Délibérations du comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles
Fascicule 18 - Témoignages du 18 octobre 2005
OTTAWA, le mardi 18 octobre 2005
Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd'hui, à 17 h 13, pour étudier les nouvelles questions concernant son mandat en vue d'en faire rapport.
Le sénateur Tommy Banks (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Je vois que nous avons le quorum; nous allons donc commencer. Je déclare la séance ouverte. Mes excuses à nos invités.
Avant d'entrer dans le vif du sujet, j'aimerais vous rappeler qu'une réunion à huis clos suivra la séance en présence de nos témoins. Je voudrais que nous discutions d'une question de privilège qui a été soulevée aujourd'hui à la Chambre.
Avant de céder la parole à nos témoins, je souhaite vous informer que la vice-présidente du comité, nos attachés de recherche, la greffière et moi-même nous sommes rencontrés hier soir de manière informelle, à ma demande et en présence de deux de nos témoins, Mme Gélinas et M. Maxwell, afin de mieux nous préparer pour la séance d'aujourd'hui.
Une question de privilège a été soulevée aujourd'hui à la Chambre pour savoir si ce type de réunion est appropriée, voire même permise, et je souhaiterais connaître votre opinion là-dessus à l'occasion de la séance à huis clos qui suivra la discussion en présence de nos témoins.
Avant de poursuivre, je tiens à souhaiter la bienvenue à un nouveau membre permanent de notre comité — pour autant que l'on puisse parler de permanence. Je vous présente le sénateur Tardif. Monsieur, c'est un plaisir de vous accueillir parmi nous. Félicitations. Notre comité compte maintenant un autre sénateur de l'Alberta.
Pour en revenir à la question figurant à l'ordre du jour, nous recevons aujourd'hui, une fois de plus, Mme Gélinas, commissaire à l'environnement et au développement durable, de même que MM. Affleck, Arseneault et Maxwell, qui sont tous les trois directeurs principaux au Commissariat. Nous apprécions leur collaboration.
Je crois que vous serez d'accord, madame Gélinas, que le mieux serait que vous nous donniez un aperçu de votre dernier rapport, qui a récemment été déposé au Parlement. Après les questions des membres, nous pourrons discuter des façons de travailler de concert sur les sujets qui nous rallient tous.
Johanne Gélinas, commissaire à l'environnement et au développement durable, Bureau du vérificateur général du Canada : Bonsoir sénateurs. Je me permets de prendre 15 minutes pour vous présenter mon rapport. Je ferai une déclaration d'ouverture, et c'est avec grand plaisir que je répondrai ensuite à vos questions. Comme le sénateur Banks l'a mentionné, trois des directeurs principaux sont à mes côtés aujourd'hui.
[Français]
D'entrée de jeu, partout dans le monde, la nature nous fait clairement savoir que notre façon de faire ne peut plus durer, et le Canada ne fait pas exception à la règle.
Pour mettre fin au déclin de la nature, le Canada doit prendre les grands moyens afin de bâtir une société durable et, à ce titre, le gouvernement doit donner l'exemple. Serons-nous parmi les pays qui sauront prévenir la détérioration de l'environnement pour ainsi épargner de l'argent et créer des occasions d'affaires? La réponse pourrait être négative, à moins que le gouvernement fédéral n'améliore nettement son leadership et sa feuille de route.
Aider le gouvernement à réaliser cette amélioration notable, tel est mon but, tout comme le vôtre.
Nous soulignons cette année le dixième anniversaire de la création du poste de Commissaire à l'environnement et au développement durable. Je tiens à reconnaître l'excellente relation que nous avons nouée avec les parlementaires, notamment avec les membres du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles.
J'ai eu le grand plaisir de lire le rapport intitulé Développement durable : Il est temps de joindre le geste à la parole, que le comité a déposé en juin dernier. Les conclusions, exprimées en termes vigoureux, sont réconfortantes et tout à fait pertinentes. J'ai tellement apprécié ce rapport que je l'ai cité dans la première partie de mon rapport Point de vue de la commissaire 2005.
Le travail de mon bureau ne serait pas aussi efficace sans l'examen minutieux des ministères par les parlementaires qui leur demandent de rendre des comptes — un peu plus tard, au cours de la soirée, j'aimerais revenir sur cette question d'imputabilité et de reddition de comptes.
Mon plus récent rapport montre que même si le gouvernement part du bon pied, en prenant des engagements louables en faveur du développement durable, souvent il ne franchit pas la ligne d'arrivée. En fait, le thème récurrent de mon rapport, c'est l'incapacité chronique du gouvernement fédéral à soutenir ses initiatives jusqu'à la fin. Permettez- moi vous citer quelques exemples.
[Traduction]
Premier grand pays industrialisé à avoir ratifié en 1992 la Convention sur la diversité biologique, le Canada s'est engagé à conserver sa biodiversité et à voir à son développement durable. Voilà pourquoi les administrations fédérale, provinciales et territoriales ont adopté, en 1996, la Stratégie canadienne de la biodiversité. Mais depuis lors, les mesures prises par le gouvernement fédéral en faveur de la stratégie stagnent sur plusieurs fronts.
Le Canada n'a toujours pas établi le bilan général de l'état de notre biodiversité et de son évolution. Sans un tel bilan, comment pouvons-nous espérer la protéger?
C'est la troisième fois que nous nous penchons sur la mise en oeuvre de la stratégie par le gouvernement fédéral. Nous constatons que les problèmes recensés dans nos vérifications antérieures demeurent. La voix influente des parlementaires doit se faire entendre pour rompre cette tendance.
Afin de donner suite à notre vérification, Environnement Canada s'est engagé à établir des objectifs concrets, qu'il s'efforcera d'atteindre. Avec votre aide, nous pouvons voir à ce que le gouvernement se fixe des buts et nous assurer qu'il les atteint.
Tout comme la biodiversité, les océans constituent un actif essentiel du patrimoine naturel du Canada. Malheureusement, l'état de nos océans se détériore et la performance du gouvernement fédéral à les protéger fait défaut.
En adoptant la Loi sur les océans de 1996, le Canada est devenu le premier pays au monde à se doter d'une loi exhaustive en matière de gestion des océans. Mais près d'une décennie plus tard, le gouvernement n'a pas réussi à se servir des moyens que lui offre cette loi pour protéger nos océans et en assurer le développement durable.
Décidément, la mise en œuvre de la loi n'a pas été une priorité pour le gouvernement. Les moyens essentiels prévus pour la mise en œuvre de la loi, les zones de protection marine et des plans de gestion intégrée, n'ont pas permis d'atteindre les cibles.
Dans l'année qui vient, près de 55 activités doivent être menées à terme. Il faut de toute urgence exercer une surveillance pour nous assurer que le Plan d'action du Canada pour les océans, qui a été divulgué il y a quelques mois, réussisse mieux que les projets dont nous avons été témoins jusqu'ici.
[Français]
Laissez-moi vous parler d'un autre aspect de notre capital naturel, nos parcs nationaux et les efforts déployés pour les protéger. Les 41 parcs nationaux du Canada sont le reflet des paysages diversifiés et du patrimoine naturel de notre pays. Toutefois, leurs écosystèmes et leur biodiversité subissent des pressions.
Parcs Canada est l'agence chargée de maintenir et de rétablir l'écologie de nos parcs nationaux. Afin de réaliser son mandat, elle a reçu d'importants fonds nouveaux.
Selon notre vérification, Parcs Canada a pris la bonne direction, notamment en s'engageant à améliorer la façon dont elle surveille et rétablit l'intégrité écologique des parcs nationaux.
Avec ces fonds supplémentaires, Parcs Canada a la possibilité de vraiment améliorer la gestion des parcs. Mais les prochaines années seront cruciales.
[Traduction]
L'un des besoins essentiels de la vie quotidienne est l'accès à une eau potable salubre. Dans un pays comme le nôtre, nous supposons tous que l'eau que nous buvons est d'excellente qualité. Mais, en réalité, dans certaines sphères de compétence fédérale, les Canadiens ne sont pas tous certains de la salubrité de leur eau potable. Cette situation touche près de 500 000 Canadiens qui vivent dans les collectivités des Premières nations.
Le gouvernement sait depuis plusieurs années que la plupart des systèmes d'aqueduc dans les collectivités des Premières nations présentent des risques pour la santé, et ce, dans une proportion considérable. Entre 1995 et 2003, on a injecté près de deux milliards de dollars pour construire et exploiter des systèmes d'approvisionnement en eau potable et des systèmes d'égouts chez les Premières nations. Entre 2003 et 2008, 1,8 milliard de dollars supplémentaires ont été consacrés à ces projets. À moins de mesure radicale, il est peu probable que cet argent, y compris les 600 millions de dollars investis dans la Stratégie de gestion de l'eau des Premières nations, permette d'améliorer la salubrité de l'eau dans l'avenir.
Les principaux problèmes tiennent, entre autres, à l'absence de lois et de règlements sur l'approvisionnement en eau potable des collectivités des Premières nations, et à l'absence de soutien technique adéquat pour les activités d'exploitation et d'entretien.
[Français]
Les Comités parlementaires peuvent poser les questions difficiles, par exemple, celle-ci : comment le gouvernement collaborera-t-il avec les Premières nations afin d'examiner la protection réglementaire et le soutien technique nécessaire pour s'assurer que ces fonds soient bien dépensés?
Le gouvernement fédéral doit également s'assurer que l'eau potable est salubre dans les emplacements fédéraux, notamment dans les bases militaires, les parcs nationaux et les installations fédérales.
Les recommandations établies, ce qu'on appelle les lignes directrices, par le gouvernement fédéral, de concert avec les provinces et les territoires, précisent les normes obligatoires qui réglementent l'approvisionnement en eau potable dans ces emplacements. Les provinces s'appuient également sur ces recommandations de différentes façons, soit comme orientation générale ou comme norme ayant force de loi.
Bien qu'il y ait en place un processus rigoureux visant à élaborer des recommandations sur les teneurs limite en contaminants pouvant se trouver dans l'eau, ce processus est trop long. Alors que le processus devrait prendre de deux à trois ans pour établir des recommandations, il en prend souvent de quatre à huit. Il peut falloir dix ans pour éliminer un arriéré de recommandation sur les teneurs limite acceptables en contaminants. Les coupes budgétaires de 20 p. 100, qui, entre 2001 et 2005 ont touché le service de santé chargé d'élaborer ces recommandations n'ont rien fait pour améliorer la situation.
La responsabilité du gouvernement fédéral s'étend aussi aux trains de voyageurs, aux avions et aux navires de croisière voyageant d'une province à l'autre ou à l'étranger. Santé Canada inspecte la qualité de l'eau à bord des navires de croisière et des trains de passager mais non à bord des avions. Les voyageurs canadiens ne peuvent donc pas être certains de la salubrité de l'eau utilisée pour boire et pour préparer des aliments à bord des avions.
[Traduction]
Le développement durable est l'approche adoptée par le Canada pour protéger l'environnement tout en réalisant des progrès économiques et sociaux. Cette approche favorise l'utilisation responsable des ressources naturelles, humaines et économiques.
Après cinq ans au poste de commissaire à l'environnement et au développement durable, je constate que la performance du gouvernement fédéral au chapitre de l'adoption et de la mise en œuvre d'une approche de développement durable a été inégale. Tel est le cas pour l'approvisionnement écologique. Le gouvernement fédéral ne tire pas profit de cet important outil.
Le gouvernement fédéral est l'un des plus grands acheteurs au Canada. Il dépense environ 13 milliards de dollars par année en biens et en services de toutes sortes, tels que des fournitures de bureau, du matériel de laboratoire, des véhicules et des services d'entretien des immeubles. Depuis bon nombre d'années déjà, le gouvernement a reconnu que l'achat de produits écologiques permettait de réduire les répercussions néfastes de ses activités sur l'environnement, stimulait l'offre de biens et de services écologiques et favorisait l'innovation. Mais après plus d'une décennie de promesses, le gouvernement fédéral n'a toujours pas de politique en matière d'approvisionnement écologique. En fait, il rate chaque jour des occasions de faire des choix judicieux pour l'environnement.
Je sais que l'approvisionnement écologique est une question importante pour le comité puisqu'il a recommandé l'élaboration d'une politique d'approvisionnement vert dans son rapport intitulé : Développement durable : il est temps de joindre le geste à la parole.
Le gouvernement donne un élan à l'approvisionnement écologique en confiant de nouvelles responsabilités à Travaux publics et Services gouvernementaux Canada et en prenant des engagements dans le discours du Trône. La question se pose : le gouvernement laissera-t-il passer une autre décennie? Grâce à des bilans réguliers que le gouvernement soumettrait aux comités parlementaires, on s'assurerait d'un approvisionnement écologique et de l'écologisation de ses activités. Cela s'inscrirait dans le mode de fonctionnement des ministères.
[Français]
Hélas, le gouvernement fédéral a également failli à sa promesse de mettre en œuvre une stratégie de coordination des mesures de développement durable des ministères, promesse qui date de longtemps.
Avec une stratégie fédérale en matière de développement durable, le gouvernement se doterait d'un programme de protection de l'environnement et de développement durable assorti de priorités fondamentales. Autrement, les parlementaires et la population n'ont aucune idée de l'orientation ou des moyens que compte prendre le gouvernement pour y parvenir.
On a confié à un comité composé de sous-ministres la tâche d'élaborer une stratégie de développement durable. Cette stratégie influerait sur la prochaine série de stratégies de développement durable de chacun des ministères attendus à la fin de 2006.
L'élaboration de la stratégie fédérale se heurte à plusieurs obstacles, notamment la possibilité d'une certaine confusion ou d'un certain chevauchement dans le contexte d'autres initiatives fédérales, telles que le projet vert que le gouvernement prévoit poursuivre au-delà de la lutte contre les changements climatiques et le cadre pour la compétitivité et la durabilité de l'environnement.
Je vous encourage à vous assurer que le comité des sous-ministres garde le pas là où les comités antérieurs ont échoué. La présentation de rapports d'étape par le président de ce comité aux Comités parlementaires nous tiendrait tous au courant des progrès.
Je constate que certaines des recommandations qui figurent dans le chapitre sur les stratégies de développement durable de mon rapport vont dans le même sens que les conclusions du rapport du comité déposé en juin dernier.
[Traduction]
À cet égard, je pense que nous devrions travailler encore plus ensemble pour essayer de faire avancer le programme.
[Français]
J'ai le plaisir de vous annoncer que les Canadiens se prévalent encore cette année du processus de pétition en matière d'environnement que mon bureau coordonne. Ils veulent aussi obtenir des réponses à leurs questions sur des problèmes d'ordre écologique ou de développement durable. La vérification des réponses données par le gouvernement aux pétitions présentées par les Canadiens me donne l'occasion d'examiner des questions environnementales qui autrement n'auraient pas été portées à mon attention. Cette année, nous avons examiné trois réponses du gouvernement à des pétitions en matière d'environnement, d'abord les assurances des exploitants d'installation nucléaire, ensuite sur les lignes directrices régissant l'inscription sur la liste des espèces en péril et, enfin, sur les répercussions environnementales de l'élevage du porc.
[Traduction]
La question des exigences en matière d'assurance-responsabilité pour les exploitants d'installations nucléaires nécessite maintenant notre attention. La protection obligatoire minimale au Canada est moins étendue que dans 12 autres pays industrialisés et elle n'a pas été révisée depuis près de 30 ans.
En 2001, le comité a recommandé des mesures immédiates en vue de hausser la couverture d'assurance minimale obligatoire. Comme vous le savez, Ressources naturelles Canada n'a pas formulé de réponse officielle à cette recommandation. Par suite de la recommandation figurant dans mon rapport, le ministère a reconnu qu'il fallait agir; mais n'a établi aucune échéance pour ce faire.
Les vérifications décrites dans mon rapport de cette année, et en fait depuis le début de mon mandat comme commissaire, ont fait ressortir un problème chronique : l'incapacité du gouvernement fédéral à mener ces initiatives à terme, après qu'elles sont lancées. Comme je l'ai mentionné lors du dépôt de mon rapport, on annonce des projets audacieux qui sombrent dans l'oubli dès que les feux de la rampe s'éteignent. Dans la première partie de mon rapport, Point de vue de la commissaire-2005, je cerne plusieurs causes profondes qui expliquent cette triste réalité.
En premier lieu, le gouvernement fédéral fait souvent des promesses sans mettre en place la structure ou les ressources nécessaires pour produire des résultats. Que penser d'un engagement pris par le gouvernement s'il n'y a pas suffisamment de ressources financières et humaines pour le réaliser? La Stratégie sur les océans du Canada et l'approvisionnement écologique en sont des exemples.
En deuxième lieu, les hauts fonctionnaires ne sont pas tenus responsables. Pour qu'ils le soient, il faudrait qu'il y ait un lien entre leur évaluation de rendement et l'atteinte de résultats dans le domaine du développement durable. Lorsque le succès ou l'échec ne porte pas à conséquence et que les principaux acteurs sont mutés d'un poste important à l'autre, il n'y a pas de reddition de comptes. Je ne suis pas la seule à demander qu'il y ait reddition de comptes. Les parlementaires se sont penchés sur cette question et ils en sont venus à la même conclusion.
En troisième lieu, le travail en vase clos et l'esprit de clocher au sein du ministère nuisent à l'intégration du développement durable. Les zones de protection marine et le Cadre fédéral de gestion de l'eau douce sont particulièrement touchés.
Enfin, le gouvernement ne cesse de réinventer la roue en mutant le personnel clé et modifiant la conception des programmes sans égard aux résultats. La Stratégie canadienne de la biodiversité, avec ses progrès constamment ralentis, illustre ce problème de façon criante.
[Français]
En tant que commissaire, je peux seulement vous faire part de cette information. En tant que parlementaires, vous êtes les véritables gardiens de l'environnement. Ainsi s'établissent entre mon bureau et votre mission des rapports mutuellement bénéfiques.
Récemment, le gouvernement s'est lancé dans d'ambitieuses initiatives en matière d'environnement et de développement durable, et je comprends que le ministre de l'Environnement viendra vous en parler la semaine prochaine.
De notre côté, mentionnons, entre autres, le Projet vert, les mesures pour contrer les changements climatiques et l'approvisionnement écologique. Dans un dernier budget, le ministre des Finances a annoncé que des fonds importants seraient consacrés à des questions environnementales et de développement durable.
Il faut profiter de ce vent d'enthousiasme. Cependant, je reste troublée par le piètre bilan du gouvernement quand vient le temps de soutenir les initiatives.
Le gouvernement doit trouver le moyen de franchir la ligne d'arrivée. Les parlementaires ont un rôle à jouer à cet égard en demandant au gouvernement de rendre des comptes sur ses résultats en matière d'environnement et de développement durable.
[Traduction]
Le président : Merci.
Le sénateur Cochrane : Merci, madame la commissaire, d'être venue nous parler. Vous êtes bienvenue tout comme les fleurs du mois de mai, comme on aime bien dire chez nous. Je vous félicite et félicite votre équipe pour un rapport très convaincant. Vos résultats ne font que confirmer ma frustration quant à ce qui se passe.
En ce qui concerne la Loi sur les océans, vous nous dites que le ministère des Pêches et des Océans n'a pas fait rapport régulièrement de l'état de nos océans. Il y a seulement deux semaines dans mon bureau, des gens se plaignaient de l'état lamentable de nos océans et se demandaient ce qui pouvait être fait, et voilà que vous nous parlez de la Loi sur les océans.
Vous avez mentionné la Stratégie de la biodiversité et dit que le gouvernement n'a pas encore résolu le problème identifié lors des deux vérifications précédentes. Vous vous êtes aussi largement étalés sur l'eau potable, et cetera.
Madame la commissaire, où devons-nous commencer en tant que comité? Que devons-nous faire? Que pouvons- nous faire pour réaliser ces objectifs? Vous avez présenté des conditions terribles; comment être sûrs qu'elles seront mises en oeuvre? Que doit faire, à votre avis, le comité pour placer ces questions au premier plan et apporter les changements nécessaires.
Mme Gélinas : Après cinq ans à ce poste, ce qui n'est pas beaucoup, je peux penser à un scénario. C'est une idée que j'ai déjà exprimée : pour voir du changement, il faut presser le ministère d'agir. Faire une vérification et un rapport sur des résultats et des conclusions est une chose, seulement les ministères ont tant de priorités ou de questions à régler qu'ils peuvent passer de l'une à l'autre. Si nous arrivons à trouver un moyen qui les force à se concentrer sur des questions particulières et si les Canadiens et vous en tant que parlementaires pouvez assurer qu'ils se concentreront sur ces questions, il y aura des changements. Je l'ai moi-même constaté. Mes collègues peuvent vous en donner plusieurs exemples.
Dans ma déclaration préliminaire, j'ai dit que je vous communiquais ces renseignements et que c'est à vous de prendre le relais et d'en faire quelque chose. Vous pouvez demander des rapports périodiques et faire en sorte que ces questions, en fonction de leur importance, soient toujours présentes, le ministère sera donc obligé de les aborder et de progresser d'une manière ou d'une autre. Ils peuvent venir ici régulièrement et vous dire clairement ce qu'ils ont fait, ce qu'ils n'ont pas fait, vous dire pourquoi ils n'ont pu faire plus. Puis, la publication de ces renseignements permettra aux Canadiens d'être informés des progrès accomplis. Ils seront les derniers juges. Il vous reviendra d'annoncer aux Canadiens si nous avons pris la bonne voie et si nous avançons assez rapidement pour régler les problèmes.
En fait, sénateur Cochrane, je dis que nous avons besoin de votre aide, et eux aussi, pour s'assurer qu'ils restent sur la bonne voie et qu'ils fassent part des progrès réalisés. Plus souvent ils viendront ici pour répondre à vos questions et présenter des rapports d'étape périodiques, plus nous saurons ce qui se passe.
Permettez-moi d'ajouter quelque chose, nous faisons des suivis réguliers de nos vérifications et de nos recommandations, mais nous le faisons habituellement après deux ans. C'est trop tard, à bien des égards. Malheureusement, nous ne pouvons pas faire de suivi régulier sur tout, car nous devons faire d'autres vérifications. Par conséquent, nous avons besoin de votre aide entre-temps pour faire un certain suivi aussi. Quand vous posez des questions, vous faites pratiquement un suivi pour nous, nous pouvons voir les progrès qui ont été faits, en faire rapport et disposer de renseignements précis sur ces progrès.
Le sénateur Cochrane : Cela semble excellent. Vous dites que votre suivi est fait après deux ans et que c'est donc assez tard. En deux ans il peut avoir un changement de parti, de ministre et du personnel chargé de ces tâches.
Le sénateur Milne : C'est le problème.
Le sénateur Cochrane : Vous avez raison, peut-être devrions-nous les presser d'agir et obtenir des renseignements et des résultats le plus tôt possible. Merci beaucoup. Je suis sûr qu'il y aura d'autres questions. Je ne veux pas monopoliser tout le temps.
Le président : Il y aura une deuxième série de questions, j'en suis sûr. J'espère que les membres du comité accepteront d'oublier le règlement strict et de procéder dans l'ordre de levée de mains des sénateurs; le sénateur Grafstein est le prochain. Le comité est-il d'accord? Malgré qu'il soit un invité?
Le sénateur Grafstein : Je ne suis pas membre du comité. Je laisse les membres du comité décider et s'il y a d'autres sénateurs, je parlerai après eux.
Le président : Je pense que tout le monde est d'accord pour que vous parliez maintenant. N'est-ce pas?
Le sénateur Grafstein : D'habitude, je laisse les membres siégeant décider.
Monsieur le président, je vous remercie de m'avoir parlé de cette audience. Comme le savent les membres du comité et je crois la commissaire, c'est un sujet qui m'intéresse.
Il y a quelques années, j'ai présenté un projet de loi pour modifier la Loi sur les aliments et drogues et ajouter l'eau potable aux responsabilités de l'organisme des aliments et drogues. Le projet de loi a eu deux lectures et est passé par ce comité, lequel a recommandé à l'unanimité son adoption, puis il a été bloqué au Sénat par le gouvernement et des députés ministériels en raison d'un argument sur la constitutionalité et aussi de la question d'interférence ou d'intrusion dans un champ de compétence provinciale.
Je sais que vous connaissez ce projet de loi. Je l'ai présenté de nouveau et j'en parlerai à la deuxième lecture plus tard cette semaine ou au début de la semaine prochaine. Les renseignements que vous avez donnés me seront utiles en raison de la difficulté à obtenir des statistiques et des informations touchant un domaine qui est, à mon avis, une grande crise de la santé publique au Canada — c'est-à-dire l'eau de mauvaise qualité.
Ma première question est, étant donné que Walkerton est l'étude marquante du juge O'Connor que pensez-vous de l'amélioration ou du manque d'amélioration de l'approvisionnement en eau potable dans tout le pays? Pouvez-vous diviser votre réponse en deux parties : la première, les régions où les provinces sont impliquées et la deuxième, les régions où le gouvernement fédéral a une responsabilité directe, c'est-à-dire les collectivités autochtones.
Mme Gélinas : Je ne peux répondre qu'à la première partie de votre question, car nous n'avons pas étudié la situation au niveau provincial. Comme vous le savez, l'eau potable entre dans un champ de compétence partagé, nous avons donc surtout examiné la responsabilité du gouvernement fédéral.
Nous avons consacré deux chapitres à cette question. Le premier traite de la responsabilité du gouvernement fédéral dans les réserves des Premières nations. Le second examine trois sujets — mon collègue peut vous en dire un peu plus — y compris les directives, car le gouvernement, par l'intermédiaire de Santé Canada, joue un rôle scientifique en donnant des directives.
Le sénateur Grafstein : Ces directives sont facultatives.
Mme Gélinas : Tout à fait, elles le sont. Elles doivent être utilisées telles quelles et ajoutées ou non aux règlements provinciaux, comme je l'ai dit tout à l'heure. C'est le premier aspect que nous avons étudié.
Nous avons aussi examiné la protection des employés du gouvernement fédéral, car les directives font partie du Code du travail qui prévoit l'approvisionnement en eau potable pour les employés fédéraux. Troisièmement, nous nous sommes penchés sur les transports en commun et nous avons dit que les inspections ne sont plus faites par Santé Canada.
Pour revenir à votre question sur les Premières nations, nous avons essentiellement dit que nous ne pouvions pas dire jusqu'à quel point l'eau était salubre dans les réserves des Premières nations. Toutefois, nous avons obtenu des renseignements lors de la vérification faite par Santé Canada qui faisaient référence à une étude de 2001 indiquant que trois quarts des systèmes ne fournissaient pas de l'eau potable salubre. C'est un problème.
Nous avons aussi constaté que l'on ne suit pas les procédures qui devraient être suivies par les Premières nations ou par Santé Canada pour s'assurer que l'eau est testée, que les résultats indiquent que l'eau est salubre et, dans le cas contraire, il faut prendre des mesures.
C'est au moyen d'ententes de financement que Santé Canada et le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien élaborent les conditions auxquelles devraient se conformer les Premières nations pour livrer de l'eau potable. La vérification a prouvé aussi qu'il n'y a pas de suivi de la mise en œuvre ou du respect des conditions, et on ne sait pas trop qui en est responsable. Par conséquent, un grand nombre des éléments du suivi passent à travers les mailles du filet. Le résultat est que les collectivités des Premières nations ne peuvent pas être assurées que leur eau est salubre.
Le sénateur Grafstein : Monsieur le président, offrez-moi quelques instants. Le gouvernement fédéral aux États-Unis a adopté le « clean drinking water act » en 1972 ou 1974 pour assurer une surveillance, une réglementation et des normes coercitives du gouvernement fédéral relatives à l'eau potable salubre; contrairement à notre gouvernement qui donne des directives. Des directives qui, comme vous en avez témoigné, accusent du retard et elles ne sont même pas à jour.
L'un des aspects positifs du projet de loi — ça rejoint ce qu'il faut faire de tous ces problèmes, où aller et comment guider le public — visait un service en ligne qui aiderait les gens à déterminer si l'eau de leur collectivité est salubre et savoir quelle est la dernière fois où elle a été testée.
Est-ce que cette réforme sera utile?
Mme Gélinas : Je ne crois pas être en mesure de dire si elle le sera ou non. Nous avons souligné certains des problèmes majeurs qu'il faut régler. Les bonnes nouvelles dans tout cela, c'est que les ministères et les ministres ont souscrit publiquement à ces recommandations et ont déclaré qu'ils y travailleront.
Richard Arseneault, directeur principal, Bureau du vérificateur général du Canada : J'aimerais ajouter quelque chose aux propos de la commissaire. Vous avez posé une bonne question : que s'est-il passé depuis Walkerton? Il s'est passé des choses au niveau provincial — nous le savons parce que nous lisons les journaux.
Au niveau fédéral, des comités interministériels au niveau supérieur, soit les comités au niveau des SMA, ont décidé de créer ce qui est appelé le cadre fédéral des eaux. Il existe encore une politique que le gouvernement fédéral a mise en œuvre en 1987, la politique fédérale relative aux eaux, qui est vraiment stagnante et qui ne va nulle part. Elle est là pour informer les lecteurs de ce qui se passe sans être mise en œuvre. Il y a 10 ans que le gouvernement n'a pas fait rapport de cette politique.
Aujourd'hui, le gouvernement a élaboré une nouvelle politique, le cadre fédéral des eaux. Elle contient une vision; de l'eau propre, salubre et sûre pour les citoyens et les écosystèmes du Canada. Elle a été introduite en 2004. Elle a été approuvée par le comité composé de sous-ministres, mais voilà elle ne mène nulle part. Le gouvernement dépense de l'argent, gaspille du temps et des efforts pour faire une politique qui est une bonne première étape dans le cadre de la politique du gouvernement fédéral sur les questions relatives à l'eau, mais à l'image de l'ancienne politique, cette politique est aujourd'hui stagnante.
Nous avons fait des recommandations à Environnement Canada. Nous avons dit « Votre cadre de gestion de l'eau pour le gouvernement fédéral semble une bonne première étape. Il y a cinq résultats escomptés. Que faites-vous de ces résultats? » Ils n'ont pas répondu à cela. Ils ont répondu dans le vague.
Maintenant, ils disent qu'ils mettent au point un nouveau cadre, un cadre plus important, à Environnement Canada qui doit orienter le gouvernement fédéral. Il s'agit d'un cadre économique et environnemental. Ils disent que le cadre de gestion de l'eau pour le gouvernement fédéral dépendra de ce cadre plus important, alors le moins que l'on puisse dire, c'est que cela prête à confusion.
Le sénateur Grafstein : Je vais compléter cela. J'aimerais revenir à un autre sujet. Bien que je comprenne que vous êtes limité en tant que haut fonctionnaire du Parlement par juridiction fédérale, commissaire, je remarque qu'il y a deux compétences fédérales qui se chevauchent ici. L'une est la réglementation de l'eau en tant que telle. Comme vous l'avez dit, le gouvernement fédéral est responsable de l'eau dans les avions et les autobus. Le gouvernement fédéral règlemente l'eau embouteillée, alors il réglemente l'eau potable.
D'autre part, les dépenses de santé liées à la consommation d'eau non potable ne sont pas cumulatives. Nous ne savons pas ce qu'il en coûte à notre système de santé publique pour les cas de consommation d'eau non potable. Nous avons de l'information isolée. Est-ce vous qui, dans le cadre de vos responsabilités, devez tenir compte de cela et communiquer avec Santé Canada, avec les organismes du gouvernement fédéral responsables de la santé publique, afin de demander pourquoi? Si ce n'est pas le cas, est-ce qu'ils ont de l'information cumulative sur les problèmes de santé individuel qui résultent de la consommation d'eau non potable?
Nous avons entendu le témoignage des communautés autochtones de Wawa il y a quelques années nous disant que si les femmes à Grassy Narrows, en Ontario, voulaient avoir un bébé, elles devaient quitter la réserve pendant trois années pour se décontaminer si elles ne voulaient pas donner naissance à un enfant malformé. C'était un scandale et le gouvernement avait des responsabilités directes, mais la chose se reproduit encore aujourd'hui.
M. Schindler et moi-même avons travaillé sur un modèle pour essayer de déterminer les coûts pour le système de santé publique. Selon nos calculs, nous avons déterminé que les contribuables payaient quelque deux milliards de dollars par année en résultat de la consommation d'eau non potable, et ces données sont estimées à la baisse.
Avez-vous l'intention d'obtenir ces chiffres afin d'alerter le gouvernement et les organismes de santé publique sur ce qui est pour moi une crise de santé publique?
Mme Gélinas : Nous n'avons pas abordé cette question en particulier. Il est certain que nous pouvons poser la question dans le cadre d'une autre vérification. La manière la plus rapide de le faire, pour vous, sénateur, ou pour n'importe quel Canadien, c'est d'avoir recours au processus de requête. C'est une manière simple par laquelle n'importe quel Canadien peut demander à un député, en passant par moi, de chercher à savoir ce que le ministère a fait.
Le sénateur Grafstein : Je viens justement de poser la question.
Mme Gélinas : Vous devez la rédiger sur papier, signer et m'envoyer le document, c'est aussi simple que cela. Dans un délai de 120 jours, le ministre doit répondre à vos questions.
Nous savons que l'information sur l'eau potable pour les Premières nations n'était pas disponible lors de la vérification. Santé Canada ne fait pas d'inspection à bord des avions, alors l'information n'était pas accessible. Il pourrait y avoir quelques bribes d'information, mais rien qui pourrait nous donner une vue d'ensemble.
M. Arseneault : Il y a des règlements pour les avions. Santé Canada a des règlements sur l'approvisionnement en eau potable pour les voyageurs. Un des règlements stipule que les avions doivent fournir de l'eau potable et que Santé Canada est chargé d'inspecter cela. Santé Canada ne le fait pas.
Le président : Je sais que la question du sénateur Grafstein est compliquée. C'est compliqué lorsqu'on essaie d'extrapoler les dépenses de santé liées à la consommation d'eau non potable au Canada et la réponse ne pourrait probablement pas être formulée dans un délai de 120 jours. Est-ce qu'on vous répond parfois à l'intérieur du délai de 120 jours ce qui suit : « Nous travaillons à formuler la réponse et nous vous la ferons parvenir plus tard »?
Mme Gélinas : Nous repoussons exceptionnellement le délai pour répondre à la requête. Dans la plupart des cas, nous obtenons des réponses détaillées des ministères, ils respectent les délais. Vous pouvez poser plus d'une question dans votre requête; il est possible d'avoir une liste de questions. Mon rôle est de m'assurer que vous obteniez des réponses. Je ne participe pas à la formulation de la réponse, mais je m'assure que toutes vos questions obtiennent des réponses.
Le président : C'est comme une loi pour l'accès à l'information, mais plus efficace.
Le sénateur Grafstein : J'imagine à quel point le consommateur doit être frustré.
Le sénateur Christensen : Je me sens cynique et déprimée depuis que je suis revenue de la pause. La plupart d'entre vous ont entendu parler des lectures Massey, une histoire condensée de la civilisation qui a été diffusée sur SRC. Cela dure environ cinq heures. J'ai été à Watson Lake. Cela m'a pris cinq heures pour me rendre là-bas, et cinq heures pour y revenir; j'ai écouté les lectures Massey deux fois. Je regarde ce que nous faisons. Notre histoire est jalonnée de civilisations qui ont échoué, de civilisations très sophistiquées qui se sont éteintes. Ce qui les a amenées à s'éteindre, c'était des questions environnementales. Elles ont appauvri leurs sols pour essayer de produire plus. Ces civilisations étaient des civilisations saines qui se développaient rapidement, alors elles ont utilisé davantage de fertilisants et ont appauvri leurs sols. Elles ont appauvri leurs forêts en utilisant des matériaux pour la construction et la combustion, et cela a soudainement causé des pénuries d'eau. Elles n'avaient pas de nourriture, pas d'abris, ces civilisations se sont éteintes.
Nous sommes assis ici et nous voyons ce qui se passe, mais nous abordons les choses à la pièce. Nous parlons de l'eau, mais c'est un problème global. Nous pouvons résoudre le problème de l'eau, mais cela ne résoudra pas les autres problèmes qui ont un effet direct sur l'environnement.
Il faut un engagement à long terme, ce que les gouvernements ont de la difficulté à prendre, car les gouvernements fonctionnent selon les périodes électorales. Ils ont un mandat de quatre ou cinq ans, et puis c'est tout. Il n'y a pas d'engagement à long terme.
Je crois que le Sénat est la réponse à ces problèmes, car nous sommes ici sur le long terme. Le Sénat devrait peut-être être responsable de l'environnement, car il peut prendre des décisions pour le long terme. Dans votre position, comment pensez-vous qu'il soit possible de prendre des engagements à long terme d'une manière générale afin de traiter de ces questions? Les problèmes sont évidents. Les solutions sont évidentes, aussi, mais comment obtenir des engagements? À titre de gouvernement et de leader, nous avons la responsabilité de résoudre ces problèmes. Comment obtenir ces engagements?
Mme Gélinas : Tout d'abord, peu importe la complexité de la question, cela ne doit pas nous arrêter; nous devons commencer quelque part. M. Arsenault a parlé du cadre de gestion de l'eau, puis avant cela, il s'agissait de la politique sur l'eau. Nous avons dit, il y a quelques années, que le gouvernement n'avait rien fait pour appliquer la politique sur l'eau, et nous ne serions probablement pas ici si nous avions fait quelque chose pour mettre en œuvre la politique en 1987, et ce n'est pas si loin. J'espère que nous ferons des progrès, mais nous devons commencer quelque part.
Il y a des exemples d'action cette année, mais il n'y a pas de coordination. Nous réinventons la roue, et c'est une des causes du problème. Commençons le travail et allons de l'avant.
L'autre lacune, et on en fait mention dans le rapport de cette année, c'est que nous ne recueillons pas de données de base qui permettraient de comprendre la biodiversité et l'état de nos océans, et ce n'est pas seulement moi qui le dis. Les ministères ont convenu qu'ils n'ont pas les données de base sur l'état de nos océans. Ils n'ont pas les données de base nécessaires pour comprendre la biodiversité et pour décider les priorités et pour s'attaquer à certains des problèmes qui touchent la biodiversité. Mais comme je l'ai dit, il faut commencer quelque part.
De plus, il ne faudrait pas prendre les choses pour acquises. Nous sommes un pays riche. Nous croyons que la biodiversité n'est pas à risque. Dans un rapport international publié récemment, plus de 1 300 experts à travers le monde ont dit que la biodiversité est la nouvelle question importante et que nous devons régler ce problème d'une manière globale et agir localement.
Nous ne sommes pas différents des autres. Nous devons résoudre nos problèmes. Ce n'est pas que nous ne savons pas quels sont les problèmes. Nous l'avons dit par le passé. Nous savons quels sont les problèmes et nous devons faire quelque chose pour les régler. Il s'agit de se mettre à l'ouvrage, d'établir les priorités et d'obtenir des résultats.
Bien sûr, une des façons d'y arriver est de donner aux comités du Sénat et de la Chambre des communes un rôle de supervision.
Sénateur Christensen, il est vrai que vous représentez le long terme et qu'il est important que les personnes se rappellent ce qui doit être fait, les engagements et les progrès accomplis.
Neil Maxwell, directeur principal, Bureau du vérificateur général du Canada : Je dirais que ma réponse repose en partie sur la recommandation que vous avez faite dans votre rapport de juin, qui disait ceci : que le gouvernement devrait avoir une vision à long terme pour toutes les activités dans le cadre d'un plan général sur l'environnement et le développement durable — une stratégie de développement durable du gouvernement fédéral. Selon le rapport, cela pourrait offrir une vision à long terme et un sens des priorités clés. C'est un réel problème de constater qu'il y a tant d'activités différentes; nous nous demandons comment elles s'intègrent les unes dans les autres et quel est le plan général du gouvernement. C'est difficile à savoir pour les parlementaires, les vérificateurs et pour la population canadienne.
Le sénateur Spivak : C'est un plaisir de vous avoir ici au comité, car vous êtes constamment en train de demander au Sénat d'être plus actif; et c'est une bonne chose. Nous avons essayé d'être plus proactifs, certains d'entre-nous — le sénateur Grafstein, le sénateur Kenny et moi-même — mais on nous a arrêtés. Peut-être que le comité a besoin d'être plus agressif dans ses efforts.
Il semble que le gouvernement effectue une planification de politiques générales, mais sans stratégies ni tactiques. Y a-t-il d'autres stratégies pour nous, car nous entendons les témoignages et prenons connaissance des rapports? Le projet de loi du sénateur Kenny, qui met de l'avant un cadre précisant ce que le gouvernement fédéral devrait faire de sa flotte de voitures, est un bon exemple. Le comité devrait-il en faire plus et préparer des documents législatifs sur, par exemple, un plan de développement durable? Si les ministères du gouvernement fédéral ne répondent pas dans un délai de 120 jours, quelle est la pénalité? Quelle est la pénalité pour le manque de vérifications dans les avions? J'aimerais savoir ce que vous pensez de cela, car lorsque j'étais au Sénat, nous avons accompli de bonnes choses, mais il n'y a jamais eu de volonté réelle. Le rapport du Pentagon suggère que d'ici 2010, nous aurons de graves problèmes si le courant s'arrête dans le Golfe. C'est vrai. Beaucoup de crises vont se produire en même temps. Nous ne pouvons résoudre tous les problèmes du monde, mais nous devons pousser le gouvernement à agir, à tous les niveaux. Croyez- vous que nous devons utiliser des outils législatifs, ce que le Sénat a déjà fait, mais n'utilise pas souvent, pour faire débloquer les choses au niveau stratégique et tactique?
Mme Gélinas : Nous n'allons pas aussi loin que cela, mais nous avons dit clairement dans le rapport de cette année que les sous-ministres et les sous-ministres adjoints doivent être tenus responsables. Nous avons dit que leurs contrats de rendement devraient contenir des objectifs pouvant être examinés par le greffier de temps en temps pour s'assurer que ces objectifs sont remplis. C'est l'une des choses que nous avons essayé de promouvoir.
Un autre aspect dont je veux vous parler, c'est l'aspect, comme je l'ai déjà dit, « Faites le bien ou faites le mal, peu importe, car il n'y a pas de conséquences dans le système ». Ceux qui essayent de promouvoir des choses et d'être novateurs ne sont pas récompensés et ceux qui ne font rien ne sont pas pénalisés. Il n'y a pas d'incitatifs ni de pénalités dans le système qui pourraient favoriser l'amélioration. Les sénateurs aimeraient peut-être se pencher sur cela. Les sous-ministres devraient répondre de leurs objectifs de rendement et devraient montrer qu'ils remplissent tous les aspects de leur mandat.
Le sénateur Spivak : Lorsque vous avez parlé de « pénalité », voulez-vous parler de résignation ou d'une coupe de salaire?
Par exemple, si le ministre Scott Brison comparaît devant le comité pour parler de l'approvisionnement vert, que devrions-nous lui dire? Devrions-nous lui demander pourquoi il ne met pas à la porte quelques personnes, s'ils n'atteignent pas les objectifs de production? Il faut prendre une approche pratique, mais il faut également être vigilant. Je ne sais pas si c'est la bonne méthode. Si vous avez d'autres idées, ce serait bien.
Mme Gélinas : Vous nous donnez un bon exemple. Nous avons effectué la vérification sur l'approvisionnement vert et lorsque nous avions presque fini, on nous a dit, le ministre et le sous-ministre nous ont dit que la politique n'était pas terminée; que nous devions la recevoir bientôt. Le comité pourrait aller plus loin et demander au ministre et au sous- ministre de comparaître afin de présenter cette nouvelle politique et son plan de mise en oeuvre. Ensuite, vous pourriez leur demander de revenir régulièrement, à tous les six mois peut-être, pour vous informer des progrès du ministère. Si les progrès tardent, vous pourriez leur demander pourquoi. Notre vérification a probablement poussé le ministère à produire un peu plus rapidement sa politique. J'espère que nous avons eu une petite influence sur les travaux du ministère, car ainsi, lorsque la politique sera achevée, vous pourrez leur poser des questions sur le calendrier, les délais et les résultats attendus dans un an et dans deux ans. Je suis certaine que le ministre et que le sous-ministre seront très heureux de vous fournir ces renseignements.
Le sénateur Spivak : C'est un bon exemple, ils peuvent agir rapidement dans le cas de l'approvisionnement, car cela ne prend pas dix ans, alors que dans d'autres domaines, c'est peut être plus difficile. Il n'est pas possible de tout régler en même temps. Quelle est votre priorité dans les domaines dont vous nous avez parlé? Quelles seraient les première, deuxième et troisième priorités?
Mme Gélinas : Je ne suis pas placée pour établir les priorités du gouvernement du Canada. J'espère que je peux aider le comité en fournissant des renseignements de base afin que vous puissiez établir les priorités. Le gouvernement peut consulter l'information et établir les priorités.
[Français]
Le sénateur Tardif : Madame la commissaire, vous reprochez au gouvernement une incapacité à mener à terme ses projets ainsi qu'à mettre en œuvre des stratégies de coordinations entre les divers ministères, par rapport au développement durable.
Ma nomination au Sénat est récente et je veux m'assurer de bien comprendre. Vous avez mentionné qu'un comité composé de sous-ministres a la tâche d'élaborer une stratégie de développement durable. Croyez-vous que ce moyen est bon pour atteindre les objectifs que vous souhaitez? Quel est le cadre d'imputabilité de ce comité de sous-ministres?
Quels sont les obstacles? Croyez-vous que ce soit un bon moyen que d'essayer de mettre de l'avant une stratégie de développement durable au sein de plusieurs ministères?
[Traduction]
Mme Gélinas : Je vais vous donner quelques renseignements de base au sujet de la stratégie de développement durable afin que vous ayez une idée d'ensemble.
[Français]
Lorsque nous avons créé le poste de Commissaire à l'environnement et au développement durable, on a créé l'obligation de produire les stratégies de développement durable. Essentiellement, il s'agit du plan de match des ministères pour mettre le Canada sur la voie du développement durable. Ces stratégies doivent être révisées tous les trois ans.
La commission a aussi pour mandat de vérifier les résultats de la mise en œuvre des stratégies de développement durable de chaque ministère et organisme. Notre rapport contient toujours un chapitre traitant de cet aspect.
Ce n'est pas parce qu'on a 28 stratégies ministérielles qu'on a une stratégie globale de développement durable. Le gouvernement fédéral s'était engagé à produire une stratégie qui servirait de guide afin que les ministères s'orientent de façon individuelle sur les objectifs nationaux ou fédéraux et qu'ils s'assurent qu'ils en fassent la mise en œuvre.
Au moment où on se parle, cette stratégie fédérale n'existe toujours pas. On atteint un plateau parce que les ministères n'ont pas d'indications quant aux priorités du gouvernement et que s'ils en avaient, ce serait plus facile de se coordonner. Votre comité a produit un rapport en juin dernier qui va dans le même sens que le nôtre et qui dit qu'il faut une stratégie fédérale pour savoir quelles sont les priorités et la vision du gouvernement et ce vers quoi il tend.
Avec la nouvelle génération de stratégies attendues pour 2006, tout le monde travaillera dans le même sens afin d'atteindre les mêmes objectifs. Le Comité des sous-ministres a comme mandat de produire cette stratégie fédérale de développement durable au cours de la prochaine année.
Il serait profitable pour les membres du Comité que M. Sammy Watson, sous-ministre de l'environnement, vienne expliquer clairement le mandat et le plan de match du Comité des sous-ministres. Ce n'est pas clair pour nous, ce n'est pas clair pour l'ensemble des Canadiens et ce n'est certainement pas clair pour les parlementaires.
Cependant ce qui est clair, c'est que le Comité des sous-ministres a le mandat de livrer la stratégie fédérale de développement durable au cours de la prochaine année.
Par ailleurs, je ne peux passer sous silence le cadre d'imputabilité puisque ce sera une question très intéressante à poser au Comité des sous-ministres pour savoir quelle est l'imputabilité des sous-ministres dans la mise en œuvre du mandat qui leur a été donné.
[Traduction]
Le sénateur Milne : Merci, madame Gélinas, d'être venue ici et de nous avoir donné des idées sur ce que nous pouvons et ce que nous devrions faire.
Un bon nombre des questions dont vous avez parlé sont des problèmes réels qui relèvent de divers ministères du gouvernement. Nous parlons des Pêches, de Patrimoine Canada, des Affaires autochtones et même des Finances, en ce qui a trait à la quantité obligatoire d'assurance sur les opérations nucléaires.
Je m'intéresse particulièrement à l'agriculture. Vous avez dit qu'Environnement Canada et qu'Agriculture Canada ne savent pas si leurs programmes et leurs activités réussissent à réduire les problèmes environnementaux, et vous avez parlé notamment des porcheries.
Ces énormes porcheries sont un problème, comme les parcs d'engraissement de bovins en Alberta. Je sais que l'agriculture est une responsabilité partagée entre les gouvernements fédéral et provinciaux et qu'elle fait l'objet d'entente de coopération entre ces deux paliers de gouvernement.
Avez-vous des vis-à-vis dans toutes les provinces? Si oui, traitez-vous avec eux? Je sais que le gouvernement de l'Ontario oblige les abattoirs de poulets à avoir d'énormes systèmes de traitement des eaux usées. Toutes les eaux évacuées provenant des abattoirs doivent subir un traitement secondaire.
Savez-vous si c'est la même chose dans d'autres secteurs? Les porcheries des provinces doivent-elles faire la même chose?
Il faut plus d'argent pour mener à bien ces activités et ces programmes, ce qui nous ramène au ministère des Finances. Ce sont des programmes qui coûtent très chers.
Quel genre de collaboration avez-vous avec les différents paliers de gouvernement? Que suggérez-vous au présent comité de faire, qui ne relève pas des Finances, de Patrimoine ou de Pêches et Océans?
Mme Gélinas : Lorsque nous avons parlé d'élevage porcin dans notre rapport, il s'agissait d'une allusion spécifique à une pétition que nous avons reçue. Il s'agit d'un bon exemple de Canadiens qui posent des questions sur la responsabilité fédérale dans le domaine de l'élevage porcin. Nous avons reçu des réponses et décidé de vérifier certains des engagements qui ont été pris pour voir si le gouvernement fédéral faisait effectivement ce qu'il avait dit qu'il ferait. Il s'agissait d'une vérification étroite et moins étendue qu'une vérification dans laquelle nous examinons différents aspects. Vous devez comprendre qu'il s'agit d'une vérification plus restreinte que ce que nous faisons habituellement.
Concernant le point que vous avez soulevé au sujet de ce que font mes homologues sur la question de l'agriculture et de la protection de l'environnement, il n'y a pas de poste équivalent au mien au niveau provincial sauf en Ontario, où le mandat diffère légèrement. Cependant, chacun des bureaux du vérificateur général des provinces peut décider de travailler sur une question liée à l'agriculture et à l'environnement. Nous pouvons travailler avec des homologues au palier provincial. Nous l'avons fait dans le cas de notre étude de l'aquaculture sur les deux côtes avec des collègues du Nouveau-Brunswick et de la Colombie-Britannique. Cela peut se faire, mais nous ne l'avons pas fait dans le cas précis que vous avez soulevé.
Vous pourriez être intéressés par ce que le ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire pourrait avoir à vous dire au sujet de sa stratégie de développement durable. Il s'agit d'une stratégie pour mettre l'agriculture sur la voie de la durabilité. Au cours des dernières années, le ministère a élaboré un cadre stratégique pour l'agriculture axé fortement sur l'environnement et le développement durable.
Vous pourriez vouloir demander au ministère comment ces outils répondent à certaines de vos préoccupations concernant l'élevage porcin ou d'autres activités dans le domaine de l'agriculture. Ce serait là ma suggestion.
Le sénateur Spivak : Dans ma propre province, l'élevage porcin est en train de détruire complètement le lac Winnipeg. Le gouvernement fédéral a une responsabilité très claire sur les eaux navigables et le poisson. Il n'a pas besoin d'y aller par quatre chemins; il peut appuyer sur la gâchette très rapidement. Avez-vous examiné cette question?
Mme Gélinas : M. Affleck vous donnera des détails sur le travail que nous avons fait.
John Affleck, directeur principal, Bureau du vérificateur général du Canada : Le sénateur a raison de signaler que différents paliers de gouvernement jouent des rôles différents. Pour ce qui est des responsabilités fédérales, Agriculture Canada s'occupe fondamentalement de R-D et de communication des meilleures pratiques de gestion. Environnement Canada a certainement un rôle d'application de la loi, particulièrement en ce qui concerne les dispositions de prévention de la pollution contenues dans la Loi sur les pêches, au nom de Pêches et Océans Canada.
En vertu de nos attributions, nous n'examinons que la responsabilité fédérale et nous avons effectivement regardé ce que faisait Environnement Canada. Ce ministère fait un effort important pour promouvoir la conformité. Le ministère ne pouvait pas nous dire si ses efforts étaient efficaces et avaient un effet. Lorsque nous avons creusé davantage dans ce dossier, nous avons découvert qu'il ne fait pas un suivi en fonction du règlement ou de la loi des coûts liés à la mise en application des diverses lois. En 2005, je pense que le ministère a reçu 46 millions de dollars de fonds nouveaux pour améliorer la promotion de la conformité et les efforts de mise en application de la loi.
En fin de compte, nous lui avons signalé que la première étape serait d'identifier la collectivité qui est réglementée. Nous avons constaté que le ministère ne savait même pas où étaient situés ces élevages porcins et qui il devait réglementer. Il a accepté de faire ce travail d'ici la fin de l'année financière. Il faut commencer quelque part. Nous lui avons dit qu'il devrait « déterminer la collectivité réglementée, recueillir des données à l'échelle nationale pour affecter les ressources ou établir des priorités pour celles-ci, surveiller les résultats de ses mesures, tenir des dossiers complets sur les budgets et les dépenses », autrement dit, uniquement les points fondamentaux.
Le sénateur Spivak : C'est un problème énorme.
Le sénateur Angus : Madame Gélinas, soyez la bienvenue. C'est agréable de vous revoir, vous et vos collègues. Félicitations pour le bon travail que vous faites. De toute évidence, vous avez un certain effet.
Je suis désolé d'avoir été absent lorsque vous avez fait votre déclaration préliminaire, mais j'ai lu le document. D'après ce que je peux voir, essentiellement, vous faites écho à notre récent rapport dans lequel nous disons qu'il est temps de joindre le geste à la parole. Si je comprends ce que vous avez écrit ici et ce que vous avez déclaré publiquement, vous dites que les politiques du gouvernement ne sont fondamentalement que de belles paroles et peu d'actions et que vous déplorez ces annonces grandioses qui sont faites et qui, par la suite, semblent s'évanouir en fumée. Évidemment, c'est une situation que nous trouvons troublantes.
Par ailleurs, il y a un nouveau ministre et il y a eu beaucoup de discussions. Le ministre viendra nous rencontrer la semaine prochaine pour nous parler du Projet vert, qui est une partie d'une initiative dont le gouvernement actuel entend faire une priorité. Beaucoup d'argent a été mis de côté pour cette initiative.
J'aimerais avoir vos observations. Est-ce que cela est sensé? Que suggérez-vous que l'on fasse cette fois pour s'assurer que le gouvernement rende des comptes? Vous avez dit de faire en sorte que ce comité des sous-ministres comparaisse devant notre comité régulièrement. Je n'en suis pas certain. Cela semble bien, mais il y a d'autres choses que nous essayons de faire ici. Si nous remplissons cette salle avec tous ces différents sous-ministres, je ne suis pas certain que cela pourrait être efficace. Je ne dis pas que ce ne serait pas une bonne idée.
Je crois comprendre que vous suivez nos travaux d'assez près et c'est encourageant pour nous. Nous aimerions vous aider lorsque vous dites qu'il y a un élan ici, mais que vous êtes troublée par le piètre bilan du gouvernement lorsqu'il s'agit de soutenir ses initiatives jusqu'au bout. J'aimerais avoir plus de détails sur ce que nous pouvons faire pour améliorer cette situation. Toutefois, dans le contexte du Projet vert, est-ce là un bon départ? Êtes-vous encouragée par les mesures d'action du gouvernement?
Mme Gélinas : Nous ne pouvons pas déterminer la valeur du Projet vert à l'heure actuelle. Il s'agit d'une nouvelle initiative et pour être honnête, il n'est pas encore tout à fait clair pour nous ce qu'est le Projet vert au-delà d'un plan d'action pour faire face aux changements climatiques.
D'après ce que nous croyons comprendre, le Projet vert est l'initiative fondamentale du gouvernement pour devenir écologique. Différents éléments relèveront du Projet vert. Le seul que nous connaissions, au moment où nous parlons, c'est l'élément lié au changement climatique dont nous faisons la vérification en ce moment. Ce sera le sujet de mon rapport de septembre 2006.
Le sénateur Angus : Vous avez parlé du Projet vert, du changement climatique et de l'approvisionnement écologique. Il me semble qu'il y aura un approvisionnement écologique ou qu'il n'y en aura pas. J'ai beaucoup ri l'autre matin. Je m'empressais de me rendre à une réunion à l'édifice du Centre lorsque j'ai vu ces limousines noires et les ministres qui en descendaient. Puis, est arrivée une petite Prius dans laquelle prenait place, sur la banquette avant, un petit homme avec de gros livres. J'ai regardé dans la voiture et j'ai reconnu l'honorable Stéphane Dion. J'ai pensé, le voici mettant la main à la pâte. J'ai pensé que c'était assez drôle et j'ai immédiatement appelé mon épouse pour lui dire que le gouvernement faisait quelque chose.
Mme Gélinas : Vous m'avez demandé comment vous pouviez aider. Il serait utile pour tous les Canadiens de savoir du ministre Dion ce que comprend exactement le Projet vert. Nous avons hâte d'en savoir davantage à son sujet.
Il y a trois chapitres dans notre rapport qui traitent de ce que nous appelons le capital naturel : la biodiversité, les océans et les parcs. Ce pourrait être des domaines — c'est certain dans le cas de la biodiversité — qui relèveront du Projet vert. Nous ne savons pas encore où cela va s'insérer. Il y a des questions sur lesquelles nous aimerions obtenir des clarifications. Je faisais allusion à cela dans ma déclaration préliminaire, dans ce sens que nous avons le Projet vert, ce cadre pour la compétitivité et la durabilité de l'environnement, qui est un autre outil ou moyen par lequel nous nous engagerons sur la voie de la durabilité. Nous avons les stratégies de développement durable des ministères. Nous aurons, comme l'a affirmé le ministère, une stratégie de développement durable fédérale.
Parmi les questions qu'il faudra poser figurent : comment ces stratégies s'agenceront-elles ensemble? s'agit-il dans tous les cas d'initiatives séparées? à un certain moment, seront-elles regroupées de telle manière que nous ayons un plan de match global? C'est quelque chose qui est encore nébuleux pour nous. Je dois dire que l'indice de difficulté de lecture est assez élevé; ce n'est pas clair. Si vous posez ces questions, ce serait utile.
Il y a un élan dont nous devrions profiter. Une somme d'argent substantielle a été réservée au cours des deux derniers budgets pour des questions environnementales. De nombreuses initiatives ont débuté il n'y a pas très longtemps. Il est important de faire en sorte que les ministères rendent des comptes sur les progrès réalisés dans la réalisation de ces engagements.
Nous avons parlé de la stratégie de la biodiversité, de la stratégie sur les océans et également de l'approvisionnement écologique comme trois exemples où, au cours des 10 dernières années, presque rien n'est arrivé.
Allons-nous perdre une autre décennie? J'espère que non. Nous devons nous assurer que quelqu'un soit tenu de faire des rapports sur les progrès réalisés.
M. Neil Maxwell, directeur principal, Bureau du vérificateur général du Canada : Une façon de réduire le brouillard du Projet vert et du cadre pour la compétitivité, et cetera, sur laquelle nous avons insisté, consiste à simplifier les choses. Y a-t-il quelque part un énoncé de ce que le gouvernement fédéral essaie de faire du point de vue d'un Canada durable?
Où est cette vision? Qu'est-ce que le gouvernement veut essayer de réaliser dans 20 ans d'ici? Quelles sont les priorités? Comment allons-nous les mesurer? Quels sont les indicateurs qui nous donnent une idée de l'état actuel de l'environnement et de ce que l'on doit accomplir? Cela se résume à certains éléments de base qui vous permettent de réduire le brouillard engendré par tous ces termes différents.
Si vous le permettez, juste comme dernier point, un des exemples que nous avons examinés, qui pourrait être très intéressant pour le comité, c'est ce qu'a fait le gouvernement du Royaume-Uni. Il a présenté cette année un plan global pour le gouvernement et ce plan fait toutes ces choses. Il donne une explication claire, n'importe qui peut le lire; vous pouvez voir exactement ce que le gouvernement essaie de faire en termes de développement durable. Il comporte 68 indicateurs différents que le gouvernement suit pour comprendre l'état de la biodiversité, du changement climatique et de toutes ces autres questions importantes. Il montre clairement quelles sont les priorités du gouvernement.
Sans en appuyer un en particulier, il y a des exemples semblables sur la scène internationale qui montrent ce que le gouvernement fédéral canadien pourrait faire.
M. Affleck : Mon observation porte davantage sur le dossier de la biodiversité parce qu'il a une valeur d'exemple. Comme l'a dit la commissaire, c'est la troisième fois que nous examinons ce dossier. Nous l'avons vérifié en 1998, en 2000 et cette année. La biodiversité est une question très fondamentale, surtout pour un pays comme le Canada qui en est si riche. Nous avons été signataire de la convention internationale en 1992, nous avons adopté une stratégie en 1996 et il n'y a toujours pas de plan d'exécution. Nous n'avons toujours pas la capacité de comprendre ce qui se passe au Canada, et nous n'avons toujours pas de rapport d'ensemble.
Je suis en train de regarder un communiqué de presse. La commissaire a déposé son rapport le 29 septembre et le Conseil canadien de conservation des espèces en péril a émis un communiqué de presse le 5 octobre. Il s'agit de la réunion des ministres fédéraux, provinciaux et territoriaux responsables des forêts, de la faune, des espèces en péril et des pêches et de l'aquaculture. M. Dion a dit que nous devions accélérer les mesures en vue de conserver la biodiversité au Canada et de rétablir les espèces en péril. Les ministres ont annoncé un plan pour élaborer un cadre axé sur les résultats en matière de biodiversité d'ici l'automne 2006.
À certains égards, c'est un peu décourageant. La réponse est encore un autre plan, et nous voyons cela depuis des années. Peut-être que le comité peut demander des comptes au ministre et le convoquer pour qu'il vienne parler de ce cadre, comment les choses avancent et, une fois que le plan sera élaboré, comment il sera mis en application.
Le sénateur Angus : Le ministre a déjà comparu et il revient la semaine prochaine. Je ne suis pas du même parti, mais j'essaie de me mettre à sa place. Il agit sûrement de bonne foi. Je pense que nous présumons la bonne foi. Les gens travaillent sur la question. Premièrement, le gouvernement de manière générale a affirmé dans son budget, et ailleurs, que c'est une priorité et il veut qu'on le voie mettre l'accent sur ce dossier important, ce domaine. De plus, ces gens sont conscients des rapports de l'OCDE qui montrent que nous perdons constamment du terrain. Je suis certain qu'ils ont été fouettés par la nouvelle qui est sortie juste cette semaine voulant que même si les Américains n'ont pas signé le Protocole de Kyoto, ils sont loin en avant de nous pour ce qui est des émissions. Cela est très révélateur.
Vous êtes les vérificateurs de la situation. Je ne peux pas croire qu'ils font tourner leurs roues dans le vide comme cela. Sont-ils mal informés? J'essaie de me mettre à sa place. Je suis nommé au cabinet, je suis ministre de l'Environnement et je présente le grand Projet vert, cette nouvelle initiative en matière de biodiversité, et voilà que vous arrivez et que vous dites que tout cela n'est que de la poudre aux yeux. Comment peut-il se faire prendre au piège comme cela?
Mme Gélinas : Le sénateur Christensen faisait allusion plus tôt à la complexité de certaines questions environnementales. Je vais vous donner un exemple concernant la Stratégie sur les océans. Il y a 19 ou 20 ministères et organismes qui participent à la mise en application de cette stratégie. Par conséquent, vous comprenez que cela va au-delà du ministère de l'Environnement et du ministre de l'Environnement. Si nous avons tous l'environnement à coeur, nous devrions trouver des façons d'aider le ministre à réaliser son propre objectif, n'est-ce pas?
Une chose sur laquelle vous voulez peut-être réfléchir, vous vous souviendrez probablement que l'an dernier le premier ministre a créé un comité spécial du cabinet sur la durabilité et l'environnement, présidé par le ministre Emmerson, ministre de l'Industrie. Il est intéressant de voir que ce comité n'est pas présidé par le ministre de l'Environnement, comme vous l'avez recommandé dans votre dernier rapport. Il sera également intéressant de voir quels seront exactement le mandat et le rôle de ce comité spécial, quelles sont les priorités, le programme et comment tout cela s'agencera avec le comité des sous-ministres, parce que nous supposons qu'ils travailleront main dans la main.
Le sénateur Angus : Êtes-vous en train de nous dire qu'en fait, ce comité ne s'est jamais réuni et qu'il n'a rien fait?
Mme Gélinas : Nous avons dit cela au sujet du comité des sous-ministres précédant. Maintenant, il y en a un nouveau. Nous n'avons pas examiné ce que ce nouveau comité a fait, mais comme je le disais plus tôt, le fait de convoquer le président de ce comité, qui est le sous-ministre d'Environnement Canada, vous donnera une assez bonne indication de son plan de match. De plus, vous pourriez vouloir faire la même chose avec le comité du cabinet pour voir qui sont les ministres qui sont chargés d'essayer de réaliser certains de nos objectifs en matière d'environnement et de développement durable.
Le sénateur Angus : Vous avez insisté devant le comité, non pas seulement ce soir, mais également l'an dernier et, je l'ai remarqué, dans beaucoup de matériel d'information en provenance de votre bureau, pour dire que l'une de vos principales critiques, c'est que les outils existent, qu'ils sont disponibles. Nous avons des techniques et des moyens ultramodernes de traiter de ces questions cruciales, mais on ne les utilise pas. J'aimerais retourner la question, madame Gélinas, et vous demander si vous avez des outils suffisants pour réaliser votre travail?
Je nous vois parfois dans un partenariat ici, le comité et les parlementaires de l'autre endroit, pour essayer d'obliger le gouvernement à rendre des comptes et à faire de l'environnement un meilleur endroit pour nous, nos enfants et nos petits-enfants. Avez-vous suffisamment de poids et avez-vous les outils nécessaires?
Mme Gélinas : Je répondrai que si nous pouvons continuer à renforcer notre relation, vous et moi avons les bons outils pour nous assurer que les ministres et les fonctionnaires rendent des comptes, certainement.
[Français]
Le sénateur Angus : Nous les avons déjà; simplement, la question est d'exiger les outils.
[Traduction]
Mme Gélinas : Exactement.
Le président : J'ai cru comprendre, en écoutant attentivement votre déclaration préliminaire et les conversations subséquentes, que si nous avions à choisir un endroit par où commencer — et peut-être que c'est un endroit qui est trop peu pratique pour commencer, peut-être que nous devrions nous attaquer à un morceau plus petit —, vous ne pouvez rien faire jusqu'à ce qu'il y ait un inventaire, jusqu'à ce qu'il y ait des mesures et que l'on ait dressé une liste de la biodiversité et, au cours du processus, cerné les problèmes qui en découlent; c'est là la première chose à faire, parce qu'autrement, nous ne saurons pas quoi faire.
Est-ce que c'est juste et est-il réellement possible de faire cela?
Mme Gélinas : C'est exactement ce que nous avons dit. Comment pouvez-vous faire quelque chose et établir une priorité dans vos actions lorsque vous n'avez pas l'information de base? Nous avons dit, non pas seulement cette année, mais dans les années antérieures, qu'il y a une sorte de dégradation de l'exercice de surveillance scientifique pour obtenir de l'information sur la biodiversité. Cela peut être l'océan. Nous avons de nombreux autres exemples. C'est là la première étape.
Vous voudrez peut-être poser cette question au ministre pour savoir ce qui se fait en ce moment dans le domaine de l'environnement à l'échelle du gouvernement en vue de renforcer notre capacité de réunir cette information dont on a grandement besoin.
Le président : Globalement, nous avons dit qu'il fallait de nouveau augmenter le financement gouvernemental pour des travaux de recherche universitaire de toutes sortes, dans le domaine des aquifères et de l'eau souterraine, par exemple. Ai-je bien compris que nous avons besoin de financer ce genre de recherche dans tout ce qui touche à la biodiversité? Manque-t-on également de financement ailleurs?
Mme Gélinas : Je ne peux pas vous en dresser le tableau général. Dans le domaine de la biodiversité — et vous pouvez me reprendre si je me trompe — il semble que l'on dispose d'information ici et là; toutefois, nous ne regroupons pas cette information. Peut-être aurons-nous une bonne image ou un bon profil de notre biodiversité, mais même ce genre d'exercice n'a pas eu lieu. Nous devrions commencer par faire l'inventaire de ce que nous avons, voir ce qu'il faut ajouter et ensuite aller de l'avant et obtenir cette information. Je dirais que faire l'inventaire est probablement la première étape à franchir dans le domaine de la biodiversité.
Le président : Existe-t-il un centre d'information ou d'archivage où cette information devrait, peut et doit se retrouver?
Mme Gélinas : Des propositions ont été faites lorsque beaucoup d'autres initiatives ont été lancées. Le sénateur Angus a parlé notamment du message essentiel de l'année dernière, à savoir que les outils existent bel et bien. Cette année, nous disons que vous pouvez prendre des mesures en tant que gouvernement, mais que vous ne pouvez pas soutenir vos initiatives.
Dans le cas de la biodiversité, par exemple, si le gouvernement avait fait ce qu'il avait promis, nous aurions déjà un tel centre où cette information serait disponible, puisque ces engagements ont été pris il y a de nombreuses années. Cela faisait partie de la stratégie elle-même, réunir l'information et savoir ce qui se passe.
Si je ne me trompe, seulement 2 p. 100 de l'information touche à la biodiversité.
M. Affleck : Trois pour cent.
Mme Gélinas : Nous devons encore nous occuper des 97 p. 100 restants.
Le sénateur Grafstein : Tout d'abord, je veux revenir à la réponse que vous avez donnée au sénateur Spivak; vous avez dit que tout ce que vous faites consiste à exposer les problèmes et que c'est aux parlementaires et au public qu'il revient de fixer les priorités. Est-ce bien votre mandat?
Lorsque le Bureau du vérificateur général a été créé sous M. Trudeau — et le sénateur Kenny va s'en souvenir — un débat a fait rage entre le vérificateur général et le gouvernement de l'époque au sujet du rôle du vérificateur général. D'après M. Trudeau, le vérificateur n'avait absolument pas à s'occuper de politique, mais la question de l'optimisation des ressources s'est posée.
Comme vous le savez, les États-Unis avaient fait un travail sur l'analyse coûts-avantages avant la guerre du Vietnam. Tout cela a commencé lorsque le secrétaire de la Défense, M. McNamara, et les spécialistes de Ford se sont servis de l'analyse statistique afin de prouver que les fonds dépensés dans le domaine de la défense l'étaient de façon rentable et qu'on ne pouvait pas faire mieux. Comment, d'après l'analyse de rentabilité, un soldat devenait-il plus efficace en tant que tueur?
Ce courant de pensée a été repris par l'UE qui a fait d'importants travaux, notamment dans le domaine de l'analyse de la concurrence. L'évaluation de la sécurité des plages a été l'un des résultats fort simples d'une telle analyse.
Le fait est que les pays d'Europe se faisaient concurrence dans les domaines du tourisme et des plages; ils ont donc mis au point le système de drapeau bleu qui a très bien fonctionné et qui permettait de savoir quelles plages étaient les plus intéressantes, celles de la Côte d'Azur, de Bordeaux, ou celles de l'Italie ou de l'Espagne. Aujourd'hui, il vous suffit d'appuyer sur un bouton pour savoir où se trouvent les plages à drapeau bleu dans toute l'Europe, afin de décider de votre lieu de villégiature.
Ce n'est pas aussi compliqué qu'on pourrait le penser si l'on examine certains résultats humains par opposition à la logique bureaucratique. Pourquoi n'est-ce pas facile à faire et pourquoi faut-il compliquer les choses? En d'autres termes, il suffit simplement d'évaluer les plages, par exemple.
Pour vous donner un exemple plus concret, parlons des Grands Lacs. Veuillez m'excuser, monsieur le président, mais je dois donner quelques explications.
Il y a dix ans environ, les provinces et les États ont décidé de s'attaquer au problème des Grands Lacs, qui représentent la plus grande ressource d'eau douce au monde. La pollution détériorait l'eau douce. Une entente contractuelle a donc été conclue entre les provinces et les États et elle fait l'objet d'un examen en ce moment même.
Le fond de l'entente n'était pas compliqué. À ce moment-là, on avait recensé 36 ou 37 points chauds dans les Grands Lacs. Si je me souviens bien, 22 se trouvaient du côté américain et 16 du côté canadien. Au bout d'une période de dix ans, ces points chauds devaient être nettoyés; c'était l'objectif poursuivi. On pouvait les vérifier, qu'ils se trouvent à Hamilton, Sault Ste Marie ou Détroit.
Depuis, un de ces points chauds et demi a été nettoyé du côté canadien — ce sont les bonnes nouvelles — sur 16. Du côté américain, rien n'a encore été fait.
N'y a-t-il pas une façon simple d'aller plus vite et de mettre en évidence les problèmes, au lieu de procéder à une microanalyse et de parler d'un bon résultat, d'un bon travail effectué à ce sujet?
Mme Gélinas : Je vais commencer par votre premier point. Je demanderais à M. Maxwell ou à M. Affleck de parler des vérifications d'optimisation des ressources auxquelles nous procédons.
En ce qui concerne les points chauds dont vous parlez, si je ne me trompe, nous les avons vérifiés en détail au moment du rapport sur l'état des Grands Lacs en 2001. Nous pouvons mettre l'accent sur cette information pour vous, si vous continuez à vous intéresser à la question. Nous allons faire un suivi du rapport sur l'état des Grands Lacs, si bien que nous pourrons vous parler des progrès réalisés dans ce domaine.
Nous faisons partie intégrante du bureau du vérificateur général et nous ne faisons aucun commentaire sur la politique. Ceci étant dit, nous essayons d'être proactifs en donnant aux parlementaires plus d'information au lieu de simplement leur présenter les résultats d'une vérification.
Nous pouvons fournir plus d'information en faisant, par exemple, des exercices d'analyse comparative. C'est ce que nous faisons dans le cadre de la vérification sur le changement climatique. Vous serez en mesure de comparer les données en fonction de l'information documentée que nous allons vous remettre. On nous a souvent demandé de fournir ce genre d'information.
Actuellement, nous repérons plus fréquemment ce que nous appelons de bonnes pratiques adoptées dans d'autres pays. C'est ce que nous allons faire dans le contexte du changement climatique et vous pourrez vous en servir comme point de comparaison pour voir si le gouvernement a pris des décisions politiques en fonction de l'information que nous vous avons donnée. Dans le cadre de notre mandat, c'est une façon pour nous d'essayer d'aller plus loin que la vérification des mesures que le gouvernement fédéral a prises ou non.
Vous avez indiqué que notre mandat consistait à exposer les problèmes. J'espère que nous pouvons aller plus loin. Il est vrai que cela fait partie de notre mandat. Grâce à nos recommandations, nous essayons d'être proactifs et d'avoir de bonnes discussions avec les ministères afin de déterminer où se trouvent les obstacles et les limites auxquels ils sont confrontés. Nous essayons de les aider par le truchement de recommandations en vue de leur donner les outils voulus pour aller de l'avant. Comme nous l'avons toujours dit, les bureaucrates sont toujours prêts à faire avancer les choses.
Il y a des gens qui essaient de faire avancer tel ou tel point, mais cela ne va pas aussi vite qu'ils le souhaiteraient. C'est ce que nous essayons de faire. Je dois dire que jusqu'ici, nos antécédents en ce qui concerne la mise en œuvre de nos recommandations n'ont pas été si mauvais. En fait, nos résultats sont assez bons.
Il est essentiel de faire régulièrement un suivi. Je reviens à ma déclaration préliminaire portant sur la façon dont nous pouvons travailler ensemble et consolider nos relations de manière à voir des progrès se réaliser, notamment, en faisant un suivi régulier, autant de notre côté que du vôtre, et en travaillant ensemble pour s'assurer que la mise en œuvre se concrétise.
Le sénateur Grafstein : Madame la commissaire, veuillez m'excuser, je ne suis pas membre de ce comité, mais je connais toutefois la mode américaine de l'analyse de l'optimisation des ressources, ainsi que son application européenne. Si votre mandat consiste essentiellement à assurer l'optimisation des ressources, et si je m'en tiens à votre témoignage d'aujourd'hui, vous dites essentiellement que le contribuable n'a pas bénéficié de cette optimisation des ressources à cause de la myriade de programmes mis sur pied. Les objectifs sont bons, mais les programmes n'ont pas donné de bons résultats. Pour nous aider, pouvez-vous nous dire quels programmes n'ont pas permis une optimisation des ressources et peuvent donc être supprimés. Vous avez déclaré dans votre témoignage qu'il existe un programme à l'intérieur d'un autre dans le Projet vert. C'est très déconcertant pour nous et pourtant nous sommes tous des législateurs d'expérience. Nous avons déjà entendu de tels propos, mais si j'étais un contribuable, je ne saurais pas par où commencer.
Nous devons en quelque sorte pouvoir dire dans le cas d'un programme qui ne fonctionne pas et qui ne favorise pas l'optimisation des ressources qu'il doit être supprimé au lieu d'y rajouter quoi que ce soit. Vous pouvez sûrement nous aider à ce sujet et être plus précise, si bien que lorsque le comité fera ses recommandations, il aura tiré parti des vôtres. J'essaye de penser, monsieur le président, aux recommandations que pourrait faire ce comité. J'ai tendance à m'intéresser particulièrement à l'eau saine et j'ai une façon bien à moi d'aborder le sujet, mais c'est plus compliqué. Je pense qu'il serait possible de rendre les choses moins compliquées si vous pouviez nous dire : tel ou tel programme n'est pas une bonne affaire. Le président peut dire à ses collègues : « Nous allons recommander au gouvernement de supprimer ces programmes. »
Mme Gélinas : Nous allons dans cette direction — et je vais demander à M. Maxwell de faire quelques observations à ce sujet — en ce qui concerne le rapport sur le changement climatique, puisque nous examinons divers programmes. Nous allons vous donner de l'information.
L'un des problèmes auxquels nous sommes souvent confrontés, c'est qu'il est difficile, lorsque l'on arrive au niveau des ministères, de savoir exactement combien de fonds ont été dépensés pour tel ou tel programme. Ils sont étalés et on ne sait jamais vraiment où les fonds sont affectés pour atteindre un objectif ou respecter un engagement. C'est l'un des points délicats. J'imagine qu'en tant que bon vérificateur d'expérience, vous devez vous être rendu compte d'autres limites qui empêchent de parvenir à l'optimisation des ressources. Il est étonnant que nous ayons déjà eu une discussion à ce sujet il y a cinq heures environ.
M. Maxwell : Je n'ai pas grand-chose à ajouter, si ce n'est, comme vient de le dire la commissaire, que nous essayons le plus possible dans nos rapports de signaler les résultats obtenus pour les Canadiens. Dans de nombreux exemples de ce rapport, nous disons qu'il n'existe que deux zones de protection marine alors que 13 ont été identifiées, et cetera. Nous tenons toujours à procéder de la sorte.
Sur un plan pratique, le travail d'un vérificateur est limité par le genre d'évaluation mis en place par le gouvernement. En vertu de la loi à laquelle nous sommes assujettis, c'est le gouvernement qui, en premier lieu, doit savoir jusqu'à quel point les efforts déployés sont efficaces. Il est beaucoup plus sain que le gouvernement prenne des décisions tout en étant au fait de l'efficacité des programmes au lieu de s'en remettre uniquement au vérificateur.
J'ajouterais également que lorsque nous terminons ces vérifications et signalons les problèmes — comme l'a dit la commissaire, nous faisons des recommandations pour essayer d'exprimer nos idées sur la façon d'améliorer les choses — beaucoup de décisions, véritablement politiques, peuvent être prises. Vous pouvez prendre les résultats que nous avons trouvés dans n'importe lequel de ces domaines, comme la gestion des océans, et en conclure qu'un programme doit être éliminé. Vous pourriez arriver à une autre conclusion, à savoir que ce programme est important vu qu'il vise à donner d'importants résultats pour les Canadiens et qu'il faudrait donc le corriger ou l'améliorer.
Il s'agit, à notre avis, de décisions politiques et, comme le Parlement l'a décrété, ce n'est pas dans le mandat du vérificateur. Les parlementaires sont ceux qui, finalement, prennent ces décisions.
Le sénateur Grafstein : Je voudrais dire que la collectivité autochtone m'a toujours intéressé. J'examine vos points 32 à 36. Permettez-moi de vous donner mon avis au sujet de cette information.
Vous dites qu'entre 1995 et 2003, on a injecté 2 milliards de dollars pour construire — et c'est explicite — et exploiter des systèmes d'approvisionnement en eau potable et des systèmes d'égouts dans les collectivités autochtones. Vous dites ensuite que 1,8 milliard de dollars supplémentaires seront dépensés entre 2003 et 2008. Je peux diviser 1,8 milliard de dollars par cinq, ce qui donne 2,6 milliards de dollars injectés pour construire des systèmes d'approvisionnement en eau potable dans les collectivités autochtones. Pourtant, nous savons que les systèmes d'approvisionnement en eau posent toujours problème.
Quelle conclusion en tirer? Cela ne sert pas à grand-chose. Si je me souviens bien, on parle de 176 réserves. À partir de l'étude que j'ai faite il y a trois ans environ, l'eau potable était insalubre dans un tiers d'entre elles.
Veuillez nous aider à ce sujet. Qu'est-ce qui fonctionne et qu'est-ce qui ne fonctionne pas dans cette catégorie précise? Avez-vous examiné dans le cadre de votre vérification les diverses collectivités autochtones les unes après les autres pour vous demander si cela fonctionne ici mais non là? Vous dites en général que les responsabilités en matière de réglementation font globalement défaut, mais je connais, plusieurs réserves dont certaines sont épouvantables et une ou deux assez bonnes, car la collectivité autochtone commence à former ses employés locaux. Ce genre de recommandation ne me permet pas de pousser le gouvernement à porter plus d'attention à ce problème. Je n'aide absolument pas le gouvernement en disant : « voici un problème que vous avez résolu et un autre que vous n'avez pas résolu. » Je sais toutefois que DART fournit de l'équipement mobile d'approvisionnement en eau au Pakistan, comme cela s'est produit après Katrina, mais nous ne pouvons pas le faire pour les collectivités autochtones. Cela me semble assez ironique, s'il s'agit d'un problème pressant, urgent.
Le sénateur Angus : Où se trouve le sénateur Adams lorsque nous avons besoin de lui?
Le sénateur Grafstein : J'ai parlé au sénateur Adams à ce sujet.
Mme Gélinas : Tous les fonds qui ont été injectés pour régler le problème de l'eau potable et des égouts des Premières nations ne devaient pas uniquement servir à exploiter l'infrastructure, mais aussi à la construire. Nous avons dit que les fonds consacrés à la construction de l'infrastructure ont été utilisés à cette fin et que les collectivités des Premières nations ont davantage accès à l'eau. Ceci étant dit, la question de la qualité de l'eau continue de se poser.
Ce que nous disons...
Le sénateur Milne : À moins de mesures radicales — de quelles mesures radicales voulez-vous parler?
Mme Gélinas : Je suis contente que vous posiez cette question. Ce n'est pas l'argent qui va régler le problème dans son entier. L'argent fait partie de la solution, mais il faut plus que cela.
Une entente de financement entre les collectivités des Premières nations et le gouvernement ne remplacera jamais la réglementation. Nous avons dit que les collectivités des Premières nations sont les seules dans notre pays qui ne soient pas assujetties à une réglementation relative à l'eau potable. Nous disons, premièrement, qu'il faudrait envisager la nécessité d'une telle réglementation. C'est notre première recommandation. Le gouvernement nous a répondu qu'il allait examiner ce point avec les Premières nations.
Le sénateur Grafstein : À ce sujet, une directive a été produite par le ministère de la Santé. Ce n'est pas comme s'il n'y en avait pas. Ce qui me préoccupe, c'est que c'est une directive facultative. Pourquoi le gouvernement — ou qui que ce soit d'autre — peut-il dire qu'il n'existe pas de directive s'il y en a une?
Mme Gélinas : Il existe une directive et le gouvernement ne va pas dire le contraire. Toutefois, elle doit être appliquée par les Premières nations, comme le prévoit Santé Canada. Il n'y a pas de contrôles ou, s'il y en a, Santé Canada ne le sait pas. Au bout du compte, personne ne sait ce qui a été fait dans les collectivités des Premières nations pour régler les problèmes d'eau potable.
S'il existait des lois, des règlements et des responsabilités clairement établies, on le saurait. C'est une partie du problème. Nous tentons de le résoudre, et peut-être que vous devriez vous aussi commencer à réfléchir à la nécessité de réglementer les pratiques dans ce domaine en particulier.
Par ailleurs, il y a de bonnes infrastructures dans les réserves, mais dans beaucoup de cas, les gens sont incapables de les exploiter et de les entretenir. Il faut chercher des solutions, parce que ce n'est pas réaliste de croire que dans quelques années, toutes les communautés autochtones auront les infrastructures et le personnel adéquat pour les exploiter. Que fera le gouvernement pour régler la question?
Voilà donc les deux principaux problèmes que nous avons décelés lorsque nous avons effectué notre vérification. Nous espérons que le ministère des Affaires indiennes et Santé Canada s'y attaqueront, comme ils l'ont promis.
J'ai moi-même visité deux communautés totalement différentes; l'une située dans le sud du pays, près d'une zone urbaine, et l'autre dans une région isolée du Manitoba, accessible seulement par avion. J'ai pu constater qu'il était urgent d'agir, en particulier dans les communautés éloignées.
Le président : Je dois dire aux membres que pour gagner du temps, si nous décidons d'étudier la question en profondeur, il serait judicieux de lire attentivement le cinquième volume — assez imposant — du rapport de la commissaire. Vous avez reçu un exemplaire à vos bureaux de ce document qui est paru le 29; il se trouve dans un étui en carton. Nous n'aurons pas le temps de discuter de tout son contenu aujourd'hui, mais nous pourrons en reparler.
Le sénateur Kenny : J'aurais quelques petites questions pour le témoin, monsieur le président. Lorsque vous parlez d'instaurer de meilleures méthodes, est-ce que vous faites également référence aux procédures gouvernementales?
Mme Gélinas : Que voulez-vous dire?
Le sénateur Kenny : Je pense aux documents destinés au conseil des ministres, par exemple. Avez-vous vu comment ils sont structurés?
Mme Gélinas : C'est une question pertinente. S'est-on déjà penché là-dessus?
M. Maxwell : Nous ne les avons pas examinés d'un oeil critique ou dans le but de leur trouver des défauts de forme, mais plutôt pour obtenir de l'information sur certains sujets spécifiques. Le comité se souviendra que l'an dernier, nous avons parlé de l'état d'avancement des travaux dans l'évaluation environnementale stratégique.
Le sénateur Kenny : Je fais allusion à une formule vierge, pour que les ministères aient des indications sur la façon de rédiger un document destiné au Cabinet. Est-ce de votre ressort?
Mme Gélinas : Je ne sais pas. Je dois m'informer. Je sais qu'il y a des directives pour l'EES. Nous avons vérifié si les ministères, qui doivent faire cette évaluation avant de pousser plus loin un projet, les ont suivies. Nous examinons parfois des modèles et des cadres de référence, mais pas les documents destinés au Cabinet.
Le sénateur Kenny : En fait, il faudrait plus qu'une formule en blanc. Ce qui est problématique, c'est la manière dont les documents destinés au conseil des ministres sont rédigés. En fait, je veux savoir si, dans ces documents, on réserve une partie à l'évaluation des impacts environnementaux du projet proposé. Le savez-vous?
M. Maxwell : Oui, c'est l'évaluation environnementale stratégique. Le conseil des ministres a décidé, en 1990, qu'on devrait dorénavant évaluer l'impact sur l'environnement de toutes les décisions qui lui parvenaient. Dans le rapport de 2004, nous avons été critiques à l'égard de l'application de cette mesure.
Votre question est intéressante, parce qu'une partie de notre travail de suivi continu consiste à voir si les ministères ont réalisé des progrès pour régler différents problèmes qu'on leur avait signalés dans le passé. Cela nous a toujours préoccupé. Si je me souviens bien, ce comité a abordé la question dans le rapport de juin. Il s'agit d'une démarche essentielle. Le sénateur Angus, plus tôt, nous parlait des outils à notre disposition. En voilà un tout aussi important que les autres dans les circonstances.
Le sénateur Kenny : Il faudrait aussi que le ministère de l'Environnement fasse office d'organisme central. Cela s'est presque produit à l'époque où M. Bouchard était ministre de l'Environnement. Cependant, M. Bouchard s'est rapidement trouvé de nouveaux centres d'intérêt et il est passé à autre chose. On avait annoncé que son ministère était devenu un organisme central et que lui devait signer toutes les propositions gouvernementales pour indiquer qu'elles répondaient aux normes de son ministère. Selon moi, cette mesure avait une très grande valeur.
Le sénateur Grafstein : Elle oblige les gens à rendre des comptes.
Le sénateur Kenny : Effectivement, et elle donne aussi au ministère le pouvoir de freiner un projet jusqu'à ce qu'il satisfasse à ses normes. C'est pourquoi je vous ai posé une question au sujet des pratiques exemplaires. J'aimerais savoir si vous avez examiné ce qui se faisait à l'OCDE et si d'autres gouvernements sont dans une situation semblable à la nôtre et ont les moyens d'agir. Vous ne verrez jamais beaucoup d'argent être investi dans l'environnement, et là je parle de vraies dépenses. Il me semble que si vous avez l'autorité en matière de pratiques exemplaires, il serait bon de vous en servir pour regarder comment fonctionne notre organisme central, le Bureau du Conseil privé. De plus, vous pourriez examiner l'appareil gouvernemental et nous indiquer si cela vaudrait la peine d'instituer un autre organisme central.
Le sénateur Grafstein : J'aimerais juste ajouter que c'est exactement ce qu'a fait M. McNamara au département américain de la Défense. Un secrétaire adjoint de ce département devait apposer sa signature sur tous les projets afin de s'assurer qu'ils atteignaient l'objectif visé — dans ce cas, c'était de trouver des armes à feu bon marché dont le tir était puissant et rapide. Il fallait donc rendre des comptes directement au secrétaire ou au secrétaire adjoint de ce département. Cela a plutôt bien fonctionné. Les États-Unis n'ont pas gagné la guerre du Vietnam, mais leur armée est devenue très puissante.
Le président : Si je ne me trompe pas, la procédure existe, mais elle n'est pas tout à fait au point.
M. Arseneault : Le Bureau du Conseil privé donne des consignes aux ministères pour remplir les grilles. Il leur demande de faire l'évaluation environnementale stratégique des projets. Il est censé leur rappeler leurs obligations. Nous avons regardé cela de plus près l'an dernier, mais nous avons conclu qu'il n'en était rien et que les directives du conseil des ministres n'étaient pas bien suivies. De plus, nous nous sommes rendu compte que même s'il demande aux ministères de faire l'évaluation environnementale stratégique pour tous les mémorandums destinés au Cabinet, seuls quelques-uns le font.
Le sénateur Kenny : Quelqu'un pourrait refuser de signer un tel document tant qu'il n'est pas rempli correctement et empêcher ainsi que le projet suive son cours. Il ne s'agit pas d'une procédure très différente de celle qu'on emploie pour approuver les achats dans les ministères. Lorsqu'on veut acheter quelque chose, on doit définir ses besoins dans une demande qu'on fait signer par son ministère, le ministère des Travaux publics et le Conseil du Trésor, lequel doit indiquer que c'est dans l'enveloppe financière. Nous comprenons tous ce principe, il s'agit simplement de l'élargir.
Le sénateur Spivak : Attendez un instant. Cette mesure n'a pas fonctionné.
Le sénateur Kenny : Elle n'est pas encore appliquée. Laissez-lui une chance, sénateur Spivak, avant de juger.
M. Arseneault : Je pourrais ajouter que nous avons parlé à des personnes ressources de différents pays à ce sujet. Nous sommes les premiers au monde à faire une vérification concernant l'évaluation environnementale stratégique. Les autres pays apprennent de notre expérience et de nos résultats.
Lors de cette vérification, c'était impressionnant de voir les changements qui s'opéraient soudainement dans les ministères; on commençait à tenir ses promesses. Évidemment, nous devrons faire un suivi.
Le sénateur Kenny : C'est pour cette raison je vous ai posé une question au sujet de l'OCDE et des autres pays.
M. Maxwell : Bien que je n'aie pas étudié le sujet en profondeur, les modèles de bon nombre de pays me sont familiers. Il en existe plusieurs. Certains ressemblent au nôtre : le ministre de l'Environnement n'a pas à apposer sa signature pour indiquer qu'il est satisfait de l'évaluation environnementale stratégique. Ailleurs, cette fonction peut relever de l'équivalent du Cabinet du premier ministre, du Bureau du Conseil privé ou encore du ministère des Finances.
Le comité sera peut-être intéressé d'apprendre que le ministre Dion a annoncé, lors d'une conférence de presse tenue après le dépôt de notre rapport, il y a quelques semaines, que le premier ministre venait de lui confier un nouveau mandat : celui de prendre en main le dossier du développement durable. Vous voudrez peut-être en discuter avec lui.
Le sénateur Grafstein : L'OCDE recueille des statistiques ayant trait à l'évaluation environnementale. Avant d'approuver un projet, la Banque mondiale demande qu'on en fasse l'analyse financière, en respectant certains paramètres, pour pouvoir tirer le maximum de chaque dollar investi. Ceci nous prouve qu'il existe actuellement des pratiques visant à s'assurer que l'argent est bien versé et que le rapport coût-efficacité est satisfaisant.
Pourquoi essayer de réinventer la roue si des modalités de calcul existent déjà? L'ONU a fait une étude intéressante, sur la stratégie de développement au Moyen-Orient, qui porte sur plusieurs domaines — l'éducation, l'alphabétisation, l'efficacité, et cetera — et elle en a fait le suivi un an plus tard.
Des études sont disponibles, monsieur le président, mais nous ne savons pas les utiliser adéquatement. D'autres ont été aux prises avec les mêmes problèmes que nous.
M. Arseneault : Vous parlez d'évaluation environnementale des projets, mais nous discutons d'un sujet bien différent : l'évaluation environnementale des politiques, des programmes et des plans, appelée évaluation environnementale stratégique.
L'évaluation environnementale des projets a fait l'objet d'une vérification dans le passé et nous comptons en faire d'autres à l'avenir. Ce qui revêt une grande importance, ce sont les mesures d'atténuation. Quand un projet est approuvé par le gouvernement, son promoteur promet de prendre un certain nombre de mesures pour protéger l'environnement. Qui s'assure de la mise en œuvre des mesures d'atténuation? Il y a une faille réelle dans le processus. C'est un problème auquel il faudra peut-être s'attaquer un jour.
Le président : Nous examinerons tout cela de manière plus détaillée et concrète dans le but d'améliorer les choses. Le gouvernement semble avoir fait quelques pas dans la bonne direction, mais les mesures manquent de mordant et ne sont pas appliquées de façon stricte. Nous pourrons peut-être, comme vous l'avez suggéré, madame la commissaire, l'aider à progresser dans cette voie.
Je dois maintenant vous remercier, chers invités. Je suis sûr que nous aurons plus de questions à vous poser; nous vous les adresserons par écrit. J'espère que vous réagirez à nos suggestions éventuelles. N'hésitez pas à nous en faire vous aussi, en vous inspirant des questions que vous avez entendues et des propositions que vous avez soumises — et que nous avons trouvé très utiles.
Chers collègues, nous nous retrouverons dans exactement 20 minutes; je vous promets d'accélérer le rythme.
La séance se poursuit à huis clos.