Délibérations du comité sénatorial permanent des
Finances nationales
Fascicule 2 - Témoignages du 2 novembre 2004
OTTAWA, le mardi 2 novembre 2004
Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd'hui, à 9 h 34, pour examiner le Budget principal des dépenses présenté au Parlement pour l'année financière se terminant le 31 mars 2005.
Le sénateur Donald H. Oliver (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Honorables sénateurs, je déclare ouverte la deuxième séance du Comité sénatorial permanent des finances nationales. Comme vous le savez, ce comité, créé en mai 1919, a eu pour nom le Comité des finances jusqu'en 1968, année où il est devenu le Comité des finances nationales.
Le comité est chargé d'étudier les dépenses du gouvernement, soit directement au moyen des budgets des dépenses, soit indirectement par le biais des projets de loi.
Nous avons l'honneur aujourd'hui de recevoir la présidente ainsi que des cadres supérieurs de la Commission de la fonction publique du Canada. La Commission de la fonction publique du Canada — ou la CFP — joue un rôle important car elle assure la sauvegarde des valeurs qui caractérisent une fonction publique professionnelle soit, entre autres, la compétence, l'impartialité et la représentativité. Maria Barrados est la présidente de la CFP. De 1993 à 2003, Mme Barrados a été vérificatrice générale adjointe des opérations de vérification au Bureau du vérificateur général du Canada. Elle a étudié en sociologie à l'Université de la Saskatchewan, l'Université McGill et l'Université Carleton. Elle a de l'expérience dans les domaines de la vérification, de l'évaluation et de l'analyse statistique.
Mme Barrados est accompagnée aujourd'hui de Mme Anne-Marie Robinson et de MM. Gaston Arsenault, Greg Gauld et Jacques Pelletier.
Nous sommes ravis de vous avoir parmi nous. Comme vous le savez, nous examinerons le Budget des dépenses de votre organisme et aurons des questions à vous poser sur vos nouvelles activités.
Madame Barrados je vous invite à prendre la parole.
Mme Barrados, présidente, Commission de la fonction publique du Canada : Je vous remercie, monsieur le président, de m'avoir invitée ici aujourd'hui pour discuter de nos prévisions budgétaires et de l'évolution de la nouvelle Commission de la fonction publique. Vous avez déjà présenté les personnes qui m'accompagnent.
[Français]
J'ai comparu devant ce comité en mai 2004 dans le cadre du processus de nomination requis en vertu de la nouvelle loi sur l'emploi dans la fonction publique. Suite aux résolutions du Sénat en mai et de la Chambre en avril, le gouverneur en conseil m'a nommée présidente de la Commission de la fonction publique le 28 mai 2004. Deux commissionnaires à temps partiel, de l'extérieur de la fonction publique, ont également été nommés, soit Manon Venant et David Sussman.
[Traduction]
Outre les documents budgétaires présentés au comité, j'aimerais attirer l'attention des sénateurs sur le rapport annuel de la Commission de la fonction publique, déposé le 19 octobre 2004, et sur deux rapports de vérification qui ont été publiés le même jour.
La Commission de la fonction publique est un organisme indépendant qui est responsable devant le Parlement. Créée en 1908, la Commission est chargée de veiller à ce que les nominations à la fonction publique du Canada soient fondées sur le principe du mérite et soient indépendantes du gouvernement au pouvoir. La Commission — et non les ministres — a été investie des pouvoirs exclusifs de nommer des fonctionnaires selon leurs compétences pour exercer leurs fonctions, et non parce qu'ils connaissent des membres du parti au pouvoir ou encore la personne responsable du recrutement. La CFP est également chargée de maintenir l'impartialité politique de la fonction publique. Les fonctionnaires qui désirent briguer les suffrages ou se porter candidats à des élections doivent obtenir la permission de la Commission et prendre un congé pour activités politiques. Nous ne relevons pas d'un ministre, sauf pour ce qui concerne la Loi sur la gestion des finances publiques et le dépôt de notre rapport annuel au Parlement.
L'adoption, en novembre 2003, de la Loi sur la modernisation de la fonction publique et la modification connexe de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique ont entraîné le transfert d'une partie des responsabilités de la CFP à d'autres organismes.
[Français]
Les programmes de perfectionnement professionnel, tels que le Programme de stagiaire en gestion, le Programme cours et affectations de perfectionnement et le programme Échanges Canada ont été confiés à l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique.
Les programmes de formation, tels Formation et perfectionnement Canada et Formation linguistique Canada, ont été cédés à la nouvelle École de la fonction publique du Canada.
[Traduction]
Les données du Budget principal des dépenses de 2004-2005 sont fondées sur une structure d'activités qui ne reflète pas les changements entrés en vigueur le 1er avril 2004. Le budget de 147 millions de dollars pour 2004-2005 devient en réalité 92 millions de dollars après le transfert des programmes : quelque 32 millions de dollars ont été transférés à la nouvelle École de la fonction publique et 23 millions de dollars à la nouvelle Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada. Notre organisation est maintenant plus petite et compte environ 900 équivalents temps plein. Nous avons toujours une structure régionale qui offre des services et assure une surveillance.
Notre Rapport sur les plans et les priorités décrit nos projets pour la prochaine année. Nous nous emploierons à mettre en œuvre la nouvelle Loi sur l'emploi dans la fonction publique, ainsi qu'à moderniser la prestation des services et la structure de gestion de la Commission de la fonction publique.
En vertu de la nouvelle Loi, nous transformons la Commission afin qu'elle se concentre de plus en plus sur son mandat fondamental, soit celui de préserver l'intégrité de la dotation dans la fonction publique.
Jusqu'à maintenant, nous avons pris certaines mesures, dont : le renouvellement de notre capacité de vérification et la création d'une nouvelle Direction générale de la vérification; le maintien de notre fonction d'enquête permanente; l'amélioration de notre reddition de comptes au Parlement; la nomination de deux commissaires à temps partiel de l'extérieur de la fonction publique pour offrir des conseils et une orientation stratégique, comme je l'ai mentionné plus tôt; et la conception d'un nouveau mode de prestation de services.
[Français]
Afin de mieux départager nos rôles de surveillance de la dotation dans la fonction publique et de prestation de services aux ministères et organismes gouvernementaux, un nouvel organisme de services sera créé au sein de la CFP d'ici le 1er avril 2005. Il relèvera moins des commissaires et traduira un nouveau mode de prestation de services.
Dans un système de dotation où les pouvoirs sont entièrement délégués, les ministères pourront choisir le mode de prestation de services qui leur convient le mieux.
[Traduction]
D'autres changements seront apportés en raison de la mise en œuvre intégrale de la Loi sur la modernisation de la fonction publique. Au cours de la prochaine année, nous transformerons notre Direction générale des enquêtes, qui traite annuellement plus de 1 100 appels et 300 requêtes sur la dotation, en une composante qui enquête sur des éléments liés à la dotation externe et aux activités politiques partisanes. Nous présenterons plus de rapports de vérification au Parlement, et tous les pouvoirs de dotation seront délégués d'ici le 1er décembre 2005.
[Français]
Nous travaillons avec l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique, l'École de la fonction publique et le Conseil du Trésor à la mise en œuvre de la Loi sur la modernisation de la fonction publique. La CFP réalise comme prévu son plan de mise en œuvre pour élaborer des cadres stratégiques, tenir des consultations exhaustives et renseigner les ministères.
[Traduction]
J'aimerais maintenant vous parler de notre rapport annuel, qui a été déposé le 19 octobre dernier. C'est le premier que je présente à titre de présidente de la Commission de la fonction publique. Dans ce rapport, on constate que, de façon générale, la dotation à la fonction publique respecte les valeurs liées aux résultats que sont la compétence, l'impartialité et la représentativité, ainsi que les valeurs liées aux processus que sont l'équité, l'égalité des chances et la transparence. Le rapport révèle que, dans un système où des milliers de mesures de dotation sont prises, les gestionnaires, dans l'ensemble, recrutent du personnel compétent tant de l'extérieur que de l'intérieur de la fonction publique.
Il existe cependant des problèmes qui doivent être résolus si cette tendance doit se poursuivre, comme la planification inadéquate des ressources humaines dans les ministères; la capacité insuffisante en ressources humaines dans de nombreux ministères; l'augmentation continue des contrats d'embauche à court terme; le nombre limité de diplômés universitaires qui se voient offrir un poste par l'entremise du Programme de recrutement postsecondaire; l'application de la politique sur la zone de sélection et les progrès trop lents en ce qui concerne l'augmentation de la représentation des membres des minorités visibles dans les rangs des cadres de direction au gouvernement.
Ma principale préoccupation est la suivante : la capacité insuffisante en ressources humaines et les lacunes relatives à la planification dans les ministères et organismes. Il est d'autant plus urgent de régler ces problèmes que la Loi sur la modernisation de la fonction publique sera pleinement entrée en vigueur en décembre 2005.
La mise en œuvre de la Loi sur la modernisation de la fonction publique, et en particulier de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique, apportera des changements importants au système de dotation. Les ministères devront planifier davantage à long terme leurs besoins en matière de ressources humaines et déterminer la façon de combler ces besoins. La planification des ressources humaines se doit de devenir la norme et de faire partie intégrante de la planification organisationnelle.
Je voudrais à présent me pencher sur certaines constatations du rapport, en particulier sur le recours fréquent aux contrats d'embauche à court terme et la sous-utilisation du recrutement postsecondaire.
L'an passé, il y a eu une diminution de l'embauche d'employés permanents et un recours soutenu à l'embauche de personnel temporaire. Au cours de l'exercice financier 2003-2004, il y a eu près de 40 000 nominations au sein de la fonction publique fédérale. De ce nombre, 4 368 étaient pour des postes à durée indéterminée, c'est-à-dire des emplois permanents, et 9 941 autres nominations étaient pour des étudiants. Le reste, soit près des deux tiers, concernait des emplois à court terme.
L'embauche de personnel temporaire représente souvent une solution moins coûteuse et plus rapide que le recrutement de personnel permanent. Toutefois, une fois embauchés, les employés temporaires peuvent souvent obtenir des postes permanents. Dans ce cas, il se peut qu'ils soient avantagés par rapport à d'autres personnes aussi qualifiées pour occuper le poste, ce qui compromet l'égalité des chances. De plus, le recours à des contrats à court terme ne s'appuie pas sur le même processus rigoureux et transparent d'évaluation. En outre, les gestionnaires ne profitent pas pleinement de la souplesse du système. Le Programme de recrutement postsecondaire est une excellente façon de préqualifier de jeunes Canadiens. Il est cependant sous-utilisé.
[Français]
Au cours de l'automne 2003, environ 22 000 diplômés des universités au pays et à l'étranger ont présenté leur candidature par l'entremise du Programme de recrutement postsecondaire. Bien que la CFP ait présenté environ 9 000 candidats et candidates testés aux ministères, moins de 500 ont été embauchés et moins de 300 d'entre eux ont été nommés à des postes de durée indéterminée.
Nous continuons de nous inquiéter de la faible utilisation de ce programme par les gestionnaires et du manque d'accès aux emplois dans la fonction publique des récents diplômés universitaires qui en résulte. Nous examinons d'autres moyens de promouvoir davantage le programme comme source de recrutement et d'obtenir des engagements fermes des ministères et organismes à considérer et à utiliser ce programme valable.
[Traduction]
Au moment de déposer notre rapport annuel, nous avons publié deux autres rapports de vérification. J'aimerais aborder en premier l'un de ces rapports, soit le rapport de suivi sur la vérification menée au Commissariat à la protection de la vie privée.
Le Bureau du vérificateur général et la Commission de la fonction publique ont publié, il y a un peu plus d'un an, les résultats des vérifications menées au Commissariat à la protection de la vie privée. Notre rapport, un an plus tard, résume les interventions que la CFP a faites depuis au Commissariat à la protection de la vie privée et qui consistent à la fois en des vérifications et des enquêtes.
Depuis notre vérification initiale, nous avons obtenu une excellente collaboration des cadres supérieurs du Commissariat à la protection de la vie privée. Ils m'ont avoué qu'ils avaient connu une année difficile, et je crois qu'ils n'ont ménagé aucun effort pour mettre en oeuvre les changements que nous avions demandés. Néanmoins, un suivi de la vérification initiale de la dotation a révélé que le Commissariat à la protection de la vie privée n'avait pas fait suffisamment de progrès par rapport aux recommandations. Les activités de suivi de la CFP se poursuivront donc jusqu'à ce que nous décidions que le commissariat satisfait aux conditions de rétablissement des pouvoirs de dotation qui lui étaient délégués.
Nous avons également mené des enquêtes séparées en vertu d'une partie distincte de la loi. Celles-ci nous ont permis de conclure que, malgré un manque de respect des valeurs de dotation et de l'entente concernant la délégation des pouvoirs et la responsabilisation en dotation, huit des neuf nominations étaient conformes à la Loi sur l'emploi dans la fonction publique ou que des mesures correctives n'étaient pas justifiées parce que les personnes concernées avaient quitté la fonction publique ou possédaient les qualités requises pour les postes qu'elles occupaient.
Dans un cas, la nomination a été jugée non conforme à la Loi, ce qui a entraîné la mise sur pied d'un comité d'enquête et la révocation de la nomination. Le comité d'enquête a conclu que le candidat au poste d'adjoint administratif et l'ancien directeur général s'étaient livrés à des pratiques de dotation frauduleuses parce que ce dernier avait remis au candidat les questions et réponses de l'examen écrit.
[Français]
Maintenant, je voudrais parler de notre dernier rapport qui porte sur les pratiques de dotation de la Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire du Canada. La Commission d'examen des plaintes a été mise sur pied en 1998 en réponse à l'engagement pris par le gouvernement fédéral de moderniser le système de justice militaire. Elle assure une supervision civile indépendante de la Police militaire des Forces canadiennes.
Au 31 décembre 2003, la commission des plaintes avait un effectif de 25 personnes nommé en vertus de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique. Par suite de plaintes reçues et de problèmes relevés dans les rapports et soumis par la commission des plaintes, nous avons amorcé une vérification en février 2004. Nos consultations indiquent que la commission des plaintes a abusé des pouvoirs de dotation qui lui avaient été délégués.
[Traduction]
La vérification a révélé de sérieuses lacunes dans l'application des politiques et pratiques de dotation, notamment : des dossiers incomplets; des nominations sans concours et insuffisamment justifiées; un droit d'appel excessivement restreint; et des reclassifications rétroactives. La direction n'avait pas non plus réglé divers problèmes, comme le mauvais moral du personnel, les craintes de représailles et le harcèlement présumé.
En raison de ces sérieuses lacunes, nous avons retiré à la Commission d'examen des plaintes les pouvoirs qui lui avaient été délégués pour toutes les nominations à des postes de cadre et lui avons imposé des conditions relativement à la dotation des postes autres que ceux de direction.
En terminant, j'aimerais souligner que le rendement récent en matière de dotation de ces deux organismes de petite taille n'est pas caractéristique de la situation à l'échelle de la fonction publique. L'atteinte et le maintien d'une fonction publique professionnelle dépendent de la qualité des personnes embauchées. Il nous revient de veiller à ce que cela se poursuive.
C'est sur ces propos que je termine mes observations préliminaires. Nous serons heureux de répondre aux questions des sénateurs sur n'importe quel aspect de notre travail.
Le président : Je vous remercie de ce survol très intéressant. Dans votre introduction, vous avez mentionné que votre nomination était récente et que deux commissaires à temps partiel de l'extérieur de la fonction publique avaient été nommés, soit Manon Vennat et David Zussman. Plus tard dans votre exposé, vous avez dit qu'une de vos préoccupations était «les progrès trop lents en ce qui concerne l'augmentation de la représentation des membres des minorités visibles dans les rangs des cadres de direction au gouvernement».
Dans le passé, il y a toujours eu au moins un membre des minorités visibles parmi les commissaires de la Commission de la fonction publique. Est-ce toujours le cas? Sinon, pourquoi? Y a-t-il actuellement des représentants des minorités visibles dans les rangs des cadres de la fonction publique?
Mme Barrados : Mes deux commissaires ne sont pas membres de minorités visibles. La Loi exige que nous ayons au moins deux commissaires en plus du président. Nous avons encore l'occasion de nommer d'autres commissaires à temps partiel, et j'espère que nous le ferons.
Le président : Sont-ils nécessaires ou va-t-on simplement faire une nomination?
Mme Barrados : Pour commencer, nous devons élaborer une nouvelle structure de gouvernance et une approche novatrice. Les deux personnes qui ont été nommées commissaires à temps partiel viennent du groupe consultatif auprès du greffier chargé d'étudier la Loi sur la modernisation de la fonction publique. Les gens retenus faisaient partie du bassin de personnes ayant participé au processus.
Ce groupe ne comptait pas de représentant bilingue d'une minorité visible; il faut savoir que j'essayais de trouver quelqu'un de bilingue également. Ceci dit, nous devons nous demander si la Commission est pleinement représentative de la population canadienne, au même titre que nous nous posons la question de savoir si la fonction publique est totalement représentative de la population de notre pays. C'est pour cette raison que nous devrions, à mon sens, élargir la Commission. Nous devons faire en sorte qu'elle adopte, pour commencer, cette nouvelle façon de travailler.
Votre deuxième question consistait à savoir s'il y a des représentants des minorités visibles parmi les cadres supérieurs de la fonction publique. Oui, il y en a. Plusieurs occupent des postes de directeur ou de directeur général. Lors d'une autre conversation, vous m'aviez demandé s'il y a, parmi les vice-présidents, des représentants des minorités visibles. La réponse est : «pas encore».
Le sénateur Ringuette : J'aimerais poser quelques questions.
Le président : Nous savons tous que vous vous intéressez de très près à ce dossier.
Le sénateur Ringuette : Madame Barrados, c'est toujours un plaisir que de vous rencontrer; l'égalité des chances dans la fonction publique vous tient beaucoup à coeur.
Dans votre déclaration, vous avez dit, et je vous cite :
nous transformerons notre direction générale des enquêtes qui traite annuellement plus de 1 100 appels et 300 enquêtes sur la dotation en une composante qui enquête sur des éléments liés à la dotation externe et aux activités politiques partisanes.
Allez-vous également faire enquête sur le favoritisme bureaucratique?
Mme Barrados : En vertu de la nouvelle loi, nos pouvoirs d'enquête ont été modifiés. Actuellement, ces pouvoirs s'étendent à toutes les nominations internes et externes. À l'avenir, les enquêtes portant sur les nominations internes relèveront des ministères, avec la possibilité de s'adresser au tribunal. La Commission de la fonction publique se chargera des enquêtes relatives aux nominations externes ainsi qu'au favoritisme politique.
En outre, nous aurons un mandat de vérification. Nous entendons pleinement examiner les problèmes de favoritisme car c'est bien de cela dont il s'agit. Nous nous sommes fixé comme objectif d'avoir terminé notre première série de travaux pour le prochain rapport annuel.
Le sénateur Ringuette : Je me rends compte que le favoritisme bureaucratique n'était pas couvert par le projet de loi C-25. Je me demandais comment vous alliez aborder cette question étant donné qu'un rapport a été publié l'année dernière au sujet de l'embauche d'étudiants pour des emplois d'été. Le vérificateur en était arrivé à la conclusion que l'embauche de 25 p. 100 des étudiants occupant des emplois d'été était attribuable à du favoritisme bureaucratique. Ce n'est vraiment pas juste.
Mme Barrados : La nouvelle loi est assez claire quant au type de valeurs auxquelles nous sommes censés adhérer. Les processus décisionnels entourant les nominations doivent être justes et assurer la représentativité des différents groupes. Cela fait toujours partie du mandat de la nouvelle Commission de la fonction publique.
C'est la Commission de la fonction publique elle-même qui a effectué la vérification relative au travail d'été des étudiants. Nous continuons de surveiller l'évolution de la situation.
Le sénateur Ringuette : La dernière fois que vous vous êtes présentée devant ce comité, nous avons parlé du fait que les ministères devaient soumettre des plans en ressources humaines pour se voir déléguer les pouvoirs d'embaucher, de congédier et d'assurer toutes les fonctions inhérentes aux ressources humaines.
Combien de ministères ont déposé de plans en matière de ressources humaines?
Mme Barrados : Sénateur Ringuette, je ne pense pas qu'il soit véritablement nécessaire d'obtenir une proposition pour approuver les plans. Ce que nous voulons, c'est que les plans soient en place.
Nous sommes engagés dans un processus avec d'autres intervenants du système afin de déterminer, grâce à nos nombreux échanges, ce qui doit apparaître dans ces plans, car pour être vraiment utiles, ces plans ne doivent pas se limiter aux ressources humaines; ils doivent assurer l'intégration complète entre les ressources humaines et la planification stratégique. Sans cela, ils n'ont pas beaucoup de valeur.
Nous sommes en train de déterminer ce que devraient contenir ces plans avant de déléguer les pouvoirs correspondants. C'est donc en cours de réalisation. Nous voulons trouver le juste équilibre entre les éléments essentiels et la reconnaissance que l'ensemble du processus de planification stratégique au sein du gouvernement n'est pas une tâche aussi facile qu'on pourrait le croire. Nous ne voulons pas nous empêcher d'aller de l'avant avec la délégation des pouvoirs. Les discussions à cet égard suivent donc leur cours.
Le sénateur Ringuette : Pourriez-vous me dire combien de ministères ont mis en œuvre un plan?
Mme Barrados : En fait, non. D'après ce que nous avons pu observer jusqu'à présent, l'accent n'est pas suffisamment mis là-dessus, et cela nous préoccupe. Ce n'est pas encore une obligation, et même si on gère bien la situation, on doit avoir un plan en place.
Nous avons demandé précisément ce que ces plans prévoyaient pour accroître le nombre de représentants des minorités visibles, et nous avons déjà obtenu quelques réponses, mais nous n'avons pas fait de demande générale pour savoir où en étaient les plans. Nous sommes en train d'élaborer, avec les autres intervenants, une liste des éléments à prendre en considération. Le plan en fait partie.
M. Gauld voudra peut-être vous en dire un peu plus sur l'état actuel des choses en ce qui concerne cet élément de planification.
M. Greg Gauld, vice-président, Direction générale de la politique et responsabilisation de matière de mérite, Commission de la fonction publique : Comme l'a expliqué la présidente, nous nous intéressons beaucoup au lien entre la planification des ressources humaines et la planification stratégique.
Nous nous concentrons véritablement sur la nouvelle mesure législative et nous cherchons, avec les autres intervenants, le moyen d'avoir suffisamment d'éléments en place pour que le nouveau système offre les avantages qu'il est censé apporter avec la nouvelle loi. C'est dans cette optique qu'ont été créés plusieurs groupes de travail oeuvrant sous l'égide de différents comités de sous-ministres pour examiner la planification aux ressources humaines et d'autres outils nécessaires au nouveau régime de dotation.
Il y a donc beaucoup de travaux en cours. Nous avons tenu deux séances de consultation majeures avec les ministères, en juin et septembre, auxquelles ont assisté plus de 300 participants à chaque fois; une autre rencontre est d'ailleurs prévue d'ici environ 10 jours pour faire le point sur la situation. En réalité, dans 10 jours, nous en saurons beaucoup plus sur la planification des ressources humaines dans les ministères.
Le sénateur Ringuette : Dans un autre ordre d'idée — qui a quand même à voir avec la question qui nous occupe —, sachez que j'ai reçu l'appel d'un Néo-Brunswickois qui avait été contacté par une agence de recrutement de cadres de Gatineau pour un emploi dans la fonction publique. Pourquoi ne passe-t-on pas par le processus normal d'embauche à la fonction publique? Combien de ministères ont-ils recours aux services de chasseurs de têtes pour combler leurs postes?
Mme Barrados : C'est une bonne question. C'est vrai qu'ils font appel à des chasseurs de têtes. La Commission ne s'est pas objectée au recours aux chasseurs de têtes lorsqu'il n'y a pas d'autre structure en place.
Cela m'amène à vous expliquer ce que nous voudrions mettre en œuvre au chapitre de la prestation de services. Actuellement, c'est la Commission de la fonction publique qui s'occupe du recrutement externe et c'est par elle que tout passe. D'ici décembre 2005, ces pouvoirs seront complètement délégués. Nous aurons la capacité d'aider les ministères en leur offrant des services, lesquels comprendront aussi la possibilité de faire appel à des agences de recrutement de cadres. À l'heure actuelle, le processus est le suivant : nous affichons un poste; nous recevons des candidatures; nous traitons les demandes et nous choisissons un candidat. Plusieurs ministères considèrent toutefois que pour certains domaines spécialisés, ils n'ont pas accès au bassin de personnes ayant le profil recherché. Ce sont précisément ceux-là qui ont tendance à s'adresser à des chasseurs de têtes.
Peut-être que M. Pelletier pourra vous expliquer plus en détail nos objectifs en la matière car il est évident qu'il y a un manque ou un besoin au sein du gouvernement.
M. Jacques Pelletier, vice-président, Direction générale des Services de recrutement et d'évaluation, Commission de la fonction publique : Il y a et il y aura encore des manques importants. Nous pensons que d'ici cinq à six ans, et nous l'avons mentionné dans le rapport annuel, environ 40 p. 100 des fonctionnaires seront en âge de prendre leur retraite. Le gouvernement fédéral devra alors livrer concurrence à toutes les organisations du pays pour obtenir les travailleurs les plus qualifiés et les plus compétents.
Comme l'a indiqué la présidente, nous savons également qu'en décembre 2005, les ministères se verront déléguer le pouvoir de s'occuper de leur recrutement externe. Ils pourront donc s'adresser à nous ou décider d'aller voir d'autres agences pour embaucher du personnel de l'extérieur. Ces pouvoirs leur seront délégués. Mais nous voulons être en mesure de leur offrir la meilleure agence de recrutement qui soit; c'est la raison pour laquelle nous sommes en train de renforcer cette organisation, comme l'a fait remarquer la présidente. Elle sera mise en œuvre d'ici avril 2005. Nous devrons passer en revue tous nos programmes de recrutement pour nous assurer qu'ils répondent autant aux besoins actuels que futurs du gouvernement fédéral. Nous devons penser à l'avenir. Nous disons que les ministères doivent se doter de plans en ressources humaines, mais avec ces plans, nous devons anticiper et nous assurer d'être en bonne position pour recruter les meilleurs candidats possibles pour le gouvernement fédéral.
Le sénateur Ringuette : Puis-je vous interrompre et continuer de vous raconter l'histoire de mon Néo-Brunswickois? Ce jeune homme est un spécialiste. Il n'a jamais vu le poste correspondant à ses compétences particulières affiché sur le site Web du gouvernement. Et même si cela avait été le cas, il n'aurait pas pu poser sa candidature en raison des restrictions géographiques. Il était l'un des 22 000 diplômés d'université de ce programme. On ne l'a jamais appelé pour une entrevue.
Tout cela pour vous dire que les ministères font déjà ce qu'ils veulent. Ce que nous voyons maintenant, cette «souplesse», sera encore pour eux une excuse parfaite. Au-delà des différents processus de présentation des demandes d'emploi, la souplesse liée à l'embauche d'étudiants diplômés et tout le reste, les ministères continueront d'embaucher 40 000 personnes par an, sans passer par vous. J'ignore combien d'argent ils dépensent pour retenir les services d'agences de recrutement qui font essentiellement votre travail.
Je trouve le système très inefficace. Vous connaissez tous les arguments que j'ai défendus par le passé au sujet des restrictions géographiques liées à l'embauche, qui consistent à éliminer des candidats valables et productifs parce qu'ils ne vivent pas dans un périmètre de 50 kilomètres autour d'Ottawa. Je me bats contre cela.
M. Pelletier : Évidemment, sénateur, je ne peux répondre à votre question au sujet du Néo-Brunswickois dont vous avez parlé parce que je ne connais pas son dossier. Si vous me donniez plus de détails, je pourrais m'informer. Au cours de l'année 2003-2004, le gouvernement fédéral a recruté plus de 15 000 travailleurs occasionnels, et la personne à laquelle vous faites référence pourrait en faire partie. L'année dernière, le gouvernement a recruté à l'extérieur plus de 15 000 employés occasionnels. J'imagine que cela préoccupe la présidente, qui a évoqué un peu plus tôt ce type de recrutement par rapport à l'embauche d'employés permanents. Mais pour recruter des employés permanents, ils sont censés s'adresser à la Commission de la fonction publique.
Mme Barrados : L'autre élément qui me préoccupe tient au fait que nous avons beaucoup investi dans le programme de recrutement postsecondaire et que personne ne l'utilise. C'est l'un des points sur lequel je n'ai cessé d'insister. J'en parle aux cadres supérieurs qui se plaignent de ne pas obtenir rapidement les ressources humaines dont ils ont besoin, alors qu'ils ne se prévalent pas de ce programme.
L'histoire que vous nous avez racontée, sénateur, m'attriste. En effet, je suis désolée de voir que même lorsqu'on a accès à une personne qualifiée, on dépense de l'argent dans des chasseurs de têtes pour trouver quelqu'un de semblable. Cela n'a aucun sens.
Le sénateur Ringuette : Ce qui me préoccupe, en plus des restrictions géographiques qui s'appliquent encore aujourd'hui — alors qu'on nous avait promis de les éliminer il y a un an —, c'est qu'on avait mis de côté 11 millions de dollars pour la mise en œuvre du projet de loi C-25, millions destinés à l'actualisation des technologies pour faire disparaître les barrières géographiques. Un an plus tard, rien n'a été fait et nous apprenons que 40 000 employés de la fonction publique ont été embauchés par d'autres services que les vôtres. Si ce n'est pas du favoritisme bureaucratique, qu'est-ce que c'est?
Mme Barrados : Puis-je vous parler de la zone de sélection nationale?
Le sénateur Ringuette : Oui, je vous en prie.
Mme Barrados : C'est aussi pour moi un motif de mécontentement, je dois l'avouer. Lorsque j'ai commencé, j'ai rencontré différentes personnes sur la Colline qui m'ont toutes exprimé leur déception à l'endroit des restrictions géographiques appliquées au choix des personnes pouvant participer à un concours. J'ai interpellé tout le monde dans l'organisation au sujet des raisons pour lesquelles nous faisions ceci et sur la façon de corriger le tir. Le problème est évident. Le fait est qu'il y a encore beaucoup d'emplois très intéressants pour plein de gens au gouvernement fédéral — ce qui signifie qu'on reçoit énormément de candidatures. C'est la raison pour laquelle on s'efforce de limiter le nombre de candidatures à un seuil gérable.
Je sais que cela contredit le fait que nous voulions une plus grande représentativité au sein de la fonction publique et que, pour l'atteindre, nous cherchions des gens de partout au pays. Dans ce cas-ci, la solution qui s'impose est l'amélioration des outils technologiques pour que tous ceux qui satisfont aux exigences des postes puissent poser leur candidature, sans restriction géographique.
Le gouvernement s'était engagé à mettre 40 millions de dollars de côté.
Le sénateur Ringuette : C'était pour la mise en œuvre complète du projet de loi C-25, n'est-ce pas?
Mme Barrados : Non, cet argent était réservé au recrutement par voie électronique. Nous avons obtenu 3,2 millions de dollars pour faire une évaluation préliminaire et préparer un plan détaillé, mais nous ne pouvons pas aller plus vite que le processus d'approbation. On nous demande de passer par le processus d'approbation du Conseil du Trésor.
En accélérant le processus, nous avons réussi à gagner une année. Nous avons progressé, parce que nous sommes conscients des préoccupations de chacun, mais je sais que ce n'est pas encore assez rapide pour vous, sénateur.
Le sénateur Harb : Pour commencer, j'aimerais féliciter Mme Barrados pour sa nomination. J'ai eu le plaisir de travailler avec elle pendant plusieurs années aux comptes publics. C'est une personne extrêmement professionnelle, intelligente, dévouée et compétente. Nous pouvons nous en réjouir. J'aimerais également profiter de l'occasion pour féliciter les deux autres membres du conseil et de la direction qui l'accompagnent.
Ma première question concerne le projet de loi C-25. Votre ancien président avait des réserves au sujet du mérite. Il a parlé de l'équilibre entre l'aspect compétitif et non compétitif du principe du mérite. Même si nous voulions protéger cela, j'aimerais savoir s'il y a eu des progrès à ce chapitre, c'est-à-dire si vous partagez les mêmes vues que les anciens présidents ou si vous avez vos propres opinions là-dessus.
Mme Barrados : Je vous remercie pour vos compliments, sénateur.
On se demande toujours comment protéger le mérite. Dans l'ancienne loi, il n'y avait pas de définition du mérite. Celui-ci a été caractérisé au terme de procédures et de décisions juridiques qui nous en ont donné une définition très technique et axée sur les processus. C'est la raison pour laquelle on s'est efforcé de définir le mérite dans la nouvelle loi.
Un des éléments clés de la définition est qu'il existe un plan, comme l'a fait remarquer le sénateur Ringuette, ainsi qu'un énoncé clair des besoins et de ce qu'un ministère ou un ministre peut faire en matière de ressources humaines. Il y a donc un énoncé des besoins et une plus grande souplesse sur la façon de les combler. On s'attend toujours à ce que le processus demeure transparent. Les ministères devront agir de manière transparente et rendre des comptes sur leurs façons de combler les postes à la lumière de cette nouvelle définition du mérite.
Y a-t-il un élément de risque supplémentaire? Probablement que oui. C'est toujours le cas lorsqu'on délègue des pouvoirs au lieu d'en garder le contrôle. Cela peut fonctionner, mais il faut être vigilant quant au respect des responsabilités. Je dois développer ma propre capacité de vérification. D'ailleurs, j'ai plus de vérificateurs consacrés à ces questions. Nous devons examiner de près les comptes rendus d'activités que nous recevons, comme nous l'avons fait dans le cas de la police militaire, et lorsque les choses ne concordent pas ou ne fonctionnent pas comme elles le devraient, une intervention s'impose.
Quand les risques sont accrus d'un côté, il faut essayer d'agir de l'autre. Mais je pense que c'est faisable.
Le sénateur Harb : Ma deuxième question a à voir avec la notion de recrutement géographique. Il est impératif que nous allions au-delà de l'évidence. Nous sommes dans une situation où nous ne faisons pas seulement face à des questions de recrutement géographique, mais aussi à des questions de migration. Au cours des 25 à 40 dernières années, nous avons assisté à l'exode rural des Canadiens et ce pour plusieurs raisons, dont l'accroissement des débouchés dans les villes et une diminution des services dans les zones rurales.
Dans le passé, la population canadienne a quitté la campagne pour s'installer en ville. Cette embauche régionale visait notamment à ne pas exclure les gens des autres parties du pays. Pourtant, elle a eu l'effet contraire. S'il y a un poste vacant à l'Île-du-Prince-Édouard, il n'est pas ouvert à tous les citoyens du Canada; il permet plutôt à un résident de l'Île-du-Prince-Édouard de poser sa candidature et d'être en concurrence avec un autre résident de l'Île-du-Prince- Édouard qui y cherche un emploi.
Le réexamen de l'embauche régionale doit se faire avec prudence. Plutôt que d'élargir ce principe, nous devons garder à l'esprit qu'il permet aussi de protéger des emplois en milieu rural et dans différentes régions du pays, que si ce mécanisme d'embauche régionale n'existait pas, ces emplois ne seraient peut-être pas protégés.
Ce n'est un secret pour personne qu'il y a plus de gens qui détiennent un diplôme universitaire en milieu urbain qu'en milieu rural. Nous savons bien qu'il y a un plus grand bassin de compétences en ville que dans les autres régions du pays.
Je veux être prudent dans la façon dont nous abordons la question. Si nous voulions que certains postes d'un niveau donné de la fonction publique soient ouverts à tous, sans restriction géographique, ce serait légitime. Mais je vous prie de bien réfléchir avant d'agir sous la pression d'intérêts politiques, publics ou individuels. Nous devons défendre les intérêts de l'ensemble du pays. Ces intérêts exigent parfois, pour des raisons économiques, de planification et pour l'intérêt du pays à long terme, une certaine discrimination et la création de conditions avantageuses pour certaines parties de la population, même si elles en désavantagent d'autres.
Enfin, à la fin des années 80, j'étais député de cette circonscription. J'ai posé la même question au ministre du Revenu de l'époque, Otto Jelinek. Il m'a rappelé la politique du gouvernement d'alors, avec laquelle j'étais d'accord, et qui consistait à protéger les petites collectivités non urbaines.
Mme Barrados : Il faut aussi tenir compte des coûts. Le déplacement d'individus pour occuper des emplois et participer à des concours doit être pris en compte. À l'heure actuelle, nous avons ouvert à la sélection nationale tous les postes de direction et ceux du niveau inférieur aux postes de direction.
Ce qui se passe, c'est qu'Internet est devenu l'outil le plus couramment utilisé. Entre 88 et 90 p. 100 de nos candidats transmettent leur candidature par Internet. Les gens voient toutes les offres d'emploi, ce qui exerce une pression vers l'élargissement des zones de sélection.
Nous avons l'intention de combler les postes d'Ottawa d'abord. Nous convenons tous qu'Ottawa devrait avoir une vaste représentation. Nous aborderons l'élargissement avec circonspection. De toute évidence, il y a un secteur du gouvernement qui veut créer des emplois dans les régions; y faisons-nous obstacle?
Nous consulterons amplement le gouvernement et les députés avant de nous engager dans cette voie. Nous sommes convaincus qu'il faut commencer par ouvrir les emplois à Ottawa, puis nous pourrons automatiser ce volet et voir comment il fonctionne.
Le président : La question de l'embauche à court terme dont vous avez parlé dans votre introduction est liée à ce problème. Si le gouvernement insiste pour que la plupart des employés qui sont embauchés soient temporaires — c'est un énorme gaspillage d'argent que d'embaucher un individu d'Halifax pour travailler en Colombie-Britannique après avoir payé une agence pour le recruter, puis de garder cet employé pendant une courte période et de le renvoyer ensuite en Nouvelle-Écosse. Ces deux questions sont reliées.
Le sénateur Murray : En ce qui concerne la nomination des deux nouveaux commissaires, Mme Vennat et M. Zussman, je les connais tous les deux : Mme Vennat depuis bientôt 40 ans et M. Zussman depuis moins longtemps. Il serait juste de dire qu'ils sont tous deux considérés par le gouvernement actuel comme fiables au plan politique. Je ne vous demanderai pas votre opinion là-dessus, et je n'ai pas d'objection à ce que les gouvernements nomment leurs propres amis s'ils sont compétents. Dans les deux cas, vous constaterez qu'ils sont exceptionnels, pourvu qu'ils aient du temps à consacrer à la Commission. Ils ont tous deux une vie professionnelle très chargée.
Il y a 25 ou 30 ans, Mme Vennat était très occupée à aider et à conseiller les entreprises du secteur privé de Montréal dans l'élaboration de politiques linguistiques. Elle pourrait vous être utile à cet égard. Je voulais vous interroger à ce sujet.
Il y a une lettre, dont le contenu a transpiré, que le dirigeant de Statistique Canada, M. Fellegi, vous a été adressée et dans laquelle il a exprimé des doutes sérieux à propos de la formation linguistique. Il estimait que les objectifs devenaient flous. Il a décrit des cas de dépression et de stress parmi ceux qui doivent passer les tests linguistiques sous peine de perdre leur emploi, et il a fait allusion à de nébuleuses exigences à l'égard de certaines formes grammaticales — trop de subjonctif, je suppose. Il était préoccupé. Il a souligné l'explosion des coûts. À son avis, l'objet des tests devrait changer. Il a dit que ce qui comptait, c'était la capacité de fonctionner, pas le test, et il tentait de promouvoir un processus d'évaluation raisonnable.
Je présume que vous avez répondu. Ces deux lettres ont suscité des commentaires. Je ne suis pas certain qu'elles aient été rendues publiques. Si ce n'est pas le cas, je pense qu'elles le devraient. Nous ne devrions pas nous contenter d'extraits plus ou moins exacts. Je pense que nous souhaitons voir ces lettres.
Je crois aussi comprendre qu'un groupe de sous-ministres adjoints se sont attaqués à ce dossier. J'aimerais que vous nous éclairiez à ce sujet. M. Fellegi est un champion de longue date du bilinguisme dans la fonction publique et de la dualité linguistique. J'en suis moi-même un ardent défenseur depuis de nombreuses années. Je m'inquiète de tout ce qui pourrait compromettre un consensus qu'il a fallu 35 ans pour bâtir, parfois avec beaucoup de difficulté — graduellement, c'est certain — et qui est encore plutôt fragile, mais qui est une réalité dans tout le pays. S'il règne un sentiment généralisé d'injustice ou de traitement inique, il est important de le dissiper publiquement et le plus rapidement possible. Que pouvez-vous nous dire à ce sujet?
Mme Barrados : Si je peux me permettre un commentaire à propos des commissaires, ils ont certainement le temps, ou prennent le temps, d'assister aux réunions de la Commission. Nous y consacrons environ deux jours par mois. Nos réunions durent une journée entière. En général, nous nous rencontrer le soir précédent. Ils m'aident beaucoup en m'offrant des conseils et une orientation stratégiques, et en discutant des politiques de la Commission. Je suis très satisfaite. Les choses semblent fonctionner rondement.
En ce qui concerne le français, la lettre que j'ai reçue de M. Fellegi est l'écho de nombreux commentaires que j'ai reçus. Quand j'ai été nommée, les gens se sont fait un devoir de me parler de leur frustration à l'égard de la formation et des tests linguistiques, en grande partie dans la mesure où sont obligatoires pour occuper certains emplois. Les candidats doivent se conformer aux exigences linguistiques parce qu'elles font partie des qualités requises. Le gouvernement a resserré sa position en disant qu'il attendait de ses gestionnaires qu'ils répondent aux exigences de la dotation impérative. Autrement dit, il faut être bilingue avant d'entrer en fonction et ce n'est que dans certaines circonstances précises qu'on donne à des titulaires le temps d'apprendre la langue. Ces politiques existent depuis longtemps, mais maintenant, le gouvernement les applique à la lettre et se montre moins patient.
Ce que M. Fellegi a exprimé, c'est la frustration de son personnel, de ses employés, qui trouvent les tests difficiles et qui estiment que la formation et le type de formation sont difficiles d'accès.
Nous prenons tout cela au sérieux. C'est une loi qui régit le cadre d'application des langues officielles. Nous n'y changerons rien. C'est l'affaire du Parlement. C'est là le consensus, et nous essayons de l'appliquer.
Beaucoup de mesures que nous prenons peuvent influencer l'application. Nous avons entrepris un vaste examen. M. Pelletier est l'un des coprésidents du comité responsable, à qui l'on a demandé de tout examiner. M. Pelletier pourrait peut-être prendre quelques minutes et décrire à l'intention des sénateurs le travail de ce comité ainsi que ses échéanciers.
Avant de lui céder la parole, je précise que nous vous enverrons les lettres, celle de M. Fellegi et ma réponse.
Le président : Pouvez-vous les envoyer à la greffière?
Mme Barrados : Oui.
M. Pelletier : Merci. En effet, un groupe de 25 sous-ministres adjoints qui représentent l'ensemble de l'appareil gouvernemental, les grands et petits ministères, se réunit à tous les mois. Nous examinons la formation linguistique et les tests, ainsi que la gestion du bilinguisme. Nous ne nous occupons pas de la loi comme telle. Nous cherchons des moyens d'améliorer la situation. Nous rencontrons des représentants d'organismes externes et d'universités du Canada et de l'étranger, et nous tentons de définir les meilleures méthodes. Nous avons créé cinq sous-comités qui travaillent expressément à la formation et aux tests linguistiques.
Nous espérons que d'ici décembre, les sous-comités auront formulé des recommandations que nous examinerons et soumettrons à notre président. Ensuite, au début du printemps, nous prévoyons nous adresser au CHF, le Comité des hauts fonctionnaires, afin d'appliquer certaines de ces recommandations le plus tôt possible pendant le prochain exercice financier, c'est-à-dire en avril 2005.
Je dois dire que, sans attendre les résultats des travaux des sous-comités et du comité, la Commission a pris certaines mesures pour voir comment elle pourrait simplifier la vie des candidats aux tests. Ainsi, il y a environ deux mois, ils devaient attendre de nombreuses journées avant de subir les tests, mais nous travaillons à réduire ce délai qui, à l'heure actuelle, ne dépasse pas dix jours. Beaucoup de gens nous ont dit que l'attente causait de la frustration et du stress; nous avons donc éliminé cette longue attente.
Nous avons donné aux candidats plus d'information sur la nature du test — le contenu linguistique et ce à quoi ils doivent s'attendre. Il y a maintenant beaucoup plus d'information que par le passé.
Nous essayons d'affecter nos examinateurs dans un ministère, pour qu'ils connaissent mieux le ministère des candidats. La semaine dernière, par exemple, le ministère de la Défense nationale a accueilli six examinateurs qui y travailleront exclusivement. Ils seront en mesure de comprendre le jargon de la Défense. Nous le ferons aussi dans beaucoup d'autres ministères.
Nous avons obtenu d'excellents résultats en produisant un vidéodisque numérique, un DVD, pour expliquer l'objet du test. Nous le présentons surtout aux candidats de l'extérieur du ministère, parce que souvent, ils ne savent pas à quoi s'attendre. Le DVD nous permet de leur donner l'information appropriée.
Nous avons entendu dire que les tests sont plus difficiles qu'auparavant. Tous les tests sont enregistrés; nous avons donc étudié ceux qui ont été administrés il y a cinq ou dix ans. Nous avons demandé à nos examinateurs de revoir ces tests, sans leur dire qu'il s'agissait de tests anciens. Les résultats ont été à peu près les mêmes.
Le sénateur Murray : Voulez-vous dire que la moitié d'entre eux échouent?
M. Pelletier : Non. Je dis que les résultats se situent exactement au même niveau que ceux rapportés par l'examinateur précédent, il y a cinq ou dix ans. Ils sont à peu près les mêmes.
Le sénateur Murray : Il semble que le taux d'échec au test final soit élevé.
M. Pelletier : Pour le test de conversation en français, si je me souviens bien, il est d'environ 47 p. 100, comparativement à environ 52 p. 100 dans le passé.
Je dirais que les participants à la formation linguistique présentent un taux final de succès de 85 p. 100.
Le sénateur Murray : Je ne veux pas passer plus de temps là-dessus, mais si 25 sous-ministres se réunissent une fois par mois en cinq sous-comités, il est évident que vous irez au fond des choses. Ce qui me préoccupe, ce sont les gens qui sont directement touchés d'une manière ou d'une autre, de même que l'opinion publique, et ce dossier est devenu un enjeu public. La radio de CBC à Ottawa a fait une série de reportages sur la question il y a environ deux semaines. Il sera important de renseigner le public sur les mesures qui sont prises, afin de garder les choses en perspective. Je vais passer à un autre sujet, à moins que quelqu'un ait quelque chose à ajouter.
Pour ce qui est des chasseurs de têtes, je devrais peut-être connaître la fréquence à laquelle le gouvernement a fait appel à leurs services par le passé. J'ai des réserves à ce sujet. Je ne sais pas comment ces chasseurs de têtes sont rémunérés, ce que leurs services coûtent et comment ce coût est déterminé.
Le risque qu'une influence politique soit exercée indirectement n'est-il pas plus grand si on fait appel à des chasseurs de têtes?
À mon avis, les agences de recrutement souscrivent à une culture du secteur privé qui ignore tout des contraintes et des valeurs recherchées chez les titulaires de postes dans la fonction publique.
Ce sont peut-être là des questions que vos anciens collègues du Bureau du vérificateur général devraient examiner, si c'est une pratique courante dans la fonction publique. Pouvez-vous nous rassurer sur la manière dont les choses se dérouleront? Compte tenu de la délégation accrue des pouvoirs de la Commission de la fonction publique aux sous- ministres, nous fonçons peut-être vers des problèmes dont nous ne voulons pas.
Mme Barrados : Je ne connais pas très bien la structure des honoraires des chasseurs de têtes. D'après mon expérience en la matière, les honoraires sont généralement proportionnels au salaire du poste à combler.
À l'occasion de l'une de nos vérifications de la Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire, nous avons signalé que, quand on faisait appel à des chasseurs de têtes — ce qui était le cas pour certaines nominations — les dossiers n'étaient pas conservés et il n'y avait pas de documentation disponible, contrairement à ce à quoi nous nous attendons au gouvernement. Nous avons clairement indiqué à tous les intervenants que nous demeurons responsables pendant encore un an. En outre, nous préciserons aux ministères que lorsqu'ils font appel à une agence de recrutement, nous nous attendons à qu'ils conservent les dossiers et toute autre documentation pertinente sur le recrutement. Que le recrutement se fasse par le truchement d'une agence ou à l'intérieur même d'un ministère, la CFP s'attend à trouver la documentation pertinente. Nous y reviendrons certainement au cours des vérifications.
Compte tenu de la délégation, nous avons l'intention de demander à voir le dossier complet pour déterminer comment la nomination a été faite et si la recherche de candidats s'est déroulée selon la procédure établie, et nous nous attendrons à trouver un processus différent dans les cas très techniques. La Commission de la fonction publique a autorisé le recours à des chasseurs de têtes quand le poste appartient à un domaine spécialisé et que les tentatives de recrutement dans la fonction publique ont été infructueuses. Ce n'est pas tout le monde qui visite le site Web des emplois. Si un poste est affiché en ligne pendant deux semaines, les spécialistes que nous tentons d'attirer le verront-ils pendant cette période? Cela fait partie du dilemme. Je vous garantis que nous examinerons cette question, car nous nous soucions de la manière dont les gens emploient les pouvoirs qui leur sont délégués.
Quant aux honoraires et aux sommes dépensées, c'est une question qui s'adresse à Mme Sheila Fraser, la vérificatrice générale du Canada.
Le président : La CFP a un rôle de vérification, alors pourquoi ne pourrions-nous pas nous pencher là-dessus?
Mme Barrados : Nous pouvons nous pencher sur les questions du recours aux chasseurs de tête et sur la procédure menant aux nominations. Nous avons déjà envoyé des lettres pour annoncer que nous nous attendions à ce que les dossiers existent et à y avoir accès. Nous débordons de notre mandat lorsque nous demandons combien cela coûte. Nous pouvons poser des questions se rapportant aux coûts — combien coûte quelque chose à peu près — mais l'attribution des coûts et l'évaluation de leurs répercussions sur le budget global déborderaient de notre mandat.
Le président : Mme Fraser doit comparaître devant le comité au sujet du budget. Peut-être pourrions-nous lui poser la question à ce moment-là?
Dans votre exposé, madame Barrados, vous avez parlé du Budget principal des dépenses. D'après les chiffres, il semble que votre budget soit relativement modeste comparativement à ceux d'autres ministères. Le chiffre, au budget, de 147 millions de dollars pour 2004-2005 est devenu 92 millions de dollars après que divers postes aient été transférés à d'autres secteurs. Autrement dit, la FPC mesure maintenant le tiers, environ de ce qu'elle était auparavant.
La Chambre des communes étudie actuellement le projet de loi C-11, sur la dénonciation. J'ai lu le compte rendu du témoignage du président du Conseil du Trésor devant ce comité. Plusieurs questions ont été posées au sujet de la Commission de la fonction publique, qui sera chargée au moins en partie de la mise en œuvre de cette loi proposée sur la dénonciation des malfaiteurs. Quelles répercussions cela aura-t-il sur vos ressources? Si 32 millions de vos fonds ont été transférés à la nouvelle école et 23 millions à la nouvelle Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada, où diable pourriez-vous trouver l'argent nécessaire pour diriger des de la Commission de la fonction publique activités liées à la dénonciation?
Mme Barrados : Je vous remercie de poser cette question. L'autre chose que nous essayons de faire, avec nos 92 millions de dollars, c'est de trouver de l'argent pour la fonction de vérification. Nous avons fait une démarche interne pour trouver des moyens de faire des économies, en remettant nos méthodes en question pour mieux faire, en essayant de rationaliser de nombreux aspects de l'organisation et de réattribuer les fonds à la vérification.
Nous avons pu en faire beaucoup. Il y a un an, lorsque j'ai commencé, deux ou trois personnes s'occupaient des vérifications, et je sais qu'elles sont maintenant une vingtaine. Nous avons réalisé de grands progrès dans la nouvelle répartition des fonds à l'interne.
Si nous faisons attribuer la responsabilité de la protection des dénonciateurs, et un comité étudie le projet de loi actuellement, nous ne pourrions pas le faire avec notre budget actuel. Il nous faudrait de nouveaux fonds si l'organisation était chargée de cette fonction.
J'ai déjà exprimé les préoccupations à l'effet que le mandat, tel qu'il est proposé, est beaucoup plus vaste que l'expérience qu'a acquis le gouvernement avec les activités de M. Keyserlingk, alors il y a un élément d'inconnu au plan de l'ampleur de tout cela. Peut-être n'est-ce pas tellement, mais ce pourrait être assez énorme.
Je tiens, c'est certain, à ce qu'un mécanisme soit établi pour que le Conseil du Trésor nous donne plus d'argent, au besoin. Cependant, le gouvernement a accepté de nous donner plus d'argent pour nous charger de ce rôle, d'après une estimation approximative de ce que sera selon lui le volume initial.
Le président : Avez-vous des chiffres, pour cela?
Mme Barrados : Je pense qu'il s'agit de 3,2 millions de dollars.
Mme Anne-Marie Robinson, vice-présidente, Direction générale de la gestion ministérielle, Commission de la fonction publique : Environ 2 millions, et d'après ce que j'ai compris, une autre tranche de 600 000 $ pour l'augmentation de l'activité. Il faudrait encore que nous discutions avec le Conseil pour préciser ces chiffres, et que nous examinions ensemble les données, les types de poste, et cetera.
Mme Barrados : L'avantage d'assigner ce rôle à organisation existante comme la Commission de la fonction publique, ou toute autre organisation, c'est que nous avons cette infrastructure de services ministériels. Il n'y aurait qu'une hausse marginale des coûts, mais la fonction principale nécessiterait de nouveaux fonds pour de nouveaux employés.
Le sénateur Mercer : Je vous souhaite la bienvenue à notre réunion. J'ai deux observations à faire avant de vous poser deux questions. En ce qui concerne la formation en français, je connais un cas, ici à Ottawa. C'est un de mes anciens collègues, un Franco-ontarien dont la langue maternelle est le français. Pendant dix ans, il a été le porte-parole francophone d'une organisation pour laquelle je travaillais, en français écrit et oral. Il a, à ce que j'ai compris, été interviewé pour un poste dans un organisme indépendant au sein du gouvernement, et on lui a dit qu'il devrait passer un examen de français. Là, ça va encore. Par contre, et cela contredit ce que disait M. Pelletier, il a appris qu'il s'écoulerait plus d'un mois et demi avant qu'il puisse passer cet examen. Il vient de l'extérieur. Il n'est pas fonctionnaire actuellement.
Si c'est vrai, voici quelqu'un qui est prêt à saisir une autre opportunité qui se présenterait hors du gouvernement, et le gouvernement pourrait perdre encore un autre atout absolument fantastique. Il me semble que vous devriez surveiller cela.
En ce qui concerne les limitations d'ordre géographique, il y a une autre solution. Nous pourrions déménager le tout d'Ottawa, et j'aimerais bien voir cela, et nous serions tout à fait satisfaits d'avoir des restrictions régionales à Charlottetown, Halifax et Kamloops. Je m'inquiète beaucoup de ce que tout n'aille pas assez vite.
Le coût du déménagement de quelqu'un d'Halifax à Ottawa pour occuper un poste permanent, et je ne parle pas des emplois occasionnels ou à temps plein, le coût du déménagement d'un employé, est normal en affaires. C'est ce qu'il en coûte d'être le gouvernement du Canada.
Mon voisin, à Halifax, ou celui de mon chalet à Pictou, a tout autant le droit de venir travailler pour le gouvernement du Canada que quelqu'un qui vit sur la rue Metcalfe. J'en suis profondément convaincu. Si vous n'êtes pas équitable avec tous les Canadiens, vous manquez à vos devoirs. Je tenais à le dire.
J'ai deux questions à poser, dont une très précise. En ce qui concerne le Commissariat à la protection de la vie privée du Canada, vous avez parlé, dans vos observations, de l'ancien effectif de ce bureau. Je m'inquiète du sort de ces personnes.
Certains de ces employés ont été salis par les fautes qu'ont commises le commissaire à la protection de la vie privée lui-même et une ou deux personnes, dans leur mode d'administration de cette organisation. D'autres personnes en ont subi le contrecoup. Je m'inquiète de ces gens qui sont laissés derrière, et qui sont encore au Commissariat à la protection de la vie privée ou qui l'ont quitté parce qu'il n'était pas pratique de les y laisser.
Je crains qu'on ne se soit pas occupé d'eux, dans le sens où ils auraient d'autres emplois maintenant à la fonction publique, pour lesquels ils ont les compétences souhaitées. Pourriez-vous m'éclairer?
La deuxième question, que je vous pose à tous deux en même temps, concerne les chasseurs de tête. Je connais bien les chasseurs de tête. J'ai moi-même déjà été dans leur mire. C'est un processus assez intéressant. Je sais comment ils sont payés, parce que j'y ai moi aussi eu recours.
Voilà ce que j'aimerais savoir : est-ce que nous allons avoir un règlement, pour les chasseurs de tête? Est-ce qu'ils seront cinq, dix chasseurs de tête dans le pays auxquels les ministères pourraient faire appel parce qu'ils auront fait des offres de services au gouvernement? Dans l'affirmative, comment déterminerons-nous le domaine d'expertise?
J'ai passé 25 ans dans le monde des organisations sans but lucratif, en tant que cadre dans des organismes de charité et des ONG de tout le pays, et il n'y a au Canada qu'environ trois chasseurs de tête qui ont l'expertise qu'il faut pour embaucher des gens au niveau des cadres supérieurs. Je sais que cela s'applique aux finances, au recrutement dans le secteur juridique, aux ingénieurs, il n'y a que certains chasseurs de tête qui peuvent le faire.
Je ne peux pas établir pignon sur rue au centre-ville d'Halifax et me déclarer chasseur de tête, et me montrer capable de recruter de bons avocats pour le gouvernement, ou de bons ingénieurs. Si vous cherchez des directeurs d'organismes de charité, je pourrais être un bon candidat. Comment allez-vous réglementer cela? Comment allez-vous faire pour vous assurer que nous n'engagions pas un chasseur de tête reconnu dans bien des domaines, qui ne l'est pas dans le domaine pour lequel nous recrutons?
Mme Barrados : Au sujet du Commissariat à la protection à la vie privée, j'ai eu plusieurs entretiens avec la Commission à la protection de la vie privée, Mme Stoddart, et elle se préoccupe du bien-être de son personnel. Nous craignons qu'ils ne progressent pas assez rapidement et c'est ce que nous disons, en fait, dans notre rapport. Je pense que, maintenant que les vérifications sont terminées, que les enquêtes sont achevées, il est important d'avancer.
Le sénateur Mercer : Et qu'en est-il des anciens employés, ceux qui ne sont peut-être plus là, mais qui n'ont pas participé au conflit?
Mme Barrados : Nous espérons que le rapport fera la lumière là-dessus, parce que pour le rédiger, tous les dossiers ont été examinés, ceux dont on considérait qu'ils exigeaient un examen plus approfondi ont été examinés, des conclusions ont été tirées, selon lesquelles il ne restait plus rien à faire. La vie continue pour tout le monde.
La Commissaire à la protection de la vie privée a eu beaucoup à faire pour instaurer tous les changements jugés nécessaires, et non pas seulement au plan de l'effectif et des nominations, mais aussi dans les classifications. Elle a beaucoup de choses à corriger, en plus des autres défis que pose son poste. Nous collaborons de très près avec elle et nous faisons de notre mieux pour lui faciliter la tâche.
Au sujet de la manière de réglementer les chasseurs de tête, actuellement, la Commission de la fonction publique est responsable de la nomination des cadres. Selon la procédure, une stratégie est proposée pour une nomination. La proposition doit recevoir l'aval de la Commission; le personnel de la Commission examine la proposition et l'approuve. On passe alors à l'étape suivante. S'il y a des dérogations quelconques, il y a un problème; mais si la procédure est bien suivie et que c'est une procédure normale, la nomination est encore approuvée par la Commission. C'est bon pour une année, et au bout de l'année, les pouvoirs sont entièrement délégués.
À ce moment-là, je ne pense pas que la CFP ait un rôle à jouer dans la réglementation de la manière que vous suggérez, sauf pour dire aux ministères que c'est leur responsabilité d'agir, et que ce doit être bien fait. Nous définissons les normes de ce que à quoi nous nous attendons en ce qui concerne le déroulement du processus d'affichage des postes, les annonces de disponibilité de postes, le processus qui est suivi et la manière dont la nomination se fait. Nous faisons un suivi de tout cela.
Il est évident que les ministères doivent observer les règles et procédures de passation de contrats en vigueur dans une partie de l'administration publique. Les offres permanentes et les concours pour engager les entrepreneurs se font par un autre processus.
Le sénateur Mercer : J'espère que cela n'arrive pas à ce gouvernement-ci, mais je serai le premier au pays à prédire qu'un jour ce sera le thème d'un rapport du vérificateur général, qu'un ministère quelconque a chargé un chasseur de tête de recruter des gens, et il ne savait vraiment pas ce qu'il faisait. Ce sera exactement comme le dit le sénateur Murray : Ils deviendront la voie politique par laquelle passeront les nominations partisanes. Je préférerais de loin que de telles nominations se fassent de manière franche et ouverte.
Le sénateur Murray : Bravo, bravo!
Le sénateur Mercer : J'y crois fermement, parce que si vous n'aimez pas les nominations politiques, vous n'avez qu'à mettre les canailles à la porte. C'est ainsi que cela devrait être. Je prédis aujourd'hui que si c'est ainsi que cela se déroule, le vérificateur général — peut-être pas la vérificatrice de maintenant, ni même son successeur — fera un jour une vérification sur ce thème. Il se trouvera quelqu'un, ici, pour avoir ce réflexe rotulien et exiger une enquête sur la question. J'espère qu'ils consulteront le compte rendu des témoignages de cette audience et verront que je l'avais prédit.
Mme Barrados : J'espère, sénateur, que nous aurons mis en place une capacité suffisante de vérification et de surveillance pour décourager cela. C'est le modèle. Selon le modèle, nous déléguons plus de responsabilités aux gestionnaires pour laisser plus à leur discrétion. Avec ce genre de délégation, il y a des exigences, une surveillance, un suivi, et nous le faisons avec beaucoup de persistance. C'est pourquoi il est tellement important d'augmenter notre capacité de vérification, d'aller effectuer ces vérifications, d'avoir les discussions sur les résultats.
Le sénateur Mercer : Mais plus nous nous éloignons des employés des organismes publics qui font le travail, plus il est difficile de faire ces vérifications. Je ne voudrais pas confondre mes comités, mais je siège au Comité de l'agriculture, et je peux vous dire que la vérificatrice générale ne peut tout simplement pas vérifier littéralement des centaines de millions de dollars qui sont versés à des gens dans le cadre du programme d'indemnisation pour la maladie de la vache folle, parce que ces fonds ont été versés à des compagnies privées.
Cela arrive. C'est très flou, et je pense que vous devriez faire très attention.
Mme Barrados : Je vous en remercie. J'ai encore le souvenir de ces frustrations ressenties à l'époque où j'étais au Bureau du vérificateur général.
Le président : Dans vos observations préliminaires, vous avez dit au comité comment vous avez été désignée à ce poste. Vous avez dit qu'il y avait eu des résolutions prises au Sénat en mai, et à la Chambre des communes en avril, et le gouverneur en conseil vous a nommée présidente de la Commission de la fonction publique le 28 mai 2004. À la Chambre des communes, dans les discussions au sujet du projet de loi dont j'ai parlé tout à l'heure, sur la dénonciation, le projet de loi C-11, un large éventail de questions ont été soulevées par divers membres relativement à l'impartialité de la personne qui serait chargée, par le truchement de la procédure de nomination, de superviser la loi sur la protection des dénonciateurs. Plus tôt aujourd'hui, vous avez dit que vous vouliez améliorer votre reddition des comptes au Parlement. À mon avis, ces deux aspects sont en quelque sorte liés. Pourriez-vous commencer par le dernier élément, et nous dire quelles mesures particulières vous comptez prendre pour améliorer la reddition des comptes au Parlement, aux comités du Sénat, à ceux de la Chambre des communes, et cetera. De quelle manière cela vous donnera-t-il l'indépendance que nos membres souhaiteraient pour quelque chose comme les dénonciations?
Mme Barrados : Tout d'abord, au sujet de l'amélioration de la reddition des comptes au Parlement, c'est déjà commencé, avec le rapport annuel que nous avons présenté et les rapports de vérification que nous avons publiés. Actuellement, aucun mécanisme n'est établi à la fonction publique pour la présentation des rapports de vérification. Le seul mécanisme qui existe pour porter quoi que ce soit à l'attention du Parlement, c'est le rapport annuel que présente le ministre du Patrimoine. La nouvelle loi qui doit être pleinement promulguée en décembre 2005 comporte une disposition qui permet au président de présenter directement ses rapports au Parlement. Je compte tirer parti de cette disposition pour présenter mes rapports de vérification. Je ne pense pas qu'il soit pertinent de les présenter par l'entremise d'un ministre. J'ai passé trop de temps au Bureau du vérificateur général pour penser que ce soit une voie raisonnable.
Nous allons nous assurer d'aborder les sujets de préoccupation dans nos rapports de vérification. J'ai soigneusement pris note des préoccupations exprimées au sujet du favoritisme bureaucratique et de l'emploi des chasseurs de têtes. Ce devrait être sur la liste des sujets sur lesquels nous devrons nous pencher pour faire en sorte que les rapports en traitent.
Nous avons aussi, maintenant, accès plus directement et plus régulièrement au Comité des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires de la Chambre des communes, ainsi qu'à ce comité-ci. C'est la deuxième fois que je comparais ici. J'espère, en présentant ces rapports, avoir la possibilité d'en discuter avec ces comités.
Nous allons officiellement augmenter le nombre de rapports, et améliorer le type de rapports que nous rédigeons. En même temps, j'encourage mon personnel et mes cadres supérieurs à entretenir autant que possible des rapports directs avec des députés, pour parler de ce que fait la CFP, de son rôle, et pour faciliter l'offre de réponses aux questions que peuvent se poser les députés au sujet des nominations et des postes. C'est le genre de choses que nous faisons.
J'espère que d'ici à 2006, toute cette mécanique sera en marche. Comme vous pouvez le voir, c'est un mode de fonctionnement tout à fait différent — c'est-à-dire le mode de préparation des rapports, leur présentation, et leur formulation en un langage simple. Nous faisons tout cela.
Il y a un autre élément important, aussi, et c'est que lorsqu'on publie des rapports et que les députés nous critiquent, c'est un processus très public. Il est important pour nous de préserver notre indépendance, et pour le Parlement d'avoir confiance en nous en participant au processus. Nous faisons de notre mieux. Nous ne pourrons pas toujours tout faire bien, mais ce genre de discussion nous est extrêmement utile, parce qu'on y signale des choses au sujet desquelles nous devrons faire preuve de plus de vigilance.
À propos de l'impartialité de la nomination, malheureusement, elle s'est faite juste avant le déclenchement des élections, alors il n'y a pas vraiment eu d'annonce. Je pense que beaucoup de députés, en fait, n'étaient pas au courant qu'elle avait eu lieu, et que le processus avait achevé. Il y a beaucoup de nouveaux députés à la Chambre. Je constate, dans mes discussions au sujet de la nature de la CFP et de la manière dont j'ai été nommé, qu'ils ne sont vraiment pas au courant de la méthode employée.
Le président : Mais vous êtes nommée par le gouverneur en conseil. Comparativement au Directeur général des élections, par exemple, ou au Commissaire aux langues officielles, est-ce qu'il y a une différence?
Mme Barrados : C'est en fait le même processus qui est appliqué pour le Commissaire aux langues officielles et au Commissaire à la protection de la vie privée. Techniquement, la nomination doit être faite par le gouverneur en conseil. Cependant, il ne peut prendre cette décision sans qu'il y ait eu de résolutions des deux chambres. C'est impossible sans ces résolutions. C'est le Parlement qui décide.
Le même processus doit être appliqué si on décide que je ne fais pas mon travail et que je dois être congédiée.
Le sénateur Ringuette : La discussion au sujet des chasseurs de têtes a éclairé certains esprits sur ce qui se passe.
Je voudrais revenir à l'examen linguistique. De mon point de vue, la compétence linguistique est une compétence qui peut être vérifiée et attestée par un établissement d'enseignement. Il n'est pas nécessaire de faire cet examen à la fonction publique. Par exemple, s'il vous faut un ingénieur, l'Université du Nouveau-Brunswick, celle d'Ottawa, de Carleton ou de Toronto pourra confirmer que cette personne satisfait à toutes les exigences de la profession.
Pourquoi ne pouvez-vous voir, après 40 ans, que nous avons évolué et admettre que la langue, que ce soit le français, l'anglais ou les deux, est une compétence que peut attester un établissement d'enseignement? Vous n'avez pas à intervenir pour déterminer qui possède une compétence particulière. Par conséquent, si quelqu'un comme, disons, le candidat dont parlait le sénateur Mercer, postulait à la fonction publique, il irait à l'établissement d'enseignement postsecondaire le plus proche et paierait pour passer l'examen.
Nous sommes en retard de 40 ans. Il faut régler cela. Je ne vois pas pourquoi c'est au gouvernement fédéral de faire les frais de la reconnaissance d'un ensemble de compétences. Si quelqu'un veut poser sa candidature pour un certain poste, un poste qui exige les compétences X, Y, Z et E, c'est au candidat de fournir les attestations et d'avoir les compétences voulues. Nous devons évoluer. C'est un peu comme tourner en rond.
Monsieur Pelletier, certains pourraient être vexés que je vous pose la question, mais je vais le faire tout de même. Sur les postes actuels à Ottawa, qui exigent des compétences linguistiques, des compétences additionnelles pour fonctionner dans le poste où ils sont promus, combien de titulaires sont des anglophones qui doivent avoir une attestation de compétence linguistique en français, et combien sont des francophones qui ont besoin d'une attestation pour l'anglais?
Mme Barrados : Puis-je faire quelques observations, pendant qu'on cherche les chiffres? Nous les avons dans notre rapport annuel.
La CFP est en fait chargée de veiller à ce que les conditions de candidature soient respectées et à ce qu'il y ait des politiques à ce sujet. Les compétences linguistiques sont un élément qui permet de déterminer si un candidat réunit les qualités requises. Ce dont il faut s'assurer, et je vais demander à M. Pelletier de parler des questions soulevées au comité des sous-ministres adjoints, c'est d'avoir un processus équitable et que tout le monde juge équitable. Actuellement, nous avons beaucoup de défis à relever, mais il y a un processus d'accréditation qui est juste et équitable. En fait, c'est une question délicate parce qu'il y a beaucoup de points de vue divergents sur le niveau de compétence linguistique. Faut-il, par exemple, un niveau C ou est-ce qu'un niveau B+ est suffisant? Voilà des questions auxquelles nous réfléchissons.
Dans le rapport annuel — et je vais laisser M. Pelletier vous en dire davantage là-dessus — à la page 69, on indique le pourcentage de nominations de l'extérieur selon le groupe linguistique et les exigences linguistiques du poste. Le tableau montre toutes les nominations, les compétences linguistiques requises et les groupes qui occupent ces postes. Ainsi, pour les postes pour lesquels le français est essentiel, il n'est pas étonnant que 97,4 p. 100 des personnes qui les occupent soient francophones; dans le cas des postes pour lesquels l'anglais est essentiel, 96,4 p. 100 des titulaires sont anglophones. Les autres sont les postes bilingues à nomination impérative et les postes bilingues à nomination non impérative. Il y a eu de la controverse au sujet des postes bilingues à nomination impérative, quant à savoir si le candidat doit connaître les deux langues au moment de son entrée en fonction. Ainsi, 66 p. 100 des titulaires sont francophones dans ce cas et 34 p. 100 sont anglophones.
Le sénateur Ringuette : Ma question portait précisément sur la formation et les tests linguistiques nécessaires actuellement pour les employés qui sont déjà fonctionnaires, pas ceux qui sont recrutés à l'extérieur; c'est-à-dire combien de francophones auraient besoin de cours d'anglais et combien d'anglophones auraient besoin de cours de français?
Mme Barrados : Nous aurons peut-être à obtenir ces chiffres, parce que j'ai les chiffres pour les nominations externes, et vous voulez avoir ceux pour les nominations à l'interne.
Le sénateur Ringuette : Oui. En ce qui a trait à vos responsabilités, quand vous recrutez un ingénieur ou un avocat, vous comptez sur la grande qualité de notre système d'enseignement postsecondaire pour affirmer qu'une personne est qualifiée et qu'une autre ne l'est pas.
Les mêmes critères peuvent s'appliquer dans le cas des compétences linguistiques. On gagnerait du temps. Nous sommes au XXIe siècle; il est temps de régler ce problème linguistique. Au Canada, si vous voulez travailler dans la fonction publique et dans le secteur privé, votre meilleur atout est de posséder au moins l'anglais et le français, et peut- être aussi l'espagnol.
C'est mon point de vue au sujet des langues, et j'espère que vous allez songer à ne plus vous occuper des tests linguistiques pour le recrutement de l'extérieur. Nous comptons sur les universités canadiennes pour offrir la formation et faire les examens, et nous passons à autre chose.
Pour revenir aux restrictions géographiques et à ce qu'un de mes collègues a dit, dans les années 60 et 70, la politique sur les limites géographiques était juste, parce que certains ministères et services étaient déployés dans les régions. Ce n'est plus le cas dans les années 2000. C'est inacceptable, par exemple, que 0,4 p. 100 de la population canadienne qui vit dans un rayon de 50 kilomètres d'Ottawa ait un accès exclusif à 60 p. 100 des emplois dans l'administration fédérale. Ce n'est pas juste que les gens qui vivent dans un rayon de 50 kilomètres autour de Fredericton, où il y a peut-être deux ou trois bureaux gouvernementaux dotés d'un personnel très limité soient les seuls avoir accès aux emplois possibles dans ces bureaux, alors que la population de Bathurst, celle d'Edmundston et celle de Woodstock ont un accès limité à ces emplois.
L'idée de vouloir protéger des emplois dans les régions rurales est erronée, si on regarde la situation actuelle. Je suis plutôt inquiet, madame Barrados, parce que nous avons reçu le président du Conseil du Trésor ici, la semaine dernière. Je lui ai posé une question précise sur la suppression des restrictions géographiques, pour savoir si on avait l'argent voulu, si le processus était en place et si on accepterait d'éliminer ces restrictions. Le président du Conseil du Trésor nous a indiqué qu'on annoncerait très bientôt leur élimination. C'est vous qui êtes responsable de les enlever. Pouvez- vous nous dire à quoi correspond ce bientôt? Quand va-t-on le faire?
Mme Barrados : Des fonds ont été prévus pour la mise en œuvre de la Loi sur la modernisation de la fonction publique.
Comme j'ai dit plus tôt, nous avons les fonds voulus pour planifier. Il s'agit d'un plan technique dont tous les éléments doivent être énoncés. Dans le plan qui prévoit l'intervention du secteur public et du secteur privé, la CFP va utiliser son expertise pour déterminer les exigences des postes, c'est-à-dire les qualités requises pour les différents types d'emploi, de façon à ce que ce soit automatisé, et on va s'adresser au secteur privé pour les aspects techniques. Tout cela doit être bien précisé.
En même temps, nous nous intéressons à l'initiative adoptée dans l'administration fédérale à propos des systèmes partagés pour la gestion des ressources humaines. C'est une initiative à laquelle le ministre tient beaucoup.
Nous nous attendons à ce que tous nos plans soient prêts à être mis en œuvre d'ici la fin du mois de mai. La date prévue dans les documents budgétaires a été reportée de quelques mois parce que, même à la CFP, nous avons du mal à coordonner tout le monde et à organiser tous les contrats.
Nous avons maintenant tout notre monde. D'ici la fin mai, nous devrions être prêts à passer à l'action. C'est ce que le ministre attend. Si nous obtenons rapidement une approbation, nous allons aller de l'avant. Je ne peux pas devancer les approbations.
Il faut que l'outil soit en place, ainsi que la technologie et le personnel; puis il y a la question de politique. C'est entièrement la responsabilité de la commission. Nous pouvons agir vite au sujet de la politique, mais je crois qu'il serait irresponsable d'élargir les zones de concours sans avoir les outils et les mécanismes voulus. Nous bloquerions le système. Nous encouragerions ainsi les gens à contourner le système encore davantage ou à recruter davantage de travailleurs occasionnels. Ce n'est pas la solution que nous cherchons.
Le sénateur Ringuette : Dans votre rapport, il est question de 40 000 nominations, dont les deux tiers sont à court terme et ne suivent pas les règles. On peut difficilement faire pire.
Mme Barrados : Ce sont surtout les nominations d'employés occasionnels qui échappent à la CFP. Pour ce qui est des nominations à temps partiel, il existe un mécanisme auquel nous participons, mais ce sont des emplois d'une durée déterminée. Le processus n'est pas le même pour les nominations à court terme et celles pour une durée indéterminée. Cela ne me plaît pas, c'est pourquoi j'ai soulevé le problème.
Le sénateur Ringuette : Je reconnais votre bonne volonté et votre compréhension de ce qui doit être fait.
Je connais le gouvernement depuis 1987. C'est une industrie de service. Une industrie de service qui ne considère pas que son succès repose à 90 p. 100 sur ses ressources humaines va manquer à ses obligations. Nous sommes entièrement une industrie de service et, 100 ans plus tard, il y a des ministères qui n'ont pas de plan de ressources humaines et qui contournent complètement le processus d'embauche établi.
Le président : Vouliez-vous répondre, madame Barrados?
Mme Barrados : Je partage certaines de vos inquiétudes. Je dois revenir à notre déclaration générale. Dans l'ensemble, les valeurs sont respectées. Je vois les signes avertisseurs. Notre système effectue des milliers d'opérations, mais il y a des problèmes et nous devons être persévérants à leur sujet.
Le sénateur Ringuette a raison de souligner l'importance des ressources humaines et de leur bonne gestion. Si on exclut le service de la dette et les transferts obligatoires, ce sont les salaires qui constituent le gros des dépenses discrétionnaires des ministères. C'est une portion énorme des affaires du gouvernement.
Le président : Les ressources humaines relevaient auparavant de la Commission de la fonction publique, mais c'est une des activités qui a maintenant été confiée à une agence. Vous êtes chargés de la vérification.
Mme Barrados : Les choses ont évolué de façon intéressante depuis 100 ans. Au départ, la Commission de la fonction publique s'occupait de tous les aspects de la gestion des ressources humaines, mais les choses ont changé. Le pouvoir de nomination appartient toujours à la CFP, qui est un organisme indépendant. Les autres aspects de la gestion de ressources humaines sont du ressort de l'Agence de gestion des ressources humaines de la Fonction publique du Canada. Une partie des activités de la CFP lui ont été dévolues, mais ses principales activités étaient celles du Conseil du Trésor. C'est le Conseil du Trésor qui, en tant qu'employeur, était responsable de la gestion des ressources humaines et, donc, ses principales responsabilités lui viennent du Conseil du Trésor, et certaines viennent de nous.
Le sénateur Murray : J'ai deux questions à poser. Je vais faire vite.
Premièrement, la loi prévoit qu'il y ait au moins deux commissaires à temps partiel. Ma question est la suivante : Vous attendez-vous à ce qu'il y en ait d'autres, en plus des deux qui ont été nommés, qui soient désignés bientôt?
Deuxièmement, au sujet de la question linguistique, est-ce que le Comité des sous-ministres adjoints ou un des sous- comités examine la désignation des postes bilingues à nomination impérative? Croyez-vous qu'il y a des mécanismes de contrôle à ce sujet? Il y a 20 ans, quand Max Yalden était commissaire aux langues officielles, le Comité mixte sur les langues officielles trouvait qu'on semblait désigner les postes bilingues à nomination impérative un peu à la va-comme- je-te-pousse. Ma question est la suivante : Cette opération est-elle une science ou un art, et qui s'en occupe?
Mme Barrados : D'abord, pour ce qui est des commissaires à temps partiel, finalement — et il en a été question quand j'ai accepté mon poste — la décision au sujet de leur nomination ne relève pas de moi; ce sont des nominations par décret.
Le sénateur Murray : Vous nous avez dit vous attendre à être consultée.
Mme Barrados : Je l'ai été pour les deux dernières nominations, et je m'attends à l'être pour les prochaines. Si je ne le suis pas, je pense que je vais venir me plaindre à vous.
J'espère qu'après la transition, la dévolution et la délégation de pouvoirs, les choses vont se stabiliser à la nouvelle commission. C'est un énorme changement pour cette organisation qui comptait trois responsables à temps plein qui occupaient un niveau de sous-ministre. Finalement, il y avait trois sous-ministres. Maintenant, c'est plutôt un conseil d'administration. Quand tout sera en place, je m'attends à ce qu'il y ait deux autres commissaires et on se préoccupera alors de la représentativité à la commission.
Je considère que je viens de l'ouest du pays, mais je n'ai pas vécu dans cette région depuis longtemps. Il y a essentiellement deux personnes de l'est du pays à la commission.
Pour ce qui est de la question linguistique, et M. Pelletier pourra compléter ma réponse, je pense que la désignation des postes bilingues à nomination impérative relève de l'Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada, c'est-à-dire l'employeur. Tout le monde s'entend sur la question du service; le service doit être offert dans la langue demandée par les Canadiens. Je ne pense pas qu'il y ait beaucoup de discussion ou d'incertitude à ce sujet.
Ce qui soulève plus de problèmes ou de discussions, c'est la gestion des emplois, la capacité de pouvoir superviser les gens dans la langue de leur choix. Quelle doit être votre maîtrise de l'autre langue pour superviser quelqu'un dans la langue de son choix, ou est-il convenable qu'une personne parle anglais et une autre français?
Actuellement, le niveau est établi à CBC, et nous nous demandons si c'est suffisant.
Le sénateur Murray : Quoi?
Mme Barrados : CBC est la norme, ABC les niveaux. Il y a les niveaux ABC et d'exemption. On s'attend au niveau C d'interaction orale à ce que vous sachiez utiliser le subjonctif, mais j'ai passé le test sans l'utiliser parce que je savais que j'allais me tromper.
M. Pelletier : Je n'ai pas grand-chose à ajouter à cela, pas au sujet du subjonctif, en tout cas. Les ministères sont chargés par l'employeur de désigner les postes et de déterminer le niveau requis. La politique veut que tous les postes de cadres à Ottawa soient de niveau CBC. Les niveaux A, B et C précisent bien les connaissances que le titulaire doit avoir et la Commission de la fonction publique fait subir les examens aux candidats en fonction de ces normes en veillant à ce que les examens soient valides. Nous pouvons expliquer les examens, qui sont justes pour tout le monde, parce que tout le monde est testé de la même façon. Voilà à quoi se résume notre responsabilité.
Le Sous-comité des sous-ministres adjoints examine la désignation des postes, la façon dont nous procédons maintenant, et il verra s'il va recommander une autre façon de faire.
Le sénateur Murray : Ou d'exercer une surveillance. Merci.
Le sénateur Harb : Au sujet de la dotation des postes, j'ai quelques questions à poser à la présidente. La première a trait à la rémunération dans la fonction publique, surtout celle des professionnels. Dans le cas des Affaires étrangères et du Commerce international, j'ai appris, au cours des nombreuses missions auxquelles j'ai participé, que l'agent commercial embauché localement touchait un salaire presque deux fois supérieur à celui de son patron, qui était le délégué commercial d'un des pays. Ce n'est pas un cas isolé. Il me semble que c'est plutôt général.
On m'a dit que d'autres professionnels dans la fonction publique touchent des salaires qui sont de 25 à 35 p. 100 inférieurs à ceux du secteur privé, dans certains cas. Il n'est pas étonnant que beaucoup de gens compétents quittent le secteur public pour le secteur privé, à cause de la rémunération.
Est-il dans vos plans d'examiner les salaires des fonctionnaires, à tous les échelons, du commis au point de service au sous-ministre, pour déterminer comment on se classe par rapport à d'autres pays de taille comparable?
Pour ce qui est de la dotation au sein des ministères, on peut penser à celui de la Citoyenneté et de l'Immigration, où le personnel est débordé, pas seulement ici au Canada mais aussi à l'étranger, au point où, dans certains cas, le visa existe, mais on n'a pas les ressources nécessaires pour le délivrer. C'est aussi grave que cela.
Vous devriez vous attaquer énergiquement à ce problème, surtout dans les ministères qui offrent des services aux Canadiens et aux étrangers qui peuvent vouloir devenir Canadiens.
Enfin, à propos de ce dont le président a parlé, les minorités visibles dans la fonction publique, je ne peux vous dire combien de fonctionnaires cadres intermédiaires qui font partie des minorités visibles sont venus me dire qu'ils n'avaient plus de chances d'avancement, qu'ils avaient frappé un mur. Ils ne semblent pas pouvoir dépasser ce niveau. Ils sont déçus et finissent par accepter une indemnité de retraite anticipée ou par aller travailler ailleurs dans le secteur privé. C'est un aspect important à considérer.
Enfin, j'aimerais faire un commentaire sur l'accès aux emplois. Je n'ai pas d'objection à ce qu'on étende les zones d'admissibilité, mais ce sont davantage les régions rurales que les régions urbaines qui vont en souffrir. Je crains qu'en permettant à des candidats de partout au pays de se présenter à un poste ici à Ottawa, on prive les différentes régions du pays des talents qui s'y trouvent au profit de la capitale du pays. À cet égard, vous ne réglez pas le problème. Il faudrait tenir compte du développement économique des différentes régions du pays dans le sens où, si le gouvernement envisage de créer de nouveaux services, il explore la possibilité d'offrir des postes en région, ou de décentraliser plutôt que déplacer des emplois d'une région dans une autre. C'est important d'y penser.
Le président : Il nous reste cinq minutes et trois questions difficiles viennent d'être posées.
Mme Barrados : Je vais essayer d'être brève. D'abord, pour ce qui est de la rémunération, la question des salaires relève de l'employeur. Actuellement, le mandat de la Commission de la fonction publique a trait aux nominations, à la vérification des nominations et des activités connexes. Je ne peux parler salaire sans dépasser le champ de mes compétences. Cependant, je crois que la classification est une question importante qui va de pair avec les nominations. Nous pensons qu'il y a abus quand on tergiverse à propos de la classification des postes, mais c'est peut-être lié à certains problèmes de rémunération.
Pour être un organisme de vérification plus efficace, il faudrait vérifier tous les aspects de la gestion des ressources humaines. Cependant, je ne pense pas que les salaires soient de notre ressort actuellement dans le sens où vous en avez parlé.
En deuxième lieu, pour ce qui est des pressions exercées sur Citoyenneté et Immigration, cela rejoint les questions de planification soulevées par le sénateur Ringuette. Il s'agit de planifier non seulement les activités mais aussi les ressources humaines. Nous devons relier les deux et déterminer que, si nous n'arrivons pas à répondre aux pressions, nous devrons nous adresser au Parlement, compte tenu de la politique en vigueur.
J'espère que c'est un domaine dont les plans vont tenir compte, s'il y a des pressions, sinon il y aura manque d'intégrité.
Vous avez aussi posé une question sur les minorités visibles qui se sont adressées à vous parce qu'elles avaient le sentiment de ne plus avoir de chances d'avancement.
Des gens sont venus me dire la même chose. J'ai indiqué dans mon exposé que les progrès étaient trop lents en ce qui concerne l'augmentation de la représentation des membres des minorités visibles dans les rangs des cadres de direction au gouvernement. Nous avons un comité consultatif qui est chargé de m'indiquer, à moi et au président de l'Agence de gestion des ressources humaines de la Fonction publique du Canada, les moyens d'améliorer la situation. J'ai demandé à chaque ministère où cette représentation est faible comment ils emploieraient les mesures d'assouplissement que nous offrons déjà pour faciliter ces nominations.
Je demanderais à M. Gauld d'expliquer les autres mesures que nous essayons de mettre en œuvre, parce que nous ne progressons pas assez rapidement. Avant de lui céder la parole, je vous dirai que je vais réfléchir à ce que vous avez dit au sujet des emplois.
M. Gauld : Comme la présidente l'a indiqué, nous avons élaboré ce que nous appelons un nouveau programme d'équité en matière d'emploi qui offre toute une gamme de pouvoirs spéciaux permettant aux ministères d'embaucher des membres des groupes visés par l'équité. Ils ont le pouvoir de réserver des concours ou des nominations aux membres de ces groupes, à l'interne ou à l'externe le plus souvent, et cela s'applique assurément aux postes de cadre de direction. Nous avons demandé des plans et nous suivons la situation. Nous sommes actuellement en train de réunir l'information.
Nous travaillons en collaboration avec Ressources humaines et Développement des compétences Canada ainsi que Développement social Canada, c'est-à-dire ce qu'on appelait DRHC auparavant, qui ont entrepris de nommer des membres des groupes visés par l'équité à des postes de cadre de direction réservés pour eux. Il y aurait à peu près 440 candidats. Il ne reste plus qu'à choisir les personnes qualifiées pour ces postes et nous attendons que des nominations soient faites.
Nous leur avons délégué des pouvoirs pour faciliter ce travail. Nous avons d'autres initiatives, comme le travail du sénateur Oliver avec le Conference Board pour examiner la représentation des minorités visibles dans le secteur public et dans le secteur privé, ce qu'on peut faire pour l'accroître et quels en sont les avantages, ainsi que le travail avec le comité consultatif externe dont la présidente a parlé.
Nous avons réussi au cours des années à attirer beaucoup de membres des minorités visibles et des autres groupes visés par l'équité dans nos programmes de perfectionnement des gestionnaires, le programme de développement des compétences en gestion et le programme Cours et affectations de perfectionnement. C'est un bon moyen pour stimuler les gens de l'intérieur et de l'extérieur. Ces programmes ont maintenant été confiés à l'agence, bien sûr, mais ils ont des bases solides.
Nous discutons de ce que nous pouvons faire d'autre. Je veux discuter avec les ministères et l'agence des moyens à prendre pour attirer des gens de l'extérieur à des postes de direction.
Le président : Madame Barrados, je tiens à vous remercier, vous et vos collaborateurs, d'être venus nous rencontrer aujourd'hui. Nous sommes heureux que vous nous ayez parlé avec autant de franchise et de candeur. Cette rencontre a été très instructive et elle nous aidera dans notre étude des prévisions budgétaires et des problèmes qui y sont liés.
La séance est levée.