club Kiwanis. C'était à l'occasion de la journée d'appréciation des cadets et j'ai pu expliquer précisément cela. Cette responsabilité qui m'incombe est hautement intéressante car il s'agit de l'enthousiasme de plus de 55 000 jeunes. Les Rangers juniors canadiens sont administrés par les cadets mais il s'agit de jeunes du même âge. L'enthousiasme est le même dans les villes que dans les localités isolées du Nord. À Noël, j'ai été nommé chef des réserves et je savais bien ce que représentent les cadets. Toutefois, tant qu'on n'est pas mêlé de près à la question, on ne se rend pas compte du nombre de gens qui interviennent. Outre les 55 000 cadets, il y a 6 500 officiers en uniforme qui forment ce que l'on appelle le CIC.
Le président : Qu'est-ce que le CIC?
Le mgén Petras : Les officiers du Cadre des instructeurs de cadets. Il y a également des milliers de bénévoles qui interviennent. C'est un énorme programme.
Quant à ce qu'ils font, les objectifs du programme sont simples. On veut faire la promotion du leadership, du sens civique et de la forme physique et sensibiliser les jeunes aux Forces canadiennes.
Au printemps, j'ai assisté aux championnats nationaux de biathlon à Mount Washington. Le biathlon combine le ski de fond et le tir. Les jeunes s'entraînent à l'échelle locale et régionale et certains atteignent le niveau pré-olympique. La concurrence est forte pour participer à cette compétition nationale. Trois jours avant la compétition, il y a eu un redoux et il n'y avait pas de neige. Il était trop tard pour se rabattre sur le plan B, c'est-à-dire retourner à ValCartier où il y avait de la neige.
Quand je suis arrivé le vendredi, j'ai vu des jeunes courir sur les pistes boueuses et pratiquer le tir, avec un moral superbe. Ils avaient accepté le défi. Ils avaient improvisé, s'étaient adaptés et avaient surmonté la difficulté. L'événement a été un franc succès même s'il n'y a pas eu de ski. Ces jeunes ont de grandes qualités et les maintiendront. Ils deviendront des citoyens et ne sont-ce pas là les qualités que nous souhaitons?
Le programme connaît énormément de succès. Nous avons dépensé environ 180 millions de dollars par année à même le budget des Forces canadiennes pour soutenir le programme. C'est le financement de base. Les Kiwanis parrainent deux corps de cadets à Ottawa. Ils recueillent beaucoup d'argent pour donner aux jeunes les choses supplémentaires dont ils ont besoin. Il s'agit véritablement d'une indication d'un partenariat réel entre les Forces canadiennes et les collectivités qui travaillent ensemble pour mettre sur pied l'un des meilleurs programmes pour les jeunes au pays.
Le président : Quel est le coût déjà du financement de base?
Le mgén Petras : Il est d'environ 180 millions de dollars.
Le président : Il s'agit d'un montant de 180 millions de dollars pour 55 000 jeunes. Combien d'heures les jeunes consacrent-ils à ce genre d'activité sur un mois?
Le mgén Petras : Ils participent à un exercice militaire habituellement un soir par semaine et parfois une fin de semaine par mois. Pendant l'été, il existe d'énormes programmes pour les cadets dans tous les camps répartis un peu partout dans le pays.
Le président : Combien de cadets participeraient à un camp comme celui de Farnham ou ailleurs? Combien de semaines y passeraient-ils?
Le mgén Petras : Cela varie. Par exemple, j'étais au camp Borden l'été dernier qui a accueilli 1 500 jeunes. Les jeunes ne vont pas nécessairement au camp pendant tout l'été. Ils y vont pour des cours de deux ou trois semaines ou des cours d'un mois. C'est un excellent programme qui est extrêmement populaire auprès des jeunes qui cherchent à s'y inscrire au cours de l'année.
Le président : Pouvez-vous nous donner des chiffres sur le nombre de participants à ces cours?
Le mgén Petras : Oui. Je ne les ai pas sous la main, mais je peux vous les obtenir.
Le président : Au nom du comité, je tiens à vous remercier d'avoir comparu devant nous. La matinée a été instructive. Nous aurons un certain nombre d'autres questions. Si notre personnel peut communiquer avec vous par la suite, je vous en serais reconnaissant. Comme vous pouvez le constater, notre comité s'intéresse beaucoup aux réserves. Nous vous sommes reconnaissants de nous avoir aidé à mieux comprendre en quoi elles consistent.
À l'intention des membres du public qui regardent l'émission, si vous avez des questions ou des commentaires, veuillez consulter notre site Internet à l'adresse suivante : www.sen-sec.ca. Vous y trouverez le compte rendu des témoignages de même que le calendrier confirmé des audiences. Autrement, vous pouvez communiquer avec le greffier du comité en composant le 1-800-267-7362 pour plus d'information ou de l'aide pour communiquer avec les membres du comité.
La séance se poursuit à huis clos.
La séance publique reprend.
Le président : Chers collègues, nous accueillons cet après-midi Karen Ellis. Mme Ellis a été nommée sous-ministre adjointe de l'Infrastructure et de l'Environnement au ministère de la Défense nationale en février 2004. En plus de gérer le portefeuille d'infrastructure et d'environnement du ministère, Mme Ellis est championne de niveau 1 de deux réseaux de gestionnaires du MDN et du Comité de la sûreté nucléaire et de la protection contre les rayons ionisants.
Avant d'exercer ce poste, Mme Ellis était directrice générale du secteur du Multiculturalisme et des Populations autochtones à Patrimoine canadien.
Madame Ellis, nous vous souhaitons la bienvenue. Nous croyons savoir que vous avez une brève déclaration à faire. Vous avez la parole.
Mme Karen Ellis, sous-ministre adjointe (Infrastructure et Environnement), Défense nationale : Honorables sénateurs, je suis ravie de cette occasion de vous rencontrer. Aujourd'hui il y a un éléphant dans la pièce, il s'agit de l'infrastructure. Je suis chargée de m'en occuper et je me considère comme la conscience du ministère sur ces questions.
Une infrastructure sûre, sécuritaire, appropriée et durable est fondamentale à l'exécution de la mission que s'est donnée la Défense.
[Français]
J'aimerais décrire la taille, la complexité et la diversité de l'infrastructure du MDN et des Forces canadiennes et souligner la façon particulière dont on gère ce portefeuille.
[Traduction]
Les compromis sont constants entre l'investissement dans les opérations des Forces canadiennes, d'une part, et dans les activités de maintien et de soutien, y compris l'infrastructure, d'autre part. Nous travaillons sans relâche afin d'obtenir les meilleurs résultats possible compte tenu des ressources financières dont nous disposons chaque année, mais la demande dépasse toujours l'offre. Nous avons par conséquent sous-investi dans l'infrastructure pendant un certain nombre d'années.
Si le budget 2005 prévoit de l'argent frais pour la défense, nous devrions pouvoir faire des améliorations à notre infrastructure au fil des ans. Pour le moment, notre priorité consiste à veiller à ce que les fonds disponibles soient judicieusement investis, parce que la façon de dépenser et les dépenses choisies sont aussi importantes que le montant dépensé.
Au sein du MDN, la gestion de l'infrastructure est grandement décentralisée. Les responsabilités actuelles en matière d'exploitation, d'entretien et de gestion des biens immobiliers sont confiées à mes collègues, qui sont les gardiens de leur propre infrastructure. Ainsi, le chef d'état-major de l'armée de terre gère 41 p. 100 du portefeuille de l'infrastructure, le chef d'état-major de la force aérienne, 32 p. 100 et le chef d'état-major des forces maritimes, 13 p. 100.
À titre de sous-ministre adjointe à l'Infrastructure et à l'Environnement, j'assure le leadership fonctionnel et la supervision, je prodigue des conseils et j'élabore des politiques relativement aux questions d'infrastructure pour le ministère. Par ailleurs, l'Agence de logement des Forces canadiennes relève également de moi. Mon groupe a aussi un rôle majeur dans la mise en œuvre de la plupart des projets d'infrastructure et environnementaux d'envergure à l'échelle du pays.
Ce modèle de gestion donne à mes collègues la latitude nécessaire pour choisir entre ce qu'il faut dépenser pour les besoins opérationnels et ce qu'il faut dépenser par exemple pour l'infrastructure. Ils établissent leurs priorités chaque année.
Le portefeuille de l'infrastructure du ministère est énorme, indispensable et diversifié sur les plans fonctionnel et géographique. Je sais que le comité a été en tournée et qu'il a pu voir beaucoup de choses. Au sein du gouvernement fédéral, la Défense nationale est le plus important gardien d'immeubles en termes de quantité. Il détient un peu plus de 44 p. 100 de l'inventaire fédéral. Notre portefeuille comporte plus de 20 000 édifices dont nous sommes propriétaires, parmi lesquels 137 installations de la Force de réserve et plus de 14 600 unités de logement. La valeur totale de remplacement de cette infrastructure s'élève à environ 19,6 milliards de dollars.
[Français]
Tous les échelons du gouvernement subissent des pressions financières importantes de l'infrastructure publique qui découle du vieillissement des biens et de la croissance démographique. La Défense nationale n'y fait pas exception. L'âge moyen de notre infrastructure est de 40 ans et quelque 57 p. 100 des immeubles du MDN ont maintenant plus de 50 ans. Ce qui signifie, en tenant compte du cycle de vie normal de 50 ans, que plus de la moitié de nos biens immobiliers ont théoriquement dépassé leur durée de vie utile.
[Traduction]
Cela ne veut pas dire que tous les biens immobiliers de plus de 50 ans doivent être remplacés. Cependant, cette réalité est un indicateur sérieux de la nécessité d'un investissement dans ce domaine.
Depuis décembre 2002, je me suis rendue dans toutes les bases et escadres du Canada, à l'exception de deux d'entre elles. J'ai été à peu près partout. J'ai ainsi pu observer les grandes différences au niveau de l'état, de l'âge et de la pertinence de l'infrastructure à l'échelle du pays. J'ai vu un certain nombre d'immeubles et d'ouvrages délabrés, mais j'ai aussi présidé l'inauguration de certaines nouvelles installations de pointe fort impressionnantes. Il y a vraiment un peu de tout.
La Défense nationale investit chaque année environ 1,2 milliard de dollars dans l'infrastructure et les activités environnementales. Cela représente une fraction importante du budget d'ensemble, soit presque 10 p. 100 du budget total du MDN pour 2005-2006.
Le coût de remplacement s'élevant à 19,6 milliards de dollars, nous devrions investir quelque 780 millions de dollars par an dans l'infrastructure, montant réparti également entre deux catégories. La première catégorie est celle de l'entretien et de la réparation, ce qui comprend les travaux effectués pour maintenir le potentiel de service d'un bien immobilisé, ce qui peut vouloir dire la réparation de fuites des toitures aussi bien que la réparation de voies d'accès. La seconde catégorie est ce que nous appelons la réfection. Il s'agit du remplacement ou de la rénovation d'installations existantes afin de mieux répondre aux besoins opérationnels.
Nous nous sommes fixé des objectifs de 2 p. 100 du coût de remplacement de l'immobilier pour chacun de ces aspects, c'est-à-dire entretien et réparation d'une part et réfection de l'autre. Cela représente 780 millions de dollars par an que nous devrions investir chaque année.
Où en sommes-nous? Dans les deux cas, l'investissement a été faible pendant un certain nombre d'années, ce qui représente un manque annuel d'environ 200 millions de dollars, les plus grandes insuffisances étant au niveau de l'entretien et de la réparation. Pour l'année financière 2005-2006, nous prévoyons un investissement moyen de 1,8 p. 100 sur un total de 2 p. 100 pour la réfection, mais d'à peine 1 p. 100 pour l'entretien et la réparation.
Pourquoi cela est-il si important? C'est important parce que c'est un peu comme une voiture. L'entretien préventif permet d'économiser de l'argent et de prolonger la vie du véhicule. Si l'on n'y voit pas pendant le cycle de vie du véhicule, cela entraîne des pannes et des problèmes plus complexes, ce qui fait qu'on finit par payer beaucoup plus pour remplacer des pièces ou pour remplacer le véhicule tout entier.
[Français]
Le ministère et les Forces canadiennes s'efforcent constamment de trouver leurs meilleurs agencements d'investissement dans les opérations et le soutien. La haute direction du ministère est consciente des questions entourant l'infrastructure et elle s'en préoccupe. Elle a des choix difficiles à faire.
[Traduction]
Pour l'année financière 2005-2006, le ministère prévoit dépenser environ 360 millions de dollars en projets de construction d'immobilisations. Le principal outil de planification que nous utilisons est ce que nous appelons le Plan d'investissement à long terme pour la construction. Il s'agit d'un plan quinquennal actualisé chaque année qui concerne tous les projets de plus de 1 million de dollars que mes collègues ont jugé prioritaires et qui, réunis, constituent notre objectif d'investissement d'ensemble.
Ce plan nous aide en fait à nous rapprocher de cet objectif de 2 p. 100 que nous nous sommes fixé pour la réfection, ce qui est une bonne chose, mais je tiens néanmoins à insister sur le lien de cause à effet de l'entretien et la réparation. Lorsqu'on remet à plus tard l'entretien courant, on finit par devoir multiplier plus tard les travaux de réfection. Il y a donc un rapport direct qui explique pourquoi nous finissons par devoir investir davantage plus tard pour la réfection.
Enfin, un financement supplémentaire nous permettrait de nous rapprocher davantage de nos deux objectifs de 2 p. 100, ce qui nous permettrait par le fait même de maintenir l'état et d'améliorer de façon constante la pertinence de nos biens immobiliers.
[Français]
Notre but est d'optimiser les avoirs de l'infrastructure de défense afin d'appuyer l'évolution de la structure et des capacités des Forces canadiennes, telle qu'en fait foi l'annonce de la politique de défense.
[Traduction]
Nous veillons en outre à tenir compte des autres priorités et politiques gouvernementales lors des premières étapes de planification de nos travaux de rénovation et de construction d'immeubles neufs. Mais nos conceptions tiennent compte de considérations environnementales, de l'initiative sur les bâtiments écologiques, des questions patrimoniales, de l'accès facile pour les personnes handicapées, de même que de l'efficacité et de l'économie en énergie.
En conclusion, honorables sénateurs, je voudrais souligner le fait qu'il s'agit là d'un secteur d'activité très important pour le ministère car les questions d'infrastructure sont de nature complexe et longues à régler. Nous composons quotidiennement avec la nécessité de faire des compromis et des concessions, compte tenu des priorités et des besoins qui se font concurrence au sein du ministère. Nous pouvons compter sur de bons plans et de bons outils pour gérer notre portefeuille et piloter nos investissements, et nous sommes prêts à dépenser davantage, si le budget nous le permet, afin de nous rapprocher progressivement, au fil des ans, de nos deux objectifs de 2 p. 100. Il reste maintenant à voir si ce financement nous sera accordé.
Le sénateur Atkins : Après avoir écouté votre exposé et pris connaissance de vos responsabilités, je dirais que vous êtes, après le premier ministre, la personne la plus importante au gouvernement.
Mme Ellis : Il est certain qu'il y a beaucoup à faire.
Le sénateur Atkins : C'est en effet l'impression que vous donnez.
Je vais commencer par le rapport sur les plans et priorités du ministère de la Défense nationale pour l'année 2005- 2006. On peut y lire ceci, et je cite :
[...] le sous-investissement dans l'infrastructure, qui a des conséquences sur l'état des biens immobiliers, accroît le risque de non-conformité à un vaste éventail de règlements municipaux, provinciaux et fédéraux... Si ces facteurs ne sont pas contrôlés, ils peuvent avoir des répercussions importantes sur la qualité de vie, la santé, la sécurité et la productivité des travailleurs.
Quelles mesures prenez-vous à cet égard?
Mme Ellis : En fait, cela nous donne l'occasion de vous dire pourquoi certains de nos investissements doivent être orientés de telle ou telle façon telle ou telle année. Il est évident que lorsqu'il s'agit de règlements et de lois concernant la santé et la sécurité, que ce soit au palier fédéral, au palier provincial ou au palier municipal, et j'entends également par là les lois concernant l'environnement, nous devons chaque année émettre des directives. Celles-ci me viennent de mes collègues. C'est ce que nous appelons nos conseils en matière de planification fonctionnelle.
Forts de ce que nous avons pu constater l'année précédente, s'il y a des secteurs, toujours les mêmes, où de nouveaux problèmes surgissent, nous soulignons la chose et je dis alors à mes collègues : « Cette année-ci, veuillez s'il vous plaît faire le nécessaire pour rectifier certains de ces problèmes que nous avons pu découvrir », en ce qui concerne telle ou telle loi ou tel ou tel règlement. Cela ne veut pas nécessairement dire que chaque base, que chaque escadre, aura le même problème, mais cela signifie qu'il nous arrive de pouvoir observer des tendances lorsque nous rencontrons régulièrement les responsables des bases et des escadres. Nous rencontrons également le personnel technique.
Nous signalons les cas où il y a des problèmes et donnons des conseils sur la façon d'y remédier. Je répète que tous mes collègues, jusqu'au bas de la chaîne de commandement, jusqu'au commandant de la base en fin de compte, ont la responsabilité de s'assurer de la conformité. La politique que mon groupe établit aide ces personnes à assurer la conformité pour ce genre de problèmes.
Si je songe à la santé et à la sécurité, un bon exemple est l'Agence de logement. Lorsqu'elle a hérité du portefeuille résidentiel en 1996, nous l'avons chargée en premier lieu de s'occuper de la première tranche de besoins. Il s'agissait de faire en sorte que les normes de santé et de sécurité soient respectées. Elle a investi 400 millions de dollars au cours des cinq ou six premières années de son existence pour s'occuper de ces problèmes.
Il y a des moments où l'on peut cibler des crédits pour cela. Je collabore étroitement avec l'Agence de logement, mais mes collègues de l'armée de terre, de la marine et de l'aviation doivent dire : « Nous en faisons une priorité; nous avons compris ce qu'il faut faire et nous allons y voir. »
Quant aux problèmes relatifs à la qualité de vie, nous faisons tout en notre pouvoir pour améliorer les infrastructures, la façon dont l'on érige les nouvelles installations, pour qu'elles profitent davantage de la lumière du jour. J'ai inspecté de nombreuses installations où le moral s'est amélioré instantanément dès que la conception facilitait la pénétration de la lumière du jour dans un immeuble. Quand on a cette possibilité et qu'on fait des rénovations ou qu'on remplace des installations, le genre de choses auxquelles on peut penser au cours des premières étapes pour améliorer le milieu de travail pour les gens est incroyable.
J'ai parlé à des ingénieurs sur les bases qui m'ont dit qu'une nouvelle couche de peinture avait amélioré le moral des gens. Il faut parfois bâtir un nouvel immeuble pour en remplacer un qui était peut-être en très mauvais état, et il s'agit parfois de petites choses qui ne coûtent pas cher, et que nous pouvons faire pour améliorer la qualité de la vie au travail.
Le sénateur Atkins : Vous dépensez environ 780 millions de dollars par année pour l'entretien et les infrastructures. Ce montant est essentiellement réparti entre quatre régions. Comment priorisez-vous la distribution des crédits?
Mme Ellis : Je peux peut-être répondre; je ne l'ai peut-être pas dit clairement au début. Vous avez raison à propos de 780 millions de dollars, mais c'est ce que nous devrions investir. Il y a environ 200 millions de dollars que nous ne dépensons pas à chaque année.
Idéalement, notre cible pour l'entretien et les réparations serait de 390 millions de dollars, soit la moitié de ces 780 millions de dollars chaque année, et les 390 millions de dollars qui restent seraient consacrés à la réfection.
Si j'ai bien compris, vous voulez savoir comment on décide de dépenser cet argent.
Le sénateur Atkins : Comment c'est réparti, oui.
Mme Ellis : Je suis sous-ministre adjointe, mais les généraux qui sont à la tête de l'armée de terre et de la marine sont mes homologues et mes collègues. Au début de chaque exercice financier, chacun d'eux reçoit ce qu'on appelle un budget de base, soit leur budget général pour les opérations de l'armée de terre ou de la marine pour l'année. Ce budget comprend l'argent pour l'infrastructure.
Je vais prendre l'armée de terre à titre d'exemple. Il y a tout un processus qui se déroule, qui part de la base, où toutes les idées et propositions concernant les infrastructures sont communiquées au commandant de l'armée. Ce sont des processus et des examens qui sont assez rigoureux tout au long de la chaîne de commandement, et les résultats lui sont ultimement présentés une fois par année, auquel moment il décide où l'on investira l'argent en 2005-2006 ou en 2006-2007.
Le sénateur Atkins : Dans ce domaine particulier.
Mme Ellis : Dans ce domaine, oui.
Le sénateur Atkins : Qui est l'ultime décideur? Est-ce vous?
Mme Ellis : Non. C'est le chef de l'armée de terre qui décide. Même chose pour la marine. Les chefs décident où l'argent sera envoyé, et ils rendent des comptes pour l'emploi de cet argent.
À la fin de l'année, je fournis une évaluation globale à l'état-major du ministère pour lui faire savoir combien l'armée de terre et la marine ont dépensé. Je leur soumets des chiffres concrets. Je dis au ministère combien on a dépensé par rapport aux cibles. Mon rôle consiste à donner des conseils sur la façon dont on doit dépenser et à dire à chacun comment il s'est acquitté de sa tâche. Je ne fais pas cela dans un esprit critique ou négatif. Je sais qu'ils composent avec des réalités. Il m'appartient de leur dire ce qui advient des infrastructures. Mais ce sont eux qui décident. Ils décident comment ils vont employer l'argent.
Le président : Question supplémentaire, pourquoi a-t-on besoin de vous? Est-ce que les chefs de chaque secteur pourraient simplement eux-mêmes produire un rapport, et quelle est la valeur ajoutée de votre poste?
Mme Ellis : Mon emploi comporte de nombreuses dimensions. Comme certains des autres sous-ministres adjoints auxquels vous avez probablement parlé, nous jouons tous ce que nous appelons un rôle fonctionnel, ce qui veut dire que nous établissons les cibles, l'orientation et la politique, et ainsi le reste du ministère sait ce qu'il doit faire dans notre domaine à nous. Par exemple, ma collègue responsable du personnel civil fera exactement la même chose. Tous nos collègues décident eux-mêmes qui ils vont engager, mais c'est elle qui arrête l'orientation générale, les objectifs du ministère, les cibles et la référenciation, pour que nous puissions ensuite rendre compte de notre rendement au ministère, qui est l'autre partie de notre rôle. Notre ministère profite de cette connaissance, mais le Conseil du Trésor aussi ainsi que le public, qui a accès à notre rapport ministériel sur le rendement.
Je vous ai dit également que mon groupe gère un nombre considérable de grands projets de construction et d'assainissement environnemental partout au pays. Nous faisons en fait de la gestion pour l'armée de terre, la marine et quelques-uns pour l'aviation. Ils ont eux aussi quelques gestionnaires de projet, mais nous avons un effectif considérable qui gère les grands projets de construction depuis plusieurs années pour le compte du ministère.
Je suis également la seule responsable de la planification stratégique concernant les biens immobiliers. Essentiellement, avec la mise en œuvre de la nouvelle politique de défense, nous commençons à voir ce que cela signifie pour la nouvelle structure des forces, les nouveaux immeubles, les nouvelles configurations, et nous devons aider nos collègues du ministère à planifier ces projets. Il faut habituellement au minimum une année pour faire la planification et parfois deux ou trois autres pour aller jusqu'au bout du projet de construction. Il se fait tout un travail complexe, axé sur le long terme, dans mon groupe pour soutenir les projets de construction, la dépollution environnementale et la neutralisation des munitions non explosées. Ce sont de grands projets.
Autre chose, je gère l'aliénation stratégique des biens immobiliers pour le compte du ministère. Lorsqu'il s'agit d'aliéner les biens excédentaires, il y a des formalités d'aliénation simples pour les petits biens de faible valeur que le commandant de la base ou de l'escadre ou le chef de l'armée de terre peut décider de ce qu'il en fera. Personne ne s'y intéresse particulièrement. Ce qui nous laisse le reste du portefeuille immobilier. Cependant, lorsqu'il s'agit de quelque chose d'assez gros, par exemple, les fermetures de base qui ont été annoncées en 1994 et 1995, étant donné qu'il s'agissait de vastes propriétés qui pouvaient avoir une valeur commerciale élevée ou présentaient un intérêt pour la collectivité voisine, nous les qualifiions d'« aliénation stratégique ». Mon groupe gère tout le processus long et complexe qu'on appelle l'aliénation stratégique.
Je suis à la tête du groupe qui règlemente tout ce qui concerne le rayonnement ionisant au ministère. La Défense nationale a le plus grand répertoire de matériel à rayonnement ionisant, des montres de plongée aux cadrans qu'on trouve dans les avions. Il est vrai que le gros de ce matériel présente un risque faible, mais c'est mon groupe qui a le pouvoir prévu par règlement pour tout le ministère.
L'agence de logement est une autre de mes responsabilités. Nous gérons tout le portefeuille du ministère qui compte 14 600 maisons. C'est un véritable service opérationnel quotidien qui nous conduit à renouveler le portefeuille.
Nous avons toute une série de responsabilités. Ce sont des responsabilités assez compliquées qui exigent un effectif assez considérable. J'ai environ 230 personnes dans le groupe Infrastructure et environnement comme tel, et entre 150 et 200 personnes à l'agence de logement partout au pays. Tout le monde est assez occupé.
Le sénateur Atkins : Que feriez-vous dans le cas de Shearwater?
Mme Ellis : Un des principaux outils que nous avons pour aider les bases et escadres à planifier ce qu'elles veulent faire de leurs infrastructures et biens est le plan de mise en valeur des biens immobiliers. Nous aidons actuellement des bases et des escadres aux quatre coins du pays. Nous nous occupons de cinq par an. Mon groupe a un petit budget de 20 millions de dollars pour mener des initiatives précises de planification. Nous donnerons un million à chacune des cinq bases afin de l'aider à mettre à jour et à renouveler son plan directeur de mise en valeur des biens immobiliers. Cela leur donne la possibilité de considérer la base dans son ensemble, en incluant le logement, ce qu'elles y feront, les changements à venir, la façon de regrouper certaines choses, d'évoluer et de s'adapter. C'est un outil important. Mon équipe va travailler avec la marine et l'armée de l'air, dans ce cas, à l'élaboration et à l'exécution du plan de mise en valeur des biens immobiliers de Shearwater.
Il y a d'autres décisions qui ne relèvent pas de mon secteur mais c'est certainement une patate chaude. Toutefois, dès que les décisions sont prises quant au type de choses qui seront construites ou nécessaires, à partir de ce plan, mon équipe intervient. Il peut s'agir de gérer le projet de construction ou d'aider à planifier ce qu'il y a à faire. Il y a là des questions immobilières. Mon équipe travaillerait alors à ces questions au besoin avec la Société immobilière du Canada Ltée.
S'il doit y avoir des négociations avec les Premières nations — car, comme vous le savez, lorsqu'il s'agit d'immobilier et d'aliénation de biens, les Premières nations de la région peuvent être concernées — mon équipe conseille et travaille avec les commandants de base.
Nous intervenons lorsqu'il est temps de commencer à mettre en œuvre les plans concernant les biens immobiliers. Nous aidons de nos avis durant l'élaboration des plans mais nous avons aussi un rôle pratique à jouer dans l'exécution.
Le sénateur Atkins : Si vous avez un manque à gagner de 200 millions de dollars par an, comment pouvez-vous vous rattraper?
Mme Ellis : Ce manque à gagner se situe essentiellement dans le secteur de l'entretien et des réparations, pour ce qui est de rattraper, il s'agit beaucoup plus de réfection, des grands projets dont je parlais tout à l'heure qui viennent plus tard.
Pour certains bâtiments, il est possible de les prolonger pendant longtemps, avant que l'on en arrive au point où on ne puisse plus les utiliser. À ce moment-là, le commandant de l'armée, par exemple, déclare à son équipe que tel ou tel bâtiment doit être démoli ou qu'il faut construire quelque chose de neuf ou faire un investissement majeur pour qu'il puisse être remis en état.
Il coûte souvent plus cher de faire ce rattrapage que d'entretenir les bâtiments convenablement. Je répète que ce sont des choix qu'il faut faire chaque année, en fonction des autres priorités du commandant dans le monde entier. L'infrastructure tend à être un élément que l'on néglige, mais cela oblige ensuite à faire des travaux plus importants.
Le sénateur Atkins : On s'entend généralement pour dire que l'infrastructure des bases, dans bien des cas, est critique. Quand on fait des appels d'offres en construction, qui gère ce processus?
Mme Ellis : Un projet de moins d'un million de dollars reste la responsabilité de la base ou de l'escadre. Le commandant de la base a autorité pour gérer tout projet de moins d'un million de dollars lorsqu'il s'agit d'infrastructure. S'il dépasse un million de dollars, mon équipe intervient.
Vous avez peut-être entendu parler de Construction de défense Canada, société d'État qui relève du ministre des Travaux publics mais dont nous sommes le seul client. Nous avons d'excellentes relations de travail avec cette société depuis plus de 50 ans.
Nous définissons le projet et je demande ensuite à un directeur de projet qui fait partie de mon personnel de travailler avec Construction de défense Canada pour obtenir l'énoncé des besoins de l'armée ou de quiconque veut réaliser ledit projet. Nous discutons avec les intéressés et demandons : « De quoi avez-vous besoin? À quoi devra servir ce bâtiment? » Nous faisons ensuite intervenir tous les autres éléments tels que les aspects environnementaux, l'accès facile.
Lorsque nous nous sommes entendus sur ce qui est nécessaire, nous mettons sur un pied un processus d'appel d'offres et de réception de soumissions. La construction et la mise en œuvre du plan font suite à cela. Tout le processus nécessite habituellement un minimum de trois ans pour un projet de construction ordinaire. Mon équipe intervient dès le début auprès de l'armée ou de tout autre client. Nous leur disons que nous assumerons le processus et que nous aiderons à le gérer. Mes directeurs de projet se déplacent et surveillent les projets du début à la fin.
Le sénateur Atkins : Est-ce Travaux publics ou la société d'État qui accorde le contrat?
Mme Ellis : Construction de Défense Canada le fait pour nous lorsque nous travaillons avec elle.
[Français]
Le sénateur Nolin : Je comprends que vous êtes en train de préparer un cadre de gestion des bien immobiliers.
Mme Ellis : Oui.
Le sénateur Nolin : Faites-vous cela en parallèle avec Travaux publics Canada, avec leur aide? Ont-ils un rôle à jouer avec vous?
Mme Ellis : Notre plan, mentionné dans mon discours, est vraiment un cadre pour gérer tous nos bien immobiliers. Nous le faisons nous-mêmes.
Le sénateur Nolin : Autrement dit, Travaux publics Canada n'a rien à y voir?
Mme Ellis : Non, rien à voir.
Le sénateur Nolin : Je m'excuse d'être un peu direct, mais qu'est-ce qui fait que votre organisation est si spéciale? Alors que tous les autres ministères du gouvernement du Canada font affaire avec Travaux publics lorsqu'on parle du cadre de gestion immobilière, qu'est-ce qui fait que vous ayez une structure d'opérations à part de celle de Travaux publics Canada? Je comprends que certains immeubles ont des usages particuliers. Cela dit, un baraquement, c'est un baraquement.
Mme Ellis : Je peux peut-être clarifier cela. Je suis responsable du suivi et de la gestion de tous les bien immobiliers qui ne sont pas à Ottawa. Je ne suis pas responsable de la région d'Ottawa. Pour tous les édifices à Ottawa, mon collègue, le sous-ministre adjoint responsable des services coopératifs, travaille avec les fonctionnaires de Travaux publics Canada. Il y a un lien, mais pas avec moi.
La deuxième partie de votre question concerne deux points. Premièrement, nous avons Construction de défense Canada qui a été établi il y a 50 ans et qui nous appuie quotidiennement à ce sujet.
Le sénateur Nolin : Vous êtes familier avec cela.
Mme Ellis : C'est exact. Deuxièmement, oui, nous avons beaucoup d'édifices et d'exigences spéciales militaires. Mes collègues croient depuis longtemps que nous avons une très bonne approche dans la gestion de nos propres projets de construction avec l'aide de CDC.
Le sénateur Nolin : Vous avez fait référence à ce qui se produit lorsque vous décidez de libérer un immeuble. Vous gérez vous-mêmes, à l'intérieur de votre organisme, tout le processus de mise en valeur d'un actif dont le ministère n'a plus besoin. Normalement, les autres ministres fonctionnent avec Travaux publics Canada et la Société immobilière du Canada. Ce sont eux qui ont la responsabilité de mettre en valeur les biens immobiliers déclarés excédentaires. Ils font un très bon travail.
Mme Ellis : On le fait pour les dispositions, ce processus implique les autres ministères. Je croyais que vous parliez des projets de construction.
Le sénateur Nolin : J'ai parlé des projets de construction. Je parle maintenant des projets de disposition.
Mme Ellis : Vous avez raison, il y a deux types de dispositions. Il y a une disposition de routine, gérée par Travaux publics Canada, et nous faisons la même chose. Travaux publics Canada a une expertise qui nous aide à mettre en valeur les propriétés et à gérer le processus de la disposition. Pour les dispositions stratégiques, ils sont impliqués, mais cela dépend du cas. Nous avons un processus. Quand nous avons une propriété en surplus, notre ministre doit écrire à chacun de ses collègues pouvant être intéressé à la propriété. Si quelqu'un est intéressé, nous allons faire un processus pour le transfert. Parfois, c'est Travaux publics Canada qui nous aide. Il faut une soumission au Secrétariat du Conseil du Trésor afin d'avoir une approbation.
Il est vrai que l'on travaille avec Travaux publics Canada; je ne veux pas vous laisser croire que l'on ne travaille jamais avec Travaux publics Canada ou avec Construction de défense Canada. Cela dépend de la région. Il est parfois approprié d'avoir un petit partenariat avec eux, mais la plupart du temps, c'est avec Construction de défense Canada.
Le sénateur Nolin : Toutes mes questions tournent autour de l'expertise. Je comprends que, compte tenu de la particularité de votre ministère, vous ayez des biens et un parc immobilier particuliers.
Ceci étant dit, Travaux publics Canada au fil des ans — et cela n'a pas toujours été facile — a développé une expertise dans la gestion immobilière. Vous pourrez arguer que cela coûte cher et que plusieurs ministères prétendent que Travaux publics Canada facture beaucoup plus que ce qu'ils pourraient investir pour arriver au même résultat. On peut en débattre; ce n'est pas le but de notre travail.
Par contre, il y a une construction de services qui s'appelle Travaux publics Canada qui offre cet éventail de services. Mais vous aussi, vous offrez les mêmes services, parfois avec l'aide de Travaux publics Canada et parfois seul. J'essaie de comprendre pourquoi. C'est tout.
Mme Ellis : La plupart du temps, c'est vraiment avec nous.
Le sénateur Nolin : Imaginez si tous les ministères faisaient cela. Il y a une époque où c'était ainsi d'ailleurs.
Mme Ellis : C'est parce que nous croyons fortement que nous sommes particuliers.
Le sénateur Nolin : Tous les ministères sont particuliers.
Mme Ellis : C'est peut-être parce que nous avons une longue tradition de besoins spécifiques pour les opérations militaires, l'entraînement, la formation. Nous ne faisons cela que depuis 50 ans. On a déjà considéré travailler plus étroitement avec Travaux publics Canada, et nous sommes toujours prêts à leur parler pour voir s'il y a un partenariat possible.
Mais pour la construction en général, on travaille la plupart du temps avec CDC. Beaucoup d'experts, d'ingénieurs qui travaillent dans mon groupe ont une excellente expertise et une longue expérience de gestion des projets de construction pour notre ministère. Cela fonctionne bien pour nous.
Le sénateur Nolin : Lors du parallèle que vous avez fait avec une automobile, vous avez bien illustré que l'investissement dans le changement d'huile, à titre préventif, est intelligent, si on compare aux coûts engendrés par les bris causés par un manque d'entretien. Tout le monde l'a compris. De toute évidence, certains gestionnaires de votre ministère ne l'ont pas compris. Ils investissent beaucoup plus, mais pas dans la prévention, ce qui diminue la vie utile des biens immobiliers jusqu'à ce qu'ils en viennent à la conclusion, un jour, que l'immeuble doit être remplacé.
Vous laissez à des utilisateurs le soin de décider s'il est valable pour les fonds publics de gérer l'actif immobilier d'une façon efficiente, pour reprendre des mots souvent utilisés. Nous trouvons particulier que vous laissiez à vos gestionnaires, à vos commandants, aux gens qui ont la responsabilité de gérer les bases, le soin de décider si vous allez au plus urgent ou si vous investissez dans le long terme. Cela nous pose un problème. J'aimerais entendre votre commentaire à ce sujet.
Mme Ellis : Vous décrivez une situation difficile. Je parle souvent avec mes collègues responsables des décisions que vous venez de décrire et chaque année, ils ont des inquiétudes qui touchent l'infrastructure. Ce n'est pas quelque chose qu'ils veulent faire. Ils doivent faire un choix très difficile des priorités et des exigences de toutes sortes, comme l'opération, la formation, l'environnement. Chaque année, chacun de mes collègues, dans leur plan d'affaires, identifie les problèmes rencontrés avec l'infrastructure.
Ce n'est pas quelque chose qui est invisible, ignoré, mais ils expriment toujours leurs difficultés lorsqu'ils ont à faire des choix.
C'est une réalité difficile. J'espère que cela changera et que l'on recevra plus de fonds pour rectifier la question de l'entretien. Cela va grandement aider, mais il faut attendre la législation pour notre budget.
Nous avons des plans si cela arrive. Les gens reconnaissent très bien les problèmes et font des choix difficiles, année après année. Je veux les encourager à optimiser les biens immobiliers, penser de façon plus créative à ce qu'ils peuvent faire pour consolider des édifices ou une partie d'une base pour épargner des fonds.
Nous avons une approche environnementale un peu créative. Si nous avons une bonne idée, comme le projet pilote de démonstration pour la conservation de l'énergie, on peut obtenir des fonds de Ressources naturelles Canada pour nous aider.
On pose des gestes, mais c'est petit à petit. On profite des autres programmes et possibilités avec nos collègues qui gèrent l'environnement.
Il y a des petits signes d'espoir et il faut profiter de nos contacts et de nos réseaux, mais un besoin existe encore pour l'infrastructure.
Le sénateur Nolin : Besoin que vous évaluez à 200 millions de dollars par année.
Mme Ellis : C'est exact.
Le sénateur Nolin : En lisant une documentation plus pointue, vous énumérez les besoins de façon assez précise.
Mme Ellis : Je les montre au ministère chaque année et notre énoncé d'incidences aide les gens à comprendre la situation. Oui, je favorise cela, c'est mon rôle, mais je ne veux pas dire que les autres priorités sont moins importantes. Je suis la conscience pour l'infrastructure et je joue ce rôle de façon assez sérieuse au ministère.
Le sénateur Nolin : Je vous remercie. Je vais laisser à mes collègues la chance de poursuivre.
[Traduction]
Le sénateur Meighen : Madame Ellis, ma première question vous paraîtra peut-être négative mais ce n'est pas du tout mon intention qui n'est pas non plus de vous critiquer. Étant donné les responsabilités dont vous vous acquittez certainement extrêmement bien, pourquoi ne serait-il pas plus facile à quelqu'un qui ait une formation militaire ou d'ingénieur de les assumer?
Mme Ellis : Je comprends votre question. Lorsque je suis arrivée à la Défense nationale, je m'inquiétais que l'on puisse se préoccuper du fait que j'étais civile ou pour que je sois une femme. La seule question que l'on m'ait posée dans les quatre premiers mois, c'est si j'étais ingénieur. Je ne le suis pas. J'ai une maîtrise en histoire médiévale. J'ai 21 ans d'expérience de la fonction publique, ayant travaillé dans un certain nombre de secteurs de politique générale et de programme.
Essentiellement, parce que j'ai un personnel extrêmement doué, un fort pourcentage d'ingénieurs militaires, ce que j'ai constaté — et ce qu'a probablement pensé mon sous-ministre qui m'a nommé là — c'est que mes compétences, en matière d'administration, d'orientation stratégique, mes connaissances et des rouages de l'administration en général et de la façon de travailler avec elle aux problèmes qui nous occupent, mais qui est un complément nécessaire aux qualifications techniques des ingénieurs militaires. Cela a très bien marché. Plus personne n'a posé de questions après cinq ou six mois et nous sommes parvenus à une façon efficace de collaborer.
Ce poste a été occupé par un militaire pendant quelques années. Je suis la deuxième civile et, jusqu'ici, la seule qui ne soit pas ingénieure.
Le sénateur Meighen : Je suis toujours d'avis que l'on peut retenir les services d'experts.
Le président : Votre spécialisation en histoire médiévale est certainement tout à fait appropriée pour certaines des bases que nous avons vues.
Mme Ellis : Tout à fait. Les considérations patrimoniales sont sérieuses.
Le sénateur Meighen : Qui est responsable de l'huile bouillante?
Mme Ellis : Des réservoirs à mazout mais pas de l'huile bouillante.
Le sénateur Meighen : Dans la même veine, je crois, que le sénateur Nolin, l'armée est la seule à bénéficier d'un service spécialisé tel que celui que vous offrez, n'est-ce pas? Je me demandais pourquoi Travaux publics ne faisait pas dès le départ certaines des choses que vous faites pour l'armée. Votre budget est d'environ 350 millions de dollars?
Mme Ellis : Le budget de mon propre groupe est d'environ 29 millions de dollars, juste pour le fonctionnement du groupe, les salaires et ce genre de choses. Nous gérons un budget de l'ordre de 200 millions de dollars pour le programme de construction du ministère. Il ne s'agit pas là des projets que j'ai décrits pour le plan de construction mais des projets commémoratifs, de grands projets qui remontent au début des années 90 et ne sont pas encore terminés. Il y a peu de choses pour lesquelles nous gérons encore les budgets.
Avant ce modèle décentralisé, tout le monde se trouvait dans mon groupe. La personne qui occupait mon poste gérait tous les budgets et prenait beaucoup de décisions. Cela a changé depuis ce modèle de décentralisation.
Oui, c'est probablement de l'ordre de 250 à 300 millions de dollars. Je pourrais vous trouver le chiffre précis. L'agence de logement a ses propres fonds qui lui viennent des loyers. Il s'agit d'un budget distinct, ce qu'elle tire des loyers et réinvestit dans les maisons.
Mon budget n'est pas énorme, mais il correspond à mon rôle de leadership fonctionnel et d'exécution et de gestion de certains projets.
Le sénateur Banks : Je ne comprends pas.
Le sénateur Meighen : Moi non plus.
Le sénateur Banks : J'ai l'impression que vous avez un budget de plus d'un milliard de dollars, n'est-ce pas?
Mme Ellis : Oui. Le ministère doit dépenser 780 millions de dollars par an.
Le sénateur Banks : Quel ministère?
Mme Ellis : Je parle du ministère de la Défense nationale. Autrement dit, l'armée, la marine, l'armée de l'air et certains autres responsables devraient dépenser en tout, à eux tous, selon leurs biens immobiliers, un total de 780 millions de dollars par an. Je gère personnellement avec mon groupe environ 20 p. 100 du budget total du ministère et ce sont les chiffres que je vous ai donnés. Je n'ai pas la part du lion de ce budget.
J'ai dit que nous dépensons pour l'infrastructure et l'environnement 1,2 milliard de dollars. Ainsi, environ 80 p. 100 de l'argent est en fait entre les mains de mes collègues. Ils obtiennent ce budget au début de l'année, chaque année. Ils se le divisent. C'est eux qui ont l'argent. Ils décident de la façon dont ils vont le dépenser et le dépensent. J'ai environ 25 p. 100 du budget total, pour aider à certaines initiatives de moins d'importance et pour gérer certains des projets de construction qui restent.
Le sénateur Meighen : Pour revenir aux questions du sénateur Nolin, pour le privilège, et je ne veux pas me montrer sarcastique, de faire faire certaines choses à votre groupe plutôt que, par exemple, à Travaux publics, on dépense environ 20 p. 100 du budget du ministère de la Défense nationale.
Mme Ellis : Non. Le total des frais généraux de mon groupe se situe à environ 30 millions de dollars. Tout le reste, c'est de l'argent qui sert à la construction. Ce n'est pas pour mon équipe.
Le sénateur Meighen : Vous vous contentez d'environ 30 millions de dollars?
Mme Ellis : Oui.
Le sénateur Meighen : Avons-nous besoin de votre groupe? Est-ce que ces 30 millions sont une dépense utile? Est-ce que le ministère de la Défense nationale en a pour son argent?
Mme Ellis : Je crois que oui et je crois que mes collègues n'hésiteraient pas à l'affirmer. Le rôle que nous jouons ne peut plus être assumé ailleurs au sein de l'organisation. Ce groupe faisait autrefois partie du groupe du matériel du sous-ministre adjoint. C'était un petit service dans le groupe des approvisionnements. On a décidé au milieu des années 90, probablement en 1994 ou 1995, que la quantité de travail que représentaient les portefeuilles du renouveau de l'infrastructure et de l'environnement était suffisamment lourde et complexe et nécessitait tellement d'attention et de gestion qu'elle devrait être confiée à un groupe distinct et indépendant. C'est ce qui s'est fait et c'est ainsi qu'a été prise la décision. Bien que ce ne soit pas un grand service, c'est important et je pense que c'est un bon investissement pour le ministère dans tous ses secteurs de responsabilité.
Le sénateur Meighen : Y a-t-il un moyen quelconque de prouver cela? Je l'espère. Personnellement, comme peut-être certains de mes collègues, je m'inquiète un peu parce que c'est le même ministère, la Défense nationale, ou, pour une raison ou une autre, il faut en moyenne 13 ans pour qu'une idée d'approvisionnement se concrétise sur le terrain. Nous avons du mal à croire que cela puisse prendre si longtemps.
Maintenant, nous avons un groupe tel que le vôtre qui, si je comprends bien, est là pour essayer de faciliter le processus, d'accélérer les choses. C'est très important, si cela fait partie de votre rôle et de vos responsabilités. Je ne parle pas d'approvisionnement en soi.
Mme Ellis : Je voulais simplement m'en assurer.
Le sénateur Meighen : Non. C'est le ministère de la Défense nationale qui semble, à première vue, être un peu trop lourd et où les décisions semblent prendre horriblement longtemps. Il semble que l'on dépense énormément d'argent à l'administration plutôt qu'à acheter du matériel militaire, par exemple — même si mes propos peuvent sembler trop simplistes. J'essaie simplement de voir si nous pourrions parvenir à la conclusion que, avec votre aide, les choses pourraient tourner de façon un peu plus efficace.
Par exemple, vous avez dit que les commandants de base et d'escadre, pour ce qui est des projets de moins d'un million de dollars, ont tous les pouvoirs. Depuis quand est-ce le cas? Est-ce un chiffre récent ou est-ce que cela fait 10, 12 ou 15 ans?
Mme Ellis : Ce plafond d'un million de dollars existe depuis assez longtemps, plus de dix ans.
Le sénateur Meighen : C'est ce que je craignais. À qui appartient-il de dire : « Ma foi, en 15 ans, il y a eu beaucoup d'inflation mais on n'a pas relevé le plafond d'un million de dollars ». Qui devrait dire : « Ne pensez-vous pas qu'il faut réviser ce chiffre? »
Mme Ellis : En fait, ce genre de questions, comme tout ce qui a trait aux autres niveaux d'approbation, c'est ce que nous considérerions dans l'évaluation fonctionnelle annuelle. C'est à ce moment-là que nous signalons les problèmes que devrait à notre avis examiner le ministère ou qu'il devrait soulever auprès du Conseil du Trésor. Nous pouvons certainement jouer un rôle en demandant comment cela marche.
Le système est très clairement défini. Pour la construction et l'infrastructure, le premier niveau, ce sont les projets de moins d'un million de dollars. Pour un projet de un à cinq millions de dollars, je peux l'autoriser. Pour tout projet de cinq à 60 millions de dollars, c'est le ministre qui doit autoriser et tout ce qui dépasse 60 millions de dollars doit être présenté au Conseil du Trésor. Il y a une hiérarchie dans les autorisations de dépenses et il existe un processus rigoureux à suivre à chaque niveau. Nous avons un système de gestion de projet de construction extrêmement pointu et rigoureux.
Vous avez parlé d'approbations. Un des problèmes, c'est le temps que cela prend, même au sein du ministère. Vous comprendrez qu'avec tout ce que l'on a dit ces dernières années au sujet des contrôles et de la rigueur, de la nécessité de s'assurer que tous les chiffres sont exacts et qu'ils ont été vérifiés avant qu'une autorisation puisse être donnée, on a ajouté certaines étapes. Tout le monde au ministère est au courant mais nous travaillons avec le vice-chef d'état-major et le SMA des finances à simplifier certains des processus sans perdre la possibilité de vérifier et de bien gérer les finances. La saison de construction est très brève et il faut que les choses bougent.
Vous avez demandé si je devrais pouvoir approuver des projets révisés afin d'accélérer les choses pour le ministre. C'est quelque chose que j'ai demandé ces dernières années au Conseil du Trésor. Peut-être que l'on devrait réenvisager cela pour voir si on ne peut gagner une certaine souplesse. Mon groupe dirigerait cela en consultation avec tous nos collègues.
Le sénateur Meighen : Je ne peux que vous encourager à poursuivre cette idée. Je m'interroge quand je vois qu'on n'a pas modifié un plafond pendant dix ans alors que le processus décisionnel est tellement lent.
Quand on vend un bien immobilier excédentaire sur une base, où va le produit de la vente?
Mme Ellis : Le ministre doit d'abord demander s'il y a d'autres ministères fédéraux, des provinces ou des municipalités que ce bien immobilier intéresse. Nous commençons au niveau fédéral.
Le sénateur Meighen : Vous avez dit qu'il vous faut écrire à tous ces gens-là. Pourquoi ne vous contentez-vous pas de publier un avis? C'est la façon dont le reste du monde est avisé.
Mme Ellis : Lorsqu'il s'agit d'une vente ordinaire, nous nous contentons en effet de publier un avis par l'intermédiaire de Travaux publics. Quand je parle d'une vente ordinaire, je veux dire d'un bien qui n'a pas une valeur commerciale particulièrement élevée et qui ne présente pas un intérêt politique ou régional. Il s'agit alors d'un simple avis et Travaux publics nous aide à gérer cette transaction.
Le sénateur Meighen : Alors, pour quoi que ce soit de politique, peu importe ce qu'on entend par ce mot, de régional ou d'une certaine valeur, vous devez écrire une lettre?
Mme Ellis : Pour toute aliénation stratégique, autrement dit, si cela rapporte une somme considérable ou si c'est dans un secteur qui pourrait susciter beaucoup d'intérêt...
Le sénateur Meighen : Est-ce que Downsview est un bon exemple?
Mme Ellis : Cela fait partie de notre liste d'aliénations stratégiques, en effet. Dans ces cas-là, le ministre doit prendre la peine d'écrire à sept, huit ou neuf collègues qui pourraient avoir des activités dans le même secteur et qui pourraient s'intéresser à cette propriété, avant qu'on la cède à la Société immobilière du Canada.
Dans le cas de Nanaimo en Colombie-Britannique, par exemple, le ministère des Affaires indiennes et du Nord s'est dit intéressé par cette propriété. Si un autre ministère s'y intéresse aussi, la cession se ferait par présentation au Conseil du Trésor, mais en fonction de la valeur du marché. L'autre ministère nous en donne la valeur marchande, selon l'évaluation faite par Travaux publics, et c'est ainsi que se ferait la cession de cette propriété.
Si aucun autre ministère n'est intéressé, nous passons au prochain palier de discussion. Je prépare une présentation au Conseil du Trésor, recommandant la cession de la propriété à la Société immobilière du Canada. Avant d'arriver à l'étape finale de demande de cession, il faut d'abord s'occuper des questions relatives aux Premières nations et procéder à la dépollution. Il faut songer aux munitions non explosées sur la propriété et penser aussi aux considérations patrimoniales, entre autres. Il y a beaucoup d'autres questions à régler avant de pouvoir faire la cession. Encore une fois, il faut obtenir une évaluation de la propriété.
Quand toutes ces étapes sont terminées et que les ministres disent que l'on peut céder la propriété, la Société immobilière du Canada doit préparer un plan d'affaires à l'égard de ce bien. On fait une évaluation de la propriété et on prépare un billet à ordre. Une fois que la propriété est cédée à la Société et que tous les autres intérêts manifestés sont pris en compte, qu'ils soient locaux ou municipaux, si la propriété est mise en valeur et produit des revenus, nous pouvons demander que ces revenus nous soient versés par le Trésor. Nous pouvons demander jusqu'à 100 p. 100 des revenus perçus par la Société immobilière du Canada pour cette propriété.
D'après le Règlement, si nous recevons de l'argent ainsi, nous devons le réinvestir dans l'infrastructure. À la Défense nationale, quand l'argent nous revient, le vice-chef d'état-major de la Défense le rend habituellement. S'il s'agit de l'initiative d'une base, l'argent revient à la base. Si cela vient du commandement, cela peut servir au commandement de l'armée, mais il est censé revenir à ceux qui ont pris l'initiative de l'aliénation de la propriété et servir aux infrastructures.
Le sénateur Meighen : Si une propriété est venue un million de dollars, vous devez en déduire les dépenses effectuées par la Société immobilière du Canada pour la publicité, la vente, les négociations, etc. Que faut-il déduire d'autre de ce million de dollars et s'agit-il seulement du profit ou du prix de vente total?
Mme Ellis : Je vais commencer par la première partie de votre question et il se pourrait que je doive vous répondre plus tard, pour certains détails.
Si nous avons une propriété considérablement polluée par l'utilisation qu'en a faite la Défense nationale, nous en ferions l'évaluation, calculerions ce que nous en connaissons et la Société immobilière du Canada n'aurait pas à rendre les sommes nécessaires pour la dépollution. Dans certains cas, il se pourrait que nous fassions nous-mêmes la dépollution. Alors cela n'entre pas dans le calcul et on obtient le montant total.
S'il était un jour révélé que le MDN était responsable d'une contamination que nous n'avions pas décelée, il nous incomberait de décontaminer le site jusqu'à six ans après la cession du terrain. Le MDN est toujours responsable des munitions non explosées. Peu importe à qui nous cédons le terrain, dans tous les cas, nous devons enlever toutes les munitions non explosées qui s'y trouvent.
Le sénateur Nolin : Pourquoi six ans?
Mme Ellis : Avant de céder un terrain à la Société immobilière du Canada, nous devons déterminer s'il y a eu contamination de l'environnement. Nous faisons enquête et évaluons le coût de la décontamination. Dans le cadre de la transaction, nous déduisons ce coût de ce que devrait nous verser la Société immobilière du Canada. Si c'est elle qui se charge de la décontamination, le prix est rajusté en conséquence. Nous pouvons aussi décider de décontaminer le terrain après l'avoir cédé.
Le sénateur Nolin : Vous restez responsable six ans après la cession du terrain?
Mme Ellis : Nous faisons l'impossible pour décontaminer les terrains avant de les vendre. Si, dans les six ans suivant la vente, un réservoir à hydrocarbures du MDN fait surface par suite de l'érosion, c'est à nous et non pas à la Société immobilière du Canada de payer la décontamination. La règle générale veut que nous restions responsables jusqu'à six ans après la cession du terrain.
Le sénateur Nolin : Et une fois les six années écoulées, qui est responsable?
Mme Ellis : Pour autant que je sache, c'est le nouveau propriétaire du terrain. Je peux le confirmer, mais je crois que c'est la règle qui s'applique quand il y a eu contamination de l'environnement.
Le cas des munitions non explosées est différent. Après des années d'érosion et de gel en hiver, des munitions non explosées peuvent refaire surface. Peu importe qui a acheté le terrain et à quel moment, le MDN doit enlever ces munitions non explosées. Cette responsabilité n'a pas d'échéance.
Le sénateur Atkins : Pouvez-vous nous en donner des exemples?
Mme Ellis : Non, aucun exemple ne me vient à l'esprit, du moins, pas dans le cadre de notre processus d'aliénations stratégiques adopté en 1994-1995. Je devrai confirmer ces informations, mais aucun exemple ne me vient à l'esprit, et je connais très bien la liste.
Le sénateur Meighen : Étant donné que le MDN est propriétaire de propriétés non bâties, de bâtiments et d'autres biens immobiliers, avez-vous un programme d'évaluation de vos besoins — autrement dit, un programme d'aliénation des biens excédentaires? Dans l'affirmative, qui s'en occupe?
Deuxièmement, compte tenu de ce que vous venez de nous dire sur les responsabilités du ministère à l'égard des terres qu'il cède, autant à court terme qu'à vie, lui arrive-t-il souvent d'obtenir 100 p. 100 ou près de 100 p. 100 de la valeur des biens aliénés?
Mme Ellis : Je commencerai par répondre à votre question sur les biens immobiliers excédentaires. Dans le cadre du processus stratégique d'aliénation que je connais bien, celui qui a été mis en place après la décision du gouvernement du Canada de fermer des bases militaires en 1994 et en 1995, le gouvernement s'est lancé dans une grande initiative pour réduire les dépenses au MDN. À l'époque, on a probablement demandé au ministère d'évaluer ses besoins et d'indiquer quels biens immobiliers ne lui servaient plus. Le gouvernement a vraisemblablement examiné les conseils du ministère et, après avoir consulté les autres ministères compétents, a décidé quels biens pourraient être aliénés. Tout cela bien sûr est lié à la question de la fermeture des bases militaires, laquelle est une question de politique.
Depuis, on fait ce que j'appellerais une analyse au cas par cas. Par exemple, on a récemment annoncé l'aliénation stratégique des casernes Kapyong, à Winnipeg.
Toutefois, il faut tenir compte de la situation du logement à Winnipeg. J'ai fait mention du plan directeur de développement des biens immobiliers pour le logement, aux termes duquel nous déterminons les besoins de la base et des possibilités futures d'aliénation stratégique. Si le chef de l'armée, dans ce cas, nous disait qu'il y a des biens immobiliers qui pourraient faire l'objet d'une aliénation stratégique, mon équipe l'aiderait à demander l'approbation du Conseil du Trésor et du gouvernement.
Je fais partie d'un comité qui examine les dispositions stratégiques dans toute l'administration fédérale. Tous les grands ministères qui détiennent des biens immobiliers en font partie et nous nous réunissons régulièrement pour examiner les biens immobiliers qui pourraient être rendus. Si l'on s'entend pour dire que tel bien immobilier est stratégique et qu'il faudrait faire une présentation au Conseil du Trésor, nous appuyons une telle recommandation.
Il existe certainement un processus mais c'est pour toute l'administration. Tout le monde s'efforce d'optimiser ses biens immobiliers et de se débarrasser de ceux qui ne sont pas nécessaires.
Le sénateur Meighen : Si j'étais commandant d'une base et que la base avait une propriété de 900 000 $, pourrais-je prendre l'initiative de la vendre au meilleur prix? Supposons que je réussisse et que j'obtienne 900 000 $. Quelles restrictions me sont imposées quant à l'utilisation de cette somme? Puis-je la verser à une sorte de fonds d'immobilier de la base ou suis-je autorisé à l'inclure dans les revenus généraux de la base ou l'utiliser pour acheter du matériel nécessaire à la formation de mes troupes?
Mme Ellis : Je vais vous donner la meilleure réponse possible pour le moment mais il me faudra peut-être demander des précisions que je vous communiquerai plus tard.
La première chose est de faire la distinction dont je parlais. S'il s'agit d'une vente relativement mineure, ordinaire, on peut supposer que le commandant de la base suivrait la chaîne de commandement, jusqu'à son commandant de zone puis au chef de l'armée et...
Le sénateur Meighen : Il ne peut décider seul?
Mme Ellis : Il doit les aviser de ce qu'il a l'intention de faire. Pour une vente peu importante, routinière, il peut le faire lui-même en passant par Travaux publics Canada. Dans ce cas, il est peu probable que cela rapporte des sommes d'argent énormes. Le produit de la vente reviendrait à la base. Il ne pourrait l'utiliser que pour de l'infrastructure. Il devrait réinvestir cet argent dans l'infrastructure.
Le sénateur Meighen : Infrastructure?
Mme Ellis : Des biens immobiliers, des bâtiments, de l'entretien et des réparations.
Le sénateur Meighen : Qu'il en ait besoin ou non?
Je suppose alors que s'il met cela dans l'entretien et les réparations, ces 900 000 $ seraient déduits de son budget l'année suivante?
Mme Ellis : Je ne peux pas vous confirmer cela.
Le sénateur Meighen : Existe-t-il un incitatif quelconque à optimiser l'immobilier? Si vous trouvez un bien immobilier dont vous n'avez pas besoin et que vous le vendez, si l'on vous demande de réinvestir le produit de la vente dans un secteur qui n'a pas particulièrement besoin de fonds, pourquoi le faire?
Mme Ellis : J'aimerais faire quelques commentaires à ce sujet. Premièrement, il y a certainement des incitatifs à réduire et optimiser l'infrastructure, selon la situation particulière d'une escadre ou d'une base.
Autour de l'an 2000, le ministre a lancé ce que l'on appelle l'initiative de réduction de 10 p. 100. Les commandements, tous les commandants, ont été invités à réduire leur empreinte de 10 p. 100. Les bases et les escadres ont toutes participé à cette série d'évaluations. Nos données, bien qu'imparfaites, sont raisonnables et ne révèlent qu'à ce moment la majorité des intéressés à opérer cette réduction. Évidemment, comme incitatif, c'est peut-être plutôt le bâton que la carotte.
Le sénateur Meighen : C'est un ordre, ce n'est pas un incitatif.
Mme Ellis : C'est quelque fois la façon dont il faut faire les choses.
Deuxièmement, les éléments les plus positifs sont les économies réalisées chaque année dans ce que nous appelons exploitation et maintenance. Par exemple, si on a des bâtiments qui sont irrécupérables, il est probablement mieux de les démolir et de vendre le terrain ou de regrouper autre chose et de construire du neuf. J'espère que dans l'analyse de rentabilisation présentée, le commandant de la base montrerait pourquoi la décision de construire du neuf ou de faire un gros investissement à cet endroit va en fait lui permettre d'économiser à la longue sur son budget d'entretien. Il peut s'agir d'économie d'énergie en remplaçant les fenêtres. Il faut beaucoup de choses lorsque l'on présente une proposition semblable.
D'autre part, un incitatif peut être parfois de partager des locaux. Par exemple, à Windsor, en Ontario, nous sommes très fiers d'un projet que nous avons réalisé avec la police de Windsor. Cela touche au manège militaire de Windsor. L'incitatif consistait à trouver un moyen de partager les frais d'exploitation de ces installations. La Défense nationale n'en avait pas besoin tout le temps mais ne pouvait tout de même pas s'en séparer. Nous économisons de l'argent en le partageant parce que la police de Windsor couvre une partie des frais d'exploitation.
Nous essayons de faire des choses plus novatrices mais on a également demandé par le passé de réduire les coûts. Quand on va examiner ce que va signifier cette nouvelle politique pour la structure de l'armée, on découvrira peut-être d'autres possibilités de reconfiguration, regroupement et optimisation de l'immobilier. Nous serons là pour aider les intéressés lorsqu'ils seront prêts à en discuter.
Le sénateur Meighen : Nous avons vu le manège militaire de Windsor lorsque nous avons été là-bas et c'est une excellente idée. C'est une idée qu'il faudrait reprendre ailleurs au pays quand c'est possible.
Certains de ces projets, comme le Queen Mary II, une fois qu'ils ont été lancés, il est presque impossible de faire marche arrière ou de les arrêter. Par exemple, comme on utilise de moins en moins Goose Bay, on peut se demander pourquoi on vient de réasphalter la piste d'atterrissage. Est-il difficile d'arrêter quelque chose une fois que cela a été approuvée? Quelle explication peut-on donner?
Mme Ellis : Le gouvernement a décidé d'investir dans la piste d'atterrissage et aide maintenant à gérer le projet.
Le sénateur Meighen : C'est ce que je craignais vous entendre dire.
Le président : Vous dites qu'on vous a dit de le faire, que ce n'est pas vous qui l'avez suggéré.
Mme Ellis : Il ne m'appartient pas de faire une suggestion sur une piste d'atterrissage.
Le président : D'où est venue la décision?
Mme Ellis : Je ne sais pas. Je sais seulement que l'État a pris la décision.
Le président : Quelqu'un doit avoir signé une note de service à ce sujet.
Mme Ellis : Ma foi, je n'en ai pas vue.
Le président : Pourriez-vous vérifier? Nous aimerions une réponse par écrit dès que possible sur l'origine de cette proposition.
Le sénateur Meighen : Où et quand a-t-elle vu le jour.
Le président : Où, quand et qui l'a signée et nous aimerions la chaîne de documentation, du début à la fin.
Mme Ellis : Je peux prendre votre question en délibération mais cela ne relève pas de mon champ de compétences. Il me faudra la transmettre à nos affaires parlementaires en demandant à ce service de vous répondre. Je me ferai un plaisir de le faire.
Le sénateur Banks : Je suis ravi de constater que vous avez enseigné, c'est la plus noble de toutes les professions et vous nous apprenez également des choses aujourd'hui. Je remarque aussi que vous avez un diplôme en études médiévales, ce qui sera utile pour nous aider à comprendre, entre autres, le système des dossiers militaires.
Nous avons entendu des témoignages de beaucoup de monde ces dernières années, qu'il s'agisse de militaires ou de fonctionnaires du ministère. Nous avons posé des questions quant à toutes sortes d'initiatives qui nous intéressaient. Si un commandement de base pouvait vendre un bien immobilier de 999 999 $, il pouvait également dépenser 999 999 $ pour construire un bâtiment sur ce terrain. C'est ce que l'on nous a dit il y a plus de 10 ans. Ne devrait-il pas s'agir aujourd'hui de 2 millions de dollars et ne devriez-vous pas avoir le pouvoir de décision sur des projets de 10 millions plutôt que de 5 millions de dollars?
Que signifie « nous pourrions examiner cela »?
Mme Ellis : Nous essayerons d'examiner au moins mon plafond, de 1 à 5 millions de dollars et je ne vois pas d'inconvénient à poser les mêmes questions à propos du plafond d'un million. Il ne faut pas toutefois oublier que ce n'est pas seulement la Défense nationale qui prend une telle décision. Ce doit être examiné par le Conseil du Trésor et être conforme à la Loi sur la gestion des finances publiques.
Le sénateur Banks : Nous comprenons bien. Ma question est toutefois : quand vous dites que c'est quelque chose qu'il faudrait examiner, combien de temps cela peut-il prendre? quand a-t-on d'abord soulevé la question et où en est- on exactement?
Mme Ellis : J'ai en effet soulevé la question en janvier et février derniers lorsque j'ai présenté mon évaluation fonctionnelle et fait certaines suggestions auxquelles les autorités pourraient réfléchir.
Le sénateur Banks : C'était il y a six mois. Que s'est-il passé depuis?
Mme Ellis : Cela n'a pas encore beaucoup avancé. Toutefois, je crois que nous devrions en parler cet automne au Conseil du Trésor.
Tout d'abord, il faut que l'idée fasse son chemin au sein du ministère. Il faut pouvoir indiquer quelle serait l'incidence de tels changements et montrer que c'est conforme à la Loi sur la gestion des finances publiques. C'est alors seulement que nous indiquons au Conseil du Trésor que cette idée nous aiderait à obtenir plus rapidement les approbations sans toutefois renoncer à la rigueur nécessaire. Ce qui est important, en fait, c'est de savoir qui doit rendre compte de quel montant d'argent et qui autorise quel type de projets.
Le sénateur Banks : Je sais qu'il faut que tout soit vérifié, revérifié et autorisé plusieurs fois. Dans ce genre de situation, je sais que la tendance va dans un sens ou dans l'autre. Je n'ai jamais préconisé que quiconque, sauf moi, soit tenu entièrement responsable de tout.
Le problème, pour les membres du comité, c'est que ce genre de choses prend des années. Ailleurs, ce n'est pas le cas. Je sais qu'il s'agit de fonds publics et qu'il faut ainsi examiner les choses beaucoup plus à fond. Toutefois, la tendance n'est-elle pas actuellement d'exagérer? Le sénateur Meighen a dit qu'il fallait 13 ans pour acheter quelque chose de nouveau. Au bout du processus, ce n'est plus nouveau. Nous avons appris que l'on avait acheté du matériel extrêmement coûteux qui sert finalement d'ancre de bateau parce qu'il n'est plus fonctionnel. Nous nous inquiétons de la lenteur de ces processus. Ne peut-on les accélérer? Est-ce que cela ne vous frustre pas quelques fois?
Mme Ellis : Je dois dire que lorsqu'il s'agit d'essayer d'obtenir des approbations, nous trouvons que c'est en effet parfois difficile parce qu'il faut longtemps pour que cela passe par tout le système.
Le sénateur Banks : Qui peut régler ce problème?
Mme Ellis : Nous essayons certaines choses pour simplifier les approbations révisées qui peuvent nous être nécessaires pour les projets de construction en faisant un travail préliminaire avec les différents bureaux du quartier général de la Défense qui doivent autoriser les projets.
Le sénateur Banks : Je comprends que cela ne concerne pas une seule personne. Ce qui nous agace, c'est que lorsque nous posons nos questions, nous recevons justement ce genre de réponses.
Mme Ellis : Ce n'est pas mon but.
Le sénateur Banks : Je sais. Vous dites qu'il faut demander à beaucoup de monde. Quelqu'un devrait pouvoir dire : « Prenons la décision », tout en s'assurant que toutes les précautions sont prises et toute la rigueur voulue est appliquée. Quelqu'un devrait pouvoir s'assurer que la proposition ne reste pas en plan sur un bureau pendant six mois. Nous savons que cela arrive. Ne connaissez-vous pas quelqu'un qui pourrait régler ce problème? J'essaie de vous demander à qui le comité pourrait s'adresser. Même lorsque l'on pose la question aux niveaux élevés de la hiérarchie, les gens nous répondent que cela ne dépend pas d'eux.
Mme Ellis : Dans mon cas, je ne peux vous parler que des approbations de construction pour des grands projets de construction ou de portée environnementale. La bonne nouvelle, c'est que nous avons, je vous le dis, le plan des grands projets de construction que nous soumettons au ministre. Lorsqu'il a été approuvé par le ministère, nous pouvons en parler directement au ministre et lorsqu'il a lui-même approuvé, nous pouvons le mettre à exécution. Cela prend toujours plus longtemps que nous ne l'imaginons mais cela revient en fait à trouver le temps de donner des informations voulues et d'obtenir les autorisations nécessaires.
Le sénateur Banks : Qu'est-ce qui est plus important que cela? Pourquoi faut-il tant de temps pour faire avancer les choses?
Mme Ellis : Dans certains cas, il faut planifier la préparation du mémoire sur le plan, quoi que ce processus marche assez bien. Des difficultés se posent lorsque nous devons réviser un projet. Certains marchés de la construction deviennent très convoités, et les coûts augmentent pour des raisons légitimes, et nous devons faire passer cela dans le système. Cela peut prendre un certain nombre de jours.
Le sénateur Banks : Il arrive qu'on vous impose aussi des changements.
Mme Ellis : Si j'apprends qu'un projet en cours doit changer, je convoque généralement mes trois ou quatre collègues de mon niveau, ou d'un niveau supérieur, qui devront y jeter un coup d'œil. Parfois, si c'est urgent, on leur soumet le projet directement pour le faire avancer plus vite. Les choses peuvent être accélérées dans un cas d'urgence mais il y a beaucoup d'autres choses qui sont urgentes aussi. Il s'agit donc de gérer la charge de travail et tout ce qui peut passer sur le bureau de quelqu'un le long de la chaîne de commandement.
Nous y travaillons, et nous tâchons d'améliorer les choses. Nous pouvons disposer d'une certaine souplesse, mais nous savons que nous devons être rigoureux. Plus les gens sauront ce que nous faisons, les choses vont s'améliorer parce que nous n'aurons pas à réinventer la roue chaque fois. Il s'agit parfois d'éduquer nos gens qui étudient ces dossiers. Sur le plan pratique, certains efforts peuvent nous aider, mais le système ne deviendra jamais hyper rapide. Ce n'est pas prévu.
Le sénateur Banks : Je sais que mes collègues espèrent comme moi que vous saurez vous montrer plus rapide, sans sacrifier la rigueur, le quand et le comment, et ce, le plus vite possible.
Pour ce qui est de l'immobilier, je m'y intéresse parce que j'ai l'honneur d'être membre d'un autre comité, celui de l'environnement. Quand vous bâtissez ou rénovez un immeuble, vous pouvez économiser énormément d'argent en modifiant les fenêtres ou les ampoules, ou en installant une thermopompe puisant l'énergie dans le sol si c'est un gros immeuble. Votre ministère accorde-t-il de l'attention à ce genre de choses?
Mme Ellis : Nous avons commencé sérieusement à nous intéresser à ce qu'on appelle la conception écologique des immeubles. Je ne dirais pas que cette conception est appliquée aujourd'hui à tous les immeubles. Pour revenir à ce que je disais plus tôt, il en coûte encore quelque chose pour mener à bien n'importe quel projet et intégrer certaines conceptions écologiques, qui finissent par être rentables plus tard. Cependant, je le répète, l'armée de terre, peu importe qui est le client, doit décider jusqu'où on veut aller du côté écologique.
Le sénateur Banks : Quand vous achetez de nouvelles ampoules, la décision n'est pas difficile.
Mme Ellis : Je suis d'accord. Je parle de la conception d'un immeuble neuf. Nous en avons eu deux bons exemples récemment. Je ne sais si vous êtes allés au mess des maîtres et des premiers maîtres à Halifax, le nouvel immeuble qu'il y a là-bas, mais celui-là est un très bon exemple de l'intégration des conceptions écologiques. Il y en a une que l'on appelle la « conception de pointe en matière d'énergie et d'environnement ». L'autre est un principe britannique, la « méthode écologique de l'autorité de recherche sur le bâtiment ». Ce sont des pense-bêtes qui vous permettent de voir dans quelle mesure vous avez tenu compte de l'écologie lorsque vous avez bâti votre immeuble. C'est un excellent exemple.
Le sénateur Banks : Est-ce que chaque immeuble nouveau ou rénové est soumis à cet examen?
Mme Ellis : Non, en ce moment, pas tous.
Le sénateur Banks : Quand allez-vous le faire?
Mme Ellis : Tous mes gestionnaires de programme ont été formés à ce genre de choses, donc lorsqu'ils sont en présence d'un client qui a un projet à soumettre, ils posent la question. Ils vont dire : « Ce sont des choses que vous pouvez faire. » La conception de chaque immeuble sera-t-elle parfaite? Pas nécessairement; ça dépend du prix. Nous tâchons d'encourager les gens à faire le minimum chaque fois qu'on entreprend un nouveau projet. Au bout du compte, c'est à eux qu'il appartient de décider jusqu'où ils veulent aller. Nous les sensibilisons à l'aspect écologique.
Le sénateur Banks : Je me permets de vous dire qu'on ne devrait pas leur laisser le soin de décider, étant donné que le gouvernement du Canada a décidé qu'il allait donner le bon exemple. Vous êtes le plus gros propriétaire du pays, et de tous les ministères du pays, c'est vous qui possédez le plus de biens immobiliers. Si on ne peut pas donner le bon exemple dans votre secteur, comment peut-on demander aux autres Canadiens de le faire?
Mme Ellis : Je crois que nous commençons à donner l'exemple. Bon nombre de ces nouvelles conceptions sont désormais d'application plus facile. Nous avons tout juste commencé à utiliser ces deux outils que j'ai décrits dans nos discussions avec nos clients.
Ce que vous devez savoir, c'est que lorsqu'on reçoit l'énoncé des besoins pour la construction d'un immeuble, l'environnement est un aspect dont on tient compte; il y en a d'autres, l'accès facile, par exemple. Ce sont là divers éléments qui ont tous un prix, et le client doit en tenir compte : jusqu'où veut-il aller pour chaque chose? Mon travail à moi, et le travail de mon équipe, consiste à signaler chaque fois ce qu'on peut faire, ce qui peut être la meilleure conception écologique de l'immeuble. Je crois que nous allons toujours en faire plus de ce côté. Il y a des exigences minimales sur ce point, et je peux en assurer le respect.
Le sénateur Banks : Un autre comité va publier très bientôt un rapport dans lequel on recommandera que tout projet fasse au préalable l'objet d'un examen environnemental.
Vous avez mentionné un manque à gagner considérable au niveau des réparations et de l'entretien, et l'analogie que vous avez employée est parfaite. Vous pouvez me payer maintenant ou me payer plus tard. Nous nous souvenons tous de cette réclame.
Vous recevez un crédit spécial de 20 millions de dollars par année pour faire des choses, et la dernière affectation de ce crédit, en 2005-2006, la notice d'impact disait que tout cet argent avait servi à diverses activités de planification, à certaines constructions et à des réductions d'infrastructure, mais il n'y avait rien pour l'entretien et les réparations. Est- ce qu'on a omis quelque chose?
Mme Ellis : On n'a rien omis. C'est une bonne question.
Essentiellement, c'est en 2004-2005 que j'ai reçu ce crédit de 20 millions de dollars pour la première fois. C'est pour cet exercice financier que je l'ai reçu pour la première fois. Ce qui a été fait, c'est que le ministère a pris une décision concernant l'accès facile. Le ministère avait fait l'objet d'une vérification par la Commission canadienne des droits de la personne quelques années auparavant, et celle-ci avait dit qu'un certain nombre de nos immeubles n'étaient pas conformes sur ce point. Encore là, étant donné qu'il est coûteux d'installer des ascenseurs et ce genre de choses, certains collègues avaient du mal à se conformer à cette exigence; rappelez-vous le règlement sur la santé et la sécurité et les questions de conformité.
J'ai rédigé un mémoire à l'adresse du ministère, qui a été approuvé, où je proposais de prendre une partie de ce crédit de 20 millions de dollars pour aider mes collègues à régler ces problèmes d'accès sur une période de deux ans, et ce, avec des fonds correspondants. C'était en 2004-2005 et en 2005-2006. Si vous voulez, cela relevait aussi de l'entretien et des réparations. C'est le choix que nous avons fait.
Nous avons alloué un peu d'argent à nos collègues pour l'entretien et les réparations. Cependant, cela constituait le gros de notre effort pour cette année-là, et nous poursuivons ce travail.
La planification est importante. Ce n'est pas seulement une question d'argent : cinq millions de dollars pour la planification, à quoi est-ce que ça sert? Cela nous permet de faire beaucoup de choses parce que cela est lié à ce que j'ai dit à propos de l'optimisation des avoirs. Comment donner au commandant d'une base la chance de faire les choses dont nous parlons? Comment l'amener à voir à quoi ressemblerait cette superficie au sol, ce qu'il peut faire avec, ce qu'il pourrait proposer? En lui donnant cet argent, étant donné qu'il a peu de ressources humaines aussi, cela lui donne la chance d'engager des experts, de prendre le temps de consulter son ingénieur, et il peut ensuite nous donner des idées qui nous aideront à réaliser nos objectifs à long terme au niveau de la superficie idéale.
Tout cela est lié, et la planification est essentielle.
Le sénateur Banks : C'est vrai. Je vous remercie pour ces réponses. Je vous prie instamment d'accorder la priorité la plus élevée qui soit à l'aspect écologique des rénovations et des nouvelles constructions, et de lui donner une place plus élevée sur cette liste dont vous avez parlé.
Mme Ellis : Je le ferai avec enthousiasme, monsieur le sénateur. C'est la Semaine de l'environnement aussi, et je fais un effort de sensibilisation très sérieux auprès du ministère cette semaine.
Le président : Madame Ellis, avez-vous dit que l'an dernier, le ministère était parvenu à réduire sa superficie au sol de 10 p. 100?
Mme Ellis : Pas en une seule année — c'est depuis l'initiative de réduction de 10 p. 100, qui a été amorcée en 2000. Nos données ne sont pas parfaites, mais elles sont raisonnables, et nous sommes sûrs — et nous l'avons dit à l'état- major — que nous avons réussi à réduire la superficie au cours des trois ou quatre dernières années. Cela veut dire que des immeubles ont été démolis ou consolidés; il y a diverses façons de l'expliquer.
Le président : Cette réduction obéissait-elle à des critères?
Mme Ellis : Je n'étais pas au ministère lorsque cette initiative a été lancée, mais je ne crois pas qu'il y avait beaucoup de critères détaillés. Je ne peux pas en parler avec certitude aujourd'hui.
Le président : Avait-on décidé arbitrairement que ce serait 10 p. 100?
Mme Ellis : Essentiellement, on a demandé aux gens de voir ce qu'ils pouvaient faire et de prendre des mesures pour réduire le plus possible. Y avait-il beaucoup de critères? Il n'y en avait pas beaucoup; c'était une question de mètres carrés.
Le sénateur Banks : Je le dis pour mémoire, c'est idiot.
Le président : Je crois que le sénateur Banks s'oppose à une réduction généralisée de 10 p. 100 mesurée en mètres? Est-ce exact, sénateur Banks?
Le sénateur Banks : Oui.
Le président : J'interprète souvent ce qu'il dit. Quels plans avez-vous maintenant pour réduire la superficie des Forces canadiennes?
Mme Ellis : Si vous parlez de petites choses qui peuvent se faire au niveau d'une base ou d'une escadre, s'il est raisonnable d'opérer une consolidation, ou d'aliéner un petit bien, je ne peux pas vous donner d'exemple pour ce genre de choses aujourd'hui. Il y a peut-être des idées à ce sujet.
Le président : Nous songeons à une réduction de 25 ou de 30 p. 100.
Mme Ellis : Il n'y a pas de plans de ce genre en ce moment au ministère. Comme je l'ai dit plus tôt, une fois que la nouvelle politique de défense sera mise en œuvre et qu'on apportera des changements à la structure des forces ou à la structure de commandement, on demandera à mon équipe d'intervenir, de fournir des conseils et de collaborer à la planification. Il n'y a encore rien en ce moment.
Le président : Comment allez-vous procéder si le gouvernement exige une réduction importante de la superficie? Que va faire le ministère?
Mme Ellis : Je n'étais pas au ministère en 1994-1995. J'imagine qu'on commencerait avec un groupe d'acteurs clés à mon niveau, qui prendrait connaissance des plans et de l'intention du gouvernement. Puis nous mettrions au point un processus au ministère pour évaluer la situation à l'échelle de tout le pays : ce que nous avons, ce qu'il nous faut, comment l'on pourrait reconfigurer les choses. Mon équipe fournirait des conseils d'experts en ce qui concerne l'aliénation de biens immobiliers. Ce serait encore les commandants opérationnels et l'état-major qui décideraient des besoins opérationnels, ce sont eux qui savent si les choses dont ils ont besoin sont différentes, et nous les conseillerions ensuite sur la manière de réaliser cet objectif. Nous devons collaborer avec eux en respectant leurs exigences.
Le ministère sait très bien comment s'attaquer aux grands problèmes. Nous créons le groupe voulu, nous réfléchissons ensemble et nous trouvons le moyen de mettre en œuvre n'importe quelle décision du gouvernement.
Le président : Y a-t-il des installations de la Défense nationale qui devraient être payées par un autre ministère?
Mme Ellis : Pouvez-vous préciser le contexte, s'il vous plaît?
Le président : Nous avons l'impression que le ministère accepte des responsabilités qui ne semblent pas avoir grand- chose à faire avec la Défense nationale. Nous voulons savoir si quelqu'un au ministère s'est penché sur ces diverses tâches pour voir si elles devraient être assignées à un autre ministère. Nous vous avons demandé plus tôt si vous et votre groupe ne devriez pas plutôt être aux Travaux publics pour faire le même travail. Vous avez dit que ce n'était pas une bonne idée.
Nous nous demandons si toutes les personnes qui semblent travailler au ministère y ont leur place et si elles ne devraient pas être ailleurs plutôt. Avez-vous des conseils à nous donner à cet égard?
Mme Ellis : Je sais que c'est une question très générale, et je vois bien que cela préoccupe le comité, mais je ne peux pas vous donner d'avis à ce sujet. Je n'ai pas d'avis particulier là-dessus. Je ne peux parler que de ce que fait mon propre groupe. Je pense qu'il a sa place et qu'il est utile au ministère. C'est mon groupe à moi, et c'est tout ce que je peux dire en réponse à la question de savoir si je devrais être dans un autre ministère ou non. Nous avons notre place dans l'institution militaire. Votre question est de nature plus générale, et je n'ai rien à ajouter.
Le président : Alors, au nom du comité, je tiens à vous remercier d'avoir été des nôtres aujourd'hui. Nous vous remercions de nous avoir aidés, et il se pourrait que nous ayons d'autres questions à vous poser, et ce sera alors un plaisir.
Mme Ellis : Je vous remercie beaucoup de m'avoir écoutée.
Le président : Je m'adresse à ceux qui nous regardent à la télévision : si vous avez des questions ou des commentaires, je vous invite à aller sur notre site Web, le www.sen-sec.ca. Vous y trouverez nos procès-verbaux ainsi que le calendrier des audiences. Vous pouvez aussi communiquer avec le greffier du comité en téléphonant au 1-800-267-7362 pour obtenir plus d'information ou pour qu'il vous aide à contacter des membres du comité.
Nous allons maintenant entendre le groupe qui nous parlera des logements militaires pour les familles. Nous recevons le brigadier-général Steve Irwin, ingénieur militaire d'expérience, qui a derrière lui une longue et riche carrière. Il a été entre autres commandant du Régiment de génie à Lahr, en Allemagne, de 1984 à 1986; commandant de l'École de génie militaire des Forces canadiennes de 1989 à 1992; commandant du contingent canadien dans l'ex-Yougoslavie en 1992; et directeur général — Infrastructure — et directeur — Disponibilité opérationnelle de la force terrestre — en 1996. Le brigadier général Irwin a été promu au grade qu'il occupe actuellement en juin 2001, et il a été nommé directeur général — Politiques et planification immobilières/J3 Génie — et directeur général — Génie militaire/J3 Génie.
Le brigadier général Irwin est accompagné du colonel Rochette, qui s'est joint aux Forces armées canadiennes en 1983 et a une formation en relations industrielles, en logistique et en finances. Il a été contrôleur en divers endroits, par exemple, au Mont Apica, au Québec, au quartier général de la Défense nationale à Ottawa, et à Goose Bay, au Labrador. En 1999, il a été promu au grade de lieutenant-colonel et admis au Collège d'état-major des Forces canadiennes. En 2000, il a assumé le rôle de directeur intérimaire — Pensions et programmes sociaux, et il a eu pour tâche d'élaborer le Régime de pensions de la Force de réserve. À l'été 2001, il a été nommé directeur du Projet de modernisation du régime de retraite des Forces canadiennes. Il a été promu à son grade actuel en janvier 2004 lorsqu'il a été nommé à ce poste.
Nous allons également entendre le capitaine de frégate Ken Lait, qui s'est engagé dans la Marine royale du Canada en 1965. Le capitaine de frégate Lait a fait une longue et belle carrière sur terre comme sur mer. Il a pris sa retraite de la Force régulière en janvier 2002, après un peu plus de 36 ans de service. En septembre 2002, le capitaine de frégate Lait, à titre d'officier de réserve, est entré à la Direction de la qualité de la vie comme chef de section responsable de la politique du logement et de la liaison avec l'Agence de logement des Forces canadiennes, poste qu'il occupe toujours.
Mon général, je crois savoir que vous avez un bref exposé à nous faire. Vous avez la parole.
Le brigadier général S. M. Irwin, chef de la direction de l'Agence de logement des Forces canadiennes, Défense nationale : Je vous remercie de nous offrir cette occasion de discuter de l'importante question du logement résidentiel pour les membres des Forces canadiennes (FC). L'Agence de logement des Forces canadiennes (ALFC) joue un rôle de premier plan dans la mise en œuvre de la politique de logement des Forces canadiennes. À titre de chef de direction de l'Agence, c'est avec plaisir que je répondrai à vos questions sur le portefeuille de logements résidentiels. Le colonel Rochette et le capitaine de frégate Lait sont présents aujourd'hui pour répondre à vos questions sur les politiques et la rémunération. Ils relèvent du sous-ministre adjoint, Ressources humaines — Militaires, qui est responsable de toute question de politique relative au logement. Je relève de la sous-ministre adjointe, Infrastructure et Environnement, et mon rôle est de gérer le portefeuille de logements résidentiels.
Avant de répondre à vos questions, j'aborderai trois points. Premièrement, l'ALFC gère le logement résidentiel de manière efficace. Nous avons investi considérablement dans le portefeuille et son état s'est grandement amélioré. Cela ne nous empêche pas de constater qu'il nous reste encore beaucoup de travail à faire pour que le portefeuille corresponde à des normes plus contemporaines. C'est pourquoi nous nous sommes engagés dans un vaste programme de rénovation et de modernisation de nos unités de logement. Deuxièmement, nous fournissons un service exceptionnel aux membres des FC. Troisièmement, le calcul des loyers est rigoureux et équitable.
Quand l'ALFC a été créée à titre d'organisme de service spécial provisoire en 1996, elle a hérité d'un portefeuille de 22 000 unités réparties à travers le Canada, la plupart datant des années 50. Plusieurs de ces maisons étaient mal entretenues depuis des années et présentaient des risques pour la santé et la sécurité. Notre mandat d'origine nous a permis d'investir plus de 400 millions de dollars pour rectifier la situation. En 2005, nous pouvons affirmer que nos logements familiaux sont bien entretenus et qu'aucune question de santé ou de sécurité n'est laissée en suspens. Ce ne sont plus les maisons dont nous avons hérité en 1996.
Pour faire en sorte que nous ayons les unités appropriées en nombre suffisant et aux bons endroits pour répondre aux besoins des membres des FC, nous pouvons compter sur des consultations avec les principaux gardiens de biens immobiliers du ministère, soit les chefs de l'Armée, de la Marine et de la Force aérienne, par exemple, qui nous font part de leurs besoins. Nous nous basons aussi sur les études en matière de logement produites par l'Agence. Ces études nous permettent de déterminer le nombre et la taille d'unités requises dans les bases et escadres partout au Canada, car elles examinent la taille et le profil de l'effectif à chacun des sites, ainsi que les tendances et conditions qui prévalent sur le marché immobilier local. Ces prévisions nous ont permis de réduire la taille du portefeuille à 14 000 unités, un nombre qui reflète mieux la taille actuelle de logements résidentiels militaires, ce qui fait en sorte que nous avons moins d'unités vacantes à entretenir.
[Français]
Nous avons reçu la confirmation de notre statut d'organisme de service spécial permanent du ministère de la Défense nationale en mars 2004.
Cela nous a permis de lancer un programme de rénovation et de modernisation à grande échelle et d'entamer la construction de nouvelles unités à Wainwright pour soutenir la transformation des Forces canadiennes.
Notre prochain défi est de prendre ces logements des années 1950 et de les faire entrer dans le XXIe siècle. Le quotidien d'aujourd'hui n'est plus celui d'il y a 50 ans. Aujourd'hui, les membres des Forces canadiennes n'ont plus les mêmes attentes envers l'endroit où ils s'établissent. Ils ont des attentes différentes envers la grandeur de leur cour, le nombre de chambres ou même l'usage qu'ils feront de leur sous-sol.
Aujourd'hui, les membres des Forces canadiennes s'attendent à la même chose que tous les autres Canadiens et Canadiennes : un chez-soi qui reflète leur style de vie. C'est ce à quoi nous faisons référence quand nous parlons de logements contemporains.
[Traduction]
L'Agence travaille très fort pour constituer un portefeuille efficace, de taille optimale et correspondant aux normes contemporaines, et pour fournir aux membres des FC le meilleur service possible. Pour nous, c'est primordial. Chaque jour et à chacun de nos sites, les membres du personnel de l'ALFC vont bien au-delà de ce qu'un propriétaire d'immeuble ordinaire ferait pour ses locataires, fournissant des plans d'étage à l'avance de déménagements transcontinentaux, aidant de jeunes parents à localiser tous les services dont leur famille a besoin, répondant à des appels d'entretien 24 heures par jour. Nous faisons tout ce qu'il faut pour que les membres des FC se sentent chez eux et pour qu'ils sachent que nous leur savons gré de leur dévouement envers notre pays.
Le colonel Rochette et le capitaine de frégate Lait pourront répondre à vos questions sur les politiques, mais j'aimerais maintenant dire quelques mots à ce sujet. D'abord, nous fournissons des logements résidentiels seulement quand le marché ne peut pas satisfaire aux besoins des FC. Nous fournissons des logements de fonction à plusieurs endroits, y compris dans certaines zones urbaines, parce que la taille du marché ne garantit pas nécessairement que des logements locatifs convenant aux familles seront disponibles pour les membres des FC. Il est important de souligner que l'objectif de cette intervention n'est pas de rendre le logement abordable.
La capacité de nos membres à payer leurs frais de logement, qu'ils vivent sur la base ou en dehors de celle-ci, est assurée par l'Indemnité de vie chère en région. Cette allocation est versée à tous les membres affectés à des zones où le coût de la vie est supérieur à la moyenne nationale. Les frais de logement sont un facteur parmi d'autres dans le calcul de cette indemnité. On doit noter également qu'en aucun cas, les occupants de logements familiaux ne sont tenus de payer un loyer supérieur à 25 p. 100 du revenu brut de leur ménage.
Aujourd'hui, 80 p. 100 des membres des FC ont recours au marché privé pour se loger. Par souci d'équité envers 100 p. 100 des membres des Forces canadiennes, peu importe où ils vivent, les loyers des logements familiaux reflètent ceux de logements comparables sur le marché privé. Afin d'établir le juste loyer du marché, les experts de la Société canadienne d'hypothèques et de logement déterminent la valeur marchande de nos unités chaque année. Cette appréciation est fondée sur le type, la taille, l'âge, l'emplacement et l'état des logements, et elle tient compte d'éléments précis comme le nombre et l'état des salles de bain, le caractère fonctionnel des cuisines ou encore la présence d'un garage. Les loyers des logements familiaux sont rajustés chaque année et reflètent tous les éléments dont tiennent compte les évaluateurs.
Le rôle de l'Agence est de mettre en pratique les politiques de logement de manière juste et équitable. Nous savons qu'il nous reste du chemin à parcourir pour ramener le portefeuille à des normes contemporaines. Aujourd'hui, nous gérons les logements familiaux de manière efficace, nous avons un plan cohérent pour l'avenir et nous nous efforçons d'améliorer continuellement la qualité de nos services.
Le sénateur Banks : Général, nous avons entendu plus tôt la sous-ministre adjointe Ellis qui nous a dit qu'on a donné l'ordre il y a quelque temps de cela de réduire de 10 p. 100 le nombre de mètres carrés des immeubles de la Défense nationale. Est-ce que cela s'appliquait aux logements?
Le bgén Irwin : Non, sénateur, pas du tout. Le logement est basé sur les exigences des membres des FC et sur les études sur les besoins du logement que nous effectuons à chaque site. Ce sont les besoins des membres des FC qui dictent la taille de notre portefeuille.
Le sénateur Banks : Il est sûr que pour ces logements qui ont été bâtis en 1950 et avant, la situation en ces endroits a changé en 2005, depuis la première fois que l'évaluation a été faite. N'est-ce pas?
Le bgén Irwin : Oui, sénateur; c'est exactement cela. Nous procédons à des études sur les besoins en logement à chaque site pour déterminer exactement les besoins de notre population. Nous étudions le marché local pour voir si nous devons intervenir ou si le marché local peut combler la demande. Si ce n'est pas le cas, nous intervenons.
Nous avons commencé en 1995 avec environ 22 000 unités. Ces unités avaient été bâties dans les années 50, à l'époque où les effectifs militaires étaient beaucoup plus nombreux qu'aujourd'hui. Nous avons déterminé que, à l'échelle du pays, nos besoins actuels — et cela va changer au fil du temps — sont au total d'environ 12 500 unités.
Le sénateur Banks : Dans d'autres aspects des Forces canadiennes, lorsque nous avons procédé à des compressions dans un secteur, que ce soit dans la capacité de formation, les installations, l'infrastructure ou le complément, nous nous sommes rendu compte, lorsque les circonstances ont changé, qu'on n'aurait pas dû opérer ces compressions. Nous nous sommes piégés nous-mêmes, et nous essayons maintenant d'en sortir. Nous avons fait cela avec le personnel, la formation, le matériel et l'infrastructure. Est-ce que la même formule ou les mêmes conditions s'appliquent au logement?
Le bgén Irwin : J'imagine que oui.
Le sénateur Banks : Je vais aller droit au but : si vous atteignez les 12 000 unités dont vous dites avoir besoin, est-ce qu'on ne va pas se réveiller un jour pour se rendre compte qu'il nous en faut 22 000, et allons-nous nous demander pourquoi diable nous nous sommes défaits de ces unités?
Le bgén Irwin : Il se peut que cela arrive. Nous effectuons ces études sur nos besoins en matière de logement sur une base continue. Pour ce qui est des 5 000 nouvelles unités annoncées, l'Armée de terre, la Marine et la Force aérienne travaillent de concert pour déterminer exactement où et combien de gens vont nous arriver, et nous étudions les marchés ainsi que notre population pour nous assurer d'avoir le chiffre exact. Le logement change tout le temps. Le cycle de vie d'une maison est normalement de 25 ans. Nous investissons pour au moins 25 ans.
Le sénateur Banks : Le cycle de vie d'une maison est de 25 ans?
Le bgén Irwin : Quand on fait l'entretien du cycle de vie d'une maison après 25 ans, on peut s'attendre à ce qu'il faille rénover considérablement la maison, dans la mesure où on veut évidemment la garder encore quelque temps.
Le sénateur Banks : Qui décide qui va profiter d'une maison de l'ALFC? Qui décide celui qui en aura une et celui qui n'en aura pas?
Le bgén Irwin : Une série de mesures fait en sorte que tout le personnel a accès aux maisons de l'ALFC. Le commandant de la base peut également intervenir lorsqu'il juge qu'un des soldats a vraiment besoin d'un logement familial. De façon générale, c'est nous qui déterminons les besoins en fonction de la disponibilité des logements, de la taille de la famille et des besoins du membre des forces armées.
Le sénateur Banks : De façon pratique, sur le terrain, c'est le commandant de la base qui pourrait prendre la décision, n'est-ce pas?
Le bgén Irwin : Il interviendra pour s'assurer que sa base reçoit les services en logement qui lui sont nécessaires, et c'est nous qui répartirons les logements en fonction des résultats de notre discussion et en nous entendant avec lui.
Le sénateur Banks : Les 12 000 unités que vous prévoyez devraient servir à combler les besoins des 65 000 membres des Forces canadiennes? Vous savez sans doute que nous avons déjà dit à plus d'une reprise qu'à notre avis, il en faudrait beaucoup plus. Qui se voit refuser l'accès à l'un de ces logements? Je sais que vous accordez également des logements familiaux, mais dois-je comprendre de ces chiffres que 50 000 des membres des Forces canadiennes ne sont pas mariés ou ne vivent avec personne d'autre?
Le bgén Irwin : Environ 80 p. 100 du personnel militaire vit à l'extérieur de la base, c'est-à-dire trouve un logement sur le marché local. Notre politique nous oblige à fournir des logements familiaux seulement là où il est impossible d'en trouver sur le marché local. D'après nos chiffres, notre intervention a permis de loger dans des logements d'État environ 20 p. 100 des membres des Forces canadiennes.
Le sénateur Banks : Cela représente-t-il la moyenne au Canada?
Le bgén Irwin : En effet.
Le sénateur Banks : Et qu'arrive-t-il à l'argent qu'ils versent en loyer?
Le bgén Irwin : Cet argent est versé à l'Agence qui le réinvestit dans les maisons.
Le sénateur Banks : L'argent reste entre les mains de l'Agence qui peut alors continuer à l'utiliser, n'est-ce pas?
Le bgén Irwin : C'est exact.
Le sénateur Banks : Il n'est pas versé au Trésor?
Le bgén Irwin : Pas du tout.
Le sénateur Banks : Commandant, vous prévoyez avoir besoin d'environ 12 000 unités. D'après ce que j'ai compris de la réponse du brigadier général, ce nombre ne correspond qu'à 20 p. 100 des besoins de demain des forces armées, n'est-ce pas?
Le capitaine de frégate K.B. Lait, Direction de la qualité de vie, DQV 3 — chef de l'équipe des politiques en matière de logement, Défense nationale : Ce chiffre ne dépend aucunement de la taille des forces armées, sénateur; il dépend plutôt des besoins et des particularités de chaque base. Lorsque l'Agence de logement a mené une étude sur les besoins en matière de logement en 1999 et a regardé la situation dans les marchés locaux, elle a déterminé que les marchés ne pourraient répondre qu'aux besoins d'une partie de nos forces, soit environ 12 500 membres. Mais ce chiffre remonte à 1999, et nous menons en permanence un examen dans chaque base. À l'heure qu'il est, nous sommes à la veille de lancer une étude qui se penchera sur les besoins en logement des célibataires des forces armées. L'Agence de logement a déjà répondu aux besoins de certains des célibataires en les logeant dans les logements familiaux.
Le sénateur Banks : Le pourcentage de militaires qui auraient besoin d'un logement fourni par l'Agence ne cesse d'évoluer en fonction de la capacité des marchés à leur fournir des logements, n'est-ce pas?
Le bgén Irwin : Tout à fait, sénateur. La dynamique des marchés locaux constitue un élément essentiel dans la détermination des besoins en matière de logement pour nos militaires, et inclut les taux d'intérêt et d'occupation. Nous essayons de faire en sorte que chaque famille de militaires ait accès à un logement convenable.
Les familles de militaires déménagent plus souvent que la moyenne canadienne.
Le sénateur Banks : Elles déménagent toujours plus souvent que les familles canadiennes ordinaires.
Le bgén Irwin : En effet, parlez-en à ma femme, sénateur. Nous ne cessons de déménager. Or, quand on ne reste au même endroit que quelques années, il est difficile pour quelqu'un de se constituer un avoir dans sa maison. Par conséquent, il est difficile de décider pour lui d'investir ou non dans le marché immobilier. Nous essayons de faire en sorte, pour notre part, que le marché puisse fournir à nos membres des logements locatifs convenables. S'il est impossible d'en trouver sur le marché, nous les fournissons.
Le sénateur Banks : Mais les marchés évoluent au fil des mois, et il se peut que dans un an ou deux, les marchés aient complètement changé et puissent offrir dans le privé des logements qui correspondent aux besoins. Tenez-vous compte de l'évolution des marchés? À quelle fréquence réévaluez-vous les besoins?
Le colonel J.G.C.Y. Rochette, directeur général, Rémunération et avantages sociaux, Défense nationale : Nous faisons faire chaque année un sondage par une entreprise privée.
Le sénateur Banks : Vous êtes donc toujours au courant de la situation.
Dans le cadre des discussions que nous avons partout au Canada avec les officiers et les autres militaires de rang, ils nous expliquent souvent que dès qu'ils obtiennent une augmentation salariale, leur loyer augmente. Ce sont des militaires de tout rang et de tous les services, de partout au pays, qui se sont plaints à nous.
Le président : Ils ajoutent aussi que les prix augmentent en même temps dans les économats CANEX.
Le sénateur Banks : On a l'impression qu'il y a une relation de cause à effet. Est-ce vrai?
Le col Rochette : Absolument pas, sénateur. En fait, nous considérons le salaire comme faisant partie de l'ensemble des indemnités. Nous comparons les membres des Forces canadiennes aux fonctionnaires, et nous formons des groupes de comparaison. Nous examinons la situation avec le Secrétariat du Conseil du Trésor et nous regardons ce qui se fait du côté des négociations dans la fonction publique. Vous savez sans doute que les sous-officiers et les officiers du service général viennent tout juste d'obtenir une belle augmentation de salaire.
Le sénateur Banks : D'accord, mais leurs loyers ont monté.
Le col Rochette : Cela n'avait rien à voir avec les loyers, sénateur. Nous avons regardé du côté des négociations des syndicats dans la fonction publique. Nous avons formé un modèle dans lequel nous avons inscrit tous les chiffres, et ce modèle est pondéré en fonction du nombre de nos militaires et du genre d'emploi qu'ils occupent, et nous effectuons une comparaison avec les groupes semblables dans la fonction publique. Cela nous permet d'établir un pourcentage en vertu duquel nous déterminons le salaire de base de nos membres. Nous y ajoutons ensuite une composante pour les facteurs militaires, facteurs qui incluent les difficultés causées par les nombreux déménagements des militaires, entre autres choses.
Le sénateur Banks : Le général nous a expliqué que, peu importe le loyer d'un logement familial, ce loyer ne doit jamais dépasser 25 p. 100 du revenu. Mais si les militaires reçoivent une augmentation de salaire, le loyer représentant 25 p. 100 augmentera-t-il aussi?
Le col Rochette : Il augmentera, en effet.
Le sénateur Banks : Autrement dit, chaque fois que j'aurai une augmentation, mon loyer grimpera?
Le col Rochette : C'est à cause des limites que nous imposent nos règlements. L'augmentation de loyer ne résulte pas directement de l'augmentation de salaire des militaires, mais vient du fait que la rémunération globale a augmenté et, partant, la limite de 25 p. 100 aussi.
Le sénateur Banks : Qui décide du loyer? Tous les locataires, les vôtres comme les autres, se plaignent du loyer, et ils se plaignent encore plus lorsqu'il augmente en même temps qu'ils découvrent que le robinet fuit. Est-ce vous qui décidez, général, quand les loyers augmentent à Halifax?
Le bgén Irwin : Cela nous est dicté par une politique du Conseil du Trésor sur le logement. On nous demande de revoir les loyers tous les ans. Par conséquent, chaque année, la Société canadienne d'hypothèques et de logement regarde l'âge et la condition de nos logements et les compare à des unités semblables de la région, mais à l'extérieur de la base. La SCHL fixe donc un loyer qui dépend de son évaluation. Or, au cours des dernières années, les loyers n'ont cessé d'augmenter.
Le sénateur Banks : Un technicien d'aéronef basé dans une ville dont le marché est en ébullition et où le prix des immeubles augmente verra son loyer augmenter, tandis que le technicien d'aéronef basé dans une ville où les prix du loyer sont stables ne subira pas une augmentation de son loyer. Mais ni l'un ni l'autre n'a choisi où il serait stationné. C'est quelqu'un d'autre qui les a envoyés dans un endroit donné. Pourtant, si ces techniciens d'aéronef appartiennent à la même catégorie, ils reçoivent le même salaire. Est-ce acceptable, à votre avis?
Le bgén Irwin : Voilà pourquoi nous offrons des indemnités, et je demanderais au colonel Rochette de vous répondre.
Le sénateur Banks : Vous parlez des indemnités versées si vous habitez une région où la vie est chère. Dans quelles régions du Canada considérez-vous que la vie coûte plus cher, ce qui vous oblige à augmenter les indemnités?
Le président : Pourrions-nous commencer par le programme?
Le col Rochette : Ce programme est celui de l'Indemnité de vie chère, qui a été créé dans la foulée d'un examen effectué en 1998 par le Comité de la défense nationale et des anciens combattants. Ce comité avait recommandé à l'époque que l'on verse une allocation ou une indemnité qui aiderait les membres des Forces canadiennes à stabiliser leurs dépenses dues au coût de la vie. Je visite souvent les troupes, et on me parle souvent de cette indemnité. Les militaires ont l'impression que chaque fois que le prix des logements ou de l'essence augmente, leur indemnité augmentera elle aussi, ce qui n'est certes pas le cas. Cette indemnité vise principalement à stabiliser le coût de la vie de façon que s'ils sont envoyés dans une région où la vie est plus chère, même si le coût de la vie augmentera pour eux, ils n'en subiront pas complètement les contrecoups grâce à l'indemnité.
Voulez-vous que je vous explique comment nous avons élaboré la politique?
Le sénateur Banks : Nous voulons surtout savoir comment elle fonctionne. Si je suis déplacé de Chilliwack à Calgary, qu'arrive-t-il?
Le col Rochette : Nous avons demandé à une entreprise privée d'étudier 114 lieux où vivent des membres des Forces canadiennes. Pour faire l'étude, on prend une famille type, composée d'un caporal dont le conjoint travaille à temps partiel et d'un enfant, pour des gains familiaux d'environ 61 000 dollars. L'entreprise qui fait l'étude tient compte de trois grands facteurs : le marché du logement, les taxes et le coût des biens. La formule est ensuite pondérée en fonction de la population des différentes régions et la compagnie établit alors le coût de la vie dans chacun de ces lieux ainsi que le coût de la vie moyen au Canada. Si le coût de la vie dans une région est plus élevé que le coût de la vie national, on verse alors une indemnité pour combler la différence.
Le sénateur Banks : Quand j'ai siégé au Comité des finances nationales, nous avons eu le plaisir de demander au ministre des Finances d'alors, M. Martin, comment fonctionnait la péréquation. Il a répondu à la blague — ou peut- être pas — que la seule personne à avoir jamais compris la péréquation était déjà morte depuis vingt ans. Votre programme est-il lui aussi un programme de péréquation?
Le col Rochette : Oui.
Le sénateur Banks : J'ai une autre question qui portera maintenant sur les impôts et taxes, et je reviendrai à mon exemple des deux techniciens d'aéronef, qui vivent tous deux cette fois-ci à Camp Mirage. L'un d'entre eux a été affecté là-bas en provenance de l'Alberta, tandis que l'autre l'a été en provenance du Québec. Ces deux techniciens effectuent le même travail et gagnent le même salaire. Celui qui a été envoyé là-bas depuis l'Alberta paie l'impôt provincial albertain, tandis que son copain d'à côté, qui gagne le même salaire que lui, paie l'impôt sur le revenu du Québec. Cela vous semble-t-il équitable?
Le président : On sait bien que dans ce pays-là, il n'y a pas de taxes.
Le col Rochette : Oui, sénateur, sauf que grâce au nouvel allégement fiscal, nous pouvons aider nos membres, et ils ne paient pas de taxes.
Le sénateur Banks : Voulez-vous nous expliquer ce qu'est ce nouvel allégement fiscal, car je n'en ai pas entendu parler.
Le col Rochette : Je vous parle ici de l'allégement fiscal annoncé dans le budget de 2004 et prévoyant que les membres des Forces armées qui sont envoyés dans des opérations de niveau de risque trois ou quatre profiteront d'office d'un allégement fiscal.
Le sénateur Banks : Mais je ne parle pas ici de ceux qui mettent leur vie en danger.
Le président : Cela n'inclut pas le Camp Mirage, puisque cet endroit n'est pas considéré comme un niveau de risque trois et quatre.
Le col Rochette : C'est ce que j'expliquais : cette indemnité est versée à ceux qui prennent part à des opérations de niveau de risque trois et quatre. Dans le cas des niveaux de risque deux, nous devons faire une demande au Cabinet.
Le sénateur Banks : Cela a-t-il été fait?
Le col Rochette : Nous sommes en train de préparer actuellement la présentation.
Le sénateur Banks : Existe-t-il des affectations à l'étranger qui ne correspondraient à aucun de ces niveaux de risque?
L col Rochette : Oui, certaines de nos opérations sont considérées comme étant de niveau un.
Le sénateur Banks : Votre politique n'aidera en rien celui qui se trouve affecté à des opérations de niveau un et qui se trouverait dans la situation que j'ai décrite.
Le col Rochette : En effet, ou même quelqu'un qui serait en poste à Washington ou à Colorado Springs.
Le sénateur Banks : Pouvons-nous corriger cette erreur? Il nous semble que c'est injuste.
Le col Rochette : Avant mon arrivée, mon prédécesseur et une équipe s'étaient penchés sur la situation pour étudier le problème d'un point de vue fiscal, puisque c'est un problème de fiscalité.
Le sénateur Banks : En effet. Mais j'essaie de vous faire comprendre qu'aucune de ces personnes ne choisit d'être envoyée à tel ou tel endroit. On les y envoie, même si on leur offre parfois un semblant de choix. Une fois que les militaires sont envoyés à l'étranger, ils subissent la disparité dans le coût de la vie. Nous vous demandons d'agir. Êtes- vous en train de faire quelque chose en ce sens?
Le col Rochette : Non, sénateur. Comme je vous l'ai expliqué, cela n'est pas inscrit à notre calendrier. Du côté de la rémunération, nous avons plusieurs facteurs à considérer. J'ai expliqué qu'il y a quatre ans, une équipe s'était penchée sur la question, mais on nous avait répondu à l'époque qu'il n'y avait rien à faire.
Le sénateur Banks : Qui vous a dit qu'il n'y avait rien à faire?
Le col Rochette : Il faudrait que je vérifie.
Le sénateur Banks : Vous serait-il possible de remettre la question à l'ordre du jour?
Le col Rochette : Oui.
Le sénateur Banks : Vous allez la réinscrire à votre calendrier?
Le col Rochette : Oui, sénateur. Nous pouvons le faire.
Le sénateur Banks : Notre comité s'est rendu le mois dernier à Washington, DC, et a rencontré Joel Hefley, président du Sous-comité de la disponibilité opérationnelle du House Armed Services Committee. M. Hefley, de la Chambre des représentants, nous a expliqué certaines des initiatives prises aux États-Unis en matière de logement chez les militaires, initiatives que nous avons trouvé fort intéressantes. Parmi elles, nous avons noté le logement privatisé, solution que vous avez commencé à explorer. On nous a parlé de la construction privatisée de logements destinés au personnel militaire et à leur famille qui correspondraient à des normes commerciales dans le privé. On songe là-bas à lier les indemnités de logement au rang et au besoin, plutôt que seulement au rang, et à permettre au personnel le moins ancien de se constituer une certaine valeur nette immobilière en le ramenant à son port d'attache chaque fois qu'il est retiré du service au cours de sa carrière. Cela permettrait donc de se constituer un certain avoir à quelque part.
Avez-vous envisagé ce type de solution? Toute comparaison est boiteuse, et nous ne sommes pas dans la même situation qu'aux États-Unis, mais cette solution nous semblait assez intéressante.
Le bgén Irwin : Nous avons acquis en mars 2004 le statut d'organisme de service spécial, ce qui nous permet d'envisager des partenariats publics-privés et ce type d'arrangement. Nous sommes actuellement en pourparlers avec le Conseil du Trésor pour tenter de déterminer les niveaux d'autorisation nécessaires pour proposer ce type de solution. Nous sommes en train d'étudier les différents modèles possibles au cours de cet exercice-ci.
Nous pouvons tirer de grandes leçons de ce qui se fait aux États-Unis, au Royaume-Uni et en Australie. Nous avons déjà beaucoup appris de ces pays.
Puisque vous avez mentionné les ports d'attache, sachez que dans l'une de nos armées, la Marine, on a pour principe d'affecter les marins soit sur la côte Ouest soit sur la côte Est, ce qui leur permet de passer une grande partie de leur carrière au même endroit. Ils peuvent ainsi se constituer un certain avoir propre et entrer plus tôt sur le marché.
Il nous faut envisager toutes ces options, et il nous faut également instaurer des modèles qui nous permettent de contrer la grande capacité qu'a le secteur privé de trouver rapidement du logement à notre clientèle. Il nous faut des modèles qui nous permettent à nous aussi de réagir rapidement.
Mais je m'empresse d'ajouter que les soldats américains ne paient pas de loyer, car le logement fait partie de l'ensemble de leurs indemnités. Chez nous, ce sera un peu différent.
Le sénateur Banks : Quand nous parlions d'accès, vous avez dit quelque chose qui nous fait toujours frémir. Vous avez parlé de « pourparlers en cours ». Combien de temps faudra-t-il pour que ces discussions auxquelles vous prenez part se concrétisent?
Le bgén Irwin : Je ne peux répondre spécifiquement à cette question, sénateur. Je peux dire qu'en mars 2004 nous avons reçu le mandat d'un organisme de service spécial, le plein mandat d'un organisme de service spécial. Nous avons commencé à examiner ces partenariats entre le secteur public et le secteur privé, ce qui était compris dans la discussion avec le Conseil du Trésor lorsque cela a été approuvé.
Le sénateur Banks : Nous ne comprenons pas tout à fait pourquoi il faut un an et demi pour mettre le processus en marche. Non pas un an et demi, plutôt un an et trois mois.
Le bgén Irwin : Nous avons entamé le processus. Au cours des 12 derniers mois, nous avons eu des entretiens avec le Conseil du Trésor. Nous sommes en train de mettre en place des modèles à l'heure actuelle qui nous permettront de conclure ces partenariats entre le secteur public et le secteur privé. Nous espérons que dans un avenir rapproché nous serons en mesure de mettre certains de ces partenariats à l'essai.
Le président : Ai-je bien compris votre témoignage lorsque vous avez dit que si l'économie est en pleine ébullition dans un endroit en particulier, les membres du personnel qui y sont affectés verront leur loyer augmenter d'une part, mais d'autre part recevront une indemnité compensatoire, ce qui fait qu'au bout du compte cela revient exactement au même?
Le bgén Irwin : Il est clair que le loyer est lié à l'économie locale. Si l'économie va bien et que les loyers augmentent, cela se reflétera un an plus tard dans les loyers que le personnel militaire est tenu de payer. L'indemnité de vie chère en région est conçue pour tenir compte de ces différences économiques. C'est l'indemnité qu'a décrite le colonel Rochette. Si l'économie locale est au-dessus de la moyenne nationale, alors l'IVCR, l'indemnité de vie chère en région, changera également.
Le président : Est-ce que l'on tient compte de la situation de l'individu ou de la famille dans son ensemble?
Le bgén Irwin : Pardon?
Le président : Est-ce que l'on tient compte de la situation de l'individu ou de la famille dans son ensemble? Le montant de l'indemnité de vie chère en région correspond-il exactement à l'augmentation de loyer?
Le col Rochette : Non, sénateur, ce ne serait pas le cas.
Le président : Que se produit-il alors? Est-ce que le personnel militaire se retrouve tout à coup avec un manque à gagner?
Le col Rochette : Oui.
Le président : Pourquoi?
Le col Rochette : C'est ainsi que la formule fonctionne.
Le président : Nous n'aimons pas la formule. Pouvez-vous nous dire pourquoi on a une telle formule qui est injuste à l'égard de ces gens?
Le col Rochette : En fait, bon nombre de membres, hommes et femmes dans les forces armées, nous ont dit qu'ils n'aimaient pas cette formule. Nous avions prévu un examen cinq ans après la mise en place de cette nouvelle indemnité, et j'ai demandé aux membres de mon personnel de commencer à rencontrer le personnel militaire à l'automne.
Le président : Quelle est la logique lorsqu'on lie le loyer à l'économie locale? Les gens qui sont affectés dans une région n'ont aucune influence sur l'économie locale. La reprise de l'économie est peut-être plutôt attribuable à une découverte pétrolière ou à la décision de construire une usine de GM dans la région. Ce n'est pas l'activité des membres des Forces canadiennes qui a causé cette reprise économique locale. Par ailleurs, ils ne profitent pas de la reprise économique proportionnellement. Les gens qui vivent dans cette collectivité reçoivent sans doute des augmentations car leurs emplois sont davantage en demande ou parce qu'ils participent à l'économie. Les membres des Forces canadiennes ne profitent pas de cette façon, alors pourquoi lier les loyers à l'économie locale?
Le col Rochette : Parlez-vous du loyer minimum requis?
Le président : Je parle de la politique selon laquelle ils doivent payer le taux du marché, et qui me semble injuste.
Le sénateur Atkins : C'est la propriété du gouvernement.
Le président : Très bien.
Le bgén Irwin : Le problème fondamentalement, c'est que partout au pays environ seulement 20 p. 100 de nos membres vivent dans des logements pour personnes mariées. Environ 80 p. 100 vivent selon l'économie et pourtant la structure de rémunération et d'avantages est la même pour tous. La politique stipule que l'on ne peut subventionner les logements militaires et ainsi offrir un avantage à certains membres.
Le président : Pourtant, vous savez que cette politique cause des problèmes. Je comprends ce que la politique dit, mais on pourrait peut-être faire valoir que ce n'est pas là une bonne politique. À votre avis, est-ce une bonne politique, brigadier général Irwin?
Le bgén Irwin : La politique est la politique. Mon travail est de la mettre en œuvre. La logique est que, à mesure que les loyers changent, l'indemnité de vie chère en région change. Si la situation est telle que le loyer est très élevé, nous limitons le loyer à 25 p. 100 du revenu familial
Le président : Je comprends cela. Ce que je dis, c'est que si quelqu'un travaille dans le secteur privé et n'aime pas le coût de la vie à un endroit, il va ailleurs. N'iriez-vous pas ailleurs si vous n'aimiez pas le coût de la vie?
Le bgén Irwin : Nous n'offrons pas cette possibilité à nos membres, monsieur.
Le président : C'est exact. Cela semble être fondamentalement injuste de dire que les loyers seront ajustés au coût de la vie dans la collectivité locale alors que les salaires ne le sont pas. C'est la politique, mais la politique semble être erronée. Il est vrai que vous n'avez pas rédigé la politique, mais quelqu'un doit faire valoir des arguments pour proposer un changement dans la politique. Quelqu'un a-t-il fait valoir des arguments pour démontrer que cette politique est fondamentalement injuste?
Le bgén Irwin : Je ne pense pas qu'elle soit fondamentalement injuste.
Le président : Vous croyez qu'il est juste que les salaires soient établis à l'échelle nationale, que certaines personnes qui vivent dans une région du pays aient les moyens de payer leur loyer tandis que dans d'autres régions, il y en ait qui n'en ont pas les moyens.
Le bgén Irwin : L'idée, c'est que l'IVCR et le loyer vont généralement de pair. D'autres facteurs à part le logement contribuent au coût de la vie dans une région.
Le président : J'ai demandé précédemment si l'indemnité correspondait à l'augmentation. Le colonel Rochette m'a répondu que ce n'était pas le cas.
Le bgén Irwin : C'est parce que l'IVCR tient compte de plusieurs facteurs, notamment du loyer qui est demandé à la fois dans l'économie locale et sur la base. Toute augmentation de loyer est prise en compte. Il y a également d'autres facteurs qui sont pris en compte. On pourrait peut-être les décrire car ils sont pris en compte lorsque nous examinons le coût total de la vie, et non seulement le coût du loyer.
Le président : En général, est-ce qu'on tient compte de la situation des gens dans son ensemble? J'ai vu trois personnes faire signe que non, ou est-ce que vous vouliez dire qu'on tenait compte de leur situation dans l'ensemble?
Le col Rochette : Non, sénateur.
Le président : C'est ce que je voulais savoir. Il devrait y avoir moyen de tenir compte de leur situation dans l'ensemble. Si vous trois de l'Agence de logement ne le faites pas, quelqu'un d'autre dans les Forces canadiennes devrait proposer de trouver le moyen de faire en sorte que la situation soit équitable pour les membres des Forces canadiennes. Est-ce déraisonnable?
Le bgén Irwin : Je ne suis pas certain. Vous avez parlé de tenir compte de la situation des gens dans son ensemble. Lorsque le loyer augmente de 12 $, il n'y a pas une augmentation automatique de 12 $ de l'ICVR. L'ICVR tiendra compte de cette augmentation de loyer mais prendra également en compte d'autres facteurs.
Lorsque nous disons qu'il faut tenir compte de la situation du membre dans son ensemble, l'ICVR n'est pas directement liée au loyer. Elle est plutôt liée au coût de la vie en général. Est-ce que l'on tient compte de la situation des gens dans son ensemble pour ce qui est du coût de la vie, non pas seulement pour ce qui est du loyer? C'est ce que l'on tente de faire avec cette politique d'indemnité.
Le président : Je l'avais compris. Cependant, lorsque j'ai posé la question au colonel Rochette, il m'a dit que ce n'était pas le cas. Ai-je bien compris?
Le col Rochette : Comme je l'ai mentionné, s'il y a une augmentation de loyer de 12 $, l'ICVR ne va pas augmenter.
Le président : Par conséquent, on ne tient pas compte de la situation de la personne dans son ensemble.
Le col Rochette : Oui, puisqu'on tient compte des autres facteurs.
Le président : Combien de fois avez-vous déménagé au cours de votre carrière, brigadier-général Irwin?
Le bgén Irwin : Je devrais m'arrêter pour faire le calcul, mais je dirais sans doute 10 à 15 fois.
Le président : Disons 12 déménagements, en moyenne?
Le bgén Irwin : Oui.
Le président : Commandant, combien de fois avez-vous déménagé?
Le captf Lait : J'ai déménagé environ huit fois.
Le président : Colonel Rochette, combien de fois avez-vous déménagé?
Le col Rochette : J'ai déménagé neuf fois.
Le président : Cela représente 29 déménagements pour vous trois au cours de votre carrière. À l'occasion d'un déménagement, vous-même ainsi que votre partenaire ou votre épouse avez-vous constaté que vous vous en étiez bien tirés financièrement pour ce qui est des coûts de réinstallation, en ce qui concerne par exemple l'achat de nouveaux rideaux et de nouveau mobilier dont vous auriez besoin dans votre nouvelle maison?
Le bgén Irwin : Quelqu'un veut-il répondre à cette question?
Le président : Les officiers supérieurs ou les hauts gradés peuvent y répondre en premier.
Le bgén Irwin : J'aurais dû amener ma femme pour répondre à cette question.
Le président : Nous lui parlerons de cette question la semaine prochaine.
Le bgén Irwin : En ce qui concerne tous ces déménagements, je ne crois pas avoir été défavorisé financièrement à cause d'un déménagement.
Le président : L'indemnité et les paiements que vous avez reçus ont servi non seulement à payer le déménagement mais vos menues dépenses et le fait que les rideaux qui allaient dans une maison ne faisaient pas dans la maison suivante, etc.? Il existe un système en place pour couvrir ces coûts.
Le bgén Irwin : Oui, on peut réclamer certains coûts qui se rattachent au déménagement. Il y a aussi le versement d'un montant pour le déménagement, une portion de votre salaire, qui vous permet de payer le reste des dépenses.
Le président : Nous vérifierons auprès de votre épouse.
Le bgén Irwin : Elle dira probablement la même chose, mais ce n'est pas certain. Je n'ai pas l'impression d'avoir été défavorisé sur le plan financier par l'un des déménagements.
Le captf Lait : J'ai eu trois affectations à l'étranger, et deux d'entre elles étaient à partir d'Ottawa. Je ne sais pas si cela compte comme quatre déménagements ou deux déménagements, bien que j'aie considéré qu'il s'agissait de deux déménagements.
Nous avons eu la chance de conserver une maison à Ottawa. La politique militaire vise à encourager les membres à aller sur le marché privé parce que le choix est meilleur. Le secteur privé est mieux en mesure de répondre aux besoins particuliers des membres. Comme Mme Ellis l'a dit, il faut entretenir la voiture. Les maisons sont comme la première voiture Ford, en ce sens que vous pouvez obtenir celle que vous voulez à condition qu'elle soit noire. Je ne crois pas que nos épouses seraient d'accord avec cela parce qu'elles ont toutes des exigences différentes.
J'ai eu recours au marché privé assez tôt, mais je n'en ai retiré aucun avantage. Il m'a fallu à peu près autant de temps que n'importe qui d'autre pour rembourser mon hypothèque. Il y a eu des interruptions qui ne m'ont pas permis de rentrer dans mes frais.
Le service nous offre des expériences qu'on ne peut pas chiffrer en dollars. Les séjours que ma famille a faits à l'étranger lui ont offert de formidables possibilités.
Je sais que certaines personnes ont éprouvé des difficultés lorsqu'elles ont déménagé parce qu'elles sont passées d'un marché où les prix étaient faibles à un marché où les prix étaient élevés et qu'elles ont eu de la difficulté à acheter une maison. Pour répondre à des besoins particuliers, nous avons des logements disponibles lorsque des logements publics ne sont pas disponibles sur le marché local.
Je crois que sur le plan de la politique, nous avons établi un bon équilibre. Nous tâchons de nous assurer que les gens ne dépendent pas de l'armée pendant toute leur vie. Nous ne voulons pas que les gens déménagent à la fin de leur carrière dans ce qui équivaudrait à leur première maison et aient à payer une hypothèque au cours des 25 années suivantes. Nous tâchons de les encourager à recourir au marché privé tôt dans leur carrière. Leur rémunération et les avantages que nous leur versons visent à les aider en ce sens.
Le président : Colonel Rochette, êtes-vous rentré dans vos frais lors de vos déménagements ou avez-vous dû payer de votre poche?
Le col Rochette : De grâce, sénateur, ne téléphonez pas à ma femme.
Il est toujours difficile, surtout lorsque l'on déménage d'une province à une autre, de s'adapter au taux de taxation et de s'adapter à une nouvelle région. Cependant, nous avons certains avantages. Pour assurer le déménagement de nos membres, nous avons ce que nous appelons le Programme de réinstallation intégré. Il couvre toutes les dépenses lorsque nous déplaçons nos membres d'un endroit à un autre. S'ils sont propriétaires d'une maison et qu'ils doivent la vendre, nous rembourserons les frais d'agent immobilier et les frais d'avocat. Nous payons l'ensemble des coûts du déménagement de toute la famille. Lorsqu'ils arrivent au nouvel endroit, tous les avantages que nous offrons permettront de les indemniser pour la réinstallation dans ce nouveau lieu. Si un membre déménage avec sa famille, il reçoit une semaine de paye, plus une subvention au déménagement, qui sert à payer les rideaux et d'autres articles.
Est-ce que cela couvre toutes les dépenses? Parfois nous avons la chance que notre nouvelle maison ait des fenêtres de la même taille, mais parfois cela coûte un peu plus cher. Cependant, grâce aux avantages que nous recevons, nous n'avons pas habituellement à payer de notre poche.
Le président : Est-ce que vos conjointes travaillent?
Le col Rochette : Ma femme a travaillé cinq ou six ans pendant que j'étais à Ottawa. Auparavant, j'étais à Goose Bay au Labrador où elle a travaillé à temps partiel. Il est toujours difficile pour un conjoint de trouver de l'emploi.
Le président : Votre épouse travaille-t-elle, capitaine Lait?
Le captf Lait : Elle ne travaille plus. Elle a travaillé à Ottawa, à Halifax et à Victoria.
Le président : A-t-elle réussi à trouver un travail à chaque endroit?
Le captf Lait : C'est difficile parce qu'il faut recommencer au niveau de base. Elle est infirmière. La situation était assez bonne à Halifax, mais lorsque nous avons été affectés à Ottawa, elle est redevenue une infirmière plus ou moins régulière. C'est difficile pour les familles. Cela ne fait aucun doute.
Le bgén Irwin : Mon épouse a travaillé dans plusieurs des endroits où j'ai été affecté et dans d'autres, elle n'a pas pu le faire. Pour l'instant elle ne travaille pas.
Le président : A-t-elle mal réagi au fait qu'elle ne pouvait poursuivre sa carrière?
Le bgén Irwin : Il ne fait aucun doute qu'elle aurait aimé poursuivre sa carrière, mais dans certains endroits, cela lui a été impossible.
[Français]
Le sénateur Nolin : J'aimerais revenir sur une partie de votre témoignage, colonel. Vous venez de dire que vous avez reçu plusieurs plaintes des membres des Forces canadiennes concernant l'allocation supplémentaire. Je n'utilise peut- être pas l'expression juste. Quel est le terme exact pour parler de cette allocation d'ajustement?
Col. Rochette : C'est un ajustement de vie chère.
Le sénateur Nolin : Vous avez reçu des plaintes. Donnez-nous les raisons mentionnées par ces plaignants. Quelles sont les principales raisons qui ont été portées à votre attention?
Col. Rochette : En fait, comme je l'ai mentionné, certaines personnes croient que s'il y a une augmentation dans leur coût de la vie, que ce soit pour l'essence, le marché, l'épicerie ou le logement, cela devrait être une augmentation égale. Parfois, lorsque les gens voient une augmentation dans leurs taxes ou leur loyer, ils peuvent avoir la même allocation de vie chère, mais quelques fois, ils peuvent avoir une augmentation ou, même avec une augmentation, ils peuvent voir une diminution de leur allocation.
La raison en est que, étant donné qu'on regarde la moyenne nationale, basée sur l'indice du coût à la consommation, cela crée un problème. L'indice national des coûts à la consommation peut se trouver à un certain niveau, mais dans une localité en particulier, l'augmentation accordée pour l'ajustement de l'allocation de vie chère est basée sur la moyenne nationale. Elle peut être plus élevée, étant donné que nos bases sont situées en milieux isolés. Donc souvent, on n'a pas la même augmentation.
Le sénateur Nolin : La plainte principale est que l'augmentation ne suit pas l'augmentation du coût de la vie à l'endroit où ils demeurent?
Col. Rochette : C'est souvent lorsque les gens vont recevoir une augmentation une année et l'année suivante, une diminution. C'est la plainte principale.
Le sénateur Nolin : Vous avez mentionné que vous procédiez à un réexamen de cette politique. Je voudrais connaître — pas le résultat final, on le connaîtra en temps et lieux —vos prémisses de réflexion pour promouvoir des modifications à cette politique.
Col. Rochette : J'ai demandé à un de mes directeurs, qui est responsable de cette politique, de débuter une révision au mois de septembre. On devait la faire pour l'année financière 2006-2007, mais nous l'avons devancée d'un an. Nous allons commencer en septembre prochain. Le premier exercice que j'aimerais faire est de communiquer et discuter avec nos collègues qui travaillent dans l'armée, la marine et la force aérienne, afin d'être capable d'obtenir des informations de leur part.
On pourrait faire la même chose que ce que l'on a fait avec le régime de retraite pour la force de réserve, soit d'aller visiter des troupes au Canada, discuter avec eux et obtenir leurs commentaires pour voir à quoi ils s'attendent et tenter de déterminer quels sont les problèmes pour essayer de les résoudre. La méthode que nous avons présentement est juste et équitable.
Le sénateur Nolin : Elle est juste et équitable en ce sens que la méthode actuelle est basée sur une moyenne. Elle est peut-être injuste pour tous, mais elle semble équitable.
Ce n'est pas parce que vous avez atteint une moyenne que ce sera juste. Ce sera le reflet moyen de tout ce qui se passe. C'est peut-être le défaut principal de la méthode actuelle.
Col. Rochette : C'est possible.
Le sénateur Nolin : Mathématiquement, elle semble équitable.
Col. Rochette : Mathématiquement, c'est une méthode qui est appliquée à tout le monde de la même façon.
Le sénateur Nolin : Et qui peut ne pas satisfaire personne.
Col. Rochette : Cela se peut fort bien.
Le sénateur Nolin : Est-ce que c'est une des options que vous allez envisager?
Col. Rochette : Oui, bien sûr.
Le sénateur Nolin : Parce que c'est très simple faire une moyenne.
Col. Rochette : Sauf que la méthode utilisée pour faire la moyenne n'est pas simple du tout.
Le sénateur Nolin : C'est pourquoi mon collègue a fait allusion au système assez complexe de péréquation. Quelles sont les avenues examinées?
Col. Rochette : Pour l'instant, je ne me suis pas arrêté à faire des recherches pour voir quel genre de méthodes on pourrait utiliser. Mais j'aimerais, en premier lieu, trouver une méthode simple à comprendre pour les gens.
Le sénateur Nolin : Qu'est-ce qui se fait dans d'autres pays similaires?
Col. Rochette : C'est une chose que je veux vérifier avec les Australiens, les Américains ainsi que les Britanniques. Mais surtout avec les Australiens, puisqu'ils ont une force tangiblement de la même grosseur que la nôtre. Il faut voir ce qu'ils ont.
Le sénateur Nolin : Ce n'est pas tellement la grosseur du contingent qui est importante, mais plus la nature du pays. On a entendu des histoires d'horreur à ce sujet. Par exemple, à Esquimalt, le niveau est beaucoup plus élevé qu'à Cold Lake; dans un cas, le militaire reçoit une allocation alors que dans l'autre, le commandant est obligé d'organiser une caisse de secours pour s'assurer que les militaires pourront chauffer leur baraquement. Il y a quelque chose qui ne fonctionne pas dans notre système. Il ne faut pas comparer deux pays parce qu'ils ont à peu près la même grosseur de contingent.
Col. Rochette : Lorsque je mentionnais les Australiens, c'était justement à cause de la grosseur des forces et...
Le sénateur Nolin : De l'économie diversifiée?
Col. Rochette : Une économie diversifiée. Leurs bases sont dispersées dans le pays; certains endroits sont isolés tandis que d'autres sont en milieu urbain. C'est un des exemples, mais on peut regarder plusieurs autres pays.
J'ai demandé à examiner l'allocation des gens qui demeureront à l'extérieur du Canada. Cette allocation s'appelle « PLA », en anglais, pour « post living allowance ». Cette méthode a été élaborée par Statistique Canada.
Le sénateur Nolin : Est-ce une méthode similaire à celle utilisée pour les employés du ministère des Affaires étrangères, entre autres?
Col. Rochette : Oui, c'est le même genre.
Le sénateur Nolin : On est familier avec cela. Je parle surtout des dysfonctionnements du système à l'intérieur du Canada.
Col. Rochette : Cela pourrait être une des méthodes que l'on pourrait utiliser à l'intérieur.
Nous avons parlé avec Statistique Canada qui nous a mentionné qu'ils pourraient nous accorder l'index de vie chère pour le Canada. C'est une option à évaluer.
Le sénateur Nolin : Je viens de faire référence à ce dysfonctionnement entre Esquimalt et Cold Lake. C'est un des cas qui me semble particulier. À Esquimalt, les gens reçoivent une allocation de vie chère tandis que les gens de Cold Lake n'en reçoivent pas.
En plus, le commandant doit mettre en place une caisse commune pour subventionner le chauffage de certains militaires qui ne peuvent pas payer leurs factures de chauffage. Connaissez-vous ce dossier?
Col. Rochette : J'en ai entendu parler dernièrement.
Le sénateur Nolin : C'est inacceptable. Il y a un problème.
Col. Rochette : On va revérifier. On doit parler avec le commandant de la base pour voir quelle est la situation exacte et pourquoi certaines personnes ne peuvent pas subvenir à leurs besoins.
Le sénateur Nolin : Allez-vous faire enquête pour savoir s'il n'y a pas, ailleurs au Canada, des situations déplorables comme celle-là?
Col. Rochette : Une fois par année, les commandants de base et les commandants d'escadre se réunissent à Ottawa — surtout les nouveaux commandants — pour assister à des sessions de breffage de différents organismes. C'est toujours très enrichissant d'aller y faire des présentations. J'y suis allé l'an passé.
Le sénateur Nolin : Vous vous déplacez.
Col. Rochette : Ils sont tous ici et je les rencontre. Je fais des présentations sur différents bénéfices en rémunération et avantages sociaux. L'an passé, l'allocation de vie chère était un des points chauds de discussions. On a eu des discussions très intéressantes, surtout sur l'utilisation de la méthode et son fonctionnement. Souvent, lorsque les gens comprennent le fonctionnement, je ne dis pas qu'ils sont heureux mais au moins ils comprennent la méthodologie et comment elle est appliquée.
Le sénateur Nolin : Je présume que vous allez vous assurer qu'il n'y ait pas d'autres cas comme celui de Cold Lake, et s'il y en a, vous allez appliquer une solution.
Col. Rochette : Vous pouvez être assuré que lorsqu'on rencontre de tels cas, le commandant de l'escadre ou de la base nous contacte assez rapidement pour expliquer leur situation. Nous attendons de recevoir un rapport du commandant pour savoir ce qu'il en est.
Le sénateur Nolin : On compte sur vous. Je vous remercie.
[Traduction]
Le sénateur Banks : Cette intervention fait suite à la question posée par le sénateur Nolin. En ce qui concerne ce point en particulier, vous nous avez dit que ces personnes sont venues à Ottawa et une fois que vous leur avez expliqué la situation, elles ont mieux compris de quoi il s'agissait.
Si vous alliez à Cold Lake, elles pourraient vous expliquer certaines choses et vous pourriez mieux les comprendre. Nous croyons savoir que le commandant de Cold Lake a engagé des consultants pour l'aider à faire valoir le fait que les personnes sous son commandement là-bas devraient avoir droit à ce type d'aide. Il le fait à même son budget de base.
Ne serait-il pas préférable, colonel, que vous alliez à Cold Lake ou que vous y envoyiez quelqu'un pour y expliquer comment les choses fonctionnent à Ottawa? N'aurait-il pas été utile que vous sachiez comment les choses fonctionnaient à Cold Lake? C'est une question oiseuse parce que je suis sûr que vous êtes allé là-bas mais, dans ce cas en particulier, ne s'agit-il pas de la première chose à faire, c'est-à-dire envoyer quelqu'un par avion à Cold Lake pour déterminer de quoi il s'agit?
Le col Rochette : J'aurais aimé que le commandant de l'escadre m'appelle d'abord et me pose des questions avant qu'il ne vous en parle. Pour commencer, nous aurions pu fournir toutes les données préparées par l'entreprise privée qui s'en occupe dans l'ensemble du Canada.
Le président : Il ne nous en a pas parlé. Nous lui en avons parlé.
Le col Rochette : Je voulais dire engager un consultant pour faire l'examen. Je crois comprendre que vous dites qu'ils ont engagé un consultant pour examiner les chiffres.
Le sénateur Banks : D'après ce que je crois comprendre, c'est qu'il considère avoir besoin d'aide pour mieux faire valoir son cas. Il considère que son personnel a besoin d'aide parce qu'il vit dans une région où les œufs coûtent cher. La solution est-elle de lui demander de venir ici ou consiste-t-elle à envoyer quelqu'un à l'épicerie à Cold Lake?
Le col Rochette : Je ne manquerai pas de téléphoner au commandant d'escadre, monsieur.
Le président : Simplement pour mettre les choses au point, il n'a pas fait de démarche auprès de nous pour présenter ses arguments. Nous lui avons arraché les mots de la bouche.
Le col Rochette : Non, monsieur, mais je tiens simplement à préciser que je ne parlais pas de votre comité. Je crois comprendre que le commandant d'escadre avait consulté certaines entreprises pour qu'elles examinent le coût de la vie dans la région.
Le président : Il l'a fait, mais cela ne faisait pas partie de l'exposé qu'il nous a présenté. Nos questions l'ont pris au dépourvu.
Le sénateur Nolin : Ce sont les membres qui en ont pris l'initiative.
Le président : C'est ce que nous tenons à préciser. Il ne s'est pas plaint auprès de nous. Nous lui avons posé une question, il a répondu honnêtement, un point c'est tout.
Le sénateur Banks : Nous avons insisté.
Le président : Nous avons insisté lourdement.
Le sénateur Atkins : Simplement pour être sûr de bien comprendre, pourquoi la SCHL a-t-elle cédé le logement familial ou le logement à l'Agence de logement des Forces canadiennes?
Le bgén Irwin : Le logement familial n'a jamais appartenu à la Société canadienne d'hypothèques et de logement. Le logement familial a été construit par la Défense nationale, et administré par l'Armée, la Marine et la Force aérienne, et dirigé par chaque commandant de base. Ils ont eu de la difficulté à concilier les opérations de la base et le financement des logements familiaux. L'état général des logements familiaux se dégradait, et on estimait que la solution consistait à mettre sur pied une agence spéciale chargée de s'assurer que l'argent provenant des loyers était réinvesti directement dans les logements.
Le sénateur Atkins : C'était ma prochaine question. L'argent provenant des loyers est réinvesti dans l'entretien.
Le bgén Irwin : Oui, effectivement. Nous sommes fiers de la quantité d'argent qui est réinvesti dans le logement.
Le sénateur Atkins : Tous les services sont-ils inclus?
Le bgén Irwin : Non, sénateur. De nombreux services sont inclus, notamment ceux pour lesquels on paie des taxes. Cela dépend de la région mais habituellement un locataire paierait les commodités, c'est-à-dire les coûts de chauffage, l'eau et l'électricité.
Le sénateur Atkins : Il s'agit d'une autre variable. Vous dites qu'un cycle normal d'entretien est de 25 ans.
Le bgén Irwin : Oui, sénateur.
Le sénateur Atkins : Cela me fait rire, parce que j'ai travaillé comme assistant auprès d'un ingénieur à Oromocto en 1954 pour la SCHL lorsque nous avons construit des logements familiaux. Ces logements viennent de terminer un deuxième cycle. N'aurait-il pas été préférable dans bien des cas de les raser et de recommencer à neuf?
Le bgén Irwin : Dans bien des cas, c'est probablement vrai. La plupart de ces structures ont 50 ans. Dans certains cas, elles arrivent à la fin de leur cycle de vie, et il est temps de les raser et de construire de nouvelles maisons. Dans d'autres cas, les petites maisons sur certains marchés sont assez populaires auprès des jeunes, des petites familles parce que les loyers sont faibles. Il vaudrait la peine que nous investissions 30 000 à 40 000 $ dans ces maisons pour les conserver cinq ou dix ans et voir ce qui se passe sur le marché.
Un grand nombre de maisons sont assez grandes et assez bien construites. Nous pourrions les garder à long terme, et nous devrions investir 70 000 $ ou 80 000 $ dans ces bâtiments. La situation n'est pas la même partout. Il faut tenir compte des exigences particulières du marché et des maisons qui se trouvent sur chaque site.
Le sénateur Atkins : Avez-vous des plans pour la base des Forces canadiennes à Gagetown?
Le bgén Irwin : Oui. Nous allons rénover entièrement certaines maisons là-bas cet été et cet automne.
Le sénateur Atkins : Les 80 p. 100 de notre personnel militaire qui vivent à l'extérieur de la base dans des maisons privées ou des logements loués signent-ils un contrat de location? S'ils le font et que par la suite ils sont transférés, comment l'armée procède-t-elle dans ce cas?
Le col Rochette : Nous les indemnisons, monsieur. S'ils signent un contrat de location, on prévoira habituellement une pénalité d'un, deux ou trois mois. Si nous devons envoyer un membre en affectation avant la fin du contrat, nous assumerons le coût. Nous payons ce coût. Ils peuvent le réclamer.
Le sénateur Atkins : Cela s'applique-t-il aux sous-officiers ainsi qu'aux cadres?
Le col Rochette : Les officiers et les militaires du rang qui louent un logement seront remboursés.
Le sénateur Atkins : Que se passe-t-il s'ils ont acheté une maison? Avez-vous une façon de les aider à cet égard?
Le col Rochette : Nous les aidons aussi à cet égard, monsieur. Si une personne est propriétaire d'une maison, elle a deux possibilités. Par exemple, si un membre à Ottawa est affecté ailleurs pendant trois ans puis revient à Ottawa, il peut choisir l'indemnité de location qui est de 12 000 $. Cela nous évite d'avoir à payer les frais immobiliers et les frais d'avocat. La personne conserve sa maison et la loue elle-même. Elle n'a pas à vendre sa maison.
Les gens ont le choix de cet incitatif ou de vendre leur maison. Quand ils la vendent, nous remboursons les frais d'avocat et d'agence. S'ils achètent une maison en arrivant là où ils sont nommés, nous payons là aussi les frais d'agence et d'avocat. Nous payons aussi un voyage à la recherche d'un logement qui leur permet de faire cela à l'avance.
Le sénateur Atkins : Et quand un commandant est propriétaire d'une maison à Ottawa, est muté puis revient à Ottawa et que vous gardez cette propriété, louée probablement en son absence? Avez-vous beaucoup de cas semblables?
Le col Rochette : Je n'ai pas les chiffres, sénateur.
Le sénateur Atkins : Il me semble qu'à Oromocto, beaucoup de militaires ne vendent pas leur maison lorsqu'ils sont mutés.
Le col Rochette : Si un militaire veut vendre sa maison mais n'y arrive pas, nous avons un programme qui défraie certains coûts tels que l'électricité, l'entretien, etc. Nous envoyons quelqu'un surveiller la maison parce que l'assurance exige que quelqu'un passe pour veiller, par exemple, à ce qu'il n'y ait pas de dommages causés par l'eau au cours de l'hiver. Ils déblaient l'allée l'hiver et tondent la pelouse l'été. Nous payons cela pendant un an.
Le sénateur Atkins : Quel genre de logement offrez-vous au personnel militaire non marié sur la base? Cela varie-t-il d'une base à l'autre ou le logement est-il assez standard?
Le bgén Irwin : Le célibataire est traité à peu près de la même façon que tout autre militaire. L'ALFC offre un logement familial, que nous appelons maintenant logement d'habitation, parce que les familles d'une personne ont besoin de la même aide que les familles de plus d'une personne. Nous offrons nos logements d'habitation aux célibataires mais nous essayons de mettre les familles dans des logements dont la surface est appropriée. Il y a dans les bases des logements pour célibataires. Le capitaine Lait peut en parler.
Le captf Lait : Nous devons justement entamer une étude qui nous mènera à demander à chaque commandant de base à quoi sont utilisés les logements pour célibataires. Nous savons que certains sont utilisés pour l'habitation et que d'autres sont utilisés pour la formation et d'autres encore pour les gens de passage.
Nous avons une norme pour les logements d'habitation. Ils doivent avoir une certaine superficie pour une famille d'une personne. Ils doivent comporter une salle de bain privée, une chambre à coucher privée et un espace de séjour. Nous reconnaissons que les logements actuels dans les bases ne correspondent pas à cette norme très souvent, mais il y en a. Lorsque nous aurons reçu les rapports des commandants de base à l'automne, nous analyserons les données à mon bureau puis nous demanderons à chaque commandant d'armée d'élaborer une bonne politique pour nos célibataires.
Le sénateur Banks : Ces critères s'appliquent-ils quel que soit leur rang?
Le captf Lait : Oui.
Le sénateur Atkins : S'appliquent-ils quel que soit le sexe?
Le captf Lait : Oui.
Le sénateur Atkins : L'ALFC s'occupe-t-elle d'autres choses que du logement à une base? Par exemple, à Oromocto, vous occupez-vous du terrain de golf ou des arénas ou cela relève-t-il du commandant de la base et d'un autre budget?
Le bgén Irwin : Cela ne dépend pas de l'ALFC. Nous tentons de veiller à ce que les logements d'habitation soient construits dans des secteurs qui soient bien desservis par ces services mais ils sont tous assurés par d'autres à la base.
Le sénateur Atkins : Que faites-vous pour les écoles? Avez-vous des rapports avec les municipalités à ce sujet?
Le bgén Irwin : Non. L'ALFC ne s'occupe pas de cela. Cela relève de la responsabilité du commandant de la base.
Le président : Merci, messieurs, d'être venus aujourd'hui. Nous vous savons gré de l'aide que vous nous avez apportée. Cela nous a été extrêmement utile. Nous vous remercions de votre assistance.
Pour les téléspectateurs, si vous avez des questions ou commentaires, veuillez visiter notre site Web à www.sen- sec.ca. Nous y affichons les témoignages ainsi que le calendrier des audiences confirmées. Vous pouvez également prendre contact avec le greffier du comité en téléphonant au 1-800-267-7362 pour d'autres précisions ou pour prendre contact avec des membres du comité.
La séance est levée.