Délibérations du comité sénatorial permanent des
Finances nationales
Fascicule 5 - Témoignages du 8 décembre 2004
OTTAWA, le mercredi 8 décembre 2004
Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd'hui à 17 heures pour se pencher sur l'étude du Budget des dépenses principal déposé au Parlement pour l'exercice se terminant le 31 mars 2005
L'honorable Donald H. Oliver (président) occupe le fauteuil.
[Français]
Le président : Honorables sénateurs, je déclare ouverte cette dixième séance du Comité sénatorial permanent des finances nationales. Comme vous le savez, notre comité a été créé en 1919. Ce comité s'intéresse principalement aux dépenses du gouvernement, directement ou indirectement, en étudiant les budgets des dépenses ou des projets de loi.
[Traduction]
Le mercredi 20 octobre 2004, le comité a été autorisé à examiner, en vue d'en faire rapport, le Budget des dépenses principal déposé au Parlement pour l'exercice se terminant le 31 mars 2005.
C'est la sixième réunion que nous tenons dans le cadre de notre mandat général d'examiner ce Budget des dépenses. Le comité a déjà entendu un certain nombre de témoins, notamment le président du Conseil du Trésor, le ministre Reg Alcock; le contrôleur général du Canada; la vérificatrice générale à deux reprises; la présidente de la Commission de la fonction publique et le ministre du Revenu national, M. John McCallum.
Le ministre Alcock a expliqué au comité les initiatives prises par le gouvernement pour promouvoir des contrôles financiers plus serrés qui sont essentiels pour assurer une intendance rigoureuse des fonds publics, pour assurer l'optimalisation et pour garantir que des cadres, politiques et orientations appropriés sur les mesures de contrôle sont appliqués dans l'ensemble de la fonction publique fédérale et favorisent la transparence et l'ouverture des activités financières, notamment les systèmes de comptabilité, de gestion des actifs et, surtout, les acquisitions.
La vérificatrice générale a déclaré qu'elle suivra de près l'examen des dépenses effectué par le Bureau du Conseil privé sous la direction du ministre McCallum. Elle a aussi répondu aux questions sur la gestion du portefeuille immobilier du gouvernement.
Durant sa comparution devant le comité, le ministre McCallum nous a dit que le gouvernement cherchait à réaliser des économies de 12 milliards de dollars au cours des cinq prochaines années, en vue d'une réaffectation à des éléments dont la priorité est plus pressante. Il a ajouté qu'il s'attendait à obtenir la moitié de ces économies dans le secteur des « activités centrales » du gouvernement, notamment une gestion plus efficiente des biens et des acquisitions.
C'est dans ce contexte que nous avons invité notre témoin de ce soir, le ministre Scott Brison. Ces deux activités relèvent en effet du mandat du ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux. Par conséquent, le ministère joue un rôle clé dans cet examen des dépenses.
M. Brison a été élu une première fois à la Chambre des communes en juin 1997 et il est devenu ministre des Travaux publics et receveur général du Canada le 20 juillet 2004.
Monsieur le ministre, nous avons hâte de discuter avec vous de la gestion immobilière et de la gestion des acquisitions dans le contexte d'une plus grande responsabilité et transparence du gouvernement. Nous accueillons aussi les fonctionnaires qui vous accompagnent ce soir. Comme d'habitude, je vous cède la parole pour prononcer une allocution, après quoi nous vous poserons des questions.
L'honorable Scott Brison, ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux : Merci, monsieur le président et honorables sénateurs. Je suis très content d'être avec vous ce soir. J'ai dit à ma mère ce soir que je ne pouvais pas lui parler très longtemps parce que je m'en allais au Sénat. Elle était ravie d'entendre cela. Elle avait mal compris, bien sûr. Elle croyait que j'aurais enfin une certaine sécurité d'emploi. Quoi qu'il en soit, je suis ravi d'être ici.
Je voudrais, monsieur le président, faire une observation sur le rôle de votre comité. C'est avec grand plaisir que j'ai lu un article publié le 25 octobre dans le Report on Business du journal The Globe and Mail. Sénateur, on disait en rapportant vos propos que nous pouvions littéralement épargner des milliards. Je suis d'accord avec cet objectif et je félicite votre comité qui joue un rôle important de surveillance et d'orientation et qui peut donc nous aider à faire exactement cela dans notre ministère et dans l'ensemble des activités gouvernementales dans le cadre du processus d'examen des dépenses.
Je suis heureux d'être ici pour discuter avec vous du budget du ministère pour l'exercice 2004-2005. Je voudrais d'abord vous présenter nos fonctionnaires, notamment notre SMA aux Finances et agent financier principal, Mme Gauvin, notre sous-ministre, David Marshall, et mon secrétaire parlementaire, Walt Lastewka. Il a joué un rôle très actif dans le processus d'examen. Nous allons discuter de tout cela ce soir.
C'est avec plaisir que je vais vous parler de notre stratégie en trois points pour l'avenir de notre ministère et de ses répercussions en termes de gains d'efficience pour le gouvernement du Canada. Je reconnais que le ministère peut jouer un rôle de chef de file important en ce qui a trait à l'amélioration de l'efficience du gouvernement du Canada.
[Français]
Je suis confiant quant au fait que notre action peut voir un impact positif et significatif sur le résultat du gouvernement. Notre but est d'offrir un meilleur service aux contribuables canadiens.
[Traduction]
Monsieur le président, notre ministère de trouve au coeur des activités liées à l'approvisionnement au gouvernement fédéral. En fait, nous sommes le plus important acheteur du Canada. Chaque année, nous achetons environ 10 milliards de dollars de biens et de services, qu'il s'agisse de vaccins contre la grippe, d'hélicoptères ou de trombones. Notre ministère fournit des locaux à bureaux à environ 210 000 fonctionnaires de l'ensemble du Canada. De ce fait, nous gérons le portefeuille immobilier le plus important et le plus diversifié du pays.
Notre ministère exploite un des plus importants réseaux de technologie de l'information au pays. Je suis fier de pouvoir dire que Travaux publics et Services gouvernementaux Canada joue également un rôle de premier ordre en ce qui a trait à l'écologisation du gouvernement. Nous avons amélioré l'efficience énergétique de nos opérations de 33 p. 100 depuis 1970, et nous avons contribué à faire du gouvernement le plus grand exploiteur de véhicules éconergétiques du Canada. Et nous jouons un rôle de premier ordre en ce qui a trait à l'assainissement de l'environnement, y compris le nettoyage des étangs bitumineux de Sydney.
[Français]
Travaux publics est le pilier du gouvernement et je suis fier d'être à la tête de ce portefeuille en ces temps de défis et changements.
[Traduction]
Travaux publics et Services gouvernementaux Canada est fier de sa longue tradition de bâtisseur du Canada, notamment des édifices du Parlement. Mais, comme vous le savez, notre ministère a dû relever certains défis au cours des dernières années. Les Canadiennes et les Canadiens connaissent ces défis et ils s'attendent à mieux. Honorables sénateurs, je peux vous dire que notre premier ministre s'attend à mieux. Et j'entends répondre à ces attentes.
Notre vision est fondée sur un principe sous-jacent qui devrait nous guider dans le cadre de toutes les activités que nous entreprenons pour le compte du gouvernement. Il s'agit du respect envers les contribuables et l'argent qu'ils gagnent si durement. En même temps, nous devons assurer la prestation des services fédéraux aux Canadiens. Ce faisant, je suis convaincu que nous pourrions chaque année économiser des centaines de millions de dollars, voire des milliards de dollars. Il n'est jamais facile d'apporter ces changements. Il faudra travailler très fort et apporter des changements fondamentaux à la philosophie, à l'approche et à la culture du gouvernement.
Cet été et cet automne, j'ai rencontré plus de 3 400 employés de l'équipe de Travaux publics et Services gouvernementaux Canada dans le cadre de six assemblées générales dans chacune des régions du pays. Et je peux vous dire que notre équipe est enthousiaste et disposée à se retrousser les manches et à réaliser ces changements dans la manière dont nous fonctionnons au ministère et dans l'ensemble du gouvernement.
[Français]
Dans ces conférences communautaires, j'ai décrit ma stratégie pour le ministère, et j'aimerais partager ma vision avec vous aujourd'hui.
[Traduction]
Premièrement, des achats plus judicieux peuvent largement contribuer à l'efficience du gouvernement. Si nous pouvons seulement économiser 10 p. 100 sur nos achats, les 10 milliards dont j'ai parlé tout à l'heure, grâce à une meilleure coordination et à des économies d'échelle, notre ministère pourrait réduire de plus de un milliard de dollars par année le coût de l'approvisionnement dans l'ensemble des 98 ministères et agences du gouvernement du Canada — et c'est un montant de un milliard de dollars qui pourrait être investi dans des domaines prioritaires au Canada, comme les soins de santé, la garde des enfants, les collectivités et d'autres priorités auxquelles les Canadiens attachent de l'importance.
Je compte aussi mettre en oeuvre les recommandations définitives découlant de l'examen des achats dans l'ensemble du gouvernement réalisé par M. Lastewka. C'est l'examen le plus approfondi des acquisitions au gouvernement qui ait été effectué au Canada depuis 1963.
De plus, Walt Lastewka a déjà travaillé pour General Motors, où il avait effectué un examen semblable. Son expérience du secteur privé nous a été très profitable au gouvernement du Canada.
La deuxième partie de ma stratégie traite de l'immobilier. Notre ministère dépense actuellement trois milliards de dollars chaque année pour des services immobiliers et des services connexes. Nous cherchons des façons de fournir aux fonctionnaires fédéraux des locaux de qualité, sûrs et accessibles, tout en réduisant le coût associé à ces locaux.
Selon nos études, le gouvernement fédéral dépense 20 p. 100 de plus du pied carré pour le fonctionnement de nos immeubles à bureaux et nous comptons une superficie plus grande par employé que la moyenne de l'industrie.
En même temps, nous avons un déficit d'entretien différé d'environ un milliard de dollars, ce qui pose un grave problème puisque cette somme augmente d'environ 100 millions de dollars par année. Comme propriétaires d'immeubles, nous sommes ruineux et il nous semble donc important de nous attaquer à ce problème de l'entretien différé. Nous prenons déjà des mesures pour appliquer des normes plus strictes concernant l'utilisation des locaux et nous avons adopté une approche plus agressive à l'égard de la location, avec l'objectif d'économiser 15 p. 100 de nos coûts. La récente renégociation de notre contrat d'entretien des immeubles nous fera économiser 50 millions de dollars par année par rapport à la somme prévue dans le budget.
Soit dit en passant, déjà en 1998, nous avions confié au secteur privé 80 p. 100 de l'entretien de nos immeubles. Cela a fait économiser 20 millions de dollars par année aux contribuables et cette récente renégociation a encore ajouté 50 millions de dollars par année à ces économies. Ce sont là d'importantes économies réalisées grâce à des solutions novatrices.
À moyen terme, j'ai demandé à des cadres d'examiner différentes possibilités. Par exemple, serait-il logique que le gouvernement se départisse d'une partie de ses immeubles à bureaux et qu'il loue des locaux, faudrait-il confier en sous- traitance les services de gestion immobilière ou avoir recours à un fonds de placement immobilier comme outil pour réaliser des gains d'efficience? Nous élaborons actuellement une demande de propositions qui sera suffisamment générale pour n'exclure aucune option prématurément, parce que nous n'avons pris aucune décision définitive dans ce dossier.
[Français]
Un de nos principes de base est que nous allons augmenter notre présence et notre visibilité dans les régions et les communautés à travers le Canada. Le gouvernement pourrait avoir la flexibilité de transférer plus de fonctionnaires dans les régions pour qu'ils soient plus prêts du grand public, envers lequel ils rendent service.
[Traduction]
Le troisième élément de notre vision consiste à améliorer les activités du gouvernement en continuant de moderniser nos systèmes de technologie de l'information. Nous devons permettre aux entreprises et aux citoyens canadiens d'interagir plus facilement avec le gouvernement, 24 heures sur 24 et sept jours sur sept, dans le confort de leur foyer. Le secteur financier l'a fait, le secteur du commerce de détail l'a fait; le gouvernement a fait de grands progrès, mais il faut faire plus en fournissant des services en direct qui soient utiles et accessibles, rapides et efficients, sûrs et confidentiels.
Monsieur le président, la stratégie en trois points vise à fournir des services de façon plus efficiente et rentable, et à mieux servir la population canadienne. Notre objectif est de maximiser le rendement de l'argent des contribuables, si chèrement gagné. Les Canadiens et les Canadiennes ne méritent rien de moins. Au cours des prochains mois, le gouvernement devra prendre des décisions parfois difficiles dans le cadre du processus d'examen des dépenses afin de réaliser l'objectif d'économiser 12 milliards de dollars sur cinq ans. Dans certains cas, des services pourront être supprimés s'ils ne permettent pas d'atteindre les résultats souhaités.
Si nous pouvons améliorer l'efficience de notre fonctionnement, c'est à bien des égards une meilleure manière de réaliser l'objectif de l'examen des dépenses que de réduire ou supprimer des services offerts aux Canadiens. Je suis convaincu qu'une bonne partie du travail que nous faisons au sein de notre ministère peut aider à réaliser ces gains d'efficience. Les décisions auxquelles nous sommes confrontés dans le cadre de l'examen des dépenses et du processus budgétaire peuvent sembler difficiles, mais elles ne sont rien en comparaison des décisions ardues que doivent prendre quotidiennement les familles canadiennes qui ont plusieurs enfants et qui gagnent 20 000 $ ou 30 000 $ par année. Si nous prenons de bonnes décisions, cela pourrait faciliter grandement les leurs.
Monsieur le président, vous avez dit tout à l'heure que j'ai été invité. En fait, je vous ai téléphoné le jour même où j'ai lu cet article élogieux dans le Globe and Mail pace que je voulais m'inviter moi-même à comparaître afin de participer aux réalisations de votre comité. Je partage entièrement l'objectif que vous avez exprimé dans cet article du Globe and Mail et vos efforts des dernières semaines pour participer à ce qui m'apparaît un projet passionnant en termes de renouvellement du gouvernement et de changement de la manière dont le gouvernement mène ses activités.
Pour ce qui est du Budget des dépenses, les crédits demandés pour notre ministère s'élèvent à 2,7 milliards de dollars, et une tranche de 2,1 milliards de dollars de cette somme ne donne lieu à aucune marge de manoeuvre puisqu'elle est contrôlée séparément, ce qui laisse 600 millions de dollars offrant une certaine marge pour des réaffectations. Il y a une augmentation dans le budget 2004-2005 principalement attribuable à la réorganisation du gouvernement du Canada opérée en décembre 2003. En conséquence, notre ministère est devenu responsable du programme Gouvernement en direct et aussi de l'initiative des services de voyage partagé. On nous a aussi confié la responsabilité de nombreux programmes et services qui étaient offerts par Communication Canada, organisme maintenant dissout.
Par conséquent, l'augmentation du budget de notre ministère est proportionnelle à notre mandat plus étendu et est attribuable, entre autres, à la demande accrue de locaux exigés par d'autres ministères dont les effectifs ont augmenté.
Nous comptons sur le Budget des dépenses de 2004-2005 pour nous donner les ressources nécessaires pour nous permettre de continuer à servir les Canadiens en tant que ministère, mais aussi de jouer un rôle important pour ce qui est de réaliser des gains d'efficience dans l'ensemble des 98 ministères et agences du gouvernement. Le public joue un rôle important dans la transformation du gouvernement et peut en faire davantage pour aider à réaliser ces gains d'efficience.
Travaux publics est en quelque sorte le moteur du gouvernement et il a besoin de carburant sous forme de crédits budgétaires pour fonctionner. Pour pousser davantage l'analogie, je veux que notre ministère soit un moteur plus économique en carburant pour faire avancer un gouvernement plus maniable et efficace.
[Français]
J'ai hâte que vous me posiez vos questions; les fonctionnaires de mon ministère sont également prêts à répondre à des questions plus techniques.
[Traduction]
Merci, monsieur le président. Je suis à votre disposition pour répondre à vos questions.
Le président : Monsieur Brison, avant de donner la parole au sénateur Kinsella pour lancer la période des questions, vous n'ignorez pas que le ministre McCallum, qui dirige le comité d'examen des dépenses, a comparu devant notre comité, accompagné de fonctionnaires du Bureau du Conseil privé. On lui a demandé notamment d'où viendraient les 12 milliards de dollars. On lui a posé un certain nombre de questions sur la vente des biens immobiliers. Je voudrais vous lire ce que le ministre a dit au sujet de la vente des immeubles du gouvernement. Je cite :
Je peux clarifier cela tout de suite. Je sous assure qu'on n'économisera pas un sou dans la gestion immobilière en vendant des immeubles. Je suis économiste et je sais qu'il n'est pas avisé de vendre les joyaux de la Couronne pour faire son marché. On aurait tort de vendre tous ces biens immobiliers et de mettre ensuite cet argent dans le budget, car il ne s'agit que de rentrées ponctuelles.
Pourriez-vous commenter les propos de votre collègue ministre au sujet de la vente des biens immobiliers?
M. Brison : Je suis entièrement d'accord avec le ministre McCallum. Ce qu'il voulait dire, et j'en suis fermement convaincu, c'est que si le seul avantage était réalisé sous forme du profit réalisé sur la vente de l'actif, il ne serait absolument pas logique de vendre ne serait-ce qu'un seul immeuble. Le ministre McCallum est d'accord avec les gens de mon ministère et avec moi-même pour dire que nous pouvons réaliser des gains d'efficience en adoptant des approches de gestion différentes, grâce à une plus grande rigueur dans le contrôle de l'utilisation des locaux et en négociant plus efficacement nos baux, et c'est ce que nous faisons en ce moment. Je suis clairement d'accord avec son analyse et il n'est donc pas question de vendre un actif à long terme pour le créditer au bilan à court terme — par exemple dans le cadre de l'examen des dépenses, ce à quoi faisait allusion le ministre McCallum dans cette déclaration.
Le sénateur Kinsella : Pourrais-je avoir des précisions pour bien comprendre tout cela? Sous la rubrique du deuxième secteur d'activité, « Explorer la possibilité de réaliser des économies dans le secteur immobilier », ai-je bien compris qu'un expert-conseil ou des fonctionnaires du ministère sont en train d'étudier le portefeuille immobilier pour déterminer si des immeubles devraient être vendus ou remplacés par de nouvelles acquisitions, et cetera? Une étude est- elle en cours actuellement?
M. Brison : En fait, une analyse assez approfondie a déjà été faite au ministère. Nous en sommes maintenant à l'étape où nous avons besoin de renseignements plus pointus, de la part d'experts du secteur privé, en particulier du marché financier, et c'est pourquoi nous faisons une demande de propositions qui, nous l'espérons, sera lancée en janvier et qui nous donnera les renseignements dont nous avons besoin pour prendre éventuellement une décision finale.
Le sénateur Kinsella : Y a-t-il quelque chose par écrit dont vous pourriez faire part au comité relativement au mandat que vous avez donné à ceux qui étudient la question, en particulier le portefeuille immobilier appartenant au gouvernement du Canada?
M. Brison : Dans notre ministère, nous avons fait une évaluation continue. Le sous-ministre voudra peut-être ajouter des précisions, parce que cette évaluation interne a été faite en grande partie avant mon arrivée. La demande de propositions, quand elle sera lancée, sera tout à fait publique, parce que cela s'inscrit bien sûr dans notre démarche.
Le sénateur Kinsella : Appliquez-vous des critères spécifiques pour demander que l'on fasse cette analyse? Ce qui m'intéresse, c'est de savoir si, dans cette évaluation et dans les recommandations que vous adresseront vos fonctionnaires, les facteurs sociaux, historiques, patrimoniaux pèseront d'un poids critique. Il s'agit d'actifs publics, d'immeubles appartenant au public, et non pas d'actifs commerciaux du secteur privé.
M. Brison : Je peux répondre à cette question immédiatement, sénateur, et la réponse est un oui catégorique. Pour les immeubles historiques, nous nous engageons à faire en sorte, que ce soit en en conservant la propriété ou en concluant des ententes, qu'ils soient entretenus en conséquence si jamais leur propriété devait passer au secteur privé.
Le sénateur Kinsella : Je vais être plus précis. Y a-t-il une possibilité quelconque, par exemple, que l'immeuble Sir John Thompson, situé sur la rue Barrington à Halifax, soit vendu?
M. Brison : Il n'y a aucune possibilité qu'il soit vendu avant que nous n'ayons fait une évaluation complète de ce que nous allons faire exactement. Il s'agit certainement d'un immeuble qui fait partie de notre portefeuille immobilier.
Le sénateur Kinsella : Cela s'appliquerait également à un immeuble que je connais mieux, nommément l'immeuble fédéral de la rue Queen à Fredericton. Il est possible qu'il soit vendu si votre étude vous amenait à cette conclusion?
M. Brison : Oui, et il est prématuré de le dire tant que nous n'aurons pas terminé notre étude. En fait, il est possible qu'à la suite de la demande de propositions, nous tirions la conclusion qu'il y a de meilleures manières que l'aliénation de réaliser des gains financiers, par exemple en confiant l'entretien à des contractuels ou bien en adoptant l'approche du fonds d'investissement immobilier qui garantirait les rentrées d'argent, tandis que la population canadienne continuerait d'être propriétaire des immeubles.
Le sénateur Kinsella : C'est pourquoi il m'apparaît d'une telle importance que les Canadiens comprennent quel est le mandat que vous avez confié aux fonctionnaires chargés de faire l'étude et qu'ils sachent si ce mandat englobe des immeubles comme, par exemple, l'immeuble fédéral à Fredericton. C'est un actif communautaire. Les considérations financières ne sont pas les seules en cause; il y a tout l'impact sur l'économie, mais plus important encore, sur la vie sociale, la géographie, l'atmosphère d'une collectivité. Voilà les éléments qui me préoccupent. Nous sommes passés par là quand Postes Canada s'est débarrassé de bon nombre de bureaux de poste, ce qui a vraiment déchiré beaucoup de collectivités.
Je vous exhorte à faire en sorte que dans tout rapport qui vous sera remis, l'analyse tienne compte des facteurs de ce genre, ayant un impact sur la collectivité.
M. Brison : Sénateur, je vous remercie pour votre intervention. Je peux vous dire, non pas en tant que ministre, mais en tant que député, que je suis très sensible à ces questions. Pour bien des gens, la présence gouvernementale est importante, et la présence du gouvernement du Canada dans les localités du pays est prioritaire pour nous, et il n'est pas question que nous réduisions notre présence dans les régions. C'est prioritaire et je vous suis reconnaissant d'insister là-dessus.
Le président : Monsieur Marshall, voulez-vous ajouter à cela?
M. David Marshall, sous-ministre, Travaux publics et Services gouvernementaux Canada : Sénateur, il est certain que la préservation des immeubles patrimoniaux occupe une place privilégiée dans notre liste de priorités et nous allons travailler en étroite collaboration avec les villes et les collectivités pour répondre à leurs besoins en termes de revitalisation.
Cela dit, nous avons un grand nombre d'immeubles polyvalents que nous devons examiner en nous demandant comment en avoir le plus pour notre argent. Beaucoup sont de vieux immeubles qui nécessitent beaucoup d'entretien. Il y a vraiment beaucoup à faire avant d'en arriver à ceux dont nous voulons vraiment nous demander s'il faut les vendre ou non et nous n'allons donc pas perdre cela de vue.
Le président : Pourriez-vous nous donner une idée de ce que sont ces immeubles polyvalents : où se trouvent-ils, à quoi ressemblent-ils, de quelle année datent-ils, de quel genre d'immeuble s'agit-il?
M. Marshall : Nous avons beaucoup d'immeubles, sénateur, environ 360 en tout. Vous pourriez en visiter quelques- uns ici même à Ottawa. Dans le complexe de Tunney's Pasture, par exemple, il y a beaucoup d'espaces occupés dans des immeubles à bureaux polyvalents. Ils ne sont pas à la fine pointe. Ils ont besoin de beaucoup d'investissement. C'est l'exemple même du type d'immeuble dont on peut se demander si c'est financièrement intéressant de les conserver ou d'y investir des capitaux. Quelle est la meilleure solution? C'est ce que nous voulons tirer au clair.
Le sénateur Kinsella : Il y a un grand projet actuellement en cours de réalisation au ministère des Travaux publics et je me demandais si le ministre avait été mis au courant du coût de l'immeuble de l'ambassade canadienne à Berlin, en Allemagne, et s'il peut nous donner des renseignements sur ce contrat. Combien vaut-il? Combien coûtera la construction de l'ambassade à Berlin?
M. Brison : Je vais m'en remettre à M. Marshall là-dessus. Je crois que le MAECI joue un rôle de premier plan dans ce projet.
M. Marshall : Sénateur, dans ce dossier, le ministère des Affaires étrangères est responsable de ses propres immeubles autant au Canada qu'à l'étranger. C'est ainsi que le gouvernement fédéral gère ses biens immobiliers. Par exemple, Travaux publics gère seulement quelque 23 p. 100 des immeubles du gouvernement. Un grand nombre d'autres ministères gèrent leurs propres immeubles et c'est d'ailleurs une question que le président du Conseil du Trésor est en train d'examiner pour savoir si c'est une manière efficiente de fonctionner. En l'occurrence, ce sont les Affaires étrangères.
Le sénateur Kinsella : C'est curieux, parce que le grand panneau à côté du chantier porte très clairement l'inscription « Travaux publics Canada ». Pour en revenir à ce que je disais, je voudrais qu'on nous dise combien cela va coûter. Pouvez-vous vous renseigner?
M. Marshall : Nous allons obtenir ce renseignement.
M. Brison : Sénateur, les ministères jouent en fait un rôle primordial dans les projets, mais nous agissons souvent en tant que contractuels pour bon nombre d'immeubles.
Le sénateur Kinsella : Je suppose qu'on a fait un appel d'offres, mais il faut faire attention de ne pas faire trop de suppositions. Qui serait responsable du processus d'appel d'offres? Serait-ce le MAECI ou bien Travaux publics Canada?
M. Brison : Nous trouverons la réponse à cette question précise.
Le sénateur Kinsella : C'est un très grand projet. Il me semble que c'est de l'ordre de peut-être 60 ou 70 millions de dollars. Je trouve qu'il serait utile d'avoir des renseignements précis sur ce projet. C'est un mégaprojet.
M. Brison : Nous allons vous obtenir cela, sénateur.
Le sénateur Downe : Merci, monsieur le ministre, d'être venu nous rencontrer ce soir. Cette procédure de gestion immobilière est nouvelle pour le Canada, mais cela a déjà été fait dans d'autres pays. Je suppose que votre ministère a vérifié ce qui s'est fait dans d'autres pays comme l'Australie. Quelles leçons en avez-vous tiré, le cas échéant?
M. Brison : Nous avons examiné l'Australie, la Nouvelle-Zélande et la General Services Administration des États- Unis, qui est notre ministère homologue aux États-Unis. Nous avons aussi étudié l'expérience du secteur privé, notamment la CIBC, la Banque Royale et Bell Canada. Même la SRC, qui est une société d'État mais qui fonctionne de manière indépendante, fait la même chose pour ces nouveaux immeubles. Il y a des leçons à tirer de ce qui a été fait avec succès et d'autres projets qui ont moins bien tourné. Globalement, le taux de succès est élevé.
Le vérificateur général d'Australie a par exemple rédigé un rapport positif sur l'expérience en Australie. Ils auraient toutefois pu mieux faire certaines choses. Par exemple, ils ont délégué aux ministères la responsabilité de signer les baux. À mon avis, c'était trop décentralisé. Certains ministères ont négocié des baux intéressants; d'autres ont négocié avec moins de succès. Il n'y a aucun avantage dans tout cela si nous ne profitons pas du pouvoir d'achat du gouvernement du Canada comme locataire ou comme fournisseur d'espaces de bureaux pour obtenir les meilleurs marchés possibles. Ce n'est qu'un exemple. Le vérificateur général australien a rendu un avis favorable. À mon avis, c'était trop décentralisé pour garantir le meilleur résultat possible.
Le sénateur Downe : Je voudrais dire aux autres membres du comité que l'on peut consulter en ligne le rapport du vérificateur général d'Australie. Je conviens avec le ministre que c'est un rapport intéressant et très positif.
Le sénateur Comeau : Merci d'être venu nous voir ce soir, monsieur le ministre. Nous vous sommes reconnaissants de prendre le temps de venir nous rencontrer et de nous aider dans notre tâche.
Ma première question porte sur la vente de biens publics. Je me reporte au bilan du gouvernement à cet égard. À mon avis, il n'est pas très positif ces dernières années.
Je donne l'exemple de la vente de quais à des intérêts privés il y a quelques années. L'un de ces quais que vous connaissez très bien est celui de Digby. Ce quai a été donné à un groupe, en plus d'une somme de trois millions de dollars. Ce groupe l'a ensuite mis en vente au prix de 7,9 millions de dollars. Aucune réparation n'a été faite au quai depuis bon nombre d'années. Le secteur de la pêche est évidemment très inquiet de la détérioration de ce quai.
Le ministre des Transports est allé là-bas la semaine dernière et on ne lui a même pas permis de mettre le pied sur le quai. Il a dû se contenter d'en faire le tour en bateau parce qu'il est en trop mauvais état. C'est extrêmement embarrassant. Le ministre a dit : « Eh bien, tout ce que je peux dire, c'est que si ce groupe fait faillite, nous verrons évidemment ce que l'on pourra faire à ce moment-là. » Ce n'est pas une bonne réponse à donner à un secteur qui dépend de ce bien public très précieux.
Je vais vous donner un autre exemple. Hier soir, nous avons entendu un témoin de la United Fish and Allied Workers de Colombie-Britannique qui est venu nous parler de la vente à rabais ou de la privatisation des ressources des pêches de la côte Ouest, qui se fait d'une manière très semblable à ce qui est arrivé en Nouvelle-Zélande, pays auquel vous faites allusion deux fois dans votre allocution. L'une des préoccupations de la UFAW concerne les gestionnaires qui s'occupent de ces ressources au nom des Canadiens. Presque aussitôt après la privatisation des actifs, ces mêmes gestionnaires deviennent gestionnaires des stocks que l'on vient de privatiser.
Je dois vous dire, monsieur le ministre, que tout cela ne passe pas le test de l'odeur, car cela ne sent pas très bon. En tant que président du Comité des pêches, je n'aime pas cela du tout.
Compte tenu de ce bilan, pourquoi accepterions-nous un nouveau programme par lequel on va commencer à vendre des immeubles? Tout cela se passe en ce moment même. C'était très embarrassant. L'incident du quai de Digby a été une source de honte. Pourquoi devrions-nous faire confiance et croire qu'il ne se passera rien de semblable? Pourquoi ne croirions-nous pas que les fonctionnaires vont alors en profiter pour devenir les bénéficiaires des actifs privatisés?
M. Brison : Je vous remercie pour cette excellente question. Il y a aussi de nombreux exemples de succès de l'engagement du secteur privé et du transfert de responsabilité du gouvernement à des entités privées. C'est inacceptable lorsqu'il y a une faille dans le système mais, malheureusement, il arrive parfois qu'un problème jette le discrédit sur un système tout entier.
Par exemple, dans certains cas, les partenariats public-privé ont donné d'excellents résultats comme méthode de prestation des services, mais les marchés qui ont été conclus n'ont pas tous été favorables. Cependant, ceux qui n'ont peut-être pas été potentiellement tout à fait aussi bons jettent le discrédit sur tous les autres.
Je tiens à dire clairement que nous ne faisons pas une comparaison entre le secteur privé et le secteur public quand nous discutons du groupe immobilier. On compare une organisation d'une vaste portée, nommément le gouvernement du Canada, et une organisation plus ciblée — une firme de gestion immobilière ou un fonds d'investissement immobilier — qui ne fait rien d'autre que de gérer des immeubles. La même évaluation a amené la CIBC, la Banque Royale ou Bell Canada à conclure qu'en tant qu'organisation, il n'était pas aussi efficace qu'il pourrait l'être comme gestionnaire immobilier, parce que ce n'était pas leur secteur d'activité. D'une certaine manière, notre secteur d'activité au gouvernement est d'offrir les meilleurs services possibles aux Canadiens grâce à de bons programmes qui fonctionnent bien et de façon optimale compte tenu de l'argent que les contribuables y investissent. La fonction de gestion immobilière n'est pas nécessairement une fonction de base pour nous. C'est sous cet angle que nous abordons la question.
Je répète que nous n'avons pris aucune décision, mais nous sommes en train d'évaluer un éventail d'options. Dans l'intérêt de l'ouverture et de la transparence, quand j'ai pris la parole à Toronto en septembre, j'ai énoncé certaines options à partir desquelles nous voulions obtenir des renseignements plus pointus dont nous avons besoin pour prendre une bonne décision, au lieu de procéder en catimini; nous voulons le faire de manière ouverte et transparente.
Une dernière observation : il existe des manières de mettre en correspondance les intérêts à long terme des Canadiens et ceux des investisseurs privés. Ce pourrait être par exemple le mécanisme d'un fonds d'investissement immobilier — nous ignorons pour l'instant quel pourrait être le mécanisme — et si l'un des fonds de retraite du Canada mettait de côté des fonds considérables à investir dans le secteur immobilier, ces caisses de retraite pourraient fournir l'investissement nécessaire pour ce type de mécanisme d'investissement. Il est clair que les intérêts à long terme des Canadiens correspondraient alors aux intérêts du secteur privé et, par conséquent, la discipline et l'expertise du secteur privé pourraient nous aider à renforcer, en l'occurrence, l'argent mis de côté pour la retraite des Canadiens en renforçant ces régimes de retraite.
Le sénateur Comeau : Monsieur le ministre, je pense que vous savez que je ne suis pas un socialiste enragé. Nous nous connaissons depuis bon nombre d'années.
M. Brison : Vous n'êtes pas socialiste — enragé, je ne sais pas.
Le sénateur Comeau : Vous avez ma parole. Je fais confiance au secteur privé qui peut livrer des produits de bonne qualité. Il n'y a pas de doute là-dessus. J'insiste là-dessus parce que je ne suis pas certain que le gouvernement soit prêt à se lancer dans cette aventure.
J'ai lu dans un article qu'un employé du ministère des Travaux publics, qui travaille dans un service qui achète pour un milliard de dollars par mois, vient tout juste d'accepter un emploi dans un grand cabinet de lobbyistes bourré de libéraux influents qui représentent actuellement des clients de Travaux publics. Cela non plus ne sent pas très bon. Je sais que vous direz probablement : « Écoutez, cette personne ne signait pas les chèques ni rien de tel ». Quand même, cela ne sent pas bon. Nous devons mettre de l'ordre dans nos affaires au gouvernement avant d'aller plus loin, de vendre nos immeubles, et cetera.
M. Brison : Quand j'ai été mis au courant de cette affaire, nous avons pris des mesures et les deux personnes en question ont cessé de travailler pour le secteur privé et reviennent au ministère. Dès que j'ai été mis au courant, je m'en suis occupé très rapidement.
Je tiens à dire clairement que cela n'enlève strictement rien à l'intégrité de ces personnes, mais dès qu'il y a possibilité de perception d'un conflit d'intérêts, nous intervenons rapidement pour nous isoler et nous protéger, comme nous l'avons fait en l'occurrence. Encore une fois, je répète que nous avons réglé cette affaire très rapidement, mais je vous remercie de l'avoir soulevée.
Le sénateur Comeau : Cela n'aurait jamais dû arriver. Il devrait y avoir au ministère une philosophie selon laquelle rien de tel ne pourrait arriver. Je suis heureux que cela ne vous ait pas échappé et je sais que vous avez fait ce qu'il fallait faire, mais les employés devraient savoir, grâce à un programme d'éducation ou quoi que ce soit, que cela ne se fait pas.
M. Brison : Vous soulevez un point important. Depuis deux ou trois ans, surtout ces 14 derniers mois, sous l'égide de M. Marshall au ministère, il y a eu un renforcement considérable du ministère. Les ministres Goodale et Owen ont fait du très bon travail et ont grandement amélioré notre mode de fonctionnement.
Je tiens à dire clairement que notre ministère fait beaucoup de choses très bien. Malheureusement, dès qu'il y a une anecdote négative, le discrédit rejaillit sur le ministère tout entier et c'est regrettable. Le ministère a introduit il y a quelques mois un train de mesures pour l'éthique et l'intégrité qui a été qualifié par le Conference Board of Canada de meilleur modèle de pratiques à la fois pour le secteur privé et le secteur public.
Le sous-ministre et moi-même avons discuté de cette situation. Dans tout ministère, les fonctionnaires ont la possibilité de demander périodiquement des congés sans solde et il y a un processus pour ce faire. Nous évaluons notre processus en la matière pour nous assurer que cela ne se reproduira plus.
Je répète que cela ne doit pas entacher la réputation ou l'intégrité des personnes en cause. Dans cette affaire, il y a possibilité de perception d'un conflit d'intérêts. Nous devons être doublement prudents là-dessus.
M. Marshall : C'est une question importante. Les deux personnes en cause étaient des commis relativement subalternes et cherchaient à acquérir de l'expérience dans le secteur privé. Je leur ai parlé moi-même aujourd'hui. Ils n'étaient nullement mal intentionnés. Ils n'en revenaient pas que quelqu'un vienne dire qu'ils étaient peut-être en conflit d'intérêts. Dans leur esprit, ils agissaient honnêtement. Ils étaient tous les deux au courant du code de conduite du ministère, qui est très strict. Les employés doivent faire une déclaration volontaire s'ils ont l'intention d'accepter un emploi qui pourrait les mettre en conflit. Comme ils n'estimaient pas que cela causerait le moindre conflit, ils n'ont pas rempli le rapport en question. Nous avons renforcé cette disposition pour préciser qu'il faut faire part de son intention, peu importe que l'on croie ou non qu'il y a conflit. De sorte que c'est devenu obligatoire plutôt que facultatif.
Nous donnons de plus en plus des cours de formation pour tirer au clair les situations qui pourraient être floues. Nous avons dit que tout doit être mis en doute, à part peut-être une tasse de café. Les gens ont le sentiment que s'ils n'ont pas de mauvaise intention, personne ne devrait mettre leurs agissements en doute. Il faut donc gratter plus loin pour aller au fond des choses.
Pour ajouter à ce que le ministre a dit, dans l'affaire en question, pour garantir qu'il n'y ait aucun doute, dès que les personnes en cause ont été mises au courant de l'affaire, elles ont toutes les deux mis fin à leur emploi avec cette firme du secteur privé. Nous allons les réintégrer dans la fonction publique, mais pas à Travaux publics. Nous allons tenter de leur trouver des emplois ailleurs pour qu'il n'y ait absolument aucun doute qu'il n'y a absolument aucun conflit, qu'il n'y en aura pas à l'avenir et pour que ce soit bien clair aux yeux de tout le monde.
Le président : Je suis heureux que vous ayez précisé cela clairement, car ce n'était pas clair auparavant. Je croyais qu'ils retourneraient occuper leurs mêmes emplois, ce qui aurait été un conflit.
Monsieur le ministre, en réponse au sénateur Comeau, vous avez dit que vous avez prononcé un grand discours à Toronto. Pour me préparer à cette réunion, j'ai lu ce discours et aussi d'autres discours que vous avez prononcés au sujet de la vente des immeubles.
Le 21 septembre 2004, vous avez annoncé que votre ministère examinerait les aspects financiers et les risques de la propriété par opposition à la location d'immeubles. Vous avez laissé entendre que le gouvernement fédéral pourrait réaliser d'importantes économies s'il devait vendre la plupart de ses immeubles non excédentaires pour louer ensuite les locaux nécessaires.
Ce soir, dans votre allocution, vous n'avez pas défendu cette position. Votre position a-t-elle changé? Votre ministère a-t-il entrepris d'analyser et de comparer les coûts et les avantages de la propriété par rapport à la location de ces immeubles? Dans l'affirmative, notre comité pourrait-il obtenir copie de cette étude avantage-coût? Combien d'immeubles seraient visés par cette vente? La performance du gouvernement en matière de gestion immobilière se compare-t-elle bien à celle du secteur privé selon des paramètres comme le taux d'inoccupation, le coût de fonctionnement, le rendement de l'investissement, et cetera?
Ma question générale est celle-ci : votre position a-t-elle changé? Examinez-vous les risques financiers comparatifs de la propriété et de la location, comme vous l'avez dit dans votre discours à Toronto le 21 septembre 2004?
M. Brison : Oui, nous examinons la manière d'améliorer notre stratégie immobilière sur le plan financier de manière à nous permettre à offrir de meilleurs locaux aux fonctionnaires tout en obtenant une meilleure valeur pour les contribuables. Dans le cadre de cette étude, il faut voir ce que nous pouvons faire de notre portefeuille existant à court terme. C'est ce que nous disons quand nous évoquons des négociations plus serrées de nos arrangements de location.
Le président : Dans l'article de Toronto, il était question de la vente d'immeubles.
M. Brison : Oui. Ils ont pris une partie du discours qui portait sur des considérations à moyen et long terme, mais à court terme, le ministère cherche à réaliser des gains d'efficience dans le cadre de notre approche actuelle, c'est-à-dire la propriété. Cela comprend ce que je disais tout à l'heure sur l'externalisation de l'entretien des immeubles, qui permet des économies supplémentaires de 15 millions de dollars grâce au contrat le plus récent. Nous voulons rationaliser l'utilisation des locaux, parce que nous utilisons actuellement plus d'espace par personne que le secteur privé.
Le président : Combien d'immeubles pourraient éventuellement être vendus? Combien d'immeubles sont visés par votre analyse avantage-coût?
M. Brison : Comme le sous-ministre l'a dit, nous avons environ 365 immeubles. Nous ne saurons pas avant un certain temps lesquels il serait logique de céder. Ce ne sera peut-être même pas la stratégie avant un certain temps. D'aucuns disent qu'il pourrait y en avoir environ 300, mais je répète que c'est prématuré.
Notre position est cohérente. Nous cherchons des solutions de rechange. Dans le discours de Toronto et ceux que j'ai prononcés par la suite, j'ai décrit le processus qui nous occupe actuellement, à savoir l'élaboration de la demande de propositions qui doit être assez large pour n'exclure aucune option. Nous ne voulons exclure aucune option, que ce soit la propriété publique ou privée, qui pourrait nous en donner le plus possible pour notre argent. Nous voulons connaître les faits. Le sénateur Kinsella a posé tout à l'heure des questions importantes portant sur ce que certains appelleraient les aspects plus flous ou moins strictement financiers entourant les immeubles patrimoniaux. C'est une priorité pour nous.
Le président : Au lieu de demander des réponses aux questions que j'ai posées tout à l'heure, je pourrais peut-être vous demander, ainsi qu'à vos collaborateurs, de les faire parvenir au comité pour que nous puissions en prendre connaissance plus tard?
M. Brison : Certainement.
Le sénateur Ringuette : Je m'étonne un peu d'apprendre que votre ministère est propriétaire/exploitant/gestionnaire de seulement 20 p. 100 de nos immeubles fédéraux. Qui possède les autres?
M. Brison : Je vais demander au sous-ministre de répondre à cela parce qu'il connaît mieux les 98 ministères et agences. Certains immeubles ont une utilisation spécifique, par exemple dans le domaine militaire.
M. Marshall : Nous avons parlé tout à l'heure du ministère des Affaires étrangères. La Défense nationale possède environ 30 p. 100 des immeubles du gouvernement. Il y a aussi Environnement Canada, Santé Canada, Pêches et Océans, Agriculture, et cetera. La plupart ont certaines utilisations particulières ou spécifiques, mais il y a aussi beaucoup d'immeubles polyvalents, du genre immeubles à bureaux. Bien souvent, ils invitent Travaux publics à s'en occuper à contrat, mais ils gèrent le parc immobilier correspondant à leurs besoins et nous exécutons leur demande.
Le Conseil du Trésor examine la situation et essaie de déterminer s'il est logique d'éparpiller ainsi nos efforts ou bien si l'expertise en gestion immobilière devrait être concentrée et appliquée. C'est un aspect que nous étudions.
Le sénateur Ringuette : Dans le processus logique pour évaluer les biens immobiliers du gouvernement, la première étape est de centraliser toutes ces opérations et la gestion de manière à faire une évaluation exacte. La Défense ne serait probablement pas d'accord, pour des raisons de sécurité, de remettre les 30 p. 100 des immeubles gouvernementaux qui relèvent de leur ministère. Votre exercice porterait donc sur 70 p. 100 des biens immobiliers gouvernementaux. Je constate qu'il y a un chaînon manquant dans ce processus.
M. Brison : Comme le sous-ministre l'a dit, le Conseil du Trésor étudie cela. Vous avez utilisé le mot « centraliser ». J'évite ce mot pour diverses raisons. La première est que dès que l'on prononce le mot « centraliser », chacun s'imagine que cela veut dire que tout doit se faire ici à Ottawa. Comme je viens d'une région périphérique, je suis convaincu que nous devrions en faire plus dans les régions en termes d'activités gouvernementales. Je tenais seulement à dire cela clairement.
Nous discutons de tout cela avec le président du Conseil du Trésor. Nous sommes un important gestionnaire immobilier au gouvernement. Si nous pouvons faire notre travail, ou bien trouver une meilleure manière de faire notre part, cela pourrait créer un modèle qu'on pourrait ensuite généraliser et appliquer à d'autres ministères.
Le sénateur Ringuette : Peut-être que ce sont eux qui ont le modèle que vous pourriez utiliser.
M. Brison : C'est concevable, absolument. Nous nous intéressons à cela. Comme d'ailleurs certaines provinces, soit dit en passant.
M. Marshall : Je veux ajouter une autre statistique qui vous donnera matière à réflexion, à savoir que, parmi les immeubles à bureaux, Travaux publics gère 80 p. 100 de l'espace en mètres carrés, mais sur l'ensemble des immeubles, nous en gérons une proportion moindre. Nous avons une masse critique d'un certain type de locaux.
M. Brison : Des immeubles à bureaux.
Le sénateur Ringuette : Très bien. De ces 80 p. 100 d'immeubles que vous gérez, combien sont actuellement confiés à des contractuels pour la gestion et l'entretien, approximativement?
M. Brison : À peu près 75 p. 100.
Le sénateur Ringuette : Environ 75 p. 100 des immeubles?
M. Brison : De l'entretien, pas de la gestion, mais de l'entretien, ce qui est complètement séparé de la gestion. Cela a été fait en 1998.
Le sénateur Ringuette : Dans votre allocution, vous avez dit : « De plus, le contrat d'entretien des immeubles que nous avons renégocié » — et je précise bien que vous avez dit « contrat » au singulier — « nous permettra d'économiser 50 millions de dollars. » Cela veut-il dire que nous avons un seul contractuel pour 75 p. 100 de notre entretien?
M. Brison : Oui, c'est exact.
Le sénateur Ringuette : Nous avons un seul entrepreneur?
M. Brison : C'est exact.
Le sénateur Ringuette : Je suppose que cet énorme contrat, à cause des règles de l'ALENA, serait ouvert à la concurrence à la grandeur de l'Amérique du Nord?
M. Brison : Nous sommes tenus de respecter les règles de l'ALENA, à cause du chapitre 11. C'est très intéressant parce que l'un des éléments que nous prenons en compte dans le cadre de notre processus d'examen des acquisitions est que certains de nos partenaires commerciaux interprètent leurs obligations aux termes du chapitre 11 en termes d'acquisition gouvernementale peut-être moins méthodiquement ou rigoureusement que nous. Nous pouvons pontifier au sujet de Adam Smith ou adopter une approche plus pratique. Cependant, nous devons respecter nos accords commerciaux et les changements apportés au TCCE s'insèrent dans cette problématique. M. Lastewka voudra peut- être ajouter quelque chose sur le processus d'acquisition.
M. Marshall : J'ai quelque chose à ajouter au sujet de l'immobilier. Pour répondre à ce qui m'apparaît votre question précise, je dirai que nous avons en fait diviser les biens immobiliers en huit tranches et avons demandé des soumissions dans huit groupes séparés, afin de permettre aux entreprises régionales de soumissionner, même si elles ont peut-être la capacité d'intervenir dans une région mais pas à l'échelle nationale. C'est un aspect important parce que c'est la manière dont nous voulons procéder. De nombreuses entreprises partout en Amérique du Nord ont manifesté vivement leur intérêt. De grandes entreprises américaines ont reçu des trousses d'information à leur demande. Une fois le processus terminé, nous avons fait un briefing à une trentaine d'entreprises. En fin de compte, une seule entreprise canadienne a remporté les huit contrats. Elle a présenté huit soumissions séparées et a été retenue dans les huit cas. Ce n'est pas comme si une seule personne avait tout raflé. Il leur a fallu l'emporter dans huit soumissions séparées. Dans certains cas, ils sont venus bien proches de perdre devant un concurrent, mais ils ont été couronnés de succès partout.
M. Brison : C'était une forme de représentation proportionnelle, par opposition à un système majoritaire uninominal.
Le sénateur Ringuette : M. Lastewka a quelque chose à ajouter.
L'honorable Walt Lastewka, secrétaire parlementaire, Travaux publics et Services gouvernementaux : L'une des questions à l'étude dans le domaine des acquisitions était la manière dont le TCCE rend ses décisions en comparaison de l'autre pays. Il y a un grand écart entre la manière dont le Canada rend les décisions en pareil cas et la manière dont on procède aux États-Unis. Nous avons eu des réunions à Washington pour discuter d'éventuelles améliorations à nos décisions. Nous avons tendance à nous demander si la décision est la bonne, tandis qu'aux États-Unis, on s'interroge plutôt sur le caractère raisonnable du processus, après quoi la décision est rendue.
Beaucoup de nos fournisseurs ont soulevé ce point dans nos discussions d'un océan à l'autre. L'une des recommandations formulées dans le cadre de l'étude des acquisitions est que nous devrions réexaminer cet aspect : autrement dit, ces dernières années, ce qui s'est passé et la manière dont nous pourrions nous aligner davantage sur les modalités de nos partenaires au sud de la frontière.
Le sénateur Ringuette : J'ai peut-être un commentaire. Ce n'est pas une question.
Le président : Vous avez la parole.
Le sénateur Ringuette : Une autre question importante que vous avez soulevée, monsieur le ministre, est que votre étude montre qu'il en coûte au gouvernement fédéral 20 p. 100 de plus le pied carré pour exploiter nos immeubles. Est- ce aux termes de l'ancien contrat d'entretien ou du nouveau contrat?
M. Brison : Cela tient compte de la gestion et du coût global, pas spécifiquement du coût d'entretien. C'est une comparaison avec la moyenne de la BOMA, c'est-à-dire la Building Owners and Management Association, qui est une organisation canadienne de gestionnaires immobiliers et je précise que ce n'est pas une comparaison entre le secteur public et le secteur privé. Il s'agit d'une organisation générale, notre ministère, et d'autre part d'organisations qui ne font rien d'autre que de la gestion immobilière et cela ne reflète donc pas cette différence.
M. Marshall : Madame le sénateur, vous vous demandez peut-être, si nous avions une entreprise de l'extérieur, pourquoi nos coûts sont encore plus élevés?
La réponse à cela est que l'on a demandé à l'entreprise de l'extérieur d'assumer une partie de la gestion. Les employés de Travaux publics font le reste, les réparations dépassant un certain coût, et cetera. Si l'on additionne le contrat externe et nos coûts propres, on obtient un chiffre qui est plus élevé qu'il ne devrait l'être, par mètre carré. Voilà ce que nous étudions : comment améliorer cette situation.
Le sénateur Ringuette : Je viens d'une petite localité et d'une famille pauvre où l'on nous disait toujours qu'il faut dépenser chaque sou judicieusement; toute sa vie, il faut avoir un toit et, par conséquent, dès que vous le pourrez, investissez dans votre propre maison, et c'est un sage conseil. Je dis cela parce que le gouvernement n'est pas une organisation à court ou à moyen terme. Ses activités sont à très long terme. Comparez cela à une industrie qui envisage peut-être une durée de vie utile de 20 ans, cela fait une différence. L'approche doit être différente parce que le mandat est différent pour ces immeubles-là.
C'était mon observation. Je m'en voudrais de ne pas dire que j'espère que dans tout ce processus, comme vous l'avez dit, monsieur le ministre, les régions et les employés actuels de la fonction publique qui font ce travail, qui touchent un salaire honorable et des avantages sociaux relativement intéressants, que ces gens-là, au bout du compte, ne perdront pas leur emploi pour se retrouver dans des emplois au salaire minimum dans nos régions rurales ou dans n'importe quelle région du pays. Cela serait inacceptable, d'une part.
J'ai donc des inquiétudes, mais je vous remercie d'être venu ici pour nous donner ces renseignements.
M. Brison : Je conviens avec vous que si l'on doit utiliser un actif pendant une très longue période, il faut ou bien en être propriétaire ou bien tout au moins négocier un bail qui tient compte de ce long terme. Le modèle australien a été évoqué tout à l'heure. Certains ministères ont signé des baux à court terme plutôt qu'à long terme et n'ont pas obtenu cet avantage.
Beaucoup d'immeubles qui ont été construits ou de complexes, comme la Place du Portage à Gatineau, ou bien Tunney's Pasture et beaucoup d'autres immeubles et complexes qui ont été construits pendant une période très expansionniste du gouvernement, ne reflètent pas nécessairement la rapidité du changement qui se passe au sein du gouvernement aujourd'hui. Certains croient que, opérationnellement, la nature du gouvernement — l'utilisation de la technologie, la capacité de rapprocher les fonctionnaires des gens qu'ils servent dans les régions, par exemple, nécessite un changement de notre approche dans le domaine immobilier. Je pense que beaucoup de vieillies hypothèses — qui m'ont nourri aussi bien que d'autres choses dans la Nouvelle-Écosse rurale — doivent être au moins remises en question.
Le président : Monsieur le ministre, je pense que votre réponse nous amène tout naturellement à une question supplémentaire que le sénateur Downe veut poser et j'invite ce dernier à le faire.
Le sénateur Downe : Monsieur le ministre, je veux donner suite à la question posée par ma collègue. Elle a mis le doigt sur certaines lacunes possibles de la gestion immobilière. Je voudrais évoquer certaines possibilités qui s'offrent et j'espère que vous en tiendrez compte.
Comme vous le savez, l'une des conséquences imprévues de l'examen des programmes au milieu des années 1990 a été la réduction du nombre d'employés fédéraux dans les régions. Si votre évaluation vous permet de changer votre gestion immobilière, cela créerait des possibilités, à ce qu'il me semble, que les régions pourraient saisir pour remédier à ce déséquilibre; et j'espère que vos fonctionnaires et vous-même en tiendrez dûment compte.
M. Brison : Merci, sénateur. Comme vous le savez, je viens d'une région et je suis donc très sensible à ces questions, mais je suis aussi très enthousiaste quant aux possibilités. Vous avez absolument raison de dire que si nous réduisons l'inertie imposée par la propriété gouvernementale des locaux — je pense que 52 p. 100 de l'espace de locaux que nous possédons se trouve ici dans la région d'Ottawa — cela donnerait une plus grande souplesse aux ministères, aux ministres et aux fonctionnaires des ministères pour trouver des manières de fonctionner qui seraient tout aussi efficientes et peut-être même davantage, à cause de la structure des coûts dans le domaine immobilier et du coût de la vie dans les régions du pays.
Avec l'abolition des distances, qui est un facteur déterminant dans le coût des télécommunications, les arguments en faveur de la centralisation géographique des fonctionnaires deviennent de moins en moins convaincants. En fait, les entreprises ont beaucoup d'avance sur nous dans ce domaine à certains égards. Si je regarde le Canada de l'Atlantique, je constate qu'on y trouve bon nombre d'entreprises qui ne se limitent pas aux grandes entreprises pancanadiennes — Magna, par exemple, a maintenant une usine au Cap-Breton, et la technologie permet à cette usine d'être très efficace et efficiente dans le cadre de leur réseau — on peut en fait réaliser des gains d'efficience sur le plan du fonctionnement, mais on peut aussi prendre en compte ce qui est un véritable bien public, à savoir la création de plus riches possibilités économiques dans les régions du pays.
Nous avons des programmes de développement régional qui reflètent la priorité du gouvernement du Canada d'investir dans les régions. Si nous pouvons, par l'entremise de nos propres activités, contribuer réellement aux biens publics tout en permettant aux contribuables d'en avoir plus pour leur agent, ce serait une erreur de ne pas le faire.
Nous avons eu des discussions quant aux secteurs de notre ministère qui pourraient tomber dans cette catégorie. Nous explorons la question. Nous n'allons pas agir de façon prématurée, mais je peux vous dire que c'est prioritaire d'identifier ces secteurs et de donner l'exemple à l'ensemble du gouvernement.
Le sénateur Downe : Je suis entièrement d'accord avec le ministre. Je suis certain qu'il connaît le meilleur exemple, à savoir quand le siège social des Affaires des anciens combattants a été déménagé de la région de la capitale nationale il y a 28 ans. Aujourd'hui, au centre-ville de Charlottetown, il y a 1 200 employés du gouvernement fédéral avec une masse salariale qui atteint cette année 68 millions de dollars. Le ministère a dû absorber des frais au départ, mais le taux de roulement est beaucoup plus bas, le coût du recrutement est inférieur et c'est la meilleure forme de développement régional. C'est un bon modèle à étudier pour ce que vous envisagez de faire.
M. Brison : Il y a aussi d'autres gouvernements qui ont de l'avance sur nous. Nous voulons les émuler.
Le sénateur Carstairs : Merci, monsieur le président. J'ai trouvé amusantes toutes les allusions à l'Australie, parce que je me rappelle de ce que j'ai appris en Australie. Leurs édifices du Parlement étaient censés coûter 58 millions de dollars et ont fini par en coûter 580 millions. On a tous une histoire d'horreur à raconter, mais je veux m'attarder plus précisément à nos édifices du Parlement.
Notre sous-ministre a fait allusion à notre patrimoine et je suis certainement d'accord avec lui. Nous devions commencer à rénover au tout début de la présente décennie. Je dois admettre que la bibliothèque est déjà bien avancée, mais nous avons besoin de construire un nouvel immeuble à l'angle des rues Bank et Wellington. Nous ne pouvons pas rénover l'édifice de l'Ouest ni l'édifice de l'Est tant que cet immeuble n'aurait pas été construit, pour avoir des locaux de remplacement. Nous ne pouvons pas rénover l'édifice du Centre tant que nous n'aurons pas rénové les édifices de l'Est et de l'Ouest.
Je serai sénateur jusqu'en 2017. J'ai dit à beaucoup de mes collègues que je ne m'attends pas à être jamais obligée de quitter l'édifice du Centre pour que ces travaux de rénovation aient lieu. J'ai fait partie du comité consultatif sur la cité parlementaire et c'est pourquoi je possède ce renseignement.
Quelles sont les prévisions? Quand allons-nous rénover l'édifice du Centre? Si l'on demandait aux Canadiens quel immeuble dans notre pays représente le gouvernement du Canada, ils diraient tous, jusqu'au dernier, les édifices du Parlement.
M. Brison : Merci, sénateur. Ma longévité à mon poste est moins prévisible que la vôtre. J'ai toutefois l'intention d'être ici aussi longtemps que vous.
C'est indéniablement une véritable priorité. Nous avons de magnifiques édifices du Parlement qui ont besoin d'énormément de travaux et de planification à long terme. Cette question a été étudiée à mort. Ce n'est pas comme si nous n'avions pas assez de renseignements.
Vous avez mentionné la bibliothèque. J'ai le plaisir de dire que les travaux progressent conformément à nos prévisions budgétaires, ce qui est excellent. Il y a des discussions en cours dont M. Lastewka vous parlera dans un instant. Il est membre du Bureau de régie interne et aussi secrétaire parlementaire.
Il y a un réel problème auquel je veux m'attaquer directement. Si nous ne nous y attaquons pas directement, nous le traînerons comme un boulet au cours des dix prochaines années ou plus pour réaliser ce que nous voulons sur le plan de l'entretien et de la restauration de la cité parlementaire. Il y a de la confusion et des responsabilités partagées dans le cadre de ce projet. Travaux publics et Services gouvernementaux partagent la responsabilité de l'intendance de la cité parlementaire; or les édifices du Parlement en font partie, comme vous le savez bien. C'est un véritable défi que de faire quoi que ce soit sans conflit. C'est vraiment très difficile d'obtenir de faire quoi que ce soit. Franchement, les responsabilités ne sont pas claires.
Travaux publics et Services gouvernementaux a, dans ce dossier, ce que Mark Twain appelait un travail minable : beaucoup de responsabilités et aucun pouvoir.
Je veux absolument m'attaquer à cette structure de gestion embrouillée et nuisible. Ce n'est pas ce que vous pensez; ce n'est pas que le ministre des Travaux publics réclame tous les pouvoirs. Au contraire, j'aimerais que le Parlement joue un plus grand rôle en assumant l'intendance exclusive de sa cité parlementaire. Il nous faut une structure de gestion plus claire dans laquelle le Parlement s'adresserait au Conseil du Trésor, demanderait des fonds et procéderait grâce à des responsabilités plus clairement établies.
L'édifice de l'Ouest et l'immeuble de la rue Bank sont tous prioritaires. Il faudra une éternité, si l'on conserve la structure de gestion actuelle, pour aboutir à quoi que ce soit, parce que nous ne cesserons jamais de nous chamailler, chacun défendant son fief.
C'est mon avis. Nous serions prêts à appuyer fermement une telle orientation. Je vais demander à M. Lastewka de vous en parler à titre de membre du Bureau de régie interne.
Le sénateur Carstairs : Vous voulez dire le Bureau de régie interne de la Chambre des communes, monsieur le ministre?
M. Lastewka : Le ministre m'a délégué la responsabilité de m'occuper de ce dossier. J'ai participé aux discussions du Bureau de régie interne sur l'édifice de l'Ouest et l'édifice de la rue Bank. Vous avez absolument raison, sénateur. Nous n'avons cessé de remettre ce projet à plus tard. Personne ne semble être le chef de file dans ce projet.
Le président : Pourquoi Travaux publics et Services gouvernementaux ne le serait-il pas?
M. Lastewka : Ils ne devraient pas l'être. C'est le Bureau de régie interne qui devrait l'être. Il est actuellement saisi, presque chaque semaine, du dossier pour essayer d'assurer la transition pour tout le monde, parce que la période pendant laquelle nous pourrons continuer à occuper l'édifice de l'Ouest est maintenant réduite à deux ans.
Le président : Pourquoi cela?
M. Lastewka : Pour deux raisons : la maçonnerie tombe en morceaux. L'entretien de l'immeuble n'est pas de nature préventive. L'entretien se fait à la pièce; on ne veut pas éventrer l'immeuble pour faire de grands travaux préventifs parce que cela risquerait de provoquer un nuage d'amiante.
Le président : Quelle est l'ampleur du problème de l'amiante dans les édifices de l'Est et de l'Ouest?
M. Lastewka : À l'édifice de l'Ouest, il n'y a eu aucun incident d'amiante qui aurait été perturbé dans un secteur où se trouvent des gens. L'une des raisons est que l'on ne fait pas d'entretien préventif et l'on ne touche donc pas du tout à l'amiante. Si jamais il est perturbé, quelque chose pourrait arriver.
Le président : Est-ce que quelqu'un fait des contrôles régulièrement pour vérifier?
M. Lastewka : Absolument, en conformité de la loi.
Le président : Quels sont les résultats de ces tests hebdomadaires?
M. Lastewka : Nous respectons la loi.
Le président : Quelle est la loi?
M. Lastewka : Nous n'avons aucun cas d'amiante dans le secteur. Y a-t-il de la poussière? Oui. Y a-t-il des briques qui tombent? Oui. Mais il n'y a pas d'amiante. Nous avons remis de la documentation là-dessus à tous les occupants de l'édifice de l'Ouest.
Le président : Est-ce la même chose à l'édifice de l'Est?
M. Lastewka : Je ne pourrais pas vous le garantir à 100 p. 100. Je vais vérifier et vous répondre plus tard.
Le sénateur Carstairs : Je peux dire qu'il n'y a aucun problème à l'édifice de l'Est. Je peux vous donner ce renseignement.
Je vois un camion de pompiers sur la colline quatre ou cinq fois par année. Une bonne fois, il y aura un incendie digne de celui de 1916, si nous ne faisons pas avancer ce projet.
J'ai fait installer une nouvelle moquette dans mon bureau quand j'étais leader du gouvernement au Sénat. C'est étonnant que le plancher n'ait pas pris en feu, tellement il y avait de câbles sous ce tapis. Ils ne passent plus sous le tapis. Ils passent maintenant le long des murs, parce que j'ai insisté pour que ce soit fait. Ces édifices sont très problématiques. Je ne voudrais pas voir un autre incendie comme celui de 1916.
Travaux publics et Services gouvernementaux a clairement un rôle à jouer dans ce dossier. Comme le secrétaire parlementaire le dit, les Bureaux de la régie interne du Sénat et de la Chambre des communes ont aussi un rôle à jouer. La réalité est qu'il faudra cogner des têtes l'une contre l'autre, faute de quoi nous aurons de nouveau l'incident de 1916.
M. Lastewka : Je peux vous assurer que le Bureau de la régie interne s'occupe du dossier et je vais vous dire comment nous avons été avertis que le Bureau de régie interne devait agir beaucoup plus vite. Quand le ministre m'a confié la responsabilité d'aller voir ce qui se passait à l'édifice de l'Ouest, en me fondant sur mon expérience de travail, j'ai posé deux questions très simples : qui est l'employeur et quelles règles nous régissent? Je peux vous dire qu'il m'a fallu un mois pour trouver qui exactement est l'employeur.
Le président : Quelle est la réponse?
M. Lastewka : La réponse est que le Bureau de régie interne et le président du Bureau de régie interne est l'employeur, parce qu'ils assurent la gouvernance...
Le président : Dans ce cas, est-ce que le Président de la Chambre des communes...
M. Lastewka : En l'occurrence, il se trouve que c'est le Président de la Chambre.
Le sénateur Carstairs : Excusez-moi, mais pas pour les immeubles occupés par le Sénat.
M. Lastewka : Non, je parle de l'édifice de l'Ouest. Le Bureau de régie interne a été saisi du dossier. Comme le ministre l'a dit, il y avait des divergences d'opinion. Nous sommes en train de les aplanir lentement. Nous ne reviendrons pas à ce processus de prise de décisions.
L'objectif, d'ici les prochaines semaines, c'est de distribuer un graphique à colonnes montrant exactement où iront les gens qui travaillent à l'édifice de l'Ouest. Certains devront peut-être déménager dès le mois de juin.
Le président : De quelle année?
M. Lastewka : De l'année prochaine. En fait, si nous pouvons en déménager un plus grand nombre, nous allons le faire. C'est en train d'être calculé et finalisé actuellement.
L'objectif est de faire déménager les gens de l'édifice de l'Ouest, de réduire le risque au minimum le plus tôt possible. Nous voulons d'abord mettre de l'ordre dans nos affaires, au Bureau de régie interne de la Chambre, nous mettre d'accord sur ce qui devrait être. Je peux vous dire que c'est très frustrant parce que nous en arrivons à une entente et il y a toujours une raison de faire autre chose. J'ai bon espoir que nous parviendrons à une entente et que nous ne ferons pas machine arrière. C'est le processus de décision que nous devons suivre. Nous allons cheminer dans cette voie et nous agirons en parallèle avec le Sénat pour nous assurer qu'il n'y ait qu'un seul plan d'action pour l'ensemble de la cité parlementaire. Ce n'est pas facile, parce qu'il y a tellement d'intervenants et tellement de gens qui s'imaginent qu'ils ont le pouvoir de décision en la matière, alors que ce n'est pas le cas. C'est le Bureau de régie interne qui a le pouvoir. C'est lui l'employeur et, dans notre cas, à l'édifice de l'Ouest, c'est le Bureau de régie interne et le ministère des Travaux publics qui sont responsables de leurs employés.
Nous avons mis les points sur les i et nous progressons. J'espère pouvoir me présenter de nouveau devant vous à l'avenir et vous donner un plan d'ensemble sur lequel nous nous serons tous entendus. Nous devons tous nous mettre d'accord.
M. Brison : Par exemple, Travaux publics et Services gouvernementaux pourrait continuer à fournir les services sous la direction du Bureau de régie interne, ou des organisations compétentes du Sénat et de la Chambre, mais comme je l'ai dit, l'un des défis, c'est que le partage des responsabilités n'est pas très prévisible, en un sens. À mon avis, il faut que ce soit tiré au clair.
Le président : Monsieur le ministre, je pourrais peut-être revenir sur une question que vous a posée le sénateur Ringuette. Il me semble qu'en matière d'acquisitions, de transactions commerciales et immobilières, de nombreux principes d'affaires devraient s'appliquer, pas seulement des principes bureaucratiques. Dans votre allocution, comme le sénateur Ringuette vous l'a rappelé, vous avez dit que, d'après vos études, le gouvernement fédéral dépense 20 p. 100 de plus le pied carré pour exploiter — il s'agit du coût d'exploitation — vos immeubles, et que nous avons aussi plus d'espace par employé que la moyenne du secteur privé. Pouvez-vous expliquer pourquoi c'est plus coûteux pour le gouvernement fédéral d'exploiter ses immeubles, par rapport au secteur privé? Est-ce que, dans le secteur privé, les principes de gestion appliquée pourraient également s'appliquer à l'exploitation des immeubles fédéraux sans en confier l'entretien au secteur privé?
M. Brison : Je vais commencer par la dernière question, sénateur Oliver. La réponse est oui, c'est certainement possible, et nous allons explorer toutes les options envisageables.
Je répète que ce n'est pas une comparaison entre le secteur public et le secteur privé, dans la mesure où l'on a affaire à une organisation de portée générale, à savoir le gouvernement du Canada, par opposition à des organisations spécialisées qui ne font rien d'autre qu'un type très pointu d'activités et qui, en conséquence, créent des gains d'efficacité et d'efficience supérieurs à ce qu'il est possible de faire dans des organisations d'une plus vaste portée.
Le président : Le comité s'intéresse aux questions de reddition de comptes et de transparence, et l'exploitation d'un immeuble de bureaux à vocation commerciale met en cause des principes d'affaires, et c'est là que je veux en venir. Est- ce qu'il n'y a pas des choses que le secteur privé fait bien, 20 p. 100 mieux que vous? N'y a-t-il pas des principes que vous pourriez appliquer pour commencer à maximiser les économies, comme on le fait dans le secteur privé?
M. Brison : Le volet entretien est un exemple de certaines mesures que nous avons déjà prises.
Le président : Mais je parle de l'exploitation.
M. Brison : Je vais vous donner un autre exemple : la réponse à votre question est oui, absolument, nous allons examiner tous les domaines où il nous serait peut-être possible de mieux faire à l'interne en nous inspirant de l'exemple du secteur privé.
Par ailleurs, notre organisation est d'une taille sans commune mesure avec celle des entreprises du secteur privé qui assument la même responsabilité en matière de gestion immobilière. Cela fait également une différence. Je répète que nous n'avons pris aucune décision et que nous n'en prendrons pas tant que nous n'aurons pas des chiffres précis.
Le président : Il y a de grandes entreprises comme Wal-Mart dont le chiffre d'affaires annuel brut en dollars US est à peu près l'équivalent du budget canadien. Ces gens-là s'arrangent pour réaliser de bonnes économies. Ils s'en tirent bien. Le gouvernement est peut-être une grande organisation, mais il y a aussi de grandes entreprises qui ont réussi à intégrer des gains d'efficience dans leurs activités.
M. Brison : Absolument.
M. Marshall : Je voudrais ajouter une observation à ce que le ministre a dit. Le résultat net est une accumulation de plusieurs intrants. On commence par le fait que nous avons une norme acceptée par le Conseil du Trésor de 18 mètres carrés par employé. À l'heure actuelle, au gouvernement fédéral, le chiffre est de 21 mètres carrés par employé. La raison en est que nous n'avons pas appliqué rigoureusement cette norme, de sorte que lorsqu'un ministère réclame davantage d'espace et nous donne des raisons et des explications, nous avons tendance à dire : « Très bien, nous allons vous l'accorder. » C'est pourquoi l'instauration d'une plus grande discipline dans l'utilisation de l'espèce nous donnerait dès le départ un avantage de 15 p. 100.
On en arrive ensuite aux normes d'aménagement, touchant la moquette et les meubles. Là encore, les gens formulent toutes sortes de désidératats. Ils dépassent les normes et on les a laissé faire et il faut reprendre cela en main.
Ensuite, pour le nombre de personnes — je tiens à le mentionner parce que nous avons parfois des besoins et objectifs conflictuels — employées par Travaux publics et Services gouvernementaux par mètre carré est le double du chiffre comparatif le plus proche que nous ayons trouvé. À certains égards, nous pouvons adopter des processus plus efficients, mais cela voudrait dire une réduction des effectifs. À un moment donné, on ne peut pas réduire ces coûts sans couper dans le gras, et cela veut dire des employés et d'autres intrants. Nous pouvons devenir plus efficients en doublant ce que nous gérons, en introduisant de meilleurs processus, et cetera, et ce sont là les divers leviers sur lesquels nous essayons d'agir, relativement à notre personnel, en leur donnant l'occasion de voir s'il y a peut-être d'autres mesures que l'on pourrait prendre.
C'est pourquoi ce processus ne prendra pas seulement un an. Nous envisageons un cheminement de cinq à huit ans durant lesquels nous allons voir si nous pouvons adopter des processus; nous allons regarder du côté du secteur privé pour voir si cela pourrait nous aider.
Enfin, je dois dire que dans le secteur privé, les immeubles sont généralement affectés à de nombreux usages. Dans une emprise foncière donnée, qui est la partie la plus précieuse d'un bien immobilier, on peut offrir un nombre donné de mères carrés, ou bien l'on peut ajouter trois étages supplémentaires et y installer des médecins ou autres locataires qui partagent le coût, tandis qu'au gouvernement, nos immeubles ont une affectation spécifique et ne servent qu'aux activités gouvernementales, ce qui contribue à augmenter les coûts.
Nous examinons chacun de ces aspects pour voir comment on peut les mettre dans la balance et en arriver à la juste structure de coûts. Peut-être qu'en fin de compte nous ne réussirons pas à obtenir la même efficience que dans le secteur privé, mais nous voulons nous en rapprocher le plus possible.
M. Brison : J'ai pensé à autre chose pendant l'intervention de M. Marshall, à savoir qu'il y a 10 ou 15 ans, le niveau d'expertise qui existait dans le secteur privé et dont on pouvait s'inspirer n'était pas aussi solide qu'aujourd'hui. L'efficacité est beaucoup plus grande que par le passé dans le secteur privé, puisqu'il y a maintenant des entreprises qui ne font rien d'autre que de la gestion immobilière et même des fonds d'investissement immobilier spécialisés dans ce domaine. C'est une évolution relativement récente.
Ces entreprises ont une grande souplesse en termes de rémunération, d'encouragement pour l'obtention de résultats et de gains d'efficience et il est très difficile d'en faire autant au gouvernement. Tout cela touche une problématique plus vaste et je sais que le président du Conseil du Trésor s'y intéresse.
Le président : J'allais justement aborder cette question. M. Marshall nous dit notamment que beaucoup de règles fixées par le Conseil du Trésor ne sont pas mises en vigueur. Or le président du Conseil du Trésor est venu nous dire qu'il aimerait une reddition de comptes beaucoup plus serrée. L'une des études qu'il effectue se penche sur divers régimes de responsabilité, en particulier la responsabilité horizontale dans ce type de dossier, et je me demande donc quel est votre rôle comme ministère dans des études de ce genre, qui tentent de trouver des manières de faire respecter des règles qui ont déjà été établies par le Conseil du Trésor, notamment pour l'espace de bureau?
M. Brison : Il y a une concurrence féroce.
Le président : J'espère qu'on répondra à ma question.
M. Brison : Absolument, mais je voudrais finir de répondre à la question précédente, si vous me le permettez, sénateur.
Il y a une concurrence féroce pour attirer les compétences en matière de gestion immobilière. Même à l'interne, nous subissons cette concurrence et nos gestionnaires sont attirés et font parfois défection vers la gestion immobilière du secteur privé. C'est un élément du problème. Cela pose une question plus vaste, à savoir comment, dans une structure gouvernementale, pouvons-nous attirer, garder et encourager l'expertise dont nous avons besoin en matière de gestion? C'est une question d'une plus vaste portée, mais elle influe sur notre prise de décisions en l'occurrence.
Pour ce qui est du deuxième point, nous prenons des mesures énergiques pour appliquer strictement les normes du Conseil du Trésor dans l'ensemble du gouvernement. Nous sommes un ministère de service. Nous sommes au service des 98 autres ministères et agences du gouvernement. La culture traditionnelle dans notre ministère a toujours été — ce qui est d'ailleurs parfaitement raisonnable — de nous tourner vers les autres ministères et organismes. Le mandat est de considérer les autres ministères et agences comme des clients. Nos employés, à juste titre, se tournant vers les autres ministères et agences qui sont leurs clients, ont répondu au désir de leurs clients. Nous considérons maintenant les autres ministères et agences — ce qui est un changement très important dans le mandat et la culture — non plus comme des clients à proprement parler, mais comme des collègues. Notre client ultime, c'est le public et les contribuables du Canada. Voilà le client en dernière analyse.
Nous considérons de plus en plus les autres ministères et agences comme des collègues avec lesquels nous allons travailler pour offrir aux contribuables les meilleurs services possibles et la plus grande valeur pour leur argent. C'est un virage qui prendra du temps, mais l'une des manifestations de ce virage culturel sera l'application stricte de la norme en termes d'espace. Je l'ai dit dans des discours d'un bout à l'autre du pays, dans des assemblées publiques. J'espère que nos fonctionnaires diront non de temps à autre aux autres ministères qui viennent leur demander quelque chose. Je peux leur assurer que j'ai déjà dit non à mes collègues du Cabinet quand ils m'ont présenté des demandes. Nous donnons l'exemple. C'est un virage qui prendra du temps, mais je suis confiant que cela fera une énorme différence dans notre capacité d'enrayer les coûts et d'offrir des services de manière plus efficiente.
Le sénateur Day : Je m'intéresse particulièrement aux renseignements que vous avez été en mesure de recueillir jusqu'à maintenant en matière d'acquisitions gouvernementales. Je crois savoir qu'on vous a remis un rapport provisoire et qu'un autre vous parviendra bientôt. Avez-vous tiré des leçons dont vous pourriez nous faire part dès maintenant et pouvez-vous nous tenir au courant au fur et à mesure dans ce dossier?
M. Brison : Je vais demander à M. Lastewka de répondre à la première question, parce que c'est lui qui est le chef de file dans le dossier des acquisitions.
Sur le deuxième point, j'aimerais revenir devant votre comité de temps à autre pour avoir une discussion comme celle d'aujourd'hui. Je trouve cela très utile.
M. Lastewka : Monsieur le président, premièrement, je tiens à vous remercier d'emblée pour avoir fait des observations sur les leçons apprises, parce que c'est l'une des premières choses que nous avons faite en tant que groupe de travail. Nous avons 14 personnes dans notre groupe de travail composé de représentants de Travaux publics, de la Justice, de la Défense, du Conseil du Trésor, en plus de moi-même. La moitié des membres de notre groupe de travail ont une certaine expérience du secteur privé.
Nous avons d'abord travaillé avec 17 grandes entreprises pour examiner la manière dont elles font leurs acquisitions, notamment Wal-Mart, John Deere, Bell, HP, EDS et d'autres grandes entreprises qui ont collaboré avec nous en termes d'échange de renseignements. Nous sommes allés voir le secteur privé pour nous enrichir de leurs expériences, pour voir quel est le meilleur modèle et quelles sont les meilleures pratiques. Ensuite, nous avons travaillé avec les États-Unis, l'Australie, la Nouvelle-Zélande et le Royaume-Uni pour prendre connaissance de leurs travaux dans le dossier des acquisitions parce qu'ils font du travail semblable. Certains ont de l'avance sur nous, d'autres ont du retard, mais nous avons tout partagé.
Nous avons aussi traité avec des universitaires. L'Université de la Floride est un excellent exemple; on y trouve des gens qui connaissent à fond le domaine des acquisitions et les changements qui surviennent dans les modèles et les pratiques appliqués un peu partout dans le monde. Nous avons eu de nombreux entretiens.
Nous avons passé en revue 112 vérifications, pour bien comprendre ce que nous disait la vérificatrice générale et divers spécialistes de la vérification. Nous avons appris très rapidement un certain nombre d'éléments que le secteur privé nous a communiqués, notamment l'importance de la gestion stratégique des acquisitions, c'est-à-dire le fait de savoir à l'avance ce que l'entreprise va acheter dans un an ou deux, ce qui permet de planifier bien à l'avance. Les compagnies privées ont une standardisation très poussée.
Durant nos entretiens avec des fournisseurs et des organisations nationales avec lesquelles nous traitons, une demande est revenue souvent : « Pourriez-vous uniformiser la terminologie et les formulaires et réduire de 50 à 10 le nombre de vos formulaires? » Voilà ce que le monde des affaires nous a apporté.
Nous avons beaucoup discuté de la gestion des fournisseurs. Nous n'avons pas un bon système de gestion des fournisseurs au gouvernement. Les fournisseurs n'ont cessé de nous dire qu'ils n'ont pas des liens assez serrés avec nous. Nous devons mieux les comprendre. Les relations de travail doivent être meilleures entre le gouvernement et ses fournisseurs.
Beaucoup d'entreprises et de sociétés nous ont parlé des marchandises. Dans notre rapport, nous traitons des marchandises. Nous utilisons le terme marchandises dans son sens le plus étendu; pour nous, les marchandises, ce sont les biens, les denrées, les services et les travaux de construction, enfin tout ce qui s'achète.
Nous avons eu des discussions d'un océan à l'autre avec la communauté des fournisseurs. Nous sommes allés à St. John's, Montréal, Toronto, Ottawa, Edmonton, Vancouver et Victoria. Les discussions sont devenues répétitives après la troisième ou quatrième réunion; nous entendions presque constamment la même chose. Eux aussi demandaient que le processus d'acquisition soit davantage stratégique, exactement comme les grandes entreprises ont fait pour améliorer leur système. Les fournisseurs nous ont parlé énergiquement de l'uniformisation des outils d'acquisition.
Il y a eu beaucoup de discussions avec les fournisseurs. J'espère que nous aurons ce rapport final d'ici le mois prochain. Le rapport sera thématique. Nous traiterons de la gouvernance des acquisitions dans l'ensemble du gouvernement. Si le mandat de Travaux publics change, si nous devenons un ministère chargé des acquisitions de manière proactive, ce sera très différent, par rapport à un organe d'acquisition et d'achat. Nous devons faire ce changement de paradigme. Ce ne sera pas facile. Tout le monde a fait ce changement sauf les gouvernements. Ce qu'il y a de bien, c'est que nous avons rencontré des représentants de beaucoup d'autres gouvernements qui ont fait ce changement et ils ont réalisé des économies importantes.
Nous allons discuter de la gestion des marchandises. Dans notre rapport provisoire, c'était embrouillé. Nous avons essayé de tirer cela au clair. Nous voulons dire marchandises dans le sens large. Nous traitons de la gestion des fournisseurs. Nous devrions être en mesure de trouver sur ordinateur des renseignements sur un fournisseur qui vend à l'ensemble du gouvernement. Peu importe où se situe une source d'approvisionnement, nous devrions être en mesure de consulter un ordinateur et de trouver immédiatement l'expérience de ce fournisseur pour ce qui est de vendre au gouvernement. Nous ne devrions pas avoir besoin d'une étude de six mois.
J'ai mentionné tout à l'heure le TCCE. Nous devons faire face à la musique à ce sujet. Tout le monde nous l'a dit. Nous devons apporter des changements.
Du côté des ressources humaines, quand nous passerons d'un ministère essentiellement transactionnel, spécialiste des achats, pour devenir un ministère des acquisitions, il faudra de la formation poussée. Pour obtenir cette expertise et les gens doivent obtenir une certification pour s'occuper d'acquisitions. Il faudra apporter beaucoup de changements au niveau de la gestion. Nous nous sommes notamment demandés si nous étions réalistes quant aux économies possibles dans le domaine des acquisitions. Je peux vous dire que nos estimations sont basses en matière d'économies.
Je dois rendre hommage à notre service de contrôle et d'évaluation du risque, qui a fait beaucoup de travail. Pour les fournitures de bureau, leur économie moyenne est de 35 p. 100. Pour les services de traduction, c'est de presque 50 p. 100. Dans le domaine des TI, c'est d'au moins 25 p. 100 et plus près de 35 p. 100. Dans certains secteurs où l'on a déjà pris des mesures, il y a des économies pouvant atteindre 70 p. 100.
Si nous continuons de fonctionner comme maintenant, c'est-à-dire en mode transaction d'achat, faisant une transaction à la fois, achetant la même chose chaque mois, nous n'obtenons aucun avantage. Cependant, si nous regroupons nos achats, nous pourrons réaliser des économies intéressantes.
Le président : Les entreprises font cela depuis des décennies pour réduire leurs coûts.
M. Lastewka : Durant les années 1980, les entreprises ont fait le changement des transactions d'achat aux acquisitions. Certaines entreprises ont seulement changé le nom et ont continué de fonctionner comme avant, mais pour obtenir les résultats que nous voulons, il faudra mettre en oeuvre de nouvelles pratiques d'acquisition et nous envisageons que cela se fera sur un échéancier de six à sept ans. Ce sera étendu graduellement aux 98 ministères. À mesure que nous bâtirons la confiance envers le mandat révisé, les intervenants adhéreront au programme.
La bonne nouvelle, et c'est ce que nous ont dit les gens d'affaires et les représentants des gouvernements, c'est que quand on utilise des offres à commandes pour négocier de meilleurs prix, on peut obtenir des prix encore meilleurs à l'avenir, mais il faut recourir aux offres à commandes. Nous recommanderons probablement qu'il soit obligatoire d'utiliser des offres à commandes.
Soit dit en passant, si nous constatons que l'on peut obtenir quelque chose moins cher avec la qualité voulue dans une autre région du pays, nous devrions faire nos acquisitions dans la région en question.
Le président : Cela ne se fait-il pas déjà?
M. Lastewka : Je ne pense pas que ce soit assez répandu, parce que nous fonctionnons en mode transactionnel. Le ministère fait de son mieux compte tenu de son mandat. Les travaux publics, qui assument la responsabilité des acquisitions, devraient élaborer les politiques et le Conseil du Trésor devrait les approuver pour s'assurer de ne rien oublier. Le ministère chargé des acquisitions devrait réexaminer continuellement ses politiques en vue de les améliorer et de les mettre en application à la grandeur du gouvernement.
Le sénateur Day : Ces renseignements contextuels nous sont très utiles. Nous cherchons à établir un dialogue continu. Vous avez manifestement fait beaucoup de travail et nous vous en félicitons. L'étape suivante, dont vous dites qu'il faudra environ sept ans pour la mettre en oeuvre, sera très stratégique. Il sera extraordinairement important que tous les ministères gouvernementaux embarquent. Cela exigera un grand effort pour obtenir l'adhésion de tous et il faut espérer que vous êtes prêts à le faire.
M. Lastewka : Il faudra obtenir l'adhésion des 98 ministères et il faudra imposer la discipline pour qu'on utilise les outils fournis, ce qui est exactement ce que tous les fournisseurs et les associations nous ont dit.
Le sénateur Day : Est-ce que le ministère de la Défense nationale est l'un des 98 ministères avec lesquels travaille le ministère des Travaux publics pour les achats et les acquisitions?
M. Lastewka : Ils vont travailler avec nous.
Le sénateur Day : Avez-vous été en mesure de déterminer si les délais dans l'acquisition d'équipement, de matériel et de fournitures dont on entend régulièrement parler à la Défense nationale sont symptomatiques de la fonction publique toute entière, ou bien y a-t-il quelque chose qui cloche sérieusement à la Défense nationale?
M. Lastewka : D'après mon expérience, si la demande de propositions a été bien faite, le délai est plus court pour l'acquisition. Si l'on apporte des changements à la demande de propositions, pour diverses raisons, l'échéancier s'allonge.
Nous, aux acquisitions, devons travailler avec notre client, en l'occurrence la Défense nationale, plus intelligemment et plus diligemment pour réduire les délais d'acquisition.
Le sénateur Day : La Défense nationale ne sera-t-elle pas votre partenaire et le public canadien votre client, ou bien est-ce seulement pour la location des biens immobiliers?
M. Lastewka : Notre ministère voit les choses sous l'angle suivant : Travaux publics doit travailler de concert avec les ministères pour répondre à leurs besoins en matière d'acquisition afin qu'ils puissent remplir leur mandat. Nous pensons pouvoir réduire les délais de moitié. Nous devrons cibler des améliorations continues, ce qui fera partie de nos recommandations, pour réduire les délais et travailler avec les divers outils dont nous disposons à Travaux publics pour accomplir la tâche.
Le sénateur Day : Les Travaux publics interviennent-ils dans chaque acquisition qui se fait à la Défense nationale? Êtes-vous autorisés à intervenir dans chacune de ces activités?
M. Brison : Il y a des différences marquées entre la Défense nationale et d'autres ministères. Nous faisons aussi les acquisitions pour le SCRS, et il y a des questions de sécurité dans le cas de la Défense nationale et du SCRS. Bien souvent, il est aussi nécessaire de se procurer des articles très spécialisés. Par exemple, il est bien possible que les gains d'efficience dont nous parlons ne s'appliquent pas autant aux articles dont nous faisons l'acquisition pour la Défense nationale, parce que ce sont des articles tellement spécialisés que le fait de changer notre fonctionnement interne pour devenir plus efficients ne nous donnera pas nécessairement de meilleurs prix. Je songe à l'exemple des hélicoptères.
Il y a environ 40 groupes de produits et il y a actuellement des spécialistes des acquisitions dans les 98 ministères et agences. Si nous pouvions rassembler l'expertise qui existe par groupes de produits plutôt que de l'éparpiller entre les ministères, je pense que nous pourrions négocier plus efficacement.
Je tiens à mentionner le Marché en direct du gouvernement du Canada, qui est le ne plus ultra en matière de portail d'approvisionnement en ligne. Nous le mettons au point avec IBM, et nous pourrons ainsi mieux coordonner les achats de nos 98 ministères et organismes.
M. Lastewka a mentionné une réduction des délais de 50 p. 100 pour les acquisitions. C'est faisable grâce à la technologie. En réduisant la paperasse et en utilisant plus efficacement les TI, nous pouvons réduire de 50 p. 100 le temps consacré aux acquisitions et, en même temps, épargner les 10 p. 100 minimum qui correspondent à notre objectif en termes de gains d'efficience..
M. Marshall : Nous avons été très chanceux de pouvoir compter sur notre secrétaire parlementaire dont l'expérience nous a guidés, et d'avoir un ministre pour nous appuyer. Nous savons assez bien ce qui peut se faire. C'est une question de faire en sorte que ça se fasse et d'avoir collectivement la volonté d'agir. On peut dire à un ministère : « Écoutez, nous avons certifié trois modèles d'ordinateur. Prenez un de ceux-là », et l'on nous répond : « Non, j'en veux un plus perfectionné. » Ils commencent par définir ce qu'ils veulent, et ensuite ils montent dans la gamme.
Je voudrais faire une observation qui vous aidera à comprendre les possibilités. Le gouvernement du Canada rédige environ 500 000 contrats par année, dont 83 p. 100 pour des articles de moins de 25 000 $. Il y a une quantité gigantesque de paperasse pour de petits montants. Ce que nous voulons et ce dont M. Lastewka vous parlait, c'est de mettre en place un contrat pour l'achat de bureaux, d'épicerie et d'ordinateurs, et cetera, un contrat de cinq ou dix ans pour la fourniture de plusieurs millions d'articles, d'obtenir un bon prix, d'inscrire le tout dans un logiciel d'acquisition, comme le ministre le disait, et de permettre aux gens de commander les articles avec cet outil, au lieu que chacun rédige des contrats séparés constamment. Il y aurait possibilité de réaliser d'énormes gains d'efficience en accélérant le processus.
Le sénateur Day : C'est l'offre à commandes dont il a été question?
M. Marshall : C'est bien cela. Nous avons aujourd'hui des offres à commandes, ce qui pose un problème intéressant pour la comptabilité gouvernementale. Nous ne pouvons pas nous engager à prendre un volume déterminé, parce qu'on peut seulement s'engager quand on obtient des crédits, et Travaux publics n'a pas de crédits.
Le président : Vous ne pouvez donc pas obtenir le meilleur prix possible.
M. Marshall : En effet, mais nous y travaillons.
Le sénateur Ringuette : Je conviens certainement que vous êtes chanceux de pouvoir compter sur M. Lastewka et son expérience du secteur privé, conjugué à ses connaissances dans le domaine politique et bureaucratique accumulées depuis 1993.
Vous avez évoqué la faible utilisation des offres à commandes par les divers ministères et c'est la même situation dans le domaine du recrutement. Nous avions une agence, la Commission de la fonction publique, et personne n'embauchait et c'est toujours le cas. Je constate un parallèle. Vous avez actuellement une source d'approvisionnement pour vos ministères, et vous offrez des services mais ceux-ci ne sont pas utilisés par le ministère. Il faudra pour cela donner de la formation aux fonctionnaires pour qu'ils comprennent la valeur de ce que vous faites et qu'ils évitent de dévier du processus, parce qu'ils profitent de la moindre occasion pour le faire. On n'atteint donc pas l'objectif d'économiser ou de recruter le meilleur candidat d'un bout à l'autre du pays. Je vous souhaite bonne chance.
Le président : Avant de vous permettre de répondre, monsieur le ministre, je veux signaler qu'il nous reste six minutes et trois questions à poser.
Le sénateur Ringuette : Je n'ai pas besoin de réponse.
M. Brison : Je vous remercie de l'observation. Encore une fois, notre capacité de coordonner et de faire un suivi et d'obtenir de bons renseignements n'existe pas actuellement faute de recourir à la technologie et nous devons le faire. Dans une certaine mesure, nous devons imposer la conformité obligatoire dans ce domaine, sinon ça ne fonctionnera pas.
Le sénateur Downe : Je suis reconnaissant au ministère des Travaux publics pour le bon travail qu'il accomplit dans le domaine des acquisitions. Je pense que vous êtes sur la bonne voie dans bien des domaines. Cependant, je voudrais revenir à la question initiale posée par le sénateur Day au sujet de la situation particulière au MDN. Tout le monde au gouvernement achète des crayons et des ordinateurs, mais personne d'autre n'achète du matériel militaire. Vous n'auriez pas l'expertise que vous pourriez acquérir dans l'ensemble du gouvernement pour procéder à des achats standardisés pour le MDN. Le ministère de la Défense a un appétit insatiable d'équipement. Il me semble que ces dernières années, peu importe ce que nous achetons — j'ai lu dans le journal dans le journal la semaine dernière que nous avons maintenant des camions dont le plancher est fissuré — on dirait qu'il y a toujours des problèmes. On constate une érosion de la crédibilité publique de ce ministère parce que, dans le passé, les gens qui s'occupaient des acquisitions se retrouvaient après quelques années à travailler comme lobbyistes ou pour des compagnies qui essayaient de vendre au gouvernement. C'est un défi particulier pour Travaux publics. Je ne suis pas certain que vous ayez l'expertise voulue à l'interne et je me demande si vous avez envisagé de consulter nos alliés de l'OTAN ou les pays du Commonwealth. Il me semble qu'il doit y avoir des exigences communes pour certaines pièces d'équipement. En travaillant ensemble, vous auriez peut-être cette expertise, mais on dirait qu'individuellement, nous achetons constamment des trucs qui ne conviennent tout simplement pas et les gens s'interrogent sur leur valeur et le prix que nous avons payé.
M. Brison : C'est une excellente suggestion. Vous dites que les militaires ont un appétit insatiable. Ils vous répondraient qu'il leur faut des budgets mieux garnis. Il y a un aspect politique dans ce dossier, et pas seulement opérationnel, et je pense que le premier ministre en a parlé. Nous voulons investir plus dans nos forces armées, mais les exigences en matière d'acquisitions, à cause de la nature de ce qu'ils achètent, sont différentes de tout ce que nous faisons par ailleurs. C'est pourquoi nous nous occupons de ce dossier. Peut-être M. Lastewka a-t-il quelque chose à ajouter.
M. Lastewka : C'est pourquoi il est tellement important pour nous de collaborer avec les États-Unis, l'Australie et le Royaume-Uni de manière continue, pour cette seule raison.
Le président : Je voudrais poser une question, après quoi j'accorderai la dernière question au sénateur Day. Ma question porte sur la politique à long terme et la planification dans votre ministère.
D'après le rapport sur les plans et priorités 2004-2005 de votre ministère, les dépenses de la direction générale des services immobiliers pour la période allant de 2004 à 2007 vont demeurer stables et constantes. Pourtant, d'après le Ottawa Citizen du 1er octobre, l'âge moyen des immeubles fédéraux est de 43 ans et il faudra y investir un milliard de dollars en réparations et rénovations au cours des prochaines années.
Ma question porte sur le principe de votre planification. Est-il réaliste de prévoir des dépenses stables, comme vous l'avez fait, compte tenu de l'âge des immeubles gouvernementaux et du besoin d'une infrastructure plus moderne? Il m'apparaît qu'il y a là une contradiction et que ce n'est pas une bonne décision d'affaires.
M. Brison : La dégradation de l'infrastructure, autrement dit l'entretien différé, est un problème considérable, à hauteur d'environ un milliard de dollars.
Le président : Dans ce cas, pourquoi prévoir des dépenses stables?
M. Brison : Il faut voir quel est le meilleur moyen de s'attaquer à ce problème. C'est pourquoi nous devons faire cette évaluation de notre stratégie pour déterminer quel est le meilleur moyen non seulement de s'attaquer aux problèmes du délabrement et de l'entretien différé, mais aussi de réaliser des gains d'efficience de manière permanente, dans le cadre d'un processus d'examen des dépenses, s'il y a moyen de réaliser de plus grands gains d'efficience, au lieu de s'adresser au Cabinet et de dire « il nous faut tant de milliards de dollars pour régler ce problème », nommément le problème du délabrement, et pour trouver des solutions de rechange afin de régler le problème sans avoir besoin de recourir à des dépenses en capital.
Le président : Par exemple de vendre l'immeuble?
M. Brison : Pas nécessairement. Je répète que ce n'est qu'une option. La question globale de l'efficience n'exige pas la vente des immeubles. Je répète qu'il y a des mécanismes comme un fonds d'investissement immobilier ou peut-être la création — je n'en ai pas parlé tout à l'heure — d'une société d'État indépendante qui aurait une plus grande souplesse, notamment pour la structure salariale et de gestion.
Le président : Même dans le cas d'immeubles de 43 ans?
M. Brison : Je n'ai même pas 43 ans, sénateur. Ce n'est pas si vieux.
Le sénateur Day : Vous avez offert, monsieur le ministre et monsieur le secrétaire parlementaire, de revenir nous voir. Ce serait très apprécié. Vous aussi, monsieur le sous-ministre.
Ma question, qui va nous entraîner en période supplémentaire, vise à confirmer ce que nous avons appris du comité sur l'examen des dépenses, au sujet de la réaffectation des fonds. Nous avons compris que chaque ministère a un objectif d'environ 5 p. 100 de son budget de fonctionnement et doit examiner ses dépenses les moins prioritaires et décréter : « On ne fera pas ceci ou cela. » Vous avez la responsabilité de faire cela dans le cadre de votre ministère. Pour l'ensemble des ministères, 5 p. 100 pour chacun nous donnera 50 p. 100 des 12 milliards de dollars sur cinq ans que le gouvernement cherche à obtenir en termes de réaffectation.
L'autre 50 p. 100 doit venir des activités centrales du gouvernement. D'après ce que nous avons entendu ici aujourd'hui, ces activités centrales sont les services, les acquisitions et la gestion immobilière, ce qui me donne l'impression qu'on se tournera vers vous pour obtenir une très grosse part de ces 12 milliards de dollars au cours des cinq prochaines années. Ai-je bien compris?
M. Brison : C'est bien cela; il est important de comprendre que sur le budget de 2,7 milliards de dollars, il y a 2,1 milliards de dollars qui ne font que transiter chez nous en provenance d'autres ministères. Une somme d'environ 600 millions de dollars est plus discrétionnaire, mais même cette somme est fixe. Notre engagement à l'égard de l'examen des dépenses respecte le chiffre de 5 p. 100 que l'on a demandé, mais à part cela, vous avez raison. Nous allons réaliser des gains d'efficience dans l'ensemble des ministères et du gouvernement qui iront bien au-delà de ce que nous aurons réalisé à l'interne, à cause de notre rôle central au gouvernement et de la nature de nos activités.
M. Marshall : Vous avez tout à fait raison, sénateur. La gestion des acquisitions dans l'ensemble du gouvernement et la gestion des biens immobiliers, ce sont des dossiers de grande envergure et nous en avons discuté au Comité d'examen des dépenses. Si je peux revenir à la question posée tout à l'heure par le sénateur Oliver, le ministre et moi-même avons exposé devant les membres du Comité d'examen des dépenses le fait que, à moins que nous puissions libérer des capitaux d'autres manières, le gouvernement devra injecter beaucoup plus d'argent pour remettre nos immeubles en état. C'est une décision que l'on prendra quand l'analyse aura été un peu plus fouillée, et nous ferons alors nos choix. Mais il est indéniable que ce problème doit être réglé.
Le président : Ne faudra-t-il pas des milliards de dollars, et non pas seulement quelques centaines de millions, pour des immeubles de cet âge?
M. Marshall : Vous avez raison.
Le sénateur Day : Je voudrais revenir à ma question. Pouvons-nous supposer que l'étude et l'examen des acquisitions dont nous avons parlé ce soit font partie de l'examen d'ensemble en vue des réaffectations?
Le président : Nous espérons recevoir copie du rapport de M. Lastewka, quand il sera déposé dans un mois, pour qu'il soit déposé à notre comité afin que nous puissions l'étudier et l'analyser.
M. Brison : Le rapport provisoire à propos duquel M. Lastewka fait actuellement des consultations peut être consulté sur le site Web.
Le président : Au nom du Comité sénatorial permanent des finances nationales, je tiens à vous remercier, vous-même et tous vos collaborateurs et fonctionnaires, pour l'excellente présentation que vous avez faite ce soir. Nous avions d'autres questions, mais nous avons manqué de temps. Nous trouvons toutefois que votre témoignage de ce soir nous a été utile pour comprendre les nouveaux principes de comptabilité, de transparence et les nouvelles approches qui ont été adoptées pour faire en sorte que l'argent des contribuables canadiens soit dépensé judicieusement. Merci d'être venus.
La séance est levée.